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Rapport sur l'Instruction Publique, les 10, 11 et 19 Septembre 1791: fait au nom du Comité de Constitution à l'Assemblée Nationale

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Une vue également morale se manifestera dans les productions d'un autre genre, ouvrage de ce même art qui change de nom en changeant ses pinceaux, et qui alors, moins imposant sans être moins utile, trace la peinture de nos mœurs habituelles dans les conditions privées. Combien de préjugés nés de la servitude, s'obstinant à exister quand rien de ce qui les soutenait, ne subsiste; combien dont la crédulité, moins odieuse qu'amusante, ne peut se résoudre à douter encore de leur extrême importance; combien enfin qui, terrassés par la loi, mille fois vaincus par la raison, ont besoin d'être finis par le ridicule, et de se trouver en quelque sorte témoins de leur propre défaite? C'est sous ce rapport que la scène françoise deviendra une des puissances auxiliaires de la révolution; que des talens voués à l'instruction, mais jusqu'à ce jour plus employés à polir la surface des mœurs, qu'à en corriger le fonds, serviront et la morale et la patrie; que la régénération politique, amenant avec elle le renouvellement des pensées de l'homme, étendra la carrière de celui des arts qui, par l'illusion, exerce le plus puissant des empires. Alors la scène françoise se rajeunira, se purifiera; elle se montrera digne des respects de l'homme le plus sévère, digne de la présence de tous les états, de tous les Citoyens qui, ayant fui les indiscrétions de la licence, viendront avec confiance chercher les leçons de la raison.

Ainsi la morale arrive à l'homme en s'emparant de son intelligence, de ses sens, de ses facultés, de toutes les puissances de son être.

C'est elle qui va bientôt ordonner, qui va animer ces fêtes, que le peuple espère, qu'il désire, et que d'avance il appelle fêtes nationales.

Ici l'esprit se porte avec charme vers ces fêtes antiques, où, au milieu des jeux, des luttes, de toutes les émotions d'une allégresse universelle, l'amour de la Patrie, cette morale presque unique des anciens peuples libres, s'exaltoit jusqu'à l'enthousiasme, et se préparait à des prodiges.

Vous ne voudrez pas priver la morale d'un tel ressort, vous voudrez aussi conduire les hommes au bien par la route du plaisir.

Vous ordonnerez donc des fêtes.

Mais vos fêtes auront un caractère plus moral: car elles porteront l'empreinte de cette bienveillance universelle qui embrasse le genre humain, tandis que le sentiment qui animoit celles des anciens, confondoit sans cesse l'amour de la cité et la haine pour le reste des hommes.

Vos fêtes ne seront point toutes religieuses, non que la religion les proscrive ou les repousse: elle-même s'est parée de leur pompe; mais, lorsqu'elle n'en est point l'objet principal, lorsque les impressions qu'elle porte à l'âme, ne doivent point y dominer, il ne convient pas qu'elle y paroisse: il est plus religieux de l'en écarter. Parmi les nouvelles fêtes, son culte réclamera toujours celles de la douleur, pour y porter ses consolations. Le culte de la liberté vous demande toutes les fêtes de l'allégresse.

Elles ne seront point périodiques; j'en excepte pourtant l'anniversaire du jour où, les armes à la main, la Nation entière a juré la sainte alliance de la liberté et de l'obéissance à la loi, et celui du jour mémorable où l'égalité sembla naître tout-à-coup de la chute de tous les privilèges. Ces fêtes auront un tel caractère de grandeur, elles réveilleront tant de sentimens à la fois, qu'il n'est pas à craindre que l'intérêt qu'elles doivent inspirer, s'affoiblisse par des retours marqués; mais les autres fêtes doivent, dans chaque lieu, varier avec les événemens: elles doivent donc conserver ce caractère d'irrégularité qui convient si bien aux mouvemens de l'âme; il ne faut pas qu'on les prévoie de trop loin, qu'on les pressente avec trop de certitude; il ne faut pas qu'elles soient trop commandées; car la joie comme la douleur ne sont plus aux ordres de personne.

Elles ne seront pas uniformes: car bientôt la monotonie en auroit détruit le charme. Elles seront tour à tour nationales, locales, privées. Vous voudrez que chaque Département rende solemnelle l'époque où, arrêtant la liste de ses nouveaux citoyens, il montre avec orgueil à la Patrie ses jeunes défenseurs, ses nouvelles richesses, et vous verrez avec intérêt chaque famille s'empresser de célébrer encore, par des fêtes intérieures, et ces mêmes époques publiques, et toutes les époques particulières de ses événemens domestiques.

Enfin toutes ces fêtes auront pour objet direct les événemens anciens ou nouveaux, publics ou privés, les plus chers à un peuple libre; pour accessoires, tous les symboles qui parlent de la liberté, et rappellent avec plus de force à cette égalité précieuse, dont l'oubli a produit tous les maux des Sociétés; et pour moyens, ce que les beaux arts, la musique, les spectacles, les combats, les prix réservés pour ces jours brillans, offriront dans chaque lieu de plus propre à rendre heureux et meilleurs les vieillards, par des souvenirs; les jeunes gens, par des triomphes; les enfans, par des espérances[1].

Qu'on ne s'étonne pas d'entendre invoquer ici les arts comme appuis de la morale. Conserver des souvenirs précieux, éterniser des actions dignes de mémoire, immortaliser les grands exemples, c'est-là sans doute enseigner la vertu. Qui ignore que l'imagination, qui s'enflamme à la vue d'un chef-d'œuvre, confond, dans le même enthousiasme, l'imitation parfaite qui l'enchante et le trait sublime qui la ravit; et que c'est particulièrement dans la première jeunesse que cette alliance des sensations et des idées, cette influence des impressions physiques sur les affections de l'âme, produit les effets les plus vifs et les plus durables.

Les arts n'ont que trop souvent été prostitués aux intérêts de la tyrannie: elle les employoit à détremper le caractère des peuples, à leur inspirer les molles affections qui les préparent à recevoir ou à souffrir la servitude; mais les arts eux-mêmes étoient esclaves lorsqu'on corrompoint ainsi la noblesse de leur destination: les arts aussi doivent rompre leurs fers chez un peuple qui devient libre. Il est vrai que, même sous l'empire des maîtres les plus absolus, on les a vu créer des chefs-d'œuvres: mais c'est qu'alors, trompant la tyrannie, ils savoient se réfugier dans une terre étrangère; ils se transportoient, ils s'élançoient à Athènes, à Rome, jusques dans l'Olympe; et c'est-là qu'ils trouvoient cette liberté et ce courage de conception dont ils ont conservé l'empreinte.

Les arts sont la langue commune des peuples et des siècles. Il en est un sur-tout particulièrement consacré à l'immortalité: il confie au marbre et à l'airain, avec les traits des grands hommes, la reconnoissance de la Patrie qui s'honore en s'acquittant envers eux, et ajoute à son lustre, en perpétuant leur renommée. Quelle autre récompense peut entrer en parallèle avec un tel triomphe qui se perpétue à travers les siècles? Qu'il est beau pour les arts qui ne vivent que de gloire, d'associer ainsi leurs ouvrages à des noms impérissables! Et aussi, quelle leçon de morale que la statue d'un grand homme élevée au milieu de ses concitoyens! Son exemple s'éternise par le monument qui lui est consacré; et s'il se trouvoit une stérile époque où des modèles vivans ne pussent s'offrir à l'ambition de la jeunesse, l'histoire ainsi animée, ainsi vivante, suffiroit dans tous les temps à son enthousiasme.

La Nation, loin de redouter l'influence des arts, voudra donc se couvrir de leur gloire: elle les encouragera; elle les honorera; elle leur confiera ses intérêts; enfin elle les placera dans l'éducation comme un moyen de plus pour faire chérir la morale. Sparte n'avoit pas banni de ses institutions l'exercice de la lyre; elle en avoit seulement retranché quelques cordes dont le son trop attendrissant étoit capable d'énerver l'âme et d'efféminer les mœurs.

C'est par l'action combinée de tous ces moyens que, sous l'empire d'une Constitution favorable à tous les développemens, l'homme social verra s'accroître ses richesses intellectuelles et morales; mais, poux réaliser ces espérances qui s'ouvrent devant nous, pour que tant de moyens indiqués ne restent point de vains projets de l'esprit, il faut qu'ils se produisent et se manifestent dans l'ordre que sollicitent les besoins de l'homme, et sous un jour qui l'éclaire par degré; il faut que le talent, s'emparant des découvertes du génie, les rende accessibles à tous, qu'il aspire, non à détruire toutes difficultés: car l'esprit humain a besoin de vaincre pour s'instruire; mais à ne laisser subsister que celles qui demandent de l'attention pour être vaincues; il faut, en un mot, que des livres élémentaires, clairs, précis, méthodiques, répandus avec profusion, rendent universellement familières toutes les vérités importantes, et épargnent d'inutiles efforts pour les apprendre. De tels livres sont de grands bienfaits: la Nation ne peut ni trop les encourager, ni trop les récompenser.

En appelant l'intérêt national sur ce genre de secours appliqué aux grands objets que nous venons de parcourir, nous nous reprocherions de ne pas l'arrêter un instant sur d'autres objets d'une utilité, moins importante, mais plus directe, mais plus adaptée aux besoins journaliers et individuels, en un mot, sur ce qui intéresse particulièrement, la culture et les arts mécaniques.

Comment ne pas former des vœux, pour qu'à l'aide des méthodes et des livres élémentaires, la théorie de l'utile s'allie enfin à la pratique dans toutes les parties de l'agriculture; pour qu'on voie cesser cette étrange séparation qui sembloit faire deux parts distinctes de nos facultés dans l'art qui demande le plus la réunion de toutes, et qui offroit le spectacle affligeant de la force et de l'activité sans lumières, de l'intelligence et des lumières sans action.

Qui pourra dire tout ce qu'une telle discordance, fruit de nos vices et de nos institutions, a causé de ravages dans nos campagnes? Par-tout on y trouve la trace profonde de l'erreur: le dépérissement des forêts, ces produits tardifs de la terre; la perte de nos bestiaux; l'éducation abandonnée de ces utiles compagnons de nos travaux; le défaut de pâturage; l'usage multiplié des jachères, ce long sommeil de nos champs condamnés à la stérilité, tout annonce l'art encore dans l'enfance, ou plutôt couvert de nos préjugés. Que seroit-ce si nous analysions tout ce que produit de maux à la fin de chaque année l'ignorance des premiers principes de la végétation, de la floraison, de la théorie de la greffe, de la nature des engrais, de l'influence des saisons, etc? N'est-il pas évident que, pour des hommes qui, condamnés par le besoin de chaque jour, ne peuvent accorder que des momens à l'étude de leur art, c'est à des livres très-élémentaires, écrits avec clarté et avec intérêt, qu'il doit être spécialement réservé de répandre sur tous ces objets les lumières les plus nécessaires.

L'effet de ce moyen se fortifiera par la révolution qui va s'opérer dans nos mœurs.

Dans le temps où il falloit occuper un état auquel un des préjugés régnans attachât de l'honneur, où d'ailleurs on naissoit magistrat et guerrier comme on naît de tel sexe, où par conséquent la profession étoit plutôt le produit de l'espèce que celui du choix, il étoit presque érigé en principe, qu'un propriétaire enrichi devoit fuir la source de sa richesse. Travailler son champ étoit une peine; l'habiter étoit un exil; et dès-lors parmi les hommes à talent on ne voyoit guères dans nos fertiles campagnes que ceux dont l'ambition trompée alloit y ensevelir ses regrets.

Désormais on sentira que, dans un pays agricole, tout doit naître cultivateur. On sera momentanément Magistrat, Guerrier, Législateur; mais les travaux champêtres feront l'occupation habituelle de l'homme, et chacun y trouvera le délassement ou même la récompense de ses fonctions de citoyen: or un tel changement de mœurs, multipliant dans nos campagnes les expériences utiles, contribuera nécessairement à y accréditer les bonnes méthodes et à y faire fructifier les principes que les livres élémentaires auront déjà pu y introduire.

Et quant aux arts mécaniques, de combien de méthodes ils demandent aussi le secours! Qui n'a pas souffert, qui ne souffre pas encore de voir un si grand nombre de nos ouvriers livrés à une routine qu'aucun principe ne dirige ou ne rectifie; contraints à faire venir de dehors les instrumens même de leur profession quand ils aspirent à perfectionner leurs ouvrages; entièrement étrangers à la science du trait si nécessaire et si peu connue, à l'art de prendre une hauteur, de mesurer un angle, d'en acquérir le sentiment à un demi-degré près: aux principes raisonnés de l'équilibre, des leviers, de la romaine, de la balance; ignorant les propriétés les plus générales de l'air, tous les procédés, toutes les découvertes applicables aux arts et aux manufactures, dont la Chimie a enrichi de nos jours l'esprit humain; ne sachant quels sont les corps que l'humidité allonge, quels sont ceux qu'elle resserre; en un mot, ne connoissant de l'art que la mécanique la plus grossière et presque jamais la théorie qui le simplifie et qui l'aggrandit. Et n'est-ce pas encore ici par des livres méthodiques, réunissant le double suffrage des théoriciens habiles et des praticiens consommés, que les vrais principes sur tous ces objets pénétreront dans nos atteliers et qu'ils y élèveront l'industrie nationale à ce degré de perfection et de splendeur, auquel la France a montré, même dans son état d'imperfection, qu'elle étoit digne de prétendre.


Nous avons annoncé au commencement de notre travail des principes d'instruction pour les femmes: ces principes nous paroissent très-simples.

On ne peut d'abord séparer ici les questions relatives à leur éducation de l'examen de leurs droits politiques; car en les élevant, il faut bien savoir à quoi elles sont destinées. Si nous leur reconnoissons les mêmes droits qu'aux hommes, il faut leur donner les mêmes moyens d'en faire usage. Si nous pensons que leur part doive être uniquement le bonheur domestique et les devoirs de la vie intérieure, il faut les former de bonne heure pour remplir cette destination.

Une moitié du genre humain exclue par l'autre de toute participation au gouvernement; des personnes indigènes par le fait et étrangères par la loi sur le sol qui les a cependant vu naître; des propriétaires sans influence directe et sans représentation: ce sont-là des phénomènes politiques, qu'en principe abstrait, il paroît impossible d'expliquer; mais il est un ordre d'idées dans lequel la question change et peut se résoudre facilement. Le but de toutes les institutions doit être le bonheur du plus grand nombre. Tout ce qui s'en écarte est une erreur; tout ce qui y conduit, une vérité. Si l'exclusion des emplois publics prononcée contre les femmes est pour les deux sexes un moyen d'augmenter la somme de leur bonheur mutuel, c'est dès-lors une loi que toutes les Sociétés ont dû reconnoître et consacrer.

Toute autre ambition seroit un renversement des destinations premières; et les femmes n'auront jamais intérêt à changer la délégation qu'elles ont reçue.

Or il nous semble incontestable que le bonheur commun, sur-tout celui des femmes, demande qu'elles n'aspirent point à l'exercice des droits et des fonctions politiques. Qu'on cherche ici leur intérêt dans le vœu de la nature. N'est-il pas sensible que leur constitution délicate, leurs inclinations paisibles, les devoirs nombreux de la maternité, les éloignent constamment des habitudes fortes, des devoirs pénibles, et les appellent à des occupations douces, à des soins intérieurs? Et comment ne pas voir que le principe conservateur des Sociétés, qui a placé l'harmonie dans la division des pouvoirs, a été exprimé et comme révélé par la nature, lorsqu'elle a ainsi distribué aux deux sexes des fonctions si évidemment distinctes? Tenons-nous-en là, et n'invoquons pas des principes inapplicables à cette question. Ne faites pas des rivaux des compagnes de votre vie: laissez, laissez dans ce monde subsister une union qu'aucun intérêt, qu'aucune rivalité ne puisse rompre. Croyez que le bien de tous vous le demande.

Loin du tumulte des affaires, ah! sans doute il reste aux femmes un beau partage dans la vie! Le titre de mère, ce sentiment que personne ne s'est encore flatté d'avoir exprimé, est une jouissance solitaire dont les soins publics pourroient distraire: et conserver aux femmes cette puissance d'amour que les autres passions affoiblissent, n'est-ce pas sur-tout penser à la félicité de leur vie?

On dit que, dans de grandes circonstances, les femmes ont fortifié le caractère des hommes; mais c'est qu'alors elles étoient hors de la carrière. Si elles avoient poursuivi la même gloire, elles auroient perdu le droit d'en distribuer les couronnes.

On a dit encore que quelques-unes avoient porté le sceptre avec gloire; mais que sont un petit nombre d'exceptions brillantes? Autorisent-elles à déranger le plan général de la nature? S'il étoit encore quelques femmes que le hazard de leur éducation ou de leurs talens parut appeller à l'existence d'un homme, elles doivent en faire le sacrifice au bonheur du grand nombre, se montrer au-dessus de leur sexe en le jugeant, en lui marquant sa véritable place, et ne pas demander qu'en livrant les femmes aux mêmes études que nous, on les sacrifie toutes pour avoir peut-être dans un siècle quelques hommes de plus.

Qu'on ne cherche donc plus la solution d'un problème suffisamment résolu; élevons les femmes, non pour aspirer à des avantages que la Constitution leur refuse, mais pour connoître et apprécier ceux qu'elle leur garantit: au lieu de leur faire dédaigner la portion de bien-être que la Société leur réserve en échange des services important qu'elle leur demande, apprenons-leur qu'elle est la véritable mesure de leurs devoirs et de leurs droits. Qu'elles trouvent, non de chimériques espérances, mais des biens réels sous l'empire de la liberté et de l'égalité; que, moins elles concourent à la formation de la loi, plus aussi elles en reçoivent de protection et de force, et sur-tout qu'au moment où elles renoncent à tout droit politique, elles acquièrent la certitude de voir leurs droits civils s'affermir et même s'accroître.

Assurées d'une telle existence par le système des lois, il faut les y préparer par l'éducation; mais développons leurs facultés sans les dénaturer; et que l'apprentissage de la vie soit à la fois pour elles une école de bonheur et de vertu.

Les hommes sont destinés à vivre sur le théâtre du monde. L'éducation publique leur convient: elle place de bonne heure sous leurs yeux toutes les scènes de la vie: les proportions seules sont différentes.

La maison paternelle vaut mieux à l'éducation des femmes; elles ont moins besoin d'apprendre à traiter avec les intérêts d'autrui, que de s'accoutumer à la vie calme et retirée. Destinées aux soins intérieurs, c'est au sein de leur famille qu'elles doivent en recevoir les premières leçons et les premiers exemples. Les pères et mères, avertis de ce devoir sacré, sentiront l'étendue des obligations qu'il impose: la présence d'une jeune fille purifie le lieu qu'elle habite, et l'innocence commande à ce qui l'entoure, le repentir ou la vertu. Que toutes vos institutions tendent donc à concentrer l'éducation des femmes dans cet asyle domestique: il n'en est pas qui convienne mieux à la pudeur, et qui lui prépare de plus douces habitudes.

Mais la prévoyance de la loi, après avoir recommandé l'institution la plus parfaite, doit encore préparer des ressources pour les exceptions et des remèdes pour le malheur. La Patrie aussi doit être une mère tendre et vigilante. Avant la destruction des vœux monastiques, une foule de maisons religieuses, destinées à cet objet, attiroient les jeunes personnes du sexe vers l'éducation publique. Cette direction générale n'étoit pas bonne; car ces établissemens n'étoient nullement propres à former des épouses et des mères. Mais du moins ils offroient un asyle à l'innocence, et cet avantage est indispensable à remplacer. On n'aura point à regretter l'éducation des Couvens; mais on regretteroit avec raison leur impénétrable demeure, si d'autres maisons non moins rassurantes et mieux dirigées ne suppléoient à leur destruction.

Chaque Département devra donc s'occuper d'établir un nombre suffisant de ces maisons, et d'y placer des institutrices dont la vertu soit le parant de la confiance publique.

Les femmes qui se consacreront à des devoirs si délicats, ne prononceront pas de vœux; mais elles prendront envers la Société des engagemens d'autant plus sacrés, qu'ils seront plus libres, et qui produiront le même effet pour la sécurité des familles.

Dans ces maisons les jeunes personnes doivent trouver toutes les ressources nécessaires à leur instruction, et sur-tout l'apprentissage des métiers différens qui peuvent assurer leur existence.

Jusqu'à l'âge de huit ans elles pourroient, sans inconvénient, fréquenter les Écoles primaires, et y puiser les élémens des connoissances qui doivent être communes aux deux sexes; mais avant de quitter l'enfance, elles doivent s'en retirer, et se renfermer dans la maison paternelle, dont il ne faut pas oublier que les maisons de retraite sont un remplacement imparfait. C'est alors qu'il faudra leur procurer d'autres secours pour s'instruire dans les arts utiles, et leur donner les moyens de subsister indépendantes, par le produit de leur travail[2].

Ainsi, prenant pour règle les termes de la Constitution, nous recommanderons, pour les femmes, l'éducation domestique, comme la plus propre à les préparer aux vertus qu'il leur importe d'acquérir. A défaut de cet avantage, nous leur assurerons des maisons retirées sous l'inspection des Départemens, et nous leur faciliterons l'apprentissage des métiers qui conviennent à leur sexe.

RÉSUMÉ.

Je vais ressaisir l'ensemble du plan que je viens de tracer.

En attachant l'Instruction publique à la constitution, nous l'avons considérée dans sa source, dans son objet, dans ses rapports, dans son organisation, dans ses moyens.

Dans sa source: elle est un produit naturel de toute société; donc elle appartient à tous, à tous les âges, à tous les sexes.

Dans son objet: elle embrasse tout ce qui peut perfectionner l'homme naturel et social; donc elle réclame des établissemens vastes et des principes libres.

Dans ses rapports: elle en a d'intimes et avec la Société et avec les individus.

Avec la Société: elle doit apprendre à connoître, à défendre, à améliorer sans cesse sa constitution, et sur-tout à la vivifier par la morale, qui est l'âme de tout.

Avec les individus: elle doit les rendre meilleurs, plus heureux, plus utiles; donc elle doit exercer, développer, fortifier toutes leurs facultés physiques, intellectuelles, morales, et ouvrir toutes les routes pour qu'ils arrivent sûrement au but auquel ils sont appellés.

Dans son organisation: elle doit se combiner avec celle du Royaume; de-là Écoles Primaires, de District, de Département, et enfin Institut national; mais elle doit se combiner avec liberté: car ses rapports ne peuvent s'identifier en tout avec ceux de l'administration; de-là aussi des différences locales, déterminées par l'intérêt de la science et par le bien public.

Les Écoles Primaires introduiront, en quelque sorte, l'enfance dans la Société.

Les Écoles de District prépareront utilement la jeunesse à tous les états de la Société.

Les Écoles de Département formeront particulièrement l'adolescence à certains états de la Société.

Dans ces Écoles on enseignera la Théologie, la Médecine, le Droit, l'Art Militaire.

Mais la Théologie, il a fallu la circonscrire; la Médecine, il a fallu la completter; le Droit, il a fallu l'épurer; l'Art Militaire, il a fallu le faciliter à tous.

L'Institut national réunit tout, perfectionne tout: donc il étoit nécessaire d'en assortir toutes les parties, de leur montrer un but, jamais un terme, et de leur imprimer, au milieu de tant de mouvemens divers, une direction ferme et rapide.

Les moyens d'instruction se sont bientôt offerts à nous: car c'est en eux et par eux que l'instruction vit et se perpétue.

Nous avons parlé des Instituteurs qu'il faut savoir choisir, honorer, récompenser; des immenses productions de l'esprit humain qu'on doit distribuer, classer, completter, purifier pour l'avantage des sciences, pour le bien de la raison; des encouragemens dûs aux promesses du talent; des prix dûs encore plus à ses services.

De-là nous sommes arrivés aux méthodes, ces premiers instrumens de nos facultés; nous avons osé en chercher pour la raison elle-même, afin d'accroître sa force, afin de lui assurer cette rectitude qui doit faire son principal caractère; nous en avons cherché pour la communication des idées, ce grand besoin de l'homme social. Là, nous avons accusé l'imperfection des langues; et en nous plaçant à la source du mal, peut-être n'avons nous pas été loin d'indiquer le remède. Nous avons voulu aussi des méthodes pour apprendre la morale: nous les avons cherchées dans la raison qui la démontre; dans le sentiment qui l'anime; dans la conscience qui la garde; dans l'intérêt même qui la conseille; dans l'histoire qui la célèbre; dans les premières habitudes qui l'impriment, etc: nous les avons demandées à tout ce qui nous entoure, aux spectacles, aux fêtes, aux beaux-arts, à ce qui nous émeut, à ce qui nous enchante; et par-tout nous avons vu que la Société réunissoit les moyens les plus féconds pour rendre les hommes meilleurs, en les rendant plus heureux.

Quittant ces méthodes générales, nous nous sommes reposés un instant sur les méthodes usuelles que sollicitent l'agriculture et les arts mécaniques: nous avons du moins formé des vœux pour leur perfectionnement, et nous avons tâché de leur obtenir cette portion d'intérêt public qu'elles méritent.

Enfin, nous avons traité à part l'éducation des Femmes. Ici, nous avons cherché les principes dans leurs droits, leurs droits dans leur destinée, leur destinée dans leur bonheur.

Il a déjà été décrété constitutionnellement sur l'Instruction:

1º. Qu'il sera créé et organisé une Instruction publique, commune à tous les Citoyens, gratuite à l'égard des parties d'enseignement indispensables pour tous les hommes, et dont les établissemens seront distribués graduellement dans un rapport combiné avec la division du Royaume.

2º. Qu'il sera établi des Fêtes Nationales.


PROJET DE DÉCRETS

SUR

L'INSTRUCTION PUBLIQUE.


ÉCOLES PRIMAIRES.

L'objet des Écoles primaires est d'enseigner à tous les enfans leurs premiers et indispensables devoirs; de les pénétrer des principes qui doivent diriger leurs actions; et d'en faire, en les préservant des dangers de l'ignorance, des hommes plus heureux et des citoyens plus utiles.

Article premier.

Chaque Administration de Département déterminera le nombre des Écoles primaires de son arrondissement, sur la demande des Municipalités, présentée par les Directoires des Districts.

Il sera établi à Paris une École primaire par Section.

II.

Les Écoles primaires seront gratuites et ouvertes aux enfans de tous les citoyens sans distinction.

III.

Nul n'y sera admis avant l'âge de six ans accomplis.

IV.

On y enseignera aux enfans, 1º. à lire tant dans les livres imprimés que dans les manuscrits; 2º. à écrire et les exemples d'écriture rappelleront leurs droits et leurs devoirs; 3º. les premiers élémens de la langue françoise, soit parlée, soit écrite; 4º. les règles de l'Arithmétique simple; 5º. les élémens du toisé; 6º. les noms des villages du canton; ceux des cantons, des districts et des villes du département; ceux des villes hors du département, avec lesquelles leur pays a des relations plus habituelles.

V.

On y enseignera, 1º. les principes de la Religion;

2º. Les premiers élémens de la morale, en s'attachant sur-tout à faire connoître les rapports de l'homme avec ses semblables;

3º. Des instructions simples et claires sur les devoirs communs à tous les citoyens et sur les lois qu'il est indispensable à tous de connoître;

4º. Des exemples d'actions vertueuses qui les toucheront de plus près, et avec le nom du Citoyen vertueux celui du pays qui l'a vu naître;

VI.

Dans les villes et bourgs au-dessus de mille âmes, on enseignera aux enfans les principes du dessin géométral.

Pendant les récréations on les exercera à des jeux propres à fortifier et à développer le corps.

VII.

Deux Notables de la Commune seront chargés de surveiller l'École primaire et de distribuer des prix tous les ans.

VIII.

Chaque Département, sur la demande des Municipalités, présentée par le Directoire du District, fixera, dans son arrondissement, le nombre des Maîtres, et celui des Écoles primaires.

IX.

Il sera ouvert un concours pour le meilleur ouvrage nécessaire aux Écoles primaires.

Les Auteurs qui voudront concourir, adresseront leur ouvrage aux Commissaires de l'Instruction publique, qui le feront passer à l'Institut national. D'après le jugement motivé de l'Institut, les Commissaires de l'Instruction publique feront leur rapport à l'Assemblée Nationale, qui prononcera sur l'envoi de l'ouvrage aux Départemens.

ÉCOLES DE DISTRICT.

Les Écoles de District offriront aux Élèves une instruction plus étendue: en les appliquant à des études plus fortes, elles donneront plus d'exercice et de développement à leurs facultés.Les jeunes gens sortiront de ces Écoles en état de bien agir pour eux-mêmes, et assez instruits pour reconnoître la profession à laquelle la nature les aura destinés.

Article premier.

Chaque Administration de Département déterminera le nombre des Écoles de District de son arrondissement.

Il sera établi à Paris six Écoles de District, qui seront réparties dans les différens quartiers de la ville.

II.

Nul ne sera admis aux Écoles de District avant l'âge de huit à neuf ans, et s'il n'est suffisamment instruit de ce que l'on enseigne dans les Écoles primaires.

III.

On y enseignera les principes de la Religion, la Morale, les Langues, l'art de raisonner, l'art oratoire, la Géographie, l'Histoire, les Mathématiques, la Physique. On formera les jeunes gens aux exercices du corps.

IV.

L'enseignement des Écoles de District sera divisé par cours. Il pourra l'être de la manière suivante: 1º. un cours de Grammaire, qui dureroit deux ans; 2º. un cours d'Humanités, ou Élémens de Belles-Lettres, qui dureroit deux ans; un cours de Rhétorique et de Logique réunies, qui dureroit deux ans, un cours de Mathématiques et de Physique, qui dureroit un an. Il y auroit, en outre, autant qu'il se pourra, un Professeur pour une langue vivante, et un Professeur de langue grecque. L'enseignement dureroit sept ans.

V.

Une École complette de District sera composée d'un Inspecteur des études ou Principal; de deux Professeurs de Grammaire; de deux Professeurs d'Humanités; de deux Professeurs de Logique et Rhétorique, réunies; les six Professeurs feroient leur cours complet, qui dureroit deux ans, et alterneroient chacun dans leur ordre. Il y aura un Professeur de Mathématiques, de Physique et des élémens de Chimie; un Professeur de Grec, un Professeur de langue vivante; en tout, dix Maîtres.

VI.

Dans le cours de Grammaire, qui dureroit deux ans, on enseignera aux enfans:

L'Histoire sacrée, la Mythologie. On leur fera apprendre par cœur la déclaration des Droits de l'homme; la morale sera mise en action par le développement des faits historiques, par l'application des Droits de l'homme. On formera leur conscience par l'idée et le sentiment de la justice.

On leur donnera l'explication combinée des élémens des langues latine et françoise, de manière qu'on n'exerce pas seulement la mémoire, mais qu'on les fasse opérer par le raisonnement. On leur fera connoître les principes de construction propres aux deux langues, et on fera l'application de ces principes dans la lecture des Auteurs françois, et l'explication des Auteurs latins.

Ils feront un cours abrégé de Géographie.

Ils rendront compte de leur travail de vive voix et par écrit, afin de se former de bonne heure au raisonnement, par l'analyse.

On les exercera pendant leurs récréations aux jeux les plus propres à développer leurs forces, et à les rendre souples et adroits. Leurs jours de congé seront destinés à des promenades, pendant lesquelles on les exercera à des marches précises qui les prépareront de loin aux évolutions militaires.

Dans les pensionnats on aura soin que chaque Élève se livre à un art d'agrément, comme la musique vocale ou instrumentale, le dessin, la danse, etc.

VII.

Dans le cours d'Humanités, qui durera deux ans, les jeunes Élèves étudieront:

La Constitution. Tous apprendront l'Acte constitutionnel dans l'espace des deux ans. Ils étudieront l'Histoire Grecque et Romaine.

Ils continueront l'étude des langues latine et françoise. On leur expliquera les Poëtes, les Historiens, les Moralistes, et on leur fera connoître les règles de la versification latine et françoise.

Même attention à les réunir pour les jeux qui donnent au corps la force et la souplesse. On leur fera exécuter des marches et des évolutions combinées. Ils continueront l'exercice de l'art agréable qu'ils auront choisi. On les formera, s'il est possible, à la natation.

VIII.

Dans le cours de Rhétorique et de Logique réunies, qui dureroit deux ans, on enseignera:

Les époques principales de l'histoire de France. On s'attachera à leur faire connoître sur-tout les révolutions arrivées dans le gouvernement du Peuple françois. On leur fera comparer les principes des gouvernemens anciens avec la Constitution françoise: on fera aussi l'application des principes de la morale à la Constitution.

On leur développeroit concurremment dans la première année les principes de la Logique, ceux de la Métaphysique et ceux de l'art oratoire.

La seconde année sera consacrée particulièrement à la composition et aux exercices d'éloquence, sur-tout dans le genre délibératif. Les discussions sur les Lois, la Morale, la Métaphysique, la Constitution, seront faites tant par écrit que de vive voix.

Pour se disposer aux fonctions qu'ils auront à remplir un jour, les jeunes gens traiteront des questions contradictoirement, tant de vive voix que par écrit. Quelquefois ils formeront une sorte de tribunal, d'assemblée administrative ou municipale; ils y rempliront tour à tour les fonctions de juges, d'accusateurs publics, de jurés, d'officiers municipaux, etc. Chacun d'eux sera obligé d'énoncer à haute voix son opinion.

C'est pendant ce cours sur-tout qu'ils pourront apprendre la langue grecque, ou une langue vivante. Ils seront exercés au maniement des armes et aux évolutions militaires, à la natation, etc.

IX.

Dans le cours de Mathématiques et de Physique, qui durera un an, on enseignera:

La Géométrie et la partie de l'Algèbre nécessaire pour entendre la mécanique dont on développera avec soin les principes applicables aux usages ordinaires de la vie.

La Physique, quelques élémens de Chimie et ceux de Botanique, dont on pourra faire l'application pratique pendant les promenades.

On continuera les exercices militaires.

X.

Il sera fait un réglement pour déterminer la distribution de ces diverses études, le temps, la durée des leçons, etc.

Les Professeurs et autres personnes pourront présenter aux Commissaires de l'Instruction publique chargés de la rédaction du réglement, leurs vues particulières et réfléchies sur le meilleur mode de distribution: ils se conformeront à l'esprit des cinq articles précédens, mais sans être tenus de s'astreindre à leur disposition littérale[3]

XI.

Il sera composé pour les différens cours des ouvrages qui comprendront des élémens d'Histoire naturelle, des instructions sur les arts, l'industrie, les manufactures de la France, des notions sur les monnoies, les poids et mesures, etc. Ces ouvrages serviront de lecture aux enfans. On leur expliquera les points les plus essentiels.

XII.

Il sera aussi composé des ouvrages élémentaires sur toutes les parties de l'enseignement des Écoles de District. Les Auteurs qui voudront concourir, adresseront leurs ouvrages aux Commissaires de l'Instruction publique, qui suivront la marche indiquée à l'article des Écoles primaires.

DES PENSIONS GRATUITES.

Les pensions gratuites sont des encouragemens accordés par la société, et distribués à ceux des jeunes gens qui, par des dispositions marquées, promettent de lui rapporter un jour le fruit de ses avances.

Article premier.

Il sera établi dans la maison principale d'éducation de chaque Département, au moins dix pensions gratuites en faveur des jeunes gens du Département, qui s'en seront rendus dignes par leur application et leurs talens.

II.

Ces pensions gratuites seront payées sur les revenus des fondations existantes pour l'éducation, dans les Collèges, Séminaires et autres maisons d'éducation du Département. Si les revenus n'étoient pas suffisans, il y sera suppléé Trésor public, sur le pied de 600 liv. par chaque pension gratuite.

III.

Il y aura de plus pour chaque Département, des pensions gratuites, destinées à des jeunes gens qui seront élevés gratuitement à Paris.

IV.

Les pensions gratuites établies à Paris, seront formées de toutes les fondations existantes à Paris pour l'éducation, de celles connues sous le nom de Bourses, dans les Collèges, Séminaires et autres maisons d'éducation.

Ces fondations seront réunies sous une seule administration, et il en sera formé des pensions gratuites d'une valeur égale.

V.

Ces pensions gratuites seront réparties entre les quatre-vingt-trois Départemens. La base de la proportion sera celle de l'imposition, de la population et du territoire.

VI.

Le directoire du Département de Paris fournira l'état des biens et revenus de ces fondations aux Commissaires de l'Instruction publique, qui présenteront le projet de répartition à l'Assemblée Nationale, pour y être par elle statué ce qu'il appartiendra.

VII.

Les jeunes gens qui auront obtenu des pensions gratuites, seront distribués en nombre égal dans les maisons qui seront établies à Paris pour l'éducation publique.

Leur pension sera payée par l'Administration des biens de l'Éducation, d'après le taux qui sera fixé.

VIII.

Lorsqu'il sera offert des souscriptions volontaires pour l'Éducation gratuite, elles seront faites aux Corps administratifs, qui traiteront de gré à gré pour la sûreté des soumissions.

L'état des souscripteurs et des souscriptions volontaires sera mis tous les ans sous les yeux du Corps législatif.

IX.

Les directoires de Département nommeront aux pensions gratuites de leur arrondissement, et ne pourront les Administrateurs faire tomber le choix sur leurs enfans, pendant le temps de leur administration.

X.

Tous les ans les Maîtres d'Écoles primaires, et ceux des Écoles de District, remettront à la Municipalité la liste de leurs Élèves, contenant leur âge, leur pays, avec des observations sur ceux qui se seront distingués par leurs progrès et leurs talens.

La Municipalité vérifiera la liste, et l'enverra au Directoire du District, qui la fera passer au Directoire du Département.

XI.

A la vacance d'une pension gratuite, chaque Directoire de District présentera au Directoire de Département les noms des six jeunes gens qui auront obtenu les témoignages les plus distingués pour leurs progrès, leur conduite et leurs talens; le Directoire de Département nommera l'un d'eux à la pluralité des voix, et en cas de partage, au scrutin individuel.

XII.

A la fin de chacun des cours d'études qui composent l'enseignement public dans les Écoles de District, les jeunes gens qui auront obtenus des pensions gratuites, seront examinés sur toutes les parties de l'instruction du cours qu'ils auront achevé. S'ils sont jugés n'avoir pas profité de leurs études, ils seront remis à leurs parens, et il sera procédé à une nouvelle nomination.

XIII.

Les Juges de cet examen seront ceux qui auront été nommés pour l'examen des éligibles aux places de l'enseignement public.

XIV.

Il sera rendu compte deux fois par an au Directoire du Département, de la conduite et des progrès des Élèves qui jouissent des pensions gratuites.

XV.

Il sera rendu, par les Commissaires de l'Instruction publique, un compte général de l'état des revenus concernant les pensions gratuites, de la conduite et des progrès des Élèves, et même de ceux qui se seront distingués d'une manière plus particulière par leurs talens.

XVI.

Les Titulaires actuels des bourses les conserveront jusqu'à la fin du cours d'étude enseigné dans les Écoles de District.

XVII.

Les bourses dites de famille, ainsi que leur nomination, si elle est réservée aux parens, seront conservées aux familles, jusqu'à l'extinction des descendans désignés par la fondation.

Ceux qui les auront obtenues, seront soumis à tous les réglemens qui concernent les Élèves nationaux.

XVIII.

Les Étudians en droit ne devant point être réunis dans des pensionnats, il n'existera point pour eux de pensions gratuites; seulement les jeunes gens sortant des Écoles de District, qui auront eu des succès très-distingués, pourront être dispensés, de la rétribution donnée au Maître. Les Commissaires de l'Instruction, sur la demande motivée des directoires des Départemens, présenteront à l'Assemblée Nationale les moyens de remplir, avec justice et économie, cet objet de l'Instruction publique.

De l'élection, de la nomination et de la destitution des Maîtres d'Écoles primaires et de District.

Les Maîtres d'Écoles primaires et de District doivent être éclairés et vertueux, puisqu'ils sont également chargés d'instruireles enfans et de les former à la vertu. Leurs talens seront donc éprouvés par des examens sévères; et les précautions qui seront prises pour leur nomination, garantiront aux pères et à la Société les qualités morales des Maîtres auxquels sera confiée l'espérance des familles et celle de la Patrie.

Article premier.

Il sera fait une liste d'éligibles dans laquelle seront choisis les Maîtres qui enseigneront, soit dans les Écoles primaires, soit dans les Écoles de District.

II.

Ceux qui se destineront à l'enseignement des Écoles primaires, se rendront à un temps indiqué chaque année, aux chefs-lieux de District qui seront déterminés par le directoire du Département. Le directoire nommera cinq Juges, dont deux au moins seront choisis parmi les Maîtres publics. Les Candidats seront examinés sur toutes les parties de l'enseignement des Écoles primaires. Ceux qui seront reçus à l'examen, seront inscrits sur la liste des éligibles.

III.

Ceux qui se destineront à l'enseignement dans les Écoles de District, se rendront à un temps indiqué chaque année, au chef-lieu du Département. Il y aura autant d'examens différens qu'il y aura de cours d'enseignement. Le Directoire du Département nommera, pour chaque examen, cinq Juges, dont deux au moins seront choisis parmi les Maîtres publics. Les Candidats seront examinés sur toutes les parties de l'enseignement du cours pour lesquels ils se seront présentés. Ceux qui seront reçus à l'examen, seront inscrits sur la liste des éligibles.

IV.

Ceux qui seront reçus à l'examen pour le cours d'Humanités, seront reçus aussi pour le cours de Grammaire. Ceux qui seront reçus à l'examen pour le cours de Rhétorique et de Logique réunies, seront aussi éligibles pour les deux premiers cours.

V.

Les Professeurs de langue vivante et de langue grecque seront nommés par les directoires des Départemens, et subiront un examen préalable avant de prendre possession de leurs Chaires, si mieux n'aiment les directoires des Départemens s'adresser, pour le choix de ces Maîtres, aux Commissaires de l'instruction publique.

VI.

Les Procureurs-syndics des Districts enverront dans la huitaine de l'examen, au Procureur-syndic du Département, la liste des éligibles pour les Écoles primaires; cette liste contiendra leurs noms, âge et pays.

VII.

Le Procureur-général-syndic du Département enverra, dans la quinzaine après l'examen, la liste de tous les éligibles du Département, aux Commissaires de l'instruction publique.

VIII.

Les Commissaires de l'instruction publique feront imprimer la liste générale de tous les éligibles pour les différens genres d'enseignement; ils y joindront la liste des Maîtres enseignans dans les Écoles publiques. Cette liste sera envoyée tous les ans à tous les Districts et Départemens du Royaume.

IX.

Lorsqu'une place de Maître d'école primaire sera vacante, le Procureur-syndic de la Municipalité en donnera avis au Procureur-syndic du District; le Directoire nommera à la place vacante, parmi tous les éligibles du Royaume.

X.

Lorsqu'une place de Maître d'École de District sera vacante, le Procureur-syndic de la Municipalité en donnera avis au Procureur-syndic du Département. Le Directoire du Département nommera à la place vacante, parmi tous les éligibles du Royaume.

XI.

Le Maître nommé recevra du Roi un brevet d'institution. Avant d'entrer dans l'exercice de ses fonctions, il prêtera le serment civique entre les mains de la Municipalité.

XII.

Nul ne sera Maître public dans les Écoles primaires ou de District avant vingt-un ans. Nul ne sera Inspecteur des Études ou Principal, qu'il n'ait été Professeur pendant cinq ans.

XIII.

A la prochaine organisation de l'éducation publique, les Maîtres seront choisis de préférence parmi ceux qui sont présentement en exercice.

XIV.

Ceux qui ne seroient pas employés, seront inscrits sur la liste des éligibles.

XV.

Les Municipalités seront chargées de l'inspection et surveillance des Écoles primaires, et les Directoires de District de la surveillance des Écoles de District.

XVI.

Les Municipalités feront connoître au Procureur-syndic du District, et les Directoires de District aux Procureurs-syndics des Départemens, les plaintes faites contre les Maîtres pour fait de leur enseignement. Ils ne pourront être destitués que par le Directoire du Département, à la pluralité des trois quarts des voix, et après avoir été entendus.

Du traitement des Maîtres.

Il a été décrété constitutionnellement que l'instruction publique seroit gratuite à l'égard des parties de l'enseignement indispensable pour tous les hommes. Ainsi l'enseignement des Écoles primaires est une dette qui sera acquittée entièrement par la Société. Si les Écoles de District sont nécessaires à un grand nombre, elles ne sont pas indispensables à tous. C'est assez pour la Société d'assurer aux Citoyens, et de leur faciliter les moyens de cette instruction. Les Maîtres des Écoles de District recevront donc de l'État un traitement fixe, strictement nécessaire. Le surplus sera acquitté par ceux qui auront intérêt à recevoir cette instruction; de manière que cette partie du paiement, variable à raison du nombre des Élèves, excite l'émulation des Maîtres, et soit la récompense de leurs talens.

Article premier.

Le traitement des Maîtres d'Écoles primaires sera gradué selon les localités. Le maximum sera de 1,000 liv., avec un local pour l'école. Le minimum sera de 400 livres.

II.

Le traitement des Maîtres d'Écoles primaires de Paris, sera de 1,000 liv.

III.

Le traitement fixe, et le traitement variable des Maîtres d'École de District de Paris, seront déterminés ainsi qu'il suit:

Les Professeurs du cours de Grammaire recevront 1,400 l., et chaque Écolier payera 24 livres par an.

Les Professeurs du cours d'Humanités, ceux de grec, et de langue vivante recevront 1,600 livres, et chaque Écolier payera 24 liv.

Les Professeurs de Rhétorique et de Logique et ceux de Mathématiques recevront 1,800 liv., et chaque Écolier payera 36 liv.

IV.

Le traitement fixe de l'Inspecteur ou Principal sera de 4,000 liv.

V.

Les Départemens proposeront la graduation du traitement fixe et variable des Professeurs, et celui du Principal, d'après la population et le mode indiqué pour la ville de Paris. L'état qu'ils auront dressé sera envoyé par eux aux Commissaires de l'Instruction, pour être, sur leur rapport, statué définitivement par l'Assemblée Nationale.

VI.

Tout Maître d'École primaire aura, après vingt ans d'exercice, son traitement pour retraite.

VII.

Tout Maître d'École de District aura aussi pour retraite, après vingt ans d'exercice, la totalité de son traitement fixe.

L'Inspecteur des Études ou Principal aura pour retraite le même traitement que les Professeurs de Rhétorique et de Mathématiques.


Nota. Il y aura à Paris quarante-huit Maîtres d'Écoles primaires, à 1,000 livres 48,000 liv.
Chacun des Collèges sera composé,  
D'un Inspecteur 4,000
D'un Maître de Mathématiques et de Physique 1,800
De deux Professeurs de Rhétorique et de Logique, réunies 3,600
     
Deux Professeurs d'Humanités 3,200
Deux Professeurs de Langues 3,200
Deux Professeurs de Grammaire 2,800
  ______
Total 18,600
  ======
Et pour six Écoles de District 111,600
Total des Écoles primaires et de District 159,600

Nota. La seule Faculté des Arts de l'Université de Paris recevoit 500,000 livres assignées sur les postes indépendamment de 70,000 liv. de rente dont l'Université étoit propriétaire.

Retraite des Professeurs actuels.

La nouvelle organisation de l'instruction publique laissera sans fonctions des hommes estimables qui s'étoient voués aux soins pénibles de l'enseignement. L'Assemblée Nationale, qui sait apprécier leurs services, ne sera pas injuste à leur égard. Quelques-uns touchent au terme qui leur donnoit droit à une pension de retraite. Nous vous proposerons de les en faire jouir dès-à-présent. D'autres en sont plus éloignés, et pour ceux-ci, nous établirons un mode de traitement proportionné à la durée de leurs services. Toutefois nous observerons que la presque totalité pourra être employée dans les nouvelles Écoles.

Article premier.

Les Maîtres publics retirés avec la pension d'émérite, la conserveront toute entière.

II.

Ceux qui sont encore en exercice et qui ont rempli le temps prescrit, obtiendront en entier leur pension d'émérites.

III.

Les Professeurs actuels de l'Université de Paris, qui n'ont pas encore atteint l'éméritat et qui ne seront pas employés dans l'enseignement public, auront une pension de retraite fixée d'après les proportions suivantes:

Ceux qui ont moins de cinq ans d'exercice, auront 500 liv.

Ceux qui ont plus de cinq ans et moins de dix ans d'exercice, auront 800 liv.

Ceux qui auront plus de dix et moins de quinze ans d'exercice, auront 1,100 liv.

Ceux qui ont plus de quinze ans d'exercice, auront 1,400 liv.

IV.

Les Professeurs de l'Université qui ont quitté leur chaire pour refus de prestation de serment, auront une pension de 500 livres.

V.

Les Professeurs et Maîtres publics de tous les Départemens, qui ne seront pas employés dans la nouvelle organisation publique, auront une retraite graduée d'après le mode qui vient d'être établi.

VI.

Tous Officiers, Appariteurs, et autres personnes attachées aux Universités, et dont les emplois sont supprimés, recevront une pension ou une indemnité, d'après l'avis des Départemens, qui sera présenté aux Commissaires de l'Instruction publique pour en être rendu compte à l'Assemblée Nationale.

Des pensionnats.

Les pensionnats sont destinés à remplacer les soins de la maison paternelle pour les enfans, à l'égard desquels les occupations de leurs pères ne permettent pas de suivre les détails journaliers de l'éducation; la société veut que les enfans élevés dans les principes de l'égalité, habitués à l'ordre et au travail, encouragés par l'émulation et l'exemple, soient rendus à leur famille, tels qu'un père sage auroit désiré les avoir formés lui-même.

Article premier.

L'Inspecteur ou Principal chargé du maintien de la discipline, aura soin que l'ordre établi par la loi soit invariablement observé par les Maîtres et par les Élèves.

II.

Tous les soins de la recette et de la dépense seront confiés à un Économe, qui rendra ses comptes tous les mois en présence de l'Inspecteur ou Principal, et de deux membres de la Municipalité. Les comptes seront vérifiés chaque année par le Directoire de District, et arrêtés par le Directoire du Département.

III.

Tous les citoyens étant égaux devant la loi, il n'y aura aucune distinction entre les enfans; soumis à la même règle, nourris à la même table, ils seront élevés ensemble et par des maîtres communs.

IV.

Pour accoutumer les jeunes gens à connoître les convenances sociales, à respecter leurs droits et leurs devoirs réciproques, on cherchera les moyens de les associer en quelque sorte au gouvernement des pensionnats, et de les faire concourir, par leurs volontés et leurs jugemens, au maintien du bon ordre. Il sera composé par les Commissaires de l'Instruction publique, un réglement pour parvenir à ce but; mais ce réglement ne sera envoyé aux Départemens, que lorsqu'ils auront jugé que les progrès de la raison et une éducation plus soignée et mieux dirigée, en auront facilité l'exécution.

ÉCOLES DE DÉPARTEMENT.

Écoles pour les Ministres de la Religion.

L'Instruction réservée aux Ministres du culte, intéresse la Nation par les nombreux rapports qu'elle peut avoir avec le bien des Peuple. L'Assemblée Nationale veut que ceux qui se destinent à cette profession, trouvent, dans les Écoles publiques, l'enseignement le plus complet sur tout ce qui appartient essentiellement à un Ministère de charité; mais elle juge qu'il est de son devoir d'en écarter, avec soin, tout enseignement qui ne seroit visiblement propre qu'à égarer les esprits et à porter le trouble dans la société.

Article premier.

Chaque Département jugera s'il lui est utile d'avoir un Séminaire particulier, ou s'il n'est pas meilleur pour lui de s'associer, pour ce genre d'instruction, à un Département voisin.

Les Séminaires métropolitains pourront servir pour tous les Diocèses de leur ressort.

II.

Il y aura dans chaque Séminaire deux Professeurs, dont les leçons seront publiques et en françois: elles comprendront exclusivement, 1º. les titres fondamentaux de la Religion catholique puisés dans leur source; 2º. l'exposition raisonnée des divers articles que doit comprendre explicitement la croyance de chaque fidèle; 3º. le développement de la morale de l'évangile; 4º. les lois particulières aux Ministres du culte catholique; 5º. les principes, ainsi que les objets habituels de la prédication; 6º. les détails appartenans à un ministère de consolation et de paix, soit dans l'administration des sacremens, soit dans le gouvernement des paroisses.

L'enseignement complet ne durera pas plus de deux ans.

III.

Il y aura en outre un Supérieur, un Économe et un Suppléant, ou tout au plus deux dans les grandes Villes.

IV.

Ils seront tous nommés par le Directoire du Département, conjointement avec l'Évêque, et seront pris sur une liste d'éligibles, faite d'après le mode déterminé pour les Écoles de District.

V.

Ils seront logés et nourris. Le maximum de leur traitement sera de 1,000 liv., le minimum de 600 liv. Les Professeurs recevront en outre une rétribution annuelle des Élèves, qui nulle part ne pourra excéder 24 liv. par an. Le supérieur aura 1,200 liv, de fixe, et 1,500 liv. à Paris.

VI.

Les Professeurs qui ne voudroient pas être nourris dans le Séminaire, auront les mêmes appointemens que les Professeurs de Logique des Écoles de District.

VII.

Au bout de vingt ans ils obtiendront la pension d'émérite: elle sera, pour les uns et les autres, de la totalité des appointemens fixes attribués aux Professeurs externes. Dans le cas où, à cette époque, ils accepteroient une place à appointemens, leur pension seroit réduite, mais ne pourroit l'être de plus de moitié.

VIII.

Le Directoire du Département déterminera le prix de la pension que payeront les Élèves qui voudront mener une vie commune dans le Séminaire.

IX.

Les Supérieurs, Directeurs, Professeurs, Économes des Séminaires, pourront être destitués par le Directoire du Département, mais seulement à la majorité des trois quarts des voix.

X.

Toutes les anciennes chaires, Écoles, et facultés de Théologie et de Droit-Canon sont supprimées.

XI.

Toutes les fondations de bourses, affectées à l'étude de la Théologie et du Droit-Canon, seront regardées à l'avenir comme fondations appartenantes à l'éducation en général, et suivront le sort des autres bourses en tout ce qui sera décrété à cet égard par l'Assemblée Nationale.

XII.

Et néanmoins tous ceux qui sont en ce moment légitimement pourvus d'une bourse de Théologie, pourront continuer d'en jouir jusqu'à la fin de leur nouveau cours d'études théologiques, s'ils n'aiment mieux achever le temps qui leur restoit à courir dans tout autre cours de science, auquel cas ils s'adresseront au Directoire du Département dans lequel leurs bourses sont établies, pour faire autoriser cette conversion.

XIII.

Quant aux Boursiers-Théologiens qui n'auront pas opté pour un autre cours d'Études, ils seront tous réunis dans le Séminaire Métropolitain du ressort où se trouvent leurs bourses.

XIV.

Tout établissement fondé pour l'enseignement de la Théologie, ou pour réunir des Étudians en cette partie, lors même qu'il seroit régi par des congrégations non supprimées, est converti en simple établissement d'éducation. Les biens, revenus et maisons, formant lesdits établissemens et tous autres vacans, seront provisoirement administrés, ainsi que le sont les biens, revenus et maisons des Collèges, sous la direction des administrations de Département.

XV.

Les Supérieurs, Directeurs, Professeurs et autres personnes employées dans lesdits établissemens, soit qu'ils appartiennent aux Ordres religieux abolis, ou à quelque Congrégation séculière non encore supprimée, soit enfin qu'ils n'appartiennent à aucune Corporation, auront droit à un traitement viager, qui sera proportionnellement réglé par un Décret particulier.

XVI.

Le mode des épreuves, la nature et la durée des examens, l'ordre des leçons, etc. comme aussi le traitement des Directeurs et Économe, seront l'objet d'un réglement.

ÉCOLES DE MÉDECINE.

Le bien public, autant que l'intérêt de la science, demande que les différentes parties de la Médecine, qui, jusqu'à ce jour, ont été enseignées et pratiquées séparément, soient réunies; que l'enseignement se fasse auprès des grands rassemblemens de malades; qu'une instruction élémentaire etpréparatoire commence dans tous les Départemens, et qu'elle se termine dans un petit nombre d'Écoles où l'enseignement sera complet, et où la faculté de pratiquer la Médecine, dans tout le Royaume, sera accordée, d'après des examens sévères sur le savoir, et non sur le temps des études.

Article premier.

Il sera établi en France quatre grandes Écoles nationales de l'art de guérir, sous le nom de Collèges de médecine, dont l'un sera placé à Paris un à Montpellier, un à Bordeaux et un à Strasbourg. L'enseignement complet de la médecine, de la chirurgie et de la pharmacie sera fait également dans ces quatre Collèges, par douze Professeurs entre lesquels seront partagées toutes les parties théoriques et pratiques de cet enseignement, conformément à l'état ci-joint (page 164).

II.

A chacun des quatre Collèges de médecine, sera annexé un hôpital dans lequel la médecine, la chirurgie et l'art des accouchemens seront enseignés près du lit des malades.

III.

Il sera formé dans chaque Département, auprès des hôpitaux civils, militaires et de la marine, des écoles secondaires de médecine, dans lesquelles les Médecins attachés à l'hôpital enseigneront les élémens de l'art de guérir; et les Pharmaciens, ceux de la pharmacie.

IV.

Il sera établi dans les hôpitaux, disposés pour l'enseignement, des bourses pour défrayer entièrement ou en partie des Élèves choisis qui seront employés dans l'hôpital à l'une des parties du service. Les Départemens détermineront l'étendue et l'application de ce secours.

V.

Les chaires de toutes les écoles de médecine seront données au concours: le mode de rénovation des maîtres sera déterminé par un réglement particulier.

VI.

Le traitement de chacun des professeurs consistera, 1º., en appointemens qui lui seront payés par le trésor public; 2º. en une rétribution qui lui sera payée par chacun des Étudians qui voudra suivre ses leçons. Un réglement particulier en déterminera la quotité.

VII.

Les Élèves seront absolument libres pour le lieu, l'époque, l'ordre, la durée et le mode de leurs études. En conséquence ils ne seront tenus ni à s'inscrire sous les différens Professeurs, ni à présenter des certificats d'assiduité, mais tous ceux qui voudront exercer l'art de guérir ou la pharmacie, subiront préalablement, dans un des quatre Collèges de médecine, les épreuves déterminées pour l'une et pour l'autre partie par le Corps législatif.

VIII.

Dans ces examens les Candidats répondront de vive voix aux questions qui exigent des démonstrations, par écrit à celles qui n'en exigent pas.

IX.

L'examen de Médecine pratique se fera dans l'Hôpital où l'École Clinique aura été établie, et près du lit des malades sur l'état et sur le traitement desquels l'Élève donnera par écrit son avis motivé. Ce sera sur cet écrit qu'il sera jugé définitivement par les Examineurs.

X.

Tout homme âgé de vingt-cinq ans, qui, dans ces preuves, aura été reconnu capable d'exercer l'art de guérir, sera déclaré Médecin.

XI.

Sous cette dénomination de Médecin, seront compris à l'avenir tous les individus qui étoient ci-devant désignés sous les noms de Médecins et de Chirurgiens; les études, les épreuves, les droits et les devoirs seront les mêmes pour les uns et pour les autres, sans aucune distinction quelconque.

XII.

Les Médecins reçus dans l'un des quatre grands Collèges, pourront exercer la Médecine dans toute l'étendue de l'Empire François. Il suffira qu'après avoir fait reconnoître leurs lettres de réception, ils se fassent inscrire sur le registre de la Municipalité, dans le ressort de laquelle ils se proposeront d'exercer leur art. Eux seuls seront admissibles au titre et aux fonctions, soit publiques, soit privées, de leur profession, pour l'enseignement, la pratique et les rapports, dans tous les établissemens civils et militaires.

XIII.

Tous ceux qui, à l'âge de vingt-cinq ans, auront été trouvés capables d'exercer la Pharmacie, seront déclarés Pharmaciens; ils pourront seuls exercer cette profession dans toute l'étendue du Royaume.

XIV.

L'ordonnance et la vente des médicamens sont incompatibles; aucun individu ne pourra, hors le cas de nécessité, joindre les fonctions de Médecin à celles de Pharmacien.

XV.

Toute personne non reçue Médecin ou Pharmacien, dans un des grands Collèges de Médecine, qui en prendra le titre dans un acte ou un écrit quelconque, ou qui se permettra d'exercer habituellement la Médecine ou la Pharmacie, sera punie d'une amende de cinq cents livres.

XVI.

Les réceptions seront gratuites.

XVII.

Les concours, les leçons, les examens, les réceptions, tous les actes et tous les exercices des Écoles de Médecine, se feront publiquement et en langue françoise.

XVIII.

Il sera établi dans un des hôpitaux de chaque Département, une école de l'art des accouchemens, à laquelle seront appellées les Sages-femmes des divers Départemens.

XIX.

Tout Corps de Médecine, de Chirurgie et de Pharmacie, connus sous les noms de Facultés, de Collèges, de Communautés; toutes charges, tous privilèges, relatifs à l'art de guérir ou à la Pharmacie, sont supprimés, à dater du présent Décret; toutes réceptions de Médecins, de Chirurgiens et de Pharmaciens sont interdites jusqu'à rétablissement des nouvelles Écoles de Médecine.

(On estime à-peu-près à 240,000 livres la dépense annuelle des quatre Collèges de Médecine).

Nota. Les formes des concours, des épreuves, des réceptions, l'organisation des Écoles, l'ordre et la durée des leçons, la division des parties d'enseignement entre les Professeurs, la fixation de leur traitement particulier, seront l'objet d'un Réglement.

TABLEAU

De l'enseignement qui sera fait dans chacun des quatre Collèges de Médecine.

1º. Cours de Physique Médicale et d'Hygiène, faits séparément un Professeur.
2º. Cours d'Anatomie et de Physiologie, faits séparément un Professeur.
3º. Cours de Chimie un Professeur.
4º. Cours de Pharmacie-pratique. Ce Cours très-détaillé sur la connoissance et la préparation des drogues médicinales, sera sur-tout nécessaire à l'instruction des Élèves en Pharmacie. Il sera toujours fait par un Pharmacien un Professeur.
5º. Cours de Botanique et de Matière médicale, faits séparément un Professeur.
6º. Cours de Médecine théorique ou d'instituts, comprenant la Pathologie, la Séméiotique,la Nosologie et la Thérapeutique un Professeur.
7º. Cours d'Histoire de la Médecine, des progrès de l'art, de la méthode de l'étudier; Cours de Médecine légale, faits séparément un Professeur.
8º. Cours de Médecine-pratique des maladies internes, fait, partie au lit des malades, partie dans une salle voisine deux Professeurs.
9º. Cours de Médecine-pratique des maladies externes, fait, partie au lit des malades, partie dans une salle voisine deux Professeurs.
10º. Cours théorique et pratique d'accouchemens, des maladies des femmes en couche, et de celles des enfans un Professeur.

Ce tableau est conforme à celui qui a été rédigé par le Comité de Salubrité, et à celui qui a été présenté par le Comité de Médecine à l'Assemblée Nationale, en 1790. (Voyez Nouveau Plan de Constitution pour la Médecine, etc. pag. 19 et 20).

Écoles pour l'enseignement du Droit.

L'enseignement du Droit doit être tellement ordonné, qu'il soit réparti, autant qu'il est possible, à des distances égales, et dans des villes considérables: il doit être complet dans son ensemble, distribué de manière que chaque Maître atteigne plus facilement la perfection; que, parmi les Élèves, ceux dont l'esprit conçoit rapidement le saisissent à-la-fois tout entier; que ceux dont l'intelligence est plus lente, se le partagent à leur gré dans un temps plus étendu; que, dans les épreuves à subir par les aspirans, aucun intérêt ne laisse de soupçon sur l'impartialité du jugement; que l'émulation des Élèves multiplie leurs efforts au profit de la science, et que leur réputation les désigne pour les places que distribue l'estime publique. Nous proposons le projet de Décret suivant:

Article premier.

Il y aura dix Écoles de Droit, chacune dans un chef-lieu de Département[4].

II.

Dans chaque École de Droit, il y aura quatre Professeurs, un de constitution, qui enseignera en même-temps le droit naturel, un de droit civil, un de droit coutumier, un de forme civile et criminelle. A Paris, il y aura huit Professeurs, deux de chaque espèce.

III.

Les Législatures détermineront le temps où une partie de l'enseignement sera changée, à raison des nouvelles lois qui auront été faites.

IV.

Chaque Professeur donnera son cours entier en dix mois. Les leçons se feront en françois. Elles auront lieu tous les jours, excepté les dimanches et fêtes, et à des heures différentes.

V.

Les Professeurs seront choisis, la première fois par les Directoires de Département, parmi les membres des Facultés de Droit actuellement en exercice pour l'enseignement ou pour la collation des degrés. S'il n'y en a pas qui puissent être choisis, le Directoire de Département nommera un membre d'une autre Faculté de Droit, ou enfin pourra choisir des hommes de loi. Dans la suite, quand il viendra à vaquer des chaires, le choix sera fait, parmi les hommes de loi, par les Directoires de Département, conjointement avec les Professeurs de Droit. Il sera pourvu de la même manière à la nomination des suppléans.

VI.

Pour destituer un Professeur de Droit, il faudra les trois quarts des voix de tout le Directoire du Département.

VII.

Le traitement des Professeurs de Droit sera en partie fixe et en partie casuel. Le traitement fixe sera payé tous les trois mois, par le Trésorier public; le traitement casuel, tous les mois, par chaque Étudiant. A Paris, le fixe annuel sera de trois mille livres; le casuel, par mois, de douze livres; dans les autres villes de Département, le fixe, de deux mille quatre cents livres, le casuel, de neuf livres.

VIII.

Les membres ci-dessus désignés des Écoles de Droit, qui ont maintenant ou qui auront servi vingt ans dans les Écoles, auront l'éméritat, et, pour pension de retraite, les deux tiers du traitement fixe marqué ci-dessus. Ceux qui auront maintenant plus de quinze ans d'exercice, et qui ne seront pas conservés, seront, pour cette fois seulement, regardés comme émérites.

IX.

Les membres des Facultés de Droit qui ne seroient pas employés dans la nouvelle organisation, s'ils ont de dix à quinze ans de service, recevront les trois cinquièmes du traitement fixe, de cinq à dix ans la moitié, et au-dessous les deux cinquièmes[5].

X.

Le traitement, ou la retraite des Officiers attachés aux Écoles de Droit, sera réglé par la Législature suivante, sur la demande des Directoires de Département.

XI.

Pour acquérir la qualité d'homme de loi, il faudra être reçu après un examen sur toutes les matières de l'enseignement du Droit. L'examen sera gratuit.

XII.

L'examen se fera en public; le Candidat sera interrogé par les Professeurs et par les Étudians.

XIII.

Les suffrages seront donnés au scrutin par les Professeurs. Il faudra, pour être admis ou refusé, la pluralité des suffrages. Si le Candidat est admis, il lui sera délivré une Patente d'Homme de loi, signée des Professeurs de Droit, et scellée du sceau du Département. Si le Candidat est refusé, il pourra se représenter dans la même Faculté, ou dans un autre à son choix.

XIV.

Lorsqu'il se présentera, le Candidat sera interrogé en public par les Professeurs, conjointement avec quatre hommes de loi nommés par le Département, lesquels auront suffrage au scrutin avec les Professeurs.

XV.

Celui qui sera refusé dans ce second examen, ne pourra se représenter à un troisième, qu'il n'ait suivi assiduement le cours entier des quatre Professeurs dans une École de Droit quelconque; alors il subira, dans l'École qu'il choisira, ce troisième examen, suivant la forme prescrite pour le second. Cette troisième fois, s'il est refusé, il ne pourra plus se représenter.

XVI.

Afin qu'un Candidat non admis dans un Département, ne subisse pas dans un autre une épreuve du même genre que celle d'après laquelle il aura été rejetté, chaque École de Droit tiendra un registre où seront marqués les admissions et les refus. Un relevé de ce registre sera envoyé, tous les mois, à Paris, aux Commissaires de l'Instruction publique, lesquels adresseront, s'il y a lieu, un certificat portant que le récipiendaire a subi le genre d'examen auquel il étoit tenu de se présenter.

XVII.

Dans les quinze derniers jours de l'année scholastique, les Étudians en Droit non reçus Hommes de loi, ou reçus dans le cours de l'année, pourront se présenter à l'École de Droit, pour subir l'épreuve suivante, que l'on appellera licence en Droit. Chacun des Candidats, à son tour qui sera réglé par le sort, soutiendra, en public, un examen, dans lequel les concurrens lui feront, sur la manière de l'enseignement, les questions qu'il leur plaira de proposer. Les Professeurs seront juges, et après en avoir conféré entre eux et pris pour arrêté l'avis de la majorité, ils proclameront la moitié des Candidats la plus méritante, et marqueront l'ordre que chacun aura obtenu dans leur estime. Ce tableau des places sera exposé, pendant vingt ans, dans l'École de Droit, dans les Tribunaux de Districts du Département, dans les salles des assemblées primaires, dans celles des Électeurs, et transcrit, au Département dans un registre particulier que tous les citoyens pourront toujours consulter.

Chaque Département enverra, au Commissaire du Roi chargé des Écoles de Droit,[6] le nom du premier de la licence. Le Commissaire du Roi fera une liste générale des premiers de licence en Droit dans le Royaume; il l'adressera à tous les Départemens, pour qu'elle y soit affichée, pendant vingt ans, dans un tableau particulier. Il sera tenu de la présenter au Ministre de la Justice, lorsqu'il y aura des nominations à faire par le Roi, pour le service des Tribunaux.

Traitement.

Dans la nouvelle organisation, il y a neuf Écoles de Droit à quatre Professeurs chacune: Paris en a huit, ce qui fait en tout quarante-quatre.

Paris, huit fois 3,000 livres 24,000 liv.
Les autres Écoles, neuf fois 2,400 livres, multipliées par quatre 86,400
Le traitement des Officiers-appariteurs pourra être évalué à 5,000
Total des traitemens 115,400

Retraite.

Du nombre total de cent vingt individus qui composoient les Facultés de Droit dans l'état passé, retranchant les quarante-quatre qui feront le service des nouvelles Écoles, il resta soixante-seize personnes non employées.

Sur ce nombre, vingt-cinq au moins ont droit à la vétérance. Paris lui seul en a huit; à 2,000 liv. 16,000
Les autres Facultés, dix-sept à 1,600 livres 27,200
La retraite des Officiers vétérans de ces Facultés pourra être estimée à 3,000
Total pour les vétérans 46,200

Les personnes qui n'ont pas la vétérance sont, d'après ce calcul, au nombre de cinquante-une.

Le choix des Départemens, pour former les nouvelles Écoles, tombera naturellement sur les personnes de moyen âge: celles qui ne seront pas placées se trouveront dans la classe de la moindre ancienneté pour le service: elles auront entre la moitié et les deux cinquièmes du traitement. Évaluant, l'un dans l'autre, la part de chacun à 1,000 livres, on a pour résultat 51,000
La retraite pour les Officiers non-vétérans pourra s'estimer 3,000
Total présumé des retraites 100,200

ÉCOLES MILITAIRES.

Les Écoles Militaires ont pour objet de former des hommes de guerre pour un Pays libre, des Chefs-Citoyens, des Soldats subordonnés; de placer à côté de l'armée de grandes pépinières où elle puisse toujours trouver des sujets déjà capables d'une utile activité, et par-là d'ouvrir la carrière militaire à toutes les classes de Citoyens, en offrant à leur disposition les études nécessaires pour obtenir les premiers grades d'Officiers.

Leurs moyens sont une instruction commune sur les élémens de toutes les connoissances qui se rapportent à l'art de la guerre, la pratique de tous les exercices et de tous les devoirs que commande cette profession, la surveillance active d'anciens Officiers, qui, dans cette même profession, ont bien mérité de leur Patrie; enfin, tous les ressorts de l'émulation et toute l'influence des bons exemples.

Article premier.

Il sera établi dans chacune des vingt-trois Divisions militaires, une École de Division qui sera commune à tous les Départemens dont se compose la même Division. On y recevra les sujets que leurs parens destinent à devenir Officiers, et qui n'auront ni moins de 14 ni plus de 16 ans. Ils y feront pendant deux ans les études nécessaires pour acquérir les premières connoissances militaires; on leur enseignera le maniement des armes, les Langues allemande et angloise, le Dessin, les Élémens de Mathématiques appliqués à l'art de la Guerre, la Géographie, l'Histoire, et sur-tout un Catéchisme de Morale social et politique, dans lequel seront exposés les droits et les devoirs de l'homme en société relativement à l'État et à ses semblables les Devoirs de l'homme de Guerre relativement à ses chefs et ses subordonnés.

II.

Il sera établi six grandes Écoles militaires pratiques dans les Places frontières, les plus importantes. Les jeunes gens de l'âge de 16 ans qui auront suivi l'École de Division pendant deux années, seront admis dans celles-ci par la voie du concours. Ils y répéteront pendant deux autres années leurs premiers cours d'étude avec plus d'étendue et de développement: on leur expliquera un traité de fortification, les élémens de l'artillerie, et ils seront en outre exercés à la pratique de tous les détails et de tous les devoirs militaires. En conséquence il sera entretenu gratuitement dans chacune des grandes Écoles un nombre suffisant d'élèves pour former un Régiment. Ces élèves seront nommés par les Départemens à proportion de ce que chacun d'eux fournit communément, de Soldats à l'armée, et choisis de préférence parmi les enfans d'anciens Soldats, et les pauvres Orphelins.

III.

Ces grandes Écoles seront toujours établies dans un corps de caserne, qui n'aura point de communication immédiate avec un autre. Le Régiment composé des Élèves qui seront répartis dans les différentes Compagnies, soit comme Officiers, soit comme Soldats, et commandés par d'anciens Officiers de Troupes de ligne, qui seront susceptibles des grades supérieurs, y fera le service intérieur; comme dans une Place de Guerre, et devra même concourir plusieurs jours de l'année au service de la Place avec le reste de la Garnison.

IV.

Les détails de l'organisation de ces différentes Écoles, et les règles suivant lesquelles les Élèves en sortiront, pour entrer dans les Troupes de ligne, appartenans au système militaire, seront déterminés par des lois particulières.

INSTITUT NATIONAL.

PROJET DE DÉCRETS.


Article premier.

Les Académies et Sociétés savantes entretenues aux frais du Trésor public, les Chaires établies à Paris, au Jardin du Roi, au Collège Royal, à celui de Navarre, à l'Hôtel des Monnoies, au Louvre, au Collège des Quatre-Nations pour l'enseignement de la Littérature, des Mathématiques, de la Chimie et de quelques parties de la Physique, de l'Histoire Naturelle, et de la Médecine, seront supprimées, et il y sera suppléé comme il suit:

II.

Il sera établi à Paris, un grand Institut qui sera destiné au perfectionnement des Lettres, des Sciences et des Arts.

III.

Cet Institut sera composé de l'élite des hommes reconnus pour être les plus distingués dans tous les genres de savoir, et dont les uns se réuniront à des jours marqués pour conférer ensemble sur la manière de hâter les progrès de leurs travaux, tandis que les autres enseigneront ces divers Arts ou Sciences à ceux qui désireront s'instruire dans ce que ces connoissances offrent de plus difficile et de plus élevé.

IV.

L'Institut national sera divisé en deux grandes sections, dont chacune sera composée de dix classes.

V.

L'une de ces sections, qui sera celle des Sciences philosophiques, des Belles-Lettres et des Beaux-Arts, comprendra 1º. la Morale; 2º. la science des Gouvernemens; 3º. l'Histoire et les Langues anciennes et les antiquités; 4º. l'Histoire et les Langues modernes; 5º. la Grammaire; 6º. l'Éloquence et la Poësie; 7º. la Peinture et la Sculpture; 8º. l'Architecture-décorative; 9º. la Musique; 10º. l'Art de la déclamation.

VI.

L'autre section, qui sera celle des Sciences mathématiques et physiques et des Arts, comprendra; 1º. les Mathématiques et la Mécanique; 2º. la Physique; 3º. l'Astronomie; 4º. la Chimie et la Minéralogie; 5º. la Zoologie et l'Anatomie; 6º. la Botanique; 7º. l'Agriculture; 8º. l'Art de guérir; 9º. l'Architecture sous le rapport de la construction; 10º, les Arts.

VII.

Les personnes attachées aux six premières classes de la section des Sciences philosophiques, des Belles-Lettres et des beaux Arts, savoir: de la Morale, de la Science des Gouvernemens, de l'Histoire tant ancienne que moderne, de la Grammaire, de l'Éloquence et de la Poësie, se rassembleront pour s'organiser et tenir des séances en commun.

VIII.

De même les personnes composant les six premières classes de la section des Sciences Mathématiques et Physiques et des Arts, savoir: les classes de Mathématiques et de Mécanique, de Physique, d'Astronomie, de Chimie et de Minéralogie, de Zoologie et d'Anatomie et de Botanique, se réuniront pour s'organiser ensemble et tenir des séances en commun.

IX.

Chacune des quatre dernières classes des deux sections, savoir: dans l'une, la Peinture et la Sculpture, l'Architecture-décorative, la Musique, l'Art de la déclamation; et dans l'autre, l'Agriculture, l'Art de guérir, l'Architecture-construction et les Arts, tiendra des séances particulières.

X.

Néanmoins aux séances particulières de ces huit classes, seront admises, comme membres intimes, les personnes attachées à celles des six premières classes des deux sections qui auront des rapports directs avec leurs travaux; c'est-à-dire, que les membres des classes de Poësie, d'Histoire et d'Anatomie seront admis aux séances de la classe de Sculpture et de Peinture; que ceux de la classe d'Architecture décorative le seront aux séances de la classe d'Architecture-construction; que ceux de la classe d'Éloquence et de Poësie, seront reçus dans celles de la classe de Déclamation; que ceux des classes de Botanique et de Chimie le seront dans celles de la classe d'Agriculture; que ceux des classes de Chimie, d'Anatomie et de Botanique le seront dans celles de la classe de l'Art de guérir; que ceux de la classe de Mathématiques et de Mécanique le seront dans celles de la classe d'Architecture considérée sous le rapport de la Construction; et que ceux des classes de Mécanique, de Physique, de Chimie et de Botanique le seront dans celles de la classe des Arts.

XI.

Chacune de ces Divisions ou Classes sera dirigée dans ce qui sera commun à toutes, c'est-à-dire, pour ce qui concernera la tenue des assemblées, les fonctions des Officiers, le choix des membres, les travaux en général et l'Administration des fonds, par un Réglement commun que le comité central, dont il est parlé dans l'article 37, rédigera. De plus chacune aura, pour ce qui sera relatif à ses occupations et fonctions propres, un réglement particulier.

XII.

Il n'y aura dans ces Divisions ou classes des deux Sections de l'Institut National aucun office perpétuel. Le Directeur sera élu au Scrutin pour une année. La majorité absolue sera nécessaire dans cette élection. Le Secrétaire sera élu de même, mais pour dix années seulement, après lesquelles il sera procédé à une nouvelle élection. L'ancien Secrétaire pourra être élu de nouveau.

XIII.

Il régnera parmi tous les Membres de l'Institut National une parfaite égalité. Chacun d'eux aura le droit d'assister aux séances ou exercices de toutes les Divisions ou Classes qui le composent. Il y aura même pour eux des places marquées; mais ils n'auront voix délibérative que dans celle des Divisions ou Classes auxquelles ils appartiendront, comme membres intimes.

XIV.

Les élections des membres de l'Institut seront faites au scrutin et à la majorité absolue des suffrages, soit dans chacune des deux Divisions formées des six premières classes de chaque Section, soit dans chacune des huit autres classes qui s'assemblent séparément, sans que ces élections aient besoin, pour être valables, d'être confirmées. Le Roi fera délivrer une patente aux nouveaux reçus pour constater leur nomination.

XV.

Un mois avant de procéder à l'élection, il sera fait par les divisions ou classes, dans la Section de laquelle la place sera vacante, une liste d'éligibles, qui demeurera affichée dans les salles d'assemblée jusqu'au jour de l'élection. Dans la Section des sciences Mathématiques et Physiques, la principale division et les quatre autres classes seront autorisées à faire réciproquement des listes d'éligibles lorsqu'il vaquera une place; dans l'une d'elles. Dans la Section des sciences Philosophiques, des Belles-Lettres et des Beaux Arts, les deux dernières classes ne feront point de liste d'éligibles pour la division où les six premières classes seront réunies.

XVI.

Le nombre des membres de chaque division ou classe de l'Institut, sera fixé comme il suit.

La première division formée des six premières classes de la Section des sciences Philosophiques, belles Lettres et Beaux Arts, sera composés de 64 Membres; savoir, de 8, pour la classe de Morale; de 8, pour celle de la science des Gouvernemens; de 12, pour la classe d'Histoire, des Langues anciennes et des antiquités, de 12, pour celle de l'Histoire et des Langues modernes; de 8, pour la classe de la Grammaire; et de 16, pour celle d'Éloquence et de Poësie.

La seconde division formée des six premières classes de la Section des sciences Mathématiques et Physiques et des Arts, sera également composée de 64 Membres; savoir, de 16, pour la classe de Mathématiques et de Mécanique; de 8, pour celle de Physique; de 8, pour celle d'Astronomie; de 12, pour la classe de Chimie et de Minéralogie; de 12, pour la classe de Zoologie et d'Anatomie; et de 8, pour celle de Botanique[7].

La classe d'Agriculture sera composée de 60 membres.

La classe de l'Art de guérir sera composée des personnes les plus habiles dans les différentes parties de cet Art, c'est-à-dire, dans la Médecine, dans la Chirurgie, dans la Pharmacie et dans l'Art Vétérinaire; elle sera formée de 60 membres, dans les proportions suivantes. Il y aura trois cinquièmes de Médecins, un cinquième de Chirurgiens, et un cinquième de Pharmaciens et de Médecins Vétérinaires.

XVII.

Les divisions ou classes qui auront le perfectionnement de l'Histoire Naturelle, de la Physique et de la Médecine pour objet, publieront annuellement les recueils de leurs mémoires, et elles entretiendront avec les Savans, soit Règnicoles dans les 83 Départemens, soit Étrangers, une correspondance exacte et suivie, dans l'intention de recueillir les découvertes utiles à l'humanité.

XVIII.

Les classes de Peinture et de Sculpture, celles d'Architecture-décorative et d'Architecture-construction, celle des Arts Physiques et Mécaniques, celle de Musique et de Déclamation, formeront des Écoles élémentaires, dont les Maîtres, en même-temps qu'ils se réuniront, pour traiter de leur Art, seront occupés du soin de former des Élèves. Ces Écoles seront organisées à-peu-près sur le même plan que les Écoles de Peinture et de Sculpture actuelles, avec des changemens et des modifications qui seront proposés par ceux que l'opinion publique a fait connoître comme les plus habiles dans les différens Arts dont il s'agit.

XIX.

Les divisions ou classes de l'Institut national rendront compte à chaque législature; 1º. De leurs travaux annuels, des progrès de l'art ou de la science dont elles seront occupées, et de la part, qu'elles y auront eue; 2º. Du choix de leurs membres et des motifs qui les auront déterminées dans leurs choix.

XX.

Les fonds dont chaque division ou classe de l'Institut pourra disposer, seront remis à un Trésorier qui sera choisi parmi les membres de la division ou classe, à laquelle il rendra ses comptes deux fois l'année. L'élection du Trésorier se fera au scrutin et à la majorité absolue. Cette élection aura lieu tous les quatre ans.

XXI.

Les fonds attribués aux différentes divisions ou classes, devront servir à payer; 1º. les frais des séances, de la correspondance et du secrétariat; 2º. à payer les frais des expériences, recherches et travaux divers; 3º. à stipendier une partie des membres de chaque division ou classe: le tout conformément au tableau ci-joint.

TABLEAU

De la distribution des fonds.

En rédigeant le tableau des fonds qu'on présente ici, on n'a fait presque aucun changement dans la distribution adoptée par les Académies actuelles. Lorsque les Sections de l'Institut seront formées, leurs besoins seront mieux connus; et le Comité d'Instruction dont il est parlé article LII, en donnera un état plus exact et mieux motivé qu'on ne pourroit faire ici.

1º. Pour les six premières classes de la première Section de l'Institut.

Le revenu actuel de l'Académie Françoise est de 25,217 l.
Celui de l'Académie des Inscriptions et des Belles-Lettres, de 43,908
Total 69,125

On propose d'attribuer ce revenu à la division formée des six premières Classes de la Section des Sciences Philosophiques, des Belles-Lettres et des beaux Arts.

Une addition peu considérable pour les classes de Morale et de Politique qui sont nouvelles, suffiroit pour achever le traitement de cette première partie de l'institut. On peut croire que ce seroit assez de 75,000 livres pour les pensions et autres dépenses: il n'y auroit donc qu'une addition de 5,875 liv. à faire pour cet objet.

2º. Pour la septième classe de la première Section.

La classe de la Peinture et de la Sculpture, ne demande pour tous ses travaux et pour tous les frais de l'École, soit à Paris, soit à Rome, que la somme de 110,830 liv.

3º. Pour la huitième classe de la première Section.

La classe d'Architecture décorative demande un revenu annuel de 31,000 liv.

4º. Pour les classes neuvième et dixième de la première Section.

On ne peut savoir d'une manière précise qu'après la formation de ces classes, ce qu'elles pourront demander; mais cette dépense ne peut être considérable.

5º Pour les six premières classes de la première Section de l'Institut,

le revenu actuel de l'Académie des Sciences est de 93,458 l. 10s

Cette somme sera attribuée à la division formée des six premières classes de la Section des Sciences Mathématiques, et Physiques et des Arts, comme il suit:

Pour huit pensions de 3,000 liv 24,000 l.
Pour huit pensions de 1,800 liv 14,400
Pour seize pensions de 1,200 liv. 19,200
Pour le Secrétaire 3,000
Pour le Trésorier 3,000
Écritures 600
Dépenses courantes 1,600
Frais d'expériences et prix 27,658
Total 93,458

6º. Pour la septième classe de la Section seconde.

La Société d'Agriculture qui formera la septième classe de la Section seconde, demande un revenu annuel de 25,000 liv.

7º. Pour la huitième classe de la Section seconde.

Le revenu actuel de la Société de Médecine est de 36,200 livres.

En adjoignant à la classe de l'art de guérir, 1º., des Chirurgiens; 2º. des Pharmaciens; 3º. des Vétérinaires; 4º. un Hôpital, dont les Officiers de santé seront choisis parmi les Membres de cette classe, on propose de porter son revenu à 46,000 livres, qui suffiroient pour toutes les dépenses, et qui seroient distribuées comme il suit:

Au Secrétaire 3,000
Au premier commis 1,800
Au second commis 1,000
Frais de Bureaux, de correspondance, de Séances particulières et publiques 3,000
Frais d'expériences et de recherches. 8,000
Prix 3,200
En pensions 26,000
Total 46,000

Nota. Les fonds de l'Académie Royale de Chirurgie, qui doit être réunie à la Société de Médecine pour former la huitième classe de la seconde Section, pourront être employés en déduction de la somme précédente.

8º. Pour les neuvième et dixième classes de la seconde Section.

On ne peut, avant que ces deux classes soient formées, donner un tableau de leurs dépenses.

XXII.

Les chaires annexées à l'Institut national pour l'enseignement de ce qu'il y a de plus transcendant et de plus élevé dans les connoissances humaines, seront les suivantes:

1º. Pour la logique, la morale et la science des Gouvernemens deux chaires.
2º. Pour l'histoire et les langues anciennes et pour les antiquités deux chaires.
3º. Pour l'histoire et les langues modernes, pour l'histoire de France, pour l'étude des titres diplômes et médailles deux chaires.
4º. Pour la Grammaire une chaire.
5º. Pour l'instruction des sourds et muets une chaire.
6º. Pour celle des aveugles une chaire.
7º. Pour l'éloquence et la poësie deux chaires.
8º. Pour les Mathématiques et la Mécanique considérées dans toute leur étendue trois chaires.
9º. Pour la Physique expérimentale une chaire.
10º. Pour l'Astronomie une chaire.
11º. Pour la Chimie, la Minéralogie, la Métallurgie et la Chimie des Arts deux chaires.
12º. Pour la Géographie souterraine, etc. une chaire.
13º. Pour la Zoologie, c'est-à-dire, pour la connoissance de toutes les classes d'animaux trois chaires.
14º. Pour l'Anatomie humaine et comparée, et pour la Physiologie expérimentale deux chaires.
15º. Pour la Botanique une chaire.
16º. Pour l'Agriculture, c'est-à-dire, pour l'Économie rurale et domestique et pour la Botanique des Arts deux chaires.
17º. Pour l'enseignement de ce qui concerne,
1º. la nature et le traitement des épidémies;
2º. les épizooties;
3º. les divers objets de salubrité publique trois chaires.
18º. Pour l'enseignement des Beaux-Arts et des Arts mécaniques, dont les écoles seront annexées à l'Institut[8] chaires.

XXIII.

Avant de procéder à l'élection des Professeurs, et en se conformant à tout ce qui est prescrit par l'article XV pour l'élection des membres, il sera fait une liste d'éligibles, lesquels seront indiqués, soit parmi les membres eux-mêmes, soit hors de l'Institut; et un mois après il sera procédé au scrutin dans la division ou classe ayant pour objet l'art ou la science qu'il s'agira d'enseigner. La majorité absolue des suffrages sera nécessaire dans cette élection.

Le Roi fera délivrer des patentes aux sujets élus, et les divisions ou classes de l'Institut rendront compte à chaque Législature des motifs qui les auront déterminées dans le choix des Professeurs.

XXIV.

Ces élections des Membres et des Professeurs de l'Institut, ne seront faites par ces divisions ou classes que pendant la session de la Législature, dont la surveillance rendra les divisions ou classes de l'Institut plus attentives à n'avoir égard qu'au seul mérite dans leur choix; en conséquence, s'il vaque une place de Professeur dans un autre temps que dans celui de la session de la Législature, afin que le service public n'en souffre point, la division ou classe à laquelle la chaire vacante sera annexée, chargera provisoirement l'un de ses Membres de remplir les fonctions de cet enseignement.

XXV.

La durée du Professorat sera de dix années, après lesquelles il sera procédé à une nouvelle élection, dans laquelle l'ex-Professeur sera éligible.

XXVI.

Chacun des Professeurs enseignera pendant neuf mois de l'année, en faisant trois leçons dans chaque semaine; il se prêtera à toutes les explications qui lui seront demandées par les Élèves qu'il formera plus sûrement encore dans des entretiens familiers que dans des Écoles: l'intention de l'Assemblée Nationale étant d'applanir, le plus qu'il lui sera possible, les difficultés sans nombre qui se présentent dans cette partie de l'instruction publique.

XXVII.

Les Professeurs élus se soumettront à ne faire chez eux aucun enseignement particulier sur le sujet qui doit être celui de leur cours public, dans lequel ils ne pourront jamais se faire remplacer que pour un temps très-court, et pour les motifs les plus pressans; il ne leur sera en conséquence jamais nommé de survivancier, ni d'adjoint.

XXVIII.

L'un des Hôpitaux de la Capitale sera annexé à la classe de l'art de guérir, qui nommera, suivant la forme d'élection déjà prescrite, article XV, un Médecin, un Chirurgien et un Pharmacien pour le desservir. Dans cet Hôpital seront faits, avec tout le soin et la prudence possibles, et toujours d'après l'avis de la majorité absolue de la classe, les recherches et observations propres à hâter les progrès de cet art.

La classe d'Agriculture sera également mise en jouissance d'un terrein situé près de Paris, lequel dépendra du Jardin des Plantes, et où elle pourra faire ses essais et ses travaux[9].

XXIX.

Les honoraires attachés à chaque Chaire seront de 4,000 l., indépendamment de frais d'expérience et de travaux, auxquels il sera pourvu séparément par le Trésor public.

XXX.

A l'Institut national seront annexés tous les établissemens publics relatifs aux Lettres, aux Sciences et aux Arts, ainsi toutes les Bibliothèques publiques, le Musæum, les diverses collections de machines, d'instrumens de physique et d'astronomie, de chirurgie, de matière médicale, de médailles, de statues, de tableaux, les jardins de botanique, etc. lesquels sont dans le domaine de la Nation, seront attachés à cet Institut, qui n'appartenant lui-même à aucun Département, mais étant un centre unique d'émulation et de travail, ne sera occupé que du soin de recueillir et de répandre sur toutes les parties de l'Empire les connoissances utiles à la culture des Arts et au perfectionnement de l'esprit.

XXXI.

Parmi les divers établissemens qui doivent être en rapport avec les classes de l'Institut, il en est qui conviennent à toutes, tels que les Bibliothèques publiques; il en est qui ne conviennent qu'à certaines classes en particulier: tels sont le Jardin des Plantes, qui doit être en relation avec les classes de botanique, d'agriculture et de l'art de guérir; les divers Musæum d'Histoire naturelle, qui doivent principalement servir aux travaux des classes de Minéralogie, de Botanique, de Zoologie, d'Anatomie et de l'Art de guérir; les collections des Machines, qui doivent servir à ceux des classes et des écoles de Mécanique et des Arts; le Cabinet de Physique, qui concerne l'école et la classe de Physique expérimentale; celui d'Anatomie, l'arsenal de Chirurgie, et une collection d'Animaux vivans, qui concernent les classes de Zoologie, d'Anatomie et de l'Art de guérir; les différens Observatoires, qui doivent servir à la classe et à l'école d'Astronomie; les collections de Modèles, de Médailles, de Bustes, de Statues, les galeries de Tableaux, qui serviront aux travaux, des classes et des écoles d'Histoire, de Peinture, de Sculpture et d'Architecture.

XXXII.

La disposition de ces diverses collections sera faite d'après les plans fournis par les classes respectives de l'Institut. Des Directeurs responsables[10], choisis parmi les gens de l'Art, membres, ou non, de l'Institut, seront nommés par le Roi, dont les Commissaires prendront toutes les mesures possibles, pour que les membres de l'Institut y soient, ainsi que le public, reçus de manière à y suivre facilement leurs travaux.

XXXIII.

Tous les établissemens publics, relatifs à ceux-ci, appartenans également à la Nation, et placés dans les quatre-vingt-deux autres Départemens, auront aussi des rapports, et seront, en correspondance avec l'Institut, auquel il sera envoyé des catalogues exacts de toutes les collections, afin qu'il existe un répertoire général de toutes les richesses physiques et littéraires de l'Empire.

XXXIV.

Il sera établi dans le Louvre, de concert avec le Roi, et dans le Collège des Quatre-Nations, des logemens convenables, soit pour les divisions ou classes de l'Institut national, soit pour les Chaires qui y seront annexées, de sorte que chacune ait à sa portée des laboratoires pourvus de tous les instrumens et machines nécessaires à ses travaux[11].

§. I.

Emplacement pour les Séances de l'Institut National.

L'Institut est composé de deux grandes sections, qui comprennent vingt classes, dont les unes s'assemblent en commun et les autres séparément.

Chaque réunion de classes a besoin d'une grande salle pour ses séances communes; mais chaque classe pouvant avoir à se rassembler d'une manière isolée, il faut que des salles moins étendues soient réservées pour cet usage.

Les classes qui se réunissent séparément, telles que celles de l'art de guérir, de Peinture, etc. se divisent souvent en Comités pour des travaux particuliers; il faut encore que ces Comités soient logés convenablement.

Conformément à ces données, nous proposons la distribution suivante:

1º. Pour les séances des six premières classes de la première Section de l'Institut, comprenant la Morale, la Science du Gouvernement, l'Histoire et les Belles-Lettres   une grande salle avec deux ou trois pièces pour les Comités.
2º. Pour la classe de Peinture, Sculpture et Gravure   une grande salle avec deux pièces pour les Comités.
3º. Pour la classe d'Architecture-décorative   une grande salle avec une ou deux pièces pour les comités.
4º. Pour la classe de Musique   une grande salle
5º. Pour la classe de Déclamation   une grande salle
6º. Pour les séances des six premières classes de la seconde Section de l'Institut, comprenant les sciences mathématiques et physiques   une grande salle avec trois salles d'une moindre étendue pour les Comités.
7º. Pour la classe d'Agriculture   une grande salle avec deux pièces pour les Comités.
8º. Pour la classe de l'art de guérir   une grande salle avec deux salles d'une moindre étendue pour les Comités.
9º. Pour la classe d'Architecture-construction   une grande salle avec plusieurs autres salles pour l'établissement de cette école.

Nota. Les salles destinées aux séances de cette classe et de ses comités, seront placées près des salles destinées aux assemblées de la classe d'Architecture-décorative, qui fait partie des beaux Arts.

10º. Pour la classe des Arts   une grande salle avec quelques autres pièces collatérales pour les comités.
Total   dix grandes salles

Pour les assemblées des divisions ou des classes de l'Institut.

Ces dix salles seroient placées au Louvre.

Nota. Les petites salles destinées à des réunions particulières ou à des comités, n'ont pas besoin d'avoir une grande étendue; il suffit que huit ou dix personnes puissent y être placées commodément.

§.II.

Emplacemens pour les collections destinées à l'usage des diverses Classes de l'Institut National.

I. Collections ou établissemens utiles à toutes les classes.

1º. Bibliothèque commune.

{  La Bibliothèque du Roi,
 celle des Quatre-Nations.
}

2º. Une Imprimerie, pourvue de caractères de tous les genres.

(Elle seroit établie au Louvre.)

3º. Un Bureau de traduction, destiné à faire connoître les lettres écrites et les ouvrages utiles publiés dans des langues étrangères par les Correspondans de l'Institut.

(Au Louvre.)

II. Collections destinées aux différentes Classes de l'Institut.

1º. Collection de médailles et de pierres gravées.

(A la Bibliothèque du Roi.)

Pour la Classe d'Histoire.

2º. Collection de tableaux, de statues antiques et modernes, de bustes, reliefs et gravures.

(Au Louvre.)

Pour la Classe de Peinture et Sculpture.

3º. Collection de dessins et modèles.

(Au Louvre.)

Pour la Classe et pour l'école d'Architecture.

4º. Collection de modèles relatifs à l'Architecture navale.

(Au Louvre.)

Pour la Classe d'Architecture et pour l'école de Navigation.

5º. Collection d'instrumens de musique et des œuvres des grande Artistes dans ce genre.

(Au Louvre.)

Pour la Classe de Musique.

6º. Collection de costumes, etc.

(Au Louvre.)

Pour la classe de Déclamation

7º. Collection d'instrumens de Mathématiques, de Physique et d'Astronomie.

(A l'Observatoire et au Collège des Quatre-Nations.)

Pour les Classes de Mathématiques, de Physique et d'Astronomie.

8º. Collection de cartes de Géographie physique et souterraine.

(Au Collège des Quatre-Nations.)

Pour les Classes de Physique et de Chimie, de Zoologie et de Botanique.

9º. Collection de Minéralogie.

{  Cabinet du Roi,
Cabinet des Mines de l'Hôtel des Monnoies.
}

Pour la Classe de Chimie et de Minéralogie.

10º. Collection des produits du Cours de Chimie et d'essais des Mines.

(Au Collège des Quatre-Nations.)

Pour la Classe de Chimie, de Minéralogie et de Métallurgie.

11º. Collection d'animaux morts et conservés.

(Cabinet du Roi.)

Pour la Classe de Zoologie et d'Anatomie.

12º. Collection de portions d'animaux disséqués, préparés et conservés,

      d'Anatomie {  naturelle.
 artificielle.

(Cabinet de l'École Vétérinaire.)

Auxquelles collections seront faites les additions nécessaires.

(Au Collège des Quatre-Nations.)

Pour la Classe d'Anatomie, de Zoologie et l'art de guérir.

13º. Collection d'animaux vivans ou Ménagerie.

(Au Jardin du Roi.)

Pour la Classe de Zoologie et d'Anatomie.

14º. Collection de végétaux et de parties de végétaux, Herbiers, Serres, Jardins.

(Jardin et Cabinet du Roi.)

Pour la Classe de Botanique et l'art de guérir.

15º. Collection d'instrumens aratoires.

(Elle sera placée au Jardin du Roi.)

Pour la Classe d'Agriculture.

16º. Collection d'ossemens et d'organes malades, préparés et conservés en nature, ou représentés en cire, en peinture ou en dessin.

(Au Collège des Quatre-Nations.)

Pour la Classe de Médecine.

17º. Collection d'instrumens et d'appareils de Chirurgie de tous les genres. Armamentarium.

(Au Collège des Quatre-Nations.)

Pour la Classe de Médecine et Chirurgie.

18º. Collection de Matière médicale et de Pharmacie.

(Au Collège des Quatre-Nations.)

Pour la Classe de Médecine, Chirurgie et Pharmacie.

19º. Collection d'instrumens propres à l'art vétérinaire, à la forge et la fabrication des fers, etc.

(Au Collège des Quatre-Nations.)

Pour la Classe de Médecine, Chirurgie, Pharmacie et de l'art vétérinaire.

20º. Collection d'instrumens et de modèles pour les divers atteliers des Arts.

(Au Collège des Quatre-Nations).

Pour la Classe des Arts.

§. III.

Emplacement propres aux Laboratoires et aux divers enseignemens dont se charge l'Institut.

Écoles de l'Institut.

1º. Pour les six premières Classes de la première Section. Deux grandes salles suffiront pour leur enseignement.

(Au Collège des Quatre-Nations.)

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