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Les endormies

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L’Heure du Mahdi

Le mot de la fin…

Notre lendemain seul le connaîtra.

Ce soir, notre mémoire rythme la dernière strophe d’un chant de Gœthe.

« Et puisque derrière chaque chant du poète, nous exigeons qu’une moralité gravement chemine, je veux aussi selon cette voie traditionnelle vous avouer ce que ces vers démontrent : En le chemin de la vie nous faisons plus d’un faux pas, et pourtant dans ce monde insensé, il est deux leviers bien puissants sur les actions humaines : à coup sûr le Devoir, — mais encore plus, l’Amour !… »

Noura, alors que tu sombres avec l’effroi de ton erreur, dans le naufrage de ta volonté, voici naître pour toi un amour qui te sauve, voici pour ton front l’épaule du Mahdi…

Tu avais su te faire un devoir ; tu l’avais déifié. Les épreuves tragiques te firent douter de sa sublimité et tu devenais telle une épave errante, une âme sans dieu. Le Messie paraît qui te rend une croyance.

Pour nous, si nous n’approuvons pas le devoir et les dieux de notre prochain, si nous n’aimons pas votre zèle, nous voulons cependant nous incliner devant tout autel qu’érigèrent la sincérité et le noble désir du mieux.

C’est pourquoi nous n’aurons point de blâme pour toi, Mahdi, annonciateur d’un autre matin, pour toi, Noura, crucifiée moralement à cause de ta doctrine, toi qui vas ressusciter pour une mission encore.


Dans l’ombre de la maison où passent des revenantes aux longs yeux, aux petites mains brunes et tatouées, Noura murmure :

— Grâce pour moi, ô mes mortes et mes vivantes. O mes Endormies, si je vous réveille pour la souffrance, grâce, car c’est aussi pour un bonheur possible dans l’avenir. Les premiers convertis sont lapidés. Ceux qui suivent n’endurent que des paroles ; puis, tout le peuple connaît la vérité ; la joie vient pour tous avec la lumière. Grâce pour tous les efforts qui appelleront la clarté.


Dans la ruelle musulmane bruit l’écho des pas du Mahdi…


Claude Hervis, au désert, fleurit de dahnouns et de zeïtas le blond sépulcre de Mouni !

Le mot de la fin… Notre lendemain seul le connaîtra. Et nous préférons ne pas l’entendre, nous qui portons le poids secret, les encens savoureux et la volupté d’une âme ancienne. S’il te plaît, ô Destin, quand parleront les lointains avenirs, nous serons les morts d’un autre passé.

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