Une histoire de l'eBook
Le financement initial est assuré par la MacArthur Foundation (10 millions de dollars US) et la Sloan Foundation (2,5 millions de dollars). 100 millions de dollars sont nécessaires pour un financement sur dix ans, avant que l'encyclopédie ne puisse s'autofinancer. La réalisation des pages web débute courant 2007. L'encyclopédie fait ses débuts à la mi-2008. Opérationnelle d'ici 2012, elle devrait être complète - c'est-à-dire à jour - en 2017.
Dans la lignée du "Human Genome Project" (Séquencage du génome humain), publié pour la première fois en février 2001 et appartenant d'emblée au domaine public, l'Encyclopedia of Life permettra de proposer toutes les connaissances disponibles à ce jour sur les espèces animales et végétales. La version initiale sera d'abord en anglais avant d'être traduite en plusieurs langues par de futurs organismes partenaires.
L'encyclopédie sera aussi un «macroscope» permettant de déceler les grandes tendances à partir d'un stock d'informations considérable, à la différence du microscope permettant l'étude de détail.
En plus de sa flexibilité et de sa diversité, elle permettra à chacun de contribuer au contenu sous une forme s'apparentant au wiki, ce contenu étant ensuite validé ou non par des scientifiques.
2003: LES NOUVEAUTES SONT EN VERSION NUMERIQUE
= [Résumé]
En 2003, les livres numériques prennent peu à peu une place significative à côté de leurs correspondants imprimés, avec des livres aux formats PDF (pour l'Adobe Reader), LIT (pour le Microsoft Reader) et PRC (pour le Mobipocket Reader), OeB (pour de nombreux logiciels de lecture), entre autres. Des centaines de best-sellers sont vendus en version numérique sur Amazon.com, Barnesandnoble.com, Yahoo! eBook Store ou sur des sites d'éditeurs (Random House, PerfectBound, etc.), pour lecture sur ordinateur ou sur assistant personnel (PDA). Numilog distribue 3.500 titres numériques (livres et périodiques) en français et en anglais. Mobipocket distribue 6.000 titres numériques dans plusieurs langues, soit sur son site soit dans des librairies partenaires. Le catalogue de Palm Digital Media approche les 10.000 titres, lisibles sur les gammes Palm et Pocket PC, avec 15 à 20 nouveaux titres par jour et 1.000 nouveaux clients par semaine.
= Adobe Reader
Le format PDF (portable document format) est lancé en juin 1993 par la société Adobe, en même temps que l'Acrobat Reader (gratuit), premier logiciel de lecture du marché, téléchargeable gratuitement pour lecture des fichiers au format PDF. Le but de ce format est de figer les documents numériques dans une présentation donnée, pour conserver la présentation originale du document source, quelle que soit la plateforme utilisée pour le créer et pour le lire. Le format PDF devient au fil des ans un standard international de diffusion des documents. Tout document peut être converti au format PDF à l'aide du logiciel Adobe Acrobat (payant).
Dix ans plus tard, 10% des documents disponibles sur l'internet sont au format PDF. Des millions de fichiers PDF sont présents sur le web pour lecture ou téléchargement, ou bien transitent par courriel. L'Acrobat Reader pour ordinateur est progressivement disponible dans plusieurs langues et pour diverses plateformes (Windows, Mac, Linux).
Adobe annonce en août 2000 l'acquisition de la société Glassbook, spécialisée dans les logiciels de distribution de livres numériques à l'intention des éditeurs, libraires, diffuseurs et bibliothèques. Adobe passe aussi un partenariat avec Amazon.com et Barnes & Noble.com afin de proposer des titres lisibles sur l'Acrobat Reader et le Glassbook Reader.
En janvier 2001, Adobe lance deux nouveaux logiciels.
Le premier logiciel, gratuit, est l'Acrobat eBook Reader. Il permet de lire les fichiers PDF de livres numériques sous droits, avec gestion des droits par l'Adobe Content Server. Il permet aussi d'ajouter des notes et des signets, de choisir l'orientation de lecture des livres (paysage ou portrait), ou encore de visualiser leur couverture dans une bibliothèque personnelle. Il utilise la technique d'affichage CoolType et comporte un dictionnaire intégré.
Le deuxième logiciel, payant, est l'Adobe Content Server, destiné aux éditeurs et distributeurs. Il s'agit d'un logiciel serveur de contenu assurant le conditionnement, la protection, la distribution et la vente sécurisée de livres numériques au format PDF. Ce système de gestion des droits numériques (DRM: digital rights management) permet de contrôler l'accès aux livres numériques sous droits, et donc de gérer les droits d'un livre selon les consignes données par le gestionnaire des droits, par exemple en autorisant ou non l'impression ou le prêt.
En avril 2001, Adobe conclut un partenariat avec Amazon, qui met en vente 2.000 livres numériques lisibles sur l'Acrobat eBook Reader: titres de grands éditeurs, guides de voyages, livres pour enfants, etc.
L'Acrobat Reader s'enrichit d'une version PDA, pour le Palm Pilot (en mai 2001) puis pour le Pocket PC (en décembre 2001).
En dix ans, entre 1993 et 2003, l'Acrobat Reader aurait été téléchargé 500 millions de fois. Ce logiciel gratuit est désormais disponible dans de nombreuses langues et pour de nombreuses plateformes (Windows, Mac, Linux, Palm OS, Pocket PC, Symbian OS, etc.).
En mai 2003, l'Acrobat Reader (5e version) fusionne avec l'Acrobat eBook Reader (2e version) pour devenir l'Adobe Reader (débutant à la version 6), qui permet de lire aussi bien les fichiers PDF standard que les fichiers PDF sécurisés comme ceux des livres numériques sous droits.
Fin 2003, Adobe ouvre sa librairie en ligne, Digital Media Store, avec les titres au format PDF de grands éditeurs - HarperCollins Publishers, Random House, Simon & Schuster, etc. - ainsi que les versions électroniques de journaux et magazines comme le New York Times, Popular Science, etc. Adobe lance aussi Adobe eBooks Central, un service permettant de lire, publier, vendre et prêter des livres numériques, et l'Adobe eBook Library, qui se veut un prototype de bibliothèque de livres numériques.
En novembre 2004, l'Adobe Content Server est remplacé par l'Adobe
LiveCycle Policy Server.
Les versions récentes d'Adobe Acrobat permettent de créer des PDF compatibles avec les formats OeB (open ebook) puis ePub (format ayant succédé au format OeB), devenus eux aussi des standards du livre numérique.
= Open eBook et ePub
Les années 1998 et 1999 sont marquées par la prolifération des formats, chacun lançant son propre format de livre numérique dans le cadre d'un marché naissant promis à une expansion rapide.
Aux formats classiques - formats TXT (texte), DOC (Microsoft Word), HTML (hypertext markup language), XML (extensible markup language) et PDF (portable document format) - s'ajoutent des formats propriétaires créés par plusieurs sociétés pour lecture sur leurs propres logiciels - Glassbook Reader, Peanut Reader, Rocket eBook Reader (pour lecture sur le Rocket eBook), Franklin Reader (pour lecture sur le eBookMan), logiciel de lecture Cytale (pour lecture sur le Cybook), Gemstar eBook Reader (pour lecture sur le Gemstar eBook), Palm Reader (pour lecture sur le Palm Pilot), etc. -, ces logiciels correspondant le plus souvent à un appareil donné et ne pouvant être utilisés sur d'autres appareils.
Inquiets pour l'avenir du livre numérique qui, à peine né, propose presque autant de formats que de titres, certains insistent sur l'intérêt - sinon la nécessité - d'un format unique. A l'instigation du NIST (National Institute of Standards & Technology) aux Etats-Unis, l'Open eBook Initiative voit le jour en juin 1998 et constitue un groupe de travail de 25 personnes sous le nom d'Open eBook Authoring Group. Ce groupe élabore l'OeB (open ebook), un format de livre numérique basé sur le langage XML et destiné à normaliser le contenu, la structure et la présentation des livres numériques.
Le format OeB est défini par l'OeBPS (open ebook publication structure), dont la version 1.0 est disponible en septembre 1999. Téléchargeable gratuitement, l'OeBPS dispose d'une version ouverte et gratuite appartenant au domaine public. La version originale est destinée aux professionnels de la publication puisqu'elle doit être associée à une technologie normalisée de gestion des droits numériques, et donc à un système de DRM (digital rights management) permettant de contrôler l'accès des livres numériques sous droits.
Fondé en janvier 2000 pour prendre la suite de l'Open eBook Initiative, l'OeBF (Open eBook Forum) est un consortium industriel international regroupant constructeurs, concepteurs de logiciels, éditeurs, libraires et spécialistes du numérique (85 participants en 2002) dans l'optique de développer le format OeB et l'OeBPS. Le format OeB devient un standard qui sert lui-même de base à de nombreux formats, par exemple le format LIT (pour le Microsoft Reader) ou le format PRC (pour le Mobipocket Reader).
En avril 2005, l'Open eBook Forum devient l'International Digital Publishing Forum (IDPF), et le format OeB laisse la place au format ePub.
= Microsoft Reader
Lancé en avril 2000, le Microsoft Reader est un logiciel permettant la lecture de livres numériques au format LIT (abrégé du terme anglais «literature»), lui-même basé sur le format OeB. Le Microsoft Reader équipe d'abord le Pocket PC, l'assistant personnel lancé à la même date par Microsoft. Quatre mois plus tard, en août 2000, le Microsoft Reader est utilisable sur toute plateforme Windows, et donc aussi bien sur ordinateur que sur assistant personnel. Ses caractéristiques sont un affichage utilisant la technologie ClearType, le choix de la taille des caractères, la mémorisation des mots-clés pour des recherches ultérieures, et l'accès d'un clic au Merriam-Webster Dictionary.
Ce logiciel étant téléchargeable gratuitement, Microsoft facture les éditeurs et distributeurs pour l'utilisation de sa technologie de gestion des droits numériques (DRM), et touche une commission sur la vente de chaque titre. La gestion des droits numériques s'effectue au moyen du Microsoft DAS Server (DAS: digital asset server). Microsoft passe aussi des partenariats avec les grandes librairies en ligne - Barnes & Noble.com en janvier 2000 puis Amazon.com en août 2000 - pour la vente de livres numériques lisibles sur le Microsoft Reader. Barnes & Noble.com ouvre son secteur eBooks en août 2000, suivi par Amazon.com en novembre 2000.
En novembre 2002, le Microsoft Reader est disponible pour tablette PC, dès la commercialisation de cette nouvelle machine par 14 fabricants.
= Mobipocket Reader
Face à Adobe avec son format PDF (lisible sur l'Acrobat Reader) et Microsoft avec son format LIT (lisible sur le Microsoft Reader), un nouvel acteur s'impose rapidement sur le marché, sur un créneau bien spécifique, celui des appareils mobiles. Fondé à Paris en mars 2000 par Thierry Brethes et Nathalie Ting, Mobipocket se spécialise d'emblée dans la lecture et la distribution sécurisée de livres pour assistant personnel. La société est financée en partie par Viventures, branche de la multinationale française Vivendi.
Mobipocket conçoit le Mobipocket Reader, logiciel de lecture permettant la lecture de fichiers au format PRC. Gratuit et disponible en plusieurs langues (français, anglais, allemand, espagnol, italien), ce logiciel est «universel», c'est-à-dire utilisable sur tout assistant personnel. En octobre 2001, le Mobipocket Reader reçoit l'eBook Technology Award de la Foire internationale du livre à Francfort. A la même date, Franklin passe un partenariat avec Mobipocket pour l'installation du Mobipocket Reader sur l'eBookMan, l'assistant personnel multimédia de Franklin, au lieu du partenariat prévu à l'origine entre Franklin et Microsoft pour l'installation du Microsoft Reader.
Si le Mobipocket Reader est gratuit, d'autres logiciels Mobipocket sont payants. Le Mobipocket Web Companion est un logiciel d'extraction automatique de contenu pour les sites de presse partenaires de la société. Le Mobipocket Publisher permet aux particuliers (version privée gratuite ou version standard payante) et aux éditeurs (version professionnelle payante) de créer des livres numériques sécurisés utilisant la technologie Mobipocket DRM, afin de contrôler l'accès aux livres numériques sous droits. Dans un souci d'ouverture aux autres formats, le Mobipocket Publisher permet aussi de créer des livres numériques au format LIT, lu par le Microsoft Reader.
Déjà utilisable sur n'importe quel PDA, le Mobipocket Reader peut être utilisé sur tout ordinateur et pour toute plateforme en avril 2002, avec le lancement de nouvelles versions pour ordinateur personnel.
Au printemps 2003, le Mobipocket Reader équipe tous les PDA du marché, à savoir les gammes Palm Pilot, Pocket PC, eBookMan et Psion, auxquels s'ajoutent les smartphones de Nokia et de Sony Ericsson. A la même date, le nombre de livres lisibles sur le Mobipocket Reader se chiffre à 6.000 titres dans plusieurs langues (français, anglais, allemand et espagnol), distribués soit sur le site de Mobipocket soit dans les librairies partenaires.
Mobipocket est racheté par Amazon.com en avril 2005. Ce rachat permet à
Amazon de beaucoup étoffer son catalogue d'ebooks, en prévision du
lancement de sa tablette de lecture Kindle en novembre 2007. Le site de
Mobipocket propose 70.000 ebooks en 2008.
= Numilog
Numilog ouvre ses portes «virtuelles» en octobre 2000 pour devenir en quelques années la plus grande librairie numérique francophone du réseau.
En février 2001, Denis Zwirn, président de Numilog, relate: «Dès 1995, j'avais imaginé et dessiné des modèles de lecteurs électroniques permettant d'emporter sa bibliothèque avec soi et pesant comme un livre de poche. Début 1999, j'ai repris ce projet avec un ami spécialiste de la création de sites internet, en réalisant la formidable synergie possible entre des appareils de lecture électronique mobiles et le développement d'internet, qui permet d'acheminer les livres dématérialisés en quelques minutes dans tous les coins du monde. (…) Nous avons créé une base de livres accessible par un moteur de recherche. Chaque livre fait l'objet d'une fiche avec un résumé et un extrait. En quelques clics, il peut être acheté en ligne par carte bancaire, puis reçu par email ou téléchargement.»
Le site offre ensuite «des fonctionnalités nouvelles, comme l'intégration d'une "authentique vente au chapitre" (les chapitres vendus isolément sont traités comme des éléments inclus dans la fiche- livre, et non comme d'autres livres) et la gestion très ergonomique des formats de lecture multiples».
Fondée en avril 2000 (six mois avant l'ouverture de la librairie), la société Numilog a en fait une triple activité: librairie en ligne, studio de fabrication et diffuseur. «Numilog est d'abord une librairie en ligne de livres numériques, explique Denis en 2001. Notre site internet est dédié à la vente en ligne de ces livres, qui sont envoyés par courrier électronique ou téléchargés après paiement par carte bancaire. Il permet aussi de vendre des livres par chapitres. Numilog est également un studio de fabrication de livres numériques: aujourd'hui, les livres numériques n'existent pas chez les éditeurs, il faut donc d'abord les fabriquer avant de pouvoir les vendre, dans le cadre de contrats négociés avec les éditeurs détenteurs des droits. Ce qui signifie les convertir à des formats convenant aux différents "readers" du marché. (…) Enfin Numilog devient aussi progressivement un diffuseur. Car, sur internet, il est important d'être présent en de très nombreux points du réseau pour faire connaître son offre. Pour les livres en particulier, il faut les proposer aux différents sites thématiques ou de communautés, dont les centres d'intérêt correspondent à leur sujet (sites de fans d'histoire, de management, de science- fiction…). Numilog facilitera ainsi la mise en oeuvre de multiples "boutiques de livres numériques" thématiques.»
Répartis à l'origine en trois grandes catégories - savoir, guides pratiques et littérature - les livres sont disponibles en plusieurs formats: format PDF pour lecture sur l'Acrobat Reader (devenu l'Adobe Reader en mai 2003), format LIT pour lecture sur le Microsoft Reader et format PRC pour lecture sur le Mobipocket Reader.
En septembre 2003, le catalogue comprend 3.500 titres (livres et périodiques) en français et en anglais, grâce à un partenariat avec une quarantaine d'éditeurs, le but à long terme étant de «permettre à un public d'internautes de plus en plus large d'avoir progressivement accès à des bases de livres numériques aussi importantes que celles des livres papier, mais avec plus de modularité, de richesse d'utilisation et à moindre prix».
Au fil des ans, Numilog devient la principale librairie francophone de livres numériques, suite à des accords avec de nombreux éditeurs: Gallimard, Albin Michel, Eyrolles, Hermès Science, Pearson Education France, etc. Numilog propose aussi des livres audionumériques lisibles sur synthèse vocale. Une librairie anglophone est lancée suite à des accords de diffusion conclus avec plusieurs éditeurs anglo-saxons: Springer-Kluwer, Oxford University Press, Taylor & Francis, Kogan Page, etc. Les différents formats proposés permettent la lecture des livres sur tout appareil électronique: ordinateur, assistant personnel, téléphone portable, smartphone et tablette de lecture.
La société est également prestataire de services pour les technologies DRM (digital rights management), à savoir les systèmes de gestion des droits numériques permettant de contrôler l'accès aux livres numériques sous droits, et donc de gérer les droits d'un livre selon les consignes données par le gestionnaire des droits, par exemple en autorisant ou non l'impression ou le prêt.
En 2004, Numilog met sur pied un système de bibliothèque en ligne pour le prêt de livres numériques. Ce système est surtout destiné aux bibliothèques, aux administrations et aux entreprises.
En janvier 2006, Numilog s'associe avec la ville de Boulogne- Billancourt (en région parisienne) pour lancer la version expérimentale de la Bibliothèque numérique pour le handicap (BnH).
En décembre 2006, le catalogue de Numilog comprend 35.000 livres grâce à un partenariat avec 60 éditeurs francophones et des éditeurs anglophones.
En janvier 2009, Numilog, devenue filiale du groupe Hachette Livre (en mai 2008), est un distributeur-diffuseur numérique représentant 100 éditeurs francophones et anglophones, avec un catalogue de 50.000 livres numériques distribués auprès des particuliers et des bibliothèques. Numilog propose également aux librairies un service de vente de livres numériques sur leur propre site.
2004: DES AUTEURS SONT CREATIFS SUR LE NET
= [Résumé]
En 2004, nombre d'auteurs s'accordent à reconnaître les bienfaits de l'internet, que ce soit pour la recherche d'information, la diffusion de leurs oeuvres, les échanges avec les lecteurs ou la collaboration avec d'autres créateurs. Des écrivains férus de nouvelles technologies font un travail de défricheur en explorant les possibilités offertes par l'hyperlien. Les technologies numériques donnent naissance à plusieurs genres: roman multimédia, roman hypertexte, roman hypermédia, site d'écriture hypermédia, mail-roman, etc. Une véritable littérature numérique - appelée aussi littérature électronique ou cyber-littérature - bouscule désormais la littérature traditionnelle en lui apportant un souffle nouveau, tout en s'intégrant à d'autres formes artistiques puisque le support numérique favorise la fusion de l'écrit avec l'image et le son.
= Poésie
Poète et plasticienne, Silvaine Arabo vit en France, dans la région Poitou-Charentes. En mai 1997, elle crée l'un des premiers sites francophones consacrés à la poésie, "Poésie d'hier et d'aujourd'hui", sur lequel elle propose de nombreux poèmes, y compris les siens.
En juin 1998, elle raconte: «Je suis poète, peintre et professeur de lettres (13 recueils de poèmes publiés, ainsi que deux recueils d'aphorismes et un essai sur le thème "poésie et transcendance"; quant à la peinture, j'ai exposé mes toiles à Paris - deux fois - et en province). (…) Pour ce qui est d'internet, je suis autodidacte (je n'ai reçu aucune formation informatique quelle qu'elle soit). J'ai eu l'idée de construire un site littéraire centré sur la poésie: internet me semble un moyen privilégié pour faire circuler des idées, pour communiquer ses passions aussi. Je me suis donc mise au travail, très empiriquement, et ai finalement abouti à ce site sur lequel j'essaye de mettre en valeur des poètes contemporains de talent, sans oublier la nécessaire prise de recul (rubrique "Réflexions sur la poésie") sur l'objet considéré. (…)
Par ailleurs, internet m'a mis en contact avec d'autres poètes, dont certains fort intéressants. Cela rompt le cercle de la solitude et permet d'échanger des idées. On se lance des défis aussi. Internet peut donc pousser à la créativité et relancer les motivations des poètes puisqu'ils savent qu'ils seront lus et pourront même, dans le meilleur des cas, correspondre avec leurs lecteurs et avoir les points de vue de ceux-ci sur leurs textes. Je ne vois personnellement que des aspects positifs à la promotion de la poésie par internet, tant pour le lecteur que pour le créateur.»
Très vite, Poésie d'hier et d'aujourd'hui prend la forme d'une cyber- revue. Quatre ans plus tard, en mars 2001, Silvaine Arabo crée une deuxième revue, "Saraswati: revue de poésie, d'art et de réflexion", cette fois sur papier. Les deux revues «se complètent et sont vraiment à placer en regard l'une de l'autre».
= Fables
Fondé en 1992 par Nicolas et Suzanne Pewny, alors libraires en Haute- Savoie, Le Choucas est une petite maison d'édition spécialisée dans les romans policiers, la littérature, la photographie et les livres d'art. Bien qu'étant d'abord un éditeur à vocation commerciale, Nicolas Pewny tient aussi à avoir des activités non commerciales pour faire connaître des auteurs peu diffusés, par exemple Raymond Godefroy, écrivain-paysan normand, qui désespérait de trouver un éditeur pour son recueil de fables, "Fables pour l'an 2000". Quelques jours avant l'an 2000, Nicolas Pewny réalise un beau design pour ces fables et publie le recueil en ligne sur le site du Choucas.
«Internet représente pour moi un formidable outil de communication qui nous affranchit des intermédiaires, des barrages doctrinaires et des intérêts des médias en place, écrit Raymond Godefroy en décembre 1999. Soumis aux mêmes lois cosmiques, les hommes, pouvant mieux se connaître, acquerront peu à peu cette conscience du collectif, d'appartenir à un même monde fragile pour y vivre en harmonie sans le détruire. Internet est absolument comme la langue d'Esope, la meilleure et la pire des choses, selon l'usage qu'on en fait, et j'espère qu'il me permettra de m'affranchir en partie de l'édition et de la distribution traditionnelle qui, refermée sur elle-même, souffre d'une crise d'intolérance pour entrer à reculons dans le prochain millénaire.»
Très certainement autobiographique, la fable "Le poète et l'éditeur" (sixième fable de la troisième partie du recueil) relate on ne peut mieux les affres du poète à la recherche d'un éditeur. Raymond Godefroy restant très attaché au papier, il auto-publie la version imprimée de ses fables en juin 2001, avec un titre légèrement différent, "Fables pour les années 2000", puisque le cap du 21e siècle est désormais franchi.
= Romans policiers
Michel Benoît habite Montréal, au Québec. Auteur de nouvelles policières, de récits noirs et d'histoires fantastiques, il utilise l'internet pour élargir ses horizons et pour abolir le temps et la distance. Il relate en juin 2000: «L'internet s'est imposé à moi comme outil de recherche et de communication, essentiellement. Non, pas essentiellement. Ouverture sur le monde aussi. Si l'on pense "recherche", on pense "information". Voyez-vous, si l'on pense "écriture", "réflexion", on pense "connaissance", "recherche". Donc on va sur la toile pour tout, pour une idée, une image, une explication. Un discours prononcé il y a vingt ans, une peinture exposée dans un musée à l'autre bout du monde. On peut donner une idée à quelqu'un qu'on n'a jamais vu, et en recevoir de même. La toile, c'est le monde au clic de la souris. On pourrait penser que c'est un beau cliché. Peut-être bien, à moins de prendre conscience de toutes les implications de la chose. L'instantanéité, l'information tout de suite, maintenant. Plus besoin de fouiller, de se taper des heures de recherche. On est en train de faire, de produire. On a besoin d'une information. On va la chercher, immédiatement. De plus, on a accès aux plus grandes bibliothèques, aux plus importants journaux, aux musées les plus prestigieux. (…)
Mon avenir professionnel en inter-relation avec le net, je le vois exploser. Plus rapide, plus complet, plus productif. Je me vois faire en une semaine ce qui m'aurait pris des mois. Plus beau, plus esthétique. Je me vois réussir des travaux plus raffinés, d'une facture plus professionnelle, même et surtout dans des domaines connexes à mon travail, comme la typographie, où je n'ai aucune compétence. La présentation, le transport de textes, par exemple. Le travail simultané de plusieurs personnes qui seront sur des continents différents. Arriver à un consensus en quelques heures sur un projet, alors qu'avant le net, il aurait fallu plusieurs semaines, parlons de mois entre les Francophones. Plus le net ira se complexifiant, plus l'utilisation du net deviendra profitable, nécessaire, essentielle.»
Autre expérience, celle d'Alain Bron, consultant en systèmes d'information et écrivain. L'internet est un des «personnages» de son deuxième roman, "Sanguine sur toile", disponible en version imprimée aux éditions du Choucas en 1999, puis en version numérique (format PDF) aux éditions 00h00.com en 2000.
Quel est le thème de ce roman? «La "toile", c'est celle du peintre, c'est aussi l'autre nom d'internet: le web - la toile d'araignée, raconte l'auteur en novembre 1999. "Sanguine" évoque le dessin et la mort brutale. Mais l'amour des couleurs justifierait-il le meurtre? Sanguine sur toile évoque l'histoire singulière d'un internaute pris dans la tourmente de son propre ordinateur, manipulé à distance par un très mystérieux correspondant qui n'a que vengeance en tête. J'ai voulu emporter le lecteur dans les univers de la peinture et de l'entreprise, univers qui s'entrelacent, s'échappent, puis se rejoignent dans la fulgurance des logiciels. Le lecteur est ainsi invité à prendre l'enquête à son propre compte pour tenter de démêler les fils tressés par la seule passion. Pour percer le mystère, il devra répondre à de multiples questions. Le monde au bout des doigts, l'internaute n'est-il pas pour autant l'être le plus seul au monde? Compétitivité oblige, jusqu'où l'entreprise d'aujourd'hui peut-elle aller dans la violence? La peinture tend-elle à reproduire le monde ou bien à en créer un autre? Enfin, j'ai voulu montrer que les images ne sont pas si sages. On peut s'en servir pour agir, voire pour tuer. (…) Dans le roman, internet est un personnage en soi. Plutôt que de le décrire dans sa complexité technique, le réseau est montré comme un être tantôt menaçant, tantôt prévenant, maniant parfois l'humour. N'oublions pas que l'écran d'ordinateur joue son double rôle: il montre et il cache. C'est cette ambivalence qui fait l'intrigue du début à la fin. Dans ce jeu, le grand gagnant est bien sûr celui ou celle qui sait s'affranchir de l'emprise de l'outil pour mettre l'humanisme et l'intelligence au- dessus de tout.»
= Oeuvres de fiction
Murray Suid vit à Palo Alto, dans la Silicon Valley, en Californie. Il est l'auteur de livres pédagogiques, de livres pour enfants, d'oeuvres multimédia et de scénarios. Dès septembre 1998, il préconise une solution choisie depuis par de nombreux auteurs: «Un livre peut avoir un prolongement sur le web - et donc vivre en partie dans le cyberespace. L'auteur peut ainsi aisément l'actualiser et le corriger, alors qu'auparavant il devait attendre longtemps, jusqu'à l'édition suivante, quand il y en avait une. (…) Je ne sais pas si je publierai des livres sur le web, au lieu de les publier en version imprimée. J'utiliserai peut-être ce nouveau support si les livres deviennent multimédia. Pour le moment, je participe au développement de matériel pédagogique multimédia. C'est un nouveau type de matériel qui me plaît beaucoup et qui permet l'interactivité entre des textes, des films, des bandes sonores et des graphiques qui sont tous reliés les uns aux autres.»
Un an après, en août 1999, il ajoute: «En plus des livres complétés par un site web, je suis en train d'adopter la même formule pour mes oeuvres multimédia - qui sont sur CD-ROM - afin de les actualiser et d'enrichir leur contenu.»
Quelques mois plus tard, l'intégralité de ses oeuvres multimédia est sur le réseau. Le matériel pédagogique auquel il contribue est conçu non plus pour diffusion sur CD-ROM, mais pour diffusion sur le web. D'entreprise multimédia, la société de logiciels éducatifs qui l'emploie s'est reconvertie en entreprise internet.
Autre expérience, celle d'Anne-Bénédicte Joly, romancière et essayiste, qui habite en région parisienne. En avril 2000, elle décide d'auto- publier ses oeuvres en utilisant l'internet pour les faire connaître. «Mon site a plusieurs objectifs, relate-t-elle en juin 2000. Présenter mes livres (essais, nouvelles et romans auto-édités) à travers des fiches signalétiques (dont le format est identique à celui que l'on trouve dans la base de données Electre) et des extraits choisis, présenter mon parcours (de professeur de lettres et d'écrivain), permettre de commander mes ouvrages, offrir la possibilité de laisser des impressions sur un livre d'or, guider le lecteur à travers des liens vers des sites littéraires. (…) Créer un site internet me permet d'élargir le cercle de mes lecteurs en incitant les internautes à découvrir mes écrits. Internet est également un moyen pour élargir la diffusion de mes ouvrages. Enfin, par une politique de liens, j'espère susciter des contacts de plus en plus nombreux.»
= Romans numériques
Lucie de Boutiny est l'auteur de "NON", roman multimédia débuté en août 1997 et publié en feuilleton par Synesthésie, une revue en ligne d'art contemporain. «"NON" est un roman comique qui fait la satire de la vie quotidienne d'un couple de jeunes cadres supposés dynamiques, raconte- t-elle en juin 2000. Bien qu'appartenant à l'élite high-tech d'une industrie florissante, Monsieur et Madame sont les jouets de la dite révolution numérique. (…) "NON" prolonge les expériences du roman post-moderne (récits tout en digression, polysémie avec jeux sur les registres - naturaliste, mélo, comique… - et les niveaux de langues, etc.). Cette hyperstylisation permet à la narration des développements inattendus et offre au lecteur l'attrait d'une navigation dans des récits multiples et multimédia, car l'écrit à l'écran s'apparente à un jeu et non seulement se lit mais aussi se regarde.»
Les romans précédents de Lucie de Boutiny sont publiés sous forme imprimée. Un roman numérique requiert-il une démarche différente? «D'une manière générale, mon humble expérience d'apprentie auteur m'a révélé qu'il n'y a pas de différence entre écrire de la fiction pour le papier ou le pixel: cela demande une concentration maximale, un isolement à la limite désespéré, une patience obsessionnelle dans le travail millimétrique avec la phrase, et bien entendu, en plus de la volonté de faire, il faut avoir quelque chose à dire! Mais avec le multimédia, le texte est ensuite mis en scène comme s'il n'était qu'un scénario. Et si, à la base, il n'y a pas un vrai travail sur le langage des mots, tout le graphisme et les astuces interactives qu'on peut y mettre fera gadget. Par ailleurs, le support modifie l'appréhension du texte, et même, il faut le souligner, change l'oeuvre originale.»
Autre roman numérique, "Apparitions inquiétantes" est né sous la plume d'Anne-Cécile Brandenbourger. Il s'agit d'«une longue histoire à lire dans tous les sens, un labyrinthe de crimes, de mauvaises pensées et de plaisirs ambigus». Pendant deux ans, cette histoire se construit sous forme de feuilleton sur le site d'Anacoluthe, en collaboration avec Olivier Lefèvre. En février 2000, l'histoire est publiée en version numérique (au format PDF) aux éditions 00h00, en tant que premier titre de la Collection 2003, consacrée aux écritures numériques, avec version imprimée à la demande.
00h00 présente l'ouvrage comme «un cyber-polar fait de récits hypertextuels imbriqués en gigogne. Entre personnages de feuilleton américain et intrigue policière, le lecteur est - hypertextuellement - mené par le bout du nez dans cette saga aux allures borgésiennes. (…) C'est une histoire de meurtre et une enquête policière; des textes écrits court et montés serrés; une balade dans l'imaginaire des séries télé; une destructuration (organisée) du récit dans une transposition littéraire du zapping; et par conséquent, des sensations de lecture radicalement neuves.»
Suite au succès du livre, les éditions Florent Massot publient en août 2000 une deuxième version imprimée (la première étant celle de 00h00, imprimée uniquement à la demande), avec une couverture en 3D, un nouveau titre - "La malédiction du parasol" - et une maquette d'Olivier Lefèvre restituant le rythme de la version originale.
Anne-Cécile Brandenbourger relate en juin 2000: «Les possibilités offertes par l'hypertexte m'ont permis de développer et de donner libre cours à des tendances que j'avais déjà auparavant. J'ai toujours adoré écrire et lire des textes éclatés et inclassables (comme par exemple "La vie mode d'emploi" de Perec ou "Si par une nuit d'hiver un voyageur" de Calvino) et l'hypermédia m'a donné l'occasion de me plonger dans ces formes narratives en toute liberté. Car, pour créer des histoires non linéaires et des réseaux de textes qui s'imbriquent les uns dans les autres, l'hypertexte est évidemment plus approprié que le papier. Je crois qu'au fil des jours, mon travail hypertextuel a rendu mon écriture de plus en plus intuitive. Plus "intérieure" aussi peut-être, plus proche des associations d'idées et des mouvements désordonnés qui caractérisent la pensée lorsqu'elle se laisse aller à la rêverie. Cela s'explique par la nature de la navigation hypertextuelle, le fait que presque chaque mot qu'on écrit peut être un lien, une porte qui s'ouvre sur une histoire.»
A la même date, Lucie de Boutiny raconte: «Mes "conseillers littéraires", des amis qui n'ont pas ressenti le vent de liberté qui souffle sur le web, aimeraient que j'y reste, engluée dans la pâte à papier. Appliquant le principe de demi-désobéissance, je fais des allers-retours papier-pixel. L'avenir nous dira si j'ai perdu mon temps ou si un nouveau genre littéraire hypermédia va naître. (…) Si les écrivains français classiques en sont encore à se demander s'ils ne préfèrent pas le petit carnet Clairefontaine, le Bic ou le Mont-Blanc fétiche, et un usage modéré du traitement de texte, plutôt que l'ordinateur connecté, voire l'installation, c'est que l'HTX (hypertext literature) nécessite un travail d'accouchement visuel qui n'est pas la vocation originaire de l'écrivain papier. En plus des préoccupations du langage (syntaxe, registre, ton, style, histoire…), le techno- écrivain - collons-lui ce label pour le différencier - doit aussi maîtriser la syntaxe informatique et participer à l'invention de codes graphiques car lire sur un écran est aussi regarder.»
= Mail-romans
Le premier mail-roman francophone est lancé en 2001 par Jean-Pierre Balpe, chercheur, écrivain et directeur du département hypermédia de l'Université Paris 8. Pendant très exactement cent jours, entre le 11 avril et le 19 juillet 2001, il diffuse quotidiennement par courriel un chapitre de "Rien n'est sans dire" auprès de cinq cents personnes - sa famille, ses amis, ses collègues, etc. - en y intégrant les réponses et réactions des lecteurs. Racontée par un narrateur, l'histoire est celle de Stanislas et Zita, qui vivent une passion tragique déchirée par une sombre histoire politique. « Cette idée d'un mail-roman m'est venue tout naturellement, relate l'auteur en février 2002. D'une part en me demandant depuis quelque temps déjà ce qu'internet peut apporter sur le plan de la forme à la littérature (…) et d'autre part en lisant de la littérature "épistolaire" du 18e siècle, ces fameux "romans par lettres". Il suffit alors de transposer: que peut être le "roman par lettres" aujourd'hui?»
Jean-Pierre Balpe tire plusieurs conclusions de cette expérience: «D'abord c'est un "genre": depuis, plusieurs personnes m'ont dit lancer aussi un mail-roman. Ensuite j'ai aperçu quantité de possibilités que je n'ai pas exploitées et que je me réserve pour un éventuel travail ultérieur. La contrainte du temps est ainsi très intéressante à exploiter: le temps de l'écriture bien sûr, mais aussi celui de la lecture: ce n'est pas rien de mettre quelqu'un devant la nécessité de lire, chaque jour, une page de roman. Ce "pacte" a quelque chose de diabolique. Et enfin le renforcement de ma conviction que les technologies numériques sont une chance extraordinaire du renouvellement du littéraire.»
= Sites hypermédia
Principe de base du web, le lien hypertexte permet de relier entre eux des documents textuels et des images. Quant au lien hypermédia, il permet l'accès à des graphiques, des images animées, des bandes sonores et des vidéos. Des écrivains férus de nouvelles technologies ne tardent pas à en explorer les possibilités, dans des sites d'écriture hypermédia et des oeuvres d'hyperfiction.
Mis en ligne en juin 1997, oVosite est un espace d'écriture conçu par un collectif de six auteurs issus du département hypermédia de l'Université Paris 8: Chantal Beaslay, Laure Carlon, Luc Dall'Armellina (qui est aussi webmestre), Philippe Meuriot, Anika Mignotte et Claude Rouah. «oVosite est un site web conçu et réalisé (…) autour d'un symbole primordial et spirituel, celui de l'oeuf, explique Luc Dall'Armellina en juin 2000. Le site s'est constitué selon un principe de cellules autonomes qui visent à exposer et intégrer des sources hétérogènes (littérature, photo, peinture, vidéo, synthèse) au sein d'une interface unifiante.»
Les possibilités offertes par l'hyperlien ont-elles changé son mode d'écriture? Sa réponse est à la fois négative et positive.
Négative d'abord: «Non - parce qu'écrire est de toute façon une affaire très intime, un mode de relation qu'on entretient avec son monde, ses proches et son lointain, ses mythes et fantasmes, son quotidien et enfin, appendus à l'espace du langage, celui de sa langue d'origine. Pour toutes ces raisons, je ne pense pas que l'hypertexte change fondamentalement sa manière d'écrire, qu'on procède par touches, par impressions, associations, quel que soit le support d'inscription, je crois que l'essentiel se passe un peu à notre insu.»
Positive ensuite: «Oui - parce que l'hypertexte permet sans doute de commencer l'acte d'écriture plus tôt: devançant l'activité de lecture (associations, bifurcations, sauts de paragraphes) jusque dans l'acte d'écrire. L'écriture (ceci est significatif avec des logiciels comme StorySpace) devient peut-être plus modulaire. On ne vise plus tant la longue horizontalité du récit, mais la mise en espace de ses fragments, autonomes. Et le travail devient celui d'un tissage des unités entre elles. L'autre aspect lié à la modularité est la possibilité d'écritures croisées, à plusieurs auteurs. Peut-être s'agit-il d'ailleurs d'une méta-écriture, qui met en relation les unités de sens (paragraphes ou phrases) entre elles.»
Luc ajoute aussi: «La couverture du réseau autour de la surface du globe resserre les liens entre les individus distants et inconnus. Ce qui n'est pas simple puisque nous sommes placés devant des situations nouvelles: ni vraiment spectateurs, ni vraiment auteurs, ni vraiment lecteurs, ni vraiment interacteurs. Ces situations créent des nouvelles postures de rencontre, des postures de "spectacture" ou de "lectacture" (Jean-Louis Weissberg). Les notions de lieu, d'espace, de temps, d'actualité sont requestionnées à travers ce médium qui n'offre plus guère de distance à l'événement mais se situe comme aucun autre dans le présent en train de se faire. L'écart peut être mince entre l'envoi et la réponse, parfois immédiat (cas de la génération de textes).
Mais ce qui frappe et se trouve repérable ne doit pas masquer les aspects encore mal définis tels que les changements radicaux qui s'opèrent sur le plan symbolique, représentationnel, imaginaire et plus simplement sur notre mode de relation aux autres. "Plus de proximité" ne crée pas plus d'engagement dans la relation, de même "plus de liens" ne créent pas plus de liaisons, ou encore "plus de tuyaux" ne créent pas plus de partage. Je rêve d'un internet où nous pourrions écrire à plusieurs sur le même dispositif, une sorte de lieu d'atelier d'écritures permanent et qui autoriserait l'écriture personnelle (c'est en voie d'exister), son partage avec d'autres auteurs, leur mise en relation dans un tissage d'hypertextes et un espace commun de notes et de commentaires sur le travail qui se crée.»
L'avenir de la cyber-littérature est tracé par sa technologie même, comme l'explique en août 1999 Jean-Paul, webmestre du site hypermédia cotres.net: «Il est maintenant impossible à un(e) auteur(e) seul(e) de manier à la fois les mots, leur apparence mouvante et leur sonorité. Maîtriser aussi bien Director, Photoshop et Cubase, pour ne citer que les plus connus, c'était possible il y a dix ans, avec les versions 1. Ça ne l'est plus. Dès demain (matin), il faudra savoir déléguer les compétences, trouver des partenaires financiers aux reins autrement plus solides que Gallimard, voir du côté d'Hachette-Matra, Warner, Pentagone, Hollywood. Au mieux, le statut de… l'écrivaste? du multimédiaste? sera celui du vidéaste, du metteur en scène, du directeur de produit: c'est lui qui écope des palmes d'or à Cannes, mais il n'aurait jamais pu les décrocher seul. Soeur jumelle (et non pas clone) du cinématographe, la cyber-littérature (= la vidéo + le lien) sera une industrie, avec quelques artisans isolés dans la périphérie off-off (aux droits d'auteur négatifs, donc).»
Quelques mois plus tard, en juin 2000, Jean-Paul s'interroge sur l'apport de l'internet dans son écriture: «La navigation par hyperliens se fait en rayon (j'ai un centre d'intérêt et je clique méthodiquement sur tous les liens qui s'y rapportent) ou en louvoiements (de clic en clic, à mesure qu'ils apparaissent, au risque de perdre de vue mon sujet). Bien sûr, les deux sont possibles avec l'imprimé. Mais la différence saute aux yeux: feuilleter n'est pas cliquer. L'internet n'a donc pas changé ma vie, mais mon rapport à l'écriture. On n'écrit pas de la même manière pour un site que pour un scénario, une pièce de théâtre, etc. (…) Depuis, j'écris (compose, mets en page, en scène) directement à l'écran. L'état "imprimé" de mon travail n'est pas le stade final, le but; mais une forme parmi d'autres, qui privilégie la linéarité et l'image, et qui exclut le son et les images animées. (…) C'est finalement dans la publication en ligne (l'entoilage?) que j'ai trouvé la mobilité, la fluidité que je cherchais. Le maître mot y est "chantier en cours", sans palissades. Accouchement permanent, à vue, comme le monde sous nos yeux. Provisoire, comme la vie qui tâtonne, se cherche, se déprend, se reprend. Avec évidemment le risque souligné par les gutenbergs, les orphelins de la civilisation du livre: plus rien n'est sûr. Il n'y a plus de source fiable, elles sont trop nombreuses, et il devient difficile de distinguer un clerc d'un gourou. Mais c'est un problème qui concerne le contrôle de l'information. Pas la transmission des émotions.»
Jean-Paul fait à nouveau le point sur son activité d'entoileur beaucoup plus tard, en janvier 2007: «J'ai gagné du temps. J'utilise moins de logiciels, dont j'intègre le résultat dans Flash. Ce dernier m'assure de contrôler à 90% le résultat à l'affichage sur les écrans de réception (au contraire de ceux qui préfèrent présenter des oeuvres ouvertes, où l'intervention tantôt du hasard tantôt de l'internaute est recherchée). Je peux maintenant me concentrer sur le coeur de la chose: l'architecture et le développement du récit. (…) Les deux points forts des trois ou quatre ans à venir sont: (1) la généralisation du très haut débit (c'est-à-dire en fait du débit normal), qui va m'affranchir des limitations purement techniques, notamment des soucis de poids et d'affichage des fichiers (mort définitive, enfin, des histogrammes de chargement); (2) le développement de la 3 D. C'est le récit en hypermédia (= le multimédia + le clic) qui m'intéresse. Les pièges que pose un récit en 2 D sont déjà passionnants. Avec la 3 D, il va falloir chevaucher le tigre pour éviter la simple prouesse technique et laisser la priorité au récit.»
2005: GOOGLE S'INTERESSE A L'EBOOK
= [Résumé]
En octobre 2004, Google lance la première partie de son programme Google Print, établi en partenariat avec les éditeurs pour consulter à l'écran des extraits de livres, puis commander les livres auprès d'une librairie en ligne. En décembre 2004, Google lance la deuxième partie de son programme Google Print, cette fois à destination des bibliothèques, le but étant de numériser 15 millions de livres, à commencer par ceux des bibliothèques de plusieurs universités partenaires (Harvard, Stanford, Michigan, Oxford) et de la ville de New York. La version bêta de Google Print est mise en ligne en mai 2005. En août 2005, le programme est suspendu pour cause de conflit avec les éditeurs de livres sous droits. Il reprend en août 2006 sous le nom de Google Books. La numérisation des fonds de grandes bibliothèques se poursuit, tout comme le développement de partenariats avec les éditeurs qui le souhaitent. En octobre 2008, Google clôt le conflit avec les associations d'auteurs et d'éditeurs en annonçant un accord avec eux, accord qui serait effectif courant 2009.
= Google Print
En 2005, alors que le Projet Gutenberg poursuit la mise en ligne gratuite des oeuvres du domaine public, tâche immense entreprise depuis nombre d'années, le livre devient un objet convoité par les géants de l'internet que sont Google, Yahoo! et Microsoft, d'une part par souci méritoire de mettre le patrimoine mondial à la disposition de tous, d'autre part à cause de l'enjeu représenté par les recettes publicitaires générées par les liens commerciaux accolés aux résultats des recherches.
Google décide de mettre son expertise au service du livre, et lance la version bêta de Google Print en mai 2005. Ce lancement est précédé de deux étapes.
En octobre 2004, Google lance la première partie de son programme Google Print, établi en partenariat avec les éditeurs pour pouvoir consulter à l'écran des extraits de livres, puis commander les livres auprès d'une librairie en ligne.
En décembre 2004, Google lance la deuxième partie de son programme Google Print, cette fois à destination des bibliothèques. Il s'agit d'un projet de bibliothèque numérique de 15 millions de livres consistant à numériser plusieurs grandes bibliothèques partenaires, à commencer par la bibliothèque de l'Université du Michigan (dans sa totalité, à savoir 7 millions d'ouvrages), les bibliothèques des universités de Harvard, de Stanford et d'Oxford, et celle de la ville de New York. Le coût estimé au départ se situe entre 150 et 200 millions de dollars US, avec la numérisation de 10 millions de livres sur six ans et un chantier d'une durée totale de dix ans.
En août 2005, soit trois mois après son lancement, Google Print est suspendu pour un temps indéterminé suite à un conflit grandissant avec les associations d'auteurs et d'éditeurs de livres sous droits, celles- ci reprochant à Google de numériser les livres sans l'accord préalable des ayants droit.
= Google Books
Le programme reprend en août 2006 sous le nom de Google Books (Google Livres). Google Books permet de rechercher les livres par date, titre ou éditeur. La numérisation des fonds de grandes bibliothèques se poursuit, axée cette fois sur les livres libres de droit, tout comme le développement de partenariats avec les éditeurs qui le souhaitent.
Les livres libres de droit sont consultables à l'écran en texte intégral, leur contenu est copiable et l'impression est possible page à page. Ils sont également téléchargeables sous forme de fichiers PDF et imprimables dans leur entier. Les liens publicitaires associés aux pages de livres sont situés en haut et à droite de l'écran.
Le conflit avec les associations d'auteurs et d'éditeurs se poursuit lui aussi, puisque Google continue de numériser des livres sous droits sans l'autorisation préalable des ayants droit, en invoquant le droit de citation pour présenter des extraits sur le web. L'Authors Guild et l'Association of American Publishers (AAP) invoquent pour leur part le non respect de la législation relative au copyright pour attaquer Google en justice. Le feuilleton judiciaire dure de nombreux mois.
Fin 2006, d'après le buzz médiatique, Google scannerait 3.000 livres par jour, ce qui représenterait un million de livres par an. Le coût estimé serait de 30 dollars par livre - d'autres sources mentionnent un coût double. Google Books comprendrait 3 millions de livres. Tous chiffres à prendre avec précaution, la société ne communiquant pas de statistiques à ce sujet.
A l'exception de la New York Public Library, les collections en cours de numérisation appartiennent toutes à des bibliothèques universitaires (Harvard, Stanford, Michigan, Oxford, Californie, Virginie, Wisconsin- Madison, Complutense de Madrid). S'y ajoutent début 2007 les bibliothèques des universités de Princeton et du Texas (Austin), ainsi que la Biblioteca de Catalunya (Catalogne, Espagne) et la Bayerische Staatbibliothek (Bavière, Allemagne). En mai 2007, Google annonce la participation de la première bibliothèque francophone, la Bibliothèque cantonale et universitaire (BCU) de Lausanne (Suisse), pour la numérisation de 100.000 titres en français, allemand et italien publiés entre le 17e et le 19e siècle. Suit ensuite un partenariat avec la Bibliothèque municipale de Lyon (France) signé en juillet 2008 pour numériser 500.000 livres.
En octobre 2008, après trois ans de conflit, Google met fin aux poursuites à son encontre par les associations d'auteurs et d'éditeurs. La société annonce un accord qui serait effectif courant 2009. Cet accord serait basé sur un partage des revenus générés par Google Books ainsi qu'un large accès aux ouvrages épuisés, et le paiement de 125 millions de dollars US à l'Authors Guild et l'Association of American Publishers (AAP) pour clôturer ce conflit.
Suite à cet accord, Google devrait proposer de plus larges extraits des livres, jusqu'à 20% d'un même ouvrage, avec un lien commercial pour acheter une copie - numérique ou non - de l'oeuvre. Les ayants droit auront la possibilité de participer ou non au projet Google Books, et de retirer leurs livres des collections. Par ailleurs, les bibliothèques universitaires et publiques (des États-Unis) pourront accéder à un portail gratuit géré par Google et donnant accès aux textes de millions de livres épuisés. Un abonnement permettra aux universités et aux écoles de consulter les collections des bibliothèques les plus renommées.
En novembre 2008, Google Books comprend 7 millions d'ouvrages numérisés, en partenariat avec 24 bibliothèques et 2.000 éditeurs partenaires. Les 24 bibliothèques partenaires se situent principalement aux Etats-Unis (16), mais aussi en Allemagne (1), en Belgique (1), en Espagne (2), en France (1), au Japon (1), au Royaume-Uni (1) et en Suisse (1).
En février 2009, Google Books lance un portail spécifique pour lecture sur téléphone mobile et smartphone, par exemple sur l'iPhone 3G d'Apple ou sur le G1 de T-Mobile (ce dernier utilisant Android, la plateforme de Google). Le catalogue comprend 1,5 million de livres du domaine public, auxquels s'ajoutent 500.000 autres titres téléchargeables hors des Etats-Unis, du fait d'une législation du copyright moins restrictive dans certains pays.
2006: VERS UNE BIBLIOTHEQUE NUMERIQUE PLANETAIRE
= [Résumé]
Lancée en octobre 2005 à l'instigation de l'Internet Archive, l'Open Content Alliance (OCA) - - qui débute véritablement en 2006 - est un vaste projet public et coopératif de bibliothèque numérique mondiale proposant un répertoire multilingue de livres et documents multimédia pour consultation et téléchargement sur tout moteur de recherche. L'OCA regroupe de nombreux partenaires: bibliothèques, universités, organisations gouvernementales, associations à but non lucratif, organismes culturels, sociétés informatiques (Adobe, Hewlett Packard, Microsoft, Yahoo!, Xerox, etc.). Les premiers participants sont les bibliothèques des universités de Californie et de Toronto, l'European Archive, les Archives nationales du Royaume-Uni, O'Reilly Media et les Prelinger Archives. L'OCA souhaite s'inspirer de l'initiative de Google tout en évitant ses travers, à savoir la numérisation de livres sous droits sans l'accord préalable des éditeurs, tout comme la consultation et le téléchargement impossibles sur un autre moteur de recherche.
= L'Internet Archive
En réaction au projet Google Books, l'Internet Archive pense qu'une bibliothèque à vocation mondiale ne doit pas être liée à des enjeux commerciaux. Elle s'associe en janvier 2005 à Yahoo! pour mettre sur pied l'Open Content Alliance (OCA), dans l'optique de fédérer un grand nombre de partenaires pour créer une bibliothèque planétaire publique respectueuse du copyright et sur un modèle ouvert.
Qu'est-ce exactement que l'Internet Archive? Fondée en avril 1996 par Brewster Kahle à San Francisco (Californie), l'Internet Archive a pour but de constituer, stocker, préserver et gérer une «bibliothèque» de l'internet, en archivant la totalité du web tous les deux mois, afin d'offrir un outil de travail aux universitaires, chercheurs et historiens, et de préserver un historique de l'internet pour les générations futures.
En octobre 2001, l'Internet Archive met ses archives en accès libre sur le web grâce à la Wayback Machine, qui permet à tout un chacun de consulter l'historique d'un site web, à savoir le contenu et la présentation d'un site web à différentes dates, théoriquement tous les deux mois à partir de 1996.
L'Internet Archive débute aussi la constitution de collections numériques telles que le Million Book Project (10.520 livres en avril 2005), des archives de films de la période 1903-1973, des archives de concerts live récents, des archives de logiciels, etc. Toutes ces collections sont en consultation libre sur le web.
= L'Open Content Alliance
En janvier 2005, l'Internet Archive s'associe à Yahoo! pour mettre sur pied l'Open Content Alliance (OCA), une initiative visant à créer un répertoire libre et multilingue de livres numérisés et de documents multimédia pour consultation sur n'importe quel moteur de recherche.
L'OCA est officiellement lancée en octobre 2005 et débute véritablement en 2006. Le but de l'initiative est de s'inspirer de Google Books tout en évitant ses travers, à savoir la numérisation des livres sous droits sans l'accord préalable des éditeurs, tout comme la consultation et le téléchargement impossibles sur un autre moteur de recherche.
L'OCA regroupe de nombreux partenaires: des bibliothèques et des universités bien sûr, mais aussi des organisations gouvernementales, des associations à but non lucratif, des organismes culturels et des sociétés informatiques (Adobe, Hewlett Packard, Microsoft, Yahoo!, Xerox, etc.).
Les premiers partenaires sont les bibliothèques des universités de Californie et de Toronto, l'European Archive, les Archives nationales du Royaume-Uni, O'Reilly Media et les Prelinger Archives. Seuls les livres appartenant au domaine public sont numérisés, pour éviter les problèmes de copyright auxquels se heurte Google. Les collections numérisées sont intégrées à la section Text Archive de l'Internet Archive.
En décembre 2006, l'Open Content Alliance franchit la barre des 100.000 livres numérisés, avec un rythme de 12.000 nouveaux livres par mois. A la même date, l'Internet Archive reçoit une subvention d'un million de dollars de la part de la Sloan Foundation pour numériser les collections du Metropolitan Museum of Art (l'ensemble des livres et plusieurs milliers d'images) ainsi que certaines collections de la Boston Public Library (les 3.800 livres de la bibliothèque personnelle de John Adams, deuxième président des Etats-Unis), du Getty Research Institute (une série de livres d'art), de la John Hopkins University (une série de documents liés au mouvement anti-esclavagiste) et de l'Université de Californie à Berkeley (une série de documents relatifs à la ruée vers l'or).
En mai 2007, l'Open Content Alliance franchit la barre des 200.000 livres numérisés.
La barre du million de livres numérisés est atteinte en décembre 2008.
Si Microsoft est un des partenaires de l'OCA, il se lance également dans l'aventure à titre personnel. En décembre 2006 est mise en ligne aux Etats-Unis la version bêta de Live Search Books, qui permet une recherche par mots-clés dans les livres du domaine public. Ces livres sont numérisés par Microsoft suite à des accords passés avec de grandes bibliothèques, les premières étant la British Library et les bibliothèques des universités de Californie et de Toronto, suivies en janvier 2007 par celles de la New York Public Library et de l'Université Cornell. Microsoft compte aussi ajouter des livres sous droits, mais uniquement avec l'accord préalable des éditeurs.
Tout comme Google Books, Live Search Books permet de consulter des extraits comportant les mots-clés, qui sont eux-même surlignés. Mais les collections sont moins riches que celles de Google Books, le moteur de recherche est plus rudimentaire, et il n'est pas possible de télécharger les livres au format PDF dans leur entier.
En mai 2007, Microsoft annonce des accords avec plusieurs grands éditeurs, dont Cambridge University Press et McGraw Hill.
Microsoft met finalement un terme à ce projet en mai 2008 pour concentrer ses efforts sur d'autres activités. Les 750.000 livres déjà numérisés sont versés dans les collections de l'Open Content Alliance.
= Europeana
En Europe, certains s'inquiètent de l'«hégémonie américaine» que représente Google Books. Il existe sur le web une Bibliothèque européenne, qui est en fait un portail commun aux 43 bibliothèques nationales, lancé en janvier 2004 par la CENL (Conference of European National Librarians) et hébergé sur le site de la Bibliothèque nationale des Pays-Bas.
En septembre 2005, la Commission européenne lance une vaste consultation sur un projet de bibliothèque numérique européenne, avec réponse requise en janvier 2006, suite à quoi le projet est officiellement lancé en mars 2006.
«Le plan de la Commission européenne visant à promouvoir l'accès numérique au patrimoine de l'Europe prend forme rapidement, lit-on dans le communiqué de presse. Dans les cinq prochaines années, au moins six millions de livres, documents et autres oeuvres culturelles seront mis à la disposition de toute personne disposant d'une connexion à l'internet, par l'intermédiaire de la "bibliothèque numérique européenne". Afin de stimuler les initiatives de numérisation européennes, la Commission va cofinancer la création d'un réseau paneuropéen de centres de numérisation. La Commission abordera également, dans une série de documents stratégiques, la question du cadre approprié à adopter pour assurer la protection des droits de propriété intellectuelle dans le cadre des bibliothèques numériques.»
Europeana et ses deux millions de documents sont disponibles en novembre 2008, avec un serveur qui déclare rapidement forfait suite à la très forte demande des premières heures, puis une période expérimentale avec consultation partielle des collections suite au «renforcement» de la capacité de ce serveur.
2007: NOUS LISONS SUR DIVERS APPAREILS ELECTRONIQUES
= [Résumé]
Si le Kindle, le lecteur de livres d'Amazon, est lancé en novembre 2007, la lecture sur appareil mobile débute dix ans auparavant. On lit d'abord sur son ordinateur - portable ou non - avant de lire sur les agendas électroniques que sont le Psion et les appareils de Franklin. La société Palm lance en mars 1996 le Palm Pilot, premier PDA du marché. Le Pocket PC de Microsoft est lancé en avril 2000. Suivent ensuite les premiers smartphones de Nokia et Sony Ericsson. Parallèlement, on voit l'émergence de tablettes de lecture dédiées. Les premières sont le Rocket eBook, le SoftBook Reader ou le Gemstar eBook, et ne durent pas. Après une période morose, des tablettes plus légères gagnent en puissance et qualité d'écran, par exemple le Cybook (nouvelle version) ou le Sony Reader, auquel s'ajoute le Kindle d'Amazon.com en novembre 2007. L'écran LCD laisse la place à un écran utilisant la technologie E Ink. On parle maintenant d'un support souple ultra-fin appelé papier électronique, qui serait lancé par E Ink, Plastic Logic et d'autres en 2010.
= Tablettes de lecture
# Premiers pas
Les livres numériques sont d'abord lisibles uniquement sur l'écran de l'ordinateur, que celui-ci soit un ordinateur de bureau ou un ordinateur portable sinon ultra-portable. Outre le stockage d'un millier de livres sinon plus - en fonction de la taille du disque dur - l'ordinateur permet l'utilisation d'outils bureautiques standard, l'accès au web, l'écoute de fichiers musicaux et le visionnement de vidéos ou de films. Certains usagers sont également tentés par le webpad, un ordinateur-écran sans disque dur disposant d'une connexion sans fil à l'internet, apparu en 2001, ou alors la tablette PC, une tablette informatique pourvue d'un écran tactile, apparue fin 2002.
En 1999, pour plus de mobilité, on voit apparaître des appareils dédiés de la taille d'un (gros) livre, souvent appelés ebooks, livres électroniques, tablettes de lecture ou même liseuses. Les premiers appareils suscitent un engouement certain, même si peu de gens vont jusqu'à les acheter, vu leur prix prohibitif et un choix de livres restreint. Le catalogue de livres numériques est encore ridicule par rapport à la production imprimée.
Les premières tablettes de lecture sont conçues et développées dans la Silicon Valley, en Californie. Elles disposent d'un écran à cristaux liquides (LCD: liquid crystal display) rétro-éclairé ou non, noir et blanc ou en couleur. Elles fonctionnent sur batterie et disposent d'un modem intégré et d'un port USB, pour connexion à l'internet et téléchargement des livres à partir de librairies numériques.
Le modèle le plus connu, le Rocket eBook, est créé par la société NuvoMedia, financée par la chaîne de librairies Barnes & Noble et le géant des médias Bertelsmann. Un deuxième modèle, le SoftBook Reader, est développé par la société SoftBook Press, financée par les deux grandes maisons d'édition Random House et Simon & Schuster. Plusieurs autres modèles ont une durée de vie assez courte, par exemple l'EveryBook, appareil à double écran créé par la société du même nom, ou encore le Millennium eBook, créé par la société Librius.com. A cette époque, qui n'est pas si lointaine, toutes ces tablettes électroniques pèsent entre 700 grammes et 2 kilos et peuvent stocker une dizaine de livres.
# Gemstar eBook
Lancés en octobre 2000 à New York, les deux premiers modèles de Gemstar eBook sont les successeurs du Rocket eBook (conçu par NuvoMedia) et du SoftBook Reader (conçu par SoftBook Press), suite au rachat de NuvoMedia et de SoftBook Press en janvier 2000 par Gemstar-TV Guide International, une grosse société spécialisée dans les produits et services numériques pour les médias.
Commercialisés en novembre 2000 aux Etats-Unis, ces deux modèles - le REB 1100 (écran noir et blanc, successeur du Rocket eBook) et le REB 1200 (écran couleur, successeur du SoftBook Reader) - sont construits et vendus sous le label RCA, appartenant à Thomson Multimedia. Le système d'exploitation, le navigateur et le logiciel de lecture sont spécifiques au produit, tout comme le format de lecture, basé sur le format OeB (open ebook).
Les ventes sont très inférieures aux pronostics. En avril 2002, un article du New York Times annonce l'arrêt de la fabrication de ces appareils par RCA. En automne 2002, leurs successeurs - le GEB 1150 et le GEB 2150 - sont produits sous le label Gemstar et vendus par SkyMall à un prix beaucoup plus compétitif (199 et 349 dollars US), avec ou sans abonnement annuel ou bisannuel à la librairie numérique Gemstar eBook. Mais les ventes restent peu concluantes et Gemstar décide de mettre fin à ses activités eBook. La société cesse la vente de ses tablettes de lecture en juin 2003 et celle de ses livres numériques le mois suivant.
# Cybook
Première tablette de lecture européenne, le Cybook (21 x 16 cm, 1 kilo) est conçu et développé par la société française Cytale, et commercialisé en janvier 2001. Sa mémoire - 32 Mo (méga-octets) de mémoire SDRAM (synchronous dynamic random access memory) et 16 Mo de mémoire flash - permet de stocker 15.000 pages de texte, soit 30 livres de 500 pages.
«J'ai croisé il y a deux ans le chemin balbutiant d'un projet extraordinaire, le livre électronique, écrit en décembre 2000 Olivier Pujol, PDG de Cytale. Depuis ce jour, je suis devenu le promoteur impénitent de ce nouveau mode d'accès à l'écrit, à la lecture, et au bonheur de lire. La lecture numérique se développe enfin, grâce à cet objet merveilleux: bibliothèque, librairie nomade, livre "adaptable", et aussi moyen d'accès à tous les sites littéraires (ou non), et à toutes les nouvelles formes de la littérature, car c'est également une fenêtre sur le web.»
Mais les ventes sont très inférieures aux pronostics et forcent la société à se déclarer en cessation de paiement. Cytale est mis en liquidation judiciaire en juillet 2002 et cesse ses activités à la même date. La commercialisation du Cybook est reprise quelques mois plus tard par la société Bookeen, créée en 2003 à l'initiative de Michael Dahan et Laurent Picard, deux ingénieurs de Cytale. En juillet 2007, Bookeen dévoile la nouvelle version de sa tablette, baptisée Cybook Gen3, avec un écran utilisant la technologie E Ink.
# Sony Reader
En avril 2004, Sony lance au Japon son premier Reader, le Librié 1000- EP, produit en partenariat avec les sociétés Philips et E Ink. Cette tablette est d'ailleurs la première à utiliser la technologie d'affichage développée par E Ink et dénommée encre électronique. L'appareil pèse 300 grammes (avec piles et protection d'écran), pour une taille de 12,6 x 19 x 1,3 centimètres. Sa mémoire est de 10 Mo (méga-octets) - avec possibilité d'extension - et sa capacité de stockage de 500 livres. Son écran de 6 pouces a une définition de 170 DPI (dots per inch) et une résolution de 800 x 600 pixels. Un port USB permet le téléchargement des livres à partir de l'ordinateur. L'appareil comprend aussi un clavier, une fonction enregistrement et une synthèse vocale. Il fonctionne avec quatre piles alcalines, qui permettraient la consultation de 10.000 pages. Son prix est de 375 dollars US. Le Librié cède ensuite la place au Sony Reader, lancé en octobre 2006 aux Etats-Unis au prix de 350 dollars, avec plusieurs nouveaux modèles sortis depuis avec succès.
# Kindle
La librairie en ligne Amazon.com lance en novembre 2007 sa propre tablette de lecture, le Kindle, qui a le format d'un livre (19 x 13 x 1,8 cm, 289 grammes), avec un écran noir et blanc (6 pouces, 800 x 600 pixels), un clavier, une mémoire de 256 Mo (extensible par carte SD) et enfin une connexion sans fil (wifi) et un port USB. Vendu 400 dollars US (273 euros), il peut contenir jusqu'à 200 livres parmi les 88.000 disponibles dans le catalogue d'Amazon. 538.000 Kindle sont vendus en 2008. En janvier 2009, Amazon rachète la société Audible.com et sa collection de livres, journaux et magazines audio - 80.000 titres - téléchargeables sur baladeurs, téléphones et smartphones. En février 2009, Amazon lance une nouvelle version du Kindle, le Kindle 2, avec un catalogue de 230.000 titres.
= PDA
# Psion
Le Psion Organiser est le vétéran des agendas électroniques. Le premier modèle est lancé dès 1984 par la société britannique Psion. Au fil des ans, la gamme des appareils s'étend et la société se développe à l'international. En 2000, les divers modèles (Série 7, Série 5mx, Revo, Revo Plus) sont concurrencés par le Palm Pilot et le Pocket PC. Les ventes baissent et la société décide de diversifier ses activités. Suite au rachat de Teklogix par Psion, Psion Teklogix est fondé en septembre 2000 pour développer des solutions mobiles sans fil à destination des entreprises. Psion Software est fondé en 2001 pour développer les logiciels de la nouvelle génération d'appareils mobiles utilisant la plateforme Symbian OS, par exemple ceux du smartphone Nokia 9210, modèle précurseur commercialisé la même année.
Enseignante-chercheuse à l'Ecole pratique des hautes études (EPHE, Paris-Sorbonne), Marie-Joseph Pierre utilise un Psion depuis plusieurs années pour lire et étudier dans le train lors de ses fréquents déplacements entre Argentan (Normandie), sa ville de résidence, et Paris. Elle achète son premier Psion en 1997, un Série 3, remplacé ensuite par un Série 5, remplacé lui-même par un Psion 5mx en juin 2001.
En février 2002, elle raconte: «J'ai chargé tout un tas de trucs littéraires - dont mes propres travaux et dont la Bible entière - sur mon Psion 5mx (16 + 16 Mo), que je consulte surtout dans le train ou pour mes cours, quand je ne peux pas emporter toute une bibliothèque. J'ai mis les éléments de programme qui permettent de lire page par page comme sur un véritable ebook. Ce qui est pratique, c'est de pouvoir charger une énorme masse documentaire sur un support minuscule. Mais ce n'est pas le même usage qu'un livre, surtout un livre de poche qu'on peut feuilleter, tordre, sentir…, et qui s'ouvre automatiquement à la page qu'on a aimée. C'est beaucoup moins agréable à utiliser, d'autant que sur PDA, la page est petite: on n'a pas de vue d'ensemble. Mais avec une qualité appréciable: on peut travailler sur le texte enregistré, en rechercher le vocabulaire, réutiliser des citations, faire tout ce que permet le traitement informatique du document, et cela m'a pas mal servi pour mon travail, ou pour mes activités associatives. Je fais par exemple partie d'une petite société poétique locale, et nous faisons prochainement un récital poétique. J'ai voulu rechercher des textes de Victor Hugo, que j'ai maintenant pu lire et même charger à partir du site de la Bibliothèque nationale de France: c'est vraiment extra.»
# eBookMan (Franklin)
Basée dans le New Jersey (Etats-Unis), la société Franklin commercialise dès 1986 le premier dictionnaire consultable sur une machine de poche. Quinze ans plus tard, Franklin distribue 200 ouvrages de référence sur des machines de poche: dictionnaires unilingues et bilingues, encyclopédies, bibles, manuels d'enseignement, ouvrages médicaux et livres de loisirs.
En octobre 2000, Franklin lance l'eBookMan, un assistant personnel multimédia qui - entre autres fonctionnalités (agenda, dictaphone, etc.) - permet la lecture de livres numériques sur le logiciel de lecture Franklin Reader. A la même date, l'eBookMan reçoit l'eBook Technology Award de la Foire internationale du livre de Francfort. Trois modèles (EBM-900, EBM-901 et EBM-911) sont disponibles début 2001. Leurs prix respectifs sont de 130, 180 et 230 dollars US. Le prix est fonction de la taille de la mémoire vive (8 ou 16 Mo) et de la qualité de l'écran à cristaux liquides (écran LCD), rétro-éclairé ou non selon les modèles. Nettement plus grand que celui de ses concurrents, l'écran n'existe toutefois qu'en noir et blanc, contrairement à la gamme Pocket PC ou à certains modèles Palm avec écran couleur. L'eBookMan permet l'écoute de livres audio et de fichiers musicaux au format MP3.
En octobre 2001, Franklin décide de ne pas intégrer le Microsoft Reader à l'eBookMan, mais de lui préférer le Mobipocket Reader, logiciel de lecture jugé plus performant, et primé à la même date par l'eBook Technology Award de la Foire internationale du livre de Francfort. Parallèlement, le Franklin Reader est progressivement disponible pour les gammes d'appareils mobiles Psion, Palm, Pocket PC et Nokia. Franklin développe aussi une librairie numérique sur son site en passant des partenariats avec plusieurs sociétés, notamment avec Audible.com pour avoir accès à sa collection de 4.500 livres audionumériques.
# Palm Pilot et Pocket PC
Lorsque le livre numérique commence à se généraliser en 2000, tous les fabricants de PDA décident d'intégrer un logiciel de lecture dans leur machine, en plus des fonctionnalités standard (agenda, dictaphone, lecteur de MP3, etc.). En parallèle, ils négocient les droits de diffusion numérique de centaines de titres, soit directement soit par le biais de librairies numériques. Si certains professionnels du livre s'inquiètent de la petitesse de l'écran, les adeptes de la lecture sur PDA assurent que la taille de l'écran n'est pas un problème. Les grands favoris du marché sont les gammes Palm Pilot et Pocket PC.
La société Palm lance le premier Palm Pilot en mars 1996 et vend 23 millions de machines entre 1996 et 2002. Le système d'exploitation du Palm Pilot est le Palm OS et son logiciel de lecture le Palm Reader. En mars 2001, la gamme Palm Pilot propose plusieurs modèles et permet la lecture de livres numériques sur le Mobipocket Reader.
Commercialisé par Microsoft en avril 2000, le Pocket PC utilise le système d'exploitation Windows CE, qui intègre le nouveau logiciel de lecture Microsoft Reader. En octobre 2001, Windows CE est remplacé par Pocket PC 2002, qui permet entre autres de lire des livres numériques sous droits. Ces livres sont protégés par un système de gestion des droits numériques, le Microsoft DAS Server (DAS: digital asset server). En 2002, la gamme Pocket PC propose plusieurs modèles et permet la lecture sur trois logiciels: le Microsoft Reader bien sûr, le Mobipocket Reader et le Palm Reader.
Le marché des PDA poursuit sa croissance. D'après The Seybold Report, on compte 17 millions de PDA dans le monde en avril 2001 (et seulement 100.000 tablettes de lecture). 13,2 millions de PDA sont vendus en 2001, et 12,1 millions en 2002. En 2002, la gamme Palm Pilot est toujours le leader du marché (36,8% des machines vendues), suivi par la gamme Pocket PC de Microsoft et les modèles de Hewlett-Packard, Sony, Handspring, Toshiba et Casio. Les systèmes d'exploitation utilisés sont essentiellement le Palm OS (pour 55% des machines) et le Pocket PC (pour 25,7% des machines).
En 2004, on note une plus grande diversité des modèles et une baisse des prix chez tous les fabricants. Les trois principaux fabricants sont Palm, Sony et Hewlett-Packard. Suivent Handspring, Toshiba, Casio et d'autres. Mais le PDA est de plus en plus concurrencé par le smartphone, qui est un téléphone portable doublé d'un PDA, et les ventes commencent à baisser. En février 2005, Sony décide de se retirer complètement du marché des PDA.
= Smartphones
Le premier smartphone est le Nokia 9210, modèle précurseur lancé en 2001 par la société finlandaise Nokia, grand fabricant mondial de téléphones portables. Apparaissent ensuite le Nokia Series 60, le Sony Ericsson P800, puis les modèles de Motorola et de Siemens. Ces différents modèles permettent de lire des livres numériques sur le Mobipocket Reader.
Appelé aussi téléphone multimédia, téléphone multifonctions ou encore téléphone intelligent, le smartphone dispose d'un écran couleur, du son polyphonique et de la fonction appareil photo, qui viennent s'ajouter aux fonctions habituelles de l'assistant personnel: agenda, dictaphone, lecteur de livres numériques, lecteur de musique, etc.
Les smartphones représentent 3,7% des ventes de téléphones portables en 2004 et 9% des ventes en 2006, à savoir 90 millions d'unités sur un milliard.
Si les livres numériques ont une longue vie devant eux, les appareils de lecture risquent de muer régulièrement. Denis Zwirn, président de Numilog, grande librairie en ligne francophone, explique en février 2003: «L'équipement des individus et des entreprises en matériel pouvant être utilisé pour la lecture numérique dans une situation de mobilité va continuer de progresser très fortement dans les dix prochaines années sous la forme de machines de plus en plus performantes (en terme d'affichage, de mémoire, de fonctionnalités, de légèreté…) et de moins en moins chères. Cela prend dès aujourd'hui la forme de PDA (Pocket PC et Palm Pilot), de tablettes PC et de smartphones, ou de smart displays (écrans tactiles sans fil). Trois tendances devraient être observées: la convergence des usages (téléphone/PDA), la diversification des types et tailles d'appareils (de la montre-PDA-téléphone à la tablette PC waterproof), la démocratisation de l'accès aux machines mobiles (des PDA pour enfants à 15 euros). Si les éditeurs et les libraires numériques savent en saisir l'opportunité, cette évolution représente un environnement technologique et culturel au sein duquel les livres numériques, sous des formes variées, peuvent devenir un mode naturel d'accès à la lecture pour toute une génération.»
On se demande si des tablettes dédiées peuvent vraiment réussir à s'imposer face aux smartphones multifonctions. On se demande aussi s'il existe une clientèle spécifique pour les deux machines, la lecture sur téléphone portable et smartphone étant destinée au grand public, et la lecture sur tablette étant réservée aux gros consommateurs de documents que sont les lycéens, les étudiants, les professeurs, les chercheurs ou les juristes. Le débat n'est pas prêt d'être clos.
La compétition risque d'être rude sur un marché très prometteur. Reste à voir quels modèles seront retenus par l'usager parce que solides, légers, économiques et procurant un véritable «confort de lecture», sans oublier l'aspect esthétique et les possibilités de lecture en 3 D. Selon Jean-Paul, webmestre du site hypermédia cotres.net, interviewé en janvier 2007, «on progresse. Les PDA et autres baladeurs multimédia ont formé le public à manipuler des écrans tactiles de dimension individuelle (par opposition aux bornes publiques de circulation et autres tirettes-à-sous). L'hypermédia est maintenant une évidence. Il ne reste plus qu'à laisser se bousculer les ingénieurs et les marketteurs pour voir sortir un objet rentable, léger, attirant, peu fragile, occupant au mieux l'espace qui sépare les deux mains d'un terrien assis dans le bus ou sur sa lunette WC: la surface d'une feuille A4 en format italien, soit ± 800 x 600 pixels. Bien sûr, ce que montrera cette surface ne sera pas en 2 D mais en 3 D. Comme les GPS prochaine génération, ou les écrans de visée sur le cockpit d'un A- Win.»
On nous parle de papier électronique pour 2010, avec les sociétés E Ink et Plastic Logic en tête de file pour nous proposer des supports de lecture souples et ultra-fins.
2008: LES EBOOKS SONT PARTOUT
= [Résumé]
En 2008, offrir un livre numérique devient «tendance», et le lire sur son smartphone l'est encore plus. Preuve que les choses ont bien évolué depuis la panique ayant saisi les éditeurs et libraires à la fin des années 1990. Trois termes paraissent essentiels en 2008: stockage, organisation et diffusion. Dans un proche avenir, on devrait disposer de l'ensemble du patrimoine mondial stocké sous forme numérique, d'une organisation effective de l'information et d'un réseau internet omniprésent. Confidentiel en 2000, puis parent pauvre des fichiers musicaux et vidéo, le livre numérique est en bonne place à côté de la musique et des films. Editeur puis consultant en édition électronique, Nicolas Pewny voit «le livre numérique du futur comme un "ouvrage total" réunissant textes, sons, images, vidéo, interactivité: une nouvelle manière de concevoir et d'écrire et de lire, peut-être sur un livre unique, sans cesse renouvelable, qui contiendrait tout ce qu'on a lu, unique et multiple compagnon.»
= [Texte]
Fondateur du Projet Gutenberg en 1971, Michael Hart précise souvent dans ses écrits que, si Gutenberg a permis à chacun d'avoir ses propres livres - jusque-là réservés à une élite -, le Projet Gutenberg permet à chacun d'avoir une bibliothèque complète - jusque-là réservée à la collectivité -, sur un support qu'on peut glisser dans sa poche, le support optimal actuel étant la clé USB. Le Projet Gutenberg compte près de 30.000 livres en novembre 2008, soit la taille d'une bibliothèque publique de quartier.
Le futur sera-t-il le cyberespace décrit par le philosophe Timothy Leary en 1994 dans son livre "Chaos et cyberculture"? «Toute l'information du monde est à l'intérieur (de gigantesques bases de données, NDLR). Et grâce au cyberespace, tout le monde peut y avoir accès. Tous les signaux humains contenus jusque-là dans les livres ont été numérisés. Ils sont enregistrés et disponibles dans ces banques de données, sans compter tous les tableaux, tous les films, toutes les émissions de télé, tout, absolument tout.» Nous n'en sommes pas encore là. Mais sur les 30 millions de livres du domaine public que compteraient les bibliothèques (sans compter les différentes éditions), 5 millions seraient déjà librement disponibles sur le web.
Tim Berners-Lee est l'inventeur du web en 1990. A la question de Pierre Ruetschi, journaliste à la Tribune de Genève, un quotidien suisse: «Sept ans plus tard, êtes-vous satisfait de la façon dont le web a évolué?», il répond en décembre 1997 que, s'il est heureux de la richesse et de la variété de l'information disponible, le web n'a pas encore la puissance prévue dans sa conception d'origine. Il aimerait «que le web soit plus interactif, que les gens puissent créer de l'information ensemble», et pas seulement consommer celle qui leur est proposée. Le web doit devenir «un média de collaboration, un monde de connaissance que nous partageons».
Son souhait commence à se concrétiser sept ans après, avec ce qu'on appelle le web 2.0. La paternité de l'expression «web 2.0» revient d'ailleurs à un éditeur, Tim O'Reilly, qui utilise cette expression pour la première fois en 2004 comme titre d'une série de conférences. Le web ne vise plus seulement à utiliser l'information. Il incite aussi les usagers à échanger et collaborer en ligne, sur des blogs, des wikis ou des encyclopédies coopératives comme Wikipédia et Citizendium.
Un enjeu tout aussi important est l'accessibilité de l'internet pour tous. Mis en ligne en septembre 2000 par l'association du même nom, le site Handicapzéro devient en février 2003 un portail généraliste offrant un accès adapté à l'information pour les Francophones ayant un problème visuel, à savoir plus de 10% de la population. Le portail offre des informations dans nombre de domaines: actualités, programmes de télévision, météo, santé, emploi, consommation, loisirs, sports, téléphonie, etc. Les personnes aveugles peuvent accéder au site au moyen d'une plage braille ou d'une synthèse vocale. Les personnes malvoyantes peuvent paramétrer sur la page d'accueil la taille et la police des caractères ainsi que la couleur du fond d'écran pour une navigation confortable. Les personnes voyantes peuvent correspondre en braille avec des aveugles par le biais du site. En octobre 2006, le portail adopte une nouvelle présentation en enrichissant encore son contenu, en adoptant une navigation plus intuitive pour la page d'accueil, en proposant des raccourcis de clavier, en offrant un service amélioré pour l'affichage «confort de lecture», etc. Plus de 2 millions de visiteurs utilisent les services du portail au cours de l'année 2006. Handicapzéro entend ainsi démontrer «que, sous réserve du respect de certaines règles élémentaires, l'internet peut devenir enfin un espace de liberté pour tous».
Un autre enjeu est l'infrastructure de l'internet. La connexion au réseau est désormais plus facile, avec la DSL (digital subscriber line), le câble ou la fibre optique, tout comme les technologies WiFi (wireless fidelity) pour un secteur géographique limité et WiMAX (worldwide interoperability for microwave access) pour un secteur géographique étendu. Jean-Paul, webmestre du site hypermédia cotres.net, résume la situation en janvier 2007: «J'ai l'impression que nous vivons une période "flottante", entre les temps héroïques, où il s'agissait d'avancer en attendant que la technologie nous rattrape, et le futur, où le très haut débit va libérer les forces qui commencent à bouger, pour l'instant dans les seuls jeux.»
La prochaine génération de l'internet serait un réseau pervasif permettant de se connecter en tout lieu et à tout moment sur tout type d'appareil à travers un réseau unique et omniprésent. Le concept de réseau pervasif est développé par Rafi Haladjian, fondateur de la société Ozone. «La nouvelle vague touchera notre monde physique, notre environnement réel, notre vie quotidienne dans tous les instants, explique-t-il en 2007. Nous n'accéderons plus au réseau, nous l'habiterons. Les composantes futures de ce réseau (parties filiaires, parties non filiaires, opérateurs) seront transparentes à l'utilisateur final. Il sera toujours ouvert, assurant une permanence de la connexion en tout lieu. Il sera également agnostique en terme d'application(s), puisque fondé sur les protocoles mêmes de l'internet.» (extrait du site web d'Ozone)
Pierre Schweitzer, inventeur du projet @folio, une tablette de lecture nomade, écrit en décembre 2006: «La chance qu'on a tous est de vivre là, ici et maintenant cette transformation fantastique. Quand je suis né en 1963, les ordinateurs avaient comme mémoire quelques pages de caractères à peine. Aujourd'hui, mon baladeur de musique pourrait contenir des milliards de pages, une vraie bibliothèque de quartier. Demain, par l'effet conjugué de la loi de Moore et de l'omniprésence des réseaux, l'accès instantané aux oeuvres et aux savoirs sera de mise. Le support de stockage lui-même n'aura plus beaucoup d'intérêt. Seules importeront les commodités fonctionnelles d'usage et la poétique de ces objets.»
Pierre ajoute: «La lecture numérique dépasse de loin, de très loin même, la seule question du "livre" ou de la presse, Le livre et le journal restent et resteront encore, pour longtemps, des supports de lecture techniquement indépassables pour les contenus de valeur ou pour ceux dépassant un seuil critique de diffusion. Bien que leur modèle économique puisse encore évoluer (comme pour les "gratuits" la presse grand public), je ne vois pas de bouleversement radical à l'échelle d'une seule génération. Au-delà de cette génération, l'avenir nous le dira. On verra bien. Pour autant, d'autres types de contenus se développent sur les réseaux. Internet défie l'imprimé sur ce terrain- là: celui de la diffusion en réseau (dématérialisée = coût marginal nul) des oeuvres et des savoirs. Là où l'imprimé ne parvient pas à équilibrer ses coûts. Là où de nouveaux acteurs peuvent venir prendre leur place.
Or, dans ce domaine nouveau, les équilibres économiques et les logiques d'adoption sont radicalement différents de ceux que l'on connaît dans l'empire du papier - voir par exemple l'évolution des systèmes de validation pour les archives ouvertes dans la publication scientifique. Ou les modèles économiques émergents de la presse en ligne. Il est donc vain, dangereux même, de vouloir transformer au forceps l'écologie du papier - on la ruinerait à vouloir le faire! À la marge, certains contenus très spécifiques, certaines niches éditoriales, pourraient être transformées - l'encyclopédie ou la publication scientifique le sont déjà: de la même façon, les guides pratiques, les livres d'actualité quasi-jetables et quelques autres segments qui envahissent les tables des librairies pourraient l'être, pour le plus grand bonheur des libraires. Mais il n'y a là rien de massif ou brutal selon moi: nos habitudes de lecture ne seront pas bouleversées du jour au lendemain, elles font partie de nos habitudes culturelles, elles évoluent lentement, au fur et à mesure de leur adoption (= acceptation) par les générations nouvelles.»
Marc Autret, journaliste et infographiste, écrit pour sa part à la même date: «Sans vouloir faire dans la divination, je suis convaincu que l'e-book (ou "ebook": impossible de trancher!) a un grand avenir dans tous les secteurs de la non-fiction. Je parle ici de livre numérique en termes de "logiciel", pas en terme de support physique dédié (les conjectures étant plus incertaines sur ce dernier point). Les éditeurs de guides, d'encyclopédies et d'ouvrages informatifs en général considèrent encore l'e-book comme une déclinaison très secondaire du livre imprimé, sans doute parce que le modèle commercial et la sécurité de cette exploitation ne leur semblent pas tout à fait stabilisés aujourd'hui. Mais c'est une question de temps. Les e-books non commerciaux émergent déjà un peu partout et opèrent d'une certaine façon un défrichage des possibles. Il y a au moins deux axes qui émergent: (a) une interface de lecture/consultation de plus en plus attractive et fonctionnelle (navigation, recherche, restructuration à la volée, annotations de l'utilisateur, quizz interactif…); (b) une intégration multimédia (vidéo, son, infographie animée, base de données, etc.) désormais fortement couplée au web. Aucun livre physique n'offre de telles fonctionnalités. J'imagine donc l'e-book de demain comme une sorte de wiki cristallisé, empaqueté dans un format. Quelle sera alors sa valeur propre? Celle d'un livre: l'unité et la qualité du travail éditorial!»
Denis Zwirn, président de Numilog, grande librairie en ligne francophone, voit 2008 comme une date essentielle dans la courbe de croissance du marché des livres numériques, avec la conjonction de trois facteurs:
«(1) le développement de vastes catalogues en ligne utilisant pleinement les fonctionnalités de la recherche plein texte dans les livres numérisés, comme ceux de la future Bibliothèque numérique européenne, de VollTextSuche Online, de Google et d'Amazon. Une fois le contenu trouvé dans un des ouvrages ainsi "sondé" par ce type de recherche révolutionnaire pour le grand public, il est naturel de vouloir accéder à la totalité de l'ouvrage… dans sa version numérique.
(2) Des progrès techniques cruciaux tels que la proposition commerciale d'appareils de lecture à base d'encre électronique améliorant radicalement l'expérience de lecture finale pour l'usager en la rapprochant de celle du papier. Par exemple l'iLiad d'Irex ou le Sony Reader, mais bien d'autres appareils s'annoncent. Le progrès concerne toutefois tout autant le développement des nouveaux smartphones multifonctions comme les BlackBerry ou l'iPhone, ou la proposition de logiciels de lecture à l'interface fortement améliorée et pensée pour les ebooks sur PC, comme Adobe Digital Edition.
(3) Enfin, le changement important d'attitude de la part des professionnels du secteur, éditeurs, et probablement bientôt aussi libraires. Les éditeurs anglo-saxons universitaires ont massivement tracé une route que tous les autres sont en train de suivre, en tout cas aux Etats-Unis, en Europe du Nord et en France: proposer une version numérique de tous les ouvrages. Même pour les plus réticents encore il y a quelques années, ce n'est plus une question de "pourquoi?", c'est simplement devenu une question de "comment?". Les libraires ne vont pas tarder à considérer que vendre un livre numérique fait partie de leur métier normal.
Selon Denis, «le livre numérique n'est plus une question de colloque, de définition conceptuelle ou de divination par certains "experts": c'est un produit commercial et un outil au service de la lecture. Il n'est pas besoin d'attendre je ne sais quel nouveau mode de lecture hypermoderne et hypertextuel enrichi de multimédia orchestrant savamment sa spécificité par rapport au papier, il suffit de proposer des textes lisibles facilement sur les supports de lecture électronique variés qu'utilisent les gens, l'encre électronique pouvant progressivement envahir tous ces supports. Et de les proposer de manière industrielle. Ce n'est pas et ne sera jamais un produit de niche (les dictionnaires, les guides de voyage, les non voyants…): c'est en train de devenir un produit de masse, riche de formes multiples comme l'est le livre traditionnel.»
2009: CYBERESPACE ET SOCIETE DE L'INFORMATION
= [Résumé]
En 2009 (date de publication de ce livre), il semblerait que le cyberespace devienne omniprésent dans une société dite de l'information, si ce n'est déjà fait. Comment définir cyberespace et société de l'information? Voici les réponses des professionnels du livre interviewés au fil des ans, qui remplaceront une conclusion pour ouvrir au contraire des perspectives. Pour mémoire, la paternité du terme «cyberespace» revient à William Gibson, qui utilise ce terme dans son roman "Neuromancien", paru en 1984: «Cyberespace: une hallucination consensuelle expérimentée quotidiennement par des milliards d'opérateurs réguliers, dans chaque nation, par des enfants à qui on enseigne des concepts mathématiques… Une représentation graphique des données extraites des banques de tous les ordinateurs dans le système humain. Complexité incroyable. Des lignes de lumière qui vont dans le non-espace de l'esprit, des agglomérats et des constellations de données. Et qui fuient, comme les lumières de la ville.» Quant à la société de l'information, elle n'est pas si récente. On annonce régulièrement son avènement depuis plus de trente ans, comme le rappelle Jacques Pataillot, conseiller en management chez Cap Gemini Ernst & Young: «C'est un vieux concept, dont on parlait déjà en 1975! Seules les technologies ont changé.»
= Cyberespace
# Auteurs
Alex Andrachmes, producteur audiovisuel, écrivain et explorateur d'hypertexte, se demande de quel cyberespace on parle: «Celui des Gibson, inventeur de la formule, des Spinrad ou des Clarke, utopies scientifiques pas toujours traitées comme elles devraient l'être? Ou celui des AOL/Time-Warner, des Microsoft ou des… J6M- Canal/Universal… Tout ce qu'on peut dire à l'heure actuelle, c'est que ce qu'on peut encore appeler le cyberspace est multiforme, et qu'on ne sait pas qui le domptera. Ni s'il faut le dompter d'ailleurs… En tout cas, les créateurs, artistes, musiciens, les sites scientifiques, les petites "start-up" créatives, voire les millions de pages perso, les chats, les forums, et tout ce qui donne au net sa matière propre ne pourra être ignoré par les grands mangeurs de toile. Sans eux, ils perdraient leurs futurs "abonnés". Ce paradoxe a son petit côté subversif qui me plaît assez.»
D'après Lucie de Boutiny, romancière multimédia, le cyberespace est «le délire SF du type: "bienvenue dans la 3e dimension, payez-vous du sexe, des voyages et des vies virtuels" a toujours existé. La méditation, l'ésotérisme, les religions y pourvoient, etc. Maintenant, on est dans le cyberspace.»
Jean-Pierre Cloutier, auteur des Chroniques de Cybérie, une chronique hebdomadaire des actualités de l'internet, définit le cyberespace comme «un monde parallèle, un espace où se déroule l'ensemble des activités d'information, de communication, et d'échanges (y compris échanges commerciaux) désormais permises par le réseau. Il y a un centre, autonome, très interconnecté qui vit par et pour lui-même. Puis des collectivités plus ou moins ouvertes, des espaces réservés (intranets), des sous-ensembles (AOL, CompuServe). Il y a ensuite de très longues frontières où règne une culture mixte, hybride, issue du virtuel et du réel (on pense aux imprimés qui ont des versions web, aux sites marchands). Il y a aussi un sentiment d'appartenance à l'une ou l'autre de ces régions du cyberespace, et un sentiment d'identité.»
Selon Luc Dall'Armellina, co-auteur et webmestre d'oVosite, un espace d'écriture hypermédia, «ce pourrait-être quelque chose comme l'ensemble électrique mouvant, le système invisible mais cohérent des êtres humains sensibles et des interfaces intelligentes dont les activités sont tout ou en partie réglées, conditionnées ou co-régulées à travers leurs machines connectées ensemble. Peut-être plus simplement: la virtualisation sensible et numérique de l'inconscient collectif…»
Jean-Paul, webmestre du site hypermédia cotres.net, définit le cyberespace comme «un lieu isotrope en expansion pour l'instant infinie. Un modèle de la vision que nous avons aujourd'hui de l'univers. Jusqu'à l'invention du clic, le savoir humain était senti comme un espace newtonien, avec deux repères absolus: le temps (linéaire: un début, une fin) et l'espace (les trois dimensions du temple, du rouleau, du volumen). Le cyberespace obéit aux lois de l'hypertexte. Deux temps simultanés: le temps taxé (par le fournisseur d'accès ou par les impératifs de productivité, égrené par l'antique chrono), et le temps aboli, qui fait passer d'un lien à l'autre, d'un lieu à l'autre à la vitesse de l'électron, dans l'illusion du déplacement instantané. Quant aux repères, quiconque a lancé une recherche dans cet espace sait qu'il doit lui-même les définir pour l'occasion, et se les imposer (sous peine de se disperser, de se dissoudre), pour échapper au vertige de la vitesse. A cause de cette "vitesse de la pensée", nous trouvons dans cet espace un "modèle" de notre cerveau. "Ça tourne dans ma tête", à travers 10, 20, etc… synapses à la fois, comme un fureteur archivant la toile. Bref les lois du cyberespace sont celles du rêve et de l'imagination.»
Pour Anne-Bénédicte Joly, écrivain auto-éditant ses livres, le cyberespace est «le domaine virtuel créé par la mise en relation de plusieurs ordinateurs communiquant et échangeant entre eux».
Naomi Lipson, écrivain multimédia, traductrice et peintre, ajoute: «J'aime la métaphore du labyrinthe. Le média se nourrissant lui-même, le cyberespace contient une infinité de sites sur les labyrinthes.»
Pour Tim McKenna, écrivain et philosophe, «le cyberespace est l'ensemble des liens existant entre les individus utilisant les technologies pour communiquer entre eux, soit pour partager des informations, soit pour discuter. Dire qu'une personne existe dans le cyberespace revient à dire qu'elle a éliminé la distance en tant que barrière empêchant de relier personnes et idées.»
Pour Xavier Malbreil, auteur multimédia et modérateur de la liste e- critures, il s'agit d'«une interconnexion de tous, partout. Avec le libre accès à des banques de données, pour insuffler également du contenu dans les échanges interpersonnels.»
Pour Murray Suid, auteur de livres pédagogiques et de logiciels éducatifs, «le cyberespace est n'importe où, c'est-à-dire partout. L'exemple le plus simple est ma boîte aux lettres électronique, qui me suit où que j'aille.»
# Documentalistes
Emmanuel Barthe, documentaliste juridique et modérateur de la liste de discussion Juriconnexion, relate: «Je ne visualise pas le cyberespace comme véritable espace physique mais comme un immense média néanmoins concentré en un lieu unique: l'écran de l'ordinateur. En revanche, je conçois/pense le cyberespace comme un forum ou une assemblée antique: beaucoup d'animation, diversité des opinions, des discours, des gens qui se cachent dans les recoins, des personnes qui ne se parlent pas, d'autres qui ne parlent qu'entre eux…»
Selon Bakayoko Bourahima, documentaliste à l'ENSEA (Ecole nationale supérieure de statistique et d'économie appliquée) d'Abidjan, «il y a encore un peu de fantasme autour de ce mot. Quand j'ai fait connaissance avec ce mot (utilisé par Jean-Claude Guédon et Nicholas Négroponte), il m'avait d'abord laissé l'illusion d'un espace extra- terrestre où les ordinateurs et leurs utilisateurs se transportaient pour échanger des données et communiquer. Depuis que je navigue moi- même, je me rends compte qu'il s'agit tout simplement d'un espace virtuel traduisant le cadre de communication qui rassemble les internautes à travers le monde.»
Pour Peter Raggett, sous-directeur de la Bibliothèque centrale de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), «le cyberespace est cette zone "extérieure" qui se trouve de l'autre côté du PC lorsqu'on se connecte à l'internet. Pour ses utilisateurs ou ses clients, tout fournisseur de services internet ou serveur de pages web se trouve donc dans le cyberespace.»
# Editeurs
Pour Marie-Aude Bourson, créatrice de Gloupsy, site littéraire destiné aux nouveaux auteurs, le cyberespace est «un espace d'expression, de liberté et d'échanges où tout peut aller très (trop) vite».
Pour Pierre-Noël Favennec, expert à la direction scientifique de France Télécom R&D et directeur de collection, «le cyberespace est un monde où je suis relié par l'image et le son et sans fil avec qui je veux, quand je veux et où je veux, où j'ai accès à toutes les documentations et informations souhaitées, et dans lequel ma vie est facilitée par les agents intelligents et les objets communicants.»
Pour Jacky Minier, créateur de Diamedit, site de promotion d'inédits artistiques et littéraires, «c'est un espace de liberté pour l'imaginaire, une dimension inexplorée de la planète, une jungle et un paradis tout à la fois, où tout est possible même si tout n'est pas permis par l'éthique, où le contenu du portefeuille des intervenants n'a aucun rapport direct avec la valeur des contenus des sites. C'est avant tout une vaste agora, une place publique où l'on s'informe et où l'on informe. Ça peut être également une place de foires et marchés, mais l'argent n'y a cours que très accessoirement, même si la possibilité de vendre en ligne est réelle et ne doit pas être négligée ni méprisée. Il n'y est pas la seule valeur de référence, contrairement au monde réel et, même dans les cas très médiatiques de start-up multimillionnaires, le rapport à l'argent n'est qu'une conséquence, la matérialisation d'espérances financières, très vite sanctionnée en cas d'ambitions excessives comme on le voit régulièrement sur le site "Vakooler: Ki Vakooler aujourd'hui?" (qui peut se transcrire en: Va couler: qui va couler aujourd'hui?, NDLR), après les envolées lyriques et délirantes des premiers temps. A terme, je pense que le cyberespace restera un lieu beaucoup plus convivial que la société réelle.»
Nicolas Pewny, fondateur des éditions du Choucas, écrit pour sa part: «Je reprendrai volontiers une phrase d'Alain Bron, ami et auteur de Sanguine sur Toile (publié en 1999 par les éditions du Choucas, NDLR): "un formidable réservoir de réponses quand on cherche une information et de questions quand on n'en cherche pas. C'est ainsi que l'imaginaire peut se développer… (Ma correspondante en Nouvelle-Zélande est-elle jolie ? L'important, c'est qu'elle ait de l'esprit.)"»
# Gestionnaires
Selon Gérard Jean-François, directeur du centre de ressources informatiques de l'Université de Caen, «le cyberspace peut être considéré comme l'ensemble des informations qui sont accessibles sans aucune restriction sur le réseau internet.»
Pour Pierre Magnenat, responsable de la cellule «gestion et prospective" du centre informatique de l'Université de Lausanne, le cyberespace est «l'ensemble des ressources et acteurs connectés et accessibles à un moment donné.»
Pour Jacques Pataillot, conseiller en management chez Cap Gemini Ernst & Young, le cyberespace est «l'"économie connectée" (de l'anglais "connected economy") où tous les agents sont reliés électroniquement pour les échanges d'information.»
# Linguistes
Pour Guy Antoine, créateur de Windows on Haiti, un site de référence sur la culture haïtienne, «le cyberespace est au sens propre une nouvelle frontière pour l'humanité, un endroit où chacun peut avoir sa place, assez facilement et avec peu de ressources financières, avant que les règlements inter-gouvernementaux et les impôts ne l'investissent. Suite à quoi une nouvelle technologie lui succédera.»
Pour Alain Clavet, analyste de politiques au Commissariat aux langues officielles du Canada, il s'agit d'«un lieu de connaissances partagées non soumis aux contraintes du temps et de l'espace.»
Eduard Hovy, directeur du Natural Language Group de l'Université de Californie du Sud, relate pour sa part: «Pour moi, le cyberespace est représenté par la totalité des informations auxquelles nous pouvons accéder par l'internet et les systèmes informatiques en général. Il ne s'agit bien sûr pas d'un espace, et son contenu est sensiblement différent de celui des bibliothèques. Par exemple, bientôt mon réfrigérateur, ma voiture et moi-même seront connus du cyberespace, et toute personne disposant d'une autorisation d'accès (et d'une raison pour cela) pourra connaître précisément le contenu de mon réfrigérateur et la vitesse de ma voiture (ainsi que la date à laquelle je devrai changer les amortisseurs), et ce que je suis en train de regarder maintenant. En fait, j'espère que la conception de la publicité va changer, y compris les affiches et les présentations que j'ai sous les yeux en marchant, afin que cette publicité puisse correspondre à mes connaissances et à mes goûts, tout simplement en ayant les moyens de reconnaître que "voici quelqu'un dont la langue maternelle est l'anglais, qui vit à Los Angeles et dont les revenus sont de tant de dollars par mois". Ceci sera possible du fait de la nature dynamique d'un cyberespace constamment mis à jour (contrairement à une bibliothèque), et grâce à l'existence de puces informatiques de plus en plus petites et bon marché. Tout comme aujourd'hui j'évolue dans un espace social qui est un réseau de normes sociales, d'expectations et de lois, demain, j'évoluerai aussi dans un cyberespace composé d'informations sur lesquelles je pourrai me baser (parfois), qui limiteront mon activité (parfois), qui me réjouiront (souvent, j'espère) et qui me décevront (j'en suis sûr).»
Pour Steven Krauwer, coordinateur d'ELSNET (European Network of Excellence in Human Language Technologies), «le cyberespace est la partie de l'univers (incluant personnes, machines et information) que je peux atteindre "derrière" ma table de travail.»
Selon Zina Tucsnak, ingénieur d'études en informatique au laboratoire ATILF (Analyse et traitements informatiques du lexique français), «dans le cyberespace, l'information et la quantité de l'information sont gouvernées par des lois mathématiques. Mais les modèles mathématiques n'ont pas trouvé encore leur solution, un peu comme le mouvement perpétuel ou la quadrature du cercle.»
# Professeurs
Pour Gaëlle Lacaze, ethnologue et professeur d'écrit électronique dans un institut universitaire professionnel, il s'agit d'«une visuelle en trois dimensions: superposition de lignes droites mouvantes selon des directions multiples où les rencontres de lignes créent des points de contact.»
Pour Patrick Rebollar, professeur de littérature française et modérateur de la liste de diffusion LITOR (littérature et ordinateur), le cyberespace est «la réplique virtuelle et très imparfaite du monde des relations humaines, sociales, commerciales et politiques. En privant partiellement les utilisateurs de la matérialité du monde (spatiale, temporelle, corporelle), le cyberespace permet de nombreuses interactions instantanées et multi-locales. A noter que les êtres humains se montrent aussi stupides ou intelligents, malveillants ou dévoués dans le cyberespace que dans l'espace réel…»
Selon Henk Slettenhaar, professeur en technologies de la communication à la Webster University de Genève, «le cyberespace est notre espace virtuel, à savoir l'espace de l'information numérique (constitué de bits, et non d'atomes). Si on considère son spectre, il s'agit d'un espace limité. Il doit être géré de telle façon que tous les habitants de la planète puissent l'utiliser et en bénéficier. Il faut donc éliminer la fracture numérique.»
Pour Christian Vandendorpe, professeur à l'Université d'Ottawa et spécialiste des théories de la lecture, le cyberespace est «le nouveau territoire de la culture, un espace qui pourrait jouer le rôle de l'Agora dans la Grèce ancienne, mais à un niveau planétaire.»
Russon Wooldridge, professeur au département d'études françaises de l'Université de Toronto, relate: «Je travaille dans la même université que Marshall McLuhan autrefois (nos carrières se sont un moment croisées). Le "village global" qu'il entrevoyait à l'époque de la radio et de la télévision est devenu une réalité dans l'ère d'internet. Mais un village sans classes sociales (il n'y a pas de châtelain).»
# Visionnaire(s)
Pour Pierre Schweitzer, architecte designer et concepteur du projet @folio, un support numérique de lecture nomade, «c'est un terme un peu obscur pour moi. Mais je déteste encore plus "réalité virtuelle". Bizarre, cette idée de conceptualiser un ailleurs sans pouvoir y mettre les pieds. Evidemment un peu idéalisé, "sans friction", où les choses ont des avantages sans les inconvénients, où les autres ne sont plus des "comme vous", où on prend sans jamais rien donner, "meilleur" - paraît-il. Facile quand on est sûr de ne jamais aller vérifier. C'est la porte ouverte à tous les excès, avec un discours technologique à outrance, déconnecté du réel, mais ça ne prend pas. Dans la réalité, internet n'est qu'une évolution de nos moyens de communication. Bon nombre d'applications s'apparentent ni plus ni moins à un télégraphe évolué (Morse, 1830): modem, email… Les mots du télégraphe traversaient les océans entre Londres, New-York, Paris et Tokyo, bien avant l'invention du téléphone. Bien sûr, la commutation téléphonique a fait quelques progrès: jusqu'à l'hypertexte cliquable sous les doigts, les URL en langage presqu'humain, bientôt accessibles y compris par les systèmes d'écriture non alphabétiques… Mais notre vrai temps réel, c'est celui des messages au fond de nos poches et de ceux qui se perdent, pas le temps zéro des télécommunications. La segmentation et la redondance des messages, une trouvaille d'internet? Au 19e siècle, quand Reuters envoyait ses nouvelles par pigeon voyageur, il en baguait déjà plusieurs. Nos pages perso? Ce sont des aquariums avec un répondeur, une radio et trois photos plongés dedans. Tout ce joyeux "bazar" est dans nos vies réelles, pas dans le "cyberespace".»
= Société de l'information
# Un concept vide de sens
Pour Gérard Jean-François, directeur du centre de ressources informatiques de l'Université de Caen, «il n'y a pas de société de l'information particulière. De tout temps, elle a toujours existé. Ce qu'il faut noter, c'est son évolution continue. Gutenberg l'a fait évoluer, de même internet.»
Selon Philippe Loubière, traducteur littéraire et dramatique, «il n'y a pas, je crois, de société de l'information. Internet, la télévision, la radio ne sont pas des moyens d'information, ce sont des moyens de communication. L'information participe d'une certaine forme de savoir sur le monde, et les moyens de communication de masse ne la transmettent pratiquement pas. Ils l'évoquent dans le meilleur des cas (ceux des journalistes de terrain par exemple), et la déforment voire la truquent dans tous les autres. Et (pour autant qu'il le veuille!) le pouvoir politique n'est hélas plus aujourd'hui assez "le" pouvoir pour pouvoir faire respecter l'information et la liberté. L'information, comme toute forme de savoir, est le résultat d'une implication personnelle et d'un effort de celui qui cherche à s'informer. C'était vrai au Moyen-Âge, c'est encore vrai aujourd'hui. La seule différence, c'est qu'aujourd'hui il y a davantage de leurres en travers du chemin de celui qui cherche.»
Pour Pierre Magnenat, responsable de la cellule «gestion et prospective» du centre informatique de l'Université de Lausanne, il s'agit d'«un mot à la mode, qui ne veut rien dire. Une société est par essence communicative, et donc caractérisée par des échanges d'informations. Les seules choses qui ont changé, c'est la quantité et la vitesse de ces échanges.»
Patrick Rebollar, professeur de littérature française et modérateur de la liste de diffusion LITOR (littérature et ordinateur), définit la société de l'information comme «une grande mise en scène (mondialisée) qui fait prendre les vessies pour des lanternes. En l'occurrence, les gouvernants de toutes sortes, notamment sous le nom de "marché", diffusent de plus en plus de prescriptions contraignantes (notamment commerciales, politiques et morales) qu'ils réussissent, un peu grâce aux merveilles technologiques, à faire passer pour des libertés. Notons que "cybernétique" et "gouvernement" ont la même racine grecque…»
# Auteurs
Nicolas Ancion, écrivain et responsable éditorial de Luc Pire électronique, relate: «Pour moi, la société de l'information est l'arrivée d'un nouveau clivage sur la planète: distinction entre ceux qui ont accès au savoir, le comprennent et l'utilisent, et ceux qui n'y ont pas accès pour de nombreuses raisons. Il ne s'agit cependant pas d'une nouvelle forme de société du tout car le pouvoir de l'information n'est lié à aucun pouvoir réel (financier, territorial, etc.). Connaître la vérité ne nourrit personne. Par contre, l'argent permet de très facilement propager des rumeurs ou des mensonges. La société de l'information est simplement une version avancée (plus rapide, plus dure, plus impitoyable) de la société industrielle. Il y a ceux qui possèdent et jouissent, ceux qui subissent et ceux dont on ne parle jamais: ceux qui comprennent et ne peuvent pas changer les choses. Au 19e siècle, certains artistes et certains intellectuels se retrouvaient dans cette position inconfortable. Grâce à la société de l'information, beaucoup de gens ont rejoint cette catégorie assise entre deux chaises. Qui possède des biens matériels et a peur de les perdre mais considère pourtant que les choses ne vont pas dans la bonne direction. Mon opinion personnelle, par rapport à tout ça, c'est que ce n'est pas l'information qui sauve. C'est la volonté. Pour changer le monde, commençons par lever notre cul de notre chaise et retrousser nos manches.»
Pour Alex Andrachmes, producteur audiovisuel, écrivain et explorateur d'hypertexte, la société de l'information est «dans l'idéal, un lieu d'échange, le fameuse agora du village global. Mais l'idéal… Tant que le débat existe entre les fous du net et les VRP (voyageurs représentants de commerce, NDLR) de la VPC (vente par correspondance, NDLR), il y a de l'espoir. Le jour où les grands portails se refermeront sur la liberté d'échanger des infos en ligne, ça risque plutôt d'être la société de la désinformation. Ici aussi, des confusions sont soigneusement entretenues. Quelle information, celles du 20 heures à relayer telles quelles sur le net? Celles contenues sur ces fabuleux CD, CD-ROM, DVD chez vous dans les 24 h chrono? Ou toutes les connaissances contenues dans les milliards de pages non répertoriées par les principaux moteurs de recherche. Ceux qui ont de plus en plus tendance à mettre en avant les sites les plus visités, qui le sont dès lors de plus en plus. Là, on ne parle même plus de désinformation, de complot de puissances occultes (financières, politiques ou autres…), mais de surinformation, donc de lassitude, de non-information, et finalement d'uniformisation de la pensée. Sans avoir de définition précise, je vois qu'une société de l'information qui serait figée atteindrait le contraire de sa définition de base. Du mouvement donc…»
Lucie de Boutiny, romancière multimédia, écrit: «Je préférerais parler de "communautés de l'information"… Nous sommes plutôt dans une société de la communication et de la commutation. Il est très discutable de savoir si nos discussions sont de meilleure qualité et si nous serions plus savants… Etre informé n'est pas être cultivé.»
Pour Jean-Pierre Cloutier, auteur des Chroniques de Cybérie, chronique hebdomadaire des actualités de l'internet, la société de l'information est «une société où l'unité de valeur réelle est l'information produite, transformée, échangée. Elle correspond au "centre" du cyberespace. Malheureusement, le concept a tellement été galvaudé, banalisé, on l'a servi à toutes les sauces politiciennes pour tenter d'évoquer ce qu'on ne pouvait imaginer dans le détail, ou concevoir dans l'ensemble, de sorte que l'expression a perdu de son sens.»
Pour Luc Dall'Armellina, co-auteur et webmestre d'oVosite, un espace d'écriture hypermédia, la société de l'information est «la nôtre, je pense? L'américano-nord-européenne. A la Bourse, les annonces ont des effets mesurables en millions de dollars ou d'euros et déclenchent des impacts économiques et humains parfois très violents: rachats, ventes, hausses et baisses des valeurs, licenciements. C'est une société où la valeur absolue est l'information et son contrôle, et la valeur relative l'humain.»
Jean-Paul, webmestre du site hypermédia cotres.net, définit la société de l'information en trois mots: «Plus, plus vite. Mais les données ne sont pas l'information. Il faut les liens, c'est-à-dire le temps. Plus d'évènements, plus d'écrans pour les couvrir. Plus vite: l'évènement du jour est liquide. Effacé, recouvert par la vaguelette du lendemain, la vague du jour d'après, la houle de la semaine, le tsunami du mois. Cycles aussi "naturels" que les marées estivales du Loch Ness. Pas "effacé", d'ailleurs, l'évènement d'hier (qui n'est pas "tous les évènements d'hier"): déja archivé, dans des bases de données qui donnent l'illusion d'être exhaustives, facilement accessibles et momentanément gratuites. Mais les données ne donnent rien par elles- même. S'informer, c'est lier entre elles des données, éliminer celles qui ne sont pas pertinentes (quitte à revenir sur ces choix plus tard), se trouver ainsi obligé de chercher d'autres données qui corroborent ou infirment les précédentes… L'information naît du temps passé à tisser les liens. Or le temps nous est mesuré, au quartz près. Productique ou temps libre, nous passons de plus en plus de temps à raccrocher au nez de spammeurs qui nous interrompent pour nous revendre nos désirs (dont nous informons les bases de données qui les leur vendent). Ce qui est intéressant dans ce bonneteau est que les infos que nous fournissons sur nous-mêmes, nous les truquons suffisamment pour que les commerciaux n'arrivent pas à en tirer les lois du succès: Survivor II est un bide, après le succès de la version I. De cette incertitude viennent les trous dans le filet qui laissent parvenir jusqu'à nous certaines infos. Bref la "société de l'information", c'est le jeu des regards dans le tableau de de La Tour "La diseuse de bonne aventure". Le jeune homme qui se fait dépouiller en est conscient, et complice. Il a visiblement les moyens de s'offrir les flatteries des trois jolies filles tout en exigeant de la vieille Diseuse qu'elle lui rende l'une de ces piécettes dont il a pris la précaution de gonfler ostensiblement la bourse qu'on lui coupe.»
Pour Anne-Bénédicte Joly, écrivain auto-éditant ses livres, la société de l'information permet «l'accès au plus grand nombre de la plus grande quantité d'information possible tout en garantissant la partialité de l'information et en fournissant les clefs de compréhension nécessaires à sa bonne utilisation.»
Tim McKenna, écrivain et philosophe, écrit: «Je considère la société de l'information comme la forme tangible de la conscience collective de Jung. L'information réside essentiellement dans notre subconscient mais, grâce à l'existence de navigateurs, l'information est désormais plus facile à récupérer. Cette information favorise une meilleure connaissance de nous-mêmes en tant qu'individus et en tant qu'êtres humains.»
Selon Xavier Malbreil, auteur multimédia et modérateur de la liste e- critures, la société de l'information est «la circulation de l'information en temps réel. La connaissance immédiate. L'oubli immédiat. L'espace saturé d'ondes nous entourant, et nous, corps humains, devenant peu à peu un simple creux laissé par les ondes, une simple interconnexion. Corps humains devenant instants de l'information.»
Pour Murray Suid, auteur de livres pédagogiques et de logiciels éducatifs, il s'agit d'«une société dans laquelle les idées et le savoir sont plus importants que les objets.»
# Documentalistes
Selon Emmanuel Barthe, documentaliste juridique et modérateur de la liste de discussion Juriconnexion, «il s'agit nettement moins d'une "société" de l'information que d'une économie de l'information. J'espère que la société, elle, ne sera jamais dominée par l'information, mais restera cimentée par des liens entre les hommes de toute nature, qu'ils communiquent bien ou mal, peu ou beaucoup.»
Pour Bakayoko Bourahima, documentaliste à l'ENSEA (Ecole nationale supérieure de statistique et d'économie appliquée) d'Abidjan, la société de l'information est «la société de l'informatique et de l'internet.»
Pour Peter Raggett, sous-directeur de la Bibliothèque centrale de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), «la société de l'information est cette société dont le produit le plus précieux est l'information. Jusqu'au 20e siècle, ce sont les produits manufacturiers qui ont été les plus considérés. Ils ont ensuite été remplacés par l'information. En fait, on parle maintenant davantage d'une société du savoir, dans laquelle, du point de vue économique, le produit le plus prisé est le savoir acquis par chacun.»
# Editeurs
Pour Marie-Aude Bourson, créatrice de Gloupsy, site littéraire destiné aux nouveaux auteurs, il s'agit d'«une société où l'information circule très vite (trop peut-être), et où chaque acteur se doit de rester toujours informé s'il ne veut pas s'exclure. L'information elle-même devient une véritable valeur monnayable.»
Pour Pierre-Noël Favennec, expert à la direction scientifique de France Télécom R&D et directeur de collection, il s'agit d'«une société dans laquelle tout membre de cette société a accès immédiatement à toutes les informations souhaitées.»
Olivier Gainon, créateur de CyLibris et pionnier de l'édition littéraire en ligne, relate: «Ce que nous vivons aujourd'hui, c'est la mise en réseau de notre société, au sens où, à terme, beaucoup des objets quotidiens seront connectés au Réseau (avec un grand R, qui sera lui-même composé de dizaines de réseaux différents). Bref, c'est une nouvelle manière de vivre et, à terme, certainement une nouvelle société. S'agit-il d'une société de "l'information"? Je n'en suis pas certain. Faut-il que nous définissions collectivement ce que nous voulons dans cette société? Cela me semble urgent, et c'est un débat qui concerne tout le monde, pas uniquement les "connectés". Bref, sur quelles valeurs de société fonder notre action future? Voilà un vrai débat. (…) "La Toile" de Jean-Pierre Balpe me semble aujourd'hui la meilleure illustration de ce débat. La société qu'il décrit au travers de ce roman est à mon sens la plus probable à court terme (l'action se passe en 2015). Est-ce cela que nous voulons? Est-ce ce type d'organisation? Peut-être, mais mon souci, c'est que ce choix soit conscient et non subi.»
Selon Jacky Minier, créateur de Diamedit, site de promotion d'inédits artistiques et littéraires, «la société de l'information amène un recadrage des hiérarchies dans les rapports qui s'établissent entre les gens, de manière beaucoup plus naturelle, à partir des discussions en forums notamment. Dans la vie réelle, on est souvent influencé, voire impressionné, par les titres ou la largeur du bureau d'un interlocuteur "installé" dans le système. Sur le net, seuls comptent le sens contenu dans le propos et la manière de l'exprimer. On distingue très vite les véritables intelligences raffinées des clowns ou autres mythomanes. Une forme de pédagogie conviviale, non intentionnelle et surtout non magistrale, s'en dégage généralement qui profite au visiteur lambda, lequel parfois apporte aussi sa propre expérience. Tout ça laisse augurer d'une créativité multiforme, dans un bouillonnement commun à des milliers de cerveaux reliés fonctionnant à la manière d'une fourmilière. C'est non seulement un véritable moyen d'échange du savoir, mais de surcroît un moyen de l'augmenter en quantité, de l'approfondir, de l'intégrer entre différentes disciplines. Le net va rendre les gens plus intelligents en favorisant leur plus grande convivialité, en cassant les départements et domaines réservés de certains mandarins. Mais il est clair qu'il faudra aussi faire attention aux dérives que cette liberté implique.»
Pour Nicolas Pewny, fondateur des éditions du Choucas, il s'agit d'«une société qui pourrait apporter beaucoup, si l'on empêche qu'elle ne rime trop avec "consommation" et tout ce qui accompagne ce mot. Mais il est déjà trop tard peut-être…»
François Vadrot, PDG de la société de cyberpresse FTPress, la définit comme «une société dont l'information est le moteur, dans tous les sens du terme.»
# Linguistes
Pour Alain Clavet, analyste de politiques au Commissariat aux langues officielles du Canada, la société de l'information est «le constat que la valeur ajoutée centrale (en référence à une notion économique, celle de la valeur ajoutée) devient de plus en plus l'intelligence de l'information. Ainsi, dans une société de l'information, la connaissance devient la plus-value recherchée.»
Selon Eduard Hovy, directeur du Natural Language Group de l'Université de Californie du Sud, «une société de l'information est une société dans laquelle la majorité des gens a conscience de l'importance de cette information en tant que produit de base, et y attache donc tout naturellement du prix. Au cours de l'histoire, il s'est toujours trouvé des gens qui ont compris combien cette information était importante, afin de servir leurs propres intérêts. Mais quand la société, dans sa majorité, commence à travailler avec et sur l'information en tant que telle, cette société peut être dénommée société de l'information. Ceci peut sembler une définition tournant un peu en rond ou vide de sens, mais je vous parie que, pour chaque société, les anthropologues sont capables de déterminer quel est le pourcentage de la société se consacrant au traitement de l'information comme produit de base. Dans les sociétés anciennes, ils trouveront uniquement des professeurs, des conseillers de dirigeants et des sages. Dans les sociétés suivantes, ils trouveront des bibliothécaires, des experts à la retraite exerçant une activité de consultant, etc. Les différentes étapes de la communication de l'information - d'abord verbale, puis écrite, puis imprimée, puis électronique - ont chaque fois élargi (dans le temps et dans l'espace) le champ de propagation de cette information, en rendant de ce fait de moins en moins nécessaire le réapprentissage et la répétition de certaines tâches difficiles. Dans une société de l'information très évoluée, je suppose, il devrait être possible de formuler votre objectif, et les services d'information (à la fois les agents du cyberespace et les experts humains) oeuvreraient ensemble pour vous donner les moyens de réaliser cet objectif, ou bien se chargeraient de le réaliser pour vous, et réduiraient le plus possible votre charge de travail en la limitant à un travail vraiment nouveau ou à un travail nécessitant vraiment d'être refait à partir de documents rassemblés pour vous dans cette intention.»
Pour Steven Krauwer, coordinateur d'ELSNET (European Network of Excellence in Human Language Technologies), «la société de l'information est une société dans laquelle: (a) l'essentiel du savoir et de l'information n'est plus stocké dans des cerveaux ou des livres mais sur des médias électroniques; (b) les dépôts d'information sont distribués et interconnectés au moyen d'une infrastructure spécifique, et accessibles de partout; (c) les processus sociaux sont devenus tellement dépendants de cette information et de son infrastructure que les citoyens non connectés au système d'information ne peuvent pleinement participer au fonctionnement de la société.»
Selon Zina Tucsnak, ingénieur d'études en informatique au laboratoire ATILF (Analyse et traitements informatiques du lexique français), «la société de l'information peut être définie comme un milieu dans lequel se développent la culture et la civilisation par l'intermédiaire de l'informatique, qui restera la base et la théorie de cette société.»
# Professeurs
Pour Emilie Devriendt, élève professeur à l'Ecole normale supérieure de Paris, «le syntagme "société de l'information" est plus une formule (journalistique, politique) à la mode depuis plusieurs années, qu'une véritable notion. Cette formule tend communément je crois, à désigner une nouvelle "ère" socio-économique, post-industrielle, qui transformerait les relations sociales du fait de la diffusion généralisée des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC). Personnellement, je n'adhère pas à cette vision des choses. Si la diffusion croissante des NTIC est indéniable et constitue un phénomène socio-économique propre à l'époque contemporaine, je ne crois pas qu'il faille y voir la marque de l'avènement d'une nouvelle société "de l'information". La formule "société de l'information" est construite sur le modèle terminologique (socio-économique) de la "société industrielle". Mais le parallèle est trompeur: "société de l'information" met l'accent sur un contenu, alors que "société industrielle" désigne l'infrastructure économique de cette société. L'information en tant que produit (industriel ou service) apparaît peut-être plus complexe que, par exemple, les produits alimentaires, mais cette complexité ne suffit pas à définir l'avènement dont il est question. D'autant plus que l'emploi inconditionnel de la formule a contribué à faire de l'information un terme passe-partout, très éloigné même de sa théorisation mathématique (Shannon), de sa signification informatique initiale. Elle traduit uniquement une idéologie du progrès électronique mise en place dans les années 1950 et véhiculée ensuite par nos gouvernements et la plupart de nos journalistes, qui définissent fallacieusement le développement des NTIC comme un "nécessaire" vecteur de progrès social. Quelques analystes (sociologues et historiens des techniques comme Mattelart, Lacroix, Guichard, Wolton) ont très bien montré cela.»
Pour Henk Slettenhaar, professeur en technologies de la communication à la Webster University de Genève, «la société de l'information est l'ensemble des personnes utilisant quotidiennement le cyberespace de manière intensive et qui n'envisageraient pas de vivre sans cela, à savoir les nantis, ceux qui sont du bon côté de la fracture numérique.»
Pour Gaëlle Lacaze, ethnologue et professeur d'écrit électronique dans un institut universitaire professionnel, il s'agit d'«une société où l'information est reçue et digérée, sans être étouffée par la profusion.»
Russon Wooldridge, professeur au département d'études françaises de l'Université de Toronto, écrit: «Si on veut parler de "société" il ne peut pas être question d'une opposition "haves" vs. "have-nots" (munis vs. démunis), sauf dans la mesure où l'accès à l'information est plus ou moins libre ou limité d'un point de vue technologique ou économique, voire politique. Par exemple, l'accès à l'information en ligne est plus libre au Canada qu'en France, plus libre en France qu'en Algérie, etc. Internet est potentiellement un moyen pour que chacun puisse s'approprier son propre contrôle de l'information, qui n'est plus diffusée par les seuls canaux dirigistes, comme l'Edition ou l'Université, entre autres.»
# Visionnaires
Olivier Pujol, PDG de Cytale et promoteur de sa tablette de lecture, la définit comme «une société où l'accès à l'information, l'information elle-même et la capacité à bien utiliser l'information sont des biens plus précieux que les biens matériels. Il faut noter que l'information a toujours été un avantage professionnel considérable. Il fut un temps où un avantage concurrentiel pouvait exister sur un territoire limité, et être protégé pour un temps long, par le secret, ou l'ignorance des autres. Les voyages, la mondialisation des échanges, la performance de la logistique ont énormément affaibli la notion de protection "géographique" d'un avantage concurrentiel. La société de l'information est une société où la protection de l'information est presque impossible, et où son usage devient donc la valeur essentielle.»
Laissons le mot de la fin à Pierre Schweitzer, architecte designer et concepteur du projet @folio, un support numérique de lecture nomade: «J'aime bien l'idée que l'information, ce n'est que la forme des messages. La circulation des messages est facilitée, techniquement, et elle s'intensifie. Et désormais, le monde évolue avec ça.»
CHRONOLOGIE
[Chaque ligne débute par l'année ou bien l'année/mois. Par exemple, 1971/07 signifie juillet 1971.]
1968: Le code ASCII est le premier système d'encodage informatique. 1971/07: Le Projet Gutenberg est la première bibliothèque numérique. 1974: L'internet fait ses débuts. 1977: L'UNIMARC est créé en tant que format bibliographique commun. 1983: L'internet prend son envol. 1984: Le copyleft est institué pour les logiciels. 1990: Le web fait ses débuts. 1991/01: L'Unicode est un système d'encodage pour toutes les langues. 1993/01: L'Online Books Page est le premier répertoire d'ebooks gratuits. 1993/06: Adobe lance le format PDF et l'Acrobat Reader. 1993/11: Mosaic est le premier logiciel de navigation sur le web. 1994: Le premier site de bibliothèque est mis en ligne. 1994: Les éditeurs utilisent le web comme outil de marketing. 1995/07: Amazon.com est la première grande librairie en ligne. 1995: La grande presse se met en ligne. 1996/03: Le Palm Pilot est le premier assistant personnel (PDA). 1996/04: L'Internet Archive est créée pour archiver le web. 1996/07: CyLibris est le pionnier francophone de l'édition électronique. 1996/10: Le projet @folio travaille sur un baladeur de textes «ouvert». 1996: Des professeurs se penchent sur de nouvelles méthodes d'enseignement. 1997/01: La convergence multimédia est le sujet d'un colloque. 1997/04: E Ink développe une technologie d'encre électronique. 1997/10: Gallica est la section numérique de la Bibliothèque nationale de France. 1997: L'édition électronique commence à se généraliser. 1997: Le Logos Dictionary est mis en ligne gratuitement. 1998/05: Les éditions 00h00 vendent «uniquement» des livres numériques. 1999/09: Le format Open eBook (OeB) est un standard de livre numérique. 1999/12: WebEncyclo est la première encyclopédie francophone en accès libre. 1999/12: Britannica.com est première encyclopédie anglophone en accès libre. 1999: Les bibliothécaires numériques font carrière. 1999: Certains auteurs se mettent au numérique. 2000/01: Le Million Book Project veut proposer un million de livres sur le web. 2000/02: yourDictionary.com est un portail pour les langues. 2000/03: Mobipocket se consacre aux livres numériques pour assistant personnel. 2000/07: La moitié des usagers de l'internet est non anglophone. 2000/07: Stephen King auto-publie un roman en ligne. 2000/08: Microsoft lance le format LIT et le Microsoft Reader. 2000/09: Le Grand dictionnaire terminologique (GDT) est bilingue français-anglais. 2000/09: La librairie Numilog se consacre aux livres numériques. 2000/09: Le portail Handicapzéro démontre que l'internet est pour tous. 2000/10: Distributed Proofreaders numérise les livres du domaine public. 2000/10: La Public Library of Science lancera des revues en ligne gratuites. 2000/11: La version numérisée de la Bible de Gutenberg est disponible. 2001/01: Wikipédia est la première grande encyclopédie collaborative gratuite. 2001: Creative Commons rénove le droit d'auteur en l'adaptant au web. 2003/09: Les cours du MIT OpenCourseWare sont à la disposition de tous. 2004/01: Le Projet Gutenberg Europe sera multilingue. 2004/10: Google lance Google Print pour le rebaptiser ensuite Google Books. 2005/04: Amazon.com rachète la société Mobipocket. 2005/10: L'Open Content Alliance lance une bibliothèque numérique universelle. 2006/08: Le catalogue collectif WorldCat devient gratuit sur le web. 2006/10: Microsoft lance Live Search Books mais l'abandonne ensuite. 2006/10: Sony lance sa tablette de lecture Sony Reader. 2007/03: Citizendium lance une encyclopédie en ligne collaborative «fiable». 2007/03: IATE (Inter-Active Terminology for Europe) est une base terminologique européenne. 2007/05: L'Encyclopedia of Life répertoriera toutes les espèces végétales et animales. 2007/11: Amazon.com lance sa tablette de lecture Kindle. 2008/05: Numilog devient une filiale d'Hachette Livre. 2008/10: Google Books propose un accord aux associations d'auteurs et d'éditeurs. 2008/11: Europeana est la bibliothèque numérique européenne. 2009/02: Amazon.com lance le Kindle 2.
REMERCIEMENTS
Ce livre doit beaucoup à toutes les personnes ayant accepté de répondre
à mes questions, dont certaines pendant plusieurs années. Certains
entretiens ont été publiés tels quels par le NEF (Net des études
françaises), Université de Toronto. Ils sont disponibles en ligne
<www.etudes-francaises.net/entretiens/index.html>. D'autres entretiens
ont été directement inclus dans ce livre, avec des textes de Nicolas
Ancion, Alex Andrachmes, Guy Antoine, Silvaine Arabo, Arlette Attali,
Marc Autret, Isabelle Aveline, Jean-Pierre Balpe, Emmanuel Barthe,
Robert Beard, Michael Behrens, Michel Benoît, Guy Bertrand, Olivier
Bogros, Christian Boitet, Bernard Boudic, Bakayoko Bourahima, Marie-
Aude Bourson, Lucie de Boutiny, Anne-Cécile Brandenbourger, Alain Bron,
Patrice Cailleaud, Tyler Chambers, Pascal Chartier, Richard Chotin,
Alain Clavet, Jean-Pierre Cloutier, Jacques Coubard, Luc
Dall'Armellina, Kushal Dave, Cynthia Delisle, Emilie Devriendt, Bruno
Didier, Catherine Domain, Helen Dry, Bill Dunlap, Pierre-Noël Favennec,
Gérard Fourestier, Pierre François Gagnon, Olivier Gainon, Jacques
Gauchey, Raymond Godefroy, Muriel Goiran, Marcel Grangier, Barbara
Grimes, Michael Hart, Roberto Hernández Montoya, Randy Hobler, Eduard
Hovy, Christiane Jadelot, Gérard Jean-François, Jean-Paul, Anne-
Bénédicte Joly, Brian King, Geoffrey Kingscott, Steven Krauwer, Gaëlle
Lacaze, Michel Landaret, Hélène Larroche, Pierre Le Loarer, Claire Le
Parco, Annie Le Saux, Fabrice Lhomme, Philippe Loubière, Pierre
Magnenat, Xavier Malbreil, Alain Marchiset, Maria Victoria Marinetti,
Michael Martin, Tim McKenna, Emmanuel Ménard, Yoshi Mikami, Jacky
Minier, Jean-Philippe Mouton, John Mark Ockerbloom, Caoimhín Ó
Donnaíle, Jacques Pataillot, Alain Patez, Nicolas Pewny, Marie-Joseph
Pierre, Hervé Ponsot, Olivier Pujol, Anissa Rachef, Peter Raggett,
Patrick Rebollar, Philippe Renaut, Jean-Baptiste Rey, Philippe Rivière,
Blaise Rosnay, Bruno de Sa Moreira, Pierre Schweitzer, Henk
Slettenhaar, Murray Suid, June Thompson, Zina Tucsnak, François Vadrot,
Christian Vandendorpe, Robert Ware, Russon Wooldridge et Denis Zwirn.
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End of Project Gutenberg's Une courte histoire de l'eBook, by Marie Lebert