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Les Cent Nouvelles Nouvelles, tome I

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LA XXXVIIe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE LA ROCHE.

T antdiz que les aultres penseront et à leur memoire ramainront aucuns cas advenuz et perpetrez, habilles et suffisans d'estre adjoustez à l'ystoire presente, je vous compteray, en brefz termes, en quelle façon fut deceu le plus jaloux de cest royaume pour son temps. Je croy assez qu'il n'a pas esté seul entaché de ce mal; mais toutesfoiz, car il le fut oultre l'enseigne, je ne le saroie passer sans vous faire savoir le gracieux tour qu'on luy fist. Ce bon jaloux dont je vous compte estoit très grand historien et avoit beaucoup veu, leu et releu de diverses histoires; mais la fin principale à quoy tendoit son exercice et tout son estude, estoit de savoir et cognoistre les façons et manières et quoy et comment femmes pevent decepvoir leurs mariz. Et car, la Dieu mercy, les histoires anciennes, comme Matheolet, Juvenal, les Quinze Joyes de mariage, et aultres pluseurs dont je ne scay le compte, font mencion de diverses tromperies, cauteles, abusions et deceptions en cest estat advenues. Nostre jaloux les avoit tousjours entre ses mains, et n'en estoit pas mains assotté qu'un follastre de sa massue; toutesfoiz lysoit, tousjours estudioit, et d'iceulx livres fist ung petit extrait pour luy, ou quel estoient emprinses, descriptes et notées pluseurs manières de tromperies, au pourchaz et emprinses de femmes, et ès personnes de leurs mariz executées. Et ce fist-il tendant à fin d'estre mieulx premuny et sur sa garde si sa femme à l'adventure vouloit user de telles querelles en son livre croniquées et registrées. Qu'il ne gardast sa femme d'aussi près comme ung jaloux Ytalien, si faisoit, et si n'estoit pas encores bien asseuré, tant estoit fort feru du maudit mal de jalousie. En cest estat et aise delectable fut ce bon homme trois ou quatre ans avecques sa femme, laquelle pour tout passetemps n'avoit aultre loisir d'estre hors de sa presence infernale, sinon allant et retournant de la messe, accompaignée d'une vieille serpente qui d'elle avoit la charge. Ung gentil compaignon, oyant la renommée de ce gouvernement, vint rencontrer ung jour ceste bonne damoiselle, qui gracieuse et belle à bon escient estoit; et luy dist le plus gracieusement que oncques peut le bon vouloir qu'il avoit de luy faire service, plaignant et souspirant pour l'amour d'elle sa maudicte fortune, d'estre allyée au plus jaloux que la terre soustiene, et disant au surplus qu'elle estoit la seule en vie pour qui plus vouldroit faire. «Et pource que je ne vous puis pas icy dire combien je suis à vous, et pluseurs aultres choses dont j'espere que ne serez que contente, s'il vous plaist, je le mettray par escript et demain le vous bailleray, vous suppliant que mon petit service, partant de bon vouloir et entier, ne soit pas refusé.» Elle l'escouta voluntiers; mais, pour la presence du Dangier, qui trop près estoit, guères ne respondit; toutesfoiz elle fut contente de veoir ses lettres quand elles viendront. L'amoureux print congé assez joyeux et à bonne cause; et la damoiselle, comme elle estoit doulce et gracieuse, le congya; mais la vieille qui la suyvoit ne faillit pas de demander quel parlement avoit esté entre elle et celuy qui s'en va. «Il m'a, dit-elle, apporté nouvelle de ma mère, dont je suis bien joyeuse, car elle est en bon point.» La vieille n'enquist plus avant; si vindrent à l'ostel. L'aultre au lendemain, garny d'unes lettres Dieu scet comment dictées, vint rencontrer sa dame, et tant subitement et subtilement les luy bailla que oncques le guet de la vieille serpente n'en eut la cognoissance. Ces lettres furent ouvertes par celle qui voluntiers les vit quand elle fut à part. Le contenu en gros estoit comment il estoit esprins de l'amour d'elle, et que jamais ung seul jour de bien n'aroit si temps et loisir prestez ne luy sont pour plus au long l'en advertir, requerant en conclusion qu'elle luy veille de sa grace jour et lieu assigner convenable à ce faire, ensembles et response à ce contenu. Elle fist unes lettres par lesquelles très gracieusement s'excusoit de vouloir en amours entretenir aultre que celuy auquel elle doit et foy et loyauté; néantmains toutesfoiz, pourtant qu'il est tant fort esprins d'amours à cause d'elle, qu'elle ne vouldroit pour rien qu'il n'en fust guerdonné, elle seroit très contente d'oyr ce qu'il luy vouldroit dire, si nullement povoit ou savoit; mais certes nenny; tant près la tient son mary, qu'il ne la laisse d'ung pas sinon à l'heure de la messe, qu'elle vient à l'église, gardée et plus que gardée par la plus pute veille qui jamais aultruy destourba. Ce gentil compaignon, tout aultrement habillé en point que le jour precedent, vint rencontrer sa dame, qui très bien le congneut; et au passer qu'il fist assez près d'elle receut de sa main sa lettre dessus dicte. S'il avoit faim de veoir le contenu, ce n'estoit pas de merveille; il se trouva en ung destour où tout à son aise et beau loisir vit et congneut l'estat de sa besongne, qui luy sembloit estre en bon train. Si regarda qu'il ne luy fault que lieu pour venir au dessus et à chef de sa bonne entreprise, pour laquelle achever il ne finoit nuyt ne jour de adviser et penser comment il se pourroit conduire. Il s'advisa d'un trèsbon tour en la parfin, qui ne fait pas à oublier: car il s'en vint à une sienne bonne amye qui demouroit entre l'eglise où sa dame alloit à la messe et l'ostel d'elle; et luy compta sans rien celer le fait de ses amours, luy priant que à ce besoing luy veille aider et secourir. «Ce que je pourroye faire pour vous, dist-elle, ne pensez pas que je ne m'y employe de trèsbon cueur.—Je vous mercye, dit-il; et seriez vous contente qu'elle venist céans parler à moy?—Ma foy, dit elle, pour l'amour de vous, il me plaist bien.—Et bien! dit il, s'il est en moy de vous faire autant de service, pensez que j'aray cognoissance de ceste courtoisie.» Il ne fut oncques aise tant qu'il eust rescript à sa dame et baillé ses lettres, qui contenoient qu'il avoit tant fait à une telle «qui est ma très grande amye, femme de bien, loyalle et secrète, et qui vous ame et cognoist bien, qu'elle nous baillera sa maison pour deviser. Et véez cy que j'ai advisé: je seray demain en la chambre d'enhault, qui descouvre sur la rue, et si aray emprès de moy ung grand seau d'eaue et de cendres entremeslées, dont je vous affubleray tout à coup que vous passerez. Et si seray en habit si descogneu que vostre veille ne ame du monde n'ara garde de moy cognoistre. Quand vous serez en ce point atournée, vous ferez bien de l'esbahie et vous sauverez en ceste maison; et par vostre Dangier manderez querre une aultre robe; et tantdiz qu'elle sera au chemin, nous parlerons ensemble.» Pour abréger, ces lettres furent baillées, et la response fut rendue par celle qui fut contente. Or fut venu ce jour, et la damoiselle affublée par son serviteur du seau d'eaue et de cendres, voire par telle façon que son couvrechef, sa robe et le surplus de ses habillemens furent tous gastez et percez. Et Dieu scet qu'elle fist bien de l'esbahie et de la malcontente; et comme elle estoit estollée, elle se bouta en l'ostel, ignorant d'y avoir cognoissance. Tantost qu'elle vit la dame, elle se plaindit de son meschef, et n'est pas à vous dire le dueil qu'elle menoit de ceste adventure. Maintenant plaint sa robe, maintenant son couvrechef, et l'aultre foiz son tixu; bref, qui l'oyoit, il sembloit que le monde fust finé. Et Dangier sa meschine, qui enrageoit d'angaigne, avoit ung coulteau en sa main dont elle nestoioit sa robe le mieulx qu'elle savoit. «Nenny, nenny, m'amye, vous perdés vostre peine, ce n'est pas chose à nettoyer si en haste; vous n'y sariez faire chose maintenant qui valust rien; il fault que j'aye une aultre robe et ung aultre couvrechef, il n'y a point d'aultre remède; allez à l'ostel et les m'apportez, et vous avancez de retourner, que nous ne perdons la messe avecques tout nostre mal.» La vieille, voyant la chose estre necessaire, n'osa desdire sa maistresse; si print et robe et couvrechef soubz son manteau, et à l'ostel s'en va. Elle n'eut pas si tost tourné les talons que sa maistresse ne fut guidée en la chambre où son serviteur estoit, qui voluntiers la vit en cotte simple et en cheveulx. Et, tantdiz qu'ilz se devisèrent, nous retournerons à parler de la vieille qui revint à l'ostel, où elle trouva son maistre, qui n'attendit pas qu'elle parlast, mais demanda incontinent: «Qu'avez vous fait de ma femme, et où est elle?—Je l'ay laissée, dit-elle, chés une telle, et en tel lieu.—Et à quel propos?» dit-il. Lors elle luy monstra robe et couvrechef, et luy compta l'adventure de la tyne d'eaue et des cendres, disant qu'elle vient querir aultres habillemens, car en ce point sa maistresse n'osoit partir dont elle estoit. «Est ce cela? dit-il; nostre dame, ce tour n'estoit pas en mon livre! Allez, allez, je voy bien que c'est.» Il eust voluntiers dit qu'il estoit coux, et creez que si estoit-il à ceste heure; et ne l'en sceut oncques garder livre ne brevet où pluseurs tours estoient enregistrez. Et fait assez à penser qu'il retint si bien ce derrenier qu'oncques depuis de sa memoire ne partit, et ne luy fut nesung besoing que à ceste cause il l'escripsist, tant en eut fresche souvenance le pou de bons jours qu'il vesquit.


LA XXXVIIIe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE LOAN.

N 'a guères que ung marchant de Tours, pour festoyer son curé et aultres gens de bien, achatta une belle et grosse lemproye, et l'envoya à son hostel, et chargea trèsbien sa femme de la mettre à point, ainsi qu'elle savoit bien faire. «Et faictes, dist-il, que le disner soit prest à douze heures, car j'ameneray nostre curé, et aucuns aultres qu'il luy nomma.—Tout sera prest, dit-elle, amenez qui vous vouldrez.» Elle mist à point ung grand tas de bon poisson; et quand vint à la lemproie, elle la souhaicta aux Cordeliers, à son amy, et dist en soy mesmes: «Ha, frère Bernard, que n'estez vous cy! Par ma foy, vous n'en partiriez tant qu'auriez tasté de la lemproye, ou, se mieulx vous plaisoit, vous l'emporteriez en vostre chambre; et je ne fauldroye pas de vous y faire compaignie.» A trèsgrant regret mettoit ceste bonne femme la main à ceste lemproye, voire pour son mary, et ne faisoit que penser comment son cordelier la pourroit avoir. Tant pensa et advisa qu'elle conclud de luy envoyer par une vieille qui savoit de son secret, ce qu'elle fist, et luy manda qu'elle viendroit ennuyt soupper et coucher avecques luy. Quand maistre cordelier vit celle belle lemproye et entendit la venue de sa dame, pensez qu'il fut joyeux et bien aise; et dist bien à la vieille, s'il peut finer de bon vin, que la lemproye ne sera pas frustrée du droit qu'elle a, puis qu'on la mengeue. La vieille retourna de son message et dist sa charge. Environ douze heures, véez cy nostre marchant venir, le curé et aucuns aultres bons compaignons, pour devorer ceste lemproye, qui estoit bien hors de leur commendement. Quand ilz furent trestous en l'ostel du marchant, il les mena trestouz en la cuisine pour leur monstrer la grosse lemproye dont il les veult festoier; et appella sa femme, et luy dist: «Monstrez nous nostre lemproye, je veil savoir à ces gens si j'ay eu bon marché.—Quelle lemproye? dit elle.—La lemproye que je vous fiz bailler pour nostre disner, avecques cest aultre poisson.—Je n'ay point veu de lemproye, dit elle; je cuide, moy, que vous songez. Véezcy une carpe, deux brochez et je ne scay quelx aultres poissons; mais je ne viz aujourd'uy lemproye.—Comment, dit il, et pensez vous que je soye yvre?—Ma foy ouy, dirent lors et le curé et les aultres, nous n'en pensasmes aujourd'uy mains; vous estes un peu trop chiche pour acheter lemproye maintenant.—Par Dieu, dist la femme, il se farse de vous, ou il a songé d'une lemproye, car seurement je ne viz de cest an lemproye.» Et bon mary de soy courroucer, et dit: «Vous avez menty, paillarde, ou vous l'avez mengée, ou vous l'avez cachée quelque part; je vous promectz qu'oncques si chère lemproye ne fut pour vous. «Puis se vira vers le curé et les aultres, et juroit la mort bieu et ung cent de sermens qu'il avoit baillé à sa femme une lemproye qui luy cousta ung franc. Et ilz, pour encores plus le tourmenter et faire enrager, faisoient semblant de le non croire, et tenoient termes comme s'ilz fussent mal contens, et disoient: «Nous estions priez de disner cheux ung tel et cheux ung tel, et si avons tout laissé pour venir icy, cuidans menger de la lemproye; mais ad ce que nous voyons, elle ne nous fera jà mal. L'oste, qui enrageoit tout vif, print ung baston et marchoit vers sa femme pour la tresbien frotter, si les aultres ne l'eussent tenu, qui l'emmenèrent à force hors de son hostel, et misrent peine de le rappaiser le mieulx qu'ilz sceurent, quand ilz le virent ainsi troublé. Puis qu'ilz eurent failly à la lemproye, le curé mist la table et firent la meilleure chère qu'ilz sceurent. La bonne damoiselle à la lemproye manda l'une de ses voisines qui vefve estoit, mais belle femme et en bon point, et la fist disner avec elle. Et, quand elle vit son point, elle dist: «Ma bonne voisine, il seroit bien en vous de me faire ung service et un tressingulier plaisir; et si tant vouliez faire pour moy, il vous seroit tellement par moy desservy que vous en devriez estre contente.—Et que vous plaist il que je face? dit l'aultre.—Je le vous diray, dit elle: mon mary est si trèsrude à ses besongnes de nuyt que c'est grand merveille; et de fait, la nuyt passée, il m'a tellement retournée que, par ma foy, je ne l'oseroye bonnement ennuyt attendre. Si vous prie que vous veillez tenir ma place, et si jamais puis rien faire pour vous, me trouverez preste de corps et de biens.» La bonne voisine, pour luy faire plaisir et service, fut contente de tenir son lieu, dont elle fut beaucop et largement mercyée. Or devez vous savoir que nostre marchant à la lemproye, quand il vint puis le disner, il fist trèsgrande et grosse garnison de bonnes verges de boul qu'il apporta secrètement en sa maison, et auprès de son lit il les caicha, disant en soy mesmes que sa femme ennuyt en sera trop bien servie. Il ne scéut ce faire si celéement que sa femme ne s'en donna tresbien garde, qui n'en pensoit pas mains, cognoissant assez par longue expérience la cruaulté de son mary, lequel ne souppa pas à l'ostel, mais tarda tant dehors qu'il pensa bien qu'il la trouveroit nue et couchée. Mais il faillit à son emprinse, car quand vint sur le soir et tard, elle fit despouillier sa voisine et couchier en sa place, en la chargeant expressément que elle ne responde mot à son mary quand il viendra, mais contreface la muette et la malade. Et si fist encores plus, car elle estaindit le feu de léens, tant en la cuisine comme en la chambre. Et ce fait, à sa voisine chargea que tantost que son mary sera levé le matin, qu'elle s'en voise en sa maison. Elle, lui promist que si feroit elle. La voisine ainsi logée et couchée, aux Cordeliers s'en va la vaillant femme pour menger la lemproye et gaigner les pardons, comme assez avoit de coustume. Tantdiz qu'elle se festiera léens, nous dirons du marchant, qui après soupper s'en vint à son hostel, esprins d'ire et de maltalent à cause de la lemproye; et pour executer ce qu'en son pardedans avoit conclud, il vint saisir ses verges et en sa main les tint, cherchant partout de la chandele, dont il ne scéut oncques recouvrer; mesmes en la cheminée faillit il au feu trouver. Quand il vit ce, il se coucha sans dire mot, et dormit jusques sur le jour, qu'il se leva et s'abilla, et print ses verges et baptit tant la lieutenante de sa femme que à pou qu'il ne la cravanta, en luy ramantevant la lemproye, et la mist en tel point qu'elle saignoit de tous costez, mesmes les draps du lit estoient tant sanglans qu'il sembloit que ung beuf y fut escorché; mais la pouvre martire n'osoit pas dire ung mot, ne monstrer le visage. Ses verges luy faillirent, et fut lassé; si s'en alla hors de l'ostel. Et la pouvre femme, qui s'attendoit d'estre festoyée de l'amoureux jeu et gracieux passetemps, s'en alla tantost après à sa maison, plaindre son mal et son martire, non pas sans menacer et sa voisine bien maudire. Tantdiz que le mary estoit dehors, revint des Cordeliers sa bonne femme, qui trouva sa chambre de verges toute jonchée, son lit dérompu et desfroissié et ses draps tous ensanglantez; si cogneut bien tantost que sa voisine avoit eu afaire de son corps, comme elle pensoit bien; et sans tarder ne faire arrest refist son lit et d'aultres beaulx draps et frez le rempara, et sa chambre nettoya, et puis vers sa voisine s'en alla, qu'elle trouva en piteux point; et ne fault pas dire qu'elle ne trouva bien à qui parler. Au plus tost qu'elle peut en son hostel s'en retourna, et de tous poins se deshabilla, et ou beau lit qu'elle avoit mis à point se coucha, et dormit trèsbien jusques ad ce que son mary retourna de la ville comme sanchié de son courroux, pource qu'il s'en estoit vengé, et vint à sa femme, qu'il trouva ou lit faisant la dormeveille: «Et qu'est cecy, madamoiselle, dist il, n'est il pas temps de lever?—Emy, dit elle, et est il jour? Par mon serment, je ne vous ay pas oy lever; j'estoye entrée en ung songe qui m'a tenue ainsi longuement.—Je croy, dit il, que vous songiez de la lemproye, ne faisiez pas? Ce ne seroit pas trop grand merveille, car je la vous ay bien ramantue à ce matin.—Par dieu, dit elle, il ne me souvenoit de vous ne de vostre lemproye.—Comment, dit il, l'avez vous si tost oublyée?—Oublyée, dit elle, ung songe ne m'arreste rien.—Et a ce esté songe, dit il, de ceste poingnée de verges que j'ay usée sur vous n'a pas deux heures.—Sur moy? dit elle.—Voire vrayement, sur vous, dit-il. Je scay bien qu'il y appert largement, et aux draps de nostre lit avecques.—Par ma foy, beaulx amys, dit elle, je ne scay que vous avez fait ou songié, mais quant à moy il me souvient très bien qu'aujourduy, au matin, vous feistes de trèsbon appétit le jeu d'amours; aultre chose ne scay je; aussi bien povez vous avoir songé de m'avoir fait aultre chose comme vous feistes hier de m'avoir baillé la lemproye.—Ce seroit ung estrange songe, dit il; monstrez vous ung peu que je vous voye.» Elle osta la couverture et reversa, et toute nue se monstra, sans tache ne blesseure quelconque. Voit aussi les draps beaulx et blancs sans souilleure ne tache. Si fut plus esbahy qu'on ne vous saroit dire, et se print à muser et largement penser; et en ce point longuement se tint. Mais toutesfoiz à chef de pièce il dist: «Par mon serment, m'amye, je vous cuidoye à ce matin avoir trèsfort jusques au sang batue, mais je voy bien qu'il n'en est rien, si ne sçay qu'il m'est advenu.—Dya, dit elle, ostez vous hors d'ymaginacion de ceste baterie, car vous ne me touchastes oncques, vous le povez veoir; faictes vostre compte, vous l'avez songé.—Je cognois, dist il lors, que vous dictes voir; si vous requier qu'il me soit pardonné, car je sçay bien que j'euz hier tort de vous dire villannie devant les estrangiers que j'amenay céans.—Il vous est legierement pardonné, dit elle, mais toutesfoiz advisez bien que vous ne soyez plus si legier ne si hastif en voz affaires.—Non seray je, dit il, m'amye.» Ainsi qu'avez oy fut le marchant par sa femme trompé, cuidant avoir songé avoir acheté la lamproye et le surplus fait ou compte dessus dit.


LA XXXIXe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE SAINT POL.

U ng gentil chevalier des marches de Haynau, riche, puissant, vaillant, et trèsbeau compaignon, fut amoureux d'une trèsbelle dame assez et longuement; fut aussi tant en sa grace, et si privé d'elle, que toutesfoiz que bon luy sembloit se rendoit en ung lieu de son hostel à part et destourné, où elle luy venoit faire compagnie; et là devisoient tout à leur beau loisir de leurs gracieuses amours. Et n'estoit ame qui rien scéust de leur très plaisant passe temps, sinon une damoiselle qui servoit ceste dame, qui bonne bouche trèslonguement porta; et tant les servoit à gré en tous leurs affaires qu'elle estoit digne d'ung grand guerdon en recevoir. Elle avoit aussi tant de vertu que non pas seulement sa maistresse avoit gaignée par la servir comme dit est, et aultrement, mais le mary de sa dame ne l'amoit pas mains que sa femme, tant la trouvoit loyalle, bonne, et diligente. Advint ung jour que ceste dame sentent son serviteur le chevalier dessusdit en son hostel, devers lequel elle ne povoit aller si tost qu'elle eust bien voulu, à cause de son mary qui les destournoit, dont elle estoit bien desplaisante, s'advisa de luy mander par la damoiselle qu'il eust encores ung peu de pacience, et que au plustost qu'elle saroit se desarmer de son mary qu'elle viendra vers luy. Ceste damoiselle vint vers le chevalier qui sa dame attendoit, et dist sa charge. Et il, qui gracieux estoit, la mercya beaucop de ce messaige, et la fist seoir auprès de luy, puis la baisa deux ou trois foiz très doulcement; elle l'endura voluntiers, qui bailla courage au chevalier de proceder au surplus, dont il ne fut pas reffusé. Cela fait, elle revint à sa maistresse, et luy dist que son amy n'attendoit qu'elle: «Helas! dit elle, je scay bien qu'il est vray, mais monseigneur ne se veult coucher; ilz sont cy je ne sçay quelz gens que je ne puis laisser. Dieu les maudye! j'aymasse mieulx estre vers luy. Il luy ennuye bien, fait pas, d'estre ainsi seul?—Par ma foy, creez que oy, dit elle, mais l'espoir de vostre venue le conforte, et attend tant plus aise.—Je vous en croy, mais toutesfoiz il est là seul, et sans chandelle, et sont plus de deux heures qu'il y est; il ne peut estre qu'il ne soit beaucop ennuyé. Si vous prie, m'amye, que vous retournez encores vers luy une foiz pour m'excuser, et luy faictes compaignie ung espace; et entretant, si Dieu plaist, le dyable emportera ces gens qui nous tiennent cy.—Je feray ce qu'il vous plaira, madame; mais il me semble qu'il est si content de vous qu'il ne vous fault jà excuser, et aussi se je y alloye vous demourriez icy toute seule de femmes, et pourroit monseigneur demander pour moy, et l'on ne me saroit où trouver.—Ne vous chaille de cela, dist elle, j'en feray bien s'il vous mande; il me desplaist que mon amy est seul; allez veoir qu'il fait, je vous en prie.—Je y vois, puis qu'il vous plaist», dit elle. S'elle fut bien joyeuse de ceste ambassade, il ne le fault jà demander; mais pour couvrir sa volunté, elle en fist l'excusance et le refus à sa maistresse. Elle fust tantost vers le chevalier attendant, qui la receut joieusement; si lui dist:—«Monseigneur, madame m'envoie encores icy s'excuser devers vous pource que tant vous fait attendre, et croyez qu'elle en est la plus courroucée.—Vous luy direz, dit il, qu'elle face tout à loisir, et qu'elle ne se haste de rien pour moy, car vous tiendrez son lieu.» Lors de rechef la baise et acole, et ne la souffrit partir tant qu'il eut besognié deux foiz, qui guères ne luy coustèrent; car alors il estoit frez et jeune et homme fort à cela. Ceste damoiselle print bien en pacience sa bonne adventure, et eust bien voulu avoir souvent une telle rencontre, sans le prejudice de sa maistresse. Et quand vint au partir, elle pria au chevalier que sa maistresse n'en sceust rien. «Vous n'avez garde, dit il.—Je vous en requier», dist elle. Et puis s'en vint à sa maistresse, qui demanda tantost que fait son amy? «Il est là, dit elle, et vous attend.—Voire, dit elle, et est il point mal content?—Nenny, dit elle, puis qu'il a compaignie. Il vous scet trèsbon gré que vous m'y avez envoyée; et si ceste attente estoit souvent à faire, il seroit content m'avoir pour deviser et passer temps; et par ma foy je y voys voluntiers, car c'est le plus plaisant homme de jamais; et Dieu scet qu'il le fait bon oyr maudire ces gens qui vous retiennent, excepté monseigneur: à luy ne vouldroit il toucher.—Saint Jehan! dit elle, je voudroye que luy et la compaignie fussent en la rivière, et je fusse dont vous venez.» Tant passa le temps que monseigneur, Dieu mercy, se deffist de ses gens, vint en sa chambre, se déshabilla et coucha. Madame se mist en cotte simple, et print son attour de nuyt, et ses heures en sa main, et commence devotement, Dieu le scet, à dire sept pseaulmes et paternostres; mais monseigneur, qui estoit plus esveillé qu'un rat, avoit grand fain de deviser, si vouloit que madame laissast ses oroisons jusques à demain, et qu'elle parle à luy: «Ha! monseigneur, dit elle, pardonnez moy, je ne puis vous entretenir maintenant; Dieu va devant, vous le savez; je n'aroye meshuy bien, ne de sepmaine, si je n'avoie dit le tant pou de service que je luy sçay faire; et encores de mal venir je n'eu piéça tant à dire que j'ay maintenant.» Alors dist monseigneur: «Vous m'affolez bien de ceste bigoterie; et est ce à faire à vous de dire tant d'heures? Ostez, ostez, laissez les dire aux prestres. Dy je pas bien, Jehannette?» dist il à la damoiselle dessus dicte.—«Monseigneur, dit elle, je n'en sçay que dire, sinon, puis que madame est accoustumée de servir Dieu, qu'elle parface.—A dya, dit madame, monseigneur, je voy bien que vous estes avoyé de plaider, et j'ay volunté d'achever mes heures; si ne sommes pas bien d'un accord. Si vous lairray Jehannette qui vous entretiendra, et je m'en iray en ma chambrette là derrière tancer à Dieu.» Monseigneur fut content. Si s'en alla madame les grans galotz vers le chevalier son amy, qui la receut Dieu scet en grand liesse et reverence, car l'onneur qu'il luy fist n'estoit pas maindre qu'à genouz ployez et enclinez jusques à terre. Mais vous devez savoir que tantdiz que madame achevoit ses heures avec son amy, monseigneur son mary, ne sçay de quoy il lui sourvint, prya Jehannette, qui luy faisoit compaignie, d'amours à bon escient. Et pour abreger, tant fist par promesses et par beau langage, qu'elle fut contente d'obéyr; mais le pis fut que madame, au retour de son amy, qui l'acola deux foiz à bon escient avant son partir, trouva monseigneur son mary et Jehannette sa chambrière en tel ouvrage et semblable qu'elle venoit de faire, dont elle fut bien esbahye, et encores plus monseigneur et Jehannette, qui se trouvèrent ainsi sourprins. Quand madame vit ce, Dieu scet comment elle salua la compaignie, jà soit qu'elle eust bien cause de se taire; et se print à la pouvre Jehannette par si très grant courroux qu'il sembloit bien qu'elle eust ung dyable ou ventre, tant luy disoit de villainnes parolles. Encores fist elle plus et pis, car elle print ung grant baston et l'en chargea trèsbien le doz, voyant monseigneur, qui en fut mal content et desplaisant, et se leva sur piez et batit tant madame qu'elle ne se povoit sourdre. Et quant elle vit qu'elle n'avoit puissance que de sa langue, Dieu scet s'elle la mist en œuvre, mais adressoit la plus part de ses motz venimeux sur la pouvre Jehannette, qui n'en peut plus souffrir, si dit à monseigneur le gouvernement de madame, et dont elle venoit à ceste heure de dire ses oroisons et avec quy. Si fut la compaignie bien troublée, monseigneur tout le premier, qui se doubtoit assez, et madame, qui se trouve affolée et batue et de sa chambrière accusée. Le surplus du gouvernement du mesnaige bien troublé demoure en la bouche de ceulx que le scevent, si n'en fault jà plus avant enquerir.


LA XLe NOUVELLE.
PAR MESSIRE MICHAULT DE CHANGY.

I l advint naguères à Lille que ung grand clerc et prescheur de l'ordre Saint Dominicque convertit, par sa sainte et doulce predicacion, la femme d'un bouchier, par telle et si bonne façon qu'elle l'aimoit plus que tout le monde, et n'avoit jamais au cueur bien ne en soy parfaicte liesse s'elle n'estoit emprès luy. Mais maistre moyne en la parfin s'ennuya d'elle, et estoit sur son corps dependant, ce qu'il luy feist grand pièce après, et eust trèsbien voulu qu'elle se fust deportée de si souvent le visiter; dont elle estoit tant mal contente que plus ne povoit, mesmes le reboutement qu'il luy faisoit trop plus avant en son amour l'enracinoit. Damp moyne, ce voyant, luy defendit sa chambre, et chargea bien expressement à son clerc qu'il ne la souffrist plus entrer dedans, quelque chose qu'elle luy dye. S'elle fut plus mal contente que par avant, ce ne fut pas de merveille, car elle estoit ainsi que forcenée. Et si vous me demandez à quel propos damp moyne ce faisoit, je vous respons que ce n'estoit pas par devocion ne pour vouloir qu'il eust de devenir chaste; mais la cause est qu'il en avoit racointée une plus belle, plus jeune beaucop, et plus riche, qui desjà estoit tant privée qu'elle avoit la clef de sa chambre. Tant fist toutesfoiz que la bouchière ne venoit plus vers luy comme elle avoit de coustume; si avoit trop meilleur et plus seur loysir sa dame nouvelle de venir gaingner les pardons en sa chambre et paier le disme, comme les femmes d'Ostellerie, dont cy dessus est touché. Ung jour fut prest de faire bonne chère en la chambre de maistre moyne, après disner, où sa dame promist de comparoir et faire apporter sa porcion, tant de vin comme de viande. Et car aucuns de ses frères de léens estoient assez de son mestier, il en invita deux ou troys tout secretement; et Dieu scet la grand chère qu'on fist à ce disner, qui ne se passa point sans boire d'autant. Or devez vous savoir que nostre bouchière cognoissoit assez les gens de ces prescheurs, qu'elle veoit passer devant sa maison, qui portoient puis du vin, puis des pastez, et puis des tartres, et tant de choses que merveilles. Si ne se peut tenir de demander quelle feste on fait à leur hostel? Et il luy fut respondu que ces biens sont pour ung tel, c'est assavoir son moyne, qui a gens de bien au disner. «Et qui sont ilz? dit elle.—Ma foy je ne scay, dit il; je porte mon vin jusques à l'huys tant seullement, et là vient nostre maistre qui me descharge; je ne sçay qui y est.—Voire, dit elle, c'est la secrète compaignie. Or bien allez vous en et les servez bien.» Tantost passa ung aultre serviteur qu'elle interroga pareillement, qui luy dist comme son compaignon, mais plus avant, car il dit: «Je pense qu'il y a une damoiselle qui ne veult pas estre veue ne congneue.» Elle pensa tantost ce qui estoit; si cuida bien enrager, tant estoit mal contente, et disoit en soy mesmes qu'elle fera le guet sur celle qui luy fait tort de son amy, et qui luy a baillé le bout. Et s'elle la peut rencontrer, ce ne sera pas sans luy dire sa leçon, et egratigner le visage. Si se mist au chemin en intencion d'executer ce qu'elle avoit conclud. Quand elle fut venue au lieu desiré, moult luy tardoit de rencontrer celle qu'elle hayt plus que personne; si n'eut pas tant de constance que d'attendre qu'elle saillist de la chambre où elle avoit fait maintes bonnes chères, mais s'advisa de prendre une eschalle que ung couvreur avoit laissée lez son ouvrage tantdiz qu'il estoit allé disner; elle dressa ceste échelle à l'endroit de la cheminée de la cuisine de l'ostel, où elle vouloit estre pour saluer la compaignie, car bien savoir que aultrement n'y pourroit entrer. Ceste eschelle mise à point comme elle la voulut avoir, elle monta jusques à la cheminée, à l'entour de laquelle elle lya très bien une moyenne corde qu'elle trouva d'adventure. Et cela fait, trèsbien, comme luy sembloit, elle se bouta dedans la dicte cheminée, et se commença à descendre et ung peu avaler; mais le pis fut qu'elle demoura en chemin, sans se pouvoir ravoir, ne monter, ne avaler, quelque peine qu'elle y mist, et ce à l'occasion de son derrière qui estoit beaucop gros et pesant, et de sa corde qui rompit, par quoy ne se povoit ressourdre. Si estoit, Dieu scet, en merveilleux desplaisir, et ne savoit que faire ne que dire. Si s'advisa qu'elle attendroit le couvreur et qu'elle se mettroit en sa mercy, et l'appellera quand il viendra querre son eschelle et sa corde. Elle fut bien trompée, car le couvreur ne vint à l'œuvre jusques au lendemain bien matin, pource qu'il fist trop grand pluye, dont elle eut bien sa part, car elle fut toute percée. Quand vint sur le soir, bien tart, nostre bouchière oyt gens deviser en la cuisine; si commença à hucher, dont ilz furent bien esbahiz et effraiez, et ne savoient qui les huchoit ne où elle estoit. Toutesfoiz, quelque esbahiz qu'ilz fussent, ilz entendirent encores ung peu: s'ilz oyrent la voix du par avant, arrière hucher très aigrement; si cuidèrent que ce fut ung esperit, et le vindrent annuncer à leur maistre, qui estoit en dortouer, et ne fut pas si vaillant d'y venir veoir que c'estoit, mais il mist tout à demain. Pensez la belle patience que ceste bonne femme eut, qui fut toute la nuyt en ceste cheminée. Et de sa bonne adventure, il ne pleut long temps aussi fort, ne si bien. Lendemain, assez matin, nostre couvreur revint à l'œuvre pour recouvrer la perte que la pluye luy fist le jour devant. Il fut tout esbahy de veoir son eschelle ailleurs qu'il ne la laissa, et la cheminée lyée de sa corde: si ne savoit qui ce avoit fait ne à quoy. Si s'advisa d'aller querre sa corde, et monta à mont son eschelle, et vint jusques à la cheminée, et destacha sa corde; et de bien venir, bouta sa teste dedans la cheminée, où il vit nostre bouchière plus simple qu'un chat baigné, dont il fut très esbahy. «Et que faictes vous icy, dame? dit il; voulez vous desrober les pouvres religieux de ceans?—Helas! mon amy, dist elle, par ma foy, nenny. Je vous requier, aidez moy à saillir d'icy, et je vous donneray ce que me vouldrez demander.—A! je m'en garderay bien, dist le couvreur, si je ne sçay dont vous y venez.—Je le vous diray, puis qu'il vous plaist, dit elle; mais je vous prie, qu'il n'en soit nouvelle.» Lors luy compta tout du long les amours d'elle et du moyne, et la cause dont elle venoit là. Le couvreur eut pitié d'elle, si fist tant, à quelque meschef que ce fut, moyennant sa corde, qu'il la tira dehors, et la mena en bas. Et elle luy promist que, si tenoit bonne bouche, elle luy donneroit de la char et de bœuf et de mouton pour fournir son mesnage pour toute ceste année, ce qu'elle fist. Et l'autre tint si secret son cas que chascun en fut adverty.


LA XLIe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE LA ROCHE.

U ng gentil chevalier de Haynau, sage, subtil et trèsgrand voyageur, après la mort de sa très bonne femme et sage, pour les biens qu'il avoit trouvez en mariage ne sceut passer son temps sans soy lyer comme il fut par avant, car il espousa une trèsbelle et gente damoiselle, non pas des plus subtiles du monde; car, à la verité dire, elle estoit ung peu lourde en la taille, et c'estoit en elle qui plus plaisoit à son mary, pource qu'il esperoit par ce point mieulx la duyre et tourner à la fasson qu'avoir la vouldroit. Il mist sa cure et son estude à la fassonner, et de fait elle luy obéissoit et complaisoit comme il le desiroit, si bien qu'il ne sceut mieulx demander. Et entre aultres choses, toutesfoiz qu'il vouloit faire l'amoureux jeu, qui n'estoit pas si souvent qu'elle eust bien voulu, il luy faisoit vestir ung très beau jaserant, dont elle estoit bien esbahie; et de prinsault lui demanda bien à quel propos il la faisoit armer. Et il luy respondit qu'on ne se doit point trouver à l'assault amoureux sans armes. Et fut contente de vestir se jaserant; et n'avoit aultre regret que monseigneur n'avoir l'assault plus au cueur, combien que ce luy estoit assez grand peine s'aucun plaisir ne fust ensuy. Et si vous demandez à quel propos son seigneur ainsi la gouvernoit, je vous respons que la cause qui à ce faire le mouvoit estoit affin que madame ne désire pas tant l'assault amoureux, pour la peine et empeschement de ce jaserant. Mais combien qu'il fust bien sage, il s'abusoit de trop; car si le jaserant à chacun assault luy eust cassé et doz et ventre, si n'eust elle pas refusé le vestir, tant luy estoit et doulx et plaisant ce qui s'ensuyvoit. Ceste manière de faire dura beaucop, et tant que monseigneur fut mandé pour servir son prince en la guerre, et en aultre assault que le dessusdit. Si print congié de madame et s'en alla où il fut mandé. Elle demoura à l'ostel en la garde et conduicte d'un ancien gentil homme et d'aucunes damoiselles qui la servoient. Or devez vous savoir qu'en cest hostel avoit gentil compaignon clerc, qui trèsbien chantoit et jouoit de la harpe, et avoit la charge de la despense. Et aprés disner s'esbatoit voluntiers de la harpe; à quoy madame prenoit trèsgrand plaisir, et se rendoit souvent vers luy au son de la harpe. Tant y ala et tant s'i trouva que le clerc la pria d'amours; et elle, désirant de vestir son jaserant, ne l'escondit pas, ainçois luy dist: «Venez vers moy à tele heure et en telle chambre, et je vous feray response telle que vous serez content.» Elle fut beaucop merciée, et à l'heure assignée, nostre clerc ne faillit pas devenir hurter où madame luy dist, qui l'attendoit de pié coy, le beau jaserant en son doz. Elle ouvrit la chambre, et le clerc la vit armée; si cuida que ce fust aultry qui fust embusché léens pour luy faire desplaisir; dont il fut si trèseffrayé que, de la grand paour qu'il eut, il chéut à la reverse et descompta ne sçay quants degreez si trèsroiddement qu'à pou qu'il ne se rompit le col. Mais toutesfoiz il n'eut garde, tant bien luy aida Dieu et sa bonne querelle. Madame, qui le vit en ce point et dangier, fut très desplaisante et mal contente; si vint en bas et luy aida à sourdre, et luy demanda dont luy venoit ceste paour. Et il luy compta et dist que vrayement il cuydoit estre deceu. «Vous n'avez garde, dit elle, je ne suis pas armée pour vous faire mal»; et en ce disant, montèrent arrière les degrez, et entrèrent en la chambre. «Madame, dit le clerc, je vous pry, dictes moy, s'il vous plaist, qui vous meut de vestir ce jaserant.» Et elle, comme ung peu faisant la honteuse, luy respondit: «Et vous le savez bien.—Par ma foy, sauf vostre grace, madame, dit il, se je le sceusse je ne le demandasse pas.—Monseigneur, dit elle, quand il me veult baiser et parler d'amours, il me fait en ce point habiller, et je sçay bien que vous venez icy à ceste cause; et pour ce me suys mise en point.—Madame, dit il, vous avez raison; et aussi vous me faictes souvenir que c'est la manière des chevaliers d'en ce point faire adouber leurs dames. Mais les clercs ont tout aultre manière de faire, qui à mon advis est trop plus belle et plus aisée.—Et quelle est elle, dist la dame, je vous prie?—Je la vous monstreray», dit il. Lors la fist despoiller de son jaserant et du surplus de ses habillemens jusques à la belle chemise, et il pareillement se deshabilla, et misrent à point le beau lit qui là estoit, et se coucherent tout dedans et se désarmèrent de leurs chemises et passèrent temps deux ou trois heures bien plaisamment. Et avant partir, le gentil clerc monstra à madame la coustume des clercs, quelle beaucop loa et trop plus que celle des chevaliers. Assez et souvent se rencontrèrent depuis en la fasson dessusdicte, sans qu'il en fust nouvelle, quoy que madame fust pou subtille. A chef de pièce, monseigneur retourna de la guerre, dont madame ne fut pas trop joyeuse en son pardedans, quelque semblant qu'elle monstrast au pardehors. Et à l'heure de disner, et car el savoit sa venue, il fut servy, Dieu scet comment. Ce disner se passa; et quand vint à dire graces, monseigneur se mist en son reng, et madame print son quartier. Tantost que graces furent achevées et dictes, monseigneur, pour faire du mesnagier et du gentil compaignon, dist à madame: «Allez tost en nostre chambre et vestez vostre jaserant.» Et elle, recordant du bon temps qu'elle avoit eu avec son clerc, respondit tout subit: «Ha! monseigneur, la coustume des clercs vault mieulx.—La coustume des clercs! dit-il. Et savez vous leur coustume?» Si se commença à fumer, et coleur changer, et se doubta de ce qui estoit, combien qu'il n'en sceut oncques rien, car il fut tout à coup mis hors de sa doubte. Madame ne fut pas si beste qu'elle n'aperceust bien que monseigneur n'estoit pas content de ce qu'elle avoit dit, si s'advisa de trouver le ver: «Monseigneur, je vous ay dit que la coustume des clercs vault mieulx, et encores le vous dy je.—Et quelle est elle? dit il.—Ilz boivent après grâces.—Voire dya, dit il, saint Jehan! vous dictes vray, c'est leur coustume voirement, qui n'est pas mauvaise; et pource que vous la prisez tant, nous la tiendrons doresenavant. Si firent apporter du vin et beurent, et puis madame alla vestir son jaserant, dont elle se fust bien passée, car le gentil clerc luy avoit monstré aultre fasson de faire qui trop mieulx luy plaisoit. Comme vous avez oy fut monseigneur par madame en sa response abusé. Et fault dire que le sens subit qui luy vint à mémoire à ce coup luy descendit en la vertu du clerc, qui depuis luy monstra foison d'aultres tours, dont monseigneur en la parfin se trouva noz amis.


LA XLIIe NOUVELLE.
RACOMPTÉE PAR MÉRIADECH.

L 'an cinquante derrenier passé, le clerc d'un village du diocèse de Noyon, pour impetrer et gaigner les pardons qui furent à Romme, qui sont tels que chascun sçait, se mist à chemin, en la compaignie de pluseurs gens de bien de Noyon, de Compiengne, et des lieux voisins. Mais avant son departement disposa de ses besoignes bien et surement: premièrement de sa femme et de son mesnage, et le fait de sa coustrerie recommenda à ung jeune gentil clerc pour la desservir jusques à son retour. En assez bref temps il vint à Romme lui et sa compaignie, et firent chacun leur devocion et pelerinage le mains mal qu'ilz sceurent; mais vous devez savoir que nostre clerc trouva d'adventure à Romme ung de ses compaignons d'escole du temps passé, qui estoit ou service d'un grand cardinal, et en grand autorité, qui fut trèsjoieux de l'avoir trouvé, pour l'accointance qu'il avoit à luy, et luy demanda de son estat. Et l'autre luy compta tout du long tout premier comment il estoit, hélas! maryé, son nombre d'enfans, et comment il estoit clerc d'une parroiche. «Ha! dit son compaignon, par mon créateur, il me desplaist bien que vous estes maryé.—Pourquoy? dit l'autre.—Je le vous diray, dit il; ung tel cardinal m'a chargé expressément que je luy trouve un serviteur pour estre son notaire, qui soit de nostre marche; et croiez que ce seroit trèsbien vostre fait, pour estre tost et largement pourveu, se ce ne fust vostre mariage, qui vous fera repatrier, et espoire plus grans bien perdre que vous n'y arez.—Par ma foy, dit le clerc, mon mariage n'y fait rien, mon compaignon; car, à vous dire vérité, je me suis party de nostre pays soubz umbre du pardon qui est à present icy. Mais creez que ce n'a pas esté ma principale intention, car j'ay conclud d'aller jouer deux ou trois ans par pays; et ce pendant ce temps si Dieu vouloit prendre ma famme, jamais je ne fu si eureux. Et pourtant je vous requier que vous soyez mon moyen vers ce cardinal que je le serve; et, par ma foy, je feray tant que vous n'arez jà reprouche pour moy; et s'ainsi le faictes vous me ferez le plus grand service que jamais compaignon fist à autre.—Puis que vous avez ceste volunté, dist son compaignon, je vous serviray à ceste heure, et vous logeray pour avoir bon temps, se à vous ne tient.—Et, mon amy, je vous mercie», dit l'autre. Pour abreger, nostre clerc fut logié avecques ce cardinal, laquelle chose il manda à sa femme, l'ensemble et son intencion, que n'est pas de retourner par delà si tost qu'il luy dist au partir. Elle se conforta, et luy rescripst qu'elle fera le mieulx qu'elle pourra. Ou service de ce cardinal se maintint et conduisit gentement nostre bon clerc, et fist tant à chef de pièce qu'il gaigna son maistre, lequel n'avoit pas pou de regret qu'il n'estoit habile à tenir bénéfices, car largement l'en eust pourveu. Pendant le temps que nostre dit clerc estoit ainsi en grace que dit est, le curé de son village alla de vie à mort, et ainsi vaca son benefice, qui estoit ou mois du pape, dont le coustre, tenant le lieu de son compaignon estant à Romme, se pensa qu'au plus tost qu'il pourroit qu'il courroit à Romme et feroit tant à l'ayde de son compaignon qu'il auroit ceste cure. Il ne dormit pas, car en pou de jours, après maintes peines et travaulx, tant fist qu'il se trouva à Romme, et n'eut oncques bien tant qu'il eust trouvé son compaignon, le clerc servant le cardinal. Après grosses recognoissances et d'ung costé et d'aultre, le clerc demanda de sa femme, et l'autre, esperant de luy faire ung trèsgrand plaisir, et affin que la besoigne dont il le veult requerre en vaille mieulx, luy respondit qu'elle estoit morte; dont il mentoit, car je tien qu'à ceste heure elle saroit bien tanser son mary. «Dictes vous doncques que ma femme est morte, dit le clerc, et je prie à Dieu qu'il luy pardonne ses pechez.—Oy vrayement, dit l'autre, la pestilence de l'année passée avecques aultres pluseurs l'emporta.» Or faindoit il ceste bourde, qui depuis luy fut cher vendue, pource qu'il savoit que le clerc ne s'estoit party de son pais qu'à l'occasion de sa femme, qui estoit trop peu paisible, et que plus plaisant nouvelle d'elle ne luy pourroit on apporter que de sa mort. Et à la vérité ainsi en estoit il, mais le rapport fut faulx. «Et qui vous amaine en ce pais? dist il, après pluseurs et diverses devises.—Je le vous diray, mon compaignon et mon amy. Il est vrai que le curé de nostre ville est trespassé; si vien vers vous pour que par vostre bon moien je puisse parvenir à son benefice. Si vous prie tant que puis que me veillez aider à ce besoing. Je sçay bien qu'il est en vous de le me faire avoir, à l'aide de monseigneur vostre maistre.» Le clerc, pensant sa femme estre morte et la cure de sa ville vacquer, conclud en soy mesmes que il happera ce benefice, et aultres encores, s'il y peut parvenir. Mais toutesfoiz il ne le dit pas à son compaignon, ainçois luy dist qu'il ne tiendroit pas à luy qu'il ne soit curé de leur ville, dont il fut beaucop mercyé. Tout autrement alla, car au lendemain nostre saint père, à la requeste du cardinal maistre de nostre clerc, luy donna ceste cure. Si s'en vint ce clerc à son compaignon, quand il sceut ces nouvelles, et luy dist: «Ha! mon amy, par ma foy, vostre fait est rompu, dont me desplaist bien.—Et comment? dit l'aultre.—La cure de nostre ville est donnée, dit il, mais je ne sçay à qui. Monseigneur mon maistre vous a cuidé aider, mais il n'a pas esté en sa puissance de faire vostre fait.» Qui fut bien mal content, ce fut celuy qui estoit venu de si loing perdre sa peine et despendre son argent, dont ce ne fut pas dommaige. Si print congié bien piteux de son compaignon, et s'en retourna en son pais, sans soy vanter de la bourde qu'il a semée. Or retournons à nostre clerc, qui estoit plus gay que une mitaine de la mort de sa femme, et de la cure de leur ville que nostre saint père, à la requeste de son maistre, luy avoit donnée pour recompense. Et disons comment il devint prestre à Romme, et y chanta sa bien devote première messe, et print congié de son maistre pour une espace de temps, à venir par deçà à leur ville prendre possession de sa cure. A l'entrée qu'il fist de leur ville, de son boneur la première personne qu'il rencontra ce fut sa femme, dont il fut bien esbahy, je vous en asseure, et encores beaucop plus courroucé. «Et qu'est ce cy, dist il, m'amye? et on m'avoit dit que vous estiez trespassée.—Je m'en suis bien gardée, dit elle. Vous le dictes, ce croy je, pource que l'eussez bien voulu; et vous l'avez bien monstre, qui m'avez laissée l'espace de cinq ans à tout une grant tas de petiz enfans.—M'amye, dit il, je suis bien joyeux de vous veoir en bon point, et en loe Dieu de tout mon cueur; maudit soit qui m'en apporta aultres nouvelles!—Ainsi soit il, dit elle.—Or je vous diray, m'amye: je ne puis arrester pour maintenant; force est que je m'en aille hastivement devers monseigneur de Noyon, pour une besongne qui luy touche; mais au plus bref que je pourray je vous verray.» Il se partit de sa femme et prend son chemin devers Noyon, mais Dieu scet s'il pensa en chemin à son pouvre fait: «Hélas! dit il, or suis je homme deffait et deshonoré: prestre, clerc, et maryé! Je croy que je suis le premier maleureux de cest estat.» Il vint devers monseigneur de Noyon, qui fut bien esbahy d'oyr son cas, et ne le sceut conseiller; si le renvoya à Romme. Quand il y fut venu, il compta à son maistre, du long et du lé, la verité de son adventure, qui en fut trèsamèrement desplaisant. Au lendemain il compta à nostre saint père, en la presence du colliège des cardinaux et de tout le conseil, l'adventure de son homme qu'il avoit fait curé. Si fut ordonné qu'il demourra prestre et maryé et curé aussi. Et demourra avec sa femme en la façon que ung homme maryé honorablement et sans reprouche, et seront ses enfans legitimez et non bastards, jà soit que le père soit prestre. Mais au surplus, s'il est trouvé qu'il aille aultre part que à sa femme, il perdra son benefice. Ainsi qu'avez oy fut ce galant puny par faulx donner à entendre de son compaignon; et fut contraint de venir demourer sur son benefice, et qui plus et pis est, avecques sa femme, dont il se fust bien passé si l'eglise ne l'eust ordonné.


LA XLIIIe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE FIENNES.

N 'a guères que ung bon homme, laboureur et marchant et tenant sa residence en ung bon village de la chastellenie de Lille, trouva façon et manière, au pourchaz de luy et de ses bons amis, d'avoir à femme une trèsbelle jeune fille qui n'estoit pas des plus riches; et aussi n'estoit son mary, mais trèsconvoiteux estoit et homme de grand diligence, et qui fort tiroit d'acquerre et gaigner. Et elle d'aultre part mettoit peine d'entretenir le mesnage selon le desirier de son mary, qui à ceste cause l'avoit beaucop en grace, lequel à mains de regret alloit souvent es affaires de sa marchandise, sans avoir doubte ne suspicion qu'elle feist aultre chose que bien. Mais le pouvre homme sur ceste fiance tant y alla et tant la laissa seule, que ung gentil compaignon s'approucha, et pour abreger fist tant à pou de jours qu'il fut son lieutenant, dont guères ne se doubtoit celuy qui cuidoit avoir du monde la meilleur femme, et qui plus pensast à l'accroissement de son honneur et de sa chevance. Ainsi n'estoit pas, car elle abandonna tost l'amour qu'elle luy devoit, et ne luy challut du prouffit ne du dommage; ce seulement luy suffisoit qu'elle se trouvast avecques son amy, dont il en advint ung jour ce qui s'ensuyt. Nostre bon marchant dessusdit estant dehors, comme il avoit de coustume, sa femme le fist tantost savoir à son amy, qui n'eust pas failly voluntiers à son mandement, mais vint tout incontinent. Et affin qu'il ne perdist temps, au plustost qu'oncques peut ne sceust s'approucha de sa dame, et luy mist en terme pluseurs et divers propos amoureux; et pour conclusion, le desiré plaisir ne luy fut pas escondit néant plus que autresfoiz, dont le nombre n'estoit pas petit. De mal venir, tout à ce beau cop que ces amours se faisoient, véez bon mary d'arriver, qui trouve la compagnie en besoigne, dont il fut bien esbahy, car il n'eust pas pensé que sa femme fust telle. «Qu'est ce cy? dist il; par la mort bieu, ribauld, je vous tueray tout roidde.» Et l'aultre, qui se treuve surprins et en meffait present achopé, ne savoit sa contenance; mais car il le savoit diseteux et fort souffreteux, il luy dist tout subit: «Ha! Jehan, mon amy, je vous cry mercy, pardonnez moy si je vous ay rien meffait, et par ma foy je vous donray six rasures de blé.—Par dieu, dit il, je n'en feray rien; vous passerez par mes mains et auray la vie de vostre corps, si je n'en ay douze rasures. Et la bonne femme, qui oyoit ce débat, pour y mettre le bien comme elle estoit tenue, s'advança de parler et dist à son mary: «Et Jehan, beau sire, laissez luy achever ce qu'il a commencé, je vous requier, et vous aurez huit rasures. N'ara pas? dit elle, en se virant vers son amy.—J'en suis content, dit il, mais, par ma foy, c'est trop, ad ce que le blé est cher.—Est ce trop? dist le vaillant homme; et par la mort bieu, je me repens bien que je n'ay dit plus hault, car vous avez forfait une emende, s'il venoit à la cognoissance de la justice, qui vous seroit beaucop plus tauxée; pourtant faictes vostre compte que j'en aray douze rasures, ou vous passerez par là.—Et vrayement, dit sa femme, Jehan, vous avez tort de me desdire; il me semble que vous devez estre content à ces huit rasures, et pensez y que c'est ung grand tas de blé.—Ne m'en parlez plus, dit il, j'en auray douze rasures, ou je le tueray et vous aussi.—A dya, dit le compaignon, vous estes ung fort marchant; et au mains puis qu'il fault que vous aiez tout à vostre dit, j'auray terme de paier.—Cela veil je bien, mais j'aray mes douze rasieres.» La noise s'appaisa; et fut prins jour de paier à deux termes, les six rasures au lendemain, et les aultres à la saint Remy prouchainement venant, et ce par l'ordonnance de sa femme comme moien, qui dist à son mary: «Or ça, vous estes content, n'est ce pas, de recevoir vostre blé comme j'ay dit.—Oy, vrayement, dit il.—Or vous en allez, dit elle, tant qu'il ayt achevé ce qu'il avoit encommencé quand vous sourvenistes; aultrement son marché seroit nul, que vous l'entendez, car je l'ay mis en devis, s'il vous en soubvient.—Saint Jehan, il est ainsi, dit le bon compaignon; je n'yray pas à l'encontre de mon mot, dist le bon marchand. Jà Dieu ne veille que en marché que je face on me trouve trompeur ne mensongier. Vous achèverez ce qu'avez entreprins, et j'aray mes douze rasieres de blé aux termes dessusdictz. Veez là nostre marchié, n'est pas?—Oy, vrayement, dit sa femme.—Et adieu donc, dist il; mais toutesfoiz qu'il n'y ait pas faulte que je n'aye demain six rasieres de blé.—Ne vous doubtez, dit l'aultre, je vous tiendray promesse.» Ainsi se partit ce vaillant homme de sa maison, joyeux en son courage, pour ces douze rasieres de blé qu'il doit avoir. Et sa femme et son amy recommencèrent de plus belle. Du payer soit à l'adventure, combien toutesfoiz qu'il me fut dit depuis que le blé fut payé et délivré au jour et terme dessus dictz.


LA XLIVe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE LA ROCHE.

C omme il est aujourduy largement de prestres et curez qui sont si gentilz compaignons que nulles des folies que font et commettent les gens laiz ne leur sont impossibles ne difficiles, avoit n'a guères en ung bon village de Picardie ung maistre curé qui faisoit rage d'amer par amours. Et entre les autres femmes et belles filles de sa parroiche, il choisit et enoeilla une trèsbelle jeune et gente fille à marier, et ne fut pas si peu hardy qu'il ne luy comptast tout du long son cas. De fait, son bel et asseuré langage, cent mille promesses et auttretant de bourdes, la menèrent ad ce qu'elle estoit assez comme contente d'obéyr à ce curé, qui n'eust pas esté ung petit dommage, tant estoit belle, gente, et de plaisans manières; et n'avoit en elle que une faulte, c'estoit qu'elle n'estoit pas des plus subtilles du monde. Toutesfoiz je ne sçay dont luy vint cest advis ne manière de respondre; elle dist ung jour à son curé, qui chauldement poursuyvoit sa besogne, qu'elle n'estoit pas conseillée de faire ce qu'il requéroit tant qu'elle fust à marier; car si par adventure, comme il advient chacun jour, elle faisoit ung enfant, elle seroit à tousjours mès femme deshonorée et reprouchée de son père, de sa mère, de ses frères, et de tout son lignage; laquelle chose elle ne pourroit souffrir, et n'a pas cueur pour soustenir et porter le desplaisir et ennuy qu'endurer luy conviendroit à ceste occasion: «Et pourtant hors de ce propos, si je suis quelque jour mariée, parlez à moy, je feray ce que je pourray pour vous, et non aultrement; affin que vous ne vous y attendez point je le vous dy, et m'en creez une fois pour toutes.» Monseigneur le curé ne fut pas trop joyeux de ceste response absolue; et ne scet penser de quel courage, ne à quel propos elle part; toutesfoiz luy, qui estoit prins ou las d'amours et féru bien à bon escient, ne veult pas pourtant sa queste abandonner; si dit à sa dame: «Or ça, m'amye, estez vous en ce fermée et conclue que de riens faire pour moy si vous n'estes mariée?—Certes oy, dit elle.—Et si vous estiez mariée, dit il, et j'en estoie le moien et la cause, en ariez vous après cognoissance, en moy tenant loyaulment et sans faulseté ce que m'avez promis?—Par ma foy, dit elle, oy, et de rechef le vous promectz.—Or bien grant mercy, dit il, faictes bonne chère, car je vous promectz seurement qu'il ne demourra pas à mon pourchaz ne à ma chevance que vous ne le soyez, et de bref, car je suis seur que vous ne le desirez pas tant que je faiz; et affin que vous voiez à l'œil que je suis celuy qui veil emploier et corps et biens en vostre service, vous verrez comment je me conduiray en ceste besoigne.—Or bien, dit elle, monseigneur le curé, l'on verra comment vous ferez.» Sur ce se fist la despartie; et bon curé, qui avoit le feu d'amours, ne fut depuis guères aise tant qu'il eut trouvé le père de sa dame, et se mist en langage avecques luy de pluseurs et diverses matères; et en la fin il vint et cheut à parler de sa fille, et luy va dire bon curé: «Mon voisin, je me donne grand merveille, si font aussi pluseurs voz voisins et amys, que vous ne mariez vostre fille, et à quel propos vous la tenez tant d'emprès vous, et si savez toutesfoiz que la garde est périlleuse. Non pas, Dieu me veille garder que je dye ou voulsisse dire qu'elle ne soit toute bonne; mais vous en voiez tous les jours mesadvenir puis qu'on les tient oultre le terme deu. Pardonnez-moy toutesfoiz que si fiablement vous ouvre et descouvre mon courage; car l'amour que je vous porte, la foy aussy que je vous doy, en tant que je suis vostre pasteur indigne, me semonnent et obligent de ce faire.—Par dieu! monseigneur le curé, dist le bon homme, vous ne me dictes chose que je ne cognoisse estre vraye; et tant que je puis vous mercye; et ne pensez pas ce que je la tiens si longuement avecques moy c'est malgré moy; car quand son bien viendra, par ma foy, je me traveilleray pour elle comme je doy. Vous ne voulez pas que je luy pourchasse ung mary, mais s'il en vient ung qui soit homme de bien, je feray comme ung bon père doit faire.—Vous dictes trèsbien, dit le curé, et par ma foy, vous ne povez mieulx faire que de vous en despescher, car c'est grand chose de veoir ses enfans allyez en sa plaine vie. Et que diriez vous d'un tel, le filz d'un tel vostre voisin? par ma foy, il me semble bon homme, bon mesnagier, et ung grand laboureur.—Saint Jehan, dit le bon homme, je n'en dy que tout bien; quant à moy je le cognois pour ung bon jeune homme et bon laboureur. Son père et sa mère et tous ses parens sont gens de bien; et quand ilz feroient cest honneur à ma fille que de la requerre à mariage pour luy, je leur en respondroye tellement qu'ilz devroient estre contens par raison.—Ainsi m'aïst Dieu, dist le curé, l'on ne dist jamais mieulx, et pleust à Dieu que la chose en fust ores bien faicte ainsi comme je le desire; et pource que je sçay à la verité que ceste allyance seroit le bien des parties, je m'y veil emploier; et sur ce adieu vous dy.» Si ce maistre curé avoit bien fait son personnage au père de sa dame, il ne le fist pas mains mal au père du jeune homme qu'il avoit mis en bouche à son beau père qui sera s'il peut; et luy va faire ung grand premisse, que son filz estoit en eage de marier, et qu'il le deust pieça estre; et cent mille raisons luy amène par lesquelles il dit et veult conclure que le monde est perdu si son filz n'est tantost maryé. «Monseigneur le curé, dit ce segond bon homme, je scay que vous dictes au plus près de verité; et en conscience, si je fusse aussi bien à l'avantage que j'ay esté puis ne sçay quants ans, il ne fust pas encores à marier; car c'est une des choses en ce monde que plus je desire; mais faulte d'argent l'en a retardé, et c'est force qu'il ait encores pacience jusques ad ce que nostre seigneur nous envoye plus de bien que encores n'avons.—A dya, dit le curé, je vous entens bien, il ne vous fault que de l'argent.—Par ma foy non, dit il; si j'en eusse comme aultresfoiz ay eu, je luy querroye tantost une femme.—J'ay regardé en moy, dit le curé, pource que je vouldroye le bien et avancement de vostre filz, que la fille d'un tel, c'est assavoir sa dame, seroit trop bien sa charge; elle est belle et bonne, et a son père bien de quoy, et tant en sçay je il luy veult trèsbien aider, et qui n'est pas pou de chose, c'est ung sage homs, de bon conseil, et bon amy, et à qui vous et vostre filz ariez ung grand recours et trèsbon secours. Quen dictes vous?—Certainement, dit le bon homme, pleust à Dieu que mon filz fust si eureux que d'avoir allyance en si bon hostel; et certes si je pensoye en aucune fasson qu'il y peust parvenir, et je fusse fourny d'argent aussi bien que je ne suis mye, je y emploiroye tous mes amis, car je sçay tout de vray qu'il ne saroit en ceste marche mieulx trouver.—Je n'ay pas donc, dit le curé, mal choisy. Et que diriez vous se je parloie de ceste besoigne au père, et je la conduisoie tellement qu'elle sortist à effect desiré, et je vous faisoie encores avecques ce le plaisir que de vous prester jusques a vingt frans jusques à ung terme que nous deviserons?—Par ma foy, dit le bon homme, monseigneur le curé, vous m'offrez plus de biens que je ne vaulx ne qu'en moy n'est du deservir. Mais s'ainsi le faisiez, vous m'obligeriez à tousjours mès à vostre service.—Et vrayement, dit le curé, je ne vous ay dit chose que je ne face; et faictes bonne chère, car j'espère ceste besongne mener à fin.» Pour abreger, maistre curé, esperant de joyr de sa dame quand elle seroit mariée, conduisit les besoignes en tel estat, et par le moien des vingt francs qu'il presta, ce mariage fut fait et passé et vint le jour des nopces. Or est il de coustume que l'espousé et l'espousée se confessent à tel jour. Si vint l'espousé premier, et se confessa à ce curé; et quand il eut fait, il se tire ung petit arrière de luy, disant ses oroisons et paternostres. Et véez cy l'espousée qui se mect à genoux devant le curé et se confesse. Quand elle eut tout dit, il parla voire si hault que l'espousé, qui n'estoit pas loing, l'entendit tout du long, et dist: «M'amye, je vous prie qu'il vous souvienne maintenant, car il est heure, de la promesse que me feistes n'a guères; vous me promistes que quand vous seriez mariée que je vous chevaulcheroye; or l'estes vous, Dieu mercy, par mon moien et pourchaz, et moyennant mon argent que j'ay presté.—Monseigneur le curé, dit elle, je vous tiendray ce que je vous ay promis, se Dieu plaist, n'en faictes nulle doubte.—Je vous en mercie», dit il; puis luy bailla l'absolucion, après ceste devote confession, et la laissa courre. Mais l'espousé, qui avoit oy ces parolles, n'estoit pas bien à son aise. Toutesfoiz il n'estoit pas heure de faire le courroucié. Après que toutes les solennitez de l'eglise furent passées, et que tout fut retourné à l'ostel, et que l'heure de coucher approuchoit, l'espousé vint à ung sien compaignon qu'il amoit trèsbien, et luy pria qu'il luy feist garnison d'une grosse poignée de verges, et qu'il la mist secrètement soubz le chevet de son lit, et l'autre le fist. Quand il fut heure, l'espousée fut couchée, comme il est de coustume, et tint le coing du lit, sans mot dire. L'espousé vint assez tost après, et se mect à l'autre bort du lit sans l'approucher, ne mot dire; et à lendemain se lève sans aultre chose faire, et caiche ses verges dessoubz son lit. Quand il fut hors de la chambre, véezcy bonnes matrones qui viennent, et trouvent l'espousée ou lit, et ne fut pas sans demander comment c'est portée la nuyt, et qu'il luy semble de son mary. «Ma foy, dit elle, véezlà sa place, là loing, monstrant le bort du lit, et véezcy la mienne; il n'approucha ennuyt de plus près et aussi n'ay je de luy. «Elles furent bien esbahies et plus y pensèrent les unes que les aultres; toutesfoiz elles s'accordèrent ad ce qu'il l'a laissie par devocion, et n'en fut plus parlé pour ceste foiz. La deuxiesme nuyt vint, et se coucha l'espousée en sa place du jour devant, et le mary arrière en la sienne, fourny de ses verges; et ne luy fist aultre chose, dont elle n'estoit pas contente, et ne faillit pas de le dire au lendemain à ses matrones, qui ne scevent que penser. Les aucunes disoient: «Espoir qu'il n'est pas homme, il le fault esprouver, car jusques à la iiije nuyt il a continué ceste manière. Si fault dire qu'il y ait à dire en son fait; pourtant si la nuyt qui vient il ne vous fait aultre chose, dirent elles à l'espousée, tirez vers luy, si l'accolez et le baisez, et luy demandez si on ne fait aultre chose en mariage. Et s'il vous demande quelle chose vous voulez qu'il vous face, dictes luy que vous voulez qu'il vous chevauche, et vous orrez, qu'il vous dira.—Je le feray», dit elle. Elle ne faillit pas; car quand elle fut couchée en sa place de tousjours, le mary reprint son quartier et ne s'avançoit aultrement qu'il avoit fait les nuiz passées. Si se vira tost vers luy et le print à bon braz de corps et luy commence à dire: «Et venez çà, mon mary, est ce la bonne chère que vous me ferez? Véezcy jà la cinquiesme nuyt que je suis avecques vous, et si ne m'avez daigné approucher; et par ma foy, si je ne cuidasse qu'on feist aultre chose en mariage, je ne m'y fusse jà boutée.—Et quelle chose, dist lors, vous a l'on dit que l'on face en mariage?—On m'a dit, dit elle, qu'on y chevauche l'un l'autre; si vous prie que vous me chevauchez.—Chevaucher, dit il, cela ne vouldroye je pas faire encores, ne suis je pas si mal gracieux.—Hélas, je vous prie que vous si facez, car on le fait en mariage.—Le voulez vous? dit il.—Je vous en requier, dit elle; et en ce disant le baisa trèsdoulcement.—Par ma foy, dit il, je le faiz à grand regret, mais puis que vous le voulez le feray, mais je sçay bien que vous ne vous en loerez jà.» Lors prend, sans plus mot dire, ses verges de garnison, et descouvre madamoiselle et l'en batit trèsbien et dos et ventre, jambes et cuissez, tant que le sang en sailloit de tous costez. Elle crie, elle plore, elle se demaine, c'est grand pitié que de la veoir; elle maudit qui oncques luy fist requerre d'estre chevauchée: «Je le vous disoye bien», dit lors son mary. Après la prend entre ses braz, et la roucina trèsbien, qui luy fist oublier la douleur des verges. «Et comment appelle on, dit elle, ce que vous m'avez maintenant fait?—On l'appelle, dit il, souffle en cul.—Souffle en cul! dit elle, le nom n'est pas si beau que de chevauchier; mais la manière de le faire vault trop mieulx d'assez, et puisque je le scay, je sceray bien doresenavant duquel je vous doy requerre.» Or devez vous savoir que monseigneur le curé tendoit tousjours l'oreille quand sa nouvelle mariée viendroit à l'eglise, pour luy ramantevoir ses besoignes, et luy souvenir de sa promesse. Le jour qu'elle y vint, se pourmenoit et se tenoit près du benoistier; et quand elle fut près, il luy bailla de l'eaue beneite, et luy dist assez bas:—«M'amye, vous m'avez promis que je vous chevaucheroie quand vous seriez mariée; vous l'estes, Dieu mercy, si seroit heure de penser quand ce pourroit estre.—Chevaucher? dit elle, j'aymeroie par dieu mieulx que vous fussez noyé, voire pendu; ne me parlez point de chevaucher. Mais je suis contente que vous me soufflez ou cul, si vous voulez.—Et je feray, dit le curé, voz fièvres quartaines, paillarde que vous estes, qui tant estes et orde et sale et malhonneste: ay je tant fait pour vous que d'estre guerdonné pour vous souffler ou cul?» Ainsi mal content se partit monseigneur le curé de la nouvelle mariée, qui se va mettre en son siége pour oyr la devote messe que le bon curé vouldra dire. En la fasson qu'avez oy dessus perdit monseigneur le curé son adventure de joir de sa dame, dont il fut cause et non aultre, pource qu'il parla trop hault à elle le jour qu'il la confessa; car son mary qui l'oyt l'empescha en la fasson que dessus, par faire acroire à sa femme que la fasson de roucyner s'appelle souffle en cul.


LA XLVe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE LA ROCHE.

C ombien que nulle des histoires précédentes n'aye touché ou racompté aucun cas advenu es marches d'Ytalie, mais seullement face mencion des advenues en France, Alemaigne, Angleterre, Flandres et Brabant, si s'estendra elle toutesfoiz, à cause de la fresche advenue, à ung cas à Romme naguères advenu et connus, qui fut tel: A Romme avoit ung Escossois de l'eage d'environ vingt à xxii ans, lequel par l'espace de xiiij ans se maintint et conduisit en l'estat et habillement de femme, sans ce que dedans le dit terme il fust venu à la coignoissance publicque qu'il fust homme; et se faisoit appeler donne Margarite, et n'y avoit guères bon hostel en la ville de Romme à rate de temps où il n'eust son tour et cognoissance, et specialement estoit il bien venu des femmes, comme entre les chambrières, meschines de bas estat, et aussi des aucunes des plus grandes de Romme. Et affin de vous descouvrir l'industrie de ce bon Escossois, il trouva fasson d'apprendre à blanchir les draps linges, et s'appelloit la lavendière; et soubz ceste umbre, hantoit, comme dessus est dit, par toutes bonnes maisons de Romme, car il n'y avoit femme qui sceust l'art de blanchir draps comme il faisoit. Mais vous devez savoir qu'encores savoit il bien plus; car puis qu'il se trouvoit en quelque part à descouvert avecques quelque belle fille, il luy monstroit qu'il estoit homme. Il demouroit bien souvent au couscher, à cause de faire la buée, ung jour, deux jours, ès maisons dessus dictes; et le faisoit on coucher avecques la chambrière et aucunes foiz avecques la fille; et bien souvent et le plus, la maistresse, si son mary n'y estoit, vouloit bien avoir sa compaignie. Et Dieu scet s'il avoit bien le temps, et moyennant le labour de son corps, il estoit bien venu par tout; et n'y avoit bien souvent meschine ne chambrière qui ne se combatist pour luy bailler la moitié de son lit. Les bourgois mesmes de Romme, à la relacion de leurs femmes, le voient trèsvoluntiers en leurs maisons; et s'ilz alloient quelque part dehors, trèsbien leur plaisoit que donne Margarite aidast à garder le mesnage avecques leurs femmes; et qui plus est la faisoient coucher avecques elles, tant la sentoient bonne et honeste, comme dessus est dit. Par l'espace de xiiij ans continua donne Margarite sa manière de faire. Mais fortune bailla la cognoissance de l'abus de son estat dessus dit par la bouche d'une jeune fille, qui dist à son père qu'elle avoit couché avec elle et luy dist qu'elle l'avoit assaillie, et luy dist veritablement qu'elle estoit homme. Ce père feist preuve à la relacion de sa fille de donne Margarite; elle fut regardée par ceulx de la justice, qui trouvèrent qu'elle avoit tous telz membres et oustilz que les hommes portent, et que vrayement elle estoit homme, et non pas femme. Si ordonnèrent qu'on le mectroit sur ung chariot et qu'on le mainroit par la ville de Romme, de quarrefour en quarrefour, et là monstreroit on, voyant chacun, ses genitoires. Ainsi en fut fait, et Dieu scet que la pouvre donne Margarite estoit honteuse et soupprinse. Mais vous devez savoir que comme le chariot venist en ung quarrefour, et qu'on faisoit ostension des denrées de donne Margarite, ung Rommain qui le vit dist tout hault: «Regardez quel galioffe: il a couché plus de vingt nuiz avecques ma femme.» Et le dirent aussi pluseurs aultres comme luy; pluseurs ne le dirent point qui bien le savoient, mais pour leur honneur ilz s'en teurent. En la fasson que vous oyez fut puny nostre pouvre Escossois qui la femme contrefist; et après ceste punicion il fut banny de Romme, dont les femmes furent bien desplaisantes: car oncques si bonne lavendière ne fut, et avoyent bien grand regret que si meschantement l'avoient perdu.


LA XLVIe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE THIEUGES.

C e n'est pas chose estrange que les moynes hantent voluntiers les nonnains. A ce propos il advint naguères que ung maistre jacobin tant hanta, visita et fréquenta en une bonne maison de dames de religion de ce royaume, qu'il parvint à son intencion, laquelle estoit de coucher avec une des dames de léens. Et Dieu scet puis qu'il eut ce bien s'il estoit diligent et soigneux de se trouver vers celle qu'il amoit plus que tout le demourant du monde; et tant y continua sa hantise que l'abbesse de léens et pluseurs des religieuses se parceurent de ce qui estoit, dont elles furent bien mal contentes. Mais toutesfoiz, pour eviter esclandre, elles n'en dirent mot, voire au religieux, mais trop bien chantèrent la leczon à la religieuse nonnain, laquelle se sceut bien excuser; mais l'abbesse qui veoit cler et estoit bien percevante, cogneut tantost à ses responses et excusances, aux manières qu'elle tenoit et aux apparences qu'elle avoit veues, qu'elle estoit coulpable du fait; si voulut pourvoir de remède, car elle fist tenir bien de court, à cause de ceste religieuse, toutes les aultres, fermer les huys des cloistres et des aultres lieux de léens, et tellement fist que le pouvre jacobin ne povoit plus venir veoir sa dame. Si luy en desplaisoit, et à elle aussi, il ne le fault pas demander. Et vous dy bien qu'ilz pensoient et jour et nuyt par quelle façon et moien ilz se pourroient rencontrer; mais ilz n'y savoient engin trouver, tant faisoit faire le guet sus eulx madame l'abbesse. Or advint toutesfoiz ung jour que une des niepces de madame l'abbesse se marioit, et faisoit sa feste en l'abbaye; et y avoit grosse assemblée des gens du païs; et estoit madame l'abbesse fort empeschée de festoyer les gens de bien qui estoyent venuz à la feste faire honneur à sa niepce. Si s'advisa bon jacobin qu'il viendroit veoir sa dame, et que à l'adventure pourroit il estre si eureux que de la trouver en belle. Il y vint, comme il proposa, et de fait trouva ce qu'il queroit, et à cause de la grosse assemblée, et de l'empeschement que l'abbesse et ses guettes avoient, il eut bien loisir de dire à sa dame ses doléances et regretter le bon temps passé; et elle qui beaucop le amoit le vit trèsvoluntiers, et si en elle eust esté elle luy eust fait aultre chère. Entre aultres parolles il luy dit: «Hélas! m'amye, vous savez qu'il a jà long temps que point ne sommes devisez ainsi que nous soulions; je vous requier, s'il est possible, tantdiz que l'ostel de céens est fort donné à aultre choses que à nous guetter, que vous me diez où je pourray parler à vous à part.—Ainsi m'aist Dieu, dit-elle, mon amy, je ne le desire pas mains que vous. Mais je ne sçay penser ne lieu ne place ou ce se puisse faire; car tout le monde est par céens, et ne seroit pas en moy d'entrer en ma chambre, tant y a d'estrangiers logez qui sont venuz à ceste feste; mais je vous diray que vous ferez. Vous savés bien le grand jardin de céens, faictes pas?—Saint Jehan! oy, dit-il.—Au coing de ce jardin, dit-elle, a ung trèsbeau préau bien encloz de belles hayes fortes et espesses, et au milieu ung grant poirier, qui rendent le lieu umbragé et couvert. Vous en yrez là et m'attendrez; et tantost que je pourray eschapper je feray ma diligence de me trouver bientost vers vous.» Elle fut beaucop merciée, et dit maistre jacobin qu'il s'i en va tout droit. Or devez vous savoir que ung jeune galant venu à la feste n'estoit guères loing de ces deux amans, si oy et entendit toute leur conclusion; si s'advisa, car il savoit le préau, qu'il s'i viendra embuscher pour veoir les armes qui s'i feront. Il se mist hors de la presse, et tant que piez le peurent porter, il s'en court devers ce préau, et fist tant qu'il y fut devant le jacobin. Et luy là venu, il monte sur ce beau poirier qui estoit large et ramu, trèsbien vestu de fueilles et de poires, et s'i ambuscha si bien qu'il n'estoit pas aisié à veoir. Il n'y eut guères esté que véezcy bon jacobin qui attrotte, regardant derrière lui si ame le suyvoit. Et Dieu scet qu'il fut bien joyeux de se trouver en ce beau lieu, et se garda bien de lever les yeulx contre mont le poirier; car jamais ne se fust doubté qu'il y eust quelqu'ung; mais tousjours avoit l'œil vers le chemin qu'il estoit venu. Tant regarda qu'il vit sa dame venir le grand pas, qui fut tost d'emprès luy; si se firent grand feste, et bon jacobin d'oster sa goune et son scapulaire, et de baiser et accoler bien serrément la belle nonnain. Ilz vouldrent faire ce pour quoy ilz estoient venuz: et se mist chacun en point, et en ce faisant commence à dire la nonnain: «Pardieu, mon amy frère Aubry, je vuil bien que vous sachez que vous avez aujourd'uy à dame et en vostre commandement ung des beaulx corps de nostre religion; et je vous en fais juge, vous le voiez: regardez quelz tetins, quel ventre, quelles cuisses, et du surplus il n'y a que dire.—Par ma foy, dist frère Aubry, seur Jehanne m'amye, je cognois ce que vous dictes; mais aussi vous povez dire que vous avez à serviteur ung des beaulx religieux de tout nostre ordre, aussi bien fourny de ce que ung homme doit avoir que nul de ce royaume.» Et à ces motz mist la main au baston dont il vouloit faire ses armes, et le brandissoit voyant sa dame, en luy disant: «Qu'en dictes-vous? que vous en semble? n'est-il pas beau? vault-il pas bien une belle fille?—Certes oy, dit-elle.—Et aussi l'arez vous.—Et vous arez, dist lors celuy qui estoit dessus le poirier, sur eulz, tous des meilleures poires du poirier.» Lors prend à ses deux mains les brances du poirier, et fait tumber en bas sur eulx et ou préau des poires trèslargement, dont frère Aubry fut tout effraié qu'à peu s'il eut sens ne loisir de reprendre sa goune; si s'en picque tant qu'il peut sans attendre, et ne fut oncques asseuré tant qu'il fut hors de léens. Et la nonnain, qui fut autant ou plus effrayée que luy, ne sceut si tost se mettre au chemin que le galant qui estoit sur le poirier ne fut descendu, qui la va prandre par la main et luy defendit le partir, et luy dist: «M'amye, ainsi n'en yrez vous; il vous fault bien premier paier le fruictier.» Elle, qui estoit prinse et soupprinse, vit bien que le refuz n'estoit pas de saison, et fut contente que le fruictier fist ce que frère Aubry avoit laissié en train.


LA XLVIIe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE LA ROCHE.

E n Prouvence avoit naguères ung president de haulte et bien eureuse renommée, qui trèsgrand clerc et prudent estoit, vaillant aux armes, discret en conseil; et en bref dire, en lui estoient tous les biens de quoy l'on pourroit jamais loer homme. D'une chose tant seulement estoit noté dont il n'estoit pas cause, mais estoit celuy à qui plus en desplaisoit; et la raison y estoit bonne. Et pour dire la note que de luy estoit, c'estoit qu'il estoit coupault par faulte d'avoir femme aultre que bonne. Le bon seigneur veoit et cognoissoit la desloyauté de sa femme, et la trouvoit encline de tous poincts à sa puterie; et quelque sens que Dieu luy eust donné, il ne savoit remède à son cas, fors de soy taire et faire du mort; car il n'avoit pas si peu leu et veu en son temps qu'il ne sceust vrayement que correction n'a point de lieu à femme de tel estat. Toutesfoiz vous povez penser que ung homme de courage et vertueux, comme cestuy estoit, ne vivoit pas bien à son aise, mais fault dire et conclure que son dolent cueur portoit la paste au four de ceste maladie infortune. Et car au pardehors avoit manère et semblant de rien savoir et percevoir le gouvernement de sa femme, ung de ses serviteurs le vint trouver un jour en sa chambre, à part, et luy va dire par grand sens: «Monseigneur, je suis celuy qui vous vouldroye advenir, comme je doy, de tout ce qui peut especialement toucher à vostre honneur; je me suis prins et donné garde du gouvernement de madame vostre femme, mais je vous asseure qu'elle vous garde trèsmal la loyaulté qu'elle vous a promise: car seurement un tel (qui luy nomma) tient vostre lieu bien souvent.» Le bon president, sachant aussi bien ou mieulx l'estat de sa femme que son serviteur qui faisoit ce rapport, luy respondit trèsfièrement: «Ha! ribauld, je sçay bien que vous mentez de tout ce que me dictes; je cognois trop ma femme, elle n'est pas telle, non. Et vous ay-je nourry pour me rapporter une telle bourde, voire de celle qui tant est bonne et loyale? Et vrayement vous ne m'en ferez plus: dictes que je vous doys, et vous en allez tost, et ne vous trouvez jamais devant moy, si cher que vous amez vostre vie.» Le pouvre serviteur, qui cuidoit faire grand plaisir à son maistre de son adventure, dist qu'il luy devoit. Il le receut et s'en alla. Nostre president, voyant encores de plus en plus rafrescher la desloyauté de sa femme, estoit tant mal content et si trèsfort troublé qu'on ne pourroit plus. Si ne savoit que penser ne ymaginer par quelle façon il s'en pourroit honestement descharger. Si s'advisa, comme Dieu le voult, ou comme fortune le consentit, que sa femme devoit aller à unes nopces assez tost; et si ce qu'il pense peut advenir il sera du monde le mieulx fortuné. Il vint à ung varlet qui la garde avoit de ses chevaulx, et d'une belle mule qu'il avoit, et luy dit: «Garde bien que tu ne bailles à boire à ma mule de nuyt ne de jour, tant que je le te diray; et à chacune foiz que tu luy donneras son avene si mectz parmy une bonne poignée de sel; et garde que n'en sonnez mot.—Non feray-je, dit le varlet, et si feray ce que vous me commendez.» Quand le jour des nopces de la cousine de madame la presidente approucha, elle dist au bon president: «Monseigneur, si c'estoit votre plaisir, je me trouveroye voluntiers aux nopces de ma cousine, qui se feront dimenche en ung tel lieu.—Trèsbien, m'amye, j'en suis bien content; allez, Dieu vous conduyse.—Je vous mercie, monseigneur, dit-elle, mais je ne sçay bonnement comment y aller; je n'y menasse point voluntiers mon chariot, pour le tant pou que ay à y estre; vostre hacquenée aussi est tant desfrayée que je n'oseroie pas bien emprendre le chemin sur elle.—Et bien! m'amie, si prenez ma mule; elle est trèsbelle et si va bien et doulx, et est aussi seure du pié que je n'en trouvay oncques point.—Et, par ma foy, monseigneur, dit-elle, je vous en mercye, vous estes bon mary.» Le jour de partir vint, et se firent prestz les serviteurs de madame la presidente et ses femmes qui la devoient servir et accompaigner; pareillement vont venir à cheval deux ou troys gorgyas qui la devoient accompagner, qui demandent se madame est preste, et elle leur fait savoir qu'elle viendra maintenant. Elle fut preste et vint en bas, et luy fut amenée la belle mule au montouer, qui n'avoit beu de viij. jours; et enrageoit de soif, tant avoit mengé de sel. Quand elle fut montée, les gorgias se misrent devant, qui faisoient fringuer leurs chevaulx, et estoit rage qu'ilz faisoient bien et hault. Et se pourroit bien faire que aucuns de la compaignie savoient bien que madame savoit faire. En la compaignie de ces gentilz gorgyas, de ses serviteurs et de ses femmes, passa madame par la ville, et se vint trouver aux champs; et tant alla qu'elle vint à ung destroit auprès duquel passe la grosse rivière du Rosne, qui en cel endroit est tant roidde que merveilles. Et comme ceste mule, qui de viij. jours n'avoit beu, perceut la rivière, courant sans demander pont ne passage, elle de plain vol saulta dedans à tout sa charge, qui estoit du precieux corps de madame. Ceulx qui la virent la regardèrent trèsbien; mais aultre secours ne luy firent, car aussi il n'estoit pas en eulx; si fut madame noyée, dont ce fut grand dommage. Et la mule, quand elle eut beu son saoul, naigea tant par le Rosne qu'elle trouva la rive, si fut sauvée. La compaignie fut moult troublée, qui eut perdu madame; si s'en retourna en la ville. Et vint ung des serviteurs de monseigneur le president le trouver en sa chambre, qui n'attendoit aultre chose que les nouvelles qu'il luy dist, et luy va dire tout plorant la piteuse adventure de madame sa maistresse. Le bon president, plus joyeux en cueur qu'oncques triste ne fut, se monstra trèsdesplaisant; et de fait se laissa cheoir du hault de luy, menant trèspiteus dueil en regretant sa bonne femme. Il maudisoit sa mule, les belles nopces qui firent sa femme partir ce jour. «Et Dieu! dit-il, ce vous est grand reprouche qui estiez tant de gens et n'avez sceu rescourre la pouvre femme qui trèstant vous amoit; vous estes lasches et meschans, et l'avez bien monstré.» Le serviteur s'excusa et les aultres aussi, le mains mal qu'ilz sceurent; et laissa monseigneur le president, qui loa Dieu à joinctes mains de ce qu'il est quicte de sa femme. Quand point fut, il fist faire ses funérailles comme il appartint; mais croiez, combien qu'encorez il fust en eage, il n'eut garde de se rebouter en mariage, craignant le dangier où tant avoit esté.


LA XLVIIIe NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE LA ROCHE.

U ng gentil compaignon devint amoureux d'une jeune damoiselle qui n'a guères estoit mariée; et le mains mal qu'il sceut, après qu'il eut trouvé façon d'avoir vers elle accointance, il compta son cas, et au rapport qu'il fist, il sembloit fort malade; et à la verité dire, aussi estoit-il bien picqué. Elle fut bien si gracieuse qu'elle luy bailla bonne audience, et pour la première foiz il se partit trèscontent de la response qu'il eut. S'il estoit bien feru au paravant, encores fut il plus touché au vif quand il eut dit son fait; si ne dormoit ne nuyt ne jour, de force de penser à sa dame et de trouver la façon et manière de parvenir à sa grace. Il retourna à sa queste quand il vit son point; et Dieu scet, s'il avoit bien parlé la première foiz, que encores fist-il mieulx son personnage à la deuxiesme, et si trouva de son boneur sa dame assez encline à passer sa requeste, dont il ne fut pas moyennement joyeux. Et car il n'avoit pas tousjours ne le temps ne le loisir de se trouver vers elle, il luy dist à ceste foiz la bonne volunté qu'il avoit de luy faire service et en quelle façon. Il en fut mercyé de celle, qui estoit tant gracieuse qu'on ne pourroit plus. Bref il trouva en elle tant de courtoisie en maintien et parler qu'il n'en sceust plus demander par raison; si se cuida avancer de la baiser, mais il en fut refusé de tous poins; mesme quand vint au partir et au dire adieu, il n'en peut oncques finer, dont il fut trèsesbahy. Et quand il fut en sus d'elle, il se doubta beaucop de point parvenir à son intencion, veu qu'il ne povoit obtenir d'elle ung seul baiser. Il se confortoit d'aultre costé des gracieuses parolles qu'il eut au dire adieu, et de l'espoir qu'elle luy baille. Il revint comme aultresfoiz à sa queste; et pour abreger, tant y alla et tant y vint qu'il eut heure assignée de dire à sa dame, à part, le surplus de ce qu'il ne vouldroit dire sinon entre eulx deux. Et, car temps estoit, il print congé d'elle, si l'embrassa bien doulcement et la voulut baiser; et elle s'en defend trèsbien et luy dit assez rudement: «Ostez, ostez-vous, et me laissez, je n'ay cure d'estre baisée.» Il s'excusa le plus gracieusement que oncques sceut, et sur ce se partit. «Et qu'est cecy? dist-il en soy-mesmes; je ne vy jamais ceste manière en femme: elle me fait la meilleure chère du monde, et si m'a desjà accordé tout ce que je luy ay osé requerre; mais encores n'ay je peu finer d'un pouvre baiser.» Quand il fut heure, il vint où sa dame luy avoit dit, et fist tout ce pour quoy il y vint tout à son beau loisir: car il coucha entre ses braz toute la belle nuyt, et fist tout ce qu'il voulut, fors seullement baiser, et de cela n'eust-il jamais finé. «Et je n'entens point ceste manière de faire, disoit-il en son pardedens; ceste femme est contente que je couche avecques elle et que je face tout ce qu'il me plaist; mais du baiser je n'en fineroye neant plus que de la vraye croix? Par la mort bieu! je ne sçay entendre cecy; il fault qu'il y ait aucun mistère; il est force que je le sache.» Ung jour entre les aultres, qu'il estoit avecques sa dame à goguettes, et qu'ilz estoient beaucoup dehet tous deux: «M'amye, dist-il, je vous requier que vous me dictes la cause qui vous meut de moy tenir si grand rigueur quand je vous veil baiser. Vous m'avez de vostre grace baillé la joyssance de vostre beau et gracieux corps tout entièrement, et d'un petit baiser vous me faictes le refus!—Par ma foy, mon amy, dit-elle, vous dictes voir, le baiser vous ay refusé, et ne vous y attendez point, vous n'en finerez jamais; et la raison y est bonne, si la vous diray: Il est vray, quand j'espousay mon mary, que je luy promis de la bouche tant seullement beaucop de belles choses. Et car ma bouche est celle qui luy a juré et promis de luy estre bonne, je suis celle qui luy veil entretenir, et ne souffreroye pour mourir qu'aultre de luy y touchast; elle est sienne et à nul aultre; et ne vous attendez d'en rien avoir. Mais mon derrière ne luy a rien promis ne juré; faictes de luy et du surplus de moy, ma bouche hors, ce qu'il vous plaise; je le vous habandonne.» L'autre commença à rire trèsfort, et dist: «M'amye, je vous mercye, vous dictes trèsbien, et si vous sçay grand gré que vous avez la franchise de bien garder vostre promesse.—Jà Dieu ne veille, dist-elle, que je luy face faulte.» En la façon que avez oy fut ceste femme abustinée: le mary avoit la bouche seullement, et son amy le surplus; et si d'adventure le mary se servoit aucunes foiz des aultres membres, ce n'estoit que par manière d'emprunt, car ilz estoient à son amy par le don de sa dicte femme. Mais il avoit ceste advantage, que sa femme estoit contente qu'il emprint sur ce qu'elle avoit donné à son amy; mais pour rien n'eust souffert que l'amy eust joy de ce que à son mary avoit donné.


LA XLIXe NOUVELLE.
PAR PIERRE DAVID.

J 'ay bien scéu que n'a guères, en la ville d'Arras, avoit ung bon marchant auquel il mescheut d'avoir femme espousée qui n'estoit point de meilleur au monde: car elle ne tenoit serre, tant qu'elle peust veoir son cop, et qu'elle trouvast à qui, neant plus que une vieille arbaleste. Ce bon marchant se donna garde du gouvernement de sa femme; il en fut aussi adverty par aucuns ses plus prives amis et voisins. Si se bouta en une bien grande frenesie et parfonde melencolie, dont il ne valut pas mieulx. Puis s'advisa qu'il esprouveroit s'il savoit par bonne façon s'il pourrait veoir ce qu'il scet que bien peu luy plaira; c'estoit de veoir venir en son hostel, devers sa femme; ung ou pluseurs de ceulx qu'on dit qui sont les lieutenans. Si fainit ung jour d'aller dehors, et s'embuscha en une chambre de son hostel dont luy seul avoit la clef. Et destournoit la dicte chambre sur la rue, sur la court, et par aucuns secrez pertus et treilliz regardoit en plusieurs aultres lieux et chambres de léens. Tantost que la bonne femme pensa que son mary estoit dehors, elle fist prestement savoir à une de ses amys qu'il vensist vers elle; et il obéyt comme il devoit, car il suyvit pié à pié la meschine qui le vint querre. Le mary, qui, comme dit est, estoit en sa chambre, vit trèsbien entrer celuy qui venoit tenir son lieu; mais il ne dit mot, car il veult veoir plus avant s'il peut. Quand l'amoureux fut léens, la dame le mena par léans par la main tout devisant en sa chambre, et serra l'huys, et se commencent à baiser et à accoler, et faire la plus grand chère de jamais; et bonne damoiselle de despoiller sa robe, et se mectre en cotte simple; et le bon compaignon de la prendre à bons braz de corps, et faire ce pourquoy il vint. Et tout ce veoit à l'œil le pouvre mary par une petite treille; pensez s'il estoit à son aise; mesme estoit-il si près d'eulz qu'il entendoit plainement tout ce qu'ilz disoient. Quand les armes d'entre la bonne femme et son serviteur furent achevées, ilz se mirent sur une couche qui estoit en la chambre, et se commencent à deviser de pluseurs choses. Et comme le serviteur regardast sa dame, qui tant belle estoit que merveilles, il la commence à rebaiser, et dit en baisant: «M'amye, à qui est ceste belle bouche?—C'est à vous, mon bel amy, dit-elle.—Et je vous en mercie, dit-il. Et ces beaulx yeulx?—A vous aussi, dit-elle.—Et ce beau tetin qui tant est bien troussé, n'est-il pas de mon compte? dit-il.—Oy, par ma foy, dit-elle, il est à vous, et non à aultre.» Il mect après la main au ventre et à son devant, où il n'avoit que redire, et luy demanda: «A qui est cecy, m'amye?—Il ne le fault jà demander, on scet bien que tout est vostre.» Il vint après gecter la main sur son gros derrière, et luy demanda en soubariant: «Et à qui est cecy?—Il est à mon mary, dit-elle, c'est sa part; mais tout le demourant est vostre.—Et vrayement, dit-il, je vous en mercie beaucop. Je ne me doy pas plaindre, vous m'avez très bien party; et aussi d'aultre costé, par ma foy, pensez que je suis tout entier vostre.—Je le sçay bien», dit elle. Et après ces offres recommencèrent leurs armes de plus belle; et ce fait, le serviteur se partit de léans. Le pouvre mary, qui tout avoit veu et oy, n'en povoit plus, s'il n'enraigeoit tout vif; toutesfoiz, pour mieulx faire que laisser, il avala ceste première, et au lendemain fist trèsbien son personnage, faisant semblant qu'il vient de dehors. Et quand vint au disner, il dist qu'il vouloit avoir au disner, dimenche prochain venant, son père et sa mère, telz et telles de ses parens et cousines; et qu'elle face garnison de vivres, et qu'ilz soient bien aises à ce jour. Elle se chargea de ce faire et il de les inviter. Ce dimenche vint, le disner fut prest, et ceulx qui mandez y furent comparurent, et print chacun place comme leur hoste l'ordonnoit, qui estoit debout et sa femme aussi, qui servirent du premier mes. Quand le premier mes fut assis, l'oste, qui secrètement avoit fait faire une robe pour sa femme de gros bureau gris, et à l'endroit du derrière fist mectre une pièce de bonne escarlate, à manière de tasseau, dist à sa femme: «Venez jusques en la chambre»; il se mect devant et elle le suyt. Quand ilz y furent, il luy fist despoiller sa robe et va prendre celle de bureau dessusdicte et luy dit: «Or vestez ceste robe.» Elle la regarde et voit qu'elle est de gros bureau; si en est toute esbahie et ne scet penser qu'il fault à son mary, ne pourquoy il la veult ainsi habiller. «Et à quel propos me voulez-vous ainsi housser? dit-elle.—Ne vous chaille, dit-il, je veil que vous la vestez.—Ma foy, dit elle, je n'en tien compte, je ne la vestiray jamais. Faictes-vous du fol? Vous voulez-vous bien faire farcer de vous et de moy devant tant de gens.—Il n'y a ne fol ne sage, dit il, vous la vestirez.—Au mains, dit-elle, que je sache pour quoy.—Vous le sarez, dit-il, cy après.» Pour abreger, force fut qu'elle endossast ceste robe, qui estoit bien estrange à regarder. Et en ce point fut amenée à la table, où la pluspart de ses amys et parens estoient. Mais pensez qu'ilz furent bien esbahiz de la veoir ainsi habillée; et creez qu'elle estoit bien honteuse; et si la force eust esté sienne, elle ne fust pas là venue. Droit là fut bien qui demanda que signifioit cest habillement. Et le mary respondit qu'ilz pensent trestous de faire bonne chère, et que après disner ilz le sceroient. Mais vous devez savoir que la bonne femme houssée du bureau ne mengea chose qui bien luy feist; et luy jugeoit le cueur que le mistère de sa housserie luy feroit ennuy. Et encore eust-elle esté plus troublée d'assez s'elle eust sceu du tasseau d'escarlate; mais nenny. Le disner se passa, et fut la table ostée, les grâces dictes, et chacun debout. Lors le mary se mect avant et commence à dire: «Vous telz qui cy estes, s'il vous plaist, je vous diray en bref la cause pourquoy j'ay vestu ma femme de cest habillement. Il est vray que jà pieçà j'ay esté adverty que vostre fille qui cy est me gardoit trèsmal la loyaulté qu'elle me promist en la main du prestre; toutesfoiz, quelque chose que l'on m'ait dit, je ne l'ay pas creu legerement, mais l'ay voulu esprouver; et qu'il soit vray, il n'y a que six jours que je faindy d'aller dehors, et m'enbuschay en ma chambre là hault. Je n'y eu guères esté que véezcy venir ung tel, que ma femme mena tantost en sa chambre, où ilz firent ce que mieulx leur pleut. Entre leurs aultres devises, l'homme luy demanda de sa bouche, de ses yeulx, de ses mains, de son tetin, de son ventre, de son devant et de ses cuisses, à qui tout ce bagage estoit. Et elle luy respondit: «A vous, mon amy.» Et quand vint à son derrière, il luy dist: «Et à qui est cecy, m'amye?—A mon mary», dist elle. Lors, pource que je l'ay trouvée telle, je l'ay en ce point habillée: elle a dit que d'elle il n'y a rien mien que le derrière, si l'ay houssé comme il appartient à mon estat; le demourant ay-je houssé de vesture qui est deue à femme desloyale et deshonorée, car elle est telle; je la vous rends.» La compaignie fut bien esbahie d'oyr ce propos, et la pouvre femme bien honteuse. Mais toutesfoiz, quoy qu'il fust, oncques puis avecques son mary ne se trouva, ains deshonorée et reprouchée entre ses amys depuis demoura.


LA Le NOUVELLE.
PAR MONSEIGNEUR DE LA SALLE, PREMIER MAISTRE D'HOSTEL DE MONSEIGNEUR LE DUC.

C omme jeunes gens se mettent à voyager et prennent plaisir à veoir et sercher les adventures du monde, il y eut n'a guères au pays de Lannoys le filz d'un laboureur qui fut depuis l'eage de dix ans jusques à l'eage de vingt et six tousjours hors du pays; et puis son partement jusques à son retour, oncque son père ne sa mère n'en eurent une seule nouvelle: si pensèrent pluseurs foiz qu'il fust mort. Il revint après toutesfoiz, et Dieu scet la joye qui fust en l'ostel, et comment il fut festoié à son retour du tant pou de biens que Dieu leur avoit donné. Mais qui le vit voluntiers et en fist grand feste, sa grand mère, la mère de son père, luy faisoit plus grand chère et estoit la plus joyeuse de son retour; elle le baisa plus de cinquante foiz, et ne cessoit de loer Dieu qu'il leur avoit rendu leur beau filz et retourné en si beau point. Après ceste grande chère, l'heure vint de dormir; mais il n'y avoit à l'ostel que deux lictz: l'un estoit pour le père et la mère et l'autre pour la grand mère. Si fut ordonné que leur filz coucheroit avecques sa taye, dont elle fut joyeuse; mais il s'en fust bien passé, combien que pour obéir il fut content de prendre la pacience pour ceste nuyt. Comme il estoit couché avec sa taye, ne sçay de quoy il luy sourvint, il monta dessus. «Et que veulz-tu faire? dit-elle.—Ne vous chaille, dit-il, ne dictes mot.» Quand elle vit qu'il vouloit besoigner à bon escient, elle commence de crier tant qu'elle peut après son filz, qui dormoit en la chambre au plus près; si se leve de son lit et se va plaindre à luy de son filz, en plorant tendrement. Quand l'autre entendit la plainte de sa mère et l'inhumanité de son filz, il se leva sur piez trèscouroussié et mal meu, et dit qu'il l'occira. Le filz, oye ceste menace, si sault sus, et s'en picque par derrière et se sauve. Son père le suyt, mais c'est pour néant: il n'estoit pas si radde du pyé comme luy; il vit qu'il perdoit sa peine, si revint à l'ostel et trouva sa mère lamentant à cause de l'offense que son filz avoit faicte. «Ne vous chaille, dit-il, ma mère, je vous en vengeray bien.» Ne sçay quants jours après ce père vint trouver son filz, qui jouoit à la paulme en la ville de Laon; et tantost qu'il le vit, il tire bonne dague et marche vers luy et l'en cuide ferir. Le filz se destourna, et son père fut tenu. Aucuns qui là estoient sceurent bien que c'estoit le père et le filz. Si dit l'un au filz: «Et vien çà; qu'as tu meffait à ton père, qui te veult tuer?—Ma foy, dist-il, rien. Il a le plus grand tort de jamais; il me veult tout le mal du monde pour une pouvre foiz que j'ay voulu rouciner sa mère; il a rouciné la mienne plus de cing cens foiz, et je n'en parlay oncques ung seul mot.» Tous ceux qui oyrent ceste response commencèrent à rire de grand cueur et dirent bien qu'il estoit bon homme. Si s'efforcèrent à ceste occasion de faire sa paix à son père, et tant si employèrent qu'ils en vindrent au bout, et fut tout pardonné d'un costé et d'aultre.


FIN DU TOME PREMIER.


NOTES.

Tome I.

P. xxj. Dans le manuscrit, la dédicace suit la table; mais j'ai adopté de préférence l'ordre des éditions imprimées.

P. xxij. De Dijon, etc. Cette date, qui me paroît une erreur évidente, est reproduite très exactement d'après le manuscrit; mais elle est d'une écriture un peu plus récente que celle du manuscrit lui-même, et d'une encre plus pâle. L'édition de Verard ne donne pas de date, mais l'éditeur (sans doute) a ajouté à la dédicace les mots: Et notez que par toutes les nouvelles où il est dit par monseigneur, il est entendu par monseigneur le Daulphin, lequel depuis a succédé à la couronne, et est le roy Loys unsiesme, car il estoit lors ès pays du duc de Bourgoingne. Voyez ce que j'ai dit à ce sujet dans l'Introduction.

P. xxvj. La dousiesme nouvelle. Il manque ici au manuscrit un cahier de quatre feuillets qui contenoit les titres des nouvelles 12e à 96e inclusivement; j'ai suppléé cette lacune d'après l'édition de Verard.

P. 1. La première nouvelle. Ce conte se trouve dans un fabliau probablement du treizième siècle, intitulé Des deux changeors, et imprimé dans la collection de Barbazan, t. III, p. 254, et aussi dans le Pecorone, nov. 11. Brantôme, dans ses Dames galantes, le raconte comme une aventure qui étoit véritablement arrivée à Louis, duc d'Orléans, et à sa maîtresse Mariette d'Enghien, mère du bâtard comte de Dunois.

P. 6, l. 3. Serure. Le manuscrit lit ceruse, qui n'est probablement qu'une erreur de l'écrivain.

P. 8, l. 12. Meiser. Penser, Verard.

P. 9. La secunde nouvelle. On ne trouve ce conte dans aucun ouvrage plus ancien que Les Cent Nouvelles nouvelles; mais Malespini l'a imité dans les Ducento Novelle, nov. 37.

P. 16. La troysiesme nouvelle. Imitée des Facéties de Pogge, p. 64, édit. de 1798. Ce conte a été reproduit souvent sous différentes formes par les conteurs des seizième et dix-septième siècles.—Monseigneur de la Roche. Philippe Pot, seigneur de la Roche de Nolay, un des plus intimes et plus fidèles conseillers de Philippe le Bon et de son fils Charles le Téméraire, ducs de Bourgogne. En 1449, on le trouve nommé comme un des échansons du duc Philippe. Plus tard, il avoit l'office de chambellan dans la maison de Bourgogne, sous lequel titre il est mentionné dans un compte de l'année 1457, et il le tenoit encore en 1474. En 1466, Charles le Téméraire lui a donné l'office de capitaine de Lille, et il tenoit en même temps la capitainerie de Douai et d'Orchies. En 1470, le seigneur de la Roche reçut du duc Charles la charge de grand maître d'hôtel et chambellan de Bourgogne. Après la mort de son bienfaiteur, il entra dans la faveur de Louis XI, qui le nomma grand sénéchal de Bourgogne en 1477. Il est mort vers l'année 1498.

P. 26. La quarte nouvelle. Ce conte et les trois suivants se trouvent pour la première fois dans Les Cent Nouvelles nouvelles.

P. 29, l. 15. Sainct Trignan. Sainct Engnan, Verard.

P. 32. Philipe de Loan. Cet individu est mentionné sous le titre d'écuyer d'écurie du duc Philippe le Bon, en 1461, dans un manuscrit de la Bibliothèque impériale, ancien fonds, n. 6702. Verard a toujours changé ce nom en Philippe de Laon.

P. 32, l. 1. Monseigneur Talelot. Thalebot, Verard. C'étoit le célèbre guerrier, sir John Talbot, créé comte de Shrewsbury en 1441. Ses beaux faits d'armes faisoient la merveille du quinzième siècle. Il fut défait et fait prisonnier par Jeanne d'Arc à Patai en 1429, et tué à Châtillon le 20 juillet 1453, à l'âge de quatre-vingts ans.

P. 32, l. 2. Si preux, si vaillant, et aux armes. Ces mots sont omis dans le texte de Verard, qui n'approuvoit pas, sans doute, l'éloge qu'un Bourguignon faisoit de l'ennemi de la France.

P. 33, l. 1. Couroye. A sa ceinture, Verard.

P. 36, ll. 16 et 28. Ciboire. Tabernacle, Verard. Le dernier mot est tout simplement une traduction de l'autre. On seroit porté à croire que le mot ciboire n'étoit plus en usage général à Paris.

P. 38. Par monseigneur de Launoy. Le nom de Jean de Launoy (ou Lannoy) est assez connu dans l'histoire de Bourgogne. En 1451, il fut créé chevalier de la toison d'or, et nous le trouvons plus tard gouverneur de Lille. Il paroît avoir secrètement servi les intérêts de Louis XI, et sa trahison étoit devenue si évidente, qu'en 1464 il fut obligé de se sauver en France, tandis que le comte de Charolois s'empara de son château. Durant le règne de Charles le Téméraire, il étoit en complète disgrâce à la cour de Bourgogne; mais après la mort de ce prince il reprit une grande influence en Bourgogne. Il n'est mort qu'en 1481.

P. 39, l. 3. Maistre curé. Ici et dans la suite, le texte de Verard a toujours substitué le mot prieur au mot curé.

P. 41, l. 7. Mesmes. Au mains, Verard.

P. 43, l. 4. Feste. Foire, Verard.

P. 43, l. 4. Feste de Lendit et d'Envers. La célèbre foire tenue à Saint-Denis dans le mois de juin.

P. 46. La huitiesme nouvelle. Cette nouvelle, qui est l'origine des Aveux indiscrets, de la Fontaine, est imitée des Facéties de Pogge, p. 165 de l'édition de 1798.

P. 50. La neufiesme nouvelle. Ce conte étoit assez populaire dans le moyen âge, et se trouve dans des ouvrages bien antérieurs à la date des Cent Nouvelles nouvelles, comme le fabliau du Meunier d'Aleu par le trouvère Enguerrand d'Oisi, le Décameron de Boccace, où il forme la 4e nouvelle de la 8e journée, et les Facéties de Pogge, p. 248. Les imitations modernes en sont nombreuses. C'est Les Quiproquos de la Fontaine.

P. 56. La dixiesme nouvelle. Imitée par la Fontaine et par d'autres conteurs; mais on ne la trouve dans aucun recueil antérieur aux Cent Nouvelles nouvelles.Verard a changé beaucoup le texte de cette nouvelle et de la suivante.

P. 61. La onziesme nouvelle. Imitée d'après Pogge, Facéties, p. 141. C'est le conte bien connu de L'Anneau d'Hans Carvel, de Rabelais.

P. 62, l. 21. Des fantaisies et pensées. C'est la leçon de Verard. Le manuscrit ne donne qu'un mot, que je n'ai pas pu déchiffrer d'une manière satisfaisante, mais qui ressemble à ermons.

P. 63. La douziesme nouvelle. Ce conte se trouve dans les Cento Novelle antiche et dans Pogge. Les imitations modernes sont très nombreuses.

P. 67. Monseigneur de Castregat. Par monseigneur l'amant de Brucelles, Verard. Jean d'Enghien, sieur de Kessergat, étoit maître-d'hôtel de duc de Bourgogne en 1461. Il tenoit en même temps l'office de chambellan. Il étoit amann (une charge municipale) de Bruxelles.

P. 67, l. 8. Procureur en Parlement. L'auteur des Cent Nouvelles nouvelles supposoit que le Parlement de Londres étoit une institution semblable à celui de Paris.

P. 68, l. 14. Malebouche... Dangier. Personnages du Roman de la Rose.

P. 73. La quatorzième nouvelle. La 2e nouvelle de la 4e journée du Décameron de Boccace. C'est le conte de L'Ermite de la Fontaine.

P. 73. Monseigneur de Créquy. Jean, seigneur de Créquy, de Canaples et de Tressin, fut élu chevalier de la Toison d'or lors de la fondation de cet ordre en janvier 1431. A la mort de Philippe le Bon, Jean de Créquy étoit un des douze seigneurs choisis pour porter son corps. Ce fut lui qui, en 1469, introduisit auprès du duc Charles le Téméraire les ambassadeurs de Louis XI.

P. 74, ll. 9 et 13. Ung soir... se trouva. Ung soir, environ la mynuyt, qu'il faisoit fort et rude temps, il descendit de sa montaigne et vint à ce village, et tant passa de voyes et sentiers que à l'environ de la mère et la fille sans estre oiseux se trouva, Verard. Un bon exemple des corruptions que Verard introduisit dans le texte de son édition.

P. 75, l. 11. Reclusage. Hermitaige, Verard.

P. 76, l. 17. Et pitié. Le texte de Verard ajoute: Et la povre fille aussi plouroit, quand elle véoit ce bon et sainct hermite en si grande dévocion prier et ne sçavoit pourquoy. En comparant les deux textes, on trouvera plusieurs additions semblables, qu'on y a mises probablement dans l'idée de rendre le récit plus piquant.

P. 77, l. 15. Crochette. Potense, Verard.

P. 84. La seiziesme nouvelle. Un des contes les plus populaires du vieux temps, et qui a eu le plus grand nombre d'imitateurs. On le trouve dans la Disciplina clericalis de Pierre Alfonse, dans les Gesta Romanorum, dans les Fabulæ Adolphi publiées par Leyser, et dans Boccace. Les imitations modernes sont innombrables.

P. 85, l. 15. Perusse. Prusse, Verard. Les Chevaliers de l'ordre Teutonique, en Prusse, étoient toujours en guerre contre les infidèles.

P. 92, l. 13. Thamisoit de la fleur. Buletoit de la farine, Verard.

P. 101. La dix-neuviesme nouvelle. Ce conte se trouve assez souvent répété dans les manuscrits du moyen âge. Il forme le sujet d'un fabliau publié par Barbazan, tom. III, p. 215, De l'enfant qui fu remis au soleil.

P. 101. Philipe Vignier. Philippe Vignier est nommé parmi les valets de chambre de Philippe le Bon sous la date de 1451. Voyez les Mémoires pour servir à l'Histoire de France et de Bourgogne, p. 225.

P. 106. La vingtiesme nouvelle. Ce conte ressemble un peu à une des Facéties de Pogge, Priapi vis, p. 118 de l'édition de 1798.

P. 114. La vingt-uniesme nouvelle. Le conte de L'Abbesse guérie de la Fontaine, liv. IV, conte 2.

P. 120. Caron. G. Chastelain, dans ses Chroniques de Bourgogne, 3e partie, ch. 73, appelle Caron «le clerc de chappelle» de Philippe le Bon.

P. 121, l. 17. Sourdantes. C'est la leçon de Verard. Le manuscrit lit soudaines, une erreur évidente.

P. 125. La vingt-troisiesme nouvelle. Imitation du fabliau De celui qui vota la pierre, imprimé dans la collection de Méon, t. I, p. 307. Ce conte a été souvent reproduit par les conteurs des seizième et dix-septième siècles.

P. 125. Monseigneur de Quievrain. Monseigneur de Commesuram, Verard.

P. 125, l. 19. Le servir de landes, Dieu scet, largement. Le servir d'aubades assez largement, Verard.

P. 127, ll. 23-25. E de ce cas... de léans. Or est-il vray que là present y estoit ung jeune enfant de environ deux ans, filz de léans, Verard. J'aurais peut-être dû admettre dans le texte la leçon de Verard.

P. 128, l. 2. Approucha. C'est la leçon de Verard. Le manuscrit lit, il apperceu de la raye.

P. 128, l. 2. Monseigneur de Fiennes. Thibaut de Luxembourg, seigneur de Fiennes, étoit un des chevaliers qui accompagnoient le comte de Charolois à Lille en 1466. Vers la fin de sa vie, il devint ecclésiastique, et mourut, en 1477, évêque du Mans.

P. 134. Philipe de Saint Yon. Peut-être le fils de Garnot de Saint-Yon, qui étoit un des officiers de la maison du duc Jean Sans-Peur.

P. 135, l. 13. Larrier. Levrier, Verard.

P. 136, ll. 10, 12, 22. Duyere. Terrier, Verard.

P. 137. Monseigneur de Foquessoles. G. Chastelain parle d'un bailli de Fouquerolles, en 1419, qui étoit peut-être le père de notre conteur.

P. 140, l. 24. L'abbayt. Sans passer grans langaiges. Verard.

P. 151, l. 9. Mestrier, leçon de Verard; mestre. dans le manuscrit.

P. 154, l. 7. Tendreur. J'ai adopté la leçon de Verard; le manuscrit lit teneur.

P. 157. Monseigneur de Beauvoir. Jean de Montespedon, seigneur de Beauvoir, écuyer, conseiller, et premier valet de chambre de Louis XI, dont il étoit partisan avant son accession au trône.

P. 160, l. 20. Queues. Traynées, Verard.

P. 166. Messire Michault de Changy. Michault de Changy étoit conseiller du grand conseil, chambellan, premier écuyer tranchant, puis premier maître d'hôtel des ducs Philippe le Bon et Charles le Téméraire.

P. 166, l. 22. Boccace. L'ouvrage de Boccace auquel il est fait allusion ici est le livre latin De Casibus virorum illustrium, dont il existoit déjà des traductions françoises.

P. 173, l. 17. Boulevars, bailles. Bellèvres, baublières, Verard.

P. 177, l. 12. La ville de Chambery. Le nom de la ville manque dans le texte de Verard.

P. 183. Monseigneur de la Barre. Une faute d'impression. Lisez Barde. Jean d'Estecer, seigneur de la Barde, étoit compagnon d'exil du Dauphin de France, et conserva sa faveur lorsqu'il fut roi. En 1462, il fut envoyé par Louis XI comme son ambassadeur à la cour d'Angleterre.

P. 184, l. 29. Courre. Coucher, Verard.

P. 192. La trente-deuxiesme nouvelle. Ce conte se trouve dans Pogge (Facetiæ, p. 163, decimæ), et dans La Fontaine, liv. II, conte 3. L'auteur des Cent Nouvelles nouvelles l'a pris sans doute du premier de ces conteurs.

P. 192. Monseigneur de Villiers. Ce doit être Antoine de Villiers, premier écuyer du duc de Bourgogne, qui fut, à ce qu'on dit, un des seigneurs qui formoient la cour du Dauphin à Genappe. En 1475, il fut un des courtisans de Louis XI chargés de traiter les Anglois au camp devant Amiens.

P. 192, l. 9. La ville d'Ostellerie en Casteloigne. Hostelerie, Verard.

P. 205, l. 29. Trop mieulx soulier à son pié. Trop mieulx garny au pongnet, Verard.

P. 218. La trente-quatriesme nouvelle. Ce conte est le sujet d'un fabliau par un trouvère nommé Jean de Condé, publié dans la collection de Méon, tom. I, p. 165, sous le titre: Du Clerc qui fut repus deriere l'escrin. On en trouve plusieurs imitations aux XVIe et XVIIe siècles.

P. 221, l. 8. Le survenu. C'est la leçon de Verard que j'ai adoptée, en place de celle du manuscrit, souvenir.

P. 232. La trente-septiesme nouvelle. Imitée par La Fontaine (liv. II, conte 10), et reproduite assez souvent par les conteurs des seizième et dix-septième siècles.

P. 232, l. 25. Les Quinze Joyes de mariage. Ouvrage célèbre d'Antoine de la Sale; voyez mon Introduction.

P. 233, l. 6. Qu'un follastre de sa massue. Que ung fol de sa marote, Verard.

P. 238. La trente-huitiesme nouvelle. On trouve ce conte dans Boccace (Décam., journée VIIe, nov. 8), et dans un fabliau (voy. Legrand d'Aussy, Fabl., tom. II, p. 340). L'origine se trouve dans les collections de contes indiens.

P. 238. Monseigneur de Loan. Monseigneur de Lau, Verard.

P. 245. Monseigneur de Saint Pol. Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol, fut créé connétable de France en 1465, et décapité par ordre de Louis XI en 1475.

P. 254, l. 2. Dedans la dicte cheminée. Dedens le bouhot de la dicte cheminée, Verard.

P. 256, l. 20. Jaserant. Haubergon, Verard. Cette variante, répétée dans le courant de la nouvelle, nous feroit croire qu'entre la date de la rédaction des Cent Nouvelles nouvelles et celle de l'édition de Verard, le jaserant, qui étoit une pièce d'armure plus légère que l'haubergeon, avoit cessé d'être en usage.

P. 261. Racomptée par Mériadech. Les documents contemporains parlent de Hervé de Mériadec au nombre des officiers de la maison de Bourgogne. Selon la chronique de Jacques de La Laing, il avoit accompagné l'expédition en Ecosse, et s'y étoit fait remarquer par ses exploits. En 1461, Louis XI lui donnoit le gouvernement de Tournai.

P. 283. Monseigneur de Thieuges, lisez Thienges. Thianges étoit la seigneurie de Chrestien de Digoine, conseiller et chambellan de Philippe le Bon. On le retrouvera dans les Cent Nouvelles nouvelles, cité comme le conteur de la nouvelle LXVIII.

P. 286, l. 7. Sa goune. Son manteau, Verard.

P. 287. La quarante-septiesme nouvelle. On a prétendu que cette aventure étoit arrivée à Grenoble, à Chaffrey Carles, président du parlement, au commencement du seizième siècle; mais la date de la nouvelle est évidemment trop ancienne pour que l'aventure de Chaffrey ait pu en être l'origine.

P. 295. Pierre David. Cet individu n'est connu que par un compte de la maison de Bourgogne, daté du 30 mai 1448, qui le porte aux appointements de 12 sols par mois.

P. 301. La cinquantiesme nouvelle. On trouve l'origine de cette nouvelle dans les Facéties de Pogge et dans l'ancienne collection italienne de Sacchetti, nov. XIV.

P. 301. Monseigneur de la Salle. Lisez, d'après le manuscrit, la Sale; ce n'est qu'une faute d'impression. Voyez sur Antoine de la Sale notre Introduction.

P. 301, l. 7. Au pays de Lannoys. Lannois, ou Lannoy, dans le Beauvoisis.


GLOSSAIRE.

  • A  avec.
  • A tout, atout, avec.
  • Abaiz, abois. II, 47.
  • Abbayt, commérages. I, 140.
  • Abregement, brièvement. II, 126.
  • Absoille, absolve. II, 97.
  • Absolu, absous. II, 95.
  • Abusion, déception. I, 233.
  • Abustiné, distribué, partagé. I, 295.
  • Accoincte, familier. «Se fist par gracieux et subtilz moyens accoincte de celuy dont il vouloit estre compaignon.» II, 114.
  • Accointance, connoissance, relations, familiarité. I, 8; II, 152.
  • Accordement, conciliation. II, 69.
  • Accoustumance, habitude. II, 116.
  • Acevé, achevé. II, 146.
  • Achoison, occasion, cause. I, 183.
  • Achopé, surpris, pris. I, 268.
  • Aconsuyvir, rattraper. II, 79.
  • Acoucher, acoucher malade, se coucher, se mettre au lit pour cause de maladie. I, 114; II, 5.
  • Acquerre, acquerir. I, 267.
  • Adicte, interdite, accablée. «Elle se trouvera en pou d'espace si adicte et de mal souprinse.» I, 115. Voyez Du Cange, Glossarium mediæ et infimæ latinitatis, VII, 10, vo Adis.
  • Adnichiler, annuler. II, 93.
  • Adolé, triste, chagrin. II, 202.
  • Adonc, alors. II, 243.
  • Adosser, mettre arrière. I, 154.
  • Adouber, armer. «Dieu, qui ses chevaliers de telles armes scet adouber.» II, 105.
  • Adouber (S'), s'armer. I, 154.
  • Adrecié, instruit, dressé. I, 204.
  • Advenir, à venir, futur. I, 80.
  • Advisement, avis, conseil. II, 10.
  • Advoé, adressé, instruit: «La damoiselle de sa maistresse est escollée et advoée que mieulx on ne pourroit.» I, 52.
  • Affaictié, simulé, dressé. «Le mary se fist mander querir par ung messagier affaictié.» II, 30.—«Certaines matrones affaictiées.» II, 50.
  • Afferré, effrayé. I, 93.
  • Affiert, appartient, concerne. II, 138.
  • Affoler, blesser. II, 159.
  • Affres, peur, effroi. II, 128.
  • Affulé, coiffé. II, 181. Se dit au figuré: «Je vous feroie affuler la prison.» II, 199.
  • Aggresser, attaquer. I, 11, 40.
  • Agu, aigu. I, 7.
  • Aguet (D'), de dessein prémédité. I, 163.
  • Aguillette, aiguillette. Courre l'aiguillette. (I, 52), courir après les filles.
  • Agyos, façons, cérémonies. I, 77.
  • Ahurter (S'), s'arrêter obstinément à une détermination. I, 95; II, 174. Voy. Enhurter.
  • Ainçois, avant, plutôt. I, 67, 224.
  • Ains, mais au contraire. I, 209.
  • Aitre, cimetiere. II, 206.
  • Alibiz forains, mauvaises excuses. II, 236.
  • Amant. Voy. t. II, p. 255, l. 33.
  • Amatir, flétrir, ternir, devenir languissant. II, 243.
  • Amender, réparer, expier une faute. II, 50.
  • Amis. Etre de nos amis, est dit souvent pour désigner un mari trompé. Voy. I, 103, 260.
  • Ammiracions, exclamations. II, 51.
  • Ammonestemens, réprimandes. II, 185.
  • Angaigne, chagrin, peine. «Et Dangier, sa meschine, qui enrageoit d'angaigne...» I, 237.
  • Anuyt, aujourd'hui, ou plutôt «cette nuit.» I, 83. Voy. Ennuyt.
  • Aparoir, paroître. I, 100, 144; II, 117.
  • Apertement, ouvertement, clairement. I, 13.
  • Apertises, tours d'adresse. «Faire souplesses et apertises.» II, 225.
  • Apiert (S'), s'attaque. II, 158.
  • Appati, abandonné par suite d'un arrangement, d'un pacte: «Ainsi furent toutes les femmes de la ville appaties à ces vaillans moynes.» I, 194.
  • Appeau, appel. I, 179.
  • Appenser (S'), s'imaginer, se figurer, se mettre en tête. I, 122; II, 90.
  • Araisonner, parler à quelqu'un, lui expliquer ses raisons, I, 96.
  • Aray, aurai, II, 175.
  • Arbaleste. Proverb.: «Ne tenir serre non plus qu'une vieille arbaleste.» (I, 296.) Faire peu de résistance, être d'un caractère foible.
  • Ardre, bruler.
  • Aspry, âpre, aigri. I, 8.
  • Asseulé, isolé. I, 130.
  • Asseur, assuré, certain. II, 164.
  • Assiete. Proverb.: «Et pour assiete en lieu de cresson, elle lui dist...» I, 212.
  • Assimply, affoibli, chancelant. «Tout espoenté et assimply.» I, 40.
  • Assovir, accomplir, achever. II, 138.
  • Assovi, pourvu, ayant assez. II, 38, 233.
  • Atelée, attelage, union naturelle de l'homme et de la femme. II, 107.
  • Atour, coiffure. I, 216.
  • Atrempé, ferme, solide, bien trempé. «Atrempé cueur et vertueux courage.» I, 101.
  • Attainctes, visées, but. «Parvenir à ses attainctes.» II, 201.
  • Attinté, arrangé, disposé. I, 154.
  • Attrotter, arriver en trottant. I, 285.
  • Aultier, autel. II, 16, 122.
  • Aultrhier (L'), l'autre jour, dernièrement. II, 205.
  • Aumosnier, libéral, faisant de riches aumônes. I, 74.
  • Aurfaveresse, femme d'un orfévre. I, 44.
  • Autant. «Boire d'autant et d'autel» (I, 43, 175), faire raison à tout le monde, le verre à la main.
  • Autel. «Boire d'autant et d'autel.» Voy. Autant.
  • Autretant, autant, encore autant. I, 271.
  • Aval, parmi, en long et en large de: «Aval la chambre.» II, 131.—«Aval Paris.» II, 92.
  • Avaler, descendre, aller ou mettre à val, en bas. I, 254.
  • Averer, vérifier. II, 119.
  • Avertin, vertige, accès de mauvaise humeur. II, 137.
  • Avolenter (S'), prendre la détermination. II, 135.
  • Avoyé, en voie, en train. I, 249.
  • Baculer, bâtonner, II, 104.
  • Baguer, pourvoir de bijoux, linge, meubles. II, 139.
  • Bagué, garni de bijoux, de linge, etc. II, 92.
  • Bagues, bijoux, hardes, bagages. I, 10, 202.
  • Bailler, donner.
  • Baille, lieu fermé de palissades, première défense d'une ville. «Force luy fut de gaigner et emporter boulevars, bailles, et aultres plusieurs fors dont la place estoit bien garnie.» I, 173.
  • Balme, baume; au figuré, merveilles. II, 207.
  • Balochoit, se balançoit. II, 156.
  • Balochouere, balançoire. II, 156.
  • Baloiz, balais. «Elle fist baloiz courre partout.» Elle fit nettoyer avec soin. II, 241.
  • Bancq. «S'en aller sur le bancq», aller au cabaret, aller banqueter. II, 196.
  • Bancquiers, coussins, housses pour mettre sur les bancs. I, 202.
  • Bandon (A), à discrétion. II, 91.
  • Baptisement, baptême. II, 102.
  • Barbaier, raser, faire la barbe. II, 200.
  • Barguigner, marchander. «Et quiconque la barguignoit, il l'avoit aussi bien à créance que à argent sec.» II, 187.
  • Barres. «Comment il avoit prins le galant à ses barres.» II, 57.
  • Bas, parties naturelles de la femme. II, 135.
  • Bas instrumens, parties naturelles. II, 201.
  • Basset (En) à voix basse, secrètement. I, 155.
  • Baston. «Le baston de quoy on plante les hommes», le membre viril. II, 144.
  • Baterie, action de battre. I, 245.
  • Bature, action d'être battu. I, 181.
  • Baudement, gaiement, hardiment. II, 172, 214.
  • Bec, bouche. «Jouer bien du bec» (I, 96), faire des discours captieux.
  • Bedon, instrument de musique. Ce mot est employé pour désigner les parties naturelles de la femme. II, 131.
  • Bée, passage, route, voie. I, 146. «Payer a bée» (II, 150).
  • Belle. «Trouver en belle» (I, 282), avoir l'occasion favorable.
  • Beneisson, bénédiction. II, 184.
  • Besoigner, travailler, s'occuper de... I, 48.
  • Beste. «Le mestier de la beste à deux dos» (I, 107), l'amour.
  • Beurre. Prov.: «Ravoir beurre pour œufs» (I, 21), être payé avec usure d'un tour qu'on a joué à quelqu'un.
  • Bienviengner, donner la bienvenue, recevoir joyeusement. II, 106.
  • Bihès, byhès, biais. I, 132.
  • Blasonner, blâmer, critiquer, décrier, «Vous blasonnez très bien mes armes.» I, 188, 218.
  • Bleu, «Craindoit trèsfort estre du reng des bleuz vestuz, qu'on appelle communement noz amis.» II, 118. Voy. Amis.
  • Boeste aux cailloux, prison. II, 207.
  • Bouchons (A), sens dessus dessous, à l'envers. «Fut à bouchons couchée et son derrière descouvert.» I, 13.
  • Boul, bouleau. I, 241.
  • Bourdes, mensonges.
  • Bourdon, bourdon joustouer, membre viril. I, 84; II, 172.
  • Bourser, enfler, s'arrondir comme une bourse pleine. «Le ventre luy commença à bourser.» I, 80.
  • Bout (Bailler le) (?). I, 253.
  • Bouter, mettre.
  • Brayes, culotte, II, 12.
  • Brefment, bientôt, brièvement. II, 6.
  • Brefté, brièveté. II, 53.
  • Brichouart, membre viril. II, 87.
  • Broches, hémorroïdes, I, 10.
  • Brouet, soupe, sauce. II, 45.
  • Bruyt, renommée. I, 193.
  • Bruyt, victoire, triomphe. I, 215.
  • Buffe, soufflet. II, 58.
  • Buleteau, blutoir. «Tenez ce buleteau sur vostre teste.» I, 94.
  • Bureau, bure, étoffe grossière. I, 299.
  • Buroye, boirois. II, 208.
  • Buvraiges, breuvages. II, 141.
  • Byhès. Voy. Bihès.
  • Calenger, demander, reclamer, contester. II, 129.
  • Calonge (?). II, 207.
  • Camus, désappointé. II, 81.
  • Capitulé, grondé, chapitré. I, 217.
  • Car, presque toujours employé dans le sens de parce que: «Ou car Dieu le permist, ou car Fortune le voult et commenda.» I, 10.
  • Casse, cassé.
  • Castille, querelle, lutte. I, 126.
  • Cautelles, ruses. I, 77.
  • Ce, se.
  • Céans, céens, ici dedans.
  • Celéement, en cachette. I, 92.
  • Celer, cacher, dissimuler. I, 69.
  • Ces, ses.
  • Cest, ce.
  • Cestes (?). «Mais le juger fut differé jusques à la fasson de cestes.» I, 16.
  • Chailloit, soucioit. II, 130.
  • Challut, soucioit. I, 268.
  • Chamberière, servante, femme de chambre. II, 85.
  • Chambre a parer, chambre de toilette. I, 227.
  • Chandelle. «Allumer sa chandelle», prétexte honnête pour s'introduire chez quelqu'un. Nous n'ayons pas besoin de signaler l'allusion qui se trouve dans ce passage: «Veezcy maistre curé qui vient pour allumer sa chandelle, ou pour mieux dire pour l'estaindre.» II, 117.
  • Chapperon, sorte de coiffure que portoient les femmes. I, 216.
  • Chaperon fourré, officier de justice. II, 90.
  • Char, chair. Voy. Poisson.
  • Chareton, charreton, charretier, voiturier. I, 43; II, 120.
  • Charruyer, laboureur, bouvier. II, 214.
  • Chartre, prison. II, 97.
  • Chastoy, direction, gouvernement. I, 136.
  • Chauffer la cire, attendre longuement une chose qu'on désire; on dit aujourd'hui dans le même sens: «Se voir passer quelque chose devant le nez.» II, 190.
  • Chauld sur potage, enclin à l'amour. I, 108; II, 187.
  • Chault, soucie. «Il ne vous chault guères de moy.» I, 49.
  • Chéance, chute. I, 159.
  • Chef, tête. A chef de peche, au bout de quelque temps, de pièce de temps. I, 2.
  • Chef, bout. «Venir à chef», venir à bout. I, 21.
  • Chère, visage. I, 7; II, 244.
  • Chevance, biens, fortune. I, 101, 267.
  • Chevaulcher, faire l'amour. I, 276.
  • Chevir, venir à bout de. I, 74.
  • Chicheté, avarice. I, 97.
  • Chiège, choie, tombe. I, 17.
  • Choisir, regarder, voir, apercevoir. I, 13. «Et avoient torches et flambeaulx pour mieulx choisir partout.» II, 58.
  • Chrestienner, baptiser. I, 123.
  • Chula, celui-là. II, 127.
  • Cicaneur, homme de chicane, sergent. II, 206.
  • Cimbales (Jouer des), faire l'acte amoureux. II, 107.
  • Cire (Chauffer la). II, 190. Voy. Chauffer.
  • Clamer, déclarer, proclamer. II, 76.
  • Clergie, science. II, 238.
  • Cligne-musse, sorte de jeu où l'un ferme les yeux pendant que l'autre se cache. Cligne-musette. II, 176.
  • Cocquard. Voy. Coquard.
  • Cognoissance, reconnoissance. I, 272.
  • Collacion, discours. I, 200.
  • Colons, pigeons. II, 180.
  • Comblement, amplement, à mesure comble. I, 11.
  • Commender, recommender. II, 7.
  • Comparer, payer. I, 222.
  • Compter, battre, charger de coups. «Ce dyable, sans mot dire, le commença à compter, et bon chevalier de se défendre.» II, 104.
  • Comptouer, étude, lieu de travail. I, 127.
  • Conclu, convaincu, vaincu. «Mais en son ton évident fut le mary conclu.» I, 31. Voy. I, 212.
  • Confermer, confirmer. I, 106.
  • Congyer, congedier.
  • Conquester, conquérir, acquérir, gagner.
  • Consequemment, consécutivement. «Et ainsi conséquemment jusques ad ce que tout fut party et portionné.» II, 120.
  • Contendre, tendre, chercher. II, 122.
  • Content, comptant. I, 97.
  • Convenir, être nécessaire. «La bonne dame laissoit tout convenir, car de donner conseil au contraire ne s'osoit avancer.» II, 121.
  • Coquard, coquart, sot, imbécile. «Que faites vous, meschant coquart?» I, 45.—«Ceulx qui le cuident sont parfaiz coquars.» I, 152.
  • Cordoannier, cordonnier. II, 90.
  • Corner, jouer des instruments. «Fist corner les menestrielz.» I, 157.
  • Coulpe, faute. II, 62.
  • Coup (A la), au moment. «Tenir sur fons son enfant, dont la mère s'estoit delivrée droit à la coup du retour dudit chevalier.» II, 101.
  • Coupault, mari trompé. I, 288; II, 108.
  • Courre, courir.
  • Cousine. Etre de noz cousines, être au rang des courtisanes. «Et tiens, qui en aroit à faire, qu'on la trouverait aujourd'huy ou reng de noz cousines, en Avignon, à Vienne, à Valence, ou en quelque aultre lieu en Dauphiné.» II, 29. Voy. II, 40.
  • Coustille, couteau, épée. I, 39.
  • Coustre, gardien, sacristain. II, 194.
  • Coustrerie, garde, surveillance. I, 261.
  • Couvine, invitation. «Et comme ilz retournoient de ce couvine.» I, 194.
  • Coux, mari trompé. I, 29, 238; II, 110.
  • Crasse, grasse. «Bouloigne la crasse.» II, 239.
  • Crastine, lendemain, matinée. «Et laissoit sa femme prendre la longue crastine jusques à viij ou à IX heures.» II, 63.
  • Cravanter, renverser. I, 243.
  • Créant. I, 54. Voy. Recréant.
  • Credence, créance, confiance. II, 115.
  • Créez, croyez. I, 77.
  • Cremoit, craignoit. II, 44.
  • Cresson. Voy. Assiète.
  • Crestian, chrétien. «Luy, qui oncques sur beste crestiane n'avoit monté.» I, 107.
  • Cristien, chrétien. II, 102.
  • Crochette, petite crosse. I, 77.
  • Croquer, prendre, saisir, accrocher. I, 22.
  • Croix. Prov.: «Je n'en fineroye néant plus que de la vraye croix.» I, 294.
  • Crueux, cruel. I, 142.
  • Cueur, cœur. Prov.: «N'avoit pas son cueur en sa chausse.» II, 168.
  • Cuider, croire.
  • Cuigner, connoître charnellement. II, 187.
  • Culetté la selle, couru à cheval. II, 154.
  • Dangier, défaut, manque. «Et s'il y avoit dangier de lictz, la belle paillasse est en saison.» I, 182.
  • Dangier, dépendance, domination. «Or bien, je suis en vostre dangier.» II, 176.
  • Dangier, difficulté. «Mais comme souvent chose eue en dangier est trop plus cher tenue que celle qu'on a à bandon...» II, 91.
  • Dangier, personnage allégorique du Roman de la Rose. L'auteur des Cent Nouvelles paroît avoir en mince estime l'œuvre célèbre de Guillaume de Lorris et de Jean de Meung. Voy. I, 68, 158.
  • Dangier, garde. Nom donné à une duègne. I, 236.
  • De, que. I, 294; II, 84.
  • Deable, diable. II, 104.
  • Debouté, rebuté, renvoyé. I, 192.
  • Deceute, trompée. I, 100.
  • Decevable, trompeur. I, 212.
  • Deduit. «Luy qui estait homme de deduit» (II, 10), c'est-à-dire qui aimoit à s'amuser.
  • Defaulte, faute. II, 235.
  • Deffigurance, difformité. II, 187.
  • Deffubler, décoiffer. II, 52.
  • Degois, disposé. I, 65.
  • Dehet, gai, dispos. I, 294.
  • Demené, le détail d'une affaire, la manière dont elle s'est passée. I, 73. «Et il luy en compta largement et bien au long le demené.» I, 210. Voy. II, 69.
  • Demeut, détourna de son projet. II, 248.
  • Denrées, instruments génitaux. I, 109.
  • Dépendant (?). «Et estoit sur son corps dépendant.» I, 251.
  • Deporter (Se) d'une chose, y renoncer. I, 251.
  • Derrain, dernier.
  • Desarmer, défaire. «Et ne savoit que penser comment il se pourroit de luy desarmer.» II, 9.
  • Desatourné, décoiffé. I, 216.
  • Desceu (Au), à l'insu. II, 113.
  • Descombré, débarrassé, désencombré, II, 33.
  • Desconforté, affligé. II, 18.
  • Descouché, levé. I, 86.
  • Deservir, meriter. I, 181, 273.
  • Desfourni, privé. II, 232.
  • Desfrayé, peureux, ombrageux, sauvage. I, 290.
  • Deshaité, malade. I, 111.
  • Deshouser, débotter. II, 110.
  • Deslonger, détacher de sa longe. II, 131.
  • Desplaisant, fâché. II, 42.
  • Despoilli, dévêtu, dépouillé. I, 220.
  • Desprisonner, mettre hors de prison, délivrer. I, 162.
  • Desroy, désarroi. I, 3.
  • Desrompre, séparer. II, 115.
  • Desserrer, ouvrir. «La posterne fut desserrée.» I, 3.
  • Desserte, ce qu'on a mérité. I, 223.
  • Destené, destiné, prédestiné. II, 135.
  • Destourbier, trouble, embarras. I, 68, 126.
  • Destresseux, plein de détresse, qui met en détresse. I, 12.
  • Devant. «Dieu devant», Dieu aidant. I, 200.
  • Devises, discours. I, 42.
  • Dextre, droite.
  • Dilacion, retard. II, 170, 245.
  • Dolez, affligez. II, 20.
  • Domine, surnom dorme à un curé. «Respondit maistre Domine.» II, 129.
  • Dommage, terme de droit. «Et si très bien à point la rabatit qu'en dommage et en sa garenne le poulain au chareton trouva.» I, 45.
  • Dont, d'où. I, 32.
  • Dont, donc. I, 18.
  • Donzelle, fille facile. II, 128.
  • Dormeveille (Faire la), faire semblant de dormir; dormir d'un œil. I, 244.
  • Doubte, doute, crainte. I, 128, 267; II, 54, 56.
  • Doubter, craindre. I, 100.
  • Doubtif, dubitatif, incertain. I, 78.
  • Douloir (Se), se plaindre, gémir. I, 64.
  • Douyère, duyère, porte, entrée, I, 135.
  • Doy, doigt.
  • Dureau. «Marcha la dureau, marcha hardiment.» I, 127.
  • Duyère. I, 136. Voy. Douyère.
  • Dya, diable. I, 17.
  • Eage, âge. Etre sur eage, être déjà vieux. I, 90, 172.
  • Effrayement, avec effroi, tout effrayé. II, 7.
  • Effroy, bruit. «La dame monte en sa chambre sans faire effroy.» I, 29.
  • Effroyt, bruit. I, 178.
  • Embronché, enveloppé, entortillé. «Elle fut tantost desarmée de sa faille, où elle estoit bien enfermée et embronchée.» II, 17.
  • Emende, amende. II, 198.
  • Empané, garni de drap, d'étoffe. II, 247.
  • Empapiné, barbouillé. «Doré et empapiné d'œufz, de fromage, de laict, etc.» II, 121.
  • Emprendre, prendre, entreprendre. «Et entre aultres qui devoient emprendre ce doulx et seur estat de mariage.» II, 16.
  • Emprès (D'), auprès de. I, 188, 272.
  • Emprinse, entreprise, projet. I, 51; II, 39.
  • Emprinse d'armes. I, 224.
  • Emprint, prit, entreprit. I, 68.
  • Emy! exclamation. I, 244.
  • Encepé, enchaîné. II, 131.
  • Enchargé, commandé, imposé. II, 53.
  • Enchasser, chasser, repousser. I, 81.
  • Encliner, incliner, pencher. II, 173.
  • Encloit (S'), s'enferma. II, 190.
  • Encontre, au-devant. II, 7.
  • Encoulpit, accusé, confessé. II, 140.
  • Encourtiné, garni, fermé de rideaux. I, 4.
  • Encueillir, accueillir. II, 79.
  • Encuser, déclarer, dévoiler, accuser. I, 134; II, 89, 125.
  • Enditté, éloquent, informé de ce qu'il doit dire. I, 33.
  • Enfermière, infirmière. I, 118.
  • Engin, esprit, imagination. I, 21.
  • Engin, ruse, moyen ingénieux. I, 12. «Mais ilz n'y sçavoient engin trouver.» I, 284.
  • Engin (Mal), ruse. II, 246. J'ignore qui sont «ceulx du mal engin», qui sont voisins des Champenois. Voy. I, 106.
  • Engins, détours. «L'ostel n'estoit pas si grand, ne si pou de lui hanté en toute devocion, qu'il ne sceust bien les engins.» I, 74.
  • Engreger, aggraver. II, 111.
  • Enhurté, obstiné, butté. I, 58. Même sens que ahurté.
  • Enlangagé, beau parleur, prompt à la riposte. II, 90.
  • Enmy, au milieu de. I, 75.
  • Ennuyeuse, accablée d'ennui, de chagrin. II, 154.
  • Ennuyt, aujourd'hui; mais dans ce livre le mot est constamment pris dans le sens de cette nuit. «Et si par miséricorde il nous démonstre ennuyt comme les autres precedentes...» I, 78. Voy. I, 52, 159, 180, 241; II, 43, 47.
  • Enœiller, lorgner. I, 271.
  • Enortement, exhortation. II, 51.
  • Enorter, exciter, exhorter. I, 65.
  • Enquerre, enquérir, rechercher, s'informer, I, 66.
  • Ens, dedans. I, 173; II, 241.
  • Enseur, loin. «Quand le vaillant homme d'armes sceut l'Escossois enseur de luy.» I, 29.
  • Ensus, loin. I, 293. «Va-t'en en sus de moy.» I, 47.
  • Ensuyz, suivis. II, 115.
  • Ententivement, attentivement. I, 14.
  • Entière, restée fidèle à son mari. II, 249.
  • Entiereté, chasteté, fidélité conjugale. II, 235, 244, 249.
  • Entreoyt, entendoit. II, 111.
  • Entrerompre, interrompre. I, 183.
  • Entretant (En), pendant le temps. I, 22, 89.
  • Entretenances, entretiens, devis familiers. I, 154; II, 30.
  • Entretiennement, relations coupables entre homme et femme. I, 209.
  • Envers, Anvers. «Une feste de Lendit et d'Envers.» I, 43.
  • Envis, envys, à contre-cœur, malgré soi. II, 152, 218.
  • Eries (?). I, 136.
  • Errer, se tromper, II, 10.
  • Erres, indices. «Le gentil homme tantost congneut que toutes ces excusacions estoient erres pour besoigner.» I, 96.
  • Escharsement, petitement, chichement, avec parcimonie. I, 17.
  • Eschassé, chassé. I, 192.
  • Eschever, achever. I, 126.
  • Esclabotures, éclaboussures. I, 151.
  • Esclandri, deshonoré par un esclandre. I, 100.
  • Escoller, instruire, faire la leçon. I, 52; II, 167.
  • Escourre, secouer. I, 166.
  • Esloignier, éloignement. I, 141.
  • Espanter, épouvanter. I, 98, 220.
  • Espartent (S'), se répandent. II, 157.
  • Espies, espions. I, 130.
  • Espoenter, épouvanter, effrayer.
  • Espoir, peut être. I, 57, 128.
  • Espoire, peut-être. I, 262.
  • Esracher, arracher. II, 176.
  • Esraillé, ouvert. «Et les deux jambes esraillées en dehors du bancq.» II, 166.
  • Esserré, effrayé. I, 3.
  • Estable, stable. II, 236.
  • Estains, etain; ce métal venoit d'Angleterre dès l'antiquité. I, 101.
  • Esternu, décidé. «Je ne vy jamais, moy, homme de si hault esternu si tost rassis.» I, 175.
  • Estire (?). «Mais de plus belle rend estire.» I, 126.
  • Estollé (?). I, 237.
  • Estouppes. Avoir «des estouppes en sa quenouille», être embarrassé, avoir une mauvaise affaire sur les bras. Voy. I, 213; II, 11.
  • Estrain, paille. II, 33, 166.
  • Estrains, serrés. II, 52.
  • Estrange, étranger. I, 102.
  • Estrange, réservé, sur le quant à soy. «Je vous seray aussi pou privé que vous m'estes estrange.» I, 184.
  • Estrangé, éloigné, isolé. II, 213.
  • Estres, choses, objets quelconques. «Je n'en portay oncques la clef, mais pend à vostre cincture avec les vostres, dès le temps que vous y mettiez vos estres.» II, 59.
  • Eur, heur. II, 162.
  • Euvangile, Evangile. Prov.: «Une assez bonne histoire qui n'est moins vraye que l'Euvangile.» II, 106.
  • Euvre (A la première), dès le matin. I, 122.
  • Examiné, tourmenté. «Nos voisins ont esté terriblement persecutez et de pestilence et de famine. Quand les aultres en ont esté examinez, nous avons peu dire que Dieu nous en a preservez.» I, 200.
  • Excusacions, excuses, défaites. I, 96.
  • Excusances, excuses. II, 36.
  • Fabrice, fabrique d'une église. II, 199.
  • Faebleté, foiblesse, simplicité. II, 105.
  • Faille, sorte de mante flamande. II, 17.
  • Failly, fini. «Et tantost après la feste faillye...» II, 167.
  • Fain, faim, désir, envie, besoin.
  • Faindit, feignit. II, 117.
  • Faire, faire l'acte amoureux. I, 81.
  • Fame, réputation. II, 233.
  • Farser, moquer. I, 97.
  • Faulseté, méchanceté, trahison. I, 153.
  • Fel, méchant, traître, félon. II, 142.
  • Fer. «Tenir quelqu'un à fer et à clou», l'entretenir. I, 123.
  • Ferir, frapper. I, 302.
  • Ferrer, dompter. «La pouvre fille se laissa ferrer.» I, 12. Voy. II, 91, 94.
  • Fiablement, avec confiance. I, 273.
  • Fiché, mis, fixé. II, 246.
  • Fiert, frappe.
  • Fin. Prov.: «Plus fine que moutarde.» II, 128.
  • Finance, rançon. «On eust eu nouvelle de luy pour faire sa finance.» II, 98.—Mettre un prisonnier à finance, c'étoit exiger de lui une rançon. Voy. I, 32.
  • Finer, finir. «Sa queste en amour doit estre bien finée.» I, 57. Voy. I, 132, 237; II, 246.
  • Finer, obtenir. «Mais vous ne vous en irez pas si je ne la puis finer.» II, 20.
  • Flambe, flamme. II, 103.
  • Folye (La), l'acte amoureux. II, 40.
  • Fors, hormis, excepté. II, 9.
  • Fort (Au), au fond, à la fin. I, 113, 121; II, 172.
  • Fourches (Basses). Pendre aux basses fourches d'une femme, la connoître. I, 137.
  • Fraile, frêle, délicat. II, 234.
  • Frain, frein. «Ronger son frain.» I, 156.
  • Frict, perdu, détruit. I, 215.
  • Frisque, frais, gai, fringant. II, 135.
  • Froissie, traces. «Suivant le froissie des chevaulx.» I, 157.
  • Fumer. I, 259.
  • Furon, furet; membre viril. I, 135.
  • Gaitte, soldat qui fait le guet. II, 126.
  • Galée, amusement, fête, plaisanterie. I, 231.
  • Galioffe, grossier personnage, vaurien. «Regardez quel galioffe! il a couché plus de vingt nuiz avecques ma femme.» I, 282.
  • Garin, homme déterminé, qui a réponse à tout. «Vrayment, ma mye, dist le moyne, qui estoit ung garin tout fait...» II, 160.
  • Garin (Prendre), s'enfuir. «Veez là l'huys: prenez garin, et si vous faites que sage, ne vous trouvez jamais devant moy.» II, 96. Voy. II, 136.
  • Garnier, grenier. I, 220.
  • Gay. Prov.: «Plus gay que une mitaine.» I, 265.
  • Geheyne, gêne, torture. I, 134.
  • Genteté, gentillesse. I, 10.
  • Geron, giron, sein. I, 44.
  • Gesine, couches. I, 123.
  • Glatissoit, aboyoit, chassoit. II, 110.
  • Gogettes, goghettes, goguettes, réjouissances, fête. I, 85, 294; II, 196.
  • Goghettes. Voy. Gogettes.
  • Gogues (Etre de), être en gaieté. I, 175.
  • Goguettes. Voy. Gogettes.
  • Goisson, compagnon. II, 196.
  • Gorgias, gorgyas, élégant. «Faisoit du gorgias.» II, 197.—«Deux ou trois gorgyas qui la devoient accompaigner.» I, 290.
  • Gouge, fille, femme portée à l'amour. I, 2.
  • Goune, manteau. I, 286.
  • Gourmander, exercer sa gourmandise. II, 159.
  • Goustable (Mal), de mauvais goût. II, 225.
  • Grain, pas du tout. «Le lieu n'est grain honneste.» II, 180.
  • Gramment, grandement.
  • Graux, gré. I, 92.
  • Gref, grave. I, 18.
  • Grifz, griffes, mains. I, 127.
  • Grigneur, plus grand, plus grande. I, 72.
  • Gros, sorte de monnoie. II, 157.
  • Grouiller, gronder, grogner à la manière des chiens. I, 188.
  • Groutter, comme grouiller. I, 189.
  • Guerdon, récompense. I, 246.
  • Guerdonner, récompenser. I, 156.
  • Guingant, Guingamp, célèbre par ses rasoirs. Voy. I, 7.
  • Halle, marché. Prov.: «Sans tenir cy halle de néant» (II, 192), sans nous occuper de choses vaines.
  • Haloz, branches ou troncs d'arbres. On a le mot hallier. II, 156.
  • Hamelet, petit hameau. II, 122.
  • Hantise, fréquentation. II, 9.
  • Harier, fatiguer, assaillir. Pris dans le sens de saillir. I, 45.
  • Haulte heure (de), de bonne heure. I, 185.
  • Hebreos. «Usque ad hebreos» (II, 208), équivoque d'hébreu à ebriosus;—jusqu'à être ivre.
  • Het, réjouissance, entrain. II, 78. «Et hurta l'on de bon het à la porte.» II, 150.
  • Hoc (?). «Tenant le hoc en l'eau pour deviser.» I, 6.
  • Hocher, connoître charnellement. II, 188.
  • Hodé, lassé, fatigué. S'écrivoit aussi odé. «Par la mort bieu! dist-il, j'en suis si trèshodé que plus n'en puis: il me semble que je ne voy que pastez.» I, 59. Voy. I, 87; II, 228.
  • Hoignard, grondeur. I, 62.
  • Homs, homme. I, 275. Vieille forme du nominatif singulier, que La Sale employoit volontiers. On la trouve souvent dans les Quinze joyes de mariage.
  • Hostellain, hôtelier. II, 82.
  • Houlette, confrérie des femmes débauchées, des dames du Huleu, et, par extension, des maris trompés. «Aussi suis-je pieça de la Houlette.» I, 189; II, 38.
  • Houllier, débauché, coureur de filles. I, 4. Un mari trompé reproche à sa femme son houllier. I, 221.
  • Hourder, fournir, pourvoir, charger. «Mais de sens assez escharsement hourdée.» I, 17. Voy. I, 74. «Se hourde de l'escuyer et à son col le charge.» I, 100.
  • Hourter, heurter. I, 159.
  • Housé, botté, chaussé de houseaux. I, 87; II, 182.
  • Houseaux, bottes.
  • Houser, botter, et, par extension, vêtir. I, 298.
  • Houserie, habillement, action de vêtir. I, 299.
  • Housser, vêtir. II, 133.
  • Houssé, fourni, vêtu. «Le plus hault arbre et mieux houssé du bois.» I, 64. C'est-à-dire le mieux garni de feuilles.
  • Hucher, appeler à haute voix, en criant. I, 41, 180.
  • Hucquer, frapper. II, 178.
  • Huée, réputation, notoriété. II, 142.
  • Humet, sauce, ragoût. II, 45.
  • Huppiller, houspiller. I, 128.
  • Hurt, action de heurter. I, 161.
  • Hutin, bruit, querelle, dispute, combat amoureux. «Et ne demandoit que hutin.» II, 187.
  • Hutiner, tracasser, lutiner. I, 126.
  • Huys, porte.
  • Illec, là. II, 242.
  • Impareil, non pareil, incomparable. I, 68.
  • Improveu, dépourvu. I, 229.
  • Induce, délai, loisir, «Si ne leur bailla pas induce de respondre.» I, 181.
  • Infortune, malheureuse, infortunée. I, 288.
  • Introduire, instruire. II, 167.
  • Inventoire, inventaire. I, 66.
  • Ire, colère. II, 234.
  • Jannes, Gênes, II, 223.
  • Jaserant, cotte de mailles. I, 256.
  • Jasoit, bien que, quoique. II, 11.
  • Jouer des cimbales, faire l'acte amoureux. II, 107.
  • Journée, affaire, combat. «Et s'il accepte la journée, dit Madame, je viendray tenir vostre place.» I, 51.
  • Jousteur, qui aime les joutes, les luttes. II, 21.
  • Joustouer, destiné à la joute. II, 172.
  • Jouvence, jeunesse. II, 234.
  • Jugié, condamné. I, 70.
  • Jus, à bas. II, 43, 138.
  • Justice, lieu où se faisoient les exécutions. II, 126.
  • Lairray, laisserai. I, 191.
  • Laisser, lasser. II, 27.
  • Landes (?). I, 125.
  • Langagier (Beau), beau parleur. «Car il estoit bon clerc et très beau langagier.» II, 157.
  • Larrier, mot tiré sans doute de larris, lande, terre en friche. I, 135.
  • Las, lac, lacet, piége. I, 272.
  • Lassé, lacé. I, 6.
  • Léans, là dedans.
  • Léaulté, foi, loyauté. II, 233.
  • Ledanger, injurier. II, 58.
  • Légende dorée, ouvrage célèbre de Jacques de Voragine, contenant les Vies des saints. La femme qui recommence sa grande légende dorée, t. I, p. 8, dit à son mari une kyrielle d'injures.
  • Lendit, foire qui se tenoit à Saint-Denis. «Une feste de Lendit et d'Envers.» I, 43.
  • Lez, côtés. «Visiter les angletz de sa chambre à tous lez au mieulx qu'il luy fut possible.» II, 119. «Elle se pourchassoit à tous lez.» II, 187.
  • Lieutenant, celui qui remplace le mari auprès de sa femme. I, 267; II, 118.
  • Lignage, famille. I, 271.
  • Linge, fin, délié. «Draps linges.» I, 181; II, 202.
  • Loer, louer. II, 105.
  • Loist, est loisible, permis. I, 118.
  • Los, renommée. I, 193.
  • Loudier, débauché, coureur de filles. I, 4.—Employé en mauvaise part dans le sens d'amant. II, 58.—Se prenoit aussi dans la signification plus étendue de mauvais sujet, vaurien. Voy. II, 124.
  • Lourdoys (En), lourdement, à la façon d'un lourdaud. I, 112.
  • Luycte, lutte. Prov. «A la tierce foiz va la luycte.» I, 78.
  • Lye, joyeux. I, 72.
  • Lyé, joyeux. I, 19.
  • Lyesse, gaieté, joie. I, 12.
  • Lysit, lut. I, 34.
  • Maignye, famille, les gens de la maison. «Maignye d'enfans, parens, amis, héritages.» I, 101.
  • Main mise (?). «Il en eust prins vengence criminelle et de main mise.» II, 30.
  • Mains, moins. I, 9.
  • Mal, mauvais.
  • Mal venir (De), par malheur. I, 268.
  • Malebouche, personnage allégorique du Roman de la Rose. I, 68.
  • Maltalant, colère, mauvaise disposition d'esprit. I, 8.
  • Manière, colère, mauvaise humeur. «Elle est merveilleuse depuis qu'elle entre en sa manière.» I, 45.
  • Marchander, faire le métier de marchand. II, 118.
  • Marchant, marchand. «En lieu marchant», dans une situation favorable. I, 92.
  • Marche, contrée, frontière. I, 72.
  • Marchissant, attenant. I, 64.
  • Marescaucié, traité comme les individus arrêtés par les soldats de la maréchaussée? II, 166.
  • Matère, matière. I, 69.
  • Matheolet. Le livre de Matheolus, poëme de Jean Le Febvre dirigé contre les femmes. I, 232. La Sale en parle dans les Quinze joyes de mariage.
  • Matte, triste. «Une sure et matte chère.» I, 208.
  • Mauvaistié, méchanceté, condition d'une chose mauvaise. II, 161.
  • Meffait présent, flagrant délit. I, 268; II, 94.
  • Meiser, penser, réfléchir. I, 8.
  • Membre à perche, membre viril. I, 70.
  • Menestrielz, musiciens, ménétriers. I, 157.
  • Merci. «Obtenir le don de merci d'une dame», obtenir ses dernières faveurs. II, 22.
  • Mercier, remercier. I, 19.
  • Mercque, marque. II, 155.
  • Mercy, grâce. II, 121.
  • Meriter, récompenser. I, 71.
  • Merveilleux, méchant. I, 220.
  • Merveilleuse, méchante, acariâtre. I, 45.
  • Meschef, accident, malheur. I, 18. «A quelque meschef que ce fust.» I, 156; II, 7.
  • Meschief, faute. «Si en feray tout seul le meschief.» II, 223.
  • Meschine, servante. I, 91.
  • Meschinette, petite servante. II, 240.
  • Mescroire, soupçonner. I, 23.
  • Meshuy, jamais. I, 8, 161.
  • Meshuy. Aujourd'hui. «Si vous prie que ayez patience meshuy, et demain je besoigneray à vous.» I, 48. Voy. II, 149.
  • Mesmes, soi-même, «Et que pour mieulx besoigner, il y vouloit mesmes aller.» II, 116.
  • Mesnager, s'occuper du ménage. I, 6.
  • Mestier, besoin. I, 21, 140.
  • Mestrier, maîtriser, gouverner. I, 151.
  • Metes, limites. I, 63.
  • Meures, mûres. «Etre rechassé des meures», être repoussé avec perte. I, 95; II, 93.
  • Mignon, beau, agréable. «Et entre les aultres nostre gentilhomme, qui mignon se povoit bien nommer.» I, 57.
  • Minot, cachette, petit trésor, petite mine d'argent. «Et si vous avez quelque minot d'argent à part...» II, 95.
  • Mitaine. Prov.: «Plus gay que une mitaine.» I, 265.
  • Molin, moulin.
  • Mommeries, mascarades. II, 21.
  • Mommeur, homme masqué, qui fait des mommeries. II, 200.
  • Moncelet, petit monceau. II, 181.
  • Monstre, montre, revue. «Etre à monstre», être passé en revue. (I, 84).
  • Monter. «Monter sur son chevalet», se mettre en colère. II, 161.
  • Montouer, montoir, borne qui servoit pour monter à cheval. I, 290.
  • More, mûre. II, 155.
  • Morse, amorce. «Pour voir s'il ne reviendroit point à la morse.» II, 156. Peut-être falloit-il imprimer l'amorse.
  • Mortaigne. «Aller à Mortaigne», mourir. II, 133.
  • Moult, beaucoup. II, 169.
  • Mourir sur bout, sécher sur pied. I, 151.
  • Mousche, mouche. Prov.: «Luy qui cognoissoit mousche en laict.» I, 95.
  • Mousseau, ragoût, sauce. II, 46.
  • Moustarde. Prov.: «Plus fine que moustarde.» II, 128.
  • Moustier, couvent. I, 36.
  • Moyen, chose située entre deux autres. «La maison du curé tenoit à la sienne sans moyen.» II, 164.
  • Muableté, inconstance, disposition au changement. II, 228.
  • Mucer, musser, cacher. II, 117.
  • Musnier, meunier.
  • Musser, cacher. II, 180.
  • Mutemacque, mutinerie, rebellion. II, 245.
  • Mye, nullement. I, 273.
  • N',  ni. II, 232.
  • Nataulx, jours solennels. «Quatre foiz l'an, c'est assavoir, à quatre nataulx, vous devez confesser.» I, 201. Voy. Du Gange, vo Natalis.
  • Nave, navire. I, 105.
  • Navrer, blesser. II, 159.
  • Navyeur, marin, navigateur. II, 228.
  • Ne, non plus. «Je vous requier que nous ne tenons compte d'elles ne qu'elles font de nous.» II, 39.
  • Néanté, néant. «Il la veult trop bien tancer et luy dire la lascheté et néanté de son cœur.» II, 23.
  • Nen, non. II, 95.
  • Nenny, non.
  • Nesq'un, non plus qu'un. II, 158.
  • Nesun, nesung, aucun. I, 214.
  • Nichil, rien. «Nichil au doz», vieux terme de procédure: néant au dossier. I, 107.
  • Noeve (?). «Belle et gente et gracieuse estoit au temps qu'elle fut noeve.» II, 5.
  • Noise, bruit, tapage. I, 92.
  • Noiseux, querelleur, entreprenant. I, 131.
  • Nonchalloir, négligence, indifférence. II, 155.
  • Nonne (Basse), trois heures après midi. II, 148.
  • Notaire. Être le notaire d'une chose, y assister, en être témoin. I, 127, 154.
  • Nou, nage. II, 35.
  • Nouvel (De), nouvellement. II, 161.
  • Nouvelleté, nouveauté. II, 47.
  • Nuncier, annoncer. I, 115.
  • Obstant, nonobstant. II, 115.
  • Oder, fatiguer. «Se oda et tanna.» II, 228. Voy. Hodé.
  • Œufs. Prov. Voy. Beurre.
  • Oez, entendez. II, 115.
  • Offerende, offrande. «Il alloit devant eulx à l'offerende.» Il étoit le préféré. I, 144.
  • Oignemens, onguents. I, 12.
  • Oncques, jamais.
  • Orde, sale, grossiere. «Une orde excusance.» I, 157.
  • Ordoyer, salir, souiller. II, 95.
  • Ores, maintenant. II, 40.
  • Orinal, vase à uriner. I, 111.
  • Orphenin, orphelin. I, 106.
  • Orra, entendra. II, 33.
  • Orrez, entendrez. II, 164.
  • Ostel, maison.
  • Ostellerie, nom de lieu. I, 192, 252.
  • Ou, avec.
  • Oustillé, garni d'instrument naturel. II, 84.
  • Ouvrant, travaillant. II, 202.
  • Ouvrer, travailler.
  • Ouvrouer, laboratoire. Est dit de la partie naturelle d'une femme. II, 117.
  • Oye, ouïe. I, 128.
  • Pain. «Tenoit à pain et à pot une donzelle belle et gente», l'entretenoit. II, 128.
  • Parachever, terminer, accomplir. II, 13. On rencontre souvent dans ce livre cette syllable explètive par, qui indique l'achévement, la perfection. Voy. les mots ci-après.
  • Paraccomplir, accomplir. II, 91.
  • Paraffoler, affoler, martyriser complétement. I, 110.
  • Parbondy, bondi, sauté. II, 131.
  • Parceurent, aperçurent. I, 114.
  • Parchon, partage. II, 120, 193.
  • Pardedans (En son), intérieurement, à part soi. I, 242, 259.
  • Pardehors, extérieur, mine, apparence. I, 258.
  • Paremens, vêtements, parures. II, 242.
  • Parentage, parenté. II, 211.
  • Parestoit, étoit complétement. II, 112.
  • Parface, accomplisse. I, 249.
  • Parfait, achévement. «Mais du parfait, nichil!» I, 170.
  • Parfin (En la), à la fin. II, 94.
  • Parfond, profond. I, 121.
  • Parforcer, forcer complétement. I, 40.
  • Parfournir, compléter. II, 34.
  • Parlement, discours, conversation. I, 234.
  • Parmentier, passementier. II, 198.
  • Paroultrer, passer outre complétement, accomplir. I, 132.
  • Partement, départ. I, 86.
  • Partissons, partagions. II, 119.
  • Partuer, tuer tout à fait. I, 112.
  • Party, partagé, pourvu. I, 228; II, 145.
  • Pasque (Blanche), le jour des Rameaux. II, 182.
  • Pasques communiaux, le jour de Paques. II, 183.
  • Pasques flories, les Rameaux. II, 182.
  • Passe route, expert, routier. «Tout ce que bon et sage chien doit et scet faire il estoit le passe route.» II, 205.
  • Passionner, souffrir. II, 203.
  • Paste, prov. «Porter la paste au four.» I, 288.
  • Pastoure, conductrice d'un troupeau. Est dit d'une abbesse. I, 119.
  • Patars, sorte de monnaie. II, 157.
  • Patoys, langage de paysan. «Et les servit grandement en son patoys à ce disner.» I, 112.
  • Paulmé, pâmé. II, 100, 113.
  • Paumoison, pâmoison. I, 108.
  • Peche, pièce. I, 2.
  • Péché. Etre mis avec les péchés oubliés (I, 148), être complétement oublié.
  • Peleterie, mauvaise situation. «Il ronge son frain aux dens et tout vif enrage quand il se voit en celle peleterie.» I, 156.
  • Pennes, pièces de drap. «Pluseurs pennes entières et de très bonne valeur.» II, 95.
  • Pensemens, pensées, soucis. II, 226.
  • Penultime, avant-dernier. II, 248.
  • Percevant, adroit, pénétrant. II, 140.
  • Percevoir, apercevoir. II, 9.
  • Perchant, bâton, perche; pris pour membre viril. II, 204.
  • Percha, perça. II, 217.
  • Perilleux, dangereux. I, 131.
  • Pertuiser, percer. II, 14.
  • Pertus, trous. I, 178.
  • Phisicien, médecin. I, 11.
  • Pie, boisson. «En pluseurs religions y a de bons compaignons à la pie et au jeu des bas instrumens.» II, 201. On disoit aussi pier, boire; piot, vin; croquer la pie, boire.
  • Pieça, il y a longtemps, il y a pièce de temps. I, 3.
  • Piez, pieds. «Vous ne saulterez jamais d'icy sinon les piez devant.» C'est-à-dire: Vous ne sortirez que mort. I, 197.
  • Pigne, peigne. «Trousser pignes et miroirs» (I, 123), faire ses paquets.
  • Piller, prendre. II, 81.
  • Plaisance, volonté, fantaisie. I, 65.
  • Plastrier, homme grossier, malpropre. «Les villains plastriers.» II, 216.
  • Pléger, tenir tête à quelqu'un qui boit à notre santé. I, 176.
  • Plorerie, action de pleurer. I, 116.
  • Pluc, ce qu'on a recueilli. Cueillir se dit en allemand pflücken. En gascon, manger un raisin grain à grain se dit pluca. Cotgrave donne le mot plucquoter... «Car du pluc et butin qu'elle avoit à la force de ses reins conquesté avoit acquis vaisselle et tapisserie.» II, 136.
  • Poisson. «S'en revint devers son maistre à tout ce qu'il avoit de poisson, car à char avoit-il failli», est dit d'un entremetteur. I, 130.
  • Porcionner, faire des parts, partager. II, 120.
  • Posterne, poterne. I, 1.
  • Pot (A pain et à). Voy. Pain.
  • Pou, peu.
  • Pourchaz, recherche, diligence. I, 133, 267.
  • Poursuir, poursuivre. I, 96.
  • Premisse, discours, prologue, exorde. I, 129, 274.
  • Prenist, prît. II, 177.
  • Preschement, sermon, remonstrance. I, 95.
  • Preu, profit, avantage. «Bon preu vous fasse!» I, 189.
  • Prins, prov. «Cy prins cy mis.» II, 134, 149. On dit aujourd'hui: «Sitôt pris, sitôt pendu.»
  • Prinsault, prime abord. I, 3.
  • Procurer, plaider, intercéder, servir de procureur. I, 166.
  • Publicqueroit, divulgueroit, publieroit. II, 233.
  • Puis, après. I, 178.
  • Puis, dès. I, 195.
  • Pute, méchant, pervers. Des deux genres. I, 235.
  • Puterie, mauvaise vie, débauche. I, 288.
  • Putier, débauché. I, 4.
  • Quaresme. Prov. «Il sembloit qu'ils voulsissent tuer Quaresme.» II, 178. C'est-à-dire: Ce sont des gens déterminez, qui tueroient tout, même Carême, tout maigre qu'il est.
  • Quaresmeaulx, jours maigres. I, 212.
  • Quans, combien de. I, 92.
  • Que, comme. «Et s'asseura que celuy qui en beaucop de perilz s'estoit trouvé.» II, 28.
  • Querelle, recherche, demande, prétention. I, 233, 258.
  • Querir, vouloir, chercher. «Je ne vous le quier jà celer.» I, 186. Voy. I, 222; II, 11.
  • Quesnoy (Le). I, 134.
  • Quetaille (?). «Se tenoit comme une droite statue ou ydole en quetaille.» I, 175.
  • Quibus, argent. II, 136.
  • Quis, cherché. I, 163.
  • Quitter, abandonner, céder. I, 68.
  • Quoniam, parties naturelles de la femme. II, 135.
  • Racaner, braire. II, 143.
  • Racoler, faire l'acte amoureux. I, 113.
  • Radde, vif, alerte. «Radde du pyé», agile. I, 302.
  • Radoubter, radoter. I, 181.
  • Raffroigné, refrogné. II, 86.
  • Rafrescher, rappeler, renouveler, rafraîchir. I, 289.
  • Raherce (?). I, 183.
  • Raidz, rayons. I, 105.
  • Ramentevoir, rappeler. I, 121.
  • Ramonné. Prov. «Se trouver en place ramonnée» (I, 67), en lieu propre, favorable.
  • Ramponner, quereller, gronder. I, 176.
  • Raroit, auroit de nouveau. I, 21.
  • Rasiere, mesure de blé. I, 270.
  • Rastelée, râtelée, ce qu'on sait, ce qu'on pense d'une chose. «Compta sa rastelée à madamoiselle.» II, 128.
  • Rasure, mesure de blé. I, 268.
  • Rataindit, ratteignit. I, 157.
  • Rate, un peu. Espagnol, rato. «A rate de temps.» I, 180.
  • Ratelée. Voy. Rastelée.
  • Ratoille, réattelle. I, 54.
  • Reboutement, action de rebuter, repousser. I, 251; II, 98.
  • Rebouter, remettre. I, 292.
  • Rebouter, rebuter, repousser. I, 70.
  • Recaner, braire. II, 59.
  • Receveur, celui qui reçoit des coups. «Il compteroit avecques luy et le feroit receveur oultre son plaisir.» II, 115.
  • Rechap, action de réchapper d'un danger. «Elle est morte, et n'y a pas de rechap.» I, 111.
  • Reclusage, ermitage. I, 75.
  • Recors (Etre), se souvenir. II, 183.
  • Recréant, las, lâche. «Plus que tous aultres recréant et las.» I, 7, 61; II, 104, 225.
  • Refroidement, refroidissement. II, 42.
  • Rehouser, remettre les bottes. I, 133.
  • Religion, couvent. II, 201.
  • Remanent, restant, demeurant. II, 192.
  • Rembatre, revenir sur ses anciens errements (?). I, 127.
  • Renard, fin, rusé. I, 70.
  • Renchoir, retomber. II, 15.
  • Rencouler, roucouler. II, 180.
  • Rendy (?). «Car la mercy Dieu elle avoit rendy et couru païs plus tant que du monde ne savoit que trop.» II, 128.
  • Rengreger, aggraver. II, 91.
  • Renuré, profondément gravé. I, 231.
  • Repaire, visite, fréquentation. II, 115.
  • Repatrier. I, 262.
  • Reprinse, repréhension. «Pour bien se venger de luy à son aise et sans reprinse.» I, 27.
  • Reproché, reprouché, blâmé, décrié, diffamé. I, 31, 118, 300.
  • Requerre, requérir. I, 118.
  • Requestes. «Passer les requestes de quelqu'un», lui accorder ce qu'il demande. «Elle passa legerement les requestes de ceulx qui mieulx luy pleurent.» II, 5.
  • Rescourre, secourir. I, 291.
  • Rescripsit, écrivit en réponse. I, 144.
  • Reserrer, refermer. I, 186.
  • Resne, rêne. Employé dans le sens de membre viril. I, 230.
  • Retollir, reprendre ce qu'on avoit donné. I, 99.
  • Retour, retraite, habitude, amourette. «J'ay ung retour en ceste ville dont je suis beaucop assoté.» I, 184.
  • Retourner, retour. II, 110.
  • Revirer, retourner. I, 178.
  • Reut, eut de nouveau. I, 14.
  • Ribauld, homme de mauvaise vie. I, 4.
  • Ribauldelle, ribaude, femme de mauvaise vie. II, 215.
  • Rien, chose. «La rien en ce monde dont la présence plus luy plaist.» I, 121.
  • Rigoler, railler. Verbe actif. I, 176.
  • Rire. Prov.: «Qui à ceste heure l'eust veu rire, jamais n'eust eu les fièvres.» I, 133.
  • Risit, rit. II, 22.
  • Riz, indiqué comme une marchandise dont l'Angleterre fournissoit les autres pays. I, 101.
  • Roe, roue. I, 134.
  • Rompture, rupture. I, 77.
  • Ronteure, rupture. I, 181.
  • Rote, troupe. I, 34.
  • Roucyner, rousyner, faire l'acte amoureux. I, 111, 280.
  • Rouil, rouille. II, 177.
  • Routier (?). «Son mary avoit demouré deux ou trois jours routiers.» II, 178.
  • Ruer, jeter. II, 176.
  • Ruse (?). «Car il estoit ferme en la ruse que d'estre confessé.» I, 39.
  • Sacqua, tira. II, 219.
  • Saillir, sortir. II, 12.
  • Saillir sus, se lever vivement. II, 43.
  • Saillir avant, s'avancer vivement. I, 117.
  • Sains, saints. «La devocion que monseigneur avoit aux sains de sa meschine de jour en jour croissoit.» I, 91.
  • Saint Anthoine. «Saint Anthoine arde la louve!» I, 231.
  • Saint Nicolas de Warengeville. I, 141.
  • Saint Pol (comte de). Voy. Walerant. I, 128.
  • Saint Remy, époque d'échéance. I, 269.
  • Saint Trignan. I, 29.
  • Sainte Goule, sainte Gudule. II, 15.
  • Salade, sorte de casque. I, 28.
  • Sanchié (?) «Son mary retourna de la ville comme sanchié de son courroux, pource qu'il s'en estoit vengé.» I, 243.
  • Sané, guéri. II, 174.
  • Sangles, simples. II, 247.
  • Sara, saura. II, 244.
  • Sauldrez, sortirez, sauterez. II, 124.
  • Sault, sort. I, 92.
  • Saulterez, sortirez. I, 197.
  • Saulx, saule. «Charbon de saulx.» I, 43.
  • Sauvement, salutairement. «Si sauvement preservé.» II, 105.
  • Sayoit, scioit. I, 130.
  • Sçaras, sauras.
  • Scera, saura. I, 60.
  • Se, ce.
  • Séans, céans, ici. I, 6.
  • Seaumes, psaumes. I, 105.
  • Seclus, exclu. I, 192; II, 236.
  • Semonce, invitation. I, 169.
  • Semonnez, invitez, engagez. I, 176.
  • Semons, invité. II, 34.
  • Senestre, gauche.
  • Sengloutir, jeter des sanglots. II, 245.
  • Sente, route, sentier. I, 139.
  • Sentement, sentiment. II, 131.
  • Sequestre. «Et si emporte la verge qu'elle luy donna, qu'il avoit desja mise en main sequestre.» I, 155.
  • Serain, soir. I, 38.
  • Sercher, chercher. I, 23.
  • Serre. Prov.: «Elle ne tenoit serre non plus qu'une vieille arbaleste.» I, 295.
  • Ses, ces.
  • Seuffrir, souffrir. I, 226.
  • Si, oui, oui certes. «Le musnier demanda à madame se elle l'avoit à l'entrée du baing, et elle dit que si.» I, 24.
  • Si que, jusqu'à ce que. I, 131.
  • Siet, est assis, situé. I, 114.
  • Signifiance, signification. II, 13.
  • Simplesse, simplicité, bêtise. II, 181.
  • Singe. Prov.: «Pour qui elle ne feroit néant plus que le singe pour les mauvais.» I, 130.
  • Soef, doucement. I, 100.
  • Soichons, compagnons. II, 227.
  • Solaz, plaisir, réjouissance. I, 159.
  • Solier, soulier. Prov.: «Doubtant qu'il ne soit pas bien solier à son pié.» I, 83.
  • Sonnet, pet. I, 14, 100.
  • Sorner, se moquer. II, 46.
  • Souef, doucement. I, 178.
  • Souffisaument, suffisamment. I, 19.
  • Souffle-en-cul, nom donné à l'acte amoureux. I, 279.
  • Souffrance, patience. Employé ironiquement, II, 209.
  • Soulas, plaisir, réjouissance. II, 232.
  • Souloir, avoir coutume. I, 284.
  • Souprins, surpris. I, 75.
  • Sourdoient, provenoient. II, 137.
  • Sourdre, naissance, origine. «Quelque menace qui sourdre prist.» II, 115.
  • Sourvenistes, survîntes. I, 269.
  • Souvyne, sur le dos. I, 131.
  • Subtilier, chercher des détours. II, 187.
  • Sure, aigre. «Une sure et matte chère.» I, 208.
  • Sus, chez. II, 50, 54.
  • Sus (En), loin. I, 126.
  • Susciter, réveiller, ranimer. II, 186.
  • Suspeçonner, soupçonner. I, 8.
  • Suspeçonneux, soupçonneux.
  • Suspicion, soupçon. I, 267; II, 118.
  • Suspicionné, soupçonné. II, 114.
  • Suyr, suivre. II, 106.
  • Taillé de, fait, disposé pour..., apte à..., en passe de... I, 125; II, 193.
  • Talebot, Talbot. I, 32.
  • Tamburch, bruit. II, 176.
  • Tancer, gronder, quereller, parler. «Et je m'en iray en ma chambrette là derrière tancer à Dieu.» I, 249.
  • Tanné, lassé, fatigué. II, 228.
  • Tantes, tant de. II, 109.
  • Tapinage (En), en cachette, en tapinois. I, 130.
  • Tas. «Monter sur le tas pourvoir plus loin», est dit d'un homme qui caresse une femme. II, 131.
  • Tasseau, pièce. I, 299.
  • Tauxé, taxé. I, 269.
  • Taye, grand'mère, ayeule. I, 302.
  • Teins, veillé. I, 206. Voy. Tenir.
  • Tendreur, tendresse. I, 154.
  • Tenir sur quelqu'un, le surveiller. «Car je tendray sur luy.» I, 212.
  • Tenser, tancer, quereller. I, 30.
  • Tente, instrument de chirurgie, appareil. «Et d'un tel oustil fit il la tente pour querir et pescher le dyamant.» I, 25.
  • Termes (Mis en), proposé, convenu. II, 52.
  • Terminé (?). «Ensuyvant le terminé propos.» II, 159.
  • Terrien, terrestre. I, 194.
  • Tiers, Tierce, troisième.
  • Tollu, enlevé. II, 131.
  • Toust, ôte. I, 211.
  • Train. «Tirer au train de derrière» (I, 126), être enclin à l'amour.
  • Trainnée, traynée, traynnée, intrigue, secret. Allusion à la traînée de poudre d'une mine. II, 59, 113, 117. On dit aujourd'hui: «Eventer la mine.»
  • Transmuer, changer. I, 138.
  • Traveiller, fatiguer. «Il n'est jà mestier que vous traveillez plus monseigneur.» I, 21.
  • Traynée, traynnée. Voy. Trainnée.
  • Trespasser, passer outre. I, 137.
  • Trestous, tous. II, 124.
  • Triumphe, joie, allégresse. I, 11.
  • Tromper (Se) de quelqu'un, s'en moquer. I, 207.
  • Tyne, tonneau. I, 238.
  • Unes, une paire de. «Unes brayes qui pendoient.» II, 13.
  • Ung (A l'), également, d'une manière unie. I, 215.
  • Va-luy-dire, messager d'amour. I, 130.
  • Vaissel, vaisseau, vase. I, 14.
  • Variableté, condition de ce qui change facilement. II, 228.
  • Véez cy, voici.
  • Véez la, voilà.
  • Veil, volonté, vouloir. I, 145.
  • Veille, veux. I, 136.
  • Veillé, éveillé, vif, rusé. «Son varlet, qui estoit ung galant tout veillé.» I, 96.
  • Veillote, petite vieille. I, 76.
  • Vensist, vînt. I, 296.
  • Verge, bague, anneau. I, 23.
  • Veyer (?). II, 126.
  • Viaire, visage. II, 174.
  • Viander, manger. II, 79.
  • Villanner, injurier, décrier, offenser grièvement de paroles. I, 30.
  • Villanie (Dire), dire des injures. I, 163, 245; II, 24.
  • Virer, tourner. I, 225.
  • Vireton, bâton. II, 205.
  • Vitailles, victuailles. II, 118.
  • Viveux, vif, éveillé. I, 67.
  • Voer, jurer, faire vœu. II, 13.
  • Voirré, garni de vitraux, de verrières. II, 35.
  • Voirrières, verrières, vitrages. I, 75.
  • Voulsist, voulût.
  • Vuider, quitter le lieu où l'on est. II, 116.
  • Walerant (Comte). I, 128.
  • Wrelenchem, près de Lille. I, 128.
  • Ydoine, propre, approprié, convenable, suffisant. S'écrit ordinairement idoine. II, 244.

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