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Madeleine, jeune femme

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XXIV

Mon mari ayant accompagné ses cousins, je restai avec les enfants à Neuilly, où nous devions attendre le commencement de septembre pour aller à Chinon.

Une après-midi, alors que nous nous tenions dans le pavillon, au fond du jardin, on sonna à la grille. Ma petite bonne, peu faite aux usages, inaccoutumée surtout aux visites, vint, sans se presser, me dire qu'une dame me demandait, une dame qui n'avait pas voulu donner son nom et qu'elle avait laissée à la porte.

—Mais comment est cette dame?

—Une fausse jeunesse, me dit la bonne, mais qui doit se faire reluquer encore... Il y a deux messieurs qui sont arrêtés plus loin...

A quelques détails complémentaires, je reconnus Emma. Mon premier mouvement fut de ne pas la recevoir, mon mari me l'ayant formellement interdit. Puis la pensée qu'elle n'insistait pour me voir pendant l'absence de son frère que parce qu'elle était malheureuse, m'apitoya. Elle venait jusqu'au fond de Neuilly, par la grande chaleur et sans voiture; je n'eus pas la dureté de la laisser repartir; je dis à la bonne de la faire entrer à la maison, et j'allai la rejoindre. Il me semblait que je faisais quelque chose d'à moitié mal, d'à moitié bien. Emma s'était conduite d'une façon qui méritait peu d'indulgence; mais, depuis que j'avais souffert par l'amour, j'éprouvais moins de répulsion que de pitié pour les infortunées qui furent par lui roulées comme les galets par la lame de la mer.

Elle était bien changée, la pauvre Emma. Le jugement sommaire de la bonne n'était pas sans justesse. Emma, frappée par le mal des années, concentrait toute sa farouche ardeur à en combattre le ravage; si ses yeux s'amollissaient, elle conservait sa taille, onduleuse, opulente sans excès, et cette bouche en grenade éclatée qui vous donnait frais, au cœur de l'été.

Elle s'excusa beaucoup. Je croyais sa visite vulgairement intéressée; je m'attendais à ce qu'elle me tendît une main de quêteuse. Mais non! Elle avait avec moi, comme dès notre première entrevue, une certaine gentillesse perceptible malgré toute la distance qui nous séparait; je ne lui étais pas antipathique; elle me croyait seulement soumise à des mœurs antédiluviennes et hypocrites, et elle avait cru de la meilleure foi du monde que, de ce qu'elle tenait pour ma vieille défroque, il ne me resterait bientôt rien. Elle me plaignit surtout, à la suite d'un préambule embarrassé et difficile, destiné à aborder notre situation diminuée. Comme je lui disais que, loin de me trouver à plaindre de cette situation nouvelle, je m'en trouvais au contraire beaucoup plus à l'aise et menais une vie plus conforme à mes goûts, elle me dit: «Allons donc!...» en haussant les épaules, et je lus dans ses yeux qu'elle croyait encore à mon «jésuitisme» invétéré. Elle n'était pas accessible à une autre conception du bonheur qu'à celle du plaisir uni à la fortune. Elle soupira longuement. Il était évident qu'elle avait des motifs personnels de regretter que son frère n'eût pas réalisé ses brillantes espérances; mais elle semblait me porter un intérêt tout personnel et compatir à mon sort. A cela, elle avait une raison que je n'allais pas tarder à apprendre, malheureusement. Il existait aussi entre elle et moi cette cloison qui sépare les êtres soumis à des mœurs totalement différentes. Elle me jugeait avec autant de compassion que j'avais de compassion, moi, pour les Voulasne, pour leurs amis ou pour Emma elle-même. Emma me représentait l'image, poussée à l'extrême, de ces mœurs dont l'amour est le pivot et la loi unique et que je voyais opposées sans cesse comme un progrès, comme une conquête, aux mœurs disciplinées et soumises à la contrainte morale. Je voyais en moi la génération arrachée à ce vieux sol, inacclimatée au nouveau, cherchant entre les deux un introuvable compromis. Notre rencontre improvisée, dans cette pièce de la petite maison de Neuilly, prenait pour mon esprit confus, solitaire et trop disposé à réfléchir, une importance insoupçonnée. Cette jolie femme un peu fripée et cette bouche, restes de désordre et de beauté, cela grandit tout à coup devant moi. Les volets étaient clos afin d'éviter la chaleur; nous causions dans l'ombre; je voulus voir et j'entr'ouvris l'un d'eux. Emma se leva, se déplaça, pour se poser à contre-jour. Dans ces mouvements, et comme mes allusions à quelques détails matériels de la maison introduisaient un peu de familiarité dans l'entretien, Emma qui brûlait d'arriver à ses fins, me dit qu'il fallait voir les choses comme elles sont, prendre les gens pour ce qu'ils valent, que vivre dans les nuages était «idiot», et qu'enfin c'était «être une gourde» que de prétendre faire d'un homme autre chose que ce qu'il est.

J'allais prendre la balle au bond et m'apprêter à mettre Emma hors de chez moi, pour me traiter avec son sans-façon et son langage de cabaret; mais c'était elle qui, par ses mots un peu vifs, venait d'ouvrir une porte par où elle expulsait enfin toute la rancune amassée depuis des années contre son frère dédaigneux, et ce qu'elle me dit me cloua sur place. Je ne suis pas assez initiée au libre parler d'Emma pour reproduire ses termes; ils jaillirent soudain comme les scories d'un cratère en éruption; la lave bouillante se déversait à mes pieds; j'étais surprise, ahurie, captivée aussi par ce que m'apprenait ou m'invitait à connaître une telle effervescence d'expressions. Je faisais, à mesure qu'elle vociférait, la part de l'exagération, trop aisée à discerner; mais Emma me citait des faits précis et contrôlables qui, au-dessus du torrent fielleux, surnageaient comme les douloureuses épaves reconnues d'une maison écroulée. Mon mari, au dire d'Emma, n'avait jamais cessé de me tromper. La liaison qu'il avait, avant son mariage, il ne s'était pas donné la peine de la rompre; elle n'était ni sérieuse, ni unique; il était comme tous ces messieurs; ils s'entraînaient les uns les autres; les plus riches avaient des maîtresses, les moins fortunés se fussent crus déshonorés de ne point faire comme s'ils en entretenaient une, deux, parfois davantage. Depuis deux ans, mon mari s'était acoquiné, disait-elle, avec une femme dangereuse non par son esbrouffe, mais au contraire son attitude rangée et son goût de thésauriser. Emma me la nommait, me donnait son adresse, me citait le nom de l'enfant qu'elle avait eu récemment. «Achille a des goûts bourgeois, me dit-elle, vous le savez; ce n'est pas tant un noceur, mais il lui faut pour le moins un faux ménage afin qu'on ne se f... pas de lui dans le métier.»

Les sentiments les plus divers bataillaient en moi pendant ce discours plein de fiel dont quelques gouttes évidemment étaient destinées à me faire souffrir. Ne vouloir pas en entendre davantage! mais la curiosité, l'utilité d'apprendre me retenaient attentive. Mépriser les médisances, jouer l'indifférence! mais la révélation me faisait un mal que je n'eusse pas soupçonné. Certes, je n'avais jamais pu aimer mon mari, d'amour; mais j'avais pour beaucoup de ses qualités une estime définitive; et j'aimais en lui le goût qu'il avait eu de me choisir d'abord, de me vouloir conserver ensuite conforme à un type de femme que je juge le meilleur, indispensable à la vie, à sa continuation, à sa prospérité, et le plus beau au jugement secret de notre conscience; aussi, à cause de l'amour qu'il avait pour ses enfants... Et il possédait un autre ménage! Il pouvait aimer un autre enfant!...

—Vous voyez bien, disait Emma, que ce n'est pas la peine de se fouler!...

Elle avait tout l'air de vouloir ajouter des conseils amicaux aux révélations dont elle venait de me frapper. Peut-être, après tout, était-elle sincère et ne pensait-elle qu'à me rendre service, une fois sa vindicte exercée contre son frère. Son exemple m'obligeait tout à coup à faire un retour sur moi-même qui, depuis que j'avais aimé, concevais de l'indulgence pour les femmes amoureuses, et, à cause de cela, uniquement, sans doute, m'étais exposée, aujourd'hui, à recevoir la visite, les révélations et les avis de ma belle-sœur Emma. Et, pensant à la faute de ma vie, à la femme que j'aurais pu être, en ce moment précis, moi, si des circonstances supérieures à moi-même ne m'avaient sauvée, je n'eus pas plus de ressentiment contre mon mari que je n'en avais, première réflexion faite, contre Emma qui s'acquittait là, tout simplement, de son rôle de femme naturelle. Jugeant toutes gens et toutes choses du point de vue assez bas où notre propre faiblesse nous pose, nous ne pouvons qu'être indulgents et débonnaires; et je vois bien que c'est cette tiédeur débile que l'on nommera de plus en plus la bonté.

Emma, me jugeant édifiée comme elle l'avait voulu, se leva. Je vis qu'avant de se rejeter dans la rue, elle cherchait un miroir. Nous étions presque dans l'ombre; une glace, derrière la pendule, ne se prêtait que maladroitement aux soins de la coquetterie. Je déplaçai la pendule dont le balancier eut des palpitations désordonnées et je retournai au volet entrebâillé pour rouvrir tout grand. Puis je revins derrière l'épaule d'Emma afin de m'assurer qu'elle se voyait suffisamment pour donner le petit coup nécessaire à ses cheveux et rajuster son chapeau. Je n'avais pas coutume de me mirer dans cette glace. Le jour se trouvait par hasard très bon. Nos deux visages paraissaient accolés comme en un portrait de deux sœurs. Les marques définitives de l'âge me frappèrent aux alentours des yeux d'Emma, trop tendres, plissés et poudreux comme l'aile de certains papillons gris du soir. Un bref regard d'elle me jugea, moi, pareillement: j'avais dix ans de moins qu'elle, mais mes cheveux blanchissaient, ce dont je m'efforçais depuis quelque temps de rire; à côté de cette femme cramponnée désespérément à sa jeunesse et à sa beauté fuyantes, pour la première fois ma figure me parut creusée en dessous par un travail de termite. Moi comme Emma, bon gré mal gré, nous avions reçu le coup d'aile insonore de l'oiseau qui passe au-dessus des têtes blondes et des brunes, tantôt avec trop de hâte et tantôt avec un retard bénévole, et en déplaçant un air funeste qui tue la fleur humaine.

Je me retirai presque aussitôt, mais j'avais vu. Et la double image offerte à moi par un hasard ne devait plus s'effacer de mon souvenir, et elle devait contribuer, plus que mes méditations, à m'éclairer sur moi-même. Mon visage, pour ainsi dire surpris, et joue à joue, avec le tragique masque d'Emma amplifiant un gémissement sourd et désespéré, me parut, dans sa flétrissure commencée, porter la trace d'un sourire peut-être ancien chez moi, mais dont je n'avais pas saisi l'expression: le sourire d'un être attristé, mais le sourire de quelqu'un qui sait l'existence d'un trésor caché... Emma contemplait les restes de sa richesse dissipée; moi, créature aussi, femme comme elle, je souffrais de mes ruines prématurées; quelque chose en moi,—oh! j'en conviens!—pleurait la douce vie non savourée et trop éphémère; mais quelque chose en moi se riait des bonheurs communs et des choses éphémères... Emma avait goûté de folles années et ne concevait plus rien au delà, sinon un prolongement artificiel par le moyen de cabotinages sans relâche exercés sur sa peau. En vertu de quel merveilleux privilège est-ce que mes premiers cheveux blancs me causaient, par-dessous ma mélancolie, une impression d'allégement et suscitaient en moi un élan de vie renouvelée? A la minute, pour ainsi dire, où je venais de recevoir le choc de deux des plus puissantes désillusions, celle de la durée de ma jeunesse et celle de la loyauté conjugale de mon mari, loin de sentir un abattement, le voisinage d'une femme abattue mobilisait mes réserves secrètes, mettait en branle, au fond de moi, toute une armée d'énergies insoupçonnées, et je reconquérais en moi un royaume qui ne doit pas périr.

En regardant encore Emma au grand jour, alors qu'elle allait me quitter, je me souvins de l'étonnement que m'avait causé son genre de beauté, lors de notre première entrevue, et quand je ne songeais à le comparer qu'à celui de madame Du Cange. Ce que nous étions convenues, jadis, au couvent, d'appeler la beauté de madame Du Cange, c'était une transfiguration de la chair par le miracle de la force morale. Oh! que cela n'avait donc aucun rapport avec le troublant assouvissement qui avivait et ombrait les yeux de ma belle-sœur! De même Charlotte de Clamarion, sans avoir été jamais jolie, embellissait en vieillissant, parce que sa vie s'enrichissait de jour en jour, tandis que chez Emma toutes les sources desséchées lui laissaient la face morne et dépitée à jamais d'un astre mort.

Emma ne comprit rien à la sérénité que son exemple même, par contre-coup, m'inspirait. Elle me regarda à plusieurs reprises, à travers sa voilette, pendant que je la reconduisais à la porte de l'avenue. Je crois qu'elle emportait de sa visite une grande déception: l'état dans lequel elle m'avait trouvée l'étonnait; celui où elle me laissait l'étonnait davantage. Elle n'était pas de sens très fin; et surtout elle ignorait absolument cette «seconde nature» qu'ajoutaient nos vieilles mœurs à la nature que nous partageons avec toutes les bêtes humaines.

Je la vis s'éloigner à pied, relevant sa robe sur ses petits souliers défraîchis. Une portion de moi lui en voulait de ce qu'elle était venue faire ici; une autre, meilleure, éprouvait pour elle une grande et sincère pitié.

Elle avait quarante ans, la malheureuse Emma, elle pouvait vivre encore un nombre égal d'années, et elle ne leur concevait pas d'autre emploi que le regret impuissant et l'appel désolé, désormais ridicule, de l'amour!...

Je vins rabattre le volet, remettre de l'ordre dans la pièce où j'avais reçu Emma, épousseter la poudre de riz semée sur le marbre de la cheminée, sur le bras d'un fauteuil et jusque sur le tapis de la table, replacer la pendule en son beau milieu. Un parfum demeurait dans l'atmosphère. Suzanne en entrant le happa de ses petites narines si jeunes encore, s'arrêta, et poussa une exclamation qui prouvait que, déjà, elle n'y était pas insensible.

—C'est de très mauvais goût, lui dis-je. Nous devons sentir bon par nos qualités, et cela suffit.

A sa mine indifférente et aussitôt distraite, je vis bien que Suzanne tenait mes paroles pour le langage convenu que les parents adressent aux enfants, auquel les enfants ne croient pas parce que les parents n'y croient pas eux-mêmes.

J'y croyais! J'eus même l'impression soudaine d'y croire plus ardemment que je n'avais jamais fait à aucun précepte adressé à mes enfants! Et, simultanément, s'imposa à moi de nouveau l'impérieuse nécessité de cette adhésion passionnée aux vérités morales, dont il faut que l'ardeur soit bien grande si nous voulons en communiquer la centième partie!...

Un élan irrésistible me poussa à ma chambre où je tombai à genoux au pied de mon lit, comme autrefois: «Mon Dieu! mon Dieu!...» Mais les mots qui s'adressent à Dieu, pour ne les avoir pas prononcés tous les jours, mes lèvres ne les retrouvaient plus. J'entendis dans l'escalier le pas de Suzanne; il se tut aux environs de ma porte; on essaya de tourner le bouton; mais j'avais fermé au verrou. Suzanne cria:

—Maman, qu'est-ce que tu fais?

—Je prie le bon Dieu, mon enfant.

—Ce n'est pas vrai... tu pleures...

O terribles enfants, en qui nous sentons quelque chose de plus fort que nous!... Dans le moment où nous essayons de nous gonfler pour nous envoler dans les airs, ils nous lancent des traits qui nous percent; ils me rappellent la voix implacablement humaine de Montaigne, si cinglante pour ceux qu'a touchés l'accent de l'auteur des Pensées, son fils sublime: «Nous aurons beau faire... nous n'en sommes pas moins assis sur notre derrière...» Et pourtant lui-même avait dit, inspiré par l'amoureuse amitié un jour: «O la vile chose et abjecte que l'Homme, s'il ne s'élève au-dessus de l'humanité!...» Choix angoissant! entre le ciel et la terre prendre parti! renoncer à l'enivrement du plus beau en faveur de la sagesse au visage de marbre! Vivre à mi-côte, la plus dure des résignations!...

Tout à coup, un beau jour, je reconnus que, précisément, cette résignation étant pour moi la plus dure, c'était à celle-là qu'il fallait me soumettre. Accepter la médiocrité du monde, oui, cela était pour moi une tâche plus ardue que de laver les pieds des pauvres ou de bander les ulcères, comme faisait Charlotte de Clamarion. Et quand j'eus résolu d'accomplir cette tâche qui s'impose aux femmes «de la bonne moyenne» dont j'étais, il me sembla que mon appétit de passion était comblé... Ma voie à mi-côte s'allongeait devant moi, droite et unie; tout orgueil abattu, j'y roulais, emboîtée en des rails d'acier que ma volonté avait étendus sur un plan; et je goûtais à cet effort plus de bonheur secret que je n'en avais éprouvé lorsque, dans mon emportement, j'avais fui avec indignation le milieu Voulasne. Par la plus âpre lutte que je pusse soutenir contre moi-même, je touchais le plus parfait contentement intime: je refaisais, de mon propre mouvement, et par la force des choses, ce que la plus vieille foi de ma famille enseignait comme le devoir élémentaire; l'expérience me ramenait à mon point de départ un peu dédaigneusement abandonné dans la bourrasque que déchaînent les courants d'air de mon temps; sur le chemin de retour où je marchais, ne discernais-je pas déjà ces grandes voix, organes mystérieux, échos d'instruments inconnus, dont le timbre n'a pas d'équivalent parmi ceux de ce monde, dont la musique célébrait la dignité de mon origine, la sainteté de ma destinée, et entre ces deux relais, l'humble beauté de la vie que nous ne pouvons pas changer. «Faire les petites choses comme grandes à cause de la majesté de Jésus-Christ qui les fait en nous...», m'avait dit un jour celui qui se plaisait à m'instruire si dangereusement!


XXV

Lorsque je retournai à Chinon, résolue à ne plus faire de moi qu'un instrument utile au bien des miens et savourant dans cet oubli de moi-même, dans cet adieu définitif à tous mes désirs personnels, dans ce renoncement même à la joie de mieux faire, une autre joie, d'essence plus subtile et plus haute, et qui ne devait plus jamais me manquer, je fis l'émerveillement de tous par la figure heureuse que l'on me voyait et que, au dire de chacun, personne ne m'avait encore vue. J'étais inquiète autrefois, disait-on, j'avais sans cesse l'air d'attendre quelqu'un, de désirer un objet chimérique, de rêver à la lune! A la bonne heure! On me trouvait, pour la première fois, satisfaite.

Et la vérité m'oblige à dire qu'en face de ce bonheur rayonnant de moi, il ne se trouva personne, dans la maison et hors de là, personne parmi ceux qui pourtant m'avaient enseigné la source secrète de ma présente félicité, qui ne chuchotât:—les échos m'en vinrent de toutes parts:—«Elle aime!... elle est aimée!...»

1910, 1911, 1912.

FIN

E. GREVIN—IMPRIMERIE DE LAGNY—2011-0-12.

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