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Diane de Poitiers

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François, quand la Castille, inégale à ses armes,
Lui vola son dauphin,
Semblait d'un si grand coup devoir jeter des larmes
Qui n'eussent jamais fin;
Il les sécha pourtant, et comme un autre Alcide,
Contre fortune instruit,
Fit qu'à ses ennemis, d'un acte si perfide
La honte fut le fruit.
Leur camp que la Durance avait presque tarie
De bataillons épais,
Entendant sa constance, eut peur de sa furie
Et demanda la paix.

Le poëte Malherbe ne parlait que par la tradition, il n'avait vu ni les hommes ni les événements du règne de François Ier: le procès poursuivi contre Montécuculi, jugé et condamné pour l'empoisonnement du dauphin[293], comme agent de l'Empereur, ne constatait qu'un résultat, la volonté de jeter un grand odieux sur la personne de Charles-Quint, et de l'accuser d'un crime, au milieu de ses conquêtes...

A ce moment la politique de François Ier, soulevait une irritation profonde dans toute la chrétienté menacée par les sultans; non-seulement le Roi avait fait une alliance secrète avec le Turc, mais encore il avait attiré, secondé ses entreprises, en Italie, en Allemagne, afin d'amener un contre-poids à la domination universelle de Charles-Quint. Dans le droit public de l'école moderne, une telle politique eut été habile, justifiée; mais au sortir du moyen-âge, elle était comme un sacrilége: ainsi il était avéré que dans l'expédition de Provence, c'était moins le camp d'Avignon, la marche des Français sur le bord du Rhône, qui avaient déterminé la retraite des flottes et des troupes de Charles-Quint que la nouvelle reçue par l'Empereur, que les Turcs et les Arabes d'Afrique se préparaient à débarquer sur les côtes de Gibraltar et à soulever les maures si nombreux encore en Espagne: Charles-Quint, à l'exemple de Ferdinand et d'Isabelle, avait été d'une indulgence extrême pour les Maures qui restaient maîtres, par le commerce et leurs richesses, des grandes cités de l'Andalousie: Cordoue, Séville, Grenade, et des magnifiques huertas du royaume de Valence. Pour contenir les Maures et sauver l'Espagne d'un soulèvement, il fallut plus tard la politique sévère de Philippe II et l'inflexible justice de l'inquisition. François Ier, en s'alliant avec le sultan, mettait en péril la sûreté de l'Espagne et de l'Italie[294].

Dans ces circonstances difficiles le pape Paul III voulut préserver la chrétienté, en apaisant la haine profonde qui séparait Charles-Quint de François Ier. La situation s'était un peu modifiée depuis la mort du dauphin; le second fils du roi, Henri, sous l'influence de Diane de Poitiers, était plus favorable à l'unité catholique, et dauphin de France à son tour, il devait exercer une plus forte action sur la politique du roi. Si le pape n'espérait pas une paix définitive, il pouvait obtenir une trève suffisante pour repousser l'invasion des sultans. Paul III proposait donc les conditions suivantes[295]: 1o mariage du troisième fils du roi (devenu duc d'Orléans, depuis que le duc d'Orléans était dauphin) avec Marguerite, nièce de Charles-Quint, fille du roi des Romains (elle apporterait en dot le Milanais sous l'hommage à l'empire); 2o confirmation du traité de Madrid et de Cambrai; 3o engagement souscrit par François Ier, sur sa parole de chevalier, de réunir toutes ses forces pour une croisade contre le Turc; 4o renonciation loyale du roi de France à toutes les brigues et ligues conclues et suivies avec les princes luthériens de l'Allemagne. Moyennant ces conditions acceptées, on signait, non pas une paix définitive, mais une trève de dix ans[296].

Par ce traité ou trève, le troisième fils du roi, duc d'Orléans, devenait duc de Milan. Pour s'expliquer cette faveur subite qui entourait le duc d'Orléans, on doit dire qu'un parti dirigé par la duchesse d'Étampes, entourait ce jeune prince pour l'opposer au dauphin, lié à la politique des Guises et de Diane de Poitiers: le duc d'Orléans devenait ainsi neveu de l'empereur, vassal du saint-empire, et avec cette protection, il pouvait lutter contre la domination du dauphin et la prépondérance de Diane. On laissait dans l'indécision les droits de Catherine de Médicis; et c'était une singulière position qu'on avait faite à cette jeune femme, qui devait exercer plus tard une si grande action sur les affaires. En ce moment, elle s'annulait comme influence politique: Devenue dauphine de France, héritière de la couronne, elle laissait toute sa puissance à Diane de Poitiers; il semblait qu'avec sa prescience italienne, elle devinait que le temps n'était pas arrivé pour elle, et qu'il fallait cacher sous l'amour des plaisirs et des distractions, des projets de domination dans l'avenir. Ces sortes de caractères se rencontrent dans l'histoire; il ne faut pas toujours croire que la légèreté des formes soit une abdication absolue de l'ambition individuelle; dans les mascarades chacun avait son déguisement, et Catherine cachait le sceptre sous les grelots de la folie[297].

Le pape Paul III qui mettait un si haut intérêt à régler les conditions de la trève, se rendit de Rome à Nice pour se placer dans une sorte de pays neutre, d'où il pourrait négocier librement. Comme il craignait que l'entrevue personnelle entre deux princes, si profondément irrités, ne leur fît encore porter une fois la main sur la garde de leur épée et n'aboutît qu'à un nouveau cartel, le pape exigea que François Ier se tint du côté de la France dans le petit village de Villanova à une lieue de Nice, tandis que Charles-Quint résiderait du côté du Piémont, à Villa-Franca: le souverain pontife, quoique accablé par les années, se rendait d'un village à l'autre, portant des paroles de conciliation aux deux princes, afin d'aboutir à l'apaisement de leurs griefs, œuvre difficile. Ce fut ainsi que par sa douceur et sa patience, le pape Paul III amena la trève de dix ans, si désirée: il fit taire les irritations violentes dans le cœur de deux princes qui avaient juré de se venger; il leur révéla les puissants intérêts de la chrétienté menacés par les invasions des Turcs et par les prédications du luthéranisme, les deux faits subversifs qui ébranlaient tout le droit public du moyen-âge[298].

XXVI
CHARLES-QUINT A PARIS.—LA DUCHESSE D'ÉTAMPES.—LES FOUS TRIBOULET ET BRUSQUET.
1538-1540.

La trève à peine signée, François Ier vint résider au château de Compiègne, demeure royale située au nord de ses domaines, vieille forêt des rois francs Mérovingiens. Durant sa dernière campagne, le Roi souffrant et maladif avait été obligé de s'aliter: Quelques récits de Brantôme ont donné lieu à d'autres légendes, elles disent: «que le roi fut atteint du mal de Naples, et qu'un mari trompé se vengea cruellement[299];» on a même supposé dans cette légende scandaleuse, que ce mari était celui de la belle Féronnière. J'ai prouvé que cet amour du Roi pour la Féronnière, se rattachait à la première période du règne, à l'époque artistique de Léonard de Vinci. Ainsi, la légende scandaleuse se modifierait singulièrement: pourquoi supposer une cause libertine à une maladie qui put être le résultat des fatigues, des tristesses et des déceptions: faut-il croire toujours Brantôme, vieux conteur de scandales?

Dans le château de Compiègne, à peine relevé de ses souffrances, François Ier reçut la nouvelle d'une demande inattendue qui vint surprendre et embarrasser son conseil; l'empereur Charles-Quint annonçait que les Gantois, ces hardis flamands venaient de se révolter, qu'il était à craindre que la plupart des villes de Flandres ne suivissent cet exemple: l'Empereur demandait donc à son frère un sauf-conduit pour traverser la France, afin de plus facilement réprimer la révolte des cités. François Ier était informé de cette révolte, car les Gantois s'étaient adressés à lui pour demander concours et appui, comme ils avaient fait autrefois sous Louis XI (le vieux rusé s'était bien donné garde de refuser, quand il s'agissait d'abaisser l'orgueil de son puissant vassal le duc de Bourgogne), François Ier, qui venait de signer la trève de dix ans, ne voulait pas suivre l'exemple de cette politique; toutefois la lettre de Charles-Quint embarrassa singulièrement le conseil. Ce sauf-conduit, il fallait l'accorder sans condition, n'était-il pas à craindre que Charles-Quint n'en abusât pour renouveler quelques intrigues avec les mécontents, alors que les divisions étaient profondes entre le Dauphin et le duc d'Orléans, entre Diane de Poitiers et la duchesse d'Étampes[300]?

Le parti le plus généreux l'emporta; le sauf-conduit fut accordé, les deux fils du roi, le Dauphin et le duc d'Orléans, furent envoyés au-devant de l'Empereur comme compagnons de route jusqu'aux Pyrénées, où Charles-Quint fut accueilli avec tous les honneurs souverains; le connétable de France portait devant lui l'épée nue et droite comme devant le Roi; dans chaque ville de son itinéraire il délivrait les prisonniers, prérogative qui n'appartenait qu'aux souverains du pays (droit régalien); on lâchait des oiseaux, image de son pouvoir de grâce. François Ier vint lui-même recevoir l'Empereur à Chateleroux, des fêtes somptueuses, des tournois, des assauts d'armes, des festins magnifiques marquèrent son séjour aux châteaux d'Amboise, de Blois et d'Orléans.[301] A Paris, le corps des bourgeois, le Parlement vinrent au-devant de l'Empereur à deux lieues des portes de la ville; l'Université lui fit une belle harangue, et le connétable marchait toujours devant lui l'épée nue, honneur grand et souverain.

Charles-Quint visita les royales abbayes, Saint-Denis en France, la dernière demeure des rois, et son œil mélancolique, sous ces voûtes antiques, suivait les traces de la puissance tombée. Ces spectacles de la mort dans les débris de ce qui fut grand et superbe, plaisaient à Charles-Quint; naguère il s'était arrêté plus de deux heures sur la tombe de Charlemagne, à Aix-la-Chapelle, comme pour méditer sur les causes de grandeur et de décadence des empires: il n'est pas rare de voir les hautes intelligences méditer sur les ruines. Dans ce séjour de Paris, Charles-Quint n'était pas parfaitement rassuré sur sa propre situation à la cour de François Ier; à chaque incident, à chaque épisode de ce voyage, il semblait craindre qu'on ne profitât de sa présence à Paris pour lui imposer de dures lois, ou même pour le retenir captif[302]. Il n'avait pas une grande confiance dans la parole de François Ier depuis la violation du traité de Madrid; en plusieurs circonstances, il le manifesta: un frisson traversa son corps, lorsque, suivant une familiarité des jeux chevaleresques, le jeune duc d'Orléans, le fils du roi, sautant en croupe derrière lui sur son cheval s'écria: «Sire, vous êtes mon prisonnier.» L'Empereur sourit d'une manière très-expressive, lorsqu'il vit que ce n'était qu'un jeu. Dans un jour d'abandon et de gaieté confiante, François Ier dit à Charles-Quint en lui montrant la duchesse d'Étampes, qu'on supposait hostile: «Savez-vous bien le conseil que me donne cette belle dame, c'est de vous retenir prisonnier jusqu'à la pleine exécution de nos traités.» Et sans paraître s'émouvoir, l'Empereur répondit: «Si le conseil est bon il faut le suivre.» Il savait bien à qui ces paroles s'adressaient, et le soir même, à Fontainebleau, lorsque la duchesse d'Étampes lui présenta l'aiguière pour se laver, l'Empereur laissa tomber de son doigt comme par mégarde, un diamant d'un prix incomparable, et se baissant pour le ramasser, il l'offrit galamment à la belle duchesse, en la priant de le garder en souvenir de lui. Charles-Quint, du reste, promit alors de favoriser la politique de la duchesse d'Étampes, qui était d'élever et de grandir le duc d'Orléans au delà et au-dessus du dauphin Henri, afin de créer la rivalité d'un grand vassal à côté d'un nouveau roi après la mort de François Ier. La santé du roi de France s'altérait tous les jours, la souffrance s'emparait de son corps, il s'alitait souvent; autour de lui, il ne tolérait plus que quelques poëtes ou quelques bouffons pour le distraire, et, parmi eux, Brusquet[303] le fou du roi, qui venait de succéder à Triboulet[304]. On a attribué à Triboulet un jeu d'esprit qui se rattache au séjour de Charles-Quint à Paris; le fou gardait un livre barriolé de mille couleurs, comme son vêtement, et sur lequel il inscrivait tous les fous ses amis et ses confrères. Quand Charles-Quint prit la résolution de traverser la France en se confiant au roi, Triboulet l'inscrivit tout au long sur son livre, et quand on le laissa sortir, il y mit François Ier en plus gros caractère et presque comme un fou à lier. Si cette anecdote est vraie, il faut l'attribuer à Brusquet et non à Triboulet, mort depuis plusieurs années. C'était un homme étrange, une sorte de Diogène spirituel, contrefait de corps, qui jetait çà et là de triviales vérités avec une hardiesse qui dégénérait en cynisme. Triboulet était vieux déjà au commencement du règne de François Ier: fou à titre du roi Louis XII, il l'avait suivi dans sa campagne d'Italie; il eut tellement peur au siége de Peschiera du bruit de l'artillerie, qu'il se cacha sous un lit comme un chien de basse cour. (Il est rare que les railleurs et les cyniques aient du courage). Jean Marot fait allusion à cette circonstance dans les vers que voici:

Et croy qu'encore y fu qui ne l'en eut tiré
C'est de merveilles pour les sages craignant coups
Qui font telles tremeurs aux innocents et foulx[305]

Le poëte se complait à décrire la grotesque figure de Triboulet dans la paix comme dans la guerre:

De la tête énorme
Aussi large à trente ans que le jour qui fut né,
Petit front et gros yeux, nez grand, taille avoste,
Estomac plat et long, hault dos à porter hotte,
Chacun contrefaisant, chanta, dansa, prêcha,
Et de tout si plaisant qu'onc homme ne fascha.

Après la mort de Louis XII, François Ier avait pris Triboulet à son service, et il le réjouissait par ses facéties, ses mots, et ses libres jugements sur chacun[306]. Après sa mort, le Roi adopta un autre fou contrefait, plus instruit que lui, médecin de profession, du nom de Brusquet, pauvre médecin selon Brantôme: «qui envoyait les lansquenets ad patres, drus comme mouche.» C'est donc à Brusquet qu'il faudrait attribuer l'anecdote du calendrier des fous et la substitution de François Ier à Charles-Quint dans leur légende; fort dévoué à Diane de Poitiers, Brusquet était son hôte journalier et l'amusait par son esprit et son érudition; à son accent provençal, il joignait la connaissance des langues italienne, espagnole, avec de l'esprit par dessus tout, dans cette société étrange peut-être, mais mobile et variée comme un jeu de cartes et de tarots: chevaliers, barons, écuyers, dames de coupe, valet de carreaux, fous, bohémiens, chevaliers de deniers et mallemort. Cette société ne connaissait pas l'uniformité triste et désenchantée: «c'étaient toujours festes et mascarades dans un long carnaval.»

XXVII
LES DERNIERS JOURS DE FRANÇOIS Ier.
1530-1545.

S'il y avait encore dans le roi François Ier des volontés et des impatiences de guerre, si l'esprit de ses gentilshommes et de ses familiers l'y entraînait, son corps souffreteux et maladif ne s'y prêtait plus guère. Ce qui lui restait d'activité, il le donnait aux arts, aux constructions, aux magnificences des châteaux; l'influence de Catherine de Médicis n'avait fait que redoubler cette ardeur. Florence, Rome, Pise ne s'oublient jamais, on les porte avec soi comme son cœur et son imagination d'artiste.

Fontainebleau était toujours le lieu de prédilection du Roi; la chasse qui est comme le mensonge de la guerre pour les bras vieillis et fatigués, était devenue sa passion dominante; François Ier après quelques heures de repos était toujours en chasse au milieu des forêts, suivi de sa cour de dames, de ses gentilshommes favoris; les jappements d'une meute, le son du cor, la poursuite d'un cerf, d'un sanglier, d'une troupe de loups était son plus doux délassement: le Roi passait au moins cinq mois de l'année à Fontainebleau, que ses artistes embellissaient avec une infatigable ardeur[307].

Le Primatice dirigeait toujours les travaux; sa jalousie contre Rosso (Maître Roux) lui avait un peu fait changer l'ordonnance primitive des galeries, il les ornait avec un soin particulier, ainsi que les jardins, les bosquets, les parterres. Le talent du Primatice avait deux genres particuliers: la grande peinture historique et mythologique qu'il tenait de Jules Romain, puis l'ornementation qu'il poussait jusqu'à une excellence exquise; ses fontaines, ses dieux termes, ses masques de satyre étaient des fantaisies, admirables souvenirs de l'antiquité; il les entrelaçait de fleurs, d'adorables arabesques[308], il excellait dans l'art d'orner les cheminées monumentales, ce qui ne l'empêchait pas de continuer la grande peinture de son odyssée (les aventures d'Ulysse). Dans ses figures de dieux, de Vénus ou de Diane, il semble toujours apercevoir les modèles de Diane de Poitiers et de la duchesse d'Étampes. Il était fort naturel qu'un artiste courtisan se fût servi de ces modèles de perfection et de beauté; nulle n'égalait Diane de Poitiers, et quand Brantôme la vit pour la première fois elle avait 60 ans, il fut frappé de cette beauté de marbre de Paros, de cette grâce, de cette perfection de formes[309].

Autour de Primatice s'était formée toute une école française, deux hommes jeunes encore qui devaient déployer un immense talent sous les successeurs de François Ier, pour la construction et la décoration de son palais: 1o Germain Pilon, normand d'origine,[310] le sculpteur qui comprit le mieux, peut-être, les détails d'ornementation et les groupes de statues; 2o Jean Goujon[311], appelé le restaurateur de la sculpture française, né à Paris, où il exerça spécialement son art; le roi avait ordonné la transformation du Louvre. Si l'on examine un plan de Paris à la fin du XIVe siècle, on peut voir sur les bords de la Seine, en face de l'hôtel de Nesle, un véritable château féodal, avec ses hautes murailles, ses créneaux, son pont-levis jeté près des vastes jardins de l'église de Saint-Germain-l'Auxerrois. Le Louvre flanqué de quatre tours, protégeait le côté ouest de la Seine, comme l'hôtel Saint-Paul et la Bastille défendaient celui de l'est. C'est ce château féodal que François Ier voulut transformer: le moyen-âge peu à peu disparaissait pour faire place à la Renaissance romaine et florentine; le Louvre cessait d'être un château pour devenir un palais. Cette transformation, peut-être heureuse pour tout ce qui touchait aux demeures royales, aux jardins, à l'ornementation des hôtels, l'était-elle également pour les églises et les tombeaux?

Le moyen-âge avec ses formes ogivales, avec ses églises nues et pourtant ornées de ses statues de saints, de ses abbés mitrés où partout se montrait l'image de la mort et de la résurrection, n'était-il pas préférable pour l'exaltation de la pensée religieuse, à ces églises de la Renaissance, à ces tombes ornées de statues froides et correctes qui rappelaient l'école païenne d'Athènes ou de Rome? La belle tombe de Louis XII, à Saint-Denis, avec ses bas-reliefs admirablement ciselés, élevée comme un monument, inspire-t-elle l'idée de la prière et de la résurrection[312]! Le prince couché sur la tombe à côté de sa royale compagne, n'inspire aucune idée de la mort chrétienne. On regarde, on admire, mais l'on n'est point pénétré du sentiment religieux, comme devant ces ossements en croix, ces crânes dénudés, aux yeux creusés par les vers du sépulcre: ces statues du tombeau de Louis XII iraient aussi bien en groupes autour d'une fontaine, dans l'escalier d'un palais que dans une basilique chrétienne.

Ce même goût de l'art antique se trouve dans Philibert Delorme, né à Lyon[313], et qui avait passé sa jeunesse dans les ateliers de Florence et de Rome; quand il revint dans sa ville natale, son premier ouvrage fut le portail de Saint-Nizier: il fut ensuite appelé à Paris pour les embellissements que le roi faisait faire à Fontainebleau; il dessina l'escalier à fer à cheval, construction svelte et hardie. Mais les œuvres capitales et nouvelles de ce maître, appartiennent surtout au règne de Henri II, époque artistique par excellence, sous la double protection de Catherine de Médicis et de Diane de Poitiers.

La dernière partie du règne de François Ier est déjà dominée par les questions religieuses. Or la tendance des opinions est de s'emparer du pouvoir, lorsqu'on les laisse à leur propre énergie; c'est pourquoi la liberté des idées conduit droit à la guerre civile. Le système de François Ier, à l'exception de quelques répressions passagères dirigées par les parlements et le Châtelet, avait été celui de la tolérance; le Roi avait arrêté plus d'une fois les poursuites contre les luthériens[314]; entouré de savants, aux opinions mixtes et incertaines, ses philosophes, ses poëtes, étaient accusés des nouvelles hérésies. De ses deux sœurs, l'une professait ouvertement le calvinisme, l'autre restait indifférente. La duchesse d'Étampes allait secrètement aux prêches, et méritait les éloges des docteurs et des ministres, qui disaient d'elle qu'elle était la plus savante des belles et la plus belle des savantes[315]. Fortifié par ces protections diverses, le calvinisme, obscur d'abord, s'était constitué en opinion, et comme le luthéranisme dans l'Allemagne, il était prêt à sonner la guerre civile, car les paysans des montagnes s'armaient aussi contre les riches et les États. La dernière partie du règne de François Ier fût dominée par cette situation nouvelle; il fallait un chef, un roi au parti huguenot, et ce parti entourait le duc d'Orléans, le frère cadet du dauphin. Les huguenots savaient qu'ils n'avaient rien à espérer de Henri, le dauphin, l'héritier présomptif de la couronne, toujours sous l'influence de Diane de Poitiers, leur profonde ennemie; le duc d'Orléans s'était engagé avec eux, et ils voulaient le faire roi après la mort de François Ier. Ce prince, sous le charme de la duchesse d'Étampes, se laissait aller à cette idée de changement, et son principal motif c'était la liaison du dauphin avec les Guises.

Cette puissante et noble famille, adorée des catholiques, grandissait toujours; François Ier pressentait sa fortune et s'en faisait des craintes sérieuses jusqu'à ce point que plus tard on fit ce quatrain:

Le feu roi devina ce point
Que ceux de la maison de Guise
Mettraient ses fils en pourpoint
Et son pauvre peuple en chemise[316].

Rien n'était plus mensonger que ce quatrain huguenot, car les Guise et les Montmorency étaient les seuls vigoureux défenseurs du territoire dans la guerre, que, cette fois encore, François Ier engageait contre Charles-Quint; devenu maladif, capricieux, le roi, vieilli avant l'âge, s'était jeté un peu en fou dans cette guerre, aidé de l'alliance des Turcs et des luthériens d'Allemagne, et cette fois l'alliance ne consistait plus en un assentiment moral et en des traités éventuels: la guerre se faisait de concert et ouvertement; les flottes ottomanes, sous l'émir Barberousse, venaient s'abriter au port de Marseille, et réunies à celles du roi de France, elles assiégeaient Nice[317], ravageaient les côtes d'Italie et d'Espagne: François Ier recevait des secours des reîtres et des lansquenets luthériens d'Allemagne.

Dans les voies de cette politique étrange, si on la compare à la situation religieuse des esprits, le roi avait dû changer son conseil; la duchesse d'Étampes désormais gouvernait tout, et la guerre fut pour ainsi dire dans ses mains. Cette guerre ne fut pas heureuse, les armées de Charles-Quint envahirent la France par toutes ses frontières: il y eut bien de folles entreprises jusqu'à la mort du duc d'Orléans, qui vint une fois encore arrêter les espérances du parti huguenot et de la duchesse d'Étampes, maîtresse absolue des destinées de la France. Le dauphin était en disgrâce; Diane de Poitiers s'était retirée au château d'Anet, dont les embellissements faisaient sa préoccupation unique. Les Guise avaient des commandements en Italie; Catherine de Médicis seule gardait à la cour de Fontainebleau une situation mixte et mesurée; femme du dauphin, un peu négligée par son mari, elle était fort aimée de François Ier, par son goût de plaisir, ses hardiesses de chasse que le Roi se plaisait à raconter dans ses entretiens du soir[318].

Après la paix de Crespi, la santé de François Ier déclina sensiblement; à peine à 52 ans, il portait déjà toutes les marques de la décrépitude et de la vieillesse; un seul goût lui restait, la chasse, et il s'y livrait avec une activité fébrile, une fureur qui tenait sans doute au besoin de changer sans cesse de résidence, de gîte, pour distraire ses douleurs: Catherine de Médicis seule semblait avoir compris cette nouvelle situation de François Ier; attentive auprès du Roi, elle caressait ses faiblesses et tenait un habile milieu entre la duchesse d'Étampes et Diane de Poitiers[319]: «la vie du Roi ne pouvait longtemps se prolonger; à sa mort elle devenait reine; le pouvoir de la duchesse d'Étampes devait cesser.» Mais Catherine ne pouvait espérer la domination avec la puissance qu'exerçait Diane de Poitiers sur l'esprit et les volontés du dauphin Henri, et quelle continuerait d'exercer sur ce prince devenu Roi. La rivalité entre la duchesse d'Étampes et Diane avait pris les proportions d'aigreur et de proscriptions violentes. Diane de Poitiers, était reléguée par la duchesse d'Étampes, qui faisait plus encore. «Disant, selon le récit de Brantôme, qu'elle était née précisément le jour où Diane de Poitiers s'était mariée.» Les femmes ne pardonnent pas ces sortes d'outrages, et c'était en tremblant que la duchesse d'Étampes devait voir s'avancer les derniers jours de François Ier.

Le prince semblait fuir la mort qui, montant en croupe, le suivait partout, dans ses excursions saccadées, maladives, de château en château, de forêts en forêts, sans trève, sans repos, comme s'il était poursuivi par le cor fantastique qui appelle les trépassés! il courait de Saint-Germain à la Muette, à Dampierre, à Loche. Puis il revint à Rambouillet, toujours triste, préoccupé, chassant comme le fantôme des légendes, il s'arrêta dans le château pour ne plus se relever, et le glas funèbre sonna le 5 mars 1547, la mort du Roi de France[320].

XXVII
AVÈNEMENT DE HENRI II.—TOUTE-PUISSANCE DE DIANE DE POITIERS.
1547—1548.

Les funérailles de François Ier étaient à peine accomplies, que Diane de Poitiers arrivait à la cour de Saint-Germain, et son premier acte fut un ordre d'exil pour la duchesse d'Étampes, qui se retira dans son château de Saint-Bris. La toute-puissance de Diane de Poitiers effaça toutes les rivalités et les oppositions, et ce fut une véritable merveille que de la voir à l'âge de quarante-sept ans, régner en maîtresse favorite sur l'esprit et le cœur de Henri II; on put croire alors à la prédiction de la bohémienne, dont parlent quelques mémoires. Enfant, elle avait sauvé un vieux mécréant prêt à être pendu par le prévôt, et la fille du mécréant reconnaissante, lui avait donné un filtre, qui lui conservait une éternelle jeunesse[321]. Ce qu'il y a de certain, c'est que le portrait de Diane de Poitiers, fait à cette époque par le Primatice, sous les traits de Diane chasseresse, et son buste par Jean Goujon, constatent une éternelle jeunesse, une grâce charmante et naïve de la première époque de la vie d'une femme.

Presque aussitôt des lettres-patentes créèrent Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois, un des beaux domaines de la couronne[322]: en même temps la reine Catherine de Médicis recevait pour son revenu, l'administration du comté d'Auvergne; des lettres-patentes rendaient au sire de Montmorency son titre de connétable, et son cousin Rochepot, était élevé à la lieutenance générale de la ville de Paris. Tout le conseil du Roi était changé, car un système nouveau de fermeté, de résolution allait s'inaugurer sous la main des Guise, hommes forts et populaires. Le duc de Guise était bien le plus fier, le plus hardi des féodaux qui oncque fut jamais.

A quel Dieu semblait-il? ou si, comme il me semble,
Il ressemblait lui seul à trois dieux tous ensemble
Or, ne ressemblait-il pas de la tête et des yeux
Le tonnerre foudroyant et le père de dieux,
Au fier esbranle-terre, au dieu de la marine?

Ce changement absolu dans le conseil venait de la nécessité surtout d'arrêter les progrès des opinions que la duchesse d'Étampes avait tant favorisées; ces opinions pénétraient partout, et Calvin lui-même écrivait: «La reine de Navarre a bien affermi notre religion en Béarn; les papistes ont été chassés entièrement; en Languedoc, ont été réunies maintes assemblées sur notre croyance. Avec le temps partout seront ouies les louanges de l'Eternel[323]

Ainsi s'exprimait Calvin, et ses espérances se réalisaient: presque partout le calvinisme s'organisait comme une réformation et une résistance dans l'Etat, témoin la révolte déjà de la Guyenne et de La Rochelle. Des assemblées se formaient, et, le soir, les huguenots se réunissaient dans le Pré aux Clercs pour chanter les psaumes de Bèze ou de Marot en français. A la cour même, les nouvelles opinions faisaient des progrès; Dandelot, colonel de l'infanterie française, était déjà fortement soupçonné d'hérésie. Quand le roi Henri II l'interrogea sur ce point: «Est-il vrai, seriez-vous huguenot?» Dandelot répondit: «Mon corps et ma vie sont au pouvoir de Votre Majesté, mais mon âme appartient à Dieu seul; j'aimerais mieux mourir que d'aller à la messe[324].» Cette hardie réponse indiquait le péril que l'Etat courait par l'invasion des nouvelle doctrines, et Diane de Poitiers ne fut pas la dernière à conseiller au Roi un système répressif sous la main des Guise. Il ne faut jamais séparer un temps de ses nécessités, de ses idées; le mot intolérance ne doit jamais être pris d'une façon absolue; chaque époque a ses intolérances; quand la religion domine, l'intolérance est dans la religion; quand la politique domine, elle est dans la politique; les mots changent seuls. La messe était encore la foi générale de la société; se révolter contre la formule religieuse était aussi dangereux pour l'État que dans les temps modernes se révolter contre la formule politique; et cela était si vrai, que partout la réformation était suivie d'une insurrection hardie de nobles et de paysans. L'Allemagne voyait son antique constitution renversée; l'Angleterre était en pleine guerre civile, tandis que l'Espagne, qui, à l'aide de l'inquisition, avait su se préserver des nouvelles opinions, portant son énergie sur elle-même, découvrait un nouveau monde et gagnait la bataille de Lépante. A toutes les époques, l'unité est une force, et l'opposition une cause de faiblesse et de décadence.

Diane de Poitiers, sous l'influence des Guise, contribua puissamment à cette tendance ferme et unitaire de la monarchie sous Henri II; partout l'ordre fut rétabli et la révolte réprimée d'une manière inflexible, nécessité d'un gouvernement qui voulait éviter la guerre civile[325]: les temps modernes en montrent plus d'un exemple. Certes, le connétable Anne de Montmorency était un esprit de modération avec une certaine tendance vers la réforme, et cependant Brantôme dit de lui[326]: «Tous les matins, il ne faillait de dire et entretenir ses patenôtres, soit qu'il ne bougeât du logis ou qu'il montât à cheval, et on disait qu'il fallait se garder des patenôtres de M. le connétable, car en les disant et marmottant, lorsque les occasions se présentaient, il s'écriait: «Allez-moi pendre un tel, attachez celui-là à un arbre, faites passer celui-là par les piques, tout à cette heure; taillez-moi en pièce, mettez-moi le feu partout, et tels ou semblables mots de police ou de guerre[327].» Ainsi étaient les mœurs dans ce siècle de violence et de guerre civile, et cependant Anne de Montmorency était un esprit de tempérance et de modération!

XXVIII
LE COMBAT SINGULIER DE LA CHATAIGNERAIE ET JARNAC.
1547.

La toute-puissance de Diane de Poitiers, le retour vers les vieilles mœurs, furent marqués par une lice ardente et chevaleresque entre deux nobles champions à qui le champ fut assigné selon l'antique formule des combats singuliers: ils s'appelaient La Chataigneraie et Jarnac. Diane de Poitiers passionnée pour les usages des paladins eut toujours applaudi des deux mains à ces rencontres à l'épée; mais à ce duel retentissant, qui a laissé une longue traînée de souvenirs, se mêlaient des idées et des passions particulières, la rivalité de Diane de Poitiers, désormais duchesse de Valentinois, avec la duchesse d'Étampes.

François de Vivonne, seigneur de La Chataigneraie, était fils d'André de Vivonne, grand sénéchal de Poitou[328], et de tout temps lié à la famille de Saint-Vallier. François Ier avait été son parrain, et il l'attacha à sa personne comme page et enfant d'honneur. A dix-huit ans, La Chataigneraie, que le Roi aimait tendrement, qu'il appelait son filleul, excellait dans tous les exercices du corps, à la lutte, à l'escrime, à la chasse, avec une telle vigueur, qu'il saisissait un taureau par les cornes et le renversait sans effort; on l'avait vu lutter avec deux athlètes à la fois et leur faire toucher la terre du front. Dans les tournois, en pleine course, sur son cheval, il jetait deux ou trois fois sa lance, la reprenait de ses mains gantées avant de la mettre en arrêt contre son adversaire. Aussi, un peu orgueilleux de sa vaillance et de son adresse, La Chataigneraie aimait à dire: «Nous sommes quatre gentilshommes de la Guyenne, Fezensac, Sensac, Essé et moi qui courons à tous venants.» François Ier avait composé ces deux vers pour lui:

Chataigneraye, Vieilleville et Bourdillon
Sont les trois hardis compagnons.

Partout la Chataigneraie s'était distingué aux batailles; plusieurs fois aussi le Dauphin, depuis Henri II, lui confia son gonfanon aux siéges de Landrecis et de Thérouanne; Diane de Poitiers exaltait La Chataigneraie comme le plus brave paladin[329].

Non moins illustre était le comte de Jarnac, de l'illustre famille des Chabot, beau-frère de la duchesse d'Étampes, un peu coureur d'amour, comme le dit Brantôme: «Jarnac, petit dameret, qui faisait plus grande profession de curieusement se vestir que des armes de guerre[330],» avait fait certaines confidences un peu équivoques sur ses amours avec certaine dame; il s'en était fait grand bruit, Jarnac les démentit; on voulut remonter à la source jusqu'au Dauphin, profondément hostile à la duchesse d'Étampes. La Chataigneraie intervint loyalement pour son seigneur et déclara que Jarnac lui en avait fait confidence à lui-même, et sans hésiter, offrit le combat pour le soutenir. Toutefois, il ne fut pas approuvé de tous. «S'il m'avait voulu croire, dit Montluc, et cinq ou six de mes amis, il eût desmêlé sa furie contre le sire de Jarnac d'autre sorte[331]

Ce défi était jeté à la fin du règne de François Ier, à une époque de faiblesse et de maladie; le roi n'avait pas accordé le champ, c'est-à-dire qu'il avait refusé la permission de la lice et du combat; mais à l'avènement de Henri II, au moment de la disgrâce de la duchesse d'Étampes, Jarnac alla demander le champ-clos contre La Chataigneraie, et le nouveau roi, tout chevaleresque, l'accorda d'après les principes des romans de chevalerie. La lice fut indiquée dans le parc du château de Saint-Germain: comme dans les combats judiciaires du moyen-âge, les armes avaient été bénies à Saint-Denis; le Roi, toute sa cour, les dames, Diane de Poitiers elle-même, durent assister à cette grande lice. Le champ-clos fut orné comme pour un tournoi, et jouste à fer très-moulu.

La renommée de La Chataigneraie était si bien établie sous le rapport de la vaillance, de l'adresse, de la force, que nul ne doutait qu'il ne sortît vainqueur; lui-même avait commandé pour le soir un joyeux festin destiné à célébrer sa victoire. Le combat commença au soleil couchant, dans une chaude journée[332]. La Chataigneraie fondit sur son adversaire avec la fière assurance d'un vainqueur; Jarnac esquiva le coup, et avec une adresse non pareille, il lui répondit par la feinte de quarte, que depuis on a appelé le coup de Jarnac. Quel était ce coup qui a fait l'objet de tant de recherches? Les uns disent que c'était un coup de pointe donné avec l'habileté d'un chirurgien dans les tendons de la cuisse et de la jambe, de manière à renverser son adversaire sur la poussière; les autres, qu'il lui fendit le mollet par un estoc terrible de haut en bas[333]. Tant il y a que La Chataigneraie toucha la terre, humiliation qu'il n'avait jamais subie. Jarnac, étonné de sa victoire, courut vers lui, le suppliant de garder sa vie, pourvu qu'il rendît l'honneur à la dame par une déclaration publique qu'il s'était trompé. La Chataigneraie refusa; alors Jarnac, selon les coutumes du combat singulier, s'agenouilla devant le Roi pour lui dire «qu'il lui donnait La Chataigneraie pour en faire son plaisir.» Le Roi répondit à Jarnac: «Vous avez combattu comme César et vous parlez comme Cicéron; j'accepte La Chataigneraie.» Le fier chevalier blessé déclara «qu'il voulait mourir.» En vain transporté au château du duc de Guise, son parent, on pansa sa blessure; il en déchira les appareils et ne fit aucune concession. Il mourut donc fièrement avec l'orgueil de sa renommée. «Il y en eut force qui ne le regrettèrent guère, car ils le craignaient plus qu'ils ne l'aimaient; il était trop haut de la main, querelleux: comme il était des parents et commensaux des Guise, Monseigneur d'Aumale lui fit élever un grand mausolée avec cette inscription: «Aux mânes fières de François de Vivonne, chevalier français très-valeureux[334]

XXIX
LE CURÉ DE MEUDON.—MONTAIGNE.—BRANTOME.—NOSTRADAMUS.
1549-1560.

Le duel sanglant entre La Châtaignerai et Jarnac fut le dernier combat judiciaire autorisé comme il l'était au moyen-âge chevaleresque, véritable appel au jugement de Dieu. Cet esprit s'affaiblissait chaque jour: l'honneur et la chevalerie étaient raillés hautement comme une folie des temps écoulés. Alors mourait dans la petite maison, rue du Jardin et Saint-Paul[335] cet esprit méchant et tout matérialiste dont j'ai parlé, Rabelais, que l'indulgence de François Ier avait trop ménagé comme un pédant échiqueté d'universitaire et de fou royal: «La vie inestimable du grand Gargantua, père de Pantagruel, jadis composée par l'abstracteur et quintessence, livre plein de Pantagrualisme» avait paru à Lyon sous le règne encore de François Ier[336], et la protection du Roi avait couvert ce fatras d'histoires drolatiques écrites dans une langue inintelligible; mais le recueil contenait de grossières déclamations contre le pape, les moines, les papelards, et même contre les dogmes chrétiens et à cette époque, où les calvinistes et les luthériens attaquaient l'Église, les livres de Rabelais obtinrent une grande renommée: on entrait dans l'époque matérialiste. Ce qu'on exaltait, c'était la chair, le ventre, le sensualisme aux dépens des idées de chevalerie et de dévouement. Le parlement avait été d'une indulgence extrême pour ce curé qui mourait dans l'opulence en profitant des bénéfices de cette Église qu'il maudissait: et c'était une grande faute du concordat signé par François Ier et Léon X, que l'autorité laissée au Roi de disposer des bénéfices ecclésiastiques qu'il distribuait libéralement entre les artistes, les courtisans et quelquefois parmi les universitaires ennemis de l'Église; le Primatice, Benvenuto Cellini eurent des abbayes comme s'ils avaient appartenu aux ordres sacrés.

François Rabelais fut sans doute un grand railleur de choses saintes, mais on lui prêta plus encore qu'il n'avait dit et fait; les faiseurs d'historiettes lui ont attribué mille bouffonneries impies et des paroles plus que déplorables au moment si grave de son agonie; quand le cardinal du Bellay fit demander des nouvelles de sa santé par un page, Rabelais répondit de sa voix mourante: «Dis à monseigneur l'état où tu me vois, je m'en vais chercher un grand peut-être; il est au nid de la pie, dis-lui qu'il s'y tienne, et pour toi tu ne seras jamais qu'un fou; tire le rideau, la farce est jouée.» Toutes ces inventions furent faites après coup par de mauvais esprits qui voulurent trouver dans Rabelais un précurseur des idées du XVIIIe siècle, tandis qu'il ne fut que le successeur de ces médisans de l'Église, les Albigeois et Vaudois qui troublèrent l'ordre religieux du XIIIe siècle. Ses livres sont écrits presque en patois mêlé de grécisisme, tous ses personnages sont des paysans, des moines, mais il n'y a dans Rabelais ni système, ni pensée arrêtée, ni intention saisissante: on lui ferait trop d'honneur de trouver en lui autre chose qu'un bouffon[337].

Si Rabelais avait été le protégé de la duchesse d'Étampes, Michel Montaigne fut celui de Diane de Poitiers; et cependant son esprit dissertateur, les livres qu'il avait publiés entraînaient avec eux-mêmes la destruction de l'esprit chevaleresque, objet d'un culte profondément ébranlé par la réformation. Michel Montaigne enfant fut envoyé auprès de François Ier[338], et plus tard Diane de Poitiers l'attacha au service de Henri II, non pas comme un de ses braves chevaliers qui allaient avec lui aux batailles, mais comme un jeune page qui pouvait le distraire et l'enseigner. Ainsi se formait le scepticisme en face de cet édifice de croyance qui composait le moyen-âge. Peu de chose appartenait à l'esprit de Montaigne dans ses œuvres; il empruntait tout à Cicéron, à Senèque et même à Lucrèce. L'antiquité réagit sur toute cette littérature comme le latin et le grec sur la langue française; Montaigne enfant eut toute la faveur de Diane de Poitiers, parce que tout en philosophant et méditant, il ne fut jamais soupçonné de huguenoterie; il restait dans la région élevée de la pensée sans ébranler publiquement le dogme[339].

A tous ces écrivains d'une littérature empruntée aux anciens, combien Brantôme était préférable, non point qu'on doive croire tout ce qu'il rapporte: «J'ai ouï dire, j'ai entendu conter» n'est-ce pas sa formule? Brantôme a écouté partout les mille chroniques de guerre et de galanterie; quand il vint à la cour, Diane de Poitiers était vieille déjà[340]; pourtant il fut frappé de cette éclatante beauté qui se conservait à travers les années; Périgourdin un peu vantard, il se disait issu par son père de la très-noble et antique race de Bourdeilles, déjà renommée sous l'empereur Charlemagne: «Comme les histoires anciennes et vieux romans français, italiens, espagnols le témoignent de père en fils, et du côté de sa mère, issue de l'illustre race des Vivonne[341].» Brantôme recueillait jour par jour les anecdotes dans un grand volume couvert de velours vert pour les dames et de velours noir pour les rodomontades. Brantôme fut par la naïveté de son langage, la tradition de la chronique du moyen-âge, en y ajoutant cette petite médisance de récit qui était l'apanage du Valois. Chez Brantôme, seigneur de Bourdeilles, le sentiment de la morale n'a pas un rigide écho; expression de la cour de Charles IX et de Catherine de Médicis, il conte avec une grande crudité les actions que d'autres siècles et d'autres mœurs ont flétries; chaque époque a sa morale particulière trop souvent, hélas! en dehors des lois suprêmes et éternelles.

Bien plus puissant sur les imaginations et les esprits, avait paru à cette époque un écrivain étrange, tireur d'horoscope, dont les Centuries faisaient grand bruit à la cour; c'était Michel Nostradame ou Nostradamus, natif de Salon en Provence. Jamais les superstitions et les fables n'abandonnent le cœur de l'homme; elles se transforment et ne disparaissent sous un type que pour se produire sous un autre; l'horoscope fut une dégénération de cette magie, des épopées du moyen-âge, dans les romans de Lancelot du Lac, de Roland et des quatre fils d'Aymon où la magie se montre sous des couleurs brillantes comme le ressort divin d'un poëme. L'horoscope plus sombre s'attachait à la vie de l'homme, à deviner son histoire individuelle, sa destinée, tel était le but des centuries que maître Nostradamus publiait à Lyon. Quelle était l'origine de ce triste prophète? Il se disait d'une famille de juifs convertie. A Rome, Juvénal avait déjà flétri les juifs vendeurs et interprètes des songes; médecin d'abord, il avait publié un almanach pronosticant toutes les saisons[342], puis un traité des fardements[343], l'art de se farder que l'Italie avait donné à la France; les singulières recettes pour entretenir le corps (et Diane de Poitiers n'était-elle pas une merveille entre toutes). Mais les livres qui firent sa renommée, ce furent les centuries[344] qui prédisaient en termes fort obscurs les horoscopes de chacun et que toute la génération lisait avec avidité; qui ne désire pénétrer le secret de sa destinée? Les centuries écrites en vers étaient feuilletées par Catherine de Médicis, Diane de Poitiers, la duchesse d'Étampes, et on citait avec effroi la prédiction suivante qu'on appliqua plus tard au malheureux tournoi où périt Henri II:

Le lion jeune, le vieux surmontera
Au champ bellique par singulier duel.
Dans cage d'or les yeux lui crevera,
Deux plaies ont fait mourir, mort cruelle!

Cette prédiction semblait annoncer qu'un grand péril menaçait le Roi (le lion), qu'un vieux (Montgomery) le blesserait en duel au champ belliqueux; la cage d'or, c'était le casque; le Roi serait frappé entre les deux yeux, et de quelle blessure, juste ciel? une blessure à mort. Ces prédictions obscures étaient d'un grand effet sur les imaginations; on ne se dirigeait que par son astrologue. Au milieu des fêtes, des plaisirs, des distractions, la prédiction apparaissait comme une fatale menace!

XXX
LES ARTS SOUS HENRI II.—LES DEMEURES ROYALES.—CHAMBORD.—CHENONCEAUX.—ANET.—LES ARTISTES.
1545-1557.

Si l'on veut exactement parler, la belle Renaissance n'appartient pas à François Ier, mais à Henri II; c'est sous ce règne que se développe l'art dans sa perfection, ces bâtiments sveltes à colonnes canelées qui se couronnent par des ornements de fantaisie d'une belle ordonnance, et ces mille statues parsemées dans les niches et qui diffèrent si essentiellement des œuvres du moyen-âge: meubles, armures, coffrets, boiseries, orfèvrerie, tout est marqué d'un splendide cachet; le marbre est ciselé avec un fini dont on trouve des modèles dans les deux tombeaux de Louis XII et de François Ier à Saint-Denis.

Quels maîtres accomplirent ces œuvres? la plupart sont inconnus; ils venaient presque tous d'Italie, et Catherine de Médicis les avait entraînés à sa suite. Quand aujourd'hui on parcourt même les provinces, on trouve dans certaines églises des boiseries, des sculptures, des œuvres d'art d'une grande perfection évidemment de l'école italienne, et en feuilletant les registres on voit que des artistes, sorte de pèlerins de la Renaissance, allaient de villes en villes offrir leurs ciseaux, leurs pinceaux aux églises, aux monastères; Catherine de Médicis n'était-elle pas la reine des artistes? elle leur donnait l'impulsion, et l'art français se ressentit de cette protection, comme l'école italienne.

On en trouve un exemple considérable dans l'ineffable amitié qu'elle porta à maître Bernard Palissy, ce merveilleux potier de terre dont les œuvres devinrent pour Diane de Poitiers et Catherine de Médicis ce que la manufacture de Sèvres fut plus tard sous la marquise de Pompadour. La seconde manière de maître Bernard Palissy est la plus perfectionnée; celle-là seule est splendide et incontestablement les modèles étaient fournis par l'école de Florence et de Rome; la reine Catherine de Médicis faisait exécuter sur les grands dessins ses plats, ses assiettes dont le prix est aujourd'hui illimité[345].

La demeure habituelle de Henri II ce fut le château de Saint-Germain. Presque tous ses actes d'autorité royale sont sortis de cette résidence élevée au temps de Charles VII; la vaste forêt qui s'étendait d'un côté jusqu'à Pontoise, de l'autre jusqu'à Écouen, était aussi sombre et séculaire que celle de Fontainebleau; la chasse y était belle et plantureuse, et le point de vue unique. Un certain nombre de châteaux commencés par François Ier étaient en construction, aucun n'était achevé, le bizarre Chenonceaux avec ses ponts, ses canaux, ses formes irrégulières; Chambord, construit sur les dessins du Primatice étaient loin d'être à leur fin. Philibert Delorme, par les ordres de Diane de Poitiers, semait de riches ornements la résidence d'Anet. Les galeries du Louvre, celles qui donnaient sur la rivière, ne s'élevaient qu'au premier étage[346].

Presque dans tous ces bâtiments, à côté de la Salamandre de François Ier, on voyait s'incruster le chiffre entrelacé de Diane de Poitiers et de Henri II, et la plus singulière des remarques c'est que ce témoignage public d'un amour un peu étrange était donné en présence de Catherine de Médicis, la femme légitime de Henri II. La reine féconde[347] et heureuse de ses artistes paraissait très-peu s'occuper de ces manifestations publiques; elle préparait sa domination politique au milieu des plaisirs et des fêtes. Sous l'emblême de ces chiffres amoureux, on ne vit partout que l'histoire de Diane dans l'Olympe restauré de tant de dieux, par la Renaissance; Vénus n'a qu'une très-petite place dans ces créations d'artiste; Hébé, symbole de la jeunesse et de la grâce, avait été plusieurs fois sculptée durant la puissance de la duchesse d'Étampes, et Benvenuto avait conçu et exécuté dans une pensée flatteuse son Hébé, chef-d'œuvre d'orfévrerie. Sous Henri II, Vénus, Hébé cessent de régner, les artistes y substituent des scènes de chasse où Diane apparaît dans tous ses attributs; autour d'elle sont groupées ses nymphes qui reflètent souvent le portrait des dames qui accompagnaient Diane de Poitiers: parmi elles on trouve une autre Diane, moins célèbre et néanmoins aussi belle, aussi spirituelle.

C'était une fille d'amour de Henri II qu'il avait eue dauphin dans son expédition des Alpes, d'une dame piémontaise nommée Philippe Duc[348]. La petite princesse prit le nom de Diane de France, et fut élevée avec un soin extrême sur les genoux pour ainsi dire de la duchesse de Valentinois. «Je pense, dit Brantôme, que jamais dame eût été mieux à cheval, et elle était très-belle de visage et de taille: elle parlait l'italien, l'espagnol, et à treize ans elle avait épousé Horace de Farnèze, duc de Castro, deuxième fils de Louis, duc de Parme et de Plaisance, tué tout jeune devant Hesdin[349].» Diane de France, restée veuve sous la garde de Diane de Poitiers, fut destinée à François de Montmorency, fils du connétable, le protégé particulier de Diane de Poitiers, alors en toute sa faveur: on dit même qu'elle était la mère de cette jeune Diane que les lettres de légitimation supposaient fille d'une dame piémontaise.

L'amour de Henri II pour Diane de Poitiers (duchesse de Valentinois) ne faisait que s'accroître; le roi portait publiquement ses couleurs, la devise de donec totum implicit orbem[350] sous un croissant placé sur les monnaies s'appliquait à Diane de Poitiers, qui elle-même avait pris pour devise le chiffre de Henri; dans quelques médailles on voit Diane foulant au pied un amour avec cette légende: omnium victorem vici (j'ai vaincu le vainqueur de tous). A la fin de l'année 1556, le château d'Anet fut achevé par Philibert Delorme, charmante demeure entre les deux forêts d'Yves et de Dreux. Diane devait aimer les bois; son parc s'étendait sur l'Eure jusqu'au village d'Yvry, célèbre depuis par la victoire de Henri IV. Anet devint désormais la demeure de prédilection de Diane de Poitiers: elle-même l'avait meublé de belles tapisseries qui racontaient ses amours avec le Roi de France qu'elle aimait de toute sa passion; le premier acte de la prise de possession du château d'Anet fut la fondation d'un hospice ou maladrerie pour les pauvres[351].

Le château d'Anet se distinguait surtout par la richesse de son ameublement, cet art porté à son point extrême de sévère élégance sous les Valois: les meubles étaient d'ébène et d'ivoire, les tentures en cuir damasquiné jaune, les buffets et coffrets en bois sculpté reproduisaient les scènes de chasse relevées en or; les tapis de l'Orient, les glaces de Venise sans reflet, ornaient les salles; dans quelques galeries, des peintures, des poteries jaune glauque ou bien sur émail; les cheminées avaient cette perfection de grandeur qui en faisait des monuments: n'était-ce pas autour de la cheminée qu'après la chasse on se réunissait pour deviser sur les faits et gestes de la journée? Diane de Poitiers connaissait peu la vie sédentaire: le son du cor la réveillait le matin, et véritable déesse, elle courait dans la forêt le pieu en main, suivie de sa meute. La forêt d'Evreux a conservé plusieurs rendez-vous de chasse de la dame suzeraine d'Anet.

XXXI
ALLIANCE DE DIANE DE POITIERS AVEC LES GUISE.—MARIE STUART.—LA VIE DE CHATEAU.
1558.

Le roi Henri II, à son avènement à la couronne, avait trouvé une politique toute faite, des traités existants qu'il fallait exécuter; François de Guise, qui avait expulsé les Anglais de Boulogne et de Calais, était envoyé en Italie, dans un commandement militaire, sorte d'exil, tandis que les gentilshommes huguenots, ou tiers-parti, sous l'amiral Coligni, marchaient contre les Espagnols en Flandre. A Saint-Quentin, le corps de chevalerie de Coligni éprouva une telle défaite, que Charles-Quint, du fond de son monastère, demanda à son fils Philippe II si les Espagnols étaient entrés à Paris, et le roi catholique, dans l'exaltation de sa victoire, fit vœu d'élever, à Saint-Laurent, ce fantastique monastère de l'Escurial qui fait encore l'admiration du monde[352]. Il fallut rappeler en toute hâte le duc de Guise de son commandement d'Italie et lui confier la défense publique avec le titre de lieutenant-général: le peuple avait une telle confiance en lui, qu'il réunit toutes les forces de la monarchie, comme si elles n'attendaient que lui pour marcher. Les Espagnols furent contraints à la retraite; le duc de Guise s'empara de la place de Guine. La conséquence fut la signature du traité de Cateau-Cambresis[353] et la paix générale avec l'Angleterre et l'Espagne.

La puissance de la maison de Guise s'accrut encore par les fiançailles de François, dauphin de France, avec Marie Stuart, fille de Jacques V, roi d'Ecosse[354], et de Marie de Lorraine, duchesse de Longueville: son enfance avait commencé triste et solitaire, au milieu des lacs. Entourée de quatre jeunes filles de son âge (7 ans), des premières familles d'Ecosse, Marie arrivait en France[355] pour s'accoutumer aux mœurs, aux habitudes de la cour si polie des Valois; elle fut comblée de caresses par Henri II, et placée avec ses jeunes compagnes dans un couvent à Saint-Germain; Marie s'y fit admirer par ses progrès dans les langues, la poésie et les lettres. A onze ans, elle parlait si bien le latin, qu'elle soutint une thèse devant les plus grands érudits pour prouver: «que les femmes doivent s'occuper de littérature aussi bien que les hommes, et que le savoir leur sied à merveille[356].» Ce n'était pas seulement à Brantôme que Marie Stuart inspirait de l'admiration, mais encore au grave chancelier l'Hospital, à Du Bellay, à tout ce qui s'occupait alors de science et des lettres à la cour de Henri II.

Quelle charmante réunion d'esprit et de grâce que la cour des Valois! des femmes poëtes, artistes, pratiquant tous les travaux de l'esprit; Diane de Poitiers appelant Ronsard à Anet, que le poëte célébrait sous le nom de Dianet; Marie Stuart cultivant la poésie depuis son enfance, et Diane de France, duchesse de Montmorency, érudite à vingt ans comme le Parnasse tout entier. La mythologie semblait insuffisante à Ronsard pour célébrer tant de beauté et de grâces, et Marie Stuart appelait Ronsard «l'Apollon de la source des Muses.»

Puis enfin Catherine de Médicis, l'artiste par excellence, l'amie du Primatice, de Benvenuto-Cellini, dessinant elle-même les châteaux, le jardin des Tuileries et partageant sa vie entre les fêtes, les joyeuses mascarades et la patiente étude des partis; elle savait qu'il y avait plus de charme spirituel que de réalités sensuelles dans l'amour de Henri II pour Diane de Poitiers et le roi semblaient le prouver, puisque dix enfants étaient nés de son union avec Catherine dans les dix années, garçons et filles, charmante famille élevée dans les arts, la poésie, les plaisirs et les fêtes; l'aîné des fils, je l'ai dit, épousait Marie Stuart; l'aînée des filles, l'Infant d'Espagne, fils de Philippe II. Si la réformation n'était pas venue jeter son érudition disputeuse et la guerre civile à travers la renaissance et les progrès de la France, la patrie serait passé à un degré de splendeur merveilleux.

Et toute cette cour si brillante, si courtoise, vivait dans les plus belles résidences du monde. François Ier et Henri II, dans leur amour des arts, avaient mis la main à toutes les œuvres: tel est le caractère indélébile de cette architecture; on la reconnaît à la simple vue dans cette admirable galerie de vieux manoirs qui s'étend de Blois à Amboise: vus de loin, ils ressemblent à des châteaux fantastiques. Amboise fut un peu la transition de l'architecture du moyen-âge à celle de la Renaissance; Chenonceaux fut bâti comme par un enchantement capricieux sur pilotis, avec ses ponts, ses vives eaux; il semble voir encore sur des élégantes barques, comme à Venise, toute cette cour de Henri II naviguant au milieu des cygnes au cou élancé et des carpes au collier d'or. On trouve encore à Chenonceaux une salle tout entière conservée avec ces belles cheminées soutenues par des cariatides; et comme toujours, dominé par la pensée de Diane de Poitiers, l'artiste a reproduit Diane entièrement nue (et pourtant chaste), tenant dans ses bras un cerf qu'elle semble caresser[357].

Chambord, entouré d'un parc de sept lieues, était à lui seul une création splendide; on voyait bien que le crayon du Primatice avait dirigé ces dessins; tout se ressentait de l'Italie, de Florence, même ces lanternes de pierre qu'on dirait des campanilles, comme à Pise, et cet ajustement des tuyaux de cheminées, ces escaliers en spirales d'un effet audacieux et charmant, ces pavillons carrés que Catherine de Médicis mit partout à la mode, témoins les Tuileries, avant qu'elles n'eussent été alourdies par les grosses galeries et les pavillons de Henri IV et de Louis XIV[358].

Déjà dans les bâtiments de Chambord on employait le moellon rouge; ce mélange de pierre et de marbre de toute couleur enlevait aux monuments la monotonie de la pierre toujours blanche ou grise. Ces bâtiments étaient immenses, et néanmoins, vus à certaine distance, ils paraissaient légers, fluets, comme si le vent qui se jouait dans les campanilles allait les emporter par ses caprices. A Chambord, la salamandre de François Ier brille partout; on ne trouve pas les chiffres amoureux de Diane de Poitiers et de Henri II, comme si l'on avait voulu conserver entière l'empreinte de son créateur.

Mais la grande merveille fut achevée aux dernières années de Henri II, ce fut le château dont j'ai parlé, la demeure chérie de Diane de Poitiers. Tel qu'il sortit des mains de Philibert Delorme, Anet consistait en un portique de la plus belle époque de la Renaissance, surmonté de la figure d'un beau cerf six cors, que deux levriers au repos regardent avec une sorte de respect. Sur l'autre face du portique est encore Diane nue qui tient un cerf dans les bras et le caresse de ses yeux; après le portique, vient une cour entourée de galeries à colonnes sveltes; une élégante fontaine, œuvre de Jean Goujon, avec les attributs de Diane, s'élevait au milieu[359]; un second portique conduisait à une nouvelle cour également ornée de bâtiments, et au fond la chapelle. Diane de Poitiers n'avait pas oublié la mort, et son tombeau l'attendait pieusement sous les armoiries de la duchesse de Valentinois: Benvenuto-Cellini avait ciselé les galeries et les rampes en fer; Jean Goujon avait orné les chambranles, les cheminées, les portes, les fenêtres, avec un soin qui respirait l'amour, l'admiration envers la grande protectrice des arts.

C'est dans ces vastes demeures aux champs que vivaient les cours de François Ier et de Henri II; les séjours des rois, des gentilshommes dans les villes étaient alors une exception, les capitales n'absorbaient pas toutes les grandeurs; le château, le monastère recueillaient le cultivateur enfant et le nourrissaient vieillard. Dans quelques miniatures du moyen-âge, celles surtout qui ornent les manuscrits de Froissard, on peut voir quels étaient les travaux des champs: le paysan à la figure riante, porte des vêtements commodes, même élégants; il foule le raisin dans la cuve, il s'abrite sous les pommiers chargés de fruits, il dort sous la treille; le soir venu, autour du feu de l'âtre il écoute les contes, les légendes, et des brocs circulent autour des tables chargées de fruits; la vieille est au rouet, la jeune fille à la toile de lin, et le jeune homme boit le vin qui fait attendre l'amour et les fiançailles.

XXXII
LE DERNIER TOURNOIS[360].—MORT DE HENRI II.—DESTINÉES DE DIANE DE POITIERS ET DE LA DUCHESSE D'ÉTAMPES.
1557-1578.

C'était un des nobles penchants de la chevalerie que la passion des tournois et des passes d'armes. Oui, il devait y avoir dans ce bruit de fer et d'acier, dans ce caracollement des chevaux, dans ce croisement des lances un charme indicible; chacun portait son armure brillante, son casque aux plumes de mille couleurs; on se disputait comme un prix, un regard, un gage d'honneur et d'amour. Au son des trompettes la lice était ouverte; il fallait une adresse infinie pour conduire ces chevaux caparaçonnés, braves compagnons de batailles; il fallait esquiver les coups, en porter de puissants et de redoutables aux applaudissements d'une foule avide de ces jeux. A toutes les époques les luttes, les jeux d'armes furent une vive passion; Rome antique avait ses gladiateurs, Bysance ses courses dans les hippodromes. Au moyen-âge chevaleresque, on se passionnait pour les tournois, dont la renommée retentissait dans le plus lointain pays.

Les mariages d'Elisabeth de France et de Philippe II, roi d'Espagne, et de Marguerite, sœur de Henri II, avec le duc de Savoie, venaient de s'accomplir[361]. A l'occasion de ces mariages, un tournois avait été annoncé par des messagers, selon l'antique usage, dans toutes les cours d'Espagne, d'Angleterre, d'Ecosse, d'Italie.

Le lieu fixé pour la lice fut encore la rue Saint-Antoine, entre les Tournelles et la Bastille. Il y eut multitude de dames et de preux chevaliers. Après cent lances brisées, le roi voulut lui-même courir contre un capitaine de la garde écossaise du nom de Montgomery. Brantôme rapporte qu'avant le tournoi Henri II s'était fait tirer son horoscope en présence du connétable Anne de Montmorency, et qu'on lui avait annoncé qu'il serait tué en duel; alors le roi se tournant vers le connétable lui dit: «Voyez, mon compère, quelle mort m'est présagée.—«Comment, sire, lui répondit le fier connétable, vous, vous pouvez croire à ces marauds qui sont menteurs et bavards; faites-moi jeter cela au feu.—«N'importe, compère, je la garde, mais j'aime autant mourir de cette manière-là, pourvu que ce soit de la main d'un chevalier brave et noble[362].» Paroles loyales dignes d'un Valois.

L'horoscope n'avait donc point arrêté ce roi qui entra fièrement dans la lice; Henri mit donc la lance hautement en arrêt contre Montgomery qui, fort colère de voir sa propre lance brisée dans le choc, atteignit durement le roi du tronçon à la visière au-dessous de l'œil, et lui fit une plaie profonde. On crut d'abord la blessure peu dangereuse; bientôt elle s'empira et le roi fut en danger de mort: Ce fut un grand deuil autour de ce lit de douleur: déjà les ambitions s'agitèrent. Avec la vie et le pouvoir de Henri II devait s'effacer et disparaître l'influence de Diane de Poitiers, et Catherine de Médicis, si longtemps reléguée dans les plaisirs et les arts, devenait reine et régente[363].

Aussi fit-elle donner avis à la duchesse de Valentinois qu'elle eût à se retirer de la cour; Diane, avec beaucoup de dignité, demanda si le roi était mort; «Non, madame, mais il ne passera pas la journée.—«Je n'ai donc point encore de maître; que mes ennemis sachent que je ne les crains point; quand le roi ne sera plus, je serai trop occupée de la douleur de sa perte pour que je puisse être sensible aux chagrins qu'on voudra me donner.» Diane avait toujours eu un langage plein de dignité et de fierté, même envers Henri II. Quand le roi voulut légitimer sa fille, Diane lui dit: «J'étais née pour avoir des enfants légitimes de vous; je vous ai appartenue parce que je vous aimais, je ne souffrirai pas qu'un arrêt du parlement me déclare votre concubine.»

Après la mort de Henri II, Diane de Poitiers se retira au château d'Anet, où elle vécut dans le deuil et la solitude la plus absolue, conservant auprès d'elle ses amis les plus intimes, les Montmorency et les Guise, ces grandes races. Le gouvernement était passé aux mains et aux idées de Catherine de Médicis, esprit de tempérance et de modération qui espérait tenir le milieu entre les catholiques et les huguenots. Vaine tentative; quand les partis sont en armes, rien ne peut les empêcher d'arriver à leur fin[364].

On le vit bientôt dans la conjuration d'Amboise, un des plus audacieux projets du parti protestant qui ne tendait à rien moins qu'à créer une république huguenote sous le protectorat du prince de Condé. Catherine de Médicis fut obligée d'appeler les Guise en aide à la royauté et avec eux Diane de Poitiers reprit quelque pouvoir jusqu'à sa mort, arrivée le 22 avril 1665, à l'âge de 66 ans; c'était six ans auparavant que Brantôme, seigneur de Bourdeille, l'avait vue encore si belle qu'il en fut ébloui.

Avant sa mort, Diane de Poitiers avait fondé un Hôtel-Dieu à Anet pour nourrir et recueillir six pauvres veuves; sa rivale, Anne de Pisseleu duchesse d'Étampes, la protectrice du parti huguenot, se jeta ouvertement dans la réformation; elle embrassa le protestantisme à Genève, devint l'amie de Bèze et de Calvin; elle mourut dans une telle obscurité, dit son biographe, qu'on ne peut dire l'époque de sa mort[365].

Le château d'Anet passa dans les mains des légitimés de Henri IV (les Vendôme), qui l'embellirent encore en respectant tous les symboles, tous les souvenirs de Diane de Poitiers et son tombeau surtout, l'œuvre réunie de Jean Goujon et de Philibert Delorme. Anet fut ravagé par la révolution française: toutes ces belles œuvres eussent péri s'il ne se fût trouvé un savant collecteur. M. Lenoir, le fondateur du musée des Augustins, qui l'an VIII de la république proposa au ministre de l'Intérieur>[366] de recueillir tous les débris du château d'Anet pour en orner l'École des Beaux-Arts. On y voit encore quelques portiques, des cariathides, et ces inimitables ornements que Philibert Delorme et Jean Goujon jetaient partout avec une abondance de détails qu'on ne connaît plus aujourd'hui.

J'ai visité naguère les ruines abandonnées du château d'Anet; je m'arrêtai d'abord à Ivry, l'hermitage de Diane de Poitiers, près d'un moulin à eau dont le bruit monotone prêtait à la méditation et à la solitude. A Anet, le pont élégant qui précédait le pavillon du centre était frangé par le temps, comme le beau corps de Diane est dévoré par les vers du sépulcre; le pavillon que surmontaient la Diane, les chiens, le cerf, était en ruine; la chambre que Henri II aimait de prédilection était alors transformée en une espèce de buanderie remplie de cornues et de baquets: une bonne et vieille femme agitait son rouet devant une belle cheminée de la Renaissance dont l'âtre était démoli. Ainsi est la destinée des choses du passé; notre orgueil se propose toujours des œuvres impérissables, et quelques années suffisent pour faire disparaître et nos œuvres et notre souvenir!

FIN.


NOTES:

[1] Voir ma Catherine de Médicis.

[2] J'ai peint cette époque avec ses vives couleurs dans mon travail sur Philippe-Auguste.

[3] Presque toutes les épopées en vers des XIIe et XIIIe siècles, furent traduites en prose de 1480 à 1520. Ces traductions ont été parmi les premiers livres imprimés in-folio. La Bibliothèque impériale en possède une belle collection.

[4] Le manuscrit des Tournois du roi Réné est un précieux monument de l'art. Le cabinet des manuscrits de la Bibliothèque Impériale en possède un magnifique exemplaire.

[5] La description de la Fête-Dieu d'Aix du roi Réné a été plusieurs fois imprimée; l'édition la plus exacte est celle d'Aix (1610).

[6] Préface du déduit de la chasse au cerf.

[7] Bouteillier, Somme rurale, un des livres de jurisprudence le plus remarquable du moyen-âge. Bouteillier était conseiller au Parlement de Paris au milieu du XVe siècle.

[8] Charles VI envoya à Bajazet des vautours et des faucons; il les accompagna de gants bordés de perles destinas au sultan pour les porter en chasse. Les deux frères Ste-Palaye ont donné de bien curieux renseignements sur lâchasse au moyen-âge dans leurs admirables Mémoires sur la Chevalerie.

[9] Sur cette guerre, on peut consulter les savantes recherches de Foncemagne, tomes XVI et XVII de l'Académie des Inscriptions.

[10] Philippe de Comines, livre VIII. Les Génois avaient dit dans une supplique: «Nous nous donnons à vous.» Louis XI impatienté répondit: «Et moi je vous donne au diable!»

[11] Le beau travail de Ducange ne laisse rien à désirer sur la domination des Empereurs francs à Constantinople, Paris 1642.—Cette grande famille de Ducange a laissé des monuments impérissables sur lesquels vivent les érudits modernes qui refont les lexiques et les glossaires.

[12] Ce diplôme est donné dans le travail de Foncemagne: Éclaircissements sur le voyage de Charles VIII en Italie, t. XVII, Académie des Inscriptions.

[13] Les premières gravures de la Renaissance reproduisent l'entrée de Louis XII à Milan et à Gênes (Bibliothèque Impériale). On peut y voir quelles étaient les armures de la chevalerie, le casque et l'armet.

[14] Guicchardini est fort intéressant sur les événements de l'Italie; mais il est passionné contre les Français. C'est un véritable Italien. Historia d'Italia, t. 1er. J'ai la curieuse édition princeps de Florence sans date. Guicchardini a beaucoup de Tacite.

[15] Lahire (le valet de cœur) a été seul conservé jusqu'aujourd'hui. Il a été fait beaucoup de dissertations sur les cartes à jouer. (Voyez un travail spécial dans mon Agnès Sorel.) Dunois était mort sous le règne de Louis XI en 1468.

[16] La Trémouille avait épousé Gabrielle de Bourbon (Histoire monumentale de la maison La Trémouille par Fauché).

[17] C'est en abusant de cette tradition que La Monnaie au XVIIIe siècle fit la fameuse chanson de Monsieur de la Palisse est mort.

[18] Brantôme Vie des Capitaines français.

[19] La vie de Bayard a été écrite par un de ses écuyers qui s'intitule loyal serviteur.—Paris 1515, in-4o.

[20] Brantôme (Vie des grands Capitaines).

[21] L'église de Montmorency contient la tombe de quelques nobles Polonais morts en exil après la révolution de 1830. Le peuple de St-Casimir toujours pieux, était digne de s'abriter dans l'église des Montmorency.

[22] La mère du connétable était Claire de Gonzague. Il était né en 1489. Sa vie a été écrite par son écuyer Gilbert de Marillac, baron de Puissac.

[23] On ne peut bien connaître l'origine et le caractère du comte de Saint-Vallier que par les pièces du grand procès poursuivi contre le connétable et que le savant Du Puy a publiées en 1665.

[24] Diane de Poitiers était née le 3 septembre 1499. C'est à tort que Bayle a placé sa naissance au 14 mars 1500.

[25] La famille actuelle des Dreux-Brézé vient des Dreux, maîtres des requêtes.

[26] L'archevêque Turpin, ou Tulpin, n'est pas un nom imaginaire, comme on l'a cru jusqu'ici; les savants bénédictins l'ont placé le 29e dans la chronologie des archevêques de Rheims; ils le font mourir de 810 à 811. Le livre, qui lui est attribué, porte le titre de: Vita Caroli Magni et Rolandi: on l'a rejeté parmi les fables, je crois que c'est à tort; il y a des manuscrits du XIe siècle qui en constatent l'authenticité. Jamais livre ne fut plus populaire. Lacurne Ste-Palaye, le grand érudit, en comptait 13 exemplaires à la Bibliothèque du Roi seulement. Dante invoque souvent la chronique de Turpin; le roi Charles V fit faire deux bas-reliefs sur des coupes d'or qui représentent les exploits de Charlemagne, d'après la chronique de Turpin. Un savant de Florence, M. Ciampi, a publié une édition magnifique de la chronique de Turpin (1823) à la suite du roman de Philomena de gesta Caroli Magna.

[27] Ariosto qui s'était nourri pour son Orlando furioso de la lecture attentive des romans de chevalerie, donne à tous ses chevaux une intelligence féerique; l'hypogriphe de Roger est un emprunt à l'antiquité.

[28] Je renvoie aux admirables Mémoires de Ste-Palaye sur l'ancienne chevalerie. Pure et belle vie que celle des deux frères Ste-Palaye, tout entière consacrée à l'étude des monuments de notre ancienne France.

[29] Rien de plus curieux que le travail du père Ménétrier sur les armoiries; la science du blason est si attrayante: on y a commis tant d'erreurs aux temps modernes!

[30] Les romans de Lancelot du Lac, d'Amadis de Gaules, les vrais miroirs des coutumes du temps, en contiennent mille exemples. La Colombière les a recueillis dans son beau livre: Théâtre d'honneur et de chevalerie.

[31] Roman de Rou ou de Rollon, duc de Normandie.

[32] Musée de Versailles (Galerie de portraits).

[33] Rabelais qui a été presque l'objet d'un culte pour toute une école universitaire, était né en 1483 à Chinon en Tourraine. Le pape Clément VII fut plein de bonté et d'indulgence pour ce mauvais esprit: Les philosophes ont beaucoup exalté Rabelais parce qu'ils ont tué aussi la poésie de l'héroïsme.

[34] Le 23 novembre 1407 (Juvénal des Ursins: Histoire de Charles VI. L'hôtel de la rue Barbette existe encore selon la tradition hasardée. La maison que l'on voit aujourd'hui ne date pas au delà du XVIIe siècle. Les chroniques de Monstrelet entrent dans de grands détails, t. I, p. 36.

[35] La vie du comte d'Angoulême a été écrite par Papyrus, Masson et Jean Du Port. On trouve des détails exacts dans l'Art de vérifier les dates, par les bénédictins.

[36] Le comte Dunois était fils de Louis XII et de Mariette d'Enghien.

[37] Né le 14 novembre 1494.

[38] Le Journal de Louise de Savoie embrasse l'histoire depuis 1501 jusqu'en 1522. Il a été publié en outre par Guichenon, Histoire généalogique de la maison de Savoie.

[39] Brantôme dit de Louise de Savoie: «Elle était très-belle de visage et de taille, et à grand peine voyait-on à la cour de plus riche que celle-là.»

[40] Les Gouffier étaient de la noblesse de Poitou.

[41] C'était alors le temps des devises et des symboles comme on peut le voir dans les monuments contemporains. J'ai trouvé sur une médaille qui porte la Salamandre de François Ier cette devise:

Discutit hæc flammam Franciscus robore mentis
Omnia pervicit, rerum immersabilis undis.

[42] Il est triste de voir l'abandon des souvenirs de François Ier à Fontainebleau.

[43] Madame Claude, fille de Louis XII, portait pour devise la lune éclatante et cette légende: candida candidis.

[44] 15 janvier 1515. On peut voir son admirable tombeau, sur lequel il est placé à côté de la reine Anne de Bretagne, dans l'église de St-Denis. Je m'y suis souvent arrêté, tandis que la foule allait visiter les tombeaux replâtrés. Quand abandonnera-t-on cette horrible manie de mettre du plâtre sur toutes les statues du moyen-âge?

[45] Brantôme se plaint un peu de la faveur exclusive des amis de François Ier

«Sire, si vous donnez pour tous
A trois ou quatre,
Il faut donc que pour tous,
Vous les fassiez combattre.»

[46] 25 janvier 1515.

[47] Belcarius Comment. rerum Gallic., liv. année 1515.

[48] L'aïeul des Sforza, chef de leur maison, était Giacomuzo Sforza, dont le père était simple cultivateur et qui fut soldat, chef de condottieri. Le surnom de Sforza venait de force. Le premier duc de Milan qui reçut l'investiture des empereurs Germains fut son fils François-Alexandre Sforza (1415).

[49] Sur les guerres d'Italie, il faut consulter Guichardini; quoique fort dessiné contre la France, il est exact et précieux.

[50] Les Suisses s'étaient d'abord alliés à la France sous Louis XI par le traité de 1454 conclu avec le dauphin depuis roi; ils secondèrent Charles VIII et Louis XII au commencement de son règne; ils se séparèrent ensuite de la France sur des questions de positions et d'argent (Comparez Simler Respublica Helvetica et Philippe de Comines fort détaillé sur les négociations avec les Suisses).

[51] Venise avait traité séparément avec Louis XII et voulait renouveler ce traité avec François Ier. Guichardini, livre XII.

[52] L'origine de la maison de Savoie est des plus anciennes; elle remonte à Humbert Ier, duc de Savoie en 1020; il était Saxon. Comparez le livre de Guichenon, Histoire généalogique de la maison de Savoie et l'ouvrage de M. Costa de Beauregard. Turin 1806, 3 vol. in-8o. Les ducs de Savoie, étaient classés parmi les feudataires de l'Empire. Ce fut Amédée IV, duc en 1234, qui plaça le siége de son gouvernement à Turin.

[53] Le connétable était fils de Gilbert de Bourbon, comte de Montpensier; né le 27 février 1489, il avait alors vingt-six ans.

[54] Guichardini, livre XII; Paul Jove, livre XV.

[55] Prosper Colonnia qui avait été d'abord au service de la France, était un élève de Gonzalve de Cordoue; les Colonnia étaient les grands ennemis des Orsini.

[56] L'armée des confédérés italiens contre les Français se composait de Lombards, de Romains, de Florentins, de Parmesans et de Bolonais. Paul Jovi, livre XV.

[57] C'étaient six mille aventuriers qui avaient servi le duc de Gueldre contre l'empereur d'Allemagne: leur drapeau était noir. (Belcarius livre XV, Guichardini livre XII.)

[58] C'est ainsi qu'on les voit dans les bas-reliefs du tombeau de François Ier à Saint-Denis.

[59] Paul Jovi, Histor. sui tempor.

[60] Le duc de Savoie s'y comporta avec une grande vaillance ainsi que le duc de Lorraine et de Gueldre.

[61] Paul Jove est le seul qui ne rende pas au connétable la justice qu'il mérite. Historia sui tempor. livre XV.

[62] J'ai donné cette lettre en entier dans mon François Ier et la Renaissance.

[63] Au château de Vinci, en 1452.

[64] Il était fils naturel de Giacoppo de Vinci (de noble maison).

[65] La statue équestre de Ludovico Sforza et tanto grande la commencio, che condur non si pote mai.

[66] Voyez le remarquable opuscule de l'abbé Aimé Guillon, sous ce titre: Le cénacle de Léonard de Vinci, essai historique et psychologique. Milan 1811, in-8o.

[67] Léonard de Vinci était aussi poëte, et rien de joli comme ce sonnet mélancolique à la manière du Tasse:

Chi non può quel che vuol, quel che può voglia
Che quel che non si può folle e volere.
Adunque saggio e l'huomo da tenere
Che da quel che non può suo volere toglia.

[68] Telle est l'opinion de Mariette, de Vasari et de Monzi, éditeur du Traité della pitture, par Léonard de Vinci.

[69] Venturi a publié en 1797 un excellent mémoire sur Léonard de Vinci.

[70] Le portrait est au Louvre.

[71] On sait que Léonard de Vinci mourut dans les bras de François Ier, ainsi que le dit son épitaphe:

Leonardus Vincii, quid plura?
Divinum ingenium
Divina manus
E mori in sinu regio meruêre
Virtus et fortuna hoc monumentum contingere
Gravissimis impensis curaverunt.

[72] Cette scène a été plusieurs fois reproduite par la peinture.

[73] Ces vers d'un de ses sonnets expriment encore sa philosophie toujours de bon conseil.

A dunque tu, lettor di queste note
S'a te vuoi esser buenoe, e agl'altri caro,
Vogli semper poter quel che tu debbe.

[74] Dans la croisade de 1190 (Voir mon Philippe-Auguste). Il avait épousé Marie, fille du roi d'Aragon.

[75] Il a été aussi publié sous ce titre: Le Myroir de Phœbus avec l'art de faulconnerie et la cure des bestes et oyseaux à cela propice. Imprimé par Philippe Lenoir 1515-1520.

[76] Les détails un peu romanesques de la vie de madame de Châteaubriand sont tirés d'un pamphlet hollandais sous ce titre: Histoire amoureuse de François Ier. Amsterdam, 1695.

[77] Jacobo Trivulzio était né en 1447: il a été sévèrement jugé par les historiens français; il mourut en 1518. Son épitaphe est curieuse:

Hic quiescit qui nunquam quierit.

[78] Pour les détails, lisez mon livre sur François Ier et la Renaissance.

[79] Guichardini, livre XII.—Belcarius livre XV et Paul Jovi hist. sui temporis, livre XVIII. Paul Jovi a écrit une vie de Léon X.

[80] Le cardinal de Sion, un des esprits remarquables du temps, était l'intermédiaire entre le Pape et les Suisses, auxquels Rome avait envoyé des étendards bénis.

[81] Bartholomeo Alviani, vénitien, avait servi d'abord sous les ordres de Borgia; cette illustre et grande famille des Borgia, tant calomniée, voulait rendre l'Italie la reine du monde. Tous les mélodrames et les belles histoires qu'on a faits sur les Borgia ne sont que des légendes atroces inventées par leurs ennemis. Les Borgia étaient des patriotes italiens avec des âmes mâles et romaines qui voulaient délivrer leur patrie du joug des nations étrangères; en désespoir de cause, ils se jetèrent dans les mains de la France; ils sont l'origine des ducs de Valentinois.

[82] Bibliothèque Impériale (collection des estampes).

[83] Voyez mon travail sur Catherine de Médicis.

[84] Il existe une savante dissertation du professeur Bohm, sous ce titre: de Henrico Octavo angliæ rege, imperium romanum post obitum Maximiliam primi affectante. Leipsick 1765.

[85] Cette entrevue ne fut pas un fait spontané; elle avait été résolue entre François Ier et Henri VIII.

[86] Reymer Federa XIII pages 719 à 724.

[87] Le cardinal de Wolsey était alors le conseiller intime de Henri VIII.

[88] Consultez sur le camp du Drap-d'Or, Belcarius livre XVI no 14. Sleidan comment. livre XIX et Paul Jove Historia sui tempor., lib. XIX.

[89] Fleurange fort connu sous le nom du Jeune aventureux, a écrit l'histoire des choses advenues en son temps depuis 1499 jusqu'en 1521.

[90] Mémoires de Fleurange, 1520.

[91] Du Bellay, livre Ier.

[92] François Ier ensuite voulut servir d'écuyer au roi d'Angleterre pour l'habiller et le vestir. Ce que Fleurange trouve très-indigne du Roi. François Ier répondit: «Je n'ai pris conseil de personne, parce que personne ne m'aurait donné le conseil de la résolution que j'ai prise.»

[93] Ce mot boxe est dans la chronique, the box one signifie donner un coup de poing.

[94] Roman de Perceforet, vol. Ier fo 155.

[95] Poésie d'Eustache Deschamps: Eustache Deschamps, charmant poëte vivait au XVe siècle.

[96] Ce vieux mot signifiait aussi.

[97] Donnera.

[98] Le Roi savait aussi que Charles-Quint et Henri VIII avaient eu des entrevues secrètes et qu'il était même question d'une alliance intime: Sleidan commentar lib. XIX, et Paul Jove Hist. sui tempor., liv. IX.

[99] Le caractère de Panurge dans l'île des Lanternes était une allusion critique à l'esprit aventureux et plein d'illusions de François Ier.

[100] Pasquier a très-bien analysé le procès au Parlement contre le connétable. Recherches sur la France, livre VI, chapitre 4.

[101] Le chancelier Duprat fut la main persévérante et inflexible qui fit prévaloir dans le Parlement le principe de la réversion à la couronne des apanages du connétable. L'arrêt est du 11 novembre 1522.

[102] Le séquestre fut mis sur tous les biens de la maison de Bourbon. (Mémoires de Du Bellay, livre II).

[103] Le connétable devait épouser Éléonore, sœur de Charles-Quint, veuve du roi du Portugal avec une dot de 400,000 écus d'or. Pour tous les détails, on peut consulter le procès en original du connétable. (Manuscrits de la bibliothèque impériale). Voyez surtout la déposition de l'évêque d'Autun, 9 novembre 1523.

[104] Adrien de Croy, seigneur de Beaurein, fils du comte de Rœux.

[105] Le comte de St-Vallier était chevalier de l'ordre, capitaine de cent hommes d'armes.

[106] Déposition de Saint-Vallier (procès du connétable).

[107] On peut voir toutes les ruses qu'employa le connétable pour cacher sa fuite dans la déposition de Grossone, 4 octobre 1523 (procès du connétable).

[108] Le grave de Thou, au reste, le plus passionné, le plus inexact des historiens a rappelé toutes ces fables; Bayle les a acceptées (Diction. historique).

[109] D'après les généalogistes, la mère du comte de Maulevrier était fille naturelle de Charles VII et d'Agnès Sorel; le comte de Maulevrier mourut le 23 juillet 1531.

[110] Voir le procès du connétable (manuscrits de la Bibliothèque Impériale).

[111] Ces lettres-patentes du 12 avril 1523, sont enregistrées au Parlement de Paris, le 7 septembre, et se trouvent au Mémorial de la Chambre des Comptes, c. c. fo 246.

[112] Paul Jove Hist. sui tempor. lib. X.

[113] Guichardini, lib. XV, il est très-dessiné pour la ligue italienne.

[114] Bonnivet devait remplacer Lautrec au gouvernement de la Guyenne.

[115] Le Pape s'était déclaré le chef de la Ligue italienne. Guichardini, lib. XV, Belcarius, lib. XVII, no 55.

[116] L'historien de Thou entre dans beaucoup de détails sur la campagne du connétable en Provence. Comparez avec Belcarius, livre XVIII, et Papon, Histoire de Provence, livre VIII.

[117] Pour s'opposer à la marche des Espagnols, François Ier, venait de signer un traité d'alliance avec Henri, roi de Navarre (27 septembre 1525).

[118] Antoine de Ruffi conseiller de la Sénéchaussée était né à Marseille en 1607. Son fils Louis-Antoine continua son œuvre d'érudition. Histoire de la ville de Marseille, 1643.

[119] Depuis la Canebière.

[120] Notre famille sort de quelques-uns de ces capitaines de compagnies génoises.

[121] Romæ soror dans les inscriptions lapidaires.

[122] Guichardini, lib. XV, Mémoires du Bellay livre II.

[123] François Ier y avait ses galères commandées par un amiral du nom de Lafayette.

[124] Je ne pourrai rien dire de plus que Ruffi sur ces souvenirs du siége de Marseille, livre VI.

[125] Du Bellay, livre II.

[126] Guillaume Lorris était mort en 1240. Le roman de la Rose exerça une immense influence sur toute la société du XIVe et du XVe siècle. Voyez sur ce sujet le beau travail de M. Méon, vieillard respectable qui passa sa vie à publier un texte pur et complet du Roman de la Rose. Je l'ai connu, étant élève de l'école des Chartes à la Bibliothèque Impériale; lui et l'abbé de Lépine appartenaient encore à la vieille érudition.

[127] Je me suis souvent enivré de la poussière de ces vieilles éditions des romans de chevalerie. La Bibliothèque impériale en possède une magnifique collection rare et premières œuvres de l'Imprimerie. La traduction princeps en prose d'Amadis de Gaule fut dédiée à François Ier.

[128] Jean Marot était né à Caen en 1463; il avait commencé par publier son Voyage à Gênes, ou Voyage à Venise.

[129] Les œuvres de Jean Marot ont été recueillies pour la première fois, Paris, 1563.

[130] Ballade VIII. C'est Langlet Dufresnoy, le dernier des éditeurs de Clément Marot qui a émis l'opinion des amours de Clément Marot avec Diane de Poitiers (1745). L'abbé Goujet a discuté cette opinion avec une judicieuse critique.

[131] J'ai parlé des troubadours dans mon travail sur Philippe-Auguste.

[132] Clément Marot avait suivi François Ier à l'entrevue du Camp du Drap-d'Or et au camp d'Attigné, 1520.

[133] Ballade VIII. Voyez l'édition Elzevir qui est la plus exacte et la plus correcte; celle de Niort, in-16, 1595, est aussi très-recherchée.

[134] C'est dans la pièce intitulée l'Enfer, que Clément Marot se livre à ces déclamations: L'Enfer, c'est le Châtelet. Au point de vue de la versification et de l'idée, je n'ai jamais beaucoup admiré Clément Marot, je n'ai même jamais compris que Boileau ait appelé un élégant badinage ces vers, la plupart fort ennuyeux, lourds et inintelligibles. Mais Clément Marot était mort hérétique, de là la renommée qu'on lui a fait.

[135] J'ai choisi la version la plus commune; une autre peu différente a été donnée dans le Recueil des poésies de François Ier dont je parlerai plus tard.

[136] Gaston avait été tué à la bataille de Ravennes.

[137] Blessé dix-sept fois dans sa carrière de soldat (Voyez sa vie écrite par son écuyer).

[138] Le poëme d'Orlando furioso fut commencé à imprimer en 1515, et achevé en 1516. L'édition de Ferrare est très-rare; celle des Aldes, 1545, est aussi fort recherchée.

[139] Vie des grands capitaines.

[140] Les régiments napolitains sous la Ligue occupèrent Paris. Voir mon travail sur la Ligue.

[141] Le 24 avril 1524; il était né en 1476.

[142] Vie de Bayard écrite par un loyal serviteur, Paris, 1527 in-4o.

[143] Guichardini, Hist. Ital., livre XV, toujours très-ennemi de la puissance française en Italie.

[144] Il ne fut pas même arrêté par la nouvelle de la mort de Madame (Claude de France), sa femme, Sanctissima fæmina, 25 juillet 1524, Belcarius, livre XVIII.

[145] Guichardini, lib. XV.

[146] Le duc de Savoie qui avait passé à l'alliance de Charles-Quint avait fourni des subsides au connétable de Bourbon pour la levée des reitres (Guichenon, Histoire de la maison de Savoie, 1524).

[147] Brantôme a consacré un article à Fronsberg (Voyez Capitaines étrangers).

[148] Elle était d'or parce que, disait-il: A tout seigneur tout honneur.

[149] Belcarius, livre XVIII, no 17. L'armée de François Ier occupait Varregio et Savonne.

[150] Les Français comptaient 1,800 lances et 26,000 hommes d'infanterie (Paul Jove, livre X).

[151] Sur la bataille de Pavie on peut comparer Guichardin, lib. XV. Les mémoires de du Bellay, livre II et surtout Brantôme, articles La Palisse, Bonnivet. Brantôme avait connu plusieurs des capitaines qui assistèrent à la bataille de Pavie.

[152] Guichardin, l'ennemi de la France, raconte la bataille de Pavie avec une joie mal dissimulée, lib. XV.

[153] La Palisse fut tué d'un coup d'arquebuse; il avait assisté à dix-sept batailles. Un Guise fut également tué, il portait le titre de comte de Lambesc.

[154] Ce fut deux coups d'arquebuse des Basques. Brantôme est plein d'un froid intérêt en racontant la mort de ces braves capitaines.

[155] Le père Daniel est celui des historiens du XVIIe siècle qui a le mieux résumé la bataille de Pavie; on a trop dédaigné le père Daniel et on l'a jugé sur quelques lazzis de Voltaire; le père Daniel s'occupait surtout des opérations militaires. Dans l'ordre des jésuites, chacun avait sa spécialité. J'ai entendu dire par le plus éminent des écrivains militaires que le père Daniel était l'historien qui avait le mieux raconté les opérations de guerre dans l'histoire de France.

[156] Brantôme, toujours un peu conteur, dit que l'amiral Bonnivet était l'amant heureux de la comtesse de Châteaubriand.

[157] Les regimentos espagnols prétendaient s'être emparés de François Ier. On joua longtemps à Madrid un drame ou (saynete) dans lequel un Espagnol était représenté terrassant François Ier sous ses genoux.

[158] Brantôme dit qu'il alla faire sa prière dans l'église des Chartreux de Pavie et la première chose qui le frappa ce fut ce passage du psaume: Bonum mihi quia humiliaste me et discam justificationes tuas. La Chartreuse de Pavie est une des merveilles de la Renaissance; elle est en beau marbre de diverses couleurs et ressemble à un bijou d'ivoire incrusté d'ébène.

[159] Il existe un édit (25 septembre 1523) qui ordonne de courir sur ces aventuriers pillards et mangeurs de peuple (Recueil Fontanon 115, 166).

[160] Lettres patentes de la Régente relatives aux poursuites à exercer contre les luthériens (10 juin 1525).

[161] La régente insistait auprès du Châtelet pour qu'il suivît une procédure contre Marot.

[162] Mémoires du Bellay, livre III.

[163] La conversation fut courte. «François Ier: Votre Majesté veut donc voir mourir son prisonnier?

«Charles: Vous n'êtes point mon prisonnier, mais mon frère et mon ami.» Arnold Ferron, de rerum Gallicæ, lib. VIII.

[164] Paul Jove, histor. lib. III.

[165] Les contes de la reine de Navarre furent recueillis par Claude Gruget, un des valets de chambre de Marguerite et dédiés à Jeanne d'Albret. 1 vol. in-4o, 7 avril 1559.

[166] Le mot de restitution se trouve dans la note. En effet, Charles-Quint était fils de Philippe, archiduc d'Autriche, lui-même fils de Maximilien et de Marie de Bourgogne.

[167] Ces deux provinces étaient déjà dans l'apanage du duc de Bourbon. Il devait recevoir en plus la Provence et le Dauphiné.

[168] Paul Jove, lib. III. Le Roi avait désigné le maréchal de Montmorency et Brion pour diriger le Dauphin par leurs conseils.

[169] Ces poésies et ces lettres ont été imprimées et publiées in-4o dans la Collection de l'Histoire de France; elles sont difficiles à lire et à comprendre dans leurs incorrections.

[170] Le collecteur de ce recueil aurait dû accompagner ces lettres de quelques annotations; il s'en est presque toujours abstenu ce qui rend presque impossible la lecture des lettres de François Ier.

[171] Les deux évêques plénipotentiaires furent faits depuis cardinaux. 1530.

[172] Recueil de Traités, II, 112.

[173] C'étaient les meilleurs hommes de guerre de François Ier, la fleur de la noblesse.

[174] La réunion de ces comtés avait été faite à la France sous le règne de Louis XI.

[175] L'engagement en avait été pris lors de la défection du connétable par Charles-Quint qui l'oubliait dans le traité de Madrid.

[176] Le connétable de Bourbon avait alors quitté l'Espagne, il se trouvait dans le Milanais.

[177] Pour rendre cette alliance encore plus intime, François Ier, veuf de la reine Claude, s'obligeait à épouser Éléonore de Portugal, veuve aussi et sœur de Charles-Quint, et le Dauphin, Marie, Infante du Portugal (Articles 15 à 19 du traité).

[178] 18 mars 1526. Comparez Sleidanus, Comment., lib. VI et Belcarius, livre XVIII.

[179] Ant. de Vera. Hist. Carl. V.

[180] Quoique le premier président de Selves eût été un des signataires du traité, le Procureur Général avait fait des réquisitoires contre le traité, 15 février 1526.

[181] La duchesse d'Angoulême s'arrêta à Bayonne (10 mars 1526).

[182] Les commissaires espagnols pour l'échange étaient de Lannoy, vice-roi de Naples et le capitaine d'Alarcon; le commissaire français qui accompagnait les princes était le maréchal de Lautrec. L'échange se fit au milieu de la rivière dans des barques. Belcarius, liv. XVIII.

[183] 1526. Elle était demoiselle d'honneur de la reine-mère.

[184] Il a été fait bien des portraits de fantaisie de la duchesse d'Étampes. (Voyez la collection des gravures, bibliothèque impériale.)

[185] Sur la chasse au faucon, lisez toujours le charmant et admirable ouvrage de Ste-Palaye sur la chevalerie et la chasse. T. II. Ste-Palaye entre dans les plus précieux détails sur la vie des chasseurs au moyen-âge. J'ai également décrit les distractions de la féodalité dans mon Philippe-Auguste.

[186] Ce fut ensuite le roi Henri II. Le maréchal Anne de Montmorency accompagnait les enfants de France à Madrid.

[187] Beaucoup de romans ont été écrits sur la comtesse de Châteaubriand. Lescouvel l'a racontée dans son Histoire amoureuse de François Ier. Un anonyme a publié l'Histoire tragique de la comtesse de Châteaubriand. Amsterdam 1675, in-12. Comparez Bayle, Moreri, Dict. hist. qui se perdent en conjectures.

[188] Recueil in-4o déjà cité.

[189] Brantôme, Mme de Châteaubriand.

[190] Poésie de Marot, lib. III.

[191] Le cardinal du Bellay avait donné à Rabelais une prébende dans l'église collégiale de Saint-Mandé-les-Fossés.

[192] Œuvres de Marot, lib. III.

[193] Jean de Brosses appartenait à une famille bretonne, dont les biens avaient été confisqués sous Louis XI.

[194]
«Ne parlez plus de César, d'Annibal, de Scipion,
Vive la renommée de Bourbon.»

[195] Charles-Quint.

[196] Pièce conservée à la Bibliothèque de l'Arsenal, et publiée dans le Bulletin des Bibliophiles, 1853-1858, p. 732.

[197] «Que si on ne les payait, ils retourneraient tout le monde, et pour montrer leur intention par leurs œuvres, ils saccageaient et volaient tout.»

[198] Brantôme, dans l'article M. de Bourbon, est fort curieux à consulter: La Vie des grands Capitaines, t. Ier. Ou les mœurs militaires de cette époque étaient étranges et sans merci, ou bien Brantôme n'a pas le sens moral.

[199] Voyez mon travail sur la Réforme et la Ligue, t. II.

[200] Guicchardin, liv. XVI et XVII. L'historien Guicchardin commandait comme capitaine dans l'armée de la Ligue italienne, dont cependant il reconnaît la faiblesse.

[201] La vie du capitaine Fronsberg a été publiée en latin, par Adam Reissner, Francfort, 1568, in-fo, et traduite en allemand, 1595, in-fo; le capitaine laissa un fils, Gaspard Fronsberg, qui fut aussi chef d'un corps de lansquenets.

[202] Brantôme a consacré un article au prince d'Orange.

[203] «Laissez faire, compagnons, je vous mène en un lieu où vous serez tous riches.» (Paroles du Connétable.)

[204] Mémoires de Benvenuto Cellini, liv. III.

[205] Carne! carne! Sangre! sangre! Cierra! cierra! Bourbon! Bourbon! Ils ajoutaient ces mots sauvages dans leur mauvais idiome d'espagnol-flamand: Hasta a non hartaze: Il faut tuer sans être jamais rassasiés.

[206] Ce chant a été conservé dans la Collection Fontanieu. Le prince d'Orange dont il est tant parlé par Brantôme, était Philibert de Chalons, né en 1502; il mourut au siége de Florence, en 1530.

[207] Brantôme, Grands Capitaines, article M. de Bourbon.

[208] Aussi les soldats espagnols, qui ne conservaient rien de toutes ces richesses, disaient que: el diablo les avia dado el diablo les avia il evado.

[209] Le livre capital de Calvin, L'Institution chrétienne, est dédié à François Ier.

[210] Sœur de Louis XII.

[211] Les catholiques attaquant ces psaumes en vers, les appelaient des chansons. Voyez le petit livre: Contrepoison des cinquante-deux chansons de Clément Marot, faussement intitulées par lui Psaumes de David, Paris, 1560.

[212] La traduction des psaumes de David par Clément Marot, complétée par Théodore de Bèze, fut le texte chanté dans les églises calvinistes pendant le XVIe siècle; Conrard en a donné une version plus moderne, que plusieurs églises calvinistes chantent encore aujourd'hui.

[213] Le Roi vint tenir un lit de justice au parlement, le 12 décembre 1527. Le traité de Madrid fut solennellement déclaré nul (Mss de Colbert, Pièces sur le Parlement, t. Ier.). Antonio de Vera, Histoire de Charles-Quint, juge très-sévèrement cet arrêt et la conduite de François Ier.

[214] Pour tout ce qui concerne le cartel de Charles-Quint à François Ier, on peut consulter un récit contemporain conservé dans les Mss Bethune, Biblioth. imp. nos 8471, 8472.

[215] Le traité conclu entre François Ier et Henri d'Angleterre fut signé le 14 septembre 1527. Ces deux rois dénoncèrent ensuite la guerre à Charles-Quint par des hérauts-d'armes.

[216] Comparez Belcarius, liv. 19, no 46, et Sleidan, Comm., lib. VI.

[217] Sur les fonctions de hérauts-d'armes, consultez le beau livre de Sainte-Palaye Sur la chevalerie, liv. IV. Les miniatures de manuscrits reproduisent également les hérauts-d'armes.

[218] Mss Bethune, nos 8471, 8472 (Biblioth. imp.) Cette demande était habile de la part de François Ier; elle indiquait l'alliance intime de la France et de l'Angleterre.

[219] Ces sortes de défi se retrouvaient souvent dans les romans de chevalerie au moyen-âge; voyez aussi Favin Théâtre d'honneur. François Ier avait pris pour modèle Amadis de Gaule, et il le suivait en toutes ses fabuleuses actions.

[220] J'ai donné toute la correspondance et les pièces relatives à ce cartel, dans mon François Ier et la Renaissance, t. II.

[221] Le héraut Bourgogne a lui-même rédigé un procès-verbal presque notarié, de toutes les circonstances de son message. (Mss Bethune, nos 8471, 8472. Les hérauts-d'armes portaient en général le nom d'une province, et le blason du prince.

[222] Toutes les paroles de François Ier portent la trace d'une vive et profonde irritation; on avait déjà eu l'exemple de ces cartels envoyés de rois à rois: Louis le Gros défia Henri Ier, roi d'Angleterre, Edouard III défia Philippe-de-Valois, et le roi Jean, etc. etc.

[223] «Procès-verbal du héraut-d'armes Bourgogne.» Cette pièce est fort curieuse pour l'histoire des cartels de chevalerie.

[224] Je conserve ce mot de Paix des Dames, qui est dans Brantôme; les véritables négociateurs furent des clercs et des parlementaires sous la médiation du légat.

[225] L'Orlando furioso d'Arioste avait été publié en 1515, et la première édition était très-répandue en Italie et en France; François Ier en commanda la traduction.

[226] Guichardin, quoique profondément italien, constate ces tristes agitations des peuples.

[227] Charles était le successeur de Philibert II, duc de Savoie; son règne fut très-long, il ne mourut qu'en 1558.

[228] Traité du 7 août 1526, avec l'Angleterre.

[229] Comparez Belcarius, liv. XX, Sleidan, Comment. lib. VI, avec Guichardin, liv. XIX. Guichardin est fort irrité contre cette négociation, qui selon lui sacrifiait l'Italie.

[230] Marguerite d'Autriche était née à Gand, en 1430; elle avait été fiancée à l'infant en 1497. Ce fut alors qu'elle composa l'épitaphe si connue:

Ci gît Margot, la gente damoiselle,
Eut deux maris et si mourut pucelle.

[231] Les deux princesses logeaient dans deux maisons contigues, afin de se voir facilement. Consulter Belcarius, liv. XX, no 24, 25, et Sleidan, Comment., lib. VI.

[232] Philibert de Chalons, prince d'Orange, était fils de Jean de Chalons, baron d'Aulay, et de Philiberte de Luxembourg; il avait dû épouser Catherine de Medicis, pour se faire un grand État en Italie. La négociation fut brusquement rompue. Philibert de Chalons, prince d'Orange, étant mort sans enfants, ses biens et ses armoiries passèrent à Réné de Nassau, fils de sa sœur, qui institua pour héritier Guillaume de Nassau, le fondateur de la république hollandaise.

[233] Il y avait 80 caisses de 25,000 écus chacune. Voyez Belcarius, lib. XX, no 31, qui entre dans de grands détails.

[234] Sleidan, Comment., liv. VII, détaille toute cette cérémonie de la Bidassoa.

[235] Depuis créé cardinal de Tournon.

[236] Au mois de mars 1530.

[237] On peut voir (Biblioth. imper.) le plan de Paris sous François Ier (Cabinet des cartes). Ce cabinet est fort pauvre sur le vieux Paris.

[238] Les rues environnantes ont encore conservé aujourd'hui ces dénominations de la Cerisaye, du Beau-Treillis, du Lyon-Saint-Paul.

[239] Voir dans le bel ouvrage de Sainte-Palaye, les cérémonies des tournois: Essais sur la chevalerie, dissert. 3.

[240] François de Belleforest appartenait à la noblesse du pays de Comminges; il avait été élevé sur les genoux de la reine de Navarre, sœur de François Ier, et avait entendu conter les belles histoires du temps.

[241] Son livre porte ce titre: Annales ou Histoire générale de France, 2 vol. in-fo. Belleforest avait encore écrit un livre d'histoire sous ce titre: Histoire de neuf rois de France qui ont porté le nom de Charles.

[242] Théodore de Bèze, fort hostile à Diane de Poitiers, attribue à la magie, ce charme qu'elle exerçait autour d'elle; le grave Pasquier n'est pas éloigné de cette opinion populaire, t. II, p. 5 de ses Recherches.

[243] La maison de Lorraine était représentée par Claude, duc de Guise, qui avait épousé Antoinette de Bourbon.

[244] La maison de Montmorency était représentée par le maréchal Anne de Montmorency, depuis le connétable.

[245] Louise de Savoie, duchesse d'Angoulême, mourut le 29 septembre 1532, à l'âge de 54 ans; son Journal comprend les annales de 1501 à 1522.

[246] Marguerite d'Autriche mourut à Bruxelles, le 1er décembre 1531, elle a laissé des poëmes et des chansons qui existent encore à la Bibliothèque Impériale.

[247] Guichardin, quoique profondément Italien, fait un triste tableau de sa patrie à cette époque, liv. VII.

[248] J'ai traité avec quelque étendue la vie de château au moyen-âge dans mon Philippe-Auguste.

[249] La Bibliothèque Impériale possède des gravures presque contemporaines qui reproduisent le château de Plessis-les-Tours, la résidence de Louis XI, moins terrible qu'on ne la fait (Cabinet des estampes).

[250] Maître Roux était né en 1496, et avait beaucoup étudié Michel-Ange.

[251] Le musée du Louvre a un seul tableau del Rosso; il représente la Vierge qui reçoit les hommages de sainte Élisabeth.

[252] En 1490; il resta six ans dans les ateliers de Jules Romain.

[253] Un an après l'arrivée del Rosso à Fontainebleau.

[254] Il prit du poison à la suite d'une aventure tragique, en 1541.

[255] La galerie du château de Fontainebleau a été gravée par Théodore Van Thualden, 58 pièces in-fo.

[256] Benvenuto Cellini naquit en 1501. Les mémoires de Benvenuto Cellini ont été plusieurs fois imprimés; il a fait aussi un Trattato del arti delle oreficeria, Florence 1568.

[257] Les coupes de Benvenuto Cellini sont très-précieusement recherchées; une d'elles fut payée 1,600 guinées en 1774.

[258] Mémoires de Benvenuto Cellini, liv. Ier.

[259] Le roi François Ier avait pour habitude de donner le revenu des abbayes aux grands artistes; l'art put louer cette générosité, mais elle altéra les biens sacrés des églises. Voir mon Eglise au moyen-âge.

[260] On lui attribue le Persée qui coupe la tête de Médée, dans le palais Pitti.

[261] Bernard Palissy était né dans le diocèse d'Agen, en 1501. Sa descendance existe encore inconnue dans un petit village sur les limites du Perigord. Les grandes œuvres de Bernard Palissy appartiennent surtout à l'époque de Catherine de Médicis et au règne de Henri II; elles sont d'une grande beauté. La si remarquable collection de poteries et d'émaux de M. le baron Seillière, au château de Mello, possède deux assiettes admirables marquées des chiffres de Catherine de Médicis et de Henri II.

[262] Collect. du Louvre.

[263] Sous Henri II, nous parlerons de Jean Goujon.

[264] Je suis entré dans de grands détails sur la littérature du moyen-âge dans mon Philippe-Auguste.

[265] Ces trois poëtes vécurent dans le XIVe siècle, sous Charles VI. La plupart de leurs poésies sont encore inédites ou mal éditées; le manuscrit, no 7219 Biblioth. Impériale, contient les ballades d'Eustache Deschamps.

[266] La chronique de Froissard n'a besoin ni d'explication ni de commentaires; je connais un érudit qui a fait sa renommée en promettant depuis 30 ans une édition commentée des grandes chroniques.

[267] On a depuis appelé ce jargon inintelligible le Rabelaisnisme; il a eu des imitateurs modernes, et particulièrement M. de Balzac; je n'ai pas à juger ses œuvres d'une cruelle et fatale analyse qui a tué toutes les nobles et saintes illusions.

[268] La grande émigration des savants grecs se fit par Venise: ils vinrent la plupart s'abriter à Rome sous la protection des papes. (Voir Muratori, Annales, ann. 1470.)

[269] Constantinople était riche de toute industrie au XVe siècle; il faut regretter que Gibbon n'ait pas traité ce sujet; Ducange en a dit à peine un mot dans son admirable livre: Histoire de Constantinople.

[270] Les Centuries de Nostradamus. Aix, 1580; ils ont eu 20 éditions au XVIe siècle.

[271] Le Collége de France fut fondé après la paix de Cambrai.

[272] La Biblioth. Impér. possède un bel exemplaire de l'Amadis des Gaules, avec une dédicace au roi François Ier. (Fonds réservés.)

[273] Voir mon Philippe-Auguste, sur la croisade en Orient.

[274] La vie de Frédéric Barberousse, qui régna de 1185 à 1191, a été recueillie dans la chronique d'Othon de Fresingue.

[275] Sur la guerre des Albigeois, on peut consulter la chronique de Pierre de Vaulxcernai, ad. ann. 1220.

[276] François Ier sentait si bien la hardiesse de sa démarche, qu'il s'en justifia personnellement dans une lettre particulière. Litt. Francisc. I. apud Freher, t. III, Rerum Germanii.

[277] La ligue de Smalkalde fut signée le 5 février 1531. Voyez Sleidan, Comment. lib. VII. Le principal instigateur avait été Jean-Frédéric, électeur de Saxe. Les catholiques signèrent la ligue d'Augsbourg.

[278] J'en ai recueilli et publié les preuves dans mon Histoire de la Réforme.

[279] Calderon, Lopèz de Vega, Cervantes, Murillo, s'honoraient du titre de familiers de l'Inquisition.

[280] Correspondance des cardinaux Grammont et de Tournon, négociateurs du mariage, 21 janvier 1533.

[281] Le pape et François Ier s'étaient vus à Marseille. Comparez Dubellay, liv. IV, et Belcarius, liv. XV, no 48: j'ai donné beaucoup de détails dans mon livre sur Catherine de Médicis.

[282] Sur la politique de Charles-Quint en Italie, Guichardin est fort curieux, liv. XX.

[283] Brantôme, Les Dames galantes.

[284] J'aime Brantôme, mais il est impossible de se fier à ses récits; il parle toujours par des ouï dire, et les aventures scandaleuses ont besoin d'autres témoignages pour passer dans l'histoire.

[285] Je n'ai trouvé qu'un seul document (sous Charles VII), qui constate la présence de femmes impudiques auprès des rois; mais c'était à la guerre et peut-être dans le désordre des camps. Brantôme parle encore par ouï-dire.

[286] La Salamandre se trouve sur l'aile des bâtiments de la troisième cour à gauche; la porte est presqu'en ruine.

[287] Paolo Giovo; il était né le 19 avril 1483; son livre, très-remarquable, porte le titre: Historiarum sui temporis ab ann. 1494 ad ann. 1544, libri XLV. L'édition princeps est de Florence, 2 vol. in-fo, 1550.

[288] La plus dure épigramme de l'Arétin sur Paolo Giovo, est son épitaphe:

Qui giace Paolo Giovo ermafrodito
Quel vuol dire in vulgar moglie et marito.

[289] Sur cette campagne de 1536, voyez le Mémoire de Langey, lib. VI, et Paul Jove lui-même très-favorable à l'empereur Charles-Quint.

[290] Un premier camp retranché avait été établi entre Valence et Avignon (Voyez Belcarius, liv. XXI, no 48): le connétable de Montmorency le commandait.

[291] Sleidan, Commentaires, liv. X.

[292] Malherbe, Stances à Du Perrier, strophe 77.

[293] Montecuculi fut écartelé à Lyon. L'arrêt s'appuie sur l'empoisonnement. (Voyez les mémoires de Du Bellay, liv. VIII, comparez avec Sleidan, liv. X.)

[294] Khair Eddyn Barberousse avait débarqué dans le royaume de Naples, et Soliman envahissait la Hongrie (1537).

[295] Sur ces négociations, voyez les mémoires de Du Bellay, liv. VIII.

[296] Cette négociation fut protégée par la reine Eléonore, la propre femme de François Ier, et la sœur de Charles-Quint, (dépêche du mois de janvier, 1538).

[297] Voir ma Catherine de Médicis.

[298] Le traité pour la trève est du 18 juin 1538.

[299] Je dois dire que Du Bellay le rapporte, Mémoires, liv. II.

[300] Le message de Charles-Quint, du mois d'avril 1538, portait la promesse que l'Empereur donnerait l'investiture du duché de Milan au second fils de François Ier, le duc d'Orléans, en vertu du traité de trève.

[301] Comparez Sleidan, Comment., liv. XII, et Martin Du Bellay, liv. VIII, sur l'itinéraire de Charles-Quint.

[302] Mémoires de Du Bellay, liv. VIII.

[303] Brusquet était provençal; il se fit connaître au roi lors du camp d'Avignon, en 1536, où il devint médecin des Suisses et des lansquenets.

[304] Triboulet était blaisois, né vers la fin du XVe siècle; il avait été longtemps le jouet des pages et des officiers de Louis XII.

[305] Jean Marot, le père de Clément (poëme sur le siége de Peschiera).

[306] Dans un drame de l'École déjà vieillie, à peine née (1830), on fait jouer à Triboulet un rôle d'indignation qu'il n'eut jamais: le roi pouvait s'amuser, mais en aucun cas Triboulet n'eût lancé ces déclamations que le poëte lui prête; les chevaliers l'eussent renvoyé parmi les varlets et les gardeurs d'écurie pour n'en sortir jamais.

[307] Les premières gravures de la Renaissance reproduisent les chasses monumentales du roi François Ier.

[308] Voyez les œuvres du Primatice (Biblioth. Imp.).

[309] Brantôme, Dames galantes.

[310] Né près du Mans, il ne vint à Paris qu'en 1540.

[311] On n'a jamais pu savoir le nom du maître qui l'enseigna; c'était sans doute, un de ces artistes italiens, venus à la suite de Catherine de Medicis, et auquel on attribue le beau tombeau de François Ier encore à Saint-Denis.

[312] Le tombeau est dû sans doute encore à quelques artistes florentins. Les bas-reliefs sont admirables.

[313] 1508. Philibert Delorme avait étudié à Florence; il fut attiré à Paris par le cardinal Du Bellay.

[314] La duchesse d'Étampes prit sous sa protection La Renaudie, qui devint ensuite le chef de la conjuration d'Amboise. Voir ma Catherine de Médicis.

[315] Cependant Théodore de Bèze ne nomme pas la duchesse d'Étampes dans la liste qu'il donne des femmes qui ont protégé le calvinisme; peut-être la sévérité du prêche désavouait cette protection.

[316] Ces vers sont attribués à Charles IX, alors tout dévoué au parti huguenot.

[317] Les flottes ne purent réussir devant Nice, et il existe une médaille curieuse qui constate l'alliance des Turcs et des Français: Nicæa à Turcis et Gallis obsessa.

[318] Brantôme constate le charmant esprit de François Ier dans sa causerie, souvent un peu licencieuse.

[319] Voir ma Catherine de Médicis.

[320] Sur la mort de François Ier, comparez Mémoires de Du Bellay, lib. X, et Belcarius, liv. XXV, no 1.

[321] Voyez ce que disent à ce sujet des auteurs fort graves du XVIe siècle: Théodore de Bèze et Pasquier lui-même dans ses Recherches sur la France.

[322] Après le sacre de Reims, 25 juillet 1547.

[323] Lettre originale de Calvin.

[324] Voir les pièces textuelles dans mon travail sur la Réforme, t. Ier.

[325] Recueil des ordonnances de Henri II, publié par Decreusi.

[326] Brantôme, Le connétable de Montmorency.

[327] Brantôme, article M. le connétable de Montmorency.

[328] Il était né en 1520.

[329] Brantôme dit de lui: «Il n'avait que cela de mauvais qu'il était trop haut de la main et trop querelleux.»

[330] Paroles de La Vieuville, dans ses Mémoires.

[331] Mémoires de Montluc, chap. V.

[332] «Il estait au soleil couché, premier qu'ils entrassent en duel.» (Mém. de Montluc.)

[333] Ce coup n'était pas loyal.

[334] Comparez Mémoires de Montluc, Brantôme et La Vieuville (Mémoires). On dit que la dame sur laquelle Chataigneraie avait tenu les vilains propos, était la duchesse d'Étampes et qu'en cette occasion il servit Diane de Poitiers qui fit autoriser le combat.

[335] En 1553; il était toujours curé de Meudon, et avait une prébende dans l'église collégiale de Saint-Maur-les-Fossés.

[336] L'édition princeps est de Lyon, Frédéric Juste, 1536. L'édition Elzevir est de Leyde, 1663.

[337] Les philosophes, médiocres commentateurs de Rabelais, ont cherché en vain à relever cette physionomie jusqu'à en faire un penseur; chaque époque a sa manie: aujourd'hui on est penseur par état.

[338] Il était né le 22 février 1533.

[339] Ce ne fut que plus tard qu'il publia ses livres; l'édition princeps est de 1585.

[340] Brantôme était né en 1537.

[341] Cette longue énumération se trouve dans le testament ou épitaphe de Brantôme.

[342] Le 14 décembre 1563, ainsi que le constate Papon (Hist. de Provence).

[343] Traité des Fardements, édition princeps très-rare, 1552.

[344] Édition rare, Lyon, 1568.

[345] Les deux assiettes (collection du château de Mello) marquées aux chiffres de Henri II et de Catherine de Médicis, ont été payées douze mille francs.

[346] On a pourtant écrit que Charles IX tirait sur les huguenots des fenêtres du Louvre, qui ne fut achevé que sous Henri III.

[347] Elle avait trois enfants déjà à la mort de François Ier.

[348] Diane était née en 1538. Voyez ce qui est dit d'elle dans les Confessions de Sancy, chap. VI, et dans d'Aubigné, liv. II, chap. IV.

[349] Le Roi avait négocié ce mariage avec le pape Paul III.

[350] Plusieurs des monnaies de Henri II portent cette légende.

[351] Sa fondation la plus charitable fut un hospice pour quinze pauvres veuves.

[352] L'Escurial coûta six millions de ducats d'or (soixante millions de francs).

[353] La paix de Cateau-Cambresis fut signée le 13 avril 1559.

[354] Marie avait été couronnée reine d'Ecosse à 9 mois (septembre 1543).

[355] Elle avait été confiée au comte de Brézé, ambassadeur de France.

[356] Cette thèse fut soutenue en présence de Catherine de Médicis, dans une salle du Louvre.

[357] Si l'on veut se faire une idée exacte de ces châteaux à chaque époque, il faut parcourir la collection de gravures (Biblioth. Imp.). Malheureusement le désir de trop compléter, a fait donner place dans cette collection à de mauvaises estampes vendues aux foires comme l'histoire du Juif Errant.

[358] Les Tuileries de Catherine de Médicis se composaient du pavillon du centre avec deux ailes que terminaient deux petits pavillons florentins, surmontés de galeries à colonnades: il n'y avait pas ces noires et grosses mansardes, chapeaux de plomb, sur le monument.

[359] Quelques débris du château d'Anet ont été conservés; le plus beau morceau est à l'École des Beaux-Arts, où il fait encore l'admiration des visiteurs: on a placé encore quelques débris d'Anet, les médaillons, dans un petit édifice situé dans le quartier de François Ier aux Champs-Élysées.

[360] Il serait inexact de dire que le tournois de la rue Saint-Antoine fut le dernier. Charles IX fut blessé par le duc de Guise dans un tournoi donné en 1571, à Clermont-la-Marche.

[361] Mai 1559.

[362] Brantôme, Henri II.

[363] Henri II mourut le 10 juillet 1559, il avait régné 13 ans.

[364] Voir ma Catherine de Médicis.

[365] Voir sa biographie dans Michaud.

[366] La pétition existe encore, elle est recueillie (Biblioth. Impériale, cabinet des estampes, château d'Anet).


TABLE

    Pages.
I. —Les romans de chevalerie. XVe siècle 1
II. —Charles VIII et Louis XII en Italie. 1480-1514 7
III. —Les capitaines des gens d'armes sous Louis XII.—Le comte de Saint-Vallier.—Origine de Diane de Poitiers. 1488-1514 13
IV. —La chronique de l'archevêque Turpin.—Le monde enchanté. 1200-1510 20
V. —Naissance, éducation et mariage de François Ier. 1494-1514 27
VI. —Première campagne de François Ier en Italie.—Victoire de Marignan. 1515-1516 34
VII. —Léonard de Vinci.—La belle Ferronnière. 1515-1518 44
VIII. —Madame de Châteaubriand.—Gouvernement du maréchal de Lautrec dans le Milanais. 1518-1520 52
IX. —Le camp du Drap-d'Or. 1519 61
X. —Défection du connétable de Bourbon.—Complicité du comte de Saint-Vallier.—Diane de Poitiers. 1520-1522 71
XI. —La chevalerie française dans le Milanais.—Les Espagnols en Provence.—Les dames de Marseille. 1523-1524 82
XII. —Les poëtes d'amour et de guerre.—Jean et Clément Marot—Diane de Poitiers. 1524-1530 93
XIII. —L'armée Française en Italie.—La bataille de Pavie. 1521-1525 103
XIV. —Captivité de François Ier à Madrid. 1524-1525 117
XV. —Négociations pour le traité de Madrid. 1625 125
XVI. —Délivrance du roi.—Son amour pour mademoiselle d'Heilly, créée duchesse d'Étampes.—Disgrâce de madame de Châteaubriand. 1526 136
XVII. —Le connétable de Bourbon en Italie.—Sac de Rome par les huguenots.—Calvin et la duchesse d'Étampes. 1526-1527 147
XVIII. —Cartel de Charles-Quint à François Ier. 1526-1527 162
XIX. —La paix de Cambrai ou des Dames. 1528 173
XX. —Délivrance des enfants de France.—Tournoi de la rue Saint-Antoine.—Diane de Poitiers.—La duchesse d'Étampes. 1529-1530 184
XXI. —La renaissance de l'art.—Del Rosso.—Primatice.—Benvenuto Cellini.—Bernard Palissy. 1520-1540 194
XXII. —La renaissance dans les lettres.—Influence de Diane de Poitiers et de la duchesse d'Étampes. 1530-1545 207
XXIII. —Modification de la diplomatie du moyen-âge.—Alliance politique de François Ier avec la Porte Ottomane et les luthériens.—1540-1547 216
XXIV. —La jeune Catherine de Médicis.—La cour de François Ier. 1530-1535 224
XXV. —La France envahie une seconde fois par Charles-Quint.—La trève de dix ans. 1533-1538 232
XXVI. —Charles-Quint à Paris.—La duchesse d'Étampes.—Les fous Triboulet et Brusquet. 1538-1540 242
XXVII. —Les derniers jours de François Ier. 1530-1545 250
      Avènement de Henri II.—Toute puissance de Diane de Poitiers. 1547-1548 261
XXVIII. —Le combat singulier de La Chataigneraie et Jarnac. 1547 267
XXIX. —Le curé de Meudon.—Montaigne.—Brantôme.—Nostradamus. 1549-1560 273
XXX. —Les arts sous Henri II.—Les demeures royales.—Chambord.—Chenonceaux. Anet.—Les artistes.—1545-1557 284
XXXI. —Alliance de Diane de Poitiers avec les Guise.—Marie Stuart.—La vie de château. 1558 288
XXXII. —Le dernier tournoi.—Mort de Henri II.—Destinées de Diane de Poitiers et de la duchesse d'Étampes. 1557-1578 296

Coulommiers.—Imprimerie de A. MOUSSIN.

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