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L'organisation de l'industrie et les conditions du travail dans la Russie des Soviets

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Le IXme Congrès estime que la nouvelle politique économique ne peut être réalisée qu'avec la collaboration des syndicats.

La création des unions d'entreprises, l'établissement de leur programme de production, les questions d'impôts et de politique financière, les listes des entreprises à affermer, les conditions des contrats d'affermage, l'organisation du travail et de la direction des entreprises industrielles, tout cela doit être étudié en commun avec les syndicats.

L'une des tâches spéciales des syndicats sous le régime de la nouvelle politique doit être de créer des organisateurs ouvriers pour occuper les postes de directeurs responsables des entreprises d'État.

Dans sa séance plénière du 28 décembre 1921 le Comité central du parti communiste, d'accord avec le Conseil central panrusse des syndicats, a adopté la résolution suivante relative au rôle des syndicats dans la gestion des entreprises:

Le rétablissement rapide de la grande industrie exige incontestablement, vu les circonstances régnant actuellement en Russie, la concentration de tout le pouvoir entre les mains des administrations des usines.

La participation des syndicats dans les organes économiques et gouvernementaux de l'État prolétarien doit être organisée pour la prochaine période sous la forme suivante:

Les syndicats participeront à l'organisation de tous les organes liés à l'économie nationale en proposant des candidats dont ils indiqueront le stage, l'expérience, etc. Le droit de nomination cependant appartiendra uniquement aux organes économiques, qui ont aussi toute la responsabilité du travail. Les organes économiques tiendront compte des qualifications de tous les candidats présentés par le syndicat.

Une des tâches principales des syndicats consistera dans la préparation et la présentation d'administrateurs, sortant des masses ouvrières en général.

Il est indispensable de renforcer la participation des syndicats à tous les organes s'occupant des projets de l'État prolétarien, de l'élaboration des plans économiques, des programmes de production et de la distribution des fonds de ravitaillement des ouvriers; il faut qu'ils participent aussi à l'établissement des listes d'entreprises qui doivent être ravitaillées par l'État, affermées, concédées, etc.

Les syndicats, tout en n'exerçant pas de contrôle immédiat sur la production des entreprises particulières ou affermées, participent à la réglementation de la production capitaliste privée par leur simple représentation aux organes d'État correspondants.

Une résolution analogue fut prise par le Conseil central panrusse des syndicats. En voici les passages essentiels:

Le principe du «rendement commercial» comme tel exige une stricte responsabilité des personnes auxquelles l'État a donné des pleins pouvoirs, car l'État, en leur laissant une entière liberté d'initiative, impose aux administrations des unions industrielles et des entreprises séparées une plus grande responsabilité. Cette responsabilité exige à son tour plus de souplesse, d'esprit d'initiative et d'unité de volonté qui ne peuvent exister que s'il y a un pouvoir unique dans l'administration de l'entreprise.

Ceci implique la nécessité de réexaminer les relations entre les organes des syndicats et les organes économiques, en matière d'administration de l'industrie, dans le sens de la renonciation de la part des syndicats à toute immixtion directe dans la marche de l'entreprise, ainsi qu'à la participation sur un pied d'égalité à la nomination des directions d'usine et des autres organes d'administration de l'industrie.

Il faut établir comme règle que les syndicats discutent avec les organes économiques toutes les candidatures aux postes d'administration des entreprises, quel que soit l'organisme qui propose le candidat. En même temps il faut renforcer la participation des syndicats à tous les organes s'occupant des projets de l'État prolétarien, de l'élaboration des plans économiques, des programmes de production et de la distribution des fonds de ravitaillement des ouvriers; il faut qu'ils participent aussi à l'établissement des listes d'entreprises qui doivent être ravitaillées par l'État, affermées, concédées, etc.

La circulaire élaborée conformément à cette résolution et signée par les présidents du Conseil central panrusse des syndicats et du Conseil suprême de l'économie nationale établit les rapports suivants entre les syndicats et les administrations des entreprises:

Les organes économiques directeurs (trusts, administrations) ont pleine autorité en ce qui concerne la direction des entreprises qui leur sont confiées. C'est sur eux que repose toute la responsabilité de la direction, et l'intervention des syndicats ne peut donc excuser le travail insuffisant de l'industrie. Aussi, toute intervention directe des syndicats professionnels dans la direction de l'entreprise est-elle inadmissible.

Dans ces conditions, quand un comité d'usine ou un autre organe syndical remarque quelque faute de la part d'un organe économique, il doit, sans intervenir directement, le signaler aux organes syndicaux et aux compétences économiques.

L'action des syndicats professionnels dans l'organisation économique est indiquée de la façon suivante:

Lors de la formation de toutes les directions, qu'il s'agisse des trusts ou des entreprises séparées, les organes économiques devront inviter les syndicats professionnels à présenter des candidats et leur soumettre les leurs; quoique la décision définitive appartienne aux organes économiques, la nomination devra être examinée..... d'accord avec les syndicats....

Les syndicats professionnels doivent se faire représenter pour l'élaboration des programmes des organes économiques,..... la désignation des entreprises devant faire partie d'un trust,..... ou être affermées,.... les rapports avec l'étranger, la détermination des branches industrielles dans lesquelles on pourra admettre la constitution de sociétés mixtes, ainsi que l'examen des conditions dans lesquelles le capital privé peut être admis dans l'industrie russe.....

Pour l'établissement des contrats collectifs et la fixation des normes de travail, la réglementation des salaires et des conditions du travail aux pièces,..... les syndicats professionnels doivent se faire représenter..... et les directions devront périodiquement exposer aux assemblées générales des ouvriers, les caractéristiques de la production,..... les programmes de l'État, etc., etc.

CONCLUSION

L'étude que nous venons de faire de la législation soviétique montre la grande influence exercée par la nouvelle politique économique sur l'organisation de l'industrie et les conditions du travail en Russie.

La nationalisation, en tant que principe, reste encore en vigueur mais les formes d'administration se sont diversifiées et l'importance du rôle direct de l'État diminue pour un nombre d'entreprises toujours plus grand.

La petite industrie est désormais soustraite à la nationalisation. Les entreprises qui restent nationalisées doivent autant que possible être affermées à des particuliers qui reçoivent l'autorisation de les exploiter d'après les formes de l'économie capitaliste privée. Il résulte pourtant des chiffres que nous reproduisons en annexe que l'affermage n'a pas reçu jusqu'à présent une application très étendue; le nombre des entreprises données à bail est insignifiant, et toutes appartiennent à la petite ou à la moyenne industrie. L'espoir que les autorités avaient mis dans le décret du 5 juillet 1921 ne semble donc pas s'être réalisé, de leur aveu même.

Le nombre des entreprises gérées directement par l'État et ravitaillées par lui en matières premières, combustible, etc., ainsi que le nombre des ouvriers et employés entretenus aux frais de l'État diminue. Le manque d'argent et d'autres ressources a obligé l'État d'établir comme règle générale que les entreprises doivent être gérées sur la base du «rendement commercial». Pour cela, il a fallu autoriser un grand nombre d'établissements à s'adresser directement au marché libre pour s'y ravitailler en combustible, en matières premières ainsi qu'en argent. Le désir d'obtenir de l'argent sur le marché libre a eu pour conséquence nécessaire l'appel au capital privé et a donné lieu à la création d'un type nouveau d'entreprises: les sociétés mixtes par actions, où le capital privé est admis à participer presque sur un pied d'égalité avec l'État.

Les renseignements que nous possédons sur ces sociétés sont encore très rares; leur nombre est trop restreint et leur création trop récente pour qu'on puisse en apprécier l'importance ou les résultats. Nous ne pouvons pas davantage porter un jugement sur les concessions dont la question ne semble pas avoir été étudiée à fond jusqu'à présent par le gouvernement soviétique lui-même. Mais c'est partout le même effort pour obtenir des ressources nouvelles, créer des moyens nouveaux d'exploitation en abandonnant la gestion directe des entreprises.

Ainsi donc, à mesure que se développe la nouvelle politique économique, le gouvernement des soviets rétrécit davantage sa sphère d'activité en matière d'administration industrielle et laisse un champ plus large au capital privé.


En donnant naissance à des entreprises partiellement ou totalement indépendantes de l'État, la nouvelle politique économique a posé d'autre part la question de la révision des lois sur les conditions du travail.

À côté des règles fondamentales, applicables à toutes les entreprises quelles qu'elles soient, il a fallu introduire de nouvelles dispositions régissant les rapports des administrations ou des entrepreneurs avec leur personnel. Cette nouvelle législation est encore en voie d'élaboration et l'on ne peut juger de ce qu'elle sera que par les tendances générales qui se font jour dans les résolutions et rapports des divers congrès ou commissions et par l'usage qui s'établit dans certaines entreprises.

Il faut attendre la publication du nouveau Code des lois sur le travail, actuellement en préparation, pour apprécier définitivement l'influence de la nouvelle politique économique sur la législation ouvrière. Toutefois, nous pouvons dès maintenant—nous en tenant aux informations parues dans les publications soviétiques que nous avons utilisées au cours de la présente étude—mentionner quelques innovations.

La suppression de fait du travail obligatoire et l'autorisation accordées aux entreprises dirigées par des particuliers de disposer librement de la main-d'œuvre ont soumis celle-ci de nouveau à la loi de l'offre et de la demande. La répercussion n'a pas tardé à se faire sentir sur le mode d'établissement des salaires qui sont actuellement réglés dans ces entreprises par accord mutuel entre les parties.

De même, les rapports entre l'administration et les travailleurs sont nécessairement différents dans les entreprises gérées par des particuliers de ce qu'ils sont dans les entreprises nationalisées dirigées par l'État.

Mais, comme nous l'avons dit, le gouvernement des soviets n'a pas encore de législation définitive et complète à ce sujet. On peut dire qu'à l'heure actuelle les conditions du travail sont régies par trois catégories de législations différentes. La première est commune à toutes les entreprises; la deuxième ne s'applique qu'aux entreprises nationalisées gérées par l'État; la troisième s'étend uniquement aux entreprises dirigées par des particuliers. En comparant les dispositions de la première et de la deuxième catégories avec celles qui ont été en vigueur jusqu'en 1921[42], on constate aisément quelle est l'importance des modifications qu'ont apportées dans ce domaine de la législation—par exemple l'assurance sociale, l'embauchage et le congédiement—les conditions créées dans la Russie des soviets par la nouvelle politique économique.

ANNEXES[43]

ANNEXE I.
Les «trusts d'État».

1. L'industrie gérée par L'État.

La situation générale des trusts d'État constitués en vertu des décrets des 12 et 16 août 1921 était la suivante à la date du 1er février 1922.[44]

Le nombre total des entreprises existant dans les branches d'industrie où des «trusts» avaient été organisés était de 3.354.

Le nombre d'entreprises organisées en «trusts» était de 989, soit 29 % du total.

Le nombre total d'ouvriers travaillant dans les diverses branches d'industrie où des «trusts» avaient été organisés était de 769.000.

Le nombre d'ouvriers dans les entreprises organisées en «trusts» était de 501.000, soit 63 % du total.

Le pourcentage du nombre des entreprises et des ouvriers dans les branches d'industrie où des trusts avaient été organisés, par rapport au nombre total des entreprises et des ouvriers dans chacune de ces industries, était le suivant[45]:

Industries Entreprises Ouvriers
 
Électrotechnique 100 100
Textile 72 81
Matériaux de construction 41 52
Aliments 41 92
Papier 35 54
Produits chimiques 19 44
Charbon 37 6

2. Les «trusts» ravitaillés par l'État

au 15 décembre 1921.

Industries Entreprises Ouvriers
 
Lin 17 20.195
Bois 42 7.365
Prod. chimiques 14 10.334
Thé 15 979
Métallurgie 3 35.000
Matières colorantes 8 1.136
Plomb et zinc 3 1.600
Platine 6
Or 1
Oural Asbest 3 2.680

Au 1er janvier 1922.

  Nombre de «trusts»
 
Textile 13
Bois 6
Prod. chimiques 6
Mines 5
Métallurgie 3
Papier 2
Électrotechnique 2
Alimentation 2
Matériaux de construc. 4

3. Industrie gérée par l'État dans le département de Moscou (y compris Moscou-ville) au 1er mars 1922[46].

L'industrie gérée par l'État dans le département de Moscou (y compris Moscou-ville), comptait au 1er mars 1922, 496 entreprises occupant 165.280 travailleurs, dont 23.746 seulement étaient complètement ravitaillés par l'État.

Entreprises constituées en «trusts».

Industries Nombre de trusts Nombre d'entreprises Nombre d'ouvriers Nombre d'employés
Total En activité Total Dans les entreprises en activité Total Dans les entreprises en activité
Textile 16 217 170 101.703 94.673 9.512 8.942
Imprimerie 1 10 10 3.498 3.498 357 357
Alimentation 1 32 27 5.852 5.742 1.127 1.083
Bois 1 21 20 1.114 1.104 166 163
Prod. chimiques 3 18 13 1.842 1.781 353 315
Bâtiment 3 48 34 2.984 2.716 310 242
Électricité 1 31 31 110 110 60 60
Cuirs 1 23 23 2.341 2.341 449 449
Total 27 400 328 119.444 111.965 12.334 11.611

Entreprises non constituées en «trusts»[47].

Industries Nombre d'entreprises en activité Nombre d'ouvriers Nombre d'employés
Vêtement 25 21.246 1.593
Métallurgie 47 7.361 1.561
Imprimerie 18 2.113 200
Électricité 1 31 2
Produits chimiques 5 87 31
Total 96 30.838 3.387

ANNEXE II
Les entreprises gérées et ravitaillées par l'État.

La tendance fondamentale du gouvernement soviétique à l'égard de l'industrie nationalisée, gérée et ravitaillée par l'État, consiste à supprimer le ravitaillement par l'État d'un nombre d'entreprises aussi considérable que possible.

1. Balance générale de l'industrie ravitaillée par l'État.

Voici, d'après le budget du Conseil suprême de l'économie nationale, du 1er janvier jusqu'au 1er octobre 1922, la balance générale de l'industrie ravitaillée par l'État (en millions de roubles-or)[48].

Industries Production en 1922 Dépenses pour la production Valeur des disponibilités de l'État et des recettes sans contre-partie en argent Déficit
Forestière 78,0 74,2 24,0 50,2
Tourbe 10,5 10,2 1,8 6,2
Charbonnière 63,5 82,5 37,6 44,9
Naphte 85,0 52,0 29,1 23,0
Minière 16,7 16,7 5,2 11,6
Métallurgique 123,0 135,0 60,1 67,4
Électrotechnique 16,6 14,9 6,5 8,4
Textile 149,2 139,9 68,9 55,0
Chimique 49,8 44,0 20,4 14,8
Minerais 11,6 10,6 2,7 6,1
Papier 6,9 14,4 8,3 6,1
Produits animaux 93,0 92,3 29,2 54,4
Aliments 87,1 81,3 29,5 28,8
Sucre 19,5 21,0 1,8 19,0
Autres 96,4 105,0 34,4 70,6
Total 906,6 894,1 359,3 466,8

D'après les renseignements fournis au Conseil suprême de l'économie nationale en février 1922, une somme de 371 millions de roubles-or était nécessaire comme fonds de roulement pour tous les trusts.

Les sommes suivantes furent reçues effectivement par les diverses branches de l'industrie[49].

Industries Sommes nécessaires Sommes reçues
(en millions de roubles-or)
 
Textile 154 72
Métallurgique 60 38
Électrotechnique 11 7
Construction 7 4

«L'union industrielle Gomza devait recevoir de l'État 21 milliards afin de payer les salaires de trois mois (août, septembre, octobre), salaires qui étaient loin d'atteindre le minimum nécessaire pour vivre; elle n'en a reçu toutefois qu'un milliard et demi. En général, 10 % des besoins seulement furent satisfaits par les administrations centrales de l'État; pour les 90 % restants, pas un sou ne fut attribué. On peut dire la même chose des entreprises qui s'occupaient de l'approvisionnement en bois et d'autres qui ne furent pas ravitaillées du tout ou ne le furent que pour une très faible partie de leurs besoins. Quant aux sommes en espèces qui devaient remplacer les produits manquants dans le ravitaillement par l'État, elles ne furent presque jamais payées. Il en résulte que les usines n'ont pas du tout de fonds de roulement. Dans de pareilles conditions, tout effort pour introduire le «rendement commercial» est impossible[50]

«Il faut l'avouer franchement, disait M. Taratouta à la conférence des trusts, le ravitaillement par l'État n'existe pas, et il faut en tirer les conclusions. Le trust que je représente, dont le budget mensuel est de 300 milliards, n'a reçu que 10 millions de roubles soviétiques. Dans ces conditions-là, le sens principal de la formation des trusts, c'est-à-dire la responsabilité des chefs, disparaît, car dans de pareilles conditions il est impossible d'assumer une responsabilité quelconque.

«L'industrie ukrainienne n'a reçu en janvier que 204,000 roubles, au lieu des 10 millions et demi prévus par le budget; elle n'a reçu de vivres que pour 120,000 ouvriers au lieu de 235.000 ...»

«En fait, il n'y a pas de ravitaillement par l'État en Ukraine», disait à la conférence des trusts le représentant du Conseil d'économie nationale ukrainien. «La cause principale de la faiblesse de l'industrie, d'après l'opinion de M. Kactyne, est l'absence de fonds de roulement, de capitaux. Telle est la raison fondamentale de l'impuissance et de l'anémie des entreprises industrielles. L'État a donné à ses unions industrielles d'assez grands capitaux au moment de la fondation, exigeant de grandes dépenses pour l'amortissement, mais il a accordé trop peu ou pas du tout de fonds de roulement et de capitaux de réserve pour le travail courant; en même temps, toute ou presque toute la production est perçue par les commissariats des chemins de fer, de l'instruction publique, de l'hygiène, etc., à titre de «compensation pour le ravitaillement». Où l'industrie doit-elle se procurer les fonds de roulement? Dans certaines branches de l'industrie, dont la production est entièrement absorbée par les besoins militaires, cette question se pose dans toute son acuité aux dirigeants des entreprises et des unions, en les menaçant de l'arrêt complet de la production ...»

«Tout le monde sait, d'après l'expérience pratique, disait-on à la conférence des trusts, que le ravitaillement par l'État se borne à des quantités insignifiantes; l'entreprise doit faire elle-même l'acquisition de ses fonds de roulement, même si elle est «ravitaillée» par l'État. Où que l'on s'adresse, partout on demande un paiement immédiat en marchandises et en argent[51].

«En fait, le ravitaillement par l'État se réduit à la partie insignifiante de vivres que doivent recevoir les entreprises dont le ravitaillement par l'État est maintenu. Quoique le nombre de ces entreprises soit insignifiant, que les ressources obtenues par elles soient minimes, le ravitaillement par l'État est d'une irrégularité incroyable.

«En même temps, l'industrie ravitaillée par l'État, donc la plus importante de toutes, est limitée dans son activité, surtout en ce qui concerne les commandes et le ravitaillement, et se trouve être par là-même dans une situation infiniment plus désavantageuse que l'autre partie de l'industrie, qui, n'étant pas ravitaillée par l'État parce que n'ayant pas la même importance, ne connaît pas ces restrictions à son activité.»

En partant de ces constatations, les représentants des trusts ont exigé «que l'industrie nationalisée ne soit plus ravitaillée par l'État en aucune façon, car le ravitaillement par l'État est pour l'industrie ce qu'est la chaîne pour le forçat qu'elle tient attaché[52]

«Pour autant qu'il est évident, écrivait M. Lomov, que l'ancien plan de ravitaillement par l'État a fait faillite et doit être modifié, il faudra soustraire au ravitaillement par l'État dans un avenir prochain quantité de branches de l'industrie[53]

Sous l'influence des considérations ci-dessus, une partie des entreprises et des institutions de l'État (par exemple l'administration centrale des combustibles, les transports, etc.) ne sont plus ravitaillées par l'État, mais doivent être organisées sur la base du «rendement commercial».

2. Le ravitaillement des ouvriers par l'État.

À l'égard d'autres entreprises on procéda à une forte diminution de l'approvisionnement par l'État des ouvriers employés dans les entreprises gérées et ravitaillées par l'État.

Le décret du Conseil suprême de l'économie nationale du 6 février 1922 stipulait:

Afin d'atténuer les conséquences très graves qui pourraient résulter pour l'industrie de la crise qui approche, à cause des difficultés en matière de ravitaillement, le presidium du Conseil suprême de l'économie nationale estime qu'il est nécessaire de prendre des mesures urgentes pour cesser le ravitaillement par l'État du plus grand nombre possible d'entreprises.

Pour la période mai-octobre 1921 il y avait 1.579.207 ouvriers employés dans les industries qui devaient être ravitaillées par l'État. En décembre, 1.118.126 ouvriers seulement furent laissés au «ravitaillement blindé»; en janvier 1922, 1.100.000; en février 1922, 1.043,469. À partir de février ce nombre devait être réduit d'après le plan suivant, élaboré par la Section économique près le Conseil suprême, de l'économie nationale.-Devaient être soustraites au ravitaillement:

à partir du 1er mars 119.882 personnes.
» 1er avril 248.594 »
» 1er mai 125.789 »
» 1er juin 55.073 »

Le nombre d'ouvriers que l'État continue à ravitailler ne doit donc plus s'élever à partir du 1er juin qu'à 494.131.

Le Conseil suprême de l'économie nationale a dressé un tableau des entreprises qui continueront à recevoir les rations alimentaires sur les ressources de l'État pour la période mars-septembre[54].

Organes économiques Nombre d'ouvriers
restant à ravitailler au 1er fév. 1922 dont le ravitaillement doit être supprimé restant à ravitailler au 1er juin 1922
au 1er mars au 1er avril au 1er mai au 1er juin
Conseil des industries de guerre 166.342 22.342 33.069 140.000
Métallurgie 192.193 16.721 11.966 17.954 32.004 100.479
Produits chimiques 26.902 6.305 12.768 7.919
Papier 17.134 28 17.106
Textile 190.994 16.707 97.671 54.443 30.173
Sucre 8.406 28 8.378
Cuirs 30.627 4.184 11.443 15.000
Forêts 21.169 15.385 5.784
Charbon 85.975 37 85.938
Naphte 53.598 560 53.038
Schiste 2.042 34 2.008
Ponts et chaussées 63.467 21.438 3.507 38.522
Électricité 27.243 14.782 1.220 11.241
Industrie agricole 12.004 3.222 2.185 6.597
Habillement 25.609 3.053 22.556
Construction 15.221 2.468 8.361
      3.434 958
Typographie 27.480 17.800 5.051 4.629
      2.225      
Mines 41.385 52 1.970 6.545 30.293
Géologie 4.000 300 3.700
  463 463
Supplément pour le C. S. d'E. N. 27.215 27.215
Réserves du C. S. d'E. N. 16.089
Totaux 1.043.469 119.882 248.594 125.789 55.073 510.000

ANNEXE III.
Le financement d'entreprises non ravitaillées par l'État.

La Division des opérations de la Banque d'État a élaboré les règlements suivants pour le financement de l'industrie.

Un crédit à la production est ouvert aux entreprises pour des buts déterminés. Les dates et les moyens de remboursement des crédits, le montant des intérêts ainsi que l'importance et la nature des garanties sont réglés par des accords spéciaux.

Le crédit est de courte durée: neuf mois au maximum. Les 62 % du capital initial de la Banque sont employés à créditer l'industrie d'État; les 25% sont utilisés pour la coopération et les 12,5 % pour les crédits à l'industrie et au commerce privés.

Le montant d'un crédit pour la production alloué à un seul emprunteur ne doit pas dépasser 10 milliards de roubles. Le crédit est attribué surtout aux fonds de roulement pour les dépenses courantes occasionnées par la production. Pour les dépenses extraordinaires le crédit n'est alloué qu'au cas où il sera remboursé dans les neuf mois. Le capital de la Banque d'État lors de sa constitution atteignait 2.000 milliards de roubles soviétiques. Au mois de mars 1922 il était augmenté jusqu'à la somme de 5.750 milliards de roubles soviétiques.

Le taux pour les prêts fut fixé d'abord de 8 à 12 % par mois; au mois de mars il fut élevé et fixé de 12 à 18 %.

Pour que la Banque d'État soit couverte contre les risques provenant de la dépréciation continuelle du rouble, l'intérêt du prêt est augmenté dans certaines proportions d'après le cours du rouble officiellement fixé[55].

Le tableau suivant montre l'importance des crédits accordés à l'industrie sous différentes formes à partir de l'ouverture de la Banque d'État jusqu'au 1er mai 1922 (en milliards de roubles)[56].

Crédits ouverts 16 déc. 1921 1er janv. 1922 1er fév. 1922 1er mars 1922 1er avril 1922 1er mai 1922
Dans des buts de production industrielle 8,5 96,4 603,8 1.571,5 2.073,0 2.610,1
Comptes spéciaux basés sur des marchandises et des documents concernant des marchandises 5,6 70,4 597,0 2.035,2 1.712,7 2.431,0
Sur des marchandises 3,2 6,0 10,7 42,5 109,7
Comptes spéciaux à base de lettres de change et autres obligations 51,0 407,5 400,1 843,3 754,3 910,7
Total 68,3 580,3 1.603,6 4.450,0 4.582,5 6.061,1

Les dimensions des crédits demandés et accordés, pour les différentes catégories d'entreprises jusqu'au 1er mars 1922, se présentent ainsi (en milliards de roubles)[57].

  Aux entreprises d'État Aux coopératives Aux entreprises privées Total
Montant Pourc. Montant Pourc. Montant Pourc. Montant Pourc.
Crédits demandés 3.833,7 53,4 3.166,4 44,1 172,8 2,2 7.172,9 100
Crédits ouverts:                
dans des buts de production 1.368,5 87,0 202,0 12,8 1,0 0,2 1.571,5 100
escompte de lettres de change et prêts à court terme 52,0 6,1 784,6 93,0 6,7 0,9 843,3 100
sur marchandises et documts de marchandises 1.438,5 70,6 494,4 24,2 102,3 5,2 2.035,2 100
                 
Total 2.859 64,2 1.481,0 33,2 110,0 2,4 4.450,0 100

Au 1er mai 1922 les crédits ouverts par la Banque d'État ont atteint la somme de 8.134 milliards de roubles, y compris 5.490 milliards de roubles accordés à l'industrie d'État, 1.884 milliards de roubles accordés aux coopératives et 210 milliards de roubles accordés aux entreprises privées[58].

Le financement des différentes branches de l'industrie jusqu'au 1er mai 1922 se présente de la façon suivante en milliards de roubles soviétiques.

Industries Nombre d'entreprises Crédits demandés Crédits accordés Pourcentage des crédits accordés par rapport aux crédits demandés
Total Crédit moyen par entreprise
Forêts 8 2.130 1.310 164 65
Aliments 8 1.560 780 98 49
Imprimerie et commerce 9 1.520 1.100 122 73
Produits chimiques 10 1.450 530 53 38
Métallurgie 6 1.040 510 60 50
Textile 8 770 480 60 60
Outils et machines agricoles, huileries 4 410 190 48 47
Mines 3 320 260 87 88
Agriculture 8 66 60 8 86
Divers 7 480 270 38 54

ANNEXE IV
L'affermage.

Des renseignements sur l'affermage paraissent de temps à autre dans la presse soviétique, mais ils ont un caractère occasionnel et décousu qui ne permet pas de donner un aperçu complet et détaillé sur les résultats de la politique d'affermage depuis la publication du décret du 5 juillet 1921 jusqu'au moment où s'arrête notre documentation, à savoir le 1er mai 1922.

1. Les résultats de l'affermage.

Dans son rapport au XIme Congrès du parti communiste qui s'est tenu à Moscou le 25 mars 1922, le Conseil suprême de l'économie nationale décrit comme suit les résultats de la politique d'affermage à la date du 1er mars 1922[59]:

  • a) La grande masse des entreprises industrielles désignées pour être affermées sont des entreprises de la petite industrie; une faible partie seulement appartiennent à l'industrie moyenne. Parmi les entreprises de l'industrie manufacturière désignées pour l'affermage, près des sept dizièmes travaillent pour l'alimentation; les moulins, boulangeries, etc., en constituent notamment les six dizièmes; un tiers seulement des entreprises désignées pour l'affermage appartiennent à d'autres industries.
  • b) 56 à 60 pour cent du nombre total des entreprises désignées pour être affermées l'ont été réellement; presque toutes étaient des entreprises de la petite industrie.
  • c) La plupart des entreprises affermées sont situées dans les gouvernements du sud et du sud-ouest, ainsi que près du Volga; il y en a beaucoup moins dans les gouvernements centraux et très peu dans le nord et le nord-ouest, ainsi qu'en Sibérie et au Turkestan.
  • d) L'intensité de la campagne d'affermage dans chaque gouvernement est en raison inverse de la distance qui sépare ce gouvernement des sources de combustible et de matières premières ainsi que des marchés consommateurs.
  • e) L'intensité de cette campagne diminuera encore au fur et à mesure que s'aggravera la crise des transports et des combustibles.
  • f) Le plus grand nombre des entreprises affermées appartiennent aux industries suivantes: industrie polygraphique: 70 %; industrie alimentaire: 61,6%; industrie travaillant sur métaux: 44,5%, etc. Le plus petit pourcentage, soit 12%, est atteint par l'industrie minérale.
  • g) Les huit dizièmes à peu près des entreprises affermées étaient en activité au moment de l'affermage, ce qui constitue une proportion plus forte que celle rencontrée dans l'industrie russe en général.
  • h) Les 50 pour cent du nombre total des entreprises affermées l'ont été à des entrepreneurs particuliers et les 36 pour cent seulement à des coopératives de tous genres, bien que la loi accorde la préférence à la coopération. Les diverses entreprises et institutions de l'État n'ont pris à ferme que quatre pour cent de toutes les entreprises affermées.
  • i) L'affermage des entreprises industrielles a presque toujours lieu pour une courte durée.
  • j) La forme la plus usitée pour le payement du fermage (80 pour cent des cas) est la livraison d'une partie des produits à l'État; une petite partie des entreprises seulement doivent payer le fermage en espèces.
  • En général, le fermage consiste en une quantité de marchandises fixée à l'avance. La part de la production que le fermier doit livrer à l'État en guise de fermage se monte d'habitude de 5 à 10 pour cent de la production totale de l'entreprise affermée.

Tels sont les renseignements contenus dans le rapport du Conseil suprême de l'économie nationale. Nous avons cherché, d'autre part, à résumer sous forme d'une série de tableaux les informations publiées occasionnellement par l'Economitcheskaia Jizn.

2. L'Affermage des entreprises dans les différentes villes et régions.
(en vertu du décret du 5 juillet 1921).

Villes et Régions Nombre d'entreprises à affermer Nombre d'entreprises affermées
1 oct. 21 1 nov. 21 1 déc. 21 1 janv. 22 1 mars 22
Villes            
Petrograd 234 60 42 72
Moscou 532 143 245 417
             
Régions            
Ukraine 4.338 6.015
Oural 1.016 171 280 497
Sud-Est 13.215 446 1.029
Sibérie 1.576 152
Nord 9
Nord-Ouest 144
Centre industriel 323
Centre agricole 628
Volga 970
Ouest 254
Crimée 162
Kirghizie 38
Turkestan 136

3. L'affermage des entreprises dans les différents gouvernements.

  Au 1er nov. 1921[60]
Kostroma 1  
Vladimir 9  
Novgorod 2  
Nijni-Novgorod 70  
Penza 7  
Rép. tartare 124  
Saratov 2  
Vitebsk 10  
 
  Au 1er déc. 1921[61]
Ekaterinoslav 1.134  
Donetz 745  
Nicolaev 732  
Odessa 585  
Zaporosz 578  
Krementchoug 473  
Volhynie 430  
Tchernigov 427  
Kiev 309  
Kharkov 276  
Podolie 39  
Poltava 257  
Nicolaevsk 65  
Altai 23  
Omsk 8  
Tomsk 10  
Yenisséisk 15  
Irkoutsk 21  
 
  Au 1er janv. 1922[62]
Kouban 98  
Perm 3  
Ekaterinbourg 32  

4. L'affermage des entreprises dans les différentes branches d'industrie.

Branches d'industrie Petrograd[63] Moscou[64] Ukraine[65] Sibérie[66]
Nombre d'entreprises Pourc. Nombre d'entreprises Pourc. Nombre d'entreprises Pourc. Nombre d'entreprises Pourc.
Métallurgie 32 44,0 50 12,0 98 1,6 5 4,0
Produits chimiques 18 25,8 30 7,6 107 1,7
Textile 5 6,9 50 12,0 13 0,2 10 8,0
Cuirs 11 15,2 27 6,6 217 3,6 39 30,0
Bois 3 4,1 17 4,1 23 1,3
Aliments 2 2,7
Tabacs 1 1,3 7 0,1 5 5,6
Bâtiment 22 5,3 47 0,7
Imprimerie 17 4,1 7 0,1
                 
Boulangeries }   157 } 49,3      
Pâtisseries
Charcuteries   47     7 6,6
                 
Moulins 4.953 82,5 31 24,8
Briqueterie 5 4,0
Beurrerie 379 8,9
Savonnerie 12 9,9
Fourrures 9 7,2
Total 72 100,00 417 100,00 5.851 100,00 123 100,00

5. L'affermage des entreprises nationalisées à Moscou (ville et département)[67].

Le nombre d'entreprises désignées pour être affermées s'élève à 1.350. Le nombre d'entreprises affermées jusqu'au 1er février 1922 s'élevait à 372. Elles se répartissaient comme suit:

Entreprises Moscou (ville) Département de Moscou (sans la ville) Total dans le département de Moscou
Nombre total d'entreprises affermées 323 49 372
Nombre d'entreprises qui sont en activité 207 12 219
Nombre d'entreprises qui ne sont pas en activité 86 37 123
Nombre d'entreprises fermées 28 28

Les entreprises qui ne sont pas en activité ou qui sont fermées constituent 41,2 % du nombre total des entreprises affermées. Le nombre d'ouvriers et d'employés qui travaillent dans les entreprises en activité est le suivant:

Entreprises Moscou (ville) Département de Moscou (sans la ville) Total dans le département de Moscou
Nombre d'entreprises affermées qui sont en activité 207 12 219
Nombre d'ouvriers 4.402 490 4.892
Nombre d'employés 974 66 1.040
Nombre moyen d'ouvriers et d'employés par entreprise 25,9 46,3 31,2

Le nombre d'ouvriers employés par les entreprises situées dans le ressort du Conseil de l'économie nationale de Moscou est de 150.000. Le nombre d'ouvriers dans les entreprises affermées est de 4.892, soit 3,2 % du total.

La force motrice utilisée dans les entreprises du ressort du Conseil de l'économie nationale de Moscou est de 557.745 HP. La force motrice utilisée dans les entreprises affermées est de 5.811 HP., soit 1,04 % du total.

La répartition des ouvriers et des employés dans les différentes branches de l'industrie est la suivante:

Industries Pourcentage par rapport au personnel total
Ouvriers Employés
Aliments 45 55
Imprimerie 17,8 10
Produits chimiques 10 9

Le salaire mensuel moyen d'un ouvrier est:

  Roubles
dans la ville de Moscou 3.700.000
dans le département de Moscou 1.200.000

Le salaire mensuel moyen d'un employé est:

  Roubles
dans la ville de Moscou 4.900.000
dans le département de Moscou 1.500.000

La somme totale du fermage à payer atteignait, au 3 mars 1922, 56.000 millions de roubles.

Les versements effectués par les fermiers atteignaient à la même date 6.170 millions de roubles.

6. L'affermage des entreprises nationalisées à Petrograd au 1er mai 1922[68].

D'après les données du bureau d'affermage près le Conseil de l'économie nationale de Petrograd, les résultats de l'affermage se présentaient comme suit au 1er mai 1922:

En tout, 428 entreprises étaient désignées pour l'affermage. Le nombre d'entreprises affermées depuis le 1er août jusqu'au 1er mai 1922 était de 102, à savoir:

  Entreprises
affermées
En août 1921 3
» septembre » 16
» octobre » 13
» novembre » 25
» décembre » 4
» janvier 1922 7
» février » 11
» mars » 11
» avril » 12

La moyenne mensuelle des entreprises affermées était de 13.

Les fermiers appartenaient aux catégories suivantes:

Anciens propriétaires 30
Artels de producteurs 8
Coopératives 5
Unions de coopératives de consommation 7
Institutions soviétiques 9
Particuliers 43

Au point de vue de la durée de l'affermage, les entreprises se répartissent comme suit:

Pour 3 ans 42 entreprises
» 5 ans 55 »
Pour 5-1/2 ans 1 entreprise
» 6 ans 4 »

Du nombre total des entreprises affermées furent transmises effectivement aux fermiers: 98 entreprises, dont 52 avaient déjà commencé le travail au 1er mai.

Les conditions du payement des fermages étaient les suivantes:

Payement exclusivement en espèces 5 entreprises
Payement mixte (en espèces et en nature) 4 »
Payement exclusivement en nature (partie de la production) 92 »
Affermées à titre gratuit 3 »

La proportion moyenne de la production totale payée en guise de fermage est de 10,8 %.

Au premier mai, 21 entreprises seulement avaient payé leur fermage (en argent), dont le total se montait à 20.000 roubles du type-émission 1922, c'est-à-dire 200.000.000 de roubles soviétiques anciens.

Les payements effectués en nature s'élevaient à 40.000 pouds de blé.

7. L'affermage dans l'Ukraine, au 1er mars 1922[69].

Le nombre d'entreprises affermées jusqu'au 1er mars 1922 a atteint 1.469. La répartition des entreprises affermées par branches d'industrie était la suivante:

  %
Aliments 45,0
Cuirs 19,3
Produits chimiques 16,0
Métallurgie 9,9
Bâtiment 3,7
Bois 2,3
Textile 2,6
Imprimerie 0,7
Électrochimie 0,4
Tabac 0,4

La répartition des fermiers par catégories était la suivante:

  %
Particuliers 54
Artels 20
Coopératives 20
Organes d'État 6

Le pourcentage de la production devant être payé comme fermage était le suivant, dans les différentes branches d'industrie:

  % de la
production
Aliments 8  
Métallurgie 8  
Textile 11  
Bâtiment 12  
Produits chimiques 19  
Cuirs 20  
Imprimerie 33  

Le total des recettes produites par l'affermage se répartit comme suit entre les différentes branches d'industrie:

  %
Cuirs 66
Métallurgie 7
Aliments 4
Bois 2,5
Produits chimiques 1,8
Textile 0,9
Bâtiment 0,8

ANNEXE V
Statistique des ouvriers.

1. Nombre des ouvriers employés dans les usines de la Russie des soviets en 1921.

Branches de la production Deuxième semestre 1921 Au 1er janvier 1917 Au 1er janvier 1914
  En milliers Pourcentage par rapport au total En milliers Pourcentage par rapport au total En milliers Pourcentage par rapport au total
Combustibles (total) 568 25,8 585 17,7 370 13,5
  Bois 300 13,6 184 5,6 168 6,1
  Charbon 212 9,7 340 10,3 145 5,3
  Naphte 24 1,0 41 1,2 37 1,4
  Huiles minérales 2 0,1
  Tourbe 30 1,4 20 0,6 20 0,7
             
Minerais (total) 62 2,9 118 3,5 84 3,0
  Extraction de minerais 20 1,0 64 2,3
  Or et platine 9 0,4 3 0,1
  Sel 25 1,1 17 0,6
  Divers 8 0,4
             
Métallurgie (total) 471 21,5 1073 32,4 667 24,2
  Grosse métallurgie 140 6,4 328 9,9 362 13,1
  Machines 228 10,4 } 745 } 22,5 246 8,9
  Produits métallurgiques 103 4,7 59 2,2
             
Matériaux (total) 31 1,4 101 3,1 188 6,8
  a) Matér. de constr. (ciment, briques, etc.) 23 1,0 110 4,0
  b) Verre et faïence 8 0,4 78 2,8
             
Bois (total) 116 5,3 88 2,6 116 4,3
             
Papier (total) 25 1,1 } 81 } 2,4 50 1,8
         
Polygraphie (total) 57 2,6 44 1,6
             
Textile (total) 390 17,7 727 22,0 740 27,0
  Coton 161 7,3 462 14,0 497 18,9
  Laine 69 3,1 88 2,7 94 3,4
  Soie 5 0,2 27 0,8 31 1,1
  Lin, chanvre 71 3,2 108 3,3 90 3,3
  Production mixte 10 0,5 42 1,2 28 1,0
  Vêtements 74 3,4
             
Produits animaux (total) 125 5,7 70 2,1 45 1,6
  Peaux, fourrures 115 5,3 551 1,6 35 1,2
  Poils, brosses, os, etc. 7 0,3 14 0,4 9 0,3
  Savon 3 0,1 2 0,1 1 0,1
             
Produits alimentaires et tabacs (total) 223 10,1 338 10,1 329 12,0
  Farine 90 4,1 41 1,2 38 1,4
  Sucre 63 2,9 160 4,8 155 5,6
  Autres aliments 41 2,0 106 4,0
  Tabacs 29 1,3 30 1,0
             
Produits chimiques (total) 103 4,7 130 3,9 111 4,0
  Acides, sels 17 0,8 14 0,5
  Explosifs 35 1,6 44 1,3 36 1,3
  Allumettes 11 0,5 20 0,8
  Distillation du naphte 21 1,0 6 0,2
  Divers 19 0,9 35 1,2

2. Classification des ouvriers d'après l'âge et le sexe.

A. Dans l'ensemble de l'industrie.

Années Sexe Âge
Femmes Hommes Adultes (18 ans et plus) Mineurs (moins de 18 ans)
  % % % %
1914 31,2 68,8 88,9 11,1
1917 40,0 60,0 86,0 14,0
1921 32,0 68,0 90,9   9,1

B. Dans les diverses industries.

Branche de l'industrie Âge Sexe
Adultes
(18 ans au plus)
Mineurs
(moins de 18 ans)
Hommes Femmes
1914 1921 1914 1921 1914 1921 1914 1921
  % % % % % % % %
Bois 91,1 91,3 9,0 8,7 88,9 74,6 11,1 25,4
Cuirs[70] (91,1) 89,8 (8,5) 10,9 (85,5) 79,2 (16,5) 20,8
Métallurgie 89,3 90,4 10,7 9,6 94,1 84,2 5,9 15,6
Imprimerie 77,6 84,0 22,4 16,0 88,4 63,0 11,6 37,0
Papier 85,9 89,4 14,1 10,6 63,4 65,7 26,6 34,3
Aliments et tabacs 91,7 91,5 8,2 8,5 77,8 73,0 22,2 27,0
Textile 88,5 90,4 11,5 9,6 46,1 45,3 53,9 54,7
Produits chimiques 87,6 92,7 12,4 7,3 63,4 64,0 36,6 35,1
Moyenne 88,9 90,9 11,1 9,1 68,8 68,0 31,2 32,0

ANNEXE VI
Application de la législation sur la protection du Travail.

Les données sur l'application de la législation concernant la protection du travail ne sont ni complètes ni précises.

Les données ci-après ne constituent qu'une illustration approximative du fonctionnement réel des lois sur le travail dans la Russie des soviets à l'heure présente.

1. Activité de l'Inspection technique du travail[71].

Infractions aux lois sur le travail.

Genre d'infraction Nombre d'infractions
1er semestre de 1920 2me semestre de 1920
Chiffre absolu sur 100 visites Chiffre absolu sur 100 visites
État des bâtiments 1.946 58 2.493 39
État des machines 711 22 875 14
Mesures de précaution 2.855 91 3.066 44
Chaudières 1.256 41 1.384 22
Installations électriques 358 12 829 13
Grues, etc. 390 13 324 5
Chauffage, ventilation 2.385 77 2.737 43
Éclairage 630 18 1.075 17
Mesures contre l'incendie 1.306 40 1.914 30
Autres infractions 2.895 87 2.187 34
Totaux 14.372 459 16.894 265

Nombre d'infractions commises en 1920, comparé à celui de 1918.

Genre d'infraction Nombre d'infractions sur 100 visites
1918 1er semestre 1920 2me semestre 1920
État des bâtiments 42,9 48 39
État des machines 31,1 18 14
Mesures de précaution 111,7 70 48
Grues et installations électriques 8,9 19 18
Ventilation, chauffage, etc. 58,7 75 60
Mesures contre l'incendie 28,2 32 30
Autres infractions 68,4 102 56
Totaux 349,9 363 265

Mesures exigées par l'inspection du travail.

1er semestre de 1920:  
  Exigences formulées 9.716
  » exécutées 3.506, soit 35 % des exigences formulées
  » non exécutées 6.210 » 65 % »»
2me semestre de 1920:  
  Exigences formulées 8.694
  » exécutées 3.547 » 39,4 % »»
  » non exécutées 5.147 » 60,6 % »»

Les causes de la non-exécution des mesures exigées se répartissent comme suit:

Causes Sur 100 mesures exigées et non exécutées
1er semestre 1920 2e semestre 1920
Absence de matériaux 55 62,5
Absence de main-d'œuvre 29 24,0
Négligence de l'administration 6 5,7
Autres causes 10 7,8

Accidents enregistrés comme résultats d'infractions aux lois sur le travail.

Sur 100 accidents enregistrés, les causes furent les suivantes:

Causes 1er semestre 1920 2e semestre 1920
Manque de précautions 18,3 21,7
Mauvaise organisation du travail 15,2 17,4
Négligence ou imprudence 34,9 37,8
Surveillance insuffisante 9,0 14,7
Autres causes 22,6 8,4

2. Les conditions du travail en général.

Durée du travail.

La durée normale de la journée de travail est fréquemment dépassée. Voici quelques données relatives à 1921-1922.

D'après les résultats de l'inspection du travail à Moscou, en avril-juin 1921, sur 100 travailleurs, 6,9 fournissaient une journée de travail plus longue que la normale.

En ce qui concerne les entreprises privées, une note de la Vie économique du 3 décembre 1921 montre que sur 377 entreprises inspectées, 272 n'observaient pas les règles sur la durée du travail. Dans 44 entreprises le travail durait de 10 à 12 heures et dans 11 entreprises de 14 à 16 heures.

De même, pour la période toute récente de mars à avril 1922, des infractions nombreuses sont signalées dans le nouveau journal Rabotchi (L'ouvrier) de Moscou[72]. Les infractions sont commises non seulement dans les entreprises privées (12 à 14 heures dans une cordonnerie Ginsburg, 18 heures dans une entreprise de camionnage, 12 heures dans la filature Issaev, etc.), mais aussi dans les entreprises de l'État. Ainsi, pour des réparations d'usines électriques (ex-société de 1880) on a travaillé 14 heures par jour; à l'atelier de couture du Commissariat du travail, plus de 8 heures; aux travaux de la gare à Kazan, 12 heures, etc. À l'atelier de cordonnerie coopératif du Commissariat du ravitaillement il n'y a pas d'horaire fixe.

Repos et congés.

D'après l'inspection du travail de Moscou pour avril-juin 1921, sur 100 travailleurs, 3,6 n'ont pas eu de repos à midi pour leur repas et 7,1 ne jouissent pas du repos hebdomadaire de 42 heures.

En ce qui concerne les congés annuels, les seuls renseignements ont trait à 1920. Ils sont fournis dans Questions du travail de 1921.

Industries Nombre moyen de jours de congé
Automobiles 1,7
Construction de machines («Gomza») 3,4
Produits chimiques 6,6
Matériel de guerre 0,0
Papier 9,2
Allumettes 1,4
Tabac 15,1

Travail des enfants.

Durée du travail.—La moyenne journalière de la durée du travail des enfants était en 1918 de 7,4 heures et en 1919 de 6,4 heures[73].

Au total, en 1921, 40,5 % des enfants avaient une durée de travail supérieure à la normale.

Rabotchi, de mars 1922, cite les infractions suivantes: dans la fabrique Ginsburg, les enfants travaillent plus de 8 heures; dans la bonneterie Pirojkine, les enfants travaillent 12 heures; dans la bonneterie Hermann, les enfants travaillent 9 heures.

Il en est de même de certaines entreprises d'État. À l'atelier de cordonnerie coopératif du Commissariat du ravitaillement les enfants travaillent comme des adultes. Aux garages du Commissariat du travail les enfants travaillent plus de six heures. Enfin, suivant un rapport de Milioutine au Conseil intersyndical de Moscou, une Section de travail de district a porté la journée de travail des enfants à huit heures.

Heures supplémentaires.—En ce qui concerne les travaux supplémentaires (interdits pour les enfants) les pourcentages d'infraction ont été en 1918 de 4,7 % et en 1921 de 11,9 %.

Travail de nuit.—En ce qui concerne le travail de nuit (interdit aux enfants) les pourcentages d'infraction ont été en 1918 de 5,6 % et en 1921 de 6,2 %.

Travail des femmes.

D'après l'inspection du travail de Moscou pour avril-juin 1921, 4 % des femmes faisaient des travaux supplémentaires et 22 % travaillaient la nuit.

3. Les conditions du travail dans les entreprises particulières[74].

Le Conseil intersyndical du département de Moscou a inspecté les conditions du travail dans une série d'entreprises particulières à Moscou. En tout furent inspectées, dans les sept districts de la ville, 695 entreprises, dont 377 employaient de la main-d'œuvre salariée.

Le nombre total des ouvriers et des employés travaillant dans ces entreprises était de 3.368, dont 1.988 hommes, 1.021 femmes, 203 adolescents et 56 enfants. La majorité de ces entreprises est composée de magasins (151), d'installations de coiffeurs (44), d'ateliers mécaniques (41), de cafés, de boulangeries, etc.

En ce qui concerne l'embauchage et le renvoi des ouvriers on a constaté que dans la plupart des cas l'enregistrement obligatoire auprès des Sections du travail n'était pas effectué. Ainsi, dans l'arrondissement de Basmanov, l'enregistrement n'était effectué pour aucune des entreprises inspectées; il en était de même dans celui de Zamoskvoretsk; un faible pourcentage d'enregistrement était accusé par les autres arrondissements de Moscou. Le renvoi se faisait également dans la grande majorité des cas par l'entrepreneur, sans participation du syndicat.

Le contrôle de l'application de la journée de six heures et de huit heures donna d'intéressants résultats. Sur le nombre total de 377 entreprises employant de la main-d'œuvre salariée, 105 seulement observaient la loi sur la durée du travail, tandis que 272 commettaient des infractions à ces lois.

Dans 44 entreprises on a constaté la journée de 12 heures et même, dans 11 entreprises, la journée de 14 à 16 heures. Beaucoup d'entreprises ont adopté la journée de 9 heures et dans 46 entreprises la durée du travail n'est pas déterminée.

Les salaires varient beaucoup. Dans un grand nombre d'entreprises est appliqué le salaire à la tâche ou le salaire à la journée. Dans certains cas le travail est payé en nature, par exemple en pain dans les boulangeries, en marchandises dans d'autres ateliers, etc. Le montant du salaire est fixé d'habitude d'un commun accord.

Des congés n'étaient accordés dans aucune des entreprises visitées.

Les versements à l'assurance sociale n'étaient souvent pas effectués.

En ce qui concerne l'organisation syndicale des ouvriers et employés des entreprises examinées, on constate que dans l'arrondissement de Zamoskvoretsk il n'y a pas un seul ouvrier ou employé syndiqué; de même dans l'arrondissement de Basmanov; dans celui de Khamovniki il y a un petit nombre d'ouvriers syndiqués, surtout dans les anciennes entreprises.

Le plus grand nombre de syndiqués se rencontre dans les arrondissements suivants: ville: 432 syndiqués dans 5 entreprises; Sokolniki: 185 syndiqués dans 10 entreprises; de Rogojsko-Simonovsky: 34 syndiqués dans 8 entreprises.

4. Absences illégales.

Le tableau suivant indique le nombre moyen des jours de travail et d'absence d'un ouvrier en 1920 dans les entreprises industrielles importantes dites «d'attaque».

Administration centrale industrielle Nombre moyen des ouvriers pour 1920 d'après les listes d'usines Nombre de jours de présence par ouvrier Nombre de jours chômés par ouvrier pour cause de:
Travail effectif Non activité de l'entreprise Participation aux délégations Congé Maladie Causes légitimes Causes illégitimes Jours fériés Total
Automobiles 58.994 258 1,6 10,2 1,7 23,9 5,5 25,1 29,9 106,3
Construct. de machines («Gomza») 26.485 222 0,1 14,9 3,4 32,3 8,9 36,6 49,1 144,2
Prod. chimiques. 5.034 257 0,0 12,8 6,6 20,1 6,0 24,0 39,5 108,8
Papier 5.464 250 0,4 8,8 9,2 19,4 10,2 15,0 53,1 115,9
Allumettes 1.886 233 16,0 2,5 1,4 18,8 8,8 24,5 61,1 117,1
Tabac 625 237 4,7 10,3 15,1 22,0 3,1 20,1 68,8 139,1
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