La vie et la mort du roi Richard III
SCÈNE IV
Une autre partie du champ de bataille.
Entrent NORFOLK avec des troupes; CATESBY vient à lui.
CATESBY.--Du secours, milord de Norfolk! Du secours! du secours! Le roi a fait des prodiges au-dessus des forces d'un homme. Il brave audacieusement tous les dangers. Son cheval est tué, et il combat à pied, cherchant Richmond jusque dans le sein de la mort. Du secours, cher lord, ou la bataille est perdue!
(Une alarme. Entrent le roi Richard, Catesby.)
LE ROI RICHARD.--Un cheval! un cheval! Mon royaume pour un cheval!
CATESBY.--Retirez-vous, seigneur, et je vous ferai trouver un cheval!
LE ROI RICHARD.--Lâche, j'ai joué ma vie sur un coup de dés, j'en veux courir les risques.--Je crois en vérité qu'il y a six Richmond sur le champ de bataille; j'en ai déjà tué cinq pour celui que je cherche! Un cheval! un cheval! mon royaume pour mon cheval!
(Ils sortent.)
(Alarmes. Entrent le roi Richard et Richmond; ils sortent en combattant. Retraite et fanfares. Entrent ensuite Richmond, Stanley apportant la couronne; plusieurs autres lords et des troupes.)
RICHMOND.--Louange à Dieu, et à vos armes, victorieux amis! La journée est à nous; ce chien sanguinaire est mort.
STANLEY.--Vaillant Richmond, tu as bien rempli ton rôle. Tiens, j'ai arraché, pour en orner ta tête, du front inanimé de ce misérable couvert de sang, la couronne qu'il a si longtemps usurpée. Porte-la, possède-la et connais-en tout le prix.
RICHMOND.--Grand Dieu du ciel, je dis amen à tout cela.--Mais, avant tout dites-moi, le jeune George Stanley est-il vivant?
STANLEY.--Oui, milord; il est sain et sauf à Leicester, où nous pouvons, si vous voulez, nous retirer à présent.
RICHMOND.--Quels hommes de marque ont péri dans l'autre armée?
STANLEY.--John, duc de Norfolk, Walter, lord Ferrers, sir Robert Brakenbury et sir William Brandon.
RICHMOND.--Qu'on les enterre avec les honneurs dus à leur naissance.--Qu'on proclame le pardon pour les soldats fugitifs qui reviendront se soumettre à nous, et ensuite, comme nous en avons pris l'engagement sacré, nous réunirons enfin la rose blanche et la rose rouge.--Puisse le ciel si longtemps irrité de leurs haines, sourire à la beauté de leur union! Quel est le traître qui pourrait m'entendre, et ne pas dire amen? Longtemps l'Angleterre en délire s'est déchirée elle-même; le frère a versé aveuglément le sang de son frère; le père dans son emportement massacrait son fils, et le fils était forcé de devenir l'assassin de son père, tous divisés par les détestables divisions d'York et de Lancastre. O qu'aujourd'hui enfin, Richmond et Élisabeth, légitimes héritiers des deux maisons royales, s'unissent ensemble de l'aveu de l'Éternel! Et que leurs successeurs (grand Dieu! si c'est ta volonté) donnent aux générations à venir le riche présent de la paix au doux visage, de la riante abondance, et des beaux jours de la prospérité! fais tomber, ô Dieu bienfaisant, l'épée des traîtres qui voudraient ramener ces jours meurtriers, et faire verser à la pauvre Angleterre des ruisseaux de larmes sanglantes. Qu'ils ne vivent pas pour jouir de la prospérité de leur patrie, ceux qui voudraient par la trahison déchirer ce beau pays; enfin les plaies de la guerre civile sont fermées, et la paix revit. Puisse-t-elle vivre longtemps! ô Dieu, dis-nous amen.
(Tous sortent.)
FIN DU CINQUIÈME ET DERNIER ACTE.