Le Téléphone, le Microphone et le Phonographe
The Project Gutenberg eBook of Le Téléphone, le Microphone et le Phonographe
Title: Le Téléphone, le Microphone et le Phonographe
Author: comte Th. Du Moncel
Illustrator: B. Bonnafoux
Release date: December 20, 2008 [eBook #27574]
Most recently updated: January 4, 2021
Language: French
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Seules les erreurs clairement introduites par le typographe ont été corrigées.BIBLIOTHÈQUE DES MERVEILLES
LE TÉLÉPHONE
LE MICROPHONE
ET LE PHONOGRAPHEpar
Le comte Th. DU MONCEL
Membre de l'InstitutOUVRAGE ILLUSTRÉ
DE 67 FIGURES DESSINÉES SUR BOIS
PAR B. BONNAFOUXPARIS
LIBRAIRIE HACHETTE ET Cie
79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79
1878
Droits de propriété et de traduction réservésBIBLIOTHÈQUE DES MERVEILLES
PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION
DE M. ÉDOUARD CHARTONLE TÉLÉPHONE, LE MICROPHONE
ET LE PHONOGRAPHE21571-78.—PARIS, TYPOGRAPHIE LAHURE
Rue de Fleurus, 9LE TÉLÉPHONE
LE MICROPHONE
ET LE PHONOGRAPHEUN COUP D'ŒIL HISTORIQUE.
À proprement parler, le téléphone n'est qu'un instrument apte à transmettre les sons à distance, et l'idée de cette transmission est aussi ancienne que le monde. Les Grecs employaient des moyens susceptibles de la réaliser, et il n'est pas douteux que ces moyens n'aient été quelquefois mis à contribution dans les oracles du paganisme. Seulement cette transmission des sons ne sortait pas de certaines limites assez restreintes, ne dépassant pas sans doute celles des porte-voix. Suivant M. Preece, le document le plus ancien où cette transmission du son à distance soit formulée d'une manière un peu nette, remonte à l'année 1667, comme il résulte d'un écrit d'un certain Robert Hooke, qui dit à ce propos: «Il n'est pas impossible d'entendre un bruit à grande distance, car on y est déjà parvenu, et l'on pourrait même décupler cette distance sans qu'on puisse taxer la chose d'impossible. Bien que certains auteurs estimés aient affirmé qu'il était impossible d'entendre à travers une plaque de verre noircie même très-mince, je connais un moyen facile de faire entendre la parole à travers un mur d'une grande épaisseur. On n'a pas encore examiné à fond jusqu'où pouvaient atteindre les moyens acoustiques, ni comment on pourrait impressionner l'ouïe par l'intermédiaire d'autres milieux que l'air, et je puis affirmer qu'en employant un fil tendu, j'ai pu transmettre instantanément le son à une grande distance et avec une vitesse sinon aussi rapide que celle de la lumière, du moins incomparablement plus grande que celle du son dans l'air. Cette transmission peut être effectuée non-seulement avec le fil tendu en ligne droite, mais encore quand ce fil présente plusieurs coudes.»
Ce système de transmission des sons, sur lequel sont basés les téléphones à ficelle qui attirent l'attention depuis quelques années, est resté à l'état de simple expérience jusqu'en 1819, époque à laquelle M. Wheatstone l'appliqua à sa lyre magique. Dans cet appareil, les sons étaient transmis à travers une longue tige de sapin dont l'extrémité était adaptée à une caisse sonore; de là à l'emploi des membranes utilisées dans les téléphones à ficelle, il n'y avait qu'un pas. Quel est celui qui eut cette dernière idée?... il est assez difficile de le dire, car beaucoup de ces vendeurs de téléphones se l'attribuent sans se douter même de la question. S'il faut en croire certains voyageurs, ce système serait depuis longtemps employé en Espagne pour les correspondances amoureuses. Quoi qu'il en soit, les cabinets de physique ne possédaient pas ces appareils il y a quelques années, et beaucoup de personnes croyaient même que la ficelle était constituée par un tube acoustique de petit diamètre. Cet appareil, quoique devenu un jouet d'enfant, est d'une grande importance scientifique, car il montre que les vibrations capables de reproduire la parole peuvent être d'un ordre infiniment petit, puisqu'elles peuvent être transmises mécaniquement à des distances dépassant cent mètres. Toutefois, au point de vue télégraphique, le problème de la propagation des sons à distance était loin d'être résolu de cette manière, et l'idée d'appliquer les effets électriques à cette sorte de transmission dut naître aussitôt qu'on put être témoin des effets merveilleux de la télégraphie électrique, ce qui nous reporte déjà aux époques qui suivirent l'année 1839. Une découverte inattendue faite par M. Page en 1837, en Amérique, et étudiée depuis par MM. Wertheim, de la Rive et autres, devait d'ailleurs y conduire naturellement; car on avait reconnu qu'une tige magnétique soumise à des aimantations et à des désaimantations très-rapides, pouvait émettre des sons, et que ces sons étaient en rapport avec le nombre des émissions de courants qui les provoquaient.
D'un autre côté, les vibrateurs électriques combinés par MM. Mac-Gauley, Wagner, Neef, etc., et disposés dès 1847 et 1852 par MM. Froment et Pétrina pour la production de sons musicaux, prouvaient que le problème de la transmission des sons à distance était possible. Toutefois, jusqu'en 1854, personne n'avait osé admettre la possibilité de transmettre électriquement la parole à distance, et quand M. Charles Bourseul publia à cette époque une note sur la transmission électrique de la parole, on regarda cette idée comme un rêve fantastique. Moi-même, je dois l'avouer, je ne pouvais y croire, et quand, dans la première édition de mon exposé des applications de l'électricité publiée en 1854[1], je rapportai cette note, je crus devoir l'accompagner de commentaires plus que dubitatifs. Cependant, comme la note me paraissait bien raisonnée, je n'hésitai pas à la publier en la signant seulement des initiales Ch. B***. La suite devait donner raison à cette idée hardie, et quoiqu'elle ne renfermât pas en elle le principe physique qui seul pouvait conduire à la reproduction des sons articulés, elle était pourtant le germe de l'invention féconde qui a illustré les noms de Graham Bell et d'Elisha Gray. C'est à ce titre que nous allons reproduire encore ici la note de M. Charles Bourseul.
«Après les merveilleux télégraphes qui peuvent reproduire à distance l'écriture de tel ou tel individu, et même des dessins plus ou moins compliqués, il semblerait impossible, dit M. B***, d'aller plus en avant dans les régions du merveilleux. Essayons cependant de faire quelques pas de plus encore. Je me suis demandé, par exemple, si la parole elle-même ne pourrait pas être transmise par l'électricité, en un mot, si l'on ne pourrait pas parler à Vienne et se faire entendre à Paris. La chose est praticable: voici comment:
«Les sons, on le sait, sont formés par des vibrations et appropriés à l'oreille par ces mêmes vibrations que reproduisent les milieux intermédiaires.
«Mais l'intensité de ces vibrations diminue très rapidement avec la distance; de sorte qu'il y a, même en employant des porte-voix, des tubes et des cornets acoustiques, des limites assez restreintes qu'on ne peut dépasser. Imaginez que l'on parle près d'une plaque mobile, assez flexible pour ne perdre aucune des vibrations produites par la voix, que cette plaque établisse et interrompe successivement la communication avec une pile: vous pourrez avoir à distance une autre plaque qui exécutera en même temps les mêmes vibrations.
«Il est vrai que l'intensité des sons produits sera variable au point de départ, où la plaque vibre par la voix, et constante au point d'arrivée, où elle vibre par l'électricité; mais il est démontré que cela ne peut altérer les sons.
«Il est évident d'abord que les sons se reproduiraient avec la même hauteur dans la gamme.
«L'état actuel de la science acoustique ne permet pas de dire a priori s'il en sera tout à fait de même des syllabes articulées par la voix humaine. On ne s'est pas encore suffisamment occupé de la manière dont ces syllabes sont produites. On a remarqué, il est vrai, que les unes se prononcent des dents, les autres des lèvres, etc., mais c'est là tout.
«Quoi qu'il en soit, il faut bien songer que les syllabes ne reproduisent, à l'audition, rien autre chose que des vibrations des milieux intermédiaires; reproduisez exactement ces vibrations, et vous reproduirez exactement aussi les syllabes.
«En tout cas, il est impossible de démontrer, dans l'état actuel de la science, que la transmission électrique des sons soit impossible. Toutes les probabilités, au contraire, sont pour la possibilité.
«Quand on parla pour la première fois d'appliquer l'électro-magnétisme à la transmission des dépêches, un homme haut placé dans la science traita cette idée de sublime utopie, et cependant aujourd'hui on communique directement de Londres à Vienne par un simple fil métallique.—Cela n'était pas possible, disait-on, et cela est.
«Il va sans dire que des applications sans nombre et de la plus haute importance surgiraient immédiatement de la transmission de la parole par l'électricité.
«À moins d'être sourd et muet, qui que ce soit pourrait se servir de ce mode de transmission qui n'exigerait aucune espèce d'appareils. Une pile électrique, deux plaques vibrantes et un fil métallique suffiraient.
«Dans une multitude de cas, dans de vastes établissements, par exemple, on pourrait, par ce moyen, transmettre à distance tel ou tel avis, tandis qu'on renoncera à opérer cette transmission par l'électricité, dès lors qu'il faudra procéder lettre par lettre et à l'aide de télégraphes exigeant un apprentissage et de l'habitude.
«Quoi qu'il arrive, il est certain que dans un avenir plus ou moins éloigné, la parole sera transmise à distance par l'électricité. J'ai commencé des expériences à cet égard: elles sont délicates et exigent du temps et de la patience, mais les approximations obtenues font entrevoir un résultat favorable.»
Il est certain que cette description n'est pas assez complète pour qu'on puisse y découvrir la disposition qui pouvait conduire à la solution du problème, et si les vibrations de la lame au poste de réception devaient résulter d'interruptions et de fermetures de courant effectuées au poste de transmission, sous l'influence des vibrations déterminées par la voix, elles ne pouvaient fournir que des sons musicaux et non des sons articulés. Néanmoins l'idée était très-belle, comme le dit M. Preece, tout en regardant sa réalisation comme impossible[2]. Il est du reste facile de voir que M. Bourseul lui-même ne se dissimulait pas les difficultés du problème en ce qui touchait les sons articulés, car il signale, comme on vient de le voir, les différences qui existent entre les vibrations simples produisant les sons musicaux et les vibrations complexes déterminant les sons articulés; mais, comme il le disait fort justement: Reproduisez au poste de réception les vibrations de l'air déterminées au poste de transmission, et vous aurez la transmission de la parole quelque compliqué que soit le mécanisme au moyen duquel on l'obtient. Nous verrons à l'instant comment a été résolu ce problème, et il est probable que certains essais avaient déjà fait pressentir à M. Bourseul la solution de la question; mais rien dans sa note ne peut faire entrevoir quels étaient les moyens auxquels il avait pensé; de sorte que l'on ne peut raisonnablement pas lui rapporter la découverte de la transmission électrique de la parole, et nous ne comprenons guère qu'on ait pu nous faire un reproche de ne pas avoir apprécié, dès cette époque, l'importance de cette découverte qui pouvait bien alors paraître un peu du domaine de la fantaisie.
Ce n'est qu'en 1876 que le problème de la transmission électrique de la parole a été définitivement résolu, et cette découverte a soulevé dans ces derniers temps, entre MM. Elisha Gray, de Chicago, et Graham Bell un débat de priorité intéressant sur lequel nous devons dire quelques mots.
Dès l'année 1874, M. Elisha Gray s'occupait d'un système de téléphone musical qu'il voulait appliquer aux transmissions télégraphiques multiples, et les recherches qu'il dut entreprendre pour établir ce système dans les meilleures conditions possibles lui firent entrevoir la possibilité de transmettre électriquement les mots articulés. Tout en expérimentant son système télégraphique, il combina, en effet, vers le 15 janvier 1876, un système de téléphone parlant dont il déposa à l'office des patentes américaines, sous la forme de caveat ou de brevet provisoire, la description et les dessins. Ce dépôt fut fait le 14 février 1876: or ce même jour M. Graham Bell déposait également à l'office des patentes américaines une demande de brevet dans laquelle il était bien question d'un appareil du même genre, mais qui s'appliquait surtout à des transmissions télégraphiques simultanées au moyen d'appareils téléphoniques, et les quelques mots qui, dans ce brevet, pouvaient se rapporter au téléphone à sons articulés, s'appliquaient à un instrument qui, de l'aveu même de M. Bell, n'a pu fournir aucuns résultats satisfaisants[3]. Dans le caveat de M. Gray, au contraire, l'application de l'appareil à la transmission électrique de la parole est uniquement indiquée, la description du système est complète, et les dessins qui l'accompagnent sont tellement précis qu'un téléphone exécuté d'après eux pouvait parfaitement fonctionner; c'est du reste ce que M. Gray put constater lui-même quand, quelque temps après, il exécuta son appareil qui ne différait guère de celui à liquide dont parle M. Bell dans son mémoire. À ce titre, M. Elisha Gray se serait trouvé certainement mis en possession du brevet, si une omission de formes de l'office des patentes américaines, qui, comme on le sait, prononce sur la priorité des inventions dans ce pays, n'avait entraîné la déchéance de son caveat, et c'est à propos de cette omission qu'un procès a été intenté dernièrement à M. Bell, devant la Cour suprême de l'office des patentes américaines, pour faire tomber son brevet. Si M. Gray ne s'est pas occupé plus tôt de cette réclamation, c'est qu'il était alors entièrement occupé d'expérimenter son système de téléphone harmonique appliqué aux transmissions télégraphiques qu'il jugeait plus important au point de vue commercial, et que le temps lui avait complètement manqué pour donner suite à cette affaire.
Quoi qu'il en soit, c'est seulement à partir de la prise de possession de son brevet que M. Bell commença à s'occuper sérieusement du téléphone parlant, et ses efforts ne tardèrent pas à être couronnés de succès, car peu de mois après, il exposait à Philadelphie son téléphone parlant qui excita, dès cette époque, l'attention publique au plus haut degré, et qui, perfectionné encore au point de vue pratique, nous arriva en Europe dans l'automne 1877 avec la forme que nous lui connaissons.
Comme complément à cette histoire sommaire du téléphone, nous devons dire que, depuis sa réussite, bon nombre de réclamations de priorité ont surgi comme par enchantement. Nous voyons d'abord qu'un certain M. John Camack, Anglais d'origine, s'attribue l'invention du téléphone, se basant sur ce qu'en 1865 il aurait non-seulement fait la description de cet appareil, mais encore exécuté les dessins; il ajoute même que si les moyens ne lui avaient pas fait défaut pour le construire, le téléphone aurait été découvert dès cette époque. Une prétention semblable a été également émise par M. Dolbear, compatriote de M. Bell, et nous verrons bientôt ce qu'en dit ce dernier.
Il en est de même d'un certain M. Manzetti, d'Aoste, qui prétend que son invention téléphonique a été décrite dans beaucoup de journaux de 1865, entre autres dans le Petit Journal, de Paris, du 22 novembre 1865, le Diretto, de Rome, du 10 juillet 1865, l'Écho d'Italie, de New-York, du 9 août 1865, l'Italie, de Florence, du 10 août 1865, la Commune d'Italie, de Gênes, du 1er décembre 1865, la Vérité, de Novarre, du 4 janvier 1866, le Commerce, de Gênes, du 6 janvier 1866. Il est vrai qu'aucune description n'a été donnée de ce système, et que les journaux en question n'ont fait qu'assurer que les expériences qui avaient été faites avaient montré que la solution pratique du problème de la transmission électrique de la parole par ce système était possible. Quoi qu'il en soit, M. Charles Bourseul aurait encore la priorité de l'idée; mais suivant nous, on ne doit ajouter qu'une médiocre confiance à toutes ces revendications faites après coup.
Avant de nous occuper du téléphone de Bell et des diverses modifications qu'on lui a apportées, il nous a paru important, pour bien familiariser le lecteur avec ces sortes d'appareils, d'étudier les téléphones électro-musicaux qui l'ont précédé, et en particulier celui de M. Reiss, qui fut construit en 1860 et qui a été le point de départ de tous les autres. Nous verrons d'ailleurs que ces instruments ont des applications très-importantes, et la télégraphie leur devra probablement un jour de grands progrès.[Table des Matières]
TÉLÉPHONES MUSICAUX.
Téléphone de M. Reiss.—Le téléphone de M. Reiss est fondé, quant à la reproduction des sons, sur les effets découverts par M. Page en 1837 et, pour leur transmission électrique, sur le système à membrane vibrante utilisé dès 1855 par M. L. Scott dans son phonautographe. Cet appareil se compose donc, comme les systèmes télégraphiques, de deux parties distinctes, d'un transmetteur et d'un récepteur, et nous les représentons fig. 1.
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Fig. 1.
Le transmetteur était essentiellement constitué par une boîte sonore K, qui portait à sa partie supérieure une large ouverture circulaire à travers laquelle était tendue une membrane, et au centre de celle-ci était adapté un léger disque de platine o, au-dessus duquel était fixée une pointe métallique b, qui constituait avec le disque l'interrupteur. Sur une des faces de cette boîte sonore K, se trouvait une sorte de porte-voix T qui était destiné à recueillir les sons et à les diriger à l'intérieur de la boîte pour les faire réagir ensuite sur la membrane. Une partie de la boîte K est brisée sur la figure pour qu'on puisse distinguer les différentes parties qui la composent.
Les tiges a, c, qui portent la pointe de platine b, sont réunies métalliquement avec une clef Morse t, placée sur le côté de la boîte K, et avec un électro-aimant A, qui appartient à un système télégraphique destiné à échanger les signaux nécessaires à la mise en action des deux appareils aux deux stations.
Le récepteur est constitué par une caisse sonore B, portant deux chevalets d, d, sur lesquels est soutenu un fil de fer d d de la grosseur d'une aiguille à tricoter. Une bobine électro-magnétique g enveloppe ce fil et se trouve enfermée par un couvercle D, qui concentre les sons déjà amplifiés par la caisse sonore; cette caisse est même munie, à cet effet, de deux ouvertures pratiquées au-dessous de la bobine.
Le circuit de ligne est mis en rapport avec le fil de cette bobine par les deux bornes d'attache 3 et 4, et une clef Morse t se trouve placée sur le côté de la caisse B pour l'échange des correspondances.
Pour faire fonctionner ce système, il suffit de faire parler l'instrument dont on veut transmettre les sons devant l'ouverture T, et cet instrument peut être une flûte, un violon ou même la voix humaine. Les vibrations de l'air déterminées par ces instruments font vibrer à l'unisson la membrane téléphonique, et celle-ci, en approchant et éloignant rapidement le disque de platine o de la pointe b, fournit une série d'interruptions de courant qui se trouvent répercutées par le fil de fer d d et transformées en vibrations métalliques, dont le nombre est égal à celui des sons successivement produits.
D'après ce mode d'action, on comprend donc qu'il soit possible de transmettre les sons avec leur valeur relative; mais l'on conçoit également que ces sons ainsi transmis n'auront pas le timbre de ceux qui leur donnent naissance, car le timbre est indépendant du nombre des vibrations, et, il faut même le dire ici, les sons produits par l'appareil de M. Reiss avaient un timbre de flûte à l'oignon qui n'avait rien de séduisant; toutefois le problème de la transmission électrique des sons musicaux était bien réellement résolu, et l'on pouvait dire en toute vérité qu'un air ou une mélodie pouvait être entendu à une distance aussi grande qu'on pouvait le désirer.
L'invention de ce téléphone date, comme on l'a déjà vu, de l'année 1860, et le professeur Heisler en parle dans son traité de physique technique, publié à Vienne en 1866; il prétend même dans l'article qu'il lui a consacré, que, quoique dans son enfance, cet appareil était susceptible de transmettre non-seulement des sons musicaux, mais encore des mélodies chantées. Ce système fut ensuite perfectionné par M. Vander-Weyde, qui, après avoir lu la description publiée par M. Heisler, chercha à rendre la boîte de transmission de l'appareil plus sonore et les sons produits par le récepteur plus forts. Voici ce qu'il dit à ce sujet dans le Scientific american Journal:
«Ayant fait construire en 1868 deux téléphones du genre de celui décrit précédemment, je les montrai à la réunion du club polytechnique de l'Institut américain. Les sons transmis étaient produits à l'extrémité la plus éloignée du Cooper Institut, et tout à fait en dehors de la salle où se trouvaient les auditeurs de l'association; l'appareil récepteur était placé sur une table, dans la salle même des séances. Il reproduisait fidèlement les airs chantés, mais les sons étaient un peu faibles et un peu nasillards. Je songeai alors à perfectionner cet appareil, et je cherchai d'abord à obtenir dans la boîte K des vibrations plus puissantes en les faisant répercuter par les côtés de cette boîte au moyen de parois creuses. Je renforçai ensuite les sons produits par le récepteur, en introduisant dans la bobine plusieurs fils de fer, au lieu d'un seul. Ces perfectionnements ayant été soumis à la réunion de l'Association américaine pour l'avancement des sciences qui eut lieu en 1869, on exprima l'opinion que cette invention renfermait en elle le germe d'une nouvelle méthode de transmission télégraphique qui pourrait conduire à des résultats importants. Cette appréciation devait être bientôt justifiée par la découverte de Bell et d'Elisha Gray.
Téléphone de MM. Cécil et Léonard Wray.—Ce système, que nous représentons fig. 2 et 3, n'est qu'un simple perfectionnement de celui de M. Reiss, imaginé en vue de rendre les effets produits plus énergiques. Ainsi le transmetteur est muni de deux membranes au lieu d'une, et son récepteur, au lieu d'être constitué par un simple fil de fer recouvert d'une bobine magnétisante, se compose de deux bobines distinctes, H, H', fig. 2, placées dans le prolongement l'une de l'autre, et à l'intérieur desquelles se trouvent deux tiges de fer. Ces tiges sont fixées par une de leurs extrémités à deux lames de cuivre A, B, maintenues elles-mêmes dans une position fixe au moyen de deux piliers à écrous I, I', et les deux autres extrémités de ces tiges, entre les bobines, sont disposées à une très-petite distance l'une devant l'autre, mais sans cependant se toucher. Le système est d'ailleurs monté sur une caisse sonore, munie d'un trou T dans l'espace correspondant à l'intervalle séparant les bobines, et celles-ci communiquent avec quatre boutons d'attache qui sont mis en rapport avec le circuit de ligne de telle manière que les polarités opposées des deux tiges soient de signes contraires, et ne forment qu'un seul et même aimant coupé par le milieu. Il paraît qu'avec cette disposition les sons produits sont beaucoup plus accentués.
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Fig. 2.
La forme du transmetteur est aussi un peu différente de celle que nous avons décrite précédemment; la partie supérieure, au lieu d'être horizontale, est un peu inclinée, comme on le voit fig. 3, et l'ouverture E par laquelle les sons doivent se communiquer à la membrane vibrante, occupe une grande partie du côté le plus élevé de la caisse, qui, à cet effet, se présente sous une certaine obliquité. La seconde membrane G, qui est en caoutchouc, forme une sorte de cloison qui divise en deux la caisse, à partir du bord supérieur de l'ouverture, et, d'après l'inventeur, elle aurait pour effet, tout en augmentant l'amplitude des vibrations produites par la membrane extérieure D, comme dans un tambour, de protéger celle-ci contre les effets de la respiration et plusieurs autres causes nuisibles. L'interrupteur lui-même diffère aussi de celui de l'appareil de M. Reiss. Ainsi le disque de platine b, appelé à fournir les contacts, n'est mis en rapport métallique avec le circuit que par l'intermédiaire de deux petits fils de platine ou d'acier qui plongent dans deux petits godets a, c remplis de mercure et reliés à ce circuit. Par ce moyen, la membrane D se trouve libre dans ses mouvements et peut vibrer plus facilement.
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Fig. 3.
L'interruption est d'ailleurs effectuée par une petite pointe de platine portée par un levier à ressort articulé KH qui se trouve au-dessus du disque, et dont l'extrémité, étant fixée au-dessous d'une sorte de clef Morse MI, permet d'effectuer à la main les fermetures de courant nécessaires à l'échange des correspondances pour la mise en train des appareils.
Harmonica électrique.—Longtemps avant M. Reiss et à plus forte raison longtemps avant M. Elisha Gray qui a imaginé un téléphone du même genre, j'avais fait mention d'une sorte d'harmonica électrique qui a été décrit de la manière suivante dans le tome I, p. 167, de la première édition de mon Exposé des applications de l'électricité publié en 1853[4].
«La faculté que possède l'électricité de mettre en mouvement des lames métalliques et de les faire vibrer, a pu être utilisée à la production de sons distincts, susceptibles d'être combinés et harmonisés; mais, en outre de cette application toute physique, l'électro-magnétisme a pu venir en auxiliaire à certains instruments, tels que pianos, orgues, etc., pour leur donner la facilité d'être joués à distance. Ainsi jusque dans les arts en apparence les moins susceptibles de recevoir de l'électricité quelque application, cet élément si extraordinaire a pu être d'un secours utile.
«Nous avons déjà parlé de l'interrupteur de M. de la Rive. C'est, comme on le sait, une lame de fer soudée à un ressort d'acier et maintenue dans une position fixe vis-à-vis un électro-aimant, par un autre ressort ou un butoir métallique en connexion avec l'une des branches du courant. Comme l'autre branche, après avoir passé dans le fil de l'électro-aimant aboutit à la lame de fer elle-même, l'électro-aimant n'est actif qu'au moment où cette lame touche le butoir ou le ressort d'arrêt; mais aussitôt qu'elle l'abandonne, l'aimantation cesse, et la lame de fer revient en son point d'arrêt, puis l'abandonne ensuite. Il se détermine donc une vibration d'autant plus rapide que la longueur de la lame vibrante est plus courte, et que la force est plus grande par suite du rapprochement de la lame de l'électro-aimant.
«Pour rendre les sons de plus en plus aigus, il ne s'agit donc que d'employer l'un ou l'autre des deux moyens. Le plus simple est d'avoir une vis que l'on serre ou que l'on desserre à volonté, et qui par cela même éloigne plus ou moins la lame vibrante de l'électro-aimant. Tel est l'appareil de M. Froment au moyen duquel il a obtenu des sons d'une acuité extraordinaire, bien qu'étant fort doux à l'oreille.
«M. Froment n'a pas fait de cet appareil un instrument de musique; mais on conçoit que rien ne serait plus facile que d'en constituer un; il ne s'agirait pour cela que de faire agir les touches d'un clavier sur des leviers métalliques, dont la longueur des bras serait en rapport avec le rapprochement de la lame nécessité pour la vibration des différentes notes. Ces différents leviers, en appuyant sur la lame, joueraient le rôle du butoir d'arrêt, mais ce butoir varierait de position suivant la touche.
«Si le courant était constant, un pareil instrument aurait certainement beaucoup d'avantages sur les instruments à anches dont on se sert, en ce sens qu'on aurait une vibration aussi prolongée qu'on le voudrait pour chaque note, et que les sons seraient plus veloutés; malheureusement l'inégalité d'action de la pile en rend l'usage bien difficile. Aussi ne s'est-on guère servi de ce genre d'appareils que comme régulateurs auditifs pour l'intensité des piles, régulateurs infiniment plus commodes que les rhéomètres, puisqu'ils peuvent faire apprécier les différentes variations d'une pile pendant une expérience, sans qu'on soit obligé d'en détourner son attention.»
En 1856, M. Pétrina, de Prague, imagina un dispositif analogue auquel il donna le nom d'harmonica électrique, bien qu'à proprement parler il ne constituât pas dans sa pensée un instrument de musique.
Voici ce que j'en disais dans le tome IV de la seconde édition de mon exposé des applications de l'électricité publié en 1859.
«Le principe de cet appareil est le même que celui du rhéotome de Neef, au marteau duquel on a substitué une baguette dont les vibrations transversales produisent un son. Quatre de ces baguettes, différentes en longueur, sont placées l'une à côté de l'autre, et étant mises en mouvement au moyen de touches, puis arrêtées par des leviers, produisent des sons de combinaison dont il devient facile de démontrer l'origine.»
Dans ce qui précède je ne dis pas, il est vrai, que ces appareils pouvaient être joués à distance; mais cette idée était toute naturelle, et les journaux allemands prétendent que M. Pétrina l'avait réalisée même avant 1856. Elle était la conséquence de ce que je disais en débutant: «que l'électro-magnétisme pouvait venir en auxiliaire à certains instruments tels que pianos, orgues, etc., pour leur donner la facilité d'être joués à distance», et j'indiquais plus loin les moyens employés pour cela et même pour les faire fonctionner sous l'influence d'une petite boîte à musique. Je n'y avais du reste pas attaché d'importance, et ce n'est que comme document historique que je parle de ces systèmes.
Téléphone de M. Elisha Gray, de Chicago.—Ce système, imaginé en 1874, n'est en réalité qu'un appareil du genre de ceux qui précèdent, mais avec des combinaisons importantes qui ont permis de l'appliquer utilement à la télégraphie. Dans un premier modèle il mettait à contribution une bobine d'induction à deux hélices superposées, dont l'interrupteur, qui était à trembleur, était multiple et disposé de manière à produire des vibrations assez nombreuses pour émettre des sons. Ces sons, comme on l'a vu, peuvent avec cette disposition être modifiés suivant la manière dont l'appareil est réglé, et s'il existe à côté les uns des autres un certain nombre d'interrupteurs de ce genre, dont les lames vibrantes soient réglées de manière à fournir les différentes notes de la gamme sur plusieurs octaves, on pourra, en mettant en action tels ou tels d'entre eux, exécuter sur cet instrument d'un nouveau genre un morceau de musique dont les sons se rapprocheront de ceux produits par les instruments à anches, tels que harmoniums, accordéons, etc. La mise en action de ces interrupteurs pourra d'ailleurs être effectuée au moyen du courant primaire de la bobine d'induction qui circulera à travers l'un ou l'autre des électro-aimants de ces interrupteurs, sous l'influence de l'abaissement de l'une ou l'autre des touches d'un clavier commutateur, et les courants secondaires qui naîtront dans la bobine sous l'influence de ces courants primaires interrompus, pourront transmettre des vibrations correspondantes à distance sur un récepteur. Celui-ci pourrait être analogue à ceux dont nous avons parlé précédemment pour les téléphones de Reiss, de Wray, etc., mais M. Gray a dû le modifier pour obtenir des effets plus amplifiés.
Nous représentons (fig. 4) la disposition de ce premier système. Les vibrateurs sont en A et A', les touches du clavier en M et M', la bobine d'induction en B, et le récepteur en C. Ce récepteur se compose, comme on le voit, d'un simple électro-aimant NN' au-dessus des pôles duquel est adaptée une caisse cylindrique en métal C dont le fond est en fer et sert d'armature. Cette boîte étant percée comme les violons de deux trous en S, joue le rôle de caisse sonore, et M. Elisha Gray a reconnu que les mouvements moléculaires déterminés au sein du noyau magnétique et de son armature, sous l'influence des alternatives d'aimantation et de désaimantation, étaient suffisants pour engendrer des vibrations en rapport avec la rapidité de ces alternatives, et fournir des sons qui devenaient perceptibles par suite de leur amplification par la boîte sonore.
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Fig. 4.
S'il faut en croire M. Elisha Gray, les vibrations transmises par des courants secondaires seraient capables de faire résonner à distance, par l'intermédiaire du corps humain, des lames conductrices susceptibles d'entrer facilement en vibration et disposées sur des caisses sonores. Ainsi l'on pourrait faire produire des sons musicaux à des cylindres de cuivre placés sur une table, à une plaque métallique appliquée sur une sorte de violon, à une feuille de clinquant tendue sur un tambour ou à toute autre substance résonnante, en touchant d'une main ces différents corps et en prenant de l'autre le bout du fil du circuit. Ces sons qui pourraient avoir un timbre différent, suivant la nature de la substance touchée, reproduiraient la note transmise avec le nombre exact de vibrations qui lui correspond[5].
On comprend aisément que les effets obtenus dans le système représenté (fig. 4) pourraient être reproduits, si au lieu d'interrupteurs ou de rhéotomes électriques, on employait à la station de transmission des interrupteurs mécaniques disposés de manière à fournir le nombre d'interruptions de courants en rapport avec les vibrations des différentes notes de la gamme. On pourrait encore, par ce moyen, se dispenser de la bobine d'induction et faire réagir directement sur le récepteur le courant ainsi interrompu par l'interrupteur mécanique. M. Elisha Gray a du reste combiné une autre disposition de ce système téléphonique qu'il a appliquée à la télégraphie pour les transmissions électriques simultanées, et dont nous parlerons plus tard.
Téléphone de M. Varley.—Ce téléphone n'est à proprement parler qu'un téléphone musical dans le genre de celui de M. Gray, mais dont le récepteur présente une disposition originale vraiment intéressante.
Cette partie de l'appareil est essentiellement constituée par un véritable tambour de grandes dimensions (3 ou 4 pieds de diamètre), dans l'intérieur duquel est placé un condensateur formé de quatre feuilles de papier d'étain séparées par des feuilles en matière parfaitement isolante, et dont la surface représente à peu près la moitié de celle du tambour. Les lames de ce condensateur sont disposées parallèlement aux membranes du tambour et à une très-petite distance de leur surface.
Si une charge électrique est communiquée à l'une des séries de plaques conductrices de ce condensateur, celles qui leur correspondront se trouveront attirées, et si elles peuvent se mouvoir, elles pourront communiquer aux couches d'air interposées un mouvement qui, en se communiquant aux membranes du tambour, pourront, pour une série de charges très-rapprochées les unes des autres, faire vibrer ces membranes et engendrer des sons; or ces sons seront en rapport avec le nombre des charges et décharges qui seront produites. Comme ces charges et décharges peuvent être déterminées par la réunion des deux armatures du condensateur aux extrémités du circuit secondaire d'une bobine d'induction dont le circuit primaire sera interrompu convenablement, on voit immédiatement que, pour faire émettre par le tambour un son donné, il suffira de faire fonctionner l'interrupteur de la bobine d'induction de manière à produire le nombre de vibrations que comporte ce son.
Le moyen employé par M. Varley pour produire ces interruptions est celui qui a été déjà mis en usage dans plusieurs applications électriques et notamment pour les chronographes; c'est un diapason électro-magnétique réglé de manière à émettre le son qu'il s'agit de transmettre. Ce diapason peut, en formant lui-même interrupteur, réagir sur le courant primaire de la bobine d'induction, et s'il y a autant de ces diapasons que de notes musicales à transmettre, et que les électro-aimants qui les animent soient reliés à un clavier de piano, il sera possible de transmettre de cette manière une mélodie à distance comme dans le système de M. Elisha Gray.
La seule chose particulière dans ce système est le fait de la reproduction des sons par l'action d'un condensateur, et nous verrons plus loin que cette idée, reprise par MM. Pollard et Garnier, a conduit à des résultats vraiment intéressants.[Table des Matières]
TÉLÉPHONES PARLANTS.
Les téléphones que nous venons d'étudier ne peuvent transmettre, comme on l'a vu, que des sons musicaux, puisqu'ils ne peuvent répéter que des vibrations simples, en nombre plus ou moins grand, il est vrai, mais non en combinaisons simultanées, telles que celles qui doivent reproduire les sons articulés. Jusqu'à l'époque de l'invention de M. Bell, la transmission de la parole ne pouvait donc se faire que par des tubes acoustiques ou par les téléphones à ficelle dont nous avons déjà parlé. Bien que ces sortes d'appareils n'aient aucun rapport avec ceux que nous nous proposons d'étudier dans cet ouvrage, nous avons cru devoir en dire ici quelques mots, car ils peuvent quelquefois être combinés avec les téléphones électriques, et, d'ailleurs, ils représentent la première étape de l'invention.
Téléphones à ficelle.—Les téléphones à ficelle qui depuis plusieurs années inondent les boulevards et les rues des différentes villes d'Europe, et dont l'invention remonte, comme on l'a vu, à l'année 1667, sont des appareils très-intéressants par eux-mêmes, et nous sommes étonné qu'ils n'aient pas figuré plutôt dans les cabinets de physique. Ils sont constitués par des tubes cylindro-coniques en métal ou en carton, dont un bout est fermé par une membrane tendue de parchemin, au centre de laquelle est fixée par un nœud la ficelle ou le cordon destiné à les réunir. Quand deux tubes de ce genre sont ainsi réunis et que le fil est bien tendu, comme on le voit fig. 5, il suffit qu'une personne applique un de ces tubes contre l'oreille et qu'une autre personne parle très-près de l'ouverture de l'autre tube, pour que toutes les paroles prononcées par cette dernière soient immédiatement transmises à l'autre, et l'on peut même converser de cette manière à voix presque basse. Dans ces conditions, les vibrations de la membrane impressionnée par la voix se trouvent transmises mécaniquement à l'autre membrane par le fil qui, comme l'avait annoncé le physicien de 1667, transmet les sons beaucoup mieux que l'air. On a pu par ce moyen converser à une distance de cent cinquante mètres, et il paraîtrait que la grosseur et la nature des fils exercent une certaine influence. Suivant les vendeurs de ces appareils, les fils de soie seraient ceux qui donneraient les meilleurs résultats et les ficelles de chanvre les moins bons. Ce sont ordinairement des fils de coton tressés qui sont employés afin de permettre de livrer à bon marché ces appareils.
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Fig. 5.
Dans certains modèles on a disposé les tubes de manière à présenter, entre la membrane et l'embouchure, un diaphragme percé d'un trou, et l'appareil ressemble alors à une espèce de cloche dont le fond aurait été percé et recouvert à quelques millimètres au-dessus de la membrane de parchemin; mais je n'ai pas reconnu de supériorité bien marquée à ce modèle.
On a également prétendu que les cornets en métal nickelé étaient préférables; je n'en suis pas davantage convaincu. Quoi qu'il en soit, ces appareils ont donné des résultats qu'on était loin d'attendre, et bien que leurs usages pratiques soient très-restreints, ils constituent des instruments scientifiques très-intéressants et des jouets instructifs pour les enfants.
D'après M. Millar, de Glascow, l'intensité des effets produits dans ces téléphones dépend beaucoup de la nature de la ficelle, de la manière dont elle est attachée et de la manière dont la membrane est placée sur l'embouchure.
Perfectionnements apportés aux téléphones à ficelle.—Les effets prodigieux des téléphones Bell ont dans ces derniers temps remis à la mode les téléphones à ficelle qui étaient restés jusque-là dans le domaine des jouets d'enfant. La possibilité qu'ils ont donnée de transmettre à plusieurs personnes la parole reproduite sur un téléphone électrique a fait rechercher les moyens de les utiliser concurremment avec ces derniers, et pour cela on a dû d'abord examiner le moyen le plus efficace de les faire parler sur un fil présentant plusieurs coudes; nous avons vu que, dans les conditions ordinaires, ces appareils ne parlaient distinctement que quand le fil était tendu en ligne droite. Pour résoudre ce problème, M. A. Bréguet a eu l'idée d'employer comme supports des espèces de petits tambours de basque par le centre desquels on fait passer le fil; le son porté par la partie du fil en rapport avec le cornet dans lequel on parle, fait alors vibrer la membrane de ce tambour, et celle-ci communique ensuite la vibration à la partie du fil qui suit. On peut de cette manière obtenir autant de coudes que l'on veut et soutenir le fil sur toute la longueur qui peut convenir à ces sortes de téléphones, laquelle ne dépasse guère cent mètres.
M. A. Bréguet a fait encore de ce système des espèces de relais pour arriver au même but, et pour cela il fait aboutir les fils à deux membranes qui ferment les deux ouvertures d'un cylindre de laiton; les sons reproduits par l'une des membranes réagissent sur l'autre, et celle-ci vibre sous cette influence comme si elle était impressionnée par la voix; le cylindre joue alors le rôle d'un tube acoustique ordinaire, et sa forme peut être aussi variée qu'on peut le désirer.
Il paraît que M. A. Badet, dès le 1er février 1878, était parvenu à faire fonctionner d'une manière analogue les téléphones à ficelle, et il se servait pour cela de parchemins tendus sur des cadres qui faisaient l'office de tables résonnantes. Le fil était fixé au centre de la membrane et faisait avec elle tel angle que l'on voulait.
Plusieurs savants, entre autres MM. Wheatstone, Cornu et Mercadier, se sont occupés il y a déjà longtemps de ces sortes de transmissions par les fils, et tout dernièrement MM. Millar, Heaviside et Nixon ont fait des expériences intéressantes dont nous devons dire quelques mots. Ainsi, M. Millar a reconnu qu'avec un fil télégraphique tendu et relié par deux fils de cuivre à deux disques susceptibles de vibrer, on pouvait transporter les sons musicaux à cent cinquante mètres, et qu'en tendant des fils à travers une maison, ces fils étant reliés à des embouchures et à des cornets auriculaires placés dans différentes chambres, on pouvait correspondre avec toutes ces chambres de la manière la plus facile.
Il a employé pour les disques vibrants, soit du bois, soit du métal, soit de la gutta-percha ayant la forme d'un tambour, et les fils étaient fixés au centre. L'intensité du son semblait augmenter avec la grosseur du fil.
MM. Heaviside et Nixon, dans leurs expériences à New-Castle sur la Tyne, ont reconnu que la grosseur du fil qui donnait les meilleurs résultats était le fil no 4 de la jauge anglaise. Les disques qu'ils avaient employés étaient en bois de 1/8 de pouce d'épaisseur, et ils pouvaient être placés en un point quelconque de la longueur du fil. Avec un fil bien tendu et tranquille, la parole a pu être entendue de cette manière à une distance de deux cents mètres.
Téléphone électrique de M. Graham Bell.—Tel était l'état des appareils téléphoniques, lorsqu'en 1876 apparut à l'exposition de Philadelphie le téléphone de Bell que sir W. Thomson n'a pas craint d'appeler la merveille des merveilles, et sur lequel l'attention du monde entier s'est trouvée immédiatement portée, bien qu'à vrai dire son authenticité ait soulevé dans l'origine bien des incrédulités. Ce téléphone, en effet, reproduisait les mots articulés, et ce résultat dépassait tout ce que les physiciens avaient pu concevoir. Cette fois ce n'était plus une conception que l'on pouvait, jusqu'à preuve contraire, traiter de fantastique: l'appareil parlait, et même parlait assez haut pour n'avoir pas besoin d'être placé contre l'oreille. Voici ce qu'en disait sir W. Thomson à l'Association britannique pour l'avancement des sciences lors de sa réunion à Glascow en septembre 1876.
«Au département des télégraphes des États-Unis, j'ai vu et entendu le téléphone électrique de M. Elisha Gray, merveilleusement construit, faire résonner en même temps quatre dépêches en langage Morse, et avec quelques améliorations de détail, cet appareil serait évidemment susceptible d'un rendement quadruple.... Au département du Canada, j'ai entendu: To be or not to be.—There's the rub, articulés à travers un fil télégraphique, et la prononciation électrique ne faisait qu'accentuer encore l'expression railleuse des monosyllabes; le fil m'a récité aussi des extraits au hasard des journaux de New-York... Tout cela, mes oreilles l'ont entendu articuler très-distinctement par le mince disque circulaire formé par l'armature d'un électro-aimant. C'était mon collègue du jury, le professeur Watson, qui, à l'autre extrémité de la ligne, proférait ces paroles à haute et intelligible voix, en appliquant sa bouche contre une membrane tendue, munie d'une petite pièce de fer doux, laquelle exécutait près d'un électro-aimant introduit dans le circuit de la ligne, des mouvements proportionnels aux vibrations sonores de l'air. Cette découverte, la merveille des merveilles du télégraphe électrique, est due à un de nos jeunes compatriotes, M. Graham Bell, originaire d'Édimbourg et aujourd'hui naturalisé citoyen des États-Unis.
«On ne peut qu'admirer la hardiesse d'invention qui a permis de réaliser avec des moyens si simples, le problème si complexe de faire reproduire par l'électricité les intonations et les articulations si délicates de la voix et du langage, et pour obtenir ce résultat, il fallait trouver moyen de faire varier l'intensité du courant dans le même rapport que les inflexions des sons émis par la voix.»
S'il faut en croire M. G. Bell, l'invention du téléphone n'aurait pas été le résultat d'une conception spontanée et heureuse; elle aurait été la conséquence de longues et patientes études entreprises par lui sur l'acoustique et les travaux des physiciens qui s'en étaient occupés avant lui[6]. Déjà son père, M. Alexandre Melville Bell, d'Édimbourg, avait fait de cette science une étude approfondie, et était même parvenu à représenter d'une manière excessivement ingénieuse la disposition des organes vocaux pour émettre des sons. Il devait naturellement inculquer à son fils le goût de ses études favorites, et ils firent ensemble de nombreuses recherches pour découvrir les relations qui pouvaient exister entre les divers éléments de la parole dans les différentes langues et les relations musicales existant entre les voyelles. Plusieurs de ces recherches avaient, il est vrai, déjà été entreprises par M. Helmholtz, et même dans de meilleures conditions; mais ces études lui furent d'une grande utilité quand il s'occupa plus tard du téléphone, et les expériences d'Helmholtz qu'il répéta avec un de ses amis, M. Hellis, de Londres, sur la reproduction artificielle des voyelles au moyen de diapasons électriques, le lancèrent dans l'étude de l'application des moyens électriques aux instruments d'acoustique. Il combina d'abord un système d'harmonica électrique à clavier, dans lequel les différents sons de la gamme étaient reproduits par des diapasons électriques de différentes tailles, accordés suivant les différentes notes, et qui étant mis en action par suite de l'abaissement successif des touches du clavier, pouvaient reproduire les sons correspondants aux touches abaissées, comme cela a lieu dans les pianos ordinaires.
Il s'occupa ensuite, dit-il, de télégraphie et pensa à rendre les télégraphes Morse auditifs en faisant réagir l'organe électro-magnétique sur des contacts sonores. Ce résultat, il est vrai, était déjà obtenu dans les parleurs usités en télégraphie, mais il pensa qu'en appliquant ce système à son harmonica électrique et en employant des appareils renforceurs tels que le résonnateur d'Helmholtz à la station de réception, on pourrait obtenir à travers un seul fil des transmissions simultanées, fondées sur l'emploi des moyens phonétiques. Nous verrons plus tard que cette idée s'est trouvée réalisée presque simultanément par plusieurs inventeurs, entre autres par MM. Paul Lacour, de Copenhague, Elisha Gray, de Chicago, Edison et Varley.
C'est à partir de ce moment que commencèrent sérieusement les recherches de M. G. Bell sur les téléphones électriques, et des appareils compliqués il passa aux appareils simples, en faisant une étude complète des différents modes de vibrations résultant d'actions électriques différentes; voici ce qu'il dit à cet égard dans son Mémoire lu à la Société des ingénieurs télégraphistes de Londres, le 31 octobre 1877:
«Si l'on représente par les ordonnées d'une courbe les intensités d'un courant électrique, et les durées des fermetures de ce courant par les abscisses, la courbe fournie pourra représenter des ondes en dessus ou en dessous de la ligne des x, suivant que le courant sera positif ou négatif, et ces ondes pourront être plus ou moins accentuées suivant que les courants transmis seront plus ou moins instantanés.
«Si les courants interrompus pour produire un son sont tout à fait instantanés dans leur manifestation, la courbe représente une série de dentelures isolées comme on le voit, fig. 6, et si les interruptions sont faites de manière à ne provoquer que des différences d'intensité, la courbe se présente sous la forme de la figure 7. Enfin si les émissions de courant sont effectuées de manière que les intensités soient successivement croissantes ou décroissantes, la courbe prend l'aspect représenté fig. 8. Or je donne aux premiers courants le nom de courants intermittents, aux seconds le nom de courants d'impulsion et aux troisièmes le nom de courants ondulatoires.
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Fig. 6.
«Naturellement ces courants sont positifs ou négatifs, suivant leur position au-dessus ou au-dessous de la ligne des x, et s'ils sont alternativement renversés, les courbes se présentent sous l'aspect de la figure 9, courbes essentiellement différentes des premières, non-seulement par le sens différent des dentelures, mais surtout par la suppression du courant résiduel qui existe toujours avec les courants d'impulsion et les courants ondulatoires.
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Fig. 7.
«Les deux premiers systèmes de courants ont été employés depuis longtemps pour la transmission électrique des sons musicaux, et le téléphone de Reiss dont nous avons déjà parlé en a été une application intéressante. Mais les courants ondulatoires n'avaient pas été employés avant moi[7], et ce sont eux qui ont permis de résoudre le problème de la transmission de la parole. Pour qu'on puisse se rendre compte de l'importance de cette découverte, il suffit d'analyser les effets produits avec ces différents systèmes de courants, quand plusieurs sons de hauteur différente doivent entrer en combinaison.
«La fig. 6 montre une combinaison dans laquelle les styles a et a' de deux instruments transmetteurs provoquent l'interruption du courant d'une même batterie B, de manière que les vibrations déterminées soient entre elles dans le rapport d'une tierce majeure, c'est-à-dire dans le rapport de quatre à cinq. Dans ces conditions, les courants sont intermittents, et quatre fermetures de a se produiront dans le même espace de temps que les cinq fermetures de a', et les intensités électriques correspondantes seront représentées par les dentelures que l'on voit en A2 et en B2; la combinaison de ces intensités A2 + B2 donnera lieu aux dentelures inégalement espacées que l'on distingue sur la troisième ligne. Or l'on voit que, bien que le courant conserve une intensité uniforme, il est moins de temps interrompu quand les styles interrupteurs réagissent ensemble que quand ils réagissent isolément; de sorte que pour un grand nombre de fermetures simultanées effectuées par des styles animés de différentes vitesses, les effets produits équivalent à celui d'un courant continu. Toutefois le nombre maximum des effets distincts qui pourront être obtenus de cette manière dépendra beaucoup du rapport existant entre les durées des fermetures et des interruptions du courant. Plus les fermetures seront courtes et les interruptions longues, plus les effets transmis sans confusion seront nombreux et vice versâ.
«Avec les courants d'impulsion, la transmission des sons musicaux s'effectue comme l'indique la figure 7, et l'on voit que quand ils sont produits simultanément, l'effet résultant A2 + B2 est analogue à celui qui serait produit par un courant continu d'intensité minima.
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Fig. 8.
«Avec les courants ondulatoires, les choses se passent autrement, mais pour les produire il est nécessaire d'avoir recours aux effets d'induction, et la fig. 8 indique la manière dont l'expérience doit être faite. Dans ce cas, les courants réagissant sur le récepteur musical R résultent de renforcements et d'affaiblissements produits par l'action d'armatures, M, M' vibrant devant des électro-aimants e, e', placés dans le circuit de la batterie B, et comme ces renforcements et affaiblissements successifs sont en rapport avec les positions respectives des armatures par rapport aux pôles magnétiques, les courants qui en résultent peuvent avoir leur intensité représentée par des lignes ondulées comme on le voit en A2 et en B2; or ces ondulations, pour la tierce dont il a été question précédemment, seront telles qu'il s'en produira quatre en A2, dans le même temps qu'il s'en produira cinq en B2, et il résultera de la combinaison de ces deux effets une résultante qui pourra être représentée par la courbe A2 + B2, laquelle représente la somme algébrique des courbes A2 et B2. Un effet analogue est produit quand on emploie des courants ondulatoires alternativement renversés comme on le voit fig. 9, et pour les obtenir, il suffit d'opposer aux armatures de fer M, M' employées dans la précédente expérience, des aimants permanents et de supprimer la batterie voltaïque B.
«Pour peu qu'on étudie les fig. 8 et 9, continue M. G. Bell, on reconnaît aisément que la transmission simultanée, par un même fil, de sons de différente force et de différente nature ne peut, dans le cas qui nous occupe en ce moment, altérer le caractère des vibrations qui les ont provoquées, comme cela a lieu avec les courants intermittents ou avec les courants d'impulsion; elle ne fait que changer la forme des ondulations, et ce changement se produit de la même manière que dans le milieu aériforme qui transmet à l'oreille la combinaison des sons émis. On peut donc de cette manière transmettre à travers un fil télégraphique le même nombre de sons qu'à travers l'air.»
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Fig. 9.
Après avoir appliqué les principes précédents à la construction d'un système télégraphique à transmissions multiples[8], M. G. Bell ne tarda pas à en tirer parti dans de nouvelles recherches qu'il fit alors pour perfectionner l'éducation vocale des sourds et muets. «Il est bien connu, dit M. Bell, que les sourds et muets ne sont muets que parce qu'ils sont sourds et qu'il n'y a dans leur système vocal aucun défaut qui puisse les empêcher de parler. Par conséquent, si l'on parvenait à rendre visible la parole et à déterminer les fonctions du mécanisme vocal nécessaires pour produire tel ou tel son articulé représenté, il deviendrait possible d'enseigner aux sourds et muets la manière de se servir de leur voix pour parler. Le succès que j'obtins de ce système dans les expériences que je fis à l'école de Boston m'engagea à étudier d'une manière toute particulière les relations qui pouvaient exister entre les sons produits et leur représentation graphique, et j'employai, à cet effet, la capsule manométrique de M. Kœnig et le phonautographe de M. Léon Scott auquel M. Maurey de Boston avait appliqué un enregistreur assez sensible pour être mis en action par la voix. Cet enregistreur consistait d'ailleurs dans un style de bois de un pied de longueur environ, qui était fixé directement sur la membrane vibrante du phonautographe et qui pouvait fournir sur une surface plane de verre noirci, des traces assez amplifiées pour être d'une distinction facile. Quelques-unes de ces traces sont représentées fig. 10. Je fus très-frappé des résultats produits par cet instrument, et il me sembla qu'il y avait une grande analogie entre lui et l'oreille humaine. Je cherchai alors à construire un phonautographe modelé davantage sur le mécanisme de l'oreille, et j'eus pour cela recours à un célèbre médecin spécialiste de Boston, M. le docteur Clarence J. Blake. Il me proposa de me servir de l'oreille humaine elle-même comme de phonautographe plutôt que de chercher à l'imiter, et d'après cette idée, il construisit l'appareil représenté fig. 11, auquel fut adapté un style traçant. En enduisant la membrane du tympan et le pavillon circulaire avec un mélange de glycérine et d'eau, on communiqua à ces organes une souplesse suffisante pour que, en chantant dans la partie extérieure de cette sorte de membrane artificielle, le style fût mis en vibration, et l'on obtint ainsi des traces sur une plaque de verre noircie, disposée au-dessous de ce style et soumise à un mouvement d'entraînement rapide. La disproportion considérable de masse et de grandeur qui, dans cet appareil, existait entre la membrane et les osselets mis en vibration par elle, attira particulièrement mon attention et me fit penser à substituer à la disposition compliquée que j'avais employée pour mon téléphone à transmission de sons multiples, une simple membrane à laquelle était fixée une armature de fer. Cet appareil fut alors disposé comme l'indique la fig. 12, et je croyais obtenir par lui les courants ondulatoires qui m'étaient nécessaires[9]. En effet, en articulant à la branche sans bobine d'un électro-aimant boiteux une armature de fer doux A, reliée par une tige à une membrane en or battu n, je devais obtenir, par suite des vibrations de celles-ci, une série de courants induits ondulatoires qui, réagissant sur l'électro-aimant d'un appareil semblable placé à distance, devaient faire reproduire à l'armature de celui-ci les mouvements de la première armature, et par conséquent faire vibrer la membrane correspondante, exactement comme celle ayant provoqué les courants. Toutefois les résultats que j'obtins de cet arrangement ne furent pas satisfaisants, et il me fallut encore entreprendre bien des essais qui m'amenèrent à réduire autant que possible les dimensions et le poids des armatures et même à les constituer avec des ressorts de pendule de la grandeur de l'ongle de mon pouce. Dans ces conditions, au lieu d'articuler ces armatures, je les attachai au centre des membranes, et mon appareil fut alors disposé comme l'indique la fig. 13[10]. Nous pûmes alors, mon ami M. Thomas Watson et moi, obtenir des transmissions téléphoniques qui nous montrèrent que nous étions dans la bonne voie. Je me souviens d'une expérience faite alors avec ce téléphone qui me remplit de joie. Un des deux appareils était placé à Boston dans une des salles de conférences de l'université, l'autre dans le soubassement d'un bâtiment adjacent. Un de mes élèves observait ce dernier appareil, et je tenais l'autre. Après que j'eus prononcé ces mots: «Comprenez-vous ce que je dis?», quelle a été ma joie quand je pus entendre moi-même cette réponse à travers l'instrument: «Oui, je vous comprends parfaitement.» Certainement l'articulation de la parole n'était pas alors parfaite, et il fallait l'extrême attention que je prêtais, pour distinguer les mots de cette réponse; cependant l'articulation de ces mots existait, et je pouvais croire que leur manque de clarté devait être rapporté uniquement à l'imperfection de l'instrument. Sans entrer dans le détail de tous les essais que je dus entreprendre pour améliorer la construction de cet appareil, je dirai qu'au bout de quelque temps je fus conduit à employer comme téléphone de réception l'appareil représenté fig. 14, et c'est ce modèle joint à celui de la fig. 13, combiné comme transmetteur, qui fut admis à l'exposition de Philadelphie.
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Fig. 10.
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Fig. 11.
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Fig. 12.
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Fig. 13.
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Fig. 14.
«Dans ce nouveau modèle de récepteur, la membrane était remplacée par une lame vibrante de fer L fixée sur l'enveloppe cylindrique d'un électro-aimant tubulaire C, et le système était monté sur un pont P qui servait de caisse sonore. Les articulations produites par cet appareil étaient bien distinctes; mais son grand défaut était qu'il ne pouvait servir d'appareil transmetteur; il était donc nécessaire d'avoir deux appareils à chaque station, l'un pour la transmission, l'autre pour la réception.
«Je cherchai alors à changer la disposition du téléphone transmetteur en variant les conditions de ses éléments constituants, tels que les dimensions et la tension de la membrane, le diamètre et l'épaisseur de l'armature, la grandeur et la puissance de l'aimant et même les hélices de fil enroulé sur ce dernier; j'ai pu en reconnaître empiriquement les meilleures conditions d'organisation et combiner la meilleure forme à donner à l'appareil. Ainsi j'avais reconnu, par exemple, qu'en diminuant la longueur de la bobine du fil de l'hélice magnétisante et la surface de la lame de fer attachée à la membrane, j'augmentais non-seulement l'intensité des sons, mais encore leur netteté d'articulation; ce qui me fit naturellement abandonner la membrane en or battu pour n'employer qu'une simple plaque de fer, et comme il m'était démontré depuis longtemps que l'intervention du courant traversant la bobine de l'électro-aimant n'était utile que pour magnétiser celui-ci, je me décidai à supprimer la pile et à employer pour noyau magnétique un aimant permanent. Toutefois, comme à l'époque où ces instruments devaient être exposés pour la première fois en public, les résultats obtenus avec ce dernier système étaient moins satisfaisants qu'avec celui qui mettait à contribution la batterie voltaïque, je ne voulus exposer que cette dernière disposition d'instrument, ce qui donna l'occasion à certaines personnes et, entre autres au professeur Dolbear du collége de Tufts, de réclamer la priorité pour l'introduction des aimants permanents dans le téléphone; mais j'en avais eu l'idée dès le commencement de mes recherches et alors que je m'occupais des transmissions simultanées des sons musicaux.
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Fig. 15.
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Fig. 16.
«La fig. 15 représente le premier perfectionnement que j'ai apporté à l'appareil exposé à Philadelphie, et la fig. 16 en représente un autre qui a fourni des effets très-puissants. Dans ce dernier, l'aimant était en fer à cheval et disposé à la manière de celui que M. Hughes a employé pour son télégraphe imprimeur. Avec cet appareil, les sons pouvaient être entendus (faiblement il est vrai) par une nombreuse assemblée; il fut exposé le 12 février 1877 à l'institut d'Essex, à Salem (Massachusetts), et y reproduisit devant un auditoire de 600 personnes un discours prononcé à Boston dans un appareil semblable. Les intonations de la voix de celui qui parlait ont pu être distinguées par l'auditoire. Toutefois l'articulation n'était distincte qu'à une distance de 6 pieds de l'instrument. Il fut fait à cette occasion un rapport qu'on transmit par l'appareil à Boston, et qui fut reproduit le lendemain dans les journaux de cette ville.
«Entre la forme de la fig. 13 et celle de l'appareil actuel, représenté fig. 17, il n'y a qu'une différence bien légère, et cette dernière forme n'a été combinée que pour rendre l'appareil plus portatif et d'un usage plus commode. Sous ce rapport, je dois exprimer ma reconnaissance à plusieurs de mes amis, entre autres à MM. les professeurs Peirce et Blake, le docteur Channing, M. Clarke et M. Jones, pour l'aide qu'ils m'ont prêté. Ainsi M. Peirce a été le premier à démontrer la possibilité de l'emploi dans les téléphones d'aimants de très-petites dimensions. C'est lui également qui a donné à l'embouchure recouvrant la plaque vibrante la forme que j'ai adoptée pour le modèle définitif qui est représenté fig. 17.
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Fig. 17.
Outre le modèle représenté fig. 13, il se trouvait encore à l'exposition de Philadelphie un autre système de transmetteur téléphonique qui est reproduit fig. 18 et qui était fondé sur l'action directe des courants voltaïques. Un fil de platine p fixé à une membrane tendue LL complétait par son immersion dans de l'eau V le circuit réunissant les deux appareils en correspondance. En parlant en E devant la membrane tendue, les vibrations communiquées à la pointe de platine modifiaient la résistance du circuit dans des conditions telles, que le courant réagissait sur le récepteur par impulsions ondulatoires tout à fait semblables à celles résultant des courants induits. Les sons produits devenaient plus forts quand le liquide était légèrement acidulé ou salé, et l'on obtenait encore de bons résultats au moyen d'une pointe de plombagine immergée dans du mercure, de l'eau acidulée ou salée, ou dans une solution de bichromate de potasse.
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Fig. 18.
«Bien que mes recherches eussent pour but final le perfectionnement de la télégraphie, je pus constater dans le cours de mes expériences quelques effets intéressants que je crois devoir rapporter ici. Ainsi j'observai qu'un son musical était produit par le seul fait du passage d'un courant à travers un morceau de plombagine ou de charbon de cornue. Des effets extrêmement curieux résultaient aussi du passage de courants intermittents alternativement renversés à travers le corps humain. Ainsi un rhéotome étant placé dans le circuit primaire d'un appareil d'induction et les deux bouts du fil du circuit secondaire étant réunis à deux électrodes de cuivre dont une était placée près de l'oreille, on percevait des sons très-distincts aussitôt que l'on touchait de la main l'autre électrode. En touchant des deux mains les deux électrodes et plaçant les doigts contre l'oreille, des craquements se faisaient entendre et semblaient venir des doigts, comme s'ils étaient la répercussion du tremblement musculaire résultant du passage des courants induits. Ces bruits pourtant n'existaient que pour la personne sur laquelle l'expérience était faite. Quand deux personnes se tenant par la main étaient interposées dans le circuit au lieu d'une seule, un son se produisait au contact des mains réunies, mais il fallait pour cela que les mains ne fussent pas humides. Ce phénomène se reproduisait, du reste, quand le contact de ces deux personnes était effectué sur une partie quelconque de leur corps. Au contact des bras, le bruit était assez intense pour être entendu à plusieurs pieds de distance, et il était alors presque toujours accompagné d'une légère secousse. L'introduction d'une feuille de papier entre les deux parties en contact n'interrompait pas la production du son, mais elle supprimait l'effet désagréable de la secousse. Quand on faisait passer le courant intermittent de la bobine de Ruhmkorff à travers le bras d'une personne, on pouvait, en y appliquant l'oreille, entendre un son qui semblait provenir des muscles de l'avant-bras et du biceps.
«Du reste, des sons musicaux très-nets se font entendre quand on fait fonctionner l'interrupteur du circuit primaire de l'appareil de Ruhmkorff, et s'il y a deux interrupteurs, on obtient deux sons différents, ce qui montre que ces sons proviennent de l'étincelle.
«Voici encore une expérience très-intéressante, faite par le professeur Blake avec un téléphone dont le barreau aimanté était remplacé par une tige de fer doux de six pieds de longueur. Ce téléphone étant réuni électriquement à un téléphone ordinaire du modèle de la fig. 17, reproduisait très-bien les sons émis dans ce dernier; mais leur intensité variait suivant la direction que l'on donnait à la tige de fer, et le maximum correspondait à la position de la tige dans le méridien magnétique.
«Quand on interpose un téléphone dans un circuit télégraphique, on entend des bruits d'un caractère très-particulier dont l'origine me paraît encore assez complexe et souvent obscure. Il en est pourtant qui doivent provenir de l'induction exercée par les fils voisins et des dérivations de courant qui se produisent toujours à travers les supports des fils, car les signaux télégraphiques échangés à travers ces fils voisins sont parfaitement perçus dans le téléphone. Certains bruits résultent aussi des courants terrestres, des vibrations du fil sous l'influence des courants d'air et même des frictions produites par des joints défectueux. La sensibilité du téléphone est, du reste, telle que les bruits résultant des transmissions télégraphiques voisines peuvent être perçus quand on substitue au fil télégraphique du téléphone un rail de chemin de fer, et alors même que les fils télégraphiques les plus voisins de ce rail sont éloignés de quarante pieds. D'un autre côté, M. Peirce a reconnu que des sons peuvent être produits dans un téléphone, quand le fil télégraphique auquel cet appareil est réuni est impressionné par une aurore boréale. Quelquefois aussi, des airs chantés ou joués sur un instrument de musique se sont trouvés transmis par le téléphone sans qu'on ait pu savoir leur provenance; mais ce qui montre le plus la merveilleuse sensibilité de cet appareil, c'est la possibilité qu'il donne de reproduire la parole à travers des corps que l'on pourrait croire à peu près non conducteurs. Ainsi la communication à la terre d'un circuit téléphonique peut être faite par l'intermédiaire du corps humain malgré l'interposition des bas et des chaussures; et elle peut même être effectuée si, au lieu d'être sur le sol, on est placé sur un mur en briques. Il n'y a que la pierre de taille et le bois qui constituent un obstacle assez grand pour couper la communication; mais il suffit que le pied touche le terrain avoisinant, soit même une touffe de gazon, pour qu'aussitôt les effets électriques manifestent leur présence.
«D'après ces résultats, une question toute naturelle pouvait se poser à l'esprit: quelle est la longueur maxima de circuit à laquelle les transmissions téléphoniques peuvent atteindre?... Mais il est difficile d'y répondre en raison des conditions différentes dans lesquelles peut être placée l'expérience. Dans les essais de laboratoire on est parvenu à échanger sans difficulté des correspondances sur des circuits de 60,000 ohms de résistance, soit 6000 kilomètres de fil télégraphique, et je suis parvenu à transmettre sur un circuit dans lequel étaient interposées 16 personnes se tenant par la main, lequel circuit avait une résistance d'environ 6400 kilomètres. Toutefois la plus grande longueur de circuit télégraphique sur laquelle j'ai pu obtenir une transmission nette de la parole, n'a pas dépassé 250 milles. Dans cette expérience, aucune difficulté ne survint, tant que les lignes télégraphiques voisines n'étaient pas en activité; mais aussitôt que les correspondances s'échangèrent à travers ces lignes, les sons vocaux, quoique encore perceptibles, étaient bien diminués d'intensité, et l'on aurait cru entendre une conversation échangée au milieu d'un orage. On a pu également transmettre la parole à travers les câbles sous-marins, et M. Preece m'informe que des résultats satisfaisants ont été obtenus à travers un câble de 60 milles de longueur, immergé entre Dartmouth et l'île de Guernesey, et cela avec des téléphones à main du modèle ordinaire.»
Part de M. Elisha Gray dans l'invention du téléphone.—Nous avons vu (p. 8) que si M. Bell a été le premier à construire et à rendre pratique le téléphone parlant, M. Elisha Gray avait le premier conçu le principe de cet instrument et l'avait combiné en électricien consommé. Un travail très-curieux qu'il vient de publier sur ses diverses inventions en téléphonie montre que dès l'année 1874 (en juin), il avait combiné un récepteur à lame vibrante dont on peut se faire une idée en supposant un électro-aimant soutenu verticalement devant le fond d'un plat métallique évasé, dont la partie plate, c'est-à-dire le fond, serait très-mince et éloignée de quelques dixièmes de millimètre seulement des pôles de l'électro-aimant.
Le transmetteur correspondant à ce récepteur n'était, il est vrai, qu'une sorte de tuyau d'orgue dont l'anche agissait comme interrupteur de courant, et par conséquent il ne pouvait transmettre que des sons musicaux. Mais en 1875, M. Gray pensa à disposer un transmetteur pour les sons articulés, et le 15 février 1876, il déposa, comme nous l'avons vu, à l'office des patentes américaines un caveat dans lequel était exposé un système complet de téléphone parlant. Ce système ne fut pas, il est vrai, exécuté immédiatement, car M. Gray croyait qu'un téléphone de ce genre n'avait qu'un intérêt secondaire au point de vue commercial et télégraphique, et il attachait plus d'importance à son système de téléphone musical appliqué aux transmissions multiples; mais sa description était complète comme on peut en juger par la fig. 19 qui représente l'ensemble du système.
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Fig. 19.
Dans ce système, le transmetteur était tout à fait semblable à celui à liquide dont M. Bell parle dans son mémoire et que nous avons décrit p. 51[11], et le récepteur ressemblait beaucoup à celui que nous avons représenté fig. 13. Pourtant, en principe, le système de M. Gray différait entièrement de celui adopté définitivement par M. G. Bell. Dans le premier, en effet, les variations d'intensité du courant nécessaires pour la production des mots articulés, étaient la conséquence de variations dans la résistance du circuit, et ces variations étaient obtenues par l'intermédiaire d'un liquide au sein duquel se mouvait, sous l'influence des vibrations d'une membrane tendue adaptée à un porte-voix, une pointe de platine mise en rapport avec une pile. Du rapprochement plus ou moins grand de cette pointe d'une électrode mise en rapport avec l'appareil récepteur, résultaient des différences de conductibilité du liquide proportionnelles aux amplitudes et aux inflexions des vibrations de la membrane, et ces différences d'intensité étaient traduites sur le récepteur par des magnétisations plus ou moins grandes d'un électro-aimant actionnant un disque de fer doux, fixé au centre d'une membrane tendue sur une sorte de résonnateur ou de cornet acoustique. Ce système appartenait donc à la catégorie des téléphones à pile que M. Edison, comme nous allons le voir à l'instant, a rendus si importants par la substitution au liquide d'un conducteur secondaire en charbon, et qui devaient plus tard donner naissance au microphone.
Le système Bell, comme on l'a vu, bien que mettant dans l'origine à contribution une pile, ne déterminait les affaiblissements et les renforcements électriques nécessaires à l'articulation des mots, qu'au moyen de courants d'induction provoqués par les mouvements d'une armature de fer doux, courants dont l'intensité était, par conséquent, fonction de l'amplitude et des inflexions de ces mouvements. La pile n'intervenait que pour communiquer à l'inducteur une forte aimantation. Or cet emploi des courants induits dans les transmissions téléphoniques était déjà d'une grande importance, car les diverses expériences faites depuis ont montré leur supériorité sur les courants voltaïques dans cette application. Mais l'expérience lui montra bientôt que non-seulement il n'était pas besoin pour faire agir cet instrument d'un appareil d'induction puissant animé par une pile, mais qu'un aimant permanent très-faible et très-petit pouvait à lui seul fournir des courants suffisants. Cette découverte à laquelle avait contribué M. Peirce, ainsi qu'on l'a vu, était d'une extrême importance, car elle permettait de réduire considérablement les dimensions de l'appareil, elle le rendait portatif et susceptible de se prêter à la transmission et à la réception, et elle montrait que le téléphone était le plus sensible de tous les appareils révélateurs de l'action des courants. Si donc M. Bell n'a pas employé le premier les moyens efficaces pour transmettre les mots articulés, on peut dire qu'il a cherché comme M. Gray à résoudre le problème par des courants ondulatoires, et qu'il a obtenu ces courants au moyen des effets d'induction, système qui, étant perfectionné, devait conduire aux résultats importants que tout le monde connaît. N'y eût-il que la connaissance qu'il a donnée au monde étonné d'un instrument capable de reproduire télégraphiquement la parole, qu'une grande gloire lui serait acquise, car ce problème avait été regardé jusque-là comme insoluble.
En résumé, les prétentions de M. Gray à l'invention du téléphone ont été résumées par lui de la manière suivante, dans un travail très-intéressant intitulé: Experimental researches on electro-harmonic telegraphy and telephony.
1o J'ai trouvé le premier les moyens pratiques de transmettre à travers un circuit fermé les sons composés et d'inflexions variables par la superposition de deux ou de plusieurs ondes électriques.
2o Je prétends avoir découvert et utilisé le premier le moyen de reproduire les vibrations par l'emploi d'un aimant récepteur constamment animé par une action électrique.
3o Je prétends encore être le premier à avoir construit un instrument ayant un aimant avec un diaphragme circulaire en matière magnétique, soutenu par ses bords à une petite distance en face des pôles de l'aimant, et susceptible d'être appliqué à la transmission et à la réception des sons articulés.
4o Je soutiens avoir décrit le premier le téléphone à sons articulés, et cela d'une manière assez exacte et assez complète pour qu'un téléphone exécuté d'après cette description ait pu transmettre et reproduire fidèlement la parole.[Table des Matières]
EXAMEN DES PRINCIPES FONDAMENTAUX SUR LESQUELS REPOSE LE TÉLÉPHONE DE BELL.
Bien que l'historique qui précède soit suffisant pour faire comprendre aux personnes initiées dans la science électrique le principe du téléphone de Bell, il pourrait bien ne pas en être de même pour la plupart des personnes auxquelles notre livre s'adresse, et nous croyons en conséquence devoir entrer dans quelques détails physiques sur l'origine des courants électriques qui sont en jeu dans les transmissions téléphoniques. Ces détails nous paraissent d'autant plus nécessaires qu'il est beaucoup de personnes qui croient encore que les téléphones de Bell ne sont pas électriques, parce qu'ils ne mettent pas une pile à contribution, et le plus souvent elles les confondent avec les téléphones à ficelle, s'étonnant de la différence de prix qui existe entre les appareils que l'on vend dans les rues et ceux que l'on vend chez les constructeurs.
Sans définir ici ce que c'est qu'un courant électrique, ce qui serait par trop élémentaire, nous pourrons dire que les courants électriques peuvent provenir de beaucoup d'effets divers, et qu'en dehors de ceux qui résultent des piles, il en est d'aussi énergiques qui peuvent provenir d'une action exercée par des aimants sur un circuit conducteur convenablement combiné. Ces courants sont alors appelés courants d'induction, et ce sont eux qui sont en jeu dans les téléphones de Bell. Pour qu'on puisse comprendre comment ils se développent dans ces conditions, il sera nécessaire que nous examinions d'abord ce qui arrive quand, devant un circuit fermé, on avance ou l'on retire le pôle d'un aimant, et pour cela nous supposerons qu'un fil de cuivre sur lequel est interposé un galvanomètre est enroulé en cercle, et qu'on dirige vers le centre de ce cercle l'un des pôles d'un aimant permanent. Or voici ce que l'on observera:
1o Au moment où l'on approchera l'aimant, un courant électrique prendra naissance et fera dévier le galvanomètre d'un certain côté. Cette déviation sera d'autant plus grande que le mouvement accompli sera plus étendu, et la tension de ce courant sera d'autant plus grande que le mouvement sera plus brusquement effectué. Ce courant toutefois ne sera jamais qu'instantané.
2o Au moment où l'on éloignera l'aimant, un nouveau courant du même genre prendra naissance, mais il se manifestera en sens inverse du premier. Il sera ce que l'on appelle un courant direct, parce qu'il est de même sens que le courant magnétique de l'aimant qui lui donne naissance, tandis que l'autre courant sera dit inverse.
3o Si au lieu d'avancer ou de retirer l'aimant par l'effet d'un seul mouvement, on le fait avancer par saccades, on reconnaît qu'il se détermine une succession de courants dans le même sens dont la présence peut être constatée sur le galvanomètre quand les mouvements sont suffisamment espacés, mais qui se confondent en se superposant quand ces espacements sont très-faibles, et comme des effets inverses résultent des mouvements de l'aimant effectués dans un sens contraire, il arrive que l'aiguille du galvanomètre suit les mouvements de l'aimant et les stéréotype en quelque sorte.
4o Naturellement si, au lieu de réagir sur un simple circuit fermé, l'aimant exerce son action sur un nombre considérable de circonvolutions de ce circuit, c'est-à-dire sur une bobine de fil enroulé, les effets seront considérablement augmentés, et ils le seront encore plus si, à l'intérieur de cette bobine, se trouve un noyau magnétique, car l'action inductive s'effectuera alors de plus près et sur toutes les parties de la bobine. Comme le noyau magnétique en s'aimantant ou en se désaimantant plus ou moins sous l'influence du rapprochement ou de l'éloignement de l'aimant inducteur subit le contre-coup de tous les accidents qui peuvent se manifester pendant le mouvement de cet aimant, les courants induits qui en résultent les accusent parfaitement.
5o Au lieu d'admettre que l'aimant inducteur est mobile, on peut le supposer fixe au centre de la bobine, et l'on peut dès lors déterminer les courants induits dont nous avons parlé en modifiant son énergie. Il suffit pour cela de réagir sur ses pôles au moyen d'une armature de fer. Quand cette armature est approchée de l'un de ces pôles ou de tous les deux en même temps, il acquiert de l'énergie et produit un courant inverse, c'est-à-dire un courant dans le sens qui aurait correspondu à un rapprochement de l'aimant du circuit fermé. Quand elle s'éloigne, l'effet inverse se produit; mais dans les deux cas, les courants induits sont en rapport avec l'étendue et le sens des mouvements accomplis par l'armature, et par conséquent, ils peuvent reproduire par leurs effets les mouvements de cette armature. Or si cette armature est une lame de fer et que cette lame vibre sous l'influence d'un son quelconque devant un système électro-magnétique disposé comme il vient d'être dit plus haut, les allées et venues de cette lame se traduiront par des courants induits, plus ou moins forts, plus ou moins accidentés, suivant l'amplitude et la complexité des vibrations, mais qui seront ondulatoires, puisqu'ils résulteront toujours de mouvements successifs et continus et seront, par conséquent, dans les conditions voulues pour transmettre la parole ainsi qu'on l'a vu précédemment.
Quant à l'action déterminée sur le récepteur, c'est-à-dire sur l'appareil qui reproduit la parole, elle est assez complexe, et nous aurons occasion de la discuter plus tard; mais, au premier abord, on peut la concevoir si l'on considère que les effets produits par ces courants induits d'intensité variable qui traversent la bobine du système électro-magnétique, doivent déterminer par les magnétisations et démagnétisations qui en résultent, des vibrations plus ou moins amplifiées, plus ou moins accidentées de la lame armature, lesquelles représentent exactement celles de la lame devant laquelle on a parlé, mais qui n'en peuvent être qu'une réduction. Toutefois les effets sont par le fait plus compliqués, quoique se produisant dans des conditions analogues, et ce sont eux que nous discuterons plus tard quand nous en serons aux expériences faites avec le téléphone. Nous ferons observer néanmoins, dès maintenant, que pour ces reproductions de la parole, il n'est pas nécessaire que le noyau magnétique soit en fer doux, car les effets vibratoires peuvent résulter aussi bien d'aimantations différentielles que d'aimantations directes.[Table des Matières]
DISPOSITION ORDINAIRE DES TÉLÉPHONES BELL.
La disposition la plus généralement employée pour les téléphones est celle que nous avons représentée fig. 20. C'est une sorte de petite boîte circulaire en bois adaptée à l'extrémité d'un manche M, également de bois, qui renferme dans son intérieur le barreau aimanté NS. Ce barreau est fixé au moyen d'une vis t et est disposé de manière à pouvoir être avancé ou reculé quand on serre ou l'on desserre la vis, condition nécessaire pour le réglage de l'appareil. À l'extrémité libre du barreau est fixée la bobine magnétique B qui, d'après MM. Pollard et Garnier, doit, pour fournir le maximum d'effet, être construite avec du fil no. 42 et présenter un grand nombre de spires. Les bouts du fil de cette bobine aboutissent le plus généralement à l'extrémité inférieure du manche par deux tiges de cuivre f, f, qui traversent celui-ci dans sa longueur et viennent se relier à deux boutons d'attache I, I' où l'on fixe les fils C, C du circuit. Cependant dans les appareils construits par M. Bréguet il n'y a pas de boutons d'attache, et c'est une petite torsade de deux fils flexibles recouverts de gutta-percha et de soie qui est fixée aux deux tiges; un capuchon en bois se visse alors à l'extrémité du manche, et la torsade passe par un trou pratiqué dans ce capuchon; de sorte que l'on n'est nullement gêné dans la manipulation de l'appareil. Des serre-fils adaptés aux extrémités des fils de la torsade, permettent d'ailleurs de les réunir à ceux du circuit. La figure 21 représente cet appareil.
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Fig. 20.
Dans une autre disposition, les fils de la bobine aboutissent directement à des boutons d'attache placés au-dessous de la boîte de bois; mais cette disposition est incommode.
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Fig. 21.
Au-dessus de l'extrémité polaire du barreau aimanté est placée la lame vibrante en fer LL qui est recouverte soit de vernis noir ou jaune, soit d'étain, soit d'un oxyde bleu, mais qui doit toujours être très-mince. Cette lame a la forme d'un disque, et c'est par les bords de ce disque, appuyés sur une bague en caoutchouc, qu'elle est fixée fortement sur les bords circulaires de la boîte de bois qui est à cet effet composée de deux parties. Ces parties s'ajustent l'une sur l'autre soit au moyen de vis, soit au moyen d'un pas de vis, ménagé à mi-épaisseur de bois. Cette lame doit être le plus rapprochée possible de l'extrémité polaire de l'aimant, mais pas assez pour que les vibrations de la voix déterminent le contact de ces deux pièces. Enfin l'embouchure RR', fig. 20, par laquelle on parle et qui a la forme d'un entonnoir très-évasé, termine la partie supérieure de la boîte et doit être disposée de manière à laisser un certain vide entre la lame et les bords du trou V qui est ouvert à son centre. La capacité intérieure de la boîte doit être calculée de manière à pouvoir jouer le rôle de caisse sonore, sans cependant provoquer d'échos et d'interférences de sons.
Quand l'appareil est bien exécuté, il peut produire des effets très-accentués, et voici ce que m'écrivait à ce sujet M. Pollard, qui est un des premiers qui se soient occupés en France de téléphone.
«L'appareil que j'ai confectionné donne des résultats réellement étonnants: D'abord, au point de vue de la résistance, 5 ou 6 personnes introduites dans le circuit n'affaiblissent pas sensiblement l'intensité des sons. Quand on met un appareil sur chaque oreille on a absolument la même sensation que si le correspondant parlait derrière à quelques mètres. L'intensité, la netteté, la pureté du timbre sont irréprochables.
«Je puis parler à mon collègue à voix complétement basse, avec le souffle pour ainsi dire, et causer avec lui sans que des personnes placées à deux mètres de moi puissent saisir un seul mot de notre conversation.
«Au point de vue de la réception, lorsqu'on m'appelle en élevant la voix, j'entends cet appel de tous les points de mon bureau, du moins quand le silence y règne; dans tous les cas, lorsque je suis assis à ma table et que l'instrument est à quelques mètres de moi, je m'entends toujours appeler. Pour augmenter l'intensité des sons, j'adapte à l'embouchure un cornet en cuivre de forme conique, et dans ces conditions, on entend, au bout de la ligne, parler dans mon bureau à 2 ou 3 mètres de l'embouchure; de ma place, à 1 mètre environ du cornet, je puis entendre et parler sans effort à mon collègue.»
Pour se servir du téléphone ordinaire de Bell, il faut parler nettement devant l'embouchure du téléphone qu'on tient à la main, pendant que l'auditeur placé à la station correspondante tient contre son oreille l'embouchure du téléphone récepteur. Ces deux appareils composent un circuit fermé avec les deux fils qui les relient, mais un seul suffit pour réaliser complétement la transmission, si l'on a soin de mettre en communication les deux appareils avec la terre qui, de cette manière, tient lieu du second fil. M. Bourbouze prétend qu'en employant ce moyen l'intensité des sons dans le téléphone est grandement augmentée; mais nous croyons que cette augmentation dépend des conditions du circuit, quoiqu'il prétende qu'on puisse la constater sur un circuit ne dépassant pas 70 mètres.
Dans la pratique, il convient d'avoir à sa disposition deux téléphones à chaque station, afin d'en avoir un à l'oreille pendant qu'on parle dans l'autre, comme on le voit fig. 22. On entend aussi beaucoup mieux quand on applique un téléphone contre chaque oreille. On tient alors les deux téléphones comme on le voit fig. 23. Afin d'éviter la fatigue des bras, on a disposé un modèle qui les tient suspendus devant les oreilles au moyen d'une sangle à ressort qui entoure la tête.
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Fig. 22.
Il y a du reste des différences considérables dans le pouvoir de transmission téléphonique des différentes voix. Suivant M. Preece, crier ne sert à rien: il faut pour obtenir de bons résultats, que l'intonation soit claire, que l'articulation soit distincte, et que les sons émis se rapprochent le plus possible des sons musicaux.
«J'ai entendu, dit-il, M. Willmot, l'un des électriciens de l'administration des postes, sur des circuits à travers lesquels aucunes autres voix n'auraient pu se faire entendre. Les sons des voyelles viennent toujours le mieux, et parmi les autres lettres, e, g, j, k, q sont toujours les plus mal répétées. L'oreille aussi demande à être exercée, et les facultés auditives varient d'une manière surprenante suivant les personnes. Le chant est toujours entendu avec une grande netteté ainsi que les sons des instruments à vent et surtout ceux du cornet à piston qui, de Londres, pourraient être entendus par des milliers de personnes à la fois à travers le large Corn Exchange de Basingstoke.»
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Fig. 23.
Suivant M. Rollo Russel, le circuit d'un téléphone n'aurait pas besoin d'isolation sur une longueur relativement petite; ainsi avec un circuit de 418 mètres on a pu employer un fil de cuivre nu déposé sur un gazon sans que les transmissions téléphoniques résultant d'une petite boîte à musique fussent annulées, mais à la condition que les deux fils ne fussent pas en contact. On a pu même obtenir des transmissions quand ce circuit était enterré dans de la terre mouillée sur une longueur de 30 mètres, ou immergé dans un puits sur une longueur de 40 mètres. La parole transmise dans ces conditions ne semblait même pas différente de ce qu'elle était quand le circuit était isolé.
Le téléphone peut se faire entendre simultanément à plusieurs auditeurs, soit en prenant sur les deux fils réunissant les deux téléphones en correspondance (près du téléphone récepteur) des dérivations aboutissant à différents téléphones, qui peuvent facilement être au nombre de 5 ou 6, sur les courts circuits, soit au moyen d'une petite caisse sonore fermée par deux membranes légères dont l'une est fixée sur la lame vibrante. En faisant aboutir à cette caisse un certain nombre de tubes acoustiques, plusieurs personnes pourraient, suivant M. Mc. Kendrick, entendre très-distinctement.
On peut obtenir encore des auditions simultanées du téléphone en les interposant dans un même circuit, et les expériences faites à New-York ont montré qu'on pouvait ainsi en faire parler cinq échelonnés en différents points d'une ligne télégraphique. Dans des essais téléphoniques faits sur les lignes des écluses du département de l'Yonne, on a constaté que sur un fil de 12 kilomètres où l'on avait placé à des distances différentes plusieurs téléphones, trois ou quatre personnes ont pu causer entres elles à travers ces téléphones, chacune entendant ce que disaient les autres. Les réponses et les demandes tout en se croisant restaient perceptibles. On a pu même, en plaçant un téléphone sur un second fil de dix kilomètres éloigné du premier de cinquante centimètres, et le suivant sur une longueur de deux kilomètres seulement, saisir la conversation échangée sur l'autre fil. On pouvait même distinguer très-bien les timbres des voix des deux interlocuteurs.
Depuis l'apparition du téléphone en Europe, beaucoup d'inventeurs prétendent être parvenus à faire parler un téléphone de manière qu'il soit entendu des différents points d'une vaste salle. Nous avons vu que M. Bell avait déjà obtenu ce résultat, et sous ce rapport nous ne voyons pas que ceux qui ont perfectionné le téléphone soient arrivés à des résultats beaucoup plus importants. Mais ce qui est certain, c'est qu'un téléphone ordinaire peut parfaitement émettre des sons musicaux susceptibles d'être entendus dans une pièce assez grande et tout en étant attaché à la muraille. On doit se rappeler les résultats obtenus par MM. Pollard et Garnier lors des essais qu'ils firent à Cherbourg pour relier la digue à la préfecture maritime de cette ville.
La digue de Cherbourg est, comme on le sait, une sorte d'île factice créée de main d'homme devant cette ville pour constituer une rade. Les forts établis sur cette digue sont reliés par des câbles sous-marins au port militaire et à la préfecture maritime. Un jour qu'après des expériences faites dans le cabinet du préfet sur l'un de ces câbles, au moyen de téléphones, plusieurs des personnes présentes causaient ensemble dans la pièce, elles furent très-étonnées d'entendre le clairon sonner la retraite, et les sons semblaient venir de l'un des points de la pièce. On cherche, et l'on reconnaît bientôt que c'est le téléphone pendu à la muraille qui se livrait à cet exercice. On s'informe et l'on apprend que c'était un des expérimentateurs de la station de la digue qui avait fait la plaisanterie de sonner du clairon devant le téléphone de cette station. Or la digue est éloignée de Cherbourg de plus d'une lieue, et la préfecture maritime est au milieu de la ville. Les téléphones étaient pourtant construits grossièrement dans les ateliers du port de Cherbourg, ce qui prouve une fois de plus combien ces appareils exigent peu de précision pour fonctionner.
Les téléphones du modèle de Bell les plus variés dans leurs dispositions se trouvent chez M. C. Roosevelt, représentant de M. Bell à Paris, 1, rue de la Bourse. Ils sont généralement construits par M. Bréguet, et les modèles les plus recherchés sont, indépendamment de celui que nous avons décrit, le grand modèle carré dont l'aimant est en fer à cheval et qui est renfermé dans une boîte plate, portant sur sa face antérieure un cornet qui sert en même temps d'embouchure. Nous représentons (fig. 24), ce système, qui a du reste été construit tout récemment à Boston dans de meilleures conditions. Dans ce nouveau modèle, établi par M. Gower, l'aimant est composé de plusieurs lames terminées par un noyau magnétique en fer sur lequel est fixée la bobine, et le tout est recouvert d'une épaisse couche de paraffine. Les sons reproduits sont alors beaucoup plus nets et plus forts. Il y a aussi un modèle en forme de tabatière dans lequel l'aimant est contourné en spirale afin de conserver sa longueur sous une forme ronde. Le pôle qui occupe la partie centrale de cette spirale est alors muni d'un noyau de fer sur lequel est fixée la bobine d'induction, et le couvercle de la tabatière porte la lame vibrante ainsi que l'embouchure; nous représentons ce modèle fig. 25. Dans un autre modèle, dit téléphone miroir, le dispositif précédent est adapté sur un manche comme la glace d'un miroir portatif, et l'embouchure se présentant sur l'une des faces latérales, on parle avec cet instrument comme si l'on parlait devant un écran de cheminée.
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Fig. 24.
On trouve d'un autre côté chez M. Bailey les divers modèles de téléphones à pile et à charbon d'Edison dont nous parlerons bientôt et qui ont donné les meilleurs résultats sur les longues lignes, ainsi que les téléphones de MM. Gray et Phelps.[Table des Matières]
DISPOSITIONS DIFFÉRENTES DES TÉLÉPHONES.
Les résultats si prodigieux obtenus avec le téléphone Bell et dont l'authenticité avait été mise en doute par la plupart des savants, devaient naturellement, étant une fois démontrés, provoquer une foule de recherches de la part des inventeurs et même de ceux qui avaient été dans l'origine les plus incrédules. Il en est résulté une foule de perfectionnements et de modifications qui ont évidemment leur intérêt, et dont nous allons maintenant nous occuper.[Table des Matières]
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Fig. 25.
TÉLÉPHONES À PILE.
Téléphone de M. Edison.—L'un des premiers et des plus intéressants perfectionnements apportés au téléphone de Bell, est celui qui a été combiné dans la première moitié de l'année 1876 par M. Edison. Ce système est, à la vérité, plus compliqué que celui que nous avons étudié précédemment, car il met à contribution une pile, et l'appareil transmetteur est différent de l'appareil récepteur; mais il est moins susceptible d'être influencé par les causes extérieures et permet des transmissions à plus grande distance.
Le téléphone de M. Edison, comme celui de M. Gray, dont nous avons déjà eu occasion de parler, est fondé sur l'action de courants ondulatoires déterminés par des variations de résistance d'un médiocre conducteur interposé dans le circuit, et sur lequel réagissent les vibrations d'un diaphragme devant lequel on parle. Seulement, au lieu d'employer un conducteur liquide qui ne peut jamais être utilisé pratiquement, M. Edison a cherché à mettre à contribution les corps solides semi-conducteurs. Ceux qui lui offrirent le plus d'avantages, à ce point de vue, furent le graphite et le charbon, surtout le charbon résultant du noir de fumée comprimé. Ces substances, en effet, étant introduites dans un circuit entre deux lames conductrices dont l'une est mobile, sont susceptibles de modifier la résistance de ce circuit dans le même rapport à peu près que la pression qui est exercée sur elles par la lame mobile[12], et l'on conçoit que pour obtenir avec ce système les courants ondulatoires nécessaires à la reproduction des sons articulés, il suffisait d'introduire un disque de plombagine ou de noir de fumée entre la lame vibrante d'un téléphone et une lame de platine mise en rapport avec la pile. La lame du téléphone étant mise en communication avec le fil du circuit, il devait résulter des vibrations de cette lame devant le disque de charbon, une série de pressions croissantes et décroissantes, donnant lieu à des effets correspondants dans l'intensité du courant transmis, et ces effets devaient réagir d'une manière analogue aux courants ondulatoires déterminés par l'induction dans le système de Bell. Toutefois, pour obtenir de très-bons résultats, plusieurs dispositions accessoires étaient nécessaires, et nous représentons (fig. 26) l'une des dispositions qui ont été données à cette partie du système téléphonique de M. Edison.
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Fig. 26.
Dans cette figure, l'appareil est vu en coupe, et il se rapproche beaucoup, quant à la forme, du téléphone de Bell. L L est la lame vibrante, O O, l'embouchure, M le trou de cette embouchure, N N N la cage de l'appareil qui est construite ainsi que l'embouchure en ébonite et qui présente au-dessous de la lame une cavité assez spacieuse et un trou tubulaire qui est creusé dans le manche. À sa partie supérieure, ce tube est continué par un rebord cylindrique muni d'un pas de vis sur lequel est vissée une petite bague présentant une saillie intérieurement, et c'est à l'intérieur de ce tube que se trouve disposé le système rhéostatique. Celui-ci se compose d'abord d'un piston E, adapté à l'extrémité d'une longue vis E F, dont le bouton F en tournant permet de faire avancer ou reculer le piston d'une certaine quantité. Au-dessus de ce piston, se trouve adaptée une lame de platine très mince A reliée par une lamelle flexible et un fil à un bouton d'attache P'. Une autre lame B, exactement semblable, est reliée avec le bouton d'attache P, et c'est entre ces deux lames qu'est placé le disque de charbon C. Ce disque est constitué avec du noir de fumée de pétrole comprimé, et sa résistance est d'un ohm ou de 100 mètres de fil télégraphique. Enfin un disque d'ébonite est appliqué sur la lame de platine supérieure B, et un tampon élastique composé d'un morceau de tube de caoutchouc G et d'un disque de liège H, est interposé entre la lame vibrante L L et le disque B, afin que les vibrations de cette lame ne soient pas arrêtées par l'obstacle rigide constitué par l'ensemble du système rhéostatique. Quand ces différentes pièces sont en place, on règle l'appareil au moyen de la vis F, et ce réglage est facile puisqu'il suffit de la serrer ou de la desserrer jusqu'à ce que le téléphone récepteur donne son maximum de son.
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Fig. 27.
Dans un nouveau modèle représenté (fig. 27), et qui a fourni les meilleurs résultats pour la netteté des transmissions, la lame vibrante L L est maintenue et appuyée contre les disques du conducteur secondaire en charbon C, par l'intermédiaire d'un petit cylindre de fer A au lieu d'un tampon en caoutchouc, et la pression est réglée par une vis placée au-dessous de e. L'embouchure E de l'appareil est plus saillante, et le trou plus large. Enfin il n'y a plus de manche à l'appareil dont l'enveloppe est en fonte nickelée. Le disque rigide b qui appuie sur la première lame de platine p est, d'un autre côté, en aluminium au lieu d'être en ébonite.
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Fig. 28.
Le téléphone récepteur ressemble assez à celui de M. Bell. Il présente néanmoins quelques différences que l'on peut reconnaître par l'inspection de la fig. 28. Ainsi l'aimant N S est recourbé en fer à cheval, et la bobine magnétisante E recouvre seulement un des pôles N; ce pôle occupe précisément le centre de la lame vibrante L L, tandis que le second pôle est près du bord de cette lame. Les dimensions elles-mêmes de la lame sont considérablement réduites; sa surface est à peu près celle d'une pièce de cinq francs, et elle est enclavée dans une espèce de rainure circulaire qui la maintient dans une position parfaitement déterminée. En raison de cette disposition, le manche de l'instrument est en bois plein, et l'espace vide où se trouve le système électro-magnétique est un peu plus développé que dans le modèle de Bell; mais l'on s'est arrangé de manière à éviter les échos et à en faire une sorte de caisse sonore apte à amplifier les sons. La disposition du système électro-magnétique par rapport à la lame vibrante doit évidemment augmenter aussi la sensibilité de l'appareil, car le pôle S étant en contact intime avec la lame L L, celle-ci se trouve polarisée et peut recevoir beaucoup plus énergiquement les influences magnétiques du second pôle N, qui en est distant de l'épaisseur d'une forte feuille de papier. Dans les deux appareils de M. Edison (récepteur et transmetteur) la partie supérieure CC correspondante à la lame vibrante, au lieu d'être fixée par des vis sur la partie attenante au manche, est vissée sur cette partie elle-même, ce qui permet de démonter beaucoup plus facilement l'instrument.
M. Edison a, du reste, beaucoup varié la forme de ses appareils, et aujourd'hui leur enveloppe est en métal avec une embouchure d'ébonite en forme d'entonnoir.
Ayant constaté, comme du reste l'avait fait avant lui M. Elisha Gray, que les courants induits sont plus favorables aux transmissions téléphoniques que les courants voltaïques, M. Edison transforma les courants de pile passant par son transmetteur en courants induits, et cela en leur faisant traverser le circuit primaire d'une bobine d'induction bien isolée; le fil de ligne était alors mis en communication avec le fil secondaire de la bobine. Nous rapporterons plus tard des expériences qui montreront les avantages de cette combinaison; pour le moment, nous ne faisons que la signaler, car elle fait aujourd'hui partie intégrante de presque tous les systèmes de téléphones à pile.
Téléphone musical d'Edison.—Les effets curieux et réellement très-avantageux que M. Edison avait obtenus avec son électro-motographe, lui donnèrent l'idée, dès le commencement de l'année 1877, d'appliquer le principe de cet appareil au téléphone pour la reproduction des sons transmis, et il a obtenu des résultats tellement intéressants que l'auteur d'un article sur les téléphones, publié dans le Telegraphic Journal du 15 août 1877, présente cette invention comme l'une des plus belles du dix-neuvième siècle. Ce qui est certain, c'est qu'elle semble avoir donné naissance au phonographe qui, dans ces derniers temps, a fait tant de bruit et a tant étonné les savants.
Pour qu'on puisse comprendre le principe de ce téléphone, nous devrons entrer dans quelques détails sur l'électro-motographe de M. Edison, découvert en 1872. Cet appareil est fondé sur ce principe: que si une feuille de papier, préparée avec une solution d'hydrate de potasse, est appliquée sur une plaque métallique réunie au pôle positif d'une pile, et qu'une pointe de plomb ou de platine reliée au pôle négatif soit promenée sur le papier, le frottement que cette pointe rencontre cesse dès que le courant passe, et elle peut dès lors glisser comme sur une glace jusqu'à ce que le courant soit interrompu. Or, comme cette réaction peut être effectuée instantanément sous l'influence de courants excessivement faibles, les effets mécaniques produits par ces alternatives d'arrêt et de glissement, peuvent, pour une disposition convenable de l'appareil, déterminer des vibrations en rapport avec les interruptions de courant produites par le transmetteur.
Dans ce système, le récepteur téléphonique se compose d'un résonnateur et d'un tambour monté sur un axe que fait tourner une manivelle. Une bande de papier en provision sur un rouleau, passe sur le tambour dont la surface est rugueuse, et sur cette bande appuie fortement une pointe émoussée de platine qui est adaptée à l'extrémité d'un ressort fixé au centre du résonnateur. Le courant de la pile dirigé d'abord sur le ressort, passe par la pointe de platine à travers le papier chimique, et retourne par le tambour à la pile. Quand on tourne la manivelle, le papier avance, et le frottement normal qui se produit entre le papier et la pointe de platine, pousse en avant cette dernière, en provoquant par l'intermédiaire du ressort une traction sur un des côtés du résonnateur; mais au moment de chaque passage du courant à travers le papier, tout frottement cessant, le ressort n'est plus entraîné, et le résonnateur revient à sa position normale. Or, comme à chaque vibration effectuée au transmetteur ce double effet se manifeste, il en résulte une série de vibrations du résonnateur qui sont la répétition de celles du transmetteur et, par conséquent, la reproduction plus ou moins réduite des sons musicaux qui ont affecté le transmetteur. Suivant les journaux américains, cet appareil aurait fourni des résultats surprenants; les courants les plus faibles, qui n'exerceraient aucune action sur un électro-aimant, produisent de cette manière des effets complets. L'appareil peut même reproduire, avec une grande intensité, les notes les plus élevées de la voix humaine, notes que l'on peut à peine distinguer lorsque l'on emploie des électro-aimants.
Le transmetteur est à peu près le même que celui que nous avons décrit précédemment; seulement, au lieu du disque de charbon, c'est une pointe de platine qui est employée, et elle ne doit pas être en contact continuel avec la lame vibrante. Voici du reste comment il est décrit dans le Telegraphic Journal: «Il consiste simplement dans un long tube de deux pouces de diamètre, ayant un de ses bouts recouvert d'un diaphragme constitué par une mince feuille de cuivre et maintenu serré au moyen d'une bague élastique. Au centre du diaphragme de cuivre se trouve rivé un petit disque de platine, et devant ce disque, est ajustée une pointe du même métal adaptée à un support fixe. Quand on chante devant le diaphragme, celui-ci en vibrant rencontre la pointe de platine et lui fait produire le nombre de fermetures de courant en rapport avec les vibrations des notes chantées.»
D'après de nouvelles expériences faites en Amérique pour juger du mérite des différents systèmes de téléphones, ce serait celui de M. Edison qui aurait fourni les meilleurs résultats. Voici ce que nous lisons, en effet, dans le Telegraphic Journal du 1er mai 1878 (p. 187): «Le 2 avril dernier, on expérimenta le téléphone à charbon de M. Edison entre New-York et Philadelphie, sur une des lignes si nombreuses de la compagnie de l'Ouest Union. La ligne avait une longueur de cent six milles, et dans presque tout son parcours elle longeait les autres fils. Or les effets d'induction déterminés par les transmissions télégraphiques à travers les fils voisins, et qui étaient suffisants pour empêcher l'audition de la parole dans tous les téléphones essayés, furent sans influence quand on employa le téléphone d'Edison avec deux éléments de pile et une petite bobine d'induction, et MM. Batchelor, Phelps et Edison purent échanger facilement une conversation. Le téléphone magnétique de M. Phelps regardé comme le plus puissant de son espèce, donna même de moins bons résultats.»
Dans des expériences faites entre le palais de l'Exposition de Paris et Versailles, la commission du jury a pu constater les mêmes résultats avantageux.
Téléphones du colonel Navez.—Le colonel d'artillerie belge Navez, l'auteur du chronographe balistique bien connu, a cherché à perfectionner le téléphone d'Edison en employant plusieurs disques de charbon au lieu d'un seul. Suivant lui, les variations de résistance électrique produites par les disques de charbon, sous l'influence de pressions inégales, dépendent surtout de leur surface de contact, et il croit en conséquence que plus ces surfaces sont multipliées, plus les différences en question sont considérables, comme cela a lieu quand on polarise la lumière avec une pile de glaces. Les meilleurs résultats ont été obtenus par lui avec une pile de douze rondelles de charbon. «Ces rondelles, dit-il, agissent bien par leurs surfaces de contact, car il suffit de les séparer par des rondelles d'étain interposées, pour détruire toute articulation de la parole reproduite[13].»
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Fig. 29.
Pour éteindre les vibrations musicales nuisibles qui accompagnent les transmissions téléphoniques, M. Navez emploie, comme lame vibrante du transmetteur, une lame de cuivre recouverte d'argent, et pour lame vibrante du récepteur, une lame de fer doublée d'une plaque de laiton, le tout soudé ensemble. Il emploie d'ailleurs des tubes de caoutchouc munis d'embouchures et de conduits auriculaires, pour la transmission et la réception des sons, et les appareils sont disposés à plat, sur une table. À cet effet, le barreau aimanté du téléphone récepteur est alors remplacé par deux aimants horizontaux agissant par un pôle de même nom sur un petit noyau de fer qui porte la bobine et qui se trouve placé verticalement entre les deux aimants. Il emploie naturellement une petite bobine de Ruhmkorff, pour transformer l'électricité de la pile en électricité d'induction.
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Fig. 30.
Les figures 29 et 30 représentent les deux parties de ce système téléphonique. La pile de charbon est en C, fig. 29; la lame vibrante en LL, et l'embouchure E, adaptée à un tube en caoutchouc TE, correspond par le dessous à la lame vibrante. La pile de charbons est réunie métalliquement au circuit par une tige de platine EC, et la lame vibrante communique également au circuit par l'intermédiaire d'un bouton d'attache. Dans le téléphone récepteur, fig. 30, la partie supérieure est disposée à peu près comme dans les téléphones ordinaires; seulement, au lieu d'une embouchure, on a adapté à l'appareil un conduit auriculaire TO. Les deux aimants qui communiquent une polarité uniforme au noyau de fer N portant la bobine d'induction B, sont en A, A' et ont la forme de fers à cheval; on en voit un en coupe en D du côté droit, et l'autre ne montre en C que la courbe du fer à cheval. Les deux boutons d'attache de ce récepteur correspondent aux deux extrémités du fil induit de la bobine d'induction supplémentaire, et les deux boutons d'attache du transmetteur correspondent aux deux bouts du fil primaire de cette bobine et à la pile qui est interposée dans le circuit près de cet appareil.
Téléphones de MM. Pollard et Garnier.—Le téléphone à pile construit par MM. Pollard et Garnier est différent de ceux qui précèdent, en ce qu'il met simplement à contribution deux pointes de mine de plomb portées par des porte-crayons métalliques, et que ces pointes sont appliquées directement contre la lame vibrante avec une pression qui doit être réglée. La fig. 31 représente la disposition qu'ils ont adoptée, et qui du reste peut être variée d'une infinité de manières.
LL est la lame vibrante en fer-blanc au-dessus de laquelle se trouve l'embouchure E, et P, P' sont les deux pointes de graphite munies de leur porte-crayons. Ces porte-crayons portent à leur partie inférieure un pas de vis qui, étant engagé dans un trou fileté pratiqué dans une plaque métallique CC, permet de serrer plus ou moins les crayons contre la lame LL. Cette plaque métallique CC est composée de deux parties juxtaposées qui, étant isolées l'une de l'autre, peuvent être mises en rapport avec un commutateur cylindrique au moyen duquel on peut disposer le circuit de diverses manières. Ce commutateur étant pourvu de cinq lames, permet de passer presque instantanément d'une combinaison à l'autre, et ces combinaisons sont les suivantes:
1o Le courant entre par le crayon P, passe dans la plaque et de là dans la ligne;
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Fig. 31.
2o Le courant arrive par le crayon P', passe dans la plaque et de là dans la ligne;
3o Le courant arrive à la fois par les crayons P et P', se rend dans la plaque et de là à la ligne;
4o Le courant arrive par le crayon P, va de là à la plaque, puis dans le crayon P', et de là à la ligne.
On a donc de cette manière deux éléments de combinaison que l'on peut utiliser séparément ou en les associant en tension ou en quantité.
Lorsque les crayons sont bien réglés et donnent une transmission bien régulière et de même intensité, on peut étudier facilement les effets produits quand on passe de l'une des combinaisons à l'autre, et l'on constate: 1o que pour un circuit court, il n'y a pas de changement appréciable, quelle que soit la combinaison employée; 2o que quand le circuit est long ou présente une grande résistance, c'est la combinaison en tension qui a l'avantage, et cela d'autant plus que la ligne est plus longue.
Ce système téléphonique, comme du reste les deux précédents, met à contribution une machine d'induction pour transformer les courants voltaïques en courants induits; nous parlerons plus tard de cet accessoire important de ces sortes d'appareils.
Quant au téléphone récepteur, la disposition adoptée par MM. Pollard et Garnier est à peu près celle de Bell. Seulement ils emploient des lames de fer-blanc et des hélices beaucoup plus résistantes. Cette résistance est, en effet, de cent cinquante à deux cents kilomètres. «Nous avons toujours reconnu, disent ces messieurs, que quelle que soit la résistance du circuit extérieur, on a avantage à augmenter le nombre des tours de spires, même en faisant usage du fil no 42, qui est celui que nous avons employé de préférence.»
Téléphone à réaction de M. Hellesen.—M. Hellesen pensant que les vibrations produites par la voix sur un transmetteur téléphonique à charbon, devaient se trouver amplifiées si la pièce mobile du rhéotome était soumise à une action électro-magnétique résultant de ces vibrations elles-mêmes, a combiné un transmetteur fondé sur ce principe que nous représentons fig. 32, et qui a l'avantage de constituer lui-même l'appareil d'induction destiné à transformer les courants voltaïques employés. Cet appareil se compose d'un tube de fer vertical appuyé sur une masse magnétique NS et entouré d'une bobine magnétisante BB au-dessus de laquelle est adaptée une hélice d'induction en fil fin II, mise en communication avec le circuit. À l'intérieur du tube, se trouve un crayon de plombagine C, disposé dans un porte-crayon qui peut être élevé ou abaissé au moyen d'une vis de rappel V adaptée au dessous de la masse magnétique. Enfin, au-dessus de ce crayon, est fixée une lame vibrante en fer LL, qui est munie à son centre d'un contact de platine communiquant à la pile; le circuit local est alors mis en rapport avec le crayon par l'intermédiaire de l'hélice magnétisante B, dont un bout est à cet effet soudé sur le tube de fer.