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Correspondance diplomatique de Bertrand de Salignac de La Mothe Fénélon, Tome Second: Ambassadeur de France en Angleterre de 1568 à 1575

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Et semble que, pour l'heure présente, la dicte résolution ne sera que salutaire à la dicte Royne d'Escoce, car l'on a opinion qu'elle ne seroit bien asseurée de sa vie ez mains du dict comte de Mora, et je croy que, tant qu'elle sera ez mains de la Royne d'Angleterre, sa personne ne prendra poinct de mal, sellon certains propos que la dicte Dame m'a tenuz, quant elle s'est pleincte à moy de ce que la dicte Royne d'Escoce s'estoit vollue adresser au duc de Norfolc, aulx comtes d'Arondel, de Lestre et de Pembrot, pour la cuyder contraindre de faire quelque chose par force; et que ceulx là n'estoient que ses subjectz advancez par elle, et, comme elle les avoit faictz, elle les pouvoit deffaire; et que desjà ayant miz la main sur le plus grand, elle la mettroit bien sur les moindres, quant elle vouldroit; et que la dicte Royne d'Escoce debvoit avoir considéré qu'ilz ne luy seroient jamais si bons, ny si bien affectionnez comme elle, car, si elle eust vollu croyre leur conseil et mesmes celluy du duc, quelle amytié qu'il y ayt meintennant, elle ne seroit plus au monde, mais qu'elle aymeroit mieulx mourir que de l'avoir consenty ny souffert.

Sur quoy, je miz devant les yeulx à la dicte Dame aulcunes considérations, qui avoient meu la Royne d'Escoce de s'adresser à eulx pour les affaires de sa liberté et restitution, parce qu'elle les leur avoit commiz, et s'en estoit dessaysie au grand regrect de la dicte Dame, laquelle n'avait rien tant desiré que de pouvoir venir en sa présence pour tretter avecques elle seulle, mais ses ennemys avoient toutjour miz peyne de l'empescher; et, quant au mariage du duc, j'entendois que cella n'estoit aulcunement procédé d'elle, ains luy avoit esté proposé par ceulx de son conseil, et qu'elle avoit toutjour respondu qu'elle s'y gouverneroit sellon que la Royne d'Angleterre et ceulx de sa noblesse la conseilleroient; par ainsy se voyoit que son intention n'avoit jamais esté de l'offancer: et semble que, sans les artiffices des protestans, lesquelz sont grandement contraires à la dicte Royne d'Escoce, la dicte Dame seroit assés bien disposée envers elle.

Au surplus, encor que la dicte Royne d'Angleterre et les plus grandz de ses subjectz ayent intention d'entendre à l'accord des différans des Pays Bas, et que iceulx, mesmes protestantz, pour aulcun respect, sçavoir est, du commerce, monstrent d'y concourir avec elle, sans ozer ouvertement le contradire, parce qu'il est grandement desiré du peuple (et l'alliance de Bourgoigne a grand part dans ce royaulme), si travaillent ilz bien fort, d'ailleurs, d'en prolonger tant qu'ilz peuvent la matière, affin que ce suspens leur puisse toutjour servir de couverture pour les pratiques, et transport d'argent et de merchandises, qu'ilz font en Allemaigne, d'où ceulx de la nouvelle religion sont grandement accommodez.

En quoy voyantz que le Roy d'Espaigne ne s'est tant vollu tenir ceste foys sur la réputation, qu'il n'ayt envoyé le premier requérir le dict accord à ceste princesse (chose qu'ilz n'espéroient debvoir jamais advenir, et de laquelle ilz ne mettent en petit compte l'advantaige, qu'ilz se vantent d'avoir faict gaigner en cella à la dicte Dame), ilz luy proposent meintennant que, soubz la facillité d'ung si puissant prince comme est le Roy d'Espaigne, le duc d'Alve va trainant quelque grand malice; et que la lettre, que le duc luy a meintennant envoyée de son Maistre, peult bien estre ung vieux blanc qu'il a remply à sa poste; dont, s'il fault entrer en tretté, estiment que cella doibt estre tant des choses passées et de celles du présent, que pour celles qui peuvent advenir entre eulx, et, si le pouvoir du marquis de Chetona n'est suffizant pour tout cella, qu'elle doibt remettre l'affaire en un aultre temps, s'esforceans par ce moyen de l'interrompre. Mais estimant la dicte Dame que de ceste légation résultera ou la paix ou la guerre, mal vollontiers veult elle rejecter les propos du marquis de Chetona; et néantmoins ne peult trouver mauvais que toutz les différans soyent vuydez à une foys, dont a trouvé bon qu'il se soit desjà faict une assemblée de gens de lettres pour examiner le dict pouvoir, et qu'au cas qu'il ne soit suffizant, qu'on en face venir de plus ample; dont, encor qu'ilz n'ayent interrompu la matière, ilz l'ont au moins prolongée encores pour quelques moys, et pourra estre que le dict marquis s'en retourne sans rien faire.]


LXXVe DÉPESCHE

—du dernier jour de novembre 1569.—

(Envoyée par homme exprès jusques à Calais.)

Nouvelles de la révolte du Nord.—Force des révoltés.—Impuissance de lord Hunsdon et du comte de Sussex pour les réduire.—Crainte d'un soulèvement des catholiques dans le pays de Galles.—Sollicitation du comte de Leicester pour obtenir le commandement en chef de l'expédition contre les rebelles, qui est donné au comte de Warwick, son frère.—Le comte de Leicester, établi lieutenant général, a la conduite de toutes les affaires.—Nombreuses levées de troupes faites dans toutes les parties de l'Angleterre, pour s'opposer à ceux du Nord.—Le comte de Shrewsbery est chargé de conduire Marie Stuart à Coventry, et de la mettre sous la garde du comte de Huntingdon.—Demandes que l'on dit être faites par ceux du Nord dans leurs proclamations.—Les négociations avec l'Espagne sont sur le point d'être rompues.—Soupçons d'Élisabeth que l'Espagne et la France ont excité les troubles du Nord.—Nouvelles d'Allemagne, où le duc Casimir s'apprête à commencer son expédition.—Proclamation de la reine contre ceux du Nord.—Violents reproches adressés aux comtes de Northumberland et de Westmorland.—Ils sont déclarés traîtres.—Proclamation de ceux du Nord.—Ils protestent de leur dévouement à la reine.—Ils demandent le rétablissement de la religion catholique.

Au Roy.

Sire, ceulx qui se sont eslevez au Nort poursuyvent leur entreprinse, lesquelz ayant faict leur première assemblée à Duren d'envyron six mil hommes de pied et quinze centz chevaulx, se sont miz aulx champs, et ont marché en bon ordre jusques bien prez de Yorc, et, en marchant, ilz ont toutjour accreu et renforcé leur troupe, laquelle l'on estime estre à présent de plus de quinze mille hommes. Milor Housdon, qui avoit esté dépesché pour leur aller au devant, ne se sentant assés fort pour les combattre, s'estoit arresté en ung lieu par dellà Yorc, où l'on dict qu'il a esté surprins et qu'il est demeuré prisonnier entre leurs mains; je n'en sçay encores bien la certitude. Le comte de Sussex, présidant et gouverneur du pays, n'a encores de quoy leur faire grand empeschement; aussi dict on qu'il n'a vollonté de guières les empescher. Il avoit envoyé ung sien jeune frère, nommé le sieur d'Aygremont, avec trois cents chevaulx, pour battre l'estrade et recognoistre le chemin qu'ilz prendroient, lequel, à ce que j'entendz, s'est allé joindre à eulx. Au contraire, le sire Georges Bos, qui monstroit estre de la part des eslevez, s'estant jetté dans ung fort au dict pays du North, a déclairé le tenir pour la Royne, sa Mestresse. Le comte de Betfort a esté dépesché en Galles pour aller contenir le pays, duquel l'on ne crainct moins l'eslévation que du North.

Le comte de Lestre a faict, par plusieurs foys, une grande instance, le genou en terre, à la Royne sa Mestresse, de l'envoyer chef et général à ceste entreprinse, mais non seulement elle le luy a reffuzé, ains luy a très expressément commandé de ne bouger, et comme à celluy qui, quasi seul des principaulx de la noblesse, se retrouve maintennant près d'elle capable de conduyre les grandz affaires qui se présentent, elle les luy a commiz et l'a créé comme son lieutenant général et superintendant sur tout le royaulme, estantz presque toutz les aultres du conseil, qui sont présens, ou trop vieulx ou gens de lettres, et le secrétaire Cecille tumbé fort mallade; mais elle a faict général en la campaigne, pour commander sur les armes, le comte de Vuarvic, frère du dict de Lestre, lequel ayant incontinent ordonné aulcuns capitaines, s'en est allé à Vuarvycsther son pays, qui est sur le chemyn que tiennent ceulx du North, affin d'assembler promptement des forces pour leur résister.

L'Admyral d'Angleterre est aussi party pour aller lever gens en son quartier, qu'on appelle Linconsther, et dict on qu'il a commission de passer jusques devers ces seigneurs du North pour sçavoir ce qu'ilz demandent; et semble que le comte [de] Dherby et milord Dacres du Nort s'entremettent aussi de modérer les choses, mais, en effect, l'on estime qu'ilz sont de la part des eslevez. Plusieurs gentishommes et pencionnaires de court ont esté dépeschez pour aller faire chacun une compagnye, mais plusieurs aussi s'en sont partys sans congé, qu'on dict estre allez de l'aultre part. L'on est après à lever quatre mil hommes en ceste ville aulx despens des habitans. Il est arrivé prez de la personne de ceste Royne trois centz harquebouziers, vieulx soldatz, de l'isle d'Ouyc. Toutz les officiers de la maryne ont esté mandez comme pour faire démonstration d'ung grand armement, et a l'on artifficieusement publié qu'on aprestoit douze navyres, affin que les eslevez et pareillement le marquis de Chetona le creussent ainsy; mais en effect, des douze grandz navyres qu'ilz ont toutjour tenu prestz, ilz n'ont mandé meintennant d'en équiper et mettre à la voille que sept, et d'iceulx n'en getter pour encores que trois en mer, sçavoir, l'Ayde, l'Arondelle et le Phœnix, avec cinq cens hommes seulement, bien que l'ordinaire fornyment des trois est de sept centz cinquante hommes, avec commandement de s'aller tenir sur le Pas de Callais pour guetter ce qui entrera et sortyra de ce royaulme.

Et au comte de Cherosbery a esté envoyé une commission de lieutenant de Roy en la contrée où est assize sa principalle mayson, le deschargeant de la garde de la Royne d'Escoce, laquelle, pour ceste occasion, il doibt admener, à ce qu'on dict, du premier jour en la ville de Conventry, là où le comte de Huntingthon la recepvra de rechef en sa charge, pour la conduyre à Quilingourt, maison du comte de Lestre, ou bien à Vuyndesor, d'où l'on dict que la Royne d'Angleterre, pour luy faire place, s'en vient la sepmaine prochaine à Hamptoncourt, et la consigner là en la garde de quelque aultre, lequel je ne sçay encores qui ce sera.

L'on dict que les dicts eslevez demandent cinq choses:

La première, est la réunyon de la religion avec réformation d'icelle, et, quoy que soit, le restablissement de la catholique par tout le royaulme, affin que les estrangiers n'entrepreignent de l'y venir restablir;—la seconde, est le règlement du Conseil d'Angleterre pour y remettre les principaulx et plus anciens de la noblesse qui avoient accoustumé d'en estre, et chasser aulcuns nouveaulx, que mal à propos l'on y a introduict;—la troisiesme, est la délivrance du duc de Norfolc et aultres seigneurs, qui sont en prison ou en arrest;—la quatriesme, est la restitution de la Royne d'Escoce à sa couronne, comme prochaine parante et héritière présomptive de celle de ce royaulme après sa cousine;—et la cinquiesme, est de chasser d'Angleterre toutz les estrangiers, qui y sont fuytifz des aultres pays;—et m'ont aulcuns asseuré d'avoir leu de leurs escriptz qui contiennent tout cella. Tant y a que celluy que j'ay veu ne touche que le poinct de la religion, en la forme que Vostre Majesté verra. Bien pensè je que de leur costé soit venu certain libelle diffamatoire contre l'estat de ce gouvernement et contre ceulx qui le manyent, à cause duquel je croy que la Royne d'Angleterre et son conseil ont ainsy passé oultre à déclairer rebelles les deux comtes et ceulx qui sont avec eulx de ceste entreprinse, comme le porte sa proclamation.

Le marquis de Chetona n'a pour encores grande espérance de pouvoir accorder les différans d'entre ce pays et les Pays Bas, veu certaine responce que la Royne d'Angleterre luy a desjà faicte sur la deffectuosité de son pouvoir; tant y a que, avec assés de regrect d'elle et des siens, vers lesquelz croyt le souspeçon de la demeure du dict marquis par deçà despuys ces troubles, il a vollu attandre encores une responce du duc d'Alve, premier que de prendre congé; et semble que, en toutes sortes, le dict accord est recerché de la part du Roy d'Espaigne, voyre avec désavantaige, dont sera merveille si en fin ceulx cy ne condescendent de l'accepter, voyantz mesmement les choses du dedans de leur royaulme n'aller si bien qu'ilz puissent entendre à celles du dehors. Sur ce, etc.

De Londres ce xxxe de novembre 1569.

A la Royne.

Madame, ayant comprins, par le retour du dict Sr. de La Croix et par les lettres qu'il m'a apportées, beaulcoup de choses de vostre intention, je mettray peine de les accomplir le plus entièrement qu'il me sera possible, et me semble que la bonne lettre, que le Roy a escripte à monsieur l'ambassadeur d'Angleterre, touchant l'interception de mon pacquet, et touchant le faict de la Royne d'Escoce, a esté bien à propos. L'on dict que la Royne d'Angleterre porte ung merveilleux ennuy dans son cueur de ceste eslévation du North, disant avecques larmes qu'elle n'a rien moins mérité que cella de ses subjectz, et qu'elle ne peult croyre qu'ilz ayent sitost oblyé les bons trettemens qu'ilz ont toutjour receu d'elle, pour s'en monstrer à ceste heure si ingratz; et qu'il fault que cella procède de la menée d'aulcuns estrangiers, dont est entrée en grande souspeçon et deffiance du duc d'Alve et des ministres du Roy d'Espaigne, et se crainct assés de Voz Majestez Très Chrestiennes pour les choses qu'elle sçayt que les siens ont mené avec ceulx de la Rochelle; mesmes qu'il semble,

Chiffre.—[Qu'ung nommé le Sr. Standen, Anglois, lequel, despuys la mort du feu Roy d'Escoce, s'est tenu en France, ayt, entre aultres particullaritez de la bataille et de ce qui a succédé despuys icelle, naguières escript à ung sien frère en ceste ville, qu'il se préparoit quelque entreprinse en France contre ce pays, dont icelluy frère a esté interrogé là dessus, et de certaine prison appellé le Flit où il avoit esté long temps dettenu l'on l'a remué dans la Tour,]—Vostre Majesté advisera s'il sera bon de rasseurer ceste princesse de vostre part, ou la laysser en ce suspens.

Les adviz, qu'on a icy d'Allemaigne, sont que le duc de Cazimir a sa levée de quatre mille chevaulx et quelques gens de pied toute preste, et, qu'aussitost qu'il aura touché certain argent, que je présume estre celluy des bagues de la Royne de Navarre, qu'il marchera. Je ne sçay si Mr. de Lizy aura trouvé les deniers si prestz de dellà, mais le Sr. Grassan, qui est après à cercher icy parmy les merchans cinquante mil {lt} esterlin (c'est cent soixante sept mille escuz) pour frayer à la guerre qui se commance icy, ou pour envoyer en Allemaigne, pensant les pouvoir trouver en quatre heures, n'a, en dix jours, peu assembler qu'envyron cinquante mil escuz; n'ozantz ceulx cy encores distribuer rien de ce qui est provenu d'Espaigne. Néantmoins, sellon aultres adviz qui sont venuz du duc d'Alve, l'on dict qu'il ne s'entend encores pas ung mouvement de guerre en Allemaigne.

Chiffre.—[L'homme merqué de pouldre au visaige]—m'est, despuys dix jours, venu deux foys dire adieu pour s'en retorner, allégant quelques occasions de son retardement, et en fin, m'a dict qu'il avoit fort bien accomply ce qu'il avoit à faire par deçà. Sur ce, etc.

De Londres ce xxxe de novembre 1569.

Proclamation de la Royne d'Angleterre contre ceulx qui se sont eslevez au pays du North.

Par la Royne.

La Majesté de la Royne a esté diversement informée, sur la fin de l'esté, qu'il se faisoit de secrectes menées en aulcuns lieux du pays de Yorc et en l'évesché de Duren, qui monstroient tendre à une prochaine assemblée et esmotion de peuple insolent; de quoy, parce que, du commancement, les informations ne contenoient aulcune évidante preuve, Sa Majesté y a heu moins d'esgart jusques à ce que [à l'occasion] des secrectes assemblées et conventions, que faisoient les comtes de Northomberland et Vuesmerland avec aulcunes personnes suspectes, les susdictz raportz ont esté renouvellez, et que le bruict et le commun parler d'ung chacun est allé, de lieu en lieu, sur eulx, qui les a expressément nothez d'en estre les autheurs.

Sur quoy, le comte de Sussex, présidant pour Sa Majesté en ces parties du North, en a donné advertissement, adjouxtant toutesfoys qu'en sa conscience il n'estimoit que ce fût aultre chose que rumeurs soubdeynement levez et soubdainement finyes; et encores, ayant incontinent mandé les dictz comtes pour conférer avec eulx de ces rumeurs, desquelles ilz ne pouvoient nyer qu'ilz n'en eussent ouy parler, ilz dissimulèrent néantmoins allors bien faulcement, ainsy qu'il apert à ceste heure, et protestèrent qu'ilz estoient ignoscens de ces occasions, offrans de despandre leurs vyes contre ceulx qui romproient la paix; et fut donné par le dict sieur présidant tant de foy à leurs sèremens, que non seulement ilz furent licenciez pour s'en retourner, ains leur fut baillé pouvoir d'examiner les causes des dictz bruictz.

Toutesfoys le feu, qu'ilz couvroient de leurs trahisons, estoit si grand qu'il errompit bientost nouvelles flammes, dont Sa Majesté, estant encores marrye d'entrer en aulcune ouverte mesfiance de ceulx de sa noblesse, et desirant pour ceste occasion voir les dictz comtes nettoyés de cest scandalle et son bon peuple demeurer en paix, lequel vyt en grand peur d'estre pillé, commanda au dict sieur présidant de faire entendre aus dictz deux comtes, au nom de Sa dicte Majesté, qu'ilz eussent à venir devers elle.

Sur quoy, ayant desjà, comme il est vraysemblable, le dict sieur présidant descouvert quelque chose davantaige de leurs mauvaises intentions, leur escripvit seulement de venir devers luy pour conseiller d'aulcuns affaires appartenans au conseil, ce qu'ilz différèrent de faire avec des responces frivolles; et, les en ayant de rechef plus expressément requis, ilz le dényèrent tout ouvertement.

En fin Sa Majesté leur a envoyé ses propres lettres affin de ne faillir de venir devers elle, mais, nonobstant icelles, ilz l'ont entièrement reffuzé, et auparavant la présentation des dictes lettres, ayantz assemblé ce qu'ilz avoient peu de personnes, qui n'estoit toutesfoys grand nombre, parce que les plus honnestes gens leur avoient reffuzé d'y aller, ilz sont entrez en une actuelle et ouverte rebellyon, se sont armez et fortiffiez en toute manière d'hostillité, et ont invadé maysons et esglizes, et ont publié en leurs propres noms des proclamations pour mouvoir les subjectz à prendre leur party, comme ayantz intention de rompre et subvertir de leur propre authorité les loix, et menassant le peuple que, quand ilz ne pourront achever leurs intentions, adonc les estrangiers entreront dans le royaulme pour les mettre à fin; et avec cecy, adjoustent qu'ilz n'entendent faire aulcun préjudice à Sa Majesté, qui est ung prétexte de tout temps prins et usurpé par trahistres; et sont deux hommes, si leurs qualitez sont bien considérées, qui, pour la réformation d'une grande chose, sont aussi mal choysis et ont aussi mauvais crédit que, possible, nulz aultres de ce royaulme.

Dont cognoissant Sa Majesté en quelle sorte les dictz comtes, qui sont toutz deux pauvres, n'ayant l'ung, qu'une bien petite portion de ce que ses ancestres souloient tenir, qui l'ont despuys perdu, et l'aultre, ayant presque tout son patrimoyne gasté, vont, à ceste heure, comme gens débauchez, de çà dellà, accompaignez et associez d'ung nombre grand de personnes désespérez comme eulx, pour satisfaire à leur nécessité et ambition, laquelle ilz ne peuvent assouvyr, sinon qu'ilz recourent aulx plus grandes et extrêmes trahysons, de long temps projectées par ceulx qui les provoquent à cella contre la personne de la Majesté de la Royne et contre son royaulme, avec couleur d'aultres prétendues grandes entreprinses,

Elle a trouvé bon de faire promptement entendre à toutz ses bien aymés subjectz que les dictz deux comtes, contre le propre naturel de la noblesse, qui a esté instituée et establye pour deffandre le Prince comme leur chef, et préserver la paix, sont ainsy ouvertement et traystreusement entrez en ceste grande rébellion, et ont rompu la paix publique de ce royaulme, chose qui est contre tout aultre exemple advenu despuys le règne de Sa Majesté, lequel a desjà duré unze ans, et acte bien horrible contre Dieu, seul auctheur d'une si longue paix, et de grande ingratitude contre leur souveraine Dame, à laquelle les dictz deux comtes avoient cy devant faict plusieurs professions de leur foy; et, à ceste heure, sont si desnaturez et pernicieulx, que leur natif pays, par leur seule mallice et ambicion, est pour estre troublé en la paix qu'il a si longtemps jouye, et en sa félicité.

A cause de quoy, Sa Majesté encharge et commande à toutz ses bons subjectz d'employer tout leur pouvoir à la préservation de la paix commune, qui est la bénédiction de Dieu Tout Puyssant, et de apréhender sans délay toutes manières de personnes qui, en aulcune sorte, se monstreront favorables à la rebelle entreprinse des dictz deux comtes ny de leurs associez; lesquelz, ainsy que Sa Majesté par le dict comte de Sussex, son lieutenant général au North, a commandé estre publiez rebelles et traystres à sa couronne et dignité.

Ainsy, pour obvier à tout prétexte d'ignorance, Sa dicte Majesté par ces présentes réytère et torne notiffier à tout son royaulme qu'ilz sont traystres et pour telz ont à estre tenuz, réputez et appellez en toutz propos, espérant que ceste cognoissance et admonition, donnée à toutz ses bons subjectz, suffira pour les faire contenir en leurs debvoirs et se contregarder de toutes les séductions des susdictz rebelles et traystres, et de leurs adhérans et faulteurs, nonobstant quelconque prétexte qui puisse estre prins ou publié par eulx ou par ceulx qui n'ont pas la grâce de Dieu de se déclairer de vivre en paix, mais à mouvoir querelles et exciter volleries sur les biens et substance du bon peuple, vray et propre fruict de toutes rebellions et traysons.

Donné au Chasteau de Vuyndesor, le xxıııȷe jour de novembre 1569, en l'unziesme an du règne de Sa Majesté.

Ce que ceulx du North ont publié de la cause pour laquelle ilz ont prins les armes.

Nous, Thomas comte de Northomberland et Charles comte de Vuesmerland, loyaulx subjectz de la Royne,

Faisons sçavoir à toutz ceulx de l'ancienne religion catholique que Nous, avec plusieurs bien disposez personnaiges de la noblesse, et aultres, avons promiz nostre foy en l'avencement de ceste bonne intention, et que, pour aultant que diverses personnes désordonnées et mal disposées, d'alentour de la Majesté de la Royne, par leurs malicieuses et subtilles praticques, et affin de s'avancer eulx mesmes, ont ruyné et abattu en ce royaulme la vraye religion catholique, et abusans par ce moyen la Royne, et mettans en mauvais ordre le royaulme, cherchent et procurent de ruyner la noblesse;

Nous nous sommes assemblez pour leur résister par la force, et pour, avec l'ayde de Dieu et de Vous, ô bon Peuple, restaurer toutes les anciennes libertez de l'esglize de Dieu et de ce noble royaulme, parce que, si nous mesmes ne le faisons, nous serons réformez par les estrangiers, au grand dangier de l'estat de ce pays, où nous sommes.

Dieu saulve la Royne.

Soubzigné le comte de Northomberland, le comte de Vuesmerland et neuf aultres.


LXXVIe DÉPESCHE

—du Ve jour de décembre 1569.—

(Envoyée exprès jusques à Calais par Olivyer Champernon.)

Retard apporté dans les communications de l'ambassadeur avec la France.—Nouvelles du Nord.—Lord Hunsdon, sir Raf Sadler et le comte de Sussex chargés d'étouffer la révolte.—Bonnes nouvelles qu'ils transmettent à la reine.—La tentative des révoltés sur Tutbury pour s'emparer de Marie Stuart n'a pas eu de succès.—Confiance que semble prendre Élisabeth dans les nouvelles qui lui sont données.—Mise en liberté du comte d'Arundel.—Commandement important confié au comte de Pembroke.—Mission du comte de Bedford dans le comté de Sussex.—Soupçon d'Élisabeth contre le vicomte de Montagu et le comte de Sussex lui-même.—Dégradation des armoiries du comte de Northumberland comme chevalier de l'ordre.—Les négociations avec l'Espagne restent en suspens.—Meilleur accueil est fait au Sr. Ciapino Vitelli, qui paraît être parvenu à détruire les soupçons que l'on avait contre lui.—Serment fait par Élisabeth sur les livres saints, qu'elle n'a point commandé l'enlèvement de la dépêche de l'ambassadeur.—Restitution de cette dépêche faite par un inconnu.—Espoir d'un meilleur traitement pour la reine d'Écosse.—Audience est accordée à l'évêque de Ross, qu'Élisabeth avait d'abord voulu faire arrêter.—Depuis la révolte du Nord, la reine d'Angleterre se montre plus favorable envers la France et plus irritée contre l'Espagne.—Nouvelle que le comte de Southampton et le vicomte de Montagu sont passés dans les Pays-Bas pour traiter avec le duc d'Albe.—Note mise sur l'enveloppe du paquet rendu.

Au Roy.

Sire, j'ay esté assés prompt et dilligent de vous escripre les mouvemens de ce royaulme, mais, de tant que la Royne d'Angleterre a heu souspeçon qu'il y pourroit avoir meslé quelque intelligence de dellà la mer, et qu'à ceste occasion elle a commandé de tenir les passaiges estroictement serrez, encor que despuys elle m'ayt assez libérallement faict expédier ung passeport, signé de son garde des sceaulx et des principaulx de son conseil, pour vous envoyer le Sr. de Sabran, le gardien néantmoins de ses portz n'a vollu permettre que luy ny aultre ayent passé, sans avoir exprès passeport signé de la propre main de la dicte Dame, et par ceste difficulté le dict Sr. de Sabran, qui s'en est retorné de Douvres jusques icy, a esté retardé plus de huict jours entiers; par lequel j'espère qu'aulmoins à présent, Sire, et par mes lettres du xxve du passé, qu'il vous a aportées, et par aultres que, du dernier d'icelluy, je vous ay despuys escriptes, Vostre Majesté aura amplement entendu ce qui, jusques à la datte d'icelles, est advenu par deçà.

Et meintennant j'ay à vous dire, Sire, que ayant millord Housdon failly de tumber ez mains de ceulx du North, il s'est saulvé dedans Yorc, où ceste Royne l'a ordonné, luy et ser Raf Sadeler, adjoinctz au comte de Sussex, pour conduyre les affaires du North, sans que le dict comte ayt faict semblant de le trouver mauvais; et les trois ensemble, à ce que j'entendz, ont conjoinctement mandé à la dicte Dame qu'ilz n'ont esté d'adviz de combattre encores les eslevez jusques à ce que les forces, qu'elle a promiz leur envoyer davantaige, soyent arrivées, affin de ne rien hazarder; et que cependant, avec celles qu'ilz ont, ilz mettent peyne de confirmer le pays, et que ceulx du North, ayantz marché pardeçà le chasteau du Pont Freit, avoient faict advancer huict cens chevaulx comme pour aller surprendre le chasteau de Tutbery, affin de mettre la royne d'Escoce en liberté; de quoy adverty, le comte de Cherosbery avoit incontinent conduict la dicte Dame à Conventry, dont les aultres voyantz leur entreprinse faillye s'en estoient retournez par dellà le dict Pont Freit, et avoient recullé lx milles; et que, sellon qu'ilz avoient entendu de leurs affaires, le comte de Northomberland délibéroit de poursuyvre opinyastrément son entreprinse; mais que le comte de Vuesmerlan commançoit desjà de branler, et qu'il n'y avoit guières à faire à le regaigner, et luy faire accepter ung pardon de la dicte Dame, s'en estant deux mille des siens desjà retornez; et que leur troupe commançoyt de se deffaire; que eulx trois avoient miz ordre aulx portz et forteresses de Neufcasthel, de Norpont, de Escalebourg et de Eychester, pour garder que les dicts comtes ne se peussent aulcunement prévaloir de la mer, ny vers France, ny vers Flandres, ny vers Yrlande; et par ainsy que, allans leurs affaires mal, comme il y avoit grande aparance qu'ilz feroient leur retrette, [ce] ne pourroit estre que ez frontières d'entre l'Angleterre et l'Escoce, et n'estoient d'adviz, puysqu'ilz avoient recullé, que la dicte Dame mît encores si grandes troupes aulx champs soubz le comte de Vuarvyc, comme elle avoit proposé de le faire, affin de ne travailler son peuple, lequel commançoyt estre aulcunement mutiné contre les aultres parce qu'ilz ne s'estoient peu tenir de piller; et qu'il suffira, à ceste heure, de bien petites forces pour rompre celles des dictz eslevez.

Tant y a que ceulx qui entendent les choses ne jugent qu'elles soyent ny aysées ny facilles; néantmoins ceste Royne, encores qu'elle les estime bien urgentes, semble que, à cause de ces bonnes nouvelles et par l'opinion de quelques ungs des siens, elle ayt diminué de moictié l'ordonnance de ces apareils, et que, de vingt quatre mil hommes qu'elle avoit mandé lever, elle n'en fera mettre que douze mil aux champs; de quoy aulcuns jugent que trop légièrement elle se repose en la foy et parolle de ceulx qui luy représantent ce dangier estre petit; mais pour la seurté de sa personne et de sa court, elle a ordonné huict cens harquebouziers et six centz chevaulx à sa suytte, oultre ses gardes, et oultre les ordinaires de sa mayson.

Le comte d'Arondel a esté relasché, avec permission de s'en aller en sa mayson, soubz une solemnelle promesse qu'il a faicte d'estre bon et loyal à la Royne, sa Mestresse, laquelle toutesfoys il n'a veue.

Le comte de Pembrot a envoyé remercyer ceulx du conseil de la charge qu'ilz luy ont donnée sur deux provinces, qui sont prez de sa mayson, et qu'il mettra peyne d'en rendre bon compte à sa Mestresse.

Au retour du comte de Betford du pays de Galles, l'on l'a envoyé adjoinct au viscomte de Montegu en Sussex, pour quelque souspeçon qu'on a du dict vyscomte, et ne se peult l'on encores bien asseurer du mesmes comte de Sussex.

Les armoyries du comte de Northomberland ont esté dégradées et ostées publiquement par le Hérauld Jarretière du reng des aultres qui estoient à Vuyndezor, et mises bas avec ignominie, follées aulx piedz et puys jectées aulx fossez, après ung sermon qui a esté faict exprès pour cella.

Le marquis de Chetona ne donne encores grand advancement à ses affaires; néantmoins il est toutjour près de Vuyndezor, attandant d'un costé certaine responce du duc d'Alve, et de l'autre l'oportunité de pouvoir trouver ceste Royne et les siens en quelque bonne disposition, pour leur faire mieulx gouster ses honnestes offres et raysons qu'ilz n'ont encores faict; et leur a le dict marquis uzé de si gracieuses et humbles parolles et démonstrations pour son regard, et pour ceulx qui sont avecques luy, que l'on n'a plus tant de souspeçon d'eulx comme l'on avoit, et a esté commandé fort expressément de ne leur faire aulcun desplaysir, ainsy que l'on commançoyt de les arceller et quereller à tout propos et leur faire beaulcoup d'indignitez. Sur ce, etc.

De Londres ce ve de décembre 1569.

A la Royne.

Madame, ne sachant qu'il soit advenu aultre chose, despuys ma précédante dépesche, laquelle est du dernier du passé, ez entreprinses de ceulx du North, ny aulx aprestz qu'on faict icy contre eulx, que ce que j'en escriptz présentement en la lettre du Roy, je ne vous en manderay rien davantaige en ceste cy; mais je vous diray au surplus, Madame, que de la bonne lettre que Voz Majestez escripvirent, le ııȷe de novembre, à l'ambassadeur d'Angleterre, sur la vollerie de mon pacquet et sur les affaires de la Royne d'Escoce, joinct l'instance que j'en ay faicte icy sur le lieu, sont advenues deux choses, oultre mon expectation:

L'une, que, ayant la Royne d'Angleterre juré sur ung livre de ses oraysons qu'elle estoit ignorante du faict de mon pacquet, et qu'elle mettroit peyne de m'en faire justice, ung homme incogneu vint, devant hyer, sur les huict heures du soir, estant la porte de mon logis desjà fermée, jetter par dessus icelle, dedans ma court, le dict pacquet avec une envelope où y avoit bien peu de motz escriptz en anglois, desquelz je vous envoye la traduction, qui protestent que le dict pacquet n'a poinct esté ouvert, ce que je croy estre vray, lequel je vous envoye tout tel, parce que les lettres que la Royne d'Escoce vous escripvoit sont dedans.

L'aultre est qu'ayant la dicte Dame trois et quatre foys reffuzé de donner audience sur les affaires de la Royne d'Escoce à monsieur l'évesque de Roz, et mesmes ayant dellibéré de faire mettre le dict évesque en arrest, pour le souspeçon qu'elle a heu de luy, elle néantmoins luy a faict escripre par le secrétaire Cecille bien fort gracieusement, qu'elle sera preste de l'ouyr, quant il luy plairra d'y aller, lequel s'y est tout aussi tost acheminé; dont peult estre que la dicte Dame se soit résolue de prendre quelque bon expédiant sur la liberté et restitution de la dicte Dame, sa cousine, ce que nous ne lairrons réfroydir s'il s'y voyt tant soit peu de disposition. Bien pensé je que, parmy le marché, l'on vouldra principallement rompre le mariage d'elle et du duc de Norfolc.

Je croy que ces tumultes du North pourront randre la dicte Royne d'Angleterre plus trettable envers Voz Majestez Très Chrestiennes qu'elle n'a esté jusques icy, ez choses raysonnables qui luy seront requises en vostre nom; et qu'aussi y servira beaulcoup le bon rapport que toute la flotte des siens, qui est allée ceste année pour le vin à Bourdeaulx, a faict du bon trettement qu'elle y a receu, et de la grande faveur que voz gallères luy ont faicte; de quoy la dicte Dame demeure fort contante. Et semble aussi que, pour la difficulté de ne pouvoir ou ne vouloir tretter avec le duc d'Alve des différans qu'elle a avecques luy, elle cerche de se porter plus doulcement et respectueusement envers Voz Majestez, et certes je n'ay jamais guières cogneu de mauvaise intention en ce qui procédoit d'elle, mais je ne dy le semblable de ce qui procédoit de son conseil. Sur ce, je bayse très humblement les mains de Vostre Majesté, etc.

De Londres ce ve de décembre 1569.

Chiffre.—[J'entendz que le comte de Surampton et le viscomte de Montegu sont passez devers le duc d'Alve.]—Je vous suplie très humblement commander qu'il soit faict part de toute ceste despesche à Monseigneur vostre filz.

Copie de ce qui estoit escript à l'envelope du pacquet rendu.

Monsieur l'ambassadeur, je vous laysse ces lettres, lesquelles ne me peuvent de rien servir, et vous asseure, sur ma foy, qu'elles n'ont jamais esté ouvertes, et le milord Coban menaçoit chacun que s'il pouvoit trouver celluy qui avoit pris les dictes lettres, qu'il le pendroit; dont, pour craincte de cella, je les ay aportées à Londres, et je n'ozerois estre cogneu de mon nom, ny ne le vouldrois estre, ains plus tost avoir perdu beaulcoup d'escuz.


LXXVIIe DÉPESCHE

—du Xe jour de décembre 1569.—

(Envoyée exprès jusques à Calais par Jehan Valet.)

Nouvelles du Nord.—Les révoltés sont entièrement maîtres du pays, où ils rétablissent partout le culte de la religion catholique.—Le comte de Sussex, lord Hunsdon et sir Raf Sadler renfermés dans York.—Force des insurgés.—Parfaite union qui existe entre les deux comtes.—Activité d'Élisabeth, dans ses préparatifs d'attaque et de défense.—Son armée se rassemble à Leicester.—Elle a su gagner à son parti les comtes de Dherby, de Sussex et de Cumberland, le comte de Southampton et le vicomte de Montagu, le lord Dacres, principal catholique du Nord, et jusqu'aux comtes d'Arundel et de Pembroke.—Elle s'est assurée du secours des princes d'Allemagne, dans le cas où il lui seroit nécessaire.—Motifs auxquels on peut rapporter la révolte du Nord.—Crainte qu'Élisabeth ne fournisse des secours à la Rochelle, si la paix n'est pas conclue promptement.—Avis donné d'Allemagne, où le duc Casimir ne semble pas encore prêt pour tenter son expédition.—Préparatifs du sieur Dolovyn et du bâtard de Briderode pour se rendre avec une flotte nombreuse à la Rochelle.—Armements maritimes du duc d'Albe.—Crainte qu'ils inspirent à Élisabeth.—Le Sr. Ciapino Vitelli retarde son départ sous divers prétextes.—Détails sur le projet formé par Élisabeth de livrer la reine d'Écosse au comte de Murray.—Sollicitations de Marie Stuart pour que la France s'y oppose.—Arrivée en Angleterre d'un député de la reine de Navarre.

Au Roy.

Sire, ayant ceulx du Nord failly à leur entreprinse de surprendre Tutbery et de mettre la Royne d'Escoce en liberté, comme par mes précédantes, du ve du présent, je le vous ay mandé, ilz s'en sont retournez par dellà Pont Freit et ont couru le pays, restablissant partout la religion catholique et la messe; puys se sont arrestez ez envyrons de Yorc, qui est une grande ville en laquelle le comte de Sussex, millord de Housdon et ser Raf Sadeller ont assemblé cinq mille hommes de guerre pour leur résister, mais ne les ozent encores aller rencontrer en la campaigne, et mesmes les layssent ordinairement courir jusques à leurs portes; ce qui donne espérance aulx aultres de les pouvoir mettre en quelque nécessité de vivres.

Et estantz advertys qu'ung seigneur protestant du North, nommé millord Tempost, venoit avec trois cens chevaulx pour se jecter dedans la dicte ville, ilz l'ont surprins et dévalizé, luy et toutz ses gens, et remonté aultant de ceulx de leur trouppe, et au millord Lathemor, très riche seigneur de ce quartier là, lequel n'a que deux filles, l'une maryée au sire Henry Percy, frère du comte de Northomberland, et l'aultre au filz aysné du secrétaire Cecille, toutz trois protestans, parce que, quant ilz l'ont mandé venir devers eulx, il a reffuzé de le faire, ilz ont envoyé saysir sa mayson, où ilz ont trouvé grand quantité de vaysselle d'argent et beaulcoup de deniers contantz, et, oultre ce, luy ont faict enlever de ses escuyeries et de ses parcz unze ou douze vingtz pièces de chevaulx; par lequel et aultres semblables exploictz, ilz se vont remontant et se pourvoyent pour continuer la guerre tant qu'ilz pourront. Ilz sont quinze mille hommes ensemble, et seroient davantaige s'ilz vouloient, mais ne permettent sinon à gens d'effect de se joindre à leur trouppe. Et voicy ce qu'on dict d'eulx, qu'ilz ont quatre mil hommes de cheval, aussi bien montez et armez et en [aussi] bon équipage qu'il s'en puisse trouver en Angleterre, et que les deux comtes procèdent toutjour d'ung bon accord avec résolution de poursuyvre conjoinctement leur entreprinse jusques à la mort; et que, pour encores, ils n'ont faulte de rien.

De l'autre part, la Royne d'Angleterre faict de grandz aprestz pour les deffaire, ayant mandé aulx principaulx de la noblesse et aulx villes et provinces de son royaulme de luy envoyer en toute dilligence le secours, qu'en tel cas ung chacun pour son regard est tenu de luy bailler, qui monte à ung grand nombre tant de gens de cheval que de gens de pied; et que, de la levée qui se faisoit à ses despens, laquelle debvoit estre de xxıııȷ mil hommes, les douze mil ayent à s'acheminer incontinent devers le comte de Vuarvic, lequel dresse l'armée à Lechester, où la dicte Dame luy a envoyé grand quantité d'armes, de pouldres, d'artillerye et aultres monitions de guerre. Davantaige elle a mandé que les douze grandz navyres, dont en mes précédantes j'ay faict mencion, ayent à estre tenuz en ung apareil tout prest à la voille, et d'en faire sortir présentement trois pour la garde du Pas de Callais, et presse bien fort en ceste ville ung emprunct de cinquante mille {lt} esterlin, c'est cent lxvii mil escuz, lesquelz, pour la plus part, sont desjà miz ez mains de Me. Grassan; et par mesme dilligence, elle pourvoit à la garde et seureté de ses places et de ses portz, et va confirmant la vollonté de ses villes, et de toutz ceulx qu'elle estime tenir son party, et rasseurant les aultres, de qui elle a quelque doubte, par les meilleurs moyens qu'elle peult; dont semble que les comtes [de] Dherby, de Sussex et de Commerlan se soyent déclairés pour elle, et que le comte de Surampton et le viscomte de Montegu, lesquelz on disoit s'estre acheminez en Flandres, pour aulcune grande difficulté que, possible, ilz ont senty de ne pouvoir passer, affin de ne se randre davantaige suspectz, ayent prins pour expédiant de retourner vers elle, laquelle leur a baillé incontinent des charges honnorables; que le millord Dacres du North, principal catholique du pays, parce qu'elle luy a permiz de se saysir d'une opulante succession d'ung sien nepveu, laquelle se querelle entre luy et le duc de Norfolc, il soit demeuré ferme pour la dicte Dame; et que, avec la prison, et aultres moyens qu'elle a uzé envers le dict duc et envers les comtes d'Arondel et de Pembrot, elle leur ayt si bien amorty le cueur, que, pour ce commancement, elle pense avoyr desjà randu les eslevez fort dénuez de leurs meilleures espérances; et tient le partement de Quillegrey, lequel pour aultres occasions estoit desjà tout dépesché pour Allemaigne, en suspens, affin que, si l'affaire se monstroit plus difficille ou dangereux qu'elle ne pance, elle puysse par luy mesmes en donner adviz aulx princes de dellà, desquelz elle se tient trop plus que bien asseurée qu'ilz s'esmouveront pour sa cause, et luy presteront tout le secours qu'elle leur vouldra demander; et cependant faict retirer soubz sa main les armes, artillerye et pouldres de ce royaulme, qui ne sont employées pour elle, et faict visiter les flottes et vaysseaulx, qui retournent de voyage, pour leur enlever les restes de leurs monitions, affin que les dictz eslevez ne s'en puissent prévaloir.

Et en effect, Sire, ceste esmotion n'est petite, de laquelle on faict acroyre à ceste Royne que l'occasion procède principallement de trois endroictz: sçavoir, de la Royne d'Escoce, de ceste grande victoire qu'il a pleu à Dieu vous donner, et des praticques du duc d'Alve; mais ne luy font mencion de la forme de sèrement, auquel despuys six sepmaines elle a vollu contraindre les catholiques contre leur conscience; ce que je croy leur avoir, plus que tout le reste, faict ainsy soubdeynement prendre les armes. Tant y a, quant au premier poinct, de la Royne d'Escoce, parce que la dicte Dame a la personne d'elle entre ses mains, elle estime y pouvoir bien remédier; mais des aultres deux elle se prandroit sans doubte trop plus volontiers au duc d'Alve que à Vostre Majesté, si ce n'estoit, qu'ayant le dict duc miz l'estat de Flandres en paix, elle ne voyt bien le moyen comme luy pouvoir sussiter une guerre, et a opinion que, pour le présent, une bonne partie de son faict deppend de veoyr ou les affaires de ceulx de la Rochelle relevez, ou ung accord en vostre royaulme; et ne fault doubter qu'elle ne s'employe, sans rien espargner, en celle de ces deux choses qu'elle cognoistra y avoir plus d'aparance de pouvoir bien effectuer. Celluy comte de Mensfelt, qui a succédé au lieu du feu duc de Deux Pontz, luy a naguières escript qu'il se tenoit pour jamais son bon serviteur, et obligé soldat, et qu'il avoit adjouxté à ses armes la roze rouge et le phœnix, pour merque qu'il veult combattre toute sa vie soubz l'enseigne et faveur de la dicte Dame.

Au surplus, Sire, ce que j'ay d'adviz d'Allemaigne est en deux sortes, l'une venant du duc d'Alve, qui se publie icy, n'y avoir aulcun mouvement de guerre ny aprest en tout le dict pays; l'aultre est par une lettre de Mr. de Chantonné, du huictiesme du passé, laquelle je sçay que monsieur l'ambassadeur d'Espaigne, résidant par deçà, a receue despuys deux jours en langaige espaignol, lequel traduict en francès est en ces termes qui s'ensuyvent:

«Certes, il conviendroit que en France se donnassent presse de pousser en avant la victoire qu'ilz ont sur les rebelles, s'ilz ne veulent perdre le tout avecques le temps; car, despuys la nouvelle de la routte de l'Admyral, s'entend que Cazimir faict dilligence de mettre en ordre cinq mil chevaulx, bien que, jusques à ceste heure, ne se parle de nulz gens de pied, sans lesquelz ne semble qu'il soit pour entreprendre d'entrer en France, n'en ayant le dict Admyral à ceste heure pour luy en pouvoir envoyer au devant; et se dict communément qu'il estoit à regarder ce qui se passoit, quant ilz furent deffectz le jour de la bataille, et qu'il s'en soucya moins pour le beaulcoup d'argent qu'il leur debvoit; de quoy les Allemans monstroient ung grand sentyment et d'en estre bien mal contantz.»—C'est le contenu de la dicte lettre.

Je suys aussi adverty, Sire, que le Sr. Doulovyn et le bastard de Briderode ayantz, de leurs butins et pilleryes qu'ilz ont faictes sur mer, dressé ung armement de trente bons navyres de guerre, avec deux mille harquebouziers et quelque nombre de corseletz, et grandement pourveu leurs vaysseaulx d'artillerye, de pouldres et de toutes aultres monitions, sentans que le duc d'Alve faict quelque apareil en Olande et Zélande, lequel ilz craignent estre pour les aller combattre, dellibèrent de s'en aller à la Rochelle et y conduyre tout ce qu'ilz pourront de vivres, d'armes, de monitions, et encores, comme l'on pense, bonne somme de deniers; dont estant ces deux, et le capitaine Sores, qui s'intitulle à présent visadmyral de France, joinctz avec les aultres pirates de ceste mer estroicte, ilz pourront faire toutz ensemble une armée d'envyron quarante cinq ou cinquante vaysseaulx; à quoy Vostre Majesté, s'il luy playt, fera prendre garde tout le long de la coste de dellà.

Et j'entendz que ceste Royne est en quelque souspeçon de l'armement qu'on dict du duc d'Alve, bien qu'on luy veult persuader que c'est pour la conduicte de la flotte qui doibt bientost partir pour les Indes; et luy tarde infinyement que le marquis de Chetona soit hors de ce royaulme, lequel va néantmoins prolongeant toutjour son partement soubz colleur qu'il dict attandre une responce du duc d'Alve, laquelle ne vient poinct, et ne donne cependant que petit ou nul advancement à l'accord des différans des Pays Bas. Sur ce, etc.

De Londres ce xe de décembre 1569.

A la Royne.

Madame, encor que la lettre que j'escriptz présentement au Roy soit bien ample, j'ay néantmoins à vous dire de restes par ceste cy, que la praticque de mettre la Royne d'Escoce ez mains du comte de Mora avoit esté menée si secrectement que, quant six sepmaines a, j'en heuz quelque sentyment, comme incontinent je l'escripviz à Vostre Majesté, la Royne d'Escoce, à laquelle semblablement je le fiz entendre, et monsieur l'évesque de Roz n'en pouvans avoir pour lors aulcune certaine notice, estimèrent qu'il n'en estoit rien, mais à présent elle et luy et moy sommes très certainement informez que Me. Chary, filz aysné de millord Housdon, fut, en septembre dernier, dépesché par poste en Escoce pour l'aller proposer au comte de Mora, et despuys, en octobre ensuyvant, le propos en a esté continué à l'abbé de Domfermelin, quant il est venu par deçà; c'est de consigner la dicte Dame à icelluy de Mora, pourveu qu'il la viègne prendre au port de Houl, pour la conduyre par mer en Escoce, affin de ne la passer par le North; et que, pour l'acquit de l'honneur de la Royne d'Angleterre, il face venir deux comtes et deux lordz, et les filz aysnez d'aultres deux comtes et d'aultres deux lordz, huict personnes en tout, hostaiges en Angleterre, pour la seureté de la personne et de la vie de la dicte Dame; dont, ayant le dict de Mora desjà communiqué l'affaire aulx comtes de Morthon et de Mar, et à millord Lendzey, icelluy de Mar a offert son filz aysné, et le dict Lendzey s'est offert soy mesmes, d'estre deux des dictz ostaiges. Chose que la dicte Royne d'Escoce crainct sur toutes aultres, et pour l'empescher elle supplie très humblement Voz Majestez, avecques larmes, d'envoyer mille harquebuziers, a tout le moins cinq centz, à Dombertran, affin de donner tant de cueur à ceulx de son party qu'ilz puissent empescher ses adversaires de se prévaloir si ayséement contre elle et contre son estat, comme ilz en font leur compte.

Et encor que je vous aye naguières mandé qu'on m'avoit donné adviz que, au conseil d'Angleterre, cella avoit esté interrompu par le menée des protestans, qui avoient faict résouldre la détention de la Royne d'Escoce par deçà estre très nécessaire, et n'y avoir aultre moyen que celluy là pour se pouvoir bien asseurer d'elle; néantmoins, parce qu'il y pourroit avoir de l'incertitude ez advertissemens qu'on me donne, qui comme sçavez, Madame, ne me peuvent venir que par meins tierces, et qu'il survient assés souvant du changement aulx dellibérations de ceulx cy, je suplie très humblement Vostre Majesté de vouloir pourvoir au pitoyable et très urgent besoing de ceste pouvre princesse, vostre belle fille et principalle allyée de vostre couronne, par les meilleurs moyens qu'avec vostre commodité vous le pourrez faire, et me mander par le premier ce que, pour sa consolation, je luy auray à faire entendre là dessus, estant cependant ma dellibération de m'oposer fermement, au nom de Voz Majestez, à ce que cella ne s'exécute, ainsy que le dict évesque de Roz verra que à propos je le debvray faire; qui mettrons peyne, toutz deux, de sçavoir au vray en quoy en demeurent les choses.

Au surplus, Madame, j'entendz qu'aujourdhuy est arrivé en ceste court ung gentilhomme venant de la Rochelle, natif de Flandres d'auprès d'Esguerdes, lequel la Royne de Navarre envoye devers la Royne d'Angleterre; mais ne sçay encores à quelles fins, si n'est qu'on m'a dict que c'est pour tretter d'avoir quelque secours, et pour avoir, pour elle et madame Catherine sa fille, et pour madame la princesse de Condé et ses petitz enfans, asseurance d'estre, avecques toute seurté, receuz en ce royaulme au cas que la nécessité les contreigne d'y avoir leur reffuge. Je mettray peyne d'entendre mieulx ce qui en est, et Vostre Majesté me commandera ce que j'y auray à faire; et n'estant la présente que pour vous parler de ces princesses et de leur misérable estat, je ne la vous feray plus longue, remectant à mon retour de Vuyndesor, où je m'en vays demain, sur l'occasion de la dépesche que le Sr. de Vassal m'a aportée, de vous escripre plus amplement toutes aultres choses; et je prieray Dieu, etc.

De Londres ce xe de décembre 1569.


LXXVIIIe DÉPESCHE

—du XVIIe jour de décembre 1569.—

(Envoyée exprès jusques à Callais par Pierre Chassac.)

Nouvelles de la guerre de France.—Retraite de l'amiral de Coligni sur Montauban.—Réduction de plusieurs places fortes de Guyenne sous l'obéissance du roi.—Siège de Saint-Jean-d'Angely.—Capitulation proposée aux habitants.—Entrevue de l'ambassadeur et de la reine d'Angleterre.—Déclaration de l'ambassadeur, que tout secours donné par les Anglais aux protestants de la Rochelle sera pris pour un acte de guerre.—Protestation d'Élisabeth qu'elle veut maintenir la paix, qu'elle interdira à ses sujets de fournir aucun secours à ceux de la Rochelle, et qu'elle est fermement résolue à ne prendre les armes que pour la défense de sa religion, si elle était attaquée.—Sollicitations qui sont faites auprès d'elle par les princes protestants d'Allemagne, pour l'engager à entreprendre une guerre générale.—Déclaration de l'ambassadeur, que le roi ne serait pas éloigné d'accepter la médiation d'Élisabeth, et qu'il est toujours prêt à recevoir en grâce ses sujets révoltés.—Conversation entre la reine et l'ambassadeur sur les troubles du Nord.—Offre faite par l'ambassadeur des bons offices du roi.—Ses instances pour que l'Angleterre consente à la réunion des deux églises.—Assurance donnée par la reine que la révolte du Nord lui cause peu d'inquiétude, et qu'elle ne se refuse pas à négocier pour la réunion des églises.—Promesse qu'elle fait de bien traiter Marie Stuart et d'assurer une bonne issue à ses affaires.—Efforts des Espagnols pour renouer les négociations au sujet des Pays-Bas.—Nouvelles du Nord.—Un grand nombre des révoltés sont rentrés dans leurs foyers.—Le reste a mis le siége devant Castelbar.—Ils se sont rendus maîtres de Hartlepool.—Lord Heries, sorti de prison, a pris les armes avec le projet de se joindre à ceux du Nord.—Mouvements en Écosse contre le comte de Murray.—Pardon offert par Élisabeth aux révoltés.—Réunion des troupes de la reine.—Une bataille générale devient imminente.—Apprêts de guerre faits par le duc d'Albe dans les Pays-Bas.—Craintes qu'ils inspirent à la reine d'Angleterre.—Mesures qui sont prises par Élisabeth pour arrêter les entreprises des Espagnols.—Armements de plusieurs vaisseaux de guerre dans la Tamise.—Plainte des Anglais au sujet de quelques uns de leurs navires qui ont été arrêtés en Bretagne.—Vives instances pour que la restitution des prises soit faite au jour marqué.

Au Roy.

Sire, parce que vostre dépesche du xxe du passé, laquelle le Sr. de Vassal m'a apportée, n'a guières miz à venir après celle, que peu auparavant j'avoys receue par le Sr. de La Croix, je n'ay faict pour les deux qu'ung seul voyage devers la Royne d'Angleterre, affin de tant moins l'ennuyer sur le commancement de ces troubles, et ayant esté bien receu d'elle ainsy que toutjour, je luy ay faict ung sommaire récit de la retrette de monsieur l'Admyral vers Montauban assés en effroy, avec ce qui luy restoit de cavallerye; et comme les communes, en passant, s'estoient eslevées contre luy, et avoient assailly et deffaict aulcuns des siens aulx passaiges des rivières; néantmoins qu'il avoit passé oultre jusques à la Garonne pour se joindre aulx Viscomtes, qui estoient de dellà, ou leur donner moyen à eulx de passer devers luy, ce qui n'importoit guières que l'ung ou l'aultre advînt, car les deux forces ensemble n'estoient pour faire grand effect; et que cependant vous estiez après à recouvrer les places qu'il avoit occupées en Guyenne, dont la plus part s'estoient desjà réduictes, ès quelles vous aviez faict uzer d'une si grande clémence qu'il n'avoit esté touché ny à la vye ny à la personne d'ung seul des habitans; et [que] meintennant vous estiez devant St. Jehan d'Angely, là où ceulx de dedans avoient expérimenté la mesmes clémence de Vostre Majesté par une capitulation la plus gracieuse qui se pourroit ottroyer de nul prince à ses subjectz, laquelle néantmoins ilz avoient contre leur foy et promesse, reffuzé despuys d'accomplir; priant la dicte Dame vouloir prendre la peyne de la veoir; ce que tant plus curieusement elle fit qu'elle desiroit sçavoir si vous leur aviés concédé la liberté de leurs consciences. Et après l'avoir leue, je suyviz à luy dire que, pour faire retourner le monde en son ordre accoustumé de l'obéyssance deuhe aulx princes, avec quelques exemples notables pour aprendre aulx subjectz de ne plus désobeyr, vous la requériez, comme princesse souveraine, constituée entre les aultres grandz princes de la terre sur cest ordre de commander, et comme ayant grand intérest qu'il ne fût parverty, ains s'il l'estoit qu'il fût fermement restably, qu'elle vous vollût sur la dicte capitulation accorder deux choses;—l'une, de croyre fermement que Voz Majestez Très Chrestiennes n'ont jamais eu que bonne et droicte intention à la conservation de leurs subjectz, et au contraire que les aultres ne l'ont heue ny bonne ny droicte envers l'obéyssance et subjection qu'ilz vous doibvent;—la seconde que, de tant que par la force, puysqu'aultrement ne pouviez, vous dellibériez recouvrer la dicte obéyssance, et qu'à cest effect vous estiez en personne en vostre camp, la dicte Dame vollût favoriser vostre juste entreprinse, et ne donner aulcune assistance, secours ny faveur, ny permettre estre donné par ses subjectz à ceulx qui ainsy s'opposent à vostre légitime authorité; aultrement vous prendriez cella pour une manifeste déclaration qu'elle ne vouldroit demeurer aulx bons termes de paix et d'amytié envers vous, que vous desiriez de bon cueur persévérer envers elle; et luy vouliez ainsy dire cella, Sire, à cause du Sr. de Lombres, gentilhomme flamant, que je sçavois estre desjà venu, de la part de ceulx de la Rochelle devers la dicte Dame, et qu'on m'avoit dict que le frère de leur comte de Mensfelt y estoit aussi fort secrectement arrivé, et qu'il se tenoit caché en une chambre à Vuyndesor.

La dicte Dame me respondit que, avec le contantement qu'il vous playsoit luy donner du récit de voz affaires, elle en recepvoit ung aultre bien fort grand d'entendre qu'ilz alloient toutjours prospérant de bien en mieulx; et que, pour vous satisfaire sur les deux choses que je luy requérois, elle vouldroit qu'ung propos, que despuys quelques jours elle avoit desiré me tenir y peust suffire: c'est qu'elle protestoit envers Dieu et Voz Majestez Très Chrestiennes qu'elle avoit fermement rejecté deux très véhémentes persuasions qu'on s'estoit esforcé de luy donner; l'une d'entreprendre la deffance de voz subjectz travaillez pour la religion, et l'aultre de nourrir et foumanter la guerre en vostre royaulme, affin qu'elle ne passât au sien; car n'avoit estimé que l'une ny l'aultre de ces deux praticques peult convenir à son honneur ny à sa conscience, jugeant en son cueur que Voz Majestez Très Chrestiennes n'avoient peu vouloir mal à leurs subjectz, et que c'estoient plustost voz subjectz qui vous avoient provoquez et irritez; lesquelz, nonobstant qu'on leur fît empeschement en leur religion, debvoient, plustost que de mouvoir les armes, s'en estre allez hors du royaulme; par quoy avoit reffuzé d'estre pour leur cause, et n'avoit non plus desiré la continuation de la guerre en vostre royaulme, ains d'y veoir de bon cueur une paciffication; et que de leur envoyer meintennant du secours elle ne le feroit ny permettroit à ses subjectz, sinon au péril de leurs testes, de le faire; que mesmes, pour avoir la flotte de leurs vins esté ceste foys bien trettée à Bourdeaulx, dont elle vous en remercyoit grandement, elle avoit obtenu de ses merchantz qu'ilz continueroient dorsenavant leurs trafficz au dict Bourdeaulx, ainsy qu'il vous playsoit le leur offrir, et ne retourneroient plus à la Rochelle; et qu'elle estimeroit les choses succitées en son pays du North estre advenues par juste punition de Dieu, si elle n'avoit ainsy droictement procédé envers vous, comme elle avoit [fait]. Une chose me vouloit tout librement dire, qu'elle n'avoit reffuzé d'entendre fort volontiers à ce qui luy avoit esté proposé pour résister aulx conseilz et entreprinses de ceulx qui aspiroient à la généralle ruyne de ceulx de sa religion, et que, quant il luy a apareu ou aparoistroit rien de cella, qu'on la tînt hardyment pour toute déclairée et pour estre d'une partie si bien faicte et si forte, qu'elle estimoit n'avoir à se doubter de rien, et n'estoit marrye, sinon qu'il sembloit qu'on eust descouvert, par aulcunes démonstrations de Voz Majestez, que vous y dressiez voz entreprinses; de quoy ayantz beaulcoup souffert pour cella, vous fussiez pour en souffrir encores davantaige.

Sur quoy j'ay à vous dire, Sire, qu'on m'a asseuré estre naguières venu ung adviz à la dicte Dame, comme, despuys le retour du prince d'Orange en Allemaigne, luy et sa femme ont tant sollicité les princes protestans qu'ilz les ont faictz résouldre de se mouvoir toutz conjoinctement pour ceste cause, et qu'ilz n'attendent plus que la responce de la dicte Dame, dont je crains assés que le dict frère du comte de Mensfelt et icelluy de Lombres, avec Quillegrey, ne soyent bien tost dépeschez pour l'aller apporter; mais, affin d'empescher ou retarder la matière, j'ay dict à la dicte Dame que Voz Majestez avoient prins de fort bonne part ce qu'elle m'avoit prié vous escripre du bon desir qu'elle avoit à la pacification des troubles de vostre royaulme, et de se vouloir employer à mettre en avant quelque bon expédiant pour cella, qui vous fût aultant agréable comme elle le vous desiroit advantaigeux, et qu'avec le mercyement que vous luy faisiez de sa bonne volonté, vous me commandiez luy dire que, quoy que voz subjectz vous eussent extrêmement offancé, vous n'aviez jamais reffuzé et ne reffuseriez encores de les recepvoir en vostre bonne grâce, quant ilz s'y vouldroient retirer et se remettre en vostre obéyssance; et ay adjouxté que, quant par l'exortation de la dicte Dame, ou meuz de leur propre repentance, ce qui seroit encores mieulx, ilz vouldroient retourner à ce debvoir, Voz Majestez Très Chrestiennes promettoient de les y recepvoir avec toute l'humanité qui se pourroit espérer de princes très clémentz et benings; au reste, que vous n'aviez rien entendu des choses sucitées au North, quant mes gens ont esté dépeschez, dont ne m'en aviez encores rien escript; mais je m'asseurois que la preuve de vostre propre mal, et la désolation que vous voyez devant voz yeulx de vostre propre royaulme par l'opiniastreté d'aulcuns de voz subjectz, vous feroient estre marrys que les sciens eussent suyvy leur exemple; dont, attendant que m'eussiez commandé de faire là dessus de vostre part quelque bon office envers elle, je ne voulois faillyr de luy offrir tout ce qu'en vostre nom je pourroys servyr à la paix de son royaulme et à la conservation de son authorité. Bien la suplioys ne prendre en mauvaise part ce que j'entreprenoys de luy dire là dessus, que pour le peu de compte qu'elle et les autres princes protestans avoient tenu d'entendre à l'accord de la religion et à la réunyon de l'esglize de Dieu, lorsque Voz Majestez Très Chrestiennes avoient procuré, au commancement des troubles de vostre royaulme, qu'elle se fît par le Concille de Trante, auquel elle et eulx avoient esté semons, qu'ilz estoient cause que la division avoit despuys grandement travaillé la France, et commançoyt de travailler meintennant l'Angleterre, et seroit pour getter eulx mesmes de leurs estatz, s'ilz ne prènent expédiant de retourner à l'unyon de l'esglize catholique, laquelle les y recepvroit toutjours.

A quoy la dicte Dame avec grand affection m'a respondu qu'elle estoit très ayse d'entendre une si bonne intention de Voz Majestez sur le faict de voz subjectz, et que, si je luy pouvois donner quelque notice de vostre desir en cella, qu'elle mettroit bonne peyne de les y faire condescendre; que quant à l'entreprinse des siens ce n'estoit que témérité, et qu'elle avoit layssé tout exprès déborder ces deux comtes, sans s'oposer beaulcoup à eulx du commancement, pour l'espérance de ce qui est despuys advenu, que eulx et toutz ceulx qui les favorisent sont desjà bien fort laz de leurs follyes, et s'en vont rompuz d'eulx mesmes; et si n'estoit pour son honneur qu'elle n'y envoyeroit ung seul homme de guerre pour les deffaire, bien que, à toutes advantures, elle y avoit desjà dépesché de si bonnes forces que, dans quatre jours, elle espéroit en avoir sa rayson; et, quant à cercher l'unyon de l'esglize, Dieu sçavoit qu'elle avoit souvent envoyé devers l'Empereur pour l'en solliciter, et qu'elle ne s'y randroit jamais opiniastre, mesmes avoit dict à monsieur le cardinal de Chatillon que, quoyqu'on tînt en leur religion pour une grande abomination d'aller à la messe, qu'elle aymeroit mieulx en avoir ouy mille, que d'avoir esté cause de là moindre meschancetté d'ung million qui s'estoient commises par ces troubles.

Au surplus, Sire, sur aulcunes grandes contrariétez, que nous avons heues pour les affaires de la Royne d'Escoce, elle m'a promiz qu'elle la feroit bien tretter, et luy feroit avoir toute honneste liberté; et qu'aussi tost que ces troubles seroient ung peu passez, lesquelz sembloient en partie estre suscitez pour l'amour d'elle, qu'elle prendroit ung si bon et honneste expédiant en ses affaires que Voz Majestez Très Chrestiennes en demeureriez raysonnablement satisfaictes, et qu'elle n'estoit en termes de la dellivrer en aulcune mauvaise sorte au comte de Mora, ny en lieu où ne fut bien asseurée de son bon trettement, et de la seurté et liberté de la dicte Dame.

Quant aulx différandz des Pays Bas, la responce du duc d'Alve est arrivée, et l'ambassadeur d'Espaigne est allé trouver le marquis de Chetona pour adviser ensemble comme ilz pourront remettre en quelques bons termes les choses de l'accord, mais n'ont grand espérance qu'ilz le puyssent faire; et j'ay opinion que ceste Royne se résouldra d'envoyer ung des siens en Espaigne, pour ne vouloir en façon du monde entrer en aulcun tretté avec le duc d'Alve ny avec pas ung envoyé de sa part.

Les nouvelles de ceulx du North seront en la lettre de la Royne, parce que ceste cy est desjà trop longue, et je prieray Dieu, après avoir très humblement baysé les mains de Vostre Majesté, qu'il vous doinct, etc.

De Londres ce xvıȷe de décembre 1569.

A la Royne.

Madame, j'ay miz en la lettre du Roy le propos que m'a tenu la Royne d'Angleterre, ceste dernière foys que je l'ay veue, affin que de ses parolles présentes Vostre Majesté puisse faire quelque jugement de ce qu'elle prétend ou desire à l'advenir; et, encor qu'elle monstre ne s'estonner guières des mouvementz du North, et que bientost elle espère les avoir remédiez, si est ce que, pour nulle aultre guerre, qui ayt esté entreprinse en ce royaulme despuys cent ans en çà, l'on n'a veu faire de si grandz aprestz, comme elle les ordonne pour ceste cy, soit d'hommes, d'armes, d'argent, de vaysseaulx et de toutes aultres monitions de guerre; et se manifeste assés qu'elle souspeçonne bien fort le duc d'Alve estre de ceste intelligence; néantmoins ne se plye pour cella davantaige à l'accord des différans des Pays Bas, ains monstre ne vouloir en façon du monde estre menée par contraincte ou rigueur; et mesmes, pour le regard de Voz Majestez Très Chrestiennes ez choses que je luy ay proposées de la Rochelle et de la Royne d'Escoce, elle a plus monstré de vous vouloir complaire pour la recognoissance du bon trettement qu'avez faict donner à ses subjectz à Bourdeaulx, que pour craincte qu'elle ayt qu'il luy puisse venir aulcun mal si elle ne le faisoit, bien que je ne veulx rien inférer pour cella, parce que le temps et l'occasion font souvent changer les volontez.

Ceulx du North, à ce que j'entendz, ne sont plus que envyron six mil hommes de pied et quinze centz chevaulx ensemble, mais on dict que ceulx qui se sont retirez se sont allez rafreschir en leurs maysons par ordonnances des comtes, pendant qu'avec le reste ilz poursuyvent le siège de Castelbarne contre le sir Henry Boy, qui le soubstient bravement; et cependant se sont saysys de Hartepoul, qui est une assés bonne ville, où y a ung chasteau, qu'ilz ont aussi prins, et ung port assez capable pour se pouvoir prévaloir de la mer.

Milor Herys ayant trouvé moyen de sortir soubz certaine capitulation du chasteau de l'Islebourg, où il estoit prisonnier, a assemblé envyron quinze centz chevaulx escouçoys sur la frontière pour se joindre aus dicts deux comtes, mais dict [on] qu'ilz l'ont prié de ne venir encores; et semble que les comtes d'Arguil, d'Honteley et d'Hatil assemblent aussi gens contre le comte de Mora.

L'on dict que ceste Royne a faict expédier ung général pardon pour toutz ceulx de ceste eslévation, qui se vouldront retirer, excepté les comtes et dix aultres des chefz d'icelle; et que mesmes à iceulx elle l'a faict offrir soubz main, lesquelz toutesfoys, tant chefz que adhérans, ne l'ont en façon du monde vollu accepter; ains de nouveau ont juré la poursuyte de leur entreprinse jusques à la mort. Dont pour les aller rompre, la dicte Dame a faict marcher le comte de Vuarvich avec quatre mil hommes, l'admyral Clinton avec aultres quatre mil, et mandé au comte de Sussex se joindre à eulx avec trois mille, faisantz en tout neuf mille hommes de pied et deux mille chevaulx, avec bon nombre d'artillerye, et tient on en ceste court que la bataille se donra dans quatre jours; mais aultres estiment que les dicts comtes ne l'accepteront, ains, que pour estre leur armée moins empeschée d'artillerye et de bagaiges que l'aultre, qu'ilz entreprendront de courre le pays, et m'a l'on dict que le comte de Sussex a envoyé suplier ceste Royne d'avoir agréable qu'il ayt la charge de ceste entreprinse puysqu'elle se faict en son gouvernement, ne voulant que le dict comte de Vuarvich, bien qu'il ayt titre de général, luy soit préféré. Et par ce qu'on a raporté que le duc d'Alve avoit quatre ou cinq mil hommes de pied ou de cheval en Zélande, desjà toutz prestz à s'embarquer, avec artillerye, rouages, monitions et tout aultre équipage de guerre, la dicte Dame a ordonné mettre encores promptement quatre de ses grandz navyres en mer, avec les trois qui y sont, pour tenir le Pas de Callais, et en faict tenir aultres deux sur le port de Arthepoul, affin que les comtes ne puissent envoyer ni recepvoir aulcun messaige par la dicte mer.

La dicte Dame m'a faict veoir une plaincte d'aulcuns de ses subjectz, lesquelz retournans de Bourdeaulx avec quatre navyres chargés de vins, ont esté prins et arrestez à Blevet en Bretaigne, de quoy elle et ceulx de son conseil m'ont fort prié de vouloir très instantment requérir Vostre Majesté de les faire délivrer, et d'enjoindre bien expressément à ceulx de Roan de faire la mainlevée des biens des Anglois, comme elle a esté promise; dont, de ma part, j'en suplie très humblement Vostre Majesté, à laquelle, baysant en cest endroict très humblement les mains, je prieray dévottement le Créateur qu'il vous doinct, etc.

De Londres ce xvıȷe de décembre 1569.


LXXIXe DÉPESCHE

—du XXI de décembre 1569.—

(Envoyée par homme exprès, en la compagnie du marquis de Chetona, jusques à Calais.)

Demandes de secours en argent, vivres et munitions faites par les députés de la reine de Navarre.—Efforts de l'ambassadeur pour faire échouer leur négociation.—Nouvelle protestation d'Élisabeth, qu'elle ne fournira aucun secours, et qu'elle ne permettra qu'il en soit donné aucun d'Angleterre.—Mission du jeune comte de Mansfeld.—Ses conférences avec Élisabeth et sir William Cecil.—Voyage qu'il a fait en Allemagne pour hâter le départ du duc Casimir.—Confiance de la reine dans la prompte répression de la révolte du Nord.—Elle se montre entièrement rassurée au sujet des armements ordonnés par le duc d'Albe.—Efforts du Sr. Ciapino Vitelli pour renouer les négociations, malgré les insultes de tout genre qui lui sont faites.—Interpellation adressée au duc de Norfolk sur ses relations avec les seigneurs du Nord.—Protestation faite par le duc, qu'il n'a jamais eu aucune intelligence avec les révoltés; qu'il n'a jamais songé à son mariage avec Marie Stuart que sous le bon plaisir de la reine, mais qu'il ne prendra aucun engagement pour une nouvelle union avant d'avoir recouvré sa liberté.—Refus est fait de lui accorder son hôtel pour prison.—On montre plus de bienveillance envers lui ainsi qu'envers la reine d'Écosse.—Crainte de l'ambassadeur qu'il n'ait été délivré de l'argent au jeune comte de Mansfeld.—Son opinion, que la révolte du Nord est loin d'être apaisée;—que l'on doit conserver l'espoir du rétablissement de Marie Stuart en Écosse;—et que le duc de Norfolk serait rendu à la liberté s'il voulait renoncer à son mariage avec cette reine.—Nouvelle que les révoltés du Nord se sont emparés de Castelbar.—Résolution prise subitement par le Sr. Ciapino Vitelli, de quitter l'Angleterre.

Au Roy.

Sire, je n'ay plustost entendu que quelques ungs estoient venuz de la Rochelle, que je n'aye incontinent préveu qu'ilz estoient envoyez pour recouvrer de l'argent, et des blez, et des pouldres de ce royaulme, ainsy que j'entendz qu'ilz font à présent bien fort grande instance d'en avoir; mais j'ay mis peyne de préoccuper la Royne d'Angleterre, premier qu'ilz ayent parlé à elle, de me promettre qu'elle ne leur baillera, ny souffrira que ses subjectz leur baillent, aulcunes provisions ny secours, luy ayant protesté de l'infraction d'amytié, si elle le faisoit ou le permettoit; de quoy elle m'a donné la parolle que je vous ay desjà escripte le xvıe de ce moys, et croy qu'à grand difficulté tireront ilz d'elle, ny encores ouvertement de ses subjectz, rien de cella. Bien pourra estre que par l'employte d'aulcuns merchantz, soubz colleur d'aultres trettes qui sont desjà expédiées pour porter des bledz en Portugal, ou bien par quelques ungs désadvouhez, ilz en pourront estre accommodez de quelque partie, mais plus habondamment, à mon adviz, les en forniront de Hendem le Sr. Dolovyn et le bastard de Briderode, devers lesquelz le Sr. de Lombres, et ung nommé Tafin, toutz deux Flamans, qui demeurent icy pour ceste négociation, ont à cest effect desjà envoyé home exprès.

Et le frère du comte de Mensfelt, qui estoit arrivé avecques eulx, après qu'à diverses foys il a heu tretté bien longuement, et fort secrectement avec ceste Royne et avec le secrétaire Cecille, il a esté expédié pour passer en Allemaigne; et, par des propos qu'il a tenuz à Vuyndesor et en ceste ville, semble qu'il ayt opinion de trouver le duc de Cazimir assez prest de marcher avec cinq mil reytres et huict mil lansquenetz, et que sa commission soit avec le prince d'Orange de haster le dict duc de Cazimir et de solliciter à ceste entreprinse de France les aultres princes protestans.

Quillegrey ne part en sa compaignye, et croy qu'on le réserve pour l'envoyer après, sellon qu'on verra que les affaires du North se porteront; desquelz semble qu'on faict desjà prendre une bien fort bonne espérance à ceste princesse, luy donnant entendre que les deux comtes, ne s'asseurans plus de leur trouppe, proposent desjà de gaigner la mer pour se retirer en France ou en Flandres, et que ceulx qui les ont suyviz monstrent de vouloir accepter le pardon de la dicte Dame. Et tant pour cella, que pour se trouver la dicte Dame aulcunement délivrée du doubte, qu'elle avoit du duc d'Alve, elle a contremandé de ne mettre en mer les sept grandz navyres, qu'elle avoit ordonnez sortir du premier jour; car a entendu que l'armement, que le dict duc prépare en Zélande, ne peult estre prest de quatre moys, pendant lesquelz elle espargnera la despence des dictz navyres, et aussi, qu'estant la responce, qu'on attandoit du dict duc d'Alve touchant les différantz des Pays Bas, arrivée, le marquis de Chetona, à qui l'on avoit desjà assés indignement donné congé, en faisant semblant, à ceste heure, de le demander à la dicte Dame pour s'en retourner, il luy a faict tant d'honnestes et gracieuses offres qu'il a monstré ne vouloir rien moins que le prendre ny que interrompre la conférance de l'accord; et elle, qui n'a peu user là dessus que de bonnes parolles, luy en a donné des meilleures qu'elle a peu touchant le desir qu'elle dict avoir de contanter le Roy d'Espaigne, de sorte que le dict marquis est encores demeuré pour essayer de remettre en termes la dicte conférance.

Je ne sçay que juger là dessus, pour la grande incertitude et variété qui se veoyt ordinairement au conseil de ceste princesse, si n'est qu'il ne sera mal aysé de trouver ung expédiant de paix entre deux, qui ne veulent rien tant évitter que la guerre.

J'entendz que, despuys deux jours, l'on a faict interroger le duc de Norfolc sur l'entreprinse de ceulx du North, et sur le mariage de la Royne d'Escoce, et sur le propos d'ung aultre mariage pour le faire despartir d'estuy là; et qu'il a respondu n'avoir jamais heu aulcune communication avec ceulx du North, ny prétandu à la Royne d'Escoce que pour le bien de la Royne, sa Mestresse, et de son royaulme, et qu'il n'est dellibéré d'entendre à nul aultre nouveau propos de mariage, qu'il ne soit en liberté; dont, se sentant fort ignocent de tout cella, a envoyé suplier la dicte Dame de le vouloir faire eslargir, ou aulmoins luy ordonner sa mayson, qu'il a en ceste ville, pour prison, ce qu'elle ne luy a encores accordé, mais bien luy faict faire plus gracieulx trettement dans la Tour; et à la Royne d'Escoce, encore que son courroux ne soit, du tout, bien passé contre elle, ne luy faict toutesfoys user d'aultre rigueur meintennant, que de la faire observer de prez par les comtes de Cherosbery et Huntington qu'elle n'ayt aulcune communication avec ceulx du North, et qu'elle [ne] puysse escripre ou recepvoir aulcunes lettres du dict duc de Norfolc. Je bayse très humblement les mains de Vostre Majesté, et prie Dieu qu'il vous doinct, etc.

De Londres ce xxȷe de décembre 1569.

A la Royne.

Madame, sur ce que j'escriptz en la lettre du Roy de l'instance que font ceulx de la Rochelle pour tirer des rafreschissemens de ce royaulme, je m'opposeray aultant qu'il me sera possible qu'ilz n'en ayent, et croy que je leur y feray trouver assés de difficultez; mais, quant à ce qui peult succéder du passaige du jeune comte de Mensfelt en Allemaigne, Vostre Majesté y fera, s'il luy playt, prendre garde de dellà, car je n'y puys rien plus veoir d'icy, sinon qu'il s'y feyt quelque advance d'une partie de ces deniers, qu'on continue toutz les jours mettre ez mains de Me. Grassan, qui montent desjà plus de quatre centz mil escuz, de quoy j'ay bien grand souspeçon, parce que l'argent, qu'on a à distribuer dans ce royaulme, se mect ordinairement ez mains des trésoriers et recepveurs, et non ez mains des facteurs ou merchantz. Toutesfoys je n'ay entendu qu'il y ayt mandement d'aulcune nouvelle somme encores expédiée pour Allemaigne.

Des différantz des Pays Bas, il semble qu'on y procède, des deux costez, avec très grande deffiance; sçavoir, les ungs, de n'espérer tirer une digne satisfaction ny des biens déprédez, ny de l'offance receue; et les aultres, de ne se pouvoir, après qu'ilz l'auroient faicte, aulcunement asseurer de la paix. Je ne sçay si, après une si manifeste ropture qu'il y a heu en la conférance, les choses se remettront à ceste heure en meilleurs termes par la reprise que le marquis de Chetona en a faicte, ce qui se verra en peu de jours.

Touchant les affaires du North, j'ay opinion qu'on les faict plus petitz et moins dangereux à la Royne d'Angleterre qu'ilz ne sont, car j'entendz que les eslevez ne monstrent aulcun signe de repentance ny de craincte, et qu'ilz procèdent avec grand asseurance, et par bon ordre, et en grand confiance d'ung bon succez de leur entreprinse.

Les choses de la Royne d'Escoce demeurent en suspens, et bien qu'on luy attribue la principalle occasion de ces troubles, l'on n'estime toutesfoys que ce soit proprement elle qui les ayt succitez, mais que ce sont ceulx, qui ont cogneu les tortz qu'on luy faisoit, qui se sont ainsy meuz d'eulx mesmes pour les remédier. Et de tant que la Royne d'Angleterre, en son cueur, ne luy veult ny luy peult vouloir mal, et que l'auctorité de ses ennemys (si n'estoit ce, qu'ilz proposent quelque aparance de bien et de repoz pour ce royaulme par la détention de la dicte Dame), n'aproche de celle de ses amys et serviteurs, je ne puys encores désespérer de l'yssue de ses affaires, et croy que, pour l'honneur et respect de Voz Majestez, l'on n'usera au moins dorsenavant que dignement en l'endroict de sa personne.

Et quant à la prison du duc de Norfolc, elle luy sera, à mon adviz, plus longue pour ne se vouloir librement despartyr du mariage de la dicte Royne d'Escoce, bien que, ez aultres choses, ceste grande obéyssance d'estre venu au mandement de la Royne, sa Mestresse, et d'avoir quasi voluntairement accepté la prison pour la contanter, luy sert d'une grande justiffication envers elle, et la rend elle moins offancée envers luy. Tant y a qu'il se cognoist que des choses du North ont à sortir les principalles déterminations de toutz ses affaires, et de la plus part des aultres qui sont à présent en ce royaulme. Je bayse très humblement les mains de Vostre Majesté et prie Dieu qu'il vous doinct, Madame, en parfaite santé, très longue vie et toute la prospérité que vous desire.

De Londres ce xxȷe de décembre 1569.

Par postille à la lettre précédente.

Despuys la présente escripte, est venu nouvelles que ceulx du North ont prins Castelbarne, lequel ilz tenoient assiégé, et je viens d'entendre que, pour aulcunes occasions survenues despuys hyer, le marquis de Chetona a prins résoluement son congé.


LXXXe DÉPESCHE

—du XXVIIe jour de décembre 1569.—

(Envoyée exprès jusques à la Court par le Sr. de Vassal.)

Nouvelles importantes du Nord.—Force des révoltés et situation de leurs affaires après la prise de Castelbar.—Le comte de Warwick attend, pour les attaquer, les renforts qui lui sont promis.—Tout se prépare pour une bataille décisive.—Rappel à la cour du comte de Pembroke, à qui toute faveur et autorité sont rendues.—Espoir qu'il fera mettre le duc de Norfolk en liberté.—Audience de congé a été accordée au Sr. Ciapino Vitelli, avant son départ.—Mission donnée en Allemagne par Élisabeth au jeune comte de Mansfeld.—Soupçon qu'il a été chargé de traiter de la levée de deux mille reitres.—Réclamations de l'ambassadeur à raison de diverses sommes qui lui sont dues.—Plaintes qu'il adresse à la reine-mère au sujet des promesses qui lui avaient été faites et qui sont restées oubliées.—Lettre secrète pour la reine-mère.—Vive recommandation de l'ambassadeur pour que le plus profond secret soit gardé sur les communications confidentielles contenues dans le second mémoire joint à la dépêche.—Premier mémoire.—Détails sur les affaires du Nord depuis la prise d'armes.—Motifs qui ont empêché les comtes de Northumberland et de Westmoreland de mettre à exécution leur entreprise aussi complètement qu'ils le désiraient.—Nécessité où ils se sont trouvés de devancer l'époque fixée pour la prise d'armes.—Succès qu'ils ont obtenus.—Appui qu'ils doivent espérer dans toutes les provinces du royaume.—Craintes d'Élisabeth, que plusieurs des seigneurs les plus influents de la cour, qui sont auprès d'elle, ne soient d'intelligence avec les révoltés.—Instances faites auprès du duc de Norfolk pour qu'il renonce à épouser la reine d'Écosse.—Mémoire confidentiel.—Sollicitations faites auprès de l'ambassadeur par les comtes de Northumberland et de Westmoreland, pour que le roi leur donne un secours d'argent, qui doit être remis à Calais ou à Boulogne.—Confiance qu'ils ont eue, en prenant les armes, dans l'appui de la France et de l'Espagne.—Grandes promesses qui leur ont été faites par l'Espagne avant la prise d'armes.—Refus de les accomplir, depuis qu'ils sont entrés en campagne.—Conditions que veulent imposer les Espagnols.—Ils exigent que la reine d'Écosse épouse don Juan, et lui fasse la cession du droit qu'elle prétend à la couronne d'Angleterre.—Avis qui a été donné secrètement de Londres par le Sr. Ciapino Vitelli, au duc d'Albe, d'agir sur-le-champ comme si la guerre était déclarée.—Démarches faites auprès du duc d'Albe par les comtes de Northumberland et de Westmoreland.—Déclaration de ceux du Nord qu'ils prennent les armes pour la religion;—pour assurer la succession au trône d'Angleterre après la reine;—et pour chasser les nouveaux parvenus qui se sont emparés du pouvoir.—Seconde lettre au roi.—Félicitations de l'ambassadeur pour la prise de Saint-Jean-d'Angely, et les offres de soumission faites par le prince de Navarre, le prince de Condé et l'amiral de Coligni.—Nouvelles qui viennent de lui être transmises par la reine d'Angleterre sur les affaires du Nord.—Division qui aurait éclaté entre les comtes de Northumberland et de Westmoreland.—Ils se seraient séparés, abandonnant leur infanterie et leur artillerie.—Les troupes de la reine se sont mises à leur poursuite.—Secours offerts à Élisabeth par le comte de Murray.—Incertitude de ces nouvelles.

Au Roy.

Sire, après que ceulx du North ont heu prins Castelbarne, ville et chasteau, qui n'ont tenu que huict jours par faulte de vivres, le comte de Vuesmerland a miz dedans une bonne garnyson et force vivres, avec dellibération de tenir la place, et le comte de Northomberland s'en est retourné à Arthelpoul pour y continuer, avec grand dilligence, la fortiffication qu'il y faict faire. Me. Northon est pour eulx en la ville de Durem, et d'aultres de leurs principaulx adhérans sont en d'aultres villes et chasteaulx ez envyrons. Ilz ont logé le principal de leur armée entre le dict Castelbarne et Arthelpoul, et ez villaiges qui sont le long d'une rivière tirant vers Yorc, de laquelle ilz ont faict rompre les pontz et les passaiges, et se résolvent, à ce qu'on dict, de donner la bataille, si l'armée de la Royne d'Angleterre entreprend de la passer. J'entendz que le comte de Vuarvich a escript qu'ilz sont quinze mille hommes de pied, non toutz bien armez, et deux mil chevaulx en fort bon équipage, et qu'il ne s'estime encores assez fort pour les combattre; néantmoins prie la Royne et ceulx du conseil de luy mander résoluement si, avec les huict ou neuf mil hommes et dix huict centz à deux mil chevaulx qu'il peult desjà avoir avecques luy, il entreprendra de passer la susdicte rivière sur eulx. A quoy semble qu'on luy ayt respondu que, du premier jour, l'on luy envoyera de renfort les gens du Queint, que milor Coban a levez, et ceulx de Sommercet, qui sont de la charge du comte de Pembrot, et qu'aussitost qu'il les aura receuz, qu'il ne temporise plus d'aller rencontrer les dictz ennemys. Par ainsy semble qu'on se prépare, d'ung costé et d'aultre, à la bataille.

Le comte de Pembrot a esté mandé pour retourner, avec toute faveur et auctorité, à la court; et par luy s'espère que la réconcilliation du duc de Norfolc se fera, et qu'il pourra estre miz en liberté.

Ces jours passez, ung consul, de la nation espaignolle, de Bruges, soubz tiltre de courrier, est passé de deçà avec pacquetz et lettres pour le marquis de Chetona, lequel ayant esté recogneu a esté arresté et miz ez mains de Me. Marso, gouverneur des merchantz, mais les lettres principalles ont esté randues au dict marquis; lequel, pour son regard, et la Royne d'Angleterre, pour le sien, n'ont estimé que sa plus longue demeure par deçà peult estre de quelque utillité, dont est allé prendre publicquement congé de la dicte Dame, sans s'arrester à certaine aultre façon de congé moins digne, qu'on luy avoit donné auparavant; et luy a le comte de Lestre faict ung présent de deux beaulx guilledins. Je ne sçay encores si sur l'embarquement il luy sera faict aultre présent de la part de la Royne, mais l'on a estimé qu'il le reffuzera.

J'entendz que la dicte Dame a fort gracieusement expédié le jeune comte de Mensfelt, et qu'elle luy a faict donner mil escuz, desquelz semble qu'il eust bien fort grand besoing, et a escript par luy amplement aulx princes d'Allemaigne; mesmes quelcun m'a dict qu'il emportoit une lettre de crédict pour faire fornyr quelque somme par dellà, mais ne sçay encores à quelles fins, bien m'a l'on donné entendre que c'est pour lever deux mil reytres pour la dicte Dame, mais n'ay encores certitude de cella.

La Royne d'Escoce vous escript, et vous envoye ung sien gentilhomme exprès pour vous compter ses nouvelles. J'ay si amplement instruict de toutes aultres choses de deçà le Sr. de Vassal, présent pourteur, que vous supliant très humblement, Sire, de le croyre, je n'adjouxteray rien plus icy qu'une bien dévotte prière à Dieu, après avoir très humblement baysé les mains de Vostre Majesté, qu'il vous doinct, en parfaite santé, très longue vie et toute la prospérité que vous desire.

De Londres ce xxvıȷe de décembre 1569.

A la Royne.

Madame, vous ayant par le Sr. de Sabran, le xxve du passé, et despuys, par cinq dépesches du dernier d'icelluy et du cinquiesme, dixiesme, séziesme et vingt uniesme du présent, faict toutjour entendre les adviz que j'ay heu de l'eslévation du North; de la praticque que ceulx de la Rochelle ont envoyé faire icy par le jeune comte de Mensfelt et le Sr. de Lombres; de la négociation du marquis de Chetona sur les différandz des Pays Bas; de la ferme opposition de la Royne d'Angleterre au mariage de la Royne d'Escoce, pour l'occasion duquel et du souspeçon qu'on a heu d'elle sur les choses du North, l'on l'a transportée et resserrée davantaige; pareillement de la prison du duc de Norfolc, et des aultres mouvementz, préparatifz et apareilz de ce Royaulme; Vostre Majesté verra meintennant par la lettre du Roy, et entendra par le Sr. de Vassal, présent pourteur, et par les mémoires et instructions que je luy ay donnez, tout ce qui a succédé despuys, et en quoy en sont à présent les choses, ez quelles j'ay miz peyne, Madame, de suyvre, du plus prez que j'ay peu, ce que j'ay estimé estre de vostre intention; et loue Dieu que, à quoy qu'elles soyent meintennant devenues, la Royne d'Angleterre ne demeure que bien disposée envers Voz Très Chrestiennes Majestez, et monstre vous vouloir grandement complaire, sinon en ce que je la presse de la Royne d'Escosse, sur les affaires[22] [de la quelle] elle m'a dict qu'elle vous avoit fait entendre ses ra[isons] par son ambassadeur et qu'elle estoit toute esbahye [de n'en] avoir encores responce; mesmes, l'on m'a asseuré qu'en plusieurs choses elle deffend fermement contre aulcuns mal intentionnez de son conseil le salut et la vie de la dicte Dame, et nous faict l'on acroyre qu'avec le temps elle nous donra de meilleures et plus certaines responces pour elle que [nous n'en] avons heu jusques icy.

La dicte Royne d'Escoce vous escript, et vous envoye exprès le Sr. de Gardelle pour vous compter de ses affaires, et vous requérir quelque bonne pourvoyance sur iceulx; et m'ayant prié de les vous recorder, j'ay baillé au dict de Vassal sa mesmes lettre[23] affin qu'il vous playse prendre la peyne de la veoyr.

Et me remettant à luy de toutes aultres particullaritez de deçà, sur lesquelles je vous suplie, Madame, le vouloir ouyr et luy donner foy, le surplus de la présente sera pour très humblement me ramentevoir à Vostre Majesté pour le payement de mes gaiges de la chambre et de la pencion de xıȷc {lt}, qu'il vous a pleu m'ordonner, à ce qu'il vous playse commander, Madame, que la moictié de la pencion qui me reste de ceste année, jà escheue (1569), et les gaiges de la dicte mesmes année, et la moictié de ceulx de la précédante, despuys que suys en ceste charge, me soyent payez, qui est en tout quinze centz livres, tant de la pencion que de la chambre, et ordonner que, pour les aultres suyvantes, je soys miz au rolle des assignez et payé, affin de n'en importuner plus Vostre Majesté. Ce que j'espère, Madame, que ne me vouldrez reffuzer, veu que je n'ay ny n'ay heu jamais aultre estat ny bienfaict de Voz Majestez, et qu'il vous peult souvenir qu'il a tantost dix ans qu'avez heu desir et intention de me faire du bien, pour m'avoir veu auparavant longuement servyr, et néantmoins j'ay toutjour despuys continué le service, et vostre bienfaict n'est encores venu; mais j'espère en la grande bonté et vertu de Vostre Majesté que là, où à tant d'aultres vous avez faict recepvoir honneurs, récompences et advancement de leurs services, vous ne me ferez demeurer seul confuz d'honte et de paouvretté, pour ceulx que, avec toute dilligence et affection, vous sçavez, Madame, que j'ay très fidellement faictz à Voz Majestez; et, je prieray Dieu, après avoir très humblement baysé les mains de Vostre Majesté, qu'il vous doinct, etc.

De Londres ce xxvıȷe de décembre 1569.

AULTRE LETTRE A PART A LA ROYNE.

Chiffre.—[Madame, affin que le Roy et Vous et Monseigneur soyez advertys d'aulcunes choses, qui sont d'assés de moment pour celles de vostre service, et regardent beaulcoup le présent estat, et celluy d'advenir, de vostre grandeur, et peuvent encores vous servyr pour demeurer auculnement advisez en vous mesmes sur ce que, à mon adviz, l'on vous requerra, je vous suplie très humblement, Madame, ouyr à part et donner foy à ce mien gentilhomme, le Sr. de Vassal, et me commander par luy comme, sellon vostre intention, j'aurai à me conduyre en ce qui pourra eschoir à ma présente charge; et [que vous ne] preignez, Madame, à desplaysir si très humblement, et [au nom] de Dieu, je vous suplie que le propos n'aille plus avant que à Voz Majestez et à Mon dict Seigneur vostre filz, sellon que j'ay obligé ma foy et ma conscience de ne le reveller qu'à vous trois dellà la mer; et je suplieray le Créateur, après avoir très humblement baysé les mains à Vostre Majesté, qu'il vous doinct, etc.

De Londres ce xxvıe de décembre 1569.

Avec le propos principal, je luy en ay commis d'aultres, pour dire aussi à part à Vostre Majesté.

MÉMOIRE.

Il a semblé que l'entreprinse des comtes de Northomberland et Vuesmerland leur deubt torner à malle fin par ce qu'ayant, du commancement, proposé de marcher jusques à Londres, et de mettre la Royne d'Escoce en liberté, et de se saysir des villes de Yorc et de Neufcastel, avec grand espérance que, aussitost qu'ilz se seroient monstrez en campaigne, ung milion de catholiques se lèveroient, et les grandz qui sont de leur intelligence s'yroient joindre à eulx, ou au moins leur envoyeroient de leurs forces, ou argent, ou quelque [autre secours], rien de tout cella ne leur a réuscy.

Ains, ayantz assés soubdainement marché trente mil oultre la ville d'Yorc, la Royne d'Escoce a esté incontinent transportée, et, encor que le peuple les ayt suyviz, nul des seigneurs n'a [pareu], ny bougé, ny envoyé devers eulx; dont, ne se sentans avoir assés d'argent pour conduyre leur troupe jusques à Londres [parce que ilz] ne vouloient vivre sur le peuple, ny de pou[voir occuper] ceste ville incontinent qu'ilz y seroient arrivez [parce que elle est] puyssante et bien fornye d'armes, et où ilz [n'espéroient] qu'il se fît aulcun mouvement pour eulx, ilz s'en [allèrent] vers Yorc, où ilz aproffitèrent encores moins parce que [estant] la ville, par la dilligence du comte de Sussex, bien pourveue de gens de guerre; ilz furent contrainctz de rapasser vers le quartier d'où ilz estoient venuz.

Et parce que une partie de leur troupe se retira [lors] et que les comtes, avec le reste, s'acheminèrent vers le pays de Blacmur, qui est marescageux et sur la mer, l'on eust opinion qu'ilz s'en alloient rompuz d'eulx mesmes, et que les principaulx se venoient saulver sur quelques navyres en France ou en Flandres, dont la Royne d'Angleterre et ceulx de son conseil diminuèrent de moictié l'ordre des apareils qu'ilz avoient faict pour les aller deffaire.

Mais semble que, despuys, l'on a bien cogneu que leur retrette n'estoit advenue que par ce seulement que les aultres seigneurs catholiques, de leur intelligence, ne leur avoient aulcunement correspondu, s'excusantz, à ce qu'on dict, [sur ce] que l'entreprinse avoit esté hors de temps et beaulcoup plustost commancée qu'il n'estoit convenu entre eulx, ce que les dictz comtes semblent advouher, mais que, voyantz l'instante sommation qu'on leur faisoit de se représenter en court, et que, à faulte de comparoir, ung simple sergent les fût allez prendre, l'ung après l'aultre, en leurs maysons, ainsy qu'ilz sçavent très bien que les commissions en estoient desjà expédiées, ils avoient esté contraintz d'ainsy soubdain recourir aulx armes et se mettre en campaigne.

Dont, ayantz, à ceste heure, donné quelque fondement à leur entreprinse, et monstrantz de vouloir attendre le temps et la commodité des aultres, il se cognoist que leurs troupes ne se sont séparées d'eulx, ny ilz n'ont prins le chemin vers la mer, pour aulcunement habandonner leur dicte entreprinse, ny pour s'enfouyr hors du pays; ains que ceulx, qui se sont retirez, sont allez, par leur congé, se retirer en leurs maysons, pour estre prestz quant ilz les manderont, et eulx, avec le reste, sont allez saysir cependant la ville, le chasteau et le port de Hartepoul, qui sont très oportuns lieux par la terre, et fort commodes pour s'ayder de la mer; et ont assiégé la ville et chasteau de Castelbarne, lesquelz, nonobstant que les comtes de Vuarvich, de Sussex et admyral Clinton ayent faict semblant de se mettre aulx champs pour les secourir, ilz n'y ont aproché, et les ont layssé prendre par composition (bagues saulves, aultant que chacun soldat sur soy, et Henry Boy, le capitaine, sur ung cheval seulement, en ont peu emporter); qui est une place assez forte, et où les dicts comtes ont trouvé de l'artillerye, des armes, des pouldres, et veult on dire aussi beaulcoup d'argent et de richesses.

L'on estime que le nombre d'hommes d'effect, de quoy iceulx comtes peuvent faire estat pour ung combat, sellon leurs rolles, est de vingt mil, comprins quinze centz Escouçois à cheval, que milord de Humes tient toutz prestz à leur dévotion sur la frontière, et qu'ilz se résolvent de donner la bataille, si l'armée [de] ceste Royne marche guières plus en avant, et s'entend que les dictz comtes ont mandé plusieurs parolles de deffy aulx chefz d'icelle, mesmement au comte de Vuarvich.

L'on commance à cognoistre qu'ilz procèdent d'une plus grande asseurance et plus grande confiance qu'on ne cuydoit, et que, demeurantz ainsy fermes ez lieux qu'ilz ont gaignez, et les fortiffians comme ilz font, qu'ilz sentent ung grand apuy dans le royaulme, et qu'ilz espèrent quelque bon secours de dehors, dont ceste Royne souspeçonne plus que jamais le duc d'Alve; et peult estre qu'à ceste occasion, elle s'estoit advisée d'arrester quelques jours encores le marquis de Chetona et sa troupe, qui est belle et grande, affin qu'ilz luy servissent comme d'ostages par deçà, mais le dict marquis s'est enfin déterminé de prendre résoluement son congé.

L'armée de la dicte Dame a desjà marché vers les ennemys, soubz le comte de Vuarvich, assisté des comtes de Sussex et admyral Clynton, toute en bonne équipage d'armes, d'artillerye et de monitions, et s'espéroit en ceste cour que la bataille se donroit jeudy dernier; mais, encores qu'on ayt assés accoustumé en ce royaulme de ne la temporiser, néantmoins aulcuns ont opinion qu'on ne l'azardera.

Et parce que les dictz comtes ont publié ung escript, lequel translaté d'anglois en françoys, contient ce qui se veoyt par icellui, la dicte Royne et ceulx de son conseil sont entrez en nouvelles [craintes] des seigneurs qui y sont dénommés, lesquelz l'on a dilligemment [recherchés] là dessus, mais pour ce que le duc de Norfolc ne s'est en [ses] responces tant exaspéré contre les dictz comtes et leurs [adhérans] comme ont faict les comtes d'Arondel et de Pembrot, l'on a extraict certains articles du [dict escript et] d'aultres du faict d'entre la Royne d'Escoce et luy, [sur lesquels] l'on l'a, de rechef, curieusement interrogé, avec pl[us grand instance] pour luy faire quicter la Royne d'Escoce, luy donnant en[tendre] qu'aussi bien a elle escript de ne le vouloir aulcunement es[pouser], et qu'il se trouvera bien ung aultre party pour luy qui sera [approuvé] de la Royne, sa Mestresse, et par le moyen duquel il recouvrera sa liberté, car aussi ne trouve l'on qu'il soit chargé d'aulcune c[hose] que du dict mariage; dont, pour l'ennuy de la pryson, il a esté en grand [danger] de se laysser aller à ceste persuasion et habandonner la Royne [d'Escoce].

Mais j'entendz que, sellon les bons admonestemens et conseilz qu'on luy a administrez, il a en fin sagement respondu, que touchant ceulx du North, il n'a jamais heu communication de leur entreprinse, et à quiconques vouldra dire aultrement il luy maintiendra qu'il a menty; et quant à ce qu'ilz ont allégué qu'il a tenu certain propos de la succession de ceste couronne, que, à la vérité, il en a parlé souvant, mais toutjours sellon les bons termes qui en furent proposez et débattuz au dernier parlement; que, du mariage de la Royne d'Escoce, il n'y a jamais prétandu sinon pour servir au bien de la Royne, sa Mestresse, et à celluy de son royaulme; et, quant elle a monstré ne le trouver bon, qu'il s'en est despourté; qu'il ne faict doubte que la Royne d'Escoce n'ayt faict le mesmes, quant la Royne d'Angleterre luy a faict cognoistre le courroux qu'elle en avoit, et qu'il sera toutjour plus ayse de se maryer au gré de la dicte Dame que contre sa volonté; mais qu'il ne dellibère en façon du monde entendre à nul party qu'il ne soit en liberté.

SEGOND MÉMOIRE.

Chiffre.—[Ayant les deux comtes du North, et ceulx qui les suyvent, prins les armes pour restablyr la relligion catholique en Angleterre, et pour mettre la Royne d'Escoce en liberté, et à icelle conserver la succession de ceste couronne, et pour s'opposer à ceulx qui, abusantz de l'auctorité qu'ilz ont prèz de la Royne d'Angleterre, l'employent à travailler les subjectz du royaulme et offancer les princes estrangiers, ilz ont espéré que, par mon moyen et de celluy de l'ambassadeur d'Espaigne, ilz seroient secouruz de nos deux Maistres, comme de deux grandz princes, intéressez en leur entreprinse.

Dont, pour icelle continuer, ilz nous ont faict remonstrer que, pour le présent, ilz se trouvent assés fortz de gens, mais qu'ilz n'ont argent pour les entretenir que jusques envyron le xe ou xve de janvier, et que celluy de Northomberland a desjà advancé sept ou huict mil escuz, qui est tout ce qu'il a peu fornyr, par ainsy requièrent d'estre promptement secouruz.

Sur quoy, pour mon regard, je leur ay faict considérer l'infiny espuysement des finances du Roy, Mon Seigneur, par la présente guerre de son royaulme, et aussi que le secours qui s'attand de luy à Dombertrand ne sera sans frais, lequel reviendra beaulcoup au proffict de leur entreprinse, dont se sont assés con[tentés] des bonnes espérances, que je leur ay données, de toute l'assistance que le Roy leur pourra faire, mesmes d'argent s'il en a, et de ge[ns.......] et de retraicte s'il est besoing en son royaulme. Néantmoins m'ont fort conjuré d'escripre à Sa Majesté qu'il luy playse leur fornyr quelque somme, sellon qu'il en pourra avoir la commodité; ce que je n'ay peu reffuzer de leur accorder. Et semble qu'avec bien peu d'argent de Sa Majesté ou de celluy du douayre de la Royne d'Escoce, porté à Callais ou à Bouloigne, ausquelz lieux ilz l'yront bien cercher, ilz se contanteront.

Quant à l'ambassadeur d'Espaigne, de tant qu'ilz avoient de grandes promesses de luy, et mesmes lettre de sa main, laquelle celluy de Northomberland porte toutjour sur soy, et qu'avant s'eslever il les sollicitoit, par offres d'ung grand et présent secours d'arquebouziers, de corseletz, de gens de cheval, et de cent mil escuz, affin qu'ilz prinsent incontinent les armes, meintennant qu'ilz les ont prinzes et qu'ilz se trouvent en nécessité d'argent, et ayant le dict ambassadeur moyen de leur faire frayer huict mil escuz par deux merchantz de ceste ville, qui, sur sa parolle, se offrent de les leur bailler, ilz sont fort esbahys que non seulement il reffuze de le faire «par ce, dict il, qu'il n'a expresse commission pour cella du duc d'Alve,» mais aussi se monstre assés froid sur tout le reste du secours promiz, et qu'il ne fault qu'ilz espèrent que le duc s'advance d'en bailler, si quelcun des plus grandz et principaulx d'entre eulx ne va devers luy pour accorder à quelles condicions il l'envoyera, et à quelles ilz le prendront.

Sur quoy, je ne fays doubte que les voyant à ceste heure entrez bien avant et avoir besoing de luy, qu'il ne les veuille attirer à ses intentions, et, entre aultres, à celle qu'il a grande du mariage de la Royne d'Escoce et de dom Joan, avec le tiltre de la succession de ce royaulme; à quoy le comte de Northomberlan s'est toutjours monstré fort enclin, et qu'il les veult aussi [engager] de ne poser les armes, ny faire aulcun accord, sans luy.

Et se voyt assés que ce réfroydissement n'est que artiffice par[ce que je] sçay que le dict duc a esté fort marry que le viscomte de Montegu [ne] soit passé devers luy, comme il l'avoit promiz, et comme l'am[bassadeur] luy avoit desjà baillé lettre pour ce faire, et a le dict duc mandé qu'il face grand instance au dict de Montegu, ou bien à quelque [aultre] seigneur de qualité de ce royaulme, de l'aller trouver.

Ce que le dict ambassadeur essaye de faire par toutes les persuasions qu'il peult; et cependant que luy et le marquis de Chetona n'ont peu obtenir passeport pour escripre en Flandres, ilz ont faict que le Sr. Barbarin, gentilhomme florentin, de la troupe du dict marquis, a feinct qu'il luy estoit nécessaire pour sa santé de retourner dellà la mer, dont, ayant pour une si raysonnable occasion obtenu son congé, sans toutesfoys pouvoir pourter aulcunes lettres, ilz luy ont secrectement baillé ces quatre motz d'escriptz «croyez entièrement le pourteur» signé des deux, en si peu de papier, qu'il l'a peu cacher en lieu secrect de sa personne; et sa créance a esté que n'y ayant espérance d'accord ez différandz des prinses, bien que le dict marquis se soit miz en debvoir de l'offrir à ceulx cy avec les plus gracieuses, voyre humbles, condicions qu'il a peu, mais se monstrans eulx opiniastres de n'y vouloir entendre, ilz prient le duc d'Alve de ne temporiser plus à leur faire le piz qu'il pourra comme à obstinez ennemis, et qu'il se haste d'entreprendre quelque chose contre eulx, pendant que ces troubles du North sont en vigueur, car ne recouvrera jamais une plus belle occasion; et que le dict marquis se trouve si offancé des indignitez qu'ilz luy ont faictes, qu'il n'a rien en plus grand desir que de s'en venger. Et, despuys le despartement du dict Barbarin, ung aultre gentilhomme anglois a esté dépesché devers le dict duc de la part du dict de Montegu, lequel, parce qu'il a heu à descendre en France, il m'a requiz ung passeport, et oultre celluy là j'entendz que ceulx du North luy ont dépesché le Sr. de Marconville, qui est le plus capable et suffizant homme qu'ilz ayent.

Certaine déclaration que ceulx du North ont faicte de l'intention de leur entreprinse.

Comme, par le très inique et sinistre raport d'aulcuns malicieux ennemys de la parolle de Dieu et du publicque estat de ce royaulme, ayt esté publié et miz en avant que l'assemblée des nobles hommes, les comtes de Northomberland et de Vuesmerland, et de plusieurs aultres principaulx personnaiges qui suyvent leur party, ayt esté et soit contre la couronne et au préjudice de cest estat, il a semblé bon aus dictz deux comtes, et à ceulx de leur conseil, de signiffier à toutz les bons subjectz de la Majesté de la Royne quelle est en cest endroict leur vraye et saincte intention, et celle de leurs amys et alliés, comme s'ensuyt:

Parce que très saigement et loyaulment a esté naguières admis par le hault et puissant prince Thomas duc de Norfolc, Henry comte d'Arondel, Guillaume comte de Pembrok, et Nous, comtes de Northomberland et Vuesmerland, et plusieurs aultres de l'ancienne noblesse de ce royaulme, avec grand consentement de toutz les gens de bien, qui favorisent la parolle de Dieu et ayment l'honneur de cest estat, qu'il estoit nécessaire, pour obvier à effuzion de sang et à la ruyne de ce commun pays, et aussi pour refformer les désordonnées personnes qui, par abuz et par la malicieuse praticque d'aulcuns aultres, à eulx semblables, ont esté ellevez, de faire entendre à ung chacun quelle est la légitime succession de ceste couronne, et à qui, par légitime droict, cy après elle doibt apartenir, affin de ne la laysser aller à la dangereuse et incertaine descision que, pour rayson de divers tiltres, plusieurs, qui y prétendent intérest, la pourroient faire venir;

Laquelle saincte, bonne et honnorable intention de la dicte noblesse a esté, en plusieurs et diverses façons très mauvaises, préocupée envers la Majesté de ladicte Dame par les communs ennemys de son royaulme, et par iceulx mesmes, et leurs pernicieux et détestables conseilz et pratiques, qui nous sont assés cogneues et au reste de la noblesse, noz vies et noz libertez sont mises meintennant en grand dangier, et monopolles toutz les jours faictz pour apréhender noz personnes, conseils vrayement procédantz de la damnable et ambicieuse affection de ceulx qui, pour aulcune nostre soubzmission, ne peult estre aultrement modérée que par les armes;

A l'ocasion de quoy nous nous sommes assemblez d'une juste et loyalle intention envers la Majesté de la Royne et envers sa couronne, et la légitime succession d'icelle, pour leur résister force par force; et voyantz que nulle intercession ne nous peult valloir, nous nous sommes commiz à la grande bonté et clémence de Dieu et à l'assistance de toutz les vrays zélateurs de ce royaulme, résoluz en nous mesmes d'advanturer entièrement noz vies, terres et biens, en ceste très juste et saincte entreprinse; en quoy nous requérons affectueusement l'ayde et secours de toutz ceulx qui desirent le repoz de cest estat et celluy de l'ancienne noblesse qui y est.

Du mesmes jour.

AULTRE LETTRE AU ROY.

Sire, ceste segonde lettre est pour me conjouyr avecques Vostre Majesté de la reddition de St. Jehan d'Angely, et du debvoir auquel les princes de Navarre et de Condé, monsieur l'Admyral et ceulx qui les ont suyviz se veulent mettre de requérir, à genoux, vostre bonne grâce, et retourner à vostre obéyssance, ainsy que par les vostres, du xxvııȷe du passé, il vous playt me le mander; lesquelles je n'ay receues que ainsy que mon pacquet estoit desjà cloz et dellivré au Sr. de Vassal. Et avec icelles j'ay ensemblement receu voz dernières, qui sont du quatriesme du présent. J'yray, pour l'occasion des unes et des aultres, trouver du premier jour la Royne d'Angleterre, et verray comme elle prendra ces bonnes nouvelles.

L'on m'a présentement faict entendre de sa part celles de cy dessoubz aulx propres termes qui s'ensuyvent:

«La nuict du xvııȷe de ce moys, s'estantz les rebelles de la Royne assemblez au chasteau de Duren pour prendre résolution s'ilz debvoient combattre ou non, ilz se sont trouvez de contraire adviz entre eulx, remonstrant le comte de Northomberland qu'il n'avoit prins les armes pour assaillir les gens de la Royne, sa Mestresse, mais seulement pour deffandre sa personne et celle des aultres seigneurs et gens de bien de sa compaignie, et pour faire certaine remonstrance à la dicte Dame affin de redresser aulcunes choses au bien et proffict de la noblesse et de tout l'estat du royaulme; et que, s'estant là dessus meu différant entre luy et le comte de Vuesmerland, il s'estoit retiré icelle mesme nuict, avec douze centz chevaulx au lieu et chasteau de Exain; et le dict de Vuesmerland avoit prins ung aultre chemyn avec huict centz chevaulx vers Lisdidale, layssans leurs gens de pied, lesquelz avoient incontinent envoyé accepter le pardon de la dicte Dame; et avoient pareillement habandonné Artelpoul et layssé leur artillerye;—que le comte de Sussex et sire Jehan Fauster entendant cella s'estoient miz, l'ung, d'ung costé, avec quinze centz chevaulx et six centz harquebouziers, et l'aultre, de l'aultre, avec mil chevaulx à poursuyvre les dicts comtes;—que le comte de Vuarvich et l'admyral Clinton, ayantz layssé leur infanterye à Ripon, avoient dilligentment passé la rivière, avec toute la cavallerie et avec ung nombre d'arquebouziers et six pièces de campaigne, pour se mettre [après];—que le comte de Mora s'estoit aproché en la frontière pour combattre le dict de Northomberland, et offert à la dicte Royne d'Angleterre dix mil hommes payez pour vingt deux jours, s'il luy playsoit de s'en servyr.»

Je vériffieray mieulx ceste nouvelle, et par mes premières vous en manderay ce que j'en auray aprins, aydant le Créateur auquel je prie, après avoir très humblement baysé les mains de Vostre Majesté qu'il vous doinct, Sire, en parfaicte santé, très heureuse et très longue vie, et toute la grandeur et prospérité que vous desire.

De Londres ce xxvıȷe de décembre 1569.

ADDITION A LA LXXIIIe DEPÊCHE.

LA ROYNE D'ESCOCE A LA ROYNE D'ANGLETERRE.

—du xe de novembre 1569.—

Instances de Marie Stuart auprès d'Élisabeth pour obtenir son rétablissement en Écosse, ou tout au moins la permission de passer en France, même en payant rançon.

La copie de cette lettre, qui n'a pas été transcrite sur les registres de l'ambassadeur (voyez LXXIIIe Dépêche, p. 343), se trouve dans les papiers déposés aux Archives, provenant de la famille Fénélon. L'écriture est de la fin du XVIIe siècle; mais, ce qui en assure l'authenticité, c'est qu'elle fait partie de cahiers qui sont la copie littérale et textuelle des dépêches. Elle est tirée du second manuscrit dont nous avons parlé dans les observations insérées en tête du premier volume de cet ouvrage.

A la Royne d'Angleterre.

Madame ma bonne sœur, ne voulant rien obmettre jusques au dernier but de la patience qu'il a pleu à Dieu me prester en mes adversitez, j'ay différé tant que j'ay peu de vous importuner de mes lamentations, espérant qu'avecques le temps, père de vérité, vostre bon naturel considérant la malice de mes ennemys, qui sans aulcuns contredict courent à bride abatue leur cource contre moy, vous esmouveroit à pitié de vostre propre sang, vostre semblable, et de celle quy entre toutz autres princes vous a esleue pour son resfuge après Dieu, se fyant tant en voz favorables lettres et amiables promesses, fortifiez par ce lien de parantaige et proche voisinnaige, que je me suis mise en voz mains et vostre pouvoir, de mon gré sans contrainte, où j'en demeure prez de deux ans, aucunes foys en espérance de vostre faveur et suport par courtoises lettres, d'autres foys en désespoir par les menées et faux rapportz de mes contraires. Néantmoins mon affection vers vous m'a toujours faict espérer le bien et souffrir le mal paciemment; or maintenant vous avez escouté de rechef la malice de mes rebelles, à ce que me mande l'évesque de Rosse, reffuzant d'ouyr la juste plaincte de celle qui volontairement s'est mise en vostre puissance, se jettant entre voz bras; par quoy j'ay présumé de tenter encores ma fortune vers vous, appelant à la Royne ma bonne sœur d'elle mêmes.

Hélas, Madame, quel plus grand signe d'amitié vous puis je monstrer que d'avoir fiance en vous, et pour récompense rendrez vous vayne l'espérance qui est mise en vous par vostre sœur et cousine, qui peut et n'a voullu envoyer allieurs pour secours? Sera donc mon attente en vous pour néant, ma pacience vayne, et l'amitié et respect que vous ay portée desprisée jusques là que je ne puys obtenir ce que ne sçauriez justement reffuzer à la plus estrange du monde. Je ne vous ay jamais offencée, ains vous ay aymée, honnorée et par toutz moyens recherché de vous complaire et assurer de ma bonne inclination vers vous. L'on vous a faict de faux raportz de moy, à quoy vous adjouxtez foy jusques à m'en avoir traittée non comme une royne, vostre parante, venue cercher support de vous, seure de vostre promise faveur, mais comme une prisonnière à qui vous pourriez imputer offence d'une subjecte.

Madame, puisque je ne puis obtenir de vous déclarer, face à face, ma sincérité vers vous, au moins permettez que monsieur de Rosse, mon ambassadeur, vous rende compte de toutz mes déportemens, comme celluy qui en est [chargé], ayant accez de vous remonstrer les occasions que j'ay de me douloir sans vous offencer, estant contraincte de renouveller mes anciennes requestes, desquelles je vous suplie le vouloir résouldre et moy aussy; à sçavoir, qu'il vous plaise, suyvant mes premières demandes, m'obliger pour jamais, m'aydant de vostre support au recouvrement de mon estat auquel il a pleu à Dieu me constituer entre mes subjectz, comme de tout temps [me l'avez] promis; ou sy le sang, mon affection vers vous, et longue patience ne vous semble mériter cela, au moings ne reffuzez de me laisser aller libre, comme je suis venue, en France ou aillieurs, où je me pourray retirer entre mes amys et alliez.

Et, s'il vous plait m'user de rigueur et me traiter comme ennemye, ce que je ne vous ay jamais estée, ni desire estre, laissez moi racheter ma misérable prison par ranson, comme est la coustume entre tous princes, voire ennemys, et me donnez commodité de traffiquer avecques les susdictz princes, mes amys et alliez, pour faire ma dicte ranson. Et cependant je vous supplie que, pour m'estre fiée en vous de ma personne et offert en tout de suivre vostre conseil, je n'en reçoive dommaige par l'extortion de mes rebelles sur mes fidelles subjectz, ny que je soys affoyblie, pour m'estre attendue à voz promesses, de la perte de Dombertran. Et si tous ces respectz et miennes humbles requestes sont par les faux raports de mes ennemys empeschez d'estre [accueillis de] vous, et que veulliez prendre de mauvaise part tout ce que j'ay faict à intention de vous satisfaire, au moins ne permettez que ma vie soit, sans l'avoir déservi, mise en dangier, comme celluy qui se dict abbé de Domfermelin faict courir le bruict, se vantant de ce (que je ne puis croire) que me mettrez entre les mains de mes rebelles ou de tels aultres en ce pays dont ilz ne sont moins contens et que je ne cognois point.

Je proteste n'avoir jamais eu volonté de vous offancer, ny faire chose qui vous tournasse à desplaisir, ny n'ay méritée cruelle récompense que d'estre sy peu respectée, comme l'évesque de Rosse vous a desjà déclaré et fera de rechef, s'il vous plaist luy donner audience, de quoy je vous supplie bien humblement, et, comme dessus, de luy donner une résolution, et sy ce n'est par amour que ce soit par pitié. Vous avez esprouvée que c'est d'estre en troubles, jugez ce que les aultres souffrent par cela. Vous avez assés prestée l'oreille à mes ennemys, à leurs inventions pour vous rendre soupçonneuze de moy, il est temps de considérer ce quy les y meult et leurs doubles déportemens vers moy, et ce que je vous suys, et l'affection vers vous qui m'a faict venir en lieu où vous avez ce pouvoir sur moy.

Réduysez en mémoire les offres d'amitié que je vous ay faictes, et l'amitié que m'avez promise, et combien je desire vous complaire jusques à avoir négligé le support des aultres princes par vostre adviz et promesse du vostre. N'oubliez le droit d'hospitalité vers moy seule et pesez tout cecy avecques le respect de vostre confiance, honneur et pitié de vostre sang; et lors j'espère que ne me restera occasion de me repentir. Pensez aussi, Madame, quel lieu j'ay teneu et comment j'ay estée nourrye, et sy ayant, par le moyen de mes rebelles ou aultres ennemys, ung sy différant traictement de cestuy là par les miens; de quy j'espéroys tout confort, sy malaisément je puys porter ung tel fardeau avecques celuy de vostre mauvaise grâce, qui m'est le plus dur; laquelle je n'ay jamais méritée, ny d'estre sy estroictement emprisonnée que je n'aye le moyen d'entendre les nouvelles de mes affaires, ou pouvoir mettre ordre en nul part, et mesmes sans pouvoir au moins consoler mes fidelles subjectz, qui souffrent pour moy, tant s'en faut que je les supporte comme j'espérois.

Je vous supplie de rechef que faux rapportz ou mauvais desseins de mes ennemys ne vous facent oublier tant d'aultres respectz en ma faveur. Et pour le dernier, si tout le reste ne peut esmouvoir vostre naturelle pitié, ne desprisez la prière des Roys, mes bons frères et alliez, aux ambassadeurs desquelz j'escriptz pour vous faire instante prière en ma faveur; et, affin que ne le preniez de mauvaise part, je vous supplie m'excuser sy, en caz [que] veulliez oublier vostre bon naturel et pitié qui vous a faict tant honorer et aymer vers moy, je les prie d'advertir les dictz Roys de ma nécessité, et les prie de presser l'ayde à mes affaires que j'ay attandue de vous, et requiers présentement, devant toute aultre, s'il vous plaist me l'accorder; [laquelle], comme j'espère vous trouverez enfin, je n'ay jamais déservi[24] de perdre.

Sy en cecy ou en aulcun poinct de ma lettre je vous offence, excusez l'extrémité de ma cause à ces infiniz troubles, où je me voys. Et pour fin, je me remetz à la suffizance de l'évesque de Rosse que je vous supplie croire comme moy, qui vous présente mes humbles recommandacions, priant Dieu qu'il vous face cognoistre au vray mon intention vers vous et mes déportemens.

De Titbery ce xe de novembre 1569.

Je vous supplie m'excuser sy j'escriptz sy mal, car ma prison, m'est tant mal saine et moy inhabile à cest office et à tout autre exercice.

Vostre très affectionnée bonne sœur et cousine,

MARIE R.


ADDITION AUX DÉPÊCHES DE L'ANNÉE 1569.

LETTRES DIVERSES DE MARIE STUART A L'AMBASSADEUR.

(Les lettres suivantes sont tirées du même manuscrit.)

LA ROYNE D'ESCOCE A MONSIEUR DE LA MOTHE FÉNÉLON.

—du xxve de juillet 1569.—

Lettre de remerciment de Marie Stuart à l'ambassadeur, avec prière de lui continuer ses bons offices.

Monsieur de La Mothe Fénélon, je receu hier vostre lettre du xxȷe de ce moys, ensemble celle de monsieur le Cardinal mon oncle, de laquelle je vous envoye la responce par le présent porteur, laquelle je vous prie luy faire seurement tenir par la première commodité. L'évesque de Rosse m'a plusieurs foys escript de la peine et soing que vous prenez pour l'advancement de mes affaires, de quoy je vous remercye de bien bon cœur, et vous prie de ne vous lasser de continuer et de parler vifvement, l'occasion s'offrante, à la Royne, ma bonne sœur, ainsy qu'avez faict au passé, et que je m'assure, que le Roy, vostre Maistre, monsieur mon bon frère, entend que fassiez à toutes les fois que penserez que vostre parolle me pourroit servir.

Je n'eusse esté si longtemps sans vous escripre, si quelcung de mes secrétaires eust esté icy près de moy, et vous fairois plus ample discours à ceste heure de l'estat de mes affaires, sy je ne m'assurois que le dict évesque de Rosse vous communique librement tout [ce] qui se passe en iceulx, suyvant le commandement que je luy en ay donné à son partement d'icy et ce que je luy en ay souvant despuys escript. Je vous prie, au surplus, de me mander souvant de vos nouvelles, ou pour le moins quand vous [en] recepvrez des bonnes, d'en faire part au dict évesque de Rosse; et atant, après mes affectionnées recommandations à vostre bonne grâce, je prie le Créateur, monsieur de La Mothe Fénélon, vous donner heureuse et longue vie.

De Vuingfeild le xxve de juillet 1569.

Vostre bien bonne amye,
MARIE R.

LA ROYNE D'ESCOCE A MONSIEUR DE LA MOTHE FÉNÉLON.

—du xe d'aoust 1569.—

Prière de Marie Stuart à l'ambassadeur pour qu'il insiste vivement en sa faveur auprès d'Élisabeth.—Plaintes contre le secrétaire La Vergne.

Monsieur de La Mothe Fénélon, je receu vostre lettre du vȷe du présent par le moyen de monsieur de Rosse, et, tant par icelle que par la sienne, cogneu la continuelle bonne volonté que vous avez au bien et expédition de mes affaires, en quoy vous ne serez déceu, le faisant pour une qui ne manquera jamais de bonne volonté à s'en revencher où elle pourra pour vous. J'ay eu naguières nouvelles d'Escosse par Me. Thomas Flemyng, présant porteur, que j'envoys vers le dict sieur de Rosse, lesquelz vous en fairont part et communiqueront sur ma pressente liberté, pour laquelle, (ou bien que je puisse chercher secours ailleurs), il ne faut plus que la Royne d'Angleterre s'excuse sur le comte de Mora pour les causes que vous entendrez par le dict Sieur de Rosse; de quoy je vous prie parler à la dicte Royne, quant l'occasion se présentera.

La Vergne m'a parlé de quelque affaire, dont je ne luy sceu résoudre parce que je ne sçay bonnement comme ces choses sont passées, et aussy que venant freschement de France, comme il m'a dit, il n'en a parlé ny à monsieur de Glazco mon ambassadeur, ny à aultre de mes gens; toutesfoys j'en escriray au dict sieur de Rosse pour en advizer avec vous et faire ce que vous ensemble trouverez bon pour ma seureté. Le dict de La Vergne se dict vostre secrétaire, encores que vous n'en fassiez mention par vostre lettre; et me souvenant que je vous ay cy devant escript comme j'avois eu advertissement que de toutes les lettres et despesches, tant du Roy, monsieur mon bon frère, que de moy, on en bailhoit des coppies à la court d'Angleterre, sur quoy vous me mandaste que vous aviez ung secrétaire en France, et m'ayant cestuy cy dict qu'il y a esté envyron trois moys, et aussy qu'il n'avoit encores guères parlé avec moy qu'il ne me demandast sy je voulois escripre en France ou mander quelque chose de bouche, j'ay eu quelque soupçon que ce fust luy, et ne m'ay sceu garder de luy en parler et remonstrer que luy et aultres voz secrétaires se doibvent bien garder de telles choses, affin que les affaires du Roy, mon dict sieur mon bon frère, ne fussent sy divulguez comme ilz ont esté par cy devant, et que cela estoit fort dangereux. Et, à vous dire vérité, cela m'enpeschera aulcunement que je ne luy donne quelque crédit. Je luy ay faict quelque remonstrance pour le bon voulloir que j'ay et porte continuellement au bien et advancement [des] affaires [du Roy], dont je vous prie l'en assurer et la Royne, madame ma bonne mère, et je prie Dieu vous avoir, monsieur de La Mothe Fénélon, en sa saincte garde.

Le xe d'aoust 1569.

Vostre bien bonne amye,
MARIE R.

LA ROYNE D'ESCOSSE A MONSIEUR DE LA MOTHE FÉNÉLON.

—du XIIe d'aoust 1569.—

Plaintes contre les menées du Sr. Moulins en France.

Monsieur de La Mothe Fénélon, je vous ay amplement escript par Me. Thomas Flemyng, du xe du présent, et ne me reste rien à vous dire, sinon que je me suis souvenue qu'on m'a advertye qu'un nommé Moulins, que vous cognoissés, est après à faire quelque menée en France contre moy et mon estat; de quoy je vous prie en escrire au Roy Très Chrestien, monsieur mon bon frère, affin que ces malignes entreprinses soyent rompues. J'ay escript à monsieur de Rosse qu'il advise avec vous sur l'affaire dont m'a parlé La Vergne, et sellon l'adviz qu'il m'en donnera je me résouldray, priant Dieu vous avoir, monsieur de La Mothe Fénélon, en sa saincte garde.

Escript à Vuingfeild le xıȷe jour d'aoust 1569.

Vostre bien bonne amye,
MARIE R.

Du mesmes jour.

Monsieur de La Mothe Fénélon, despuys vous avoir escript ce matin par La Vergne des menées de Moulins, le Sr. de Bourdeuille, ung de mes escuyers d'escurye, est arrivé venant de France, lequel parmy sa dépesche, m'a raporté que le dict Moulins s'est tant advancé en ses dictz menées que de vouloir solliciter d'envoyer un ambassadeur de France en Escosse. C'est ung très dangereux homme, il fait tout ce qu'il peut pour empescher ceulx en faveur desquels j'escriptz pour estre miz en la garde du Roy Très Chrestien, monsieur mon bon frère, et en leur lieu faire mettre ceulx qui sont de sa pratique. Ce seroit bien faict pour le bien et service du Roy, mon dict sieur mon bon frère, de lui en escripre. Dont je vous en prie de bien bon cœur, et aussi en faveur d'un nommé de Castares, qui est de mes officiers, que je desirerois estre miz de la dicte garde. Il est homme de bien, duquel j'ay expérimenté la fidellité et en réponds, vous priant l'avoir pour recommandé; et je prie Dieu vous avoir, monsieur de La Mothe Fénélon, en sa saincte garde.

Escript à Vuingfeild le xıȷe jour d'aoust 1569.

Vostre bien bonne amye,
MARIE R.

(De la main de la Royne d'Escosse.)

Je vous manderay de ce propos plus au long par Borthick, et de toutes mes nouvelles avecques l'obligation dont je me sentz redevable à vous pour tant de bons offices, vous priant à ceste heure solliciter un peu ferme pour moy.

FIN DU DEUXIÈME VOLUME.


NOTES:

[1] Muley Hascen, roi de Tunis, ayant été chassé de ses états en 1534, par Khaïr Eddyn Barberousse II, roi d'Alger, implora la protection de l'empereur, qui le rétablit dans son royaume au mois de juillet 1535.

[2] Marie Stuart, fille de Jacques V et petite-fille de Marguerite d'Angleterre, était la petite-nièce de Henri VIII, et la cousine, issue de germain, d'Élisabeth. S'il est dit, au Ier vol., p. 66, qu'elle était nièce d'Élisabeth, c'est que celle-ci ayant sur elle l'avantage d'un degré, se trouvait être aussi, comme ou le disait en France, sa tante à la mode de Bretagne.

   HENRI VII † 1509.
   
   
Marguerite
Mariée à
Henri VIII † 1547
Marié à
Jacques IV † 1513. 1o. Catherine d'Aragon. 2o. Anne de Boleyn. 3o. Jeanne Seymour.
| | | |
Jacques V † 1542
Marié à
Marie de Lorraine.
Marie † 1568. Élisabeth † 1603. Édouard VI † 1553.
|
Marie Stuart † 1587.

[3] Voyage.

[4] Wolrad, comte de Mansfeld, qui était le lieutenant du duc de Deux-Ponts.

[5] Pierre Ernest, comte de Mansfeld, qui commandait le secours envoyé par le duc d'Albe à Charles IX.

[6] Sir Georges Douglas, le plus jeune des frères du seigneur de Lochleven, avait procuré l'évasion de Marie Stuart du château de Lochleven en gagnant quelques-uns des gardes et entre autres William Douglas, jeune garçon de seize à dix-sept ans, qui avait enlevé les clés des portes au gouverneur. (Jebb. 1735, t. II, p. 230.)

[7] Combat de la Roche Abeille, livré le 25 juin 1569, dans lequel Philippe de Strozzi, colonel général de l'infanterie, fut fait prisonnier par les protestants.

[8] Allusion à ce que les Saintes Écritures rapportent du prophète Élie, que s'étant rendu par l'ordre de Dieu à Sarepta, ville de la Phénicie, dans un temps de disette, il y trouva une pauvre veuve à laquelle il demanda le reste du peu de provision qu'elle avait en farine et en huile, lui disant:—«La farine qui est dans le pot ne manquera point, et l'huile qui est dans le vase ne diminuera point jusqu'au jour auquel le Seigneur doit faire tomber la pluie sur la terre.—Cette femme s'en alla donc et fit ce qu'Élie lui avait dit. Élie mangea et elle aussi, avec sa maison; et depuis ce jour là,—la farine du pot ne manqua point et l'huile du vase ne diminua point, selon que le Seigneur l'avait prédit par Élie.»—3e liv. des Rois, ch. 17, v. 9 à 16.

[9] A son arrivée en Angleterre, au mois de juillet 1554, Philippe avait obtenu de la reine Marie, qu'il venait épouser, la grâce d'Élisabeth, retenue prisonnière par sa sœur depuis le 11 mars, comme ayant trempé dans la conjuration de Thomas Wyatt, qui avait déjà servi de prétexte à l'exécution de Jeanne Gray.

[10] Cette pièce se trouve jointe à la LIVe Dépêche. Voyez p. 179.

[11] Le capitaine de Sore était amiral de la flotte des protestants; il avait succédé au baron de La Tour, mort à la bataille de Jarnac.

[12] Voir ces pièces qui sont insérées à la fin du Ier vol. à la suite de la XXXVIIIe Dépêche.

[13] Projets de mariage de Charles IX avec Élisabeth, seconde fille de Maximilien II, et de Marguerite, sa sœur, avec Sébastien, roi de Portugal. Voyez Ier vol., p. 67 et 68.

[14] Traité du 11 avril 1564. Rymer, Fœdera, t. vi, 2e part., p. 123.

[15] L'amiral de Coligni, qui avait mis le siège le 24 juillet devant Poitiers, défendu par le duc de Guise, fut forcé de l'abandonner le 9 septembre pour aller au secours de Chatellerault, que le duc d'Anjou menaçait.

[16] Cette pièce n'a pas été transcrite sur les registres de l'ambassadeur.

[17] Ciapino Vitelli, marquis de Chelona, célèbre capitaine italien, était l'un des principaux chefs de l'armée espagnole sous les ordres du duc d'Albe. En 1564, il avait conduit les bandes italiennes dans l'expédition d'Afrique. Depuis, Philippe II l'avait envoyé dans les Pays-Bas, où il exerçait les commandements les plus importants; il fut même dans la suite créé Grand-Maréchal.—Tous les historiens ont pensé que cette mission, dont il fut chargé en 1569, avait pour but secret d'assurer aux catholiques d'Angleterre un chef expérimenté, aussitôt qu'ils se seraient déterminés à prendre les armes.—Il est mort dans les Pays-Bas en 1576.

[18] Bataille de Moncontour, livrée le 3 octobre 1569.

[19] Ces deux pièces n'ont pas été transcrites sur les registres de l'ambassadeur.

[20] Cette lettre n'a point été transcrite sur les registres de l'ambassadeur, mais nous en avons trouvé une copie. Voyez ci-après, p. 428.

[21] C'est-à-dire Temporiser, de Trempance, délai, prolongation; temperation.

[22] Dans cette page du MS. et les deux suivantes, le bord du feuillet se trouvant rongé, il manque quelques mots qu'il a été facile de rétablir.

[23] Cette lettre n'a point été transcrite sur le registre.

[24] Mérité.—Ce mot est déjà employé dans le même sens au commencement de la page précédente.


TABLE

DES MATIÈRES DU DEUXIÈME VOLUME


Année 1569.—Seconde Partie.

  Pages

39e Dépêche.—3 juin.—

 
Au Roi. 1
Audience. Ib.
A la Reine. 8
Mort de M. d'Andelot. 8
Accusations d'empoisonnement. 8

40e Dépêche.—10 juin.—

 
Au Roi. 10
Prise de la Charité et passage de la Loire par le duc de Deux-Ponts. 10
Les Anglais prêts à déclarer la guerre malgré leurs protestations d'amitié. 11
Meilleur traitement fait aux Espagnols. 14
A la Reine. 15
Bruits sur la mort de M. d'Andelot. 16
Précautions prises par Élisabeth contre le poison. Ib.
Proposition de traité sur la restitution des prises. 18

41e Dépêche.—15 juin.—

 
Au Roi. 19
Crainte d'une déclaration de guerre. Ib.
Audience. 21
Assurance de paix. 25
A la Reine. 26
La guerre n'est point encore imminente. 27
Promesse d'Élisabeth en faveur de Marie Stuart. 28
Remontrances de l'ambassadeur sur le commerce. (30 mai). 29
Réponse du conseil aux remontrances. 32

42e Dépêche.—21 juin.—

 
Au Roi. 37
Préparatifs de guerre. Ib.
Exclusion de commerce prononcée par le roi de Portugal contre les Anglais. 38
Précautions qu'il faut prendre en France. 39
A la Reine. 40
Assurance de paix donnée par Élisabeth. Ib.
Mémoire général sur les affaires de France, d'Espagne et d'Écosse. 42
État des différends avec les Pays-Bas. 50
Du fait de la reine d'Écosse. 56
Ses droits à la couronne d'Angleterre. 57
Conditions de l'accord proposé pour son rétablissement. 58
Lettre d'Elisabeth à Marie Stuart (25 mai.) 59

43e Dépêche.—28 juin.—

 
Au Roi. 61
Apprêts d'une expédition maritime. Ib.
Achats d'armes pour la Rochelle. 63
Affaires d'Écosse. 65
Députés anglais envoyés à Rouen. 66
A la Reine. 67
Incertitude sur les projets d'Élisabeth. Ib.
Nouvelles qui lui sont données de France. Ib.
Mort du duc de Deux-Ponts. 69

44e Dépêche.—5 juillet.—

 
Au Roi. 70
Audience. Ib.
Menaces de guerre. 74
Nouvelles d'Écosse. 76
A la Reine. Ib.
Disposition d'Élisabeth à se tenir prête à profiter des événements. Ib.

45e Dépêche.—7 juillet.—

 
Au Roi. 78
Recommandation de Marie Stuart en faveur de sir Georges Douglas. Ib.

46e Dépêche.—11 juillet.—

 
Au Roi. 80
Retour de la flotte de la Rochelle. Ib.
Révolte en Irlande. 81
Nouvelles de la Rochelle.—Combat de la Roche-Abeille. 82
Audience. 83
A la Reine. 85
L'ambassadeur d'Espagne délivré de ses gardes. 86
Nouveaux détails d'audience. Ib.

47e Dépêche.—19 juillet.—

 
Au Roi. 89
Formation d'un corps de volontaires pour la Rochelle. Ib.
Audience. 90
Négociations avec les Pays-Bas. 94
Espoir du rétablissement de Marie Stuart. Ib.
A la Reine. 95
Résolution qui semble prise d'attaquer la France s'il se
   présente une occasion favorable.
Ib.

48e Dépêche.—27 juillet.—

 
Au Roi. 98
Les envoyés de la Rochelle sollicitent un emprunt sur les
joyaux de la reine de Navarre.
Ib.
Préparatifs de guerre. 99
Plaintes du traitement fait au Sr. Norrys en France. 101
A la Reine. 102
Constans efforts pour maintenir la paix. Ib.
Déclaration du roi sur la restitution des prises. 103
Mémoire général sur les affaires de France et d'Angleterre. 104
Mémoire secret sur divers projets de mariage d'Élisabeth. 115
Autre mémoire secret. 119
Élisabeth ne se mariera jamais. Ib.
Détails sur la vie privée de la reine. 120
Familiarités entre elle et le comte de Leicester. Ib.
Elle ne veut point l'épouser. 122
Présomptifs héritiers du trône. Ib.
Remontrance du comte de Leicester en faveur de Marie Stuart. 124
Projet de mariage du duc de Norfolk avec la reine d'Écosse. 126

49e Dépêche.—1er août.—

 
Au Roi. 129
Voyage d'Élisabeth. Ib.
Assurances de paix données par le conseil. 130
Audience. 133
Mouvements dans les comtés de Suffolk et de Norfolk. 135
A la Reine. 136
Nécessité de se préparer à la guerre. Ib.
Vive recommandation en faveur du sieur Norrys. 137
Déclaration d'Élisabeth (28 juillet) sur la restitution
des prises.
138

50e Dépêche.—5 août.—

 
Au Roi. Ib.
Emprunt pour la Rochelle. 141
Armement fait par les députés d'Allemagne. Ib.
Troubles de Suffolk, Norfolk et d'Irlande. 142
A la Reine. 143
Départ de sir Henri Chambrenant pour la Rochelle, comme volontaire. Ib.

51e Dépêche.—10 août.—

 
Au Roi. 145
Audience. 146
Arrêt des navires armés par les députés d'Allemagne. Ib.
A la Reine. 150
Hésitation d'Élisabeth, qui se trouve engagée envers les
deux partis en France.
Ib.

52e Dépêche.—15 août.—

 
Au Roi. 152
Négociations au sujet des navires arrêtés. Ib.
Commerce avec Hambourg. 153
Assemblée de Saint-Johnstown en Écosse (25 juillet). 154
A la Reine. 155
Nouvelles de la Rochelle. 156
Lettre de M. de Chatillon (6 juillet). 157
Relation envoyée de la Rochelle.—Opérations
militaires des protestants depuis leur jonction avec le
duc de Deux-Ponts.
158
Ordonnance d'Élisabeth contre les pirates (3 août). 163

53e Dépêche.—22 août.—

 
Au Roi. 165
Arrivée des députés de Rouen. Ib.
Audience. Ib.
A la Reine. 170
Nouveaux détails d'audience. Ib.
Troubles d'Irlande. 173

54e Dépêche.—20 août.—

 
Au Roi. 174
Expéditions maritimes qui se préparent de tous côtés. Ib.
Plaintes de l'ambassadeur à ce sujet. 175
Chargement de la flotte de Hambourg. 176
A la Reine. 177
Instance pour la reine d'Écosse. 178
Satisfaction d'Élisabeth au sujet des déclarations relatives
à la cession des droits de Marie Stuart au trône d'Angleterre.
Ib.
Remontrance de ceux de la Rochelle au roi après l'arrivée
du duc de Deux-Ponts.
179

55e Dépêche.—1er septembre.—

 
Au Roi. 190
Projets de mariage du roi et de Madame. Ib.
Nouvel arrêt des navires du prince d'Orange 191
Arrivée d'un ambassadeur de Moscovie. 192
A la Reine. Ib.
État des affaires de Marie Stuart. Ib.
Demande de secours pour le château de Dumbarton. 193
Lettre secrète pour la reine. 194
Détails sur le projet de mariage du duc de Norfolk avec Marie
Stuart.—Sollicitations du duc auprès de l'ambassadeur.—Propositions
faites par lui.
Ib.
Mémoire général sur les affaires d'Angleterre, d'Espagne
et d'Écosse.
196
Des différends des Pays-Bas. 202
Du fait de la reine d'Écosse. 204
Propos de la reine d'Angleterre à Mr. le cardinal
de Chatillon.
206
Réclamation de l'ambassadeur auprès d'Élisabeth en faveur de Marie Stuart. 209
Réponse d'Élisabeth. 211
Avis secret concernant Marie Stuart. 214
Vives instances faites auprès d'elle par l'Espagne pour qu'elle
se remette entièrement à la discrétion de Philippe II.
Ib.

56e Dépêche.—5 septembre.—

 
Au Roi. 218
Menées des protestants contre Marie Stuart. 219
Faux bruits de la prise de Poitiers. 220
Demande du conseil afin que la France ne serve pas d'intermédiaire
pour le commerce des Pays-Bas.
Ib.
Départ des navires du prince d'Orange. 221
A la Reine. Ib.
Nécessité de porter secours à Marie Stuart. Ib.
État et évaluation des joyaux envoyés de la Rochelle. 222
Déclaration du conseil (17 août) sur le commerce. 223
Réponse de l'ambassadeur.—Protestation contre toute
restriction de commerce.
225

57e Dépêche.—6 septembre.—

 
Au Roi. 227
Départ des sieurs de Lizy et de Jumelles pour hâter l'expédition
du duc Casimir.
Ib.
A la Reine. 228
Préparatifs de guerre en Allemagne contre la France. Ib.

58e Dépêche.—14 septembre.—

 
Au Roi. 229
Notification des projets de mariage du roi et de Madame. 230
Audience. Ib.
A la Reine. 234
Nouveaux détails d'audience. Ib.
Lettre secrète pour la reine. 236
Débats élevés entre Élisabeth et le duc de Norfolk au sujet de son
mariage projeté avec Marie Stuart.
Ib.

59e Dépêche.—19 septembre.—

 
Au Roi. 237
Sommes importantes réunies par Élisabeth en Allemagne. 238
Arrivée de la flotte anglaise à Hambourg. 239
Troubles d'Irlande. 240
Députés envoyés par Philippe II à Élisabeth pour traiter de
leurs différends.
Ib.
A La Reine. 241
Nouvelles d'Écosse.—Assemblée de Stirling.—Arrestation du
comte de Lethington comme complice du meurtre de Darnley.
242

60e Dépêche.—23 septembre.—

 
Au Roi. 243
Levée du siége de Poitiers. 244
Retour du sieur de Quillegrey d'Allemagne. 245
Projet d'une ligue entre les princes protestants. Ib.
Prochaine arrivée des députés d'Espagne. Ib.
Mesures rigoureuses prises à l'égard de Marie Stuart. 246
A La Reine. Ib.
Demande d'instructions relativement au commerce. 247
Lettre secrète pour la reine. Ib.
Départ subit du duc de Norfolk. Ib.

61e Dépêche.—27 septembre.—(Dépêche interceptée.)

Au Roi. 249
Retour d'Élisabeth à Windesor. 250
Craintes inspirées par diverses flottes qui sont en mer. 251
Méfiance des Anglais à l'égard de l'Espagne. Ib.
Mécontentement témoigné par Élisabeth à Marie Stuart au sujet
de son projet de mariage avec le duc de Norfolk.
Ib.
A La Reine. 252
Nouvelles instances pour des instructions. Ib.
Lettre secrète pour la reine. 254
Envoi d'un paquet de lettres de Marie Stuart. Ib.
Lettre de Marie Stuart à l'ambassadeur (20 septembre).—Instance
pour qu'il s'oppose à ce qu'elle soit livrée au comte de
Huntingdon et au vicomte de Hertford.
Ib.

62e Dépêche.—3 octobre.—

 
Au Roi. 255
Détails sur l'enlèvement de la précédente dépêche. Ib.
Émotion causée par le départ du duc de Norfolk. Ib.
Arrestation des comtes d'Arundel, de Pembroke et
de lord Lumley.
257
A La Reine. Ib.
Les passages d'Angleterre fermés. 258
Refus de passe-ports fait à l'ambassadeur. Ib.

63e Dépêche.—7 octobre.—

 
Au Roi. 259
Arrestation du sieur de Sabran à son retour de France. Ib.
Notification faite par Élisabeth que ses ports sont fermés. 260
Protestation de la reine et des seigneurs du conseil au
sujet de la dépêche enlevée.
Ib.
Nouvelle du retour du duc de Norfolk. Ib.
Craintes de l'ambassadeur pour le duc et pour Marie Stuart. 261
A La Reine. 262
Prudence de l'ambassadeur dans la négociation du mariage de
Marie Stuart avec le duc de Norfolk.
Ib.
Lettre de Marie Stuart à l'ambassadeur (25 septembre).—Ses
supplications pour que la France ne l'abandonne pas.
263

64e Dépêche.—8 octobre.—

 
Au Roi. 266
Certitude de la levée du siége de Poitiers. Ib.
Craintes inspirées par la mission du sieur Ciapino Vitelli. 267
A la Reine. 268
Affaires du duc de Norfolk et de Marie Stuart. Ib.
Mémoire secret. 269
Détails sur le départ du duc de Norfolk. Ib.
Son retour et son arrestation. 272
Préparatifs de guerre en Allemagne. 274
Troubles d'Irlande. 275

65e Dépêche.—12 octobre.—

 
Au Roi. 277
Commission donnée par Élisabeth au sujet de la dépêche enlevée. Ib.
Refus d'audience. 278
Le duc de Norfolk mis à la Tour. Ib.
Nouvelles d'Écosse. 279
A la Reine. 280
Instances pour que de vives plaintes soient faites à l'ambassadeur d'Angleterre. Ib.
Au Roi.—Lettre de recommandation en faveur du capitaine
Muer, Écossais.
281
A la Reine.—Lettre de créance pour le Sr.
Thomas Flemyng, envoyé de la reine d'Écosse.
282

66e Dépêche.—18 octobre.—

 
Au Roi. 284
Procédure criminelle contre le duc de Norfolk. Ib.
Commissaires. 285
Première nouvelle de la victoire de Moncontour (3 octobre). 286
A la Reine. 287
Nouveau refus d'audience. Ib.

67e Dépêche.—24 octobre.—

 
Au Roi. 288
Audience. 289
Arrivée du sieur Ciapino Vitelli. 293
A la Reine. Ib.
Effet produit par la victoire de Moncontour. 294

68e Dépêche.—28 octobre.—

 
Au Roi. 296
Joie des catholiques d'Angleterre au sujet de la dernière victoire. Ib.
Bon accueil fait au sieur Ciapino Vitelli. 297
A la Reine. Ib.
Négociations au sujet du commerce. 298
Mémoire général sur les affaires d'Angleterre. 299
Mesures rigoureuses prises contre les catholiques. Ib.
Détails circonstanciés de tout ce qui a rapport à l'affaire du duc de Norfolk. 300
Chefs d'accusation contre lui. 302
—Contre le comte d'Arundel et lord Lumley,—et le comte de Pembroke. 303
Étroite prison de Marie Stuart. 304
Remontrances de l'ambassadeur sur le commerce, la restitution
des prises et la conduite tenue à l'égard de Marie Stuart.
305

69e Dépêche.—1er novembre.—

 
Au Roi. 308
Audience accordée à l'ambassadeur et au sieur d'Amour, envoyé de
France après la bataille de Moncontour.
Ib.
A la Reine. 313
Détails d'audience. Ib.
Nouvelles d'Allemagne. 314
Reproches contre le duc d'Albe. 315

70e Dépêche.—5 novembre.—

 
Au Roi. 317
Retour du sieur d'Amour en France. Ib.
Instances de l'ambassadeur auprès d'Élisabeth pour empêcher le
commerce avec la Rochelle, et pour qu'il soit porté secours
à la reine d'Écosse.
319
Crainte que Marie Stuart ne soit livrée au comte de Murray. 320
A la Reine. 321
Secours préparés secrètement pour la Rochelle. Ib.
Convention sur la restitution des prises et le commerce. 323

71e Dépêche.—12 novembre.—

 
Au Roi. 328
Efforts tentés en faveur des protestants de France. Ib.
Nouvelles rigueurs contre Marie Stuart et le duc de Norfolk. 331
Mise en liberté du comte de Pembroke. 332
Négociations avec l'Espagne. Ib.
A la Reine. Ib.
Instances pour que le traité sur la restitution des prises
soit fidèlement exécuté.
333
Vive recommandation en faveur de Marie Stuart. 334

72e Dépêche.—18 novembre.—

 
Au Roi. 335
Agitation dans le nord. 336
Négociations avec l'Espagne. 337
Conversion des réaux espagnols en monnaie anglaise. 338
A la Reine. 339
Mesures prises contre les catholiques. Ib.
Leur désir de se retirer en France. Ib.
Commission contre le capitaine Sores. 340

73e Dépêche.—22 novembre.—

 
Au Roi. 341
Nouvelles de la Rochelle. Ib.
Premier bruit du soulèvement des catholiques dans le Nord. 342
Soupçons des Anglais contre le sieur Ciapino Vitelli. Ib.
Instances de Marie Stuart auprès d'Élisabeth. 343
A la Reine. 344
Caractère sérieux de la révolte du Nord. Ib.

74e Dépêche.—25 novembre.—

 
Au Roi. 346
Prise d'armes par le comte de Northumberland. 347
Il est maître de Durham. 348
Seigneurs que l'on croit d'intelligence avec les révoltés. Ib.
A la Reine (lettre secrète). 349
Démonstrations qu'il est nécessaire de faire en France pour
encourager le soulèvement des catholiques en Angleterre.
Ib.
Mise en liberté du sieur Ridolfy. 350
Mémoire secret. 351
Confiance des révoltés dans les secours du roi.—Leurs
projets—Leurs négociations avec l'Espagne.—Vues
de l'Espagne sur Élisabeth et sur Marie Stuart.—Mission
de sir John Hamilton auprès du duc d'Albe.
Ib.
Second mémoire. 356
Irritation d'Élisabeth contre le duc de Norfolk.—Elle
s'abandonne aux protestants.—Leurs desseins politiques.—Causes
du soulèvement du Nord.—Affaires de Marie Stuart.—Négociations
avec l'Espagne.
Ib.

75e Dépêche.—30 novembre.—

 
Au Roi. 366
Nouvelles du Nord. Ib.
Demandes faites par les révoltés. 369
Rupture des négociations avec l'Espagne. 370
A la Reine. Ib.
Soupçons d'Élisabeth contre la France et l'Espagne. 371
Préparatifs du duc Casimir. Ib.
Proclamation d'Élisabeth contre ceux du Nord. (24 novembre). 372
Proclamation de ceux du Nord;—De la cause
pour laquelle ils ont pris les armes.
375

76e Dépêche.—5 décembre.—

 
Au Roi. 376
Nouvelles du Nord. 377
Marie Stuart conduite à Coventry. Ib.
Mise en liberté du comte d'Arundel. 379
Dégradation des armoiries du comte de Northumberland. Ib.
A la Reine. 380
Serment d'Élisabeth au sujet de la dépêche enlevée. Ib.
Restitution de la dépêche. Ib.
Audience est accordée à l'évêque de Ross. 381
Dispositions favorables d'Élisabeth envers la France. Ib.
Note mise sur l'enveloppe du paquet rendu. 382

77e Dépêche.—10 décembre.—

 
Au Roi. 383
Nouvelles du Nord. Ib.
Succès des révoltés. 384
Mesures prises par Élisabeth. 385
Motifs qui ont fait prendre les armes. 386
Nouvelles d'Allemagne. 387
Préparatifs pour secourir la Rochelle. 388
Armements du duc d'Albe. 389
A la Reine. Ib.
Projet d'Élisabeth de livrer Marie Stuart au comte de Murray. Ib.
Arrivée d'un député de la Rochelle. 391

78e Dépêche.—17 décembre.—

 
Au Roi. 393
Audience. Ib.
Efforts des Espagnols pour renouer les négociations. 399
A la Reine. Ib.
Nouvelles du Nord. 400
Siége de Castelbar et prise de Hartlepool par les révoltés. Ib.
Préparatifs de défense contre le duc d'Albe. 401
Plaintes contre les Bretons. 402

79e Dépêche.—21 décembre.—

 
Au Roi. 403
Demande de secours faite parvles députés de la Rochelle. Ib.
Mission du jeune comte de Mansfeld. 404
Confiance d'Élisabeth dans la répression de la révolte. 405
Interrogatoire du duc de Norfolk. 406
A la Reine. Ib.
Négociations de l'Espagne. 407
Meilleure disposition d'Élisabeth en faveur de Marie Stuart
et du duc de Norfolk.
408
Prise de Castelbar par les révoltés. 409
Départ du sieur Ciapino Vitelli. Ib.

80e Dépêche.—27 décembre.—

 
Au Roi. 411
Nouvelles du Nord. Ib.
Imminence d'une bataille décisive. Ib.
Faveur rendue au comte de Pembroke. 412
Audience de congé donnée au sieur Ciapino Vitelli. Ib.
Mission du comte de Mansfeld en Allemagne. 413
A la Reine. Ib.
État des affaires de Marie Stuart. 414
L'ambassadeur réclame le payement de sa pension, et l'accomplissement
des promesses qui lui ont été faites.
415
Lettre secrète à la reine. 416
Recommandation pour que le secret soit gardé sur le second
mémoire joint à la dépêche.
Ib.
Premier mémoire. 417
Historique des affaires du Nord depuis la prise d'armes. Ib.
Crainte que la révolte inspire à Élisabeth. 420
Instance faite auprès du duc de Norfolk pour qu'il renonce
à épouser Marie Stuart.
Ib.
Second mémoire confidentiel. 421
Demande d'un secours d'argent faite par les comtes de
Northumberland et de Westmoreland.
Ib.
Détails secrets de leurs négociations avec l'Espagne. 422
Avis donné par le sieur Ciapino Vitelli au duc d'Albe
de déclarer la guerre à Élisabeth.
Ib.
Proclamation de ceux du Nord. 424
Lettre au roi.—du même jour.— 426
Félicitations sur les nouvelles de France. Ib.
Affaires du Nord. Ib.
Bruit de la dispersion des révoltés. Ib.
Incertitude de cette nouvelle. 427

Addition à la 73e Dépêche.

 
Lettre de Marie Stuart à
Élisabeth (10 novembre).
428
Ses instances pour obtenir son rétablissement en Écosse,
ou la permission de passer en France, même en payant rançon.
Ib.

Addition aux Dépêches de l'année 1569.

 
Lettres diverses de Marie Stuart à l'ambassadeur. 433
25 juillet.—Remercîment de Marie Stuart à l'ambassadeur,
avec prière de lui continuer ses bons offices.
Ib.
10 août.—Prière de Marie Stuart pour que l'ambassadeur
insiste en sa faveur auprès d'Élisabeth.—Soupçons contre
le secrétaire La Vergne.
435
12 août.—Plaintes contre les menées du sieur
Moulins en France.
437
Du même jour.—Nouvelles plaintes contre le sieur Moulins. Ib.
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