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Journal d'une Comédienne Française sous la Terreur Bolchevik, 1917-1918

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Mais quelle joie pour une Française!

Les nouvelles ont beau être laconiques, morcelées sans doute.

L’attitude même, le silence de ces journaux amis de l’Allemagne sont singulièrement significatifs.

Et puis il y a des choses qui sont dans l’air, qui se transmettent, se répandent à des milliers de lieues. Par la radio, à la mission française, on a saisi—bien qu’imparfaitement—des mots qui sont de l’espérance.

Ah! partir! partir! Quitter cette terre de malédiction, cette terre morte, pour retourner dans ma chère France, vivre les heures qui vont venir...

2 août.

C’en est fait... Nous ne pouvons plus partir.

Les Allemands ont avisé les Suédois de ne laisser monter sur leurs bateaux, sous aucun prétexte, des sujets alliés.

La Finlande est fermée, il n’y a pas moyen d’aller à Arkhangel, où vont se passer, paraît-il, de graves événements.

Je n’ai, quant à moi, pas perdu tout espoir, et, à la suite d’une conversation que je viens d’avoir avec le consul de Suède, j’ai entrevu un joint. Il n’y a plus à se faire d’illusions. Nous sommes en pays ennemi. Les ambassades de Vologda sont dirigées sur Arkhangel, où elles se sont embarquées.

A la mission, l’inquiétude règne sourde, imprécise. On s’attend à quelque chose qu’on ignore. Désormais, nous sommes séparés du monde civilisé. Trotsky a fait saisir les appareils de radio de la mission, pauvres appareils bien abîmés, bien imparfaits, mais qui, par intermittence, nous ralliaient un peu à la mère patrie.

Nous voici à l’entière merci des bolcheviks.

On dirait que les nouvelles de la guerre, qui tournent au désavantage des Allemands, les exaspèrent ces mauvais patriotes.

Leur jeu devient de plus en plus clair. Et je suis poursuivie par la phrase, que j’ai déjà notée, de Lounatcharsky, un des rares sincères, un des rares croyants de ce parti:

«Nous sommes la tête, une petite tête; mais vous verrez que la queue, qui sera formidable, entraînera tout le corps.»

Les événements marchent vite; depuis la mort de l’empereur, la terreur a recommencé. Les arrestations se comptent chaque jour par centaines et les bolcheviks restent au pouvoir, car il ne se trouve personne qui ose les chasser et qui soit capable de prendre leur place. Peuple vendu, sans aucune énergie, qui ne sait que parler, incapable d’aucun effort. Les Russes, vraiment, n’ont que ce qu’ils méritent.

4 août.

Depuis que nous sommes privés de la T. S. F., on connaît moins les nouvelles de la guerre. Mais il est facile de comprendre que tout continue à aller très bien.

Ce qui le prouve, ce n’est pas tant les communiqués allemands, où il faut savoir lire entre les lignes, que l’attitude de Lénine et de Trotsky, qui, assurent ceux qui les approchent, ne décolèrent pas.

6 août.

Une nouvelle me bouleverse. Un ami arrivé de Moscou m’annonce qu’on y arrête les Français et les Anglais. Lui-même me dit avoir échappé miraculeusement à la rafle.

Les gardes rouges se rendent de maison en maison, questionnant les portiers sur la nationalité de leurs locataires.

Je ne fais qu’un bond au téléphone pour prévenir un de mes amis, le capitaine Lelasseux, qui doit partir à 8 heures pour Moscou, qu’un de ses camarades est arrêté ainsi que plusieurs membres de la mission.

Malheureusement, il me faut être prudente et je lui dis seulement:

«—Ne partez pas!

«—Pourquoi?

«—Impossible de rien dire. Rendez-vous dans vingt minutes devant le Jardin d’Été.

«—Entendu.»

Lorsque j’arrive au rendez-vous, je ne le vois pas. Peut-être est-il déjà parti. Je cours à la mission.

Je n’oublierai jamais ce moment. Je les trouve tous réunis dans le grand salon et en train de lire. Je crie aussitôt, en entrant:

«—Lelasseux est parti pour Moscou?

«—Oui.

«—Mais on arrête la mission en ce moment là-bas. Courez à la gare et empêchez-le de prendre le train.»

Un silence... Je regarde le commandant Hezard, qui jette un coup d’œil sur son livre. Personne ne dit mot. Puis nous descendons en hâte. Ils prennent mon isvotchik. Le commandant me serre fortement la main, et me dit: «Merci.»

En partant, je remarque des individus louches qui rôdent autour de la mission. L’un d’eux me dévisage. Je passe mon chemin et rentre chez moi, car je crains le pillage qui me semble imminent et veux mettre tous mes objets précieux en lieu sûr.

7 août.

J’ai passé une mauvaise nuit. Perpétuellement aux écoutes, redoutant le fatal coup de sonnette annonçant la perquisition. Quel sort nous réserve-t-on? Car certainement les bolcheviks prendront ici contre nous les mêmes mesures. Je vais aux renseignements. Le consul de Suède et l’ambassadeur des Pays-Bas m’affirment que, sauf le général de Lavergne, tout le monde a été remis en liberté à Moscou. Je n’ose le croire. N’est-ce pas une feinte d’Ouritzki, le commissaire de la justice, pour endormir nos craintes et nous arrêter plus facilement après? Il y a une semaine, il a publié une ordonnance priant les étrangers de se faire inscrire au commissariat de leur quartier.

On vient d’en comprendre la raison à Moscou et je crains bien qu’elle ne se fasse aussi bientôt comprendre ici.

8 août.

Ce qu’on redoutait est arrivé. On a arrêté cette nuit plus de cinquante Français et on les a conduits à la Gorokovaïa, prison préventive où demeure Ouritzky.

On dit que parmi eux il y a des femmes. Il ne me reste qu’à demander protection à Lounatcharsky.

En arrivant au Palais d’Hiver, j’ai la chance de rencontrer Sténeberg, qui revient de Moscou.

Comme il a toujours été charmant pour moi, je prends l’air plus affolé que je ne le suis réellement; je fonds en larmes et lui raconte que la garde rouge est venue chez moi et que j’ai eu tout juste le temps de m’échapper par la cuisine. Je prêche le faux pour savoir le vrai, car je n’ai pas encore pu me rendre compte si la liberté des femmes était menacée ou non. Je le supplie de me donner un papier prouvant que je suis des théâtres de l’État et que je ne dois pas être inquiétée.

«—Ces arrestations, explique-t-il, ne pouvaient pas vous viser. Des Français ont très réellement comploté contre le gouvernement bolchevik. Il y a tout un plan avec l’aide des Tchéco-Slovaques et un gros effort en perspective vers la côte mourmane. Ceux qui sont en prison y étaient mêlés. D’autres seront sans doute arrêtés encore. Mais je doute que vous ayez conspiré. Aussi, dormez tranquille.»

Quant au certificat que je lui demande, Sténeberg s’empresse de me le donner.

Il me dit de le faire signer par Lounatcharsky, qui se trouve, en ce moment, au ministère de l’Instruction. Je m’y rends à pied, quoique la distance soit assez grande; je marche, je marche comme une automate.

Lounatcharsky n’est pas visible, me dit sa secrétaire, une femme d’une quarantaine d’années, d’un air rébarbatif, mais, dès qu’elle a pris connaissance du papier que je lui présente, elle se met aussitôt à sourire aimablement:

«—Vous êtes Française. Je vais voir le commissaire et lui faire signer votre requête. Il ne peut rien vous arriver, du moins je l’espère.»

Un quart d’heure se passe; elle revient, mais c’est avec un air de pitié qu’elle me répète les paroles décevantes de Lounatcharsky.

Il me conseille de mettre mon argent et mes bijoux en sûreté et de faire ma valise dans le cas où l’on m’arrêterait. Il signera ce que je lui demande pour moi et mes camarades femmes, mais ne peut garantir qu’on nous laissera en liberté.

Et, maternellement, sa secrétaire m’emmène déjeuner avec elle au restaurant qui est situé au rez-de-chaussée, pendant qu’on tape à la machine les pièces qui me seront nécessaires.

Pour cinq roubles on me sert une soupe immangeable, une boulette de viande aux pommes de terre passable, et un verre de café buvable. Une gentille dactylo tient à partager sa ration de pain avec moi, elle semble atterrée de ce que je lui raconte.

En remontant, je vois enfin Lounatcharsky qui téléphone à Ourizky à mon sujet, et, d’après ses réponses, je sens qu’il y a une forte résistance de l’autre côté de l’appareil. A la fin, pourtant, il obtient ce qu’il demande, et il me dit qu’il espère que je serai laissée en liberté; néanmoins il est préférable de ne pas rentrer chez moi en le quittant; j’en profite pour lui faire signer sa photo que j’avais prise avec moi. Il s’exécute aimablement et me conseille de ne pas coucher chez moi.

C’en est donc fait de ma tranquillité, de ma sûreté même, de cette vie que j’avais menée au milieu de tant de difficultés, mais avec une demeure au moins que je retrouvais, dans ma solitude, mais avec mes meubles!

Il me faut beaucoup de sang-froid, j’en aurai.

On assure que les Allemands vont arriver, en force imposante, avec des corps de troupes régulières.

Je m’arrête au parti que je crois le plus sage: celui d’aller demander asile à une ambassade neutre dont le ministre est un de mes amis.

Je suis reçue à bras ouverts et un lit m’est installé sur le canapé du grand salon de réception. Jamais je n’aurais pensé qu’il m’arriverait de dormir ainsi sous le portrait du roi d’Espagne.

9 août.

Les Allemands viendront-ils? Personne ne peut le dire. Beaucoup de gens assurent qu’ils font leurs malles. S’ils viennent, nous serons certainement tous faits prisonniers et envoyés dans un camp de concentration. D’un autre côté, on dit que les Alliés sont à Vologda et qu’ils ont déjà pris Nijni-Novgorod et Kazan.

Aucun journal ne paraît, excepté ceux du parti bolchevik.

L’angoisse étreint la ville entière!

Je sors avec prudence, évitant les gardes rouges qui se promènent, car je veux finir de transporter chez ma voisine du quatrième tous mes objets de valeur, craignant que les bolcheviks ne s’emparent de nos appartements et les réquisitionnent.

A l’ambassade d’Angleterre on ne connaît pas encore le résultat des pourparlers engagés avec Ouritzky pour obtenir la libération des prisonniers alliés.

L’attaché naval Cromie me raconte qu’on est venu pour l’arrêter, mais qu’il a pu se cacher chez des amis où il a élu domicile, entre le plafond et le toit.

Je retourne passer la nuit sous le portrait de Sa Majesté.

11 août.

Bravo! Les nouvelles sont meilleures. Les Allemands sont partis, ils ont quitté Moscou et Petrograd, leur situation n’étant plus tenable. Le remplaçant de Mirbach, Helfferich, recevait chaque jour des menaces de mort. Ils donnent une raison enfantine de leur départ. Ils tiennent à prouver aux Alliés qu’ils n’ont rien de commun avec les bolcheviks.

. . . . . . . . . . .

De France aussi les nouvelles sont meilleures, excellentes même.

Ah! tenir, tenir jusqu’au bout.

28 août.

De la nervosité toujours... De l’anxiété...

M. Scavenius, le ministre danois chargé des intérêts français, a obtenu l’élargissement des prisonniers alliés, mais les bolcheviks ont déclaré que, dès la prise de Vologda (le bruit avait couru que c’était chose faite, il était dénué de fondement), quatre cents Alliés seraient pris comme otages. Qu’adviendra-t-il alors d’eux? Ils sont capables de les fusiller. Quelle vie! On voudrait s’endormir et se réveiller hors de ce pays maudit. Et il est presque impossible d’en sortir. Les frontières finlandaises sont fermées depuis hier, même pour les courriers neutres. Seuls les Allemands, les Turcs et les Autrichiens sont autorisés à passer.

Sans être psychologue, on reconnaît toujours la manière boche. Du côté de la mer, les Allemands exercent aussi un sévère contrôle aux îles Aland. Naturellement, les Suédois n’acceptent pas les Alliés sur leurs bateaux. Impossible aussi de passer par Arkhangel ou par Vladivostock: la route est occupée par les troupes des soviets.

Le bruit court d’une triomphale victoire française. On parle de 280,000 prisonniers et on dit que Lille serait reprise. Je n’ose y croire.

19 août.

Rien. On ne sait rien de bon. Les cartes semblent vouloir s’embrouiller de plus en plus. Les Alliés ont fait un appel au peuple russe. Ils déclarent qu’ils sont leurs amis, et lui demandent de leur faire confiance. Ils se chargent de faire arriver des vivres et de remettre l’ordre. Les bolcheviks ont répondu en déclarant une guerre à mort aux Alliés.

Attendons!

21 août.

Je viens de l’ambassade, où j’ai trouvé le capitaine Lelasseux qui est revenu de Moscou spécialement pour organiser notre départ général.

La Finlande a accepté et on espère réussir à faire partir tous les Alliés. Le gouvernement nous réclame officiellement et, sur la demande des bolcheviks, permettra, en échange, aux Russes actuellement en France de regagner leur patrie. Néanmoins, on a encore arrêté cette nuit M. Verstraët, un des directeurs de la Banque russe-asiatique, ainsi que sa femme. On vit en se cachant et en se dissimulant chaque nuit dans une maison différente.

Cet après-midi, dans le tramway, un monsieur me salue très aimablement. Je le regarde d’un air étonné; il murmure tout bas un nom que je ne comprends pas; cependant il a l’air de fort bien me connaître. Nous parlons de choses vagues. Où donc l’ai-je vu? Impossible de m’en souvenir. Son visage m’est totalement inconnu.

Il s’approche davantage de moi et me dit: «J’ai rasé ma moustache et le costume de pékin me change.»

Je le regarde plus attentivement. Euréka! C’est le beau Tcherkess qui faisait la passion de toutes les femmes. Il est vraiment méconnaissable; ce costume ne lui va pas bien!

Il me raconte qu’il a été arrêté, mais qu’il a pu réussir à s’évader. Il part demain pour le Turkestan.

Un monsieur que je ne connais pas me tend la main en souriant pour m’aider à descendre du tramway. Vraiment, celui-là m’est tout à fait inconnu. J’ai beau chercher, je ne trouve pas. Il me dit: «Je suis le prince X....., j’ai laissé pousser ma barbe.» En effet, maintenant, je le reconnais. C’est bien le prince dont le visage se dissimule sous une barbe frisée et abondante. Cela devient un véritable jeu de devinettes.

22 août.

Chaque matin je me rends à la légation danoise, chargée de défendre les intérêts français. Aujourd’hui, il y a une grande effervescence dans le salon d’attente.

M. Verstraët a été remis en liberté. Il raconte son entrevue avec Ouritzky. Je lui laisse la parole:

«Ouritzky, dit-il, est maigre, petit, souffreteux. Il se balance en marchant. Il m’a reçu très aimablement et à la question que je lui posai: Pourquoi suis-je arrêté? Il me répondit en me montrant plusieurs dénonciations.

On m’accusait d’avoir envoyé des fonds pour soutenir les Tchèques.

«—Si cela est vrai, vous devez me fusiller! Si c’est faux, fusillez les délateurs!»

Il ne répondit rien à cette vibrante déclaration, mais me dit:

«—Nous sommes en guerre avec vous; expliquez-moi comment il se peut que la patrie de la révolution n’ait même pas voulu discuter avec nous et que c’est à Berlin, au pays de l’impérialisme, que flotte notre drapeau rouge. Quant à moi, je hais l’Allemagne, je serai le premier à marcher contre elle; j’ai désapprouvé la signature du traité de Brest-Litovsk et j’ai donné ma démission de membre de la commission chargée de signer le traité. Maintenant vous êtes libre.

«—Vous me laisserez quitter la Russie?

«—Oui; je serai simplement obligé de vous faire dresser procès-verbal pour les armes trouvées chez vous.»

Je m’empressai de lui montrer mes permis.

«—Dans ce cas, me dit-il en souriant, je ne puis même pas vous condamner à une amende.»

Ainsi s’est terminé mon entretien avec l’homme qui terrifie Petrograd. Je dois d’ailleurs ajouter que pendant notre conversation il signa plusieurs condamnations à mort.

Son visage prenait alors une expression de bestialité.»

M. Verstraët nous relate ces faits avec bonne humeur. Toute sa personne exprime la satisfaction d’être enfin libre.

«—Ce n’était plus tenable, nous dit-il; chaque nuit être obligé de coucher dans un autre domicile, en un mot, être condamné à vivre comme un voleur. J’ai préféré en finir et, dès que j’ai appris qu’ils venaient m’arrêter, au lieu de me cacher, je suis immédiatement rentré à mon domicile.»

23 août.

Chaque jour on peut enregistrer un nouveau fait déconcertant.

Ce matin, les gardes rouges escortaient une petite troupe de prisonniers qu’on transférait de la prison de la Gorokovaïa dans celle de Vaisliesky-Ostrow, lorsqu’en chemin deux détenus réussirent à s’échapper. Dès que les gardes rouges s’en aperçurent, ils arrêtèrent tout simplement deux inoffensifs passants pour remplacer les deux fugitifs, afin de n’encourir aucune punition pour manque de surveillance.

Un autre fait tout aussi extraordinaire m’a été raconté par la personne qui en fut victime. C’est une dame de mes amies qui vient de sortir de prison où elle a été maintenue pendant une semaine.

En rentrant chez elle, elle apprend de son concierge, qui la regardait avec une vive stupeur, qu’on la croyait morte, fusillée; que son acte de décès avait été établi et que tous ses meubles et vêtements avaient été vendus, naturellement au profit des bolcheviks. La pauvre femme ne put rien faire ni rien réclamer. Elle devra même se considérer heureuse si les bolcheviks consentent à la remettre sur la liste des vivants!

24 août.

On part! On part! Alleluia! La Finlande nous permet de passer et les Alliés acceptent, assure-t-on, les conditions des bolcheviks, qui font tout à fait leur jeu.

Renvoi des troupes russes qui se trouvent encore en France ainsi que de tous les bolcheviks qui sont soit en France, soit en Angleterre, retour de Litvinoff, le ministre bolchevik, qui n’a pas été reconnu par les Anglais.

Tous les visages expriment la joie. Je rencontre, en sortant de la légation danoise chargée de nos intérêts, le chef de la mission, le commandant Archene. Il est rayonnant. Il revient d’une tournée chez les antiquaires et serre précieusement dans ses bras des icônes qu’il vient d’acquérir en vue de son prochain départ.

Je rentre chez moi et me mets à danser pour extérioriser ma joie. Je suis toute seule dans le grand salon de l’ambassade. Le roi, dans son grand cadre, semble me regarder d’un air très étonné, mais il doit me comprendre et reconnaître en moi une latine, une femme de sa race qui sait exprimer ce qu’elle ressent.

25 août.

Ce matin, je suis réveillée par la musique militaire. Que se passe-t-il? Je me précipite au balcon et je vois défiler vingt musiciens suivis de vingt soldats. C’est aujourd’hui qu’on a appelé sous les armes tous les hommes de dix-huit à quarante ans. Je me demande comment les Russes vont prendre cette plaisanterie.

Tant que les bolcheviks leur ont dit: «Vous ne vous battrez plus, vous serez riches et heureux», le peuple a compris. Aujourd’hui, ces mêmes hommes leur disent: «Battez-vous contre l’impérialisme, mais nous sommes désolés, car nous ne pouvons pas vous donner du pain.» Je doute fort que le peuple comprenne et accepte surtout. C’est si facile de ne pas agir, de se laisser vivre et mourir de faim.

Vers midi a eu lieu le défilé général. Il est parti du Champ-de-Mars, musique en tête. On y voyait des gens élégants (bourgeois), des ouvriers. Toutes les classes s’y trouvaient représentées. Il y avait même, caracolant sur son cheval, un officier. Les gardes rouges, la casquette en arrière, semblaient vouloir conduire la troupe à une imaginaire victoire. Dame, c’est que l’appât est tentant! Le premier jour, ils recevront une paire de bottines pour 24 roubles (n’oublions pas que celles-ci valent au moins 640 roubles à l’heure actuelle). Les jours suivants, ils recevront une livre de pain. Vraiment, cela vaut bien la peine d’avoir l’air patriote, à la manière des bolcheviks.

26 août.

Hélas! nous ne partons pas aussi vite que nous l’espérions! Les bolcheviks émettent des prétentions exorbitantes, qui sont inacceptables.

Chaque jour surgit quelque complication nouvelle, juste au moment où nous croyions pouvoir espérer.

On dit aussi qu’en cas de départ il ne nous sera permis d’emporter qu’une seule robe, une paire de chaussures et très peu de linge. Il nous faudra laisser toutes nos affaires. C’est dur. Mais on s’y résoudra pour partir. Cela devient pour tous une véritable hantise, d’autant plus que nous savons la tournure nouvelle que prennent les événements en France. Les journaux d’ici, tous à la solde des Boches, ont beau faire la conspiration du silence, nous savons, nous sommes sûrs que les Alliés, maintenant, ont la victoire, qu’elle marche à grands pas.

Tout le monde, d’ailleurs, veut quitter Petrograd, du moins tous les gens qui peuvent réfléchir et qui sentent tout ce qu’il y a de lamentable dans cette réorganisation sociale qui repose sur tant d’utopies. La Russie va à un désastre. Les vrais Russes, ceux qui ont encore dans le cœur le sentiment de la patrie, veulent partir aussi, partir à tout prix, dans la direction de l’Ukraine, qu’on dit être un pays calme.

Les gens ne savent quel subterfuge inventer. Un banquier, que je connais, s’est camouflé en comédien et part avec une troupe qui va donner des représentations à Odessa.

En dehors de l’Ukraine, je crois qu’on se bat partout en Russie. Dans tous les journaux bolcheviks, qui sont seuls à paraître avec les journaux allemands, on lit que les troupes des soviets remportent des victoires.

Mais un rédacteur de la Gazette rouge (Crasnaïa Gazette), à qui l’on demandait des renseignements à ce sujet, n’a pas craint de dire à ce sujet:

«Lisez le journal à l’envers, vous connaîtrez la vérité.»

Tout bas on espère que les Tchèques arriveront à Moscou.

30 août.

Quel événement sensationnel, inattendu!

Ouritzky, le tyran de Petrograd, l’âme damnée du bolchevisme, a été assassiné.

Un soupir de satisfaction s’échappe—on peut le dire—de toutes les poitrines.

Il semble que l’air est plus léger. Ouritzky a été tué hier d’un coup de revolver à bout portant par un étudiant nommé Kanegiesser. C’était un juif appartenant à un autre parti.

Malheureusement on a pu l’arrêter. Quel dommage!

Il faut être brave pour oser, à pareille heure, faire le geste. En faisant disparaître un individu, cet homme en a peut-être sauvé des milliers.

Ouritzky, c’était le Marat de la révolution russe.

J’ai, sans m’en douter, assisté à la chasse et à la prise du meurtrier.

Vers midi, ayant entendu tirer, je me suis mise à la fenêtre. D’abord je ne vis rien qu’un barrage de gardes rouges placés à chaque issue de la rue et qui demandaient aux passants leurs passeports et interdisaient aux voitures l’accès de la chaussée. Intriguée, je demeurai un moment à mon balcon, et vers midi un quart je vis passer une voiture remplie de soldats et, au milieu d’eux, un homme étendu. Je crus que c’était un blessé, mais je dus faire erreur. C’était certainement Kanegiesser qu’on emmenait. Ce n’est que plus tard, au consulat du Danemark, que j’appris la vérité; mais on doutait encore, cela semblait trop beau. Pourtant, à deux heures, le bruit était confirmé.

Voici comment Kanegiesser raconte son crime, ou plutôt son acte de justice:

«—Je connaissais Ouritzky de vue. Je résolus de l’attendre au ministère des affaires étrangères et de le tuer, espérant ainsi arrêter les exécutions que je savais être imminentes.

«Ce que j’avais décidé s’accomplit exactement. Quand je vis que Ouritzky était mortellement atteint, je pris la motocyclette qui m’attendait à la porte et je m’enfuis par la Moïka, puis la Mochkoff Péréoulok. Je descendis de ma machine devant le numéro 17 de la Millionaya, je m’engouffrai alors dans la cour, puis dans un escalier de service où j’aperçus, par hasard, la porte ouverte d’un appartement. J’y entrai, et ayant trouvé un pardessus accroché dans l’antichambre je le pris et sortis par l’autre porte, en prenant la précaution de descendre par l’ascenseur. Malheureusement, en arrivant en bas je me heurtai à deux hommes et à une femme qui tentèrent de m’arrêter. Je me mis alors à tirer au hasard dans le tas, mais je fus vite désarmé par des soldats accourus au bruit des détonations.»

Il court encore un autre bruit, mais je n’ose y croire. On dit que Trotsky, ayant voulu se rendre compte de la situation occupée par les Tchéco-Slovaques, partit en aéroplane et que le pilote le conduisit directement dans les lignes ennemies, où il atterrit, et qu’à l’heure actuelle il est prisonnier. Je le répète, ce n’est qu’un simple bruit auquel je ne crois guère; cependant, ce qui est certain, c’est que depuis plusieurs jours on ignore absolument ce qu’est devenu le terrible commissaire de la guerre et que le bruit de son arrestation et de sa mort persiste.

Quant à Lénine, un attentat vient d’avoir lieu contre lui, hier matin, à Moscou. Il a été blessé simplement à la main, disent les journaux. Cependant dans ceux du soir il est dit que la blessure est beaucoup plus grave qu’on ne l’avait d’abord cru.

Les meurtrières, car il s’agit de deux femmes, l’attendaient à la sortie du meeting et tirèrent en même temps sur lui. Une balle l’atteignit au cou et l’autre à la poitrine; elles n’ont pas encore été extraites. Le bulletin de ce jour annonce 104 pulsations. Chaque jour un bulletin sera publié pour tenir le peuple au courant.

C’est tout à fait comme pour un souverain.

31 août.

Décidément, les choses vont bien mal.

Pour combien de temps encore sommes-nous ici, hélas!

Hier, à 5 heures, une perquisition a eu lieu à l’ambassade d’Angleterre; pourtant elle est placée sous la protection des Pays-Bas. Les Anglais ont tiré sur les gardes rouges qui venaient pour perquisitionner. Un Anglais a été tué et un soldat bolcheviste a été blessé.

On ne sait absolument rien d’autre que ce qu’on lit dans les journaux, car il convient de rester chez soi, afin de ne pas s’exposer à être arrêté dans la rue.

Naturellement, les bolcheviks vont s’empresser de faire prisonniers les Anglais. Le départ me semble de plus en plus problématique. C’est désolant et d’autant plus regrettable que le chargé d’affaires hollandais est allé à Moscou s’entendre avec Chitcherine, le ministre des affaires étrangères, pour fixer le départ des Alliés.

Il faut attendre. Attendre encore. Attendre éternellement. Quant à moi, je dois m’estimer heureuse d’habiter une ambassade neutre. C’est du moins, on me l’assure, un refuge sacré.

1ᵉʳ septembre.

Les bolcheviks ont commis une infamie dont ils vont avoir à répondre devant l’histoire et qui est peut-être grosse de conséquences: ils ont envoyé des gardes rouges perquisitionner à l’ambassade d’Angleterre, prétextant qu’il y avait un complot organisé contre le gouvernement des Soviets.

Malgré l’opposition énergique des Anglais, ils voulurent, quand même, pénétrer. C’est alors que l’attaché naval, le commandant Cromie, les somma par trois fois de se retirer et, sur leur refus, tira sur eux, blessant et tuant trois gardes rouges.

Lui-même fut atteint et tomba mortellement frappé.

En traçant ces lignes, les larmes me montent aux yeux. Cet officier, que je connaissais bien, était la vaillance et le courage mêmes. Hélas! je l’avais vu il y a quelques jours à peine. Il avait son fin sourire railleur.

Nous allâmes ensemble acheter des dentelles, car ce guerrier était un collectionneur de jolies choses, et je le vois encore, attentif à mes leçons, cherchant à reconnaître si le fond de tulle était fait à la main ou à la machine. Il se faisait une joie de rapporter à sa femme et à sa mère de précieuses dentelles, et, hier, pendant une visite que j’ai faite à la légation danoise, j’entendais commander sa bière par téléphone, un cercueil de chêne et un autre de plomb, car on doit ramener son corps en Angleterre. Mon Dieu, que nous sommes peu de chose!

2 septembre.

Depuis les tragiques incidents de l’ambassade d’Angleterre, les arrestations se succèdent sans arrêt. On arrête dans la rue, dans les tramways, dans les cinémas, et ce sont surtout les Anglais et les Français que l’on arrête.

Une véritable chasse aux Alliés...

Hier a été encore une journée terrible. J’ai été réveillée à 8 heures par la femme de chambre, qui semblait affolée et s’efforçait de me faire comprendre dans un langage mi-français mi-russe que je devais me lever et m’habiller le plus rapidement possible, car on craint une perquisition à l’ambassade. Le concierge vint plus tard me confirmer cette nouvelle. Des gardes rouges ont passé la nuit à enlever des caisses d’argenterie qui se trouvaient chez le prince Abamelek Lazareff, lequel habite un rez-de-chaussée dans le même immeuble que l’ambassade. Pourtant sur sa porte se trouvaient des cachets et des inscriptions officielles de protection. Que faire? Haletante, je saute aussitôt de mon lit. Si les gardes rouges me trouvent ici, ils me demanderont qui je suis. Comme je serai obligée alors de reconnaître que je suis Française et que je n’occupe aucun poste à l’ambassade, ils m’arrêteront. La première précaution à prendre est de faire disparaître toute trace de mon séjour ici. Avec l’aide de la femme de chambre, j’enlève mon lit dressé dans le salon; je cache mes vêtements dans la cheminée; je dissimule mes bijoux dans des potiches; mais ce qui m’inquiète le plus ce sont ces notes écrites par moi au jour le jour depuis deux ans et où je dis ma pensée franchement.

Jamais on ne me pardonnera cette franchise.

Si l’on trouve ces cahiers, je suis perdue.

Je décide de les porter à la légation danoise, qui n’est pas éloignée. J’en fais un paquet et j’y joins mon argent, que j’avais d’abord dissimulé dans une réserve de bois mise dans l’escalier de service; mais je trouve plus prudent de le cacher autre part, le dvornik n’aurait par malheur qu’à brûler mes roubles en même temps que son bois.

En chemin, je rencontre le premier secrétaire, qui me conseille de sortir par les communs. C’est ce que je fais. Mais au moment de franchir la porte cochère, je vois, juste devant moi, quatre soldats avec leur chef.

J’ai exactement éprouvé ceci, ma tête a été en arrière et mon pied en avant et souriante je leur ai demandé où se trouvait la Bolchoïa Kauninchnaïa (rue des Grandes-Écuries).

«—A droite», me fut-il répondu.

Et j’ai continué ma route allégrement, chantant nerveusement sans pouvoir m’arrêter. Un Français ami que je rencontre me dit:

«—Vous avez l’air bien gaie, ce matin?

«—Taisez-vous, lui répondis-je, ou je fonds en larmes.»

A la légation de Danemark, je me débarrasse enfin de ces cahiers, dont une seule phrase suffirait à m’envoyer au mur, celle-ci:

Ouritsky vient d’être assassiné. Un soupir de soulagement s’échappe de toutes les poitrines!

8 septembre.

Et moi qui me croyais en sûreté à l’ambassade d’Espagne!

Les gardes rouges y sont continuellement; chaque jour ils emportent des caisses pleines, et tout ceci n’est que le résultat d’une vengeance personnelle. Le prince Abamelek Lazareff légua en mourant 6,000 roubles à son dvornik. Mais les héritiers se refusèrent à payer cette somme. Le bénéficiaire, pour se venger, alla trouver les gardes rouges et les prévint que le prince avait d’énormes richesses cachées dans son appartement. Il fit plus: il dénonça que deux chambres situées dans l’ambassade d’Espagne contenaient encore des meubles appartenant au prince. C’est la raison pour laquelle les gardes rouges veulent y pénétrer malgré nos efforts, et malheureusement le chargé d’affaires, M. Contreras, se trouve à Moscou.

9 septembre.

Il faut absolument sortir de cette situation, qui menace de devenir un de ces jours tout à fait tragique.

Le drapeau d’un pays neutre ne couvre plus rien. Les gardes rouges ont voulu pénétrer encore ce matin et ils ont prévenu qu’ils reviendraient.

Alors, j’ai payé d’audace.

M’intitulant avec aplomb secrétaire de la chancellerie de l’ambassade d’Espagne, je me suis rendue avec le secrétaire de l’ambassade trouver froidement le terrible commissaire Petroff aux Affaires étrangères. Je veux lui demander ce que veulent dire ces perquisitions.

J’apprends que depuis peu Petroff n’est plus là. Il a été pris la main dans le sac et emprisonné à son tour.

Un autre commissaire me reçoit. Il ne sait pas un mot de français. Je sais très peu le russe et le secrétaire pas un mot.

Néanmoins, nous finissons par nous comprendre; il téléphone à Smolny pour savoir s’il y a ordre de perquisitionner à l’ambassade. On répond que non. Et j’obtiens à force d’amabilité et de diplomatie un papier de protection défendant à quiconque de pénétrer dans l’ambassade sous menace de sérieuses poursuites.

Ouf!

10 septembre.

Hier soir, les gardes rouges ont encore reparu. Mais dès qu’ils ont pris connaissance du papier, ils se sont retirés.

Allons-nous enfin pouvoir dormir tranquilles?...

M. Contreras est revenu de Moscou.

Il est indigné de la façon dont les commissaires du peuple, là-bas, l’ont traité. Pour comble, cet après-midi, vers trois heures, la femme de chambre est venue nous dire que les gardes rouges étaient en bas et qu’ils rôdaient autour de l’ambassade.

M. Contreras a couru dans sa chambre pour s’emparer de son revolver.

Mais plus vite que lui je l’ai trouvé et me suis empressé de le cacher sur une armoire. Il criait: «Je leur apprendrai ce qu’est un Espagnol, je ferai comme Cromie. Je veux en descendre. Ah! ils osent me braver.»

Je l’ai supplié de se calmer. Le Ministre était dans un état d’exaspération facile à comprendre. Mais j’ai insisté de toutes mes forces.

Un malheur arrive si vite aux heures abominables que sont ces heures.

11 septembre.

Je suis allée à midi au consulat danois.

La première personne que je vois est la femme du capitaine Vacquier. Son mari est toujours en prison et la malheureuse, la tête appuyée contre le mur, sanglote: «Ils vont me le tuer!» C’est un spectacle déchirant. Une stupeur est peinte sur tous les visages. Je vais au-devant de M. Binet, notre chargé d’affaires. Il est pâle et me serre nerveusement la main. Je crains de le questionner. Mais, hâtivement, il crie plutôt qu’il ne parle: «C’est affreux, nos malheureux amis sont à la forteresse, traités comme des malfaiteurs. Ils meurent littéralement de faim. Ils appellent à l’aide; les gardes rouges menacent de les fusiller et les neutres se taisent. Ils n’ont pas encore protesté contre la violation de l’ambassade d’Angleterre.

«—Que faudrait-il faire?» lui demandai-je.

«—Une protestation énergique de tous les neutres et surtout celle de la Suède, que les bolcheviks redoutent parce qu’elle est leur voisine et qu’elle peut beaucoup contre eux.

«—Eh bien, lui fis-je, je repars tout de suite à l’ambassade d’Espagne. Vous connaissez les sentiments de M. Contreras. Il fera l’impossible pour sauver nos compatriotes.»

Je ne m’étais pas trompée. Dès les premiers mots, le chargé d’affaires espagnol déclara:

«—Il faut agir immédiatement. Je vais convoquer les ambassadeurs neutres.»

Mais la même phrase revient:

«—Il faudrait surtout que la Suède soit des nôtres. Nous ne pouvons rien sans elle. Je ne puis pourtant lui demander ses intentions, car il m’est impossible de m’exposer à un refus.»

Comment être sûr de ses sentiments?

Alors j’ai osé m’écrier:

«—J’irai, moi. Je connais le chargé d’affaires, le baron Koskull. Il me recevra.»

Et je partis comme j’avais dit, très audacieuse, mais parfaitement calme.

Le baron Koskull m’a reçue tout de suite, me demandant ce qu’il pouvait faire pour m’être agréable.

Je n’abordai pas la question d’emblée, commençant à intéresser le baron au sort des femmes françaises et lui représentant leur effroyable situation avec la fermeture de la frontière finlandaise qui les empêche de quitter la Russie.

Peut-être y aurait-il moyen de les faire passer sur des bateaux suédois.

Et puis les neutres pourraient bien faire au moins cela pour nous, eux qui n’ont même pas protesté contre la violation de l’ambassade d’Angleterre. Cette négligence peut amener dans l’avenir la violation des ambassades neutres.

«—Quoi? On dit cela?» demanda le baron nerveusement.

Alors, m’armant de tout mon courage, j’ai ajouté:

«—On dit bien autre chose encore. On dit que les neutres ne protestent pas parce qu’ils ne sont pas fixés sur vos intentions, qu’ils craignent votre abstention, vous sachant en bonnes relations avec l’Allemagne.

«Vous savez bien que les neutres ne peuvent rien sans la Suède, que les bolcheviks craignent parce qu’elle est leur voisine.»

J’ai senti que je touchais là le point sensible et, résolument, je frappai un grand coup:

«—Savez-vous que les officiers alliés prisonniers seront peut-être fusillés d’ici quarante-huit heures?»

Le baron se promena de long en large quelques minutes, semblant réfléchir.

J’entendais mon cœur battre.

Enfin, le baron parla:

«—Et que faudrait-il faire pour empêcher cette iniquité?

«—Il faudrait que les neutres protestent, lui répondis-je.

«—Mais je ne demande pas mieux. Quant à moi, je réponds de mon gouvernement.

«—Eh bien, c’est chose faite. M. Contreras viendra vous voir demain à midi.»

Je quittai le baron, enivrée du beau résultat de ma démarche. Je montai quatre à quatre les escaliers de l’ambassade d’Espagne.

«—Victoire! criai-je, la Suède marche!»

12 septembre.

M. Contreras ne s’est pas couché. Il a passé la nuit à rédiger la protestation à la lueur de son cigare, car l’électricité est coupée le soir et on ne trouve pas de bougies ni de pétrole. Il a écrit sur des petits morceaux de papier qu’il a ensuite réunis.

Je suis émue de ce grand dévouement et je le remercie avec effusion. C’est tout à l’heure qu’aura lieu l’entrevue avec le chargé d’affaires suédois.

Tout s’est passé comme je l’espérais. La protestation a été signée par tous les neutres.

15 septembre.

Il semble que les événements s’apaisent un peu.

Mᵐᵉ de Scavenius, dont la bonté est inlassable, a pu pénétrer jusqu’aux prisonniers et leur remettre des vivres. Elle a même obtenu d’organiser une cuisine à la forteresse. Est-ce l’effet de la protestation? Je n’ose y croire, et pourtant je suis bien heureuse quand je songe au rôle que j’ai pu jouer.

M. Binet m’a remerciée de tout son cœur, ainsi que notre consul, M. Duchêne. Ce que j’ai fait est bien naturel, et ce qui me rend fière, c’est seulement de l’avoir osé.

16 septembre.

Aujourd’hui, pendant le déjeuner à l’ambassade, on m’apporte une carte de Mᵐᵉ de Cheremeteff, de la part de M. Binet. Je vais au salon pour la recevoir. Je me trouve en présence d’une jeune et jolie femme qui se présente en ces termes:

«—Je suis Française mariée à un Russe et j’ai perdu mon mari. Je viens à vous, mademoiselle, envoyée par M. Binet. Voici ce qui m’arrive: j’ai reçu une convocation de la Gorokovaïa où je dois me rendre à 3 heures. Pouvez-vous prendre mes bijoux et les garder? Dans le cas où je serais arrêtée, peut-être pourriez-vous faire quelque chose pour moi par M. Lounatcharsky.»

Je l’assure que je ferai tout mon possible. Je garde ses bijoux et je l’emmène à la légation danoise pour prendre conseil sur la marche à suivre.

J’y trouve M. Pierre Darcy, qui lui aussi, a reçu une convocation et va partir pour Moscou. Je lui conseille de ne pas y aller et de venir plutôt se cacher à l’ambassade d’Espagne. Je lui représente le danger qu’il court. Peut-être l’arrêteront-ils encore une fois. Il me rassure en me disant qu’un secrétaire danois l’accompagnera.

«—Vous avez tort. Ça ne fera que les exaspérer, vous savez comme moi qu’ils ne respectent rien.»

Mais M. Darcy, s’affermissant dans sa détermination, me dit:

«—J’en profiterai, au contraire, pour leur faire signer la feuille de départ des femmes françaises et des hommes au-dessus de 48 ans.»

Je n’insiste pas, mais j’ai bien peur pour lui.

On ne peut rien faire à la légation pour Mᵐᵉ de Cheremeteff, car elle est devenue Russe par son mariage. La pauvre jeune femme, en me quittant pour se rendre à la Gorokovaïa, ajoute:

«—Si vous n’avez pas de nouvelles de moi demain matin, c’est que je serai arrêtée.»

J’admire son calme et son courage.

23 septembre.

Je touche au but.

Je croyais du moins y toucher.

Je vais pouvoir partir grâce à ma camarade Roggers qui connaît Gorki, elle se charge de nous faire obtenir le visa bolchevik, et moi j’ai obtenu du consul de Norvège un mot pour le commandant à la frontière finlandaise qui lui a promis verbalement de nous laisser passer.

Mais à la dernière heure une difficulté absurde. Le commissaire qui a visé ce passeport s’est, paraît-il, trompé dans l’orthographe de mon nom. Il est indispensable que je fasse rectifier, sans quoi je risque d’être arrêtée à la frontière.

J’ai donc dû me rendre à la Gorokovaïa, l’antre du fameux Ouritzky.

Partout des mitrailleuses. On ne veut pas me laisser passer. J’insiste. Je demande Boky, le successeur d’Ouritzky. Au bout d’une heure d’attente, un monsieur s’approche de moi et me tient ce langage:

«—Vous êtes Française, moi je le suis de cœur. Un de mes amis voudrait sortir de Russie. Ne pourriez-vous m’indiquer un moyen, car les bolcheviks lui refusent le visa? On m’a dit qu’on pouvait s’enfuir par la Finlande et que les officiers de la mission française avaient déjà pu quitter Petrograd.»

Je me tiens sur mes gardes.

«—Vous faites erreur. Les officiers étaient encore là hier matin.»

Je sais qu’ils ont pu s’enfuir hier soir; mais je me méfie.

«—Je vous en prie, me répète-t-il, donnez-moi ce moyen pour mon ami.»

Agacée, je répondis:

«—Mais il n’y a aucun moyen. C’est un conte qu’on vous a fait.»

Alors, changeant de ton, il me demande:

«—En quoi puis-je vous être utile?»

Je lui montre l’erreur commise sur mon passeport. Il me fait entrer dans un cabinet, appelle une jeune fille, fait faire la correction, appose un tampon qu’il avait dans sa poche et, souriant, me dit: «Il n’y a pas à dire, vous êtes forte.»

Imbécile!

24 septembre.

Voici le moment si attendu. Je crois rêver. Depuis tant de semaines, en de continuelles alternatives d’espérances et d’angoisse, j’ai tenu bon, patienté, lutté, car la lutte était de tous les jours.

J’ai un immense soulagement et le regret de voir abîmé le beau rêve que j’avais fait de me retrouver ici dans une Russie calmée enfin, assagie, d’y poursuivre la tâche artistique que moi et quelques autres nous nous étions donnée.

La Révolution, l’infamie bolcheviste, n’a pas permis que nous allions jusqu’au bout.

Mais nous avons la juste fierté d’être demeurés, aussi longtemps qu’il était humainement possible, à notre poste de propagande française—la plus belle propagande—celle qui dans notre belle langue interprétait les chefs-d’œuvre de la littérature française. Nous avons la fierté de sentir qu’en pleine tourmente, même ces hommes qui terrifiaient la Russie, qui pillaient, qui tuaient, nous témoignaient des égards et du respect.

Il a fallu, pour que notre chère entreprise fût arrêtée, que le bolchevisme sombrât dans le plus bas des avilissements. L’Allemagne le tient sous sa dépendance, l’Allemagne est là, d’autant plus féroce, d’autant plus implacable qu’elle sent la partie perdue pour elle sur le front de France.

Lounatcharsky, Sténeberg et quelques autres qui furent des sincères, qui crurent à la réalisation d’un rêve généreux, sombreront sous cet ouragan qui dérègle tout, bouleverse tout. Leurs jours sont comptés.

En m’apprêtant à quitter ce pays hospitalier, je pense avec une infinie mélancolie à toute cette foule de pauvres gens, êtres décharnés par les privations, apathiques, résignés à tout à force de tortures, et dont, avec leurs grandes phrases, leurs paradoxes, leurs gestes de cabotins, Lénine et Trotsky forment peu à peu l’armée—disons le troupeau—qui leur est nécessaire.

Ils n’ont pas la belle indignation, l’amertume orgueilleuse des hommes qui, en France, protestent en des manifestations tumultueuses.

Je les ai vus souvent passer, les malheureux devenus serviles, avec leurs regards mauvais quand un peu de pâture était au bout de quelque pillage, avec leurs regards tristes de pauvres bêtes de somme qui manquaient... lorsque leurs mauvais bergers ne leur versaient plus d’illusion.

Ce sont les mêmes hommes qui, au début de la grande guerre, se sont magnifiquement battus, ceux qui ont envahi la Prusse et franchi les Karpathes.

Menés autrement, demain ils pourraient faire de grandes choses.

Aujourd’hui, ils ont roulé aux bas-fonds de ce bolchevisme qui n’aboutit à rien de pratique, qui n’a que l’ombre d’une organisation et à la tête duquel il y a trop de profiteurs.

Pauvre Russie!

Au moment où je vais partir le temps est triste, tout est triste dans Petrograd.

Je m’y sens comme une étrangère, moi une Française pourtant. Je sens que l’affection pour la France que l’on proclamait tant ici ne se voit plus à rien.

Çà et là, un drapeau à des édifices fait claquer sous le vent froid trois couleurs ternes lavées par la pluie...

On pourrait avoir l’illusion de nos trois couleurs.

N’ayons pas cette illusion: ce sont les couleurs allemandes.

Sous mes fenêtres, où je regarde peut-être pour la dernière fois, des prisonniers autrichiens libérés passent minables.

Recrues précieuses pour le bolchevisme, pillards nécessaires qui se laisseront faire par l’appât de quelques roubles que Lénine fait fabriquer par liasses, sans arrêt. Que vaudront-ils à l’étranger?

Au moment de partir, j’ai l’angoisse d’un incident de dernière heure.

Ces notes... prises de jour en jour et franches, trop franches... Ne vont-elles pas...?

Je n’aurais plus l’ambassade danoise pour leur donner asile... Ne va-t-on pas me fouiller. Que diront ces brutes, s’ils les trouvent, s’ils les épluchent et si quelqu’un d’eux comprend le français?...

Tant pis... Je tiens trop à écrire un jour un livre avec le souvenir poignant de ces heures.

28 septembre.

Enfin partie!...

Je vais essayer de me rappeler un peu l’anxiété des dernières heures en Russie.

Quand, munie du précieux passeport je fus arrivée à Bieliostroff, il a fallu attendre, attendre interminablement.

Impossible d’être renseignée. Les fonctionnaires ne veulent recevoir personne. Enfin, vers quatre heures, j’aperçus des bagages qu’on apportait. Je me précipitai à la douane. Mais on m’y déclara qu’il était trop tard pour partir, que la frontière était fermée, que je n’avais qu’à retourner coucher à Petrograd.

Un soldat, qui avait une bonne figure et parlait un peu le français, s’est apitoyé. Quelques roubles ont achevé de l’attendrir. Il a trouvé moyen de m’amener jusqu’à un commandant chargé de la police. Il n’a pas l’air trop rébarbatif. J’insiste.

«—Laissez passer, dit-il... mais il ajoute:

«—Si toutefois la Finlande vous le permet.»

J’affirme qu’il n’y aura aucune difficulté de ce côté.

En réalité, je suis loin d’être rassurée, n’ayant en somme aucun visa, mais seulement une carte du consul de Norvège pour le commandant finlandais.

On m’interroge:

«—Vous avez des bagages?

«—Deux malles et quelques petits colis.

«—Vous êtes seule?

«—Une autre Française est avec moi.»

Une autre personne en effet, ma camarade Roggers, tente aussi la chance, et ce m’est une grande joie de n’être pas seule parmi ces difficultés, dans ce voyage vers l’inconnu.

On nous prend nos passeports et on nous donne des feuilles à remplir pour que nous déclarions quelle somme nous emportons avec nous. Ensuite une femme est désignée pour nous fouiller. Elle s’acquitte consciencieusement de sa tâche et va même jusqu’à fouiller dans mon corset et dans les chaussures. Puis c’est le tour des bagages. Deux soldats, sous la surveillance d’un chef, sont chargés de cette besogne. Ils la font avec le plus grand soin, ils ouvrent toutes les boîtes, tâtent tous les objets, scrutent tous les coins.

Soudain, je vois ma compagne de voyage pâlir et, se penchant vers moi, elle me dit fébrilement: «Ils ont trouvé mon argent!» Je sais en effet qu’elle a caché deux mille roubles dans une petite pendulette. Il est impossible de voyager avec les mille roubles qu’on vous permet d’emporter; j’en ai fait moi-même autant et j’ai caché des marks finlandais.

Je frémis. Que vont-ils faire de nous? Certainement, maintenant, nous ne passerons plus la frontière et l’argent sera confisqué. Le soldat qui a trouvé l’argent brandit les deux billets, mais mon amie, sans perdre la tête, affirme qu’elle les a oubliés dans cette cachette où elle les avait mis, il y a deux ans, lors de son voyage avec Gorky et Chaliapine en Crimée. Immédiatement je pense qu’elle se perd, car ces billets n’existaient pas à cette époque, puisqu’ils ont été émis seulement depuis la révolution.

Grâce à Dieu, ils ne réfléchissent pas et déclarent simplement que les billets sont confisqués. Seulement, comme malgré tout ils se méfient un peu, ils cherchent encore plus activement.

Tout est déballé, trituré avec des mains sales. Et je pense: «Pourvu qu’ils ne découvrent pas aussi mes billets, car alors nous sommes bien perdues!» Je tremble au moment où ils fouillent la boîte dangereuse, mais ils la referment sans avoir rien trouvé. Enfin sauvées! Quelle joie!

Maintenant, fouillez, mes amis, si tel est votre bon plaisir. Nos malles-armoires les amusent énormément. Ils ont une vraie joie à sortir un à un tous les tiroirs. Ils trouvent encore dans la malle de mon amie une pièce ancienne en or et une couronne de lauriers également en or. Ils confisquent naturellement les deux objets. Mais on les lui rend, car le jeune homme chargé de surveiller la fouille déclare par amabilité que ces deux pièces ne sont pas en or. Il a pitié de nous.

Enfin on referme le tout et on fait monter ma camarade chez le commandant. Elle en redescend toute souriante: il lui a tout rendu. Elle triomphe.

Maintenant il s’agit de passer en Finlande.

La voie ferrée a été détruite entre Bieliostrof et Raiooki. Et il faut porter nos bagages jusqu’à la frontière qui se trouve exactement à 150 mètres.

Naturellement, ce transport est un prétexte pour nous pressurer.

Le transport de nos bagages nous coûte exactement 360 roubles. C’est une exploitation éhontée.

Mais nous payons sans murmurer, heureuses, si heureuses d’approcher du but.

On décharge nos malles sur le petit pont qui relie les deux pays; la pluie s’est mise à tomber fine, serrée.

La sentinelle finlandaise nous dévisage avec pitié. Je me sens oppressée. Je regarde Roggers. Nous nous comprenons! Pourvu qu’on nous ouvre. Sinon nous devrons passer la nuit assises sur nos malles. Qu’importe! nous sommes décidées à tout, sauf à rebrousser chemin.

Mais un soldat finlandais vient nous demander nos passeports. Je lui remets la carte du consul norvégien, qu’il doit porter au commandant. Si on allait nous refuser le passage par la Finlande? Vingt minutes—vingt heures—s’écoulent. Le soldat revient. Je cherche à deviner sur son visage la réponse qu’il nous apporte. Elle est bonne, car il nous sourit. La sentinelle fait glisser la barrière. Enfin, mon cœur saute dans ma poitrine. Nous passons et je piétine avec ivresse la terre finlandaise.

Un employé des chemins de fer est là que nous interrogeons. En quelques mots, il nous explique que dans son pays, à quarante minutes de chemin de fer de l’enfer soviétiste, tout fonctionne admirablement, les trains, le ravitaillement, la lumière, le téléphone.

Tout est calme!

Ce mot-là me semble immense...

La vie va être possible sans angoisse.

. . . . . . . . . . .

Et je me suis mise en route pour retourner vers mon pays.

Tout autour de moi il y avait de délicieux paysages accidentés où les sapins se profilaient sur le ciel rose.

Cette teinte rose qui incendiait le ciel était devant moi, dans la direction que je prenais, tranquille enfin.

Derrière moi je laissais, comme une masse sombre, le pays désolé, le pays de famine et de mort.

Il paraissait déjà noyé dans la brume, et cette dernière vision de la Russie était tout un symbole en face de l’horizon clair vers lequel je me hâtais.

Un symbole d’une tristesse profonde.

Il semblait que la nuit, une nuit lugubre, allait envelopper ce pays, y éteignant tout ce qu’il y avait eu de généreux et de grand, rendant vains les rêves généreux, inutiles les sacrifices, toutes ces longues heures de misère supportées par des milliers de malheureux dans la chimérique attente d’un peu plus de justice qui aurait pu venir, mais qui ne viendra pas, à cause de l’égoïsme des appétits, de la cruauté et surtout de la servilité de ceux qui se sont imposés comme bergers du douloureux troupeau...


L’EDITION,

4, Rue de Furstenberg, 4

—— PARIS (VIᴱ) ——

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