Histoire Médicale de l'Armée d'Orient. Volume 1
Veluti flos succisus aratro.[14]
Telle une tendre fleur qu'un matin voit éclore
Des baisers du zéphir, et des pleurs de l'aurore,
Brille un moment aux yeux et tombe avant le temps
Sous le tranchant du fer ou sous l'effort des vents.[15]
La stupeur s'empare de lui; bientôt il se ranime, et résiste avec violence à ceux qui veulent l'entraîner loin d'un si douloureux spectacle; égaré il s'élance sur la tombe de son ami, recouverte à la hâte, et veut s'y ensevelir avec lui; l'affaissement survient, et il perd le sentiment; on en profite pour l'enlever et le porter au camp... là, il se réveilla et s'abandonna de nouveau aux pleurs et aux gémissements... Qui n'accusa-t-il pas de la perte de son ami?... il alla jusqu'aux imprécations de la fureur... enfin le repos, qui calme une partie des maux des hommes, vint lui rendre la raison sans éteindre pourtant ses regrets.
Le 17 prairial on battit la générale à neuf heures du soir, et l'armée quitta le camp, qui était resté pendant soixante jours au sud d'une petite chaîne de collines parallèles à la mer, à mille ou douze cents toises de la place d'Acre.
Le 2, à une heure et demie du matin, je trouvai l'adjudant-général Leturq, non seulement ordonnant depuis trois jours dans Haïffa les dispositions de l'évacuation des blessés, dont quelques-uns étaient attaqués de l'épidémie, mais chargeant lui-même les plus malades d'entre eux sur des brancards. Cet officier supérieur fut attaqué au Kaire, à son retour de l'expédition, d'une fièvre soporeuse très grave: à peine l'avais-je guéri qu'il vola à de nouvelles fatigues et à de nouveaux dangers: il fut tué à la glorieuse bataille d'Aboukir, du 7 thermidor; et sa mémoire a été honorée par les éloges du général en chef.
L'évacuation du mont Carmel se fit aussi régulièrement; seulement quelques malheureux, trop empressés de rejoindre le corps de l'armée, crurent pouvoir abréger leur route en se frayant des sentiers sur un terrain qui était impraticable; ils se précipitèrent des rochers élevés du Carmel, et on n'en fut averti dans la faible lueur de la nuit que par les cris et les gémissements déchirants qu'ils firent entendre avant d'expirer.
Je renvoie encore à la narration du général Berthier pour le bel ordre dans lequel se fit l'évacuation des malades et des blessés, à laquelle toute l'armée, mais lui surtout, s'empressa de concourir avec ce zèle qu'inspire un amour profond de l'humanité.
L'armée était à Tentoura le même soir.
D'Acre à Tentoura il y a près de douze heures de marche: d'abord on traversa les marais; ensuite on passa le Keïsson à son embouchure sur un pont que l'on avait jeté; on traversa Haïffa, petite ville fermée de murs flanqués de tours, au midi et à cinquante toises de laquelle on voit une grosse tour qui domine la ville; on tourna la pointe du Carmel; on trouva un puits en face de Kineséh; plus loin les imposantes ruines d'Atalik, château célèbre du temps des croisés; enfin la plage aride et le mouillage de Tentoura.
Le 3, l'armée se porta en deux heures et demie de marche de Tentoura à Kaisariéh ou Césarée; on passa deux rivières à gué: le chemin était mauvais aux approches de cette ville, bâtie et dédiée par Hérode à César-Auguste, et qui ne présente plus aujourd'hui que des ruines qui attestent cependant son antique magnificence. On voit également un château fort, bâti par les croisés, dont les fossés et les murs, bien conservés, renferment dans leur enceinte les ruines d'une église gothique, en face de laquelle se trouve un puits d'excellente eau.
L'armée partit de Césarée le 4 au matin pour aller coucher à l'embouchure de l'êl-Hhadar; il y a un peu plus de huit heures de marche: d'abord on passa une petite rivière à gué; on entra ensuite dans un défilé dangereux; puis on s'arrêta au petit port de Mina abou-Zaboura, où l'on trouve au pied d'un rocher une source d'eau douce: en continuant la route on passa à gué la rivière de Hhyléh ou du Crocodile; quittant ensuite le rivage de la mer, qui s'élève brusquement, nous nous enfonçâmes un peu à l'est dans un pays montueux, couvert d'arbres et d'arbustes: le vent de mer, si agréable dans nos marches précédentes, ne s'y faisait point sentir, et la chaleur fut accablante. Après avoir passé à la vue du village d'Omkaled, nous arrivâmes avant le coucher du soleil aux bords de l'êl-Hhadar; cette rivière que l'on traversa à gué, et dont les eaux sont marécageuses, enveloppe presque de toutes parts un énorme mamelon, sur lequel l'armée passa la nuit.
On décampa le 5 à deux heures du matin; et l'armée arriva en sept heures de marche à Jaffa, en reprenant la route à l'ouest pour regagner le rivage de la mer, qu'elle ne quitta plus, et en passant sur un pont l'embouchure de la Houja.
L'armée séjourna quatre jours à Jaffa.
Le 6, au matin, il y avait dans cette place cent soixante-dix fiévreux, et le soir deux cents cinquante, fournis dans le jour par l'évacuation du mont Carmel et quelques traîneurs.
Il y avait le plus grand encombrement dans les établissements; tout manquait au soulagement des malades, local spacieux, officiers de santé, médicaments, employés et sous-employés d'administration.
Quelques militaires intelligents avaient établi d'eux-mêmes l'ombre d'organisation qui subsistait encore. On a parlé, page 52, d'un chrétien du pays qui fut fort utile: cet homme, presque toujours ivre, ronflait une partie du jour, et souvent exposé au soleil, sur un banc de pierre qui était à la porte de l'hôpital; j'ai vu des soldats, pour le tirer de cette espèce de léthargie, le réveiller brusquement, et même le conduire à grands coups de bâtons dans leurs salles, et se faire panser et opérer par lui; et il est digne d'observation qu'après avoir ouvert les bubons, ou enlevé des charbons, il essuyait légèrement ses bistouris, et les plaçait entre son front, souvent couvert de sueur, et son turban, sans qu'il en soit résulté aucun inconvénient.
Le commandant de la place avait désigné une maison isolée pour les convalescents. Elle en contenait à notre arrivée près de cinquante qui rentrèrent dans leurs corps pendant que l'armée campa devant Jaffa.
Je fis partir le même jour le citoyen Pugnet, pour qu'il prît soin d'une cinquantaine de nos malades, que l'on évacua sur Cathiéh, sous l'escorte d'un bataillon de la vingt-deuxième demi-brigade d'infanterie légère.
Le 7, sur deux cents malades existant dans l'hôpital, cinquante seulement pouvaient être évacués sur des montures; le reste ne pouvait l'être que sur des voitures ou des brancards. Parmi ces derniers un grand nombre était sans aucun espoir de guérison, et il était probable qu'il en périrait quinze, vingt, et jusqu'à 25 par jour. Je fis sentir à l'autorité supérieure l'inutilité et les dangers d'une évacuation de malades réduits à cette extrémité (no 231 et 232 de ma correspondance.)
Ayant vu une grande quantité de soldats se gorger d'abricots verts, je remis la note suivante au chef de l'état-major-général, qui la fit insérer dans l'ordre du jour (no 233 de ma correspondance).
Au camp de Jaffa, le 8 prairial an VII.
«Les fruits qui ne sont pas bien mûrs sont très nuisibles; ils produisent au moins des digestions difficiles, souvent des diarrhées et des dysenteries: ces indispositions ou ces maladies jettent dans une grande faiblesse et rendent incapable de supporter les fatigues de la guerre.»
Le soir du même jour le mouvement de l'hôpital était de cent cinquante malades; mais d'après un examen plus attentif je déterminai vingt à vingt-cinq hommes à rentrer au camp.
Je passai presque tout le 9 dans l'hôpital pour hâter l'évacuation des malades qui étaient au nombre de cent.
L'état-major de l'artillerie faisait chercher de tous côtés un jeune officier blessé à la tête au siège d'Acre: je crus le reconnaître au signalement qu'on m'en avait donné; j'appelai des canonniers qui roulaient des pièces sur le port; ils le reconnurent en effet, et m'aidèrent à le tirer d'une chambre grillée et barricadée où on l'avait laissé tout nu sur le pavé, au milieu des immondices, et ne conservant de la vie qu'un peu de chaleur. J'avertis le général commandant l'artillerie, qui le fit conduire dans sa tente et transporter ensuite pendant la route sur un brancard très commode. Ce jeune homme dont le sort intéressa tout le monde recouvra, quoique très lentement, quelque sentiment; et ses yeux, longtemps immobiles, se ranimèrent enfin pour se tourner avec reconnaissance sur le général Dommartin: il arriva jusqu'au fort d'êl-A'rich où il fut confié à une femme qui reçut des avances assez considérables en se chargeant de lui donner ses soins: mais comme s'il était des êtres que la fatalité poursuit, sa gardienne se repentit au bout de quelques jours de ses engagements; elle l'abandonna, s'enfuit furtivement pour rejoindre l'armée, et l'infortuné jeune homme périt...
L'armée partit le soir de Jaffa et arriva en sept heures de marche près d'Ebnéh; elle rencontra un passage difficile au pont du Rubia ruiné, le lit de la rivière se trouvant encaissé.
Le 10, elle se porta par une marche d'un peu plus de sept heures du village d'Ebnéh à celui d'êl-Mecheden.
Le 11, elle arriva à Gaza par une marche d'un peu plus de huit heures.
Les chemins que nous avions trouvés si fangeux en ventôse étaient devenus secs et gercés; nous ne trouvâmes à notre retour sur notre route que trois puits qui avaient jusqu'à cent pieds de profondeur, et dont il était par conséquent très difficile de puiser de l'eau pour un aussi grand nombre d'hommes.
L'hôpital de Gaza n'avait plus à notre passage que des convalescents, et il reçut quelques malades, qui suivirent les uns et les autres le mouvement de l'armée: il n'était resté personne en état de rendre un compte bien exact de ce qui s'était passé depuis six semaines; on a seulement su que le citoyen Bousquet, chirurgien attaché à la vingt-cinquième demi-brigade d'infanterie de ligne, s'était chargé de la totalité du service, et qu'il s'en était acquitté avec autant de zèle que de succès.
L'armée quitta Gaza le 12 et vint coucher en sept heures à Kan-Iounes.
Le 13, elle se rendit de ce lieu à êl-A'rich où elle séjourna le 14: la marche fut de plus de quinze heures, toujours dans le sable, et très pénible; car indépendamment de ses armes et de son sac, chaque militaire portait son bidon plein d'eau et sa provision de vivres pour quatre jours.
Arrivés à êl-A'rich nous eûmes quelques hommes que la fatigue força de s'arrêter; il s'établit à l'extérieur et à l'abri des murs du fort environ cent malades ou convalescents, en comptant quelques officiers qui s'isolèrent sous des baraques fort commodes, construites avec des branches de palmier.
L'armée se porta le 15 d'êl-A'rich en face d'Ostracine en dix-sept heures de marche; elle trouva de l'eau une fois.
D'Ostracine à Cathiéh, le 16, on trouva le puits dit Bir-êl-Ab, et la marche fut de quinze heures.
La chaleur fut portée dans le sable jusqu'au quarante-quatrième degré au thermomètre de Réaumur.
L'armée séjourna à Cathiéh le 17 et le 18.
J'eus l'honneur de remettre au général en chef le rapport suivant (no 237 de ma correspondance).
Au camp de Cathiéh, le 17 prairial an VII.
«Général,
«Il y a ici aujourd'hui environ cent fiévreux réunis sous des baraques aux environs de l'ancienne redoute; ils ont été fournis par les évacuations d'Acre, de Jaffa, et les hommes tombés malades en route.
Tous ces malades confiés aux soins d'un médecin, d'un chirurgien, et d'un pharmacien, sont dans une situation qui promet guérison à presque tous; il y en aura la moitié susceptible d'être évacuée le 19 ou le 20.
Il faudra encore un dépôt de fiévreux à Belbéis.»
Salut et respect.
L'arrière-garde, formée par la division aux ordres du général Kléber, prit un soin particulier de l'évacuation des fiévreux et des blessés; à l'une des stations ce général dit un jour aux premiers, «Mes enfants, je suis occupé de vous; nous allons partager ce que j'ai; mais ne m'approchez pas de trop près, parce que ce n'est pas de la peste qu'il convient que je meure...» Il rendait aux généraux Junot et Verdier l'honorable témoignage d'avoir puissamment secondé sa sollicitude pour ces malheureux pendant toute la route.
Mais qui peut nommer le dernier de ces généraux sans se rappeler ce que fit son épouse pendant tout le cours de l'expédition de Syrie? C'est elle qui, sans calculer qu'elle s'exposait à toutes les fatigues de la marche la plus pénible, donna son cheval pour faire passer un torrent à des piétons... elle donna souvent son eau, ses provisions, son linge, pour des malades ou des blessés... Un jour elle entendit dans le désert les cris du désespoir d'un soldat aveugle et abandonné; elle court à lui, Attache-toi, lui dit-elle, à la queue de mon cheval et ne le quitte plus; il est doux comme moi, il ne te fera aucun mal; viens, pauvre misérable, j'aurai soin de toi; lui qui ne pouvait voir sa bienfaitrice s'écriait souvent, Est-ce un ange qui me conduit, qui me nourrit? et elle, avec une touchante simplicité embellie par ses grâces, Eh non!... C'est madame Verdier... Une Italienne... La femme du général.
L'armée se porta le 19 de Cathiéh à Bir-êl-Duedar.
Le 20, de Bir-êl-Duedar à Ssalehhyéh.
Elle séjourna, et le général en chef mit à l'ordre du jour ce qui suit:
Au quartier-général de Ssalehhyéh, le 21 prairial an VII.
BONAPARTE, général en chef, ordonne:
Article premier.
Tous les hommes qui sont attaqués de la fièvre à bubons seront soumis à une quarantaine, qui sera déterminée par les conservateurs de santé.
Art. II.
Les corps qui ont avec eux des hommes ayant des symptômes de cette maladie les laisseront aux lazarets de Ssalehhyéh et de Belbéis.
Art. III.
Les hommes qui auront avec eux des individus atteints de cette maladie, lorsque l'armée aura dépassé Belbéis, seront soumis, avant d'entrer au Kaire, à une quarantaine qui sera déterminée par les conservateurs de santé.
Art. IV.
L'ordonnateur des lazarets se rendra à Mathariéh, et fera avec les conservateurs de santé les visites et autres dispositions nécessaires pour mettre à exécution le présent ordre.
Signé Bonaparte.
Le 22, l'armée alla coucher au Santon;
Le 23, à Belbéis.
Le 24, séjour, pendant lequel j'adressai une lettre à l'ordonnateur en chef sur la nécessité de déterminer un mode régulier pour la rentrée des convalescents de l'épidémie dans leurs corps, où l'on faisait souvent des difficultés pour les recevoir (no 240 de ma correspondance). Le général en chef prit à ce sujet un arrêté qui fut inséré comme supplément à l'ordre du jour.
L'armée vint camper le 25 à êl-Mark, et l'ordre du jour portait:
«En conséquence de l'arrêté du général en chef du 21 prairial, concernant les dispositions sanitaires, le citoyen Blanc, ordonnateur des lazarets, a arrêté que l'armée pourra entrer demain au Kaire sous les conditions ci-après:
Les officiers de santé des différents corps, le citoyen Desgenettes, pour le quartier-général, reconnaîtront qu'il n'y a aucune maladie contagieuse dans les corps, et en adresseront le certificat ce soir au quartier-général.
Le chef de l'état-major, l'ordonnateur en chef, les généraux de division, passeront en revue, et ordonneront que tous les effets turcs et de fabrique de Syrie seront laissés en quarantaine à la Qoubbéh; chaque corps en fera un paquet.
Le général en chef ordonne la stricte exécution des présentes dispositions, et en rend les généraux et chefs de corps responsables.
Tous les hommes qui seraient reconnus malades au quartier général et dans les divisions d'après la visite des officiers de santé resteront à la Qoubbéh pour y faire quarantaine.»
Signé Alex. BERTHIER,
Général de division, Chef de l'État-Major général.
Je remis le même soir, en exécution de l'ordre précédent, la note suivante à l'ordonnateur des lazarets (no 241 de ma correspondance):
Au camp d'êl-Mark, le 25 prairial an VII.
«Le médecin en chef de l'armée déclare au citoyen ordonnateur des lazarets qu'il a, conformément aux ordres du général en chef du 21 et d'aujourd'hui, constaté l'état de santé des divers individus composant l'état-major-général, ou se trouvant à sa suite, et qu'il n'existe parmi eux aucune maladie contagieuse.»
Les autres rapports ayant été également favorables, l'armée rentra au Kaire le 26.
On a eu lieu de s'assurer en Syrie que les exutoires permanents tels que les cautères et les sétons; les éruptions cutanées, telles que les dartres, la gale; les maladies vénériennes, les plaies récentes ou les ulcères avec une abondante suppuration ne mettaient point à l'abri de l'épidémie.
Les femmes, les jeunes gens, les enfants même à la mamelle, ont généralement plus résisté à l'épidémie que les hommes les plus robustes. Une Alsacienne, épouse d'un guide, qui allaitait son enfant, a fait plus de soixante lieues derrière la voiture du général en chef, presque toujours assise entre deux pestiférés, sans qu'il en soit rien résulté de malheureux.
Il a péri plus de douze à quinze cents chameaux tandis que les ânes ont parfaitement résisté à la fatigue.
Des bandes de chiens affamés, comme ceux qui dévorèrent Jésabel, rodaient continuellement autour de nos ambulances: on les vit se jeter avec avidité sur des cataplasmes qui avaient recouvert des bubons, manger des chairs charbonnées, se repaître de cadavres de pestiférés, sans qu'ils aient contracté de maladie; au moins en voyait-on rarement de morts aux environs de nos établissements.
J'ai oublié de dire que l'on a tiré un grand parti des oignons de scille cuits et appliqués sur les bubons.
Ces tumeurs critiques étaient généralement dans les aines; quelques malades en avaient dans les aines et sous les aisselles; on en a vu jusqu'à quatre dans le même individu.
Les charbons n'avaient pas de siège bien déterminé. Ils étaient souvent multipliés dans le même malade, et j'en ai fréquemment vu jusqu'à trois.
La rétrocession des bubons, surtout des parotides, à toutes les époques, mais plus particulièrement au commencement, était presque toujours funeste. Il y a cependant eu quelques exemples mais très rares du contraire.
Les bubons pestilentiels sont des engorgements des glandes lymphatiques qui s'opèrent évidemment par un mouvement inverse du système absorbant.
Les charbons éminemment contagieux se communiquent au contraire par absorption directe, c'est-à-dire dans l'ordre ordinaire et par la voie la plus courte et le plus simple contact.
J'ai observé dans les marches et au retour que les blessés attaqués du tétanos souffraient beaucoup plus de la variation de l'atmosphère que du plus haut degré de chaleur.
On a je crois parlé ailleurs des sangsues que nos soldats trouvèrent, à leur retour, dans des eaux saumâtres, et qui s'étant attachées au voile du palais et aux parties voisines causèrent des hémorragies. Quelquefois un gargarisme fait avec un peu de vinaigre suffit pour les détacher, et d'autres fois nos chirurgiens furent forcés d'aller les chercher avec des pinces.
D'après les renseignements les plus exacts, l'armée a perdu en Syrie, par l'épidémie, environ sept cent hommes.
En rappelant les obligations que j'ai au citoyen Jacotin, j'emprunte encore de lui le résultat suivant pour terminer ce qui concerne l'expédition de Syrie.
Je me suis également servi pour le retour de l'armée d'un itinéraire publié par le citoyen Costaz; no 31 et 32 du Courier d'Égypte.
Résultat des routes pendant l'expédition de Syrie.
| Distance du Kaire à Ssalehhyéh | 23 lieues |
| De Ssalehhyéh à Cathiéh | 16-¾ |
| De Cathiéh à êl-A'rich | 24 |
| D'êl-A'rich à Gaza | 17 |
| De Gaza à Jaffa | 18-¾ |
| De Jaffa à Acre | 23-½ |
| Cette route de | 123 lieues |
a été faite dans 38 jours, desquels il faut déduire; savoir,
| Pour le siège d'êl-A'rich | 3 jours | 7 | 18 | ||
| Pour celui de Jaffa | 4 | ||||
| Pour séjour | 11 | ||||
ce qui donne pour terme moyen une marche de 6 lieues 3/20 par jour.
La marche moyenne des convois, les chameaux portant environ 3 quintaux, est d'environ ¼ de lieue à l'heure; ainsi la marche moyenne a été de 8 heures environ.
Cette marche considérée quant au sol, l'armée a fait; savoir,
| Dans le désert | 52 lieues | ½ |
| Dans le pays habité ou cultivé | 70 | ½ |
| De ces 123 lieues il y | ||
en a, en supposant les limites de l'Asie et de l'Afrique aux colonnes de Réfa; savoir,
| En Asie | 50 lieues | ½ |
| En Afrique | 72 | ½ |
| La route de retour n'a été que de | 119 lieues | ½ |
| L'armée a suivi la mer | 20 lieues | |
| Et marché dans l'intérieur du pays | 99 | ½ |
| Ces 119 lieues | ½ | |
ont été faites en 25 jours;
| Savoir, | en séjour 8 | 25; ce qui fait par | ||
| en marche 17 |
jour de marche pour terme moyen 7 lieues, et en temps 9 heures 21 minutes.
En allant en Syrie de Kan-Iounes à Acre (distance 47 lieues ½) l'armée a passé dans trois villes, et dans quinze villages, et quarante-neuf rivières, torrents, etc; savoir,
| Rivières passées | sur des ponts | 3 | 8 | ||
| à gué | 5 | ||||
| Ruisseaux ou torrents passés | à sec | 3 | 35 | ||
| à gué | 32 | ||||
| Marais et mauvais passages | 6 | ||||
| Total | 49 | ||||
Le retour d'Acre à Kan-Iounes, par la route indiquée ci-dessus, n'a été que de 44 lieues ¼; on a passé dans cinq villes, et douze villages.
| Villes | subsistantes | 3 | 5 | ||
| ruinées | 2 |
L'armée a passé vingt-trois rivières, torrents, ou ruisseaux; savoir,
| Rivières passées | sur ponts de pierre | 2 | 23 | ||
| ponts de bois jetés par l'armée | 3 | ||||
| à gué | 5 | ||||
| à sec (le Rubin) | 1 | ||||
| Torrents et ruisseaux passés à sec | 12 | ||||
De Kan-Iounes à Acre, l'armée a marché 10 jours effectifs, et elle a fait 47 lieues et demi; savoir,
| En pays | de montagnes | 4 | 47½ | ||
| de coteaux | 21 | ||||
| Et en plaine | 22 | ½ | |||
L'invasion de Syrie a duré 125 jours; savoir,
| En marches | en allant | 20 | 37 | ||
| au retour | 17 | ||||
| En séjour | en allant | 11 | 16 | ||
| au retour | 5 | ||||
| En sièges | en allant | 7 | 72 | ||
| devant Acre | 62 | ||||
| au retour, pour faire sauter les fortific. de Jaffa | 3 | ||||
| Enfin de ces 125 j., | |||||
l'armée en a passé, savoir,
| En Asie | 98 | 125 | |
| En Afrique | 27 |
Le citoyen Emeric, que j'avais chargé de me suppléer en Égypte, et qui l'a fait de manière à mériter la reconnaissance de l'armée, me remit, à mon retour de Syrie, un compte fort exact et fort détaillé du service médical.
J'ai relevé, tant de ses rapports que des mouvements qui m'ont été fournis par l'administration, qu'il était mort dans les hôpitaux ou lazarets de l'Égypte, en pluviôse an 7, trois cents dix-huit hommes, dont cent trente à Alexandrie, par continuation de l'épidémie;
En ventôse, deux cents soixante-sept hommes, dont cent trente à Alexandrie;
En germinal, trois cents onze, dont cent quarante-quatre à Alexandrie;
En floréal, deux cents huit, dont quatre-vingt-quinze à Alexandrie;
En prairial, cent vingt-un, dont quarante-sept à Alexandrie;
Ce qui fait un total de mille deux cents vingt-cinq ci:
| Morts en pluviôse an 7 | 318 |
| Idem en ventôse | 267 |
| Idem en germinal | 311 |
| Idem en floréal | 208 |
| Idem en prairial | 121 |
| Total | 1225 |
Je fis mettre à l'ordre du jour l'avis suivant (no 246 de ma correspondance):
Au quartier-général du Kaire, le 3 messidor an VII.
«On croit utile de rappeler à l'armée dans ce moment l'avis inséré dans un ordre du jour de fructidor an 6, relativement aux bains (voyez page 16).
«Dans la saison où nous nous trouvons maintenant notre attention principale doit être dirigée sur l'état de la transpiration, c'est-à-dire que nous devons nous tenir, autant qu'il est possible, dans une température égale: ainsi il est dangereux de passer les nuits à l'air et nu; il en résulte des maladies des yeux assez connues, souvent des diarrhées incommodes, et même des dysenteries, presque toujours funestes dans de grands rassemblements d'hommes.
L'eau du Nil est d'une excellente qualité; il est malgré cela prudent, quand on a chaud, de ne la boire qu'après s'être rincé la bouche avec, ou en avoir versé sur ses mains.
L'usage exclusif de la viande n'est pas avantageux dans les chaleurs.
Les spiritueux tels que l'eau-de-vie, pris en quantité, font autant de mal qu'ils font de bien pris modérément.
Personne ne peut ignorer que les fruits qui ne sont pas bien mûrs sont nuisibles.
La nombreuse garnison du Kaire, et les corps de troupes considérables qui s'y trouvent momentanément, ainsi que dans les environs, ne fournissent pas cent cinquante fiévreux aux hôpitaux.»
J'adressai le même jour au général chef de l'état-major-général la lettre suivante (no 247 de ma correspondance):
Au quartier-général du Kaire, le 3 messidor an VII.
«Général, j'ai visité aujourd'hui les prisons de la citadelle; tous les cachots, sans exception, sont inhabitables: l'air n'y plonge que par des ouvertures très étroites; il y a déjà longtemps que le général en chef avait ordonné de les agrandir.
Ce qui m'engage à réclamer de nouveau sur cet objet, c'est qu'indépendamment du mal qui en résulte pour les prisonniers, ils peuvent souvent porter dans les hôpitaux ou au-dehors des maladies dangereuses.
Les distributions d'aliments ne se font pas toujours avec exactitude: l'eau manque souvent dans la proportion nécessaire pour entretenir la santé.
Les Anglais, les Turcs, et les Grecs, qui ont la liberté de respirer l'air pur, ne se plaignent de rien relativement au régime.
La proximité des prisons avec un hôpital considérable, et qui dans ce moment est bien tenu, exige qu'on les surveille d'une manière particulière.»
Le 9, j'envoyai au général chef de l'état-major-général le résultat circonstancié des visites de salubrité faites, d'après mes ordres, dans tous les établissements militaires du grand et du vieux Kaire, de Gizeh, de Boulak, et environs; il se faisait de semblables visites sur tous les autres points de l'armée.
Le 15, les convalescents de Syrie étaient définitivement rentrés dans leurs corps respectifs.
Le 21, on arrêta diverses mesures d'organisation pour les hôpitaux, et les officiers de santé en chef relevèrent un abus préjudiciable par la lettre suivante, adressée à l'ordonnateur en chef (no 260 de ma correspondance):
Au quartier-général du Kaire, le 21 messidor an VII.
«Citoyen, les différentes dispositions prises pour assurer aux militaires une distribution plus abondante de légumes en déduction de la viande étant restées sans exécution, nous vous prions d'ordonner que le règlement soit suivi ponctuellement sur l'article des aliments.»
Signé les officiers de santé en chef de l'armée.
Les hôpitaux étaient généralement mal tenus et mal approvisionnés; les autorités supérieures, et les surveillants intermédiaires, n'avaient point eu assez d'énergie ou de crédit pendant l'absence du général en chef pour maintenir l'ordre dans toutes les parties de ce service délicat.
On perdit en messidor quatre-vingts malades, presque tous de la dysenterie, ci... 80 morts.
Le 27, on organisa le service de santé destiné à suivre le corps d'armée, qui, commandé par le général en chef en personne, anéantit, dans les premiers jours de thermidor, une armée formidable, sur cette même plage d'Aboukir, devenue trop célèbre par les inconstances de la fortune.
La saison était belle, et le moment de l'activité n'est pas celui des maladies: nous perdîmes dans les hôpitaux, en thermidor, quatre-vingt-trois malades, ci.............. 83 morts.
Le général Bonaparte quitta l'armée le 5 fructidor, et en laissa le commandement au général Kléber.
Pendant l'intervalle qui s'écoula entre la nomination et l'arrivée du général en chef au Kaire, l'administration sanitaire, avertie par des rapports qui avaient même une sorte de caractère officiel, éleva des soupçons sur la nature des maladies régnantes à la citadelle; je fus forcé d'adresser à ce sujet au général Dugua, commandant de la ville et de la province, ainsi qu'au conservateur chef par intérim de l'administration sanitaire, des notes, qui, rendues publiques, calmèrent et satisfirent les esprits trompés par des exagérations (no 278 et 279 de ma correspondance).
Le général en chef, par un arrêté du 24, ordonna la formation d'une commission, composée de l'ordonnateur en chef, du général commandant du génie, de l'ordonnateur des lazarets, des trois officiers de santé en chef, et chargée d'arrêter les comptes de l'administration sanitaire, ainsi que de proposer dans le plus court délai des vues sur son amélioration.
Cette commission adressa le rapport suivant au général en chef (no 291 de ma correspondance).
Au quartier-général du Kaire, le 26 fructidor an VII.
«La commission formée par l'arrêté du général en chef du 24 du courant s'est assemblée cejourd'hui 26, quoiqu'elle fût convoquée pour le 25, à cause de l'absence de quelques uns de ses membres.
Remise a été faite à la commission du rapport adressé par le citoyen Blanc, ordonnateur des lazarets, au général en chef.
Il est résulté de son examen que l'on a reconnu l'insuffisance des moyens d'isolement adoptés jusqu'à ce jour en Égypte dans les lazarets d'Alexandrie, de Rosette, de Lesbéh, et du Kaire, qui n'ont jamais été et sont hors d'état de remplir les vues de sûreté que se propose le gouvernement.
La commission est obligée de prévenir le général en chef que les établissements nécessaires ne peuvent être construits avant la saison ordinaire de la peste, qui s'avance rapidement.
On doit donc se borner à faire quelques améliorations aux établissements existants, telles que les enclore plus exactement, y former des abris, et en surveiller plus soigneusement le service; porter surtout ces améliorations sur les lazarets d'Alexandrie, de Rosette, et celui de Lesbéh, qui doit être établi sur la rive gauche du Nil.
Le général commandant le génie présentera des plans relatifs aux constructions et réparations.
L'ordonnateur des lazarets présentera des règlements pour l'administration.
Les officiers de santé en chef de l'armée organiseront et surveilleront le service des lazarets.
Signés H. Daure, Samson, D. J. Larrey, Blanc, Royer, et R. Desgenettes.
Je faisais renouveler les visites de salubrité dans les établissements militaires, et j'adressai, le 29 et le 6e jour complémentaire, des rapports à ce sujet au général de division Damas, chef de l'état-major-général (no 292 et 302 de ma correspondance).
L'ordre du jour du 5e jour complémentaire portait:
«La charge de contribuer au soulagement des défenseurs de la patrie blessés ou malades, en surveillant sévèrement les hôpitaux, est un des plus beaux attributs attachés aux fonctions de commissaire des guerres.
Mais l'abandon scandaleux dans lequel le général en chef a trouvé celui d'Ibrahim bey prouve assez combien peu ils sont l'objet de leur sollicitude.
En conséquence, le général en chef ordonne ce qui suit:
Le 6e jour complémentaire, l'adjudant-général faisant les fonctions de sous-chef de l'état-major se rendra à l'hôpital d'Ibrahim bey et à celui de la citadelle, accompagné du commissaire des guerres chargé de la police, et d'un officier du génie chargé de l'entretien et de la réparation de ces hôpitaux. Il fera constater le besoin des fournitures de toute espèce nécessaires aux malades, l'état des réparations et constructions utiles pour la propreté et la salubrité; il recueillera les réclamations des soldats et officiers malades, et celles des infirmiers, et fera de tout un rapport circonstancié et par écrit au chef de l'état-major-général.
Indépendamment des officiers commandés pour l'inspection et la police journalière, il y aura chaque jour un officier d'état-major qui fera la visite de ces hôpitaux, et rendra compte au sous-chef de l'état-major; le sous-chef de l'état-major fera lui-même cette visite de surveillance tous les dix jours, et le chef de l'état-major deux fois par mois.
Il sera de suite mis un fonds extraordinaire de quatre mille livres à la disposition de l'ordonnateur en chef pour achat de draps de lit, couvertures, et autres fournitures nécessaires aux deux hôpitaux ci-dessus.
Il sera fourni trois cents pintes de vin à celui d'Ibrahim bey, et deux cents à celui de la citadelle.»
Le général de division, chef de l'état-major-général,
Signé Damas.
L'administration sanitaire fut supprimée par un arrêté du même jour. On ne peut nier qu'elle a été utile, et on lui a dû, dans l'an 7, le dessèchement du khalich qui traverse le Kaire, exécuté par les ingénieurs des ponts et chaussées.
Ce dessèchement, fait avec mille à douze cents journées d'ouvriers, n'a guère coûté plus de vingt-un mille medins, ou sept cents cinquante livres de notre monnaie.
J'omets ici une foule de détails d'exécution dans mon service, parce que leurs résultats seuls peuvent intéresser.
Nous perdîmes en fructidor et jours complémentaires quatre-vingt-douze malades, ci..... 92 morts.
Morts dans le dernier trimestre de l'an 7.
| Messidor | 80 | |
| Thermidor | 83 | |
| Fructidor, et jours complém. | 92 | |
| Total | 255 | morts. |
Ordre du jour du 6 vendémiaire an 8.
«Kléber, général en chef, ordonne:
Les administrations sanitaires, supprimées par l'arrêté du 5e jour complémentaire de l'an 7, sont réorganisées ainsi qu'il suit:
| Il y aura au Kaire, intérieur du lazaret; | |||
| Un conservateur de 1re classe, à | 400 | f. p. mois. | |
| Un conservateur de 3e classe, à | 250 | ||
| Un secrétaire-archiviste, à | 150 | ||
| Un préposé de santé, à | 100 | ||
| Deux surveillants, à 80 f. par mois, | 160 | ||
| Six gardes de santé, à 50 f. p. m., | 300 | ||
| À Alexandrie, pour le service du port; | |||
| Un conservateur de 2e classe, à | 300 | ||
| Un secrétaire-archiviste, à | 150 | ||
| Quatre gardes de santé, à 50 f. p. m., | 200 | ||
| À Lesbéh, pour le service du bogahz de Damiette; | |||
| Un conservateur de 3e classe, à | 250 | ||
| Un secrétaire-archiviste, à | 150 | ||
| Quatre gardes de santé, à 50 f. p. m., | 200 | ||
Les employés préposés par le citoyen Blanc seront conservés.
Les conservateurs d'Alexandrie et de Lesbéh correspondront avec le conservateur de première classe au Kaire, et celui-ci avec l'ordonnateur en chef et la commission extraordinaire de salubrité publique, établie ci-après.
Les fonds destinés au service des administrations sanitaires seront mis à la disposition de l'ordonnateur en chef.
Tous les employés ci-dessus seront brevetés par l'ordonnateur en chef, et le brevet sera visé par le chef de l'état-major-général.»
Signé Kléber.
Le général en chef, sur les divers rapports de la commission formée par arrêté du 24 fructidor dernier, ordonne:
Il sera formé au Kaire une commission permanente, sous le nom de Commission extraordinaire de salubrité publique, qui aura la surveillance générale du service des lazarets, et dont les ordres seront provisoirement exécutés sans délai, sauf recours au général en chef.
Cette commission sera composée du commissaire-ordonnateur en chef, du général commandant le génie, du médecin, du chirurgien, et du pharmacien en chef de l'armée.
Il y aura trois autres commissions subordonnées à la première, à Alexandrie, à Rosette, et à Lesbéh; elles porteront simplement le nom de Commission de salubrité publique: chacune d'elles sera composée du commandant de la place, d'un commissaire des guerres, d'un médecin ordinaire, d'un chirurgien, et d'un pharmacien de première classe.
Le bureau de santé, créé pour la ville du Kaire par l'ordre du jour du 9 vendémiaire an 7, est supprimé, de même que tous ceux qui auraient pu être établis en d'autres lieux; les fonctions qui leur avaient été attribuées sont confiées par des lois et des règlements aux officiers de santé en chef de l'armée et des hôpitaux militaires.
Les règlements sanitaires adoptés l'an 6 et l'an 7, et qui ne sont point modifiés par le présent ordre, continueront d'être en vigueur.
Le général commandant le génie donnera promptement des ordres pour les constructions et réparations indispensables aux quatre lazarets pour le service de l'an 8, et il sera mis pour cet effet à sa disposition la somme de trente mille livres, que porte le devis joint à son rapport du 29 fructidor an 7.
Les officiers de santé en chef de l'armée sont chargés d'assurer et de surveiller le service de santé des lazarets; le commissaire-ordonnateur en chef délivrera des brevets, sur leur rapport, à ceux des officiers de santé qu'ils jugeront convenable de conserver, employer, ou requérir.
Il y aura en outre dans chaque lazaret deux ou quatre chirurgiens turcs, au besoin, qui rempliront les fonctions d'aides, et seront à la solde de soixante-quinze livres par mois.
Signé Kléber.
Le général de division, chef de l'état-major
général.
Signé Damas.
En exécution de l'arrêté ci-dessus, les officiers de santé en chef de l'armée nommèrent, le 7, les officiers de santé suivants pour faire temporairement partie des commissions de salubrité publique:
| À Alexandrie, | |||
| Le citoyen Salze, médecin ordinaire. | |||
| Le citoyen Mauban, chirurgien de 1re classe. | |||
| Le citoyen Flamand, pharmacien de 1re classe. | |||
| À Rosette, | |||
| Le citoyen Sotira, médecin ordinaire. | |||
| Le citoyen Villepreux, chirurgien de 1re classe. | |||
| Le citoyen Désir, pharmacien de 1re classe. | |||
| À Lesbéh, | |||
| Le citoyen Barbès, médecin ordinaire. | |||
| Le citoyen Rozelle, chirurgien de 1re classe. | |||
| Le citoyen Lemaire, pharmacien de 1re classe. | |||
Le 15, tous les travaux relatifs aux invalides étant terminés, et les états définitivement arrêtés, les officiers de santé en chef écrivirent aux inspecteurs-généraux du service de santé des armées, à Paris, la lettre suivante (no 309 de ma correspondance):
«Citoyens, nous vous envoyons ci-joint l'état des militaires jugés dans le cas d'invalidité absolue, et qui retournent en conséquence en France.
Nous les faisons accompagner par les citoyens Casabianca, chirurgien de première classe, Bosio et Demay, chirurgiens de troisième classe, qui quittent ce climat pour raison de santé.
Nous avons déposé les doubles des certificats entre les mains de l'ordonnateur en chef.»
Extrait de l'ordre du jour du 17 vendémiaire an 8.
«La commission extraordinaire de salubrité publique, dont la formation a été ordonnée par l'ordre du jour du 6 vendémiaire, s'assemblera les 1er et 5 de chaque décade, à trois heures après midi, chez le commissaire-ordonnateur en chef.
Il est accordé à cette commission un secrétaire, qui aura par mois cent cinquante livres qu'il touchera sur un état signé de lui, et arrêté par le commissaire ordonnateur en chef, dont il devra être breveté.
Le commandant de la place du Kaire enverra à la commission les rapports qui étaient adressés à l'ordonnateur des lazarets.
Il est recommandé aux commissions formées dans les autres places de correspondre régulièrement avec celle du Kaire, et de l'informer exactement de tout ce qui sera relatif à ce service.»
Signé Kléber.
Le même jour, j'adressai aux citoyens Calvi, au Kaire, et Gisleni, à Alexandrie, une commission de médecin ordinaire de l'armée, expédiée conformément à l'arrêté du 6 du courant par l'ordonnateur en chef, et je les chargeai spécialement du service des lazarets de ces deux places (no 310 et 311 de ma correspondance).
Le 21, la commission extraordinaire de salubrité publique proposa au général en chef de prendre l'arrêté suivant, qui fut inséré à l'ordre du jour.
Au quartier-général du Kaire, le 24 vendémiaire an 8.
Le général en chef, sur le rapport de la commission extraordinaire de salubrité publique, ordonne:
Art. Ier. Les effets des hôpitaux ou des lazarets qui ont servi, l'an passé, à des malades attaqués de fièvres contagieuses, seront, dans le plus court délai, lavés soigneusement, ou brûlés, selon qu'il sera jugé convenable.
II. L'exécution de cet ordre est confiée à la commission extraordinaire, et aux commissions de salubrité publique d'Alexandrie, Rosette, et Lesbéh; ces dernières rendront compte de cette opération à la commission extraordinaire, ainsi que de toutes celles que les localités pourront leur dicter.
III. Tous les agents de l'administration sanitaire sont aux ordres immédiats des dites commissions.
Signé Kléber.
Les lettres du citoyen Pugnet, datées de Girgéh, m'apprenaient que dans la haute Égypte il n'y avait guère en vendémiaire que des dysenteries.
Dans la basse Égypte, beaucoup plus humide, et particulièrement à Lesbéh, il régnait des fièvres catarrhales et bilieuses, et depuis que les chaleurs, qui n'avaient duré qu'environ un mois et demi, étaient disparues, les fièvres pestilentielles commençaient à reparaître (Extrait de la correspondance du citoyen Barbès).
À Alexandrie, on comptait neuf personnes attaquées de ces fièvres, dont trois mortes; les autres maladies étaient des diarrhées, des dysenteries, et quelques cas de scorbut.
À Rosette, il y avait très peu de malades; le mouvement de l'hôpital était communément de vingt-cinq fiévreux.
Au Kaire, on surveillait avec la plus grande vigilance la santé des troupes, sans négliger celle des habitants, et j'étais journellement occupé à provoquer ou à faire exécuter des mesures de salubrité; je ne cessais également, dans les mêmes vues, de presser par des circulaires la rédaction des topographies médicales (no 318, 319 et 320 de ma correspondance).
Voici quelques observations du citoyen Savaresi sur les maladies régnantes dans cette place en vendémiaire.
Dysenteries. Les dysenteries invétérées sont incurables; elles sont accompagnées de coliques très fortes, qui sont produites par l'inflammation locale des intestins, et se terminent par la gangrène.
Les dysenteries récentes, quoiqu'opiniâtres, se guérissent avec moins d'obstacles: quelquefois elles sont vermineuses; on les voit rarement accompagnées de fièvres intermittentes.
Dans ces maladies l'administration de l'opium produit de bons effets; les stimulants sont très utiles dans certains cas.
Affections du foie. Il y a eu beaucoup d'obstructions du foie et de la rate; je crois que c'est la constitution automnale: les rhumes accompagnent ces obstructions.
Les alcalins ont été employés avec utilité.
Maladies diverses. Il y a eu des jaunisses, qui ont disparu à la suite de l'action du tartrate de potasse antimoine, et de la rhubarbe en poudre en petites doses réitérées.
Les fièvres intermittentes n'ont pas été nombreuses; elles résistent quelque temps, parce que le quinquina est médiocre; je le mêle avec l'alun pour lui donner plus de stypticité.
Les ophtalmies se guérissent très facilement.
Ceux qui avaient eu des douleurs rhumatismales l'année passée dans cette saison, et qui les avaient vues s'apaiser dans les chaleurs, en sont atteints de nouveau.
Nous avons perdu en vendémiaire soixante-sept hommes, ci............. 67 morts.
La commission extraordinaire de salubrité publique prit, le 1er brumaire, plusieurs délibérations:
1o Elle proposa et détermina l'organisation de l'administration de Rosette;
2o Elle rejeta, comme dispendieuse et inutile, la proposition de donner des adjoints aux conservateurs de santé;
3o Elle provoqua des mesures qui furent adoptées, et mises à l'ordre du jour ainsi qu'il suit:
Au quartier-général du Kaire, le 4 brumaire an VIII.
Kléber, général en chef, sur le rapport de la commission extraordinaire de salubrité publique, ordonne:
Art. Ier. Les commissions de salubrité publique établies à Alexandrie, Rosette, et Lesbéh, qui sont en activité, doivent correspondre le plus fréquemment possible avec la commission extraordinaire séante au Kaire.
II. À la réception du présent ordre du jour, et à la diligence des susdites commissions, la quarantaine sera établie ainsi qu'il suit:
III. À Alexandrie, on se conformera, pour les relations extérieures, au règlement observé l'an VII, et approuvé par le général en chef Bonaparte.
IV. À Rosette, on suivra le même règlement pour ce qui arriverait directement par mer en remontant le Nil; ce qui vient d'Alexandrie sera provisoirement sujet à quinze jours de quarantaine.
V. À Lesbéh, on observera, de même qu'à Alexandrie et à Rosette, ce qui est prescrit par le règlement pour les relations de l'extérieur, c'est-à-dire de la mer en remontant directement le Nil: dès à présent, tout ce qui vient de Damiette fera à Lesbéh quinze jours de quarantaine d'observation, et la commission de salubrité de cette place fera ce qu'elle jugera convenable sur la prolongation de la quarantaine, dans le cas où la situation de Damiette l'exigerait.
VI. Au Kaire, on soumettra, à partir de ce jour, tous les objets venant d'Alexandrie, Rosette, Lesbéh, et Damiette, à quinze jours d'observation, et les personnes seulement à dix jours.
VII. Les conservateurs prendront des mesures pour aérer et sanifier les marchandises et autres objets.
VIII. Les lettres venant d'Alexandrie, Rosette, Damiette, et Lesbéh, seront passées au vinaigre, et l'administration des postes est responsable de l'exécution de cet article.
Signé Kléber.
La commission délibéra, le 6, d'appeler dans son sein l'ordonnateur de la marine Leroy, dont l'expérience et les lumières sont aussi connues que son ardent amour du bien public: le général en chef approuva cette nomination.
La même commission prit, dans sa séance du 10, les délibérations suivantes, qui furent mises à l'ordre du jour.
Ordre du jour du 17 brumaire an 8.
Le général en chef, sur le rapport de la commission extraordinaire de salubrité publique, ordonne:
Art. I. Il y aura une djerme armée en station à la pointe du Delta.
II. Le commandant de la djerme fera arrêter tous les bâtiments venant de Rosette et Damiette, et les fera escorter jusqu'au lazaret de Boulak.
III. Il délivrera à chaque reys une note signée par lui, portant le nom du reys, l'endroit d'où il vient, et le nombre de personnes qu'il a sur son bord.
IV. Il recommandera au patron commandant le bateau d'escorte d'empêcher toute communication des personnes qui se trouveront sur la djerme en quarantaine jusqu'à leur arrivée au lazaret.
V. Quant aux djermes venant de tout autre lieu que ceux mis en quarantaine, on les laissera monter à Boulak sans escorte, en recommandant aux reys de ne communiquer avec personne avant d'avoir pris l'entrée du bureau de santé vis-à-vis de Boulak.
VI. Il sera établi à la Koubéh un poste sanitaire d'observation, composé d'un des conservateurs de troisième classe du Kaire, et de deux gardes de santé.
Signé Kléber.
Extrait des délibérations de la commission extraordinaire de salubrité publique, du 10 brumaire an 8.
La commission délibère d'appeler, au nom du bien public, le concours des lumières et de la surveillance de tous ceux qui peuvent lui communiquer des renseignements utiles; elle recevra avec reconnaissance tous les avis et toutes les observations; elle invite en même temps tous ceux qui auraient connaissance de l'existence de quelques fièvres contagieuses à en informer les conservateurs de santé, pour qu'il soit fait une visite régulière par qui de droit, et que l'on puisse prendre de suite les mesures nécessaires pour la sûreté générale.
La commission s'assemble régulièrement tous les décadi et quintidi, et toutes les fois que les circonstances l'exigent, maison de l'ordonnateur en chef.
Le président de la commission.
Signé R. Desgenettes.
Le secrétaire de la commission.
Signé Zink.
Le général en chef approuve la présente délibération, et ordonne l'exécution des dispositions qu'elle renferme.
Signé Kléber.
L'ordre du jour du 18, qui déterminait le service des ports d'Alexandrie, renfermait la disposition suivante:
«Lorsque les commissions de salubrité publique des ports d'Alexandrie, Rosette, et Lesbéh, auront à délibérer sur quelque chose relative à la santé des marins et à la salubrité des bâtiments, elles appelleront l'administrateur en chef de la marine, et le chef de l'état-major maritime.»
Le 21, sur la proposition du général en chef, la correspondance des commissions de salubrité publique, et les déclarations du conservateur de première classe, la commission extraordinaire délibéra que la quarantaine d'observation serait réduite à cinq jours, à compter de l'entrée au lazaret.
Un rapport mal motivé excita des réclamations sur la délibération du 21; mais elle fut maintenue d'après la connaissance positive que je pris des faits le 24.
Le 30, il fut déterminé entre l'ordonnateur et les officiers de santé en chef qu'un corps d'armée se portant sur les frontières de l'Égypte, du côté de la Syrie, l'hôpital de Belbéis serait l'établissement principal.
Je passe sous silence une foule de détails d'exécution.
Il y eut peu de malades en brumaire, et un très petit nombre d'exemples de fièvres pestilentielles mortelles; nous perdîmes pendant ce mois soixante-treize hommes, ci..... 73 morts.
La commission extraordinaire approuva, le premier frimaire, la mise en quarantaine de la frégate la Léoben, ordonnée par la commission de salubrité publique d'Alexandrie, à cause d'un accident de fièvre pestilentielle qui s'était manifestée à son bord, et elle la chargea de faire descendre l'équipage à terre, et de l'isoler pendant que l'on s'occuperait de sanifier le bâtiment.
Quelques circonstances forcèrent la commission extraordinaire à réclamer près du général en chef la prérogative indispensable de communiquer avec lui sans intermédiaire, et l'exécution sévère des règlements sans acception des personnes.
Je fis cesser les préférences usurpées par les vénériens sur les fiévreux de tout genre, en rappelant encore l'exécution de nos règlements, qui ont si sagement et depuis si longtemps déterminé le classement le plus avantageux des malades.
Le 11, la commission extraordinaire adressa à la commission de salubrité publique d'Alexandrie la délibération suivante, prise dans la séance de la veille (no 366 de ma correspondance).
«La commission de salubrité publique d'Alexandrie donnera les ordres nécessaires pour faire visiter les marins tous les matins, et faire séparer ceux qui auraient pu tomber malades pendant la nuit; faire consigner les équipages; séparer les distributions, pour éviter les inconvénients du défaut d'exercice. Elle invitera le chef de l'état-major maritime à laisser descendre à terre, à des jours et heures différentes, les équipages, qui, séparément, pourront se promener sur le rivage entre la batterie des mortiers, l'île Pharos, et le moulin: les états-majors maritimes et les officiers mariniers seront responsables de toute transgression aux lois sanitaires.»
Le 21, la commission extraordinaire eut l'honneur de prévenir le général en chef qu'un bâtiment grec, commandé par le capitaine Caravachisy, était arrivé le 10 du courant (frimaire) devant Aboukir, et que, sans aucunes mesures de précaution, il lui avait été permis de vendre sa cargaison; ce qui pouvait compromettre la santé publique: elle le pria en conséquence d'ordonner qu'aucun bâtiment ne pût prendre communication que dans les lieux où il existe des lazarets.
Chaque séance de la commission extraordinaire fut marquée par des délibérations confirmatives des mesures prises par les commissions de salubrité publique, ou destinées à maintenir l'ordre de police et l'économie.
Le général en chef accorda aux médecins ordinaires de l'armée une gratification, comme un témoignage de satisfaction pour leurs services.
Nous perdîmes en frimaire, par des maladies du foie, des diarrhées, des dysenteries chroniques, et un petit nombre de fièvres pestilentielles, soixante-dix hommes, ci... 70 morts.
On transféra, sur la demande des officiers de santé en chef de l'armée, le corps des invalides, de la ferme d'Ibrahim bey qu'il encombrait, dans un local commode et spacieux, à la citadelle du Kaire.
L'ordre du jour du 14 annonçait que le général en chef venait de recevoir du commodore anglais, sir Sidney Smith, un passeport qui garantissait le libre passage et le retour de nos invalides en France, et il contenait un arrêté relatif aux mesures qu'exigeait cette translation.
L'ordre du jour du 18, qui pouvait être regardé comme une ampliation de celui du 14, ordonnait que les invalides partiraient du Kaire le 25, et se rendraient à Rosette, au lieu d'Alexandrie, rendez-vous d'abord désigné.
Le quartier-général partit pour Ssalehhyéh le 19.
Extrait des délibérations de la commission extraordinaire de salubrité publique, du 25 nivôse an 8.
La commission, d'après les ordres du jour du 14 et du 18 du courant, relatifs à l'évacuation des invalides en France, et après avoir eu communication du départ des membres de la commission des sciences et arts, a délibéré:
1o Aussitôt que les conditions du cartel pour les navires destinés à porter les invalides et la commission des sciences et arts seront arrêtées, et que ces navires, ayant leurs équipages à bord, seront prêts à faire leur route, ils entreront en quarantaine.
2o Il sera formé un comité de surveillance de salubrité à bord du commandant, un comité particulier à bord de chaque bâtiment correspondant avec le comité central; et il sera nommé près du comité central un conservateur de santé de troisième classe, qui aura sous ses ordres le nombre suffisant de gardes de santé pour qu'il y en ait un à bord de chaque bâtiment.
3o Le comité central sera composé du citoyen Tallien, commissaire civil, du commissaire de la marine, du commissaire des guerres Duprat, de l'officier de santé de première classe de l'armée de terre, et de celui du bord le plus avancé en grade. Chaque comité particulier sera composé de l'officier de marine chef de route, du faisant fonctions d'aide-commissaire de marine, et de l'officier de santé. Le conservateur de troisième classe sera désigné par le citoyen Guirard, conservateur de première, qui désignera également les gardes de santé, qui seront pris de préférence parmi les invalides de la marine ou les anciens gardes en exercice dans l'an VII, et qui n'ont pas été conservés dans la réorganisation de l'an VIII. Ces employés sanitaires suivront l'expédition jusque dans les ports, et ils seront chargés des mesures de précaution, dans le cas qu'il survînt quelques accidents de peste dans le courant de la traversée.
4o Il sera destiné plusieurs djermes pour le transport des effets, provisions, et personnes, qui doivent être embarqués sur lesdits navires au lieu de l'embarquement; les djermes resteront en quarantaine jusqu'après le départ des navires auxquels elles auront été affectées: elles seront surveillées par des gardes de santé, pour qu'elles ne communiquent avec la terre ailleurs que sur l'île de la quarantaine de Rosette.
5o Toutes les provisions seront portées du Kaire à bord des navires, au lieu de l'embarquement; les djermes qui les descendront à Rosette s'y arrêteront à l'île de la quarantaine, et attendront que les djermes de la marine, indiquées dans l'article 4, puissent se charger; elles ne seront portées à bord des navires que quand le conservateur chargé de la quarantaine l'autorisera.
6o Les personnes qui doivent faire partie de l'expédition, et s'embarquer sur les susdits navires autres que les équipages, se rendront à Rosette, sur l'île de la quarantaine.
7o Les personnes qui sont à Alexandrie pour y subir la quarantaine, faire sereiner leurs hardes, laver celles qui sont susceptibles de l'être, obtiendront un certificat du conservateur de santé du lazaret, visé par la commission de salubrité publique de cette place.
8o Les personnes qui partiront du Kaire pour Rosette n'y communiqueront pas avec la ville; elles attendront, ainsi que celles venues d'Alexandrie, que le conservateur de santé chargé de la sanification des navires et équipages, avise qu'on peut se rendre à bord des navires.
9o Les contrevenants aux articles 6, 7, et 8, ne pourront s'embarquer, et faire partie de l'expédition.
Le président de la commission.
Signé R. Desgenettes.
Le secrétaire de la commission.
Signé Zink.
Par autorisation et dans l'absence du général en chef, le général de division commandant des ville et province du Kaire approuve la présente délibération, et ordonne l'exécution des mesures qu'elle renferme.
Signé C. F. J. Dugua.
La commission délibéra dans la même séance;
1o Que les personnes et marchandises venant de Rosette seraient soumises à la quarantaine d'observation jusqu'à nouvel ordre;
2o Que les personnes feraient quinze jours de quarantaine, et les marchandises selon l'exigence;
3o Que tout bâtiment ou bateau arrivant à Rosette par le boghaz devait être compris dans le rapport de l'administration sanitaire, ainsi que toutes les barques portant des troupes, chevaux, effets, vivres de la république, de quelque endroit qu'elles viennent.
Je remis, le 30, au général Dugua le résultat d'une visite de salubrité faite dans les établissements militaires du grand et du vieux Kaire, de Gizeh, et de Boulak.
Nous perdîmes en nivôse cinquante-sept malades, ci.............. 57 morts.
Pluviôse, fertile en évènements politiques, de même que les mois qui le suivirent, offrit peu de faits relatifs à l'histoire médicale.
La commission extraordinaire délibéra que les courriers venant de Damiette au Kaire se rendraient directement au lazaret.
Je remis, le 4, à l'ordonnateur de la marine une note, par laquelle, en approuvant l'approvisionnement des bâtiments en buffles, lard, et poisson salé, je recommandais les farineux (no 401 de ma correspondance).
La commission extraordinaire délibéra, le 5, que la quarantaine d'observation, établie pour les personnes venant de Rosette, serait réduite à cinq jours.
La convention d'êl-A'rich fut ratifiée par le général en chef au camp de Ssalehhyéh, le 8, et l'ordre du même jour la transmit à l'armée, accompagnée d'une proclamation qui en expliquait les motifs.
Très peu de jours après, l'on apprit par un papier public anglais (the Sun, no 2233) les évènements très détaillés du 18 brumaire[16].
Nous n'avions cependant pas ignoré toutes les grandes nouvelles de l'Europe; mais les ennemis, qui nous les avaient toujours données, ne nous avaient laissé connaître que les succès rapides et effrayants des puissances coalisées; on avait rembruni avec art et pour nous le tableau déjà trop désolant des maux intérieurs de notre patrie; et, croyant ajouter à la position la plus inquiétante, on osa nous transmettre jusqu'à ce vœu dicté par le délire d'une haine homicide à un ministre britannique au milieu du parlement: «Que l'armée d'Orient serve d'exemple; l'intérêt du genre humain demande sa destruction: espérons que, harcelée sur tous les points, luttant contre les maladies et l'influence du climat, elle ne retournera point tranquille sur le rivage où elle s'embarqua.»
Le reste du mois fut employé aux préparatifs de l'évacuation convenue.
Il y eut dans pluviôse des fièvres pestilentielles sur presque tous les points de l'armée, notamment à Alexandrie, Lesbéh, Rosette, et même au Kaire; nous ne perdîmes pourtant par les maladies que trente-huit hommes, ci... 38 morts.
Nos établissements se reployaient régulièrement sur le centre de l'armée, en suivant le mouvement des troupes.
Les provocations de quelques Osmanlis dans la journée du 12 avaient été punies de mort par l'ordre de leurs chefs, et n'avaient point altéré notre tranquillité.
Le chef de brigade Latour-Maubourg apporta le 14 au Kaire avec la constitution des nouvelles qui influèrent prodigieusement sur le moral de l'armée.
Une proclamation du 20 annonça que l'exécution de la convention éprouvait des difficultés.
Enfin, le 27, Kléber publia dans l'ordre du jour la célèbre lettre du lord Keith, à laquelle il répondit le 30 par son immortelle victoire d'Héliopolis.
Pendant que le général en chef dispersait devant lui les ottomans fugitifs, son palais, abandonné à la garde d'une centaine d'hommes, fut attaqué avec fureur par Nassif pacha, qui avait pénétré dans le Kaire à la tête d'un corps de troupes considérable. Je reçus dans cette circonstance un coup de feu à la tête.
Le citoyen Calvi, médecin de l'armée fut massacré dans le quartier des Francs.
Resserrés bientôt par des forces toujours croissantes, nous mîmes le feu à nos propres maisons en les abandonnant. Les matériaux nombreux qui ont servi à ce travail étaient perdus s'ils n'eussent été arrachés au pillage et dérobés aux flammes par le zèle et le courage d'un excellent ami[17].
Les renseignements que j'ai pu recueillir ont porté à quarante-cinq le nombre des malades que nous avons perdus en ventôse, ci... 45 morts.
État des morts dans le premier semestre de l'an VIII.
| Vendémiaire | 67 | |
| Brumaire | 73 | |
| Frimaire | 70 | |
| Nivôse | 57 | |
| Pluviôse | 38 | |
| Ventôse | 45 | |
| Total | 350 | morts. |
Germinal appartient tout entier à l'histoire militaire et politique; il est marqué par le siège et la capitulation du Kaire révolté, et le traité d'alliance avec Mourat-bey.
La correspondance du citoyen Pugnet, qui suivit les troupes qui reprirent Damiette le 9, nous a appris que le ciel étant devenu très brumeux le 15 et le 16, et que des pluies abondantes ayant tombé les 17, 18, 19, 20 et 21, il y eut dans cette ville onze personnes attaquées à la fois de fièvres pestilentielles.
Nous perdîmes dans les hôpitaux, d'après les mouvements que j'ai pu me procurer, cent vingt-un hommes, presque tous au Kaire, et presque tous blessés. Je pris sur les causes de cette mortalité des renseignements qui à la vérité ne furent point officiels, parce que les médecins ne furent point appelés en consultation, mais très suffisants pour me prouver que la complication qui se mêlait aux blessures, d'ailleurs la plupart très graves, était une vraie fièvre d'hôpital, produite par l'entassement des hommes et la pénurie des circonstances, ci............ 121 morts.
Le service fut réorganisé en floréal comme l'exigeait la conservation de l'Égypte.
Le grand nombre de blessés qui avait afflué à la ferme d'Ibrahim-bey m'engagea à faire transférer cent cinquante fiévreux à la citadelle.
Les Osmanlis malades et blessés furent reçus et traités d'après les ordres du général en chef avec les mêmes soins que nos propres concitoyens dans cette même mosquée de Nensbek, qui leur avait servi de quartier-général pendant le siège, et du haut du minaret de laquelle le fanatisme avait appelé au nom du ciel sur nos têtes reprouvées la vengeance et la mort.
Le chef de bataillon Lamarque, commandant de la sixième section du Kaire, m'ayant envoyé comme objet de salubrité, le 28, une demande qui lui avait été adressée, je lui répondis le même jour (no 455 de ma correspondance).
«Le médecin en chef de l'armée ne voit aucun inconvénient à permettre à madame Caffe de recueillir les ossements de son fils assassiné dans le Calish, pour leur rendre les honneurs religieux d'une sépulture plus décente.»
La correspondance de ce mois nous a offert dans les hôpitaux des fièvres intermittentes et nerveuses, des inflammations du foie, des jaunisses, des hydropisies du bas-ventre, et toujours des dysenteries. Les lazarets ont continué sur tous les points à recevoir des malades. La mortalité a, de même qu'en germinal, porté presque entièrement sur les blessés; et comme il a été impossible d'obtenir des mouvements distincts par genre de maladie, je porte ici cent soixante-six hommes, ci............. 166 morts.
L'ordre s'établit toujours très difficilement, et les hôpitaux manquaient encore, au commencement de prairial, de beaucoup d'objets essentiels (voyez les no 453, 456, et 464 de ma correspondance).
L'augmentation rapide des croisières anglaises et turques ayant paru à la même époque menacer d'un débarquement sur les côtes d'Alexandrie, le quartier-général se porta à Rahmanyéh.
La commission extraordinaire renvoya dans la séance du 15 au conseil de guerre de la division Lanusse une accusation de vols commis par des employés du lazaret de Rosette.
Le 21, je sollicitai et obtins du général-commandant du Kaire que les officiers, sous-officiers, et matelots anglais formant l'équipage du Cormoran, échoué dans la nuit du 30 floréal au 1er prairial sur la côte d'Aboukir, et détenus à la citadelle, fussent moins étroitement logés, et pussent se promener quelques heures chaque jour sur la place d'armes.
Les premiers étaient très affectés de leur situation; les autres ne montraient point d'inquiétudes: heureuse insouciance, qui, dans les rangs moins élevés, compense assez volontiers les faveurs de la fortune! ils se livraient à toutes sortes d'exercices et de jeux; ils se consolaient, loin de leur pays, en dessinant partout ces vaisseaux qui en font l'orgueil et la gloire; et, dans les lieux les plus apparents comme dans les recoins de leur habitation, ils tracèrent en grands caractères cette devise patriotique et chère à leurs cœurs: Old England for ever! (La vieille Angleterre à jamais!)
Les maladies qui régnaient le mois précédent se montrèrent encore dans celui-ci; la mortalité qui eut les mêmes causes fut moins grande.
L'époque du 27 est trop célèbre par la fin tragique du général en chef, qui périt sans défense sous les coups d'un assassin fanatique et furieux.
L'armée d'Orient a pleuré Kléber; la patrie a dit, en lui élevant des statues, et l'histoire répétera ce qu'il fut comme guerrier.
Si l'homme privé peut rencontrer un Plutarque, il sera aussi chéri qu'admiré par la postérité. Quoique j'aie lu journellement dans sa vie, il ne m'est permis de rappeler ici que la sollicitude avec laquelle il s'occupait de tous les détails du service dont une partie m'était confiée. La veille de sa mort il me disait encore: On sait dans l'armée combien j'ai pour vous d'amitié... C'est une lettre de crédit dont il faut vous servir pour faire du bien... Tirez sur moi hardiment, je ferai honneur à mon papier.
Nous perdîmes en prairial quatre-vingt-seize hommes, ci............. 96 morts.
Le général Menou prit le commandement de l'armée.
Il ordonna le 7 messidor la formation d'une commission, composée de l'ordonnateur en chef de l'armée, du médecin, du chirurgien, et du pharmacien en chef, du directeur de la pharmacie de l'armée, du général-commandant du génie, et de l'ordonnateur de la marine, chargée de proposer sur-le-champ des mesures pour améliorer l'administration des hôpitaux et des lazarets.
L'ordre du jour du 9, qui était entièrement consacré à la police des hôpitaux, à la répression et punition d'abus et de négligences dans la partie administrative de ce service, finissait ainsi qu'il suit:
«Le général en chef recommande à tous les commandants de provinces et de places, à tous les chefs militaires quelconques, à tous les commissaires des guerres de surveiller avec la plus grande attention tout ce qui a rapport aux hôpitaux. Les officiers de jour devront, dans toutes les villes où il existe des hôpitaux, en faire la visite avec la plus grande exactitude et la plus grande sévérité. Les commandants de provinces rendront un compte direct de cet objet si essentiel au général en chef en lui envoyant le rapport des hôpitaux toutes les décades.»
Malgré ce que l'on vient de lire, je fus obligé d'adresser le 18 à l'ordonnateur chargé de la police supérieure des hôpitaux des plaintes sur la mauvaise tenue et le désordre qui régnaient dans ceux du Kaire (no 483 de ma correspondance.)
J'appris officiellement le même jour la mort du citoyen Cérésole, médecin de l'armée employé à Alexandrie: il avait contracté dans sa maison, et d'un domestique, une fièvre pestilentielle; son épouse lui rendit les soins les plus affectueux sans en être atteinte. Ce jeune médecin aurait un jour réalisé les grandes espérances qu'il donnait, s'il eût pu concentrer son esprit, qui embrassait trop d'objets dans l'étude déjà si étendue de la médecine.
J'adressai, le 19, au comité administratif, et sur sa demande du même jour, l'état désignatif;
1o Des substances médicamenteuses, simples ou composées, dont l'introduction en Égypte pouvait mériter une prime d'encouragement;
2o De celles qui méritent une exemption de droits d'entrée;
3o De celles qui doivent payer des droits comme provenant de France;
4o De celles qui doivent payer des droits comme provenant de l'étranger (no 485 de ma correspondance).
L'ordre du jour du 20 portait:
«Le général en chef voulant prendre tous les moyens qui pourront préserver les soldats de plusieurs maladies, et notamment de l'ophtalmie, qui provient en grande partie de la fraîcheur et de l'humidité de l'air pendant la nuit, ainsi que de la mauvaise habitude qu'ont la plupart des soldats de dormir sans avoir la tête couverte, ordonne:
D'ici au 15 vendémiaire prochain tous les individus composant l'armée seront pourvus d'une capote, faite avec l'étoffe de laine brune dont se servent ordinairement les Arabes. Tous les corps de l'armée seront chargés de l'achat des étoffes et de la confection des capotes.»
J'avais fait différentes réclamations sur la position d'une portion des prisonniers anglais détenus à la citadelle, et m'y étant rendu le 21 dès neuf heures du matin pour terminer dans le jour cette affaire, j'écrivis au général en chef la lettre suivante (no 488 de ma correspondance).
À la citadelle du Kaire, le 21 messidor an VIII,
à 3 heures ½ après midi.
«Général,
Je me suis transporté ce matin, d'après vos ordres, à la citadelle, où je me suis concerté avec le chef de brigade commandant Dupas pour la translation indispensable d'une partie des prisonniers anglais dans un local plus salubre. On s'occupe avec activité de leur préparer pour ce soir l'un des étages de la tour des Janissaires.
Salut et respect.»
Ayant eu connaissance par les papiers publics des plaintes graves adressées par M. Courtenay-Boyle, capitaine du Cormoran, au commodore sir Sydney Smith, j'ai cru devoir à la vérité de mettre contradictoirement sous les yeux du public une pièce qui constatât officiellement que le sort des détenus anglais fut amélioré par les soins empressés du général en chef, au nom et sous l'autorité duquel j'agis dans cette circonstance.
J'adressai au président de la commission extraordinaire de salubrité et des hôpitaux la lettre suivante (no 489 de ma correspondance).
Au quartier-général du Kaire, le 25 messidor an VIII.
«Citoyen, des affaires très urgentes m'empêchent de me rendre à la commission.
Je n'ai au reste rien à lui communiquer pour mon service particulier.
Je me borne à désirer l'exécution stricte et littérale du règlement du 30 floréal an IV, parce que je crois qu'il est difficile de faire mieux, et qu'il serait dangereux de se livrer à des innovations d'essai dans les circonstances où nous nous trouvons.»
Le même jour j'adressai à l'ordonnateur en chef un rapport pour faire passer sur sa demande, et avec l'agrément du chirurgien en chef, le citoyen Balme, chirurgien de première classe dans la vingt-deuxième demi-brigade d'infanterie légère, au grade de médecin ordinaire de l'armée (no 490 de ma correspondance).
Les maladies, surtout les fièvres pestilentielles, se mitigèrent ou même cessèrent sur plusieurs points pendant ce mois, et nous ne perdîmes en messidor que soixante-seize hommes, ci................... 76 morts.
Extrait de l'ordre du jour du 2 thermidor an VIII.
Le général en chef voulant assurer d'une manière invariable la bonne fabrication du pain, voulant aussi prévenir les abus et les infidélités qui se commettent dans l'emploi des grains destinés à la nourriture de l'armée, ordonne ce qui suit:
Il sera formé sur-le-champ une commission, composée,
- Du général de division Reynier, président;
- Du général de brigade Lagrange;
- Du chef de la quatre-vingt-cinquième demi-brigade Viala;
- Du chef de la quatre-vingt-huitième demi-brigade Silly;
- Du chef de brigade du quatorzième régiment de dragons Lambert;
- Du chef de brigade des aérostiers Conté;
- Du directeur des poudres et salpêtres Champy;
- Du commissaire-ordonnateur en chef Daure;
- Du médecin en chef Desgenettes.
Cette commission sera chargée des opérations suivantes:
Article premier.
Elle fera remettre par le commissaire ordonnateur en chef trois ardebs bruts de blé froment, dont elle constatera le poids;
II. Elle fera procéder sous ses yeux au lavage, vannage, criblage, etc. des trois ardebs, dont, après siccité, elle constatera de nouveau le poids;
III. Elle fera suivre ensuite d'une manière exacte l'opération de la mouture, et de l'extraction de vingt livres de son par chaque quintal de farine, poids de marc;
IV. Elle fera procéder à la fabrication du pain par des boulangers qu'elle choisira, en y employant toute la farine provenue des trois ardebs: elle pourra varier les procédés tant sur la manière de pétrir que sur celle de chauffer les fours;
V. Lorsqu'elle aura obtenu le meilleur pain possible par l'extraction des vingt livres de son, elle constatera d'une manière précise ce que doit fournir de pain un poids donné de farine ainsi épurée;
VI. Elle fera publier par la voie de l'impression tous les procédés qui auront été employés, et remettra au général en chef des échantillons de pain dont l'envoi sera ordonné pour toutes les manutentions qui existent en Égypte, et pour tous les généraux commandant les provinces et divisions; partout les mêmes procédés devront être suivis; partout le pain devra être semblable à celui qui sera envoyé pour modèle.
Signé Abd. J. Menou.
Je n'ai plus trouvé dans mes notes rien d'important jusqu'à la date du 24, où j'écrivis à l'ordonnateur chargé de la police supérieure des hôpitaux la lettre suivante (no 495 de ma correspondance).
«L'expérience, citoyen ordonnateur, ayant fait connaître que plusieurs dysentériques ont guéri facilement en descendant de la haute Égypte ou du Kaire près des bords de la Méditerranée, j'ai approuvé la demande faite par le citoyen Frank; cependant l'évacuation proposée doit être bornée à 25 ou 30 malades, en s'assurant qu'ils recevront, en descendant le Nil et en arrivant, des secours convenables. C'est sur Rosette qu'il convient de faire l'évacuation; Alexandrie est trop éloignée, et le climat en est trop suspect pour y aller chercher la santé.»
Je remis le 27 au général chef de l'état-major-général l'avis suivant, qui fut inséré à l'ordre de l'armée du même jour.
AVIS sur la santé de l'armée.
L'armée a reçu plusieurs avis relatifs à la conservation de sa santé. Nous avons eu la satisfaction de voir que ces conseils simples et populaires, insérés dans les ordres du jour, et mis en pratique, ont été de quelque utilité.
Des écrits, appuyés sur l'expérience, ont été consacrés en même temps à rappeler aux hommes de l'art des choses plus dignes de leur attention: ainsi l'on a vu les médecins de l'armée faire paraître successivement des dissertations et des observations sur les maladies régnantes, en particulier sur l'ophtalmie, sur la dysenterie, et donner même des aperçus suffisants sur les fièvres contagieuses, pour que l'expérience de ceux qui les avaient traitées fût mise à profit. La mortalité considérable des enfants du Kaire pendant l'hiver dernier nous a également portés à publier en arabe et en français un avis sur la petite vérole régnante, qui a été répandu avec profusion dans toute l'Égypte.
Nous croyons dans ce moment devoir prévenir l'armée de nouveau qu'il est essentiel, pour éviter les ophtalmies, de dormir la tête et même les yeux couverts: le soin de se couvrir la nuit, et de passer le moins brusquement possible d'une température extrême à une autre, peut quelquefois seul garantir des diarrhées et des dysenteries si redoutables dans les armées.
La limonade prise en quantité et habituellement est une boisson mauvaise qui affaiblit les estomacs les plus robustes; il faut lui substituer comme rafraîchissant, l'oxycrat, qui est bien meilleur; c'est un mélange d'eau, d'un peu de vinaigre, et de sucre.
Les chaleurs considérables de la saison affaiblissent elles seules les forces digestives. Nous avons dit ailleurs que les spiritueux pris modérément relevaient ces forces, et que leur abus les détruisait, et finissait par les anéantir. Il est démontré par une expérience malheureusement trop journalière que presque tous les hommes adonnés à l'excès des liqueurs spiritueuses, et qui ont été attaqués de fièvres contagieuses, ont péri; on peut aller plus loin et dire qu'ils les ont contractées plus facilement.
Ceux qui sont attaqués de maladies vénériennes sont également par leur état de faiblesse générale ou partielle, dans des circonstances très défavorables, et qui les exposent à l'action destructive des maladies les plus graves.
Il y a dans ce moment quelques fièvres éphémères ou de très peu de durée, qui ne doivent point alarmer ceux qui en sont attaqués; une légère purgation ou deux suffisent pour rétablir la santé: le plus souvent elles sont catarrhales, et tiennent à une suppression de transpiration. Nous avons suffisamment expliqué (tome Ier de la Décade égyptienne, pages 67 et 68) les raisons qui nous engagent à recommander les purgations légères.
Nous ne craignons pas de dire qu'on abuse infiniment des remèdes: il est un peu dans le goût des militaires d'en désirer et même de violents; mais il est du devoir de ceux qui sont chargés de veiller à leur conservation, de les leur refuser quand ils sont inutiles: les remèdes héroïques ne doivent être employés que dans les circonstances difficiles. C'est rendre un service essentiel que de décrier les polypharmaques, c'est-à-dire ceux qui surchargent les malades de remèdes, et d'opposer à leur inexpérience ce beau mot d'un grand praticien de notre siècle: La fureur de traiter les maladies en faisant prendre drogues sur drogues ayant gagné les têtes ordinaires, les médecins sont aujourd'hui plus nécessaires pour les empêcher et les défendre, que pour les ordonner.
Les vésicatoires, remède très actif, et qui par conséquent a besoin d'être employé avec beaucoup de jugement et de réserve, ont récemment rendu de très grands services dans les fièvres contagieuses, et dans les soporeuses, dans quelques dysenteries, et dans les maux de gorge d'un caractère alarmant. Le gouvernement aura lieu de s'applaudir de la sage prévoyance avec laquelle il nous a fait parvenir de France une quantité considérable de cantharides.
Les éruptions qui se manifestent à la peau de plusieurs personnes, et causent de vives démangeaisons, ne doivent point inquiéter; elles sont un bienfait: les bains pris de distance en distance conviennent dans ce cas; mais il ne faut pas se lasser de répéter ce qui a été plusieurs fois dit sur leur usage, notamment dans un supplément à l'ordre du jour du 3 messidor an VII.
Les bains sont un des meilleurs moyens d'entretenir la santé, et de prévenir les maladies inflammatoires, etc. (voyez page 16.)
Nous n'avons dans ce moment qu'un très petit nombre de malades dans les hôpitaux.
Signé R. Desgenettes.
La commission chargée de l'examen de la fabrication du pain présenta son rapport au général en chef le 27.
Extrait de l'ordre du jour du 28 thermidor an VIII.
Le général en chef ordonne ce qui suit:
Article premier.
«Le général-commandant à Alexandrie fera faire le plus promptement possible des informations sur la conduite des conservateurs de santé de cette ville; il fera arrêter ceux qui seront coupables même de simples négligences, et les enverra au Kaire sous bonne et sûre escorte; ils y seront punis conformément à l'ordre du jour du 11 messidor dernier.
Art. II. La commission extraordinaire de salubrité, séante au Kaire, se rassemblera sur-le-champ, et prendra les mesures les plus actives pour arrêter les funestes effets de la contagion qui se développe de nouveau à Alexandrie; elle prendra aussi des informations sur les individus, soit de la commission de salubrité de cette place, soit des conservateurs de santé qui auraient pu manquer à leur devoir.
Art. III. Les quarantaines établies dans les différentes parties de l'Égypte d'après les ordres de la commission extraordinaire de salubrité publique seront exécutées avec la plus extrême sévérité.»
Cet arrêté était terminé par un témoignage flatteur de la satisfaction du général en chef relativement à la conduite des officiers de santé.
Nous perdîmes en thermidor soixante-dix malades, ci............... 70 morts.
L'ordre du jour du 1er fructidor portait que le rapport fait par la commission chargée d'examiner la fabrication du pain serait imprimé et publié à la diligence des président et secrétaire de ladite commission, annexé à l'ordre du jour, et envoyé dans toutes les parties de l'Égypte.[18]
Je crois devoir rapporter ici l'article que publia à ce sujet le citoyen Costaz. Je prie seulement les lecteurs de reverser entièrement sur mes honorés collègues les éloges donnés aux membres de la commission.
Extrait du Courier de l'Égypte, no 96.
«Le pain préparé pour le service de l'armée était d'une qualité fort inférieure à celle qu'on devait attendre du blé excellent délivré aux manutentionnaires par les magasins de la république: le général en chef Menou, persuadé que le soin d'assurer à d'aussi braves soldats une nourriture saine et agréable est un devoir essentiel du commandement, résolut de mettre fin aux négligences et aux abus par lesquels la fabrication du pain avait été si fort détériorée. Le moyen le plus simple de parvenir à ce but était de faire examiner tous les détails de la manutention par des hommes intègres et éclairés, chargés en même temps de déterminer par des expériences précises le produit d'une quantité donnée de blé d'Égypte réduit en bon pain: ce produit une fois connu est une base fixe d'après laquelle il est facile de reconnaître si les préposés à la fabrication ont manqué de fidélité ou de soin. C'est la marche qu'a suivie le général Menou; il a nommé pour cet objet une commission: son rapport présente des résultats intéressants sur la qualité et sur l'emploi du blé d'Égypte.
Par la négligence des cultivateurs le blé se trouve toujours mêlé avec une proportion considérable de terre: avant de l'employer on le passe d'abord au van et au crible; mais ces deux instruments ne peuvent séparer les morceaux de terre, aussi pesants que le blé, et d'un diamètre égal ou plus petit; ils laissent subsister la poussière qui s'est attachée autour du grain: on a recours au lavage pour délayer et entraîner ces derniers fragments et cette poussière. Pour épurer complètement le blé, il est nécessaire de le laver après l'avoir vanné et criblé: le lavage a de plus le mérite de remplir un objet au moins aussi intéressant que l'épuration.
Le froment d'Égypte dans son état naturel ne se comporte pas à la mouture comme celui de France; mûri au milieu de chaleurs fortes et continues, son grain est petit, dur, et corné; la pellicule qui forme le son est adhérente à la partie farineuse de telle sorte que l'action des meules les brise en même temps, et les réduit en une poussière fine, qui se tamise au travers des blutoirs sans distinction de son et de farine: c'est pour cette raison que dans quelques villes maritimes de France où l'on fait usage de blé d'Afrique, on mange un pain plus bis et moins agréable que celui de l'intérieur de la république. On a plusieurs fois, et toujours sans succès, cherché les moyens de corriger ce défaut: il paraît qu'on ne s'avisa pas d'employer le lavage. Le grain absorbe pendant cette opération une certaine quantité d'eau qui le gonfle, et lui donne le coup-d'œil jaune-doré du froment de Beauce. Alors l'adhérence entre la pellicule et la partie farineuse n'est plus aussi forte, et le son se sépare comme dans les blés de France.
La quantité d'eau que le blé peut absorber est sujette à varier suivant la durée de l'immersion: mais il y a une proportion qui est la plus favorable pour la mouture; si l'on demeure au-dessous, le son continue à se pulvériser; si l'on passe au-delà, le blé pressé entre les meules se réduit en pâte. Dans l'expérience des commissaires le poids du blé s'était augmenté au lavage de huit pour cent environ; on le laissa sécher pendant vingt-quatre heures, et lorsqu'il fut mis au moulin l'excès de poids n'était plus que de cinq et un dixième pour cent. On peut sans inconvénient s'en tenir en nombres ronds à la proportion de cinq pour cent.
Au moyen de cette préparation et des soins ordinaires le pain de l'expérience était très blanc, très savoureux, et aussi agréable que celui de Paris; il n'avait point le fumet qui nous déplaît si fort dans le pain fabriqué avec moins d'attention par les boulangers égyptiens.
Suivant qu'un boulanger est plus ou moins habile, il tire d'un poids donné de blé une quantité de pain plus ou moins grande. Cependant il y a pour chaque espèce de blé un produit moyen dont les produits particuliers ne s'écartent jamais beaucoup, quelle que soit d'ailleurs l'industrie du boulanger. En France on estime communément qu'une livre de pain répond à une livre de blé poids pour poids; dans l'expérience des commissaires le poids du pain s'est trouvé, après un refroidissement de quinze heures, supérieur à celui du blé de plus de neuf pour cent: on n'avait pas laissé un atome de son; loin de là, il avait fallu ajouter de la farine au son pour se conformer au règlement qui accorde une extraction de son de vingt pour cent, quantité que par sa nature le blé d'Égypte ne peut fournir.
Ainsi, à poids égal, le blé d'Égypte, pris dans son état naturel, donne plus de pain que celui de France.
Le général en chef qui a ordonné les expériences, et les commissaires qui ont si bien rempli ses vues se sont acquis un titre réel à la reconnaissance de l'armée. Cette mesure a eu tout l'effet qu'on pouvait en espérer; le pain du soldat est devenu très beau, et il ne faut pas douter que cette amélioration ne contribue pour beaucoup à un phénomène très remarquable que présente aujourd'hui la santé de l'armée.
La proportion des malades y est tout au plus le quart du taux sur lequel on calcule ordinairement en Europe.
Voici les nombres déterminés par l'expérience des commissaires:
Le blé a perdu au moulin en farine folle et en eau évaporée.......... 18 pour mille.
En blutant le produit de la mouture sur mille parties on a trouvé en son... 185,
En farine............ 815.
Le pain retiré du four et refroidi pendant quinze heures était plus pesant que la farine employée de 303 pour mille.
Il est facile d'en conclure que si le magasin livre un millier pesant de blé sec, vanné et criblé, on aura dans les divers degrés de la manutention les produits suivants:
| Le magasin livre à celui qui lave | 1000 | ||
| Celui qui lave doit rendre au meunier | 1050 | ||
| Le meunier doit rendre au blutoir | 1030 | ||
| Le blutoir doit rendre au boulanger | son | 191 | |
| farine | 839 | ||
| Le boulanger doit fournir en bon pain après un refroidissement de 15 heures | 1094 | ||
Les nombres précédents sont indépendants du poids dont on se sert; il suffit que dans chaque degré de la manutention on fasse usage du même poids qu'au magasin.»
Ordre du jour du 6 fructidor an VIII.
«Le général en chef voulant faire pour les invalides de l'armée tout ce que les circonstances permettent en Égypte, voulant surtout que ceux d'entre les braves officiers et soldats qui ont perdu quelque membre à la guerre, ou qui sont accablés d'infirmités, trouvent toutes les ressources qu'exige leur état, ordonne ce qui suit:
Il sera formé une commission composée des citoyens,
- Friant, général de division, président,
- Leclerc, général de division,
- Robin, général de brigade,
- Galbaud, général de brigade,
- Desgenettes, médecin en chef,
- Larrey, chirurgien en chef,
- Silly, chef de brigade commandant la quatre-vingt-huitième,
- Latour-Maubourg, chef de brigade commandant le vingt-deuxième régiment de chasseurs,
- Novel, chef de bataillon, aide-de-camp du général en chef.
II. Cette commission se fera représenter toutes les lois concernant les invalides; elle avisera aux moyens, premièrement, d'employer utilement tous les invalides non absolus, secondement, d'établir une maison où tous les invalides qui auront perdu des membres, ou qui, étant accablés d'infirmités, ont besoin de secours journaliers, recevront tous ceux que les circonstances permettent de leur offrir en Égypte.
III. Le rapport de la commission au général en chef devra, sans entrer ici dans de plus grands détails, comprendre tout ce qui a rapport à la manière d'employer les invalides non absolus, et ceux qui, étant absolus, peuvent encore rendre quelques services, à leur paie, à leur traitement, à leur habillement, et à l'établissement d'une maison de retraite. Plusieurs devront rentrer dans les dépôts de leurs corps.
IV. Le général Friant, président, convoquera le plus promptement possible les membres de la commission.»
Signé Menou.
Cette commission remit dans un court délai au général en chef un rapport très étendu, et en conséquence duquel il arrêta une organisation qui a été suspendue par différents événements.
Le général en chef avait créé une place de directeur de la pharmacie centrale de l'armée, et l'ordonnateur en chef en avait réglé les attributions. Les officiers de santé en chef furent forcés de réclamer collectivement et en particulier contre l'indépendance où l'on voulait placer cet établissement, en leur en disputant l'inspection et la surveillance. Cette discussion, où l'intérêt du service ne fit point perdre de vue l'estime et les égards dus aux personnes, fut bientôt terminée, le général en chef ayant nommé le citoyen Boudet, directeur de la pharmacie, pharmacien en chef de l'armée, par son ordre du jour du 11.
Les officiers de santé en chef adressèrent au général en chef la lettre suivante; et quoique les vues qu'elle renferme fussent et soient encore en opposition avec beaucoup d'intérêts, je ne balance pas à la rapporter (no 514 de ma correspondance).
Au quartier-général du Kaire, le 17 fructidor an VIII.
«Général,
Nous avons réfléchi sur votre lettre du 13, par laquelle vous nous faites connaître vos intentions de donner aux officiers de santé en chef de l'armée la direction et l'inspection des hôpitaux.
C'est avec raison, général, que vous avez été surpris de la part si bornée que les règlements nous ont laissée dans l'administration, quoique nous soyons les plus intimement liés à l'intérêt des malades; mais cependant, quelques justes que soient vos idées sur cet objet, et quelque flatteur qu'il soit pour nous de recueillir les témoignages de votre confiance, nous avons l'honneur de vous représenter qu'il ne nous convient point de nous exposer aux risques et aux embarras d'une comptabilité: nous nous bornons donc à vous demander d'exercer sur les dépenses de l'administration les fonctions que les contrôleurs remplissaient dans les anciens règlements, c'est-à-dire qu'il ne sera alloué en paiement que les objets dont les demandes auront été visées et approuvées, et l'emploi vérifié par les officiers de santé en chef de l'armée.
Nos fonctions sont très étendues et très pénibles; d'abord il nous a fallu, sans le secours et même contre les ordres formels du ministre de la guerre, nous procurer des collaborateurs; il a fallu ensuite travailler à former le plus grand nombre à un service qui lui était totalement étranger, et s'occuper même de l'instruction de ceux des classes inférieures[19]; enfin la confiance de l'armée s'est emparée du reste de nos moments. Vous venez encore de nous imposer de nouveaux devoirs en nous assignant honorablement une place dans le conseil privé d'Égypte[20].
Pour arriver au but que vous vous proposez, nous vous demandons d'ordonner que les officiers de santé en chef se réunissent dans un bureau sous le nom de comité de santé de l'armée;
Nous vous demandons que les attributions des officiers de santé de toutes les classes soient maintenues conformément au règlement du 30 floréal an IV;
Nous vous demandons de limiter l'autorité des commissaires des guerres. Les vices de la hiérarchie actuelle, oppressive pour nos subordonnés, sont sensibles pour tout le monde, et le ministre Petiet, dont les talents administratifs sont assez connus, y dérogea lui-même dans son règlement particulier sur les hôpitaux-militaires-d'instruction, dans lesquels deux de nous ont eu l'honneur de servir et d'enseigner.
Il est nécessaire pour consacrer l'indépendance du comité qu'il communique avec vous sans intermédiaire toutes les fois qu'il en aura besoin: il conservera des relations avec l'ordonnateur en chef pour le matériel de son service, et avec le général-commandant le génie pour se concerter sur les constructions et réparations des hôpitaux et des lazarets; et, dans le cas où il s'élèverait des difficultés entre le comité et l'ordonnateur, ou le général du génie, elles seront portées devant vous.
Nous vous demandons la suppression de la commission extraordinaire de salubrité publique, et sa réunion au comité de santé. Les motifs qui nous déterminent sont l'économie du temps et la concentration de l'action;
Nous vous demandons à conserver avec l'administration sanitaire les mêmes rapports qu'avait la commission extraordinaire, en y ajoutant ceux que nous demandons à établir avec l'administration des hôpitaux;
Nous vous entretiendrons des moyens de relever et d'encourager l'administration sanitaire;
Nous vous demandons de maintenir les commissions de salubrité publique d'Alexandrie, Rosette, et Lesbéh sur le plan de leur première organisation;
Nous vous prions de rappeler aux officiers de santé des hôpitaux militaires et des corps armés, quelquefois portés à s'en écarter, la soumission qu'ils doivent, conformément aux lois, à leurs chefs de service respectifs. Il serait bon que vous enjoigniez aux officiers-généraux, commandants des places, et officiers particuliers d'assister les officiers de santé en chef de l'armée, et de leur prêter main-forte en cas de besoin, pour l'exécution des ordres qu'ils seront dans le cas de donner d'après les règlements antérieurs, ou celui que vous arrêterez.
Il nous reste, général, un dernier article; c'est celui du traitement des officiers de santé, qui est dans une disproportion étonnante avec celui des administrateurs, et notamment des nombreux commissaires des guerres, même adjoints: nous savons que vous êtes forcé d'économiser; mais l'état gagnera en soutenant le courage de nos collaborateurs, et en leur procurant une manière d'exister qui réponde, s'il nous est permis de le dire, à la noblesse et à l'utilité de leurs fonctions.
Dans d'autres circonstances, général, et dans d'autres lieux nous aurions pu profiter davantage de vos bienveillantes dispositions; mais nous sommes déjà surchargés de nos travaux habituels. Vous aurez cependant déjà fait beaucoup en indiquant et en commençant à opérer des changements salutaires, et vos vues particulières sur l'amélioration de notre service consacreront la sagesse de votre administration paternelle.
Signés Boudet, D. J. Larrey, et R. Desgenettes.
Le général en chef annonça depuis au ministre de la guerre qu'il avait adopté un plan conforme aux vues développées ci-dessus; mais il ne le publia point, et il n'y eut d'exécuté qu'une augmentation de traitement, qui tenait un juste milieu entre la prodigalité et cette parcimonie que des esprits rétrécis veulent toujours porter dans l'administration publique.
Extrait de l'ordre du jour du 26 fructidor an VIII.
«Le général en chef approuve et ordonne l'exécution des arrêtés pris par la commission extraordinaire de salubrité publique dans ses séances des 20 et 25 fructidor, portant, 1o Qu'il sera établi au poste d'Aboukir un garde de santé, chargé d'y faire exécuter, sous les ordres de la commission d'Alexandrie, les lois et règlements sanitaires; 2o Qu'il sera également établi un garde de santé sur le lac Burlos.
L'adjudant-général faisant fonctions de
chef d'état-major-général.
Signé René.»
Les notes relatives au reste du mois et jours complémentaires ne présentent rien d'important.
Nous perdîmes en fructidor et jours complémentaires soixante dix-sept malades, presque tous dysentériques, ci.......... 77 morts.
État des morts dans le second semestre de l'an VIII.
| Germinal | 121 | |
| Floréal | 166 | |
| Prairial | 96 | |
| Messidor | 76 | |
| Fructidor, et jours complém. | 77 | |
| Total | 606 | morts. |
Je suis obligé, pour donner une idée des peines qu'il a fallu pour réunir ces résultats, qui quelquefois encore ne sont qu'approximatifs, de faire connaître que j'ai souvent écrit jusqu'à dix lettres pour me procurer le mouvement d'un seul établissement.
On trouvera ici avec intérêt un état relevé avec beaucoup de soin et d'exactitude, et qui m'a été communiqué par l'estimable commissaire des guerres Regnier, chargé du bureau central administratif de l'armée.
ÉTAT nécrologique depuis le départ de France jusqu'au dernier jour complémentaire de l'an VIII.
| Désignation | Genre de mort. | Total des morts par corps. | Total des morts par arme. | |||||
| de l'arme. | des corps. | Tués dans les combats. | Blessés. | Accidentels. | Maladies Ordinaires. | Fièvres pestilentielles. | ||
| État-major-général de l'armée | 21 | 4 | 1 | 3 | 4 | 33 | 33 | |
| Infanterie légère. | ||||||||
| 2me ½ brigade | 87 | 22 | 12 | 173 | 48 | 342 | 1353 | |
| 4me idem | 72 | 8 | 6 | 180 | 78 | 344 | ||
| 21me id. | 159 | 56 | 37 | 129 | 6 | 387 | ||
| 22me id. | 85 | 51 | 3 | 65 | 76 | 280 | ||
| Infanterie de ligne. | ||||||||
| 9me ½ brigade | 195 | 100 | 5 | 94 | 95 | 489 | 5006 | |
| 13me id. | 410 | 76 | 20 | 270 | 164 | 940 | ||
| 18me id. | 318 | 43 | 5 | 243 | 58 | 667 | ||
| 19me grenadiers | 32 | .. | .. | 12 | .. | 44 | ||
| 25me ½ brigade | 139 | 34 | 14 | 166 | 48 | 401 | ||
| 32me id. | 254 | 89 | 25 | 54 | 88 | 510 | ||
| 61me id. | 84 | 32 | 18 | 80 | 45 | 259 | ||
| 69me id. | 234 | 29 | 3 | 104 | 38 | 408 | ||
| 75me id. | 241 | 69 | 14 | 164 | 110 | 598 | ||
| 85me id. | 263 | 85 | 6 | 68 | 115 | 537 | ||
| 88me id. | 51 | 30 | 13 | 56 | 3 | 153 | ||
| Guides à pied et à cheval. | 52 | 4 | 7 | 2 | 17 | 82 | 82 | |
| Dromadaires. | ||||||||
| régiment | 15 | 8 | 3 | 4 | 1 | 31 | 31 | |
| Légions | ||||||||
| maltaise | .. | .. | 26 | 36 | 63 | 233 | ||
| nautique | 83 | .. | .. | 16 | 53 | 152 | ||
| grecque | .. | .. | 3 | 4 | .. | 7 | ||
| copte | .. | .. | 1 | .. | .. | 1 | ||
| cavalerie syrienne. | .. | .. | 1 | 1 | .. | 2 | 2 | |
| Cavalerie. | ||||||||
| 7me de hussards | 62 | 15 | 6 | 21 | 3 | 107 | 601 | |
| 22me de chasseurs | 43 | 3 | 9 | 15 | 5 | 75 | ||
| 3me de dragons | 43 | 7 | 6 | 16 | 14 | 86 | ||
| 14me id. | 34 | 12 | 4 | 33 | 10 | 93 | ||
| 15me id. | 35 | 3 | 3 | 13 | 5 | 59 | ||
| 18me id. | 91 | 4 | 1 | 13 | 6 | 115 | ||
| 20me id. | 27 | 1 | 8 | 20 | 10 | 66 | ||
| Génie. | ||||||||
| état-major | 6 | 6 | 1 | 4 | 4 | 21 | 536 | |
| sapeurs | 212 | 22 | 10 | 117 | 108 | 469 | ||
| ouvriers | 4 | 3 | 1 | 6 | 9 | 23 | ||
| 2e comp. de min. | 3 | 2 | 1 | 7 | 2 | 15 | ||
| 5me id. | 4 | .. | 1 | 2 | 1 | 8 | ||
| Artillerie. | ||||||||
| état-major | 6 | 2 | 1 | 13 | 1 | 23 | 675 | |
| pontonniers | 1 | .. | .. | 6 | 5 | 12 | ||
| équipag. des ponts | .. | .. | .. | 1 | 3 | 4 | ||
| ouvriers | 4 | 2 | 5 | 33 | 20 | 64 | ||
| trains | 41 | 2 | 7 | 81 | 41 | 172 | ||
| 1er régiment | 16 | 3 | 7 | 6 | 9 | 41 | ||
| 4me id. | 63 | 18 | 9 | 57 | 52 | 199 | ||
| escadrons | 60 | 4 | 3 | 24 | 8 | 99 | ||
| marine | 11 | 2 | 1 | 17 | 30 | 61 | ||
| Totaux | 3561 | 852 | 281 | 2419 | 1429 | 8542 | 8542 | |
| Désignation | Genre de mort. | Total des morts par administrations ou commissions. | Total des morts par administrations ou commissions. | |||||
| des diverses administrations ou commissions. | des employés des diverses administrations ou commissions. | Tués dans les combats. | Blessés. | Accidentels. | Maladies Ordinaires. | Fièvres pestilentielles. | ||
| Commissaires des guerres | 3 | .. | 1 | 1 | 4 | 9 | 9 | |
| Officiers de santé | ||||||||
| médecins | 1 | .. | .. | .. | 4 | 5 | 82 | |
| chirurgiens | 6 | 1 | 1 | 5 | 36 | 49 | ||
| pharmaciens | .. | .. | 1 | 3 | 24 | 28 | ||
| Administrat. | ||||||||
| sanitaire | .. | .. | 1 | .. | 15 | 16 | 257 | |
| trésorerie nation | 3 | .. | .. | .. | .. | 5 | ||
| postes | .. | .. | 2 | .. | 3 | 5 | ||
| vivres | 10 | .. | 1 | 2 | 20 | 33 | ||
| transports | 16 | 1 | 1 | 6 | 13 | 37 | ||
| hôpitaux | 7 | .. | .. | 21 | 126 | 154 | ||
| habillement | 1 | .. | .. | 1 | .. | 2 | ||
| monnaie | 1 | .. | .. | .. | .. | 1 | ||
| imprimerie | .. | .. | .. | 1 | .. | 1 | ||
| domaines nation | .. | .. | .. | 5 | .. | 5 | ||
| Ingénieurs | ||||||||
| géographes | 1 | .. | 1 | 1 | .. | 3 | 7 | |
| ponts et chaussées | 3 | .. | .. | .. | 1 | 4 | ||
| Commission des sciences et arts | .. | .. | .. | 3 | 2 | 5 | 5 | |
| Officiers de santé de la marine | 1 | .. | .. | .. | 12 | 13 | 13 | |
| Totaux | 53 | 2 | 9 | 49 | 260 | 373 | 575 | |
| RÉCAPITULATION. | |
| Tués dans les combats | 3614 |
| Blessés, morts | 854 |
| Tués par accidents | 290 |
| Morts par maladies ordinaires | 2468 |
| Morts de la fièvre pestilentielle | 1689 |
| Total des morts | 8915 |