La Russie en 1839, Volume I
NOTES
[1: La suprématie du pontife romain, présidant aux droits et aux décrets de l'Église, assure la perpétuité de la foi; voilà pourquoi le vicaire de Jésus-Christ restera souverain temporel tant que les chrétiens n'auront pas trouvé un autre moyen de lui garantir l'indépendance. C'est à lui d'user des grandeurs sans en abuser; devoir chrétien que les malheurs de l'Église ne lui ont que trop enseigné. Le faible et tout pacifique pouvoir que la politique a laissé au représentant de Dieu sur la terre n'est plus aujourd'hui pour ce prêtre le chef de tous les prêtres, qu'un moyen de donner au monde l'exemple unique des vertus de l'apôtre, pratiquées sur le trône; et ce qui lui rendra possible cet effort surnaturel, c'est le sentiment de sa dignité. Il sait qu'il est nécessaire à l'Église et que l'Église est nécessaire à l'accomplissement des vues de Dieu sur le genre humain; cette conviction suffirait pour élever un homme ordinaire au-dessus de l'humanité.]
[2: Le grand-duc héritier avait été malade quelque temps avant l'époque de son arrivée à Ems.]
[3: Trois années écoulées et un changement de règne, ont déjà enlevé à cette remarque une grande partie de son à-propos.]
[4: Ne se trouvera-t-il pas en France un certain nombre d'hommes qui se consacreraient à reproduire chez nous cette salutaire institution fondée depuis longtemps en Prusse?]
[5: Femme de la halle.]
[6: En corrigeant les épreuves de cette lettre, je reçois une copie littérale, et longtemps égarée, de celle de mon grand-père, que je crois pouvoir insérer ici. La noblesse et la simplicité de langage du condamné justifient tout ce que j'ai dit de lui plus haut.
«Adieu, mon fils, adieu. Conservez le souvenir d'un père qui vit arriver la mort avec tranquillité. Je n'emporte qu'un regret, c'est celui de vous laisser un nom qu'un jugement fera croire un instant coupable de trahison, par quelques hommes crédules. Réhabilitez ma mémoire, quand vous le pourrez; si vous obteniez mes correspondances, ce serait chose bien facile. Vivez pour votre aimable femme, pour votre soeur que j'embrasse; aimez-vous, aimez-moi.
«Je crois que je verrai arriver avec calme ma dernière heure; au reste il faut y être arrivé.
«Adieu encore, adieu,
«Votre père, votre ami.»
«C.
28 août à dix heures du soir 1793. ]
[7: Une des principales causes du malentendu, c'est que beaucoup de gens croient que les mots gentlemen et gentilhomme sont synonymes.]
[8: Alors régent, plus tard Roi, sous le nom de George IV.]
[9: L'auteur s'en rapporte au lecteur de bonne foi pour accorder ses apparentes contradictions; apprendre, c'est se contredire; et de ces divers retours qu'on fait sur les choses et sur soi-même sort une opinion définitive la plus raisonnable qu'il soit possible d'indiquer; la formuler définitivement appartient au philosophe, mais le voyageur doit rester dans son rôle; il y a un degré de conséquence qui n'est qu'à la portée du mensonge: ce n'est pas à celui-là que j'aspire.]
[10: Chez les Russes le souverain s'est appelé longtemps Grand-Prince.]
[11: L'engourdissement prolongé des Slaves est la conséquence de ces siècles d'esclavage, espèce de torture politique qui démoralise ensemble et les uns par les autres, les peuples et les rois.]
[12: La bonne foi dont je fais profession ne m'a pas permis de rien retrancher à cette lettre: seulement je prie de nouveau le lecteur qui voudra bien me suivre jusqu'au bout d'attendre pour se former une opinion sur la Russie qu'il ait pu comparer entre eux mes divers jugements avant et après le voyage.]
[13: Écrit le 10 juin 1839.]
[14: Pierre Ier n'a pris le titre d'empereur qu'en 1721.]
[15: Dickens, dans son voyage aux États-Unis, dit que la même chose a lieu aujourd'hui en Amérique.]
[16: L'auteur a assisté lui-même à ce désenchantement lors de son retour de Moscou.]
[17: Schnitzler est l'auteur de la meilleure statistique qu'on ait faite sur la Russie.]
[18: On lit dans M. de Ségur les faits suivants: «Pierre, lui-même, a interrogé ces criminels (les Strélitz) par la torture; puis, à l'imitation d'Iwan-le-Tyran, il se fait leur juge, leur bourreau, il force ses nobles, restés fidèles, à trancher les têtes des nobles coupables, qu'ils viennent de condamner. Le cruel, du haut de son trône, assiste d'un oeil sec à ces exécutions; il fait plus, il mêle aux joies des festins l'horreur des supplices. Ivre de vin et de sang, le verre d'une main, la hache de l'autre, en une seule heure vingt libations successives marquent la chute de vingt têtes de Strélitz, qu'il abat à ses pieds, en s'enorgueillissant de son horrible adresse. L'année d'après, le contre-coup, soit du soulèvement de ses janissaires, soit de l'atrocité de leur supplice, retentit au loin dans l'Empire, d'autres révoltes éclatent. Quatre-vingts Strélitz, chargés de chaînes, sont traînés d'Azoph à Moscou; et leurs têtes, qu'un boyard tient successivement par les cheveux, tombent encore sous la hache du Czar.» Histoire de Russie et de Pierre-le-Grand, par M. le général comte de Ségur, pages 327 et 328. Paris, Baudouin, 1820, deuxième édition.]