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Scènes de la vie sauvage au Mexique

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NOTICE
SUR LA VIE ET LES ŒUVRES
DE GABRIEL FERRY

I

Gabriel Ferry de Bellemare (dans les lettres il ne signa jamais que la première partie de son nom) naquit à Grenoble en novembre 1809. Tout enfant, il perdit sa mère ; son père, sous l’Empire, avait occupé la place de conservateur des eaux et forêts du département du Simplon. A l’époque de la Restauration, il s’engagea dans différentes affaires commerciales avec l’Amérique du Sud et finit par fonder une maison de commission à Mexico. Presque toujours éloigné de son fils, il l’avait mis au collége de Versailles.

Gabriel Ferry termina ses études en 1830, et son père, désirant l’initier aux affaires du négoce, l’appela auprès de lui à Mexico. Le jeune homme partit avec cet enthousiasme que l’on éprouve communément à cet âge pour tout ce qui est lointain, pour tout ce qui présente le caractère de l’inconnu et du merveilleux. Le Mexique était alors au lendemain de la fin de la guerre de l’Indépendance ; il était le théâtre d’étranges choses et de singulières mœurs. Gabriel Ferry en y arrivant dans ce moment n’échappa point à la fascination de ce milieu ; il sentit les instincts de recherches et de curiosité, que la nature avait déposés en lui, se développer subitement. Aussi arriva-t-il que, venu au Mexique pour s’initier aux affaires commerciales, il ne s’en occupa nullement ou très-peu.

Devenu promptement familier avec la langue espagnole, portant le costume mexicain avec une aisance à tromper les indigènes eux-mêmes, il vit de ces choses, il lui arriva de ces aventures qui sont les plus grandes joies du voyageur. La société mexicaine lui offrit l’attrait d’un roman bizarre et mystérieux, dont on ne veut ignorer aucune scène ; sa vie, qu’il aurait pu rendre moins agitée, à l’exemple de tant d’Européens établis au Mexique, devint pleine de hasards ; il allait au-devant des aventures ; il les suscitait, il les provoquait ; et fréquemment on le vit faire de longues excursions à cheval pour avoir le dernier mot d’une aventure commencée à Mexico, sa résidence habituelle.

Après quelque temps de séjour dans cette dernière ville, un vif désir s’empara de Gabriel Ferry : celui de voir ce vaste désert qui sépare au nord le Mexique des États-Unis, retraite des Sioux, des Indiens Apaches, hordes barbares perpétuellement en guerre avec les blancs ; de visiter ces prairies illustrées par Cooper, d’y admirer la vie sauvage dans toute sa simplicité primitive. Pour parvenir au désert, il faut traverser le Mexique dans toute son étendue, du Sud au Nord, en passant par la Sonora, la plus curieuse peut-être des provinces mexicaines. Une occasion lui permit bientôt de satisfaire ce désir : son père avait noué quelques relations commerciales dans la Californie, alors peu peuplée ; il y envoya son fils pour conclure une importante négociation. Au retour, Gabriel Ferry avait la faculté de pousser jusqu’au désert, si bon lui semblait. Le jeune homme part, plein d’ardeur, s’embarque à San Blas, navigue un mois dans ce beau golfe de Californie, dont les eaux sont si limpides, si transparentes, qu’on l’a appelé la mer Vermeille, touche à Pichilingue et remplit sa mission ! Désormais libre de son temps, il visite une partie des côtes de la Californie ; arrête un instant son cheval devant les quelques huttes de la misérable bourgade qui doit s’appeler plus tard San Francisco, puis il traverse de nouveau le golfe et va débarquer près de Guaymas, le plus important des ports de la Sonora !

Pour atteindre le désert, il traverse à cheval cette province dans toute son étendue ; il devient acteur et témoin des choses étranges, des aventures singulières qui sont l’origine de ce volume des Scènes de la vie sauvage. Arrivé au terme de son voyage, après des péripéties inouïes, un splendide paysage se déroule à ses yeux.

Laissons-le parler :

« Les prairies qui se terminent au San Pedro, du côté de Tubac, n’ont pour bornes, dans le côté opposé, que les eaux du Missouri. C’était bien là le désert tel que je l’avais rêvé. Au delà de la rivière, de vertes savanes ondulaient à perte de vue. A mes pieds, un petit lac, séparé du San Pedro par une étroite langue de terre, et qui jadis avait dû faire partie de la rivière, étendait ses eaux bourbeuses. Sur les larges feuilles de plantes aquatiques, des serpents d’eau faisaient reluire au soleil leurs corps visqueux, entrelacés en hideux réseaux. Au-dessus du lac voltigeaient des essaims de grues attirées par ces nombreux reptiles. De longues caravanes de bisons traversaient la plaine silencieuse. D’autres, disséminés par groupes ou par couples, paissaient l’herbe épaisse, ou, couchés sur la pente des collines, promenaient un regard tranquille sur leurs vastes domaines. Plus loin, ces sauvages animaux se livraient de rudes combats ; leurs sourds mugissements arrivaient à mes oreilles comme le murmure lointain de la mer, et, comme s’il eût fallu que, même dans le désert, l’homme révélât sa présence, un parti de chasseurs d’une tribu d’Indiens amis descendait en ce moment le cours du San Pedro sur des radeaux formés de larges bottes de roseaux soutenues par des calebasses vides. Une secua de mules chargées de lingots d’argent et escortées de leurs guides se dessinait en une longue file à l’horizon. Je restai longtemps ravi devant ce spectacle solennel, prêtant l’oreille à l’harmonie mélancolique de la clochette des mules et aux cadences indiennes qui troublaient, en montant graduellement, le silence des solitudes. »

Le désir de Gabriel Ferry était satisfait : il avait vu le désert !

Il revint sur ses pas, et, quelque temps après, il rentrait à Mexico, dont il était absent depuis quatorze mois.

« Peu s’en fallut, dit-il, que les amis qui venaient au-devant de moi ne crussent faire une fâcheuse rencontre dans le voyageur aux habits en lambeaux et couverts de poussière, à la barbe inculte, au visage hâlé, qui se présentait devant eux. J’avais quitté Mexico depuis quatorze mois, pendant lesquels j’avais fait à cheval, dans l’intérieur de la République, plus de quatorze cents lieues : c’est la distance à peu près du Havre à New-York.

Rentré dans la vie civilisée, je dépouillai mon accoutrement de voyageur, dont je ne gardai que les longs éperons que j’avais si longtemps chaussés et le sarape qui m’avait abrité de la rosée de tant de nuits froides comme du soleil de tant de jours brûlants. »

II

Gabriel Ferry revint du Mexique au commencement de 1837. Il y était resté environ sept ans. Il dut à ce long séjour de connaître les mœurs mexicaines dans leurs moindres détails. Mais ce ne fut que plus tard qu’il raconta les aventures qui lui étaient arrivées et les choses curieuses qu’il avait vues. Jamais les lettres ne furent son occupation principale ; elles devinrent pour lui un délassement de ses affaires, une occasion de rappeler et de fixer des souvenirs chers.

En 1840, Gabriel Ferry avait acheté une charge de courtier d’assurances maritimes, charge dont il se démit en 1844 pour devenir directeur général d’une grande Compagnie d’assurances maritimes, l’Espérance. Ce fut dans le cours de cette même année qu’il écrivit pour l’Illustration, sous le titre de Révolutions du Mexique, l’histoire animée des hommes qui, de 1817 à 1843, ont pris une part active dans les affaires de ce pays. Ces biographies, faites avec intérêt et fidélité, furent remarquées.

Bientôt la Revue des Deux-Mondes accueillit le récit du Pêcheur de perles, qui ouvre la série des Scènes de la vie sauvage au Mexique. Le succès de ce premier récit fut tel, que les colonnes de cette publication lui furent désormais ouvertes.

Les Scènes de la vie sauvage forment le premier volume des œuvres de Gabriel Ferry, et c’est peut-être le meilleur.

Bientôt il lui donna pour pendant les Scènes de la vie mexicaine proprement dite, c’est-à-dire le récit des événements dont il avait été acteur ou témoin à Mexico même, et ils ne lui firent pas défaut. Le cadre change de nature dans ces nouvelles scènes, mais les faits ne sont pas moins surprenants. A force d’originalité, ils semblent imaginaires ; ils paraissent empruntés à quelque fiction fantastique. Le roman est tellement dans les mœurs au Mexique, que celui qui veut les retracer fidèlement s’expose à passer pour un conteur peu scrupuleux, quand il n’est que simple historien.

Gabriel Ferry sentait son talent grandir et se développer : ses cadres habituels ne lui suffirent plus ; il essaya du roman à la façon de Cooper, et y réussit du premier coup.

Le Coureur des bois[1] fut son premier grand ouvrage ; un succès l’accueillit dès son début. Aujourd’hui peu de romans sont plus connus : plusieurs éditions et de nombreuses reproductions l’ont popularisé. Avant l’apparition du Coureur des bois, il n’existait peut-être pas de roman français de ce genre. La traduction des ouvrages de Cooper avait excité notre admiration, sans produire, cependant, chez nous, aucune œuvre originale qui s’en rapprochât. Ce genre ne se contrefait pas, il demande l’expérience des objets qu’il décrit : véritable épopée du désert, le Coureur des bois en retrace à grands traits toutes les scènes, toutes les mœurs. Une intrigue saisissante, qui court d’un bout à l’autre du roman, relève encore la nouveauté du cadre et l’originalité des détails.

[1] Le capitaine Mayne-Reid a traduit dernièrement le Coureur des bois en anglais.

Dans ses excursions à travers les provinces mexicaines, Gabriel Ferry avait eu souvent l’occasion de rencontrer d’anciens guerilleros qui avaient pris part à cette guerre de l’Indépendance du Mexique contre l’Espagne ! Guerre terrible qui dura dix ans (de 1810 à 1821). Lutte acharnée, pleine de tragiques aventures et de sombres épisodes, comme peuvent à peine en donner une idée les derniers événements dont le Mexique vient d’être le théâtre.

Ces souvenirs, ces récits d’anciens guerilleros étaient restés profondément gravés dans la mémoire de notre voyageur. Plus tard il en fit le sujet de ses Scènes de la Vie militaire au Mexique ; c’est un tableau coloré d’actions, d’aventures que l’on croirait empruntées aux temps antiques, et qui montrent que, quel que soit le climat, quelle que soit l’époque, les peuples font toujours preuve du même esprit d’héroïsme, quand ils combattent pour leur indépendance et pour leur liberté. La guerre de l’Indépendance inspira encore une fois Gabriel Ferry dans cet émouvant roman de Costal l’Indien.

C’est le récit des exploits de Morelos, le plus grand peut-être des généraux de l’expédition mexicaine ; dans cet ouvrage, l’intérêt de la fiction égale celui des détails historiques ; il forme avec les Scènes de la Vie militaire une saisissante lecture, pleine de révélations sur ce peuple dont l’étrangeté des mœurs se montre toujours la même à chaque étape de l’histoire contemporaine. Ce thème de composition appartient tout entier à Gabriel Ferry : il a été le premier à s’en emparer et à porter la lumière sur des faits totalement inconnus avant lui.

Cet esprit si original ne restait pas toujours circonscrit dans ses sujets favoris : il aimait quelquefois à faire des excursions dans un autre domaine, comme pour prouver la flexibilité de son talent, témoin ce roman de Tancrède de Châteaubrun[2], piquante étude de certains côtés des mœurs parisiennes. Mais dans ce roman, dont le but ostensible n’est que d’être amusant, Gabriel Ferry laisse encore voir l’empreinte de sa vigueur d’idées. La fiction n’est qu’un cadre, pour combattre d’une manière habile une loi étrange qui trop longtemps a fait ombre dans notre législation si éclairée, et qui vient d’être abolie : la loi de la contrainte par corps ! C’est dans notre histoire contemporaine qu’il prit le motif de la Chasse aux Cosaques, vigoureux roman où il retrace des faits peu connus de l’invasion de 1814 ; où il met en action l’histoire des sociétés secrètes qui, sous l’Empire, s’étaient organisées au sein même d’une partie de l’armée contre Napoléon, notamment la société des Philadelphes. Aussi cet ouvrage, dont le prologue commence au milieu des neiges de la retraite de 1812, n’est-il qu’une suite de scènes émouvantes et variées, reliées entre elles par une puissante intrigue.

[2] La Chasse aux Cosaques et Tancrède de Châteaubrun sont deux ouvrages posthumes ; avant d’être réunis en volumes, ils parurent en feuilletons, le premier dans la Patrie, le second dans l’Estafette.

Le dernier des ouvrages de Gabriel Ferry est un petit volume composé seulement de deux récits : Les Squatters, tableau de la vie de ces rudes défricheurs des forêts de l’Amérique du Nord, et la Clairière du Bois des Hogues, dramatique épisode des côtes de la mer.

Gabriel Ferry dessinait et peignait très-agréablement ; il rendit compte, dans l’Ordre, du salon de peinture de 1850-1851.

III

La composition de ces divers ouvrages n’avait demandé guère plus de cinq ou six ans à Gabriel Ferry, et, répétons-le, les lettres n’étaient pas son unique occupation : ceci donne la mesure de ce qu’il aurait pu faire, si la destinée avait été plus libérale de temps envers lui.

A la fin de 1851, le gouvernement français lui confia la mission d’aller recevoir à San Francisco les nombreux émigrants que la fièvre de l’or entassait sans prévoyance et sans ressource sur les rivages californiens. C’était une mission honorable et délicate ; les difficultés et les périls qu’elle comportait, le désir de revoir une partie des pays qu’il avait parcourus avec enthousiasme dans sa jeunesse, tentèrent Gabriel Ferry. Il partit.

Le 2 janvier 1852, il s’embarquait à Southampton, à bord de l’Amazone, magnifique paquebot de la Compagnie anglaise. Trente-six heures après, dans la nuit du 3 au 4, on venait à peine de perdre de vue les côtes d’Angleterre, que l’incendie envahissait l’Amazone ! Qu’est-ce qui avait causé le feu ? On ne le sut jamais. Des pompes destinées à éteindre l’embrasement furent rapidement mises en jeu ; les matelots, les passagers les desservirent avec l’ardeur du désespoir ! Il semble qu’il soit si aisé de devenir maître du feu au milieu de l’eau ! Vains espoirs ! La flamme gagnait à chaque instant de l’espace ! Bientôt même, sous l’impulsion du vent d’hiver qui activait l’incendie, la mer s’enfla, les lames grossirent et vinrent imprimer de fatales oscillations au navire embrasé !

Réveillé comme les autres passagers par le son des cloches d’alarme, Gabriel Ferry était monté sur le pont de l’Amazone ; mais avec ce coup d’œil exercé du voyageur qui s’est déjà trouvé maintes fois dans des circonstances critiques, il embrassa l’étendue du péril et vit qu’il n’y avait là aucune chance de salut ! Cette découverte ne lui arracha aucun signe de terreur. Il ramena sur sa poitrine son manteau de voyageur excité par la rafale, et, s’appuyant contre un cordage, regarda impassible l’incendie qui rugissait autour de lui. A celui qui avait vu le désert, qui avait été témoin de scènes étranges, la destinée réservait pour scène dernière un embrasement sur l’Océan pendant les ténèbres, sans autre issue qu’une mort terrible ! Deux heures après le commencement de l’incendie, l’Amazone présentait un aspect qui défie toute description : ce n’était plus qu’un gigantesque bûcher ! Les cheminées, les cordages, tout le gréement supérieur étaient tombés, et les flammes qui s’élevaient partout avec une intensité formidable, fermaient presque tout passage !

Alors chez quelques-uns la terreur se changea en vertige. Un passager et sa femme se prirent par la main et se précipitèrent dans l’intérieur du navire embrasé ! On résolut enfin une tentative désespérée : l’Amazone portait à son bord trois chaloupes de réserve ; le capitaine annonça que ses matelots allaient les mettre à la mer dans l’espoir de gagner la côte avec tout ce qu’elles pourraient contenir de monde.

On était éloigné de vingt-cinq ou trente lieues de la terre la plus voisine ; il faisait nuit et la mer était orageuse. C’était moins une espérance de sauvetage que l’alternative d’une mort moins horrible. Une première chaloupe est mise à flot. Une multitude haletante, sans songer aux dangers de cet empressement, sans écouter les représentations du capitaine, l’envahit avec confusion. Quelques coups de rames avaient à peine fait mouvoir cette embarcation qui enfonçait sous le poids de son chargement, qu’une vague formidable, accourant du large, bondit sur sa proie avec le fracas d’une décharge d’artillerie, et la submergea complétement.

La seconde chaloupe eut le même sort par les mêmes circonstances ! Du sein des flots s’élevaient alors de suprêmes cris de désespoir, et la réverbération sanglante du navire embrasé éclaira de lamentables agonies ! Restait une troisième embarcation ; ces deux désastres successifs rendirent quelque prudence : on décida que vingt passagers seulement y prendraient place. Ceux qui préféraient aux conséquences de l’incendie l’éventualité d’une fuite au hasard, pendant la nuit, sur une mer orageuse, descendirent dans la chaloupe.

Au moment d’y entrer, un négociant qui se rendait à San Francisco, M. Barrincon, se retournant vers Gabriel Ferry alors près de lui :

— Venez-vous avec nous ? lui dit-il.

— Mourir pour mourir, je préfère rester ici, répondit Gabriel Ferry avec cette sérénité qui ne l’avait pas un instant abandonné. Le capitaine joignit vainement ses pressantes instances à celles de M. Barrincon.

Enfin cette dernière barque s’éloigna !

Elle avait déjà fait une lieue au hasard, au milieu des ténèbres ; l’Amazone embrasée ne lui apparaissait plus dans le lointain que comme le fanal d’un navire qui cingle la mer pendant la nuit. Tout à coup, vers cinq heures du matin, un bruit égal à un roulement de tonnerre interrompit le silence de l’immensité… Le voile d’obscurité qui pesait sur l’horizon se déchira, la surface de l’Océan s’illumina comme par l’effet d’une aurore boréale, puis bientôt tout retomba dans la nuit… L’Amazone venait de sauter avec le reste de ses passagers[3] !

[3] Les vingt passagers montés sur cette barque de l’Amazone voguèrent pendant plusieurs heures encore ; ils furent enfin rencontrés par la galiote hollandaise la Gertrudia, qui les recueillit à son bord et les ramena aussitôt à Brest.

Voir, sur ce désastre, tous les journaux et principalement le Journal des Débats du commencement de janvier 1852.

IV

Cette mort, pathétique comme le dénoûment d’une tragédie antique, émut vivement l’opinion. La réputation de Gabriel Ferry s’étendit en raison de l’horreur de la catastrophe qui avait terminé ses jours.

La mort est une si grande artiste en renommée !

On rechercha ses ouvrages ; les éditions et les reproductions s’en multiplièrent rapidement. La critique jugea et apprécia son talent. George Sand lui consacra des pages émues ! Aujourd’hui il a sa place dans la puissante famille de ces écrivains voyageurs, hommes d’action et d’imagination, qui ont tenu le principal rôle dans leurs œuvres.

Gabriel Ferry a le mérite d’avoir marqué le premier parmi nous cette littérature qui emprunte son intérêt aux grandes scènes de la nature d’outre-mer, aux mœurs si pittoresques de ses habitants. Depuis, bien des écrivains se sont essayés dans cette voie. Notre voyageur a gardé la priorité dans le genre qu’il avait révélé, car il réunit au plus haut degré l’intérêt et le style. Il a enveloppé ses œuvres de cette forme parfaite qui rend impérissable ce qu’elle touche ; et nul n’a peint avec plus de saisissante vérité les mœurs de ce peuple étrange qui reste toujours le même en dépit de la marche du temps et des progrès de la civilisation.

Dans notre dernière expédition au Mexique un grand nombre d’officiers avaient avec eux les ouvrages de Gabriel Ferry, et les consultaient avec fruit, de même qu’en 1798 les soldats de l’armée d’Égypte n’avaient pas de meilleur guide que le voyage de Volney dans la terre des Ptolémées.

FLAVIUS GIRARD.

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