Nouveau manuel complet de marine, première partie: gréement
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Title: Nouveau manuel complet de marine, première partie: gréement
Author: Phocion-Aristide-Paulin Verdier
Release date: October 13, 2012 [eBook #41038]
Most recently updated: October 23, 2024
Language: French
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Note sur la transcription: Les erreurs clairement introduites par le typographe ont été corrigées. L'orthographe et la ponctuation d'origine ont été conservées et n'ont pas été harmonisées. Une note plus détaillée se trouve à la fin de ce volume.
NOUVEAU MANUEL
COMPLET
DE MARINE.
PREMIÈRE PARTIE.
GRÉEMENT.
NOUVEAU MANUEL
COMPLET
DE MARINE.
PREMIÈRE PARTIE.
GRÉEMENT.
Par M. Verdier,
Capitaine de Corvette.
PARIS,
A LA LIBRAIRIE ENCYCLOPÉDIQUE DE RORET,
Rue Hautefeuille, nº 10 bis.
1837.
AVERTISSEMENT.
En publiant ce Manuel de Gréement, nous avons eu l'intention d'éviter aux débutans dans le métier de marin, le moment de dégoût et de découragement qu'ils éprouvent lorsqu'en voyant un navire pour la première fois, ils cherchent à se faire donner et à retenir le nom des manœuvres. Il nous a semblé utile de leur apprendre à classer leurs idées en suivant une méthode simple et claire dans la description des diverses parties du gréement.
C'est pourquoi nous avons parlé en premier lieu du dormant, puis de la garniture et du gréement des vergues, enfin, de la garniture et du gréement des voiles. En traitant ces diverses parties d'une manière générale, en les appliquant ensuite à chaque mât, à chaque vergue, à chaque voile; en expliquant les différences nécessitées par leurs positions et leurs usages, nous avons pensé que nous nous ferions mieux comprendre, que si nous avions décrit le gréement, comme on le met en place lorsqu'on grée un navire.
En marine, pour bien savoir, il faut beaucoup voir et beaucoup faire. Le grand livre pour apprendre est le navire; mais un guide est nécessaire au commençant, pour lui enseigner à réfléchir et à classer ses idées pour voir avec fruit.
C'est le but que nous nous sommes proposé; il aura été atteint, si nous facilitons à quelques-uns de nos jeunes compatriotes l'étude si utile du gréement.
MANUEL
DE GRÉEMENT.
On désigne sous le nom général de gréement, toutes les manœuvres employées à bord d'un navire. On les classe en manœuvres dormantes, manœuvres courantes et amarres.
Les manœuvres dormantes sont celles qui tiennent les mâts dans une position déterminée, et les empêchent de céder aux terribles secousses qui leur sont imprimées par la mer. Les manœuvres courantes servent à manœuvrer les vergues et les voiles.
Les amarres, à touer et amarrer le navire.
Avant de passer à la description des diverses pièces de gréement, et assigner le poste qu'elles doivent occuper, il est indispensable de donner une idée des nœuds et amarrages qui servent à les assujettir. Nous ne nous dissimulons pas combien ces descriptions sont souvent insuffisantes, et nous tâcherons d'y mettre toute la clarté et la briéveté possible, tout en prévenant le jeune marin qu'une heure de travail dans un atelier de garniture lui en apprendra davantage que la lecture de ce que nous avons à dire sur ce sujet.
CHAPITRE PREMIER.
SECTION PREMIÈRE.
NŒUDS, AMARRAGES.
Epissures.
L'épissure sert à réunir les bouts de deux cordages, ou du même cordage, ou encore à fixer le bout d'un cordage sur lui-même, pour en faire un œil ou boucle. Il y a l'épissure courte et l'épissure longue.
La première se fait en détordant, d'une même quantité, les deux bouts du cordage qu'on veut réunir, et entrelaçant leurs torons de manière qu'ils se joignent à leurs racines. On fait passer successivement chacun des torons détordus entre les torons non détordus et correspondans de la partie opposée. Chaque toron passe de la même manière deux ou trois fois, après quoi on coupe les bouts restans au bas du cordage. Pour séparer les torons, on se sert d'un instrument en fer de forme conique et légèrement recourbé, qu'on appelle épissoir.
Si on veut faire un œil ou boucle, on détord un bout du cordage, et l'appliquant sur le cordage lui-même, suivant la grandeur qu'on veut donner à l'œil, on entrelace les torons détordus comme nous venons de le dire plus haut.
L'épissure longue se fait en décomettant un toron des deux cordages qu'on veut épisser, et substituant, à partir de la moitié de la longueur que l'on veut donner à l'épissure, le toron de l'un à celui de l'autre. On coupe la partie excédante, après l'avoir croisée par un demi-nœud avec le toron correspondant du cordage opposé, et l'avoir passée dans l'intérieur de ce même cordage. Pour employer les troisièmes torons, on les fait croiser comme les premiers; on les fixe par un demi-nœud, et on coupe l'excédant.
Amarrage à plat.
Cet amarrage sert à réunir, sans les croiser, deux cordages différens ou deux bouts du même cordage.
On fait, à l'un des bouts de la ligne qui doit servir à l'amarrage, un œil au moyen d'une épissure, passant le bout dans l'œil, on forme un nœud coulant dont on embrasse les deux cordages qu'on veut réunir, et on continue à les envelopper ainsi de plusieurs tours aussi rapprochés les uns des autres que possible, et souqués fortement au moyen d'un cabillot en fer, qui, appuyé sur le côté opposé d'où vient l'amarrage, sert de levier. Si on veut une seconde couche de tours, parvenu au dernier, on fait passer la ligne en dedans des tours, et on recommence les tours. Avec le bout qui reste on croise, dans le sens de la longueur, le rang ou les deux rangs qu'on vient de former, et on engage le bout en faisant un nœud à son extrémité, de manière qu'il ne puisse se dépasser.
Amarrage en Étrive.
L'amarrage en étrive est un amarrage plat, mais dont les bouts doivent se croiser après. Si on veut estroper une cosse ou un cap-de-mouton, on l'entoure avec le cordage, et au point de rencontre on fait un amarrage plat; on retrousse le bout excédant le long du cordage principal, pour l'y fixer au moyen d'un nouvel amarrage plat, et ce premier amarrage plat reçoit le nom d'amarrage en étrive.
Cul-de-Porc.
Le cul-de-porc est un nœud qu'on fait à l'extrémité d'un cordage pour l'empêcher de se dépasser d'un cap-de-mouton ou tout autre objet. On décomet le bout du cordage, et courbant les torons sur eux-mêmes, on les enlace de manière que les trois bouts passent en dedans et forment le centre; on les lie entre eux, ou on les enlace de nouveau, ce qui forme une tête d'alouette. On coupe les bouts excédans.
Nœud de Hauban.
Ce nœud, ainsi que son nom l'indique, sert à rapprocher les deux parties d'un hauban, ou toute autre manœuvre dormante.
On sépare d'abord, sur une certaine longueur, les torons des deux parties à joindre, en les croisant comme pour l'épissure; mais au lieu de les faire passer dans les torons non décomis, on les enlace ensemble, comme nous l'avons dit pour le cul-de-porc. Les bouts excédans sont peignés et appliqués sur les haubans, où l'on fait un garni de lusin ou merlin.
Aiguilletage.
L'aiguilletage sert à réunir deux cordages garnis d'un œillet, ou à fixer une caliorne sur son pendeur, ou une poulie sur son piton. L'un des deux objets qu'on veut réunir est garni d'un cordage appelé aiguillette, qu'on fait passer successivement d'un œillet à l'autre, en ayant soin de faire les tours également tendus, après quoi on les bride en travers avec le dernier bout de l'aiguillette qu'on engage dans les tours.
Genopes.
Les genopes servent à réunir deux cordages entre eux, ou un cordage sur une vergue, etc. Ce ne sont que des amarrages plats, avec cette différence que le premier rang, au lieu d'être en tours simples, est en tours croisés, passant alternativement de dessus en dessous des deux objets réunis.
Nœud plat.
Pour réunir deux cordages par un nœud plat, il faut croiser les deux extrémités en les tenant, celui de gauche par la main droite, et celui de droite par la main gauche. Celui qui vient de la gauche ayant passé de dessus en dessous, on le fait passer de devant en arrière, de manière que chaque extrémité du cordage se trouve à côté du morceau auquel il fait suite. C'est le nœud qu'on emploie pour amarrer les garcettes de ris.
Demi-Clef.
La demi-clef sert à arrêter immédiatement un cordage sur un objet quelconque: on passe le cordage sur l'objet, et, le ramenant sur la partie tendue, on engage le bout entre le cabiot, par exemple, et la partie qui l'entoure, en faisant soit une genope pour l'arrêter, soit une nouvelle demi-clef.
Nœud d'Enfléchures.
Le nœud d'enfléchures, qui sert à fixer les enfléchures sur les haubans, se compose de deux demi-clefs renversées. Appliquez sur la partie du hauban qui vous fait face, le quarantenier dont vous voulez faire l'enfléchure, tournez-le autour du hauban en le faisant passer en dessous et par-dessus le premier tour; ramenez le bout en dessous après lui avoir fait faire un second tour en souquant fortement, vous aurez deux demi-clefs dont les bouts se présenteront l'un sur l'avant, l'autre sur l'arrière.
Nœud d'Agui, simple et double.
Le nœud d'agui sert à former une chaise avec un cartahu pour suspendre un matelot le long d'une manœuvre qu'il doit réparer, d'une voile ou du bord. On tourne le cartahu sur lui-même, à quatre ou cinq pieds de son extrémité, et on fait ainsi une espèce d'œil dans lequel on fait passer cette extrémité. On le dirige ensuite sur la partie tendue, de manière à l'envelopper, et on le ramène dans l'œil que l'on souque fortement. C'est le nœud d'agui simple. Si le cordage avec lequel il est fait est double, ce qui est plus commode pour l'homme qui travaille, puisque, pendant qu'il est assis dans un des doubles, l'autre le soutient sous les bras, le nœud est dit, nœud d'agui double.
Nœud d'Écoute.
Ce nœud, dont le nom indique assez le but, et qui sert aussi à frapper l'orin sur la bouée, la ligne de sonde sur le plomb, etc., se fait en passant le bout du cordage dans l'œillet de l'objet auquel on doit le fixer, en le ramenant sous la partie du même cordage introduite dans l'œillet, de manière à embrasser les deux branches de celui-ci. En tirant ensuite sur le cordage, le bout se trouve tellement souqué qu'il ne peut se dépasser. Si ce nœud s'emploie sur des amarres pour touer un navire, il est prudent de fixer le nœud d'écoute par une demi-clef et un amarrage.
SECTION II.
Nous ne pousserons pas plus loin cette description des nœuds, mais nous allons donner quelques renseignemens indispensables pour bien saisir ce que nous avons à dire sur le gréement.
Une manœuvre est garnie en bitord, lorsqu'elle est recouverte de tours de bitord bien souqués et rapprochés autant que possible. Cette opération se fait au moyen d'un maillet, appelé mailloche à fourrer, qui porte une rainure cylindrique et longitudinale. Le bitord étant frappé sur le cordage qu'on veut garnir ou fourrer, on en fait deux tours sur la mailloche et son manche, et on la tourne de dessous en dessus, la rainure appliquée sur le cordage, tandis qu'un homme, qui tient une pelote de bitord, la fait mouvoir dans le même sens. Il va sans dire que le cordage doit être fortement tendu pendant cette opération.
Un cordage est congréé lorsque l'espace vide que laissent les torons après la torsion est rempli par un cordage d'une dimension suffisante pour donner au cordage congréé une forme cylindrique. Autrefois on congréait les étais et quelquefois même les haubans; mais cette méthode a été abandonnée comme nuisible, parce qu'elle charge le gréement d'un poids inutile, sans augmenter sa solidité; et en second lieu, parce que l'eau de pluie séjournait entre le cordage et son congréage, et hâtait son dépérissement.
Un cordage est garni en toile ou limandé lorsqu'on le recouvre de bandes de toile goudronnées. Les bandes ont de trois à quatre pouces de largeur et se roulent de manière à se recouvrir par la moitié. On les fixe par quelques tours de bitord bien serrés, mais placés à environ un pouce ou deux de distance.
On garnit quelquefois les cordages en basane ou en peau. Pour cela, on coupe la peau ou la basane en bandes égales à la circonférence du cordage, et après les avoir fait macérer dans l'eau pour qu'elles puissent être travaillées plus commodément, on les coud sur le cordage qu'on veut garnir.
On appelle paillets, des espèces de nattes confectionnées avec du bitord ou des torons tressés ensemble. On en fait un fréquent usage à bord pour empêcher le frottement qui pourrait entraîner la perte de telle ou telle partie du gréement. Ainsi, on en place sur les haubans et galhaubans, à l'endroit où les vergues, lors du brasséiage, portent dessus, et qu'on appelle pour cela paillets de brasséiage. On en place aussi sur les colliers des étais pour qu'ils ne soient pas ragués par les ralingues des huniers et des perroquets; sur la partie des ancres placées dans le porte-haubans, aux bossoirs, et qui peuvent se trouver en contact avec les écoutes des basses voiles ou toute autre manœuvre, etc.
Les sangles, faites en fil de carret ou en bitord fin, sont plus légères et sont employées dans le même but que les paillets. On en garnit ordinairement les ralingues de bordures des basses voiles et huniers, et le premier hauban tribord et babord, au grand mât et au mât de misaine, pour les préserver du frottement des basses voiles.
L'erse est un assemblage de fils de carret ou de bitord liés ensemble par l'excédant même de ce fil de carret ou de ce bitord. Pour la former, il faut, ayant deux points fixes, deux taquets par exemple, faire dormant sur l'un d'eux, et, allant de l'un à l'autre, les envelopper successivement jusqu'à ce que l'erse ait le nombre de fils voulus; après quoi on les lie ensemble par le moyen de demi-clefs espacées de deux à trois pouces. On forme ainsi une espèce de bague qui sert à soulever les fardeaux. Pour cela, on entoure l'objet avec l'erse, puis on passe un des bouts dans l'autre, et on croche le palan ou caliorne sur le bout supérieur.
Lorsque l'erse est faite avec un cordage dont on a réuni les deux bouts par le moyen d'une épissure à la longue, elle prend le nom d'élingue. Elle sert aux mêmes usages que l'erse.
Les caps-de-mouton, les cosses et les poulies sont souvent entourés d'un cordage qu'on a bagué au moyen d'une épissure. Ces cordages, ainsi préparés, sont appelés estropes, et l'objet est dit estropé. L'estrope réunit deux objets qui doivent agir ensemble. Ainsi, une poulie de retour est estropée sur la cosse d'un piton, c'est-à-dire que la même estrope les enveloppe, et qu'un amarrage placé entre la cosse et la poulie les empêche de se dégager de leurs goujures. Les estropes faites au moyen de l'épissure longue doivent être préférées. En général on les garnit en bitord, toile, peau ou basane.
Un palan est l'assemblage de deux poulies, l'une double et l'autre simple, réunies par un cordage appelé garant.
On les désigne ordinairement par le nom de l'action à laquelle ils sont employés, et on dit palans de bouline, palans d'amures. Mais leur véritable différence est non dans leur force et leur emploi momentané, mais dans la manière dont la poulie double est estropée.
Les estropes sont à fouet ou à croc. Le fouet est formé par une des branches de l'estrope qui s'élève au-dessus de la partie supérieure de la poulie, lorsqu'on a fait l'épissure. Si le cordage n'est pas assez maniable pour le frapper facilement, on le décomet et on en fait une garcette.
Le fouet se frappe sur un cordage en l'embrassant par deux tours, en le croisant ensuite et ramenant le bout du fouet en dessus tourné autour du cordage, ou on l'arrête par un amarrage.
L'estrope à croc porte, dans son pli supérieur, une cosse à croc.
Tout cordage qui se frappe sur un autre pour s'opposer à son action, est appelé bosse.
Les bosses sont à fouet ou à aiguillette.
A fouet, elles sont formées par un cordage dont une extrémité porte un œillet au moyen duquel on la fixe sur un piton ou tout autre point en l'y baguant. Son extrémité, décomise ordinairement, est tressée en garcette pour se frapper plus facilement; ce qu'on fait comme pour le palan.
A aiguillette, le cordage qui les forme est terminé par un cul-de-porc double qu'on bride sur le cordage à arrêter par une aiguillette adaptée en dessous du cul-de-porc. L'extrémité opposée est à cosse ou à croc, pour se crocher ou s'aiguilleter au lieu convenable.
Le dormant d'une manœuvre est son point fixe inamovible; son courant est la partie sur laquelle on agit pour produire l'effet.
CHAPITRE II.
SECTION PREMIÈRE.
MANŒUVRES DORMANTES DES BAS MATS.
Beaupré, Liûres.
Aussitôt que les bas mâts sont en place on doit s'occuper à les tenir.
Le mât de beaupré portant tous les étais du mât de misaine qui, lui-même, porte ceux des grands mâts de hune et de perroquet, étant placé à l'extrémité du navire, où les secousses imprimées par le tangage sont les plus violentes; supportant, dans ce même instant, presque tout le poids de la mâture que le mouvement de tangage jette en arrière, a besoin d'être établi de la manière la plus solide, et sa tenue, d'où dépend souvent celle du reste de la mâture, doit être l'objet des soins du second et du maître d'équipage.
Le mât de beaupré est retenu dans son étambraie par les deux apôtres, et son extrémité inférieure est engagée entre deux fortes pièces de bois ou montans appelés flasques de beaupré.
Pour faire adhérer autant que possible le beaupré au corps lui-même du navire, on le lie à la guibre par le moyen d'un ou deux amarrages appelés liûres de beaupré. Pour que les tours du cordage ne s'allongent pas une fois l'amarrage fait, on se sert en général d'un cordage qui a servi, mais sans avoir perdu de sa force. Ordinairement on emploie une guinderesse. Il y a dans la guibre autant de mortaises qu'il doit y avoir de liûres. Avant l'opération, on charge le beaupré d'un poids considérable, en suspendant à son extrémité une embarcation ou une barrique, etc., afin qu'il s'applique plus parfaitement sur la guibre.
S'il y a plusieurs liûres, on commence par celle d'en dedans. On fixe par un nœud coulant la guinderesse sur le beaupré, on la fait passer dans la mortaise, et après avoir fait un tour sur le mât en avant du dormant, on la fait passer de nouveau dans la mortaise en arrière du premier tour qu'elle croise. Si l'on a pu se procurer un ponton pour faire cette opération, la guinderesse vient, de la mortaise, passer dans une poulie de retour crochée sur le ponton, et se garnit à son cabestan; sinon on fixe une poulie de retour dans un des trous de sous-barbe de la guibre, et la guinderesse vient, de là, en passant par le chaumard de l'amure de misaine, ou l'écubier, se garnir au cabestan. Ce tour bien raidi, on fait deux ou trois genopes à demeure, et on dévire le cabestan pour faire un second tour qu'on raidit et genope de la même manière. Le nombre des tours qu'on veut donner à la liûre étant faits, on les bride ensemble avec le bout restant entre le mât et la guibre. La seconde liûre se fait de la même manière.
Autrefois, et quelquefois encore aujourd'hui, on clouait sur le beaupré et la guibre les tours de la liûre ainsi faite, afin de les empêcher soit de se desserrer, soit d'avoir un mouvement de l'avant à l'arrière, soit afin de tenir le mât lors même que l'un des tours viendrait à casser. Mais cette habitude est abandonnée par tous les marins que la routine seule ne conduit pas; car il est évident que le clou qui traverse le cordage le prive d'une partie de sa force et hâte sa pourriture par l'eau qui le pénètre.
Les liûres faites, on les entoure sur le beaupré de taquets cloués de l'avant et de l'arrière pour empêcher tout mouvement. On les enveloppe d'une toile peinte, clouée sur le mât et lacée entre ce dernier et la guibre. La partie de la liûre qui embrasse la guibre est recouverte par une feuille de plomb. Après des traversées longues et pénibles, il faut avoir soin de faire déclouer le plomb et la toile pour visiter les liûres et les faire sécher et aérer.
Sous-Barbes, fausses Sous-Barbes, Capelage.
Au milieu de la longueur totale du mât de beaupré, ou plutôt aux deux tiers de sa partie extérieure, à partir de l'étambraie, on aiguillette deux moques pour le ridage des étais de misaine. Ces moques sont à doubles goujures, leur estrope doit donc être double. Elles sont aiguilletées sur le beaupré, mais sur ses côtés, de manière à laisser entre elles l'espace nécessaire au passage du bâton de foc. On peut aussi estroper les deux moques avec le même cordage, en laissant entre les deux amarrages qui les fixent un espace égal au diamètre du beaupré. Ces moques sont souvent remplacées par de fortes cosses à doubles goujures qui en portent une seconde, sur laquelle viennent se fixer les étais de misaine.
De l'avant et de l'arrière des moques d'étai on aiguillette les moques des sous-barbes, au-dessous du beaupré. Les sous-barbes sont formées par un cordage qui passe dans une mortaise pratiquée à la guibre et dont les deux bouts viennent s'épisser. Dans le pli supérieur on fixe, par un amarrage plat, une moque semblable à celle du beaupré. On les réunit par une ride qui va de l'une à l'autre, et dont on a soin de raidir tous les tours au moyen d'un fort palan; tours qu'on doit genoper l'un à l'autre toutes les fois qu'on largue le palan pour en passer un nouveau; on les bride ensuite avec le bout excédant.
D'après la place qu'occupent les sous-barbes, on voit qu'elles doivent contre-balancer les efforts des étais de misaine; il faut donc les tenir avec beaucoup de soin, et pendant leur ridage charger la tête du mât comme nous l'avons dit pour faire les liûres.
Presque à l'extrémité du mât on aiguillette une troisième moque qui sert au ridage de la fausse sous-barbe, en tout semblable aux sous-barbes que nous venons de décrire. Celle-ci est destinée par sa position à contre-balancer l'effort de l'étai du petit mât de hune et de la draille du petit foc.
Pour éviter que les sous-barbes soient raguées par les câbles-chaînes, la fausse sous-barbe et la seconde sous-barbe sont elles-mêmes en chaînes, ou au moins leur partie inférieure est formée par une chaîne qui, au moyen d'un petit boulon, vient se marier à la cosse qui porte le cordage qui fait l'extrémité supérieure de la sous-barbe.
Il n'est même pas rare de voir des navires ayant toutes leurs sous-barbes en chaînes. Mais si le beaupré est tenu par ces dernières d'une manière plus solide, puisqu'elles n'adonnent pas comme les sous-barbes en filin, ce manque d'élasticité ne les expose-t-il pas à une rupture plus facile dans les violens coups de tangage?
En résumant ce que nous venons de dire, on voit que le capelage du beaupré se compose de l'estrope de la première sous-barbe, et avant l'estrope ou les deux estropes pour les moques des deux étais de misaine, les estropes, ou plutôt l'estrope à deux branches pour les poulies des boulines de misaine; l'estrope de la seconde sous-barbe, presque à l'extrémité du mât; l'estrope pour la fausse sous-barbe. Lorsque ce capelage est terminé, pour l'empêcher de tomber sur l'arrière, en ridant les sous-barbes et les étais, on cloue sur l'arrière un fort croissant en bois, soutenu par des taquets.
Haubans.
Quelquefois, avant de prendre la mer, on consolide encore le beaupré au moyen de deux haubans. Ces haubans sont formés par un cordage double, dont le pli inférieur porte une cosse et un croc qui se croche à un piton disposé à cet effet sur la joue du navire. Le pli supérieur porte un cap-de-mouton, une moque ou une cosse, arrêté par un amarrage plat, et qui, garni d'une ride, vient se rider sur deux caps-de-mouton, moques ou cosses, aiguillettes, en avant de la moque de la seconde sous-barbe. Ces haubans et leurs moques s'enlèvent ordinairement au mouillage.
Garde-Corps.
Sous le chouc du beaupré, qui est placé verticalement et qui est mis en place avant de mâter, sont deux pitons sur lesquels on épisse un cordage qui, garni d'une cosse, vient rider sur deux montans en fer fixés sur la tête des apôtres. Ces cordages, appelés garde-corps, servent aux matelots pour monter et descendre le long du mât avec facilité.
Des Haubans et des Étais des bas Mâts.
Les bas mâts sont tenus par des haubans et des étais. Les haubans tiennent les mâts de l'arrière, et les empêchent d'obéir aux mouvemens du roulis, c'est-à-dire d'un bord sur l'autre. Pour lier de la manière la plus favorable le mât au navire, il a fallu, en prenant pour point fixe le capelage du mât, en avoir un second sur le navire pour raidir le hauban convenablement, et éloigné autant que possible du pied du mât; car on conçoit qu'il sera d'autant mieux tenu que l'angle que fera son axe avec la direction du hauban sera plus grand. Ce point a été trouvé au moyen du porte-hauban, plate-forme en bois située à l'extérieur, à partir de la face avant du mât, et continuée de l'arrière, d'une quantité suffisante pour porter le dernier galhauban de perroquet.
La chaîne de bas hauban se compose d'une barre de fer rond, doublée sur elle-même, portant à son extrémité supérieure une estrope en fer, qui remplit la gougure d'un cap-de-mouton; et à son extrémité inférieure, une barre de fer plat, qui est chevillée et boulonnée sur les préceintes, les membres et le vaigrage. La partie inférieure de l'estrope en fer du cap-de-mouton repose dans une échancrure pratiquée au bord extérieur du porte-hauban, recouverte, après que tous les caps-de-mouton sont en place, par une forte tringle en bois.
On emploie pour la confection des haubans, du chanvre de premier brin, commis en aussière, c'est-à-dire à quatre. Ce cordage doit être plus commis que les manœuvres courantes, afin d'adonner le moins possible, et d'éviter par là de rider; opération toujours longue et difficile à la mer.
Il y a peu d'années encore que plusieurs vaisseaux de guerre et même des frégates avaient leurs bas haubans en grelin; mais ce commettage a été abandonné et n'existe que pour les étais.
La longueur des haubans se prend en mesurant la distance du capelage aux porte-haubans. A bord des bâtimens de guerre, on augmente cette quantité de trois, quatre ou cinq pieds, suivant le rang du bâtiment, afin que le hauban puisse être épissé plusieurs fois, s'il est coupé par les boulets de l'ennemi.
Le nombre des haubans n'est pas déterminé d'après une règle fixe; les bâtimens de guerre seuls sont soumis à un tarif. Leur grosseur n'est soumise à aucune règle[1], cependant on leur donne en général les deux tiers de l'étai du grand mât, qui est lui-même les deux tiers du câble, lequel a un demi-pouce de circonférence par pied de bau.
Le mât de misaine a un hauban de moins que le grand mât; le mât d'artimon un tiers de moins, et quelquefois il est au-dessous de cette quantité; car un bâtiment ayant sept haubans au grand mât, n'en porte en général que quatre à son mât d'artimon.
Avant de couper les haubans, il faut faire élonger à la caliorne, et même s'il est possible au cabestan, les pièces de cordage qui doivent servir à leur confection. Il est bon de les laisser ainsi élongées pendant vingt-quatre ou quarante-huit heures, pour leur faire subir une première tension et les empêcher de se rouler sur elles-mêmes; ce qu'on appelle faire des coques.
Les haubans se coupent par paire. A partir d'un piquet ou d'une épontille, on mesure sur le plancher la distance du capelage au porte-hauban, à laquelle on ajoute la moitié de la circonférence du mât pour former l'œillet du capelage. De cette marque, sur laquelle on fixe le bout du cordage, des hommes tenant la pièce marchent vers le piquet, font passer le cordage sur son avant, redescendent vers la marque, et alors on coupe le cordage à un demi-pied environ au-delà de cette même marque, parce que cette seconde branche doit être plus longue que la première, à cause de son obliquité. La première paire du bord opposé se coupe de la même manière; seulement, comme elle est capelée au-dessus, elle doit être plus longue du diamètre du cordage, c'est pourquoi en la coupant on la fait passer sur l'avant de la paire déjà coupée. On continue pour les autres paires comme on vient de le dire, en ayant soin de donner à chaque branche un demi-pied environ de plus qu'à celle qui doit la précéder sur le mât. Lorsque tous les haubans sont coupés, on marque le point du cordage qui touchait le piquet, non comme le milieu de la paire des haubans, puisqu'une branche est plus longue que l'autre d'un demi-pied, mais comme le milieu de l'œillet du capelage. On marque aussi, au moyen d'un lusin engagé entre les torons, le numéro de la paire.
Cela fait, chaque paire est élongée sur les chevalets et raidie avec un vireveau ou une caliorne. On garnit en bitord l'œillet du capelage et chacune des branches jusqu'au point où doivent aboutir les gambes de revers. Ce point se trouve en portant, de chaque côté du milieu de l'œillet du capelage, une distance égale à la longueur du tour du mât. Les premiers haubans de l'avant au grand mât et au mât de misaine sont garnis en bitord dans toute leur longueur, pour résister au frottement des basses voiles; on les couvre outre cela d'une sangle lorsqu'on est à la mer. Quelquefois, avant de garnir de bitord, on limande le hauban; mais c'est lourd et inutile.
La garniture faite, on retire les haubans de dessus les chevalets, et les pliant à partir du milieu de l'œillet de capelage, on fait, avec une forte ligne ou quarantenier, un amarrage plat de huit ou dix tours, qui détermine cet œillet. Au bout de chaque branche, on fixe, par un amarrage à faux frais, un cap-de-mouton garni de sa ride.
Si le nombre des haubans est impair, le dernier hauban de chaque bord est formé avec le même morceau de cordage; l'amarrage qui forme l'œillet du capelage est fait en croisant les branches, et en capelant on en laisse tomber une à tribord et l'autre à babord.
Au lieu de se servir de ce moyen, quelquefois une des branches de la première paire de chaque bord n'a que le quart de la longueur du hauban, et portant une forte cosse enveloppée par son extrémité inférieure et épissée par-dessus, sert de pendeur de caliorne.
Les étais sont destinés à maintenir les mâts sur l'avant en s'opposant à l'effet du tangage. Ils sont en cordage commis en grelin, c'est-à-dire qu'après avoir commis trois torons pour en faire un cordage, on commet ensemble trois de ces cordages et on forme le grelin. Cette espèce de cordage adonne moins que celui commis en aussière, et c'est pour cette raison qu'on s'en sert pour la confection des étais.
La pièce de cordage qu'on destine à faire un étai, doit être élongée au moyen d'une caliorne ou d'un cabestan, et laissée, s'il est possible, deux ou trois jours dans cette position, en ayant soin de faire virer plusieurs fois dans cet intervalle sur la caliorne ou le cabestan, pour abraquer le mou qui doit résulter de cette tension.
Il y a deux manières de préparer l'étai pour le rendre propre à être capelé: 1º l'étai ayant été coupé à la longueur convenable, on l'élonge en le raidissant fortement par deux caliornes. A une des extrémités on fait un œillet assez grand pour y passer l'étai lorsqu'il aura été garni. On mesure, à partir de l'œillet, une longueur égale à celle du ton du mât, et on marque. A cette marque, on fait, au moyen d'un garni de bitord, recouvert par un tissu de ligne ou de bitord en queue de rat, un bourlet appelé pomme d'étai, dont le grand diamètre qui fait face à l'extrémité inférieure de l'étai, doit être le double de celui de l'étai et qui se termine en diminuant graduellement vers l'œillet. Après avoir garni en bitord toute la partie qui sépare la pomme de l'œillet, on passe le bout inférieur dans l'œillet jusqu'à ce qu'il s'arrête à la pomme, et on a par ce moyen un vaste collier qui peut embrasser le capelage. Cette manière de confectionner les étais est en général abandonnée, on y substitue la suivante:
L'étai étant élongé comme nous l'avons dit, on fait à une de ses extrémités un œillet du diamètre de l'étai. On mesure, à partir de cet œillet, une longueur égale à celle de la moitié du ton du mât pour lequel on travaille, et on marque. On prend un morceau du même cordage qui a servi à faire l'étai, et à une de ses extrémités on fait un œillet comme celui dont nous venons de parler. On applique œillet contre œillet, et le morceau de cordage contre l'étai jusqu'à la marque qui a été faite en portant dessus la demi-longueur du ton, et au-dessous de cette marque on épisse le morceau de cordage sur l'étai. On a formé ainsi deux branches égales en longueur et en force, et qui, au moyen d'une aiguillette frappée sur l'un des deux œillets, et passant successivement de l'un dans l'autre, embrassent le capelage et y fixent l'étai. On garnit en bitord depuis les œillets jusqu'à un pied environ au-dessous de l'épissure.
Capeler les Élongis, les Traversins et les Hunes.
Ordinairement lorsqu'on mâte, surtout avec une machine à mâter, le mât est mis en place avec ses élongis; dans le cas contraire, on les met en place de la manière suivante: (la tête de chaque mât doit être garnie de deux poulies aiguilletées, dans lesquelles passent deux cartahus.) Supposons qu'on veuille capeler les élongis du grand mât, on les dispose sur l'avant du grand mât, dans le sens qu'ils doivent prendre sur les jottereaux. On affale les deux cartahus, et on les frappe sur la partie avant, en les élongeant extérieurement et les genopant au milieu et sur la partie arrière. On frappe sur l'avant un cartahu de retenue qui vient passer au mât de misaine. Les cartahus étant passés dans des poulies de retour, on fait hisser, en abraquant celui du mât de misaine. Par la manière dont les cartahus sont frappés, la partie arrière de l'élongis se présente la première; on les fait emboîter, et coupant la genope on continue à hisser, ce qui fait prendre à l'élongis une position horizontale et donne la facilité de le fixer sur les jottereaux à la place qu'il doit occuper. Les charpentiers mettent les clefs, et on défrappe les cartahus.
Les élongis de misaine et d'artimon se hissent et se mettent en place de la même manière.
Les élongis capelés, on dispose, dans le sens qu'ils doivent occuper, les barres traversières ou traversins; on frappe un cartahu sur chaque bout, et celui de retenue au milieu; on fait hisser en abraquant la retenue jusqu'à ce que le traversin soit en dessus des adens pratiqués sur les élongis, puis on amène en faisant emboîter le traversin dans les adens, après quoi on les fixe au moyen de chevilles.
La hune est une espèce de plate-forme qui repose sur les élongis et les traversins. Sa largeur est ordinairement la moitié de celle du navire, et sa longueur est un peu moindre. Sa face arrière est coupée carrément, et sa face avant arrondie. Tribord et babord, elle est percée de trous quadrangulaires pour laisser passer les lattes des caps-de-mouton des haubans de hune. Dans le milieu est un trou carré, dont le côté a le tiers de la largeur de la hune, et qui reçoit le nom de trou du chat.
Pour la hisser, on la pose sur le pont, la partie circulaire sur l'avant et dans sa position naturelle. On frappe sur sa partie arrière en faisant passer de dessous en dessus, par le trou du chat, deux cartahus, et on les genope de distance en distance jusqu'à sa partie circulaire, de manière qu'elle puisse monter dans une position verticale. Un cartahu venant du mât d'artimon, si on hisse la grande hune, et du grand mât, si on hisse la hune de misaine, est frappé en patte d'oie sur la partie arrière, et genopé sur l'avant, afin de l'écarter des élongis. Lorsqu'après avoir hissé, elle a dépassé les élongis, on mollit la retenue dont on coupe la genope. Quand la hune qui s'appuie sur le ton du mât touche les poulies des cartahus, on coupe les premières genopes en continuant à hisser. La partie avant du trou du chat se trouve bientôt au-dessus du ton du mât, alors on abraque la retenue, et la hune, exécutant un mouvement de bascule, prend une position horizontale et se trouve suspendue par les cartahus genopés sur son milieu; on l'amène dans la position qu'elle doit occuper sur les barres, et on l'y fixe par des chevilles à goupille.
CAPELAGE DES BAS MATS.
Capelage du grand Mât.
Avant de capeler, on fixe des coussins en bois mou sur les élongis, et on goudronne la partie du ton sur laquelle doit reposer le capelage.
Les haubans sont élongés sur le pont ou dans un canot le long du bord; on affale le cartahu de tribord, et on le frappe au milieu du hauban portant le nº 1; on fait ensuite deux genopes, la première à quelques pieds en dessous de l'amarrage, et la seconde sur l'œillet du capelage. On hisse; cette seconde genope étant parvenue à toucher la poulie du cartahu, on la coupe, et continuant à hisser, l'œillet du capelage dépasse le ton du mât; les gabiers le font incliner sur babord, et en amenant le cartahu il prend le ton du mât. Alors on le fait descendre sur les coussins des élongis en le forçant à coups de maillet.
Quoiqu'il importe fort peu de quel bord on commence le capelage, l'habitude est de commencer par tribord au grand mât et au mât d'artimon, et par babord au mât de misaine.
Lorsque le nombre des haubans est impair, la première paire a pour seconde branche un pendeur ayant pour longueur le quart du hauban, lequel pendeur porte à son extrémité une forte cosse, afin de recevoir l'aiguillette de la caliorne.
Si, le nombre des haubans étant pair, on veut avoir les pendeurs des caliornes capelés, on les forme du même bout de cordage en croisant l'amarrage, et commençant le capelage par eux on jette une branche de chaque bord. Si, outre le pendeur de caliorne, on veut capeler celui de candelette, alors ils se forment comme nous venons de le dire, et les deux branches tombent du même bord. Mais en général on ne capelle plus les pendeurs, et on les met en place lorsqu'ils sont nécessaires, en faisant un tour mort sur le capelage.
La première paire de haubans étant capelée, on capelle la seconde, qui devient première du côté de babord, et on lui donne une direction absolument semblable. On capelle ensuite la troisième paire, et en faisant descendre son œillet pour l'appliquer exactement sur celui de la deuxième, on a soin de le faire un peu biaiser, afin que ses branches tombent en arrière de celles déjà en place. On capelle ensuite la quatrième paire à babord, la cinquième à tribord, de manière que, le capelage terminé, les numéros impairs sont à tribord, et les numéros pairs à babord. A mesure qu'une paire est capelée, on passe la ride du cap-de-mouton du hauban dans celui correspondant sur le porte-haubans, quoiqu'il n'y soit fixé que par un amarrage à faux frais; mais c'est afin de ne pas les laisser pendre le long du mât.
Pour capeler l'étai, on passe deux cartahus par le trou du chat et en dehors des élongis, on les frappe à deux pieds environ de l'épissure des branches de l'étai, et l'on genope ensuite chaque cartahu sur une des branches. En hissant, elles viennent embrasser les élongis. Quand elles sont dans la hune, on coupe les genopes et on amarre les cartahus afin d'avoir plus de facilité à faire l'aiguilletage des deux branches; lorsqu'il est terminé, on largue les cartahus et on amarre à faux frais l'étai sur le point où plus tard il sera raidi. Après l'étai, et de la même manière, on capelle le faux étai; mais, à bord de beaucoup de navires, au lieu d'un étai et d'un faux étai, on capelle deux étais égaux. On conçoit alors qu'on a dû diminuer la grosseur de l'étai; c'est ce qu'on a fait en prenant, en général, pour circonférence de chacun des étais égaux, la moyenne entre celle du grand étai et de son faux étai.
Le grand étai avait les deux tiers du câble, et le faux étai, les deux tiers du grand. Un navire de trente pieds de baux avait donc un étai de 10 pouces et un faux étai de 6-2/3; il aura maintenant deux étais de 8 pouces ½.
Le grand étai, ou plutôt les grands étais, car, comme nous l'avons dit déjà, presque tous les navires portent, à leur grand mât et à leur mât de misaine, deux étais égaux, sont disposés de diverses manières:
A une estrope faite avec un cordage dont la dimension est les deux tiers de l'étai, est fixée la moque de ridage; et après que l'amarrage à plat a été fait, les deux branches passent dans des trous garnis en plomb, pratiqués de chaque côté de l'étrave dans la muraille du navire, puis, se croisant sur la courbe de capucine, remontent en se fixant sur elles-mêmes par plusieurs amarrages plats.
On dispose deux moques semblables en les faisant incliner un peu, l'une sur tribord, l'autre sur babord, pour qu'elles correspondent plus exactement aux étais qui passent le premier à tribord, le second à babord du mât de misaine. Ce dernier est garni d'un croissant en bois tendre, pour ne pas être endommagé par les étais qu'on a soin de fourrer et de recouvrir en basane à ce point.
Les estropes dont nous venons de parler sont limandés à leur partie extérieure, qu'on recouvre avec une plaque de plomb clouée. On remplace quelquefois les moques par des cosses, et les étais, où portent des moques semblables qu'on réunit par une ride, ou passent dans la cosse.
Quelquefois deux fortes boucles, chevillées et boulonnées sur bau, tribord et babord du mât de misaine, portent les cosses sur lesquelles les étais viennent se raidir.
On peut, au lieu de capeler les haubans, comme nous l'avons indiqué plus haut, les uns sur les autres, les capeler les uns dans les autres; c'est-à-dire que chaque œillet de la paire de babord, au lieu de reposer sur l'œillet correspondant de tribord, l'embrassera. Il est évident que pour que cela puisse avoir lieu, il a fallu, en confectionnant les haubans de babord, augmenter d'une quantité suffisante le diamètre de l'œillet du capelage. Cette installation réduit nécessairement de moitié la hauteur du capelage, et fait paraître le gréement plus léger.
Capelage du Mât de Misaine.
Après avoir mis les coussins sur les jottereaux, comme on l'a fait au grand mât, on capelle une forte poulie, ou mieux, encore une moque à rouet de fonte, pour le passage de l'étai du grand mât de hune. Elle doit présenter de l'arrière et dans la direction du milieu du mât. On capelle ensuite les haubans comme on l'a dit pour le grand mât, avec la seule différence que le premier est mis à babord, et que le capelage une fois terminé, les numéros impairs sont à babord, et les numéros pairs à tribord.
L'observation faite pour les pendeurs des caliornes et des candelettes du grand mât, s'applique aussi à ceux de misaine.
Les étais ayant été capelés, leurs extrémités vont s'amarrer, à faux frais, sur les deux moques placées, pour leur ridage, au capelage du mât de beaupré.
Capelage du Mât d'Artimon.
Les coussins mis en place, on capelle une poulie double qui doit servir pour former le palan de la drisse de corne; elle doit donc être de l'arrière et répondre entre les deux élongis. Cette poulie, au lieu d'être capelée, est souvent aiguilletée sur le capelage. Souvent aussi elle est supprimée et remplacée par un chaumart à deux rouets, placé entre les élongis.
On capelle les haubans en commençant par tribord, après quoi on capelle l'étai. Le mât d'artimon n'a pas en général de faux étai, à moins qu'on ne donne ce nom à la manœuvre qui sert de draille au foc d'artimon; manœuvre qui se trouve supprimée de droit, lorsque le foc d'artimon, ainsi que cela arrive quelquefois, est envergué sur une corne.
L'étai passe dans une moque à rouet de fonte, qui est fixée au grand mât, à quatre à cinq pieds du pont. L'estrope de cette moque embrasse le mât, et est aiguilletée sur sa face avant. On la soutient par de petits taquets cloués à distance de quelques pouces, afin de l'empêcher de descendre au ridage.
Quelquefois deux boucles sont fixées tribord et babord de l'étambrai du grand mât. On épisse, sur la cosse d'une de ces boucles, un morceau de cordage de la même grosseur et espèce que l'étai; puis, après y avoir passé une cosse, on épisse le second bout sur la boucle du bord opposé. C'est ensuite sur le milieu de ce cordage, auquel on doit laisser assez de mou pour qu'il passe au-dessus du râtelier de manœuvre du grand mât, que l'étai vient s'amarrer, en enveloppant la cosse qui y a été placée, avant de faire le dormant sur la deuxième boucle.
Au lieu de faire dormant sur les boucles, avec un cordage qui ne fait pas partie de l'étai, on peut, en arrière du râtelier de manœuvre du grand mât, épisser à l'étai un morceau de cordage de même dimension; alors l'étai a deux branches qui font dormant sur les deux boucles dont nous venons de parler.
L'une ou l'autre de ces installations, qui rendent l'étai du mât d'artimon indépendant du grand mât, nous paraît préférable à la première qui a été décrite.
Le mât d'artimon n'a pas de caliornes et par conséquent de pendeurs. Il n'a que des pendeurs de candelettes, auxquelles il faut appliquer les observations faites pour les candelettes du grand mât.
Caliornes, Candelettes, Palans d'Etai.
Les caliornes se composent de deux fortes poulies à dez de fonte, l'une supérieure à trois rouets, et la seconde inférieure à deux rouets. Elles sont réunies par un cordage appelé garant qui fait dormant sur l'estrope de la poulie double. Dans l'estrope de la poulie triple est fixée, au moyen d'un amarrage plat, une cosse portant une aiguillette; on fixe de la même manière, dans la partie inférieure de l'estrope de la poulie double, une cosse portant un croc.
La candelette diffère de la caliorne en ce qu'elle n'est formée que par la réunion d'une poulie double et d'une poulie simple.
Si les pendeurs sont capelés et qu'on veuille se servir de la caliorne ou de la candelette, on les aiguillette à leur pendeur, en les soulageant au moyen d'un cartahu, afin de donner au matelot, placé dans les haubans, la facilité de passer plusieurs tours de l'aiguillette de la poulie dans la cosse du pendeur.
Si les pendeurs ne sont pas capelés, on les hisse dans la hune au moyen d'un cartahu, et, les fixant au ton du mât par un tour mort et un amarrage, on dirige le pendeur dans la direction convenable et on y aiguillette sa caliorne, comme nous venons de le dire.
Les caliornes et les candelettes servent à soulever de lourds fardeaux; elles servent aussi, comme nous le verrons bientôt, au ridage du gréement des bas mâts.
Ordinairement, lorsque l'opération à laquelle elles ont servi est terminée, on largue l'aiguilletage, en ayant soin, auparavant, de les soutenir avec un cartahu; puis on les élonge sur le pont, on bride les garans par des amarrages en fil de carret ou en bitord, et elles sont envoyées dans la cale. Si les pendeurs ne sont pas capelés, on les défrappe aussi. Si on voulait les garder en place, il faudrait les élonger le long des haubans, et crocher la poulie double à un des pitons des porte-haubans.
Pour embarquer et débarquer les objets d'un moindre poids, on fait usage du palan d'étai. Il est formé par deux poulies, l'une double et l'autre simple. La double, ou supérieure, est estropée à un long pondeur qui s'amarre au ton du grand mât; la poulie simple porte un croc à émérillon.
Afin de pouvoir diriger le palan d'étai de l'arrière à l'avant, on frappe une poulie simple sur le pendeur, et on passe dans cette poulie un cordage qui, après avoir fait dormant sur les élongis de misaine, vient passer dans une poulie simple qui y est aiguilletée. C'est ce qu'on appelle le guide du palan d'étai. Lorsqu'il est simple, il fait dormant sur le pendeur.
On conçoit qu'en halant sur le guide, on peut faire prendre au palan d'étai une position perpendiculaire sur la grande écoutille. On bague dans l'estrope de la poulie simple une petite estrope à cosse pour y crocher le palan de bout de vergue.
On appelle ainsi un palan à long pendeur qu'on frappe sur la basse vergue et dont le garant, passant sur le pont dans une poulie de retour, sert avec le palan d'étai à décharger les canots, etc.
Ridage du Gréement des Bas Mâts.
La tenue du gréement d'un mât doit toujours commencer par l'étai.
Si on veut tenir le grand mât, il faut aiguilleter les caliornes sur leurs pendeurs, si elles ne le sont pas; brider fortement les pendeurs au mât, et crocher, aussi loin que possible sur l'avant, les poulies doubles des caliornes. Cela fait, on enlève tous les coins des étambraies, de manière que le mât ne porte plus que sur son emplanture. On range les matelots sur les garans des caliornes, en les faisant, autant que possible, haler en marchant et sans secousses, on porte le mât de l'avant. Quand il est dans la position qu'on veut lui donner, on tourne les garans des caliornes et on les genope en plusieurs endroits.
On frappe sur le milieu de chaque étai une caliorne de braguet, dont la poulie croche la ride, si l'étai est à ride, ou le trésillon du bout de l'étai, si on raidit sur l'étai lui-même. On passe les deux garans des caliornes dans des poulies coupées, crochées au fronteau d'avant, et on fait haler sur ces caliornes jusqu'à ce qu'on s'aperçoive que celles qui sont sur le mât mollissent. Alors on tourne les garans et on les genope. Si l'étai est à ride la ride est genopée, passe deux tours en dessus de la moque et bride ensuite tous les tours. Si on raidit sur l'étai lui-même, on s'occupe immédiatement de faire les amarrages en arrière de la cosse. Lorsqu'ils sont terminés, on défrappe les caliornes de braguet, on largue la bridure des pendeurs, et on les élonge le long des haubans.
Nous avons dit qu'après avoir capelé les haubans, on passait la ride de chaque cap-de-mouton dans celui qui lui correspondait sur le porte-hauban. Les haubans ainsi tenus à faux frais, on marque, en appliquant sur eux une ligne horizontale, la hauteur où doit être le cap-de-mouton de chaque hauban, et l'on travaille aussitôt à l'y fixer par un amarrage en étrive, puis on retrousse le bout du hauban lui-même en l'y retenant par deux amarrages plats.
Ces amarrages faits, ainsi que ceux des étais, on raidit les haubans soit au moyen des caliornes, soit avec de forts palans frappés à l'avance sur le milieu de chaque hauban. Le ridage doit commencer par le hauban de l'avant de chaque bord, en observant de les haler ensemble, et de continuer ainsi, de deux en deux, jusqu'à ceux de l'arrière.
Pour rider, on frappe sur le croc de la caliorne, ou du palan, la ride, et, faisant ranger les hommes sur les garans qui passent dans des poulies de retour, on les fait marcher ou haler sans secousses. Pendant ce temps, ceux placés de chaque bord dans les porte-haubans suivent la ride et embraquent sur la partie la moins tendue, afin de rendre égal le mouvement de ridage. Lorsque les deux haubans qu'on hale ainsi en même temps, ont une tension égale et convenable, on genope la ride, on fait deux tours sur le hauban, et le bout excédant, tombant entre le hauban et le bord, s'enveloppe sur les tours intérieurs.
Pendant le ridage, celui qui dirige cette opération doit apporter le plus grand soin à la tenue du mât. Il doit savoir de combien de lignes par pied il est nécessaire que le mât incline sur l'arrière; mais avec les étais il lui fait dépasser cette position sur l'avant, parce que le ridage des haubans le fera tomber. Il veille à ce que le mât ne soit pas porté plus sur un bord que sur l'autre, et cela au moyen d'un fil à plomb venant de la tête du mât.
Le ridage terminé, on coince le mât dans ses étambraies, on cloue les braies de mât, et on recouvre les caps-de-mouton et les rides de chaque hauban avec un paillet qu'on lace par derrière. On aligne les bouts des haubans en les coupant tous à même hauteur; on applique sur l'extrémité un morceau de bois rond épais de une ou deux lignes, qu'on recouvre avec une coiffe en toile peinte qu'on retient par un petit amarrage. Ce que nous avons dit pour le ridage du gréement du grand mât, s'applique exactement aux mâts de misaine et d'artimon. Ce dernier n'ayant pas de caliornes, on le porte de l'avant au moyen de ses candelettes.
Lorsque les chaînes de bas haubans, au lieu de porter des caps-de-mouton, portent des moques ou des cosses, le bout des haubans passe dans ces moques, et après avoir été raidis comme nous venons de le voir, sont fixés au-dessus par deux amarrages plats. Cette installation, plus légère que celle des caps-de-mouton à ride, a le grand inconvénient de rendre plus long et plus difficile, surtout à la mer, le ridage des haubans. Cette considération est bien importante, particulièrement pour les bâtimens de commerce qui ont des équipages peu nombreux.
Nous renvoyons à la fin de cet ouvrage pour donner la description des rides en fer, appelés rides à la Pinchau, du nom de l'inventeur. Plusieurs grands navires du commerce en ont adopté l'usage, ainsi qu'une partie des vaisseaux et frégates de la marine de l'état.
Enfléchures, Trelingages, Gambes de revers.
Les haubans raidis, on fait les enfléchures qui servent d'échelons aux matelots pour monter dans la mâture. On suspend de chaque côté des haubans, au moyen d'un cartahu à patte d'oie, un espar qui sert de marche-pied aux gabiers chargés de les faire. Ils les commencent au-dessous du point où doit être fixé le trelingage et leur donnent treize pouces d'intervalle. Ils sont munis d'un morceau de bois de cette longueur, qu'ils portent successivement sur chaque hauban pour marquer le point où doit être fait l'amarrage et le nœud.
Au bout des quaranteniers ils forment un petit œillet qui est fixé sur le hauban de l'arrière par un amarrage en fil de carret, ou mieux en lignerole. Le quarantenier embrasse, par le nœud d'enfléchure, chaque hauban, et, par un second œillet et un amarrage, se fixe sur le second de l'avant. Le premier hauban de l'avant étant indépendant du trelingage, ne porte jamais d'enfléchures. A bord des grands navires, on n'en fait que sur ceux du milieu.
Le trelingage sert de point d'appui aux gambes de hune ou de revers, qui font, pour les haubans des mâts de hune, l'office des chaînes de haubans pour les bas haubans. Le trelingage se compose de quenouillettes et de morceaux de cordages portant à chaque extrémité un œillet; c'est ce qu'on nomme les branches du trelingage.
La quenouillette est une barre de fer rond, de deux à six pouces de circonférence, suivant la force du navire. Après avoir été limandée et garnie, elle s'amarre en dedans des haubans, en faisant sur chacun d'eux un amarrage. Il faut en excepter celui de l'avant qui, étant dans l'axe du mât, ne peut faire partie du trelingage; on rapproche ensuite les haubans au moyen de palans qu'on frappe sur les quenouillettes elles-mêmes, et on aiguillette les branches sur le hauban et son correspondant à l'autre bord. Larguant les palans, les branches se trouvent raidies. Mais il ne faut pas qu'elles forcent les haubans à se rapprocher, c'est-à-dire à se couder, car, dans les mouvemens de roulis, les haubans du vent soutenant tout l'effort de la mâture et n'étant plus bridés par le trelingage, parce que les haubans sous le vent ont alors du mou, ils allongent de toute la quantité dont on les aura bridé ou fait couder, et tiendront moins la mâture.
Nous avons dit que, dans les côtés des hunes, étaient pratiqués des trous quadrangulaires en nombre égal à celui des haubans de hune. Dans ces trous on fait passer une barre de fer plat (appelé latte de hune) portant à son extrémité supérieure un cap-de-mouton ou une cosse, et ayant sa partie inférieure terminée en anneau. La gambe de hune ou de revers, qui est un morceau de cordage double ou simple, garni d'un croc à bec plat, se croche dans cet anneau et va se raidir sur la quenouillette; le bout excédant s'amarre le long du bas hauban.
On peut supprimer le trelingage, et dans ce cas on fixe sur le mât en dessous des jottereaux, une forte estrope qui en porte de plus petites dans lesquelles sont fixées des cosses, où viennent se raidir et s'amarrer les gambes de hune.
On remplace quelquefois l'estrope par un cercle en fer garni de pitons sur lesquels s'amarrent les gambes. Il est inutile de dire que dans l'un et l'autre cas les cosses et les pitons sont en nombre égal à celui des gambes.
Quelques navires suppriment les gambes, et passant les haubans de hune dans des trous pratiqués comme ceux des lattes, raidissent et amarrant les haubans sur les cosses de l'estrope, ou les pitons du cercle.
Capeler les Choucs des Bas Mâts.
Le gréement des bas mâts étant tenu, il faut capeler les choucs. On place le chouc que l'on veut hisser de l'avant de son mât, et dans la position qu'il doit avoir étant sur son tenon. On frappe de chaque côté un fort cartahu à patte d'oie, et un cartahu de retenue sur la face avant. Ce cartahu passe au ton du mât de misaine, s'il s'agit du chouc du grand mât; à l'extrémité du beaupré, s'il s'agit de celui du mât de misaine, et enfin au grand mât, s'il faut hisser celui du mât d'artimon; pesant sur les deux cartahus, et halant à propos sur la retenue, on le fait monter au-dessus de la hune, et on le présente entre les élongis, de manière que le mâtereau qui doit servir à le capeler puisse le saisir en passant entre les élongis.
Ce mâtereau, on le guinde le long du bas mât par le moyen d'une guinderesse, qui, passant dans une poulie autour du mât, et dans le clan du mâtereau, ou, s'il n'a pas de clan, dans une poulie qu'on estrope et bride à sa partie inférieure, va faire dormant sur l'élongis du bord opposé. Quand le mâtereau, en le hissant, a dépassé le chouc de quelques pieds, au moyen d'une bridure ou de deux palans, on le lie à l'extrémité du mâtereau en continuant alors à hisser. Le chouc parvient au-dessus du ton, on amène alors en douceur de manière à faire emboîter la mortaise dans le tenon du mât. On largue la bridure et on dépasse le mâtereau.
Avant de capeler le chouc, on ne doit pas, oublier de garnir le tenon du mât d'une coiffe en toile goudronnée. On force le chouc à coups de masse, car il faut qu'il n'ait pas le plus petit mouvement dans son tenon.
SECTION II.
Manœuvres dormantes des Mâts de Hune.
Les mâts de hune se hissent le long des bas mâts; ils passent entre les élongis dans la partie avant du chouc qui, ainsi, les lie aux bas mâts, et reposent sous les élongis par le moyen d'une cheville carrée en fer, appelée clef, qui traverse la partie inférieure ou caisse du mât de hune.
Ils sont tenus par des haubans qui se capellent et se rident sur les caps-de-mouton des lattes de hune. Mais ces haubans n'offrant pas assez d'empature, vu le peu de largeur de la hune, et ne pouvant, à cause de sa position, être suffisamment portés de l'arrière, on se sert des galhaubans qui, capelés après les haubans, descendent sur les porte-haubans; ce qui permet de les diriger de l'arrière et de soutenir le mât dans cette direction. Enfin, un étai et un faux étai les assurent contre les mouvemens du tangage. Ces derniers servent de draille à une voile d'étai.
Les haubans de hune se coupent et se garnissent comme nous l'avons dit pour les bas haubans. On leur donne en général pour grosseur les deux tiers de celle des galhaubans, qui sont eux-mêmes les deux tiers des bas haubans.
Si le nombre en est impair, on forme la première paire avec un pendeur qui sert à la candelette; mais, comme on le supprime ordinairement, et qu'on ne le met en place, en le frappant sur le ton du mât, que lorsqu'on veut s'en servir, la dernière paire, dont on croisera les branches, en jettera une de chaque côté.
Le premier hauban est entièrement garni: à la mer on le couvre encore avec une sangle pour le préserver du frottement de la vergue.
Les galhaubans se placent, l'un à l'extrémité arrière du porte-hauban; un second, autant que possible, dans celle de l'axe du mât; le troisième et le quatrième, s'il y en a, entre les deux premiers, mais de manière que l'un d'eux soit en arrière de la hune.
Celui qui est placé dans l'axe du mât gênant le brasséiage des vergues, on le largue pendant cette opération en mollissant le palan qui lui sert de ride, et on le porte de l'arrière de la hune. Il reçoit le nom de galhauban volant, et est aiguilleté et non capelé, comme nous le verrons. Les navires qui portent quatre galhaubans en ont deux volans et deux fixes; ceux qui n'en portent que trois en ont un volant et deux fixes.
En même temps qu'on passe le galhauban volant sous le vent pour aider le brasséiage, on donne plus d'empature à celui du vent, en le poussant avec un arc-boutant placé dans la hune, qu'on fait mouvoir par un petit palan manœuvré par les gabiers.
Les galhaubans fixes sont coupés par paire comme les haubans; les volans sont coupés un à un et sont aiguilletés et non capelés. Ils sont garnis en bitord au portage des vergues, et en prenant la mer on recouvre ce garni avec un paillet, une sangle, ou de la peau de vache.
Les étais sont confectionnés comme nous l'avons dit pour les bas mâts.
Capelage du grand Mât de Hune.
Les capelages des mâts de hune reposent sur les barres de perroquet, qui sont portées sur l'épaulement de la noix du mât. Pour les capeler, on les place sur les choucs des bas mâts, de manière que le mât de hune en guindant passe son ton dans le trou carré des barres.
Les mâts de hune se hissent au moyen d'un cordage en grelin, appelé guinderesse, dont la grosseur est égale à celle des bas haubans. Lorsque le mât est le long du bord et qu'on veut le présenter, on passe le bout de la guinderesse dans la poulie crochée au piton du chouc du bord où se trouve le mât; on l'affale, on la frappe sur le trou de la clef, et on fait une forte bridure en dessous de la noix. On vire la guinderesse garnie au cabestan, et le mât monte en présentant son ton; lorsque la caisse est sur le point de parer le bastingage, on frappe dessus une retenue pour en modérer le mouvement; on continue à virer et on le dirige le long du mât. Lorsqu'il y est, on fait dévirer pour faire reposer la caisse sur le pont, et on le bride dans cette position pour passer la guinderesse. On largue la bridure de la noix, on la défrappe du trou de la clef, et on la passe dans le clan, si le mât n'en a qu'un, ou dans celui le plus arrière, si le mât en a deux. Dans le premier cas la guinderesse va passer entre les élongis et fait dormant au piton du chouc du bord opposé à la poulie.
Dans le second cas, après avoir passé dans le clan le plus arrière, elle vient entre les élongis, et, passant dans la poulie de guinderesse du bord opposé, redescend entre les élongis, passe dans le second clan, et, remontant encore entre les élongis, fait dormant à un piton placé à côté de la première poulie de guinderesse.
Le dormant fait, on vire jusqu'à ce que les barres de perroquet reposent sur l'épaulement de la noix; alors on bosse la guinderesse, on bride le mât de hune au bas mât en passant plusieurs tours d'un bon filin dans le trou de la clef, et on dégarnit au cabestan, ou on fait une croisure sur la guinderesse, c'est-à-dire que, ramenant le bout abraqué par le dernier tour sur celui qui vient de la poulie, on les saisit par un fort amarrage croisé.
On peut alors travailler au capelage; nous allons capeler le grand mât de hune.
Après avoir mis sur les élongis des coussins d'un bois mou, et goudronné la partie du ton qui doit recevoir le capelage, on capelle les deux poulies d'itague de hune. La première présente à tribord et la seconde à babord. Vient ensuite la première paire de haubans; si elle a un pendeur de candelette, le pendeur doit être sur l'avant; puis la seconde paire qui se capelle à babord, la troisième à tribord, et ainsi des autres. Si, le nombre étant impair, le pendeur de candelette ne fait pas partie de la première paire, alors la dernière paire doit avoir une de ces branches de chaque bord.
Tous les haubans capelés, on aiguillette le galhauban volant de tribord, ensuite celui de babord, et on capelle une paire de chaque bord, ce qui fait trois galhaubans. S'il doit y en avoir un quatrième, il est volant, et on l'aiguillette entre le volant et le premier fixe. On embrasse les élongis et le capelage avec les deux branches de l'étai, et on les aiguillette sur l'arrière. Puis on capelle le chouc du mât.
Cet étai va passer dans une poulie, ou une moque, que nous avons capelée à cet effet au mât de misaine, et descend le long de ce mât au pied duquel il trouve un piton sur lequel il se raidit et s'amarre. Au lieu de prendre cette direction, il remonte quelquefois vers le ton du mât, et se raidit sur une moque ou cosse aiguilletée sur le ton. Cette installation n'offre pas une solidité assez grande et ne doit être employée qu'à bord des petits bâtimens.
Le faux étai se capelle comme l'étai, passe en dessous, et servant de draille à la grande voile d'étai, se dirige au-dessus du trelingage de misaine, pour aller passer dans une moque ou cosse, dont l'estrope qui entoure le mât est aiguilletée en dessous des jottereaux; de là, il remonte vers le ton et se raidit au moyen d'une cosse fixée au capelage.
On peut appliquer au capelage de hune le moyen que nous ayons donné pour diminuer de moitié ceux des bas mâts. Dans tous les cas on peut aiguilleter les galhaubans volans en embrassant les œillets des haubans, et non en les posant par-dessus.
Guinder un Mât de Hune.
Le capelage terminé, on garnit la guinderesse si elle a été dégarnie, ou on largue la croisure qui y a été faite; on largue la bridure qui retient le mât de hune contre le mât, et on vire. Lorsque la caisse du mât va s'engager entre les jottereaux, on la soutient avec un cordage appelé braguet, de la grosseur des haubans, qui fait dormant au capelage, et qui, après avoir passé dans une goujure pratiquée tous la caisse du mât, passe dans une poulie qui est aiguilletée du côté du capelage opposé à son dormant, et vient se frapper sur une caliorne qui sert à l'abraquer. Le but du braguet n'est pas seulement de soulager la guinderesse, mais d'empêcher la chute du mât, si cette dernière cassait pendant l'opération. Aussitôt que le trou de la clef paraît au-dessus des élongis, on y engage une pince, et lorsqu'il est entièrement découvert on y introduit la clef en retirant la pince. On dévire au cabestan, on dépasse la guinderesse, qui généralement n'est en place que dans les rades peu sûres, où on peut avoir besoin de caler fréquemment les mâts de hune; on décroche les poulies, et on s'occupe à tenir le mât.
Pour remplacer le braguet, en renforce l'avant de la hune, et on cheville sur les élongis et la barre traversière de l'avant, un fort cabrion en chêne, portant un crapaud à boulon, sur lequel se meut un linguet qui ne peut faire avec la hune un angle moindre de 45 à 50°, car alors son extrémité inférieure porte sur le crapaud. Ce cabrion est placé de manière à tangenter presque la face avant du mât de hune. Cette face avant, dans toute la longueur qui correspond au ton du bas mât, porte un soufflage, dans lequel on a fixé une crémaillère à dents.
Lorsque la première dent de cette crémaillère est à hauteur du cabrion, la tête du linguet s'appuie dessus; mais le mouvement d'ascension du mât le fait mouvoir sur son boulon, il se porte de l'avant, et retombe sur la deuxième dent, quand il trouve le vide qui existe entre celle-ci et la première. Si dans cette circonstance la guinderesse cassait, il est évident que le linguet engagé entre deux dents de la crémaillère empêcherait la chute du mât de hune.
Cette installation, qui n'est pas encore générale, a été adoptée pour les mâts de perroquet, à bord de presque tous les navires de l'état.
Le moment le plus difficile, et celui où il faut employer la plus grande force dans les mouvemens des mâts de hune, étant lorsqu'il faut placer la clef en les guindant, ou l'enlever lorsqu'on est obligé de les caler, on a imaginé un système qui rend ces opérations faciles et sans danger.
Clefs mobiles.
Nous allons transcrire le rapport fait par la commission que M. le ministre de la marine chargea de l'examiner:
«Ce système des clefs, dites mobiles, se compose de deux leviers en fer forgé, dont le petit bras est renforcé. Chaque levier est muni de deux tourillons adaptés à sa face supérieure et d'un talon saillant au-dessous de sa face inférieure.»
«Au commencement de son action, le levier s'appuie par ses tourillons sur des flasques qui l'élèvent au-dessus d'une plaque de fer fondu, et ensuite par son talon sur cette plaque même, qui est fixée sur les élongis, vis-à-vis le passage du mât à manœuvrer.»
«Pour guinder ce mât, on l'élève au moyen de la guinderesse, jusqu'à ce que le trou de la clef puisse recevoir les bouts des leviers qu'on a abaissés; on agit ensuite à l'aide d'un palan sur les extrémités opposées de ces leviers, pour les ramener à leur position horizontale; lorsqu'ils y sont arrivés, on les fixe par des clavettes, et alors ils remplacent les clefs du mât, qui lui-même se trouve dans la position qu'il doit occuper.»
«Lorsqu'on veut caler, on enlève les clavettes, après avoir pesé un peu sur les leviers; ils s'abaissent sous le poids du mât, qui descend sans qu'il soit nécessaire de mollir les haubans et galhaubans, ni de les soulever ainsi que le mât, comme l'exige le déplacement des clefs ordinaires.»
«Dans chaque levier, le grand bras a sept fois la longueur du petit; et, le premier restant constant, le petit bras diminue de plus en plus de moitié, à mesure qu'il s'engage dans le trou de la clef du mât. La force nécessaire pour établir l'équilibre dans cette machine, n'est ainsi d'abord que le septième de la résistance, et se réduit ensuite à moins d'un quatorzième de la résistance.»
«Dans un cabestan de vaisseau, la puissance étant de multiplier par quatre fois et demi, ou cinq, la force opposée à la résistance, la puissance des leviers est donc à celle du cabestan comme 11 est à 4½ ou 5, c'est-à-dire plus que double.»
«Indépendamment de cet excès de puissance, les leviers ont l'avantage d'éprouver un frottement peu considérable, et qui n'augmente pas beaucoup pendant leur grande action. Tandis que les frottemens du cabestan dans son étambraie, ceux qu'éprouve la guinderesse dans les poulies, et souvent ailleurs, sont toujours bien plus grands, et augmentent avec la pression que cause la résistance.»
«Enfin, la disposition des machines fait que les hommes agissent plus également et plus efficacement sur les leviers que sur les barres du cabestan. On ne doit donc pas être étonné de voir les clefs mobiles manœuvrées par vingt hommes, produire plus d'effet que les poulies de guinderesse et le cabestan mus par quatre-vingts ou cent hommes.»
«Les expériences ont conduit à la conclusion suivante: les clefs mobiles paraissent moins propres à guinder les mâts qu'à les caler; elles peuvent cependant, au moyen de quelques modifications faciles à exécuter, soulager la guinderesse dans des derniers et plus pénibles efforts; mais ces clefs facilitent considérablement rabaissement des mâts, avantage précieux qui, en accélérant le remplacement d'un mât de hune, peut exercer une influence favorable sur les chances d'un combat, et même sauver un bâtiment surpris par un coup de vent, en abrégeant la durée du danger.»
Le grand mât de hune guindé, on tient son gréement. La direction que doit prendre ce mât est donnée par celle du bas mât que nous avons déjà tenu.
On frappe un fort palan sur l'étai en crochant la poulie simple à une erse qui embrasse le capelage du mât de misaine; on passe le garant dans une poulie de retour crochée à la même erse, et on l'envoie sur le pont pour qu'on puisse peser dessus. On frappe un second palan sur la partie de l'étai comprise entre la poulie du capelage et le pont, et dont la poulie simple fait dormant sur le bout de l'étai qui passe dans le piton situé au pied du mât de misaine. On frappe aussi un palan sur le faux étai, la poulie simple se croche à une erse qui embrasse le mât sous les jottereaux. Avant de rider, on a dû passer dans le faux étai les bagues qui serviront plus tard à enverguer la grande voile d'étai, puisqu'il lui sert de draille. On hale sur les palans, ayant grand soin de faire travailler l'étai et le faux étai de la même manière. Lorsque la tête du mât de hune a dépassé d'une quantité suffisante la direction du bas mât, car les galhaubans le rappelleront dans cette direction, on genope les palans, on tourne leurs garans, et on fait les amarrages de l'étai et du faux étai.
On aligne les haubans de hune et les galhaubans entre eux, et on marque le point où l'on doit estroper les caps-de-mouton; on fait les amarrages, et on coiffe les bouts comme nous l'avons dit pour les bas haubans. On ride les galhaubans, avec lesquels le mât doit être mis dans une position convenable, c'est-à-dire former le prolongement du bas mât. On ride enfin les haubans avec la candelette de hune.
Au lieu d'être garnis de caps-de-mouton, les haubans de hune peuvent passer dans des cosses portées par les lattes. Quelquefois aussi le hauban lui-même traverse la hune, et servant de gambe de revers, se raidit sur la quenouillette ou sur l'estrope, qui remplace le trelingage.
Cette installation, qui offre peu de solidité, ne doit être employée qu'à bord des petits bâtimens.
Trelingage, Enfléchures.
Le gréement raidi, on travaille au trelingage. On place une quenouillette sur les haubans, vis-à-vis le point du mât où commence le renflement de la noix; on la fixe par un amarrage sur chacun d'eux, en laissant, comme aux bas mâts, le premier hauban indépendant. On bride les haubans avec un palan, et on amarre les branches de trelingage; après quoi on largue le palan et on le défrappe.
Si on supprime le trelingage, on aiguillette en dessous de la noix une estrope garnie de cosses, sur lesquelles viendront se raidir les haubans de perroquet.
Les enfléchures des haubans de hune se font de la même manière que celles des bas haubans.
Capelage du petit Mât de Hune.
Le petit mât de hune étant présenté, comme nous l'avons dit pour le grand mât de hune, on capelle d'abord les poulies d'itague, ensuite les haubans en commençant par babord, puis les galhaubans fixes, sur lesquels on aiguillette le ou les galhaubans volans, suivant que le mât en porte deux ou quatre, et enfin l'étai et le faux étai. L'étai passe dans le violon de beaupré à tribord, s'élonge sous ce mât; à son extrémité, on estrope une poulie double, qui forme, avec une poulie simple crochée sur un piton placé sur l'apôtre, un palan qui sert à le raidir. On peut aussi passer le bout même de l'étai dans le piton.
Le faux étai se dispose de la même manière, il passe dans le violon de babord.
On tient le gréement du petit mât de hune dans le même ordre, et de la même manière que nous l'avons expliqué pour le grand mât de hune.
On doit observer que, d'après l'installation de l'étai et du faux étai, tout l'effort se fait au portage, sur le rouet du violon; il faut donc, non-seulement les garnir avec soin à ce point, mais frapper une forte bosse au-dessus, toutes les fois qu'on prend la mer.
Cette observation doit aussi s'appliquer à l'étai et au faux étai du grand mât de hune; c'est l'estrope de la poulie dans laquelle ils passent qui porte tout l'effort; il faudra les bosser au-dessus de ces poulies, en embrassant le mât avec la bosse.
Capelage du Mât de Perroquet de Fougue.
On capelle au mât de perroquet de fouque, d'abord une poulie d'itague, mais on la supprime lorsque l'itague de la drisse, qui est toujours simple, passe dans un clan pratiqué dans la noix du mât; ensuite les haubans en commençant par tribord, les galhaubans fixes, le galhauban volant, et enfin l'étai et le faux étai qui sert de draille au diablotin.
L'étai passe dans une poulie aiguilletée au capelage du grand mât, et, remontant vers le ton se raidit à une cosse qui y est aiguilletée. Le faux étai passe dans une cosse dont l'estrope entoure le grand mât en dessous des jottereaux, et se raidit sur une seconde cosse fixée au capelage. On doit, avant de tenir ce dernier à demeure, y passer les bagues qui serviront à enverguer le diablotin.
Gréement du bout-dehors de Grand-Foc.
Le bout-dehors de grand-foc, ou bâton de foc, repose sur la partie supérieure du beaupré, passe entre les moques des étais de misaine, et traverse le chouc du beaupré placé verticalement. Quelquefois il passe dans les estropes des moques des étais de misaine, et enfin d'autres fois, le chouc du beaupré étant incliné sur tribord de 45°, le bout-dehors de foc s'appuie sur le côté tribord du mât, sur lequel il est retenu par deux fortes bridures.
La première de ces installations est la plus généralement suivie.
Le gréement du bout-dehors se compose de deux haubans de chaque bord et d'une sous-barbe.
Les haubans se coupent par paire et se capellent au-dessus de la noix du mât; ils passent ensuite dans des cosses estropées, la première au sixième de la vergue de civadière, et la deuxième à deux pieds de celle-ci. Ils portent à leur extrémité une poulie double, qui forme, avec une poulie simple crochée à un piton placé à l'avant du bossoir, un palan par le moyen duquel on les raidit. Il est évident qu'en brassant la civadière sous le vent on raidit les haubans du vent, et que par conséquent on appuie le bout-dehors.
Cette considération doit donc faire préférer cette méthode à celle qui, supprimant la civadière, fait passer les haubans dans un arc-boutant en fer placé sur les bossoirs. Dans ce cas, les haubans, après avoir passé dans des trous pratiqués dans les arcs-boutans, se raidissent à des pitons placés de l'arrière des bossoirs.
A bord des petits bâtimens, on supprime même les arcs-boutans, et les haubans se raidissent sur les pitons à l'avant du bossoir.
La sous-barbe a, à sa partie supérieure, un œillet qui se capelle par-dessus les haubans. On fixe sur la face arrière et inférieure du chouc de beaupré, un arc-boutant; la sous-barbe passe dans le clan supérieur pratiqué à l'extrémité de l'arc-boutant, et de là, venant passer dans une cosse estropée, entre les estropes des moques des étais de misaine, se raidit avec un palan qui élonge le mât.
Il vaut mieux rendre l'arc-boutant mobile, en le crochant à un piton, ou en le terminant en mâchoire qui s'applique à la partie inférieure du mât; on supprime alors les clans et on le termine par une tête. La sous-barbe, après avoir été capelée par-dessus les haubans, vient se fixer à cette tête, d'où partent deux haubans qui se dirigent vers les bossoirs, où on les raidit au moyen de deux palans.
On peut aussi former la sous-barbe avec le double d'un cordage: un amarrage plat forme l'œillet du capelage, les deux branches s'appliquent l'une contre l'autre, viennent passer tribord et babord de la tête de l'arc-boutant; on les y arrête par deux amarrages, l'un de l'avant et l'autre de l'arrière, et les deux bouts restans forment les haubans de l'arc-boutant.
Afin que le gréement du bout-dehors adonne le moins possible, ce qui est non-seulement nécessaire à sa solidité, mais encore à celle du petit mât de perroquet dont il porte l'étai, on le confectionne avec du cordage qui, ayant déjà servi, est peu susceptible de s'allonger.
Capelage du bout-dehors de grand Foc.
Avant de capeler le bout-dehors de grand foc, on le fait passer dans le chouc du mât de beaupré par le moyen d'une guinderesse, qui fait dormant à un des pitons de ce chouc, passe dans un clan pratiqué à l'extrémité inférieure du bout-dehors, et dont le courant, passant dans une poulie fixée à un piton du bord opposé du dormant, vient se manœuvrer sur le gaillard d'avant.
On passe d'abord un grand anneau en fer, appelé rocambeau, qui, devant porter la draille du grand foc, comme nous le dirons plus tard, doit avoir assez de jeu pour monter et descendre sur le bout-dehors. On capelle une poulie à trois rouets pour l'étai du petit mât de perroquet et les boulines du petit hunier; la paire des haubans de babord, celle des haubans de tribord, la sous-barbe et deux marche-pieds qui sont fixés à la face avant du chouc de beaupré. Le capelage terminé et bien souqué, on hale sur la guinderesse; lorsque le bout-dehors dépasse le chouc de la quantité convenable, on le fait porter sur deux taquets, qui reposent sur le beaupré, et on le lie à ce dernier par deux roustures qu'on bride entre le bout-dehors et le mât, et qu'on souque en y introduisant des coins à coups de masse.
Pour le consolider encore et l'empêcher de rentrer au tangage, on appuie sa partie inférieure sur un fort taquet cloué sur le beaupré, ou, en lui donnant plus de longueur, on le fait reposer sur le fronteau d'avant, ce qui permet, en cas de rupture, de le pousser en dehors d'une quantité convenable; ou enfin on applique à sa partie inférieure une pièce de bois ou morceau de bout-dehors qui s'appuie sur le fronteau d'avant.
Du bout-dehors de Clinfoc et de son Capelage.
Si le bout-dehors de grand foc doit porter un bout-dehors de clinfoc indépendant, son extrémité est terminée par un tenon auquel on capelle un petit chouc en fer, incliné sur babord, dans lequel doit passer le bout-dehors de clinfoc, dont l'extrémité inférieure s'appuie sur le chouc de beaupré: bien entendu qu'au moyen d'un taquet on les éloigne assez l'un de l'autre, pour que le rocambeau du grand foc ne soit pas gêné dans ses mouvemens.
Plus ordinairement les bouts-dehors de grand foc et de clinfoc sont faits de la même pièce de bois.
Dans les deux cas, le gréement du bout-dehors de clinfoc se compose d'un hauban de chaque bord, qui passe dans une cosse estropée sur la vergue de civadière, en dehors de celles des haubans du bout-dehors du grand foc et d'une sous-barbe qui fait dormant sur la tête de l'arc-boutant.
Pour le capeler, on passe d'abord le rocambeau de clinfoc, qui doit porter la draille de cette voile, mais qu'on peut supprimer, comme nous le dirons en parlant du gréement du clinfoc. On capelle une poulie à trois rouets pour l'étai du mât de catacois ou la flèche qui le remplace, et les boulines du petit perroquet; les haubans, un de chaque bord, et enfin la sous-barbe.
Le bout-dehors de clinfoc n'est pas coupé au ras de son capelage, il porte encore une flèche en bois mort.
SECTION III.
Des Mâts de Perroquet.
Les mâts de perroquet se hissent le long des mâts de hune. Ils reposent sur les élongis des barres capelées sur la noix de ces mâts au moyen d'une clef qui traverse leur caisse, prolongent le ton de ces mêmes mâts, et, passant dans leur chouc, s'élèvent au-dessus d'une quantité déterminée. Ces mâts sont de deux espèces: ou coupés au-dessus de leur capelage, et alors on les nomme vulgairement mâts de perroquet d'hiver; ou portant une flèche qui sert à établir la voile de catacois. On appelle ces derniers, mâts à flèche.
Dans le premier cas on est obligé d'établir un mât supplémentaire pour porter la voile de catacois. Ce mât, appelé de bome ou de flèche, élongeant la partie arrière du mât de perroquet, repose son pied sur le chouc du mât de hune où il est retenu par un taquet, et, passant dans le chouc en fer du mât de perroquet, s'élève au-dessus d'une quantité convenable au guindant du catacois.
Autrefois quelques grands navires portaient, et portent encore, mais rarement, des mâts de catacois à clef.
C'est-à-dire que sur la noix des mâts de perroquet on capelait des barres, ordinairement en fer; que ces mâts avaient un ton proportionné à leur longueur; que ce ton était terminé par un chouc aussi en fer, et que le mât de catacois, passant entre les barres, reposant sur elles par le moyen d'une clef qui traversait sa caisse, passait dans le chouc et s'élevait au-dessus de la quantité nécessaire à rétablissement de sa voile.
Il est clair que cette installation, lourde et sans solidité, n'offre aucun avantage, et doit être abandonnée.
Les navires de la plus grande dimension, les vaisseaux de guerre, comme les bâtimens du commerce, se servent de mâts de perroquet à flèches, comme plus légers, plus faciles à tenir, en un mot, plus marins. Souvent, en raison de la saison et des parages dans lesquels on doit naviguer, on se munit de deux jeux de mâts, l'un à flèche et l'autre d'hiver, qu'on met en place suivant les circonstances.
A bord des bâtimens de guerre, les mâts de perroquet ont quelquefois une deuxième flèche qui porte la voile de contre-catacois, mais qui plus souvent sert à élever et faire distinguer les signaux. Cette augmentation de longueur rendait plus longue, et souvent difficile à la mer, l'opération de passer et dépasser ces mâts. On y a obvié par une nouvelle construction des barres, qui permet d'engager le bout de la flèche entre elles, le mât étant passé sur l'avant de la hune et de la vergue de hune.
Gréement des Mâts de Perroquet.
Comme le gréement des mâts de hune, celui des mâts de perroquet se compose de haubans, galhaubans et étais.
Les haubans sont au nombre de trois, de chaque bord, pour les plus grands navires, et de deux pour ceux d'un rang inférieur.
Ils portent deux galhaubans, un fixe, celui de l'arrière, et un volant, celui du travers.
Ils ont un étai et pas de faux étai.
Les haubans se coupent par paires. Si le mât a six haubans, la troisième paire, après avoir été capelée, jette une de ses branches de chaque bord. Ils passent dans des trous pratiqués à l'extrémité des barres traversières, et, formant la gambe sur les quenouillettes, élongent les haubans de hune et vont se raidir à des cosses estropées en dedans des lattes de hune. Si le trelingage a été supprimé, ils se raidissent sur les cosses de l'estrope qui entoure le mât de hune en dessous de sa noix.
Les galhaubans se dirigent sur les porte-haubans, où ils trouvent celui du travers, une poulie et celui de l'arrière, un cap-de-mouton, où ils se raidissent. Quelquefois le galhauban volant du vent, après avoir été raidi, est poussé par un arc-boutant établi sur les barres.
L'étai du grand mât de perroquet passe dans une poulie aiguilletée au capelage du petit mât de hune, et se raidit sur un moque ou cosse aiguilletée sur le capelage du mât de misaine. On peut aussi le faire passer dans une poulie fixée au ton du petit mât de hune, et alors la cosse où il se raidit est au capelage de ce mât. On le fait aussi passer dans le clan du milieu d'un chaumard à trois rouets, chevillé entre les élongis des barres du petit mât de perroquet. L'étai du petit mât de perroquet passe dans le clan du milieu de la poulie triple, capelée au bout-dehors du grand foc et élongeant ce mât, et celui de beaupré vient se raidir sur un palan ou une cosse fixée sur le fronteau d'avant. Quelques navires le font passer dans un clan pratiqué dans le bout-dehors, et, lui faisant remplir l'office de sous-barbe, le brident sur l'arc-boutant et le raidissent en dessous du mât de beaupré.
L'étai du perroquet d'artimon, vulgairement appelé perruche, passe dans le clan du milieu d'une poulie triple, aiguilletée à un piton sur la face arrière du chouc du grand mât, et se raidit sur une cosse fixée au capelage de ce mât.
A bord de la plupart des navires de guerre et de plusieurs navires du commerce, on adapte aux mâts et aux barres de perroquet le système de linguets et de crémaillères dont nous avons parlé pour les mâts de hune. On fait aussi un fréquent usage des clefs mobiles dont nous avons donné la description.
GUINDER ET CAPELER LES MATS DE PERROQUET.
Capelage du grand Mât de Perroquet.
Pour présenter les mâts de perroquet au-dessus des choucs des mâts de hune afin de les capeler, on les hisse avec une guinderesse (cordage en aussière) qui passe dans une poulie crochée au ton du mât de hune, et qui fait dormant au trou de la clef; on la bride ensuite au-dessus de la noix. Lorsqu'en le hissant et faisant passer sa flèche entre les barres, elle est engagée dans le chouc du mât de hune, on le saisit contre ce mât, on largue la bridure de la noix, on défrappe la guinderesse du trou de la clef, on la passe dans le clan que chacun de ces mâts porte à sa caisse, et on en fait le dormant à un piton du côté opposé à celui où est crochée la poulie de guinderesse. On le hisse ensuite de la quantité nécessaire pour faciliter l'opération du capelage aux gabiers.
Ordinairement, avant de capeler, on passe dans le mât un manchon en basane, qui s'applique parfaitement au-dessus de la noix et sur lequel, par conséquent, viendront se placer les haubans, galhaubans et l'étai. Le but du placement de ce manchon est de conserver sur le chouc, facilement et dans l'ordre convenable, le gréement du mât, lorsqu'on dépasse ce dernier; et lorsqu'on le guinde, de capeler avec une grande promptitude, puisque le mât s'engage dedans en montant et que les gabiers n'ont qu'à le maintenir jusqu'à ce qu'il repose sur la noix.
On capelle en commençant par tribord, la première paire de haubans, la seconde et enfin la troisième, une branche de chaque côté. Puis, les galhaubans fixes, on aiguillette les galhaubans volans et on embrasse le tout avec les branches de l'étai.
Lorsque le mât a été mis en clef en pesant sur la guinderesse, on le tient, en raidissant d'abord son étai au moyen duquel on le porte de l'avant de la direction de son mât de hune, parce qu'en raidissant les galhaubans, aussitôt que l'amarrage de l'étai est fait, le mât tombe sur l'arrière dans la position convenable; on raidit ensuite les haubans.
Afin de ne pas arrêter pour larguer la bridure de la noix et faire le dormant de la guinderesse sur le piton lorsqu'on guinde les mâts de perroquet, on donne à la guinderesse trois fois la longueur du mât au pont, et on y passe une cosse à estrope. Après avoir passé la guinderesse dans sa poulie, dans le clan, et fait le dormant, on frappe le fouet de l'estrope sur la noix du mât. On voit que cette cosse sert de bridure et qu'il ne reste plus qu'à la larguer lorsque l'extrémité du mât est engagée entre les barres.
Capelage du petit Mât de Perroquet.
Le capelage du petit mât de perroquet s'exécute comme celui du grand mât de perroquet, et se compose du même gréement. Seulement on capelle en commençant par babord: on le tient aussi dans le même ordre.
Capelage du Mât de Perruche.
Le mât de perruche n'a jamais qu'une paire de haubans de chaque bord, et souvent qu'un galhauban qui est alors fixe. On le capelle et on le tient comme les autres mâts de perroquet.
Gréement des Mâts de Catacois, de Bome ou Flèche.
Si le mât de perroquet doit porter un mât de catacois, il faut, avant de capeler, mettre en place les barres sur lesquelles ce mât repose. On les présente au-dessus du chouc au moyen d'une guinderesse disposée comme celle des mâts de perroquet, et son capelage, qu'on exécute alors, se compose d'un ou deux haubans, suivant que les barres sont à un ou deux traversins. Ces haubans, après avoir passé dans le trou de l'extrémité des barres, s'amarrent, en dessous de la noix du mât de perroquet, d'un galhauban qui se dirige sur l'extrémité arrière du porte-hauban et d'un étai.
Ces mâts de catacois portent une flèche qui sert quelquefois à établir la voile de contre-catacois, comme nous l'avons dit, et alors on leur capelle un galhauban et un étai. Enfin, au-dessus de ce nouveau capelage, est une petite flèche en bois mort qui porte une pomme où passent dans deux rouets les drisses de flamme.
Si le mât de perroquet porte un mât de bome, son gréement ne se compose alors que d'un galhauban et de l'étai.
Enfin, si le mât de perroquet est à flèche, le gréement de cette dernière est le même que celui du mât de bome.
Dans les trois installations, les étais se raidissent, pour le grand, au capelage du petit perroquet; pour le petit, dans le clan du milieu d'une poulie à trois rouets, capelée au bout-dehors de clinfoc, et pour celui de perruche, au capelage du grand mât de hune.
Pataras, Haubans diagonaux, Etai de tangage.
Pour terminer ce que nous avons à dire du gréement des mâts, nous avons à faire connaître les manœuvres accidentelles qu'on place pour les consolider dans les circonstances extraordinaires.
Si on craint la rupture des bas haubans, soit par un temps forcé, soit par leur état, on renforce le mât par des pataras qui ne sont autre chose que des haubans, qui, ayant déjà servi, ont acquis tout leur allongement. Une des branches passe entre le ton du bas mât et le mât de hune, on les réunit ensuite sur le capelage par un amarrage plat. On les passe entre les gambes de revers, et après les avoir garnis de caps-de-mouton, on les raidit sur des caps-de-mouton correspondans, estropés en filin et aiguilletés à des boucles placées sur les préceintes en dessous des porte-haubans, ou à deux chaînes des bas haubans.
Le grand mât et le mât de misaine portent quatre pataras, deux de chaque bord; le mât d'artimon n'en a pas.
Pour soutenir les gambes de revers et par conséquent les haubans de hune, lorsque, les bas haubans ayant du mou, le temps ou les circonstances ne permettent pas de les raidir, on frappe de chaque bord, aux extrémités des quenouillettes, un fort cordage qu'on a fait préalablement passer dans une cosse, sur laquelle est épissé un hauban dont le cap-de-mouton correspond à un second cap-de-mouton aiguilleté sur un des pitons de la serre-gouttière du bord opposé. On les raidit fortement, et, au point où ces deux haubans se croisent, on les bride par un amarrage.
Ces haubans, qu'on appelle diagonaux à cause de leur position, ne sont mis en place qu'au grand mât et au mât de misaine.
Lorsque les bas haubans ont un mou trop considérable, qui ne peut être suffisamment abraqué par les haubans diagonaux, on les bride entre eux, au tiers de leur hauteur, à partir du capelage, par deux forts palans; on place ensuite, d'un bord à l'autre, des palans renversés qui font l'office de branches de trelingage, on en genope les garans, après avoir, par leur moyen, rapproché les haubans autant que possible, et on soutient ce faux trelingage en aiguilletant, à la hauteur des palans qui servent de quenouillettes, deux ou quatre caliornes de bas mât, qu'on fait croiser en crochant leurs poulies doubles aux pitons de la serre-gouttière du bord opposé à leur aiguilletage.
Pour préserver le mât de misaine des violens coups de tangage qui le fatiguent si souvent dans les grosses mers, on se sert d'un cordage de la grosseur des haubans, qu'on appelle étai de tangage.
On le hisse avec un cartahu sur la face avant du mât, on l'aiguillette au capelage et on le bride ensuite sur le mât pour qu'il ne gêne pas les mouvemens de la vergue de misaine. On le raidit ensuite au moyen de la poulie triple qu'il porte et d'une poulie semblable dont l'estrope embrasse le mât de beaupré en avant de son étambraie.
CHAPITRE III.
GRÉEMENT DES VERGUES.
SECTION Ire.
Gréement des Basses Vergues.
Les vergues servent à déployer et établir les voiles. Ce sont des pièces de bois travaillées sur leur milieu à huit pans, prenant ensuite la forme cylindrique, ou plutôt conique, jusqu'aux taquets d'empointure (espèce de coche taillée dans la vergue même pour y retenir, ainsi que l'indique leur nom, le raban d'empointure); la partie qui suit les taquets est ronde, ensuite coupée carrément.
Les vergues se hissent le long des mâts et s'y fixent comme nous le verrons. Celles qui s'adaptent aux bas mâts reçoivent le nom général de basses vergues, et sont distinguées par les noms particuliers de grande vergue pour le grand mât, vergue de misaine pour le mât de misaine, vergue sèche ou barrée pour le mât d'artimon, vergue de civadière pour le mât de beaupré.
Ces basses vergues sont placées de l'avant des mâts à la hauteur des trelingages; elles y sont suspendues par une estrope dite de suspente. Les drosses les retiennent contre le mât; pour soutenir les extrémités on se sert de balancines qui peuvent aussi leur donner un mouvement de haut en bas; les bras leur communiquent le mouvement de l'avant à l'arrière, et les marche-pieds facilitent aux matelots les moyens de se porter sur la vergue lorsque la manœuvre des voiles l'exige; enfin, le palan de roulis, dont le nom indique assez l'emploi, s'oppose aux mouvemens que la vergue pourrait prendre malgré ses drosses.
Ainsi, le gréement d'une basse vergue, c'est-à-dire ce qui lui est nécessaire pour la tenir en place et la manœuvrer, se compose:
- D'une ou deux estropes de suspente, suivant les dimensions de la vergue;
- Une ou deux drosses;
- Deux balancines;
- Deux bras;
- Deux marche-pieds;
- Deux palans de roulis.
Nous allons décrire successivement ces diverses pièces.
Suspentes et Estropes de Suspente.
Pour que la basse vergue puisse être suspendue à ses bas mâts par le moyen des estropes de suspente, on aiguillette au capelage, ou au-dessus du ton, deux suspentes. Elles sont formées par un cordage de la grosseur des bas haubans, dont on épisse les bouts; on le garnit en bitord ou en basane, ou le plie sur lui-même, et dans le pli on fixe, par un amarre plat, une forte cosse; on réunit ensuite les branches qui forment un œillet à leur partie supérieure.
Les deux suspentes ainsi confectionnées, on les passe dans un trou pratiqué dans la hune entre les élongis, de l'avant de la barre traversière, on les dirige l'une à tribord et l'autre à babord du ton du mât, et on les aiguillette au-dessus du capelage.
Comme, dans cette position, la barre traversière porterait tout le poids de la basse vergue, on les aiguillette plus ordinairement sur le grand chouc, et on les bride au ton pour les empêcher de s'en écarter.
On prend ensuite deux morceaux de cordage de la même grosseur que la suspente; chacun d'eux doit avoir, en longueur, deux fois la grande circonférence de la vergue et de la cosse, plus la quantité nécessaire à épisser les deux bouts. L'épissure faite, on les garnit en bitord ou en basane, on les plie en deux parties inégales; dans le pli on fixe une cosse par un amarrage plat, et, embrassant la vergue avec ces deux branches inégales, de manière que la cosse soit sur la partie supérieure, on aiguillette les deux branches ensemble, et l'on a, sur le milieu de la vergue, deux cosses qui correspondent aux deux cosses de la suspente. Si maintenant, par un moyen quelconque, on hisse la basse vergue, jusqu'à ce que les cosses de la suspente et celles des estropes soient à petites distances, et qu'on passe de l'une à l'autre une aiguillette qu'on bride ensuite pour la fixer, la basse vergue se trouvera suspendue.
C'est afin que la vergue ne tourne pas dans ses estropes, qu'on la taille à pans carrés dans son milieu.
Généralement les suspentes en cordage sont remplacées par des suspentes en chaînes.
On plie la chaîne en deux, on passe le double sous la vergue, on le ramène sur la partie supérieure, et on y passe les deux bouts. Elle se trouve ainsi baguée sur la vergue. On passe les deux bouts dans le trou appelé cheminée, où nous avons déjà fait passer la suspente, et qu'on doit garnir en tôle, et, embrassant le ton du bas mât qu'on a entouré également d'une feuille de tôle, on les boulonne sur ce capelage où on a établi un bourrelet.
Cette installation ayant le même inconvénient que celui que nous avons signalé pour la suspente en corde, lorsqu'elle passe d'une manière semblable, on y obvie en crochant ou boulonnant les deux bouts de la chaîne tribord et babord du chouc.
Les bâtimens de rang inférieur n'ont qu'une estrope de suspente placée sur le milieu de la vergue, et alors ils n'ont qu'une suspente dont les branches embrassent le ton pour l'aiguilleter soit sur le capelage, soit sur le chouc.
Drosses.
Les drosses servent à retenir la vergue contre le mât. Tous les bâtimens de grande dimension en portent deux pour la grande vergue et la vergue de misaine, une pour la vergue barrée.
A une des extrémités du cordage qui doit servir de drosse on fixe une cosse, et on le garnit en basane dans toute sa longueur. On forme à l'autre extrémité un petit œillet. Avec le bout qui porte la cosse on fait, sur la vergue à toucher les estropes de suspente, un tour mort qu'on arrête par un amarrage. La drosse, dont le tour mort est à tribord, embrasse le mât en passant sur son arrière, où elle est soutenue par un petit taquet à gueule qui y est fixé; et, passant dans la cosse de celle de babord de dessous en dessus, vient crocher son œillet à la poulie simple d'un palan, appelé palan de drosse, dont la seconde poulie est fixée à un piton placé sur la partie arrière de l'élongis de babord.
Cette poulie est ordinairement remplacée par un chaumard chevillé contre l'élongis. La drosse, dont le tour mort est à babord, passe de la même manière dans la cosse de tribord et a son palan à tribord, ou son chaumard contre l'élongis du même bord.
Lorsque la vergue n'a qu'une drosse, alors la drosse ne porte pas de cosse à son extrémité; mais il faut en estroper une du côté opposé au dormant. Alors le dormant fait, la drosse embrasse le mât, passe dans la cosse estropée sur la vergue et vient, par son œillet, se crocher à la poulie du palan de drosse. Il n'y a, dans ce cas, qu'un palan de drosse établi du bord opposé au dormant.
Au lieu d'avoir les palans des drosses sous la hune, ainsi que nous venons de le dire, on peut les crocher sur le pont, sur des pitons au pied du mât. Mais alors, au lieu de passer la drosse dans la cosse de dessous en dessus, il faut la passer de dessus en dessous. Le bout de la drosse, dans ce cas, forme l'estrope de la poulie du palan. Mais la première installation nous paraît préférable.
Quelques navires remplacent les drosses par un mécanisme en fer, qui se compose de deux cercles en fer, l'un sur le milieu de la vergue, bombé sur la face arrière pour recevoir un boulon qui se joint au cercle placé sous les jottereaux par une bande de fer ayant en avant une charnière horizontale, et en arrière une verticale. Le boulon permet à la vergue de se mouvoir de bas en haut en tournant sur son centre, la charnière horizontale de l'avant à l'arrière, et la verticale, d'obéir aux mouvemens de tangage.
Il est inutile de dire que ce système doit être enlevé lorsqu'on doit passer ou dépasser un mât de hune.
Balancines.
Les balancines soutiennent les extrémités de la vergue et lui communiquent un mouvement d'apiquage.
Elles sont passées de diverses manières, simples, doubles, ou même triples.
Simples, elles se capellent au bout de la vergue par le moyen d'un œillet, passent, l'une à tribord, l'autre à babord, dans des poulies fixées au chouc, descendent par le trou du chat le long des bas haubans, et forment l'estrope de la poulie double d'un palan, dont la poulie simple se croche sur le porte-hauban, en arrière du premier hauban.
On peut aussi les faire passer sur l'avant du chouc, sur lequel on fixe un morceau de bois demi-circulaire garni de deux profondes goujures portant de petits rouets; elles descendent alors au pied du bas mât et sont croisées.
On estrope sur un même pendeur deux poulies simples ou doubles, suivant que les balancines doivent être doubles ou triples; on passe le pendeur par-dessus le chouc en arrière du mât de hune, et on fait une bridure en dessous, entre le ton du bas mât et le mât de hune, de manière que les poulies soient au ras du chouc. Sur la poulie d'écoute est estropée une poulie simple, qu'on capelle au bout de vergue, s'il n'y a pas de poulie d'écoute.
Si elles sont doubles, elles font dormant sur l'estrope de la poulie du chouc, passent dans la poulie de la vergue, et viennent passer dans la poulie du chouc, d'où elles descendent par le trou du chat le long du premier hauban.
Si elles sont triples, elles font dormant sur l'estrope de la poulie de la vergue, passent dans la poulie du chouc, de là dans celle de la vergue, pour revenir dans le second rouet de celle du chouc et descendre de là le long du premier hauban.
Lorsque les poulies d'écoute et de balancine sont faites sur la même pièce de bois, la partie supérieure de cette dernière porte un excédant de bois perçé d'un trou au moyen duquel on fait le dormant en y passant le bout de la balancine et l'épissant sur lui-même.
La balancine de la vergue barrée est toujours simple.
Bras.
Les bras servent à faire mouvoir la vergue de l'avant à l'arrière. Ceux des basses vergues sont toujours doubles, c'est-à-dire qu'ils ont une poulie sur la vergue, appelée poulie de bras.
On établit sur l'arrière du bâtiment, en dessous des bossoirs d'embarcation, une vergue qu'on fixe par des mains de fer et qu'on soutient par deux arcs-boutans aussi en fer, allant le premier de l'avant à l'arrière, du bout de la vergue au-dessus du jardin de la bouteille, et le second de dessus en dessous, du bout de la vergue sur la face avant du tableau. Ce dernier est aussi remplacé quelquefois par un hauban.
Les grands navires remplacent avantageusement cette vergue par deux forts arcs-boutans en bois, soutenus comme nous venons de le dire.
Les bras de la grande vergue, ou plutôt les grands bras, font dormant à l'extrémité de l'arc-boutant, passent dans les poulies dites de bras, capelées au bout de la vergue, descendent parallèlement à eux-mêmes pour venir passer dans les poulies de retour, capelées et aiguilletées à côté du dormant, et viennent à bord en traversant un clan pratiqué dans le prolongement des bossoirs d'embarcation, et s'amarrent à un taquet cloué en à bord.
A bord des bâtimens à dunette, les grands bras, en sortant du clan des bossoirs, reposent sur des rouleaux placés sur le fronteau d'arrière et sont manœuvrés sur le gaillard. Les frottemens considérables qu'ils éprouvent, et le changement de direction qu'on est obligé de leur donner, nous font penser qu'il serait plus avantageux de les laisser en dehors du navire en sortant de la poulie de retour de l'arc-boutant, de toute la longueur de la dunette, et de ne les faire entrer à bord que par des chaumards pratiqués dans la muraille, à peu de distance de la face arrière de la dunette.
Les bras de misaine font dormant chacun sur un des étais du grand mât, au-dessus de la réunion des branches, passent dans la poulie de bras, se dirigent ensuite vers les jottereaux du grand mât, où ils passent dans une poulie double qui y est aiguilletée de chaque côté, descendent le long du mât pour passer dans le clan extérieur du montant du râtelier de manœuvre, ou d'une poulie double estropée sur un piton, et s'amarrent sur des taquets cloués sur le pont.
Le dormant peut aussi se faire sur les jottereaux près de la poulie de retour, soit sur le piton qui y est fixé, soit en baguant le bras autour du grand mât.
Les bras de la vergue barrée, au lieu d'être appliqués comme pour les autres basses vergues de l'avant à l'arrière, le sont de l'arrière à l'avant. Ils font dormant au dernier hauban du grand mât, à la hauteur du trelingage, passent dans les poulies de bras, qui souvent sont à long pendeur bridé sur la vergue par un amarrage, vont passer dans une poulie double aiguilletée sur le dernier hauban au-dessus du dormant, et descendent le long de ce hauban pour s'amarrer en à bord à un cabillot de tournage.
Le dormant et la poulie de retour se fixent aussi sur la branche arrière du trelingage, ou sur la face arrière du mât en dessus du trelingage; dans ce cas les bras s'amarrent au râtelier de manœuvre du pied du mât.
Marche-Pieds.
Les marche-pieds d'une vergue se composent de deux morceaux de cordage qui, par un œillet pratiqué à leur extrémité, se capellent aux bouts de la vergue, et viennent se réunir sous son milieu par un aiguilletage; mais préalablement chaque marche-pieds a passé dans des cosses estropées sur des bouts de cordage appelés étriers, qui sont fixées sur la vergue à des distances égales.
L'aiguillette qui les réunit sert à les allonger ou à les raccourcir; mais alors il faut allonger ou raccourcir les étriers dans le même rapport.
Palans de Roulis.
Le but des palans de roulis est d'empêcher les vergues d'obéir à ce mouvement que les drosses seuls ne peuvent paralyser.
Les palans de roulis sont des palans ordinaires, dont les poulies simples se crochent à des cosses estropées et aiguilletées au tiers de la vergue, à partir des bouts, et dont les poulies doubles se fixent à des cosses tribord et babord du mât, qui sont retenues par des amarrages plats, dans une estrope qui entoure le mât à hauteur de la vergue. Les garans s'amarrent à un des cabillots du cercle du mât.
Fausses Balancines.
Lorsqu'on se sert des basses vergues pour élever de lourds fardeaux, les balancines ne sont point suffisantes pour les maintenir. On les renforce alors par de fausses balancines, qui se capellent par un œillet au bout de la vergue et qui estropent la poulie simple d'un palan, dont la poulie double se croche à un des pitons du chouc. Le garant descend le long du mât et passe dans une poulie de retour.
Il est évident que si on décroche la poulie double de la fausse balancine du piton du chouc, et qu'on la fixe à la cosse de l'estrope aiguilletée au mât pour le palan de roulis, la fausse balancine s'élongeant sur la face arrière de la vergue remplacera le palan de roulis. C'est ce qu'on fait ordinairement, et alors on supprime la cosse et l'estrope qui servaient à la poulie simple de ce palan.
La vergue barrée n'a pas de fausses balancines.
Faux Bras.
Les faux bras se placent au capelage des vergues[2], dans un mauvais temps, pour soulager les bras en partageant leur effort; et lorsqu'on se prépare au combat, pour les remplacer, s'ils sont coupés par les boulets de l'ennemi.
Les faux bras des basses vergues sont doubles.
Ceux de la grande vergue se passent de deux manières. Dans le mauvais temps, ils font dormant à un piton fixé extérieurement en avant des bouteilles, passent ensuite dans la poulie crochée ou aiguilletée sur la cosse à estrope qui est au capelage de la vergue, et, se dirigeant sur l'arrière, passent dans une poulie de retour fixée sur la vergue et l'arc-boutant, d'où ils entrent dans le bord par un chaumard percé à côté de celui du bras.
Le faux bras de combat se dirige sur l'avant. Le dormant se fait sur le trelingage, ou plutôt sur le mât de misaine à hauteur des jottereaux, passe dans la poulie du bout de vergue, dont nous venons de parler, et qu'on dévire sur l'avant, passe ensuite dans une poulie aiguilletée au ton du mât de misaine en dessus du dormant, et descend le long de ce mât.
A bord des grands navires, on se sert souvent des faux bras de grande vergue passés ainsi, afin d'accélérer le changement des voiles de l'arrière, lorsqu'on a à louvoyer dans une passe étroite; mais dans ce cas on les met ordinairement simples, pour avoir moins à abraquer. Le dormant est alors au capelage de la vergue.
Les faux bras de misaine font dormant à un piton placé extérieurement en avant des grands porte-haubans, et après avoir passé dans la poulie du capelage de la vergue, traversent le clan d'un chaumard pratiqué dans la muraille et s'amarrent sur un taquet en à bord.
La vergue barrée n'a généralement pas de faux bras.
Les pièces du gréement que nous venons de décrire ne sont pas les seules que portent les basses vergues. Puisqu'elles servent à établir et serrer les voiles, elles doivent aussi porter les poulies nécessaires à ces deux opérations.
Ces poulies sont: les poulies d'écoute de sous-vergues, plus brièvement appelées poulies de sous-vergues; poulies d'écoute de bout de vergues; poulies de cargues-points, poulies de cargues-fonds, et poulies de cargues-boulines.
Si nous joignons aux pièces du gréement et aux poulies dont nous venons de parler, une filière pour enverguer la basse voile, la réunion de toutes ces parties formera ce qu'on appelle la garniture de la basse vergue; et les disposer convenablement sur la vergue, est ce qu'on appelle les garnir.
Garniture de la Grande Vergue.
La grande vergue étant supposée à l'eau le long du bord à babord, on aiguillette les caliornes sur leurs pendeurs, si elles ne le sont pas; on affale celle de babord et on la croche sur une élingue baguée et bridée sur la vergue, au tiers de la moitié qui doit être sur tribord. On pèse sur la caliorne, et la vergue monte le long du bord. Lorsque l'élingue est au-dessus du plat-bord, on y croche la caliorne de tribord, on décroche celle de babord et on l'accroche à une seconde élingue bridée de la même manière, au tiers de la seconde moitié. Pesant alors sur cette caliorne, la moitié inférieure se soulage, le bout supérieur pare le plat-bord, et la vergue guidée par une retenue placée sur l'avant, est conduite ainsi dans une position horizontale à l'aplomb des caliornes. On la laisse ainsi suspendue pour la garnir.
On aiguillette d'abord les estropes ou l'estrope de suspente, ensuite les poulies de sous-vergues qu'on en éloigne d'un demi-diamètre du mât, puis les poulies de cargues-points qui sont au sixième de la moitié. Si la fausse balancine ne sert pas de palan de roulis, on place au tiers, à partir du bout, l'estrope dans la cosse de laquelle on doit le crocher.
On capelle en premier lieu la filière d'envergure, qui se compose de deux morceaux de cordage, se capelant par un œillet et se réunissant sur le milieu de la vergue par une aiguillette qui les raidit, en passant successivement dans les cosses que porte leur extrémité inférieure. On les place un peu sur l'avant du milieu de la partie supérieure de la vergue, et on les maintient dans cette position, en les embrassant par de petits morceaux de basane dont les bouts sont réunis et cloués sur la vergue. On les maintient encore par quelques crampes dont les branches les embrassent et qu'on enfonce dans la vergue.
On capelle ensuite les marche-pieds, puis les poulies d'écoutes des huniers; si les basses vergues sont à clans pour passer les écoutes, on les supprime; puis les estropes à cosses pour les faux-bras; les poulies de bras, et enfin les balancines, si elles sont simples. Dans le cas contraire, la poulie d'écoute porte, comme nous l'avons dit plus haut, la poulie de balancine.
Les poulies de cargues-fonds et de cargues-boulines se suppriment souvent; nous y reviendrons en parlant de ces manœuvres. D'ailleurs elles s'aiguillettent au-dessus de la filière d'envergure.
Ordinairement les cercles des blins des bouts-dehors sont mis en place dans le lieu où on travaille les vergues. Dans le cas contraire, il faut le faire aussitôt que la vergue est disposée pour être garnie. Nous parlerons plus bas de leur usage.
La vergue ainsi garnie, on passe les balancines et les bras.
Pour la hisser à son poste, c'est-à-dire à hauteur du trelingage, on se sert de deux caliornes dont les pondeurs sont frappés au chouc du mât. Leur poulie double se croche à deux fortes élingues baguées sur la vergue contre les estropes des poulies de sous-vergues; les garans passent dans des poulies de retour sur le pont. On hisse en abraquant les balancines. Lorsque la cosse de l'estrope de suspente est presque à toucher celle de la suspente, on tourne et genope les garans des caliornes, et on fait l'aiguilletage de la suspente, ou on place la suspente en fer. Lorsque l'une de ces deux opérations est terminée, on largue les genopes des caliornes, on les affale; la vergue porte alors sur sa suspente et ses balancines, on décroche et on défrappe les caliornes.
On fait le dormant des drosses, on les passe de l'une des manières que nous avons indiquées, et la vergue peut recevoir sa voile.
Autrefois on hissait les basses vergues avec un appareil composé de quatre poulies triples, et de deux garans appelés drisses de basses vergues.
Deux de ces poulies étaient aiguilletées sur la vergue, entre l'estrope de suspente et celle de la poulie de sous-vergue; les deux autres de chaque côté des élongis, en faisant passer leurs estropes qu'on aiguilletait au ton du mât en avant de la barre traversière. On les réunissait ensuite par la drisse dont le dormant était sur l'estrope de la poulie du mât.
Souvent ce lourd et inutile appareil était laissé en place à la mer; puis on s'en débarrassa et on ne le mit plus que sur les rades pour être disposé à amener les basses vergues dans un mauvais temps; enfin, on ne le mit plus en place qu'au moment même de s'en servir. Mais on s'aperçut bientôt qu'il était très-long à disposer, et on l'a remplacé par les caliornes.
Garniture de la Vergue de Misaine.
La vergue de misaine se garnit et se hisse absolument de la même manière que la grande vergue; il est donc inutile de répéter ce que nous venons de dire pour cette vergue.
Garniture de la Vergue Barrée.
La vergue barrée ne portant pas de voile, sa garniture est beaucoup plus simple que celles de la grande vergue et de la misaine.
On la dispose en avant du mât pour la garnir au moyen des candelettes du mât d'artimon.
On aiguillette d'abord l'estrope de suspente au milieu de la vergue, puis, à la distance d'un demi-diamètre du mât, les poulies de sous-vergues pour les écoutes du perroquet de fougue. Le capelage se compose du marche-pied, de la poulie d'écoute, qui est ordinairement supprimée parce que la vergue est garnie d'un clan pour le passage de l'écoute, du pendeur de la poulie de bras et de la balancine.
On aiguillette aussi sur la vergue, à tribord ou à bâbord, la cosse pour la drosse, si, comme cela arrive le plus souvent, elle n'en a qu'une.
Les balancines capelées, on passe les bras et on hisse la vergue à son poste pour faire l'aiguilletage de la suspente avec deux forts palans bridés au chouc du mât d'artimon, enfin on passe la drosse.
Gréement de la Vergue de Civadière.
Cette vergue dont la place est sous le beaupré, ne portant plus de voiles, n'a d'autre but que celui de supporter et raidir les haubans des bouts-dehors de grand foc et de clinfoc.
Son gréement se compose: d'un palan appelé palan de bout qui la retient au mât de beaupré; d'un racage par lequel elle y est suspendue; des estropes à cosses pour le passage des haubans du grand foc et du clinfoc, de bras et de balancines.
Le palan de bout est un palan ordinaire dont la poulie double, qui généralement est à violon, se croche à un piton fixé en dessous et à l'extrémité du beaupré; la poulie simple est fixée à une cosse estropée sur le milieu de la vergue.
Ce palan est souvent remplacé par un cordage ayant un croc à chaque extrémité.
Le racage est confectionné avec un cordage garni en basanne, dont les deux extrémités sont terminées par un œillet ou une cosse. On embrasse la vergue avec les deux moitiés inégales, et à l'endroit où elles se joignent on fait un amarrage; on en fait un second à l'extrémité la plus courte; on entoure le mât avec ces deux branches ainsi unies; enfin la plus longue embrasse la vergue et vient s'aiguilleter sur l'autre.
Les marche-pieds sont confectionnés et établis comme nous l'avons vu pour les basses vergues.
Les bras, s'ils sont doubles, font dormant sur une des branches des étais du mât de misaine, passent dans la poulie de bras au bout de la vergue, de là dans une poulie frappée sous l'avant de la barre de la hune de misaine, ou sur la branche avant du trelingage, ou aux jottereaux, et descendent le long du mât. S'ils sont simples, le dormant est au capelage de la vergue, et alors quelquefois la poulie de retour est aiguilletée sur la branche extérieure de l'étai de misaine, mais peut aussi être fixée comme nous l'avons dit pour le bras double. On les amarre soit au râtelier de manœuvre en à bord, soit à un des cabillots du cercle du mât.
Les balancines sont simples, elles se capellent à la vergue, passent dans une poulie aiguilletée au chouc du beaupré, et descendant le long de ce mât, s'amarrent au râtelier du gaillard d'avant.
Si, par extraordinaire, on voulait les passer en double, alors il faudrait une poulie au capelage de la vergue, et le dormant se ferait à côté de la poulie du chouc.
Garniture de la Vergue de Civadière.
On aiguillette au milieu de la vergue l'estrope à cosse qui doit servir au palan de bout, ou à la petite suspente qui le remplace. A la distance d'un demi-diamètre du beaupré de cette dernière on fait le premier amarrage du racage, et ensuite le second pour qu'il puisse être employé aussitôt la vergue haute. Au sixième de la longueur de la vergue, à partir du bout, on aiguillette l'estrope de la cosse où doit passer le premier hauban du grand foc; à deux pieds de celle-ci, celle du second, et entre la première et le capelage de la vergue, celle où on fera passer le hauban du clinfoc.
On capelle d'abord le marche-pied, les poulies de bras et les balancines, ou leurs poulies si elles sont doubles.
Dans cet état, la vergue est conduite sous le mât de beaupré, dans une embarcation ou à l'eau. On passe les bras et les balancines; on aiguillette ensemble et on met à cheval sur le beaupré, en les bridant, deux palans dont les garans sont envoyés sur le gaillard d'avant, et dont les poulies sont crochées à deux élingues baguées sur la vergue. On hisse en abraquant les balancines et les bras. Lorsque les poulies de palans sont à joindre, on met en place le palan de bout ou les suspentes qui le remplacent, on aiguillette le racage et on défrappe les palans.
Autrefois quelques navires portaient au bout-dehors du grand foc une vergue semblable, appelée contre-civadière; mais elle est généralement supprimée.
Si, comme nous l'avons dit en parlant du gréement du bout-dehors du grand foc, quelques navires suppriment la vergue de civadière, le bout-dehors est moins bien tenu, puisque les haubans n'ont plus autant d'empature, et on le prive sans raison d'une vergue de rechange qui peut être d'une grande utilité lorsqu'on fait des avaries. La vergue de civadière est de la même dimension que la vergue barrée, et peut ainsi la remplacer en cas de rupture, le navire n'en ayant pas de rechange. Il faut, avant de prendre la mer, se munir des arcs-boutans en fer qui remplacent la civadière dans le cas où cette dernière prendrait la place de la vergue barrée.
Des navires entreprenant une longue campagne ont quelquefois mis une vergue de hune pour civadière, afin d'augmenter leur rechange sans grossir leur drôme.
Gréement et garniture du Gui.
Le gui se place horizontalement de l'arrière du mât d'artimon, auquel il s'adapte au moyen d'une mâchoire qui repose sur un taquet circulaire cloué sur le mât de trois à six pieds du pont, suivant l'espèce de navire. Il se repose ensuite sur le couronnement, sur un taquet disposé à cet effet, ou sur un chandelier en fer, et se prolonge au-delà d'une quantité égale au tiers de la longueur totale.
Une des branches de la mâchoire est traversée par un cordage qui s'y arrête par un cul-de-porc, et va se fixer de la même manière sur la seconde, après avoir entouré la face avant du mât.
Si la mâchoire est remplacée par un piton, il se fixe dans l'œillet d'un cercle en fer qui embrasse le mât. Le piton peut aussi se remplacer par une double charnière qui réunit le cercle à l'étrier qui embrasse l'extrémité du gui.
Pour soutenir la partie extérieure qui dépasse le couronnement, on se sert de balancines qui servent aussi à le soulever en conservant son point d'appui sur le mât.
Deux poulies réunies par un cordage servent à le porter sur le centre du navire ou à le retenir au vent; c'est ce qu'on appelle l'écoute du gui ou plus ordinairement la grande écoute.
Pour lui donner le mouvement circulaire du centre à toucher les haubans de l'arrière, on y adapte l'itague d'un palan appelé palan de retenue, qui se trouve en dehors du bord et se manœuvre en faisant rentrer son garant par un des chaumards du gaillard en arrière des grands porte-haubans.
Nous allons décrire successivement les diverses manières dont on peut passer les balancines.
Doubles, on les confectionne avec le même morceau de cordage; à son milieu on fait un œillet arrêté par deux amarrages diamétralement opposés, on capelle cet œillet au bout du gui, les amarrages étant tribord et bâbord; les deux extrémités du cordage se dirigent ensuite vers le mât d'artimon, passent dans des poulies fixées de chaque côté du ton, suivent le hauban de l'arrière en estropant les poulies doubles de deux palans, dont les poulies simples sont crochées sur des pitons placés sur la partie arrière des porte-haubans d'artimon.
Pour rapprocher le point de suspension et soutenir d'autant mieux la vergue, au quart environ de sa partie extérieure, à partir du couronnement, on l'entoure avec un cordage dont les extrémités portent des cosses dans lesquelles on fait passer les balancines avant de les diriger vers le mât d'artimon. Ces cordages, appelés étriers, ne peuvent glisser sur l'arrière des balancines, étant retenues par des pommes.
Pour supprimer les étriers, on fait le capelage aux deux tiers de la partie extérieure.
Les balancines, après avoir passé dans les poulies du ton du mât d'artimon, peuvent revenir sur le gui, passer dans des joues de vaches bridées à peu de distance en avant du couronnement, et s'élonger le long de la vergue, ainsi que leurs palans dont les garans se tournent alors sur des taquets rousturés sur l'arrière.
S'il n'y a qu'une balancine, elle se capelle au bout de la vergue, passe dans un clan qui, comme nous le verrons, est pratiqué à l'extrémité de la corne, vient passer dans une poulie aiguilletée sur le ton, ou dans un des rouets de la poulie que nous placerons bientôt pour la drisse du pic, et descend le long du mât au pied duquel se croche son palan.
Au lieu de se diriger vers le ton du mât d'artimon, elle passe quelquefois dans une poulie aiguilletée au capelage du mât de perroquet de fougue.
On peut aussi faire le dormant soit au capelage du mât de perroquet de fougue, soit au ton du mât d'artimon; alors on capelle au bout de la vergue, ou à un tiers de sa partie extérieure, l'estrope de la poulie double dont le garant passe sur le couronnement et s'amarre sur le gui.
Si les balancines ne sont pas du même morceau de cordage, on peut faire leur dormant tribord et bâbord des jottereaux, les faire passer dans les joues de vaches dont nous avons déjà parlé; alors elles élongent le gui ainsi que leurs palans.
Enfin le dormant des deux balancines étant fait aux jottereaux, leurs poulies doubles se fixent soit au bout du gui, soit au tiers de sa partie extérieure.
Les écoutes de gui, ou grandes écoutes, se composent de deux poulies à deux rouets réunies par un cordage. Les poulies sont aiguilletées sur la vergue, un peu en arrière du couronnement, et leurs correspondantes sur des mains de fer fixées dans le tableau.
Les cosses qui servent à aiguilleter les poulies sur la vergue sont dans la même estrope, aiguilletée elle-même pour pouvoir s'enlever facilement ainsi que les poulies. Les écoutes n'agissant que vers le milieu du gui, la partie extérieure doit fléchir lorsqu'on hale sur une d'elles pour porter la brigantine au vent. Pour la soutenir, on capelle à son extrémité deux itagues dont les palans se crochent à des pitons placés près de chacun des bossoirs. Toutes les fois qu'on se sert d'une des écoutes, on hale sur le palan du même bord.
Ces palans à itague reçoivent le nom de moustaches.
Les retenues sont aussi des palans à itague. Les itagues sont à crocs et se fixent à deux cosses, dont les estropes sont aiguilletées de l'arrière de celles des poulies d'écoute. Les palans ont leurs poulies simples sur l'arrière des grands porte-haubans, et les garans rentrant par un chaumard se manœuvrent sur le gaillard d'arrière.
Lorsqu'on hale sur la retenue pour porter le gui sous le vent, celle du vent se décroche, et se place extérieurement.
Quelques navires suppriment le gui et le remplacent par deux bouts-dehors traversant des blins fixés sur le couronnement à hauteur des bossoirs, et retenus dans ces blins par une clavette. Le gréement de ces bouts-dehors se compose d'une poulie pour l'écoute de brigantine, où ils ont un clan pour son passage, et de deux moustaches qui servent à la fois de retenue et de grande écoute.
On n'établit quelquefois qu'un seul bout-dehors, qu'on place alors au milieu du couronnement. Le blin doit tourner dans son pivot pour permettre à la partie qui porte le point d'écoute de la brigantine de s'éloigner du centre du navire. Une poulie ou un clan pour cette écoute, deux moustaches et une sous-barbe qui, après avoir été capelées, passent dans un piton du tableau et viennent s'amarrer sur l'arrière, composent son gréement.
Il est inutile de faire observer combien ces différentes installations sont loin de remplacer le gui avec avantage; elles n'offrent aucune solidité et doivent obliger de carguer la brigantine lorsque cette voile pourrait encore être utile.
Gréement de la Corne d'Artimon.
La corne d'artimon se hisse sur le mât au moyen de deux drisses; elle s'y adapte par sa mâchoire, et se place immédiatement au-dessous du trelingage, faisant, avec le prolongement du mât, un angle de 45°. Ces drisses, que nous allons décrire, la maintiennent dans cette position; un racage qui traverse les deux branches de la mâchoire la fixe au mât, et deux palans à itague, ou gardes, limitent ses mouvemens de roulis.
La première de ces drisses, appelée drisse du mât de corne et plus ordinairement grande drisse, se compose de deux poulies à deux rouets, dont l'une, la supérieure, a été déjà capelée au mât d'artimon, ou aiguilletée sur le capelage, ou enfin remplacée par un chaumard chevillé entre les deux élongis. L'inférieure se croche à un piton placé près de la mâchoire. Le garant qui réunit ces deux poulies descend le long du mât où il s'amarre.
La seconde drisse, appelée drisse du pic, fait dormant au capelage de la vergue, passe dans un des rouets d'une poulie double fixée à la face arrière du chouc du mât d'artimon, se dirige ensuite vers une poulie frappée au tiers de la longueur totale à partir du capelage, vient passer dans le second rouet de la poulie du chouc, et descend le long des haubans de l'arrière à tribord ou à bâbord, suivant le clan où passe le dernier tour.
On peut rendre la drisse du pic simple, en fixant au capelage et au point où nous avons placé une poulie, un cordage en patte d'oie garni d'une cosse, sur laquelle la drisse vient se fixer. La poulie du chouc est alors simple.
Les gardes, destinées à empêcher la corne d'obéir aux mouvemens du roulis, et à se porter sous le vent lorsque la brigantine est établie, se composent de deux pendeurs à palans, capelés au bout de la vergue et dont les poulies simples se fixent à des pitons placés extérieurement au-dessus des bouteilles.
On les forme aussi en capelant deux poulies au bout des vergues, et faisant passer dans chacune d'elles un cordage qui fait dormant à un piton au-dessus de la bouteille et vient passer dans une poulie de retour crochée près du dormant.
On supprime les poulies en se servant du même cordage, qu'on bague au capelage et dont les bouts passent dans les poulies de retour placées sur les bouteilles.
A bord des grands navires où la brigantine est une voile de beau temps, où l'on ne prend jamais de ris, où la corne ne s'amène que dans de rares circonstances, on la considère presque à demeure une fois en place, et on substitue à la grande drisse une suspente crochée au piton de la poulie de drisse et aiguilletée sur le capelage du mât d'artimon.
Au contraire, dans les bricks où la brigantine est une voile principale, dont la manœuvre est de tous les instans, on la rend plus facile en passant les deux drisses à itagues.
L'itague de la grande drisse fait dormant au piton qui est près de la mâchoire, passe dans un des rouets de la poulie fixée à l'arrière du chouc du mât d'artimon, et vient établir son palan le long de ce mât.
Celle de la drisse du pic fait dormant à la cosse d'une patte d'oie fixée au capelage et au tiers de la longueur de la vergue, passe dans le second rouet de la poulie du chouc, et vient former son palan au pied du mât du bord opposé à celui de la grande drisse.
Garniture de la Corne d'Artimon.
La corne, outre la longueur qui lui est nécessaire pour l'établissement de la brigantine, porte un bout de bois mort à l'extrémité duquel est une petite poulie pour les drisses des pavillons et signaux. Le capelage est au point où la corne coupée à pans carrés s'amincit pour former le prolongement qui ne fait pas partie de la longueur de la vergue; il est souvent remplacé par un arc-boutant en fer servant au même usage, et dont le bout alors porte un et même deux rouets pour les drisses des pavillons.
La brigantine s'enverguant ou s'établissant sur la corne au moyen d'une draille, la garniture de cette vergue doit éprouver des changemens suivant la méthode qu'on emploie.
Si la brigantine est enverguée, on aiguillette à deux pitons placés tribord et bâbord de la mâchoire, deux petites poulies triples pour le passage des cargues de cette voile; au milieu de la longueur de la vergue on fixe, par deux roustures, deux joues de vaches à rouets pour le passage de deux de ces cargues; un peu en arrière du tiers on en fixe deux autres pour celui des deux autres cargues; au tiers on passe l'estrope dans laquelle on fixe, par un amarrage plat, la poulie qui sert à la drisse du pic; au milieu de la distance qui sépare cette estrope du capelage, on fixe les poulies ou les pendeurs des gardes, puis on capelle l'œillet du dormant de la drisse du pic.
Si la brigantine est à draille, avant de capeler le dormant de la drisse du pic, on capelle la draille garnie de ses anneaux, et on la fait passer dans une poulie fixée en dessous de la mâchoire, pour pouvoir la raidir avec un palan placé au pied du mât d'artimon.
Dans ce cas l'artimon est envergué, et les joues de vaches rousturées sur la corne servent au passage de ses cargues.
Il est des navires qui portent la brigantine et l'artimon envergués sur la corne. Nous en parlerons à l'article qui traitera du gréement de ces deux voiles.
Pour terminer ce qui a rapport aux vergues qui se hissent sur les bas mâts, il faudrait décrire le gréement des cornes sur lesquelles quelques navires établissent le foc d'artimon et la grande voile d'étai. Mais comme cette méthode est plus exceptionnelle que générale, nous le donnerons en traitant du gréement de ces voiles.
SECTION II.
Gréement des Vergues de Hune.
Les vergues de hune se distinguent par le nom du mât qui les soutient et de la voile qu'elles portent. Celle du grand mât de hune s'appelle vergue du grand hunier; celle du petit mât de hune, vergue du petit hunier, et celle du mât de perroquet de fougue, vergue du perroquet de fougue.
Elles sont taillées à huit pans dans leur milieu, portent quatre taquets pour les empointures des ris des huniers, et sont ordinairement percées de deux clans, l'un pour le palaquin des huniers, et le second pour les écoutes de perroquet.
Ces vergues s'adaptent au mât de hune; mais n'y étant pas à demeure comme les basses vergues le sont aux bas mâts, on n'a pu les y fixer de la même manière. Il faut qu'elles puissent monter et descendre le long de leurs mâts lorsqu'il est nécessaire de diminuer ou d'augmenter la surface de la voile qu'elles portent, et d'ailleurs au mouillage elles reposent sur les choucs des bas mâts.
On leur communique ces mouvemens par une drisse à itague; des balancines les tiennent dans une position horizontale, ou les apiquent s'il est nécessaire; les bras les dirigent de l'avant sur l'arrière en tournant sur l'avant du mât où elles sont retenues par un racage, et des marche-pieds facilitent aux matelots le moyen de s'y porter quand la manœuvre l'exige.
Le gréement d'une vergue de hune se compose donc de:
- Deux drisses à itague;
- Deux bras;
- Deux balancines;
- Un racage;
- Deux marche-pieds;
- Deux palans de roulis.
Drisses à itague.
L'itague est faite avec un cordage de la force des galhaubans de hune, garni en bitord dans toute la longueur qui doit passer dans les poulies de la vergue et du capelage.
Les vaisseaux ont deux itagues; elles font dormant au capelage du mât de hune, descendent ensuite le long de ce mât pour passer de dedans en dehors dans une poulie qu'elles trouvent sur la vergue, remontent le long du mât pour passer de l'avant à l'arrière dans les poulies correspondantes, que nous avons capelées au mât de hune; de là, se dirigeant chacune d'un bord, sur l'arrière de la hune, elles vont s'épisser à la cosse des estropes de deux poulies doubles, ou former l'estrope des palans de deux poulies doubles qu'on réunit au moyen d'un garant à deux poulies simples à émérillons, crochées à des pitons placés hors le bord en arrière des porte-haubans. Ces palans ainsi formés se nomment drisses.
Pour les manœuvrer avec plus de facilité, on décroche les poulies simples, on les croche sur des pitons fixés sur la serre-gouttière et on passe les garans dans des poulies de retour, en ayant soin de les développer de l'arrière à l'avant pour les drisses de la vergue du grand hunier, et de l'avant à l'arrière pour celles du petit hunier.
Lorsque les itagues sont d'un même cordage, c'est-à-dire qu'il n'y a qu'une même itague pour les deux drisses, on ne place sur la vergue qu'une poulie. L'itague, après avoir passé dans cette poulie, envoie ses bouts passer l'un à tribord, l'autre à bâbord, dans les poulies du capelage, et se dirigeant comme nous l'avons dit, vont s'épisser, ou former les estropes des poulies doubles des deux drisses.
Les bâtimens qui n'ont qu'une drisse font le dormant de l'itague au capelage où ils n'ont alors qu'une seule poulie. L'itague, après avoir fait dormant, passe dans la poulie sur la vergue, de là dans la poulie du capelage, qui est du bord opposé à celui où le dormant a été fait, et vient estroper sa poulie de drisse.
Dans ce cas la drisse du grand hunier se place à tribord, et celle du petit hunier à bâbord.
C'est de cette manière qu'on établit les itagues du perroquet de fougue à bord des vaisseaux.
Les petits bâtimens suppriment la poulie du capelage en pratiquant à la noix du mât de hune un clan dedans lequel passe l'itague. Quelquefois même ils suppriment celle de la vergue, et alors l'itague fait dormant sur son milieu.
Ces mêmes bâtimens diminuent quelquefois la dimension de l'itague et s'en servent pour drisse. Alors la vergue porte une poulie double, et le capelage une poulie de chaque bord. L'itague fait dormant au capelage, et allant successivement de chacun des clans de la poulie de la vergue à celle du capelage, descend ensuite de l'arrière de la hune et va passer dans une poulie de retour fixée à la serre-gouttière.
Bras.
Les bras des vergues de hune sont doubles.
Ceux du grand hunier font dormant au capelage du mât de perroquet de fougue, passent dans les poulies de bras, de là dans des poulies à pendeurs qui embrassent le mât d'artimon en dessous des jottereaux, et dans les poulies de retour qui sont au pied du mât ou crochées sur la serre-gouttière. Leur développement se fait de l'arrière à l'avant. Ils s'amarrent à des taquets cloués sur la muraille ou le pont.
Le dormant se fait aussi aux jottereaux du mât d'artimon, et alors les poulies à pendeurs sont au capelage du mât de perroquet de fougue. Si par cette installation la vergue du grand hunier est mieux appuyée et apique moins au brasséiage, d'un autre côté le mât de perroquet est plus fatigué.
Les bras du petit hunier font dormant au capelage du grand mât de hune, de là vont dans leurs poulies de bras, et se dirigeant vers le grand mât passent dans les seconds rouets des poulies où passent déjà les bras de la vergue de misaine; descendent le long du mât et passent de l'avant à l'arrière dans les montans du râtelier de manœuvre en dedans et à côté des bras de misaine. Ils s'amarrent comme eux à des taquets cloués sur le pont.
Le dormant peut se faire sur l'étai du grand mât, à l'épissure des branches, et alors les poulies de retour sont au capelage des grands mâts de hune.
Les bras du perroquet de fougue font dormant sur les derniers haubans de l'arrière du grand mât, au-dessus du trelingage, ou sur la branche arrière du trelingage lui-même ou à des pitons fixés aux jottereaux, et après avoir passé dans leurs poulies de bras viennent dans des poulies fixées un peu au-dessus et à côté du dormant, et descendent soit le long du mât pour s'amarrer au râtelier de manœuvre, soit le long des haubans pour s'amarrer au cabillot fixé sur la muraille.
A bord des petits navires les bras du perroquet de fougue sont simples.
Balancines.
Les balancines des vergues de hune sont simples. Après avoir été capelées au bout de la vergue, elles passent dans les rouets inférieurs des poulies vierges à trois rouets, qui sont fixées par quatre amarrages entre le premier et le second hauban; descendent le long du mât, passent par le trou du chat, et, élongeant les bas haubans, se fixent par un amarrage à un piton placé sur les porte-haubans entre le premier et le deuxième hauban. Lorsqu'on fait cet amarrage la vergue doit reposer sur le chouc du bas mât.
Les trois vergues de hune ont leurs balancines passées de la même manière. Les poulies vierges, fixées au hauban du mât de perroquet de fougue, n'ont que deux rouets.
Racage.
Le racage des vergues de hune se compose de pommes et de bigots; ou est formé par un cordage garni en basanne, ainsi que nous l'avons expliqué pour la vergue de civadière; ou se remplace par un taquet à mâchoire fixé sur la vergue.
Les racages à pommes se composent de quatre rangs de pommes séparées l'une de l'autre par des bigots; les bouts de filin qui enfilent les pommes et les bigots, et s'appellent bâtards de racage, ont à leur extrémité un œillet et un bourrelet qui empêche les pommes de se dépasser, et sont d'une longueur suffisante pour faire trois fois le tour de la vergue. Les œillets doivent être placés alternativement l'un sur tribord, l'autre sur bâbord.
Ce racage ainsi fait étant placé sur l'arrière du mât, le bout de chaque bâtard croise la vergue en passant sur son avant, passe dans l'œillet de l'autre bâtard, repasse sur l'avant de la vergue, entoure le mât sur les bigots, entoure encore la vergue et le mât, puis on les bride entre eux, entre ce dernier et la vergue.
Le racage simple, comme nous l'avons dit pour la civadière, se fait avec un cordage garni en basanne, ayant à ses deux extrémités une cosse. On embrasse la vergue avec les deux moitiés inégales, et on fait un amarrage sur la face arrière; on en fait un second pour réunir les deux branches, à toucher la cosse de la plus courte. L'excédant de la seconde branche entoure la vergue et vient s'aiguilleter sur la cosse de la première.
Dans un cabrion en chêne, ayant en hauteur le diamètre d'une vergue de hune, on creuse un demi-cylindre dont le diamètre est un peu plus fort que celui de son mât. A deux, trois ou quatre pouces du cylindre on évide le cabrion en le taillant en sifflet, et on gouge sa partie opposée dans le sens horizontal pour pouvoir l'appliquer sur la vergue. Lorsqu'il y est, milieu sur milieu, on le saisit par deux fortes roustures et par un cercle en fer qui embrasse le cabrion et la vergue. (Le cercle peut porter un piton qui sert alors à aiguilleter la poulie d'itague.) On arrondit légèrement les angles de cette mâchoire qu'on perce d'un trou, et on la garnit en basanne.
La vergue étant sur le chouc, la mâchoire embrasse le mât et y est retenue par un cordage qui passe dans les trous pratiqués dans la mâchoire et dont les bouts s'aiguillettent l'un sur l'autre.
Cette installation non-seulement dispense de se servir des palans de roulis, mais elle offre l'inappréciable avantage d'empêcher l'apiquement de la vergue lorsqu'une balancine casse pendant que les matelots sont dessus, et peut ainsi sauver la vie à plusieurs de ces hommes précieux.
Quoique la mâchoire soit garnie en basanne, il est prudent, en prenant la mer, d'introduire entre elle et le mât un paillet fin ou une sangle bien suivée qu'on lace à faux frais sur la vergue.
Marche-pieds.
Les marche-pieds des vergues de hune sont confectionnés et placés absolument comme ceux des basses vergues.
Palans de Roulis.
Les palans de roulis sont des palans ordinaires, dont la poulie simple est crochée à une cosse estropée sur la vergue au tiers de sa longueur, et dont la poulie double se fixe à une estrope qui entoure le mât. Le garant s'amarre dans la hune, ou descend le long du bas mât pour s'amarrer à un des cabillots du cercle qui l'embrasse.
Outre le gréement dont nous venons de parler, les vergues de hune portent encore les poulies nécessaires à la manœuvre de leurs voiles et de celles des perroquets, qui, avec la filière d'envergure et les blins des bouts-dehors complètent leur garniture.
Garniture de la Vergue du grand Hunier.
Les vergues de hune se garnissent à bord, sur le pont, où on les dispose convenablement pour cette opération.
Bien au milieu de la vergue, si elle n'a qu'une itague, ou à une distance d'un demi-diamètre du mât si elle en a deux, on aiguillette la ou les poulies d'itagues, de manière que le rouet soit dans le sens de la vergue. Ces poulies sont ordinairement à double goujure; leur estrope est double, les branches en sont inégales, et l'aiguilletage se fait sur le côté.
De chaque côté de la vergue, à une distance de son milieu, égale au douzième de sa longueur, on aiguillette une poulie double dont le rouet de l'avant servira pour l'écoute du grand perroquet, et celui de l'arrière pour la cargue-point du grand hunier. Cette poulie est placée sous la vergue. Au milieu de chaque moitié et dans la même position, on place une poulie simple pour le passage des cargues-boulines. De chaque côté sur l'estrope de la poulie d'itague ou sur chacune des estropes des poulies d'itague s'il y en a deux, on fixe une poulie pour le passage des cargues-fonds du grand hunier. Mais comme presque toujours en rade on pèse les fonds bien au-dessus de la vergue pour serrer la voile avec plus de facilité, ces poulies sont à fouet pour pouvoir être défrappées. On aiguillette au tiers, à partir de chaque bout, l'estrope pour le palan de roulis.
On capelle d'abord la filière d'envergure, confectionnée et placée comme nous l'avons dit pour les basses vergues; puis les marche-pieds semblables et semblablement disposés encore à ceux de ces vergues.
Si la vergue n'est pas percée d'un clan à son carré pour le passage de l'écoute de perroquet, on capelle une poulie pour le remplacer. Puis on capelle la poulie de bras et la balancine. On met en place les blins des bouts-dehors.
Garniture de la Vergue du petit Hunier.
La garniture de la vergue du petit hunier est en tout semblable à celle du grand hunier.
Garniture de la Vergue du Perroquet de fougue.
Si la vergue de perroquet de fougue n'a pas de poulie d'itague, on aiguillette sur son milieu l'estrope d'une cosse, sur laquelle l'itague se croche si elle est à croc, ou se frappe si elle n'a pas de croc.
Si les bras sont simples, on les bague, ou on les capelle à la place qu'auraient occupée les poulies.
Croiser les Vergues de Hune.
Les vergues de hune garnies, on les place, pour plus de facilité, sur l'avant de leurs mâts respectifs pour les hisser.
On passe un fort cordage dans une des poulies d'itague, on le frappe sur le milieu de la vergue, on l'élonge sur une de ses moitiés en faisant au tiers et aux deux tiers de bonnes genopes. Cette drisse, après avoir élongé le mât, se dirige dans une poulie de retour. Il faut, autant que possible, passer les balancines, et si elles sont trop courtes on fait ajut avec un autre filin; on fait de même pour les bras. On pèse sur le cordage qui sert de drisse en guidant la vergue par une retenue pour qu'elle pare la hune. Lorsque son extrémité supérieure a dépassé le chouc, on passe les balancines et les bras s'ils ne le sont pas. On continue à hisser en abraquant un peu les bras, et on coupe la première genope lorsqu'elle paraît sur le chouc. On commence alors à abraquer la balancine sous le vent, et continuant à hisser on coupe la dernière genope, en pesant la balancine sous le vent, filant celle du vent, et abraquant les bras du même bord.
La vergue tenue ainsi carrément par ses bras et ses balancines, on fait le racage; on passe et on épisse l'itague; on défrappe le cartahu qui a servi de drisse; on la soulage un peu du chouc du bas mât pour placer entre elle et lui le paillet sur lequel elle doit porter, et on amarre les balancines sur les pitons des porte-haubans.
Faux bras des Vergues de Hune.
Les vergues de hune, comme les basses vergues, portent des faux bras dans les temps forcés, ou lorsqu'on se prépare au combat. Mais dans ces deux cas leurs installations différent totalement.
Dans les deux cas les bras sont simples; mais dans le premier ceux du grand hunier, après avoir fait dormant au capelage de la vergue, passent dans un des rouets du chaumard en arrière des haubans d'artimon; et dans le second cas, dans des poulies frappées sur les haubans d'arrière du petit mât de hune à hauteur du trelingage, ou aiguilletées au ton de ce mât.
Les faux bras de la vergue du petit hunier, pour le mauvais temps, après avoir fait dormant au capelage de la vergue, passent dans un des rouets du chaumard en avant du grand mât, ou dans une poulie frappée sur les branches du grand étai. Pour le combat ils passent dans des poulies aiguilletées sur le bout-dehors de grand foc, et se manœuvrent du gaillard d'avant.
La vergue de perroquet de fougue n'a ordinairement pas de faux bras; cependant lorsqu'on porte le perroquet de fougue avec gros temps, quelques capitaines en font placer qui passent dans des poulies fouettées sur la corne et s'amarrent le long du bord.
SECTION III.
Gréement des Vergues de Perroquet.
Les vergues de perroquet s'établissent sur les mâts de perroquet d'une manière semblable à celle qui vient de nous servir à établir les vergues de hune sur leurs mâts.
Elles reçoivent le nom de vergue de grand perroquet, vergue de petit perroquet, vergue de perruche.
Leur gréement se compose des mêmes manœuvres que celui des vergues de hune, mais simplifié à cause de leurs moindres dimensions. Il se compose de:
- Une drisse simple ou à itague;
- Deux bras simples, et doubles seulement
- pour les vaisseaux et frégates;
- Deux balancines;
- Deux marche-pieds;
- Une estrope pour la drisse;
- Un racage.
Drisse.
La drisse simple se frappe sur la cosse que nous placerons en garnissant la vergue; passe dans un clan pratiqué à la noix du mât, et descend en arrière de la drisse de la vergue de hune, pour passer dans une poulie de retour fixée sur la serre-gouttière.
Pour faciliter la manœuvre de la vergue de perroquet, on frappe sur la drisse, à une hauteur convenable et au moyen d'un cabillot, une poulie double dont l'estrope porte une cosse; et passant successivement la drisse elle-même dans une poulie double fixée sur la serre-gouttière, et dans celle qui fait dormant sur le courant de la drisse, on forme un palan qui permet de hisser la vergue avec une grande facilité.
On aiguillette quelquefois une poulie simple sur l'estrope de la vergue, on fait dormant de la drisse au capelage, on la passe dans la poulie de la vergue, de là dans le clan du mât, et elle descend soit pour passer dans la poulie de retour, soit pour former un palan comme nous venons de le dire.
Si la drisse est à itague, l'itague se croche à la cosse de l'estrope de la vergue, passe dans le clan de la noix du mât, et estrope une poulie simple. La drisse passe dans cette poulie, va faire dormant à un piton placé en arrière de la drisse de la vergue de hune, et vient de l'autre bord passer dans la poulie de retour.
L'itague, à bord des grands navires, porte quelquefois une poulie double; la drisse qui vient alors au pied du mât forme le garant d'un palan, dont la poulie simple est fixée dans la hune sur l'arrière du mât.
Bras.
Les bras de grand perroquet se capellent au bout de la vergue, passent dans des poulies fixées sur les premiers haubans du perroquet de fougue, ou dans les clans d'un chaumard chevillé entre les barres, se rendent de là dans le trou du chat, où, suivant le premier hauban du mât d'artimon, ils s'amarrent à un cabillot le long du bord.
S'ils sont doubles, le dormant se fait au-dessus de la poulie placée sous le premier hauban du perroquet de fougue, ou au capelage de mât au-dessus du clan du chaumard des barres. Après avoir passé dans la poulie de bras, ils passent dans la poulie ou le clan au-dessous du dormant et vont s'amarrer comme nous l'avons dit.
Les bras de la vergue du petit perroquet, après avoir été capelés au bout de vergue, passent dans les poulies aiguilletées sur les premiers haubans du grand mât de hune à hauteur du trelingage, ou dans le clan du chaumard fixé entre les barres du grand perroquet. Ils descendent par le trou du chat, et suivant les haubans de l'arrière s'amarrent le long du bord à un cabillot.
S'ils sont doubles on les fait passer comme ceux du grand perroquet, c'est-à-dire que le dormant se fait alors au-dessus de la poulie ou du clan qui sert au courant.
Les bras de la vergue de perruche, après avoir été capelés, passent dans des poulies aiguilletées de chaque côté de la face arrière du chouc du grand mât, ou dans des poulies aiguilletées sur les derniers haubans du grand mât à hauteur du capelage.
Ces bras sont ordinairement simples, même à bord des plus grands vaisseaux; cependant si on voulait les passer en double, il est clair que, comme pour les autres vergues de perroquet, il faudrait faire le dormant au-dessus de la poulie où passe le courant.
Les navires qui ont les bras de perroquet en double, les font passer en simple lorsqu'ils doivent rester sur rade, afin de gréer et dégréer avec plus de promptitude.
Balancines.
Les balancines des perroquets passent dans la ganse fixée sur la vergue, et se capellent après les bras. Elles passent ensuite dans le clan inférieur d'une poulie vierge à deux rouets, fixée entre les haubans de perroquet, et descendent ensuite pour s'amarrer ordinairement dans la hune. Quelquefois aussi elles passent par le trou du chat et s'amarrent le long du bord, entre le premier et le deuxième hauban. De cette manière le nombre des hommes à envoyer dans la hune pour gréer et dégréer les vergues est moins considérable.
Les poulies vierges où passent les balancines sont simples, ou à un seul rouet pour la perruche.
Marche-pieds.
Les marche-pieds sont en tout semblables à ceux des autres vergues.
Estrope.
La cosse où l'on croche l'itague est retenue par un amarrage plat dans une estrope qu'on aiguillette sur le milieu de la vergue; plus généralement l'estrope est faite en bague. On fixe la cosse par un amarrage et on passe, en la faisant entrer de force, l'estrope dans la vergue. Quand elle est parvenue au milieu, on l'y fixe par de petits taquets cloués de chaque côté.
L'estrope doit être garnie en bitord ou en basanne.
Racage.
Le racage des vergues de perroquet est absolument semblable à celui que nous avons décrit pour les vergues de civadière, et qui sert aussi fréquemment pour les vergues de hune.
Garniture de la Vergue de grand perroquet.
On aiguillette, ou on passe l'estrope de la cosse de drisse bien au milieu de la vergue et la cosse au centre.
On capelle la filière sur laquelle on enverguera la voile; on la fixe comme sur les autres vergues.
On fait l'amarrage qui réunit les deux branches inégales du racage, et on le fait glisser sur la vergue jusqu'à ce qu'il soit à peu de distance de l'estrope de drisse.
Au sixième de la longueur, à partir de l'estrope, on place de chaque côté une poulie double pour le passage des cargues-points, et dont le second rouet servira, comme nous le verrons, à l'écoute des catacois.
Sur l'avant de la vergue, et sur l'estrope même, on aiguillette une poulie pour la cargue-fond, qui est formée par une patte d'oie. S'il en était autrement, il faudrait deux poulies de cargue-fond, qu'on placerait alors, une de chaque côté, à mi-distance entre la poulie du point et l'estrope de la drisse.
On capelle les marche-pieds. Ces vergues, portant toujours un clan, n'ont pas de poulie d'écoute pour le catacois. On sent que si elles n'en avaient pas, il faudrait les capeler.
On fixe sur le carré du capelage de la vergue, la ganse où doit passer la balancine. On devrait capeler les bras et les balancines; mais ces manœuvres ne se mettent en place qu'en gréant la vergue.
Garniture de la Vergue de petit Perroquet.
La garniture de la vergue de petit perroquet est absolument semblable à celle du grand perroquet.
Garniture de la Vergue de Perruche.
La garniture de la vergue de perruche est semblable à celle des autres perroquets, avec cette seule différence que souvent elle n'a pas de cargue-fond, et qu'alors la poulie aiguilletée à l'estrope de drisse est supprimée.
Gréer les vergues de Perroquet.
Gréer les perroquets, c'est les envoyer à leurs mâts respectifs, c'est les avoir prêts à être établis aussitôt que le besoin s'en fait sentir.
Les voiles de perroquet s'enverguent sur le pont; en gréant les perroquets, nous supposons qu'elles sont en place.
Si la drisse est simple, on en affale le bout sur le pont, ou dans les bas haubans où se trouvent ordinairement les vergues lorsqu'elles sont garnies. La vergue de grand perroquet et de perruche à tribord, celle de petit perroquet à bâbord.
Si la drisse est à itague, on défrappe le dormant fait au piton dans le porte-hauban; c'est ce dormant qui sera amarré sur l'estrope de la vergue, et on hale sur l'itague de manière que sa poulie soit rendue au clan. On le croche alors à un erse bagué sur les barres.
Mais si l'itague est à palan, c'est-à-dire si la poulie est double, alors on fouette au capelage du perroquet une poulie où passera une manœuvre appelée drisse volante, qui servira à hisser le perroquet.
Le bout de la drisse affalé, on la frappe sur la cosse de l'estrope, on l'élonge sur la moitié de la vergue qui doit monter la première, et on la genope aux deux tiers à partir du milieu.
On pèse sur la drisse en faisant parer la vergue de la hune; lorsqu'elle est rendue dans les haubans de hune, on capelle les bras et les balancines, qu'on passe dans les ganses, et on continue à hisser jusqu'à ce que le milieu de la vergue soit sur le chouc du mât de hune. Alors on coupe la genope, on appuie sur le bras du même bord en pesant fortement sur les balancines du bord opposé, et la vergue vient horizontalement sur le chouc. On fait aussitôt le racage pour l'y maintenir.
On la met carrément sur ses bras et balancines, et on la garnit, c'est-à-dire qu'on frappe les manœuvres qui servent à établir les voiles et hisser les vergues.
On défrappe la drisse; on croche l'itague; on passe la drisse dans la poulie d'itague, et on en fait le dormant. Les cargues-points sont amarrées sur les barres, on les passe dans les poulies sur la vergue, et on les frappe au-dessus des cosses où l'on fait le dormant des points d'écoute. On passe dans la poulie aiguilletée sur l'estrope, la cargue-fond qu'on frappe sur sa patte d'oie; enfin on capelle l'œil des boulines aux cabillots des branches de boulines.
Il faut avoir soin, en capelant les bras et balancines, de faire passer, au large du mât, de manière à l'entourer sur l'avant, le bras et la balancine du bord opposé à celui où se trouve la vergue dans les haubans de hune.
Pour faciliter cette manœuvre, le bras et la balancine sont sur la même bague et se capellent en même temps. Mais nous ne parlerons pas des escamotages, si souvent mis en usage par les bâtimens de guerre, pour rendre cette manœuvre plus prompte à l'œil; escamotages plus nuisibles qu'utiles, car pour la mer, où il faut gréer réellement, ils n'ont rien appris aux matelots.
Lorsqu'on grée le perroquet à la mer avec du roulis ou du tangage, ce qui arrive presque toujours, il serait imprudent de livrer la vergue à elle-même lorsqu'on la hisse, elle pourrait s'endommager en frappant sur la hune, et crever les voiles appareillées. Pour la guider on frappe au bout inférieur, au piton qui y est fixé pour porter, comme nous le verrons, la poulie de drisse de la bonnette, un cordage qu'on passe dans une poulie de retour, ou un piton, qu'on tourne à un cabillot, et qu'on ne file qu'à la demande de la drisse. De cette manière la vergue sollicitée par ses deux extrémités n'a que peu ou point de mouvement. Lorsqu'elle est parvenue dans les haubans de hune, on l'y saisit pour capeler les bras et balancines, et on ne défrappe la retenue que lorsqu'on est prêt à couper la genope.
A défaut de retenue, on peut saisir la vergue par le moyen de son racage au galhauban arrière du mât de hune. Lorsque son bout inférieur a dépassé la hune, on mollit le racage et le saisit dans les haubans, et on continue les manœuvres comme nous l'avons dit.
Dégréer les Vergues de Perroquet.
Dégréer les vergues de perroquet, c'est les placer sur le pont ou dans les bas haubans, pour les soustraire à la force du vent et soulager la mâture; c'est le contraire de l'opération que nous venons de décrire.
Pour dégréer un perroquet, on défrappe les écoutes, on les amarre sur les barres; on défrappe également les cargues-points et la cargue-fond, on les dépasse de leurs poulies et on les amarre, les cargues-points aux pitons du chouc du mât de hune, la cargue-fond sur l'avant; on décapelle les boulines de leurs cabillots, et on les fixe tribord et bâbord sur la barre de l'avant.
Si la drisse est simple, on l'affale, on l'élonge sur la vergue du bord opposé à celui où on veut l'amener, et on fait une genope au tiers. A la mer, où il faut nécessairement envoyer la vergue au vent, la genope se fait sous le vent.
Si la drisse est à itague, on décroche l'itague, on la croche à un erse sur les barres; la poulie doit être alors rendue au clan; on largue le dormant de la drisse dans le porte-hauban, et on hale sur le courant, pour que le dormant monte à la hauteur de la vergue.
Enfin, si l'itague est à palan, il faut, comme nous l'avons dit pour gréer, passer une drisse volante.
La genope faite, on largue le racage, on pèse fortement sur la drisse qui, par le moyen de la genope, fait apiquer la vergue; on aide à ce mouvement en pesant sur la balancine du même bord et mollissant l'autre; en même temps on mollit le bras du côté de la genope, et on abraque l'autre pour diriger le bout de la vergue dans les haubans de hune. On amène la drisse, et lorsque le bout supérieur de la vergue est à hauteur du chouc, on décapelle les balancines et les bras, et on amène la vergue au poste qu'on lui a assigné.
Les bras et balancines sont amarrés sur les barres et raidis.
Si la mer est forte, aussitôt que la vergue est dans les haubans de hune, on l'y saisit pour décapeler les bras et les balancines, après quoi on entoure les galhaubans de l'arrière avec le racage et on amène la vergue sur ce galhauban.
SECTION IV.
Gréement des Vergues de Catacois.
Les vergues de catacois s'établissent sur les mâts de catacois, les mâts de bome qui les remplacent, ou sur les flèches des mâts de perroquet, de la même manière que les vergues de perroquet sur leurs mâts.
Ces vergues reçoivent le nom de grand catacois, petit catacois, et catacois de perruche. Leur gréement, absolument semblable à celui des vergues de perroquet, se compose comme celui de ces dernières, de:
- Une drisse simple;
- Deux bras;
- Deux balancines;
- Deux marche-pieds;
- Une estrope de drisse;
- Un racage.
Drisse.
La drisse, toujours simple, fait dormant sur la cosse de l'estrope de drisse, passe dans un clan pratiqué en dessous du capelage, et se dirigeant en arrière de la hune, descend s'amarrer contre le bord, en arrière de la drisse du perroquet.
Bras.
Les bras du grand catacois, après avoir été capelés, passent, l'un à tribord l'autre à bâbord, dans des poulies ou des cosses aiguilletées sur le hauban d'en avant du mât de perruche, ou près de son capelage, et descendant par le trou du chat vont s'amarrer contre le bord, en arrière et à côté des bras du grand perroquet.
Ceux du petit catacois, après avoir été capelés, se dirigent sur l'arrière au capelage du mât du grand perroquet, passent dans les poulies ou les cosses qui sont aiguilletées sur le hauban d'en avant, et descendant par le trou du chat s'amarrent contre le bord en arrière et à côté des bras du petit perroquet.
Enfin ceux du catacois de perruche, après avoir été capelés, passent dans des poulies ou des cosses aiguilletées sur le hauban d'en arrière du grand mât de perroquet, descendent par le trou du chat, et s'amarrent en à bord, en avant et à côté des bras de perruche.
Balancines.
Les balancines, après avoir passé dans la ganse fixée au carré de la vergue, et avoir été capelées, passent dans des poulies et plus généralement dans des cosses aiguilletées au capelage. Elles s'amarrent et se manœuvrent des hunes.
Les marche-pieds sont comme ceux des vergues de perroquet.
L'estrope de drisse est faite aussi de la même manière. On la supprime quelquefois, et alors la drisse fait dormant sur le milieu de la vergue qu'elle entoure.
Le racage est semblable à ceux des vergues de perroquet.
Les haubans de perroquet n'ayant souvent pas d'enfléchures, pour faciliter aux matelots les moyens de monter pour la manœuvre des catacois, on aiguillette au capelage des perroquets une échelle dont les branches se fixent sur l'arrière des choucs des mâts de hune.
Garnir et gréer les Vergues de Catacois.
On fixe d'abord l'estrope de drisse au milieu de la vergue, où on la retient en clouant des deux bords de petits taquets, ou en ayant pratiqué sur les vergues, en les confectionnant, deux petites mortaises.
A petite distance de l'estrope, on aiguillette de chaque côté une poulie pour les cargues-points.
On capelle les marche-pieds.
Comme pour les vergues de perroquet, les bras et balancines ne se capellent que lorsqu'on grée les vergues; pour celles-ci, lorsqu'elles sont parvenues dans les haubans de perroquet. On les garnit ensuite en faisant le racage, frappant les écoutes et les cargues-points, et en filant les boulines aux cabillots des branches.
Les navires qui portent leurs catacois au plus près sont les seuls qui les établissent comme nous venons de le dire. Quant à ceux d'une moindre dimension qui ne les portent que sur le largue, ils suppriment le racage, les bras et les boulines, et le catacois s'oriente alors en brassant le perroquet sur lequel sont les écoutes.
Dans ce cas on frappe sur le milieu de la vergue un cordage appelé hâle-bas, qui vient sur l'avant. Lorsqu'on veut se débarrasser du catacois, on largue les écoutes qui sont amarrées sur les barres de perroquet, on mollit la drisse, et pesant sur le hâle-bas, la voile passe sur l'avant des autres voiles appareillées, et se serre sur le pont. On les place après dans les bas haubans du bord opposé à celui où se trouvent les perroquets.
Les bâtimens ayant des mâts de perroquet à doubles flèches, portent quelquefois, mais bien rarement, des vergues de contre-catacois, qui s'établissent comme nous venons de le dire pour les catacois, qui n'ont ni bras, ni balancines, ni racage, ou catacois volans.