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Souvenirs de Madame Louise-Élisabeth Vigée-Lebrun, Tome premier

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GINGUENÉ.

Ginguené m'avait été présenté par Lebrun le poète comme son ami intime, en sorte qu'il venait quelquefois à mes soirées, quoiqu'il ne me plût sous aucuns rapports. Je lui trouvais un esprit sec, sans charme et sans gaieté; il n'était pas en harmonie avec ma société, et ses oeuvres m'étaient tout aussi antipathiques que sa conversation. En 1789, il nous lut une ode qu'il venait de faire pour M. Necker. Cette ode pouvait passer pour le programme de 1793, il y parlait de victimes, et soutenait qu'on ne pouvait régénérer la France sans répandre du sang. Des opinions aussi atroces me faisaient frissonner. Le comte de Vaudreuil, qui était présent, ne dit rien, mais nous nous regardâmes, et je vis bien qu'ainsi que moi il devinait l'homme.

Ginguené ne quittait guère son ami Lebrun Pindare. Sitôt après la mort de celui-ci, il alla trouver madame Lebrun (qui par parenthèse avait été cuisinière), et lui demanda les manuscrits de Lebrun, dont il désirait se faire éditeur. Madame Lebrun les lui remit tous. En les feuilletant pour les mettre en ordre, Ginguené fut un peu saisi de trouver plus de cent épigrammes faites contre lui-même; quelques-unes étaient atroces. On conçoit que l'éditeur les mit toutes de côté; mais je l'ai toujours soupçonné de s'être vengé en faisant imprimer trop de choses faibles et inutiles dans les oeuvres de Lebrun, ce qui nuit beaucoup à un recueil qui pouvait être excellent.

Tout le monde sait que, la révolution venue, Ginguené s'y jeta à corps perdu, et qu'il témoignait hautement son regret de n'avoir pas été à même de voter la mort de Louis XVI.




VIGÉE.

Mon frère était un de ces hommes faits pour se voir très recherchés dans la société. Il avait un excellent ton, ayant fréquenté fort jeune la bonne compagnie, de l'esprit, de l'instruction; il faisait de très jolis vers avec une extrême facilité, et jouait la comédie mieux que beaucoup d'acteurs. Il contribuait infiniment au charme et à la gaieté de toutes nos réunions; peut-être même l'empressement que mettait le monde à le rechercher a-t-il nui à sa carrière littéraire, car nous lui prenions beaucoup de temps. Il lui en resta assez néanmoins pour se distinguer comme homme de lettres. Outre le cours de littérature qu'il fit à l'Athénée avec un grand succès, quoiqu'il succédât au cours que venait d'y faire La Harpe, Vigée a laissé un volume de poésies légères et plusieurs comédies écrites en vers, dont deux, les Aveux difficiles et l'Entrevue sont restées fort long-temps au répertoire du Théâtre-Français. Je suis même surprise qu'on ne les donne plus, surtout l'Entrevue, charmante petite pièce, que mademoiselle Contat et Molé jouaient admirablement.

Mon frère, jeune encore, épousa la fille aînée de M. de Rivière, chargé d'affaires de Saxe: c'était une femme charmante, pleine de vertus et de talens, si excellente musicienne, et douée d'une si belle voix, qu'elle a chanté chez moi avec madame Todi, sans que la comparaison lui fût défavorable.

Mon frère et mademoiselle de Rivière n'ont laissé de leur mariage qu'un seul enfant, ma nièce, ma bien-aimée nièce, celle qui m'a rendu une fille depuis, hélas! que j'ai perdu la mienne.




LE MARQUIS DE RIVIÈRE.

Jamais je ne pense à ce brave sans songer aux anciens preux; tout en lui était chevaleresque; il a cent fois affronté la mort, et la mort la plus horrible, avec un courage, un sang-froid, une persévérance inimaginable, pour servir le prince auquel il avait consacré sa vie; et ce dévouement si complet, si constant, ne prenait sa source dans aucune ambition, mais dans l'amitié la plus vive, dans une amitié bien rare même entre particuliers. Cette affection du marquis de Rivière pour M. le comte d'Artois dominait en lui tout autre sentiment; elle a pu le conduire à l'exil, à la pauvreté, dans les cachots, sans qu'il crût lui faire trop de sacrifices. «Je n'ai plus rien, me disait-il un jour à Londres; mais, ajouta-t-il en mettant la main sur son coeur, où était toujours placé le portrait de son prince chéri, la dernière goutte du sang qui coule là est pour lui. Peut-être le sort m'a-t-il préservé si souvent parce que je dois lui être utile. Je serais bien heureux alors d'avoir échappé tant de fois à la mort.»

C'est par suite d'un désir si louable qu'on a toujours vu M. de Rivière se charger des missions les plus importantes et souvent les plus dangereuses. Le repos lui était devenu étranger, ne lui semblait plus nécessaire; il partait pour Vienne, pour Berlin, pour Pétersbourg, etc., portant aux rois qui restaient encore sur leurs trônes les demandes d'un roi tombé du sien. Il courait jour et nuit sans s'arrêter, quelquefois sans prendre de nourriture, et remplissait sa mission avec tant de noblesse et d'habileté, qu'il emportait l'estime et la considération de tous les souverains et de tous les diplomates de l'Europe. Ces voyages répétés d'une manière vraiment fabuleuse n'avaient rien de dangereux, à part l'extrême fatigue qu'ils lui causaient; mais combien de fois ne s'est-il pas introduit en France, sur cette terre qu'il ne pouvait toucher qu'au risque de sa tête? Dans les nombreuses courses qu'il faisait à Paris pendant le temps de la terreur, combien de fois son zèle, son activité, lui ont-ils fait affronter la mort? Dieu semblait le protéger. Un jour, sur le point de débarquer en Bretagne, il trouve la côte garnie de soldats; à l'instant il saute du canot dans la mer, plonge, et reste sous l'eau jusqu'au moment où, la côte devenue libre, il lui est possible de gagner la terre. Il entrait à Paris et il en sortait tantôt déguisé en marchand d'allumettes, tantôt sous tout autre déguisement du même genre. Il s'y tenait caché le jour chez un brave homme qui l'avait servi autrefois et lui était entièrement dévoué; il ne pouvait agir que la nuit en s'exposant encore aux plus grands périls; fallait-il repartir, il ne parvenait souvent à se soustraire aux poursuites qu'il excitait qu'en sautant des ravins profonds, en traversant rapidement des rivières à la nage; souffrant la faim, la soif, ne pouvant prendre aucun repos. C'est ainsi qu'il parvint toujours à s'échapper jusqu'à la triste affaire de Georges. Je me souviens que, peu de temps avant cette fatale entreprise, je me trouvais à Londres avec lui dans une maison où se trouvait aussi Pichegru. M. de Rivière, qui prétendait que j'étais excellente physionomiste, s'approcha de moi et me montrant le général français: «Observez cet homme, me dit-il, croyez-vous qu'on puisse s'y fier, qu'il ne trahira pas?» On pense bien que j'ignorais complètement de quelle affaire il s'agissait; mais je regardai Pichegru et je répondis sans hésiter:--«On peut s'y fier; la franchise me paraît siéger sur ce front-là.» Pichegru ne trahit point en effet, on sait trop qu'il est mort la première victime de cette malheureuse tentative. Le sort de M. de Rivière ne fut pas aussi affreux, quoique sa prison ait été bien longue et bien cruelle; car il m'a raconté à mon retour en France que le premier cachot où il fut mis était plein d'une eau stagnante qui lui venait jusqu'à la cheville. Si l'on joint à cette situation l'idée que cette prison ne s'ouvrirait peut-être jamais pour lui, et la douleur de vivre loin de son prince bien-aimé, loin de tous ses amis, on juge de ce qu'il a dû souffrir. C'est à cette époque de malheur que M. de Rivière devint dévot, et qu'il puisa dans la religion la force qui lui était nécessaire pour supporter tant de peines et tant de privations.

Après être resté plusieurs années en prison, il en sortit enfin sur sa parole d'honneur de ne point quitter la France; car Bonaparte lui-même savait ce qu'était la parole d'honneur de M. de Rivière, qui la respecta scrupuleusement en effet, jusqu'au jour où il eut l'ineffable joie de voir revenir les Bourbons.

On sait que le roi le fit duc, qu'il fut envoyé à Constantinople comme ambassadeur dans des circonstances difficiles, et qu'enfin Charles X l'avait choisi pour gouverneur du duc de Bordeaux, quand une mort prématurée vint l'enlever à son jeune élève, à son prince chéri, et l'on peut dire à la France.

Ayant appris à quel point Charles X ressentait douloureusement la perte d'un tel ami, comme j'avais déjà fait de souvenir le portrait de plusieurs personnes, j'essayai de faire ainsi celui de M. de Rivière; j'eus le bonheur de réussir. Je portai aussitôt le portrait au roi, qui le reçut avec une extrême sensibilité, et qui s'écria les larmes aux yeux:--Ah! madame Lebrun, combien je vous suis obligé de votre heureuse et touchante idée! J'étais plus que payée par ces paroles; mais je n'en reçus pas moins le lendemain de Sa Majesté un superbe nécessaire en vermeil, que je garderai toute ma vie.

Le duc de Rivière était d'une taille moyenne, ni beau ni laid; on ne pouvait remarquer dans sa figure qu'une extrême finesse de regard, qui, jointe à une expression de franchise et de bonté, annonçait tout le caractère de l'homme. Tel que je le dépeins, cependant, M. de Rivière a toujours fait les conquêtes les plus brillantes. Il ne les devait point à ses avantages extérieurs, mais bien aux qualités de son ame, auxquelles il devait aussi tant d'amis, qui lui sont restés attachés jusqu'à sa mort et ne perdront jamais son souvenir. Parmi plusieurs beautés distinguées qui ont eu de l'amour pour lui, la dernière surtout était bien certainement la plus jolie femme de la cour; elle l'a aimé tant qu'elle a vécu, et M. de Rivière lui conservait un souvenir touchant. Il portait habituellement sur son coeur, à côté du portrait de M. le comte d'Artois, un portrait d'elle qu'il me montra à Londres. Il ne commettait en cela aucune indiscrétion, sa liaison avec cette charmante personne ayant été connue de tout le monde. De retour en France, il se maria avec une femme qui l'adorait, et dont il a fait constamment le bonheur. Il en a eu plusieurs enfans.

M. de Rivière, outre son noble et beau caractère, avait beaucoup d'esprit. On pourrait imprimer plusieurs de ses lettres comme modèle de style, et dans la conversation le mot d'à-propos ne lui manquait jamais. Un jour, par exemple, déjeunant à Pétersbourg chez Suvarow, qui avait pour lui de l'estime et de l'affection, ce général dit aux officiers russes, en le désignant: «Allons, messieurs, buvons au plus brave!--À votre santé, monsieur le maréchal,» répondit aussitôt M. de Rivière.

Sous le titre de Mémoires, M. le chevalier de Chazet a écrit la vie du duc de Rivière. Tous les documens nécessaires lui avaient été fournis pour qu'on ne pût contester la véracité de cet ouvrage, qui se lit avec un vif intérêt et qui fait honneur au coeur comme au talent littéraire de l'auteur.




M. DE BUFFON.

Je suis allée, en 1785, avec mon frère et M. le comte de Vaudreuil, dîner chez cet homme si célèbre comme savant et comme écrivain. Buffon était déjà fort vieux, puisqu'il est mort trois ans après, âgé de quatre-vingt-un ans. Je fus d'abord frappée de la sévérité de sa physionomie; mais dès qu'il se fut mis à causer avec nous, nous crûmes voir s'opérer une métamorphose; car son visage s'anima au point qu'on pouvait dire de lui avec toute vérité que le génie étincelait dans ses yeux. Nous le quittâmes pour aller à table; lui resta dans son salon, ne mangeant plus alors que des légumes. Son fils et sa jolie belle-fille firent les honneurs du dîner, après lequel nous retournâmes au salon pour y prendre le café. Une conversation s'étant établie, M. de Buffon en fit presque tous les frais, et parut se plaire à la prolonger; il nous récita de mémoire plusieurs fragmens de ses ouvrages, qui nous charmèrent doublement par la chaleur et l'expression qu'y prêtait l'accent du génie. Nous le quittâmes assez tard, avec un grand regret, et j'étais tellement enthousiasmée de lui, que j'enviais beaucoup le sort de son fils et de sa belle-fille, qui pouvaient tous les jours le voir et l'entendre.




M. LE PELLETIER DE MORFONTAINE.

M. Le Pelletier de Morfontaine, qui a été longtemps prévôt des marchands sous Louis XVI, avait de l'esprit, de l'instruction, de la bonhomie, un ton parfait, et pourtant je n'ai connu personne plus chargé que lui de ridicule.

Il était assez grand, très maigre. À cinquante-cinq ans au moins qu'il avait quand je l'ai connu, son visage était pâle et fané, il mettait pour s'animer le teint une forte couche de rouge sur ses joues et jusque sur son nez. La chose était évidente au point qu'il en convenait en nous disant qu'il ferait peur s'il ne portait point de rouge. Cette figure déjà assez comique était entourée d'une coiffure tellement étrange, qu'en la voyant pour la première fois j'éclatai de rire. C'était une immense perruque fiscale dont le toupet s'élevait en pointe comme un pain de sucre, accompagné de longues boucles qui tombait sur les épaules; le tout poudré à blanc. Ce n'est pas tout; M. Le Pelletier avait de fatales infirmités qu'il ne devait pas à son âge avancé, mais à une malheureuse nature: il était obligé de tenir sans cesse dans sa bouche des pastilles odorantes et de se garder de parler aux gens de près. Il prenait plusieurs bains de pieds dans le jour, il en prenait même la nuit et portait constamment deux paires de souliers à doubles semelles. Tant de précautions n'empêchaient point qu'il ne fût impossible de tenir près de lui dans une voiture fermée; j'en ai fait une fois la triste expérience, ainsi que ma belle-soeur, en revenant de Morfontaine. Eh bien! tel que le voilà, M. Le Pelletier avait les plus grandes prétentions auprès des femmes, et se croyait l'homme du monde le plus dangereux pour elles. Il parlait sans cesse de ses amours, de ses succès, de ses conquêtes, ce qui prêtait beaucoup à rire.

Le chevalier de Coigny m'a raconté qu'étant allé un matin voir M. Le Pelletier, il le trouva étendu sur une chaise longue, près d'une table couverte de fioles, de médicamens, de sachets, etc., et si pâle, car il n'avait pas encore mis son rouge, qu'en entrant dans sa chambre, M. de Coigny le crut mourant.--Ah! mon cher chevalier, dit-il aussitôt, que je suis ravi de vous voir! Vous allez me donner vos bons avis sur une chose qui m'occupe beaucoup. Il faut que vous sachiez que je viens de rompre toutes mes liaisons; je suis libre, absolument libre, et vous qui connaissez les plus jolies femmes de la cour, vous allez me dire à laquelle vous me conseillez d'adresser mes soins. Le chevalier de Coigny était peut-être de notre société celui qui s'amusait le plus des ridicules de M. Le Pelletier; on juge s'il saisit l'occasion. Il se mit à passer en revue avec lui les femmes les plus remarquables par leur beauté; mais à toutes M. Le Pelletier trouvait quelque défaut qui le repoussait. Cette scène dura long-temps:--Ma foi, mon cher, dit enfin le chevalier en éclatant de rire, puisque vous êtes si difficile, je vous conseille d'imiter le beau Narcisse et de devenir amoureux de vous-même.

C'est sous la prévôté de M. Le Pelletier de Morfontaine que le pont de la place Louis XV fut bâti, et à cette occasion, le roi lui donna le cordon bleu, que l'on pouvait obtenir par charge, lorsqu'on ne faisait point partie de la haute noblesse. Ce cordon bleu lui tourna tellement la tête qu'il le portait toujours; je serais tentée de croire qu'il le mettait dès le matin sur sa robe de chambre. Un jour je l'aperçus grimpant sur les rochers qui bordent le lac de Morfontaine, et costumé selon son ordinaire comme s'il allait partir pour Versailles. Je lui criai d'en bas, où je me promenais, plongée dans mes rêveries champêtres, que son cordon bleu était tout-à-fait ridicule au milieu de cette belle nature. Il ne m'en voulut pas un instant de lui avoir ainsi fait sentir son travers; car après tout il faut dire que ce pauvre M. Le Pelletier était le meilleur homme du monde.




VOLTAIRE.

J'étais à la Comédie-Française le jour que Voltaire vint y voir représenter sa tragédie d'Irène. De ma vie je n'ai assisté à un pareil triomphe. Quand le grand homme entra dans sa loge, les cris, les applaudissemens furent tels que je crus que la salle allait s'effondrer. Il en fut de même au moment où on lui plaça la couronne sur la tête, et le célèbre vieillard était si maigre, si chétif, que d'aussi vives émotions me faisaient trembler pour lui. Quant à la pièce, on n'en écouta pas un mot, et cependant Voltaire put quitter la salle persuadé qu'Irène était son meilleur ouvrage.

J'avais une extrême envie d'aller le voir à l'hôtel de M. de Villette chez qui il logeait; mais ayant entendu dire que tout flatté qu'il était des visites sans nombre qui lui étaient faites, il en éprouvait une grande fatigue, je renonçai à mon projet. Je puis donc dire n'avoir été chez lui qu'en peinture, et voici comment. Hall, le plus habile peintre en miniature de cette époque, venait de finir mon portrait. Ce portrait était extrêmement ressemblant, et Hall étant allé voir Voltaire, le lui montra. Le célèbre vieillard, après l'avoir regardé long-temps, le baisa à plusieurs reprises. J'avoue que je fus très flattée d'avoir reçu une pareille faveur, et que je sus fort bon gré à Hall d'être venu me l'affirmer.




LE PRINCE HENRI DE PRUSSE.

Lorsque la comtesse de Sabran me présenta chez elle au frère du grand Frédéric, je voyais ce prince pour la première fois, et je ne saurais dire combien je le trouvai laid. Il pouvait avoir à peu près cinquante-cinq ans à cette époque, le roi de Prusse étant de beaucoup son aîné. Il était petit, mince, et sa taille, quoiqu'il se tînt fort droit, n'avait aucune noblesse. Il avait conservé un accent allemand très marqué, et grasseyait excessivement. Quant à la laideur de son visage, elle était au premier abord tout-à-fait repoussante. Cependant avec deux gros yeux dont l'un regardait à droite et l'autre à gauche, son regard n'en avait pas moins je ne sais quelle douceur, qu'on remarquait aussi dans le son de sa voix, et lorsqu'on l'écoutait, ses paroles étant toujours d'une obligeance extrême: on s'accoutumait à le voir.

Sa valeur guerrière est assez connue pour qu'il soit inutile d'en parler; on sait qu'il aimait la gloire en digne frère de Frédéric; mais ce qu'il faut dire, c'est qu'il était aussi sensible à un trait d'humanité qu'à un trait d'héroïsme: il était bon et faisait un très grand cas de la bonté dans les autres.

Il avait pour les arts, et surtout pour la musique, une véritable passion, au point qu'il voyageait avec son premier violon afin de pouvoir cultiver son talent en route. Ce talent était assez médiocre, mais le prince Henri ne laissait échapper aucune occasion de l'exercer. Pendant tout le séjour qu'il a fait à Paris, il venait constamment à mes soirées musicales, ne redoutait point la présence des premiers virtuoses, et je ne l'ai jamais vu refuser de faire sa partie dans un quatuor à côté de Viottis qui jouait le premier violon.




LE COMTE D'ALBARET.

Un autre amateur forcené de musique, qui vivait à Paris à la même époque, était le comte d'Albaret. Non-seulement il s'empressait d'aller à tous les concerts; mais, quoique sa fortune ne fût pas très considérable, il avait une musique à lui, comme en ont les souverains. Il logeait et nourrissait dans sa maison huit ou dix musiciens auxquels il payait des appointemens, leur permettant en outre de prendre des écoliers dehors aux heures qu'il leur laissait libres. Ces artistes, comme on doit l'imaginer, étaient tous du second ordre. La chanteuse, par exemple, qui ne chantait que des airs italiens, avait une assez belle voix, mais ne pouvait passer pour une prima dona, et je me souviens qu'il m'avait donné pour maître de chant un homme dont le savoir était médiocre. Il en était de même de ses instrumentistes, pris isolément, sans en excepter son premier violon; et cependant, tous ces gens-là avaient une telle habitude de marcher ensemble, et faisaient un si grand nombre de répétions, qu'on n'entendait nulle part de la musique aussi bien exécutée que chez le comte d'Albaret. Aussi tous les amateurs se rendaient-ils avec empressement à ses concerts. Ils avaient lieu le dimanche matin: j'y suis allée plusieurs fois, et j'en suis toujours sortie charmée.




LE COMTE D'ESPINCHAL.

Voici un homme dont les affaires, les plaisirs, en un mot toute l'existence, se bornaient à savoir, jour par jour, tout ce qui se passait dans Paris. Le comte d'Espinchal était toujours instruit le premier d'un mariage, d'une intrigue amoureuse, d'une mort, de la réception ou du refus d'une pièce de théâtre, etc.; au point que si l'on avait besoin d'un renseignement quelconque sur qui ou sur quoi que ce fût au monde, on se disait aussitôt: Il faut le demander à d'Espinchal. On imagine bien que, pour être aussi parfaitement au fait, il fallait qu'il connût une prodigieuse quantité de gens; aussi ne pouvait-il marcher dans la rue sans saluer quelqu'un à chaque pas, et cela depuis le grand seigneur jusqu'au garçon de théâtre, depuis la duchesse jusqu'à la grisette et la fille entretenue.

En outre, le comte d'Espinchal allait partout. On était certain, ne fût-ce que pour un moment, de le voir dans les promenades, aux courses de chevaux, au salon, le soir à deux ou trois spectacles. Je n'ai vraiment jamais su quel temps il prenait pour se reposer et même pour dormir; car il passait presque toutes ses nuits dans les bals.

À l'Opéra ainsi qu'à la Comédie-Française, il savait au juste à qui appartenaient toutes les loges, dont la plupart, il est vrai, étaient louées à l'année à cette époque. On le voyait se les faire ouvrir l'une après l'autre pour rester cinq minutes dans chacune; car trop d'affaires l'appelaient de tous côtés pour qu'il fît des visites longues. Il n'y mettait que le temps d'apprendre quelques nouvelles de plus.

Heureusement le comte d'Espinchal n'était point méchant, autrement il aurait pu brouiller bien des ménages, causer bien des ruptures de liaisons d'amour ou d'amitié, enfin nuire à beaucoup de gens. Il n'était pas même très bavard et savait se taire avec les personnes intéressées dans les mystères sans nombre qu'il parvenait à découvrir. Il suffisait à sa satisfaction personnelle d'être parfaitement au courant de tout ce qui se passait à Paris et à Versailles; mais pour parvenir à ce but il ne négligeait aucun soin, et bien certainement il était plus au fait de mille choses que ne l'était le lieutenant de police.

Une pareille manie est si bizarre, qu'afin de faire croire à sa réalité, je vais raconter un trait qui, dans le temps, a été connu de tout Paris. Un jour, ou plutôt une nuit, le comte d'Espinchal se trouvait au bal de l'Opéra. Ce bal n'était point alors ce qu'il est devenu maintenant; la bonne compagnie le fréquentait, et les plus honnêtes femmes de la cour et de la ville ne se refusaient pas le plaisir d'y aller, masquées jusqu'aux dents, comme on disait; mais pour M. d'Espinchal il n'existait point de masque; du premier coup d'oeil il reconnaissait son monde: aussi tous les dominos le fuyaient-ils comme la peste. Il se promenait dans la salle quand il remarqua un homme qu'il ne connaissait pas, et qui courait de côtés et d'autres, pâle, effaré, s'approchant de toutes les femmes en dominos bleus, puis s'éloignant aussitôt d'un air désespéré. Le comte n'hésite pas à l'aborder, et lui dit avec intérêt:--Vous me paraissez en peine, monsieur. Si je pouvais vous être bon à quelque chose, j'en serais charmé.--Ah! monsieur, répond l'inconnu, je suis le plus malheureux des hommes. Imaginez que ce matin je suis arrivé d'Orléans avec ma femme, qui m'a tourmenté pour la mener au bal de l'Opéra. Dans cette foule, je viens de la perdre, et la pauvre petite ne sait pas le nom de l'hôtel, pas même le nom de la rue où nous sommes descendus.--Calmez-vous, calmez-vous, dit le comte d'Espinchal, je vais vous conduire près d'elle. Madame votre femme est assise dans le foyer à la seconde fenêtre. C'était la dame en effet. Le mari, transporté de joie, se confond en remerciemens:--Mais comment se fait-il, monsieur, que vous ayez deviné?...--Rien n'est plus simple, répond le comte d'Espinchal: madame étant la seule femme du bal que je ne connaisse pas, j'avais déjà bien pensé qu'elle devait être arrivée de province très nouvellement.

Quand je suis revenue à Paris, sous le consulat, j'ai revu le comte d'Espinchal:--Eh bien! lui dis-je, vous devez être furieusement désorienté; vous ne connaissez plus personne dans les loges de l'Opéra et de la Comédie. Pour toute réponse, il leva les yeux au ciel. Il est mort peu de temps après, d'ennui sans doute; car il n'était pas extrêmement vieux. On assure qu'avant de mourir il brûla une énorme quantité de notes qu'il avait l'habitude d'écrire chaque soir. J'avais en effet entendu parler de ces notes par plusieurs personnes que peut-être elles effrayaient. Il est certain qu'elles auraient pu fournir la matière d'un ouvrage très piquant, mais bien certainement très scandaleux.




LA COMTESSE DE FLAHAUT.

Parmi les femmes les plus distinguées que j'ai connues avant la révolution, je ne dois pas oublier l'auteur d'Adèle de Sénanges, d'Eugène de Rothesin, et de plusieurs autres ouvrages charmans, que tout le monde a lus pour le moins une fois. Madame de Flahaut, aujourd'hui madame de Souza, n'écrivait point encore quand j'ai fait connaissance avec elle. Son fils, qui est maintenant pair de France, était alors un enfant de trois ou quatre ans. Elle-même était fort jeune. Elle avait une jolie taille, un visage charmant, les yeux les plus spirituels du monde, et tant d'amabilité qu'un de mes plaisirs était d'aller passer la soirée chez elle, où le plus souvent je la trouvais seule.

À mon retour en France j'avais un grand désir de revoir madame de Flahaut. Une multitude d'affaires, d'occupations diverses, m'en ont empêchée pendant si long-temps, que je n'ai plus osé me présenter chez elle. Si le hasard fait qu'elle lise ces lignes, elle saura du moins que je suis loin de l'avoir oubliée.




MADEMOISELLE QUINAULT.

Madame de Verdun, une de mes meilleures amies, me fit faire connaissance avec mademoiselle Quinault, qui, après avoir été célèbre comme grande actrice dans la tragédie et dans la comédie, l'était encore comme une des femmes les plus spirituelles et les plus instruites de son temps; elle avait quitté le théâtre en 1741. Amie intime de M. d'Argenson et de d'Alembert, son salon était devenu le rendez-vous de tout ce que Paris avait de distingué en gens de lettres et en gens du monde, et l'on recherchait avec empressement le plaisir de passer quelques momens avec elle.

À l'époque où je l'ai connue, mademoiselle Quinault, malgré son grand âge, conservait tant d'esprit et tant de gaieté, qu'en l'écoutant on la voyait jeune. Sa mémoire était prodigieuse, et certes elle avait eu le temps de l'orner; car elle avait alors quatre-vingt-cinq ans. Entre mille anecdotes que lui fournissaient sans cesse ses souvenirs, elle nous raconta qu'étant allée un jour voir Voltaire, avec qui elle était fort liée, elle trouva le grand homme au lit. Il lui parla d'une tragédie de lui pour laquelle il désirait que Le Kain mît une écharpe; mais une écharpe placée de certaine façon, et dans la chaleur de la description, voilà Voltaire qui jette ses couvertures, relève sa chemise pour en former une écharpe, laissant totalement à découvert son corps décrépit aux yeux de mademoiselle Quinault, fort embarrassée de sa personne.

Mademoiselle Quinault n'est morte qu'en 1783, plus que nonagénaire. Madame de Verdun, qui était allée chez elle un matin, fut surprise de la trouver parée, couverte de rubans couleur de rose, mais dans son lit.--Comment, dit madame de Verdun, je ne vous ai jamais vue si coquette?--Je me suis parée ainsi, répondit mademoiselle Quinault, parce que je dois mourir aujourd'hui. Le soir même, en effet, elle avait cessé de vivre.




LE COMTE DE RIVAROL.

Mon frère me présenta un matin le comte de Rivarol, que son esprit faisait extrêmement rechercher dans les plus brillantes sociétés de Paris, même avant qu'il eût rien écrit. Comme je ne l'attendais point, j'étais dans mon atelier, et je mettais ce que nous appelons l'harmonie à plusieurs tableaux que je venais de terminer. On sait que ce dernier travail ne permet aucune distraction, en sorte qu'en dépit du désir que j'avais toujours eu d'entendre causer M. de Rivarol, je jouis fort peu du charme de sa conversation, tant j'étais préoccupée: il parlait en outre avec une telle volubilité que j'en étais comme étourdie. Je remarquai cependant qu'il avait une belle figure et une taille extrêmement élégante; il n'en dut pas moins me trouver si maussade que je ne l'ai plus revu chez moi. Il se peut à la vérité qu'un autre motif l'ait empêché d'y revenir. Il passait sa vie avec le marquis de Champcenetz, qui s'est toujours montré fort méchant pour moi. Le marquis de Champcenetz, sans avoir ni tout le talent, ni la force de tête de l'auteur du discours sur l'universalité de la langue française, avait beaucoup d'esprit, qu'il employait habituellement à déchirer le prochain. Il avait, comme M. de Bièvre, le goût des calembourgs; et il en faisait sans cesse, en sorte que Rivarol l'appelait l'épigramme de la langue française.

C'est le marquis de Champcenetz, qui, condamné à mort par le tribunal révolutionnaire, demanda gaiement à ses juges s'il lui était permis de chercher un remplaçant pour la garde nationale.




PAUL JONES.

J'ai souvent soupé chez madame Thilorié, soeur de madame de Bonneuil, avec ce célèbre marin, qui a rendu tant de services à la cause américaine et fait tant de mal aux Anglais. Sa réputation l'avait précédé à Paris, où l'on savait dans combien de combats, avec sa petite escadre, il avait triomphé des forces dix fois supérieures de l'Angleterre. Néanmoins, je n'ai jamais rencontré d'homme aussi modeste: il était impossible de le faire jamais parler de ses hauts faits; mais sur tout autre sujet, il causait volontiers avec infiniment d'esprit et de naturel.

Paul Jones était Écossais de naissance. Je crois qu'il aurait beaucoup désiré devenir amiral dans la marine française; j'ai même entendu dire que, lorsqu'il revint à Paris une seconde fois, il en fit la demande à Louis XVI, qui le refusa. Quoi qu'il en soit, il alla d'abord en Russie, où le comte de Ségur le présenta à l'impératrice Catherine II, qui l'accueillit avec la plus grande distinction et le fit dîner avec elle. Il quitta Pétersbourg pour aller joindre Suvarow et le prince de Nassau, avec lesquels il se distingua de nouveau dans la guerre contre les Turcs. De retour à Paris, il y est mort pendant la révolution, mais avant la terreur.




MESMER.

Comme j'entendais parler sans cesse de ce fameux charlatan, j'eus la curiosité d'assister une fois à ce qu'il appelait ses séances, afin de juger par moi-même cette jonglerie. En entrant dans la première salle où se tenaient les partisans du magnétisme animal, je trouvai beaucoup de monde rangé autour d'un grand baquet bien goudronné: hommes et femmes, pour la plupart, se tenaient par la main, formant la chaîne. Mon désir fut d'abord de faire partie de ce cercle; mais je crus m'apercevoir que l'homme qui allait devenir mon voisin avait la gale; on sent si je me hâtai de retirer ma main et de passer dans une autre pièce. Pendant le trajet, plusieurs affidés de Mesmer dirigeaient vers moi de toutes parts de petites baguettes de fer dont ils étaient munis, ce qui m'impatientait prodigieusement. Après avoir visité les différentes salles, qui toutes étaient remplies comme la première de malades et de curieux, j'allais m'en aller, lorsque je vis sortir d'une chambre voisine une jeune et grande demoiselle, assez jolie, que Mesmer tenait par la main. Elle était tout échevelée, et jouait le délire, ayant grand soin pourtant de tenir ses yeux fermés. Tout le monde aussitôt entoura les deux personnages.--Elle est inspirée, dit Mesmer, et elle devine tout, quoique parfaitement endormie. Alors, il la fit asseoir, s'assit devant elle et lui prenant les deux mains, il lui demanda quelle heure il était? Je remarquai fort bien que le patron tenait ses pieds posés sur les pieds de la prétendue sibylle, ce qui rendait facile d'indiquer l'heure, et même les minutes; aussi la demoiselle répondit-elle avec tant d'exactitude, qu'elle se trouva d'accord avec toutes les montres des assistans.

J'avoue que je sortis indignée qu'une pareille charlatanerie pût réussir chez nous. Ce Mesmer a gagné des monceaux d'or; outre ses séances, qui, toujours fort suivies, lui ont rapporté immensément, ses nombreuses dupes firent en sa faveur une souscription qui s'éleva, m'a-t-on dit, à près de cinq cent mille francs. Mesmer, cependant fut bientôt contraint d'aller jouir dans quelque lieu ignoré de la fortune qu'il venait d'amasser à Paris: le bruit s'étant généralement répandu qu'il se passait à ses séances beaucoup de choses indécentes, les doctrines de ce jongleur furent soumises à l'examen de l'Académie des Sciences et de la Société royale de Médecine, et le jugement de ses deux corps savans sur le magnétisme animal fut tel, qu'il obligea Mesmer à quitter la France.

Aujourd'hui que les baquets et les petites baguettes de fer ont disparu, nous voyons encore des personnes persuadées que telle ou telle femme qui souvent ne sait pas lire, endormie par un magnétiseur, non-seulement peut vous dire l'heure qu'il est, mais encore deviner votre maladie et vous indiquer le meilleur traitement à suivre. Grand bien fasse ces sibylles somnambules à ceux qui les consultent; pour mon compte, si j'étais malade, j'aimerais mieux appeler un habile médecin éveillé.




MM. CHARLES ET ROBERT.

J'ai vu monter en ballon les deux premiers hommes qui ont eu le courage de s'élever dans l'air avec une si frêle machine, dont l'invention venait d'être faite très récemment par Montgolfier. Ces deux hommes étaient Charles et Robert. Ils avaient posé leur ballon sur le grand bassin des Tuileries, et le jour fixé pour l'ascension, une foule telle que je n'en ai jamais vu de pareille remplissait le jardin. Quand on eut coupé les cordes et que le ballon s'éleva majestueusement à une si grande hauteur que nous le perdîmes de vue, l'admiration, la peur pour les deux braves que portait la petite nacelle firent pousser un cri général. Beaucoup de personnes, et j'avoue que j'étais du nombre, avaient les larmes aux yeux. Heureusement on apprit peu d'heures après que Charles et Robert étaient descendus sans aucun accident à quelques lieues de Paris, dans un village, où l'arrivée de ces êtres aériens dut faire une bien vive sensation.

M. Charles était membre de l'Académie des Sciences et l'un de nos savans les plus distingués. C'était de plus un excellent homme, aimant la musique avec passion. Il faisait chaque année dans son magnifique cabinet de physique des cours extrêmement suivis, non-seulement par les personnes occupées de sciences, mais aussi par les gens du monde.

LISTE

DES TABLEAUX ET DES PORTRAITS

QUE J'AVAIS FAITS AVANT DE QUITTER
LA FRANCE EN 1789.

De 1768 à 1772.


1 Ma mère en sultane, grand pastel.

1 Ma mère, vue par le dos.

2 Mon frère en écolier. Un à l'huile, l'autre au pastel.

1 M. Le Sèvre, en bonnet de nuit et en robe de chambre.

3 Monsieur, madame et mademoiselle Bandelaire.

1 M. Vandergust.

1 Mademoiselle Pigale, marchande de modes de la reine.

1 Son commis.

1 Ma mère en pelisse blanche. À l'huile.

1 Madame Raffeneau.

1 La baronne d'Esthal.

2 Ses deux enfans.

1 Madame Daguesseau avec son chien.

1 Madame Suzanne.

1 Madame la comtesse de la Vieuville.

1 M. Mousat.

1 Mademoiselle Lespare.

2 Madame de Fossy et son fils.

2 Le vicomte et la vicomtesse de la Blache.

1 Mademoiselle Dorion.

1 Mademoiselle Mousat.

1 M. Tranchart.

1 M. le marquis de Choiseul.

1 Le comte de Zanicourt.

1 M. Bandelaire en buste, au pastel.

--

31


Un grand nombre de têtes d'études et de copies d'après Raphaël, Vandyck, Rembrandt, etc.



1773.


2 M. et madame de Roisy.

1 M. de la Fontaine.

1 M. le comte Dubarry.

5 M. le comte de Geoffré.

1 M. le maréchal comte de Stainville.

3 Madame de Bonneuil.

1 Madame de Saint-Pays.

1 Madame Paris.

1 M. Perrin.

1 Copie du marquis de Vérac.

1 Une Américaine.

1 Madame Thilorié, buste.

1 Copie de la même.

1 Madame Tétare.

1 Copie de l'évêque de Beauvais.

1 M. de Vismes.

1 M. Pernon.

1 Mademoiselle Dupetitoire.

1 Mademoiselle Baillot.

--

27



1774


1 L'abbé Giroux.

1 Le petit Roissy.

1 Copie du chancelier.

1 Copie de M. de la Marche.

1 Madame Damerval.

1 Le comte de Brie.

1 Madame Maingat.

1 Madame la baronne de Lande.

1 Madame Le Normand.

1 Madame de la Grange.

1 M. Méraut.

1 Le vicomte de Boisjelin.

1 M. de Saint-Malo.

1 M. Desmarets.

1 Madame la comtesse d'Harcourt.

2 Mesdemoiselles Saint-Brie et de Sence.

1 Madame la comtesse de Gontault.

1 Mademoiselle Robin.

1 M. de Borelly.

1 M. de Momanville.

2 Mesdemoiselles Rossignol, Américaines.

1 Madame de Belgarde.

--

24



1775.


1 Madame de Monville avec son enfant.

1 Madame Denis.

1 M. le comte de Schouvaloff.

1 M. le comte de Langeas.

1 Madame Mongé.

1 Madame Tabari.

1 Madame de Fougerait.

1 Madame de Jumilhac.

1 La marquise de Roncherol.

1 Le prince de Rochefort.

1 M. de Livoy.

1 Madame de Ronsy.

1 M. de Monville.

1 Mademoiselle de Cossé.

1 Madame Augeard.

1 Copie de madame Dameroal.

1 Madame Deplan.

1 M. Caze.

1 M. Goban.

1 Mademoiselle de Rubec.

1 Le chevalier de Roncherol.

1 Le prince de Rohan père.

1 Le prince Jules de Rohan.

1 Mademoiselle de Rochefort.

1 M. Ducluzel.

2 Le comte et la comtesse de Cologand.

1 Mademoiselle Julie, qui a épousé Talma.

1 Madame Courville.

1 Madame la marquise de Gérac.

1 Madame de la Borde.

1 Mademoiselle de Givris.

1 Mademoiselle de Ganiselot.

1 M. de Veselay.

--

34



1776.


Depuis mon mariage.

1 La princesse de Craon.

1 Le marquis de Chouart.

1 Le prince de Montbarrey.

1 M. Gros, peintre, enfant.

1 Madame Grant, depuis princesse de Talleyrand.

1 Le comte des Deux-Ponts.

1 Madame de Montbarrey.

1 Un banquier.

2 M. et madame Toullier.

1 La princesse d'Aremberg.

1 M. de Saint-Denis.

12 Monsieur, frère du roi.

2 M. et madame de Valesque.

1 Le petit Vaubal.

1 Madame de Lamoignon.

4 M. de Savalette.

1 Le prince de Nassau.

1 Madame de Brente.

1 Milady Berkley.

1 Madame Saulot.

1 La comtesse Potoska.

2 Madame de Verdun.

1 Madame de Montmorin.

1 Sa fille.

--

41



1777.


1 Le marquis de Crevecoeur.

1 Le baron de Vombal.

1 Madame Périn.

1 M. Oglovi.

1 M. Saint-Hubert.

1 Madame de Nolstein.

1 Madame de Beaugoin.

2 Mademoiselle Dartois.

1 Madame Le Normand.

1 M. de Finnel.

1 M. de Lange.

1 Madame de Montlegiëts.

1 Madame de la Fargue.

--

14



1778.


1 Madame la duchesse de Chartres.

1 Madame de Teuilly.

1 M. de Saint-Priest, ambassadeur.

2 M. et madame Dailly.

2 M. et madame Domnival.

1 Madame Monge.

1 Madame Degéraudot.

1 M. le marquis de Cossé.

1 Le marquis d'Armaillé.

1 Le duc de Cossé.

1 Mademoiselle de Ponse.

1 Monsieur, frère du roi, pour M. de Lévis.

1 Madame la marquise de Montemey.

1 Madame de Foissy.

2 Les enfans de Brongniart.

1 M. de Raunomanoski.

1 Madame de Rassy.

1 Madame la présidente de Bec de Lièvre.

1 Copie d'un portrait de la reine.

2 Madame, femme de Monsieur, frère du roi.

1 Copie d'un portrait de madame Dubarry.

1 Mademoiselle Lamoignon.

1 Ma tête.

1 Copie d'un portrait de la reine pour M. Boquet.

1 Madame Filorier.

--

29



1779.


1 Le marquis de Vrague.

1 Madame la comtesse de Virieux.

1 La présidente Richard.

1 Madame de Mongé.

1 Grand portrait de la reine pour l'impératrice de Russie.

2 Bustes de la reine.

2 Copies des mêmes.

1 Madame de Savigny.

2 La même et son fils.

2 M. et madame de Lastic.

1 Une femme en lévite pour M. de Cossé.

1 Madame Dicbrie.

2 Copies des bustes de la reine.

2 Madame Duclusel.

1 Madame de Verdun.

1 Le comte de Dorsen fils.

2 M. et madame de Montesquiou.

1 Portrait de la reine pour M. de Sartines.

1 Madame de Palerme.

1 Petit Américain.

1 Mademoiselle de la Ferté.

1 Tête penchée pour M. de Cossé.

1 Monseigneur le duc d'Orléans.

1. Madame la marquise de Montellon.

2 Copies du duc d'Orléans.

2 Copies du grand portrait de la reine, pour M. et madame de Vergennes.

1 Madame de Vannes.

1 Madame la comtesse de Tournon.

1 Le prince de Montbarrey.

--

38



1780.


1 Madame Lessout.

1 Grand tableau de la reine.

1 Idem.

4 Madame de Verdun, sa mère, sa belle-soeur et son mari.

1 Madame la baronne de Montesquiou.

1 Madame de Montaudrari.

1 Madame Foulquier.

2 Madame Genty.

1 La duchesse de Mazarin.

--

13



1781.


1 Tête d'une jeune fille, respirant l'odeur d'une rose.

1 Madame Young.

1 M. le comte de Cossé.

1 Madame la princesse de Crouy.

1 Madame de Saint-Alban.

1 M. de Landry.

2 Portraits de moi.

1 Tête d'étude pour M. le Pelletier de Morfontaine.

1 Tête d'étude pour M. Proult.

3 Têtes d'étude pour M. de Cossé.

1 Monsieur, frère du roi.

1 Copie du même.

1 Madame la duchesse de Chaulnes.

1 Mademoiselle Dumoley.

1 La comtesse Dubarry.

1 Esquisse de mon tableau de Junon.

1 Tête d'étude de ma Vénus.

1 Madame d'Harvelay.

2 Mademoiselle de la Borde.

1 Mademoiselle Devaron.

1 Madame de Moreton.

1 Madame de la Porte.

1 M. Dumoley fils.

3 La princesse de Lamballe.

1 Copie de M. de Moreton.

--

31



1782.


1 Madame, soeur du roi.

1 Copie de la même.

1 Madame la duchesse de Polignac.

1 Copie de la même.

1 Le baron de Montesquiou.

1 Madame de Verdun.

1 Madame de Chatenay.

3 Le prince Henry de Prusse.

--

10



1783.


1 Madame la marquise de la Guiche.

1 Madame Grant.

1 La landgrave de Salm.

1 Madame la maréchale de Mailly.

2 Madame la comtesse d'Artois.

2 Madame la comtesse de Simiane.

2 Madame la duchesse de Guiche.

1 La reine avec un chapeau.

2 La reine en grand habit.

2 Madame Elisabeth.

1 Copie de la même.

1 Mademoiselle Lavigne.

3 Copies de la reine avec un chapeau.

4 La reine en robe de velours.

4 Copies du même.

1 Monsieur le dauphin.

1 Madame, fille du roi.

--

30



1784.


1 M. le comte de Vaudreuil.

5 Copies du même.

1 La comtesse de Grammont-Cadrousse.

1 Madame la comtesse de Serre.

1 M. de Beaujou.

--

9



1785.


1 M. de Beaujon.

1 La princesse de Carignan.

1 Madame Fodi.

1 M. de Calonne.

1 Madame la comtesse de Ségur.

1 Copie de la même.

1 M. le comte de Ségur.

1 Copie du même.

1 Madame la baronne de Crussol.

1 M. de Saint-Hermine.

1 Grétry.

1 Madame la comtesse de Clermont-Tonnerre.

1 Madame la comtesse de Virieux.

1 La vicomtesse de Vaudreuil.

2 Copies de la reine en grand habit.

1 Madame Vigée.

1 Copie de M. de Calonne.

1 M. de Beaujon pour son hospice.

--

19



1786.


1 La petite Fouquet.

1 Madame de Tott.

1 Le petit d'Espagnac.

1 La petite de la Briche.

1 Madame de Puységur.

1 Madame Raymond.

1 Madame Daudelot.

1 Madame Davaray.

1 Madame la comtesse de Sabran.

1 Mon portrait avec ma fille.

--

10



1787.


1 Ma fille lisant la Bible.

1 Madame de Rougé et ses deux fils.

1 Madame Dugazon, dans Nina.

1 Cailleau, en chasseur.

2 Ses deux enfans.

2 Ma fille, de profil et de face dans un miroir.

1 Madame de la Grange.

1 Grand tableau de la reine et de ses enfans.

1 Mon portrait.

2 Madame la comtesse de Béon.

1 M. Le Jeune.

3 Monsieur le dauphin, Madame, et M. le duc de Normandie, pour madame de Polignac.

1 La tante de madam de Verdun.

1 La duchesse de Guiche, tenant une guirlande de fleurs.

1 La même, au pastel.

2 La duchesse de Polignac, avec un chapeau de paille.

1 La même tenant un papier de musique et chantant près d'un piano.

1 Madame de Chatenay la mère.

1 Madame Dubarry en pied.

1 La même en peignoir.

1 Madame de Polignac.

--

27



1788.


1 Le duc de Polignac.

1 Son père.

1 Robert, le peintre, pour moi.

1 Madame Dumoley.

1 Madame de la Briche.

1 Madame la comtesse de Beaumont.

1 Le petit baron d'Escars.

1 Le petit prince Lubomirsky.

1 Le même en amour de la gloire.

1 Le petit Brongniart.

1 La marquise de Grollier.

1 Le Bailly de Crussol.

1 Madame de la Guiche en laitière.

1 M. d'Angevilliers.

--

14



1789.


1 M. de Chatelux, fait de souvenir.

1 M. le duc de Normandie en pied.

1 Madame Péregaux.

1 Madame de Ségur, profil.

1 Grand portrait de la reine pour le baron de Breteuil.

1 La duchesse de la Rochefoucauld.

1 Petit amour pour M. le Pelletier de Morfontaine.

1 Madame la duchesse d'Orléans.

1 Mon portrait avec ma fille pour M. d'Angevilliers.

1 Madame de Grollier.

1 Le Bailly de Crussol.

1 Madame d'Aumont.

2 Madame de Polignac.

2 Madame de Guiche, pastel.

1 Madame de Pienne.

1 Madame de la Châtre.

1 Madame de Fresne-Daguesseau.

1 Le maréchal de Ségur.

1 Madame, et monsieur le dauphin.

1 Robert, peintre de paysage.

1 Petit ovale de ma fille.

1 Madame Chalgrin.

1 Mon portrait au pastel.

1 Le portrait de Joseph Vernet, qui est au Musée.

1 Le prince de Nassau en pied.

1 Mon portrait tenant ma fille dans mes bras.

1 Madame Raymond tenant son enfant.

2 Madame de Simiane.

2 Madame Rousseau.

1 Madame Duvernais.

1 Madame de Saint-Alban.

1 Madame Savigni.

1 Mademoiselle Dorion.

--

37


444 total général.



TABLEAUX D'HISTOIRE.

La Poésie, la Peinture et la Musique.

Une scène espagnole.

L'Amour endormi sous un bosquet de roses, avec deux nymphes qui le regardent.

Une jeune fille effrayée d'être surprise en chemise et se cachant la gorge.

Une jeune fille qui écrit et que l'on surprend.

L'Innocence qui se réfugie dans les bras de la Justice.

Une Vénus, liant les ailes de l'Amour.

Junon demandant à Vénus sa ceinture.

Une bacchante avec la peau de tigre.

La Paix qui ramène l'Abondance.


NOTES

Note 1: (retour) Nous avons placé toutes les notes et portraits à la fin de ce volume. (Note de l'Éditeur.)

Note 2: (retour) Ce portrait est un buste ovale que je fis d'après elle: j'avais alors quinze ans et demi].
Note 3: (retour) À présent on y voit des tableaux des peintres modernes français. Je suis la seule qui n'en ait pas dans cette collection.
Note 4: (retour) À cette époque, le marquis de Choiseul était du nombre, ce qui m'indignait, car il venait d'épouser la plus jolie personne du monde. Elle s'appelait mademoiselle Rabi; c'était une Américaine, âgée de seize ans. Je ne crois pas qu'on ait jamais rien vu de plus parfait.
Note 5: (retour) Il était même fort brillant. Les filles entretenues dépensaient des trésors pour y éclipser tout le monde, et l'on cite une demoiselle Renard que l'on y vit paraître un jour dans une voiture traînée par quatre chevaux dont les harnais étaient couverts de pierres fausses, imitant le diamant à s'y méprendre.
Note 6: (retour) Je ne sais pour lequel La Harpe fit les vers suivans:

Quatrain pour le portrait de la reine.


Le ciel mit dans ses traits cet éclat qu'on admire;

France, il la couronna pour la félicité:

Un sceptre est inutile avec tant de beauté;

Mais à tant de vertus il fallait un empire.

Note 7: (retour) Ce M. Campan parlait toujours de la reine. Un jour qu'il dînait chez moi, ma fille, qui avait alors sept ans, me dit tout bas: Maman, ce Monsieur, est-ce le roi?
Note 8: (retour) Cette famille avait été comblée des bontés de la reine.
Note 9: (retour) Les clairs sont au soleil; ce qu'il me faut appeler les ombres, faute d'un autre mot, est le jour. (Note de l'Auteur.)

Note 10: (retour) Les seuls membres de l'Académie royale de peinture avaient le droit, à cette époque, d'exposer au salon. (Note de l'Éditeur.)

Note 11: (retour) Ce tableau est au ministère de l'intérieur. On aurait bien dû me le rendre, puisque je ne suis plus de l'Académie.(Note de l'Auteur.)

Note 12: (retour) M. de Rivière était chargé d'affaires de la cour de Saxe. C'était un homme distingué par son esprit et ses qualités morales.(Note de l'Auteur.)

Note 13: (retour) Aujourd'hui madame Regnault d'Angély
Note 14: (retour) Les tableaux de Ménageot sont parfaitement bien composés et d'un bon style historique. Ce peintre excellait dans la manière de draper. Son Léonard de Vinci mourant dans les bras de François Ier est très remarquable, mais ne vaut pas le Méléagre que l'on garde aux Gobelins depuis nombre d'années pour l'exécuter en tapisserie. M. Ménageot était un très bel homme, parfaitement aimable, spirituel et très gai: aussi le recherchait-on dans la meilleure société.
Note 15: (retour) Il l'aurait payée bien tard; car elle ne l'a été tout-à-fait qu'à mon retour de Russie en 1801. M. Lebrun m'avait laissé ce soin, à mon grand désappointement.
Note 16: (retour) Je l'ai représenté en Amour de la Gloire, agenouillé devant un laurier et tressant une couronne. Ce tableau est toujours resté dans la famille; le roi de Pologne m'a dit à Pétersbourg que jamais on n'avait voulu consentir à le lui céder pour aucun prix.
Note 17: (retour) Ce portrait a été acheté à la vente de M. Lebrun par M. le comte d'Harcour.(Note de l'Auteur.)

Note 18: (retour) Laruette n'a quitté qu'en 1799. (Note de l'Éditeur.)

Note 19: (retour) Le prince de Ligne parle, dans ses Mémoires, de ce superbe saule.
Note 20: (retour) J'y voyais souvent M. de Monville; aimable et très élégant, il nous mena à sa campagne, appelée le Désert, dont la maison était une tour seulement.
Note 21: (retour) Madame Rousseau a laissé un fils, connu sous le nom d'Amédée de Beauplan, qui est très bon musicien. Il compose des romances charmantes, et les chante à merveille.(Note de l'Auteur.)

Note 22: (retour) Elle a épousé depuis lord Fitz-Gerald, dont elle est veuve maintenant, car elle vit encore, mais bien changée.(Note de l'Auteur.)

Note 23: (retour) La veille de mon départ, j'allai chez ma mère, qui ne me reconnut qu'à mon son de voix. Il n'y avait pas trois semaines que nous nous étions vues.
Note 24: (retour) J'ai vécu dans l'étranger des portraits que je faisais. Bien loin que M. Lebrun m'ait jamais fait passer de l'argent, il m'écrivait des lettres si lamentables sur sa détresse, que je lui envoyai une fois mille écus et une autre fois cent louis, de même que plus tard j'envoyai la même somme à ma mère.
Note 25: (retour) J'avais fait ce portrait pour M. d'Angevilliers. Il a été soustrait à son propriétaire lors de l'émigration, et porté depuis au ministère de l'intérieur.
Note 26: (retour) La plus grande partie de ces tableaux sont maintenant au Musée.(Note de l'Auteur.)

Note 27: (retour) La plupart de ces portraits, notamment celui que j'ai fait au pastel de la duchesse de Guiche, sont chez madame la comtesse de Vaudreuil.
Note 28: (retour) Il n'est mort qu'à quatre-vingt-six ans. (Note de l'Éditeur.)



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