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Les caquets de l'accouchée: nouvelle édition revue sur les pièces originales

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—N'est-ce point, dit madame Charles, femme du medecin, celuy qui estoit si fort chargé de chaligourny?

—Non, Madame, respondit la changeuse; c'est un de leurs confrères, qui fut receu trois jours auparavant.

—Qu'appellez-vous chaligourny? demande la maistresse des requestes.

—Madame, dit la medecine, c'est une intemperie froide et humide qui a attaqué les anciens et nouveaux officiers de ce bureau.

Quod sinifrimity là-dessus, Madame, dit une mercière du palais.

—Plaist-il, Madame? respondit l'autre.

—Je dis, reprent la mercière, que cela n'importe, puisqu'ils retournent en leurs maisons bien guaris.

—Madame, j'en suis fort contente, dit madame Charles; mon mary est très bien satisfaict.

La mercière, qui estoit en train et sembloit estre interessée, ou au moins obligée de soustenir le party de ses chalans, ne se peut empescher d'attaquer la changeuse. Mais Madame, lui dit-elle, il me semble qu'au paranymphe[165] que vous avez fait de vostre nouveau parent, vous avez oublié une qualité qui doit estre relevée: vous n'avez rien dit de son bon naturel. Pour moy, je le trouve bon comme le bon pain. Je m'asseure que, s'il trouvoit vostre cousine en faisant l'amour, il la traiteroit encore plus favorablement que n'a fait le comte de Vertus sa femme; et qu'au lieu de mal traitter celuy qui auroit rendu ce bon office, il le recueilleroit à bras ouverts.

—Madame, repart la changeuse assez brusquement, ma cousine n'en viendra jamais là; nous ne pechons point en nostre race de ce costé. Hé, grand Dieu! d'où le tiendroit-elle? Son père, depuis la mort de sa première maistresse, a gardé inviolablement la foy à sa femme, et sa mère n'a jamais eu seulement une mauvaise pensée: la pauvre femme est trop devote; elle a tousjours le nom de Jesus à la bouche.

Toute la compagnie se mit à rire, reservé madame la maistresse des requestes, qui se tenoit sur le serieux; elle pria neantmoins la mercière de leur dire l'histoire du comte de Vertus.

—Helas! Madame, dit la mercière, est-il possible que vous seule en ceste ville n'en ayez point ouy parler? C'est une tragedie commune dans Paris; je l'ay ouy dire à mille personnes, qui s'accordent tous à une mesme verité: que le comte de Vertus[166], ayant surpris dans la ville d'Angers des lettres qu'escrivoit madame sa femme à un gentil'homme angevin, nommé Sainct-Germain, et la response dudict Saint-Germain, il avoit envoyé prier ledit sieur de venir soupper chez luy; et, après soupper, luy ayant monstré et faict recognoistre leurs missives, l'auroit fait assassiner en presence de sadite femme, qu'il fit entrer après dans un carosse, la mena en une sienne maison forte, où il couche avec elle, et la caresse à l'ordinaire, comme si rien ne s'estoit passé.

—Jesus! dit une conseillère du Chastelet, que les grands seigneurs sont heureux dans les petites villes! Ils entreprennent tout sans contredit. Si le bon seigneur avoit fait cela à Paris, il seroit au Chastelet il y a long-temps, où on lui feroit son procez en toute diligence.

—Ne me parlez pas de vostre justice, dit une conseillère de la Cour à celle du Chastelet; vos Messieurs n'ont-ils pas bien operé en l'affaire de Cotel? Le seul respect d'une robbe qu'il a quitté leur a fait peur. Je parle contre moi-même, mais veritablement l'acte meritoit une punition exemplaire. Il faut faire comme l'on fait à la cour, se roidir au bien de la justice, sans acception ni exception de personnes. Ne voyez-vous pas comme le pauvre monsieur Demacho, conseiller aux requestes, a fait mettre son fils prisonnier, pour luy faire espouser une fille qu'il a desbauchée?

—Madamoiselle, repart la conseillère du Chastelet, si les officiers du Chastelet alloient du pair avec messieurs du Parlement, desquels ils relèvent et reçoivent toute leur authorité, ils reformeroient bien souvent beaucoup d'abus qui s'y commettent, aussi bien qu'aux justices inferieures. Est-ce bien faire la justice, de permettre qu'un gentil'homme donne un soufflet à un conseiller, dans la gallerie du Palais?

—Madamoiselle, dit la conseillère du Parlement, je sçay bien comme ceste affaire se passa. Sans la prière d'un ancien conseiller de la grand chambre, qui fit la satisfaction tout à l'heure à monsieur Deverderonne, asseurement il n'eust point reçeu une moindre punition que celuy qui parla trop haut devant feu monsieur le président Forget[167]; et s'il luy reste quelque suject de plainte, ce doit estre contre l'huyssier, qui ne voulut point obeïr au commandement qu'il luy fit de le conduire prisonnier.

—Et quoy! Madamoiselle, dit une conseillère des enquestes, n'est-ce pas une grande honte que les jeunes conseillers ne soient point recognus? Il semble qu'ils ne soyent pas du corps du Parlement, et que tout se termine à la grand chambre. Ne devroit-on pas punir cet huissier pour sa desobeyssance? Si messieurs les conseillers des enquestes croyent mon mary, ils en feront leurs plaintes à monsieur le premier president[168]. Estant premier president de tout le Parlement, il rendra partout esgallement la justice, et contraindra tous les ministres de rendre l'honneur et le respect à tous ceux qui la distribuent.

—Madamoyselle, repart la femme d'un maistre d'hostel de chez le roy, il le faut donc prendre en autre saison: il ne pense aujourd'huy qu'à l'amour; il est tellement passionné d'une belle dame de la royne, qu'il mesprise l'exercice de sa charge, et, ne se souciant plus de l'impression de la cire, reserve sa grande gallerie[169] pour dancer seulement et faire le bal.

—Madame, respondit la conseillère, j'ay bien ouy parler de ce que vous dites; mais croyés-moy, qu'il veille tousjours au bien de la justice, et veut absolument que les anciens reiglements s'observent. Le grand mal procède de ce que tous les messieurs de la grand chambre n'en demeurent pas d'accord, et que bien souvent il est tondu. Tout est perverty en ce temps-cy, il n'y a point de difference entre les juges et les parties. Messieurs les conseillers font la charge des advocats. Monsieur Portail, cet ancien senateur, qui devroit servir d'exemple, dresse luy-mesmes le factum de madamoiselle sa femme, le remplit d'invectives et reproches contre sa partie, en termes si couverts et si obscurs que la Cour ne les peut entendre; et lors qu'elle le prie de les interpreter, et declarer particulierement ce qu'il a desiré de Rose, son valet, quand il le prit pour l'emonder et repurger en toute sorte de façons sans exception, il respond sans respect que c'estoit pour lui torcher le cul, et que, si Rabelais a soustenu que le souverain bien de l'homme consiste à se torcher le cul du col d'un oye, ou d'un cygne, qu'à plus forte raison il recevroit plus de contentement se le faisant torcher de roses. Tout est aujourd'huy permis et toleré. Croyriez-vous que tout ce qui se fait de plus secret au Parlement est maintenant divulgué, et que les distributions mesmes, qui ne se pouvoient faire que chez messieurs les presidens à la sourdine, pour empescher la brigue des gros procez, se font aujourd'huy en plein marché? Monsieur Tardieu, de la première, l'asseurera par tout le monde: il en receut une fort expresse, il n'y a que huict jours, par les pages de monsieur de Nemours.

—Madamoiselle, vous trouverez bon que je vous die, dit une maistresse des Comptes, que quoy que nous soyons en robbe courte, l'on ne voit point de ces desordres à la Chambre: tous d'un commun accord se portent à ce que veut monsieur le premier president, l'on n'oseroit rien entreprendre sans son consentement, ny mesme en son absence faire assembler les semestres, s'il ne le trouve bon. Aussi, de son costé, il n'a autre soing qu'à relever l'authorité de sa charge, et faire faire la justice. Il ne pardonneroit pas à son propre fils; quelque prière que luy aye faict monsieur le duc de Chaunes, il veut que l'on achève le procez de monsieur Monsigot[170]. La consideration de sa qualité de maistre ordinaire ne peut rien obtenir.

—Mais à propos, Madamoiselle, dit la femme d'un secretaire du roy, de Saincte-Opportune, ne voulez-vous pas le faire sortir? Sur ma foy, je ne sçaurois m'empescher de dire que vous lui faictes tort; c'est le plus honneste homme qui se peut dire. Mon mary luy a d'estroites obligations[171]; il luy avoit promis de le mettre en credit bien avant, et moy en particulier je luy suis redevable: il est cause que j'ay une porte cochière.

—Madamoiselle, dit la maistresse des Comptes, j'en suis faschée pour l'amour de vous, car asseurement on luy va faire son procez.

—Madamoiselle, dit la secretaire, à l'extremité, s'il suit le conseil de mon mary, il se deffendra bien; il a de fort bons amis[172]. Monsieur le president de Chevry[173] seroit ingrat s'il ne l'assistoit de tout son pouvoir: il l'a voulu faire secretaire d'Estat pour prendre sa place de president des Comptes.

—Je pense veritablement, dit la maistresse des Comptes, qu'il le portera; mais il a contre luy un autre secretaire d'Estat plus puissant, monsieur le president Doguerre[174], qui a sa brigue plus forte; il luy peut faire beaucoup de mal, par la grande intelligence qu'il a avec monsieur le premier president.

—Madamoiselle, dit la secretaire, si on le presse trop, il recourra à sa bonne maistresse madame la duchesse de Chevreuse[175].

—Je pense, dit la maistresse des Comptes, qu'elle n'a pas aujourd'hui grand credit[176], encore qu'elle se veuille faire appeller madame la princesse; je sçay-bien qu'il y eut l'autre jour un grand bruict au Louvre pour cela, et qu'on lui fit des bonnes reprimandes.

—Je ne vous respondray rien là-dessus, dit la secretaire; mais je suis très asseurée qu'elle peut beaucoup sous le nom de monsieur son mary, particulièrement envers monsieur le chancelier, qui est la vraye partie, pour les offres que luy fit ledit duc de Chevreuse, quand on nomma monsieur le chevalier de Sillery ambassadeur[177], contre les menaces de messieurs de Vandosme, qui soustenoient le party du marquis de Cœuvre, leur oncle[178]; et de fait, je sçay bien que, sur la promesse qu'on luy feit de la part dudit sieur Monsigot, que quand il reviendroit en plus grande fortune qu'il n'avoit jamais esté il ne parleroit plus des chiffres ny de l'estat de secretaire des camps et armées, monsieur le chevalier manda à Laffemas[179] qu'il feignist de cesser la poursuitte, et la fist faire sous le nom d'un autre.

—M'amie, dit la maistresse des Comptes, quand tout le monde l'auroit quitté, monsieur le president Aubery[180] ne l'abbandonnera pas.

—Madamoiselle, dit la secretaire, s'il n'y avoit que luy, il n'auroit que faire de craindre; il est aysé à recuser, à cause de la composition qu'il faict avec des assignez d'un mandement de l'espargne, pour laquelle il eust un adjournement personnel au parlement. Hé! pleust à Dieu seulement qu'il puisse gaigner le semestre de juillet! J'espère, quoy que l'on die, qu'il sortira heureusement de son affaire, et emportera la victoire sur ses ennemis.

—Madamoiselle, dit la femme d'un autre secretaire du roy, de la ruë des Prouvelles, il a beau faire et se deffendre, on a resolu de le perdre[181]; j'ay sçeu de monsieur L'Escuyer, mon bon voisin, qui ne me voudroit point mentir, qu'on ne luy pardonnera jamais[182], et qu'on a bien preveu à ce que vous dites par l'arrest d'interdiction que l'on a donné contre luy, les deux semestres assemblez, et la defference que l'on a tousjours rendu au semestre auquel vous esperez tant de faveur, les ayant tousjours fait advertir quand on y a voulu travailler, dequoy il y a bons procez-verbaux dressez par les huissiers, pour les engager d'honneur à ne rien entreprendre en cet affaire que les semestres assemblez: si je le cognoissois particulièrement, je luy donnerois un conseil plus salutaire, le forçant de se servir de son abolition.

—Madamoiselle, dit la secretaire de Saincte-Opportune, il le voudroit bien, mais le mal'heur veut qu'il n'est plus dans le temps.

—Il est bien empesché! respond l'autre; qu'il s'addresse à M. Potel[183]: il est homme d'expedient, il luy signera aussi librement des lettres de surannation, ou telles autres qu'il souhaitera, comme il faict des advocats du conseil; il tente tout pour de l'argent.

—Madamoiselle, dit la secretaire de Saincte-Opportune, que me dites-vous? Si cela se cognoissoit, on luy feroit son procez.

—Madamoiselle, respond l'autre, il dit hardiment qu'il ne craint rien, et que, quelque declaration qu'aye donné monsieur Mangot[184] de n'avoir eu le loisir de faire des advocats pendant qu'il a eu les sceaux entre les mains, qu'il ne laissera pas d'en faire d'autres, et puis que monsieur le maistre des requestes du Lyon-Ferré entreprend d'adjouster à des arrests signez par monsieur le chancelier, il hazardera librement d'en faire passer desquels on ne fera pas tant de bruit.

La maistresse des requestes s'offença, et leur dit en cholère qu'elle ne le croyoit point, et que si cela venoit à la cognoissance de messieurs Marescot[185], du Tillet[186] et Foule, ils ne le souffriroient jamais, et en feroient faire justice. Ceste rumeur fit rompre la compagnie; chacun prit congé, et se retira. Je sortis incontinent après, et me rengeay auprès de l'accouchée, pour luy monstrer mon ample memoire; je vous laisse à penser si ce fut sans rire. Elle me pria avec instance de soupper chez elle; je la prie de m'en excuser, estant engagé d'un autre costé.

LE PASSE-PARTOUT

DU

CAQUET DES CAQUETS
DE LA NOUVELLE ACCOUCHÉE.

MDCXXII[187].

Selon le dire sententieux d'un poëte très renommé parmy ceux à qui l'experience faict voile en leurs actions plus relevées, il n'y a rien qui ne suive son temps et sa mesure. Tout ce qui est çà bas de corruptible prend son train et sa cadence au niveau de son estre; bref, tout ce qui emprunte sa lumière souz les favorables auspices du temps et de la fortune se trouve et fait ses effects à proportion de son instant et de son temps, jusques là que les moins experimentez recognoissent à veuë d'œil, dit-il, les actions humaines estre tributaires à la censure du public, et au temps qui court pour le jourd'huy.

Qu'ainsi ne soit, pendant la minorité du roy, qu'est-ce qu'un marquis d'Ancre ne faisoit point? Depuis sa mort, M. de Luynes, que n'a-il point entrepris au prejudice de la couronne et du bien public? De Luynes mort, comment la cour a-elle esté bastie et composée? En effect, omnia tempus habent; et, comme j'ay ouy très bien dire à un medecin, heritier en partie de la bosse et du sçavoir de son père, qui tastoit le poux de madame l'accouchée, à cause des assauts que la nature luy faisoit, nous devons ceder aux loix de l'amour, et toutesfois rechercher des moyens pour luy faire la nicque, si faire se peut. Ce qui ne fut pas si tost entendu par la palfrenière des bas guichets qu'elle dit à M. le medecin: Monsieur, monsieur, il vaudroit mieux que vous apprinssiez à dancer la sarabande, comme deffunt votre père, que de conseiller les dames de se servir de drogues d'apotiquaire pour passer les tranchées d'amour. Bran, bran! il ne faut que ces meneurs d'ours pour faire finir le monde, et si au diable s'ils viendront deux fois en un logis sans tendre la patte par derrière.

Sur quoy M. le medecin, qui n'a pas grand replique de son naturel, print congé de l'accouchée fort humblement, avec un estonnement nompareil de ce que ceste garde disoit contre luy; après la sortie duquel[188] quatre dames de qualité arrivèrent en la chambre de l'accouchée, lesquelles, après avoir fait chacune la reverence à la mode, prindrent place selon leur qualité[189]. Ce qu'estant faict, la veufve d'un maistre des requestes, fort affligée de l'ancienne desbauche d'une sienne fille, mariée à un conseiller de la cour, homme prudent et fort bon justicier, jetta trois ou quatre souspirs, et, voulant neantmoins les simuler, commença de dire à la compagnie: Hé bien! mes dames, apprenez-vous des nouvelles de la cour? Le roy a-il eu Montpellier, Montauban et la Rochelle, comme l'on dict?

A quoy sur-le-champ la femme d'un tresorier de l'Espargne respondit que ces morceaux-là ne s'avalloient pas si aysement, parcequ'ils s'estoient grandement fortifiez, et, d'autre part, que leurs voisins courroyent à toute bride pour empescher les desseins de Sa Majesté, et pour dissiper ses forces si l'on n'y prenoit garde.

—Pourtant j'ai appris, dit la femme d'un conseiller du Chastelet, qu'ils ont traicté avec le roy, et qu'ils ont asseuré, par une submission que l'on n'eust jamais creu, leurs biens, leur honneur et leur fortune, mesme le sieur duc de Rouan a esté contrainct de baiser le babouyn[190].

—Quelle apparence de traicter avec des rebelles qui ont desjà faussé la foy promise, dict la femme d'un auditeur des comptes de la parroisse de S.-Mederic! ce seroit tousjours à recommencer; aussi je ne puis croire que le roy ait accordé avec la cabale huguenotte, que ce ne soit souz des conditions bien considerables, et qu'elle n'ait dict le peccavit plus de trois fois auparavant: car à leur subject Sa Majesté a receu mille et mille incommoditez, et a esté tellement trompée et abusée qu'il se trouvera, au bout du compte, que la couronne ait engagé plus de trente millions, et le tout par l'astuce et intelligence de ceux qui ont les charges plus honorables, lesquels se sont servis de l'occasion pour jouër à pincer sans rire.

—Comment! Madamoiselle, voulut repliquer la tresorière, trouvez-vous qu'on ait fraudé le roy au siége de Montpellier, comme on a faict à celuy de Montauban?

—Je ne veux pas vous dire absolument qu'on l'ait trompé et abusé de la sorte, luy respondit ceste femme d'auditeur; mais il n'y a si simple qui ne juge qu'il y a eu de la trahison lorsque le duc de Fronsac a perdu la vie[191] et que le duc de Montmorency a esté blessé[192], car on sçait bien que la jeunesse veut tousjours paroistre, principalement où l'honneur engage les courages; ce qu'ayant esté recongnu par ceux qui sont auprès du roy, et qui n'ont jamais triomphé qu'aux despens d'autruy, il est à croire qu'on s'est efforcé de faire de nouveaux princes et de nouveaux seigneurs[193].

—On tient pourtant, dit la maistresse des requestes, qu'il n'y a personne auprès du roy qui puisse aspirer plus haut que le grade dont il est honnoré: car, si l'on considère la personne du connestable, c'est tout ce qu'il a peu meriter, et encore j'estime qu'il doit bien en toute sa vie payer les interests d'une telle courtoisie. Pour Desplan[194], c'est un nouveau coureur de fortune, qui se doit tenir tout goguelu de son bon-heur.

La conseillère, qui sçait comment il est parvenu, se print à sourire, et souriant dict à la compagnie: Certainement c'est un bon valet; il a bien servy son maistre, ce M. Desplan.

La maistresse des requestes, qui se plaist par fois à gausser, dit là-dessus: Vous faictes tort à M. Desplan, madamoiselle, veu sa bonne mine et son merite.

—Ce n'est pas avoir beaucoup de merite, repliqua la conseillère, de vouloir aspirer à ces honneurs dont on est indigne, et, pour y parvenir au prejudice des seigneurs de remarque et de la trop grande bonté du roy, de se servir de moyens reprochables à l'infiny. Encores si c'estoit un gentil-homme d'extraction, qui recherchast la bienveillance d'un favory à fin d'accroistre sa maison et de la rendre illustre, l'on imputeroit le project d'un tel dessein à l'ambition, qui fournit des aisles au courage et de vent en abondance pour singler jusques au havre de la fortune. Mais quoy! sa première condition estoit d'estre lacquais, mauvais gouvernement au reste, et, après avoir quitté la mandille, a faict en sorte de se fourrer au regiment de Navarre, où estant, le sieur Cadenet allant visiter M. le Prince lorsqu'il estoit au chasteau de Vincenne, il fit en sorte de l'aborder, se servant des astuces de son pays[195] et du depuis le sieur de Luynes le print en affection pour des raisons dont sa memoire seroit par trop ternie si l'on en venoit à la justification; tant y a qu'il a esté par ce moyen bien venu auprès du roy, jusques là que Sa Majesté l'a gratifié d'un brevet de mareschal de France[196].

Là-dessus la femme de l'auditeur dict tout haut: Je ne m'estonne plus de ce qu'on parle tant de ce Desplan, puis que sa bonne fortune vient par le moyen du sieur de Luynes.

—Voilà ce qui en est, répliqua la tresorière, et si je vous jure que ce que j'en dis n'est point pour mal que je luy vueille; au contraire, j'estime ceux qui s'eslèvent de peu, et lesquels d'un neant bastissent une fortune relevée.

—Mais, à propos, dit la conseillère, que deviendra le sieur Courbouzon[197] après la reduction de la Rochelle, puis qu'il a tenu pied à boule au service du roy depuis le temps qu'il est employé?

—Vrayement, respondit la femme de l'auditeur, il ne se faut point donner peine de luy, ny se soucier de ce qu'il deviendra non plus que des autres, car ayant mandé à l'hostel de Nemours la valeureuse deffaite qu'il a faict de dix ou douze habitans de la Rochelle sortis de la ville pour abbatre leurs maisons proche les murailles, et que ce bel exploict a esté crié sur le Pont-Neuf[198], asseurement il ne donnera pas sa bonne fortune pour une pièce de pain.

—Il pourra bien y donner ordre de bonne heure, dit la maistresse des requestes, s'il ne veut demeurer arrière: car à présent que la cour est remplie de cadets de haut appetit et de jeunes favoris, chacun d'eux voudra partager au bonheur et aux qualitez, en sorte qu'après la guerre l'on verra autour du roy plus de demandeurs que de deffendeurs, et, pour dire, il sera très difficile d'aborder seulement les galleries du Louvre.

—M. de Nemours l'affectionne trop, dit la tresorière, pour ne luy procurer quelque honnorable fortune, en recompence d'un si signalé service; et puis le naturel de ce prince est si benin et si louable qu'il le recompenseroit plustost de son propre bien qu'il vesquist le reste de ses jours avec un mecontentement.

Sur ces entrefaites, la garde de l'accouchée voulut mettre son nez et discourir de monsieur de Nemours à bonds et à vollée[199]; mais le respect que la compagnie portoit à son rang et à sa qualité fut cause qu'on luy ferma la bouche, sinon qu'on lui permit de discourir des façons de faire de la cour, voyant que le cœur luy en disoit: tellement qu'ayant prins pareatis de ce faire, elle ne fut guère honteuse de declarer son secret, qui estoit qu'au siége de Montpellier, lors que le roy perdit tant de braves seigneurs et gentils-hommes, qu'il estoit demeuré à ceste meslée un certain homme sur la place qui luy faisoit porter beaucoup d'ennuy, qui ne se pourroit jamais terminer que par la mort, quand toutes les meilleures fortunes luy arriveroyent, auxquelles neantmoins elle disoit ne pouvoir aspirer à cause de son aage, et en consideration de ce qu'on la cognoissoit quatre grands lieuës par delà les bornes de la raison.

A ce beau discours, la compagnie se print à rire, et celle qui esleva un ton plus haut, ce fut madame l'accouchée, qui mesme en petta de resjouyssance pour le moins huict ou dix fois consequtivement, à cause que du temps que ce drosle estoit auprès de ladite garde, et que sa marmitte boüilloit à ses despens, on n'eust osé lui dire bran en son nez, tant qu'elle faisoit ma commère l'entenduë. Ainsi fallut peu de chose pour sortir de la carrière et pour rompre de si bons discours qui se tenoient auparavant avec toute sorte de verité; toutesfois, si tost qu'il fut finy, nostre maistresse des requestes, qui se plaist d'estre entretenuë en compagnie aux despens de l'honneur d'autruy, s'efforça par tous moyens de remettre en lice les autres, tant sur les traictez de guerre et de paix que sur les fraudes et malversations des chefs et conducteurs de l'armée, et sur ce qu'on avoit tant parlé du sieur de Villautray[200] et de ses commis.

Sur quoy la tresorière, grandement engagée dans le combat, ne peut s'empescher de respondre que volontiers la fortune est enviée aussi bien que les beautez, et que tout ainsi que les esprits voluptueux faisoient recherche des dons plus gracieux de la nature, de mesme que l'avidité des envieux les portoit à des flatteries et à des mesdisances, pour faire faire des recherches candides contre l'obligation que l'on a fraternellement à son prochain: tellement que, si l'on avoit tasché d'obscurcir l'honneur du sieur Villautray, que ce n'avoit point esté pour l'affection qu'on portoit au service du roy, mais bien pour une rancune particulière de ce qu'il n'avoit voulu desbourcer des deniers qui n'eussent esté employez dessus ses comptes.

—Voilà une belle eschappatoire! dit la conseillère; je vous diray, Madamoiselle, chacun est tenu de deffendre son party, et de conserver jusques aux plus pressantes extremitez, quand mesme il n'y auroit aucune apparence de raison, principalement au temps où nous sommes, auquel il est plus necessaire de dissimuler que de dire verité, et de faindre dans les actions que de faire esclatter ce qui pourroit estre terny; et qu'ainsi ne soit, n'est-il pas vray que si l'on parloit en compagnie du sieur Fabry[201], qui du temps du feu roy se fit dire mort, et pour lequel on porta une buche dans le tombeau, craignant qu'il ne fist la capriolle, n'est-il pas vray que vous direz que cela n'est pas possible, et que ceste invention auroit esté recherchée par des justiciers pour rendre odieux ceux qui manient les finances? Aussi je m'asseure que, si l'on enfonce le discours sur ce que le sieur de Villautray, pour se faire dire innocent du crime de peculat, qu'il a passé par la porte dorée, que vous en aurez un grand despit; c'est pourquoy, pour mon regard, je brise là-dessus, et laisse à discourir de ce qui en est à ceux qui ont juste suject de s'en plaindre.

—Vrayement, Madamoiselle, c'est bien à vous, à faire de parler des financiers comme vous faictes, vous qui ne paroissez dans le monde qu'aux despens des pauvres parties, dont vostre mary est par foi lse juge; vous qui n'auriez pas dequoy nourrir un meschant[202] lacquais sans les presens que l'on vous faict, au prejudice du droict d'autruy, qui est violé la plus part du temps; vous, dis-je, qui à peine pourriez avoir un simple cotillon de taffetas de vostre estoc, n'estoit qu'avec les espices on vous fournit de sauce. Je n'en veux dire davantage: que chacun regarde à soy.

Sur ce, l'accouchée fit en sorte de rompre le discours, craignant que la conseillère et la tresorière vinssent aux prises; et, pour empescher que cela n'arrivast, elle fit feinte de se trouver mal, qui fut cause que l'on ne parla plus des charges et des qualitez, et sur ces entrefaites arriva Mathurine[203], qui courtoisement fit la reverence, à chacun particulièrement dès l'entrée de la chambre, puis s'approcha du lict de l'accouchée pour s'enquerir de sa disposition, après quoy elle print place et en compta des meilleures pour esgayer la compagnie, donnant neantmoins en passant un lardon à celles qui le meritoyent.

Madame de Verneuil, qui naguères estoit arrivée, la voulut faire jazer pour s'en donner du passe-temps; mais elle, qui est aussi malicieuse qu'un vieux singe, après avoir recité quelques sornettes, elle ne feignit de rechercher le moyen de la picquer, parlant de la chasteté des courtisanes, et sur tout mettant sur le tapis le merite et les bonnes graces de monsieur de Bassompierre, pour raison desquelles le roy l'avoit qualifié d'un brevet de mareschal de France: ce que l'on feignit pourtant d'escouter, affin d'obliger aucunement ladite marquise, qui ne peut l'aymer à cause de sa sœur. Mais aussi, elle partie, Mathurine fut conjurée à double carillon de dire au vray si ledit sieur de Bassompierre seroit mareschal de France[204]; et qui fut la plus portée à ceste curiosité, ce fut madamoiselle nostre conseillère, laquelle, outre sa brigue qu'elle faict, par le moyen de ses amis, de faire mettre monsieur Viguier aux mauvaises graces de monsieur le Prince, elle croit que si la cour change de face, que son mary sera garde des sceaux; et de la nommer, le respect des dames me le deffend, laissant au public la curiosité de s'en enquester à ceux qui mettent en contrerolle ses actions.

Suivant donc que Mathurine fut interrogée si monsieur de Bassompierre seroit mareschal, il faut croire qu'elle degoisa de luy plusieurs discours, et les causes qui avoient meu le roy de le qualifier de ce grade honorable: premièrement, que ses perfections y avoient fort operé, et puis ses agreables services, notamment ceux qu'il avoit rendus à Sa Majesté au siége de Montauban l'an passé, quand par son secours il mit en vraye deroute les ennemis, qui souz un mot feint et non retenu venoient au secours des assiegez.

—Hé quoy! dit là-dessus la femme de l'auditeur, ne faut donc plus qu'un acte remarquable pour s'eslever auprès du roy? Vrayement, si cela a lieu, il y aura d'oresnavant plus de mareschaux qu'il y aura d'asnes à ferrer.

—Pardonnez-moi, Madamoiselle, dit la maistresse des requestes, et si je vous dis que vous avez un peu tort de parler de monsieur de Bassompierre de la sorte, car il est de fort bon lieu, et puis il y a long-temps qu'il vogue en cour, sans faveur et sans qualité; et d'avantage, sa bonne mine ne vaut-elle pas quelque chose de meilleur et de plus honnorable que d'avoir tousjours des Suisses pendus à sa ceinture?

Sur ce, Mathurine dit tout haut que ses desseings n'estoient pas limitez à ce seul but, mais qu'il se promettoit d'estre connestable après la mort de monsieur Desdiguières, et qu'il le voyoit avec tant de certitude que, pour en donner l'impression à toute l'armée, tout son desduict estoit attaché aux exercices militaires, et avec plus d'affection qu'il n'eust jamais en temps de paix de faire relever sa moustache.

—Hé! que deviendroit monsieur de Crequy[205], dict la tresorière, luy qui est aussi vaillant que son espée, qui est du poil d'un martial et qui mesmes en porte les marques honorables sur le visage? Ce seroit faire tort à sa generosité que de le priver de la recompense deuë à un grand courage comme le sien, ou, si cela luy manquoit un jour, je dirois que les astres voudroient faire la guerre à leur superieur, qui luy fut tant favorable pour renverser Don Philippin sur le pré[206]. Mathurine, Mathurine, monsieur de Bassompierre est trop mignard pour beaucoup entreprendre dans la fatigue de la guerre; il vaut bien mieux qu'il se contienne en la qualité de mareschal de France, et prendre à femme madamoiselle d'Antrague, que d'esperer pretendre plus haut; car aussi bien les fortunes sont viagères, et aussi fol est celuy qui pense faire prendre pied ferme à ses desseings, que fut autres-fois sot et maroufle le pauvre Guerin, qui servoit de plaisant à la reyne Marguerite[207].

—Vous vous debattez, Madame, de la chappe à l'evesque, dit l'accouchée; hé! qui soit connestable qui le pourra estre, l'on est aussi bien mordu d'un chien que d'un chat. Nous en avons perdu, graces à Dieu, un qui ne valloit guères; à present, nous en avons un qui ne fera guères mieux. Toutesfois, ce que je trouve de meilleur en luy, c'est qu'il est riche, Dieu mercy, des bons coups qu'il a fait aux eglises du Dauphiné.

—Sa richesse, repliqua Mathurine, devroit aider beaucoup à le faire homme de bien; mais quoy! ce qu'on doibt craindre, c'est qu'un drap retourné ne faict jamais tant de proffict comme s'il estoit à poil.

—Je vous sçay bon gré, dit la maistresse des requestes, de parler ainsi à cœur ouvert, car il est vray, la hare[208] sent tousjours le fagot, et, comme disoit un jour le duc de Rosny au feu roy Henry le Grand, que Dieu absolve, lors qu'il luy demandoit pourquoy il n'alloit pas à la messe aussi bien que lui: Sire, sire, la couronne vaut bien une messe; aussi une espée de connestable donnée à un vieil routier de guerre merite bien de desguiser pour un temps sa conscience et de feindre d'estre grand catholique.

Ce discours finy, toutes les dames prindrent congé de l'accouchée, avec promesses de la revoir le lendemain, ou le premier jour que la commodité leur pourroit permettre; ainsi elles sortirent fort satisfaites de leurs entretiens, et aussi tost entrèrent six autres dames d'une bande, et d'un mesme quartier, lesquelles, ayant faict les salutations requises et necessaires pour la bien seance, trouvèrent les places toutes chaudes; elles ne firent guère mistère de s'y assoir. La première qui commença le caquet, ce fut une nouvelle femme de notaire de la parroisse S.-Jacques-de-la-Boucherie, qui dit à l'accouchée: Jesus! Madame, que vostre teinct est changé depuis que vous estes en couche!

—Comment! respondit l'accouchée, trouvez-vous que je sois laidie beaucoup?

—Nenny vrayement, repliqua la notaire, au contraire; si j'estois que de vous, je tascherois d'estre souvent en couche, tant vous estes devenuë jolie.

—Cela vous plaist à dire, dit l'accouchée; c'est que vous me voulez gratifier, car il n'y a plus de gentillesse en mon faict; si c'estoit vous, encore, il y auroit de l'apparence, car, outre que vous estes belle de vostre naturel, monsieur vostre mary, curieux de vous conserver, mettroit plustost en gage sa vaisselle d'argent que l'on vous a donnée le jour de vos nopces que vostre beau teinct ne fust entretenu.

—Aussi il n'y a rien tel que d'estre jolie, dit sur-le-champ la femme d'un passementier de la ruë de la Vieille-Monnoye. Et sur ceste gentillesse voulant un peu discourir, et de l'appuy qu'on en tire par fois, elle fut interrompuë par la femme d'un quinquallier, homme d'honneur et grandement à son aise, laquelle fut fort peu honteuse de dire qu'elle avoit cy-devant practiqué assez d'inventions pour estre continuée aux bonnes graces d'un receveur, mais qu'elle avoit recogneu que toutes ces sortes de curiositez[209] n'estoient que folies; qu'il valloit mieux s'associer en l'honneste fortune d'un mary que d'attacher ses affections à des frivoles concupiscences, où l'honneur et l'ame se ternissent et se perdent.

Ces petits discours d'amourettes durèrent presque demy-heure entre ces trois coquettes de bourgeoises, et n'eussent esté sy tost rompus, sans que la femme d'un advocat, fort sage et discrette de son naturel, fit en sorte de changer de batterie. Pour venir à l'effect de ce dessein, elle fit feinte de se trouver mal et de s'esvanouir, ce qui les occasionna de prendre garde à elle et d'apporter tous les soulagemens que l'on peut s'imaginer aux foiblesses qui arrivent par fois aux femmes grosses, de manière qu'après estre revenuë en son premier estat, elle fut interrogée de la compagnie si elle estoit grosse, ains elle afferme qu'elle n'avoit garde de l'estre.

—Cela peut pourtant bien estre, dit la femme d'un pourpointier, jalouse au possible de son mary; vous qui estes à vostre aise et qui avez un bon mary qui gaigne bien sa vie et qui vous ayme comme il faut, qui vous empescheroit de le devenir?

—Je ne manque point, graces à Dieu, de toutes ces felicitez que vous me dittes, mais j'ay une affliction qui m'empeschera d'avoir des enfans.

—Hé! quelle affliction, luy repliqua la pourpointière, Madame?

—Madame, quoy que j'aye un bon mary, ce n'est pas tout: j'ay perdu ma mère depuis peu, j'ay une sœur malade sur les bras, et un frère nouvellement rendu des universitez, qui veut se faire advocat un de ces matins, et s'il n'est qu'un sot habillé en homme.

—Voire! advocat! les rues de Paris en sont pavées. Si j'estois que de vous, Madame, je ferois en sorte de le porter dans les finances; car, ayant le bien qu'il a, il pourra paroistre un temps à ses despens pour apprendre, et puis asseurement il prendra aussi bien que les autres.

—Voilà un bon advis, Madame, dit une autre pourpointière qui a quitté la boutique pour besongner en chambre; aujourd'huy il n'y a que d'en avoir; chacun se mocque de la necessité, et le vray moyen de l'eviter pour le jourd'huy, c'est d'estre financier, car infailliblement la guerre ne durera, et pendant le temps il adviendra que les vieux se defferont de leur charge, ou pourront mourir; ce qu'estant, les jeunes s'avanceront et feront leurs bourses.

—Quelque mestier que ce soit, dit la notaire, est très bon quand on y profite et quand il ne fait point perdre son maistre, ce qui se voit assez rarement; toutesfois, si j'avois à choisir pour me pourvoir, je prendrois plustost un financier qu'un advocat.

—La femme de l'advocat s'en sentit un peu intéressée, et comme estant legitimement picquée au jeu, elle ne peut s'empescher de dire qu'on n'avoit jamais veu de financiers devenir gardes des sceaux et chanceliers, mais bien garde-prisons assez souvent, lequel l'on pourroit bien voir quelque matin, la paix estant faicte, pour les obligations et malversations qu'ils avoient commis depuis que la guerre est commencée.

—Laissons là les qualitez, Mesdames, dit la quinquallière; qui bien fera bien trouvera. Si les financiers ont desrobé l'argent du roy, comme il y a de l'apparence, le conseil en sçaura bien faire la recherche; et ce faisant, le proffit qu'ils auront faict ne sera qu'un emprunt qu'il faudra rendre avec les interests.

—Il semble que vous sçachiez les particularitez de ces Messieurs, dict là-dessus la belle pourpointière.

—Ce que j'en sçay, repliqua la quinquallière, c'est le receveur que j'ay tant aymé qui m'en a compté une partie, et le reste, ç'a esté le sieur Gesselin, comme je discourois avec luy de la belle Angelique, qu'il a tant de peine à marier.

—Mais, à propos, Madame, dit la marchande de passement, la fille de laquelle vous parlez est-elle aussi jolie qu'elle estoit lorsque le sieur advocat la recherchoit en mariage?

—Il s'en faut plus de la moitié, luy respondit la quinquallière, et si je doubte d'elle ce que je ne veux publier, pour le respect du sexe.

Comme ceste parole s'achevoit, la femme d'un procureur de la Cour, demeurante en l'Université, entre dans la chambre suivie d'une petite esmerillonnée[210] de servante, qui se douta de ce qu'on vouloit dire de la belle Angelique; et, ayant prins place, le caquet fut renforcé par elle, et meut les autres si fort à caqueter, que le meilleur secretaire n'eust peu rediger le tout par escrit. Neantmoins, encore que leur babilloire allast bien viste, je ne laissay d'en profiter et de remarquer ce que je jugeay pouvoir apporter du contentement aux curieux. Entre autres choses j'appris l'invention qui se praticque parmy les bourgeoises pour paroistre, quoy qu'elles n'ayent ny rente ni revenu.

Sçachez donc, suivant la relation mesme de la procureuse, que l'invention de paroistre[211] a esté trouvée par les femmes de practique, depuis quinze ou seize ans en çà, à dessein d'aller au pair avec les damoiselles de race et d'extraction, et pour faire à croire qu'elles en ont, mais c'est du contant, invention qui est tournée en perfection, si perfection on doit appeller le vice; en sorte que, pour le jourd'huy, on ne voit plus ny femme de notaire, ny de procureur, ni d'advocat, ny mesme de marchand et d'artisan, à qui la soye ne traine depuis les pieds jusques à la teste; et pour entretenir cet estat, que se fait-il, sinon qu'un plan de cornes aux pauvres maris, qui froidement vont au Chastelet ou au Palais, tandis que leurs femmes se donnent carrière; et qu'ainsi ne soit, demandez à Jouan, procureur, s'il n'est pas genin dans son haut de chausse; s'il ne vous dit assurement que ouy, je veux boire un verre de vin muscat à jeun pour ma penitence. Je vous en nommerois assez d'autres s'il estoit besoing, mais je me contenteray pour le présent de celuy-là, en consideration qu'un jour il demanda acte à monsieur le lieutenant de ce qu'il venoit de trouver un homme botté et esperonné couché avec sa femme.

Passons outre, et revenons à nos marchandes: les cessions et les banqueroutes de leurs maris leur bastissent une belle fortune, sans le tour du baston qu'elles font de leur costé, et de la façon elles paroissent en damoiselles, excepté la coiffure, tesmoing ceste-picque de biscaye[212] de la ruë S.-Denis, qui a fait faire plusieurs fois cession à son mary, et ne laisse pourtant de tenir boutique ouverte.

Or sus, revenons au caquet de nos bourgeoises et de nostre procureuse. Si tost donc qu'elle fut assise, elle fit signe à sa servante de s'approcher d'elle, pour luy dire qu'elle s'en allast querir ce qu'elle avoit oublié, qui estoit un libelle en vers contre plusieurs filles et femmes de ceste ville. Aussi tost dit, aussi tost effectué, et à peine avoit-elle dit à la compagnie ce que c'estoit, que ladite servante revint, et apporta ledit libelle, qui fut en mesme temps presenté sur le tapis, et la lecture s'en fit par la marchande passementière, comme la plus curieuse de toutes, lequel j'ay faict en sorte de coppier, pour en contenter ceux à qui la curiosité resveille l'esprit, et à cause de la gentillesse de sa poësie:

    Une petite vendant du clou
Fut apperceuë par un trou
Qui enfiloit à la chandelle;
Un petit de nom et de faict
S'est delecté dans le caquet
Qu'on a faict depuis de sa belle.
    Un grand jancu de bon minois,
Afin de violer les loix
Du sacrement de mariage,
En la maison d'un pourpointier
A fait despriser le mestier
Pour honorer le cocuage.
    Un gros coquin garny d'escus,
Aspre aux plaisirs et aux abus,
Fit tant que Gaumont, tout folastre,
Luy presta sa femme à minuict
Afin d'en prendre son deduict
Puis en a faict l'acariastre.

Sur cecy la passementière change de couleur et voulut deschirer le papier où estoit escrit ces vers: à quoy s'opposa formellement la procureuse, promettant à ladite passementière que jamais personne n'auroit la cognoissance de sa part, dont elle en fut conjurée par l'Accouchée, qui neantmoins avoit dessein d'en rire une autre fois plus particulièrement. Ainsi ce papier fut reserré, et commença-on de cacqueter de ceste sorte:

—A propos, Madame, dit la femme de l'advocat, est-il vray qu'on doit publier un edict pour la reformation des habits[213], et que Chalange[214] en doit entreprendre l'execution[215].

—J'en ay aucunement entendu parler, respondit la procureuse; mais pourtant je ne le puis croire, car il s'est trouvé trop empesché à l'edict des procureurs[216].

—Neantmoins, repliqua l'advocate, on en bruicte fort par la ville, et dit-on de plus qu'il passera plus facilement que nul autre qui ait passé depuis deux ans[217], parce que ou les ambitieux, pour paroistre, donneront de l'argent en forme de rente, si on l'accorde; ou bien chacun sera cognu selon sa qualité.

—Hé! qu'importe d'estre cogneu par sa qualité, pourveu qu'on ait force pistoles, dit l'accouchée?

—Non, non, Madame, respondit d'affection nostre advocate, il est bien necessaire de proceder à ceste reformation; l'argent n'est rien au respect des mœurs, et certainement il est plus à propos d'honorer l'ame de belles actions que de parer son corps de beaux vestements, qui ne servent en effect que de desguisement quand on y apporte tant de sorte d'inventions.

La marchande passementière, qui voyoit bien que c'estoit d'elle qu'on parloit particulièrement, fit forme d'avoir affaire à son logis, et sur ce discours print congé de la compagnie. La sortie de laquelle apporta une plus grande licence de parler d'elle; et qui en entama le discours, ce fut la procureuse, qui dict: Vrayement, la marchande qui vient de sortir a bien changé de poil depuis qu'elle a quitté sa boutique; la cognoissez-vous bien particulièrement, Mesdames?

A ceste demande, personne ne voulut respondre que la petite affetée de notaire, qui dict que du temps qu'elle estoit fille on en parloit fort, et qu'elle alloit la nuict trouver un certain homme pour coucher avec luy, et qu'affin de n'estre recognuë qu'elle prenoit un habit desguisé.

—Son mary estoit donc aux champs quand elle faisoit ce train-là? respondit la procureuse.

—Non, non, Madame, luy repliqua la notaire; c'estoit luy-mesme qui luy faisoit aller, et ceste façon de faire a duré deux ans et plus, et puis le badin en est devenu jaloux jusques là que de l'avoir accusé d'adultère.

—Madame, Madame, soulagez un peu l'honneur de vostre voisine, luy dit la quinquallière; on ne sçait pas ce qui nous peut arriver: toutes choses estans sujettes aux changemens, il faut peu de chose pour nous renverser veritablement.

La quinquallière avoit raison de parler de la sorte, car elle a les talons si cours qu'il ne faut la pousser guère fort pour la faire choir, et de cecy je m'en rapporte à ce qui en a esté escript et produict, ainsi qu'il se voit par le libelle cy-dessus, extraict des memoires curieux d'un des beaux esprits de ce temps qui la cognoit assez familièrement.

Cet entretien commença de desplaire à l'accouchée; aussi elle fit en sorte de faire signe à la garde de luy apporter la colation, ce qui occasionna les bourgeoises de sortir et de prendre congé d'elle, au moyen de quoy elle print relasche d'une demy-heure; et après ce temps une autre compagnie vint la saluer, qui se tint avec elle jusques au soir.

Les discours que ceste compagnie tint n'ennuyoient pas l'accouchée comme les autres: car on n'usa jamais de mesdisance, sinon qu'une mercière de la ruë de la Harpe, enquesteuse au possible des affaires d'autruy, comme on parloit de la misère du temps, accusans en partie la sienne, ne peut s'empescher de parler d'un de la vacation de son mary, qui a quitté sa boutique du Palais pour faire faire monstre à ses filles; elle n'eust garde de dire que sa boutique estoit toute remplie de nenny, que son mary faisoit passer les conventions matrimoniales par la forest d'Angoulesme[218], ny qu'elle toleroit la desbauche de sa servante à cause qu'elle n'avoit dequoy luy payer ses gages; aussi c'eust esté mal à propos de parler de la maison et de ce qu'il s'y faict, puis qu'on en parle assez en Bretagne et en Normandie.

Or, après qu'une certaine gantière assez cognue, quoy que sa mère soit garde d'accouchée, voulut mettre son nez au caquet, et commença de parler d'un procez que son mary avoit contre un advocat, la perte duquel elle redoutoit fort si elle ne s'y employoit de cul et de teste...

—En craignez-vous la perte? luy dict la femme d'un commissaire qui a pris la vache et le veau. Vraiment, puisque vous avez de l'argent, comme l'on dict, vous avez beau moyen de le gaigner.

—A la verité, repliqua la gantière, si les conseillers de la Cour sont aussi friants de presens comme ceux qui ont rendu la sentence dont est appel, je suis asseurée d'avoir gaigné la cause.

—Madame, Madame, luy dit une grosse damoiselle de Normandie qui logeoit naguères chez un chirurgien, j'en ay gaigné pour le moins une douzaine au Parlement, sans que j'aye employé d'autre faveur que mon industrie; c'est pourquoy vous pouvez beaucoup, vous qui estes de bonne grace, qui avez si beau maintien.

—Je m'asseureray donc, respondit la gantière, en la faveur de vostre bon conseil, duquel je vous remercie et vous en baise bien humblement les mains.

—Vous parlez de procez? dict l'accouchée.

—C'en est faict, respondit la damoiselle, et puis c'est d'un qui n'est pas de grande conséquence.

La femme d'un procureur du Chastelet qui demeure en la ruë S.-Martin, suivant ces entrepropos, commença et dit: Je ne sçay quels procez il se faict depuis dix ou douze ans, car je vous asseure qu'encores que mon mary soit des anciens, que son estude est aussi seiche qu'une langue de bœuf parfumée; la pluspart du temps il ne fait rien que bayer aux corneilles et jazer avec un voisin que nous avons qui fait des luts. Nous avons un fils advocat qui ressemble les tapis que mettent les marchands sur leurs boutiques, car il ne nous sert que de monstre; et ce qui m'afflige plus sur mes vieux ans, c'est que j'ay de trop grandes filles qui perdent leur temps faute d'ouvrage.

—Je vous plainds, je vous asseure, Madame, luy dict une jeune damoiselle qui a espousé le fils d'un medecin, d'autant que mesdames vos filles sont assez advenantes; toutesfois, Madame, j'estimerois que vous ne ferez pas mal d'en mettre quelqu'une en religion.

—En religion! respondit cette procureuse; vrayment, il faut autant d'argent pour le jourd'huy pour y mettre une fille comme à la mettre en son mesnage; je m'y suis assez employée pour ma grande, lorsque je l'ay veuë reformée en ses habits; mais je n'y ay rien gaigné.

Là-dessus une esrattée de perruquière de la mesme ruë, voulant donner son advis, et enseigner un moyen de mettre lesdites filles en religion, parla de celles où sont les capucines[219]; mais à ceste objection ladite damoiselle luy respondit que c'estoient discours, et qu'il y falloit avoir de l'argent aussi bien qu'ailleurs, ou bien de grands amis qui procurent le moyen d'y entrer.

Une bourgeoise de la rue Quincampois, ayant dessein de terminer l'affliction de la procureuse, luy dit: Madame, ne vous affligez point tant de vos filles; Dieu y donnera ordre à les pourvoir, et fera que quelques uns de ses bons serviteurs y mettront la main. On parle, ce dit-elle, d'une nouvelle religion où les filles de maison seront receuës à peu de fraiz, et si dit-on d'avantage, que nostre evesque[220], à son advenement, veut faire largesse pour ce subject[221].

—Ce sera un grand bien pour son ame, dict la femme d'un greffier; s'il donnoit une année ou deux de son revenu pour pourvoir quelques filles, ou en religion ou au mesnage, en retranchant un peu son train, il obligeroit icelles à prier pour soy.

Ces propos achevez et finis, arrivèrent encores quelques bourgeoises d'une mesme compagnie, desireuses d'entretenir madame l'accouchée de plusieurs choses qui courent parmy le monde, et de plusieurs façons de faire qui s'y pratiquent; les autres, qui estoient arrivées il y avoit assez longtemps, prindrent honorablement congé peu de temps après ceste arrivée, et après leur sortie une parfumeuse de la ruë S.-Sauveur commence de dire: Nous faisons un beau silence, pour estre venuës visiter une accouchée.

—Je vous asseure, Madame, luy dict une de ses voisines, qui est femme d'un tapissier, j'ay si mal à la teste des discours qu'on tient de nous, que j'en ay les jouës toutes rouges.

—Là, là, luy respondit la parfumeuse, ce n'est pas là où le bast vous blesse; c'est que vous faites la fine pour jouër les deux.

La tapissière là-dessus repliqua qu'il n'appartenoit à jouër les deux qu'à la femme d'un tailleur d'auprès la rue des Prouvelles, parcequ'elle entretenoit son mary en amytié et sans jalousie, et si un petit procureur du Chastelet ne laisse pas de captiver ses bonnes graces.

—Comment, dit aussi tost une frippière d'auprès la Tonnellerie, la petite tailleuse ayme la chiquanerie? Vrayment, je ne m'estonne plus s'ils vont si souvent aux champs ensemble.

—Ce n'est pas où ils font leurs meilleurs coups, dit encore la tapissière; mais c'est au logis de Paris: car assez souvent le procureur prend occasion d'aller joüer au picquet avec le mary, et ainsi il choisit son heure.

—Hé! si cela est sçeu à la cour, dit la parfumeuse, luy qui veut avoir un office chez le roy, ce sera une grande incommodité pour le Louvre.

Chacune de ces bourgeoises, à ces paroles, se prindrent à rire de si grand courage qu'il sembloit à les entendre que ce fussent des asnesses dans un pré qui brayassent pour estre couvertes. Et moy qui parle, je fus contrainct, quoy que caché à la ruelle du lict, d'en destacher mon esguillette, craignans de pisser dans mes chausses.

Cecy finy, elles commencèrent à caqueter et à discourir du comte Mansfeld[222]. L'une disoit qu'il est un grand capitaine pour un Allemand; l'autre soustenoit qu'il n'avoit pourtant pas grand courage. Une autre, qui avoit le jugement un peu plus solide, dit qu'une bonne fuitte valoit mieux qu'une mauvaise attente, et qu'il y avoit plus d'honneur à laisser le champ à ceux qui tiennent en main la victoire que de recevoir une perte dommageable au profit et à l'honneur, et puis, qu'ayant les gouttes comme il a, que malaisement eust-il trouvé du secours pour l'en soulager, si ce n'eust esté en perdant la vie. En fin, après tant de sortes de comptes et de sornettes, la nuict s'approcha, qui fut cause que chacune se retira à son enseigne.

LA RESPONCE

DES

DAMES ET BOURGEOISES DE PARIS
au


CAQUET DE L'ACCOUCHÉE

Par Madamoiselle E. D. M.

A Paris, chez l'imprimeur de la ville, à l'enseigne des trois Pucelles.

M. DC. XXII[223].

Maintenant que l'esté nous a fait paroistre les effets de sa chaleur, et que les rayons du soleil, d'une force plus concoctive, bruslent et consomment les campagnes mesmes qui sont sous un climat temperé comme la France, outre que d'ailleurs les femmes, qui sont d'un temperament froid et humide, ne peuvent soustenir une chaleur si ardante que celle qui se fait quand le soleil entre au signe du Cancre, comme il a fait depuis quelques jours, je me resolus, avec quelques unes de mes voisines, d'aller aux estuves pour me rafraichir: car la nature est tellement sortie de ses premiers ressorts qu'il n'est point maintenant permis aux femmes de se baigner à la rivière, à cause peut-estre qu'on les verroit à descouvert, ce qui est hors de raison, veu que les femmes peuvent avec autant de droit et authorité se baigner que les hommes, puis qu'en leur nature elles sont egalles à eux, comme je crois avoir veu assez preuvé ailleurs.

Comme je fus arrivée aux baings où d'ordinaire nous avons coustume entre nous autres de nous rafraichir, je me trouvay au milieu d'une bonne et agreable compaignie de bourgeoises et dames de Paris, qui estoient venues au mesme lieu pour ce subjet. Ainsi que nous commencions à nous deshabiller, et que chacun s'apprestoit pour se mettre à l'eau, une jeune damoiselle du faux-bourg S.-Germain dit: La porte est-elle fermée, ma cousine[224]? (Elle parloit à une sienne parente de la place Maubert.) Je vous asseure qu'il y faut prendre garde: car pour maintenant on ne prend plaisir qu'à mal parler d'autruy, et principallement on est bien aise de toucher sur la corde des femmes et d'avoir prises sur elles. Il y a plus d'un mois entier que dedans Paris on nous appelle caqueteuses; on ne parle que du caquet des femmes. Jamais le lict de l'accouchée ne fut mieux remué; il est souvent retourné et fueilletté.

—Mais il n'y a que de la plaisanterie dedans, dit sa tante [qui estoit desjà dans l'eau][225].

—C'est vostre honneur, respondit l'autre; cela ne retourne qu'à nostre desavantage. S'il y a quelque bon quolibet, quelque gausserie, quelque risée, ou quelque pacquet, c'est tousjours sur les femmes qu'il vient tomber, et tousjours les pauvres femmes sont chargées; je ne sçay comme elles ont si bon dos, car bien souvent il faut qu'elles portent de pesans fardeaux.

—Comment! ma commère, dit une qui avoit desjà deffait sa chemise[226], c'est une chose estrange que, sous pretexte de madame l'accouchée, on nous en fait payer la fole enchère. On dit mal de l'une, on se mocque de l'autre, on rit, on gausse; ce sont plustost des farces et commedies qu'autres choses. Jamais les femmes ne furent remuées de la sorte: l'une sera trop vieille à l'appetit de son mary, il se voudra mettre à la fraischeur; l'autre sera trop bouillante à l'appetit du sien, qui n'ira qu'à demy-voye; l'autre aura cinquante ans et on ne la marie pas, de sorte qu'elle sera contraincte de recoudre son pucelage plus de cent fois. Que sçay-je, moy? chacun nous donne tels quolibets qu'on veut, et ainsi pour ce jourd'huy en toutes les bonnes compagnies et assemblées on nous couche tousjours sur le tappis, puis après nous servons de joüet et d'entretien aux hommes, qui sont bien ayses, pour passe-temps, d'esplucher nos actions et de scindiquer sur nos besongnes.

—Madame a raison (fis-je alors)[227], car le temps d'aujourd'huy n'est plein que de mesdisances et d'invectives, principalement à la cour, où j'ay de coustume de hanter: l'une aura un œil trop brun à l'appetit de celuy-cy, l'autre un nez camus à l'appetit de l'autre; mais la pluspart du monde ne voit point que ceux qui sont camus ont de grands priviléges et immunitez à eux concedés de la nature, sçavoir est qu'ils sont exempts de porter les lunettes, droict qui est très beau, puis qu'il relève de la cour des Quinze-Vingts, où les aveugles president en robbes grises et fleurdelisées[228]; les autres ont des robbes qui ne correspondent pas à leur qualité. Si une marchande porte le satin à fleurs de velours cramoisi[229], etc., faut-il en murmurer? Pourtant elles seroient peu discrettes si elles ne s'accoustroient des plus riches et des plus belles estoffes de la boutique, puis qu'elles-mesmes les vendent et debitent aux autres[230]. Si aujourd'hui une passementière porte un colet monté à cinq estages, elle le fait pour une consideration qui est tres bonne, sçavoir, afin qu'on ne puisse attaindre à son pucelage, qu'elle met et constitue au dernier estage de son colet, ce qui est universellement approuvé de toutes les courtisannes: car frottez vostre nez contre leur visage, cueillez les fleurs qui s'espanouïssent sur le marbre empourpré de leurs jouës, desrobez les roses qui vont esclatant sur le corail de leur bouche, pillez les lis qui blanchissent sur la neige yvoirine de leur gorge, bref, mettez-vous en quatre parties pour entendre le bal mesuré de leurs pommes jumelles, et les souspirs contre-balancez de ces deux-hemisphères, ce n'est point là où gist le pucelage. Pourveu que vous ne touchiez point au colet, vous estes le plus galand cavalier du monde; mais si une fois vous avez rompu un rang de passement, vous perdez toute l'estime qu'on avoit de vous auparavant (elles ont bien raison, et je soustiendray tousjours leur party en cecy, puis que leur honneur est au cinquiesme estage de leur collet); il ne s'y faut jamais prendre.

—Pour moy, dit une damoiselle [qui estoit en l'eau jusques au col][231], je ne sçay comment on en veut tousjours à ces pauvres femmes: c'est la rebute ordinaire de toutes les calomnies des hommes; s'ils ont fait quelque acte auquel ils croyent avoir acquis quelque disgrace, tout aussi tost la femme en a sa part: «Ma femme est cause de cet accident; sans elle j'eusse gaigné mon procez»; et le plus souvent on trouvera que la femme aura meilleur droict que son mary: et ainsi c'est nous mespriser.

[—Vous voilà dans l'eau jusques au col (dit une vieille qui tenoit du linge blanc); mais j'y suis plus avant que vous, car m'y voilà jusques au né. Ne faisoit-il pas bon voir une femme avoir des roupies en plain esté?][232]

Une autre qui s'entendoit à la philosophie, et qui avoit choisy ce jour pour le bain[233] comme un medecin du cartier S.-Honoré qui ne vouloit coucher avec sa femme que par lune, va dire: Je ne vois aucune raison formelle qui puisse conduire ma cognoissance à croire qu'on nous doibve tenir en ligne inferieure avec les hommes: car premièrement ils disent que nostre temperie est froide et humide, et que, nos organes n'estant point bien disposez, il faut, par une consequence logicienne, que nous ne pouvions exercer nos fonctions avec l'advantage dont jusques à maintenant ils se sont prevalus contre nous, et toutesfois je prouveray tousjours par bonnes, valides, scientifiques et demonstratives raisons, que nous surpassons de beaucoup le sexe masculin, ou, à tout le moins, que nous ne luy sommes en rien inferieures. Jettons les yeux sur les sciences, arts, mestiers, pratiques et inventions: la pluspart se trouvera tirée de la teste des femmes, car comme elle pullule en raretez, subtilitez, prudence et autres qualitez infinies qui annoblissent nostre sexe, aussi le peut-on aisement remarquer par des exemples et des preuves irreprochables. C'est ce qui a meu Platon, à qui nul n'a debattu le titre de divin, et consequemment Socrates, son interprette, en batissant les loix et reiglemens fondamentaires pour les royaumes et republiques qui depuis sous icelles ont esté regies et gouvernées, de les admettre dans les dignitez, charges et offices, et de les eslever aux mesmes degrez d'honneurs que les hommes; et bien davantage, ces lumières de l'antiquitez maintiennent et asseurent avoir veu des femmes qui ont surpassé les hommes de leur patrie. Si de cecy nous en voulons sçavoir la raison, les philosophes mesme, bien que d'un sexe different du nostre, diront que, comme la pureté du sang concurre à la vivacité de l'esprit, que consequemment les femmes ont ou doivent avoir l'esprit plus vif que les hommes, puis qu'elles ont le temperament plus delicat. On en a veu naistre des effects très certains de ce que je dis, en Alexandrie, Egypte, Trace, Rome, France, et autres contrées de l'univers. De l'autre costé, la femme est en mesme puissance que l'homme de produire des actes genereux: ce n'est faute le plus souvent que de les defricher; si l'arbre ne porte point de fruict, ce n'est faute que de le cultiver, esmonder et esbrancher. Combien y auroit-il d'hommes hebetez et grossiers, si depuis le plus tendre de leur jeunesse on ne les jettoit dans les escolles, où la pluspart, le plus souvent, après avoir bien employé du temps, sont aussi sçavans que quand ils y ont entré; où au contraire, si on employoit après les femmes la centiesme partie du soin et de la cure qu'on prend après les hommes, on verroit des merveilles: car, comme les femmes sont d'un temperament plus tendre, et ont le sang, comme j'ay desjà dit, plus subtil, aussi auroient-elles en bref les organes disposez à recevoir les espèces intromises par les sens interieurs. Combien a-on veu de grands cerveaux de femmes regir, maintenir et gouverner ceste monarchie et une infinité d'autres royaumes! C'est ce qui conduisoit jadis Plutarque à dire que les vertus des femmes aloient à l'esgal de celles des hommes, comme de fait on en peut voir de grandes et irreprochables experiences. Il me souvient avoir leu dans Tacite qu'un certain, estant venu à Rome en grand equipage pour estre concitoyen de ladite ville et participer aux droicts et immunitez dont jouyssoient jadis les Romains, et principallement ceux qui avoient le titre de noblesse, qu'au commencement il se vantoit de la race des dieux, se disant sorti d'un Hercul, d'une Thetis, d'un Jupiter. On ne l'approuvoit point pourtant; mais quand, changeant de discours, il vint dire qu'il descendoit en ligne collateralle d'une Amazone, alors ce nom reveré et respecté du peuple romain le fit entrer au nombre des autres citoyens, et participer aux mesmes priviléges. Les Lacedemoniens, gens experimentez s'il en fut jamais, ne faisoient rien qu'auparavant ils n'eussent consultez les principalles femmes de la ville.

—Il n'y a que cela qui me fasche (dit une jeune mariée d'auprès le Louvre), qu'il faut donnner tant d'argent maintenant quant on se veut marier, c'est une ruyne; puis que vous dites que les femmes vont de pair avec les hommes, c'est encore peu de consideration à nous de nous attacher à la cadène et nous captiver de nostre propre et liberal arbitre sous leur empire, et au bout du compte apporter de l'argent en mariage.

—N'en sçavez-vous que cela (dit une esveillée qui estoit un à bout)? La cause pour laquelle les femmes apportent de l'argent aux hommes en mariage, c'est qu'ils acheptent un fonds pour planter des cornes.

La philosophe, à ce mot, reprit la parole: Au rapport (dit-elle) de Corneille Tacite, historien fidel des annales romaines, les Germains et Allemans, gens indomptables à la guerre, portoient dot à leurs femmes, non les femmes aux hommes, et les principaux siéges n'estoient gouvernez et regis que sous leur sceptre et commandement.

En après, si nous voulons nous fonder sur les principes et sur les bases de la metaphisique, nous trouverons que la nature humaine est divisée egallement et de l'homme et de la femme: et ainsi l'un ne participe point davantage à la raison que l'autre; ea autem sunt unum et idem quorum, natura non est diversa secundum essentiam. Or, si l'homme n'est qu'un avec la femme, il suit necessairement qu'on ne peut calomnier l'un sans parler au desadvantage de l'autre, de mesme que, si on dresse des loüanges au premier, elles ne peuvent qu'elles ne resultent et resjaillissent à l'honneur des seconds.

Je m'estendrois icy sur les Sibilles, qui ont communiqué avec la divinité par leurs oracles et propheties, si leurs discours admirables, leurs bouches divines et leur langage doré, ne fermoit la bouche à ceux qui nous veulent calomnier. Pour leur valeur et adresse aux armes, n'avons-nous point ceste genereuse guerrière en France, la Pucelle d'Orleans, qui s'est signalée en tant de combats, rencontres, en tant d'assauts et batailles, sans aller en Trace chercher les antiques Amazones? Mais, mesme en nos derniers jours, ne voyons-nous pas des exemples de leur magnanimité, de courage, où elles ont gravé leur renom dans le temple de memoire?

Toute la compagnie, et moy la première[234], qui durant ce haut et relevé discours avoit faict un silence dans l'eau[235] de peur qu'on ne nous[236] imputast le nom de caqueteuse, fusmes[237] ravies en extase de voir nostre[238] cause si bien defenduë et nostre[239] sexe si haut monté par l'ascendant que luy avoit donné ceste docte et scientique damoiselle: car elle avoit monstré (comme de fait personne ne le peut revoquer en doute) que la femme estoit en mesme ligne paralelle avec l'homme, et qu'il n'y avoit aucune difference entre eux, de manière que, cela estant, si les hommes viennent maintenant à user de represailles et calomnies envers nostre endroit[240], c'est sur eux-mesmes que resjaillissent leurs injures: tout ne peut se faire, en fait de calomnies, qu'à leurs desadvantages.

La compagnie n'en demeura pourtant là: on voulut voir et examiner les cahiers de madame l'accouchée, de laquelle on parle tant maintenant dans Paris. L'une disoit que ce n'estoit qu'une pure fiction inventée à plaisir pour la jovialité qui s'y rencontre; l'autre soustenoit que cela avoit esté fait et qu'il se pouvoit faire; qu'il n'estoit hors de raison. Chacun se debatoit: l'une le tenoit pour faux, l'autre pour veritable. Pour mon regard[241], je crois que madame l'accouchée n'y a jamais songé.

—A la verité (dit une qui commençoit à s'essuyer)[242], si on parle mal des femmes, il y en a plusieurs qui en donnent subject; on familiarise quelquefois avec des personnes qui, sous couleur d'une feinte amitié, font souvent naistre des soupçons en l'esprit de ceux qui regardent; on faict des mauvais rapports, et par ainsi les femmes sont toujours injuriées à tort.

—Voilà mon dire, respondit une fille de chambre d'auprès S.-Jacques: depuis qu'aujourd'huy on voit un homme auprès d'une femme, on en parle mal. Pour moy, je suis d'un naturel dispos et gaillard, j'aime tousjours mieux jouër au reversis qu'au picquet; je ne me picque jamais au jeu (pourveu que d'autre, part on ne passe trop avant dans les bornes de l'honneur). Au reste, je ne suis pas joyeuse quand j'entens parler mal de nostre sexe, c'est ce qui me tourmente le plus; et encore, qui pis est, on m'a meslée dans les cartes de l'accouchée; je ne sçay comment m'en desgager.

—Vous n'estes pas seule qui avez vostre paquet (dit sa cousine); j'en cognois bien d'autres, et des meilleures bourgeoises de Paris, qui en ont eu leur part. Toutefois, comme ce sont frivolles, aussi ny devons-nous nous arrester, n'y faire aucun semblant que nous nous en sommes formalisées.

—Frivolles! ma commère, dit une autre: S. Jan! appellez-vous frivolle de calomnier l'un, de se rire de l'autre, de se gausser de celle-cy, de mal parler de celle-là? Pour moy, je crois qu'on n'en eust peu inventer davantage pour se mocquer de nous: car le pire que je remarque en cecy, c'est que la pluspart sont accusées à tort et sans cause.

Moy, qui estois[243] de l'autre bout, pris la parolle pour toutes les autres en general. Mes damoiselles (dis-je)[244], il se faut resoudre en cecy; il y a un expedient fort propre; il est besoin en choses d'importance d'apporter du conseil: il nous faut faire un reglement en ceste affaire. Pour moy, je trouverois bon que nous fissions une lettre de desadveu et une signification pour nous departir de tous ces discours de l'accouchée. La femme d'un sergent du faux-bourg Sainct-Marceau, approuvant son dire, respondit que son mary ne prendroit rien des significations, et qu'infailliblement il publieroit lesdites lettres par les carrefours de Paris, n'y ayant personne qui peut mieux tromper ny trompeter que luy.

LETTRE DE DESADVEU
touchant le caquet de l'accouchée
[245].

«Nous, dames et bourgeoises de Paris, assemblées ès estuves, après avoir veu et leu un livret qui s'intitule le Caquet de l'Accouchée, et que, dans iceluy livret, nous avons amplement remarqué qu'à tort et sans cause on nous calomnioit, nous appelant caqueteuses, bien que chacun sçache assez bien que nostre langue est toujours en nostre bouche, outre qu'il n'y a eu aucune assemblée d'accouchée qui eut peu authoriser ce discours, afin que chacun cognoisse l'integrité de nos actions, et qu'il soit notoire à tous que nous aymons à avoir le droit partout: Nous avons des-avoué et des-authorisé, comme par ces presentes nous des-avouons et des-authorisons le dit livre, tenans et aboutissans et dependances d'iceluy, et en tant que nostre pouvoir s'estend. Nous segregeons de nostre compagnie tous ceux et celles qui feuilleteront le dit livre, enjoignant de plus à toutes les femmes, de quelque quartier, rue, qualité ou condition qu'elles soient, que partout où elles verront le dit Livre, Seconde et Troisiesme après-disnée d'iceluy, soit ès-mains de leurs maris ou autres, quelles ayent à s'en saisir, comme d'une pièce pernicieuse à notre sexe, et de ce nous donnons pleine puissance et authorité absolüe. Donné à Paris, le jour et an que dessus.»

Ceste lettre de desaveu pleut grandement à la compagnie, qui l'approuvèrent d'une mesme voix et d'un commun applaudissement. De là, s'estant toutes revestues, elles sortirent des estuves et s'en retournèrent chacun en son logis, avec promesse toutefois de s'assembler pour la seconde et troisiesme fois, si l'occasion le requiert.

LES DERNIÈRES PAROLLES
ou
LE DERNIER ADIEU DE L'ACCOUCHÉE

Ensemble ce qui s'est passé en la dernière visite
et quatriesme après-disnée des dames
et bourgeoises de Paris
[246].

En vain vous auriez veu les commencemens des couches de l'ACCOUCHÉE et feuilleté ses premières et secondes[247] visites, si par mesme moyen vous[248] ne veniez à jetter les yeux sur le progrez, suitte et advancement d'icelles, et ce avec autant plus de desir que le sujet le semble requerir. C'est pourquoy, comme tesmoin occulaire de ce que j'ay veu, je vous traceray en ces lignes ce que j'en ay apris depuis peu[249], esperant que, comme nostre puissance intellective n'a des bornes qu'en tant que les cognoissances qu'elle a sont dans la sphère d'activité de son esprit, et qu'elle peut encor s'estendre d'advantage, que par mesme moyen aussi je vous en feray voir d'autre, si l'occasion m'en donne le sujet. Ce que je fais icy, ce n'est qu'en forme d'ARRIÈRE-FAIX.

Plusieurs s'arresteront icy sur ce mot d'arrière-faix, qui peut-estre, n'ayant jamais penetré dans les cabinets de la medecine, ignoreront de prime-abord ce que je veux entendre par la superficie de ce discours; mais ayant visité le dedans et veu ce que j'y couche, ils verront qu'à juste tiltre je devois en ce lieu parler de l'arrière-faix de l'accouchée, puisque jusques icy on en avoit tant et tant fait de ceremonies.

L'arrière-faix, si nous nous voulons rapporter à madame Perrette, sage-femme du faux-bourg Sainct-Marceau, n'est autre chose qu'une superfluité de matière qui s'esvacuë hors de la matrice après l'enfantement, laquelle superfluité, comme elle est excrementielle, aussi estant retenuë dans les concavitez de la matrice et engluée dans les membranes qui se retrouvent là dedans, cela eut de beaucoup incommodé l'accouchée; c'est pourquoy il la faut jetter dehors, afin qu'estant reintegrée dans sa première santé, que nous aussi ayons l'honneur d'assister au baptesme de son enfant, qui se fera à Sainct-Mederic, si messire Pierre s'y rencontre: car il est fort subjet à dire son breviaire et ses sept pseaumes pour madamoiselle de la Garde.

Et pour entrer en lice et mettre la lance de ce discours dans l'estrié d'une suitte admirable où je puisse courre la carrière de bien dire, et vous faire voir le fruict d'une nayfveté gaye et naturelle, vous devez sçavoir qu'ayant apperceu que tout le monde, tant fols que sages, avoient bandé le roüet de leurs inventions pour delascher quelque coup de mesdisance, et s'estoient appliquez à faire des discours ou plustost des mixtions pour faire quelque bouillon à l'accouchée, que je pouvois, sinon avec autant de rime, au moins avec autant de raison, aller voir madame l'accouchée, comme de fait mardy dernier je m'y acheminay avec bonne intention d'en tirer mes pièces aussi bien que les autres. Ce fut le matin que je fis ceste belle entreprise, croyant que je verrois madame l'accouchée en son pontificat; mais ayant frappé à la porte, qui estoit entrebaillée, je fus tout estonné de la voir en la salle d'embas auprès du feu, qui s'amusoit à secher une coiffe à passement pour l'après-disnée, car j'ai sceu depuis que toute la matinée elles sont debout, et que l'après-disnée elles se couchent et s'accomodent, se peignans, frisans et encourtinans superbement dans leur lict.

A peine eus-je frappé qu'elle print la fuitte et gaigna au pied, de peur d'estre recogneuë, croyant infailliblement que ce fust quelque dame qui la vint voir. La servante, qui vint à la porte, me dit: Monsieur, madame est un peu indisposée pour l'heure; s'il vous plaist, revenez après midy. Ceste responce me fit retirer aussi froidement que monsieur de la Garandine, qui, estant allé souper en ville, fut contrainct, à son retour, de coucher à la porte, sa femme s'estant r'enfermée avec un jeune advocat de la ruë S.-Denis. J'attendis pourtant que midy fust sonné[250] afin d'entrer avec les autres, comme je fis insensiblement pourtant, car j'estois accommodé en apoticaire. De me mettre ny en la ruelle du lict ny au chevet, je n'eusse jamais voulu; je pris un bout de la tapisserie et me cachay secrettement à l'endroit où je pouvois entendre quelque chose.

Or il est à remarquer que ce jour il n'y avoit que les bourgeoises qui faisoient leurs visites: car, les jours precedens, les grandes dames et damoiselles y avoient passé. Madame la Bruyne, nouvellement erigée de tavernière en grand' et superbe marchande, commence à dire:

—Comment! ma cousine, n'avez-vous pas ouy parler de la drollerie qui s'est joüée dernièrement en un pelerinage qui se fit à Nostre-Dame-des-Vertus?

—Aussi vray, ma cousine, respondit l'autre, voilà les premières nouvelles que j'aye encore ouy parler.

—C'est la plus plaisante tragedie que vous oüites jamais, dit une vieille de la ruë de la Harpe.

—Pour vous commencer ces discours, ma cousine, dit la première, vous devez sçavoir qu'aujourd'huy chacun en prend où il en peut attrapper. Deux jeunes dames que plusieurs cognoissent...

—Ne sont-elles pas de la paroisse Sainct-Germain? dit une fille de chambre.

—Il n'importe de quel cartier elles soient: il ne les faut pas nommer. Elles alloient en fin l'autre jour en pelerinage à Nostre-Dame-des-Vertus, accompagnées de deux braves courtisans qui, dès longtemps ayant fait la partie, ne cherchoient que l'occasion de trouver un tripot afin d'achever le jeu en quatre ou cinq coups de grille[251]. Leurs maris, qu'on dit n'estre point de justice, car, s'ils eussent eu le droit, peut-estre qu'ils n'eussent point encouru l'affront qu'ils encoururent depuis, voulans joüer leur personnage en ceste tragedie, aussi bien que le sieur Darmingère en la ruë Sainct-Martin, où il pensa se rompre les hipocondrilles et le train de derrière, songèrent qu'en ce cas il se falloit desguiser, et que, pour ce faire, il n'estoit mal à propos de prendre l'habit de quelque moyne ou religieux. Les uns disent qu'ils prirent l'habit de capucin, les autres tiennent qu'ils estoient habillez en mathurins. Quoy que s'en soit, ils estoient desguisez, et soit de l'un, soit de l'autre habit, ils avoient de l'advantage: car s'ils estoient accommodez en capucins, ils eurent ceste prerogative qu'en alant ils portèrent la corne derrière à cause du capuchon, et en revenant ils en portoient deux sur le front; s'ils estoient habillez en mathurins, c'est qu'ils commençoient desjà à se faire recevoir en la grande confrairie des fols, comme a fait depuis peu un passementier de la ruë Sainct-Denis. S'estant habillez, ils suivirent de loin nos pelerines, qui, estans arrivez au lieu, prirent la meilleure hostellerie. Nos religieux cependant vont à l'eglise, pour faire bonne mine, où tout le train arriva. Une, entre autres, de ces deux dames vint s'adresser à son mary: Avez-vous celebré, mon père? Le mary, qui se renfonçoit dans son chapperon, lui respondit comme en reculant, peur d'estre cogneu: J'ay celebré dès le matin, Madame; excusez-moy. On en demanda autant à l'autre; mais on n'eut autre responce de luy sinon qu'il estoit indisposé. Cela les fit tourner d'autre costé. La messe dite, nos gens s'en retournent pour desjeuner. Ils demandèrent une chambre escartée; on les conduit à la chambre la plus proche des tuilles. Comme ils estoient en bonne disposition, les religieux, qui s'estoient habillez pour entrer en la confrairie des cornards, qui est maintenant si peuplée à Paris, demandèrent chopine, afin de voir le succez des affaires. On les meine dans une petite estude qui respondoit sur les pelerins, où par un petit trou ils apperceurent de quels bois estoient faites les cornes qu'on leur alloit planter sur le front; ce qu'ils virent grandement à contre-cœur, et malgré eux, ainsi que monsieur Ranville, qui eut l'autre jour un soufflet malgré luy dans le Palais. Cecy veu, ils s'en retournèrent; mais le mal'heur en voulut que, les cornes leur commençant à croistre en la suture coronale, je veux dire cornale, ils ne peurent jamais remettre leurs chapperons dans la teste, ou, pour dire avec monsieur du Fresne, la teste dans leurs chapperons. Les pelerines revindrent après midy, où nos religieux leur vouloient donner l'absolution, comme de fait ils leur pardonnirent la coulpe, bien qu'à regret (car il est impossible de renfoncer les cornes qui ont commencé de paroistre); mais pour la peine ils se resolurent de leur faire porter[252] en ce monde, afin de les descharger d'autant en purgatoire, si de fortune leur chemin s'adonnoit en ces cartiers-là: de façon que les pelerines furent espoussetées de la poudre que peut-estre elles avoient pris le long du chemin.

—Cela pourroit-il estre vray, ma cousine?

—Chacun en va à la moustarde en nostre cartier, dit une drappière de la ruë Sainct-Honoré; pour mon regard, il me souvient bien de leur avoir vendu de bonnes estoffes et trop relevées pour leur qualité.

—N'est-ce point une grande impudence (dit une autre) de madame Remonde, qui vendoit des confitures il n'y a que trois jours, et aujourd'huy, sous l'esperance d'une bonne succession, la voilà damoiselle, mariée à un homme de qualité, et porte les colets montez à quatre et cinq estages, les cotillons de satin à fleurs! Pour moy, je ne sçay comment on tollère cela.

—Voilà comme va le temps d'aujourd'huy: on se plaist à braver et à piaffer par les ruës. Mais, à propos de succession, madame la Renardière est bien empeschée despuis deux jours: elle esperoit avoir toute la succession de sa sœur, qui despuis vingt ans a esté sterille; elle n'a esté recherchée en mariage que sur ceste esperance, et sans cela elle eust esté bien empeschée de trouver seulement un huissier pour mary; et aujourd'hui que sa sœur a fait un enfant, contre l'opinion de tout le monde, la voilà privée de quinze mille escus qu'elle pouvoit raisonnablement esperer.

—Il ne faut jamais conter sans son hoste, dit une bourgeoise du faux-bourg Sainct-Honoré: il y a de certains religieux auprès de nous, à qui un certain avoit donné et passé par bon contract tout son bien durant sa vie, qui pouvoit bien revenir à quarante mille escus; ils seront bien empeschez de l'avoir, car les parens disent que la donation est nulle, et qu'on ne doit usurper ainsi le bien des mineurs au desadvantage de toute une famille; comme de fait, à l'appetit d'un homme qui portera quelque affection particulière à un autre, doit-il pourtant priver ses enfans des biens et possessions qui leur sont deubs naturellement? On ne les peut desheriter de la sorte, et en cecy l'arrest des berulistes y est formel; de façon que je crois que lesdits religieux seront bien esloignez de leurs quarante mille escus.

—Madame a raison, dit l'accouchée; moy qui ay sept enfans, si je voulois donner mon bien à quelque religion, ce seroit rendre ma famille pauvre et reduitte à mandier son pain; c'est avoir peu de consideration pour des enfans.

—Les enfans en sont quelquefois cause, madame (dit une qui estoit au pied du lict); la pluspart d'aujourd'huy sont si orgueilleux, que, mesprisans le lieu d'où ils sont venus, s'accommodent en princes et grands seigneurs; tel aujourd'huy n'a pas cinq sols vaillant, qui fera autant de parade comme s'il avoit de grands biens et possessions.

Une qui n'avoit parlé: Il ne faut, dit-elle, pas aller si loin: madame le Doux en peut porter tesmoignage. Voulez-vous voir chose plus poupine que sa fille? Il n'y a que deux jours qu'elle estoit fille de chambre au logis de M. de Chevreuse, et maintenant elle porte autant d'atours que la plus grande dame de la cour; mais pourtant elle a beau se parer, ny son masque ny ses perles ne luy blanchiront point le teint.

—Aujourd'huy, dit une marchande de perles, les damoiselles (à ce que je peux voir à la vente) observent que plus elles sont blanches, plus les perles qu'elles acheptent sont noires; ou au contraire, si une dame est un peu brunette, elle marchandera des perles les plus blanches qu'on pourra trouver.

—Voyez-vous plus grande superbe et arrogance que celle de madame Clairmonde, qui depuis un mois s'est faite damoiselle, aux despens de son mary, qui porte les cornes? dit une de son quartier. Depuis qu'elle a commencé à porter le masque, elle en est si orgueilleuse, que, mesme à l'eglise, elle ne le deferoit point pour tout le monde. Cela est intollerable et insupportable.

—Je vous asseure qu'elle le fait à cause de sa laideur, dit une autre qui est sa voisine.

—Pour mon regard, dit une jeune esventée qui aime le haut goust, je ne trouve pas trop mal à propos si madame dont vous parlez s'accommode bien: il y en a bien d'autres qu'elle entre nous autres procureuses du Chastellet (elle ne demeure pas loin de là sans doute); nous plumons la poulle du villageois. Il ne nous en chaut de tous les bruits qu'on fait courir de nous; pourveu que nous ayons de quoy faire gargoter la marmite, c'est le principal. Je ne sçay pas comme se manient et gouvernent les autres de nostre qualité; mais pour mon mary, c'est le plus heureux homme du monde: tantost on luy fera present d'un lièvre, tantost d'une couple de perdris, tantost d'un pasté de venaison; il ne faut pas mentir, que cela nous accommode grandement bien.

Une veufve, qui estoit près de la porte, interrompant son discours, va dire: Je ne sçay pas comment toutes ces affaires se prattiquent; mais on me dit l'autre jour qu'on avoit joué un plaisant trait à un procureur de vostre cartier. Chacun commençoit à dresser les oreilles pour ouyr ce traict. C'est, dit-elle, qu'on luy envoya un fort beau pasté en forme de venaison; mais quand on vint à l'ouvrir, on trouva qu'il n'y avoit que deux cornes dedans: c'estoit une viande de dure digestion.

—Ce ne fust pas à nous à qui ce present fut donné, repliqua l'autre: c'est à nostre voisin (comme si on ignoroit qu'elle a enchroniqué son mary elle-mesme au rang des cornarts!). Mon mary sçait mieux que c'est de vivre que cela; il a des affaires pour les marguilliers de Baignolet et pour les manans de Ville-Juif, qui ne sont point ingrats, car mon mary emporte tousjours plume ou aisle.

Une autre qui avoit autrefois esté fiancée à son mary, et qui le cognoissoit, va dire: C'est donc la cause pourquoy on appelle les procureurs volleurs et larrons, Madame, puis que, à tort ou à droit, ils prennent des deux mains?

—Vous n'y estes pas, ce fit une esveillée: la raison pourquoy on dit que les procureurs sont volleurs, c'est qu'ils n'ont qu'une plume, et si pourtant ils volent mieux que pas un oyseau qui soit en l'air.

[—O la grosse invention! va dire une autre; mais prendriez-vous le mary de madame pour un de ces gens-là? Vrayement il en est bien esloigné; s'il a des commoditez, elles ne viennent pas de là. Ne cognoit-on pas son père, homme riche et opulent?

—Ouy, du bien et de l'argent qu'il a presté][253] à usure, dit une des voisines.

[—Est-il seul qui preste à usure? va faire une autre de][254] la ruë de S.-Anthoine. C'est en nostre cartier où sont les gros usuriers[255]; il y en a trois qui sont en chambre garnie, qui sont de Rennes en Bretaigne, et qui ne se communiquent qu'avec beaucoup de difficultez; l'un est rousseau et les deux autres noiraux; mais ce sont les gens les mieux entendus qui se puissent remarquer. M. Gratiano, Italien, et M. de la Verdure, les cognoissent bien: ce sont leurs partisans, tout passe par leurs mains; mais s'il faut faire quelque chose d'importance, attrapper quelques jeunes gens, les suborner et seduire, ce sont ces Messieurs; s'il faut bailler cent escus pour en avoir cinquante au bout de trois mois, ils y sont les premiers; il n'en faut demander advis qu'à M. de la Tour, ce fermier tant renommé, qui a esté englué assez bien depuis quinze jours[256] en çà, qu'il alla emprunter de l'argent à ces maistres affronteurs pour marier sa fille.—Une vieille de la ruë Sainct-Victor, y voulant mettre son nez: Ne sont-ce pas, dit-elle, ces receleurs de la jeunesse, qui prestent de l'argent à rendre prebstre, mort ou marié? Il y en eut un de nostre quartier, l'autre jour, le plus vilainement affronté du monde; il n'y a point de danger de dire son nom: c'est M. de la Croisette; il avoit presté à diverses fois quinze cens livres à un jeune advocat de la rue Sainct-Jacques, le père duquel est mort depuis six mois, esperant retirer au double quand il se marieroit. Or il est arrivé que ledit advocat est mort ces jours passez, de façon que mon drolle vint à faire sceller un coffre; mais, soit que les parens eussent soustrait ce qu'il y avoit, soit que les sergens eussent quelque intelligence là-dessous, quand on vint à ouvrir le coffre pour faire l'inventaire de l'argenterie, meubles, chaisnes et joyaux qu'on croyoit estre là-dedans, on n'y trouva que des pierres.—C'est la façon de Ulespiègle[257], dit une qui avoit leu les romans. Sur ce mot, on couppa le discours pour entretenir madame l'accouchée de tout ce qui s'estoit passé en ses dernières visites. Pour l'heure, dit-elle, je me porte bien; je voudrois qu'il me fust permis de sortir, je serois bien ayse de prendre l'air: aussi y a-il long-temps que je suis icy renfermée[258]. Comme de fait, je ne sçay comme penser que cela se soit fait de demeurer si long-temps en couche, veu que les premières visites se firent l'après-disnée du vingt et quatriesme d'avril, et nous y sommes encor. Toutesfois, c'est peut-estre à la mode des Hebrieux, qui devoient estre en leurs couches, quand elles s'estoient deschargées d'une fille, l'espace de quatre-vingts jours; encore seroit-ce davantage despuis le temps.

L'accouchée, estant battuë de tant et tant de discours et rapports qu'on luy venoit faire de jours à autre, pria sa mère de congedier la compagnie, et de ne prendre en mauvaise part tout ce qui avoit esté dit chez elle. Sur cet adieu, toutes les bourgeoises prirent congé d'elle, avec toutes sortes de reverence et de courtoisie, et moy particulierement, qui sortis le dernier, et eus le bonheur[259] de voir l'enfant dont est question et du quel on attent le baptesme. De vous dire en ce lieu si c'est un masle ou une femelle, ce seroit trop entreprendre; j'ayme mieux attendre à la première occasion.

LE RELEVEMENT

DE L'ACCOUCHÉE
[260].


Puisque, par l'ordre le mieux temperé de la nature, chacun est obligé de suivre les traces et les vestiges de son naturel, on ne doit s'estonner pour le jourd'huy si je ne sçay quel crocquant de ce siècle a voulu quitter le plus specieux de son exercice pour s'avilir dans une intemperance aussi légère que la poudre, et autant inconstante que les vents et les fumées; toutesfois ses années et sa qualité devant faire rougir toute insolence dans un silence de discretion, c'est ce qui fait à cognoistre aux ames plus grossières que toutes choses sont sujettes à faire joug à l'inconstance, et qu'il n'y a rien de si stable et de si permanent qui ne reçoive des divertissemens très importans à la police des bonnes mœurs.

Excusons-le, il est sur l'aage, il est chargé de beaucoup d'enfans, et sur tout d'une grande fille qui ne peut trouver un bon party faute d'escus; et puis il est nouvellement relevé de maladie, qui fait que ses esprits sont alienez, ou du moins fort engagez dans la diversité des choses, ne considerant pas qu'en se gaussant de la comedie l'on rit de luy à gueule bée, de ce que la volupté s'exerce fort frequemment en son logis par le concert ordinaire d'une musique qu'il semble vouloir excuser, toutesfois en plusieurs et diverses compagnies; et neantmoins, comme j'ay apris d'un escholier nouvellement revenu de l'université de Poictiers, la comedie et la musique pari passu ambulant, estans d'une mesme cathegorie, d'une mesme trempe et d'une mesme composition: car, si la comedie imprime des dissolutions dans les esprits, la musique n'en faict pas moins, et si l'une resveille les sens, l'autre les jette à la renverse.

Passons outre. On a cy devant parlé au Caquet de l'accouchée pour et contre la France en certain endroit, et contre plusieurs et diverses personnes de qualité, et a-on voulu blasmer ceste benigne et courtoise nation de ce qu'elle toleroit des theatres publics deffendus du temps et du règne de sainct Louis; mais à cecy il n'y a que redire pour le jourd'hui: omnia tempus habent, ce disent les vielles; et puis il n'y a que ce bon diable de Tabarin et Desiderio de Combes qui exercent ce metier et ce passe-temps, l'un donnant des remèdes pour l'exterieur, et l'autre pour ce qui est de plus exquis, de plus cher en ce monde, ainsi que nous tesmoignent la diversité des cures par eux faictes[261]. A bon chat bon rat, il n'appartient qu'au savetier à parler de sa serpette, à l'yvrogne de sa bouteille, au petit mercier de son filet et de ses allumettes, aux femmes de cacqueter à double rattelée, et aux oysons de chier par tout (non omnia possumus omnes)[262]; il est vray selon le dire de la garde de l'accouchée, qui a le fessier plus gros que n'eut jamais la haguenée de Gargantua, car il faut s'estonner comme un homme de merite et de qualité s'est amusé à la ruelle d'un lict pour entendre et escrire tant de sornettes[263], qui ne sont pourtant bien racontées, puis qu'il a accommodé le stile de son discours avec des mensonges nonpareils.

—Sur quoy la servante de chambre du logis, esmerillonnée au possible, autant desireuse de sçavoir et de gouster de tout comme peut estre sa maistresse, remonstra à la dite garde d'accouchée[264] qu'il valloit mieux mentir un peu pour contenter le monde que de laisser son esprit enroüillé, et qu'estant de la confrairie de ceux qui vont à pied pour le present, qu'il n'estoit pas mal seant de faire telles sortes d'escritures, puis qu'on ne faisoit plus de consultations.

—Il est vray que c'est une pauvre chose que l'oisiveté[265]; mais aussi quel profit de discourir de plusieurs dames que ne luy sçavent point de gré, et qui sont maintenant ses capitales ennemies, et lesquelles, au besoin, l'ayant rencontré sur pareilles entrefaictes, lui feraient vuider le pot à pisser pour penitence?

Sur ces entrefaictes arriva la cuisinière, laquelle, pour mettre la garde[266] et la fille de chambre d'accord, leur dict: N'est-il pas vray ce qui a esté escrit ces jours passez? la mère de madame ne se plaignoit-elle pas de tant d'enfans que sa fille a depuis sept ans en çà qu'elle est mariée? Par sainct Jean! cela est vray, et si je sçay bien pourquoy elle faisoit tant de plainctes, car la galande, encore qu'elle soit assez incommodée, l'appetit de paroistre ne la peut quitter, et, toute surannée qu'elle puisse estre, elle ne laisse pas de dire par fois qu'elle est grandement obligée à Tabarin. Aux bons entendeurs salut[267]: la fontaine de Jouvance est tarie, c'est pourquoy cet homme est nécessaire; et si ce vieil registre d'amour a faict tant de plainctes devant l'assemblée qui estoit dernierement au logis, il ne faut pas que l'on s'en estonne, car elle voudrait que toute sa lignée fust de la coste de sainct Louis, pour paroistre selon son dessein.

Ce discours ne fut pas si tost finy qu'une petite muguette de la rue Sainct-Martin entra dans le logis pour sçavoir de la disposition de madame l'accouchée, et pour avoir l'honneur que de s'offrir à son service pour le jour de son relevement, où elle ne fust pas si tost entrée, qu'un certain clerc qui va tantost au pair avec son maistre, à cause de quelque gentillesse dont il est pourveu, luy demanda: Hé bien! Madame, que dit-on du Caquet de l'accouchée que l'on a faict imprimer ces jours passez? N'en avez-vous point encor eu la lecture?

—Vrayement, respondit-elle, c'est un discours assez jolly, et duquel j'ai receu un infiny contentement, principalement sur ce qui est recité d'une damoiselle qui jettoit des soupirs gros comme des boulets de canon, de ce qu'il y a tant de peine à se garantir des accidens qui arrivent aux financiers, faute d'estre alliez à quelque gentil-homme de remarque, car son mary a fait perdre plus de pas à un mien amy pour le payer de la pension que le roy luy donne qu'il n'y a presque de jours en l'an.

—Comment! luy respondit ce mignon de clerc, vous la cognoissez?

—Ouy, asseurement, je la cognois, et à mon grand dommage! Mais n'en parlons plus. A Dieu, Monsieur; je m'en vais sçavoir la disposition de Madame.

Ainsi elle monta en la chambre, et laissa choir de sa pochette, sans y songer, un certain papier enveloppé où[268] la suitte du Caquet estoit escritte, qui commençoit par ces mots: «Je m'estonne de ce que l'on a introduit en l'assemblée de l'accouchée de ce temps tant de personnes et de tant de sorte d'estoffes, avec si peu de règle et avec tant de confusion, d'autant qu'au siècle où nous sommes la ruse possède tellement les esprits d'un chacun, qu'il n'est pas à croire qu'une damoiselle allant voir quelque accouchée se fasse assister de sa suivante si d'avanture elle ne l'envoye en une antichambre ou dans une salle, selon que le logis est composé, afin que par ainsi les reigles de toutes libertez soient observées, ausquels lieux je vous laisse à penser ce qu'il s'y faict aucunesfois, tesmoin la fille d'un sergent à verge qui abandonna y a quelque temps son père, vieil qu'il estoit, pour suivre partout Madamoiselle, à cause qu'elle luy faisoit porter l'attour.

«Il y a aussi grand sujet de blasmer le secretaire du Caquet, puisqu'il a introduit avec mensonge et avec imposture une simple servante en ceste assemblée si notable: car, parmy des dames de qualité, aucunes desquelles ont amassé plus de rentes et de revenus en dix années que n'avoient autresfois vaillant les plus grandes dames de la cour, quelle apparence! C'est faire tort à l'ordre du siècle et mettre tout dans l'ancien cahos. Non, non! si telles crocquantes ont envie de causer de leur butin, ce n'est point en compagnie, ainsi que dit monsieur le secretaire; c'est avec mon compère le savatier, ou avec quelque ravaudeur qui leur est affidé, et qui le plus souvent leur resserre leur butin: aussi à ces drosles-là on leur va bien tailler de la besogne, car, au lieu de faire les galans, sans contredit il faudra qu'ils prennent lettres de maistrise malgré eux; transeat, le danger n'est pas grand: quand au corps de ces canailles il y aura jurande et maistrise, ils songeront davantage à leur profit, et ne serviront plus d'espions comme ils font aux coins des ruës; et quand à mesdames les servantes, elles n'auront plus la peine de se confesser du revenu de l'ance du panier, qui leur sera une consolation à leur esprit et une esperance de mieux faire que celles du passé, lesquelles, après avoir bien ferré la mule et s'estre pourveuës à leurs fantaisies, ont esté contrainctes enfin d'achepter une escuelle de bois: tesmoin une certaine galande qui se voit maintenant entre midy et une heure à la porte de monsieur le président ou aux environs, attendant la caristade.»

En suitte de ce discours il y avoit une reprimande contre l'autheur du Caquet de l'accouchée, en consideration de ce qu'il avoit recité d'une marchande de soye de ceste ville, qui disoit avoir vendu pour douze cens livres d'estoffes pour la fiancée d'un thresorier de Picardie. Aussi quelle apparence de se gausser ou dire que l'on s'est gaussé d'un homme de ceste qualité pour avoir fait une petite despence, car encores qu'il n'ait que douze cens livres de gages, n'y a-il pas le tour du baston, qui vaut mieux que tout, et qui peut entretenir le carosse et les laquais, outre l'ordinaire du logis? Laissons là les thresoriers, c'est un crime d'en parler en temps de guerre: le trouble du temps et leur bel esprit les licencie; bref, il n'est pas temps d'en faire la recherche: nous sommes en un temps d'estat auquel les armes sont de requeste, et le conseil des anciens guerriers plus que celuy des magistrats, si ce n'est dans les villes bien policées et où la rebellion est en mespris, esquelles il n'y a difficulté quelconque que les femmes des notaires n'aillent au traquenar de l'ambition et de la braverie, puisque la continuation de la guerre a fait engager toute la noblesse de France jusques au moule du pourpoint pour trouver de l'argent à rente. Pour moy, j'en cognois une assez familierement, qui, sur ce point, aymeroit mieux cent fois mourir si quelqu'une de ses compagnes la surpassoit; aussi a-elle le maintien assez venerable, le discours assez affilé, et pour estre un peu noire de visage, elle n'en est pas plus laide sous le linge.

J'estimerois que ce papier estoit une espèce de responce à ce pretendu Cacquet de l'accouchée, car il y avoit, outre ce que dessus, l'apologie de la femme d'un advocat du Chastellet, que l'on disoit avoir mis son nez en ce petit discours de braverie, en laquelle estaient escrits ces mots: «Si les empereurs, par leurs constitutions et par leurs nouvelles, ont entendu declarer nobles les advocats, quoy qu'ils fussent de basse extraction, pourquoy voudroit-on aujourd'hui corriger leurs actions après s'estre advancez par leur vertu?» Aux nobles tout ce qui est de noble doit estre permis et toleré, et rien ne doit borner leurs actions que leurs propres volontez, qui font d'ordinaire leur refuge dans la bienseance, et non dans les opinions d'un ingrat et d'un insolent vulgaire, lequel tasche de s'eslever de jour en jour, au prejudice d'autruy, quoy qu'il n'aye que des aisles de cire le plus souvent. Donc, si les advocats portent en ce temps des soustanes de Damas au lieu de sayes, il n'est point si mal à propos qu'à un simple procureur qui n'aura que trois ou quatre presentations le long de l'année, qui ne sera honteux d'en faire de mesme; et puis, le règne de la confusion estant en lustre, ce n'est point à ceste corde-là qu'il faut toucher.

Après la guerre viendra la paix[269]; le roy estant de retour dans Paris, il donnera, Dieu aydant, si bon ordre aux desordres qui se sont coulez parmy le peuple, qu'à l'imitation de ses ancestres, la police qu'il introduira fera que chacun sera cogneu pour ce qu'il est. Alors le petit courteau de boutique ne portera plus le castor à l'envie de la noblesse et des hommes de qualité; il sera tout honteux de porter le petit bonnet à l'antique, et madame la bourgeoise sa femme sera toute gogueluë d'estre habillée de bon gros drap au lieu de vestemens de soye (ainsi qu'une trop grande licence a toleré depuis quelque temps). Ce sera lors qu'on ne tiendra plus de caquet des maris comme l'on faict; on ne parlera plus de leurs aydes, ny des offres de courtoisie qui se font par fois pour soulager le bon homme. Bref, tout sera remis en si bon ordre et en si bonne cadence, que les lieux destinez pour l'impudicité (quoy qu'ils soyent abolis depuis un long temps) seront neantmoins retenus et conservez pour celles qui font banqueroute à leur honneur.

A grands seigneurs peu de paroles; j'ay appris par le Caquet que l'assistance de l'accouchée estoit composée de plusieurs femmes et de diverses qualitez, lesquelles disoient chacune leur rattelée, et ainsi que leur conception ou leur envie les provoquoit: ce que je suis d'advis de croire si ladicte accouchée estoit quelque femme à l'occasion; toutefois, estant certain qu'il n'y a reigle si certaine qui ne reçoive son exception, ceste accouchée estant quelque peu relevée en qualité, il est à presupposer qu'il n'y avoit point tant de sortes de femmes comme l'on dit: car pour le jourd'huy, si une femme a vaillant cinq ou six mille livres [tant de ce qu'elle a peu apporter en mariage que du travail de son pauvre diable de mary][270], il faudra tapisser la maison par tout, paroistre en vaisselle d'argent; et, quand elle ne seroit que la femme d'un petit commissaire du Chastelet, il faut que le satin marche à toute reste, sans aucun soucy des deptes [quand mesme la fruictière du quartier viendroit tous les jours crier et brailler à sa porte pour estre payée de ce qu'elle a fourny pour son logis][271].

Voilà comme l'on se porte pour le jourd'huy dans les vains appas de l'ambition, ne se voyant presque si petit compagnon ny de si basse estoffe qui ne s'en face accroire en quatre parties, aymant mieux engager sa femme, son honneur et sa conscience, qu'il ne vienne à bout de ses pretentions et de ses procez, ainsi qu'a fait un certain gantier depuis peu de jours en çà[272], afin de faire le galland en son quartier, au prejudice d'un disciple de sainct Yves; et puis l'on parle du sieur d'Ambray, qui fit jadis un don à l'Hostel-Dieu de trois pains de succre pour soulager sa conscience. Vrayement, qui voudroit parler de tout le monde et de la sorte qu'il se gouverne, ce seroit un beau libelle! Les honnestes hommes, ce sont ceux qui vont bien couverts, et quoy que l'on ait un grand esprit et accomply des plus rares perfections, ce n'est plus rien; il en faut avoir à quelque prix que ce soit, faut chasser au loing la necessité; aussi bien, quand on a plumé la poulle et le poussin, les Pères de la Société absoudent tout, ce qui m'occasionne de dire ce que disoit autresfois un poète:

Impia sub dulci molle venena latent.

Ouy, sous les herbes plus fueilluës et plus espoisses, les serpens et coleuvres font leur retraicte, et soubs les honnestes apparences des vestemens du siècle, les plus pernicieuses conspirations prennent leur estre et leur naissance: tellement qu'il est mal à propos de se plaindre des eschevins[273] de nostre siècle, qui par fas et par nefas emplissent leur bource à la sortie de leur charge, si l'on ne dit qu'il y a un grand abus aussi à la distribution des deniers provenans de la succession de la reyne Marguerite: car, si Massey[274] se gausse de sa part du procez par luy intenté au Parlement, il y en a d'autres qui font bien leurs affaires; les uns en entretiennent le carosse, et les autres en font bonne chère.

Hé bien! l'on a grandement rompu la teste de madame l'accouchée, par la diversité des discours qui se sont tenus au chevet de son lict; quiconque s'est trouvé en ceste assemblée n'a pas eu le filet à la langue; bref, le silence a esté si peu observé en toutes les apresdinées, que la plus part de Paris y a eu son lardon, attendant que le reste fust preparé pour le Relevement; sur quoy ceste grosse vesse de garde (de laquelle a esté parlé cy-dessus)[275], mettant les mains sur ses roignons, dit assez effrontement: Par ma foy, Mesdames, vous en avez bien dit entre vous; mais je vous veux apprendre un bon tour qu'a fait autres fois un[276] procureur du Chastellet de qui la fortune estoit assez petite. Il faut que vous sçachiés que, se voyant ainsi reduit au petit pied, il trouva une très bonne invention de parvenir en peu de temps: c'est qu'il estoit procureur d'une partie qui contestoit au presidial un grand fonds et de grande importance, à quoy elle se trouvoit fort empeschée, à cause des chicaneries où l'on desiroit de l'embroüiller. La partie adverse, sçachant la necessité de ce procureur, courtoisement s'adressa à luy, et luy representa que s'il y avoit moyen de passer une sentence en sa faveur, qu'il y avoit dix mille livres à gaigner: ce qui ne fut pas si tost proposé qu'il fust effectué; et ainsi le procureur commença sa fortune, qui du depuis s'est bien accreuë, car, au retour de cette affaire, sa femme luy fit si bonne chère de la resjouissance qu'elle avoit, que l'appetit luy en vint souvent de faire telles expeditions. Aussi maintenant il est si riche qu'il ne se soucie plus guères de sa practique.

Sur ce discours, la femme d'un advocat dit tout haut qu'il ne falloit point trouver estrange si un procureur s'estoit laissé corrompre pour bastir sa petite fortune, d'autant que les gens de bien n'amassent rien, et qu'elle en voyoit un tesmoignage si certain en la personne de son mary, que pour avoir refusé de prevariquer en sa charge, et avoir esconduit un solliciteur qui l'avoit pressé de ce faire, que du depuis, au lieu de travailler comme il faisoit, il a esté contraint, pour vivre depuis un an, d'emprunter de l'argent à rente.

—Hé quoy! (ce dit une damoiselle de la ruë Saint-Martin), s'est-il tant engagé comme vous dites?

—Ouy, respondit une marchande du Palais qui voulut y mettre son nez: je vous asseure, Madamoiselle, qu'il m'en doit de beau et de bon; mais je ne daignerois le presser au payement, car, quelque malheur qui luy soit arrivé, il ne laisse pas de faire bon mesnage pour le peu de bien qu'il a[277].

Sur cecy, la femme d'un chirurgien commença de dire: Je ne sçay, pour moy, de quel malheur je suis talonnée. J'avois marié ma fille à un jeune conseiller, et luy avois fait une honneste advance, pensant qu'il deust faire des merveilles avec elle; et neantmoins je n'ay peu recevoir aucun contentement de ce mariage, combien que je leur aye donné à disner à tous deux l'espace de deux ans, ce qui m'a donné sujet de la retirer avec moy, avec si peu de ce que j'ay peu r'attrapper de son mariage.

—Madame, vous avez tort de vous plaindre de vostre gendre (dit la vefve d'un autre chirurgien, qui ne manque point d'appetit au faict d'amour); le moyen que Madame vostre fille puisse estre bien satisfaicte de luy, maintenant qu'il prend le frein aux dents, taschant de se rendre capable en sa charge! Vous sçavez qu'il a fait toutes ses estudes en trois ans, tant en grammaire, rhetorique, philosophie, que droict civil: c'est pourquoy il falloit[278] davantage se contenir dans la discretion et le laisser estudier encore quatre ou cinq années, et puis il eust faict possible comme les grands guerriers, lesquels, après leurs grandes courses et leurs grands travaux, sont bien aises de cherir la dame et d'en dire deux mots à leur loisir.

—Vous avez aucunement raison, repliqua ceste bonne femme; mais les arrerages d'amour sont bien difficiles à payer, et principalement par les hommes d'estude[279] [: car il n'y a rien qui les rende plus soucieux et plus saturniens que cest exercice. Ce n'est pas comme les cavaliers, qui ont tousjours l'oreille à lairte[280]]. Voilà pourquoy j'ay esté contraincte de solliciter et procurer le divorce, pour lequel nous plaidons maintenant au Parlement.

—Voilà pourtant qui n'est guère honneste, dit la femme d'un petit procureur du Chastelet qui s'estoit foulé la verge le jour de ses espousailles; vrayement, si j'eusse voulu faire de mesme pendant deux années, ou peu s'en faut, que j'ay jeusné, ce seroient de belles merveilles! Je vous diray, ma mère ne m'en a pas donné le conseil; aussi mon mary m'en affectionne fort, et, d'autre part, on n'en peut caqueter comme on faict des autres.

—Quoy! Madame, dit une marchande de la rue Sainct-Denis, estes-vous si sage et si retenue que de laisser passer votre jeunesse de la sorte? Pour moy, je vous asseure qu'il faut que je passe mon temps et que je paroisse, quand mon mary devroit faire encor une fois cession. Hé! que ne doivent point faire les femmes[281] [de quelle liberté ne se doivent-elles point servir? qu'est-ce qui doit servir de frein à leurs actions?], puis que les filles s'emancipent bien quand on attend trop à les marier? J'en cognois une de nos quartiers, laquelle je vous asseure estre bien advisée selon le temps.

Cela esmeut madame la relevée de sçavoir qui estoit ceste fille et ce qu'elle avoit faict pour son contentement, et, pour le sçavoir, dit à madame la marchande: Madame, obligez-moy tant que je cognoisse la fille que vous dites n'avoir faict difficulté de se pourvoir.

A quoy respondit ladite marchande que c'estoit la fille d'un pourpointier, qui avoit si bien practiqué sa mère de l'habiller à l'advantage que, peu de temps après, faisant comme le paon, qui se mire d'ordinaire à sa queuë, elle s'en seroit orgueillie si fort qu'elle auroit desdaigné d'estre pourveuë à un garçon du mestier de son père pour aller querir ses estrennes chez le fils d'un president.

—Il ne se faut point estonner, repliqua la relevée, si ceste fille a laissé aller le chat au fromage de la sorte, car elle a desjà de l'aage, et ne manque point de courage pour sa qualité; et puis, voyant qu'une sienne voisine avoit trouvé un bon party qui luy fait porter le satin et le damas, ne croyez-vous pas que cela ne luy ait faict du mal au cœur?

—Veritablement, respondit la femme d'un confiturier qui s'est efforcée d'envoyer son mary en paradis par eschelle, si je pouvois trouver d'aussi bonnes fortunes, Dieu sçait si je ferois l'amour à si bon marché comme je fais! car, estant soustenuë par des enfans de bonne maison, il n'y auroit personne qui m'osast regarder de travers, ny dire pis que mon nom.

Sur ce discours, la garde de laquelle a esté parlé cy-dessus, estant ennuyée de tant de sornettes, joint que l'appetit la tenoit autant au gosier comme il luy tient par fois au cul, ne fut honteuse de dire tout haut: Ne vous desplaise, Mesdames, si je vous interromps; il vaut mieux gouster à bon escient, puisque la collation est preste, que de parler tant d'amour comme vous faictes. Par ma foy, il vaut mieux n'en guères dire et en faire davantage. Çà çà, beuvons[282]! [le temps le permet, et puis nos maris n'y sont pas. Ce qui donna tant de hardiesse à la compagnie, qu']aussi tost les dames commencèrent d'escrimer du gobelet[283] et d'articuler des machoires à bon escient, observant chascune d'elles un silence nompareil[284]; après laquelle collation on print congé de Madame la relevée fort honnestement[285].

L'ANTI-CAQUET

DE L'ACCOUCHÉE.

M.DC.XXII.

In-8º.

Ces deux antiens advocats, d'Agues et Pilaguet, avec leurs venerables barbes, ont esté contraints de revenir au monde pour donner conseil à tous ces peuples qui venoient pour demander justice contre ce meschant et miserable qui a fait imprimer les satyriques du Caquet de l'accouchée et des actions du temps, où on a recogneu en plein fonds ce qu'ils croyoient estre fort caché.

Lesquels enfin, après avoir eu communication des libelles, ont esté quelque temps sans parler; puis, avec une gravité non pareille, prenans leurs barbes à deux mains, ont prononcé:

Courage, peuples; nous recognoissons que son erreur est vostre justification, car, tout ce qu'il a dit n'estant que le quart de ce qui se fait par vous, il aura une honte de voir commenter sur ses libelles, et declarer par le menu ce qu'il a obmis à dire.

Qui vous reprendra de vos vices si chacun en est entiché? Un sac à charbonnier ne debarboüille point. Ce ne sont que gouttes d'huille qui s'estendent sur les habits de ceux qui s'en voudroient mocquer.

Ce n'est pas pourtant sauver vostre honneur que de monstrer que la pluspart des peuples sont vicieux, si ce n'est qu'en ce cas personne ne vous jugera. Mais puisqu'on ne peut effacer une tache d'ancre que par une double laissive, encore la marque y demeure, il vaut mieux en couper la pièce.

Or, disons doncques, par forme d'additions, de qui parle-il le premier? de la consultation des medecins. Le pauvre ignorant! s'il eust esté du Palais, comme nous, il eust parlé du procez et differend des quatre medecins et quatre apoticaires, proche l'un de l'autre en un tripied, qui se querelloient à qui auroient de la pratique. Enfin, pour terminer ce differend, nous les avons accordez par arbitres, et ordonné que Vignon continueroit à donner des pruneaux aux petits enfans pour entretenir sa pratique; que S.-Jacques yroit jouer des orgues à Saincte-Croix; que Le Sec yroit tous les jours deux fois entretenir les religieuses de Montmartre, et que Charles monteroit sur son mullet pour faire bonne mine par la ville; et, pour le regard des quatre apoticaires, qu'ils sonneront dès le matin leur mortier en carrillon pour la feste de Negrepelisse et la bienvenüe de monsieur de la Force.

Et ce, sans prejudice des droits de Consinot, pour avoir medicamenté un certain procureur non marié, ruë de Mauvaise-Parole, d'un entrac[286] au coin des genitoires; donné conseil à tous les procureurs et advocats de se pourmener sur les remparts et aux allées de la royne Marguerite[287], en attendant le retour du roy et la paix concluë; et sur la requeste presentée par Moreau, son voisin, pour estre disjoint de l'instance, attendu les quatre cens escus de gages qu'il a de l'Hostel-Dieu, il est mis hors de cour et de procez et sans despens.

Puis après des charlatans et farceurs; ô monsieur le satirique! vous y venez à tard: nous avons ouy parler d'eux jusques aux enfers, qui disoient avoir si bien parlé grec, latin, espagnol, italien et françois sur leur eschaffaut, qu'ils ont tiré des Parisiens en pièces de cinq sols et huict sols, pour la vente de leurs drogues et chappellets, plus de trente mil livres[288] dont ils ont profité, sur ce deduit trois ou quatre cens escus pour la permission de charlataner; que l'on reforme quand on voudra: leur paquet est faict.

Il en veut aux femmes qui veulent estre braves. Pourquoy en parle-il mal? Que ne s'attaque-il à ceux qui les espousent et qui les trompent? Un marmouzet qui promet tout et ne tient rien, qui donne un estat et ne le peut entretenir, qui asseure sa fortune sur l'étiquette d'un sac et sur la ruine d'un païsan, meritent une couronne cornuë.

Il n'en parle que par envie: c'est qu'il ne peut estre eschevin, car il n'a pas le moyen d'achepter un estat de quartenier pour assister au banquet de la trahison, ou de gagner les voix à la brigue, comme fit jadis un charpentier contre le venerable Poncet, qui en est mort de melancolie. S'il ne sçait faire trotter les bouteilles pendant la brigue, il en peut bien torcher son bec. Mais quel profit y a-il de nommer des prud'hommes? Aussi bien sont-ils corrompus quand ils ont passé par là.

Ha! monsieur le satyrique, vous estes ignorant, ne vous desplaise, quand vous mesprisez la petite bourgeoise qui prend le chapperon de velours pour estre suivante de Madamoiselle; si vous eussiez pris vos lunettes d'Amsterdam[289], vous eussiez veu leur advancement: l'une espouse un foytte-cahyer des rentes des aydes, l'autre un procureur de Sainct-André-des-Arts, l'autre un sergent dangereux de la forest de Bondis, dont la race et posterité sera dispencée d'obtenir lettres d'anoblissement, et vous ne le considerez pas.

Il fait bien l'enhazé[290] quand il parle d'une pauvre servante qui se plaint de n'espouser pour son argent qu'un cocher ou un palfrenier, qui font d'une malle vigueur une genealogie d'enfans, et ce pauvre esprit n'a pas consideré que les hospitaux des Enfans-Rouges, du S.-Esprit[291] et de la Trinité, estoient deserts sans eux, qui les ont remplis de la semence d'Abraham.

Il veut empescher, ce semble, que le marchand n'aspire aux offices, et neantmoins ils ont cest honneur ès compagnies souveraines, tenans de la race dont ils viennent, de marchander pour faire justice, et eux seuls ont esté les premiers qui en ont commencé la corruption. Et de faict, avant que le marchand y entrast, il y avoit trop de gravité: on ne pouvoit, au temps passé, approcher ses conseillers, Sainct-Valerien, la Rochetomas, Vignolles, Ruelle, Regnard, Feu, et un tas d'autres des Parlemens et Chambre des comptes, dont la race est noble jusques à la quatriesme generation.

Tu t'abuse, satyrique: quel bien plus clair et plus liquide y a-il à Paris que le loyer des maisons aux garses et mal-vivans[292]? Et neanmoins tu tasche à l'abolir; il n'en vient que du bien. Premierement, on advance le loyer; si un commissaire chasse le locataire avant le terme, on est payé et on n'use point la maison; le tonnerre n'y chet jamais; elle n'est jamais vuide, car il y a plus de ces gens-là à loger que d'autres. Il n'y auroit point de charité de les renvoyer aux faux-bourgs[293].

Tu pense avoir tout dit le plus important affaire des huguenots quand tu parle de la taille qu'ils payent pour faire la guerre contre le roy; tu t'abuse et ne le saura jamais, si ce n'est par un traistre et renegat comme Cahyer, car la première chose à observer en leur religion, c'est d'estre secret, escouter tout et ne parler point, et en faire advertir les Cercles[294] par les espions, sur peine d'excommunication.

Je croy que tu est borgne et aveugle quant tu ne contemple pas les beaux heritages et grandes possessions de ces anciens brigueurs de pratiques, qui subsistent encor à present, scis rue Fripaut[295], Fripillon, consistans en menus drappeaux que l'on ramasse à faire du papier.

Et quoy! tu te mocque d'un procureur qui escrit en grosse lettre! mais cependant, à la barbe de tous ses compagnons, il a si bien fait par ses diligences et la faveur de ses amis qu'il a attrapé la pratique du messager de Chartres, et de fait il y a treize mois qu'il presente des placets pour avoir executoire pour la conduite d'un prisonnier.

Tu es bien sot de ne pouvoir nommer par nom et sur-nom les usuriers; le grand nombre t'en crève les yeux, et, par despit de ce que l'on en dit, on fera le party du remboursement des notaires, à fin que lettres de change ayent lieu.

Pourquoy crie-tu après les cuisiniers qui font trop bonne chère à deux pistoles pour teste, puis qu'ils sont cause de la prestance et gravité des hommes, qui, avec un ventre de grenoüille, marchent d'un pied large, le visage enluminé, meprisant et ne songeant pas à ceux qui ont faim?

Vous ne dites rien de nouveau. On estoit bien contraint au temps passé de se passer d'un honneste valet bien vestu avec un manteau; mais vous ne sçavez pas qu'il n'y avoit pas aussi tant de fils de putains à Paris pour faire des lacquais, et si on ne portoit point en ce temps-là de poulets.

De quoy se soucie ce causeur satyrique si nos lacquais portent l'espée[296] après nous? C'est pour leur apprendre le mestier de tirelaine, car, quant ils nous ont servy cinq ou six ans, nous leur donnons quinze ou vingt escus de recompense pour achepter un manteau rouge[297], pour estre les Achiles d'un bordel ou guetteurs d'un coing de ruë[298].

Il croit depriser M. de Soubize quand il dit (errari), et il ne voit pas qu'il a imité ce vieil capitaine Anguerrant de Marigny[299], qui s'est fait poser sur le portail du Palais[300] pour s'enfuir le premier lorsque le feu brulleroit les roys.

Il a tort d'accuser en general ceux qui donnent invention de trouver argent pour le roy, puis qu'il sçait en sa conscience que cela procède de la subtilité de Roüillart; qui, pour en faire les memoires, a couppé un bureau à l'entrée de la chambre sans payer finance.

En mesprisant les commissaires et sergens qui ne font aucun rapport à la police, pour le moins j'eusse excepté Cordier et Brullon, l'un pour estre empesché à recevoir les loyers des maisons du Pont-Marchand, l'autre à faire la distribution de la bourse commune des huissiers du mois d'avril; encor Brullon mérite loüange d'avoir esté secret et n'avoir decouvert au roy ce grand fonds, qui sans doute eust esté pris pour faire la guerre.

Si les procureurs de la Cour et greffiers des presentations ne font rien, ils n'en vaudront que mieux à l'advenir. Ils ressemblent à la terre qui se repose: quant ils auront esté defrichez et que le temps sera venu, ils plumeront doublement; cependant ils apprendront à faire des fosses.

Tu te plains de Chalange[301], et tu ne cognois pas le plaisir qu'il a fait au plat pays lorsqu'il a fait l'edict des procureurs. Il est cause que, les clercs n'ayant plus d'esperance d'estre receus, ils se sont retirez en leur pays. Il s'en est engendré une pepinière d'esleus, grenetiers, sergens, receveurs du taillon et autres menus offices, pour lesquels achepter ils ont fait boursiller leurs parens et amis, qui sont à present secqs comme bresil.

Si on ne fait plus de ceremonies, d'enterremens ny d'offrandes, tu ne sçais pas que l'on a succé cela de la mammelle de Genève, pour tousjours appauvrir l'Eglise et faire quitter aux quatre mandians la partie?

Si l'Université a perdu son credit et son ancienne réputation, pourquoy en accuse-on les jesuites? Sçait-on pas bien que le recteur de l'Université, Dadonius, fuit auspensus in patibulo, quoniam agebatur de puero corrupto? On a eu crainte que chacun en fist de mesme?

L'on se plaint que les offices sont trop chers. O les sots! que ceux qui s'en plaignent imittent Canto et Testu: qu'ils appreignent à jouër des farces.

Sinon, qu'ils preignent ces deux beaux offices qui sont à present à Paris et à bon marché, courratiers de change et receleurs de fripperies: l'un fait trouver de l'argent à usure, l'autre fait derober son maistre. Sans cela, le Chastelet seroit bleu!

Pour ce qui est de vostre tableau et de la justice du roy, Monsieur le satyrique, nous en demourons là: nous n'avons rien à contredire. M. Pillaquet et moy, nous avons fueilleté nos annalles; nous n'avons rien trouvé ès règnes de nostre temps de pareil à celuy-cy, sinon qu'une chose, que les peuples ne meritoient pas un tel roy, qui en l'aage de vingt ans a suppedité les rebelles, corrigé les vices, et, par sa pietté et bon exemple en son règne, augmenté le culte divin.

LES ESSAIS DE MATHURINE

S. L. ni D. In-8. de 16 pages.

Quand je considère ma vie, je la trouve assaisonnée de beaucoup d'utilitez, encore que, passant par les ruës, les petits enfans clabaudent après moy: Aga! Mathurine la folle! Il est vray que je suis un peu entachée de cette maladie-là; mes sens peuvent estre quelque petit rances, et mon imagination tant soit peu moisie et disloquée. Cela m'est survenu des reliques d'un coup de carabine que je reçus en l'esprit à certain balet de Caresme-prenant. Baste! si je suis folle, c'est à l'occasion, laquelle j'ay sceu empoigner si bravement, qu'il m'en revient tous les ans plus de vingt et treize jacobus[302] de rente foncière[303], sans compter le tour du baston. Il y en a qui pensent estre d'estoffe de Milan et abiles gens, qui sont plus sots que je ne suis beste de plus de trois demy-septiers. Considerez (s'il vous plaist) que je passe mon temps gaillardement et sans melancholie. S'il me tourne sur l'ennuy, je vais visiter ma bonne amye, qui me fait manger de la souppe à l'hissope[304] toute de graisse et du lard jaune comme fil d'or, et au bout de la carrière mon paillard escu, avec le: Jusqu'au revoir, Mathurine. Mais aussi je suis tousjours preste à ses commandemens et au service des gallands hommes; paix ou guerre, à toute heure, mon harnois est en estat, car je le fais souvent fourbir avec un guimpillon fait à l'occasion et au contraire de ceux qu'on met dedans les pintes, car il est pelu au derrière du manche, et ceux-là le sont au devant. Vive la follie! c'est mon gaigne-pain. Parbleu! Tabarin profite plus avec deux ou trois questions bouffonnes et devineries de merde, ou de la chouserie, que ne fait son maistre avec tout son questo e un rimedio santo per sanare tuti gli morbi, parceque le monde ne veut plus que du badinage; aussi finit-il par la farce, afin qu'on se souvienne d'y retourner. La sagesse de ce monde est folie devant Dieu; cela me fait esperer que je seray en ce pays-là recompensée de double pitance, car je suis folle en cestuy-cy assez pour deux. Si tous les fous et les folles portoient crouppière, il y en aurait beaucoup à Paris qui auraient le cul escorché, car il y en a de toutes sortes, de tous aages, de toutes qualitez, de tous sexes; mais ils sont foux à la mode qui trotte, et, comme dit maistre Guillaume[305]:

Les uns sont foux et les autres estranges,
  Aussi merveilleux que beaux anges
  Descendus tout nouveaux des cieux,
  Et ceux-là sont foux glorieux.

Il y en a d'autre qualité qui sont les Bertolles[306], et graves; ils portent fière arrogance. Vous les jugeriez, à leur mine de serrer les lèvres comme une nouvelle mariée, que ce sont des Socrates. Donc cette sorte de foux, comme dit maistre Guillaume:

Selon nos bons docteurs devots,
Nous les appelons sages sots.

Et s'ils ne rencontraient qu'un etronc, ils y trouveraient à remordre: rien de bien fait s'ils ne le font. Si par cas fortuit ils avoient aperceu quelqu'un sur quelqu'une, foy de ma vie! il faudrait aussitost feuilleter toutes les postures de l'Aretin plustost qu'il ne trouvassent à redire à la leur; peut-estre voudroient-ils informer contre eux, disant que celle-là n'est pas à la mode. Bran pour cette liste de reprenans! bonnes gens, on le fait à toutes modes, et s'en est-on assez bien trouvé il y a desjà plus de quatorze jubilez. Vous autres lisarts, n'avez-vous point leu certain petit fatras qui se nomme le Caquet de l'Accouchée? Si avez, sans doute, si avez: car il s'en est vendu plus que d'epistres familières ou d'oraisons des saincts. Certain mescontent m'en présenta l'autre jour un, la lecture duquel m'eschauffa grandement les aureilles. Je cogneus aussitost à la trempe que c'estoit un autre mescontent qui l'avoit forgé, à qui on avoit refusé quelque lippée à butiner. Ces gens-là n'ont pas d'esprit pour se conduire, et voudroient qu'on leur baillast le timon de l'estat à chevaucher. C'est une pure ambition de se voir un jour canonisez auprès de maistre Pierre du Coignet[307]; mais le chapitre Nostre-Dame est empesché avec le promoteur à la reformation des prestres qui chantent aux cabarets la desroute des huguenots et la mort du grand turc. Vous cognoissez bien à cette heure que c'est un fol à la mode qui est l'autheur du Caquet. Il dit au commencement de la litanie qu'il avoit esté malade; il n'y a si busard de medecin qui ne cognoisse assez qu'il l'est plus que jamais et est en danger de mort, car desjà ne sçait-il plus ce qu'il dit. Quiconque fait le caqueteux, jamais bonne pie ne le couva, et la semence de quoy il fust basti estoit esvantée aussi bien que sa cervelle. Peut-estre eust-il rongé, ainsi que comme les vipereaux, le ventre de sa mère pour sortir, s'il ne se fust trouvé vers la basse cartière une bonde grandement large; et, parcequ'elle luy fit baiser son cul en passant, qui estoit un peu sale pour lors, et deceda sans hoirs legitimes de son corps, il voudroit prendre à tasche tout le sexe feminin. J'ay ouy dire à Pierre Dupuy[308] qu'il est bastard de Pasquin; maistre Martin asseure sur ses grands dieux que Marphore[309] l'a fait; le docteur croit que ç'a esté maistre Josse avec le Picard: tant il y a je n'en sçay rien davantage, sinon qu'on le tient frère de Merlin d'Angleterre, et le cognoist-on assez à son Caquet, lequel n'epargne ni Tibault ni Gautier qui ne soit pincé sans rire. Agarez, Mesdames, comment il met sur le trottoir femmes, filles, vieilles, jeunes et de toutes conditions, chetives, qualifiées et publiques, indifferemment, qui ne pensèrent jamais à ceste caqueterie non plus que je fais à estre souldan de Babylone ou à prendre Montauban. Ne prenez-vous pas garde qu'il faict comme le singe qui tire les chastaignes du feu avec la patte du levrier[310]?

Je m'aperçoy qu'il voudroit que les femmes fussent l'echo de ses mauvais discours, et le charlatan le suject de ses reformations d'estat. Pour moins de cent escus, je vous en diray quelques raisons. Item, premierement, commençons par l'isle du Palais. Sa curiosité luy fit accoster Tabarin: Estes-vous malade?—Ouy, respond le caqueteur; mais cette mienne maladie n'est point contagieuse, elle n'est qu'en l'esprit. Je me suis adressé à vous, sçachant que vous aviez credit auprès de vostre maistre, qu'on estime sçavoir des choses merveilleuses.—Ouy dà, repliqua Tabarin; il sçait des choses merveilleusement merveilleuses, il sçait des passe-merveilles, et si ne fut jamais chiche de ses sciences. Regardez de laquelle vous desirez afin d'estre satisfait. Mais je feray bien tout ce que desirez: je ne suis guère moins clerc que luy; dites hardiment.—Je desirerois, honneste seigneur, dit le galland, si vostre benevolence me l'accordoit, sçavoir de vous le moyen de cognoistre quand une fille est pucelle ou non, par ce qu'outre ce que je pourrois esviter d'estre cornard, cela me profiteroit parmy les compagnies.—Lors Tabarin respond: N'y a-il que cela? je satisferay à ce que desirez; mais il faut cognoistre avant qu'aymer. Allez vous en chez Cormier[311] faire apprester le disner pour faire plus estroite cognoissance; ce pendant je vais consulter tous mes plus exquis secrets, et je retourne à vous dans une heure.—Je vous y attendray, dit le caqueteur.—Je vous iray trouver, dit Tabarin; faictes mettre le vin au frais.—L'un et l'autre se trouve à son assignation, qui disnèrent à plain fonds. Après le disner, Tabarin commença: Monsieur, ce ne sont pas icy questions du chaffaut[312] ordinaires ny à tous les jours; davantage, toute peine requiert salaire, comme vous sçavez.—Je le sçay bien, dit le curieux; aussi je vous prie de mettre ceste couple de pistoles en vostre pochette. C'est attendant mieux.—Bien, dit Tabarin; escoutez... Lorsque vous desirez sçavoir si une fille est pucelle, mettez une de vos mains sur son robin, vous m'entendez bien? puis au mesme temps soufflez-luy au cul, et si lors vous sentez le vent à la main, elle est indubitablement percée[313]. Et en voilà pour votre argent. Adieu, Monsieur. C'est un des vieux tours de Tabarin, qui planta son homme à reverdir. Et ainsi le caqueteur demeura affiné; neantmoins, il protesta d'appel pour se venger du bouffon et affronteur. Voilà un des pourquoy; l'autre raison et second pourquoy il en veut aux femmes, c'est, par saincte Barbe! de cholère que pas une n'a daigné l'escoutter ny faire estat de son Caquet,

Sinon une vieille Picarde
Qui alloit crier la moustarde;
Encor n'en pouvoit-il jouïr.

Aussi est-ce un haubereau bien vuidé. Jan Voüaire, je suis laide et folle, ce dit-on: je ne voudrois pas luy avoir presté mon cul à baiser. Pleut à sainct Fiacre[314] que le sien fust plein d'eau boüillante! La necessité l'avoit mis si bas qu'il ne se pouvoit gratter, d'où lors il fist profession de porteur de rogatons[315], et fut contrainct d'accoster toutes sortes de femmes d'un beau s'il vous plaist, qu'il a maintenant changé avec un office de macquereau et une place aux maisonnettes. Vous l'eussiez veu aller de porte en porte comme le pourceau de sainct Anthoine[316], car il demandoit aux dames de haute gamme auctorité, aux damoiselles courtoisies, aux presidentes, maistresses des requestes» conseillières, faveur; aux advocates conseil, aux greffières coppies, aux procureuses soing, aux clergesses ecriture, aux soliciteuses diligence, aux financières argent, aux bourgeoises logis, aux marchandes estoffes, aux boulangères foüace, aux rostisseuses chair, aux cabaretières vin, aux chambrières service, aux artisans credit: surquoy estoit fondé le plus fort de toutes ses esperances;

Mais s'en cognoissant frustré,
Il buvoit comme un chastré...

et deux, joint que, s'estant adressé à une vieille boismienne qui vit en reputation d'avoir beaucoup d'experience et sçavoir les secrets plus cachez de la nature, qui vous dit proprement une bonne aventure et tire finement la croix[317] d'entre les mains des lourdaux comme luy. Or, se trouvant pour lors amoureux jusqu'au troisiesme degré et en estre malade, il se resolut d'avoir recours à ceste vieille femme piternelle pleine de pechez mortels, dont il luy arriva presque pareil tour à celuy que Tabarin luy avoit joué. A l'abord, il salüe ceste nymphe de Pluton, disant: Ma commère, ne voyez-vous point à mon visage que je suis malade?—Si fait, dit-elle; mais remède à tout, sinon à la mort. Dictes vostre mal: il y en a de plusieurs sortes. Ce n'est pas la peste, au moins?—Non, fist-il.—Hé bien! fist-elle, il n'y a pas mal de teste, d'estomach, bras, jambes et autres?—Mon mal est pire que tout cela, dit-il.—Je me veux donc retirer de vous, fist-elle.—Ne craignez point, fist-il; encore qu'il soit dangereux, si n'est-il point contagieux: en un mot, c'est un mal de femme.—Est-ce point, fist-elle, le mal de matrice?—Non, fist-il; j'entends causé par femmes.—Je vois, fist-elle; soit, il y a chancres, poulains, pisse-chaude, verolle, cristaline et autres appanages et circonstances. De quel genre est-il espèce?—Rien, rien, fist-il; le mal qui me travaille est mal d'amour.—Ha! ha! ha! ha! s'écria l'adadé[318]; courage! vous n'en mourrez pas; et puis je suis la superlative: vous avez trouvé chausse à vostre pied. Il n'est au monde ma semblable, preste à tout comme la chambrière d'un ministre, experte au metier des femmes. Je sçay oster les rousseurs et effacer les lentilles du visage; je fais de l'huille de talc et autres fars excellens en perfection; je sçay faire resserrer maujoint[319] tellement, qu'une coureuse seroit prise pour la plus pucelle du monde. Bref, elle luy monstra une boüette à divers estages pleine d'oignemens, sur le couvercle de laquelle estoit escrit:

Le medicament de ceans
Est bon pour guerir les urines
Et pour apprivoiser les grives,
Les jumens guerist du farcin;
Il fait faire maint larcin,
Il fait chanter les renaissailles,
Il fait cornes aux demoiselles.

Or, de ce que vous demandez, c'est un autre item. Parlons doucement... J'ay apporté certaine racine de la petitte Ægypte qui vous fera estre aymé des plus huppées. N'est-ce pas ce que vous cherchez?—C'est cela mesme, dit l'homme. Que ce me seroit un grand bonheur si, par vostre moyen, je pouvois rencontrer cette science et arriver à mes intentions!

—Voulez-vous que je vous dise, Monsieur? respondit la vieille; je ressemble aux archevesques: je ne marche point si la croix ne va devant.—Je l'entends ainsi, ma bonne amie, dit le caqueteur; voilà de quoy rire.—Baillez, Monsieur: à laquelle en voulez-vous? Dictes-moy seulement son nom, et je la contraindray de venir coucher avec vous. Nostre homme, frottant ses deux bras et demy extasié, la luy nomme, prennent heure et complottent ensemble: de sorte qu'elle luy meine coucher une sienne camarade, hideuse et difforme, capable de faire mourir un delicat. Il prit son desduit avec elle. Le lendemain, voulant contempler son beau sujet au jour, se pasma de honte et de peur, croyant que ce fust Proserpine. Il voulut fuyr; elle le suit, disant: «Payez-moy. Mercy Dieu! est-ce ainsi que vous renvoyez le monde après vous en estre servi[320]?» Et trois! Aussi, en mesme temps, le medecin luy avoit promis certaine drogue pour le rendre plus robuste au jeu d'amour, et d'effect fist son ordonnance, laquelle fut expediée par un apothicaire qui fist le quiproquo: car, au lieu de bailler ce qui estoit pour luy, il envoya une medecine qui avoit esté ordonnée pour un cordelier affin de luy lascher le ventre, et la sienne fust baillée au beau-père, qui tous deux se trouvèrent bien estonnés à l'heure de l'operation. Voilà le dernier pourquoy. Et ne sçachant à qui se doit prendre de son malheur, il a faict ceste levée de bouclier. L'esprit me tourne quand je pense à cest entendu en affaires, et acheveray d'affoler s'il n'est chastié comme un ennemy de nature. Sus! sus! que chasque femme barboüille son visage d'une bouse de vache! que chasque fille salisse sa moustache d'un crachat, et que toutes ensemble luy baillent tant de maledictions, qu'il ne puisse fienter qu'à coups d'estrivières et coure le garrou[321] tout le reste de sa vie! C'est un infame qui ne sçait un seul secret de femmes: nous sommes trop advisées pour babiller ainsi qu'il dit; il n'y en a pas une si sotte, si elle avoit laissé aller le chat au fromage, d'en parler à sa plus confidente. Nous avons cela de serment entre nous de le taire; il n'y a si jeunette qui n'aymast mieux le faire vingt coups que d'en parler une fois. Il suffira, pour ce coup, d'avoir descouvert le subject du mescontentement du caqueteur: ç'a esté consultant le trepied d'une sybille ancienne qui sert à soustenir mon pot à pisser. Cela me fait paroistre, quand il me plaist, plus sage que trente-cinq Diogènes. Jusqu'au revoir. Je ne puis vous entretenir plus long-temps pour ce coup, d'autant que le comte Mansfeld me fait perdre le caquet. Il faut envoyer tous les caqueteurs et de loisir au devant de cest yvrongne pour hoguiner toutes les femmes qu'il traine, de peur qu'il ne vienne empescher la continuation du travail de l'hostel de ma bonne amie, manger noz melons et boire nostre piot. Je vais descouvrir s'il est point retourné en voyage à Nostre-Dame de l'Espine[322], et puis je le vous envoyeray dire par ce mesme messager. Sanita et guadaigne.

LA

SENTENCE PAR CORPS

Obtenue par plusieurs femmes de Paris contre l'autheur des Caquets de l'Accouchée.

A Paris, chez le baron de l'Artichaux, demeurant
au royaume d'Ecosse, à l'enseigne
du Cailloux de bois.

M. DC. XXII[323].

A tous ceux qui ces présentes lettres verront, Gautier Garguille[324], gentilhomme ordinaire de sa chambre et garde de la place de l'Isle du Palais, à Paris;

Sur la requeste faitte en nostre audience de la place de l'Isle du Palais, par

Mondor, parlant pour discrette et honorable personne le sieur Tabarin, demandeur en reparation d'injures ou invectives, selon l'intervention par luy faitte avec Pierre du Puis[325], parlant pour les femmes et bourgeoises de cette ville de Paris, complaignantes pour raison des faits mis en avant par les Caquets de l'Accouchée, imprimés et publiés en cette dite ville de Paris; comme le sieur de Decombes, parlant pour Grattelart[326], autheur des dits Caquets, defendeur et opposant, et en vertu du defaut donné contre le dit Pierre du Puis au dit nom; après avoir ouy le dit Mondor au dit nom, qui nous a remontré que mal à propos, indiscrettement et contre la règle de toute societé humaine, le dit Grattelart avoit fait escrire en ses Caquets plusieurs paroles scandaleuses et injurieuses, et qu'il en requeroit reparation; et le dit Pierre du Puis, pour les dites complaignantes, parties principales, a conclud pareillement à la dite reparation, et, adjoustant à icelle, a requis condamnation de tous depens, dommages et interests. Nous avons condemné et condemnons le dit Grattelart à declarer, en présence du crocheteur de la Samaritaine[327] et du Jacquemart du clocher de l'eglise de Sainct-Paul[328], que mal à propos, indiscrettement et sans raison, il a fait escrire et publier, aux Caquets de l'Accouchée, plusieurs paroles injurieuses et scandaleuses contre l'honneur des femmes, lesquelles par elles seront rayées et biffées, et qu'il en demande pardon aus dites femmes et bourgeoises de Paris, et à Tabarin au dit nom, les suppliant vouloir oublier les dites injures et scandales; et outre condamnons le dit Grattelart ès despens, dommages et interests. En tesmoin de ce, nous avons fait mettre nostre sceau ordinaire de la dite place. Ce fut fait et donné en la dite audience par Jehan Farine[329], tenant le siége, le mardy vingt et douziesme du present mois.

Signé Guillaume[330].

Copie d'intervention.

Aujourd'huy, trois cens soixante et sixiesme jour de la presente année, est comparu, en chair et en os, Jehan de la Vigne[331], fondé de procuration authentique à luy passée par le discret et sage en teste, le seignor Tabarino, lequel a declaré qu'en consequence de la dite procuration il desiroit estre receu partie intervenante au procès meu, indecis et pendant ou accroché entre et au milieu de Grattelart, autheur des Caquets de l'Accouchée, et les bourgeoises qui se formalisent et scandalisent, pour y proposer ses defenses comme d'abus; et pour ce faire a constitué son procureur generalissime le dit la Vigne, auquel a donné tout pouvoir deçà et delà l'eau, dont le dit la Vigne a requis lettres, et a signé au registre.

Signé Gros-Guillaume.

Sentence sur l'intervention.

A tous ceux qui ces presentes lettres verront, Gautier Garguille, gentil-homme ordinaire de sa chambre et garde de la place de l'Isle du Palais, à Paris.

Sur la requeste faicte en nostre audience de la dite place de l'Isle du Palais, par Montdor, parlant pour discrette et sage personne le sieur Tabarin, demandeur en intervention avec les femmes et bourgeoises de Paris, contre Grattelart, autheur des Caquets de l'Accouchée, Decombes, parlant pour luy; après que le dit Montdor, au dit nom, a remonstré avoir grand interest d'intervenir en la dite cause pour les causes qu'il est prest desduire, et que le dit Decombes, au dit nom, a soustenu au contraire, nous avons receu et recevons le dit Tabarin partie intervenante au procez d'entre l'autheur des Caquets de l'Accouchée et les femmes et bourgeoises de Paris, et ordonnons que dans le premier jour il baillera les causes d'intervention, pour estre ordonné sur icelles ce que de raison.

Causes d'intervention.

Causes d'intervention que met et baille par devers vous Me Garguille, garde de la place de l'Isle du Palais, à Paris,

Le sieur Tabarin, demandeur en intervention avec les femmes et bourgeoises de la ville de Paris,

Contre le sieur Grattelart, defendeur et opposant;

A ce que, pour les raisons qui seront cy-après desduites, il soit dit par vous, Monsieur, que ledit Tabarin sera receu partye intervenante au procès, et obtiendra à ces fins, avec condamnation de tous despens, dommages et interests.

Il est à remarquer que le sieur Grattelart est homme fort sujet à mesdire des actions d'autruy, et sur tout il paroist ès Caquets de l'Accouchée qu'il a fait imprimer tout nouvellement, au scandale et dommage de la bonne renommée des femmes et bourgeoises de cette ville, lesquelles, estant adverties, se sont voulu formaliser, et particulièrement la femme du sieur Tabarin, lequel s'est bien voulu joindre en la cause et prendre le fait pour elle, attendu qu'il estoit interessé en l'affaire.

Et de fait, il semble qu'elle a juste cause de remonstrer que son mary n'est point charlatan et qu'il ne le fut jamais, et que l'on ne sçauroit faire escrire qu'elle soit femme de charlatan sans offenser l'un ou l'autre, dont elle pretend avoir reparation qui ne luy peut estre desniée, sauf correction: premièrement, ce que la bonne vie de l'un et l'autre est notoire à tout le monde, et est à naistre le premier qui les puisse redarguer du moindre crime ou malfaict;

Secondement, pour autant que le dit Grattelart a malicieusement faict escrire qu'icelluy Tabarin est cocu et cornard, ce à quoy il n'a jamais songé, et qui ne se sçauroit passer sans son interest ou dommage;

En troisiesme lieu, pour autant que le dit Tabarin ne fust jamais capable de cornes que de celles qui sont en son bonnet, encores luy sont-elles odieuses; au moins dict-il qu'il ne les tient que comme gaige et pour celuy qui en aura affaire;

En quatriesme lieu, il vous remonstre que les cornes ne luy sont deües que pour en faire part aux marchands, et, de vray, Grattelart en aura à sa discrétion de telles qu'il luy plaira.

Partant, conclud le dit Tabarin comme dessus, ès despens, dommages et interests.

Coppie de la requeste presentée au sieur Garguille de la part des hommes et maris dont les femmes ont esté scandalisées par les dits Caquets.

Supplient humblement les marris des femmes scandalisées par les Caquets de l'Accouchée, disans qu'ils ont esté advertis qu'il y a procez meu, indecis et pendant par devant vous entre les dites femmes et le sieur Grattelart, autheur des dits Caquets, pour raison des injures, invectives et scandales qui y sont escrits, lesquels regardent les supplians, qui ont besoin de vostre provision. Ce considéré, Monsieur, il vous plaise ordonner que les dits supplians seront receus parties intervenantes au dit procez avec les dites femmes, icelluy Tabarin et le dit Grattelart, lequel sera à ceste fin aussi assigné pardevant vous-mesme, pour ordonner en outre ce que de raison, et vous ferez justice.

Au bas est escrit: Qu'on donne assignation, etc.

FIN.

TABLE ANALYTIQUE.

Alais (Conférences d'). 88, 158, notes.

Aliénor de Poitiers. Son ouvrage les Honneurs de la cour, cité vij, VIII.

Ancre (Le maréchal d'). Remplacé par Luynes. 67. V. Luynes, Mangot.

Andreini, dit Lelio. Joue à l'hôtel de Bourgogne. 9, note.
—Ses séjours à Paris en 1618, 1621, 1623, 1624. Ibid.
—Y publie son Teatro celeste. Ibid.

Ange (L'). Chirurgien. 128.

Angers. V. S.-Germain, de Vertus (la comtesse).

Angoulême (Le duc d'). Son conseil à ses laquais. 257, note.

Anne d'Autriche. Paie les frais du feu d'artifice pour la canonisation de sainte Thérèse. 49, note.
—Elle aime les contes de revenant. 74, note.

Arc (Jeanne d'). Son éloge. XXIV, 206.

Aremberg (Le comte d'). Secours qu'il amène au roi de France en 1567. 275, note.

Arlequin, Vient avec li Gelosi. 9, note.
—La reine est marraine d'un de ses enfants. Ibid.

Artigny (L'abbé d'). Ses Mémoires de littérature, cités 98, note.

Aubigné (Agrippa d'). Son Baron de Fæneste, cité 152.
—Pour la mode du paroistre. 178, note.

Aubry (Le président et la présidente). 150, note.

Auvray. Ses Satyres, citées 26, note.
—Ses vers contre les huguenots. 86, note.
—Portrait qu'il fait, dans une de ses satires, d'un goguelu à la mode. 105, note, 200.

Avenel (M.). Sa collection des Lettres de Richelieu, citée 68.


Baignolet (Marguilliers de) et leur procureur. 224.

Baronville. Son duel avec Dasquy. 40, note.
—Pendu en effigie au bout du Pont-Neuf. Ibid.

Bassompierre (Le maréchal de). Sa liaison avec Marie d'Entragues. XXII.
—Ses Mémoires, cités 57, note.
—Ses services au siége de Montauban, à celui de Montpellier, au combat des Sables-d'Olonne. 169, note.
—Fait maréchal de France. Ibid.
—Il a toujours des Suisses pendus à sa ceinture.
170.
—Il voudroit être connétable après Lesdiguières. Ibid.
—Il fera mieux d'épouser Mlle d'Entragues. 171.

Bassompierre (Louis de). Fils du maréchal et de Marie d'Entragues, mort évêque de Senlis. XXII.

Bautru. Chassé de la cour. 161.

Beaufort (J. de). Cité 39-40, note. note.

Beaumarchais. Beau-père de la Vieuville. Rigueurs contre lui en 1624;
il est pendu en effigie. 97, note.

Bellingen (Fleury de). Son Etymol. des proverbes, etc., citée 269, note.

Belot (J.). V. Mil-Monts.

Berigal (G. Peignot.). Son Hist. du Jaquemart de Dijon, citée 280.

Bermude (Le roy Dom). Donné pour père à sainte Thérèse. 50, 115.

Bertholde. Type des farces italiennes. 263-264, note.

Berulle (Le cardinal de). Sa mission à Rome pour le mariage du prince de Galles avec Henriette de France. 79, note 1.
—Pense à établir les pères de l'Oratoire au Luxembourg; achète l'hôtel d'Estrées. 80, note 2.

Berulistes. Leur opinion formelle contre l'exhérédation des enfants. 221.

Béthune (M. de). Ambassadeur à Rome, opposé à M. de Berulle. 79, note 1.

Beuvron (Le marquis de). Tué devant Montauban. 159, note.

Bistrade (La). Conseiller au grand conseil. 40 et note.

Biset. Son plan d'embellissement pour Paris. 41, note.

Blois. Luynes y fait conduire l'argent qu'il devoit employer pour l'armée. 64, note.

Boesselière. Son cabaret. 28, note.
—Prix qu'on y paie. Ibid.

Boileau-Despréaux. Au cloître Notre-Dame. 118, note.

Boiscourtier. Sa Requête générale, au nom des Parisiens, sur le voyage de S. M. 58, note.

Bonaparte (Nicolo). Sa comédie la Vedova, citée 273.

Bosse (Abraham). Sa gravure des Caquets, XXV.
—Sa gravure représentant un Quinze-Vingts. 199.

Boucher-d'Argis. Son Hist. abrégée des plus célèbres comédiens, citée 278, 281.

Bouillon (Le duc de). Dumoulin s'enfuit près de lui. 88.
—S'entend avec Mansfeld. 191-192, note.

Bourbonnois. Prix des charges dans cette province. 131, note.

Bourderet. Financier ruiné. 40.

Bourgoing (J.). Son livre la Chasse aux larrons, cité dans les notes des pag. 39, 40, 95, 165, 166, 182.

Bourgoing (Le P.). Fait les airs des psaumes chantés à l'Oratoire. 82, note.

Brantes. L'un des frères de Luynes; épouse une héritière de la maison de Luxembourg,
et devient duc de Luxembourg-Piney.
67, note.

Bret (Le), conseiller. 135.

Brossette. Son erreur sur l'Espadon satyrique. 115, note.

Brullon, huissier. 258.

Brunet. Son Manuel du Libraire, cité 116, note.

Bruscambille (Deslauriers, dit). Donné à tort comme l'auteur des Caquets. XXVII.

Bruyne (Mme la). De tavernière (boutiquière) devenue superbe marchande. 217.


Calvin. Son nom donné à un chien. 84.

Canillac (Le baron de). Tué devant Montauban. 159, note 2.

Canto. 259.

Castel (Jean). Son Miroir des pêcheurs, cité au sujet des Caquetoires d'accouchée. XIII.

Cenami, financier. 40, note.

Cepède (Alonse Sanchez de). Donné pour père à sainte Thérèse. 50, 115.

Chalange, fameux partisan. 182.
—Fait rendre des édits onéreux dont il partage les profits avec les ministres. 182, 183, 241, notes.
—Exploite l'édit contre les procureurs. Ib., 258.

Chamilly (Mlle de). Réfugiée au cloître Notre-Dame. 118, note.

Chapelain. Sa traduction de Guzman d'Alpharache, citée 15, note.

Charenton (Ministres de). Lettre qu'ils écrivent au roi et que Richelieu combat. 86, note.
—Fuite du ministre Dumoulin 88, note.

Charles, médecin. 250.

Chaulne (M. de). Frère du connétable de Luynes, d'abord appelé M. de Cadenet. 67, note.
—Fait maréchal à l'occasion de son mariage avec l'héritière de la maison de Chaulne. Ibid.
—Intercède pour Monsigot. 146.
—Il enlève au duc de Fronsac l'héritière du vidame d'Amiens. 147, note.
—Ses menaces à M. le Prince, prisonnier à Vincennes. 162, note.
—Il veut épouser la princesse d'Orange. 162, note.

Chevalier (Nicolas), le président. Fait instruire le procès du procureur général de sa justice. 27.
—Rend service à Luynes. Ibid., note.

Chevreuse (La duchesse de), veuve de Luynes. Son peu d'influence en 1622. XXI, 148, note.

Chevry (Le présid. Duret de). Protége Monsigot. 147.
—Son épitaphe satirique. 147, note.

Christine de Pisan. Son Trésor de la cité des Dames, cité VIII, XXXIII.

Clairmonde (Madame). Se fait damoiselle aux dépens de son mari. 222.

Clérac. Pris par les troupes du roi. 57, note, 113, note.

Cœuvres (Marquis de). Son ambassade à Rome; obtient le chapeau pour Richelieu 149, note.

Coignet (Pierre du). Son image à Notre-Dame. 265, note.

Collerye (Roger de). Cité XIV, XLII.

Combalet. Tué devant Montauban. 159, note 2.

Condé (Le prince de). Tout se fait par ses avis,
VIII, 67.
—Pourquoi il se prend de haine contre les huguenots et se mêle aux affaires. Ib., note.
—Menacé par Cadenet lorsqu'il est prisonnier à Vincennes. 161, 162, note.

Consinot, médecin de l'Hôtel-Dieu. Ses gages. 251.

Coquillart (Guill.). Cité XII, XXXVII.

Cordeliers. Leur rébellion contre la réforme qu'on veut introduire chez eux. 71, note 2.

Cordier, huissier. 258.

Cormier. Tabarin à ce cabaret. 268.

Cotel (L'affaire de). 142.

Coulange. Chanson citée, XV.

Courbouzon (Le sieur de). Empêche qu'on ne massacre l'ambassadeur d'Espagne. 162, note.
—Sa furieuse escarmouche contre les Rochelois. 163, note.

Courval-Sonnet. Cité XIV.

Créqui (Le maréchal duc de). Gendre de Lesdiguières; espère après lui être connétable Ses droits. 170-171.
—Son duel avec don Philippin. Ib., note.

Croisette (M. de la), usurier. Perd tout par la mort de son débiteur. 226.


Dangeau (Suppl. au Journal de). Cité 21, note 1; 47, note.

Darmingère (M.). 218.

Daubray ou Dambray (Claude) Erreur des Caquets à son sujet. 21, note.
—Laisse, par testament, trois pains de sucre à l'Hôtel-Dieu. 22, 240.

Davity. Son livre Les Estats, Empires, etc., cité 71, note.

Desiderio Descombes, le Charlatan. 102.
—Moins plaisant que Tabarin. 102, note; 231.
—Parle pour Grattelard dans la Sentence par corps. 278, 283.

Desplan. Fortune de ce parvenu, XXI.
—Protégé de Luynes. 181, note.
—Sa chute rapide. 160, note.
—Ses commencements; il est laquais, puis soldat au régiment de Navarre sous M. Cadenet. 161.
—Visite M. Le Prince à Vincennes. Ib.
—N'est pas fait maréchal de France, quoi qu'en disent les Caquets. 162, note.

Des Rues, financier. 40.

Dobillon, usurier. 29.

Doux (Le, madame). Sa fille la poupine. 222.

Dubreul Ses Antiquités de Paris, citées 42, note.

Du Moulin, ministre protestant à Charenton. Sa fuite à Sedan. 88, note.
—Lettre d'avis publiée sous son nom. Ibid.


Entragues (Marie d'). Sa liaison avec Bassompierre. XXII.
—Il devroit l'épouser. 171.
—Madame de Verneuil brouillée avec lui à cause d'elle. 169.

Esternod (Claude d'), véritable auteur de l'Espadon satyrique; son pseudonyme de Franchères; pourquoi l'on attribue son livre à M. de ourquevaux; titres divers onnés à ce même livre; contrefaçon qu'il subit, etc. 115, 116, note.


Estienne (Henry). L'Apologie pour Herodote, citée
269, note.

Estoille (Journal de P. de l') cité au sujet des lunettes d'Amsterdam. 253, note.


Fabri, trésorier de l'extraordinaire des guerres. 167, note.

Fail (Noël du). Ses Contes d'Eutrapel, cités 265, 268, notes.

Félibien. Son Hist. de Paris, citée 24, note.

Feu, conseiller. 254.

Feuillet (M.). 134.

Fiacre (Saint). Maladie dont il est le patron. 269.

Fontaine (La). Une de ses fables, citée 267, note.

Force (Le duc de La). Vend sa soumission au roi. 56, note.
—Rend Sainte-Foy, qu'il avoit enlevée à Terbon. 57, note.
—Sa bien-venue fêtée à Paris. 251.

Forget (Le président). 143, note.

Fournier (P.) Son Hydrographie, citée 61, note.

Fournier (Édouard). Ses Variétés historiques et littéraires, citées 61, 172, 183, 251, 254, 257, 258, 272, notes.
—Son Paris démoli, cité 263, note.
—Son livre l'Esprit des autres, cité 263, note.
—Son Histoire des Hôtelleries et Cabarets, citée 268.

Fourquevaux (Le baron de). Ce nom n'est pas un pseudonyme; le baron a existé, mais n'a pas fait l'Espadon satyrique. 115, note.

Fresne (M. du). 219.

Fronsac (Le duc de), fils du comte de Saint-Pol; tué dans une sortie au siége de Montauban. 159, note.
—Le roi écrit des lettres de consolation à son père et à sa mère. Ibid.
—Ce que Luynes lui avoit promis. 160, note.


Garandine (M. de la). Sa femme, renfermée avec un jeune avocat, le laisse coucher à la porte. 216.

Gautier-Garguille. Son testament, cité 102, note 2.
—Notes le concernant. 277, 278, 282, 285.

Geperny, fameux financier. 40.

Gondi (Jean-François de), dernier évêque de Paris. 189.

Goujet (L'abbé). Partage l'erreur de Brossette au sujet de l'Espadon satyrique. 115, note.

Grattelard (Le baron de). Note sur ce farceur du Pont-Neuf et sur ses Œuvres. 279.

Gratiano. Fin partisan de connivence avec les usuriers. 225.

Grisons, voleurs. 60, note.

Gros-Guillaume. 281, note; 282.

Guerin. Bouffon de la reine Marguerite. 171
—Meurt misérable. 171-172, note.

Guillaume (Jean), le bourreau. 94, note.

Guillaume (Maître), fou en titre d'office. Pension qu'il touche. 263, note.
—Nombreux pasquils sous son nom. Ib.

Guise (Cardinal de). Prélat frisé. 51, note.

Guyon (Fery de). Ses Mémoires, cités 275, note.

Guyot (Maison). Son encre de la petite vertu. 60, note.


Henri IV. Mot de lui sur l'édit contre les financiers. 14, note.
—Dîne avec Mathurine. 168, note.

—Ce n'est pas lui, mais Rosny, qui dit: La couronne vaut bien une messe.
173.
—Ses édits somptuaires. 181, note.

Hoctot. Tué devant Montauban. 159, note 2.

Hou (Le), premier commis de l'épargne. 39.


Jacomeny, usurier. 29.

Jannet (P.). Son édition des XV Joyes de mariage, citée X, XI, XXV.

Jean de la Vigne. Farceur. 281, note.
—Fondé de pouvoirs de Tabarin dans la Sentence par corps. 282, etc.

Jean Farine. Note sur ce farceur. 280-281.

Jésuites. S'occupent de l'esprit de la Flèche. 74, note.

Joinville (Le prince de), fils du Balafré. Gagne beaucoup à rester fidèle au parti du roi. 68, note.

Jouan, le procureur. 179.


Laffemas. 150, note.

La Flèche. Lettre de Malherbe sur un esprit qui tourmentoit une fille de cette ville. 74, note.

Lafont de Saint-Yenne. Sa caricature en Quinze-Vingts. 199.

Larivey. La Vefve, comédie qu'il a traduite de la Vedova, citée. 273.

Larcher. Procureur en Parlement. 128.

La Rochelle. Premier siége de cette ville. 53, note; 157.
—Le sieur de Courbouzon et son escarmouche. 163. note.

Lebeuf (L'abbé). Cité 24. note.

Le Mercier (Jacques). Architecte; fait la façade de l'Oratoire. 81, note.

Lesdiguières (Le connétable de). 170.

Lestange. Tué devant Montauban. 159, note.

Lincy (L. de). Son Introd. au livre des Légendes, citée VII, note.

Louis (Saint). Ordonnances contre les comédiens. 9, 231.
—Croix sur ses monnaies, 271.

Louis XIII. Son édit de 1624 contre les financiers. 14. note.
—Allume le feu de la Saint-Jean en 1620. 23, note.
—Ses lettres-patentes pour un asile des pauvres. 25, note.
—Tort que son absence fait à Paris. 57, note.
—Fait les PP. de l'Oratoire ses chapelains. 80, note.
—Son édit contre les habits en 1627. 181, note.

Louvet, le grand fermier. 40.
—Sa lutte contre les contrebandiers nommés Coquilberts. Ib., note.
—Ils le ruinent. Ibid.
—Sa fuite à Maubuisson. Ibid.

Lussan. Tué devant Montauban. 159, note 2.

Luynes (Le connétable de). Vers contre lui, indiqués XVII.
—Accusé de garder l'argent nécessaire aux troupes. 54, note.
—Pourquoi il ne prend pas Montauban. 64.
—Sa mort devant Monheur. Ib., note.
—Prédictions à ce sujet. 65-66, note.
—Son immense pouvoir après la mort de Concini. 156.
—Protége Desplan. 162.
—Exploite les édits avec les partisans. 183, note; 241, note.

Machault (De), conseiller aux requêtes.
142.

Magnin (Ch.). Cité 9, note.

Malherbe. Ses lettres à Peiresc, citées dans les notes des pages 8, 9, 18, 19, 40, 41, 54, 57, 58, 91, 149, 163, 172.
— Autres lettres de lui, citées 65, 74, 192, notes.

Mangeart. Sa Francophilie. 58, note.

Mangot. Chancelier après la mort de Du Vair. 152, note.
— Sa fidélité à Marie de Médicis et au maréchal d'Ancre. Ibid.

Mansfeld (Le comte de). Cancan sur lui, XXIV.
— Menace la Champagne; peur qu'il inspire; fait un accord avec M. de Nevers; tire vers le Hainaut; est battu à Fleurus par D. Gonzalès. 191-192, note.
— On le renvoie à Notre-Dame-de-l'Épine. 275.

Marguerite (La reine). Ses libéralités. 20, note.
— Distribution des deniers de sa succession. 241.
— Ses Allées, 251.

Marigny (Enguerrand de). Sa statue au portail du palais. 257.

Marigny. Son poëme du Pain bénit, cité 37, note.

Marescot. Son ambassade infructueuse pour le chapeau de l'évêque de Beauvais. 153, note.

Marot (Clément). Invectives contre lui. 83.

Marphore ou Marforio. 266.

Mathurine, folle de cour. XXIII.
— Dîne avec Henri IV. 168, note.
— Sa pension en 1622. Ib., 261.
Maturinade, ce que c'est. Ib.
— Caquet de Mathurine sur M. de Bassompierre. 169.
Essais, livret publié sous son nom. 261.
— Court les rues poursuivie par les enfants. 252.

Mauregard, astrologue. Malherbe l'accuse d'être un faux prophète. 65, note.

Meuves (De). Pendu comme coupable de l'incendie du Pont-au-Change. 58, note.

Milmont (Le curé de). astrologue. Almanach où il prédit la mort du connétable de Luynes. 65, note; cité 66, note.

Moizant de Brieux. Comment il explique le proverbe: Ferrer la mule. 15, note.

Moncrif. Son livre sur les Chats, cité 24, note.

Mondor. Les lazzis de Tabarin font sa fortune. 100, note.
— Sa bonne mine. 101.
— Elle baisse. 102, note.
— Dans la Sentence par corps, il parle pour Tabarin. 278, 283.

Monheur, château près de Toulouse. Se révolte contre le roi; assiégé par Luynes, qui meurt devant ses murs. 64, note.

Monsigot, créature de Luynes près de Gaston. Procès qu'on lui fait après la mort de Luynes. 146, note.
— Gaston l'envoie près du duc de Lorraine. Ibid.
— Il remet à Richelieu l'inventaire des bijoux de Madame, et s'enfuit à Orléans. 146.
— Il avoit tenu banque au Louvre pour les
pensions; il a pour lui les gens du Parlement, M. de Chevry, madame de Chevreuse, etc.
147, 149, notes.
150. Mais on a juré sa perte. 151, note.
—Ses aveux. Ibid.

Montaigne (G.). Sa Police des Pauvres, citée 25, note.

Montauban. Assiégé. 53.
—Pourquoi Luynes ne s'en empare pas. 64, 96.
—Haut prix des charges de conseiller dans la généralité de Montauban. 131, note.
—On a vainement espéré prendre cette ville. 157, 158, 256.
—M. de Fronsac tué au siége de cette ville. 159, note.
—Services de Bassompierre à ce siége. 169.

Montauron, l'un des Puget. 39, note.

Montbrun. Tué devant Montauban. 159, note 2.

Montescot, fameux partisan. 40, note.

Montmorency (Le duc de). Blessé devant Montauban. 159, note.
—Avis qu'on lui donne de ne pas trop s'engager dans la guerre de Languedoc. 160, note.

Montpellier (Siége de). 158, 164.
—Bassompierre s'y distingue. 169.

Moreau, médecin. 251.

Moysset, dit Montauban, fameux partisan. 182, note; 241, note.

Mozan (M.). Il faut étudier sous lui pour entrer à la cour du Parlement. 30.


Negrepelisse. Sa prise. 113, note.
—Fête carillonnée par les mortiers des apothicaires. 251.

Nemours (Le duc de). Protége M. de Courbouzon. 162.

Nevers (Le duc de). Fait un accord avec Mansfeld. 192, note.

Nisard (Ch.). Son Hist. des livres populaires, citée 279.

Notre-Dame-de l'Épine. Lieu de pèlerinage près de Châlons-sur-Marne. 275, note.

Notre-Dame-des-Vertus. Pèlerinage. 217.
—Aventure de deux bourgeoises et de leurs maris déguisés en moines. 217-220.


Ocquerre (Le président d'). Père de Blancmesnil. 148, note.

Oratoriens. On leur reproche leur ambition. 78, note.
—Louis XIII les fait ses chapelains. 80, note 1.
—Belle musique de leur église. 82, note.


Paris. Haine de ses habitants contre les Huguenots. XX.
Rue Quincampoix, ses surnoms. 11, note.
—Corps des Merciers. 16, note.
—Feu de la Saint-Jean en Grève. 23, note.
—Le Pont Neuf et les quais bâtis au moyen d'un impôt sur les vins. 24, note.
—L'hôpital Saint Germain. 25.
—Asile pour les pauvres, Ib., note; 70, note.
Le Chevalier du guet, le Prévôt de l'Ile. 36.
Pont-au-Double. 41, note.
—Les imprimeurs, leur ignorance, etc. 50, 51, 122.
—Le trésor de la Bastille. 54, note 2.
—Tort que l'absence du roi fait aux marchands. 57, note.
—Incendie du Pont-au-Change. 58, note.
—Diverses troupes de voleurs. 60, 71, 257, notes.
—Habitants de Paris peureux la nuit.
71, note.
—La Cérès des Carmélites. 74, note.
—Fondation de l'Oratoire; pourquoi la façade de l'église est de biais. 81, note.
—Le Puits Certain. 111, note.
—Le cloître Notre Dame fermé la nuit. 118, note.
—La galerie de M. de Verdun à l'hôtel de la présidence (préf. de police). 144, note.
—Ses rues pavées d'avocats. 176.
—Établissement des Capucines en 1604. 188.
—Établissement des Ursulines de Sainte Avoye. 189.
—Le premier archevêque de Paris, en 1622. 189.
—Costume des aveugles Quinze-Vingts. 199.
—Gens de finance logent au Marais. 225.
—Plaintes contre les échevins. 241.
Allées de la reine Marguerite. 251.
—Hospices des Enfants-Rouges, du Saint-Esprit, de la Trinité. 253.
—Filles au faubourg Montmartre. 255.
—Les marchands de chiffons des rues Fripaux, Frepillon. 255.
—Statue d'Enguerrand de Marigny au portail du Palais. 257.
L'Hôtel d'Angoulême. Id.
—Loyers du Pont-Marchand. 252.
—L'image de Pierre du Coignet. 265.
—Pourceaux du Petit Saint Anthoine. 270.
—Le crocheteur de la Samaritaine, le Jacquemart de Saint-Paul. 279, 280, notes.

Passerat. Cité 61, note.

Paulmy. Ses Mélanges d'une gr. Biblioth., cités 22, note 1, 3.

Perrette (Madame). Sage-femme du faubourg Saint Marceau. 214.

Philippe le Bel. Sa loi somptuaire de 1294. 32, note.

Philippin (Don), bâtard du duc de Savoie, tué en duel par M. de Créqui. 171, note.

Piganiol. Sa Description de Paris, citée 75, note; 80, 81, 82, notes.

Poncet le vénérable. 252.

Pont (Gratien du). Cité XIII, XLI.

Portail (M.) et son valet Rose. 145.

Potel, greffier du conseil; son fils Le Parquet. 152, note.

Povillon-Pierrard. Sa Descript. de l'église de N.-D.-de-l'Épine, citée 275.

Puget. Sa fortune, etc. 39.

Puits (Pierre du). Fou qui couroit les rues. 266, 278.
—Pasquil paru sous son nom. Ib., note.
—Parle pour les femmes et bourgeoises de Paris dans la Sentence... 278.


Rabelais. Cité 145, 231, 265, 269.

Racan. Ecrit à Malherbe sur l'esprit de La Flèche. 74, note.

Regnard. 39, 254.

Regnault, trésorier de l'extraordinaire. 39.

Regnier. Dédie une de ses satires au baron de Fourquevaux. 115, note. Cité pag. 138, note.
—Sa 14e satire, parue sous le nom de Maître Guillaume. 263, note.

Reiffenberg. Son Histoire des fous en titre d'office. 263, note.

Remond. Son Sommaire traité des revenus, cité 168, 261, 263, notes.

Rémonde (Madame). Se fait damoiselle.
220.

Richelieu (Le cardinal de). L'auteur anonyme des Caquets doit être quelqu'un de ses partisans, xxiij.
—Fait juger et pendre de Meuve comme incendiaire du Pont-au-Change. 58, note.
—Passage de ses mémoires sur la mort de Luynes. 64, note 2.
—Autre sur une prophétie du curé de Milmont. 66, note.
—Autre sur le prince de Condé. 68, note.
—Ses lettres, citées 79, note.
—Sa haine des huguenots. 86, note.
—Ses mémoires, cités 146, 148, 159, 161, notes.
—M. de Cœuvre lui obtient le chapeau. 149.
—Collègue de Mangot. 152, notes.

Robichon. Il faut étudier sous lui pour entrer à la chambre des comptes. 30.

Rochefoucauld (Le comte de La). Défait Soubise dans l'île de Ré. 35, note.

Rochetomas (La), conseiller. 254.

Rohan (Le duc de). Sa cure en qualité de chef des huguenots. 33.
—Ne se jette pas dans les mêlées. 56.
—Abandonne Saint-Jean-d'Angely. 56, note.
—Ses Mémoires, Cités 57. note.
—Fait sa paix et baise le babouin. 158, note.

Rome. Fêtes qu'on y fait pour la canonisation de sainte Thérèse. 48.
—Les Pères de l'Oratoire veulent s'établir à Saint-Louis-des-François. 79, note 1.
—Les prêtres laïcs s'y opposent et retardent la concession jusqu'en 1629. Ib., note 2.

Rosny. Dit au roi le fameux mot: La couronne vaut bien une messe. 173.

Rougets, ou Manteaux-rouges, voleurs. 60, note; 257.

Rossignol (Le bonhomme). 135.

Rouillard, syndic des avocats. 258.

Roze-Croix (Frères de la). Leur établissement à Paris. 72, note.

Ruccellaï, fameux financier. 40, note.

Ruelle, conseiller. 254.


Saint Antonin. Discours fait sur la prise de cette ville. 114, note 1.

Saint-Foix. Ses Essais sur Paris, cités 75, note.

Saint-Germain, gentilhomme angevin. Amant de madame de Vertus; comment assassiné. 139-141, note.

Saint-Jacques. Médecin de ce nom. 250.

Saint-Jean-d'Angely. Ville abandonnée par M de Rohan. 56.
—Rendue par M. de Soubise. Ib., note.
—Luynes fait bien ses affaires au siége de cette ville, comment. 64, note.

Saint-Valerien, conseiller. 254.

Sainte-Foy (Ville de). Rendue par M. de La Force. 57, note.
Les gens de cette place massacrent à Gontaut les gendarmes de Luynes. 64, note.

Sardini, financier. 40, note.

Salvancy, financier ruiné. 40.

Saumur. Un des frères de Luynes pense y mourir de dépit. 67.

Sauval. Ses Antiquités de Paris, citées
23, note.
—Son livre Galanteries des rois de France, cité 172, note.

Schomberg, superintendant des finances. Chargé de payer à M. de la Force sa soumission. 57, note 1.

Sec (Le), médecin. 250.

Sillery (Le commandeur de). Opposé à M. de Berulle. 79, note 1.
—Son ambassade à Rome, d'où Richelieu le rappelle en 1624. 149, note.

Siri (Vittorio). Cité 68, note.

Soubise (Le comte de). Cure que lui paie le parti huguenot. 33.
—Sa défaite dans l'île de Ré. 35, note; 55.
—Sa capitulation à Saint-Jean-d'Angely. 56, note 2.
—Comparé, par raillerie, à Enguerrand de Marigny 257, note.


Tabarin. Son Recueil de questions, cité 100, note.
—Fait la fortune de Mondor. Ib., 262.
—Plus plaisant que le charlatan. 102, note; 231.
—Ses spécifiques pour rajeunir. 233.
—Fortune qu'il fait. 250, note.
—Où il se retire, et comment il meurt assassiné. Ibid.
—Sa rencontre avec le prétendu auteur des Caquets. 267.
—Demande en réparation contre l'auteur des Caquets. 278.

Tabourot (Estienne). Ses Bigarrures, citées 141, note.

Tardieu (M.), de la première chambre. 145.

Tardieu (Le lieutenant criminel). 38, note.

Tallemant des Réaux. Ses Historiettes, citées XXII, et dans les notes des pag. 26, 38, 39, 40, 52, 139, 147, 150, 152, 153, 169, 257.

Terbon. Se laisse prendre Sainte-Foy. 57, note.

Testu. 259.

Thérèse (Sainte). Vies de cette sainte remplies d'erreurs, XX, 50, 114.
—Fêtes de sa canonisation à Paris et à Rome. 48, note; 49, note.

Thou (De). Au cloître Notre-Dame. 118, note.

Tillay (Le président de). 153, note.

Toiras. Chassé de la cour. 161, note.
—Fait maréchal de France. 161, note.

Tonneins. Rendu par son gouverneur. 56, 57, note.

Tour (De la), fermier renommé. Ruiné par les usuriers. 225.

Traversier, usurier. 29.

Turquie (Ouvriers de). Appelés à Paris pour faire des étoffes. 17, note.


Ulenspiegel (l'Espiègle). Ce type cité 226.


Vendôme (MM. de). Opposés à M. de Sillery. 149, note.

Verderonnes (De). 143.

Verdun (Nicolas de). Premier président. 143, note.
—Estime qu'on a de lui. Ib.
—Sa grande galerie. 144, note.
—Sa galanterie. 144.

Verdure (M. de la), partisan. D'accord avec les usuriers. 225.

Verneuil (La duchesse de). Sa manière de vivre après sa rupture avec Henri IV. XXII.
—Arrive chez l'accouchée avec Mathurine. 168.
—Déteste Bassompierre à cause de sa sœur.
169. V. Entragues (Marie d').

Vertus (Comtesse de). Contrainte par son mari d'assister au meurtre de son amant. 139.
—Récit que fait Tallemant de la même aventure. 139. note.

Verville (Beroalde de). Imitation d'un passage de son Moyen de parvenir. 269.

Vieuville (M. de la). Succède à Schomberg comme superintendant des finances. 57, note.
—N'est pas d'avis que le Pont-au-Chanqe soit rebâti aux frais des orfèvres. 59, note.
—Rigueurs contre lui en 1624; il est enfermé au château d'Amboise. 97, note.
—Il éloigne madame de Chevreuse. 148, note.

Vignolles, conseiller. 254.

Vignon, médecin. 250.

Viguier (M.). On veut le mettre mal avec M. le Prince. 169.

Villautrais, partisan scandaleusement riche. 165, note; 166, 167.

Villejuif (Manants de) et le procureur qui les plume. 224.

Vincennes. V. Chaulnes, Desplan.


Weiss (M.). Rétablit la vérité au sujet de l'Espadon satirique. 115, note.

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