Les espionnes à Paris: la vérité sur Mata-Hari, Marguerite Francillard, la femme du cimetière, les marraines, une grande vedette parisienne, la mort de Marussia
X
DEUX DANGEREUSES ESPIONNES
LA TRAHISON DANS LA TRAHISON.—CE QUE LES ALLEMANDS CHERCHAIENT
Murat nous avait été donné par Raymond Corbeau, dit Saab.
Ce singulier personnage—espion double nous l’avons dit—mérite d’être encadré. Mᵉ Corbeau—appelons-le ainsi pour une fois—était plus fort que le renard allemand et il le prouva.
Il avait déserté en novembre 1916, avait gagné la Suisse et s’était fait enrôler dans le service secret allemand.
—J’étais, dit-il, désigné par A. F. 94. Ce numéro m’avait été donné par la Rouquine de Fribourg qui m’avait pris en affection particulière, et m’avait confié des missions importantes à Anvers pour son amie et collègue Mlle Docktor.
Corbeau avait été arrêté par les autorités suisses le 2 mai 1917. A sa sortie de prison il s’était présenté au consulat allemand de Genève qui l’avait envoyé à l’école de Lorach. On l’interna pour la forme pendant quelque temps dans un camp de prisonniers, puis on le fit revenir en Suisse sous le faux nom de Saab.
En même temps qu’il entrait au service de l’espionnage allemand, Corbeau faisait des propositions au... service français, qui les acceptait.
IMPORTANTE MISSION
Kœniger, que nous connaissons déjà, avait chargé Corbeau de faire parvenir en France des mouchoirs préparés à l’encre invisible (nous en parlerons en traitant du service chimique) et d’obtenir des renseignements précis sur les points de chute.
Nous avons dit que les Allemands attachaient un grand prix à ces renseignements; ils ne négligeaient rien pour se les procurer.
De notre côté ce que nous cherchions à connaître surtout, c’étaient les espions ennemis; notre agent fut chargé par nous de recueillir plus particulièrement des informations sur la bande du café Amodru.
Corbeau dissimulait son double métier sous un prétendu commerce de platine qui était son paravent. Kœniger, soi-disant pour lui faciliter l’achat de ce métal précieux, le mit en rapport avec Cayer et Murat. Corbeau nous les signala aussitôt.
Quel était le rôle de Cayer? Extrêmement important. C’est lui qui, à l’aide de deux femmes, organisa la reconnaissance méthodique des points de chute à Paris.
En avril et en mai 1918 deux questions militaires préoccupaient le service allemand: l’arrivée des Américains et les effets des bombardements.
L’ennemi cherchait à savoir le nombre d’hommes que les Etats-Unis pouvaient débarquer et mettre en ligne, les transports qui devaient être utilisés par les Américains et les voies nouvelles construites entre les ports maritimes, Paris et le front.
L’autre question était l’état moral de la population parisienne qu’on bombardait jour et nuit avec les Berthas. Pour influencer le moral il fallait connaître exactement le point et l’heure précise de la chute des projectiles, et les effets produits.
C’est dans ce but que Murat avait été envoyé pour la cinquième fois à Paris. Mais comme il avait été arrêté à la frontière, Cayer avait résolu de le remplacer par deux femmes.
LES DEUX TRAITRESSES
Le 15 mai 1918 Yvonne Schadeck, coupeuse de chaussures, née à Aubervilliers en 1896, et Anne Garnier, femme Desjardins, repasseuse, arrivaient à Paris. Elles étaient nanties d’un sauf-conduit faux du commissaire de police de Plaisance. Elles furent immédiatement prises en filature, sur l’avis de l’agent qui nous les avait «données».
Et voici ce que firent ces deux femmes.
Anne Garnier se rendit d’abord place de la Nation, où l’on disait qu’un obus était tombé; elle erra sur les boulevards, télégraphia à sa sœur habitant Houilles qu’elle arriverait le soir, et se rendit à la gare du Nord pour interroger les permissionnaires.
Yvonne Schadeck, elle, voulut tout d’abord consulter une cartomancienne! Elle alla ensuite rue La Fayette pour essayer de rencontrer Charlot, ami de Guaspare, son amant.
Pendant les premiers temps, c’est autour des gares de l’Est et du Nord que les deux femmes portèrent leurs investigations. En arrivant des tranchées, les permissionnaires étaient très bavards et aimaient se retrouver sur «le Chemin des Dames».
A la gare régulatrice du Bourget, Anna et Yvonne firent connaissance d’un soldat nommé Rouleau, qui leur expliqua comment on prévenait les postes en cas d’alerte; il leur donna même son adresse: «Secteur 23, 9ᵉ territ., 9ᵉ Cie». Cette adresse servit à Yvonne Schadeck pour rester en correspondance avec le poilu sous le nom de Georgette.
Puis les femmes se rendirent à Noisy-le-Sec, et entreprirent les artilleurs.
Le lendemain deux alertes de gothas eurent lieu. Vite elles allèrent constater les dégâts: gare d’Orléans et station du métro Campo-Formio.
Elles étaient infatigables: l’après-midi elles retournèrent aux gares du Nord et de l’Est «voir les soldats», et—le comble du zèle—pour ne pas perdre de temps, elles prenaient leurs repas au bouillon Duval situé à côté de la gare.
Naturellement elles firent la connaissance de nombreux militaires avec lesquels elles passèrent de longues heures...
Entre temps Anna écrivait à sa mère: «On est bombardé. Mais il ne faut pas avoir peur. C’est la destinée.»
Le gros canon tonnait toujours. Un obus tomba rue Palestro, au coin du boulevard Sébastopol: elles se précipitèrent pour enregistrer les dégâts. Boum... On les arrêta!
Au moment où ces abominables femmes perpétraient leurs actes de trahison, on se trouvait dans la tragique semaine de mars 1918. Le bombardement de Paris avait commencé le 27 à 6 h. 30 du matin et dura toute la journée. Une offensive ennemie puissante était déclenchée entre Soissons et Reims. Quand les Berthas cessaient les Gothas arrivaient.
Le 28 nous reculions au sud de l’Aisne, Soissons était pris et Reims menacé.
LES AVEUX
Les deux femmes firent des aveux complets. Cependant tout d’abord elles ne voulurent pas dénoncer Guaspare. Mais quand elles apprirent qu’il était arrêté, elles déclarèrent que c’était lui qui leur avait donné les indications nécessaires.
On trouva sur elles des sauf-conduits en blanc. On découvrit aussi un tout petit fragment de papier, mince comme une feuille à cigarette, couvert de notes sur les ports de débarquement des Américains. Le tout était dissimulé dans un sachet de toile grise attaché à leur robe.
Quand la surveillante préposée aux fouilles fit cette découverte, la femme Schadeck lui dit naïvement:
—Brûlez ce papier. Cela n’a aucune importance!
La surveillante répondit:
—J’t’écoute!
Les deux espionnes n’essayèrent pas de nier. Elles déclarèrent avoir envoyé en Suisse les renseignements demandés sur les mouvements des Américains, les allées et venues des permissionnaires, avec le numéro de leur régiment, de leur division, leur emplacement, leur secteur et les endroits où on les envoyait au repos.
A leur retour, ces femmes devaient toucher 600 francs d’abord et 1.000 francs ensuite, soit 1.600 francs. A cette époque, la vie n’était pas encore chère! Il est vrai que Anna Garnier se proposait de consacrer cette somme uniquement à l’achat d’un bateau pour canoter sur le lac de Genève!
POUR AVOIR VOULU REVOIR SA MAITRESSE
Voici maintenant le grand chef de la bande; il n’est pas encore pris, mais il ne va pas tarder à l’être.
Guaspare était un garçon boucher de la Villette. Il appartenait à la classe 1905, et les renseignements donnés au début par la Préfecture de Police étaient bons. Né le 20 avril 1885, à Reims, il passait pour un bon sujet.
Affecté au 5ᵉ régiment d’artillerie coloniale, il déserta le 7 novembre 1916, en demandant une permission à double destination. Réfugié à Genève, il entreprit le commerce des bestiaux, du beurre, des bouteilles, des pommes de terre, etc...
C’est Cayer qui lui proposa d’entrer au service des Boches.
Intelligent, hardi, sans scrupules, il avoua avoir fait quatre voyages en France sous l’uniforme français. Il ne manifesta aucun regret et parla de ses entreprises de trahison comme de voyages d’agrément.
En octobre 1917 il était parti en uniforme avec Ripert, dit le Marseillais, sous le faux nom de Castille.
Dans le Midi, tous deux avaient créé une vaste organisation d’espionnage, comprenant plus de dix agents, qui fonctionna très activement grâce à la mollesse et à l’indifférence de notre service dans cette région, mollesse et indifférence que nous aurons souvent l’occasion de signaler.
En novembre, il entreprend une nouvelle expédition, cette fois avec Cayer. Celui-ci est habillé en chasseur alpin et prend le nom de Bouillon. Ils vont à Lyon, à Paris et rapportent aux Boches une ample moisson de renseignements.
Nous voici en décembre 1917. Guaspare est encore à Paris habillé en artilleur. Il y reste six semaines vivant avec Yvonne Schadeck, rue du Pont-de-Flandre.
Au moment de la grande offensive, en mars 1918, au moment où Reims est menacé, Guaspare déploie une grande activité et rapporte en Suisse des informations précieuses sur l’emplacement de nos divisions.
A ce moment, A. F. 337 touche des sommes importantes. On attend son arrivée à Paris pour l’arrêter.
Yvonne, on le sait, était déjà sous les verrous.
Guaspare est en Suisse et s’inquiète de ne pas voir revenir sa maîtresse Yvonne Schadeck. Il se décide à venir prendre de ses nouvelles. Il commence par faire la noce, car les espions raffolent des parties fines, et au moment où il entre dans un cabaret avec Desjardins, ils sont arrêtés tous deux le 23 juin 1918.
On trouva sur le chef de la bande 3.450 fr. en billets allemands, suisses, italiens et français. A Genève, il avait un coffre-fort au nom d’Yvonne Schadeck.
Desjardins ignorait le métier que faisait sa femme Yvonne, qui prétendait, venir à Paris pour voir sa mère. Mais il savait parfaitement que Guaspare et Cayer étaient des agents au service de l’Allemagne.
Les deux femmes, une fois arrêtées, eurent une attitude différente. La Schadeck déclara qu’elle avait fait de l’espionnage «pour amasser une petite réserve en vue de l’hiver». La Garnier se repentit et dit:
—J’ai fait de vilaines choses sans m’en rendre compte. Si vous croyez que je mérite la mort, je mourrai avec courage.
LES CONDAMNATIONS
Le 22 août 1919, le 2ᵉ Conseil de Guerre prononçait les peines suivantes:
Louis-Emile Guaspare, à mort. Cayer, dit Barioz, par contumace, à mort. Elie Murat, aux travaux forcés à perpétuité; Anne Murat, sœur du précédent, 1 an de prison; Anne Garnier, femme Desjardin, à la déportation dans une enceinte fortifiée; Yvonne Schadek, à la même peine.
Cette affaire est une des plus embrouillées que la justice militaire du G. M. P. ait eu à élucider.
LA FIN DE L’ODYSSÉE
Murat, qui avait toujours fait preuve d’une grande lucidité d’esprit et d’une mémoire parfaite, bien que fils d’alcoolique, simula tout à coup la folie vers la fin de l’instruction et parvint à obtenir des experts un certificat d’aliénation mentale, ce qui le sauva du bagne. Sa folie consistait à crier constamment: «Pas de fusils, la guillotine. Je ne veux pas être fusillé, je veux être guillotiné et tout de suite!»
Il était si fou que, au bout de huit jours, il s’évada!... On ne l’a pas retrouvé.
Sa sœur, Marie Murat, dite Marthe, infirmière, ne fut condamnée qu’à un an de prison pour recel d’espion.
Le sieur Guaspare vit que le système de la simulation avait du bon et il se mit à imiter Murat, tant et si bien que, une demi-heure avant de le conduire à Vincennes, on commua sa peine en celle des travaux forcés à perpétuité. C’est tout à fait à la dernière minute qu’il obtint sa grâce. Sur les registres de la justice militaire, Guaspare passe pour avoir été fusillé le 2 février 1920 en même temps que Funk Rullolf, condamné pour une autre affaire. Il est bien en vie et est aujourd’hui au bagne.
Guaspare avait demandé à contracter mariage avec la femme Schadeck. A ce moment il croyait qu’il allait être fusillé. Mais cette femme était déjà partie pour la Guyane, et la cérémonie ne put être célébrée. Le condamné n’avait d’ailleurs demandé cette faveur que pour rompre la monotonie de sa détention et se procurer une légère distraction.
Corbeau, dit Saab, fut relativement moins
heureux. Il fut condamné à vingt ans de travaux forcés. Le président du Conseil de Guerre lui dit:
—Les services que vous avez rendus à la France n’effacent pas le mal que vous lui avez fait.
Deux autres soldats, du même hôpital 17 de Lyon, les nommés Maujod Emile, de la 14ᵉ section, et Souperbat, du 99ᵉ d’infanterie, étaient traduits devant le même Conseil de Guerre pour trafic de stupéfiants. Ils furent acquittés.
Quant à Cayer, dit Barrioz, brigand aussi redoutable que Guaspare, condamné à mort par contumace, il a échappé au châtiment. Il doit en ce moment jouir en paix, dans les vallons de l’Helvétie, des fruits de sa trahison.
Telle est l’odyssée de cette bande de traîtres qui ont fait tant de mal à notre pays et qui ont fini par éviter le voyage à Vincennes.
XI
LES AVENTURES D’UNE GRANDE VEDETTE PARISIENNE
MUSIC-HALL ET SERVICE SECRET.—MISSIONS DÉLICATES A TRAVERS L’ITALIE, LA SUISSE ET L’ESPAGNE.—LA DANSEUSE AU COUVENT.—LE ROI L’A DIT!
Dans les «petites femmes» qui ont joué un rôle dans l’espionnage, il en est qui sont connues de tout Paris, de toute la France et même de toute l’Europe, voire des deux Amériques.
L’une d’elles est une chanteuse de music-hall qui a fait et qui fait encore la joie des Parisiens et des Bruxellois. Nous ne devons pas la nommer bien que M. Malvy, très maladroitement, ait prononcé son nom devant la Haute Cour. Disons, seulement, que les Anglais déclarent que «c’est une miss très distinguet».
Ajoutons qu’elle a de jolies jambes, qu’elle a de l’esprit jusqu’au bout des doigts... de pied, et qu’elle a le don de provoquer le fou rire. Nous n’en dirons pas plus, car il ne faut pas qu’on la reconnaisse!
Un jour la S. C. R. (Service Central des Renseignements) lui dit gentiment:
—Vous pourriez nous rendre service. Voulez-vous accepter une mission?
—Je veux bien, répondit-elle, si je puis être utile à mon pays.
On la pria d’aller faire un tour en Italie. C’était au début de la guerre. Elle fila aussitôt vers le pays du macaroni, et le hasard voulut qu’elle n’eût pas besoin de se déranger pour savoir ce qui se passait. Dans le plus grand hôtel de la ville, les cloisons séparant les chambres étaient très minces. Et malgré elle—bien entendu—elle put surprendre des tractations intéressantes entre des Boches et des Italiens. Oh! il s’agissait de négociations purement commerciales: donnez-nous du riz, nous vous donnerons des pâtes, etc.—juste de quoi alimenter la conversation entre courtiers des deux nations.
Plus tard on lui conseilla d’aller voir si la Suisse était toujours au milieu des montagnes. Elle voulut bien s’y résoudre, et on lui indiqua une excursion intéressante dans la Suisse plus particulièrement allemande.
—Mais je ne sais pas l’allemand! objecta-t-elle.
—Qu’à cela ne tienne: nous vous donnerons une automobile et un chauffeur allemand...
—Un Allemand? Un vrai Allemand? En êtes-vous bien sûr?
—Très! C’est le chauffeur du prince Eitel, un des fils de l’empereur Guillaume...
—M...ince! fit-elle avec la vivacité d’expression qu’on lui connaît et qui a fait esclaffer tant de braves gens. Mais alors il va me fiche dans la gueule du loup?
—Pas de danger. Nous avons ici sa femme et ses deux enfants. Nous les gardons comme otages.
La grande vedette s’inclina, tout en maugréant. Ce n’était pas le métier d’une femme, elle n’était pas faite pour ça, elle avait un engagement à Paris. Déjà la mère de Gaby Deslys disait: «On ne peut pas aller prendre le thé chez elle sans s’exposer à ce qu’elle raconte tout.»
Et puis, quel prétexte aurait-elle pour se rendre dans la Suisse allemande? Voulait-on lui faire prendre l’Helvétie pour des lanternes?
—Le prétexte est tout naturel: vous allez savoir où se trouve votre ami prisonnier, votre cavalier dansant, «chevalier» sans peur et sans reproche...
—Bigre! avec le chauffeur du prince Eitel? Ça colle! Allons-y!
On partit en quatrième vitesse avec un faux passeport bien conditionné. A Sens, un territorial, baïonnette au canon, croisa son arme et faillit crever le pneumatique gauche avant.
—On ne passe pas!
—Voici mes papiers!
—Quand bien même vous seriez en travesti le petit caporal, vous ne passerez pas. Sergent! venez reconnaître troupe!
—Mais je ne suis pas une troupe! Je suis une personne naturelle.
—M’en f...! Sergent, venez reconnaître troupe!
—Il y tient!
Le sergent s’avança, examina la tête ébouriffée de l’artiste et déclara péremptoirement:
—C’est louche! Faut aller à la caserne qui se trouve dans le couvent!
—Moi, au couvent? Je ne suis pas Lavallière! C’est trop fort!
Les hommes du poste prirent les quarante chevaux par la bride et les conduisirent... au poste.
Notre miss n’en revenait pas. Elle trépignait d’indignation:
—Qu’on aille chercher les autorités!
—Ça s’ peut pas! Le colonel est en train de jouer aux cartes!
Un brave commissaire de police qu’on était allé quérir se dévoua.
—Mais, le diable m’emporte! fit le magistrat ébahi. Je vous reconnais. Je vous ai souvent applaudie à Paris!... Calmez-vous! On va arranger cela... Tout de suite?... Non, pas tout de suite. Il faut téléphoner à Paris: or, il est trop tard.
Bon gré mal gré, la spirituelle artiste dut coucher à la caserne. Ce n’est que le lendemain matin que Sens reçut de Paris l’ordre de la laisser continuer sa route.
En démarrant la prisonnière d’une nuit s’écria:
—Il n’y a pas de bon Sens!
—Mais si, fit le sergent, vous êtes dans la direction.
On arriva à Berne avec des péripéties diverses. Notre artiste, après s’être installée, se mit en devoir de faire les démarches nécessaires pour retrouver son ami. Ces démarches finirent par la mettre en rapport—comme par hasard—avec le chef de l’espionnage allemand, qui se montra ultra galant et organisa une fête en son honneur.
—Mademoiselle, lui dit le Boche, en souriant d’un air iroquois, pardon, narquois, je vous félicite de venir jusqu’ici pour chercher des nouvelles de votre ami... Nous allons essayer de vous renseigner... Mais en attendant, permettez-moi de vous faire remarquer combien vos espions sont inhabiles: je les connais tous... Tenez, voici B. Là-bas, c’est N. Et puis O. Pas malins! Voulez-vous que je vous le prouve? Je vais les appeler: ils me diront tout ce que je voudrai.
Quelques individus comparurent et firent mine de répondre à ses questions de façon à lui donner satisfaction.
—Vous voyez? fit-il triomphalement.
—Oui. On les voit et on les reverra.
*
**
Entre temps notre amie s’occupa d’une autre mission, très délicate aussi celle-là. Il s’agissait de savoir si un journaliste français, attaché à un grand journal de Paris, ne s’était pas laissé acheter par les Allemands. A cet effet, l’artiste lui dit en feignant d’être au service des Boches:
—Tu n’aurais pas une nouvelle à me donner pour eux? Tu sais: je travaille de l’autre côté!... Qu’importe! Je veux ramasser de l’argent. Tu pourrais en gagner beaucoup aussi, toi?
Le jeune homme se révolta:
—Quoi! Tu as fait cela?... Tu me fais de la peine! Je ne veux pas te dénoncer parce que tu es une amie. Mais c’est abominable!...
L’artiste lui sauta au cou:
—A la bonne heure! Je parlais ainsi pour savoir. Je suis bien heureuse d’avoir la preuve qu’on te soupçonne à tort.
C’est ainsi que le journaliste, qui était sérieusement menacé d’être fusillé, paraît-il, fut lavé de toute suspicion, et justifié grâce à l’avisée Parisienne.
En revanche elle fit arrêter, et coffrer pour longtemps, un gros banquier qui était un dangereux espion.
*
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Les choses faillirent se gâter avec le chef de l’espionnage.
—Vous êtes forte, dit-il à notre envoyée spéciale. Oui, très forte, mademoiselle!
—Très forte? riposta-t-elle en ayant l’air de ne pas comprendre. Oui, je suis très forte, je jouis d’une excellente santé!
L’artiste jugea qu’il valait mieux ne pas insister et prendre un peu de poudre... d’escampette.
Elle plia bagages et revint à Paris.
Mais ses périgrinations ne devaient pas s’arrêter là.
—Si vous vouliez aller jusqu’à Madrid, lui dit-on au S.C.R., vous mettriez le comble à votre gentillesse.
—Encore!
—Réfléchissez: vous avez des nouvelles de votre ami. Il s’agit maintenant de le faire mettre en liberté. Allez trouver le roi.
—C’est une idée. Alphonse ne me refusera pas ça! Ollé!
Et la talentueuse artiste franchit les Pyrénées.
Ici, nous passons la plume à un capitaine anglais:
«A cette époque, en 1916, les choses allaient mal en France, et l’Espagne, tout à fait favorable à l’Allemagne, était bien capable de réaliser au Maroc ses vieilles aspirations nationales contre la France. Mlle X... fut donc dépêchée pour se renseigner sur l’orientation de la politique espagnole. Cette mission eut un résultat intéressant: l’Espagne demeura en bon rapports avec la France pendant le reste de la guerre, et, détail de la plus haute importance, la France sut qu’il en serait ainsi jusqu’à la fin du conflit.»
Le roi l’a dit!
Mais Mlle X...—la miss si mys...térieuse—eut une autre satisfaction: S. M. Alphonse XIII fit une démarche à Berlin, et le brave artiste, son ami, qui avait fait si vaillamment son devoir, fut rapatrié.
*
**
Maintenant, une observation très sérieuse s’impose. La spirituelle Parisienne a agi en bonne Française, elle a fait preuve de courage et d’intelligence; elle a exposé sa liberté et même sa vie: on ne lui a rien donné. En revanche, on a décoré quantité de donzelles qui n’ont pas eu longtemps à faire le pied de grue pour recevoir un bout de ruban. Nous demandons qu’on répare cette injustice et que le gouvernement témoigne à cette Française la reconnaissance à laquelle elle a droit.
XII
LA MORT ETRANGE DE MARUSSIA
PREMIÈRE AFFAIRE «BIEN PARISIENNE» DU SERVICE DES RENSEIGNEMENTS.—L’ACTRICE ET LE ROUMAIN.—LE DRAME DE GENÈVE.
«...Et si vous rencontrez dans l’escalier un marchand de charbon, ou un garçon épicier, qui vous dévisage, ne vous en étonnez pas: ce sont des gens à nous.»
Sur ces mots, le «patron», après une vigoureuse poignée de main, referma la porte de son bureau sur son visiteur.
Celui-ci longea le couloir, tourna à gauche, descendit trois étages, et se trouva sur le boulevard Saint-Germain. Il arriva bientôt devant la Chambre des Députés, traversa le pont, la place de la Concorde, et s’installa sur un banc dans les Tuileries. Il alluma une cigarette et réfléchit aux événements de la journée.
Que s’était-il passé?
Il était chez lui, bien tranquille, le matin, quand il reçut un coup de téléphone d’une femme qu’il ne connaissait que de date récente... et peu.
—C’est moi, Marussia.
—Marussia?
—Vous savez bien...
—Ah! oui, je vous écoute, chère amie.
Elle s’excusait de le déranger et de lui demander un service, qu’elle regrettait de solliciter par une voie aussi peu discrète que le téléphone.
Voici ce qu’elle attendait de lui: ayant au cours d’un récent voyage en Suisse, souffert de difficultés rencontrées à la frontière, elle espérait qu’il voudrait bien lui envoyer, vers l’époque fixée pour son retour, un télégramme la réclamant à Paris où sa présence serait indispensable pour la répétition d’une pièce—imaginaire—dont il serait, lui, l’auteur, et elle «la principale interprète»...
BOULEVARD SAINT-GERMAIN
Sans trop savoir pourquoi il avait dit oui, mais il avait senti quelque chose de louche dans cette démarche, et de suite il avait voulu rendre compte de cet incident à une autorité compétente.
Il se rendit chez le commissaire de son quartier, qui le renvoya au district; le district à l’administration centrale qui, en fin de compte, l’expédia à tous les diables.
Dégoûté de ce que personne ne voulait l’entendre, et se rendant compte qu’on commençait à le regarder de travers, il était rentré chez lui, et c’était grâce à la visite fortuite d’un ami qu’il avait été aiguillé sur le boulevard Saint-Germain.
Il fut reçu par le chef des services qui s’intéressa tout particulièrement à sa déclaration. L’affaire que le visiteur lui signalait était importante: la femme dont il s’agissait—Marussia—attirait depuis un certain temps l’attention du S.C.R. par ses voyages et ses allures mystérieuses.
LA BELLE SUSPECTE
Blonde, jolie, mais de cette beauté un peu forcée qui n’est pas sans charmes, elle se disait veuve et Polonaise.
Habitant à Paris depuis de nombreuses années, la belle y tenait le milieu entre l’acteuse et l’actrice, jouant—sous le nom de Marussia D...—ou ayant joué juste ce qu’il fallait afin de ne pas passer pour uniquement entretenue. Elle comptait d’assez bonnes relations dans le monde théâtral.
On ne lui connaissait pas de liaisons sérieuses. Elle sortait avec l’un, avec l’autre, plus souvent en compagnie d’étrangers plutôt que de Français, car elle parlait allemand, anglais, russe, polonais et italien. Son français, dont elle usait fort correctement, se pimentait d’un léger accent slave.
Elle évoquait sa famille en termes mystérieux et discrets. Elle était de tous points le type achevé de la grande aventurière.
Les soupçons étaient parfaitement justifiés. Marussia ne trompait pas son camarade lorsqu’elle lui parlait au téléphone de ses difficultés à la frontière. L’on savait en effet qu’au début de la guerre, lors d’une tournée effectuée par des artistes français dans un pays encore neutre, la comédienne était devenue la maîtresse du manager de la troupe, vague Roumain dont le père et les frères étaient tenanciers d’un louche tripot balkanique.
Le rasta et l’aventurière étaient faits pour s’entendre, ce furent de grandes amours. Mais les affaires du Roumain se gâtèrent, la chasse aux suspects s’organisait.
Un de ses frères fut arrêté en Suisse. Le manager préféra quitter la France de son propre chef plutôt que d’attendre une expulsion imminente.
La femme pleura, jura fidélité, et, dès qu’elle jugea la chose possible, s’envola pour retrouver son bien-aimé sur les bords du lac Léman où ils vécurent tous deux de longs jours de joies—et d’angoisses.
Le frère incarcéré passa en jugement et fut, par les autorités fédérales, condamné à quelques mois de prison pour espionnage au profit des puissances centrales.
Le couple devint dès lors fort louche et Marussia ne rentra à Paris qu’au prix de mille difficultés. Mais elle ne pensait qu’à rejoindre son amant, tout en préparant son retour éventuel en France.
Sur un appel plus pressant du rasta, elle avait risqué la demande par téléphone.
Le surlendemain, elle partait pour la Suisse et pendant bien longtemps on n’entendit plus parler d’elle.
MORT SUBITE
Un matin, les journaux reproduisirent l’information suivante:
«Genève.—La sympathique artiste parisienne, Mlle X..., qui était descendue à l’hôtel Z..., a été trouvée hier inanimée dans son lit. Elle était en grande toilette et sa couche était jonchée de fleurs. Il s’agit probablement d’un suicide que la première enquête attribue à des chagrins intimes.»
C’était de Marussia qu’il s’agissait.
Dès son arrivée à Lausanne, où elle retrouvait son métèque, les autorités françaises, par le consulat, la prévinrent de la suspicion dont le Roumain était l’objet. Elle ne voulut rien savoir, pensa jouer à la plus fine et fut persuadée qu’elle avait fait la conquête du consul—qui tout au contraire la faisait étroitement surveiller.
Elle fréquenta le milieu fâcheux où évoluait son amant et se rendit elle-même suspecte—bien à tort, car il n’y avait que des légèretés. Néanmoins, quand elle voulut rentrer à Paris, elle se heurta à une fin de non-recevoir formelle de la part des autorités françaises. On lui conseilla une manière de quarantaine qui, après sa rupture avec son entourage, lui permettrait d’obtenir le visa de ses papiers».
Elle refusa tout d’abord.
Par la suite, harcelée par son désir de rentrer à Paris—désir qui ne pouvait s’expliquer que pour remplir une mission—elle s’en fut à Genève, se rendit souvent au consulat et semblait à la veille d’une rupture ou peut-être même d’aveux, quand on apprit sa mort inopinée.
Ses compagnons craignirent-ils d’en avoir trop dit devant elle? Ne voulut-elle plus obéir? On ne crut pas au suicide, et on parla tout de suite d’assassinat. Ses amis veulent voir en sa mort, habilement arrangée, une vengeance allemande.
Quoi qu’il en soit, cette disparition fut la conclusion de la première affaire bien parisienne du service des renseignements.
POST-SCRIPTUM
Cette histoire était écrite quand le hasard nous a permis de savoir toute la vérité sur ce drame.
Marussia a été empoisonnée avec du café et son corps ensuite encadré de fleurs pour simuler le suicide.
L’avant-veille elle avait soupé dans un restaurant de Genève avec un Français—un bon—envoyé par le baron de Fougères, notre consul à Evian. C’est sans doute pour ce motif que les Boches décidèrent de la supprimer.
Une enquête fut faite par la police de Genève et conclut formellement à l’assassinat. Mais un ordre vint de Berne; les conclusions de la justice durent rester secrètes, et les assassins impunis.
XIII
LA PRINCESSE WISZNIEWSKA
NÉE DE PÈRE ET MÈRE INCONNUS.—GALANTERIE ET DIPLOMATIE.—L’ALCHIMISTE EGYPTIEN ET LE DOCTEUR ARGENTIN.—OÙ ON ENTREVOIT ALMEREYDA.
Lecteur, ne vous frappez pas: il s’agit de l’histoire d’une princesse, française, née de père et mère «non dénommés», mariée à un Polonais naturalisé italien, reconnue par un Russe, ayant eu pour amants un Egyptien, un Argentin, un Serbe, un Anglais, un Italien, un Allemand, et, présentement, accusée d’avoir assassiné un Canadien!
Je commence. Nous sommes à la veille de la guerre.
Boulevard Berthier, en face les fortifications qui encerclent la porte Champerret, au numéro 25, devant un coquet hôtel particulier.
Un jeune ouvrier en cote bleue tire la sonnette.
—C’est bien ici la princesse Wisniewska?
—Parfaitement, répond un correct valet de chambre qui vient d’ouvrir.
—J’apporte les épreuves de l’imprimerie Rirachowsky.
La maîtresse du logis, prévenue, s’empare aussitôt de la grande enveloppe, en tire des feuillets encore humides, et se met à couvrir les marges de signes typographiques, puis, s’adressant à l’apprenti:
—Vous retournez boulevard Saint-Jacques?... N’oubliez pas de dire à M. Rirachowsky de mettre du meilleur papier, tout ce qu’il y a de beau, tout ce qu’il y a de plus beau!
S’adressant ensuite à un personnage bizarre à barbiche noire, à lunettes d’or, qui l’observait, elle dit:
—Ce sont les Etudes diplomatiques, la revue de luxe dont je vous ai parlé et qui va nous ouvrir toutes les portes. Le premier numéro fera sensation. Il y a des articles sur les marines militaires des grandes puissances, une chronique originale sur le roi Alphonse, et une foule de petites nouvelles sur la politique extérieure qui feront du bruit dans les chancelleries.
Ce numéro, continua la belle dame, est d’une importance capitale. Il y a un travail sur «Le facteur naval espagnol dans le problème méditerranéen» de tout premier ordre, bourré de chiffres sur les marines de guerre. Tenez, voici un passage: «Voyons comment, actuellement, dans l’année 1914, se présentent à notre appréciation les éléments matériels des flottes qui pourraient lutter demain...» Pas mal, n’est-ce pas? Il y a ensuite une statistique complète des dreadnoughts en service et en armement, et des canons dont peuvent disposer la France, l’Italie, l’Angleterre et l’Autriche-Hongrie.
—Mais, princesse, où avez-vous eu tous ces renseignements?
—C’est Amalto Gimeno qui me les a envoyés... Chut! Il ne faut pas qu’on le sache.
—Vous croyez réellement à la puissance de cette revue? Vous pensez qu’elle suffira pour nous imposer?
—Vous n’y connaissez rien, mon cher docteur. Pour réussir à Paris il suffit d’avoir un salon ou une revue. Quand on a les deux on est certain du succès.
PRINCESSE AUTHENTIQUE
Celle qui parlait ainsi était une femme de 33 ans environ, un peu rousse, d’une élégance raffinée, au verbe haut, aux gestes assurés et autoritaires, comme doit être une princesse authentique.
Princesse authentique elle l’était, quoique née à la maternité de l’hôpital Beaujon, le 4 novembre 1881, et inscrite sur les registres de l’état civil du huitième arrondissement sous les prénoms de Jeanne-Marie-Solange, de père et mère «non dénommés»:
Complètement abandonnée elle avait été confiée à l’assistance publique. Mais à quinze ans elle avait échappé à sa tutelle et commencé une vie vagabonde. En 1896, à la requête de la préfecture de police, elle fut enfermée à la maison départementale de Nanterre.
Vingt ans plus tard on trouve l’ancienne pupille de l’A. P. installée dans un luxueux hôtel, et se faisant appeler comtesse Jeannine Merrys, comtesse de Mussy, comtesse de Solange, comtesse de Grenier, etc., etc. Elle trône dans la haute galanterie, et demeure d’abord rue de la Tour-Maubourg, 42 bis, et peu après au château de Gastyne près Bonnières, ensuite à Neuilly, puis avenue Wagram, 165 (en 1903), et enfin 25, boulevard Berthier où nous venons de faire sa connaissance.
Le 11 août 1908 elle jugea bon de prendre un nom définitif et de choisir un titre nobiliaire plus relevé que celui de comtesse. Justement l’octogénaire Adam de Wisnievsky, né en 1826 en Pologne russe, naturalisé italien, pauvre, mais prince, était en disponibilité. Elle l’épousa, et devint ainsi princesse Wisniewska, sans que personne pût cette fois contester sa noblesse. Cette union fut bénie par le pape, mais resta stérile, heureusement.
Le prince eut le bon goût de ne pas la gêner trop longtemps, et de mourir, quelques années après son mariage, à Monte-Carlo, où il était allé tenter la fortune rebelle, et où gâteux, il expira entre les bras d’une domestique fidèle, aussi pauvre que son maître, mais honnête.
La princesse, n’ayant pas de parents, après s’être pourvue d’un mari, jugea utile de se munir d’un père. Elle le trouva dans la personne de Choukouski, sujet russe d’origine polonaise, qui la reconnut comme sa fille en 1910 par acte reçu à la mairie du huitième arrondissement.
Elle jugea bon aussi de se rajeunir de onze ans par un procédé facile: en 1915 elle se fit délivrer par le consulat d’Italie un passeport au nom de princesse Wiszniewska, née à Varsovie le 10 novembre 1892, de Choukouski et de Elisabeth Zoleska.
C’est sous ce faux état civil qu’elle fit sa déclaration au service des étrangers en 1915, et qu’elle obtint son permis de séjour.
Voilà pour la dame du boulevard Berthier.
LE COMTE D’ASTEK
Le monsieur à lunettes d’or, qui cohabitait avec elle, se faisait appeler docteur Emir d’Astek, comte égyptien, né à Alexandrie en 1873 et se prétendant sujet britannique.
Il s’était marié à Madrid à une Espagnole qui lui avait apporté en dot plusieurs millions. En 1913 il était venu à Paris avec sa femme, qui ne voulait pas rester à Madrid où son mari entretenait des maîtresses et dilapidait sa fortune.
Le changement de ville ne changea pas la conduite de d’Astek. Il quitta le domicile conjugal et prit d’abord comme maîtresse la théâtreuse Grent Boyer, puis la princesse Wiszniewska. Mais privé des subsides de son épouse légitime il fut bientôt obligé d’en appeler à la bourse de ses amies, et de recourir à des expédients.
Il s’improvisa homme de science, chimiste. Il se donna comme docteur ès-sciences de la faculté de Berlin, docteur en médecine de la faculté de Paris et installa un mystérieux laboratoire dans les combles de l’hôtel d’Iéna, place d’Iéna.
Là il se livrait à des expériences diaboliques en compagnie d’une bande de rastaquouères des plus remarquables tels que le marquis de Castellucia, l’ingénieur (?) Garchey, l’inventeur Pateras, Etchepare, etc.
Garchey prétendait avoir découvert un appareil de télégraphie sans fil destiné à repérer les sous-marins. Il négociait avec l’ambassade anglaise. Pateras se vantait d’avoir mis au point un appareil d’aviation piloté par Védrine.
Hôtes de la comtesse de Castelbaljac tous ces gentilshommes trouvèrent le moyen d’escroquer des sommes importantes à leur bienfaitrice qui finalement se décida à porter plainte. La bande se dispersa aussitôt comme une volée de corbeaux.
Quant à d’Astek, toutes «les grandes découvertes» de ses nobles amis lui avaient donné un prétexte pour fréquenter le cabinet du ministre de la marine et pour évoluer autour de la direction des inventions de guerre installée rue Saint-Thomas-d’Aquin. «Ça, c’est intéressant!» disait-il.
Ce couple bizarre avait donc une double couverture: la femme travaillait dans la noblesse, la galanterie et la diplomatie; le docteur se mouvait autour des secrets de la défense nationale.
L’AMI D’ALMEREYDA
Voici maintenant un nouveau personnage qui apparaît. C’est un nommé Danilovicz, journaliste à la manque, promu à la dignité de secrétaire très intime de la princesse Wiszniewska, et chargé de suppléer le comte d’Astek visiblement fatigué. Ce Danilovicz arriva tout droit de la banque Raffalovich, ami et secrétaire d’Almereyda.
Maintenant on ne s’étonnera plus de rien.
Quand le gouvernement crut devoir quitter Paris pour s’installer à Bordeaux, la princesse suivit le mouvement et partit pour les rives de la Gironde.
On la remarqua le lendemain dans les cabarets de nuit où certain ministre avait l’habitude d’aller chercher un dérivatif aux tristesses de la guerre; elle menait joyeuse vie et dépensait beaucoup.
Entre temps les Etudes diplomatiques de la princesse obligeait celle-ci à de fréquents déplacements.
Au début de la guerre elle est en séjour en Suisse. Puis on signale son passage en Espagne, en Italie. A la fin ses allées et venues incessantes, ses visites continuelles aux consulats, légations, ambassades attirent l’attention de nos agents.
On découvre que la princesse est en relations directes avec le bureau polonais germanophile de Berne.
VON TREEK
On découvre aussi que d’Astek fréquente assidûment l’Allemand von Treek qui passe pour un espion amateur subventionnant une agence bénévole de renseignements.
Ce boche est richissime et sa fortune est évaluée à une centaine de millions de francs. Naturellement la princesse Wiszniewska devint sa maîtresse: elle ne pouvait choisir mieux.
L’affaire se complique alors d’une question de rivalité féminine.
Von Treek voulait épouser la fille du comte de Frankenberg. Cela ne pouvait convenir ni à la princesse ni au comte.
Voyant qu’elle allait perdre son amant et les subsides qu’elle en recevait, la Wiszniewska fit tout pour le retenir et, n’y parvenant pas, elle employa les grands moyens. Deux jours avant la célébration du mariage, elle attira von Treek à Genève, sous prétexte d’une affaire à traiter. Là, elle tenta de le faire disparaître en le chloroformant. Mais von Treek, qui est taillé en hercule, résista au chloroforme et réussit à se débarrasser de deux agresseurs qui étaient postés dans une pièce voisine et qui attendaient le moment d’intervenir.
Après ce premier échec, l’aventurière machina contre von Treek un plan véritablement machiavélique qui amena l’arrestation de ce dernier. Elle avait fait parvenir aux autorités judiciaires un dossier renfermant de nombreux documents et photographies, prétendus authentiques, sur la propagande bolchevik. Ces documents représentaient von Treek comme le chef de la propagande bolchevik en France, en Angleterre et en Suisse. L’enquête ouverte permit d’établir que les documents fournis par la princesse Wiszniewska n’étaient que des faux; aussi l’instruction fut suspendue et des poursuites furent intentées contre l’aventurière, qui fut arrêtée.
Elle fut impliquée dans plusieurs affaires d’espionnage par les magistrats de Genève, mais elle ne resta pas longtemps en prison, et continua à séjourner sur les bords du Léman.
La princesse traversait fréquemment le lac et aimait résider tantôt à Evian et tantôt à Lausanne où elle recevait de nombreuses visites qui inquiétaient fort notre excellent consul, M. le baron de Fougères.
Quant au commissaire de police d’Evian, un certain A., placé et maintenu à ce poste par le ministre Malvy, il trouvait tout cela naturel, et ne songeait à sévir que contre les Français qui paraissaient trop renseignés.
Mais la vie en Suisse devenant agitée, la princesse décida de revenir à Paris où elle reprit ses fréquentations louches.
AU SERVICE FRANÇAIS
L’aventurière s’était aperçue qu’elle était surveillée.
Pour ne pas être prise—ni surprise—elle fit ce que font tous les espions qui se sentent en danger: elle alla offrir ses services au bureau du contre-espionnage, d’abord avec l’idée d’en tirer protection, ensuite d’en tirer profit.
En effet ses moyens étaient devenus précaires, et les quinze mille francs que coûtait l’hôtel du boulevard Berthier pesaient lourdement déjà sur les épaules de la belle.
C’est vers le mois d’avril 1915 que Wiszniewska proposa au S. R., par l’intermédiaire d’un de ses amis, figurant déjà dans les cadres du service, de lui fournir des renseignements sur les agissements des milieux francophobes espagnols. Elle demandait qu’en échange le S. R. prît à sa charge les 15.000 francs de loyer de son hôtel.
Le représentant du 2ᵉ bureau, chargé de discuter avec elle, lui fit remarquer que ses prétentions étaient exorbitantes. Après d’assez longs conciliabules, on se mit d’accord sur un modus vivendi. Le S. R. lui allouerait une somme de 20 francs par jour et par personne employée, avec un minimum garanti.
Le premier rapport que Anne-Marie-Solange fit parvenir au 2ᵉ bureau, date du début de mai. C’était un document assez filandreux, plein de fautes d’orthographe, et qui, après un minutieux examen, fut reconnu pour être l’échantillon d’une imagination féconde, mais peu précise.
Le second, puis le troisième, ne contenaient pas davantage le moindre renseignement intéressant. On devinait aisément que ces rapports étaient fabriqués de toutes pièces. Le chef du 2ᵉ bureau, mis au courant, avisa la princesse que dorénavant la S. C. R. se passerait de ses services.
Mais l’aventurière ne se découragea point. Grâce aux hautes relations qu’elle se flattait d’avoir dans les milieux politiques, elle entra de nouveau en rapports avec le 2ᵉ bureau, qui lui confia une mission personnelle en Espagne.
La princesse partit dans le courant de novembre pour Madrid, où l’attendait le fameux d’Astek. Trois semaines plus tard elle envoyait à Paris un long rapport qui fit quelque sensation. Les renseignements qu’il contenait étaient, en effet, fort importants, mais étaient-ils exacts?
Une contre-enquête fut immédiatement ordonnée. L’agent chargé de cette mission de confiance recueillit des témoignages accablants contre l’aventurière. Non seulement ses renseignements étaient erronés, mais il semblait indiscutable que le rapport avait été envoyé à Paris sur un mot d’ordre d’agents de l’Allemagne.
L’autorité militaire fut prévenue, et comme la princesse avait été une première fois suspectée d’être à la solde de l’Allemagne, son arrestation fut décidée.
La police militaire du camp retranché ne la perdait pas de vue: un jour elle voulut perquisitionner chez l’aventurière et un commissaire se présenta boulevard Berthier.
Depuis la veille le bel oiseau, évidemment prévenu, s’était envolé avec tous ses bagages. La princesse avait déclaré que l’hôtel, qu’elle louait 15.000 francs, coûtait trop cher, et, en un tour de main, elle avait vendu ses meubles à un brocanteur, fait ses malles et disparu... momentanément.
A cet instant surgit encore un nouveau personnage tout aussi étrange—et étranger—que les autres.
La princesse n’avait pas quitté le quartier de la plaine Monceau. Elle avait accepté l’hospitalité d’un Argentin, nommé Raoul H..., qui habitait un rez-de-chaussée de la rue Demours.
Cet Argentin, portant beau, se donnait les allures d’un vieux diplomate, se prétendait le beau-père du ministre des affaires étrangères d’Argentine. Comme le comte d’Astek il faisait de la chimie, et avait un laboratoire, lui aussi, mais à Barcelone, 5, calle del Pino, et comme d’Astek encore il parlait toutes les langues: l’anglais, l’allemand, l’espagnol, le catalan, le français, l’italien, etc.
C’est dans cette retraite de la rue Demours que le commissaire spécial du C. R. vint un beau matin surprendre la société Wiszniewska, d’Astek, Danilovicz et Cⁱᵉ.
Mais les protecteurs occultes veillaient. C’est en vain que la S. C. R. voulut faire ouvrir une instruction contre la Wiszniewska et ses acolytes.
LE SAUVETAGE DE L’ESPIONNE
Au moment de procéder à l’arrestation à l’hôtel Baltimore le commissaire reçut l’ordre de procéder à... l’expulsion!
La mesure était-elle légale? La Wiszniewska était née française, par conséquent en cette qualité elle ne pouvait être expulsée. Il est vrai qu’elle avait perdu sa nationalité du fait de son mariage avec un Polonais, naturalisé italien. Mais le mari étant décédé, sa femme pouvait être considérée comme redevenue française. Le ministère de l’intérieur ne l’entendit pas ainsi.
Le même jour, le 2 décembre 1916, la princesse fut conduite à la frontière d’Italie et le comte d’Astek escorté jusqu’à celle d’Espagne. Quant à H..., on l’oublia rue Demours.
Il n’y eut aucun doute sur le fait que la mesure d’expulsion—mesure conservatoire au premier chef—fut prise à l’instigation de la Wiszniewska elle-même, pour éviter une mesure plus grave. La veille de son départ la hautaine princesse (née de père et mère inconnus) avait déclaré cyniquement dans un salon de l’hôtel Edouard-VII:
—Il faut que je quitte la France. Je ne suis pas libre de dire mon opinion sur l’Allemagne... Je suis avant tout une femme fréquentant les cours étrangères (sic), approchant les souverains, les ambassadeurs, les personnages les plus considérables du monde diplomatique. Je vais me rendre en Italie, puis en Suisse: là j’aurai plus de liberté et je pourrai exprimer ma pensée à ma guise.
C’est pour lui donner cette liberté de dire du bien de l’Allemagne, et aussi sans doute pour lui rendre plus faciles ses relations avec les Allemands, que le gouvernement français d’alors envoya l’aventurière faire un voyage d’agrément en Italie au lieu de l’obliger à une petite excursion définitive... à Vincennes[J].
LE COMBLE DE L’AUDACE
C’est le service des renseignements anglais qui avait le premier attiré l’attention sur la Wiszniewska. Celle-ci ayant été informée—on ne sait comment—des suspicions dont elle était l’objet de la part des Britanniques, étaient allée carrément trouver le chef du service à Genève:
—On m’accuse à tort, dit-elle. Je viens protester. C’est une autre femme qui prend mon nom. Celle-là est une espionne et voici sa photographie.
Le chef du service la regarda:
—Vous avez tout de même de l’audace!
Et fouillant dans son tiroir:
—Voici la photographie de la véritable espionne. Vous voyez que c’est bien la vôtre!
L’officier anglais ne pouvait rien faire. Il était en territoire suisse. Il se borna à prévenir ses collègues français...
Ajoutons que la princesse Wiszniewska, sur les conseils de son amant Danilovicz, de la banque Raffalovich, ami d’Almereyda, avait fondé l’«Œuvre pacifique des femmes pour la propagation de la paix par l’éducation», ce qui lui permit d’entretenir des relations suivies avec les défaitistes notoires, le député Brizon entre autres, un des kienthaliens.
Pour une internationaliste, voilà une belle internationaliste. Elle ne fréquentait que des Russes, des Polonais, des Argentins, des Italiens ou des Allemands. Ce n’était pas une femme, c’était une société—la société des nations.
Aussi est-elle sortie de toutes ses aventures saine et sauve.
XIV
LES PETITES FEMMES
VOULEZ-VOUS UNE MARRAINE? LES CARTOMANCIENNES—L’ART DES FAUSSES NOUVELLES
Nous pourrions raconter l’histoire de beaucoup de femmes plus ou moins liées au service secret.
La nommée J..., entre autres, ne fut condamnée qu’à un an de prison, et cependant elle s’était rendue souvent à Berlin et avait trouvé le moyen d’obtenir à Paris tous les passeports dont elle avait besoin.
Cette femme était mariée à un Allemand et faisait librement le commerce des plumes d’autruche avec l’Allemagne par la Suisse.
Tous les membres de la commission supérieure des étrangers ont connu son histoire, que M. Daudet a racontée avec détails.
Mais c’est une histoire scabreuse qui ne peut encore être dévoilée.
PRIS AU PIÈGE
Le S. R. avait découvert les dangereuses menées d’une espionne que nous nommerons Julie, actrice de troisième ordre peu connue, qui remettait ses renseignements à un Hollandais.
Ce Hollandais fut arrêté le premier. Naturellement il nia.
Le capitaine rapporteur, pour le faire parler, lui dit brusquement:
—Nous savons qui vous êtes, ce que vous faites et vous serez fusillé... A moins cependant que vous n’alliez chez Julie prendre ses rapports comme vous le faisiez quand vous étiez libre.
—Mais, répondit le Hollandais effrayé, Julie ne me donne pas de rapports. C’est moi qui les écris sous sa dictée!...
—Bien. Vous venez d’avouer. Dans ce cas vous allez vous rendre chez votre amie, vous l’emmènerez dans un endroit où un agent pourra sténographier ce qu’elle dira, et, vous, vous écrirez comme si de rien n’était.
Le Hollandais, pour sauver sa peau, n’hésita pas: il vendit celle de son amie.
QUI N’A PAS DE FILLEUL?
Les «marraines» ont constitué un autre danger.
Le but réel d’un poilu en engageant une correspondance avec une femme inconnue et peut-être laide était apparemment de recevoir des encouragements moraux—c’est entendu; mais aussi parfois et souvent de recevoir des dons en nature ou en espèces.
C’était une magnifique occasion pour les espionnes d’entrer en relations avec des soldats du front, d’avoir le numéro des régiments en position, leur secteur et de connaître leur «état d’âme».
Après avoir correspondu, à la prochaine «perm’» à «Panam» le filleul venait faire connaissance de sa «marraine» et alors les effusions devenaient plus intimes et l’échange de renseignements plus complet.
En 1917, l’autorité essaya de défendre les annonces relatives aux marraines, mais en fait le système subsista.
Il était si sentimental et si poétique!
Les belles marraines ont peut-être causé quelque bien aux poilus neurasthéniques; elles ont certainement fait beaucoup de mal à l’armée. Ces bonnes dames ne se doutent pas que c’est grâce à elles que l’ennemi a pu facilement repérer les unités en campagne, et deviner les effectifs en présence.
Il n’est pas jusqu’aux cartomanciennes qui n’aient attiré l’attention de la S. G. Certaines somnambules extra-lucides, au lieu de renseigner leurs clientes, extorquaient toutes sortes de renseignements aux femmes d’officiers qui allaient les consulter sur le sort de leur mari. On dut interdire formellement leur petit commerce.
DAMES PHOTOGRAPHES
Le contre-espionnage s’est beaucoup servi des femmes, mais pas toujours avec succès, témoin cette petite actrice qui s’était dévouée pour aller amuser les officiers allemands en Belgique, et qui s’amusa tellement... qu’elle préféra ne pas revenir.
On employa aussi de timides jeunes filles à faire de l’inoffensive photographie devant des maisons, plus ou moins protégées par l’immunité diplomatique, et dans lesquelles la police ne pouvait entrer...
Ce système a été utilisé surtout chez les neutres. Boris Nadel, un agent émérite, raconte que, à Saint-Sébastien, il avait posté une jeune femme dans une maison sise juste en face de l’appartement d’un espion nommé Gruder. A l’aide d’un appareil habilement dissimulé, on prenait la photographie de tous ceux qui sortaient de ce nid d’espions. Et quand les gens suspects, arrêtés dans le Midi, protestaient de leur amour pour la France, avant de les croire, on regardait dans les fiches photographiques de Saint-Sébastien—ou de Barcelone.
POUR TROMPER L’ENNEMI
Enfin la femme est indiscrète. Ce défaut peut être utilisé pour répandre des nouvelles que l’on a intérêt à propager chez l’ennemi. A certains moments, on a usé largement de ce stratagème.
Les Anglais étaient experts dans cet art du mensonge utile.
On se rappelle le bruit qui courait à Paris au début de la guerre: plusieurs corps d’armées russes allaient venir donner la main aux armées françaises; ils étaient en route vers les côtes d’Angleterre. A Paris on a cru pendant deux mois à l’arrivée des Cosaques «en avalanche»! Les gens affirmaient les avoir vus au Havre!... On les attendit longtemps.
La rumeur avait été lancée par l’Amirauté qui voulait ainsi attirer la flotte allemande dans la mer du Nord, où elle refusait résolument de s’engager. Et de fait, de nombreux bâtiments boches vinrent voir ce qu’il en était: ils furent aussitôt torpillés.
Chez nos voisins le service secret de l’Amirauté et celui du War-Office (la guerre) ne se communiquaient pas toujours leurs projets. Un jour l’Amirauté fit répandre le bruit, absolument faux bien entendu, que la flotte anglaise songeait à fondre sur la côte allemande et à y débarquer deux divisions. Les Allemands se mirent aussitôt à concentrer des troupes sur les points vulnérables: c’était ce que voulait l’Amirauté: dérouter les Allemands. Mais le War Office n’était pas prévenu et, apprenant que les Allemands se concentraient sur les côtes, donna l’alarme et rassembla en toute hâte les troupes anglaises sur les côtes situées en face, de façon à prévenir une invasion!...
La mise en circulation systématique de fausses rumeurs dans l’espoir qu’elles arriveraient aux oreilles de l’ennemi fut un moyen souvent employé pendant la grande guerre.
RÉCAPITULATION
Avec Mata-Hari, la Francillard, la Tichelly et la femme Aubert (Loffroy), on compte quatre espionnes fusillées dans le camp retranché.
En province, il n’y eut, à notre connaissance, que deux exécutions de femmes: Margarete Schmidt, originaire de Thiaucourt, passée par les armées à Nancy, en mars 1915, et Ottilie Moss, exécutée à Bourges en mai de la même année.
Il y eut bien aussi Catherine Wheber, l’espionne de Gizaucourt, condamnée à mort par le conseil de guerre de Châlons, mais sa peine fut commuée en 20 ans de travaux forcés.
Les Allemands, eux, ont fusillé des centaines de femmes françaises et belges et une trentaine d’Anglaises.
TABLE DES MATIÈRES
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23, rue Turgot.—Tél.: Trudaine 61-79.
NOTES:
[A] Le Cri de Paris a raconté quelques histoires amusantes.
[B] On a dit aussi que c’était avec l’attaché militaire von Kallé.
[C] La condamnée avait émis la prétention d’avoir un bain de lait!... au moment où il n’y en avait pas pour nos petits enfants!...
[D] Nous avons dit que la reine Wilhelmine n’avait pas voulu faire la démarche.
[E] La secte des anabaptistes.
[F] Selon un Javanais... de Bruxelles, Mata-Hari voudrait dire «soleil», littéralement: «œil du jour». Oiseau se dirait «burong».
[G] Son état civil, que nous avons donné, établit qu’elle est née en Hollande, tout simplement.
[H] Elle avait déjà tué son cheval d’un coup de stylet d’or!
[I] C’est le comte Ignatief qui a prétendu que le capitaine Marow était réfugié dans un couvent espagnol.
[J] Cette femme vient de se rappeler à l’attention de ses contemporains—et à celle de la police—par la mort dramatique à Madrid d’un Canadien fils d’un avocat de Montréal.