Le Salon des Refusés: Le Peinture en 1863
Donnez-vous la peine de vous asseoir.—La ménagerie d'un suspect amusant.—Gare aux animaux!—Ils nous donnent un sauf-conduit.—Le Temps a fait son temps.—Un condamné par la raison qu'il est criminel. Ne pourrait-on pas le condamner pour autre chose?—On se jette les cartes et les verres à la tête.—A la tour de Nesle!—On parle encore de Béranger.—L'auteur des Étourdis, comédie en vers, fait la campagne d'Italie.—La gloire n'est que de la fumée.—Une boucherie au clair de là lune.-A nous, Français! etc.... (Varsovienne).—Celle fois, le général Hoche est bien tué.—Théorie du sous-lieutenant.
Nous allons, pour nous délasser, nous arrêter un peu devant deux peintures tout à fait amusantes; l'une est de M. Fitz-Barn, dont on ne trouve pas le nom dans le catalogue, mais ce ne peut être que par erreur, car le tableau de ce peintre fait un tel tapage qu'on ne peut soupçonner l'auteur d'avoir voulu se cacher. Tout d'un coup, nous nous trouvons dans une grande cage avec tous les animaux de pantomime. J'appelle ainsi les animaux fantastiques, domestiques et comiques, tels que chat, singe, rat, pie, grenouille, chien, poule, geai, hibou, etc., etc., dont les mouvements, les allures et les physionomies sont vraiment risibles ou étonnants.—Avec nous, dans la même cage, crient, gloussent, coassent, jappent, miaulent et grouillent les animaux que je viens de citer. A travers le treillage, des figures singulières nous examinent très-attentivement. Le singe épluche ou épile un rat, ce qui indigne une pie.—Deux petits chiens bleus se battent pour rire.—Une grenouille montre sa tête immobile à fleur d'eau.—Un chat-huant attend la nuit avec impatience, et de ses deux lueurs fixes, qu'il a pour yeux, regarde passer le temps.—Bref, tous les animaux sont dans leurs attributions respectives.—Quittons ce petit pandémonium. Les animaux ne s'opposent pas à notre sortie de la cage.
L'autre peinture représente un vieillard qui ressemble au Temps, assis sur un débris de colonne. Il a fait des progrès depuis la Mythologie; il a un chapeau, des lunettes, des bottes à revers et une lyre; il fait au jury, sans doute, une grimace des plus grotesques.
Il est impossible que M. Paul Claparède, auteur de cette petite grisaille, ne l'ait pas conçue et peinte à la suite d'une absorption exagérée d'un hatchi inconnu, mais dont les effets doivent être gais.
M. Viel-Cazal est encore un peintre hardi, un vigoureux réaliste qui n'a pas plus peur du sujet que de la couleur.
Il a exposé un étude de Tête de cheval et un très-grand tableau, la Dernière heure, dont voici la légende:
«Un cheval vicieux, condamné pour cette raison à être abattu, et ayant déjà les crins coupés, cherche à s'échapper des mains des équarrisseurs, après avoir rompu ses entraves.»
La description n'est pas très-exacte.—Le cheval s'est échappé, il a même renversé, en s'échappant, l'un des équarrisseurs, et il enlève l'autre à ses naseaux ensanglantés; un boule-dogue s'élance à fond de train sur le cheval.
Ce tableau est très-vivant, très-vrai, peint largement; il méritait enfin de s'échapper des mains des jurés et de s'installer dans le salon de la liberté et de l'audace.
Une Dispute de jeu, par M. Thiery, est un tableau romantique qui aurait eu du succès en 1833; mais le succès ne prouve rien, et M. Thiery a fait une jolie peinture de cape et d'épée.
Holà! tavernier du diable! il ne s'agit pas d'apporter à boire! sus aux querelleurs! enlevez les cartes si leurs épées vous laissent faire, ou, vive Dieu! votre tonnelle enragée sera fermée avant le couvre-feu!
M. Allard Cambray a fait un beau Louis XI, à l'eau-forte, dans la superbe collection de M. Cadart; mais, hélas! Agés... hélas! il en a peint un bien faible. On voit qu'il s'est plus inspiré de la pâle chanson de Béranger que de l'histoire:
Heureux villageois, dansons,
Sautez, fillettes
Et garçons!
Unissez vos joyeux sons,
Musettes
Et chansons!
Ainsi, dans ce tableau, non moins décoloré que le refrain, sautent et dansent les heureux villageois devant le cadavre encore vivant du roi Louis XI.
M. Andrieux nous montre le général Bonaparte accompagné de non escorte, le matin du combat. (Campagne d'Italie, 1796.)
Bonaparte, entouré de quelques officiers, galope dans un champ en désignant du doigt classique des héros l'endroit où il y a le plus de fumée.
C'est une vignette coloriée assez habilement et dont le dessin dénote une main plus exercée à exécuter sur bois de petites manœuvres militaires qu'à les peindre.
M. Édouard-Alphonse Aufray a trois tableaux, dit le catalogue, mais je n'en ai trouvé qu'un, Choc de cavaliers. On dirait que c'est la Bataille des Cimbres, qui a donné aux Refusés son portrait en miniature (son portrait, pas tout à fait cependant); mais il y a tant d'enthousiasme pour cette Bataille, dans ce choc, qu'on voit bien que les cavaliers de M. Aufray se souviennent des Cimbres de Decamps. Ils se battent presque aussi furieusement.
Les deux autres tableaux de M. Aufray, désignés dans le livret: Crépuscule et Lever de lune, semblent être réunis dans le Choc des cavaliers pour ne former à eux trois qu'une trinité. En effet, c'est par un crépuscule et par un lever de lune que se choquent les cavaliers.
Le Cavalier polonais, de M. Guillaume Regamey, est plus triste et moins animé. Il songe à sa patrie et attend. Son cheval aussi est là qui attend. Malgré le soin et le patriotisme, ce tableau, qui a des qualités, n'est pas d'une belle couleur. On pourrait croire, du reste, qu'il a été exposé malgré son auteur, car il n'est pas indiqué dans le catalogue.
Les Dernières moments du général Hoche n'ont pas fait faire un bel ouvrage à M. E. Courtois; mais je crois que la médiocrité de ce tableau tient plus au genre,—genre ou art militaire,—qu'au talent modéré du peintre.
On peut s'affermir dans cette opinion, en examinant avec attention,—rude travail,—tous les tableaux de bataille, de revue ou de guerriers, qui sont aux deux Expositions; les uns sont plus médiocres, les autres plus mauvais.
IX
SOMMAIRE
Malice du Jury.—Elle est noire, mais cousue de gros fil blanc.—«Mon impartialité bien connue....»—Prenons le chemin de fer de Castelnau.—Nous arrivons aux Tuileries.—Réhabilitation d'un condamné.—Encore une victime.—Une tragédie de MM. Ponsard et Latour de Saint-Ybars.—Ta vie, en cinq points secs!—Une fable vue au microscope.—Quelle tête!—On met à Shakespeare la perruque à marteau de Ducis ou celle des lions de l'Institut.—Henri IV est mort!—Hoche pacifie la Vendée.—Les comestibles vont dévorer le cuisinier.—Le duc d'Orléans au bal masqué.—Le petit dieu malin.—1852 et 1815.—Les suspects au bal des victimes.—De bien douces larmes.—Pauvre petite!—Elle aime Polichinelle.—Si jeune!...—Tableau selon saint Jean.—«J'ai, Jean-Marc Mathieu, huissier au tribunal, etc....»—Décidément, c'est une langue!... mais pas française.—Vente par autorité de justice.—Autre tableau religieux selon saint Marc.
Parmi les tableaux que le jury a été enchanté de voir exposés dans la salle des Refusés, parce que ces tableaux-là ressemblent aux primitifs joujoux en bois dont les enfants ne veulent plus, et qu'ils font éclater la raison du jury dans toute sa splendeur, parmi ces tableaux il faut citer un paysage de M. Castelnau, qui n'a pas eu, comme son maître M. Brivet, l'énergie de s'exposer en plein catalogue.
Moi, qui ai la résolution d'être d'une complète franchise, je cite également les choses marquantes en bien ou en mal. Je voudrais pouvoir parler de tout, mais j'ai des limites.[1]
D'ailleurs, il y a mauvais et mauvais: le mauvais amusant et le mauvais ennuyeux.
C'est à ce mauvais-là qu'appartiennent les imitateurs ou plutôt les victimes de MM. Brascassat, Flandrin, Gérôme, Muller, etc.
Mais c'est dans le mauvais amusant qu'il faut classer le paysage enfantin de M. Castelnau. Il y a un petit chemin de fer avec locomotive, un petit pont, des petites maisons en bois, des petits arbres en zinc et des petits chevaux-Brivet.
Cela fait doucement sourire; cela rappelle l'enfance; on croit qu'on vient soi-même de mettre en rang tous ces jouets.
Un autre paysage qui voulait être sérieux, mais qui a l'air d'un décor du théâtre des marionnettes aux Tuileries, c'est l'Entrée de Thérouanne, par M. Delalleau.
M. Désiré Philippe a été reçu pendant 15 ans. La commission d'examen a trouvé que c'était assez.—Cependant ce n'est pas assez.
Il fallait que les portraits envoyés par M. Philippe fussent en décadence; or, ils sont exactement ce qu'ils étaient,—d'une valeur qui n'a pas bougé.
Le premier portrait, celui de M. Charles Vincent, est très-ressemblant; le second, celui d'un collégien, doit-être encore plus ressemblant: cela se devine.
Dans son tableau, une, Famille de Tritons, M. Athon Donner est une victime de M. Millet.
M. Doneaud n'est pas dépourvu des qualités qui causent l'étonnement. Il a fait une véritable Jézabel morte qui indique qu'un membre de l'Institut avait d'abord dirigé ses études vers la tragédie, à la manière de MM. Ronsard et Latour.
Cette Jézabel est d'un mauvais—mais de ce mauvais déplaisant dont je parlais tout à l'heure.
Eh bien!—voilà d'où vient l'étonnement,—M. Doneaud a exposé un autre tableau qui est bien fait, c'est: Suite de jeu. L'intention philosophique y est peut-être trop indiquée: des cartes, de l'or, une dague et du sang!
Voilà le tableau!
La plus gigantesque des œuvres refusées c'est le Berger et la mer,—fable!—par M. Doyen.
Ce berger est plus grand que la mer qu'il contemple.
Son genou est un immense rocher.—Et M. Doyen appelle cela une fable!
M. Duckett, suspect, a fait un affreux portrait qui doit être celui de M. Brascassat.
M. Hippolyte Dubois à traduit Shakespeare à la façon de Ducis.
Figurez-vous une Titania, le Songe d'une nuit d'été, faits par un prix de Rome, sans doute, élève de M. Gleyre—Gleyre obscur,—dirait le Tintamarre.
Obéron ne s'y tromperait pas et n'irait certes pas verser le suc des fleurs sur les paupières de cette Titania-là.
Les Funérailles du géneral Marceau. L'armée autrichienne lui rend les honneurs militaires de concert avec les Français.
Nous ne ferons pas pour ce tableau de M. Dupray comme les Autrichiens et les Français pour Marceau: nous ne lui rendrons pas même les honneurs militaires (Voir ce que nous avons dit du tableau, la Mort du général Hoche).
M. Delord a fait un joli Persan—en bois.
Des légumes et des comestibles énormes sur le premier plan.—Au fond, sur le cinquantième plan, à quelques lieues on aperçoit dans une cuisine un petit cuisinier lilliputien apprêtant ses fourneaux pour faire cuire ces gros légumes qui pourraient bien le manger ou l'engloutir lui-même.
Tel est le tableau assez plaisant de M. Fanchon.
On dirait en voyant le portrait de M. Horace Vernet par M. Ficatie, que ce peintre a voulu faire le portrait du duc d'Orléans.
Cette peinture est encore du genre primitif et amusant dans lequel se sont essayés avec tant de succès MM. Brivet, Castelnau, Delord, etc.
J'aurais voulu citer l'auteur d'un Franc-maçon éclatant et celui de la Naissance d'un Poulain-Brivet; mais je n'ai pu découvrir leurs noms.
C'est dans cette série de peintres qu'il faut classer M. Hudei, auteur d'un Mendiant suspect, allégorie fine: ce mendiant, c'est l'amour.... Ah!—que dirait M. Hamon?
M. Mallet, auteur du 24 septembre 1852 à Viviers d'Ardèche; M. Regnier, qui a fait le Retour aux Tuileries, 20 mars 1815, et M. Rocques, peintre sur faïence, doivent être nomenclatures dans cette même classe.
A ces diverses classifications de peintres, les Suspects, les Philosophes, les Victimes—victimes nombreuses, hélas! de MM. Signol, Pujol, Gleyre, Flandrin, Hamon, Brascassat, Yvon, etc.,—les Primitifs ou Antédiluviens, les Poltrons, les Montagnards, etc., etc., il faut ajouter les Tristes.
M. Guillaume Regamey, qui a fait le Cavalier polonais dont j'ai parlé, est de cette série.
Il faut y placer également un peintre modeste, caché comme une violette, qui a fait une petite pauvresse plantée devant une boutique pleine de polichinelles et de poupées. On devine dans la main qui se tortille une envie démesurée de posséder, de toucher les joujoux. C'est une de ces peintures attendrissantes qui réussissent toujours en public. Le peintre l'a prise sur nature et a eu le bon goût de ne donner à ce sujet que la proportion convenable.
M. Fourau, non moins élégiaque, a mis dans un cadre de chêne ou de sapin une petite fille encore vivante, mais qui a l'air de bien souffrir.
M. Claude Maugey a exposé deux tableaux: le Christ abandonné et un Coin d'atelier. Le cadavre du crucifié est bien abandonné en effet.—Il est étendu sur le sol dans un désert. M. Maugey a rendu hardiment et même originalement l'abandon immense, plus grand que la solitude.
Ce tableau, bien conçu et bien rendu, avait été commandé, m'a-t-on dit, par un célèbre et noble amateur qui n'en a pas voulu, le jury l'ayant refusé!
Il y a encore des gens qui croient au jury!
Dans tous les cas, ce n'était pas une raison.
Le noble amateur n'étant pas le jury, n'avait pas le droit de refuser.
Le Coin d'atelier est une simple petite toile qui montre des pinceaux, une palette, des couleurs et un protêt. Triste, triste,—comme dit Hamlet,—triste allusion à la vie des peintres qui ne vendent pas leurs tableaux vingt mille francs, car alors ils ne les vendent pas du tout. Il n'y a pas de milieu.
La peinture rapporte des millions ou rien. C'est affaire de chance comme en tout art.
Je ne sais si M. Maugey a voulu agiter ces hautes questions, et s'il croit, comme M. Millet, que la peinture est une langue, mais heureusement il n'en a pas l'air. Il conviendrait d'ailleurs avec moi que ces petites vessies et ce papier timbré n'ont pas une grande importance, ni une éloquence victorieuse et tranchant la discussion.
Pour couper court à toute réplique, au lieu de cette douce plainte, il aurait fallu, alors, représenter dans un grand tableau les huissiers noirs emportant tout et le peintre rouge pleurant aux pieds du jaune propriétaire impitoyable.
Voilà qui aurait corroboré l'apophthegme de M. Millet.
J'admets le tableau religieux de M. Maugey, le Christ abandonné, mais je n'admets pas le Christ mort, de M. Zipelius. Celui-là est déplorable; il a l'air d'avoir concouru pour le prix de Rome.
X
SOMMAIRE
Orage.—Dispersion des insectes.—Nouvelle liste d'exécutés.—On manque de tombereaux.—Le Jury a encore deux peintres tués sous lui qui se portent bien.—Dernière fournée de victimes innocentes.—Gentillesses à l'aquarelle et au pastel.—Traduction libre de: La garde meurt..., etc.—Éloge des aqua-fortistes.—Adresse de M. Cadart: rue Richelieu, 66 (réclame).—La bataille de Waterloo recommence.—La sculpture.—Tout prouve que j'ai raison.—Otons nos paletots.—Un nouveau suspect qui a du talent.—Moisson de statuaires.—Conclusion.
Tout d'un coup le ciel s'obscurcit, un torrent de paysagistes nous inonde. C'est comme une invasion de sauterelles en Afrique; il faudrait du canon pour les disperser.
Cependant presque tous ces paysagistes ont du talent. C'est ce qui les a fait refuser.
Citons les plus dignes et leurs tableaux.
M. Berne-Bellecour, Plâtreries, près Fontainebleau.
M. Besnus, Bestiaux au pâturage.
M. Auguste Bouchet, auteur d'un superbe Chemin creux dans la forêt de Montmorency.
M. Berthelon, Paysage (non inscrit dans le catalogue).
M. Chauvel, Dans la Gorge aux Loups, Fontainebleau.
M. Louis Cordier (non inscrit), une Rue de village très-bien peinte.
M. Dutilleux, Étude en forêt et Effet du soir.
M. Fontaine (encore un suspect non inscrit!), Paysage.
M. Eugène Lambert, Vue prise en aval du l'Ile de Veaux.
M. Laîné (suspect), Paysage.
M. Lansyer, un Poste au bord de la mer.
M. Lemariée, Vieilles tanneries à Montargis.
MM. Lalanne et Larochenoire, introuvables dans le catalogue, auteurs, M. Lalanne qui avait toujours été reçu, de Ruines dans un paysage, et M. Larochenoire, de Chevaux au pâturage.
M. Célestin Leroux, dont j'ai remarqué les trois Sites de Landebaudière.
M. Edouard Lobjoy, qui a fait une très-belle Vue de l'Église San-Tommaso, à Gênes.
M. Longueville,—qui figure à l'exposition ordinaire,—Joinville à Nogent.
M. Marois (non inscrit), Paysage.
M. Michelin, Vallée d'Hyères.
M. Morel-Lamy, Bords de la Marne et Promenade près le canal, pastel.
M. Masure (non inscrit), Marine.
M. Perret (François), les Bords de l'Oise.
M. Petit (non inscrit), Paysages.
M. Pissaro, Paysage.
M. Lavery (non inscrit), Paysage.
M. G. de Serres, Crépuscule.
M. Sutter (David), Paysages de Fontainebleau.
M. Vollon, Paysage (Charenton).
M. Valnay (non inscrit), Paysages.
M. Wagrez—admis à l'Exposition et mentionné,—la Forêt par la neige.
J'en passe et d'aussi bons.
Tous ces paysages sont bien.—Pas un ne ressort absolument. C'est du talent ordinaire, mais c'est du talent.—On n'a pas le droit de repousser le talent, même quand on n'en a pas. Plusieurs des auteurs de ces tableaux sont à la fois admis et refusés et figurent aux deux expositions. Presque tous ont deux ou trois peintures à la Contre-Exposition; je n'ai cité que les meilleures.
Deux autres peintres très-connus, MM. Jongkind et Eugène Lavielle, qui, lui, ne s'est pas fait inscrire dans le catalogue, ont eu de charmants paysages renversés, mais non tués,—au contraire,—sous le jury.
Quelques affreuses choses, le Portrait de M. F., par M. Tichit; la Femme adultère, par M. Hébert; la Fête romaine sous Pompée, par M. Navlet; un hideux fouillis sur faïence par M. Rocques, qui ne s'est pas assez caché, et le Portrait de M. Dambry, inventeur de la capsule dite tire-feu,—(remarquez l'invention, je vous prie),—sont les dernières peintures qui m'aient arrêté à cause de leur tristesse ou de leur comique involontaire.
Madame Pauline Viancin, dont le nom manque dans le catalogue, a fait un très-joli portrait au pastel.
M. Tournayre est auteur d'un beau paysage au fusain. Un dessin de M. Saint-François, la Fièvre, est des plus remarquables: un cadavre en délire se relève dans ses draps sur un grabat; ses crispations, sa maigreur en sueur, les effets d'ombre et de lumière sont arrachés à la nature fantastique. C'est admirable.
La Promenade près le canal, pastel, par M. Morel-Lamy, et une Plage, aquarelle, par M. Laurens, tous deux déjà nommés; le Naufrage de la Méduse, d'après Géricault, fusain par M. Eustache (non inscrit); des fleurs et des fruits au pastel sont à citer.
M. Frédérick Junker, qui n'est pas sans habileté, a voulu faire de l'esprit. Il a représenté le livre des Misérables ouvert à la page où Cambronne répond si énergiquement aux Anglais qui le somment de se rendre. Un morceau de sucre brûle sur une pelle pour ôter l'odeur et mieux faire sentir l'intention du dessinateur, qui a appelé cette mauvaise plaisanterie: le Dernier mot du réalisme.
GRAVURE
M. Bracquemond, un des meilleurs aqua-fortistes, un des artistes qui se sont le plus distingués dans la magnifique galerie de M. Cadart, a laissé au salon des Refusés un superbe portrait d'Érasme, d'après Holbein, eau-forte commandée par le ministère d'État, et un Tournoi, d'après Rubens, gravure commandée par l'administration des Musées pour la calcographie.
Il paraît que le jury n'est pas d'accord avec cette administration, ni avec le ministère d'État.
M. Léopold Desbrosses a une belle eau-forte: Waterloo; épisode du chemin creux d'Ohain.
«L'instant fut épouvantable. Le ravin était là, inattendu, béant, à pic sous les pieds des chevaux, profond de deux toises entre son double talus. Le second rang y poussa le premier et le troisième y poussa le second; les chevaux se dressaient, se rejetaient en arrière, tombaient sur la croupe, glissaient les quatre pieds en l'air, pilant et bouleversant les cavaliers..., et quand cette fosse fut pleine d'hommes vivants, on marcha dessus, et le reste passa.»
Ces lignes expressives ont été comprises et rendues par M. Desbrosses.
Il faut encore signaler les gravures espagnoles de M. Manet: le Martyre de Saint-Barthelemy, d'après Ribeira, par M. Masson; une Tête, d'après Jean Bellin, par M. Balleroy, Refusé craintif dont le catalogue ne parle pas; enfin les Folles de la Salpétrière qui représentent une Sortie de sœurs de charité; les Bords de l'Oise, d'après Daubigny—(on voit une grange),—et divers croquis par M. Amand Gautier.
SCULPTURE
Mon opinion est que la sculpture est en déroute. Cela s'explique parce qu'il faut être savant pour être sculpteur, et que pour un art manuel, on rechigne à se bourrer d'études littéraires et scientifiques. La statuaire ne doit représenter que la beauté pure, correcte et nue, froide et sans défaut comme la matière qu'elle emploie.—La statuaire, c'est la mythologie, c'est l'antiquité. Malgré les vigoureuses œuvres d'un des derniers sculpteurs de génie que nous ayons eu, Rude, je trouve absolument contraire à la statuaire, nos paletots, les habits de nos généraux et leurs chapeaux. Les riches et mâles costumes des guerriers de Louis XIII et de Louis XIV même luttent mal en marbre avec les draperies et surtout avec la nudité païenne.
Le réalisme ne peut pas être aussi heureux en statuaire qu'en peinture. Il fait trop d'efforts, d'efforts inutiles.
Une des plus hardies statues dans toute l'Exposition, est celle de l'Ignorance qu'on a refusée. Je n'ai pu découvrir le nom de l'auteur.
Un nègre herculéen est rivé à la glèbe. Sans même essayer de tout briser en détendant ses gros muscles, il s'allonge à terre en beuglant comme un animal qui hume l'air. La stupidité puissante, énorme, musculaire est parfaitement exprimée, et il y a une grande vigueur dans l'exécution.
La Panthère de Java guettant des petits lapins, par M. Delabrière, est un joli plâtre.
M. Leclerc a un médaillon à l'Exposition des Reçus et un buste bien ébauché à celle des Refusés.
Le buste de M. J.-S. de G., par M. Matabon, est très-soigné; il n'a rien d'audacieux, il ressemble au roi Victor-Emmanuel, il est convenable de tous les côtés. Quoi ou qui diantre à pu le faire refuser?
M. Auguste-Flavien Poitevin, fils de l'auteur du Vengeur, avait envoyé au Jury un modèle en plâtre d'un Christ.—Pas une raison de refus ne peut se découvrir.—M. Poitevin fils a reçu et reçoit encore de son père les meilleures leçons de sculpture. Il en a donné la preuve en son Christ. On sent dans l'exécution une jeunesse qui n'exclut ni l'habileté ni la fermeté.
Le Naufragé, par M. Pètre; Diderot, par M. Lebœuf; des bustes, par MM. Durst, Virey et Alfred Michel, une Tête de cuirassier, sans nom d'auteur; la Famille Cabasson, très-spirituelle scène de saltimbanques qui font leur boniment, terre-cuite, par M. Eugène Decan, auraient on ne peut mieux figuré au milieu des œuvres de sculpture admises.
CONCLUSION
J'ai terminé la revue des peintres, sculpteurs, graveurs et dessinateurs Refusés contre tout droit et toute justice. Je ne crois avoir omis rien d'important.—Je n'ai pas voulu ne parler que des œuvres dont l'exécution ordinaire, mais complètement satisfaisante, sautait aux yeux de tout le monde. J'ai cité hautement les peintures trop rares où la hardiesse et l'originalité se laissent entrevoir. J'ai signalé et classé les mauvais tableaux, les croûtes et leurs auteurs, et je n'ai pas cessé de prendre, le plus franchement du monde, la défense des peintres,—tout en leur disant ce que je crois être leurs vérités,—contre la niaiserie du public et des critiques d'art, et contre l'arbitraire du jury.
Je répète qu'il est honteux et absurde d'avoir rejeté les tableaux de MM. Whistler, Colin, Chintreuil, Gautier, Briguiboul, Pinkras, Pipard et autres que j'ai déjà plusieurs fois nommés. La surabondance des beaux paysages et des nature-morte, dignes de maîtres, révolte aussi contre leur rejet.
Ces refus sont une condamnation à mort du jury. Tous les vrais artistes demandent l'exposition libre et la suppression de toute espèce de censure ou de commission d'examen.—Ils l'auront,—nous l'aurons!
Nous avons encore bien des reproches à faire au jury. Pour se donner des airs de raison, n'avait-il pas, l'espiègle! poussé la malignité jusqu'à donner les places les plus en vue et les meilleures aux plus détestables, risibles et primitives peintures que les garçons d'administration et de bureau auraient refusées aussi, mais moins sérieusement, moins solennellement que l'Institut.
Un fait encore grave, c'est que les refuseurs appliquent maintenant, au lieu d'une simple marque à la craie, un R. ineffaçable sur la toile même des tableaux qui ne leur plaisent pas. De sorte que les peintres sont obligés de faire rentoiler leurs œuvres à grands frais pour pouvoir les vendre aux amateurs et bourgeois que le stigmate effraye et qui croient au jury. Je ne suis pas trop sensible et je ne m'attendris pas facilement sur le sort des pauvres artistes, mais c'est outre-passer le droit que de les marquer.
M. le maréchal Vaillant a dit dans son discours officiel, le jour de la distribution des prix aux peintres, que les artistes n'avaient assurément pas à se plaindre de ce siècle: j'affirme alors qu'ils n'ont jamais eu à se plaindre, car, certes, si l'on veut se donner la peine d'aller les prendre au gîte ou de les regarder dans leurs terriers, on ne les trouvera pas très-heureux.
Une des choses les plus révoltantes à constater, c'est, je le répète, l'unité de refus pour les œuvres dites réalistes.
Que signifie la beauté de convention pour un art comme la peinture, dont l'esthétique consiste à représenter ce qu'on voit et ce qui est?
Quand on veut peindre la nature, ne faut-il pas être vrai?
Le choix, à moins d'être faux, est-il possible? N'y aurait-il pas discordance, outre absurdité, à ne montrer que de jolies choses?
J'ai publié, il y a six ou sept ans, dans le journal l'Artiste, un article sur cette vieille question. Je n'ai pas changé d'opinion et je crois devoir, pour finir, le reproduire tel que je l'ai fait:
Cet article n'est ni la défense d'un client, ni le plaidoyer pour un individu, c'est un manifeste, une profession de foi; il commence comme une grammaire, comme un cours de mathématiques, par une définition:
Le réalisme est la peinture vraie des objets.
Il n'y a pas de peinture vraie sans couleur, sans esprit, sans vie ou animation, sans physionomie ou sentiment. Il serait donc vulgaire d'appliquer la définition qui précède à un art mécanique:
L'esprit ne se peint que par l'esprit, d'où il suit qu'il serait impossible à beaucoup de gens de lettres de faire le portrait d'un homme spirituel.
(Peut-être quelques lecteurs intelligents trouveront-ils inutile de défendre un art dont la base est la vérité, et qui acclame toutes les manifestations de l'esprit humain,—qu'elles viennent de l'imagination ou de la mémoire, de la réflexion ou de l'observation,—à la condition qu'elles soient sincères et individuelles. Cependant il faut bien défendre, puisqu'on attaque.)
Le paysagiste qui ne sait pas remplir d'air son tableau, et qui n'a la force que de rendre exactement la couleur, n'est non seulement pas un peintre réaliste, mais même pas un peintre; car la vie d'un paysage, c'est l'air.
L'écrivain qui ne sait dépeindre les hommes et les choses qu'à l'aide de traits convenus et connus, n'est pas un écrivain réaliste; il n'est pas un écrivain du tout.
Le mot réaliste n'a été employé que pour distinguer l'artiste qui est sincère et clairvoyant d'avec l'être qui s'obstine, de bonne ou de mauvaise foi, à regarder les choses à travers les verres de couleur.
Comme le mot vérité met tout le monde d'accord et que tout le monde aime ce mot, même les menteurs, il faut bien admettre que le réalisme, sans être l'apologie du laid et du mal, a le droit de représenter ce qui existe et ce qu'on voit.
Or, Vénus est rare, et il y a longtemps que les nymphes diaphanes et les dieux aux arcs d'argent ont fui avec nos bois et notre ciel, et se sont réfugiés dans de certains volumes et tableaux.
On ne conteste à personne le droit d'aimer ce qui est faux, ridicule ou déteint, et de l'appeler idéal et poésie; mais il est permis de contester que cette mythologie soit notre monde, dans lequel il serait peut-être temps de faire un tour.
D'ailleurs, on abuse de la poésie. On la met à toute sauce, et ce n'est pas le cas de dire que la sauce fait le poisson.
La poésie pousse comme l'herbe entre les pavés de Paris. Elle est rare, et quand il s'en trouve un brin, les pieds-plats l'ont bien vite écrasée. Laissons la poésie tranquille! Chaque époque, chaque être a la sienne, et cependant il n'y en a qu'une. Arrangez-vous. Quant à moi, je crois que cette poésie, que chacun pense avoir dans sa poche, se trouve aussi bien dans le laid que dans le beau, dans le fantastique que dans le réel, pourvu que la pensée soit naïve et convaincue, et que la forme soit sincère. Le laid ou le beau est l'affaire du peintre ou du poète: c'est à lui de choisir et de décider; mais à coup sûr la poésie, comme le réalisme, ne peut se rencontrer que dans ce qui existe, dans ce qui se voit, se sent, s'entend, se rêve, à la condition de ne pas faire semblant de rêver. Il est singulier, a ce propos qu'on se soit spécialement suspendu aux pans de l'habit du réalisme, comme s'il avait inventé la peinture du laid. Je voudrais bien que l'on m'indiquât le poète ou le peintre dont l'œuvre ne renferme pas quelques monstres et beaucoup d'horreurs? Est-ce Shakespeare ou Rembrandt? Raphaël même ou Homère? Perse ou Rubens? Véronèse ou Rabelais? La plupart des difformités invraisemblables, des énormités hideuses, tout ce qui est matière à dégoût, horreur et épouvante, a été inventé ou dépeint par les grands artistes du passé.
Racine lui-même se complaît dans la peinture des vilaines passions et des monstres odieux que vomit la plaine liquide, il est moins pardonnable à Albert Durer de nous avoir montré les faces atroces des Israélites diluviens, qu'aux peintres actuels de nous faire voir des nudités du jour, certainement moins affreuses que celles qu'on rencontre en général, et qui, d'ailleurs, à aucun litre ne justifieraient le reproche de peinture du laid, puisqu'elles s'épanouissent dans la belle nature, sous des verdures pleines de couleurs et de frissons. Ne faudrait-il pas, pour satisfaire le goût des prétendus amateurs du beau, mettre les scellés sur les mœurs qui ne sont pas pures et les nez qui ne sont pas ioniens? Qu'ils prennent une glace, et qu'ils ne sortent plus de chez eux, alors.
L'antiquité surtout, la Mythologie, qui est beaucoup plus vraie qu'on ne le pense, regorgent d'abominations. Les types les plus repoussants, peints ou imprimés, se trouvent dans les bibliothèques et dans les musées; il n'y a point de critiques qui s'en effarouchent. Que les réalistes jouissent de la même liberté! Si les gens en paletot qui passent devant nos yeux ne sont pas beaux, tant pis! Ce n'est pas une raison pour mettre une redingote à Narcisse ou à Apollon. Je réclame le droit qu'ont les miroirs, pour la peinture comme pour la littérature. Les aventures d'à-présent ne sont pas moins étonnantes, réjouissantes et invraisemblables que celles des temps passés. Il y a même beaucoup de bourgeois dont l'existence n'excitera pas moins la curiosité, dans quelques siècles, que celles de Mercure et de Jupin. Les figures que nous rencontrons sont aussi grotesques que bien des têtes conservées par l'art grec, et la bourse de Paris ressemble au Parthénon.
Tout cela devrait engager les amateurs, membres de l'Institut et conservateurs, à sortir un instant de Claros et de Trézène, à descendre de l'Olympe et du Double-Mont, où les confine depuis si longtemps l'amour du beau.
D'autres s'obstinent non moins utilement à se promener dans les longues allées des parcs de Vatteau. Les marronniers de ces messieurs sont encore en fleurs au mois de novembre; il y a toujours des frou-frou de soie dans les bosquets—pommadés,—et les fleurs sentent la vanille et le patchouli; l'eau qui s'élance au-dessus des massifs ne cesse pas d'être irrisée dans un air couleur d'arc-en-ciel.
Quant aux romantiques, depuis qu'ils n'ont plus à exterminer la famille des Atrides, leurs moustaches d'hidalgo ressemblent absolument à celles des vieux de la vieille. Les plumes de leurs feutres, les rubans de leurs pourpoints ont déteint.
C'est en vain qu'ils prennent les volets de Paris pour les jalousies de Séville et qu'ils fredonnent d'une voix chevrotante l'air de l'Andalouse, pas un soupir ne filtre à travers les persiennes derrière lesquelles ne se fait entendre nul frôlement de robe effarouchée surprise par quelque fantôme de Bartholo. La rue de Rivoli, semblable à une flamberge, a traversé de part en part le vieux Paris. C'était là seulement que les romantiques pouvaient rêver au moyen âge! Il ne leur reste plus que leurs dagues, vieilles ferrailles dont le cliquetis ne se fait entendre que dans les feuilletons de Dartagnan; mais le journal [2] de ce héros lui-même est désert comme un estaminet où l'on a changé la qualité du gloria!
Quelques jeunes enthousiastes essayent bien encore de courir les aventures; hélas! les sergents de ville eux-mêmes n'y prennent pas garde. Des gamins de Paris hurlent aux chausses des derniers romantiques. Mais bientôt ces galopins gouailleurs sont essoufflés.
Ils ont alors besoin, pour se mettre à l'abri de l'ironie et pour ne pas encourir la peine du talion, de produire des œuvres. L'exegi monumentum leur semble être leur loi: ils s'y soumettent et attrapent au vol leurs souvenirs comme des mouches. Alors ils vont voyager dans la plaine Saint-Denis et dans le bois de Boulogne. L'aspect de la nature les émeut; ils versent de douces larmes qui font pousser de grands chênes et des tilleuls pleins de chants d'oiseaux.
Sous les feuillages ils aiment des figurantes amoureuses et des couturières dévouées qui leur font de la tisane avec la fleur de ces mêmes tilleuls. Quand vient l'hiver, ils ne peuvent plus s'embrasser sous les feuilles, car celles qui leur restent sont des feuilles de papier et il faut écrire dessus. Alors, semblables en cela aux rossignols, ils ne peuvent plus chanter.
Le grattement perpétuel qu'ils opèrent sur leur front en fait sortir, non pas Minerve, mais des myriades de danseurs qui renoncent au beau monde pour se livrer à la littérature. Ces nouveaux venus ont toujours l'air de polker; la plupart d'entre eux sont riches et ce qu'on appelle de bons partis.
Ils cultivent les lettres en dépit d'abord de leurs mères, qui bientôt ne peuvent résister à leur gloire en style coulant et facile; alors ils mettent les deux pieds dans les feuilles publiques, et les bellâtres deviennent de petits pédants.
Ils jugent avec des façons de beaux danseurs les livres sérieux et autres; à force de valser, ils deviennent influents et font cercle dans les foyers, les soirs de première représentation. Leur quadrille est organisé.
Puis viennent les professeurs qu'on appelle maîtres et qui font des cours d'art, comme si la littérature ou la peinture s'apprenait! De vieux journalistes conservent la causerie française.
Ce n'est que parmi eux que la courtoisie avec mouches sur le visages et paniers aux reins fait des révérences aux beaux parleurs. Ce sont les derniers cabotins qui aient recueilli fidèlement les traditions du dix-huitième siècle.
Ils parlent de Voltaire et de Diderot et s'appliquent à prendre leurs manières. Ils regrettent le café Procope, et la démolition du café de la Régence les fait songer aux ruines de Carthage et de Pompeï, et à la décadence de ce pays.
Heureusement le bec de gaz du Divan Lepelletier leur luit comme un phare d'espérance. C'est le dernier rayon du Permesse.
Il y a aussi de nouveaux romantiques: ceux-là ne sont pas moins curieux. Ils refont une charte à l'instar de la fameuse préface de Cromwell, qui fait encore du bruit parmi les gens de 1830. Ils ont inventé la littérature industrielle, la poésie Crampton.
Ils soutiennent que le meilleur moyen de régénérer les lettres est de chanter les bienfaits du gaz, de la machine à coudre, etc. De sorte que les inventeurs et notables commerçants n'auraient plus besoin de réclames. Les livres seraient des livrets et des guides. Pourquoi nos aïeux n'y ont-il pas pensé? Nous aurions de beaux poèmes épiques sur la chandelle et des romans ou des tableaux prodigieux sur la pomme de terre.
Cependant, au milieu de tout ce monde, on découvre quelques meneurs plus agaçants ou plus riches que d'autres. Un deux, que MM. Delaville et Luce de Lancival (maître du membre de l'Institut, Villemain) eussent appelé folliculaire, est réputé homme d'esprit autour des tables recouvertes de drap vert. Il obtient des places, porte haut la tête, et, comme Diavolo, il a sur les épaules un manteau de l'effet le plus beau. L'œil cherche parmi les plis de ce manteau un petit bout de dague.
Il est évident qu'il ne doit son maintien fier, son attitude rejetée en arrière, qu'à l'opinion considérable que lui inspire sa force; si l'on écrivait à coups de poing, il faut croire qu'il serait un hercule.
Ce critique demandait un jour à son feuilleton la signification de ce mot: Réalisme. Par malheur, son feuilleton, n'ayant pas de dictionnaire, ne put lui répondre, et il fut réduit à admirer un recueil de chansons dites populaires, dont l'auteur commence à être servi au dessert des grands dîners.
Ce jeune homme chante au piano, fait les délices des dames et exécute à lui tout seul, comme aux Folies-Nouvelles, de ravissantes opérettes. C'est un farceur de société. On dit de lui:—Nous avions hier ce délicieux X...
Les couplets de cet agréable être jouissent de la faveur de deux maîtres de la scène. Le premier a pris son art au sérieux, et il a longtemps essayé de refaire à sa manière les vers de Corneille, de Racine, d'André Chénier, en haine du romantisme. Ses grands succès l'ont engagé à faire autre chose.
Le voilà qui confectionne, dans l'attitude du Molière de la rue Fontaine, un brodequin à Thalie. Saint Crépin ne l'inspire pas et le brodequin va mal.
Quant à l'autre auteur dramatique, la froideur du théâtre moderne a échauffé sa bile.
Il est devenu tout rouge et s'est mis à la besogne, décidé à recommencer la vieille gaieté gauloise.
Cette gaieté eut sans doute réjoui nos pères. Elle me fait souvenir de l'esprit français, qui, ne sachant plus où se fourrer, dans un temps où les loyers sont si chers, est allé se nicher dans la tête d'un jeune écrivain, comme disent certaines revues hebdomadaires. Ce que cet esprit français fait faire de bêtises au jeune écrivain est incalculable.
Cependant on ne saurait refuser à cet esprit français le prix de Rome. La peinture réaliste a allumé sa mousqueterie; l'esprit français crible malicieusement la Baigneuse de Courbet de grains de sel gris.
Un autre esprit, pour n'être pas réputé absolument français, n'est pas moins pétillant, car il pétille depuis 1825 et appartient à la fameuse éclosion de 1830.
Il fait des verss comme un autre ferait... des vers. Rien ne lui coûte. Ce n'est pas comme au public,—car le public achète ses productions.—Ce merveilleux improvisateur et prestidigitateur veut qu'on fourre de l'esprit partout, même dans ses poches à lui; si le réalisme parvient à être aussi spirituel que lui, sa sanction n'est pas douteuse. Mais cet esprit va trop vite pour qu'on puisse le rattraper, il vaut mieux le laisser passer; au train dont il va, ce ne sera pas long, etc., etc.
Tout ce monde ne croit qu'au passé et forme un immense carnaval. Ces armures, pourpoints, culottes et péplums ne vont pas aux gens d'à présent. Celle friperie est rouillée, fanée, trouée, rapée; tout est trop grand ou trop petit.
Pourtant cette armée d'artistes, de littérateurs, peintres et critiques, assiste à la représentation de ce qui se fait, en germe ou en moisson, et parle en secouant la tête, des Grecs, des Romains, des Allemands, des Anglais, etc., et de l'éclosion de 1830, absolument comme ces chauves qui, les soirs de grande solennité, au Théâtre-Français, toussent les noms de Mole, de Monvel et de Mademoiselle Mars.
L'art en est là. Discuté et envahi par ces fameux hommes d'esprit, ces délicieux causeurs, dont les œuvres intitulées: Petites nouvelles, Petites causeries, Revues de Paris, Coups d'épingle, etc., réjouissent le provincial; ces poètes en or et argent qui disparaissent comme l'infâme potichomanie; ces amoureux du joli, inventeurs du rire mouillé, et autres illuminant leurs phrases d'adjectifs de toutes couleurs; ces vieux romantiques passés comme les morts de leurs ballades; ces romantiques nouveaux qui ne peuvent pas passer, malgré leur locomotive; ces pédants et pions inoccupés qui se font juges et critiques au lieu d'aller se faire tuer en Crimée; ces habitués d'estaminets qui cuvent leur bière sur des œuvres consciencieuses; ces journalistes ignares et ignorants qui expriment des opinions qui ne leur appartiennent pas plus qu'à d'autres; ces fondateurs de revues, et jolis messieurs qui se servent du titre de journaliste pour en imposer aux femmes de mauvaises mœurs et leur appliquer le chantage de l'amour; ces amateurs enfin, bourgeois et beaux fils, bacheliers évadés du collège Bourbon, que la Faculté de droit rejette dans la Société des gens de lettres. Voilà pour la littérature.
Quant à la peinture et à la statuaire, elles sont escaladées par les traditions et imitations, par l'Académie, par l'étranger enfin, comme la musique par le tapage, les tambours et les instruments de cuivre.
Enfin, le réalisme vient!
C'est à travers ces broussailles, cette bataille des Cimbres, ce pandémonium de temples grecs, de lyres et de guimbardes, d'alhambras et de chênes phthisiques, de boléros, de sonnets ridicules, d'odes en or, de dagues, de rapières et de feuilletons rouillés, d'hamadryades au clair de la lune et d'attendrissements vénériens, de mariages de Monsieur Scribe, de caricatures spirituelles et de photographies sans retouche, de cannes, de faux-cols d'amateurs, de discussions et critiques édentées, de traditions branlantes, de coutumes crochues et couplets au public, que le réalisme a fait une trouée.
Vous figurez-vous le tapage produit par tant de gens bousculés, culbutés, roulant les uns par dessus les autres, dégringolant de l'Hélicon, de la rue de Bréda, de la Chaussée-d'Antin et de toutes les Académies? Que d'articles, que d'imprécations, que d'odes, que de rouge, d'or, de bleu, de jaune, de vert et de noir ameutés sont sortis des cadres et des journaux!
Et tout cela pourquoi? Parce que le réalisme dit aux gens: Nous avons toujours été Grecs, Latins, Anglais, Allemands, Espagnols, etc., soyons un peu nous, fussions-nous laids.
N'écrivons, ne peignons que ce qui est, ou du moins ce que nous voyons, ce que nous savons, ce que nous avons vécu.
N'ayons ni maîtres, ni élèves!
Singulière école, n'est-ce pas? que celle où il n'y a ni maître ni élève, et dont les seuls principes sont l'indépendance, la sincérité, l'individualisme!
A part quelques allusions du moment et quelques détails vieillis, cet article rend encore assez mon opinion. Les diverses écoles et écoliers déteints, voulant s'opposer à la transformation ou plutôt à la marche—(je ne dis pas au progrès)—de l'art, à sa vie, ont encore la même envie, mais un peu moins criarde.
Ce prétexte, l'amour du beau, leur est commode. Tout ce qui est faux est bon—pour eux.—Encore une fois, et pour la millième, je ne fais pas comme un peintre, je suis loin de nier l'imagination. Ce qu'un homme de génie rêve est sublime quand il le réalise; mais justement ce rêve, devenu œuvre, est sublime parce que le poète l'a vécu, parce qu'il est vrai. De même, un peintre qui représente ce qu'il a vu, tel qu'il l'a vu, s'il possède son art, est un grand peintre.
La sensation qu'il a éprouvée donne la vie (c'est le génie) à son œuvre. S'il a rencontré et aimé Vénus, qu'il la fasse! Mais si une scène de campagne, quelque chose d'ordinaire, de l'espèce quotidienne, un de ces incidents humains, un de ces aspects qu'on trouve à chaque pas, est rendu par lui avec vérité, ce n'est pas moins beau. Vénus, en art, n'est pas préférable, comme sujet, à Quasimodo.
Depuis une quinzaine d'années que le réalisme se développe sur toute la ligne de l'art, en peinture surtout, il n'est pas seulement repoussé par les jurys, il est compris à faux et pris à rebours par des hommes de talent et même par des artistes qui n'y voient, comme M. Prud'homme, qu'un parti pris de ne représenter que des choses abjectes. J'en vais citer, comme exemple, le morceau suivant de M. Paul de Saint-Victor:
«Il serait cruel de parler des tableaux de M. Courbet; l'enfance de l'art désarme comme l'enfance du corps.
Comment un peintre, à qui ses adversaires les plus décidés ne pouvaient refuser la science matérielle de la brosse et de la palette, a-t-il pu produire les caricatures puériles signées de son nom?
Comment l'habile praticien de la Chasse au chevreuil et du Rut du Printemps, semble-t-il, aujourd'hui, étranger aux premières notions du dessin et aux éléments de la perspective?
Quoi qu'il en soit, tout en souhaitant que M. Courbet se relève, il est permis à ceux qui détestent les doctrines qu'il personnifie de se réjouir d'une chute qui donne la mesure de leur abaissement.
Il est démontré aujourd'hui que le réalisme attaque la main, après avoir perverti le goût et paralysé l'imagination.
Ce n'est pas impunément qu'on adore le laid et qu'on s'adonne aux trivialités; tôt ou tard l'aberration du système entraîne la dégradation du métier.
M. Millet s'enfonce de plus en plus dans la voie où M. Courbet s'est perdu. L'art, pour lui, se borne à copier servilement d'ignobles modèles.
M. Millet allume sa lanterne, et cherche un crétin; il a dû chercher longtemps avant de trouver son Paysan se reposant sur sa houe.
De pareils types ne sont pas communs, même à l'hospice de Bicêtre.
Imaginez un monstre sans crâne, à l'œil éteint, au rictus idiot, planté de travers, comme un épouvantail, au milieu d'un champ. Aucune lueur d'intelligence n'humanise cette brute au repos. Vient-il de travailler ou d'assassiner? pioche-t-il la terre ou creuse-t-il une tombe?
La voix publique a trouvé son nom: c'est Dumollart enterrant une bonne.
L'exécution la plus énergique rendrait à peine supportable une pareille figure. Or, le pinceau de M. Millet s'amollit et s'allourdit à vue d'œil: d'année en année sa couleur s'embourbe et son dessin se relâche. Les terrains, les chairs, les haillons, tout est fait de la même substance baveuse et mollasse. Faiblesse pour faiblesse, je préfère le poncif veule à l'horreur débile. Ramenez-nous aux Vénus lisses et aux Apollons ratissés.
Mieux dessinée et mieux modelée, la Femme cardant de la laine est laineuse de la tête aux pieds. La monotonie du faire recouvre maintenant, comme d'une couche d'ennui, toutes les toiles de M. Millet. L'âme est aussi absente que dans le tableau précédent. Il n'y a pas même de mélancolie dans l'apathie de cette femme ovine. Elle carde la laine, comme les moutons qui l'ont fournie broutaient l'herbe; E lo perche non sanno, c'est Dante qui l'a dit.
On peut louer dans le Berger ramenant son troupeau un paysage crépusculaire d'une tonalité fine et juste; mais le pâtre et ses hôtes sont cloués au sol: je les défie d'avancer. Quelle tournure d'esclave abruti affecte d'ailleurs ce triste berger! Sommes-nous en France ou à Carthage? Va-t-il rentrer à la ferme ou dans l'ergastule?
Si du moins cette matière inerte était naturelle; mais elle a la raideur d'un parti pris théorique. M. Millet semble glorifier l'idiotisme; il interdit l'expression à ses figures rustiques, comme les prêtres égyptiens la défendaient à leurs dieux.
On voit qu'il attache je ne sais quel sens mystérieux à la vague bestialité qu'il leur prête. Étrange façon d'honorer le peuple, pour un peintre voué aux choses plébéiennes, que de le représenter sous les masques dégradés de l'abrutissement! Comme si les races champêtres n'avaient pas leur beauté et leur élégance! comme si le travail du champ frappait le laboureur de la stupidité de son bœuf!
Cette fausse école est d'ailleurs, au Salon de cette année, en plein désarroi. La facture tombe, la vulgarité reste, et le réalisme s'évanouit.»
Comme on le voit en tête de cette sortie contre le réalisme, c'est principalement à Courbet que M. de Saint-Victor s'en prend.—En effet, Courbet a eu sur la peinture actuelle une influence visible que l'Académie veut vainement combattre.—Les deux ébauches du maître-peintre, que M. de Saint-Victor a vues à l'Exposition, sont à peine des ébauches. Courbet ne les avait envoyées, avec son tableau des curés ivres, que pour former le nombre trois, puisque le jury avait décidé que les peintres pouvaient leur adresser trois tableaux.
Qui connaît un peu les peintres sait qu'ils se seraient bien gardés de manquer à ce chiffre. Quand Courbet le voudra, il fera deux excellents tableaux de ces deux susdites ébauches.
«Il est démontré aujourd'hui que le réalisme attaque la main, etc.,» dit M. de Saint-Victor.
Le tableau des curés, dont le véritable titre est: Retour d'une conférence, en ce moment à Londres, répondrait au critique qui reconnaîtrait forcément que jamais Courbet n'avait poussé plus loin «la science matérielle de la brosse et de la palette.» Quant à l'adoration du laid, je crois y avoir suffisamment répondu.
Fernand Desnoyers.
FIN.
ERRATA
Quelques fautes d'impression se sont glissées dans cette brochure:
Page 6: à la place de: dans les tableaux refusés que ceux reçus, il faut: dans les tableaux refusés que dans ceux reçus.
M. Briguiboul n'a point d'e à la fin de son nom, et il faut un t au milieu du nom de M. Whistler, etc.
Plusieurs autres petites fautes, comme «aura» au lion de «aurait,» page 42, ont passe, et nous n'en parlons que par excès de conscience minutieuse.
Une faute plus grave est celle qui dérange le sens d'une phrase, page 42: à la place de: Il continuera par ce qu'il est convaincu, finalement, etc.; l'auteur avait mis: Il continuera parce qu'il est convaincu.—Finalement, etc....
Finalement commence une autre phrase.
PEINTRES, SCULPTEURS ET GRAVEURS
NOMMÉS DANS CE LIVRE
Allard-Cambray.
Ancourt.
Andrieux.
Aufray.
Balleroy (A. de).
Barret.
Baudry.
Bellenger.
Berne-bellecour.
Berthelon.
Besnus.
Biard.
Blin.
Bouchet.
Bouguereau.
Bracquemond.
Brascassat.
Briguiboul.
Brivet.
Cabanel.
Cals.
Castelnau.
Chauvel.
Chaussat (Emma).
Chintreuil.
Claparède.
Cogniet (Léon).
Colin.
Cordier.
Corot.
Courbet.
Courtois.
Darjou.
Darru (Louis).
Daubigny.
Decan.
Decamps
Delaroche (Paul).
Delabrière.
Delaporte (M^{lle}).
Delalleau.
Delord.
Desbrosses (Jean).
Désiré.
Dietsh.
Donner.
Doneaud.
Doyen.
Doré.
Dubois.
Duckett.
Dupray.
Durst.
Dutilleux.
Eeckout.
Eustache.
Fanchon.
Fantin.
Ficatie.
Fitz-Barn.
Flandrin.
Fontaine.
Fourau.
Galimard.
Gagnon (Louis).
Gariot.
Gautier.
Gérôme.
Gilbert.
Gleyre.
Gorin.
Graham.
Hamon.
Harpignies.
Hébert.
Hudei (Louis).
Jongkind.
Julian.
Junker.
Laass d'Aguen.
Laîné.
Lambron.
Lambert.
Lansyer.
Lalanne.
Lapostolet.
Larochenoire.
Laurandeau (Aglaé).
Laurens.
Lavielle.
Lebœuf.
Leclerc.
Legros.
Lemarié.
Leroy.
Leroux.
Lobjoy.
Loiseau.
Longueville.
Maistan.
Mallet.
Manet.
Marois.
Mazure.
Masson.
Maugey
Matabon.
Méry.
Michel.
Michelin.
Millet.
Morel-Lamy.
Muller.
Navlet.
Pagez.
Perret.
Petit.
Pètre.
Philippe.
Pinkas.
Pipard.
Pissaro.
Poitevin.
Pujol.
Regnier.
Regamey.
Rocques.
Rosi.
Saint-François.
Saint-Marcel.
Schitz.
Serres (G. de).
Signol.
Sutter.
Tabar.
Tichit.
Thibault (Marie).
Thiery.
Tournayre.
Valnay.
Vaudé.
Vernet (Horace).
Viel-Cazal.
Viancin (Pauline).
Virey.
Vollon.
Wagrez.
Whistler.
Yvon.
Zipelius.
TABLE
PREMIER SOMMAIRE:
Bonnes intentions des peintres.—Mauvais tableaux.—Le Jury devenu méchant.—Imitation des cris des peintres.—On leur applique la question du Jury.—L'Empereur la résout.—Grand embarras des Refusés.—Ils se reçoivent.—Les lutteurs, bataillon de la Moselle en sabots.—Brivet-le-Gaillard.—Quels types!—Les poltrons de la peinture.—Le Comité de salut... des Refusés.—Son plébiscite.—Honneur au courage malheureux!—Unité de Refus.—Succès espéré des Refusés.—M. Harpignies a tous les droits.—La Grenouille et le Lièvre, fable.—M. Briguiboul dans les deux camps.—Des choux, des panais, des choux-fleurs, navets, navets!—Discussion raisonnable.—La discussion continue.—La cage.—M. Whistler est le plus spirite des peintres.—Défense des moulins non attaqués.—Illumination a giorno par la peinture.—Du critique d'art.—De l'influence de la philosophie allemande sur la peinture.—Abrutissement des peintres.—Classification des peintres—École de Paris.—École de Montmartre.—École de Rome.—École de Fontainebleau.—La raison même reprend la parole.—The end.
DEUXIÈME SOMMAIRE
Grande, moyenne et petite classe des Refusés.—Les braves.—Les suspects.—Les poltrons.—On demande les têtes des suspects.—Messieurs, le maître-peintre Courbet!—Évidence de sa supériorité.—Parenthèse.—Encore le critique d'art.—Paysages de M. Daubigny en plusieus chants.—Hautes opinions de Courbet à propos de la peinture.—Révolution-Courbet.—Ornithologie des critiques d'art.—Ce qu'ils avaient sur les yeux.—Réalisme et Romantisme.—Haro sur le maître-peintre!—Les bons curés, tels que les voulait Béranger et que ne les veut pas M. Veuillot. —Exposition du Refusé en chef.—Peinture à l'encre ou description.—Conclusion raisonnée.
TROISIÈME SOMMAIRE
Missive d'un élève, jeune encore, au nom des Refusés.—Étrange prétention.—Un petit lopin.—Arguments sans réplique, réponse accablante.—Le critique d'art revient sur l'eau.—Il est question de M. Brivet-le-Gaillard et de Molière.—Naïveté indispensable.—Premier prix donné à M. Whistler.—Plusieurs tuiles se détachent et tombent sur les têtes du Jury.—La bêtise afflige les uns et réjouit les autres.—Déclaration de principes. —Dithyrambe bien appliqué à M. Signol.—L'art militaire et la religion mal représentés dans les arts.—Le suspect Briguiboul est acquitté.—La Mythologie de M. Émile Loiseau n'est pas adressée à Émilie Demoustier.—Mosaïque ou dessin à petits carreaux.—M. Amand Gautier jette la pierre à la femme adultère.—Le sujet est mis au concours par tout le monde.—Le public refait le tableau.—Un amant en déshabillé, vu de dos.—Le Muséum-Gautier. —Un petit air qui n'est pas de Nargeot.—La Tombe de l'Oiseau ou l'Architecte en démence.—Imitation de Vadé à l'adresse du jury.—La province ne vote pas comme Paris.—Preuves à l'appui.
QUATRIÈME SOMMAIRE
La noblesse des Refusés remonte à bien avant les croisades.—Les imbéciles n'admettent que leurs nez.—Heureuse comparaison entre plusieurs peintres et une fleur exotique.—Le 93-Courbet.—Bain d'eau-forte.—La soupe est sur la table des aqua-fortistes!—Un guitariste se révèle.—Tabatière à diable.—Des peintres devenus pierrots.—Conquête de toutes les Espagnes.—La séance est ouverte et levée.—Les rassemblements sont défendus.—Bonjour. Thomas.—Un poète prisonnier.—L'Infant n'a plus de droits au trône.—Le vieux persiste.—Portraits. Silence!—Le Jury-Charivari.—Oeufs brouillés et œufs sur le plat.—Retour en Espagne sans canons.—Le Jury—Journal amusant.—Souvenirs du jeune âge.—Vol de diamants.—Du latin!—Andromaque.—Charenton.—M. Biard.—M. Millet.
CINQUIÈME SOMMAIRE
La Bamboula du style.—Les cotons sont en baisse.—Citations... au tribunal.—Une nouvelle langue qui n'est pas française.—Cette vieille immorale, qu'on nomme la morale!—Garçon, encore une langue!—Le but est atteint.—Monsieur, cela ne vous regarde pas;—Le sergent de ville était dans son droit.—Oeuvre pie.—Saint-Eustache.—La quête.—Pour les pauvres, s'il vous plait!—Apollon avale la ciguë—Joseph Prud'homme.—Je n'ai pas le courage d'aller plus loin.—Comment vous portez-vous?—Faisons les cartes.—Une lettre... d'un homme à la campagne.—Nouvelles bévues du maître.—La vertu est récompensée.—Ils ont pissé partout (hémistiche du grand Racine).—Pile ou face?—La lune comme un point sur un i.
SIXIÈME SOMMAIRE
Quadrille!—Un critique d'art lève la jambe.—Trinité de M. Maxime Ducamp.—Tous ne font qu'un—(incarnation).—Beau trait de M. Adrien Paul.—La blanche ou la noire?—L'indignation ne fait pas la bonne prose.—M. Castagnary soumet quelques judicieux conseils au public et au Jury.—Les peintres ne cessent ni de vaincre ni d'écrire.—Le Séjour des Élus, c'est l'Exposition.—L'Enfer, selon saint Tremblay, c'est la contre-Exposition.—Exemple d'humilité donné par cet infortuné peintre.—Les bons et les méchants.—Ventre-saint-Gris et un autre saint!—Je m'évanouis! —D'où sort-il encore, ce peintre-là?—Cinq manants contre un gentilhomme!—Exemple de discrétion.—Mort de quelqu'un.—Selon M. Gautier, la contre-Exposition n'est que le purgatoire.—Où la religion va-t-elle se nicher?—Moyen d'inquisition.—Les bons l'emportent.—Je vais revoir ma Normandie (air connu).—La poste aux lettres.—Encore un petit saint.—Nuée de sauterelles.—La toile se lève.—Le père, le fils et....—Le bon fataliste.—Mangeons un peu.—Un pied de nez à la Sainte-Menehould.—On abat le pilori.—Partit en guerre... le tableau de Courbet.
SEPTIÈME SOMMAIRE
Enterrements de toutes classes.—Une odeur de cuir chaud.—M. Briguiboul ne sera plus Refusé.—L'honneur est le seul vrai salaire.—Morceau éloquent.—Un maréchal qui a raison.—Il a tort.—Les peintres ont mal compris.—On lit dans le Moniteur.
HUITIÈME SOMMAIRE
Donnez-vous la peine de vous asseoir.—La ménagerie d'un suspect amusant.—Gare aux animaux!—Ils nous donnent un sauf-conduit.—Le Temps a fait son temps.—Un condamné par la raison qu'il est criminel. Ne pourrait-on pas le condamner pour autre chose?—On se jette les cartes et les verres à la tête.—A la tour de Nesle!—On parle encore de Béranger.—L'auteur des Étourdis, comédie en vers, fait la campagne d'Italie.—La gloire n'est que de la fumée.—Une boucherie au clair de la lune.-A nous, Français! etc.... (Varsovienne).—Celle fois, le général Hoche est bien tué.—Théorie du sous-lieutenant.
NEUVIÈME SOMMAIRE
Malice du Jury.—Elle est noire, mais cousue de gros fil blanc.—«Mon impartialité bien connue....»—Prenons le chemin de fer de Castelnau.—Nous arrivons aux Tuileries.—Réhabilitation d'un condamné.—Encore une victime.—Une tragédie de MM. Ponsard et Latour de Saint-Ybars.—Ta vie, en cinq points secs!—Une fable vue au microscope.—Quelle tête!—On met à Shakespeare la perruque à marteau de Ducis ou celle des lions de l'Institut.—Henri IV est mort!—Hoche pacifie la Vendée.—Les comestibles vont dévorer le cuisinier.—Le duc d'Orléans au bal masqué.—Le petit dieu malin.—1852 et 1815.—Les suspects au bal des victimes.—De bien douces larmes.—Pauvre petite!—Elle aime Polichinelle.—Si jeune!...—Tableau selon saint Jean.—«J'ai, Jean-Marc Mathieu, huissier au tribunal, etc....»—Décidément, c'est une langue!... mais pas française.—Vente par autorité de justice.—Autre tableau religieux selon saint Marc.
DIXIÈME SOMMAIRE
Orage.—Dispersion des insectes.—Nouvelle liste d'exécutés.—On manque de tombereaux.—Le Jury a encore deux peintres tués sous lui qui se portent bien.—Dernière fournée de victimes innocentes.—Gentillesses à l'aquarelle et au pastel.—Traduction libre de: La garde meurt..., etc.—Éloge des aqua-fortistes.—Adresse de M. Cadart: rue Richelieu, 66 (réclame).—La bataille de Waterloo recommence.—La sculpture.—Tout prouve que j'ai raison.—Otons nos paletots.—Un nouveau suspect qui a du talent.—Moisson de statuaires.—Conclusion.
NOTES:
[1] Quand on franchit la borne, il n'est plus de limites! a dit M. Ponsard.
[2] Le Mousquetaire.