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Le specule des pecheurs
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Cy commance le specule des pecheurs fait et compilé pour le salut des ames sur pluseurs divines escriptures des saincts docteurs par frere jehan de castel religieux de l'ordre saint benoist et croniqueur de france.
Et pource que pluseurs profons clers ne se delectent pas a oyr choses faites et versifiees toutes en françois ou en prose. ne aussi pluseurs gens simples lais a escouter livres en latin tant en proses comme en mettres affin que les clers et les lais soient aucunement contans ledit specule a esté fait et composé tant en latin comme en françois mixtionné en pluseurs lieux a la requeste de reverend pere en dieu messire jehan du bellay noble homme evesque de poitiers et abbé de saint florent près de saulmur au dyocese d'angiers l'an de grace mil quatre Cens .lxviii
Le premier chappitre du premier livre
Sens sans conseil et aussi sans prudence
Ce dit moyse utinam saperent
En oultre plus dit pour l'intelligence
Du temps futur et intelligerent
Novissima atque providerent
Pour ung chacun de bien faire advertir
Helas pourtant vueillons nous convertir
Considerons nostre fragilité
Et regardons nous jours qui sont si cours
Las nous voions guerre et mortalité
Venir vers nous las plus tost que le cours
Si tost aller et n'y voulons attendre
Las pensons y pour dieu sans plus attendre
O sentence de dieu salut portante
Par la quelle nous est instruction
De sapience et aussi confortante
De contenence humble amonition
De divine grace acquisition
Exaulcement aussi de penitence
Semblablement mirouer de providence
O de jesus nostre doulx createur
Et plasmateur miranda bonitas
O de jesus nostre vray curateur
Et redempteur maxima caritas
O du sauveur dulcis benignitas
Qui ses servans de mort a vie a mis
Nous sommes serfs mais a dieu bien servir
Le temps passé feusmes trop negligens
Dont la grace n'avons peu desservir
De la quelle sommes tres indigens
Helas pourtant soions plus diligens
Le temps futur tant que serons en vie
Et de bien faire aions tousjours envie
Mauvais sommes et desservi avons
Mort plus que vie et si cognoissons bien
Que nous mourrons et l'eure ne savons
Ne de nous jours le nombre aussi combien
Et toutesfois pour nous mouvoir a bien
Qui a tout mal est tousjours different
Dieu nous conseille utinam saperent
Qui est l'omme s'il a entendement
Qui ne se doyve en cueur trop resjouir
Quant il congnoist que de son sauvement
L'advise dieu comme icy peut oyr
Pour le fayre du royaume jouir
Lassus sans fin que ceulx possideront
Qui precepta sua bien garderont
Pourtant sur tout les mandemans gardons
Studiose atque impleamus
De les briser bien nous contregardons
Sed devote ea diligamus
Et a yceulx hic obediamus
Ou aultrement saint pol dit que nous sommes
Miserables sur tous les meschans hommes
Mais pour le mettre a execution
Il nous convient premierement savoir
Que nous devons de toute affection
Sur toute rien dieu en grant crainte avoir
Nostre prochain amer sans decevoir
Pareillement ce qui peut a dieu plaire
Et haïr tout ce qu'il luy peut desplaire
Or acomplir ceci on ne pourroit
Aucunement sans la grace acquerir
Mais qui sa grace acquerir bien vourroit
De cueur contrit le fauldroit requerir
Bien pur et net pour le moyen querir
D'avoir son aide et son conseil ensemble
Car par ces points nous l'aurons se me semble
Helas pourtant en estat nous mettons
En requerant a dieu misericorde
Et desoresmais chose ne commetons
Dont nous soions envers luy en discorde
Mais ung chacun de moyse recorde
Le saint prophete homme en dieu reverend
Ceste leçon utinam saperent
Le second chappitre
O chers freres queso que legitis
Retenés bien et intelligite
Et inquantum deum diligitis
Oblivisci hec verba nolite
Car qui bien pense en ceste auctorité
Il mect remede en son temps advenir
Par quoy encore a bien peut parvenir
Car pour certain hujus sentencie
Supradicte consideratio
Est medela false malicie
Superbie atque destructio
Similiter evacuatio
De venteté qui n'est que vanité
Parfection aussi de sanctité
Luxurieque effugatio
Et d'envie c'est toute extinction
Discipline atque constructio
Et de salut c'est preparation
Et pourtant dieu pour la salvation
Des negligens ut bonum facerent
Dit a moyse utinam saperent
Heu heu quam pauci sunt au monde
Qui sapiant de dieu ceste sentence
Ne qui tiennent leur conscience munde
Ou qui portent de leurs maulx penitence
Ne qui facent auchune resistence
Contre la chair le monde et l'annemi
S'aucuns le font ce n'est pas a demy
Dieu que peu sont qui aient congnoissance
Que leur chair soit cendre et corruption
Ne qui pensent en leur ville naissance
N'a leur pechés n'a leur salvation
Encore moins qui recordation
Aient d'enfer ne de leur mort soudainne
Tant les deceoit ceste vie mondainne
Pourtant dieu veult que tousjours en prudence
Soit des pecheurs le cueur et la pensee
Et pource affin que par la providence
Sa majesté ne feust plus offensee
Par malice souuant d'eulx pourpensee
Et qu'a leur fin bene concuperent
Dire leur fist utinam saperent
Las et pourtant chers freres concevés
Ceste sentence et ne l'oubliés pas
Car vous sçavés et bien aparcevés
Que ce monde n'est que ung petit trespas
Ou nous courons trop plus tost que le pas
Sans y mettre provision future
Las pensons y comme a dit l'escripture
Trescher frere ceste admonition
Cum studio de cueur ferme et estable
Et par grande deliberation
Conceoy souvant qu'elle est proufitable
Tesmoing moyse homme tant veritable
A tout pecheur qui bonne fin veult faire
Et ses briefs jours en bonne euvre parfaire
Car tout ainsi comme l'audeur d'encens
S'il n'est au feu tu ne sens propement
Ne plus ne moins des saincts escrips ton sens
La sentence ne conceoit nullement
Nisi primo sapias clerement
Intelligas et sepe studeas
Novissima atque provideas
Ecce frater carissime tibi
Tria in hec ponuntur cest science
Premierement que ponitur ibi
Qui procede de vraye sapience
Intelligence et aussi providence
Ce sont trois temps que savoir te convient
Le temps passé le present et qui vient
Pourtant dieu veult cher frere que tu saches
Que la vie presente est fugitive
Pleine d'orgueil d'envie et d'autres taches
Toute pollue umbreuse et transitive
D'avarice corrumpue et chetive
Dont l'antree est plourable et douloureuse
Et l'issue terrible et langoureuse
Pource de tant que plus aparcevons
Ce perilleux monde estre miserable
De tant plus tost contempner le devons
Comme une chose orde et vituperable
Pour acquerir le païs pardurable
Lassus sans fin ou dieu tient son empire
Et ou nostre ame et nostre cueur suspire
Dieu veult aussi que tu penses comment
Tu es fragile et povre de nature
Et que du ventre yssis premierement
De ta mere trespovre creature
La quelle mere est terre et porriture
Et en la fin retourneras en terre
Ou y fauldra que ton corps on enterre
En la misere et povreté aussi
De ce monde tu entras devenu
Pleurant tes jours et aussi tout ainsi
Retourneras comme tu es venu
Puis que de eve naistre il t'a convenu
Qui fut creee en paradis terrestre
Et nee en terre il te fauldra terre estre
Doncques tes jours comme est dit lugendo
In hunc mundum nudus introisti
Et en labour ad mortem currendo
De jour en jour transis et transisti
Et non obtant que dives fuisti
Et habeas adhuc divitias
Quid valet hoc puis que a mourir cy as
Substancia terrena comparee
Perpetue et eterne vice
La quelle vie au peuple est preparee
Qui a bien fait et tout mal evité
Lequel de dieu est lassus invité
Ubi est pax et summum gaudium
Est charge et fés et non subsidium
Comparata vita temporalis
A l'eternelle es cieux felicité
Sine fine promissa non malis
Sed electis qui ont adversité
Aux quelz promise en la haulte cité
La couronne dieu qui sans fin vie a
Magis mors est dicenca quam vita
Le troisiesme chappitre
Entens aussi car comme en la valee
De misere tu languis ung pou cy
Toute ta vie en decours tost allee
Tu es en peine en douleur et soucy
Malade ou vain de vertus povre aussi
Plein de peché du corps et de l'ame ort
En attendant prochainement la mort
Et après mort mangé seras de vers
Pource tousjours vive deo gratus
Et nuyt et jour en recordant ces vers
Toti mundo esto tumulatus
Mundus corde transire paratus
Monstrant exemple omnibus tibique
Car mort t'atant nuyt et jour ubique
O comme eureux l'omme et benoist sera
Et son ame plaisant a jesus christ
Qui nuyt et jour en son cueur pensera
Les proverbes qui sont cy en escript
Bien est conseillé celuy qui escript
Intelligit ces choses et videt
Novissima sapitque providet
Frater ergo time et diligas
Deum tuum de cueur pur et parfait
Quid sapias et quid intelligas
Desoresmais advisé en ton fait
Ou aultrement tu es homme defait
Nisi serves supradicta dicta
Que dieu pour nous a moyse escript a
Restat ergo modo providere
Novissima par le conseil du sage
Qui nos in hoc voluit docere
En ses escrips disant en son langage
Que nous devons remambrer en courage
Tousjours la fin aussi en tous nous euvres
Pource cher frere il fault qu'en cecy euvres
Et par ainsi tu ne pecheras point
Ineternum. par quoy sauvé seras
Mais encores scavoir te fault ung point
Par le quel point sauvement tu auras
C'est qu'a present tu t'apareilleras
Disant je suis tout prest et conseillé
D'estre au conseil de dieu appareillé.
Videlicet ut pacis capiam
A cetero le chemin et la voye
Le temps passé etiam sapiam
Et le present intelligam et voye
Novissima pariter je pourvoye
Que nous devons le temps futur entendre
Si qu'après mort l'ame a dieu puisse rendre
Sed dic michi que sunt novissima
Providere nisi terribilis
Illa hora et amarissima
In qua tua anima labilis
Pauperrima et miserabilis
Hors de ton corps tramblant vouldra saillir
Quant les mauvais la vouldront assaillir
Croy moy doncques toy qui peus ceci lisre
Car se tu as consideration
Du temps futur mieulx ameras elisre
D'y pourveoir pour ta salvation
Que du monde la domination
Car comme lon dit la fin tousjours couronne
Mais qui n'y pense il n'aura ja couronne
Frater ergo si bene saperes
Que dei sunt tousjours dieu doubteroies
Semblablement si intelligeres
Que mundi sunt les cieux desireroies
Et en après se tu consideroies
Que c'est d'enfer ta fin provideres
Et grant horreur en ton cueur haberes
Le quatriesme chappitre
Qui est celuy de tous tes chers amis
Et bons parens qui viendra par effort
Pour toy aider a ta mort cum armis
Et gladiis pour te donner confort
Certainement tu n'as parent si fort
N'amy aussi ne verras a quelque heure
De ton trespas qui t'aide ou te sequeure
Deça dela assés regarderas
Vers les hommes quant tu vouldras mourir
S'ilz t'aideront mais tu ne trouveras
Parent n'amy qui vueille a toy courir
Ne qui te puisse aider ne secourir
Mais ton refuge adoncques seulement
Sera sans aultre. A dieu totellement.
Cher frere ergo pense quo timore
Est ce bon dieu ubique timendus
Repense aussi tecum cum amore
Est ce seigneur semper diligendus
Quo honore aussi venerandus
Qui en la mort seul donne auxilium
Et paradis post hoc exilium
Reduc ergo et remembre en tes fais
L'eure et le jour souvant que tu mourras
Et des mesfais que piessa tu as fais
Confesse toy le plus tost que pourras
Car pas icy tousjours ne demourras
Pource avant mort fais icy tant de bien
Qu'après trespas ton ame voise bien
Hujusmodi consideratio
Certainement conceoit contriction
De cueur contrit venit compunctio
Compunctio prent contemplation
Et tout selon la bonne affection
Qu'on a en dieu par seure confience
De son aide sa bonté et clemence
Frere dy moy qui est la chose au monde
Sur tous les ars qui plus facillement
Face tenir en conscience munde
Homme et femme comme avoir pensement
Qu'on devient terre après trespassement
Memoire aussi de sa corruption
Et de la mort consideration
Qui bien y pense il n'est iniquité
Qu'il ne boutet tout hors de son courage
Et qui ne vive en toute humilité
Et saincteté tout le temps de son aage
Jusqu'a la mort sans faire a nul dommage
Par la quelle pour tout conclure en somme
Et en effect est fait homme non homme
Hoc est quando ipse egrotescit
Egrotando tousjours en acroisance
Monte son mal et lors expavescit
L'omme pecheur tant qu'il pert cognoissance
Et tellement que sa force et puissance
Et sa vertu commance a decliner
Ainsi se veoit en declinant finer
Et a ceste heure horrible et perilleuse
Que homme et femme qui sont vivent nescit
Advient chose terrible et merveilleuse
C'est que le cueur pleure et contremescit
Le vis palist facies nigrescit
De plus en plus les yeulx tenebrescunt
Tournent en teste et aures surdescunt
En oultre plus la teste constupescit
Le sens default et de riens ne souvient
Le nes sent mal virtus exarescit
Langue et bouche begue et muet devient
La chair flatrist au cueur fraieur advient
Et adoncques carnis pulchritudo
Efficitur fetor et putredo
Et sic homo in vermem vertitur
Dedans la fosse ou on le fait descendre
Et ibidem statim resolvitur
Comme dit est en porriture et cendre
Vela fin que nous devons attendre
Nous savons bien que nous trespasserons
Et ignorons quant au trespas serons
Ecce frater satis spectaculum
Horribile et trop espoventable
Sed est nimis utile speculum
Qui bien s'i mire et a tous proufitable
Pource pensons a ce jour redoubtable
Et en vers dieu faisons si bon devoir
Qu'en bon estat nous vuelle recevoir
Quia nulla artis medicina
Sic superat d'orgueil le mauvais vice
Nec revocat sic ulla doctrina
A peccato nec sic vincit malice
Nec extinguit luxure n'avarice
Nec sic calcat mundum la vaine gloire
Comme d'avoir souvent de mort memoire
Le cinquiesme chappitre
Est il chose comme homme mort plus ville
Du quel le corps nunquam permittitur
Estre en maison troys jours en champs ou ville
Pour la pueur mais hors projicitur
Et au parfont de terre absconditur
Comme charougne a la terre donnee
Et vermibus viande abandonnee
Erubescat igitur l'orguilleux
D'elacion plenus et cecatus
Et timeat dieu qui est merveilleux
Le maleureux pecheur de ire inflatus
D'impatience etiam fedatus
Au quel plus plaist de platon la science
Que du sage la vraie sapience
Plus prend plaisir a recorder les fables
Des poetes que la sainte doctrine
Du saint apostre et des saints inefables
Donc la terre l'escripture enlumine
En delaissant la sainte loy divine
Et aime mieulx la loy mondainne eslire
Que recorder les faictz des saints et lire
Le siziesme chappitre
Ex simili studio les mondains
Scientiam semblable a eulx convient
C'est qu'ilz cueillent tant sont folz et soudains
Fueilles assez mais les fruitz ne receoivent
Non virtutes sed verba apparceoivent
De parolles ilz battent l'air souvent
Et proferunt leurs parolles au vent
Ilz langaigent et en langaigent souvent
Par ventence sans l'escripture ensuivre
Leur voix en l'air tant que l'air en resonne
Et de ceulx dit le psalmiste en son livre
Turbati sunt et moti sunt comme yvre
Leur sapience est toute devouree
Car d'eux n'est point science savouree
Comme ung homme yvre ignore ce qu'il fait
Et ou il va ainsi semblablement
Les mondains clers folz seculiers leur fait
Ne congnoissent au monde auchunement
Tant est leur sens et leur entendement
Mis et bouté en la mondanité
Et leur science en folle vanité
Scientiam satis multiplicant
Les grans livres et volumes ilz hument
Et devorent sed male applicant
Car en leurs sens se conturbent et fument
Et d'eulx maismes si grant orgueil presument
Que leur science ilz ne pensent n'entendent
Jusqu'a la mort la fin a quoy ilz tendent
Et par ainsi les mondains clers s'abusent
Qui de leur fin ne pensent ou font conte
Et de leur sens et science mal usent
Par quoy des siens dieu lassus ne les conte
Et de telz clers saint bernard nous raconte
Et dit moult sont qui bien science acquerent
Mais pou en sont qui conscience querent
O utinam telz clers bien savourassent
Entendissent ces choses et pourveussent
Et nuyt et jour le temps considerassent
Passé present et futur comme ilz deussent
S'ainsi estoit meilleurs qu'ilz ne sont feussent
Mox percussi divino amore
Preterriti etiam timore
Et de l'estude aussi de vanité
A l'estude de verité viendroient
De l'estude de curiosité
A l'estude d'umilité iroient
Et par ainsi le chemin ilz prendroient
Scientie et sapientie
En delaissant viam stulticie
De l'escolle luxure et pravité
Ad studium irent bonitatis
Et de l'estude aussi d'iniquité
Ad studium irent sanctitatis
Domo domum irent discipline
Car utile est qu'on soi discipline
Comme au psaultier par david recité
Au second pseaulme est ainsi qu'on peut lire
Le quel david dit apprehendite
Disciplinam affin que noustre sire
Encontre vous auchunement ne se ire
Et perissiés hors de la juste voie
Pour prendre celle en la quelle on forvoye
O quam illa terrible et redoutable
Sentencia est a ceulx qui feront
La voulenté de leur chair deletable
Et en ce monde affligés ne seront
Qui etiam non apprehenderunt
Disciplinam dont moyse nous dit
Qu'ilz periront comme peuple maudit
Notanda sunt tresattentivement
Ista verba comment l'ame sera
Du tout pardue après trespassement
Qui devant mort ne la corrigera
Affligera ou disciplinera
C'est assavoir per correctionem
Morum cordisque contrictionem
Et ideo qui non susceperit
Discipline et penitentie
Modo tempus dela non poterit
Trouver n'avoir lieu indulgentie
Apud deum nec tempus gratie
Car qui pourra vivant et ne vourra
Quant il vourra mourant il ne pourra
Quapropter nunc pecheur plain de peché
Charougne a vers que les vers point ne lessent
Corps orguilleux de tout mal enteché
Dont nuyt et jour les vermines se paissent
Qui s'engendrent de toimesmes et naissent
Vanité gette et d'orgueil te repren
Luxure fuy et discipline pren
Ne pereas de la voye salvable
Qu'ont tenu ceulx qui sunt in superis
Et regarde comme homme resonnable
Quid fuisti quid es et quid eris
Videbis quod modicum cineris
Tu fus tu es et après mort seras
Ce sauras tu quant tu trespasseras
Le septiesme chappitre
Se tu penses que feras et com fus
Ante ortum et après naissement
Jusqu'a ta fin te trouveras confus
Tant y verras grant esbaïssement
Se tu du tout metz en ton pensement
Comme après mort seras et deviendras
Pour povre et vil tousjours tu te tiendras
Une aultre chose encore a penser as
Quod non pensas necque pensavisti
C'est q'ung temps fut in quo tu non eras
Et postea in hoc mundo tristi
Ou maternel ventre fait fuisti
De matiere orde et cum putredine
Menstruali nutritus sanguine
Et en ce ventre ou tant vil habitoies
Ante ortum d'une orde peau qu'on nomme
Secundina envelopé estoies
La quelle peau vest au ventre tout homme
Qui vient d'adam qui mordit en la pomme
Ainsi pour vray vestu et aourné
Vins en ce monde en pleurs et paour né
Nec memores quomodo sit vilis
Ta naissance miserable et fragile
Et ta nature abhominabilis
Homme mortel meschant homme et debile
Mais que te vault estre expert et abile
Ne ton angin ne ta subtillité
Quant rien ne vient a fruit ne utillité
Rien ne te vault l'entendement parfont
Raison aussi ne le doit pas permettre
Car vraiement quatre choses te font
Frater quid es du tout en oubli mettre
Comme escript est cy dessoubz en beau mettre
C'est assavoir forma mundi favor
Opes atque juvenilis fervor
Hec quatuor de toy abstulerunt
La congnoissance ibi totaliter
Et de ton cueur les yeulx velaverunt
Et clauserunt etiam taliter
Que tu ne peus les choses firmiter
Suspicere qui sont celestielles
Tant est fiché aux choses temporelles
Quid est homo ex parte corporis
Vis tu ferre saint bernard nous afferme
Dicens homo est saccus stercoris
Viande a vers tresord et puant sperme
Conceu et fait de matiere et de germe
En tenebres au ventre de la mere
Dont la naissance est a la mere amere
Pour quoy est l'omme orgueilleux et pervers
Pour quoy monte homme en exaltation
Vita labor et tribulation
Nasci pena et mori necessaire
Puisque orgueil est a son ame adversaire
Homme orguilleux pour quoy te devestu
D'umilité qui tant est gracieuse
Cur impugnas pour quoy aussi ves tu
Ta chair pouldre de chose precieuse
Pour quoy mets tu chose delicieuse
Sur ta chair cendre en delictz trop nourrie
Puis qu'en terre sera bien tost pourrie
Le huytiesme chappitre
Robes de soye ou de fin drap d'or n'as
Vestu ta chair que a plaire hominibus
Et animam tuam non adornas
En ce monde bonis operibus
Nec decoras sanctis virtutibus
Qui est a dieu et ejus angelis
Presentanda post mortem in celis
Que ne fais tu en ce monde tandis
Que tu es vif ton ame a dieu plaisante
Cur animam tuam vilipendis
Et preponis ei ta chair puante
C'est grant abus et chose trop meschante
Que de souffrir la dame ancillari
Et ancillam aussi dominari
Et se du dictz non possum spernere
Istum mundum n'aussi semblablement
Carnem meam odio habere
Tant l'aime fort et naturellement
Je te demande homme d'entendement
Or me respon et assavoir mon dy
En quel lieu sont amatores mundi
Le .ix. chappitre
Qui nagaires bonne chere faisoient
Avecques nous en joye et en liesse
En grant honneur et en grant bruit estoient
N'a pas longc temps en pompe et en richesse
Or ont passé leur temps et leur jeunesse
Et d'eux au monde on n'a point de demeure
Fors que la cendre et les vers ne demeure
Ergo modo pense qui sont et furent
Hommes furent comme toy et regnerent
Semblablement ilz mangerent et burent
Ainsi que toy et rirent et jouerent
In bonisque dies suos menerent
De harpe aussi et d'aultre instrument dirent
Et in puncto es enfers descendirent
Ibi caro eorum vermibus
Est donnee se sont choses creables
Et leur ame pardela ignibus
Deputatur entre les mains des dyables
Jusques atant que leurs corps miserables
Et leur ame après le jugement
Soient en feu perpetuellement
Car pour certain tous ceulx qui en delices
In hoc mundo socii fuerunt
Et qui une amour conjoinct et lie en vices
Une peine mesme aussi souffreront
Certainement ceulx qui peccaverunt
Ensemble icy et sont en couple uniz
Seront dela d'une peine pugnis
Leur gloire icy que leur a proufité
Richesse aussi brevis leticia
Puisqu'en enfer sont en necessité
Que leur valut mundi potentia
Mala aussi concupiscentia
Grande famille et volupté charnelle
Puis que dela sont en peine eternelle
Ou est david et salomon le sage
Absalonque vultu mirabilis
Ou est sanson de force et de courage
Tant merveilleux dux invincibilis
Et alixandre incomparabilis
Aristote tules et sa loquence
Dont tant piteuse en fut la consequence
Tot presules et roys mundi hujus
Tot principum ducumque forcia
Mort mect au bas mort mect en la fin jus
Car contre mort trop peu de force y a
Tot proceres tot retro spacia
En ung moment omnia clauduntur
Revertuntur en terre et truduntur
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