Les pornographes sacrés: La confession et les confesseurs: Appendice: Pieuses exhortations, par Monseigneur Claret; Mœchialogie, par le R. P. Debreyne; Compendium; et les Diaconales, par Monseigneur Bouvier
SECONDE PARTIE
DU DEVOIR DES ÉPOUX
Cette seconde partie sera partagée en deux chapitres. Le premier sera consacré à l’examen de l’empêchement du mariage pour cause d’impuissance. Le second traitera des obligations spéciales des époux.
CHAPITRE PREMIER
§ I
DE L’EMPÊCHEMENT DU MARIAGE PAR IMPUISSANCE
L’impuissance est l’incapacité de consommer le mariage, c’est-à-dire d’avoir un coït qui, par lui-même, suffise à la génération.
IMPUISSANCES PERPÉTUELLE ET TEMPORAIRE, NATURELLE ET ACCIDENTELLE CHEZ L’HOMME
Trois causes produisent cette impuissance :
1o L’absence complète et absolue du pénis, de telle sorte qu’il n’y ait pas même la plus petite extrémité du membre viril, qui puisse répandre la semence même dans les parties génitales extérieures de la femme…
2o L’atrophie de la vessie ;
3o L’absence des deux testicules.
IMPUISSANCES PERPÉTUELLE ET TEMPORAIRE, NATURELLE ET ACCIDENTELLE CHEZ LA FEMME
Les causes d’impuissance chez la femme sont :
L’absence de l’utérus, du vagin, l’oblitération naturelle, congénitale et complète de ce dernier ou son excessive étroitesse résultant d’un vice de conformation des os du bassin.
Le P. Debreyne, docteur en médecine et professeur à la Faculté de Paris, avant d’entrer dans les ordres, se complaît ici dans de savantes dissertations sur toutes les causes d’impuissance : dissertations dont nous n’avons pas à nous occuper, car elles relèvent toutes exclusivement de la science médicale.
Le paragraphe II de ce chapitre est consacré aux hermaphrodites : ce paragraphe, lui aussi, n’est qu’une dissertation médicale.
CHAPITRE II
DES DEVOIRS CONJUGAUX OU DES OBLIGATIONS DES ÉPOUX
Ce chapitre sera partagé en trois articles :
Le premier aura pour objet la pétition et la reddition du devoir conjugal ;
Le second sera consacré à l’examen de l’usage du mariage, des circonstances de l’acte conjugal et des péchés qu’y commettent les époux ;
Le troisième article, enfin, traitera de la conduite du confesseur à l’égard des personnes mariées et de celles qui se disposent à entrer dans le mariage.
ARTICLE PREMIER
DE LA PÉTITION ET DE LA REDDITION DU DEVOIR CONJUGAL
Réflexions préliminaires.
L’homme doit rendre son devoir à la femme, et réciproquement l’épouse à l’époux ; la femme n’a pas la possession de son corps, mais l’homme ; de même l’homme n’a pas la possession de son corps, mais la femme. (Saint Paul.)
Qu’ils ne se le refusent pas l’un à l’autre, de peur de tomber dans de damnables corruptions, par la tentation de Satan, à cause de l’incontinence de tous les deux ou de l’un seulement d’entre eux. (Saint Augustin.)
§ I
DE LA PÉTITION DU DEVOIR ILLICITE OU DE CEUX QUI PÈCHENT MORTELLEMENT EN L’EXIGEANT
Un époux qui sait avec certitude que son mariage est nul par un empêchement dirimant quelconque, comme par exemple un empêchement d’affinité provenant d’un commerce criminel, ne peut, par aucun motif, ni demander, ni même rendre le devoir conjugal, parce qu’il commettrait une véritable fornication mortelle.
L’époux qui doute prudemment et raisonnablement de la validité de son mariage ne peut demander le devoir jusqu’à ce que, après un mûr examen, il ait déposé son doute et formé sa conscience.
Celui, dit Billuart, qui, après le mariage consommé, a fait vœu de religion ou d’embrasser les saints ordres peut demander et rendre le devoir, parce que par ce vœu il n’a contracté que l’obligation de prendre les ordres ou d’entrer en religion, s’il survit. Mais aussitôt après la mort de son conjoint, il est tenu d’accomplir son vœu. Mais s’il a fait ces vœux avant la consommation du mariage, il est tenu de le remplir avant la consommation, puisqu’il le peut licitement d’après l’hypothèse. S’il consomme le mariage, il pèche mortellement une première fois, mais ensuite il peut demander et rendre le devoir pour les raisons alléguées.
§ II
DE CEUX QUI PÈCHENT VÉNIELLEMENT EN EXIGEANT LE DEVOIR CONJUGAL.
1o Plusieurs théologiens, d’après l’autorité de saint Thomas, regardent comme une faute mortelle l’usage du coït pendant que la femme a ses règles.
Nous ne pouvons croire, cependant, malgré la grande autorité de saint Thomas, que l’acte conjugal exercé pendant l’époque des règles soit un péché mortel. Il faudrait pour cela qu’il fût prouvé expérimentalement et physiologiquement que cet acte est essentiellement infécond ou contraire à la conception.
2o La grande majorité des théologiens affirme que la pétition conjugale, dans l’état de grossesse, n’est qu’une faute vénielle, pourvu qu’il n’y ait point danger d’avortement. Mais ce danger est souvent très difficile à connaître ou à apprécier. Voici du reste, sur ce point, l’énoncé général de la science (suit une longue dissertation technique et médicale).
3o On demande si la pétition conjugale est permise les jours de fête, le dimanche et un jour de communion.
Saint Thomas répond :
L’acte matrimonial, quoique exempt du péché, cependant comme il abaisse la raison à cause de la délectation charnelle, rend l’homme inapte aux choses spirituelles ; il n’est donc pas permis de demander le devoir les jours où l’on doit plus particulièrement vaquer aux choses spirituelles… Ces jours-là on peut employer d’autres moyens pour réprimer la concupiscence, comme la prière, et beaucoup d’autres moyens de ce genre, employés par ceux qui gardent la continence perpétuelle.
Mais Sanchez est d’un sentiment contraire, et avec lui de nombreux théologiens, parce que, disent-ils, la pétition conjugale n’est défendue aux jours précités par aucun droit divin ou ecclésiastique.
On demande si celui qui a éprouvé une contamination nocturne peut communier le jour suivant.
Voici ce que répond saint Grégoire et sa décision sert de base à la pratique des confesseurs.
« Ou l’éjaculation provient d’un superflu de la nature et de faiblesse, et alors n’est pas du tout coupable ; ou d’un usage excessif des aliments, et alors elle est un péché véniel ; ou d’une pensée précédente, et alors elle peut être mortelle. Dans le premier cas, cette illusion n’est pas à craindre ; dans le second, elle n’empêche pas de recevoir le sacrement ou de célébrer les mystères, s’il y a quelque motif de le faire, comme par exemple, la circonstance d’une fête ou d’un dimanche ; mais dans le troisième cas, on doit, à cause d’une telle pollution, s’abstenir ce jour-là des saints mystères, dit saint Grégoire ; cependant, si la pollution n’a pas été mortelle dans sa cause, ou si le prêtre vraiment repentant en a été absous, et qu’il ait quelque raison de le faire, il pourra célébrer. »
§ III
DE LA REDDITION DU DEVOIR CONJUGAL ET DES RAISONS QUI EN DISPENSENT LÉGITIMEMENT
Le devoir doit être rendu sous peine de péché mortel toutes les fois qu’il est raisonnablement, sérieusement et légitimement demandé, soit expressément, soit tacitement, parce qu’il n’importe pas, dit saint Thomas, si on le demande par paroles ou par signes. Si donc une partie s’aperçoit que sa partie le demande tacitement, ou est en danger d’incontinence, elle est tenue de la prévenir.
Voici les raisons qui excusent ou empêchent de le rendre.
1o L’époux qui est moralement certain de la nullité de son mariage ne peut rendre le devoir à sa partie.
2o Si l’époux qui demande le devoir est dans un état de démence ou d’aliénation mentale, il n’y a point d’obligation à le rendre, parce qu’une telle demande n’est point un acte humain. Si la folie présentait des intervalles de lucidité, le devoir devrait alors être rendu, à moins que l’usage du mariage n’augmentât la maladie.
Quant à l’époux qui a perdu l’usage de la raison par l’ivresse, il n’y a nulle obligation à lui obéir.
Sanchez dit que le devoir ne doit pas être rendu à une femme folle et furieuse, à cause de l’avortement qu’on a toujours à craindre, à moins, ajoute-t-il, qu’elle ne soit reconnue stérile.
3o L’époux qui ne peut rendre le devoir sans exposer gravement sa santé n’y est pas tenu, car, dit l’axiome : il faut d’abord vivre et se bien porter, et saint Thomas ajoute : l’homme est tenu de rendre le devoir à sa femme pour tout ce qui tend à la génération ; sauf cependant avant tout la santé de la personne.
La femme ne pourrait se refuser à rendre le devoir à cause des grandes douleurs ou des difficultés de l’accouchement. Si néanmoins, d’après le jugement ou la décision des hommes de l’art, ou d’après l’expérience de la femme, l’accouchement ne pouvait pas se faire sans danger pour la vie, elle est dans ce cas dispensée de rendre le devoir conjugal.
4o La femme n’est pas tenue à la reddition conjugale pendant l’époque des règles…
— Il pourra quelquefois, dit Sanchez, y avoir péché mortel, si le coït devait produire une grave maladie ou une notable aggravation de maladie, comme disent saint Antonin et Sanchez…, etc. On doit craindre ce même danger, comme dit Ronc…, si le coït a lieu aussitôt après l’accouchement, c’est-à-dire le jour même ou le suivant, ainsi qu’un médecin fort expérimenté me l’a assuré.
La femme n’est pas tenue de rendre le devoir en temps d’écoulement menstruel ou d’accouchement, à moins qu’elle n’ait raison de craindre que son mari n’encoure le danger d’incontinence ; cependant si par ses prières elle ne peut l’en dissuader, finalement elle doit le rendre, parce qu’il y a toujours à craindre le danger d’incontinence, ou une querelle, ou quelque autre inconvénient. C’est l’avis de saint Bonaventure et de beaucoup d’autres d’après Sanchez.
Qu’on doit excuser de l’obligation de rendre le devoir, dit Sanchez, une mère allaitant son enfant, et assez pauvre pour ne pas pouvoir payer une nourrice, et qui sait que ses mamelles seront à sec si elle conçoit de nouveau, ou que son lait sera très pernicieux à son enfant.
5o L’époux n’est pas tenu de rendre le devoir à sa partie qui, par le fait d’un adultère, aurait perdu le droit de le demander.
6o Une des parties n’est pas tenue de rendre le devoir lorsqu’il est demandé d’une manière contraire à l’honnête exigence de la raison.
7o Il n’est pas permis de refuser le devoir, dans la crainte d’avoir trop d’enfants…
Tel n’est pas cependant l’avis de Sanchez.
… — J’avouerai cependant, écrit-il, qu’il n’y a pas péché mortel à refuser le devoir pour ce motif, quand il n’y a pas danger d’incontinence dans l’autre époux, et que les parents ne peuvent nourrir tant d’enfants. En effet, un grand inconvénient excuse de l’obligation de payer les autres dettes de justice, et personne n’est tenu de restituer à son grand détriment. En outre, l’époux n’est pas tenu de rendre le devoir, s’il y a crainte probable de danger ou de détriment pour les enfants déjà nés ; danger qui serait cependant vraisemblable, si des parents destitués des moyens de nourrir plus d’enfants augmentaient leur famille… Bien plus il n’y aura pas même faute vénielle à refuser le devoir dans ce cas. (Liv. IX, disp. 25, no 3.)
Nous croyons que cet avis de Sanchez n’est pas sûr dans la pratique.
§ IV
DES ÉPOUX QUI PÈCHENT MORTELLEMENT EN RENDANT LE DEVOIR CONJUGAL
1o On pèche mortellement à rendre le devoir conjugal lorsque la pétition se fait dans un lieu sacré ou public, ou devant les enfants et domestiques (ce qui n’arrive guère), ou avec danger d’avortement, ou grave danger pour la santé de l’un ou de l’autre, ou avec le danger évident de répandre le sperme hors du vase, quand le coït pourrait se faire autrement ; ou en s’accouplant d’une façon hors nature, sodomique, etc. Il est certain que dans tous ces cas, celui qui rend le devoir pèche aussi mortellement, parce qu’il participe au crime et en contracte la malice.
2o Ce serait également une faute mortelle que de rendre le devoir à la partie atteinte d’une impuissance perpétuelle.
3o … Si l’homme était tellement décrépit, etc. (suit une citation de Bouvier, que nos lecteurs trouveront à sa place dans nos extraits des Diaconales.)
4o On demande si l’on peut, sans péché mortel, rendre le devoir à celui qui le demande, bien qu’il ait fait vœu de chasteté ou qu’il se propose un but criminel.
Les uns prétendent qu’il y a péché mortel… les autres, au contraire, prétendent, — et c’est le plus grand nombre, — que la partie peut rendre le devoir.
§ V
DES ÉPOUX QUI PÈCHENT VÉNIELLEMENT EN RENDANT LE DEVOIR
Quand l’usage du mariage est péché véniel pour l’époux qui demande le devoir par exemple, comme parce qu’il le demande pour le seul plaisir, il semble qu’il y a quelque faute à le rendre, s’il n’y a aucune raison de le faire, parce qu’alors on fournit la matière d’un péché véniel ; mais une pétition absolue est une raison suffisante et légitimant la reddition ; car il est à craindre que le refus ne fasse naître des rixes, haines, scandales, péril de pécher gravement, etc…
ARTICLE DEUXIÈME
DE L’USAGE DU MARIAGE, DES CIRCONSTANCES DE L’ACTE CONJUGAL ET DES PÉCHÉS QU’Y COMMETTENT LES ÉPOUX
§ I
DE L’USAGE DU MARIAGE ET DES PÉCHÉS VÉNIELS QU’Y COMMETTENT LES ÉPOUX QUANT AUX MOTIFS
1o L’acte conjugal exercé pour le seul plaisir est exempt de toute faute même vénielle.
2o L’usage du mariage est-il permis pour éviter l’incontinence ?
Tous les théologiens conviennent qu’il est permis de rendre le devoir à l’époux qui le demande, sans autre raison que celle d’éviter l’incontinence.
« A cause de la fornication, que chacun ait son épouse, et chaque femme son mari… Ne vous trompez pas l’un l’autre, si ce n’est par un consentement mutuel pour un temps, pour vaquer à l’oraison, et retournez-y de nouveau, de peur que Satan ne vous tente à cause de votre incontinence ; je dis cela par indulgence, et non par commandement, car je voudrais que vous fussiez tous comme moi. » (I Corinth. 4.)
L’époux qui désire que l’acte conjugal soit stérile pèche selon l’opinion de tous les théologiens, mais seulement d’une manière vénielle.
Cependant Sœttler s’exprime ainsi :
Si quelqu’un désire n’avoir pas d’enfants, d’après un grand nombre de théologiens il pèche mortellement, parce que ce désir répugne gravement à la fin du mariage… Selon d’autres beaucoup plus nombreux, ce désir, si on s’arrête là, s’il est purement spéculatif, et si l’on ne fait rien pour empêcher la génération, est seulement véniel, mais dangereux, dit Vernier, comme tendant au péché mortel.
Tout peut donc se résumer en ces quatre paroles de Collet : « La copulation exercée pour toute autre fin que celle de la génération ou de la justice est toujours un péché. » Cette proposition est d’ailleurs fondée sur ce passage de saint Augustin :
« Le coït nécessaire pour la génération n’est pas coupable… Mais celui qui va au delà de cette nécessité n’obéit plus à la raison, mais au libertinage. Et cependant ne pas l’exiger, mais le rendre à son époux, de peur qu’il ne pèche gravement en forniquant, est une nécessité pour la personne conjugale. » (Manuel des bons époux.)
§ II
DES CIRCONSTANCES OU L’USAGE DU MARIAGE EST GÉNÉRALEMENT PÉCHÉ MORTEL QUANT A L’ACTE, CONFORMÉMENT A L’OPINION DE TOUS LES THÉOLOGIENS
1o D’après tous les théologiens, il y a péché mortel si quant à la position le coït n’est pas naturel, et s’il y a grave danger d’effusion en dehors du vase, soit en demandant, soit en rendant le devoir : « Mais, en dehors de ce danger, demander ainsi ou rendre le devoir sans nécessité est un péché seulement véniel, parce qu’une telle inversion n’est pas essentielle et n’est pas opposée à la génération. Cependant elle doit être sévèrement blâmée. S’il y a nécessité d’agir ainsi, comme par exemple à cause de la grossesse, ou parce que le corps ne peut souffrir une autre position, il n’y aura aucun péché, pourvu qu’il n’y ait pas danger probable d’effusion en dehors du vase. »
2o Les époux pèchent mortellement, quand, comme nous le verrons mieux plus bas, ils excitent volontairement une semblable effusion, ou même commencent d’une façon sodomitique le coït avec l’intention de le consommer selon les règles ; car un tel acte, désordonné, tendant de soi à l’effusion hors du vase, doit être considéré comme une sodomie commencée. C’est l’avis de Sanchez, S. Liguori, Bouvier et beaucoup d’autres. Il faut ajouter que généralement les époux pèchent mortellement, s’ils ne rougissent pas d’exercer des actes très honteux et répugnant gravement à la nature et à l’honnêteté (tels que la masturbation labiale, etc.)
3o De même pèchent mortellement les époux qui de quelque façon que ce soit empêchent la génération, ou s’exposent, comme dit Collet, au danger de rejeter le fœtus par voie d’avortement, ou de le blesser gravement.
4o L’homme pèche mortellement, dit encore le savant Collet, quand il se retire et ne consomme pas l’évacuation de la semence dans le vase. De même la femme si elle élimine à dessein la semence ou s’efforce de l’éliminer, ou répand à dessein sa propre semence.
Saint Antonin, saint Liguori, etc., etc., affirment qu’il n’y a pas péché mortel, si la copulation une fois commencée, les époux arrêtent l’effusion, c’est-à-dire, si avant l’effusion, l’homme se retire du consentement de la femme, pourvu qu’il n’y ait pas danger d’effusion au dehors du vase, ou de pollution chez l’un ou l’autre époux. Plusieurs autres, comme les RR. PP. Navarre, Ledesma, Azor, etc., pensent qu’il y a alors péché mortel, parce qu’on empêche la génération pour laquelle la copulation est faite, et qu’ainsi l’acte conjugal est frustré de sa fin essentielle, qui est la génération.
Saint Liguori demande au cas où l’homme a déjà éjaculé : si la femme pèche en se retirant ou si l’homme pèche mortellement en n’attendant pas la sémination de la femme.
Voici notre réponse : la quasi-spermatisation de la femme ne paraissant pas nécessaire à la génération, nous ne voyons pas trop la solidité des raisons qu’on apporte en faveur du péché mortel, parce que la matière qui forme la spermatisation de la femme n’est point une véritable semence, mais de simples mucosités vaginales et utérines… La femme, d’après tous les physiologistes modernes de l’Europe et du monde entier, est incapable d’une véritable sécrétion séminale ou spermatique ; elle n’a point d’organe spécial pour cela. Elle fournit seulement l’ovule ou le germe qui vient de l’ovaire, plus ordinairement une certaine quantité de mucosités ou d’humeurs lubréfiantes, qui sont l’effet de l’organisme érotique et qui sont propres à faciliter ou à compléter l’acte conjugal, mais qui ne paraissent pas du tout essentielles à la fécondation.
De ce fait d’union sexuelle accomplie du côté de la femme avec dégoût, répugnance, une sorte d’horreur, malaise et souffrance physique, il s’ensuit que, dans ces cas de coïts froids et insensibles, il n’y a point de sémination prolifique dans le sens que l’entendent les théologiens, parce que, dans un tel acte, il est physiologiquement impossible qu’une effusion de sperme s’accomplisse sans sensation érotique ou voluptueuse de la part de la femme, comme du côté de l’homme. Donc la sémination féminine n’est pas nécessaire à la conception, puisque celle-ci peut s’accomplir sans elle par le seul fait de la sémination virile.
Les théologiens demandent :
Est-il permis à la femme, quand l’homme s’est retiré après la sémination, de s’exciter aussitôt elle-même par des attouchements à sa propre éjaculation pour se procurer un soulagement nécessaire ?
Réponse : Nous pensons que cela n’est pas permis à la femme, parce que cette action solitaire n’a plus aucun but physiologique dans l’ordre de la procréation ni aucune relation avec l’acte conjugal, et que ce serait une véritable masturbation. Quant au soulagement ou au besoin à satisfaire, nous n’y voyons d’autre remède que la prolongation de l’acte ou un autre acte plus complet et plus normal. Les théologiens qui pensent comme nous apportent pour raison que la semence de la femme n’est pas nécessaire à la génération, et que cette effusion de la femme, étant un acte séparé, ne fait plus une seule chair avec l’homme. Saint Liguori ajoute : Si on le permettait aux femmes, il faudrait aussi le permettre aux hommes, dans le cas où la femme se retirerait après sa sémination, et où l’homme resterait en état d’irritation. (Livr. 6, no 219.)
« Quoique la semence de la femme, dit Sanchez, ne soit pas nécessaire à la génération, cependant elle aide beaucoup à la rendre plus facile… Il n’est pas nécessaire que les deux époux sèment ensemble. C’est pourquoi pendant que l’homme sème, il n’est pas du tout tenu à attendre l’effusion de la femme. La preuve en est que Galien et d’autres enseignent que la semence de la femme n’est pas nécessaire, et ne concourt pas activement à la génération, etc. » Un grand nombre d’auteurs sont ici cités enseignant tout ce que Sanchez vient d’établir, à savoir que la semence de la femme n’est pas nécessaire à la génération… Sanchez ajoute : « et beaucoup d’autres, et toute l’école des théologiens (excepté les disciples de Scot) »… Ce qui le prouve encore, c’est que d’après l’expérience les femmes conçoivent même malgré elles, en recevant dans le bain la semence virile (ce qui est fabuleux et faux) ; car alors elles ne sèment en aucune façon, autrement elles ne pourraient pas ressentir une très grande délectation vénérienne… Donc, puisque la génération a lieu sans cette semence, même lorsque la sémination a lieu après le coït, il n’y a aucun précepte qui oblige à semer en même temps. On ne peut faire valoir contre cette conclusion que cette sémination simultanée est plus favorable à la génération. Parce que les époux ne sont pas tenus à choisir la voie la plus convenable et la plus favorable à la génération, mais il leur suffit de ne point s’y opposer.
Les époux pèchent mortellement, s’ils s’accouplent avec une affection adultère et fornicatrice, c’est-à-dire, si l’homme en voyant son épouse désire et ait l’intention de s’accoupler avec une autre femme qu’il se représente ; il en est de même de l’épouse, quand elle songe à un autre homme. Tous les deux commettent l’adultère dans leur cœur. Il n’y a rien de plus honteux, dit saint Jérôme, que d’aimer une épouse comme une adultère. De même ils pèchent mortellement s’ils exercent le coït pour une fin gravement mauvaise, par exemple, pour faire mourir la femme en couches.
Les époux pèchent encore mortellement s’ils se livrent au coït devant témoins, à cause du grand scandale ; ils doivent donc prendre garde que d’autres personnes ne couchent dans leur chambre. Les pauvres et les paysans qui n’ont souvent qu’une seule chambre à coucher pour eux, leurs enfants et leurs domestiques, doivent veiller attentivement, le jour et la nuit, à ce que, en usant de leurs droits, ils ne soient pas pour les autres une occasion de scandale.
§ III
DES ATTOUCHEMENTS ENTRE ÉPOUX
1o … Tous baisers, attouchements, embrassements, regards, entretiens obscènes entre époux, en dehors du danger de pollution et dans les limites de l’honnêteté naturelle, sont licites, s’ils se font dans l’intention du coït ; ce ne sont que des péchés véniels, si l’on s’y arrête, sans se proposer le coït. J’ai dit : dans les limites de l’honnêteté naturelle, parce que cette indulgence n’est donnée aux époux, qu’en tant que les actes susdits sont ordonnés selon la nature et la droite raison en vue d’un coït naturel et humain ; et ils sont plus ou moins peccamineux selon qu’ils s’écartent plus ou moins de ces limites. Les époux transgressent gravement ces limites quand ils commettent quelque acte sodomique, ou en agissant avec le danger de la pollution ; hors de ces deux cas, quelque honteux que soient les actes, ils ne paraissent pas excéder le péché véniel (De la luxure, dissert. 6, art. 19).
En dehors de ces deux cas, tous les actes honteux ne semblent pas excéder le péché véniel, dit aussi Sanchez.
Les actes tendant à un coït légitime, sans danger de pollution, sont sans aucun doute licites, ce sont comme les accessoires du coït ; la copule étant licite, ils ne peuvent être illicites. Si cependant ils se faisaient en vue d’une plus grande délectation, quoique tendant au coït, ce serait des péchés véniels, à cause de la fin véniellement mauvaise. Mais s’ils étaient gravement opposés à la droite raison, quoique faits en vue du coït, ils seraient des péchés mortels ; car des époux chrétiens ne doivent pas agir comme le cheval et le mulet qui n’ont pas d’intelligence (Ps. 31, 11) ; mais chacun doit posséder son vase dans la sanctification et l’honneur, non dans la passion du désir, comme les païens qui ignorent Dieu (1re épître aux Thessal. 4, 4).
D’après l’opinion la plus commune et la plus vraie, dit saint Liguori, il n’y a pas péché mortel dans les attouchements et regards déshonnêtes entre époux pour le seul plaisir, sans rapport à la copule, pourvu qu’il n’y ait pas danger de pollution. « La raison en est que l’état conjugal, de même qu’il légitime la copule, légitime aussi ces actes et regards ; car autrement, la société entre époux étant si étroite, et comme ils ne peuvent si souvent s’accoupler, ils seraient exposés à de continuels dangers, si de tels actes étaient gravement illicites. »
De tout ce qui précède, il résulte que les attouchements exercés entre époux sont péchés mortels s’ils sont accompagnés du danger prochain de pollution, car cette contamination corporelle n’est pas moins criminelle chez les gens mariés qu’elle ne l’est dans les personnes libres.
2o Maintenant, toute la question controversée par les théologiens se réduit à ceci : les actions déshonnêtes sans danger prochain de contamination corporelle et sans intention ni relation à l’acte conjugal sont-elles entre époux péché mortel ou véniel ?
Plusieurs auteurs, entre autres saint Antonin, Sylvester et quelques autres auteurs encore cités par Sanchez affirment qu’il y a péché mortel parce qu’elles tendent essentiellement à la pollution, par cela seul qu’elles ne se rapportent pas à l’acte conjugal ; car, ajoutent-ils, tout acte vénérien qui ne se rapporte pas à l’acte conjugal est péché mortel.
Suivant Sanchez, Busembaum, saint Liguori, Layman, Bonacina, Lessius, Sporer, Diana et un grand nombre d’auteurs cités par saint Liguori et Sanchez, enfin, suivant l’opinion commune, les actions déshonnêtes comme attouchements, regards, etc., entre époux, sans relation à l’acte conjugal et aussi sans danger prochain de pollution ne sont que des fautes vénielles, parce que, pouvant être exemptes de péché si elles étaient rapportées à leur fin légitime, qui est l’acte conjugal, elles ne deviennent péché mortel que par le manque de cette fin légitime.
Il faut pourtant faire ici une distinction : c’est qu’il faut regarder comme cause du danger prochain de pollution, ou même comme une pollution commencée, les actes considérablement, énormément déshonnêtes ou infâmes, mentionnés ci-dessus, soit, comme dit Sottler, parce que de tels actes sont ordinairement accompagnés du danger de pollution ; soit parce qu’ils répugnent singulièrement à la nature raisonnable, et qu’ils ne peuvent être rapportés en soi à la copule, et que pour cela ils ne semblent pas pouvoir être excusés de faute grave à cause de l’état de mariage.
C’est avec raison que M. Rousselot, le commentateur de Sottler, a fait la remarque suivante : « L’expérience prouve que les pécheurs ne se résignent à avouer ces attouchements qu’avec beaucoup de peine, et s’ils les taisent par honte, en sont beaucoup plus tourmentés. Donc les époux considèrent naturellement ces attouchements comme déshonorant grandement la créature raisonnable. »
Tout ce que nous avons dit sur cette matière peut se résumer en ce seul passage de saint Liguori :
— Je pense qu’il est plus probable que les actes honteux entre époux avec danger de pollution, soit en demandant le devoir, soit en le rendant, sont mortels ; à moins que les époux ne les fassent pour s’exciter à une copule prochaine, parce qu’ayant droit à la copule ils ont aussi droit à de pareils actes, quand même une pollution accidentelle précéderait la copule. Mais je pense que des attouchements même pudiques sont des péchés mortels, s’ils se font avec danger de pollution, par exemple, avec la langue, sur le pénis ou sur le clitoris, vu que, dans ce cas, l’attouchement s’exerce pour la seule volupté ; il en serait autrement si c’était pour un grave motif, comme par exemple s’il y avait un motif urgent de donner des signes d’affection pour réchauffer le mutuel amour, ou si un des conjoints voulait empêcher l’autre de soupçonner qu’il aime quelque autre personne. (Liv. VI, no 934.)
3o Quant aux attouchements et regards sur son propre corps, libidineux et déshonnêtes, sans danger de pollution en l’absence du conjoint, ou dans un temps ou un lieu où le coït ne peut avoir lieu, d’après Sanchez et d’autres qu’il cite, il n’y a que péché véniel, parce que ces actes, disent-ils, sont secondaires et tendent au coït licite, quoiqu’ils n’atteignent pas leur fin légitime.
L’opinion contraire nous paraît plus sûre et doit être maintenue dans la pratique parce que l’époux, dit saint Liguori, n’a pas droit sur son propre corps per se, mais seulement par accident, en tant seulement qu’il puisse se disposer à la copule ; d’où il suit que la copule n’étant pas possible alors, les attouchements sur lui-même sont tout à fait illicites ; et parce que l’attouchement des parties génitales, quand il a lieu morosement et avec commotion des esprits, tend de soi à la pollution et en entraîne le prochain danger. (S. Liguori, l. VI, no 936.)
§ IV
DU PÉCHÉ D’ONAN ET DE L’ONANISME EN GÉNÉRAL
Tout le monde sait que l’onanisme conjugal, aujourd’hui l’écueil, le fléau, la désolation du mariage, est le crime d’Onan : « Il répandait à terre son sperme pour n’avoir pas d’enfants, » dit la Genèse.
Établissons maintenant quelques propositions certaines et admises par tous les théologiens :
1o Un homme qui imite la conduite d’Onan, par quelque motif que ce soit, commet un crime énorme, et est incapable d’absolution tant qu’il persévère dans sa mauvaise habitude.
2o La femme qui engage son mari à en agir ainsi ou qui consent à cette action injurieuse à la nature et contraire à la fin du mariage, ou qui, enfin, à plus forte raison s’oppose elle-même à l’accomplissement de l’acte conjugal, commet également un péché mortel, et, comme son mari, elle est indigne d’absolution tant qu’elle demeure dans cette criminelle habitude.
3o La loi de charité impose à la femme le devoir de faire tout ce qui dépend d’elle pour empêcher que son mari, qu’elle sait être disposé à mal faire, ne fasse l’action détestable d’Onan.
4o La femme est tenue de rendre le devoir si son mari, dûment averti, promet de consommer l’acte conjugal de la manière qu’il y est obligé, si toutefois cette promesse est faite sérieusement et que la femme puisse juger prudemment que tout se passera de la manière ordinaire et normale.
Maintenant, la difficulté est de savoir si la femme peut, en sûreté de conscience, rendre le devoir lorsqu’elle est assurée par l’expérience que, malgré ses avertissements, ses prières et toutes ses instances possibles, son mari coïtera à la manière d’Onan.
A cet égard, quatre opinions se sont établies : la première est celle des théologiens qui soutiennent que la femme ne peut rendre le devoir même pour éviter la mort :
1o Parce que, disent-ils, l’action du mari étant essentiellement mauvaise, la femme participera à son péché dont elle fournit l’occasion prochaine ; 2o parce que le mari ne se propose pas de faire un acte conjugal, mais de se servir du ministère de sa femme pour s’exposer à la souillure ou à la contamination criminelle ; 3o parce que si le mari demandait à sa femme son concours pour un acte sodomique, elle devrait s’y refuser, même au péril de sa vie ; 4o parce qu’enfin la femme coopère aussi directement au crime de son mari qu’un homme participe au larcin d’un voleur en tenant le sac pour y recevoir les objets volés. — Ainsi pensent Hubert, les rédacteurs des Conférences d’Angers et des Conférences de Paris, Collet, avec plusieurs docteurs de la Sorbonne, Bailly, Vernier, etc.
Cette opinion, il faut l’avouer, paraît fortement établie ; elle est fort grave et de nature à faire beaucoup d’impression sur les esprits. Les confesseurs qui la suivent refusent constamment l’absolution à toutes les femmes qui dans de pareilles circonstances rendent le devoir à leurs maris. Mais voici les raisons qu’on peut lui opposer :
1o La femme, dit-on, en obéissant à son mari participe au péché dont elle fournit l’occasion. — A cela, on peut répondre que la femme fait une chose permise, qu’elle use de son droit, dont elle ne doit pas être privée par la dépravation et la corruption de son mari…, que sans consentir à l’action détestable de son mari elle ne fait que se prêter passivement, par devoir et par obéissance conjugale, à un acte qui, de sa part, est dans l’ordre naturel…
2o On dit encore : le mari, dans cette hypothèse, ne demande point un acte conjugal, mais seulement la coopération de sa femme à une action criminelle. — On peut répondre que cela n’est pas rigoureusement exact, car la souillure, dans ce cas, n’est pas une véritable masturbation ; car la spermatisation externe peut, par une circonstance heureuse, produire quelquefois un heureux effet, en ce sens qu’elle ne sera pas alors complètement extra-vaginale…
3o On prétend que le cas dont il s’agit n’est en réalité qu’un acte sodomique, et que, par conséquent, la femme ne peut y consentir, même pour éviter la mort. — On peut répondre à cela qu’un acte sodomique est toujours nécessairement stérile et que vouloir confondre une action naturelle et permise à la femme avec un acte de sodomie, c’est confondre les termes, changer l’acception des mots et le moyen assuré de ne plus s’entendre sur rien…
4o On dit que la femme coopère au crime de son mari de même que le complice participe au vol en tenant le sac pour y recevoir les objets volés. — On peut répondre qu’il n’y a ici aucune espèce de parité, car la femme use de son droit de justice, et celui qui favorise le vol n’a, à cet effet, aucun droit ni aucun titre légitimes…
Saint Liguori affirme que la femme, dans ces circonstances, doit non seulement rendre le devoir, mais même qu’elle y est obligée.
— « Il semble, dit-il, plus probable que l’épouse non seulement peut rendre le devoir, mais qu’elle y est tenue. La raison en est que la faute étant du côté de celui qui demande, puisqu’il a droit à la copule, l’autre ne peut sans injustice le lui refuser, si elle ne peut en paroles le détourner de cette faute ; et alors il est évident qu’en le rendant elle ne coopère pas, même matériellement, à son péché, puisqu’elle ne coopère pas à la sémination en dehors du vase, mais seulement au commencement d’un coït licite en lui-même pour tous les deux. (Liv. VI, no 947.) »
— Une pieuse épouse peut-elle se laisser approcher de son mari quand elle sait par expérience que son mari se conduit comme Onan… surtout si l’épouse en refusant s’expose au danger de sévices, ou craint que son mari ne voie des prostituées ?
La Sacrée Pénitencerie a répondu le 23 avril 1822 : Dans le cas proposé, la femme de son côté ne faisant rien contre nature et laissant faire une action licite, toute la malice de l’acte venant de celle du mari, qui au lieu de consommer l’acte se retire et répand sa semence hors du vase ; alors, si la femme, après les admonestations voulues, n’obtient rien, et que le mari insiste en la menaçant de coups ou de la mort, ou d’autres graves sévices, elle pourra (selon de graves théologiens) se laisser faire sans péché ; car alors elle ne fait que permettre le péché de son mari, et cela pour un grave motif qui l’excuse, parce que la charité, qui l’obligerait à l’en empêcher, n’oblige pas avec un si grand inconvénient.
— Berthe a un mari qu’elle sait par une constante expérience être onaniste. Elle a essayé en vain tous les moyens pour le détourner d’un si affreux crime ; bien plus, elle est menacée probablement des plus graves dangers, qu’elle ne pourrait éviter qu’en fuyant de la maison de son mari, si elle ne permet pas au moins quelquefois l’abus du mariage.
La Sacrée Pénitencerie, aux dates des 15 novembre 1816 et 1er février 1823, a répondu :
De graves et austères théologiens sont d’avis que l’épouse peut rendre le devoir à son mari si son refus doit la faire maltraiter par lui et qu’elle ait à craindre quelque grave inconvénient ; car, disent-ils, dans ce cas, l’épouse n’est pas censée coopérer formellement au péché de son mari, mais seulement le permettre pour une cause juste et raisonnable. Il faut cependant l’avertir de ne pas cesser d’inviter prudemment son mari à éviter cette turpitude.
CONSULTATION
SUR CERTAINES PROPOSITIONS TOUCHANT L’ONANISME
On demande au Saint-Siège quelle note théologique il faut appliquer aux trois propositions suivantes :
1o Pour des raisons honnêtes les époux peuvent user du mariage à la façon d’Onan.
2o Il est probable que cet usage du mariage n’est pas défendu par le droit naturel.
3o Il ne convient jamais d’interroger sur ce sujet les époux de l’un et de l’autre sexe, quand même on aurait raison de craindre que les époux n’abusent du mariage.
Réponse, 4 mai 1851.
A la première : cette proposition est scandaleuse, erronée et contraire au droit naturel.
A la deuxième : cette proposition est scandaleuse, erronée, et d’ailleurs implicitement condamnée par le pape Innocent IX, proposition 49e. (La pollution n’est pas défendue de droit naturel, d’où il suit que si Dieu ne l’avait pas interdite elle serait souvent bonne, et quelquefois obligatoire sous peine de péché mortel.)
A la troisième : proposition fausse, trop relâchée et dangereuse en pratique.
Angelus Argenti,
Notaire de la Sainte Inquisition romaine universelle.
ARTICLE TROISIÈME
DE LA CONDUITE DES CONFESSEURS A L’ÉGARD DES PERSONNES MARIÉES ET DE CELLES QUI SE DISPOSENT A ENTRER DANS L’ÉTAT DE MARIAGE
Un confesseur ne saurait trop se pénétrer de la connaissance des nombreuses et difficiles obligations des époux, qui ont été exposées dans le cours de cet ouvrage. Il faut surtout qu’il les leur représente et les leur inculque suivant l’occasion et le besoin. Il doit se rappeler que les fautes les plus graves et les plus ordinaires des personnes mariées sont les refus injustes du devoir conjugal, l’empêchement ou l’obstacle que l’on apporte volontairement à la génération par les actes onaniques, sodomiques et quelques autres pratiques secrètes plus rares et connues seulement de quelques femmes et de quelques hommes profondément corrompus : manœuvres sataniques d’autant plus difficiles à découvrir que tout se passe à l’extérieur comme dans l’état ordinaire et normal. Le peu de mots qu’il nous a été possible de dire sur ces infernales inventions doit suffire aux confesseurs pour les mettre sur la voie de l’investigation.
Les confesseurs devront se rappeler que les gens mariés des deux sexes pèchent encore plus souvent qu’on ne pense de la manière que pèchent les personnes libres : la masturbation solitaire ne leur est pas toujours inconnue, ou ils ne l’ont pas complètement oubliée. Il est donc du devoir d’un sage confesseur de chercher avec soin à découvrir les nombreuses et hideuses plaies de toutes les âmes plongées dans la matière et souvent même dans la plus infecte corruption. A cet effet, il lui sera souvent nécessaire de faire des interrogations indispensables…
Quant à l’abominable crime d’onanisme qui se répand partout dans ces malheureux temps, et dont se souillent si honteusement les époux, surtout plus jeunes, que le confesseur leur demande s’ils n’ont aucun remords au sujet de l’acte conjugal, et s’ils ne craignent pas d’avoir trop d’enfants, si dans le coït ils n’ont rien fait pour empêcher la génération, s’ils n’ont rien commis de honteux en dehors de l’acte, etc… Qu’il ajoute qu’il lui est pénible de faire de telles questions et de toucher de telles matières, mais que cela est nécessaire, pour qu’ils sachent ce qui leur est permis ou non ; autrement il leur arriverait de commettre très souvent de très graves fautes par une ignorance inexcusable. Beaucoup, en effet, comme nous l’avons déjà dit, s’imaginent faussement que dans le mariage tout leur est permis, et qui, par des péchés que peut-être ils regardent comme légers, encourent la damnation éternelle.
« Le vice d’onanisme découvert, le confesseur ne peut absoudre le coupable, qu’à condition qu’il se repente de son péché, et ait le ferme propos de ne plus pécher à l’avenir. S’il est incorrigible, le confesseur doit lui refuser l’absolution.
» Quant à la femme qui induit son mari à cette action, ou y consent, ou qui se retire elle-même, malgré son mari, le confesseur ne peut l’absoudre que dans le cas d’une vraie douleur et du ferme propos. Si elle en a l’habitude, on ne peut l’absoudre en aucune façon. C’est pourquoi il faut interroger à ce sujet les femmes qui sont cause que leurs maris se souillent de l’onanisme, et il faut les avertir sérieusement qu’elles sont tenues par la loi de la charité à les détourner de ce crime. Cependant dans le doute si le mari averti agira bien ou mal, la femme peut rendre le devoir, bien plus, elle y est tenue ; car dans le doute un droit certain ne peut être refusé. » (M. Rousselot.)
Chez certaines femmes on peut s’y prendre de la manière suivante : on feint d’entrer dans quelques détails relatifs aux enfants de la pénitente, car très souvent ce sont les femmes elles-mêmes qui ne veulent pas la fin du mariage ; on l’interroge sur la manière dont elle les élève et s’ils le sont chrétiennement, etc. — On ajoute ensuite : « Vous seriez sans doute heureuse si Dieu vous en donnait encore d’autres pour les élever de même, afin qu’il vous procurassent de nouvelles et abondantes consolations ? » Souvent à ces derniers mots il leur échappe cet aveu involontaire : « Ah ! mon Dieu, j’en ai déjà bien assez ! — Cette réponse vous instruit suffisamment et vous dispense d’en dire davantage.
Il est du devoir des confesseurs de dire aux personnes qui sont sur le point de contracter mariage les graves obligations du nouvel état qu’elles vont embrasser. Il sera bon de leur dire que le mariage n’a pas été institué au profit de la passion grossière de la chair, mais pour donner à Dieu et à l’Église des enfants qui deviennent un jour des saints et des habitants du ciel. — On peut ajouter qu’un très grand nombre d’époux s’abusent, se font illusion sur l’état de mariage et se persuadent faussement que tout leur est permis, s’y conduisent comme des êtres sans raison et s’abandonnent sans frein et sans mesure à l’entraînement de leur passion, et qu’ainsi, ils commettent un grand nombre de péchés et se perdront très probablement.
Pour leur éviter un aussi grand malheur dans l’autre vie et d’abord tous les maux de celle-ci qui y conduisent, il faut que le confesseur ait grand soin de leur inculquer cette grave et capitale vérité, savoir : que tout ce qui conduit à la fin du mariage, tout ce qui est dans l’ordre de la procréation et de la génération des enfants est permis ; tout ce qui est contre cette fin de la génération est illicite ou défendu sous peine de péché mortel ; enfin tout ce qui n’est ni suivant ni contre cette fin, par exemple les baisers, les étreintes et tant d’autres familiarités conjugales sont ou péchés véniels, lorsqu’ils sont uniquement faits dans un but voluptueux, ou n’entraînent pas péché lorsqu’ils proviennent d’une affection mutuelle ou du simple désir d’entretenir ou réchauffer l’amour conjugal, à condition toutefois qu’il n’y ait pas péril de pollution. Tout donc peut se résumer sous cette courte formule : ce qui se fait pour la fin est permis, contre la fin est péché mortel ; ni pour ni contre la fin est ou péché véniel ou nul péché.
Le confesseur doit encore interroger les époux au sujet des attouchements impudiques ou autres infamies qu’ils commettent souvent entre eux. Il peut commencer ainsi : « N’avez-vous rien fait avec votre conjoint en dehors des choses permises par le mariage, c’est-à-dire des choses nécessaires à la génération ? » S’il répond qu’il y a eu quelque chose de tel, il faut demander en quoi il consiste, et l’amener à déclarer enfin s’il y a eu des attouchements ou des exercices honteux ; il faut demander s’il y a eu pollution, ou danger de la souffrir ou de la procurer.