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Le livre, de l'imprimé au numérique

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Une semaine après la mise en ligne du premier chapitre, on compte 152.132 téléchargements, avec paiement par 76% des lecteurs. Certains paient davantage que le dollar demandé, allant parfois jusqu'à 10 ou 20 dollars pour compenser le manque à gagner de ceux qui ne paieraient pas, et éviter ainsi que la série ne s'arrête.

La barre des 75% est dépassée de peu, au grand soulagement des fans, si bien que le deuxième chapitre suit un mois après.

En août 2000, dans une nouvelle lettre aux lecteurs, Stephen King annonce un nombre de téléchargements légèrement inférieur à celui du premier chapitre. Il en attribue la cause à une publicité moindre et à des problèmes de téléchargement. Si le nombre de téléchargements n'a que légèrement décru, le nombre de paiements est en nette diminution, les internautes ne réglant leur dû qu'une seule fois pour plusieurs téléchargements.

L'auteur s'engage toutefois à publier le troisième chapitre comme prévu, fin septembre, et à prendre une décision ensuite sur la poursuite ou non de l'expérience, en fonction du nombre de paiements. Ses prévisions sont de onze ou douze chapitres en tout, avec un nombre total de 1,7 million de téléchargements. Le ou les derniers chapitres seraient gratuits.

Plus volumineux (environ 10.000 signes au lieu de 5.000), les chapitres 4 et 5 passent à 2 dollars. Mais le nombre de téléchargements et de paiements ne cesse de décliner, avec 40.000 téléchargements seulement pour le cinquième chapitre - alors que le premier chapitre avait été téléchargé 120.000 fois -, et paiement pour 46% des téléchargements seulement.

Fin novembre, Stephen King annonce l'interruption de la publication pendant une période indéterminée, après la parution du sixième chapitre, téléchargeable gratuitement à la mi-décembre. «The Plant va retourner en hibernation afin que je puisse continuer à travailler», précise-t-il sur son site. «Mes agents insistent sur la nécessité d'observer une pause afin que la traduction et la publication à l'étranger puissent rattraper la publication en anglais.» Mais cette décision semble d'abord liée à l'échec commercial de l'expérience.

Cet arrêt suscite de vives critiques. On oublie de reconnaître à l'auteur au moins un mérite, celui d'avoir été le premier à se lancer dans l'aventure, avec les risques qu'elle comporte. Entre juillet et décembre 2000, pendant les six mois qu'elle aura duré, nombreux sont ceux qui suivent les tribulations de The Plant, à commencer par les éditeurs, quelque peu inquiets face à un médium qui pourrait un jour concurrencer le circuit traditionnel.

Quand Stephen King décide d'arrêter l'expérience, plusieurs journalistes et critiques littéraires affirment qu'il se ridiculise aux yeux du monde entier. N'est-ce pas quelque peu exagéré? L'auteur avait d'emblée annoncé la couleur puisqu'il avait lié la poursuite de la publication à un pourcentage de paiements satisfaisant.

Qu'est-il advenu ensuite des expériences numériques de Stephen King? L'auteur reste très présent dans ce domaine, mais cette fois par le biais de son éditeur, preuve que les éditeurs restent toujours utiles.

En mars 2001, son roman Dreamcatcher est le premier roman à être lancé simultanément en version imprimée par Simon & Schuster et en version numérique par Palm Digital Media, pour lecture sur les assistants personnels Palm Pilot et Pocket PC.

En mars 2002, son recueil de nouvelles Everything's Eventual est lui
aussi publié simultanément en deux versions: en version imprimée par
Scribner, subdivision de Simon & Schuster, et en version numérique par
Palm Digital Media, qui en propose un extrait en téléchargement libre.

= D'autres auteurs suivent

En novembre 2000, deux romanciers européens, l'anglais Frederick Forsyth et l'espagnol Arturo Pérez-Reverte, décident eux aussi de tenter l'aventure numérique. Mais, forts de l'expérience d'auto- publication de Stephen King peut-être, ni l'un ni l'autre n'ont l'intention de se passer d'éditeur.

Frederick Forsyth, le maître britannique du thriller, aborde la publication numérique avec l'appui d'Online Originals, un éditeur électronique londonien. En novembre 2000, Online Originals publie The Veteran, histoire d'un crime violent commis à Londres et premier volet de Quintet, une série de cinq nouvelles électroniques (annoncées dans l'ordre suivant: The Veteran, The Miracle, The Citizen, The Art of the Matter, Draco).

Disponible en trois formats (PDF, Microsoft Reader et Glassbook
Reader), la nouvelle est vendue au prix de 3,99 pounds (6,60 euros) sur
le site de l'éditeur et dans plusieurs librairies en ligne au Royaume-
Uni (Alphabetstreet, BOL.com, WHSmith) et aux États-Unis (Barnes &
Noble, Contentville, Glassbook).

«La publication en ligne sera essentielle à l'avenir, déclare Frederick Forsyth sur le site d'Online Originals. Elle crée un lien simple et surtout rapide et direct entre le producteur original (l'auteur) et le consommateur final (le lecteur), avec très peu d'intermédiaires. Il est passionnant de participer à cette expérience. Je ne suis absolument pas un spécialiste des nouvelles technologies. Je n'ai jamais vu de livre électronique. Mais je n'ai jamais vu non plus de moteur de Formule 1, ce qui ne m'empêche pas de constater combien ces voitures de course sont rapides.»

La première expérience numérique d'Arturo Pérez-Reverte est un peu différente. La série best-seller du romancier espagnol relate les aventures du Capitan Alatriste au 17e siècle. Le nouveau titre à paraître fin 2000 s'intitule El Oro del Rey (L'or du roi).

En novembre 2000, en collaboration avec son éditeur Alfaguara, l'auteur décide de diffuser El Oro del Rey en version numérique sur un site spécifique du portail Inicia, en exclusivité pendant un mois, avant sa sortie en librairie. Le roman est disponible au format PDF pour 2,90 euros, un prix très inférieur aux 15,10 euros annoncés pour le livre imprimé.

Résultat de l'expérience, le nombre de téléchargements est très satisfaisant, mais pas celui des paiements. Un mois après la mise en ligne du roman, on compte 332.000 téléchargements, avec paiement par 12.000 lecteurs seulement.

À la même date, Marilo Ruiz de Elvira, directrice de contenus du portail Inicia, explique dans un communiqué: «Pour tout acheteur du livre numérique, il y avait une clé pour le télécharger en 48 heures sur le site internet et, surtout au début, beaucoup d'internautes se sont échangés ce code d'accès dans les forums de chats [dialogues en direct] et ont téléchargé leur exemplaire sans payer. On a voulu tester et cela faisait partie du jeu. Arturo Pérez-Reverte voulait surtout qu'on le lise.»

En 2006, les cinq premiers tomes de cette saga littéraire devenue un succès planétaire sont vendus à 4 millions d'exemplaires. Ils donnent également naissance au film Alatriste, une superproduction espagnole de 20 millions d'euros.

Trois ans après ces premières tentatives, si les expériences purement numériques sont provisoirement abandonnées, les livres numériques ont une place significative à côté de leurs correspondants imprimés.

En 2003, des centaines de best-sellers sont vendus en version numérique sur Amazon.com, Barnes & Noble.com, Yahoo! eBook Store ou sur des sites d'éditeurs (Random House, PerfectBound, etc.), pour lecture sur ordinateur ou sur assistant personnel. Mobipocket distribue 6.000 titres numériques dans plusieurs langues, soit sur son site soit dans des librairies partenaires. Le catalogue de Palm Digital Media approche les 10.000 titres, lisibles sur les gammes de PDA Palm et Pocket PC, avec 15 à 20 nouveaux titres par jour et 1.000 nouveaux clients par semaine.

Une expérience un peu différente est celle du romancier brésilien Paulo Coelho, devenu mondialement célèbre après la parution de L'Alchimiste. Début 2003, ses livres, traduits en 56 langues, ont été vendus en 53 millions d'exemplaires dans 155 pays, dont 6,5 millions d'exemplaires dans les pays francophones.

En mars 2003, Paulo Coelho décide de distribuer plusieurs romans gratuitement en version PDF, dans diverses langues, avec l'accord de ses éditeurs respectifs, dont Anne Carrière, son éditrice en France. Trois romans sont disponibles en français: Manuel du guerrier de la lumière, La cinquième montagne et Veronika décide de mourir.

Pourquoi une telle décision? «Comme le français est présent, à plus ou moins grande échelle, dans le monde entier, je recevais sans cesse des courriers électroniques d'universités et de personnes habitant loin de la France, qui ne trouvaient pas mes oeuvres», déclare le romancier par le biais de son éditrice. À la question classique relative au préjudice éventuel sur les ventes futures, il répond: «Seule une minorité de gens a accès à l'internet, et le livre au format ebook ne remplacera jamais le livre papier.» Une remarque très juste en 2003, mais qui n'est peut- être plus de mise en 2010.

= Numilog, librairie numérique

Numilog ouvre ses portes «virtuelles» en octobre 2000 pour devenir en quelques années la plus grande librairie numérique francophone du réseau.

En février 2001, Denis Zwirn, président de Numilog, relate: «Dès 1995, j'avais imaginé et dessiné des modèles de lecteurs électroniques permettant d'emporter sa bibliothèque avec soi et pesant comme un livre de poche. Début 1999, j'ai repris ce projet avec un ami spécialiste de la création de sites internet, en réalisant la formidable synergie possible entre des appareils de lecture électronique mobiles et le développement d'internet, qui permet d'acheminer les livres dématérialisés en quelques minutes dans tous les coins du monde.»

Denis explique aussi: «Nous avons créé une base de livres accessible par un moteur de recherche. Chaque livre fait l'objet d'une fiche avec un résumé et un extrait. En quelques clics, il peut être acheté en ligne par carte bancaire, puis reçu par email ou téléchargement.» Les livres sont à l'origine répartis en trois grandes catégories - savoir, guides pratiques et littérature. Le site de Numilog offre ensuite «des fonctionnalités nouvelles, comme l'intégration d'une "authentique vente au chapitre" (les chapitres vendus isolément sont traités comme des éléments inclus dans la fiche-livre, et non comme d'autres livres) et la gestion très ergonomique des formats de lecture multiples».

Fondée en avril 2000, six mois avant l'ouverture de la librairie numérique, la société Numilog a en fait une triple activité: librairie en ligne, studio de fabrication et diffuseur.

«Numilog est d'abord une librairie en ligne de livres numériques», relate Denis en 2001. «Notre site internet est dédié à la vente en ligne de ces livres, qui sont envoyés par courrier électronique ou téléchargés après paiement par carte bancaire. Il permet aussi de vendre des livres par chapitres. Numilog est également un studio de fabrication de livres numériques: aujourd'hui, les livres numériques n'existent pas chez les éditeurs, il faut donc d'abord les fabriquer avant de pouvoir les vendre, dans le cadre de contrats négociés avec les éditeurs détenteurs des droits. Ce qui signifie les convertir à des formats convenant aux différents "readers" du marché. (…)

Enfin Numilog devient aussi progressivement un diffuseur. Car, sur internet, il est important d'être présent en de très nombreux points du réseau pour faire connaître son offre. Pour les livres en particulier, il faut les proposer aux différents sites thématiques ou de communautés, dont les centres d'intérêt correspondent à leur sujet (sites de fans d'histoire, de management, de science-fiction…). Numilog facilitera ainsi la mise en oeuvre de multiples "boutiques de livres numériques" thématiques.»

Les livres sont disponibles en plusieurs formats: format PDF pour lecture sur l'Acrobat Reader (devenu l'Adobe Reader en mai 2003), format LIT pour lecture sur le Microsoft Reader et format PRC pour lecture sur le Mobipocket Reader.

En septembre 2003, le catalogue comprend 3.500 titres (livres et périodiques) en français et en anglais, grâce à un partenariat avec une quarantaine d'éditeurs, le but à long terme étant de «permettre à un public d'internautes de plus en plus large d'avoir progressivement accès à des bases de livres numériques aussi importantes que celles des livres papier, mais avec plus de modularité, de richesse d'utilisation et à moindre prix».

Au fil des ans, Numilog devient la principale librairie francophone de livres numériques, suite à des accords avec de nombreux éditeurs: Gallimard, Albin Michel, Eyrolles, Hermès Science, Pearson Education France, etc. Numilog propose aussi des livres audio-numériques lisibles sur synthèse vocale. Une librairie anglophone est lancée suite à des accords de diffusion conclus avec plusieurs éditeurs anglo-saxons: Springer-Kluwer, Oxford University Press, Taylor & Francis, Kogan Page, etc. Les différents formats proposés permettent la lecture des livres sur tout appareil électronique: ordinateur, assistant personnel, téléphone portable, smartphone, tablette de lecture.

La société est également prestataire de services pour les technologies DRM. En 2004, Numilog met sur pied un système de bibliothèque en ligne pour le prêt de livres numériques. Ce système est surtout destiné aux bibliothèques, aux administrations et aux entreprises. En décembre 2006, le catalogue de Numilog comprend 35.000 livres grâce à un partenariat avec 60 éditeurs francophones et anglophones.

Selon Denis Zwirn, interviewé à nouveau en août 2007, «2008 pourrait sans doute marquer un premier point d'inflexion dans la courbe de croissance du marché des livres numériques. Plusieurs facteurs sont réunis pour cela:

(1) le développement de vastes catalogues en ligne utilisant pleinement les fonctionnalités de la recherche plein texte dans les livres numérisés, comme ceux de la future Bibliothèque numérique européenne, de VollTextSuche Online, de Google et d'Amazon. Une fois le contenu trouvé dans un des ouvrages ainsi "sondé" par ce type de recherche révolutionnaire pour le grand public, il est naturel de vouloir accéder à la totalité de l'ouvrage… dans sa version numérique.

(2) Des progrès techniques cruciaux tels que la proposition commerciale d'appareils de lecture à base d'encre électronique améliorant radicalement l'expérience de lecture finale pour l'usager en la rapprochant de celle du papier. Par exemple l'iLiad d'Irex ou le Sony Reader, mais bien d'autres appareils s'annoncent. Le progrès concerne toutefois tout autant le développement des nouveaux smartphones multifonctions comme les BlackBerry ou l'iPhone, ou la proposition de logiciels de lecture à l'interface fortement améliorée et pensée pour les ebooks sur PC, comme Adobe Digital Edition.

(3) Enfin, le changement important d'attitude de la part des professionnels du secteur, éditeurs, et probablement bientôt aussi libraires. Les éditeurs anglo-saxons universitaires ont massivement tracé une route que tous les autres sont en train de suivre, en tout cas aux États-Unis, en Europe du Nord et en France: proposer une version numérique de tous les ouvrages. Même pour les plus réticents encore il y a quelques années, ce n'est plus une question de "pourquoi?", c'est simplement devenu une question de "comment?". Les libraires ne vont pas tarder à considérer que vendre un livre numérique fait partie de leur métier normal.»

Selon Denis, «le livre numérique n'est plus une question de colloque, de définition conceptuelle ou de divination par certains "experts": c'est un produit commercial et un outil au service de la lecture. Il n'est pas besoin d'attendre je ne sais quel nouveau mode de lecture hypermoderne et hypertextuel enrichi de multimédia orchestrant savamment sa spécificité par rapport au papier, il suffit de proposer des textes lisibles facilement sur les supports de lecture électronique variés qu'utilisent les gens, l'encre électronique pouvant progressivement envahir tous ces supports. Et de les proposer de manière industrielle. Ce n'est pas et ne sera jamais un produit de niche (les dictionnaires, les guides de voyage, les livres pour les non voyants…): c'est en train de devenir un produit de masse, riche de formes multiples comme l'est le livre traditionnel.»

En janvier 2009, Numilog, devenu filiale du groupe Hachette Livre (en mai 2008), est désormais un distributeur-diffuseur numérique représentant 100 éditeurs francophones et anglophones, avec un catalogue de 50.000 livres numériques distribués auprès des particuliers et des bibliothèques. Numilog propose également aux librairies un service de vente de livres numériques sur leur propre site.

LA CYBER-LITTÉRATURE

[Résumé] Nombre d'auteurs s'accordent à reconnaître les bienfaits de l'internet, que ce soit pour la recherche d'information, la diffusion de leurs oeuvres, les échanges avec les lecteurs ou la collaboration avec d'autres créateurs. Des auteurs férus de nouvelles technologies font aussi un véritable travail de défricheur en explorant les possibilités offertes par l'hyperlien. Les technologies numériques donnent naissance à plusieurs genres: roman multimédia, roman hypertexte, roman hypermédia, site d'écriture hypermédia, mail-roman, etc. La cyber- littérature bouscule désormais la littérature traditionnelle en lui apportant un souffle nouveau, tout en s'intégrant à d'autres formes artistiques puisque le support numérique favorise la fusion de l'écrit avec l'image et le son.

= Poésie

Poète et plasticienne, Silvaine Arabo vit en France, dans la région Poitou-Charentes. En mai 1997, elle crée l'un des premiers sites francophones consacrés à la poésie, Poésie d'hier et d'aujourd'hui, sur lequel elle propose de nombreux poèmes, y compris les siens.

En juin 1998, elle raconte: «Je suis poète, peintre et professeur de lettres (13 recueils de poèmes publiés, ainsi que deux recueils d'aphorismes et un essai sur le thème "poésie et transcendance"; quant à la peinture, j'ai exposé mes toiles à Paris - deux fois - et en province). (…) Pour ce qui est d'internet, je suis autodidacte (je n'ai reçu aucune formation informatique quelle qu'elle soit). J'ai eu l'idée de construire un site littéraire centré sur la poésie: internet me semble un moyen privilégié pour faire circuler des idées, pour communiquer ses passions aussi. Je me suis donc mise au travail, très empiriquement, et ai finalement abouti à ce site sur lequel j'essaye de mettre en valeur des poètes contemporains de talent, sans oublier la nécessaire prise de recul (rubrique "Réflexions sur la poésie") sur l'objet considéré. (…)

Par ailleurs, internet m'a mis en contact avec d'autres poètes, dont certains fort intéressants. Cela rompt le cercle de la solitude et permet d'échanger des idées. On se lance des défis aussi. Internet peut donc pousser à la créativité et relancer les motivations des poètes puisqu'ils savent qu'ils seront lus et pourront même, dans le meilleur des cas, correspondre avec leurs lecteurs et avoir les points de vue de ceux-ci sur leurs textes. Je ne vois personnellement que des aspects positifs à la promotion de la poésie par internet, tant pour le lecteur que pour le créateur.»

Très vite, Poésie d'hier et d'aujourd'hui prend la forme d'une cyber- revue. Quatre ans plus tard, en mars 2001, Silvaine Arabo crée une deuxième revue, Saraswati: revue de poésie, d'art et de réflexion, cette fois sous forme imprimée. Les deux revues «se complètent et sont vraiment à placer en regard l'une de l'autre».

= Fables

Fondé en 1992 par Nicolas et Suzanne Pewny, alors libraires en Haute- Savoie, Le Choucas est une petite maison d'édition spécialisée dans les romans policiers, la littérature, la photographie et les livres d'art.

Bien qu'étant d'abord un éditeur à vocation commerciale, Nicolas Pewny tient aussi à avoir des activités non commerciales pour faire connaître des auteurs peu diffusés, par exemple Raymond Godefroy, écrivain-paysan normand, qui désespérait de trouver un éditeur pour son recueil de fables, Fables pour l'an 2000. Quelques jours avant l'an 2000, Nicolas Pewny publie le recueil en ligne sur le site du Choucas, dans une belle version numérique.

«Internet représente pour moi un formidable outil de communication qui nous affranchit des intermédiaires, des barrages doctrinaires et des intérêts des médias en place», écrit Raymond Godefroy en décembre 1999. «Soumis aux mêmes lois cosmiques, les hommes, pouvant mieux se connaître, acquerront peu à peu cette conscience du collectif, d'appartenir à un même monde fragile pour y vivre en harmonie sans le détruire. Internet est absolument comme la langue d'Ésope, la meilleure et la pire des choses, selon l'usage qu'on en fait, et j'espère qu'il me permettra de m'affranchir en partie de l'édition et de la distribution traditionnelle qui, refermée sur elle-même, souffre d'une crise d'intolérance pour entrer à reculons dans le prochain millénaire.»

Très certainement autobiographique, la fable Le poète et l'éditeur (à savoir la sixième fable de la troisième partie du recueil) relate on ne peut mieux les affres du poète à la recherche d'un éditeur. Raymond Godefroy restant très attaché au papier, il auto-publie la version imprimée de ses fables en juin 2001, avec un titre légèrement différent, Fables pour les années 2000, puisque le cap du 21e siècle est désormais franchi.

= Romans policiers

Michel Benoît habite Montréal, au Québec. Auteur de nouvelles policières, de récits noirs et d'histoires fantastiques, il utilise l'internet pour élargir ses horizons et pour «abolir le temps et la distance».

Il relate en juin 2000: «L'internet s'est imposé à moi comme outil de recherche et de communication, essentiellement. Non, pas essentiellement. Ouverture sur le monde aussi. Si l'on pense "recherche", on pense "information". Voyez-vous, si l'on pense "écriture", "réflexion", on pense "connaissance", "recherche". Donc on va sur la toile pour tout, pour une idée, une image, une explication. Un discours prononcé il y a vingt ans, une peinture exposée dans un musée à l'autre bout du monde. On peut donner une idée à quelqu'un qu'on n'a jamais vu, et en recevoir de même. La toile, c'est le monde au clic de la souris. On pourrait penser que c'est un beau cliché. Peut-être bien, à moins de prendre conscience de toutes les implications de la chose. L'instantanéité, l'information tout de suite, maintenant. Plus besoin de fouiller, de se taper des heures de recherche. On est en train de faire, de produire. On a besoin d'une information. On va la chercher, immédiatement. De plus, on a accès aux plus grandes bibliothèques, aux plus importants journaux, aux musées les plus prestigieux. (…)

Mon avenir professionnel en inter-relation avec le net, je le vois exploser. Plus rapide, plus complet, plus productif. Je me vois faire en une semaine ce qui m'aurait pris des mois. Plus beau, plus esthétique. Je me vois réussir des travaux plus raffinés, d'une facture plus professionnelle, même et surtout dans des domaines connexes à mon travail, comme la typographie, où je n'ai aucune compétence. La présentation, le transport de textes, par exemple. Le travail simultané de plusieurs personnes qui seront sur des continents différents. Arriver à un consensus en quelques heures sur un projet, alors qu'avant le net, il aurait fallu plusieurs semaines, parlons de mois entre les Francophones. Plus le net ira se complexifiant, plus l'utilisation du net deviendra profitable, nécessaire, essentielle.»

Autre expérience, celle d'Alain Bron, consultant en systèmes d'information et écrivain. L'internet est un des «personnages» de son deuxième roman, Sanguine sur toile, disponible en version imprimée aux éditions du Choucas en 1999, puis en version numérique (format PDF) aux éditions 00h00 en 2000.

Quel est le thème de ce roman? «La "toile", c'est celle du peintre, c'est aussi l'autre nom d'internet: le web - la toile d'araignée -», raconte l'auteur en novembre 1999. «"Sanguine" évoque le dessin et la mort brutale. Mais l'amour des couleurs justifierait-il le meurtre? Sanguine sur toile évoque l'histoire singulière d'un internaute pris dans la tourmente de son propre ordinateur, manipulé à distance par un très mystérieux correspondant qui n'a que vengeance en tête. J'ai voulu emporter le lecteur dans les univers de la peinture et de l'entreprise, univers qui s'entrelacent, s'échappent, puis se rejoignent dans la fulgurance des logiciels.

Le lecteur est ainsi invité à prendre l'enquête à son propre compte pour tenter de démêler les fils tressés par la seule passion. Pour percer le mystère, il devra répondre à de multiples questions. Le monde au bout des doigts, l'internaute n'est-il pas pour autant l'être le plus seul au monde? Compétitivité oblige, jusqu'où l'entreprise d'aujourd'hui peut-elle aller dans la violence? La peinture tend-elle à reproduire le monde ou bien à en créer un autre? Enfin, j'ai voulu montrer que les images ne sont pas si sages. On peut s'en servir pour agir, voire pour tuer. (…)

Dans le roman, internet est un personnage en soi. Plutôt que de le décrire dans sa complexité technique, le réseau est montré comme un être tantôt menaçant, tantôt prévenant, maniant parfois l'humour. N'oublions pas que l'écran d'ordinateur joue son double rôle: il montre et il cache. C'est cette ambivalence qui fait l'intrigue du début à la fin. Dans ce jeu, le grand gagnant est bien sûr celui ou celle qui sait s'affranchir de l'emprise de l'outil pour mettre l'humanisme et l'intelligence au-dessus de tout.»

= Autres oeuvres de fiction

Murray Suid vit à Palo Alto, dans la Silicon Valley, en Californie. Il est l'auteur de livres pédagogiques, de livres pour enfants, d'oeuvres multimédia et de scénarios.

Dès septembre 1998, il préconise une solution choisie depuis par de nombreux auteurs. «Un livre peut avoir un prolongement sur le web - et donc vivre en partie dans le cyberespace, explique-t-il. L'auteur peut ainsi aisément l'actualiser et le corriger, alors qu'auparavant il devait attendre longtemps, jusqu'à l'édition suivante, quand il y en avait une. (…) Je ne sais pas si je publierai des livres sur le web, au lieu de les publier en version imprimée. J'utiliserai peut-être ce nouveau support si les livres deviennent multimédias. Pour le moment, je participe au développement de matériel pédagogique multimédia. C'est un nouveau type de matériel qui me plaît beaucoup et qui permet l'interactivité entre des textes, des films, des bandes sonores et des graphiques qui sont tous reliés les uns aux autres.»

Un an plus tard, en août 1999, il ajoute: «En plus des livres complétés par un site web, je suis en train d'adopter la même formule pour mes oeuvres multimédias - qui sont sur CD-ROM - afin de les actualiser et d'enrichir leur contenu.»

Quelques mois plus tard, l'intégralité de ses oeuvres multimédias est sur le réseau. Le matériel pédagogique auquel il contribue est conçu non plus pour diffusion sur CD-ROM, mais pour diffusion sur le web. D'entreprise multimédia, la société de logiciels éducatifs qui emploie Murray s'est reconvertie en entreprise internet.

Autre expérience, celle d'Anne-Bénédicte Joly, romancière et essayiste, qui habite en région parisienne. En avril 2000, elle décide d'auto- publier ses oeuvres en utilisant l'internet pour les faire connaître. «Mon site a plusieurs objectifs», relate-t-elle en juin 2000. «Présenter mes livres (essais, nouvelles et romans auto-édités) à travers des fiches signalétiques (dont le format est identique à celui que l'on trouve dans la base de données Électre) et des extraits choisis, présenter mon parcours (de professeur de lettres et d'écrivain), permettre de commander mes ouvrages, offrir la possibilité de laisser des impressions sur un livre d'or, guider le lecteur à travers des liens vers des sites littéraires. (…) Créer un site internet me permet d'élargir le cercle de mes lecteurs en incitant les internautes à découvrir mes écrits. Internet est également un moyen pour élargir la diffusion de mes ouvrages. Enfin, par une politique de liens, j'espère susciter des contacts de plus en plus nombreux.»

= Romans numériques

Lucie de Boutiny est l'auteur de NON, roman multimédia débuté en août 1997 et publié en feuilleton par Synesthésie, une revue en ligne d'art contemporain.

«NON est un roman comique qui fait la satire de la vie quotidienne d'un couple de jeunes cadres supposés dynamiques», raconte-t-elle en juin 2000. «Bien qu'appartenant à l'élite high-tech d'une industrie florissante, Monsieur et Madame sont les jouets de la dite révolution numérique. (…) NON prolonge les expériences du roman post-moderne (récits tout en digression, polysémie avec jeux sur les registres - naturaliste, mélo, comique… - et les niveaux de langues, etc.). Cette hyper-stylisation permet à la narration des développements inattendus et offre au lecteur l'attrait d'une navigation dans des récits multiples et multimédias, car l'écrit à l'écran s'apparente à un jeu et non seulement se lit mais aussi se regarde.»

Les romans précédents de Lucie de Boutiny sont publiés sous forme imprimée. Un roman numérique requiert-il une démarche différente? «D'une manière générale, mon humble expérience d'apprentie auteur m'a révélé qu'il n'y a pas de différence entre écrire de la fiction pour le papier ou le pixel: cela demande une concentration maximale, un isolement à la limite désespéré, une patience obsessionnelle dans le travail millimétrique avec la phrase, et bien entendu, en plus de la volonté de faire, il faut avoir quelque chose à dire! Mais avec le multimédia, le texte est ensuite mis en scène comme s'il n'était qu'un scénario. Et si, à la base, il n'y a pas un vrai travail sur le langage des mots, tout le graphisme et les astuces interactives qu'on peut y mettre fera gadget. Par ailleurs, le support modifie l'appréhension du texte, et même, il faut le souligner, change l'oeuvre originale.»

Autre roman numérique, Apparitions inquiétantes est né sous la plume d'Anne-Cécile Brandenbourger. Il s'agit d'«une longue histoire à lire dans tous les sens, un labyrinthe de crimes, de mauvaises pensées et de plaisirs ambigus».

Pendant deux ans, cette histoire se construit sous forme de feuilleton sur le site d'Anacoluthe, en collaboration avec Olivier Lefèvre. En février 2000, l'histoire est publiée en version numérique (au format PDF) aux éditions 00h00, en tant que premier titre de la Collection 2003, consacrée aux écritures numériques, avec version imprimée à la demande.

00h00 présente l'ouvrage comme «un cyber-polar fait de récits hypertextuels imbriqués en gigogne. Entre personnages de feuilleton américain et intrigue policière, le lecteur est - hypertextuellement - mené par le bout du nez dans cette saga aux allures borgésiennes. (…) C'est une histoire de meurtre et une enquête policière; des textes écrits court et montés serrés; une balade dans l'imaginaire des séries télé; une déstructuration (organisée) du récit dans une transposition littéraire du zapping; et par conséquent, des sensations de lecture radicalement neuves.»

Suite au succès du livre, les éditions Florent Massot publient en août 2000 une deuxième version imprimée (la première étant celle de 00h00, imprimée uniquement à la demande), avec une couverture en 3D, un nouveau titre - La malédiction du parasol - et une maquette d'Olivier Lefèvre restituant le rythme de la version originale.

Anne-Cécile Brandenbourger relate en juin 2000: «Les possibilités offertes par l'hypertexte m'ont permis de développer et de donner libre cours à des tendances que j'avais déjà auparavant. J'ai toujours adoré écrire et lire des textes éclatés et inclassables (comme par exemple La vie mode d'emploi de Perec ou Si par une nuit d'hiver un voyageur de Calvino) et l'hypermédia m'a donné l'occasion de me plonger dans ces formes narratives en toute liberté. Car, pour créer des histoires non linéaires et des réseaux de textes qui s'imbriquent les uns dans les autres, l'hypertexte est évidemment plus approprié que le papier. Je crois qu'au fil des jours, mon travail hypertextuel a rendu mon écriture de plus en plus intuitive. Plus "intérieure" aussi peut-être, plus proche des associations d'idées et des mouvements désordonnés qui caractérisent la pensée lorsqu'elle se laisse aller à la rêverie. Cela s'explique par la nature de la navigation hypertextuelle, le fait que presque chaque mot qu'on écrit peut être un lien, une porte qui s'ouvre sur une histoire.»

Lucie de Boutiny raconte à la même date: «Mes "conseillers littéraires", des amis qui n'ont pas ressenti le vent de liberté qui souffle sur le web, aimeraient que j'y reste, engluée dans la pâte à papier. Appliquant le principe de demi-désobéissance, je fais des allers-retours papier-pixel. L'avenir nous dira si j'ai perdu mon temps ou si un nouveau genre littéraire hypermédia va naître. (…) Si les écrivains français classiques en sont encore à se demander s'ils ne préfèrent pas le petit carnet Clairefontaine, le Bic ou le Mont-Blanc fétiche, et un usage modéré du traitement de texte, plutôt que l'ordinateur connecté, c'est que l'HTX [HyperText Literature] nécessite un travail d'accouchement visuel qui n'est pas la vocation originaire de l'écrivain papier. En plus des préoccupations du langage (syntaxe, registre, ton, style, histoire…), le techno-écrivain - collons-lui ce label pour le différencier - doit aussi maîtriser la syntaxe informatique et participer à l'invention de codes graphiques car lire sur un écran est aussi regarder.»

= Mail-romans

Le premier mail-roman francophone est lancé en 2001 par Jean-Pierre Balpe, chercheur, écrivain et directeur du département hypermédia de l'Université Paris 8. Pendant très exactement cent jours, entre le 11 avril et le 19 juillet 2001, il diffuse quotidiennement par courriel un chapitre de Rien n'est sans dire auprès de cinq cents personnes - sa famille, ses amis, ses collègues, etc. - en y intégrant les réponses et les réactions des lecteurs.

Racontée par un narrateur, l'histoire est celle de Stanislas et Zita, qui vivent une passion tragique déchirée par une sombre histoire politique. «Cette idée d'un mail-roman m'est venue tout naturellement», relate l'auteur en février 2002. «D'une part en me demandant depuis quelque temps déjà ce qu'internet peut apporter sur le plan de la forme à la littérature (…) et d'autre part en lisant de la littérature "épistolaire" du 18e siècle, ces fameux "romans par lettres". Il suffit alors de transposer: que peut être le "roman par lettres" aujourd'hui?»

Jean-Pierre Balpe tire plusieurs conclusions de cette expérience: «D'abord c'est un "genre": depuis, plusieurs personnes m'ont dit lancer aussi un mail-roman. Ensuite j'ai aperçu quantité de possibilités que je n'ai pas exploitées et que je me réserve pour un éventuel travail ultérieur. La contrainte du temps est ainsi très intéressante à exploiter: le temps de l'écriture bien sûr, mais aussi celui de la lecture: ce n'est pas rien de mettre quelqu'un devant la nécessité de lire, chaque jour, une page de roman. Ce "pacte" a quelque chose de diabolique. Et enfin le renforcement de ma conviction que les technologies numériques sont une chance extraordinaire du renouvellement du littéraire.»

= Sites hypermédias

Principe de base du web, le lien hypertexte permet de relier entre eux des documents textuels et des images. Quant au lien hypermédia, il permet l'accès à des graphiques, des images animées, des bandes sonores et des vidéos. Des écrivains férus de nouvelles technologies ne tardent pas à en explorer les possibilités, dans des sites d'écriture hypermédia et des oeuvres d'hyperfiction.

Mis en ligne en juin 1997, oVosite est un espace d'écriture conçu par un collectif de six auteurs issus du département hypermédia de l'Université Paris 8: Chantal Beaslay, Laure Carlon, Luc Dall'Armellina (qui est aussi le webmestre d'oVosite), Philippe Meuriot, Anika Mignotte et Claude Rouah. «oVosite est un site web conçu et réalisé (…) autour d'un symbole primordial et spirituel, celui de l'oeuf», explique Luc Dall'Armellina en juin 2000. «Le site s'est constitué selon un principe de cellules autonomes qui visent à exposer et intégrer des sources hétérogènes (littérature, photo, peinture, vidéo, synthèse) au sein d'une interface unifiante.»

Les possibilités offertes par l'hyperlien ont-elles changé son mode d'écriture? Sa réponse est à la fois négative et positive.

Négative d'abord: «Non - parce qu'écrire est de toute façon une affaire très intime, un mode de relation qu'on entretient avec son monde, ses proches et son lointain, ses mythes et fantasmes, son quotidien et enfin, appendus à l'espace du langage, celui de sa langue d'origine. Pour toutes ces raisons, je ne pense pas que l'hypertexte change fondamentalement sa manière d'écrire, qu'on procède par touches, par impressions, associations, quel que soit le support d'inscription, je crois que l'essentiel se passe un peu à notre insu.»

Positive ensuite: «Oui - parce que l'hypertexte permet sans doute de commencer l'acte d'écriture plus tôt: devançant l'activité de lecture (associations, bifurcations, sauts de paragraphes) jusque dans l'acte d'écrire. L'écriture (ceci est significatif avec des logiciels comme StorySpace) devient peut-être plus modulaire. On ne vise plus tant la longue horizontalité du récit, mais la mise en espace de ses fragments, autonomes. Et le travail devient celui d'un tissage des unités entre elles. L'autre aspect lié à la modularité est la possibilité d'écritures croisées, à plusieurs auteurs. Peut-être s'agit-il d'ailleurs d'une méta-écriture, qui met en relation les unités de sens (paragraphes ou phrases) entre elles.»

Luc ajoute aussi: «La couverture du réseau autour de la surface du globe resserre les liens entre les individus distants et inconnus. Ce qui n'est pas simple puisque nous sommes placés devant des situations nouvelles: ni vraiment spectateurs, ni vraiment auteurs, ni vraiment lecteurs, ni vraiment interacteurs. Ces situations créent des nouvelles postures de rencontre, des postures de "spectacture" ou de "lectacture" (Jean-Louis Weissberg). Les notions de lieu, d'espace, de temps, d'actualité sont requestionnées à travers ce médium qui n'offre plus guère de distance à l'événement mais se situe comme aucun autre dans le présent en train de se faire. L'écart peut être mince entre l'envoi et la réponse, parfois immédiat (cas de la génération de textes).

Mais ce qui frappe et se trouve repérable ne doit pas masquer les aspects encore mal définis tels que les changements radicaux qui s'opèrent sur le plan symbolique, représentationnel, imaginaire et plus simplement sur notre mode de relation aux autres. "Plus de proximité" ne crée pas plus d'engagement dans la relation, de même "plus de liens" ne créent pas plus de liaisons, ou encore "plus de tuyaux" ne créent pas plus de partage. Je rêve d'un internet où nous pourrions écrire à plusieurs sur le même dispositif, une sorte de lieu d'atelier d'écritures permanent et qui autoriserait l'écriture personnelle (c'est en voie d'exister), son partage avec d'autres auteurs, leur mise en relation dans un tissage d'hypertextes et un espace commun de notes et de commentaires sur le travail qui se crée.»

L'avenir de la cyber-littérature est tracé par sa technologie même, comme l'explique en août 1999 Jean-Paul, webmestre du site hypermédia cotres.net: «Il est maintenant impossible à un(e) auteur(e) seul(e) de manier à la fois les mots, leur apparence mouvante et leur sonorité. Maîtriser aussi bien Director, Photoshop et Cubase, pour ne citer que les plus connus, c'était possible il y a dix ans, avec les versions 1. Ça ne l'est plus. Dès demain (matin), il faudra savoir déléguer les compétences, trouver des partenaires financiers aux reins autrement plus solides que Gallimard, voir du côté d'Hachette-Matra, Warner, Pentagone, Hollywood. Au mieux, le statut de… l'écrivaste? Du multimédiaste? sera celui du vidéaste, du metteur en scène, du directeur de produit: c'est lui qui écope des palmes d'or à Cannes, mais il n'aurait jamais pu les décrocher seul. Soeur jumelle (et non pas clone) du cinématographe, la cyber-littérature (= la vidéo + le lien) sera une industrie, avec quelques artisans isolés dans la périphérie off-off (aux droits d'auteur négatifs, donc).»

Quelques mois plus tard, en juin 2000, Jean-Paul s'interroge sur l'apport de l'internet dans son écriture: «La navigation par hyperliens se fait en rayon (j'ai un centre d'intérêt et je clique méthodiquement sur tous les liens qui s'y rapportent) ou en louvoiements (de clic en clic, à mesure qu'ils apparaissent, au risque de perdre de vue mon sujet). Bien sûr, les deux sont possibles avec l'imprimé. Mais la différence saute aux yeux: feuilleter n'est pas cliquer. L'internet n'a donc pas changé ma vie, mais mon rapport à l'écriture. On n'écrit pas de la même manière pour un site que pour un scénario, une pièce de théâtre, etc. (…)

Depuis, j'écris (compose, mets en page, en scène) directement à l'écran. L'état "imprimé" de mon travail n'est pas le stade final, le but; mais une forme parmi d'autres, qui privilégie la linéarité et l'image, et qui exclut le son et les images animées. …

C'est finalement dans la publication en ligne (l'entoilage?) que j'ai trouvé la mobilité, la fluidité que je cherchais. Le maître mot y est "chantier en cours", sans palissades. Accouchement permanent, à vue, comme le monde sous nos yeux. Provisoire, comme la vie qui tâtonne, se cherche, se déprend, se reprend. Avec évidemment le risque souligné par les gutenbergs, les orphelins de la civilisation du livre: plus rien n'est sûr. Il n'y a plus de source fiable, elles sont trop nombreuses, et il devient difficile de distinguer un clerc d'un gourou. Mais c'est un problème qui concerne le contrôle de l'information. Pas la transmission des émotions.»

Jean-Paul fait à nouveau le point sur son activité d'entoileur quelques années plus tard, en janvier 2007: «J'ai gagné du temps. J'utilise moins de logiciels, dont j'intègre le résultat dans Flash. Ce dernier m'assure de contrôler à 90% le résultat à l'affichage sur les écrans de réception (au contraire de ceux qui préfèrent présenter des oeuvres ouvertes, où l'intervention tantôt du hasard tantôt de l'internaute est recherchée). Je peux maintenant me concentrer sur le coeur de la chose: l'architecture et le développement du récit. (…) Les deux points forts des trois ou quatre ans à venir sont: (1) la généralisation du très haut débit (c'est-à-dire en fait du débit normal), qui va m'affranchir des limitations purement techniques, notamment des soucis de poids et d'affichage des fichiers (mort définitive, enfin, des histogrammes de chargement); (2) le développement de la 3 D. C'est le récit en hypermédia (= le multimédia + le clic) qui m'intéresse. Les pièges que pose un récit en 2 D sont déjà passionnants. Avec la 3 D, il va falloir chevaucher le tigre pour éviter la simple prouesse technique et laisser la priorité au récit.»

VERS UNE BIBLIOTHÈQUE PLANÉTAIRE

[Résumé] En 2005, le livre devient un objet convoité par les géants de l'internet que sont Google, Yahoo! et Microsoft, d'une part par souci méritoire de mettre le patrimoine mondial à la disposition de tous, d'autre part à cause de l'enjeu représenté par les recettes publicitaires générées par les liens commerciaux accolés aux résultats des recherches. Lancée en octobre 2005 à l'instigation de l'Internet Archive, l'Open Content Alliance (OCA) souhaite pour sa part créer une bibliothèque planétaire publique qui soit respectueuse du droit d'auteur et dont les collections puissent être accessibles sur n'importe quel moteur de recherche.

= Google Books

# Google Print

Google décide de mettre son expertise au service du livre et lance la version bêta de Google Print en mai 2005. Ce lancement est précédé de deux étapes.

En octobre 2004, Google lance la première partie de son programme Google Print, établi en partenariat avec les éditeurs pour pouvoir consulter à l'écran des extraits de livres, puis commander les livres auprès d'une librairie en ligne.

En décembre 2004, Google lance la deuxième partie de son programme Google Print, cette fois à destination des bibliothèques. Il s'agit d'un projet de bibliothèque consistant à numériser les livres appartenant à plusieurs grandes bibliothèques partenaires, à commencer par la bibliothèque de l'Université du Michigan (dans sa totalité, à savoir 7 millions d'ouvrages), les bibliothèques des Universités de Harvard, de Stanford et d'Oxford, et celle de la ville de New York. Le coût estimé au départ se situe entre 150 et 200 millions de dollars US, avec la numérisation de 10 millions de livres sur six ans et un chantier d'une durée totale de dix ans.

En août 2005, soit trois mois après son lancement, Google Print est suspendu pour une durée indéterminée suite à un conflit grandissant avec les associations d'auteurs et d'éditeurs de livres sous droits, celles-ci reprochant à Google de numériser les livres sans l'accord préalable des ayants droit.

# Google Livres

Le programme reprend en août 2006 sous le nom de Google Books (Google Livres). Google Books permet de rechercher les livres par date, titre ou éditeur. La numérisation des fonds de grandes bibliothèques se poursuit, tout comme le développement de partenariats avec les éditeurs qui le souhaitent.

Les livres libres de droit sont consultables à l'écran en texte intégral, leur contenu est copiable et l'impression est possible page à page. Ils sont également téléchargeables sous forme de fichiers PDF et imprimables dans leur entier. Les liens publicitaires associés aux pages de livres sont situés en haut et à droite de l'écran.

Le conflit avec les associations d'auteurs et d'éditeurs se poursuit lui aussi, puisque Google continue de numériser des livres sous droits sans l'autorisation préalable des ayants droit, en invoquant le droit de citation pour présenter des extraits sur le web. L'Authors Guild et l'Association of American Publishers (AAP) invoquent pour leur part le non respect de la législation relative au copyright pour attaquer Google en justice.

Fin 2006, d'après le buzz médiatique, Google scannerait 3.000 livres par jour - ce qui représenterait un million de livres par an -, le coût estimé serait de 30 dollars par livre et Google Books comprendrait déjà 3 millions de livres. Tous chiffres à prendre avec précaution, la société ne communiquant pas de statistiques à ce sujet.

À l'exception de la New York Public Library, les collections en cours de numérisation appartiennent toutes à des bibliothèques universitaires américaines (Harvard, Stanford, Michigan, Oxford, Californie, Virginie, Wisconsin-Madison), auxquelles s'ajoutent la bibliothèque de l'Universidad Complutense de Madrid (Espagne) puis, début 2007, les bibliothèques des Universités de Princeton et du Texas (Austin), ainsi que la Biblioteca de Catalunya (Catalogne, Espagne) et la Bayerische Staatbibliothek (Bavière, Allemagne). En mai 2007, Google annonce la participation de la première bibliothèque francophone, la Bibliothèque cantonale et universitaire (BCU) de Lausanne (Suisse), pour la numérisation de 100.000 titres en français, en allemand et en italien publiés entre le 17e et le 19e siècle. Suit ensuite un partenariat avec la Bibliothèque municipale de Lyon (France), signé en juillet 2008 pour numériser 500.000 livres.

En octobre 2008, après trois ans de conflit, Google tente de mettre fin aux poursuites émanant des associations d'auteurs et d'éditeurs. La société propose un accord qui serait basé sur un partage des revenus générés par Google Books ainsi qu'un large accès aux ouvrages épuisés, tout comme le paiement de 125 millions de dollars US à l'Authors Guild et à l'Association of American Publishers (AAP) pour clôturer définitivement ce conflit.

Suite à cet accord, Google pourrait proposer de plus larges extraits de livres, jusqu'à 20% d'un même ouvrage, avec un lien commercial pour acheter une copie - numérique ou non - de l'oeuvre. Les ayants droit auraient la possibilité de participer ou non au projet Google Books, et donc de retirer leurs livres des collections. Par ailleurs, les bibliothèques universitaires et publiques des États-Unis pourraient accéder à un portail gratuit géré par Google et donnant accès aux textes de millions de livres épuisés. Un abonnement permettrait aux universités et aux écoles de consulter les collections des bibliothèques les plus renommées.

En novembre 2008, Google Books comprend 7 millions d'ouvrages numérisés, en partenariat avec 24 bibliothèques et 2.000 éditeurs partenaires. Les 24 bibliothèques partenaires se situent principalement aux États-Unis (16), mais aussi en Allemagne (1), en Belgique (1), en Espagne (2), en France (1), au Japon (1), au Royaume-Uni (1) et en Suisse (1).

En février 2009, Google Books lance un portail spécifique pour téléphone mobile et smartphone, par exemple sur l'iPhone 3G d'Apple ou sur le G1 de T-Mobile. Le catalogue comprend 1,5 million de livres du domaine public, auxquels s'ajoutent 500.000 autres titres téléchargeables hors des États-Unis, du fait d'une législation du copyright moins restrictive dans certains pays.

= L'Open Content Alliance

En réaction au projet Google Books, l'Internet Archive pense qu'une bibliothèque à vocation mondiale ne doit pas être liée à des enjeux commerciaux. Courant 2005, elle lance l'Open Content Alliance (OCA), dans l'optique de fédérer un grand nombre de partenaires pour créer une bibliothèque planétaire publique respectueuse du copyright et sur un modèle ouvert.

Qu'est-ce exactement que l'Internet Archive? Fondée en avril 1996 par Brewster Kahle à San Francisco (Californie), l'Internet Archive a pour but de constituer, stocker, préserver et gérer une «bibliothèque» de l'internet, en archivant la totalité du web tous les deux mois, afin d'offrir un outil de travail aux universitaires, chercheurs et historiens, et de préserver un historique de l'internet pour les générations futures.

En octobre 2001, l'Internet Archive met ses archives en accès libre sur le web grâce à la Wayback Machine, qui permet à tout un chacun de consulter l'historique d'un site web, à savoir le contenu et la présentation d'un site web à différentes dates, théoriquement tous les deux mois à partir de 1996.

L'Internet Archive débute aussi la constitution de collections numériques telles que le Million Book Project (10.520 livres en avril 2005), des archives de films de la période 1903-1973, des archives de concerts live récents, des archives de logiciels, etc. Toutes ces collections sont en consultation libre sur le web.

En janvier 2005, l'Internet Archive s'associe à Yahoo! pour mettre sur pied l'Open Content Alliance (OCA), une initiative visant à créer un répertoire libre et multilingue de livres numérisés et de documents multimédia pour consultation sur n'importe quel moteur de recherche.

L'OCA est officiellement lancée en octobre 2005 et débute véritablement durant l'été 2006. Le but de l'initiative est de s'inspirer de Google Books tout en évitant ses travers, à savoir la numérisation des livres sous droits sans l'accord préalable des éditeurs, tout comme la consultation et le téléchargement impossibles sur un autre moteur de recherche.

L'OCA regroupe de nombreux partenaires: des bibliothèques et des universités bien sûr, mais aussi des organisations gouvernementales, des associations à but non lucratif, des organismes culturels et des sociétés informatiques (Adobe, Hewlett Packard, Microsoft, Yahoo!, Xerox, etc.).

Les premiers partenaires pour la numérisation des livres sont les bibliothèques des Universités de Californie et de Toronto, l'European Archive, les Archives nationales du Royaume-Uni, O'Reilly Media et les Prelinger Archives. Seuls les livres appartenant au domaine public sont numérisés, pour éviter les problèmes de copyright auxquels se heurte Google, et les collections numérisées sont progressivement intégrées à la section Text Archive de l'Internet Archive.

En décembre 2006, l'OCA franchit la barre des 100.000 livres numérisés, avec un rythme de 12.000 nouveaux livres par mois.

À la même date, l'Internet Archive reçoit une subvention d'un million de dollars US de la part de la Sloan Foundation pour numériser les collections du Metropolitan Museum of Art (l'ensemble des livres et plusieurs milliers d'images) ainsi que certaines collections de la Boston Public Library (les 3.800 livres de la bibliothèque personnelle de John Adams, deuxième président des États-Unis), du Getty Research Institute (une collection de livres d'art), de la John Hopkins University (une collection de documents liés au mouvement anti- esclavagiste) et de l'Université de Californie à Berkeley (une collection de documents relatifs à la ruée vers l'or).

En mai 2007, l'OCA franchit la barre des 200.000 livres numérisés. La barre du million de livres numérisés est atteinte en décembre 2008, et celle des deux millions de livres numérisés en mars 2010.

= Autres initiatives

# Microsoft Live Search Books

Si Microsoft est l'un des partenaires de l'Open Content Alliance, la société se lance aussi dans l'aventure à titre personnel. En décembre 2006 est mise en ligne aux États-Unis la version bêta de Live Search Books, qui permet une recherche par mots-clés dans les livres du domaine public. Ces livres sont numérisés par Microsoft suite à des accords passés avec de grandes bibliothèques, les premières étant la British Library et les bibliothèques des Universités de Californie et de Toronto, suivies en janvier 2007 par celles de la New York Public Library et de l'Université Cornell. Microsoft compte également ajouter des livres sous droits, mais uniquement avec l'accord préalable des éditeurs.

Tout comme Google Books, Live Search Books permet de consulter des extraits comportant les mots-clés, qui sont eux-même surlignés. Mais les collections sont moins riches, le moteur de recherche est plus rudimentaire, et il n'est pas possible de télécharger les livres au format PDF dans leur entier.

En mai 2007, Microsoft annonce des accords avec plusieurs grands éditeurs, dont Cambridge University Press et McGraw Hill.

Microsoft met finalement un terme à ce projet en mai 2008, pour concentrer ses efforts sur d'autres activités. Les 750.000 livres déjà numérisés sont versés dans les collections de l'Open Content Alliance.

# Europeana

En Europe, certains s'inquiètent de l'«hégémonie américaine» que représente Google Books.

Il existe déjà sur le web une Bibliothèque européenne, qui est en fait un portail commun aux 43 bibliothèques nationales, lancé en janvier 2004 par la CENL (Conference of European National Librarians) et hébergé sur le site de la Bibliothèque nationale des Pays-Bas.

En septembre 2005, la Commission européenne lance une vaste consultation sur un projet de bibliothèque numérique européenne, avec réponse requise en janvier 2006 et lancement officiel du projet en mars 2006.

«Le plan de la Commission européenne visant à promouvoir l'accès numérique au patrimoine de l'Europe prend forme rapidement, lit-on dans le communiqué de presse. Dans les cinq prochaines années, au moins six millions de livres, documents et autres oeuvres culturelles seront mis à la disposition de toute personne disposant d'une connexion à l'internet, par l'intermédiaire de la "bibliothèque numérique européenne". Afin de stimuler les initiatives de numérisation européennes, la Commission va co-financer la création d'un réseau paneuropéen de centres de numérisation. La Commission abordera également, dans une série de documents stratégiques, la question du cadre approprié à adopter pour assurer la protection des droits de propriété intellectuelle dans le cadre des bibliothèques numériques.»

Europeana et ses deux millions de documents sont disponibles en novembre 2008, avec un serveur qui déclare rapidement forfait suite à la très forte demande des premières heures, puis une période expérimentale avec consultation partielle des collections. Europeana propose 6 millions de documents en mars 2010, puis 10 millions de documents en septembre 2010 avec une nouvelle interface.

PDA, SMARTPHONES ET TABLETTES

[Résumé] Nous lisons d'abord sur notre ordinateur - portable ou non - avant de lire sur des agendas électroniques (Psion et eBookMan) puis sur des PDA (Palm Pilot, Pocket PC et bien d'autres). Suivent ensuite les premiers smartphones de Nokia et Sony Ericsson. Parallèlement apparaissent des tablettes de lecture dédiées. Les premières sont le Rocket eBook, le SoftBook Reader et le Gemstar eBook, qui ne durent pas. Après une période morose, des tablettes plus légères gagnent en puissance et en qualité d'écran, par exemple le Cybook (nouvelle version) et le Sony Reader, auxquels s'ajoute le Kindle d'Amazon en novembre 2007, puis l'iPad d'Apple en avril 2010. Le papier électronique serait pour «bientôt».

= Le projet @folio

Les livres numériques sont d'abord lisibles uniquement sur l'écran de notre ordinateur, que celui-ci soit un ordinateur de bureau ou un ordinateur portable sinon ultra-portable. Outre le stockage d'un millier de livres sinon plus - en fonction de la taille du disque dur - , l'ordinateur permet l'utilisation d'outils bureautiques standard, l'accès au web, l'écoute de fichiers musicaux et le visionnement de vidéos ou de films. Certains usagers sont également tentés par le webpad, un ordinateur-écran sans disque dur disposant d'une connexion sans fil à l'internet, apparu en 2001, ou alors la tablette PC, une tablette informatique pourvue d'un écran tactile, apparue fin 2002.

Conçu dès octobre 1996 par Pierre Schweitzer, architecte designer à Strasbourg (Alsace, France), le projet @folio (qui se prononce «a- folio») se définit comme un baladeur de textes ou encore comme un support de lecture nomade permettant de lire des textes glanés sur l'internet. De petite taille, il cherche à mimer, sous forme électronique, le dispositif technique du livre, afin d'offrir une mémoire de fac-similés reliés en hypertexte pour faciliter le feuilletage.

Pierre explique en janvier 2001: «@folio est un baladeur de textes, simple, léger, autonome, que le lecteur remplit selon ses désirs à partir du web, pour aller lire n'importe où. Il peut aussi y imprimer des documents personnels ou professionnels provenant d'un CD-ROM. Les textes sont mémorisés en faisant: "imprimer", mais c'est beaucoup plus rapide qu'une imprimante, ça ne consomme ni encre ni papier. Les liens hypertextes sont maintenus au niveau d'une reliure tactile. (…)

Le projet est né à l'atelier Design de l'École d'architecture de Strasbourg où j'étais étudiant. Il est développé à l'École nationale supérieure des arts et industries de Strasbourg avec le soutien de l'ANVAR-Alsace. Aujourd'hui, je participe avec d'autres à sa formalisation, les prototypes, design, logiciels, industrialisation, environnement technique et culturel, etc., pour transformer ce concept en un objet grand public pertinent.»

Pierre est aussi l'auteur du logiciel Mot@mot. «La plus grande partie du patrimoine écrit existant est fixé dans des livres, sur du papier», explique-t-il à la même date. «Pour rendre ces oeuvres accessibles sur la toile, la numérisation en mode image est un moyen très efficace. Le projet Gallica en est la preuve. Mais il reste le problème de l'adaptation des fac-similés d'origine à nos écrans de lecture aujourd'hui: réduits brutalement à la taille d'un écran, les fac- similés deviennent illisibles. Sauf à manipuler les barres d'ascenseur, ce qui nécessite un ordinateur et ne permet pas une lecture confortable. La solution proposée par Mot@mot consiste à découper le livre, mot à mot, du début à la fin (enfin, les pages scannées du livre…). Ces mots restent donc des images, il n'y a pas de reconnaissance de caractères, donc pas d'erreur possible. On obtient une chaîne d'images-mots liquide, qu'on peut remettre en page aussi facilement qu'une chaîne de caractères. Il devient alors possible de l'adapter à un écran de taille modeste, sans rien perdre de la lisibilité du texte. La typographie d'origine est conservée, les illustrations aussi.» Pour développer le projet @folio et le logiciel Mot@mot, Pierre fait valider un brevet international en avril 2001, puis crée la start-up française iCodex en juillet 2002.

Cinq ans plus tard, en août 2007, Pierre Schweitzer poursuit patiemment sa croisade pour promouvoir son projet. «Il ne s'agit pas de transformer le support papier des livres existants, c'est absurde, écrit-il. Il s'agit plutôt d'offrir un support de lecture efficace aux textes qui n'en ont pas, ceux qui sont accessibles sur le web. Avec @folio, je reste persuadé qu'un support de lecture transportable qui serait à la fois simple et léger, annotable et effaçable, à bas coût, respectueux de la page et de nos traditions typographiques, pourrait apporter un supplément de confort appréciable à tous les usagers du texte numérique. Une ardoise dont on pourrait feuilleter l'hypertexte à main nue, en lieu et place de l'imprimante…»

En quoi la technologie utilisée est-elle différente de celle des autres tablettes? «La technologie d'@folio est inspirée du fax et du classeur à onglets. La mémoire flash est imprimée comme Gutenberg imprimait ses livres. Ce mode fac-similé ne nécessite aucun format propriétaire, il est directement lisible à l'oeil nu. Le fac-similé est un mode de représentation de l'information robuste, pérenne, adaptable à tout type de contenu (de la musique imprimée aux formules de mathématique ou de chimie) sans aucune adaptation nécessaire. C'est un mode de représentation totalement ouvert et accessible à tous: il supporte l'écriture manuscrite, la calligraphie, les écritures non alphabétiques, et le dessin à main levée, toutes choses qui sont très difficiles à faire à l'aide d'un seul outil sur un ordinateur ou un "ebook" classique. Cette conception technique nouvelle et très simplifiée permet de recueillir une grande variété de contenus et surtout, elle permet un prix de vente très raisonnable (100 euros pour le modèle de base) dans différentes combinaisons de formats (tailles d'écran) et de mémoire (nombre de pages) adaptées aux différentes pratiques de lecture.»

Outre cette technologie novatrice, quel serait l'avantage de la lecture sur @folio? «La simplicité d'usage, l'autonomie, le poids, le prix. Quoi d'autre? La finesse n'est pas négligeable pour pouvoir être glissé presque n'importe où. Et l'accès immédiat aux documents - pas de temps d'attente comme quand on "allume" son ordinateur portable: @folio ne s'allume jamais et ne s'éteint pas, la dernière page lue reste affichée et une simple pression sur le bord de l'écran permet de remonter instantanément au sommaire du document ou aux onglets de classement.»

À la même date, en août 2007, la grande revue en ligne anglophone TeleRead fait l'éloge du projet @folio en intitulant l'article Pierre Schweitzer's Dream (Le rêve de Pierre Schweitzer). Plusieurs spécialistes anglophones, et non des moindres (David Rothman, Mike Cook, Ellen Hage), rendent hommage à la persévérance de Pierre en espérant voir son projet commercialisé un jour.

= PDA (assistants personnels)

# La gamme Psion

Lancé dès 1984 par la société britannique Psion, le Psion Organiser est le premier modèle d'agenda électronique. Au fil des ans, la gamme des appareils s'étend et la société se développe à l'international.

En 2000, les divers modèles (Série 7, Série 5mx, Revo, Revo Plus) sont concurrencés par le Palm Pilot et le Pocket PC. Les ventes baissent et la société décide de diversifier ses activités. Suite au rachat de Teklogix par Psion, Psion Teklogix est créé en septembre 2000 pour développer des solutions mobiles sans fil à destination des entreprises. Psion Software est créé en 2001 pour développer les logiciels de la nouvelle génération d'appareils mobiles utilisant la plateforme Symbian OS, par exemple ceux du smartphone Nokia 9210, modèle précurseur commercialisé la même année.

Enseignante-chercheuse à l'École pratique des hautes études (EPHE, Paris-Sorbonne), Marie-Joseph Pierre utilise un Psion depuis plusieurs années pour lire et étudier dans le train lors de ses fréquents déplacements entre Argentan (Normandie), sa ville de résidence, et Paris. Elle achète son premier Psion en 1997, un Série 3, remplacé ensuite par un Série 5, remplacé lui-même par un Psion 5mx en juin 2001.

En février 2002, elle raconte: «J'ai chargé tout un tas de trucs littéraires - dont mes propres travaux et dont la Bible entière - sur mon Psion 5mx (16 + 16 Mo), que je consulte surtout dans le train ou pour mes cours, quand je ne peux pas emporter toute une bibliothèque. J'ai mis les éléments de programme qui permettent de lire page par page comme sur un véritable ebook. Ce qui est pratique, c'est de pouvoir charger une énorme masse documentaire sur un support minuscule. Mais ce n'est pas le même usage qu'un livre, surtout un livre de poche qu'on peut feuilleter, tordre, sentir…, et qui s'ouvre automatiquement à la page qu'on a aimée. C'est beaucoup moins agréable à utiliser, d'autant que sur PDA, la page est petite: on n'a pas de vue d'ensemble. Mais avec une qualité appréciable: on peut travailler sur le texte enregistré, en rechercher le vocabulaire, réutiliser des citations, faire tout ce que permet le traitement informatique du document, et cela m'a pas mal servi pour mon travail, ou pour mes activités associatives. Je fais par exemple partie d'une petite société poétique locale, et nous faisons prochainement un récital poétique. J'ai voulu rechercher des textes de Victor Hugo, que j'ai maintenant pu lire et même charger à partir du site de la Bibliothèque nationale de France: c'est vraiment extra.»

# L'eBookMan de Franklin

Basée dans le New Jersey (États-Unis), la société Franklin commercialise dès 1986 le premier dictionnaire consultable sur une machine de poche. Quinze ans plus tard, Franklin distribue 200 ouvrages de référence sur des machines de poche: dictionnaires unilingues et bilingues, encyclopédies, Bibles, manuels d'enseignement, ouvrages médicaux et livres de loisirs.

En octobre 2000, Franklin lance l'eBookMan, un assistant personnel multimédia qui - entre autres fonctionnalités (agenda, dictaphone, etc.) - permet la lecture de livres numériques sur le Franklin Reader, le logiciel de lecture «maison». À la même date, l'eBookMan reçoit l'eBook Technology Award de la Foire internationale du livre de Francfort.

Trois modèles (EBM-900, EBM-901 et EBM-911) sont disponibles début 2001. Leurs prix respectifs sont de 130, 180 et 230 dollars US. Le prix est fonction de la taille de la mémoire vive (8 ou 16 Mo) et de la qualité de l'écran à cristaux liquides (écran LCD), rétro-éclairé ou non selon les modèles. Nettement plus grand que celui de ses concurrents, l'écran n'existe toutefois qu'en noir et blanc, contrairement à la gamme Pocket PC ou à certains modèles Palm avec écran couleur. L'eBookMan permet aussi l'écoute de livres audio- numériques et de fichiers musicaux au format MP3.

En octobre 2001, Franklin décide de ne pas intégrer le Microsoft Reader à l'eBookMan, mais de lui préférer le Mobipocket Reader, logiciel de lecture jugé plus performant, et primé à la même date par l'eBook Technology Award de la Foire de Francfort. Parallèlement, le Franklin Reader est progressivement disponible pour les gammes d'appareils mobiles Psion, Palm, Pocket PC et Nokia. Franklin développe aussi une librairie numérique sur son site en passant des partenariats avec plusieurs sociétés, notamment avec Audible.com pour avoir accès à sa collection de 4.500 livres audio-numériques.

# La gamme Palm Pilot

Lorsque le livre numérique commence à se généraliser en 2000, tous les fabricants de PDA décident d'intégrer un logiciel de lecture dans leur machine, en plus des fonctionnalités standard (agenda, dictaphone, lecteur de MP3, etc.). En parallèle, ils négocient les droits de diffusion numérique de centaines de titres, soit directement soit par le biais de librairies numériques. Si certains professionnels du livre s'inquiètent de la petitesse de l'écran, les adeptes de la lecture sur PDA assurent que la taille de l'écran n'est pas un problème. Les grands favoris du marché sont les gammes Palm Pilot et Pocket PC.

La société Palm lance en mars 1996 le Palm Pilot, premier PDA du marché, et vend 23 millions de machines entre 1996 et 2002. Le système d'exploitation du Palm Pilot est le Palm OS et son logiciel de lecture le Palm Reader. En mars 2001, la gamme Palm Pilot propose plusieurs modèles permettant de lire des livres aussi bien sur le Palm Reader que sur le Mobipocket Reader, le logiciel de lecture de Mobipocket.

# La gamme Pocket PC

Microsoft lance en avril 2000 son propre PDA, le Pocket PC, et son propre logiciel de lecture, le Microsoft Reader. Le système d'exploitation utilisé est Windows CE, remplacé en octobre 2001 par Pocket PC 2002, qui permet entre autres de lire des livres numériques sous droits. Ces livres sont protégés par un système de gestion des droits numériques, le Microsoft DAS Server (DAS: Digital Asset Server). En 2002, la gamme Pocket PC permet la lecture sur trois logiciels: le Microsoft Reader bien sûr, le Mobipocket Reader et le Palm Reader.

# D'autres modèles

Le marché des PDA poursuit sa croissance. D'après un numéro du Seybold Report daté d'avril 2001, on dénombre 17 millions de PDA dans le monde pour seulement 100.000 tablettes de lecture. 13,2 millions de PDA sont vendus en 2001, et 12,1 millions en 2002. En 2002, la gamme Palm Pilot est toujours le leader du marché (avec 36,8% des machines vendues), suivi par la gamme Pocket PC de Microsoft et les modèles de Hewlett- Packard, Sony, Handspring, Toshiba et Casio. Les systèmes d'exploitation utilisés sont essentiellement le Palm OS (pour 55% des machines) et le Pocket PC (pour 25,7% des machines).

En 2004, on note une plus grande diversité des modèles et une baisse des prix chez tous les fabricants. Les trois principaux fabricants sont Palm, Sony et Hewlett-Packard. Suivent Handspring, Toshiba, Casio et d'autres. Mais le PDA est de plus en plus concurrencé par le smartphone, qui est un téléphone portable doublé d'un PDA, et les ventes commencent à baisser. En février 2005, Sony décide de se retirer complètement du marché des PDA.

= Smartphones

Le premier smartphone est le Nokia 9210, modèle précurseur lancé en 2001 par la société finlandaise Nokia, grand fabricant mondial de téléphones portables. Apparaissent ensuite le Nokia Series 60, le Sony Ericsson P800, puis les modèles de Motorola et de Siemens. Ces différents modèles permettent de lire des livres numériques sur le Mobipocket Reader.

Appelé aussi téléphone multimédia, téléphone multifonctions ou encore téléphone intelligent, le smartphone dispose d'un écran couleur, du son polyphonique et de la fonction appareil photo, qui viennent s'ajouter aux fonctions habituelles de l'assistant personnel: agenda, dictaphone, lecteur de livres numériques, lecteur de musique, etc.

Les smartphones représentent 3,7% des ventes de téléphones portables en 2004 et 9% des ventes en 2006, à savoir 90 millions de smartphones pour un milliard de téléphones portables.

Si les livres numériques ont une longue vie devant eux, les appareils de lecture risquent de muer régulièrement. Selon Denis Zwirn, président de la librairie numérique Numilog, interviewé en février 2003, «l'équipement des individus et des entreprises en matériel pouvant être utilisé pour la lecture numérique dans une situation de mobilité va continuer de progresser très fortement dans les dix prochaines années sous la forme de machines de plus en plus performantes (en terme d'affichage, de mémoire, de fonctionnalités, de légèreté…) et de moins en moins chères. Cela prend dès aujourd'hui la forme de PDA (Pocket PC et Palm Pilot), de tablettes PC et de smartphones, ou de smart displays (écrans tactiles sans fil). Trois tendances devraient être observées: la convergence des usages (téléphone/PDA), la diversification des types et tailles d'appareils (de la montre-PDA- téléphone à la tablette PC waterproof), la démocratisation de l'accès aux machines mobiles (des PDA pour enfants à 15 euros). Si les éditeurs et les libraires numériques savent en saisir l'opportunité, cette évolution représente un environnement technologique et culturel au sein duquel les livres numériques, sous des formes variées, peuvent devenir un mode naturel d'accès à la lecture pour toute une génération.»

À la même date, on se demande si les tablettes dédiées pourront vraiment réussir à s'imposer face aux smartphones multifonctions. On se demande aussi s'il existe une clientèle spécifique pour les deux types de machines, la lecture sur téléphone portable et smartphone étant destinée au grand public, et la lecture sur tablette étant réservée aux gros consommateurs de documents que sont les lycéens, les étudiants, les professeurs, les chercheurs ou les juristes. Le débat n'est pas prêt d'être clos en 2010, même si on ne parle plus de publics différents pour l'une et l'autre machine.

= Tablettes de lecture

# Premiers pas

Dès 1999, on voit apparaître des tablettes dédiées de la taille d'un (gros) livre, souvent appelées ebooks, livres électroniques, tablettes de lecture ou même liseuses. Ces premiers appareils suscitent un engouement certain, même si peu de gens vont jusqu'à les acheter, vu leur prix prohibitif (plusieurs centaines de dollars) et un choix de livres restreint, le catalogue de livres numériques étant encore ridicule par rapport à la production imprimée.

Les premières tablettes de lecture sont conçues et développées dans la Silicon Valley, en Californie. Elles disposent d'un écran à cristaux liquides (écran LCD) rétro-éclairé ou non, noir et blanc ou en couleur. Elles fonctionnent sur batterie et disposent d'un modem intégré et d'un port USB, pour connexion à l'internet et téléchargement des livres à partir de librairies numériques.

Le modèle le plus connu, le Rocket eBook, est développé en 1998 et commercialisé en 1999 par la société NuvoMedia, financée par la chaîne de librairies Barnes & Noble et le géant des médias Bertelsmann. Un deuxième modèle, le SoftBook Reader, est développé par la société SoftBook Press, financée par les deux grandes maisons d'édition Random House et Simon & Schuster. Plusieurs autres modèles ont une durée de vie assez courte, par exemple l'EveryBook, appareil à double écran créé par la société du même nom, ou encore le Millennium eBook, créé par la société Librius.com. A cette époque, qui n'est pas si lointaine, toutes ces tablettes électroniques pèsent entre 700 grammes et 2 kilos et peuvent stocker une dizaine de livres.

# Le Gemstar eBook

Présenté en octobre 2000 à New York et commercialisé le mois suivant aux États-Unis, le Gemstar eBook se décline en deux modèles, qui sont les successeurs du Rocket eBook (conçu par NuvoMedia) et du SoftBook Reader (conçu par SoftBook Press), suite au rachat de NuvoMedia et de SoftBook Press en janvier 2000 par Gemstar-TV Guide International, grande société spécialisée dans les produits et services numériques pour les médias.

Ces deux modèles - le REB 1100 (écran noir et blanc, successeur du Rocket eBook) et le REB 1200 (écran couleur, successeur du SoftBook Reader) - sont construits et vendus sous le label RCA, appartenant à Thomson Multimedia. Le système d'exploitation, le navigateur et le logiciel de lecture sont spécifiques à l'appareil, tout comme le format de lecture, basé sur le format OeB (Open eBook). Les deux modèles sont vendus respectivement 300 et 699 dollars US par la chaîne de magasins SkyMall.

Les ventes sont très inférieures aux pronostics. En avril 2002, un article du New York Times annonce l'arrêt de la fabrication de ces appareils par RCA. En automne 2002, leurs successeurs - le GEB 1150 et le GEB 2150 - sont produits sous le label Gemstar et vendus par SkyMall à un prix beaucoup plus compétitif, avec ou sans abonnement annuel ou bisannuel à la librairie numérique Gemstar eBook. Le GEB 1150 coûte 199 dollars sans abonnement, et 99 dollars avec abonnement annuel (facturé 20 dollars par mois). Le GEB 2150 coûte 349 dollars sans abonnement, et 199 dollars avec abonnement bisannuel (également facturé 20 dollars par mois).

Mais les ventes restent peu concluantes - faute d'un marché mûr pour ce genre d'appareil - et Gemstar décide de mettre fin à ses activités eBook. La société cesse la vente de ses tablettes de lecture en juin 2003 et la vente de ses livres numériques le mois suivant.

# Le Cybook

Première tablette de lecture européenne, le Cybook (21 x 16 cm, 1 kilo) est conçu et développé par la société française Cytale, et commercialisé en janvier 2001. Sa mémoire - 32 Mo de mémoire SDRAM et 16 Mo de mémoire flash - permet de stocker 15.000 pages de texte, soit 30 livres de 500 pages.

«J'ai croisé il y a deux ans le chemin balbutiant d'un projet extraordinaire, le livre électronique», écrit en décembre 2000 Olivier Pujol, PDG de Cytale. «Depuis ce jour, je suis devenu le promoteur impénitent de ce nouveau mode d'accès à l'écrit, à la lecture, et au bonheur de lire. La lecture numérique se développe enfin, grâce à cet objet merveilleux: bibliothèque, librairie nomade, livre "adaptable", et aussi moyen d'accès à tous les sites littéraires (ou non), et à toutes les nouvelles formes de la littérature, car c'est également une fenêtre sur le web.»

Mais les ventes sont très inférieures aux pronostics - le marché n'étant pas mûr pour ce genre d'appareil - et forcent la société à se déclarer en cessation de paiement. Cytale est mis en liquidation judiciaire en juillet 2002 et cesse ses activités à la même date.

La commercialisation du Cybook est reprise quelques mois plus tard par la société Bookeen, créée en 2003 à l'initiative de Michael Dahan et Laurent Picard, deux ingénieurs de Cytale. En juillet 2007, Bookeen dévoile une nouvelle version de sa tablette, baptisée Cybook Gen3, avec un écran utilisant pour la première fois la technologie E Ink.

# Les modèles de Sony

En avril 2004, Sony lance au Japon le Librié 1000-EP, produit en partenariat avec les sociétés Philips et E Ink. Cette tablette est la première à utiliser la technologie d'affichage développée par la société E Ink et dénommée encre électronique.

L'appareil pèse 300 grammes (avec piles et protection d'écran) pour une taille de 12,6 x 19 x 1,3 centimètres. Sa mémoire est de 10 Mo - avec possibilité d'extension - et sa capacité de stockage de 500 livres. Son écran de 6 pouces a une définition de 170 DPI et une résolution de 800 x 600 pixels. Un port USB permet le téléchargement des livres à partir de son ordinateur. L'appareil comprend aussi un clavier, une fonction d'enregistrement et une synthèse vocale. Il fonctionne avec quatre piles alcalines, qui permettraient la consultation de 10.000 pages. Son prix est de 375 dollars US.

Le Librié cède ensuite la place au Sony Reader, lancé en septembre 2006 aux États-Unis au prix de 350 dollars, avec six modèles sortis depuis avec succès.

# Le Kindle

Amazon.com lance en novembre 2007 sa propre tablette de lecture, le Kindle, avec un format livresque (19 x 13 x 1,8 cm), un poids de 289 grammes, un écran noir et blanc (6 pouces, 800 x 600 pixels), un clavier, une mémoire de 256 Mo (extensible par carte SD), un port USB et une connexion sans fil (WiFi). Vendu 400 dollars US (273 euros), le Kindle peut contenir jusqu'à 200 livres parmi les 80.000 livres numériques disponibles sur le site d'Amazon. 538.000 tablettes sont vendues en 2008.

En février 2009, Amazon lance une nouvelle version du Kindle, le Kindle 2, au prix de 359 dollars (prix qui baisse sensiblement dans les mois qui suivent), avec un catalogue de 230.000 titres. En mai de la même année, Amazon lance le Kindle DX avec un écran plus grand, notamment pour la lecture de journaux et magazines, pour un prix de 489 dollars.

# L'iPad

En avril 2010, la société Apple lance l'iPad, sa tablette numérique multifonctions, au prix de 499 dollars US, avec un iBookstore de 60.000 livres numériques qui devrait s'étoffer rapidement. Après l'iPod (lancé en octobre 2001) puis l'iPhone (lancé en juin 2007), deux objets cultes auprès de toute une génération, Apple devient lui aussi un acteur de poids pour le livre numérique.

La compétition risque d'être rude sur un marché très prometteur. Reste à voir quels modèles seront retenus par l'usager parce que solides, légers, économiques et procurant un véritable «confort de lecture», sans oublier l'aspect esthétique et les possibilités de lecture en 3 D. Petit ou grand écran? Smartphone ou tablette?

Selon Jean-Paul, webmestre du site hypermédia cotres.net, interviewé en janvier 2007, «on progresse. Les PDA et autres baladeurs multimédia ont formé le public à manipuler des écrans tactiles de dimension individuelle (par opposition aux bornes publiques de circulation et autres tirettes-à-sous). L'hypermédia est maintenant une évidence. Il ne reste plus qu'à laisser se bousculer les ingénieurs et les marketteurs pour voir sortir un objet rentable, léger, attirant, peu fragile, occupant au mieux l'espace qui sépare les deux mains d'un terrien assis dans le bus ou sur sa lunette WC: la surface d'une feuille A4 en format italien, soit ± 800 x 600 pixels. Bien sûr, ce que montrera cette surface ne sera pas en 2 D mais en 3 D. Comme les GPS prochaine génération, ou les écrans de visée sur le cockpit d'un A- Win.»

On nous parle maintenant de papier électronique pour «bientôt», avec les sociétés E Ink et Plastic Logic en tête de file pour nous proposer des supports de lecture souples et ultra-fins.

CONCLUSION

[Résumé] En 2010, offrir un livre numérique devient «tendance», et le lire sur son smartphone ou sa tablette l'est encore plus. Preuve que le monde du livre a bien changé depuis la panique ayant saisi les éditeurs et les libraires à la fin des années 1990. Dix ans plus tard, trois termes paraissent essentiels: stockage, organisation et diffusion. Dans un proche avenir, on devrait disposer de l'ensemble du patrimoine mondial stocké sous forme numérique, d'une organisation effective de l'information et d'un réseau internet omniprésent. Confidentiel en 2000, puis parent pauvre des fichiers musicaux et vidéo, le livre numérique est désormais en bonne place à côté de la musique et des films.

***

Tim Berners-Lee est l'inventeur du web en 1990. A la question de Pierre Ruetschi, journaliste au quotidien La Tribune de Genève: «Sept ans plus tard, êtes-vous satisfait de la façon dont le web a évolué?», il répond en décembre 1997 que, s'il est heureux de la richesse et de la variété de l'information disponible, le web n'a pas encore la puissance prévue dans sa conception d'origine. Il aimerait «que le web soit plus interactif, que les gens puissent créer de l'information ensemble», et pas seulement consommer celle qui leur est proposée. Le web doit devenir «un média de collaboration, un monde de connaissance que nous partageons».

Son souhait commence à se concrétiser quelque sept années plus tard, en 2004, avec ce qu'on appelle le web 2.0. La paternité de l'expression «web 2.0» revient d'ailleurs à un éditeur, Tim O'Reilly, fondateur des éditions O'Reilly Media, qui utilise cette expression pour la première fois en 2004 comme titre d'une série de conférences qu'il est en train d'organiser. Désormais, le web ne vise plus seulement à utiliser l'information, mais il incite aussi les usagers à échanger et collaborer en ligne, sur des blogs, des wikis, des sites sociaux ou des encyclopédies coopératives comme Wikipédia et Citizendium.

Un enjeu tout aussi important est l'accessibilité de l'internet pour tous. Mis en ligne en septembre 2000 par l'association du même nom, le site Handicapzéro devient en février 2003 un portail généraliste offrant un accès adapté à l'information pour les Francophones ayant un problème visuel, à savoir plus de 10% de la population. Le portail offre des informations dans nombre de domaines: actualités, programmes de télévision, météo, santé, emploi, consommation, loisirs, sports, téléphonie, etc. Les personnes aveugles peuvent accéder au site au moyen d'une plage braille ou d'une synthèse vocale. Les personnes malvoyantes peuvent paramétrer sur la page d'accueil la taille et la police des caractères ainsi que la couleur du fond d'écran pour une navigation confortable. Les personnes voyantes peuvent correspondre en braille avec des aveugles par le biais du site.

En octobre 2006, le portail adopte une nouvelle présentation en enrichissant encore son contenu, en adoptant une navigation plus intuitive pour la page d'accueil, en proposant des raccourcis de clavier, en offrant un service amélioré pour l'affichage «confort de lecture», etc. Plus de 2 millions de visiteurs utilisent les services du portail en 2006. Handicapzéro entend ainsi démontrer «que, sous réserve du respect de certaines règles élémentaires, l'internet peut devenir enfin un espace de liberté pour tous».

Un autre enjeu est l'infrastructure de l'internet. La connexion au réseau est désormais plus facile, avec la DSL, le câble ou la fibre optique, tout comme les technologies WiFi pour un secteur géographique limité et WiMAX pour un secteur géographique étendu. Jean-Paul, webmestre du site hypermédia cotres.net, résume la situation en janvier 2007: «J'ai l'impression que nous vivons une période "flottante", entre les temps héroïques, où il s'agissait d'avancer en attendant que la technologie nous rattrape, et le futur, où le très haut débit va libérer les forces qui commencent à bouger, pour l'instant dans les seuls jeux.»

L'internet du futur pourrait être un réseau pervasif permettant de se connecter en tout lieu et à tout moment sur tout type d'appareil à travers un réseau unique et omniprésent. Le concept de réseau pervasif est développé par Rafi Haladjian, fondateur de la société Ozone. Comme expliqué sur le site web de la société en 2007, «la nouvelle vague touchera notre monde physique, notre environnement réel, notre vie quotidienne dans tous les instants. Nous n'accéderons plus au réseau, nous l'habiterons. Les composantes futures de ce réseau (parties filiaires, parties non filiaires, opérateurs) seront transparentes à l'utilisateur final. Il sera toujours ouvert, assurant une permanence de la connexion en tout lieu. Il sera également agnostique en terme d'application(s), puisque fondé sur les protocoles mêmes de l'internet.»

Pierre Schweitzer, inventeur du projet @folio, une tablette de lecture nomade, écrit en décembre 2006: «La chance qu'on a tous est de vivre là, ici et maintenant cette transformation fantastique. Quand je suis né en 1963, les ordinateurs avaient comme mémoire quelques pages de caractères à peine. Aujourd'hui, mon baladeur de musique pourrait contenir des milliards de pages, une vraie bibliothèque de quartier. Demain, par l'effet conjugué de la loi de Moore et de l'omniprésence des réseaux, l'accès instantané aux oeuvres et aux savoirs sera de mise. Le support de stockage lui-même n'aura plus beaucoup d'intérêt. Seules importeront les commodités fonctionnelles d'usage et la poétique de ces objets.»

Fondateur du Projet Gutenberg en 1971, Michael Hart précise souvent dans ses écrits que, si Gutenberg a permis à chacun d'avoir ses propres livres - jusque-là réservés à une élite -, le Projet Gutenberg permet à chacun d'avoir une bibliothèque complète - jusque-là réservée à la collectivité -, sur un support qu'on peut glisser dans sa poche, le support optimal actuel étant la clé USB. Le Projet Gutenberg compte plus de 33.000 livres numériques en octobre 2010, soit la taille d'une bibliothèque publique de quartier, mais cette fois disponible sur le web et indéfiniment reproductible.

Le web est aussi une formidable aventure. Selon les termes mêmes de Tim Berners-Lee, son inventeur, «le rêve derrière le web est un espace d'information commun dans lequel nous communiquons en partageant l'information. Son universalité est essentielle, à savoir le fait qu'un lien hypertexte puisse pointer sur quoi que ce soit, quelque chose de personnel, de local ou de global, aussi bien une ébauche qu'une réalisation très sophistiquée. Deuxième partie de ce rêve, le web deviendrait d'une utilisation tellement courante qu'il serait un miroir réaliste (sinon la principale incarnation) de la manière dont nous travaillons, jouons et nouons des relations sociales. Une fois que ces interactions seraient en ligne, nous pourrions utiliser nos ordinateurs pour nous aider à les analyser, donner un sens à ce que nous faisons, et voir comment chacun trouve sa place et comment nous pouvons mieux travailler ensemble.» (extrait de son essai The World Wide Web: A very short personal history (Le World Wide Web: une très courte histoire personnelle), daté d'avril 1998)

Quinze ans après la création du web, le magazine Wired constate dans son numéro d'août 2005 que «moins de la moitié du web est commercial, le reste fonctionne avec la passion». Quant à l'internet, d'après le quotidien Le Monde du 19 août 2005, «ses trois pouvoirs - l'ubiquité, la variété et l'interactivité - rendent son potentiel d'usages quasi infini».

Le futur sera-t-il le cyberespace décrit en 1994 par Timothy Leary, philosophe, dans son livre Chaos et cyberculture? «Toute l'information du monde est à l'intérieur [NDLR: de gigantesques bases de données]. Et grâce au cyberespace, tout le monde peut y avoir accès. Tous les signaux humains contenus jusque-là dans les livres ont été numérisés. Ils sont enregistrés et disponibles dans ces banques de données, sans compter tous les tableaux, tous les films, toutes les émissions de télé, tout, absolument tout.»

Nous n'en sommes pas encore là. Mais, en 2010, sur les 30 millions de livres du domaine public présents dans les bibliothèques (sans compter les différentes éditions), 10 millions de livres seraient déjà librement disponibles sur l'internet.

Libraire, éditeur puis consultant en édition électronique, Nicolas Pewny voit «le livre numérique du futur comme un "ouvrage total" réunissant textes, sons, images, vidéo, interactivité: une nouvelle manière de concevoir et d'écrire et de lire, peut-être sur un livre unique, sans cesse renouvelable, qui contiendrait tout ce qu'on a lu, unique et multiple compagnon».

Si nous avons maintenant Gallica, le Projet Gutenberg, l'Internet Archive et Google Books pour lire des livres, Wikipédia pour nous documenter et Facebook et Twitter pour communiquer, un point particulièrement intéressant semble être la possibilité - encore à l'étude - de la traduction simultanée du même livre dans de nombreuses langues, même si la traduction automatique reste encore à améliorer.

Rien ne remplacera une traduction par un traducteur littéraire professionnel, bien sûr, mais ce serait un premier pas pour ceux qui souhaiteraient découvrir de nouvelles oeuvres sans en connaître la langue, avant de recruter ensuite un traducteur littéraire professionnel pour proposer une traduction de qualité. C'est aussi l'assurance d'un vaste débat sur les avantages et les limites de la traduction automatique, un débat entamé dans les années 1990 et qui n'est pas prêt d'être clos.

Sans nul doute, nous continuerons à vivre des années passionnantes, qui ne seront pas seulement marquées par l'iPad et ses successeurs ou encore le (véritable) papier électronique enfin sorti des éprouvettes des chercheurs, mais qui verront aussi une imbrication plus grande des technologies du livre avec celles des langues, un sujet auquel l'auteure pense désormais se consacrer.

Mais, qu'il soit un volume imprimé ou un fichier numérique, le livre est d'abord un ensemble de mots émanant d'une personne voulant communiquer ses pensées, ses sentiments ou son savoir à large échelle. Souvent appelé le père de l'internet parce que co-inventeur en 1974 des protocoles du réseau, Vinton Cerf aime à rappeler que l'internet relie moins des ordinateurs que des personnes et des idées. Ce fut le cas pour ce livre. Merci à tous - professionnels du livre et apparentés - pour leur participation, pour leur temps et pour leur amitié.

CHRONOLOGIE

[Chaque ligne débute par l'année ou bien l'année/mois. Par exemple, 1971/07 signifie juillet 1971.]

1968: Le code ASCII est le premier système d'encodage informatique. 1971/07: Le Projet Gutenberg est la première bibliothèque numérique. 1974: L'internet fait ses débuts. 1977: L'UNIMARC est créé en tant que format bibliographique commun. 1983: L'internet prend son envol. 1984: Le copyleft est institué pour les logiciels puis pour toute oeuvre de création. 1984: Psion lance l'agenda électronique Psion Organiser. 1986: Franklin lance le premier dictionnaire consultable sur une machine de poche. 1990: Le web fait ses débuts. 1991/01: L'Unicode est un système d'encodage pour toutes les langues. 1993/01: L'Online Books Page est le premier répertoire de livres en accès libre. 1993/06: Adobe lance le format PDF et l'Acrobat Reader. 1993/07: L'E-zine-list recense les zines électroniques. 1993/11: Mosaic est le premier logiciel de navigation sur le web. 1994/02: Le premier site de bibliothèque est mis en ligne. 1994: La NAP met des livres en accès libre sur son site pour augmenter leurs ventes imprimées. 1995/07: Amazon.com est la première grande librairie en ligne. 1995: La grande presse se met en ligne. 1996/03: Le Palm Pilot est le premier assistant personnel (PDA). 1996/04: L'Internet Archive est créée pour archiver le web. 1996/07: CyLibris est le pionnier francophone de l'édition électronique. 1996/10: Le projet @folio travaille à un baladeur de textes «ouvert». 1996: On se penche sur de nouvelles méthodes d'enseignement. 1997: L'édition électronique commence à se généraliser. 1997/01: La convergence multimédia est le sujet d'un colloque. 1997/04: E Ink développe une technologie d'encre électronique. 1997/10: La Bibliothèque nationale de France lance Gallica, sa bibliothèque numérique. 1997/12: AltaVista lance son logiciel de traduction automatique Babel Fish. 1998/05: Les éditions 00h00 vendent des livres numériques. 1999: Des bibliothécaires deviennent cyberthécaires. 1999: Certains auteurs se mettent au numérique. 1999: WordReference.com propose des dictionnaires bilingues gratuits. 1999: Le Rocket eBook est la première tablette de lecture. 1999/09: Le format Open eBook (OeB) est un standard de livre numérique. 1999/12: WebEncyclo est la première grande encyclopédie francophone en ligne. 1999/12: Britannica.com est la première grande encyclopédie anglophone en ligne. 2000/01: Le Million Book Project veut proposer un million de livres sur le web. 2000/03: Mobipocket se consacre aux livres numériques pour assistant personnel. 2000/04: Microsoft lance son assistant personnel Pocket PC. 2000/07: La moitié des usagers de l'internet est non anglophone. 2000/07: Stephen King auto-publie un roman en ligne. 2000/08: Microsoft lance le Pocket PC (PDA) et le Microsoft Reader. 2000/09: Le Grand dictionnaire terminologique (GDT) est bilingue français-anglais. 2000/09: La librairie Numilog se consacre aux livres numériques. 2000/09: Le portail Handicapzéro démontre que l'internet est pour tous. 2000/10: Distributed Proofreaders numérise les livres du domaine public. 2000/10: La Public Library of Science envisage des revues scientifiques en ligne gratuites. 2000/10: Franklin lance l'eBookMan, un assistant personnel multimédia. 2000/10: Gemstar lance ses tablettes de lecture Gemstar eBook. 2000/11: La version numérisée de la Bible de Gutenberg est disponible. 2001/01: Wikipédia est la première grande encyclopédie collaborative gratuite. 2001/01: Le Cybook est la première tablette de lecture européenne. 2001: La licence Creative Commons adapte le droit d'auteur au web. 2001: Le Nokia 9210 est le premier smartphone. 2003/09: Le matériel pédagogique des cours du MIT est à la disposition de tous. 2004/01: Le Projet Gutenberg Europe est multilingue. 2004/10: Google lance Google Print pour le rebaptiser ensuite Google Books. 2005/04: Amazon.com rachète la société Mobipocket. 2005/10: L'Open Content Alliance lance une bibliothèque numérique planétaire et publique. 2006/08: Le catalogue collectif mondial WorldCat lance une version gratuite sur le web. 2006/10: Microsoft lance Live Search Books mais l'abandonne ensuite. 2006/10: Sony lance sa tablette de lecture Sony Reader. 2007/03: Citizendium est une encyclopédie en ligne collaborative «fiable». 2007/03: IATE est la base terminologique multilingue européenne. 2007/05: L'Encyclopedia of Life compte répertorier toutes les espèces végétales et animales. 2007/11: Amazon.com lance sa tablette de lecture Kindle. 2008/05: Numilog devient une filiale d'Hachette Livre. 2008/10: Google Books propose un accord aux associations d'auteurs et d'éditeurs. 2008/11: Europeana est la bibliothèque numérique européenne. 2010/04: Apple lance l'iPad, sa propre tablette.

REMERCIEMENTS

Ce livre doit beaucoup à toutes les personnes ayant accepté de répondre à mes questions au fil des ans. Certains entretiens sont disponibles en ligne sur le Net des études françaises (NEF) <www.etudes- francaises.net/entretiens/>, Université de Toronto, Canada. D'autres entretiens ont été directement inclus dans ce livre ou alors ils ont inspiré des idées développées dans ces pages.

Merci à Nicolas Ancion, Alex Andrachmes, Guy Antoine, Silvaine Arabo,
Arlette Attali, Marc Autret, Isabelle Aveline, Jean-Pierre Balpe,
Emmanuel Barthe, Robert Beard, Michael Behrens, Michel Benoît, Guy
Bertrand, Olivier Bogros, Christian Boitet, Bernard Boudic, Bakayoko
Bourahima, Marie-Aude Bourson, Lucie de Boutiny, Anne-Cécile
Brandenbourger, Alain Bron, Patrice Cailleaud, Tyler Chambers, Pascal
Chartier, Richard Chotin, Alain Clavet, Jean-Pierre Cloutier, Jacques
Coubard, Luc Dall'Armellina, Kushal Dave, Cynthia Delisle, Émilie
Devriendt, Bruno Didier, Catherine Domain, Helen Dry, Bill Dunlap,
Pierre-Noël Favennec, Gérard Fourestier, Pierre François Gagnon,
Olivier Gainon, Jacques Gauchey, Raymond Godefroy, Muriel Goiran,
Marcel Grangier, Barbara Grimes, Michael Hart, Roberto Hernández
Montoya, Randy Hobler, Eduard Hovy, Christiane Jadelot, Gérard Jean-
François, Jean-Paul, Anne-Bénédicte Joly, Brian King, Geoffrey
Kingscott, Steven Krauwer, Gaëlle Lacaze, Michel Landaret, Hélène
Larroche, Pierre Le Loarer, Claire Le Parco, Annie Le Saux, Fabrice
Lhomme, Philippe Loubière, Pierre Magnenat, Xavier Malbreil, Alain
Marchiset, Maria Victoria Marinetti, Michael Martin, Tim McKenna,
Emmanuel Ménard, Yoshi Mikami, Jacky Minier, Jean-Philippe Mouton, John
Mark Ockerbloom, Caoimhín Ó Donnaíle, Jacques Pataillot, Alain Patez,
Nicolas Pewny, Marie-Joseph Pierre, Hervé Ponsot, Olivier Pujol, Anissa
Rachef, Peter Raggett, Patrick Rebollar, Philippe Renaut, Jean-Baptiste
Rey, Philippe Rivière, Blaise Rosnay, Bruno de Sa Moreira, Pierre
Schweitzer, Henk Slettenhaar, Murray Suid, June Thompson, Zina Tucsnak,
François Vadrot, Christian Vandendorpe, Robert Ware, Russon Wooldridge
et Denis Zwirn.

Copyright © 2010 Marie Lebert. Tous droits réservés.

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