Dictionnaire d'argot fin-de-siècle
The Project Gutenberg eBook of Dictionnaire d'argot fin-de-siècle
Title: Dictionnaire d'argot fin-de-siècle
Author: Charles Virmaître
Release date: August 7, 2018 [eBook #57656]
Language: French
Credits: Produced by Hilary Caws-Elwitt, Christian Boissonnas, Hugo
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DICTIONNAIRE D’ARGOT
FIN-DE-SIÈCLE
A Francisque SARCEY
HOMMAGE RESPECTUEUX
Ch. VIRMAITRE.
DICTIONNAIRE
d’Argot
FIN-DE-SIÈCLEPAR
Charles VIRMAITRE
PARIS
A. CHARLES, LIBRAIRE
8, RUE MONSIEUR-LE-PRINCE, 8
1894
À MON CHER ET HONORÉ CONFRÈRE
FRANCISQUE SARCEYPermettez-moi de vous prier d’accepter l’hommage de ce volume. Je suis persuadé que le nom du maître critique lui portera bonheur.
J’ai essayé de faire juste, sans, comme mes devanciers, écarter volontairement des termes risqués.
Je les ai écrits comme ils sont employés dans les milieux auxquels je les emprunte.
Pour écrire mes précédents ouvrages, j’ai dû vivre dans ces milieux, depuis l’atelier jusqu’aux bouges les plus infects, inconnus des chercheurs, et où, d’ailleurs, nul n’oserait s’aventurer sans danger.
C’est donc un Dictionnaire vécu, étudié sur le vif. S’il n’est pas aussi savant que ceux de MM. Jean Rigaud, Alfred Delvau et Lorédan Larchey, il a au moins le mérite de n’être pas fantaisiste; il n’est pas l’écho atténué par une pudibonderie par trop Bérengeriste des expressions en usage depuis des siècles.
Des dames à un certain bal célèbre, mirant leur chemise au vestiaire, j’ai fait comme elles, ce sera moins beau sûrement, mais c’est aussi nature.
TO BE OR NOT TO BE
Veuillez agréer, mon cher Maître, mes remerciements et l’expression de mes sentiments de confraternité.
CH. VIRMAITRE.
Mon cher Confrère,
Vous m’avez fait grand plaisir en vous souvenant du goût que j’ai toujours montré pour les études de linguistique. J’aime les locutions d’argot, dont beaucoup sont très pittoresques; au lieu de les proscrire toutes, comme font les dégoûtés, nous devrions avoir à cœur de choisir les plus expressives et de les introduire dans la conversation de la bonne compagnie, d’où elles passeraient dans le Dictionnaire de l’Académie, qui leur donnerait ainsi leurs lettres de naturalisation.
Je vous remercie et vous serre la main.
FRANCISQUE SARCEY.
PRÉFACE
Avant que les bonnes feuilles de ce Dictionnaire ne me tombassent sous les yeux, je ne connaissais guère, je dois le dire à ma honte, que l’argot de Méténier et celui de Bruant. Je dois confesser que mon éducation était incomplète. Et comme je crois que beaucoup sont dans mon cas, il est de toute évidence que ce Dictionnaire est destiné à rendre les plus grands services aux femmes du monde qui vont, au cabaret du Mirliton, quérir des émotions un peu faisandées, et qui en reviennent mélancolieuses, oh! combien! et le cœur tout en pantenne, les pauvres chères! de ce qu’elles n’ont pas goûté, n’ayant pas compris, toute la boue dont, à leur passage dans son bouge, les éclaboussa l’habile cabot-limonadier.
⁂
Quel beau livre, quel livre puissant, de quel haut intérêt, et de quelle portée morale, philosophique et sociale, il y aurait à écrire sur l’argot! Quels coins de voile il soulève sur ce monde mystérieux, inconnu, inquiétant, si loin de notre société bourgeoise, sur ce monde du crime, où le vol et l’assassinat portent cyniquement le même nom que la retape de la fillasse: le turbin! Le turbin c’est-à-dire le Travail!!!
Ah! nos lois! nos règlements! nos conventions! Ah! nos morales! nos vertus! nos devoirs! Ah! nos Codes, nos gendarmes! A quels antipodes!
⁂
Il y a dans l’argot l’histoire de tout un monde, il y a la psychique de tout un peuple qui pense, croit et agit tout contradictoirement à nous, de même qu’il parle une autre langue que nous, une langue difficile à saisir, en dépit de tous les dictionnaires, parce que sa mobilité est en raison directe des efforts faits par les profanes pour la pénétrer.
Je n’ai ni le temps, ni l’autorité qu’il siérait pour essayer d’écrire, en tête de ce livre, le Commentaire qu’il faudrait. Je ne veux, je ne puis que tenter quelques considérations sur ce qu’est l’argot, au point de vue philologique, et sur la manière dont se forme et se déforme, encore aujourd’hui, ou plutôt se transforme en se déformant ce vocabulaire d’une richesse si colorée et si sapidement et intensément pittoresque.
⁂
Les dictionnaires d’argot, publiés jusqu’à présent, n’ont pas assez, me semble-t-il, insisté sur les modes de recrutement et de transformation des vocables argotiques. Or, précisément, ce côté philologique m’a tout de suite paru, à moi, profane, comporter un intérêt de premier ordre. Je sais bien qu’il faudrait tout un livre pour écrire, expliquer et commenter la longue et si accidentée histoire philologique de l’argot, dont les compétents font remonter les origines jusqu’au XIIe siècle.
Toutefois, à défaut de cette étude savante il y a tout au moins à donner la formule de la mobilité de cette langue, qui, à dix ans de distance, devient presque méconnaissable et quasi incompréhensible pour qui n’en suit pas les évolutions et n’en connaît pas le mécanisme.
⁂
L’argot est un langage artificiel, un vocabulaire de convention.
Riche d’un fond de vieux mots français, latins, ou d’importation étrangère (par le fait, par exemple, des guerres), l’argot, je le répète, est une langue essentiellement bougeante et fugace.
Cette mobilité est obtenue par divers principaux procédés, tels que: déformation de mots existants, substitution de mots, apport de suffixes divers.
Le procédé de déformation le plus curieux est celui qui consiste à remplacer la première lettre d’un mot par la lettre l, à la rejeter à la fin du mot, et à terminer le mot par un suffixe, comme oque, ique, ème, onche, uche.
C’est ainsi que le mot «fou» a produit loufoque. L’f de fou, remplacée par un l et passant à la fin du mot, a formé louf, radical auquel est venu s’ajouter le suffixe oque, soit loufoque. C’est pareillement que linvé vient de vingt, le v, remplacé par l’l, est passé à la fin du mot, et le t est disparu euphoniquement.
Quelquefois le suffixe s’intercale dans le mot. Caler, mourir, devient calancher, par l’addition du suffixe anche, qui est un suffixe courant en argot, comme ique et oque. Exemple: boutique, qui fait bouloque et boutanche.
Un autre suffixe, qu’on retrouve un peu partout, est la syllable quin. Roux = rouquin. Lance, eau, fait lancequine et lancequiner pleuvoir.
Le suffixe go entre dans la composition de beaucoup de mots: icigo pour ici, remplaçant icicaille qui est très vieux; sergot, mendigot, etc.
⁂
L’argot s’enrichit de mots nouveaux par la méthode des synonymes et par métaphores. C’est à dire, à plus exactement parler, que les choses et les gens sont désignés par une de leurs propriétés, une de leurs fonctions, la plus saillante: une montre devient une toquante, parce qu’elle fait toc, toc; un juge s’appelle un endormi, un avocat un bavard; l’avocat général l’avocat bêcheur, une corde ligottante.
Les dérivations par synonymes, donnent parfois des résultats qui déconcertent de prime abord. Comment expliquer que taupe, femme, vient de marmite, qui désigne également la femme. C’est que marmite, par substitution de finale est devenue marmotte, et que marmotte, ayant éveillé l’idée d’animal qui dort sous terre, est un terme cousin germain de taupe.
Une des conséquences à laquelle, par ce procédé, on arrive vite, est le calembourg. L’argot y a aussi recours pour se modifier. C’est ainsi que Saint-Esprit devient Sainte-Essence, le portier cloporte, les latrines le numéro 100.
Suivant cet ordre d’idée, l’expression passer à tabac, doit venir logiquement de chiquer qui en argot signifie battre; chiquer éveillant tout naturellement l’idée de tabac.
⁂
N’y aurait-il pas tout un chapitre à écrire sur la poésie de certaines expressions, telle que blanchette qui veut dire hiver, telle que brouillotte qui signifie la nuit? Et sur l’esprit de certaines locutions imagées? Coucher sur la plume de Beauce, n’est-ce pas joli pour dire «coucher sur de la paille»! Quand la fille qui fait la retape rechasse les passants (les reluque si vous voulez) pour les allumer, on dit qu’elle distribue son prospectus.
Et combien d’autres?
⁂
Ce Dictionnaire vient à son heure, il est l’expression exacte de la langue actuelle qu’on parle couramment dans les bouges. Il émane de la plume d’un qui a beaucoup retenu, après avoir beaucoup vu. Virmaître est plus qu’un écrivain documentaire, c’est le Document lui même. Il est le seul homme de Paris qui a été partout, là même, là surtout, où la police, éventée à distance, n’entre pas. Il a rapporté de cette ballade de touriste dans le tréfond de Paris, tout une œuvre d’un arôme spécial. Que si ces clichés photographiques effarouchent quelques pudeurs, au moins ont-ils pour eux d’être d’une exactitude absolue, puisqu’ils ont été pris sur le vif.
Ce Dictionnaire d’Argot fin-de-siècle, en dépit, et peut-être à cause, du cynisme de certains vocables, et du pittoresque violent de certaines locutions, n’est pas le moins curieux morceau de sa collection.
Léo Trézenik.
EXPLICATIONS
Il est inutile de chercher les origines de l’argot, car tous les auteurs qui ont essayé de les découvrir sont en parfait désaccord.
D’ailleurs, où commence l’argot, où finit-il?
Chaque jour ce langage se forme, se déforme et se transforme.
Ce qu’il faut reconnaître et simplement constater, c’est qu’il est des plus anciens. Il existe depuis la création des associations de filous, de voleurs et de mendiants; ils avaient en effet besoin d’un langage conventionnel pour se comprendre entre eux, sans que le vulgaire non initié pût saisir le véritable sens de leurs conversations.
⁂
Le mot Argot dérive-t-il du grec Argos, d’Argus emblème de la vigilance; de la vieille expression Narquot (mendiant), de Ragot, truand du XVIe siècle, du mot Argu, finesse, etc., etc?
Cela importe peu. Ce qu’il faut considérer c’est que l’usage de l’argot est passé dans nos mœurs, dans toutes les classes de la société; on en retrouve des expressions dans la langue courante.
Nous avons l’argot des voleurs, des souteneurs, des filles de la rue et du demi-monde, des ateliers, des bouchers, des coulisses, du peuple, des troupiers, des bohêmes, des gens de lettres, des saltimbanques, des joueurs, des boursiers, des typographes, des bourgeois, des musiciens, des mendiants, etc., etc.
⁂
Si les expressions employées dans ces divers milieux diffèrent sensiblement comme étymologie et comme sens, tout en signifiant la même chose, c’est que cette langue est très riche; elle est si riche que pour exprimer le mot tête, par exemple, il existe plus de vingt vocables: Trogne, caboche, bobine, fiole, caillou, bouillotte, cafetière, couache, poire, hure, sorbonne, olive, nord, baptême, trompette, globe, binette, cabéche, etc., etc.
⁂
L’étude de l’argot a tenté de grands écrivains, mais ils n’ont pu réussir à pénétrer dans les profondeurs de ce mystérieux langage.
Vidocq, le célèbre voleur, fut, dans notre siècle, le premier initiateur populaire de l’argot; il était placé pour cela, il avait vécu dans le monde des prisons, au bagne, à la Force, et pendant qu’il fut chef de la sûreté, il vit défiler devant lui tous les chefs de bandes célèbres.
Après lui sont venus MM. Alfred Delvau, Jean Rigaud et Loredan Larchey.
Je ne parle pas des auteurs qui n’ont fait qu’emprunter les expressions de nos devanciers, en commettant de grossières erreurs sur le sens et la valeur des mots, erreurs qui prouvent qu’ils n’ont rien pris sur le vif, et qu’ils se sont contentés d’employer les mots tels qu’ils les avaient entendus.
Ainsi, l’un d’eux dit cadelle pour cadenne (chaîne); brouter (manger), pour prouter (colère). C’est à l’infini.
⁂
Au XVIe siècle, l’argot avait pris une telle extension que l’on songea à modifier ce langage et à l’unifier. Ce travail fut confié aux archi-suppôts, titre que prenaient les cagoux, principaux officiers du roi des Truands.
Voici ce que dit à ce sujet Ollivier Chereau:
«... En un mot, ce sont les plus scavants, les plus habiles marpauts de toutime l’argot, qui sont des escoliers desbauchez et quelques ratichons de ces coureurs qui enseignent le jargon à rouscailler bigorne qui ostent, retranchent, réforment l’argot, ainsi qu’ils veulent, et ont ainsi une puissance de trucher sur le toutime sans ficher floutière.»
⁂
La méthode suivie par mes devanciers a ceci de particulier: c’est qu’ils se sont évertués à attribuer à telles ou telles personnalités la paternité des expressions nouvelles. Cela n’est pas juste, car l’argot ne s’étudie pas dans les livres, il s’étudie dans les rues, dans les ateliers, dans les bouges, en un mot dans tous les mondes où il est la langue usuelle.
⁂
C’est le peuple qui est le véritable créateur de la langue verte, c’est lui qui trouve chaque jour des mots nouveaux pour exprimer sa pensée; ce qu’il recherche avant tout, c’est la figure qui frappe, l’image qui détermine l’objet ou la chose qu’il veut désigner, voilà la raison pour laquelle l’argot est si pittoresque, ne repose sur aucune règle fixe et n’appartient à personne parce qu’il appartient à tous, à la masse.
⁂
Dans un atelier, deux ouvriers causent, l’un dit à l’autre:
—Tu ne finiras pas ton travail?
L’autre lui répond:
—Non, c’est que je tousse.
L’apprenti qui a entendu dans les faubourgs dire d’un homme qui pète: «Il est enrhumé» transforme l’expression; au lieu de dire: c’est que je tousse, il dit: c’est que je pète.
Les deux expressions restent, la dernière complète la première, et toutes deux sont dans la circulation pour exprimer la même pensée.
À qui appartiennent-elles? à tout le monde.
Qu’importe au peuple que les étymologistes se torturent la cervelle pour prouver que gogo vient de gaudium et baragouiner du Bas-Breton?
Pour lui gogo est un imbécile, voilà tout.
⁂
Dans ce Dictionnaire d’Argot j’ai procédé d’une toute autre manière que mes prédécesseurs; je ne cite personne, parce que, je le répète, c’est le peuple qui est l’auteur de tous les mots d’argot en usage.
Depuis dix ans que je travaille à ce Dictionnaire, j’en ai étudié les expressions sur le vif, dans les prisons, dans les ateliers, dans les bas-fonds, dans le monde des filles de la rue et des filles de la haute, et ailleurs; j’ai acquis la certitude qu’attribuer à quelqu’un telles ou telles expressions c’est contraire à la vérité. Je me contente d’indiquer à la suite de chaque mot à quel argot il est emprunté et dans quel milieu il est en usage.
⁂
Certainement, j’ai employé des expressions brutales, grossières, mais je n’en suis pas cause; pour être un photographe fidèle; je ne devais pas tourner autour du pot, je ne devais pas hésiter à soulever le couvercle.
C’est ce que j’ai fait.
Le parfum du fricot ne sera peut-être pas du goût de tout le monde, je le regrette; il y en a qui aiment l’odeur de la peau d’Espagne et d’autres qui lui préfèrent celle du vidangeur.
Toutes deux sont aussi bonnes l’une que l’autre, la peau d’Espagne a fait la fortune du parfumeur, et la merde celle du vidangeur.
D’ailleurs, une expression n’est grossière que lorsqu’elle est voulue; quand elle employée pour déterminer un objet, un fait, un individu elle perd sa grossièreté pour passer à l’état d’image, et dans cinquante ans ce qui paraît brutal aujourd’hui paraîtra sûrement anodin.
⁂
Si, à l’époque où l’on poursuivait Madame Bovary on nous avait dit qu’en 1894, l’Académie française accorderait quatorze voix à l’auteur de Germinal, de Nana et de l’Assommoir, on aurait conspué l’audacieux prophète.
A tout il faut s’attendre pour ne s’étonner de rien.
Je remercie mes collaborateurs du concours qu’ils ont bien voulu me prêter pour accomplir ce travail; pour être conséquent avec mon système, je n’en nomme aucun, car il en est qui ne voudraient pas voir figurer leurs noms à côté de ceux de Gamahut, d’Abadie et d’autres célèbres voleurs et assassins qui ont été pour moi des lexicographes.
Ch. Virmaitre.
NOUVEAU
Dictionnaire d’Argot
SIGNES ABRÉVIATIFS
Les noms suivis des initiales L L donnent les explications de M. Lorédan Larchey; A D celles de M. Alfred Delvau.
Les erreurs des autres auteurs cités par ces messieurs ne valant pas la peine d’être relevées, je les passe sous silence.
Toutes les expressions nouvelles, ou celles à qui j’ai restitué leur véritable sens sont suivies de la lettre N.
A
ABATTRE: Faire des dettes, L. L.
Abattre veut dire faire beaucoup d’ouvrage.—C’est un ouvrier habile, il en abat en un jour plus que ses compagnons en une semaine (Argot du peuple).
ABATTAGE: (En recevoir un) être grondé à en être abattu. Équivalent à recevoir un gras, un suif, en un mot, à être enlevé (Argot du peuple). N.
ABATTAGE: (en avoir) être grand, fort, d’une taille à dominer.—Il a de l’abattage, il peut frapper fort (Argot du peuple). N.
ABADIS ou ABADIE: V. Trépe.
ABAT-RELUIT: Cette expression désigne la visière placée sur la casquette des vieillards ou des gens faibles de la vue pour adoucir l’intensité de la lumière (Argot des voleurs).
ABATIS: Les pieds ou les mains.
Dans le peuple, on dit d’un individu mal conformé: Il a des abatis canailles, ou encore il a des abatis à la manque.
Quand deux hommes se battent, la foule dit du plus faible: il peut numéroter ses abatis (Argot du peuple).
ABATTOIR: Lieu où l’on abat les animaux; les prisonniers ont donné ce nom au cachot des condamnés à mort (Argot des voleurs).
ABBAYE DE S’OFFRE-A-TOUS: V. Bocard.
ABBAYE DE MONTE-À-REGRET: La guillotine.
L’expression peut se passer d’explications: ceux qui y montent le font sûrement à regret (Argot des voleurs).
ABBAYE DE CINQ PIERRES: Les cinq dalles de granit placées devant la Roquette, sur lesquelles on monte l’échafaud.
Lacenaire dédia ces strophes à ces cinq dalles:
Oh! je vous connais bien, dalles qui faites placeAux quatre pieds de l’échafaud.Dalles de pierres blanches ou ne reste plus traceDu sang versé par le bourreau.ABBAYE RUFFIANTE: Four chaud, dans lequel les vêtements des prisonniers sont passés au soufre pour détruire la vermine (Argot des voleurs).
ABÉQUEUSE: Maîtresse d’hôtel ou nourrice: elles donnent la becquée.
Cette expression s’applique depuis peu aux voleuses qui dévalisent les magasins de nouveautés en se servant d’un enfant.
Ce vol nécessite trois personnages: la mère, la nourrice et le momignard.
Tous trois entrent dans un magasin. La mère se fait montrer les étoffes. Elle détourne l’attention du commis par un manège quelconque. Profitant de ce moment, elle fait tomber à terre une pièce d’étoffe. La nourrice se baisse, comme pour y déposer l’enfant un instant, et cache prestement l’objet sous la pelisse du petit. Aussitôt elle le pince fortement. L’enfant crie comme un possédé. Elle fait semblant d’essayer de le calmer, mais elle le pince encore plus fort. Ses cris redoublent. Alors la mère témoigne une impatience très vive.
—Te tairas-tu, lui dit-elle; allez-vous en, nourrice. Nous reviendrons une autre fois.
Leur manière d’opérer se nomme le vol à la nourrice (Argot des voleurs). N.
ABBESSE: Maîtresse d’une maison de tolérance.
Allusion aux filles qui sont cloîtrées connue dans un couvent (Argot du peuple).
ABÉTI: Lourd, pâteux, nonchalant.
Mot à mot: abruti par des pratiques personnelles ou de naissance (Argot du peuple). N.
ABLOQUER: Acheter en tas, en bloc.
Les brocanteurs bloquent un tas de marchandises des plus disparates (Argot des camelots). V. revidage.
ABONNÉ AU GUIGNON: Déveine persistante, qu’aucun effort ne peut conjurer.
On dit aussi: «Il a si peu de chance qu’il se noierait dans un crachat» (Argot du peuple).
ABOULER: Se dit dans le peuple d’un récalcitrant qui ne veut pas payer; abouler la monnaie.
—Aboulez donc, mon vieux, faut y passer.
On dit aussi à quelqu’un qui attend: Un peu de patience, il va abouler (Argot du peuple).
ABOYEUR: Nom donné dans les prisons à l’auxiliaire chargé d’appeler les détenus à voix haute pour le greffe ou pour l’instruction.
Ce nom est également donné aux crieurs qui, dans les ventes publiques, aboient la mise à prix des objets à adjuger (Argot des voleurs).
ABREUVOIR: La boutique du marchand de vins où les ouvriers ont l’habitude chaque matin de boire la goutte.
Quand la station a été trop prolongée, que l’homme rentre au logis éméché dans les grandes largeurs, la ménagère lui dit d’un ton rogue: As-tu assez abreuvé ton cochon? (Argot du peuple).
ACCAGNARDIR (s’): Être indolent qui s’amuse à des bagatelles, qui piétine sur place et dormirait, comme dit le proverbe, le cul dans la rivière par dix degrés au-dessous de zéro (Argot du peuple).
ACCIDENTIER: Voleur qui profite des accidents, et sait au besoin les faire naître pour dévaliser ceux qui en sont les victimes.
Le voleur s’empresse autour du blessé, et pendant que lui et un de ses complices le portent chez le pharmacien, ils dévalisent le pauvre diable en route.
Ce genre de vol est nouveau (Argot des voleurs). N.
ACCORDAILLES: Synonyme de fiançailles; il y a toutefois une légère nuance: elles se font généralement sans le secours du maire; les conjoints ne sont pas liés par l’écharpe municipale (Argot du peuple). N.
ACCORDEUR DE FLUTES: Juge de paix (Argot du peuple). V. Bâton.
ACCOUCHER: Avouer, parler.
Quand un prévenu garde un mutisme obstiné, les agents chargés de le «cuisiner» lui disent: Accouche donc, puisque c’est le même prix (Argot des voleurs).
ACCOUPLÉES: Expression qui désigne dans un monde spécial les habituées du Rat Mort, de la Souris ou du Hanneton, deux femmes qui s’aiment avec une ardente passion et en conséquence détestent les hommes (Argot des filles). V. Gougnottes. N.
ACCROCHER SON PALETOT: Voleur qui, chez le juge d’instruction, farde la vérité.
Mot à mot: Mentir (Argot des voleurs). N.
ACCUREUSE: Commode (Argot des voleurs). N.
ACHETER QUELQU’UN: Se moquer, lui faire croire des choses insensées, se payer sa tête.
Mot à mot: prendre un individu pour un imbécile.
Acheter à la course, voler en passant un objet quelconque à un étalage (Argot du peuple).
ACRÉE, ou ACRIER ou ACRÉ: Méfie-toi, prends garde, il y a du pet (danger), voilà la rousse (Argot des voleurs).
ACTEUR: La tournure que portent les femmes pour faire bouffer leur robe.
Cette tournure est ainsi nommée parce qu’elle est au-dessus du trou du souffleur (Argot du peuple). N.
ACTIF: Ne se prend pas, dans le monde où ce mot est employé, dans le sens d’activité.
Il veut dire que l’actif est l’amant du passif (Argot des pédérastes). V. Passif.
AFFALER SON GRELOT: Se taire.
Dans le peuple, on dit d’une femme bavarde, qu’elle, est un moulin à paroles.
Quand elle bavarde trop bruyamment, on lui conseille de mettre du papier dans sa sonnette.
L’image est fort juste, la sonnette ne tinte plus (Argot du peuple). N.
AFFAMÉE (l’): La bouche.
Allusion à la faim ou à la femme hystérique affamée de baisers (Argot des voleurs). N.
AFFE (l’): L’âme.
Son affe se débine.
Mot à mot: il rend l’âme (Argot des voleurs). N.
AFFOURCHÉE SUR SES ANCRES: Fille publique qui renâcle sur le turbin pour faire tortorer son souteneur.
Cette expression ancienne est fréquemment employée, car l’image est frappante.
Affourchée, immobile comme le vaisseau amarré dans le port.
Sur ses ancres, sur ses jambes.
La fille ne trimarde pas (Argot des souteneurs).
AFFRANCHI (être): Ne rien craindre.
On dit dans le peuple d’une fille qui a perdu son capital: elle est affranchie (Argot du peuple).
AFFRANCHIR: Exciter un individu mâle ou femelle au vice ou au vol.
S’affranchir d’une tutelle gênante (Argot des voleurs).
AFFRANCHIR: Châtrer, faire ablation des parties génitales à un animal quelconque.
Le tondeur de chiens est l’affranchisseur des chats, comme le chanoine Fulbert le fut pour Abélard (Argot du peuple).
AFFRANCHISSEUR: Voleur qui pousse un honnête homme pressé par le besoin à voler (Argot des voleurs).
AFFUR ou AFFURE: Profit, bénéfice.
—J’ai mon fade d’affure (part de vol ou d’une opération quelconque) (Argot des voleurs).
AFFURER: Tromper, faire un profit illicite. A. D.
Cette expression signifie: gagner.
L’argent que les croupiers étouffent sur la cagnotte, les sous que l’enfant détourne d’une commission; le conducteur d’omnibus qui oublie de sonner un voyageur, c’est de l’affure (Argot des voleurs).
AFFÛTER: Tromper. A. D.
J’ignore où il a pu entendre que ce mot avait cette signification, il est pourtant depuis longtemps en usage dans le monde des ouvriers.
Affûter un outil, le passer sur la meule pour le rendre tranchant.
Quand, dans les ateliers, on embauche un ouvrier, il attend sa paye du samedi ou de la fin du mois pour être affûté, savoir ce qu’il gagnera (Argot du peuple). N.
AFFUTER DES PINCETTES (s’): Courir, se sauver à grande vitesse (Argot des voleurs).
AGENOUILLÉE: Fille du demi-monde et même du demi-quart qui a des aptitudes spéciales.
L’expression est suffisamment expliquée par la position d’être agenouillée... pas sur les dalles d’une église pour prier le bon Dieu (Argot des filles). N.
AGOBILLES: Outils employés par les malfaiteurs pour voler.
Ce mot est très ancien (Argot des voleurs).
AGUA ou AGOUA: Eau.
Corruption du mot latin aqua (Argot des voleurs).
AGUALURO: Jeter, bannir.
On emploie cette expression pour envoyer promener quelqu’un loin de soi (Argot des voleurs).
AIDE-MARI: L’amant.
Il aide à la besogne conjugale, sans en avoir les désagréments.
On dit aussi l’autre.
Pour les omnibus traînés par trois chevaux, on dit: ménage à trois.
Allusion à ce qu’ils tirent les uns après les autres (Argot du peuple). N.
AIGLE BLANC: Chef de bande du voleurs.
Sans doute parce que l’aigle vole haut (Argot des voleurs). V. Méquard. N.
AIGLON: Apprenti voleur (Argot des voleurs). N.
AIGUILLE: Fausse clé (Argot des voleurs).
AIGUILLEUR: Vol au moyen de fausses clés (Argot des voleurs).
AILERONS ou AILE: Bras.
—Mademoiselle, voulez-vous accepter mon aile.
Couvrir une femme d’une aile protectrice.
—Prends mon aile, s’y te touche, je le crève (Argot du peuple). V. Abatis.
AIMER À CRÉDIT: Être l’amant de cœur d’une femme.
Ne la payer qu’en nature.
De la famille des maquereaux (Argot des filles).
AIMER POUR PEAU DE BALLE: Aimer pour rien.
Perdre son temps et sa jeunesse, amour qui ne rapporte pas (Argot des filles). N.
AIMER AU CHASSE: Aimer à l’œil, faire une queue à son souteneur avec un passant galbeux (Argot des filles). N.
ALARMISTES: Chien de garde.
L’animal donne l’alarme à ses maîtres.
En 1848, les alarmistes étaient des bourgeois qui répandaient chaque jour des mauvaises nouvelles (Argot des voleurs).
ALBACHE: Faux nom, en donner un.
On nomme ainsi le voleur qui donne un faux nom pour dissimuler son identité (Argot des voleurs). N.
ALBOCHE: Allemand.
Autrefois les ouvriers disaient boche, pour qualifier un lourdeau, al a été ajouté pour désigner les Allemands en général (Argot du peuple). N.
ALENTOIR: Aux environs, aux alentours.
—Nib de Tronche fait le pet aux alentoirs pendant que les aminches, ratiboisent la cambrousse du garnaffier (Argot des voleurs).
ALIGNER (s’): Les duellistes s’alignent pour se battre.
Quand un travail est très soigné l’ouvrier dit avec fierté: Hein! comme c’est aligné.
Quand il s’agit d’argent. aligner est synonyme d’allonger (Argot des voleurs).
ALFA: Cheveux blonds.
On sait que l’alfa plante textile qui sert à fabriquer la pâte du papier, a absolument l’aspect d’un paquet de filasse.
Allusion de fait et de couleur (Argot des voleurs). N.
ALLEZ VOUS ASSEOIR: Terme employé pour envoyer promener un individu ennuyeux.
Cette expression ancienne a servi à un chansonnier de 1848 pour composer une chanson dont le refrain: Allez vous asseoir est resté célèbre (Argot du peuple).
ALLEZ À DACHE: Mot à mot allez vous faire voir. Vous m’ennuyez (Argot du peuple).
ALLER À DAME: Être assommé à coups de poings et tomber comme une masse sur le pavé (Argot du peuple). V. Fluxion de pavé.
ALLER À NIORT: Nier.
Recommandation qu’ont soin de faire les voleurs à leurs complices quand ils vont à l’instruction.
Ils se souviennent du mot du boucher Avinain qui, la tête sous le couteau, cria: N’avouez jamais (Argot des voleurs).
ALLER AU RAPPORT SANS ARME: Moucharder ses camarades.
Expression employée dans les ateliers pour indiquer que l’un des leurs va chaque jour au rapport, chez le patron pour lui raconter ce qui se passe et même ce qui ne se passe pas (Argot du peuple).
ALLER AU REFIL: Dénoncer un complice (Argot des voleurs). V. Mouton. N.
ALLER OÙ LE ROI VA À PIED: Satisfaire un besoin dans le silence d’un cabinet qui n’a rien de ministériel. L’allusion est juste; malgré sa grandeur, le roi ne pourrait y aller en voiture (Argot du peuple).
ALLER VOIR DÉFILER LES DRAGONS: Ne pas manger.
Être de la revue signifie la même chose (Argot du peuple).
ALLEZ VOIR LÀ-BAS SI J’Y SUIS: Ce qui veut dire nettement à une personne: Foutez-moi le camp (Argot du peuple).
ALLIANCES: Poucettes.
Les gendarmes mettent les poucettes aux prisonniers pour les conduire de brigade en brigade. (Argot des voleurs) V. Cabriolet.
ALLUMAGE (professeur d’): Grec qui apprend à ses élèves le moyen à employer pour allumer les joueurs naïfs.
Il y avait anciennement au boulevard du Temple, un café où se rencontraient les grecs; il était connu sous le nom de café d’allumage (Argot des grecs). V. Suiffart.
ALLUMER: Faire de l’œil à un passant.
Chauffer une salle de théâtre ou une réunion publique pour faire éclater l’enthousiasme et assurer le succès.
Frapper ses animaux à coups de fouet pour les exciter.
Compères chargés dans les salles de ventes d’allumer les acheteurs (Argot du peuple).
ALLUMER LA QUITOURNE: Fille qui fait la fenêtre, qui raccroche en chambre.
À la tombée de la nuit elle allume sa lampe. Comme elle la tourne de façons différentes pour signaler aux passants qu’elle est libre ou occupée, de là, la quitourne (Argot des filles.)
ALLUMER SON PÉTROLE: Rendre quelqu’un amoureux.
Mot à mot l’enflammer.
—Le grand t’a donc plaquée?
—Comme un pet.
—T’a pas su y enflammer le pétrole (Argot des filles).
ALLUMEUR: Agent provocateur chargé d’organiser un complot politique quand le gouvernement a besoin d’effrayer la population pour faire voter une loi réactionnaire.
On en trouve un curieux exemple dans les Mémoires de Claude, à propos de l’Internationale et des allumeurs de la rue des Gravilliers. (Argot du peuple).
ALPAGUE: Abréviation d’alpaga.
—Je vais me balader, Nini passe-moi mon alpague (Argot du peuple).
ALPHONSE: Souteneur.
On a attribué cette expression à M. Alexandre Dumas qui en a fait le titre d’une pièce; elle était connue depuis plus de vingt ans par la chanson si populaire de Lacombe: Alphonse du Gros-Caillou (Argot du peuple).
ALTÈQUE: beau, plus que beau (Argot des voleurs).
ALZINGUE: Même signification qu’Alpague.
AMANDES DE PAINS D’ÉPICE. V. Dominos.
AMARRÉ: Allusion aux amarres qui fixent les bateaux sur la jetée, dans les ports.
Amarrer quelqu’un, se l’attacher.
—J’ai amarré un chouette gonce qui casque tout le temps (Argot du peuple).
AMBULANTE: Fille qui va de cafés en cafés, tantôt à Montmartre tantôt à Grenelle. C’est généralement une fille rangée qui n’a pas de souteneur. Elle passe dans son quartier pour une laborieuse ouvrière qui va travailler au loin.
Elle ne ramène jamais chez elle (Argot du peuple). N.
AMÈRE (la trouver mauvaise). Les voleurs principalement trouvent toujours leurs condamnations amères.
Synonyme de il faut avaler la pilule (Argot du peuple).
AMÉRICAINE (Vol à l’): Ce vol fut inventé par Hurand, qui en 1844, était détenu à la prison de la Force.
On sait en quoi consiste ce vol qui est fréquemment pratiqué.
Il a donné naissance au vol au charriage qui se divise en plusieurs catégories. (Argot des voleurs). V. Charriage.
AMINCHE: Ami.
Quand deux voleurs sont, associés ils sont aminches d’aff. (Argot des voleurs).
AMINCHES D’AFF: Amis d’affaires.
Un vol pour un voleur est une affaire, comme voler c’est travailler (Argot des voleurs).
AMOCHER: Recevoir des coups.
Quant ils laissent de fortes traces on dit que l’ami a été rudement amoché (Argot du peuple). V. Trinquer.
ANDOUILLE MAL FICELÉE: Individu déguingandé, à la démarche traînante.
Se dit surtout de quelqu’un mal habillé, ayant des allures ridicules.
On dit aussi: Mal fagoté (Argot du peuple).
ANGLAIS: Créancier.
Cette expression se trouve dans Marot, elle était tombée en désuétude lorsqu’elle revit le jour vers 1804.
Napoléon 1er avait plusieurs commis attachés à un cabinet spécial. Il remarqua à différentes reprises que l’un d’eux arrivait depuis quelques matins deux heures au moins avant ses collègues.
L’empereur intrigué lui en demanda les motifs.
—Sire, répondit le commis, c’est à cause des anglais.
—Je ne vous comprends pas.
—Sire, les anglais sont vos ennemis, mes créanciers sont les miens.
—Bien, fit l’Empereur, donnez m’en la liste, je vous en débarrasserai, comme moi des autres.
Le mot est resté et est employé fréquemment. (Argot du peuple).
ANGLAIS (ils débarquent).
Il est aussi brave,Que sensible amant,Des anglais il brave,Le débarquement.(Argot du peuple). V. Bande sur l’affiche.
ANGLUCE: Oie (Argot des voleurs). V. Ornichon.
ANGOULÈME: La bouche (Argot des voleurs). V. Affamée.
ANGUILLE: Ceinture.
Allusion à sa souplesse (Argot des voleurs).
ANITERGE: Mouchoir (Argot des voleurs). V. Blavin.
ANTIF ou ANTIFFLE: Marcher.
—Que fait la môme?
—Elle bat l’antif pour dégoter un miché (Argot des souteneurs).
ANTIFFE: Église (Argot des voleurs). V. Antonne.
ANTIQUITÉ: Vieille femme.
Au temps de sa jeunesse Théophile Gautier, en compagnie d’un de ses amis, se promenait dans le jardin des Tuileries. Il avisa une vieille femme vêtue d’une robe à ramages qui datait au moins du Directoire.
Il s’approcha d’elle, le chapeau à la main.
—Madame, lui dit-il, je raffole des antiquités, voulez-vous me permettre de baiser le bas de votre robe?
Elle répondit fièrement:
—Si monsieur veut embrasser mon cul, il a vingt cinq ans de plus que ma robe (Argot du peuple). N.
ANTONNE: Église.
Du vieux mot: Antie (Argot des voleurs).
ANTONNEUR: Voleur qui a la spécialité de dévaliser les églises.
Il vole l’argent contenu dans les troncs à l’aide d’une baleine enduite de glu (Argot des voleurs).
APASCLINER (s’): S’acclimater.
L’aminche s’apascline doucettement à tunobé (Argot des voleurs). N.
APPACHONNER: Attirer à soi.
—J’ai appachonné un morlingue dans la valade d’un goncier pendant qui baillait devant les sigues de la Boutanche d’un balanceur de braise (Argot des voleurs). N.
APOTRES: Les doigts (Argot des voleurs). V. Ministre de l’Intérieur.
AQUARIUM: Lieu où se réunissent les souteneurs.
Allusion aux poissons.
Aquarium: la Chambre des députés.
Cette expression n’est pas très polie pour ces messieurs, qui assurément ne sont pas tous des poissons, mais comme elle est d’origine anarchiste, elle ne surprendra personne (Argot du peuple). N.
AQUIGER: Battre, blesser.
On dit par corruption de celui qui est battu: il est attigé (Argot du peuple).
AQUIGER: Prendre.
Aquiger n’est pas le vrai mot, c’est quiger (Argot des voleurs).
AQUIGEUR: Voleur qui cherche querelle à un passant.
Pendant qu’il le bat, un complice le dévalise proprement et lestement (Argot des voleurs).
ARAIGNÉE DANS LE PLAFOND (avoir une): Synonyme de loufoque.
Avoir la cervelle détraquée (Argot du peuple).
ARCASINEUR: Voleur au trésor caché.
Le voleur se nomme arcasien parce qu’il procède au moyen d’une lettre (arcat) écrite d’une prison quelconque à l’individu qu’il s’agit d’escroquer.
L’arcat indique généralement un trésor caché à l’étranger. Des naïfs mordent toujours dans l’espoir d’un gros gain (Argot des voleurs).
ARCO: Avare (Argot des voleurs). V. Grippe-sous.
ARÇONNIER: Celui qui donne le signal de l’alarme convenu entre les voleurs.
Au temps de Vidocq, le C figuré à l’aide du pouce sur la joue droite signifiait: prenez-garde voilà la rousse (Argot des voleurs).
ARDENTS: Les yeux (Argot des voleurs).
ARDOISE (boire à l’): Il existait autrefois un marchand de vin à la barrière Montparnasse; le patron ne sachant ni lire ni écrire, les clients marquaient eux-mêmes leurs dépenses sur une ardoise à l’aide d’un morceau de craie.
Un jour le brave homme s’aperçut que les consommateurs s’entendaient, et que le dernier qui marquait effaçait avec sa manche, comme par mégarde, les comptes précédents.
Il coupa le crédit, mais l’expression de boire à l’ardoise est restée (Argot du peuple). V. Marquer à la fourchette. N.
ARLEQUINS: Détritus de toutes sortes de mets que les cuisiniers des restaurants vendent à des marchandes des Halles.
Ces débris sont triés avec soin, et elles en font des assiettes assorties que les malheureux achètent un ou deux sous.
Cette expression vient de l’habit d’Arlequin, qui est composé d’étoffes de différentes couleurs (Argot du peuple).
ARMOIRE À GLACE: Sac du troupier (Argot du troupier). V. As de carreau.
ARMOIRE À RICHER: Le ventre.
Allusion aux matières fécales que contiennent les intestins (Argot du peuple).
ARNACHE: Agent de police. A. D.
Arnache: trompeur. L. L.
Les voleurs disent: Arnaque.
Cette expression vient du vieux mot français: harnacher; il est employé, sans doute, par les voleurs, parce que les agents les harnachent en les ligottant, soit avec les alliances, soit avec le cabriolet (Argot des voleurs).
ARNAQUE: Nom d’un jeu qui se joue sur la voie publique et sur les boulevards extérieurs; il est connu également sous le nom de tourne-vire.
Ce jeu consiste en une roue posée à plat sur un pivot, la table est composée de trois planches mobiles, supportées par deux tréteaux; ces planches sont recouvertes d’une toile cirée; cette toile est divisée en carrés qui forment cases, ces cases se distinguent par des emblèmes différents, les quatre rois: trèfle, cœur, pique et carreau, une ancre, un cœur, un dé et un soleil. Les joueurs misent sur une case, la roue tourne et celui qui gagne reçoit dix fois sa mise.
En évidence, sur la table, il y a des paquets de tabac, des cigares, des pipes et autres objets, mais c’est pour la frime, le tenancier du jeu paie le gagnant en monnaie. Ce jeu est un vol.
Autour de la table, il y a toujours deux ou trois engayeurs, ils sont de préférence à chaque bout (la table est un carré long); au moment où la plume va s’arrêter sur une case, par un mouvement imperceptible, un des engayeurs s’appuie sur la planche mobile du milieu, la plume dévie et le tour est joué; si c’est un engayeur qui gagne, il partage avec ses complices (Argot des camelots). N.
ARPETTE: Apprenti de n’importe quel métier.
Ce mot se prend aussi dans le sens de petit, moufflet, diminutif de moutard (Argot du peuple).
ARPIONS: Vieille expression qui veut dire: pieds.
Jean Hiroux disait au président des assises:
—Je demande qu’on fasse sortir le gendarme, il plombe des arpions.
—Gendarme, répondit le président, remuez vos pieds dans vos bottes d’ordonnance.
Prévenu, la punition commence (Argot des voleurs).
ARRACHER UN PAVÉ: V. Rouscailler.
ARRACHEUR DE CHIENDENT: Voleur qui cherche une occasion de voler (Argot des voleurs).
ARRANGEMANN: Arranger.
Arranger quelqu’un en lui faisant faire une opération ruineuse.
Les grues arrangent les pantes.
Une femme arrange un homme en lui communiquant un mal vénérien.
On arrange un homme en le battant à plate couture.
—Il est arrangemann le gonce, il ne rebiffera pas, il est foutu d’en crapser (Argot des souteneurs). N.
ARRONDIE: Montre.
Allusion à sa forme ronde (Argot des voleurs).
ARROSER: Donner un accompte sur une dette.
Un huissier cesse les poursuites commencées quand le débiteur arrose.
Donner de l’argent à un fonctionnaire pour obtenir un privilège, c’est l’arroser.
Nos députés le furent largement par Arton pour l’affaire du Panama.
Martingaler son enjeu c’est arroser le tapis (Argot du peuple). N.
ARROSEUR DE VERDOUZE: Jardinier (Argot des voleurs).
ARTIE DE MEULAN: Pain blanc.
Allusion à la blancheur des farines produites par les moulins de cette ville (Argot des voleurs).
ARTIE DU GROS GUILLAUME: Pain abominablement noir qui rappelle celui du siège de Paris, en 1870, qui contenait de tout, excepté de la farine (Argot des voleurs).
ARTIE: V. Bricheton.
ARTICHE (l’): Le derrière.
—Je vais t’enlever l’artiche.
On nomme artiches, par abréviation d’artichauts, les barres de fer pointues et hérissées qui couronnent les murs et les grilles des prisons (Argot des voleurs). N.
AS DE CARREAU: Sac du fantassin (Argot du troupier). V. Armoire à glace.
AS DE PIQUE: Se dit d’une femme qui possède abondamment ce que d’autres n’ont que très peu... (Argot du peuple). V. Fournitures.
ASPHALTEUSE: Fille qui raccroche sur le trottoir.
Elle foule l’asphalte en tous sens (Argot des filles).
ASPERGE MONTÉE: Grande femme toute en jambes, maigre et sèche comme un copeau.
On dit aussi: longue comme un jour sans pain (Argot du peuple).
ASPIC: Avare.
Aspic signifie aussi mauvaise langue, langue de vipère.
Cette expression est empruntée au proverbe: Mieux vaut un coup d’épée qu’un coup de langue (Argot du peuple). N.
ASSOMMOIR: Boutique où l’on vend des liqueurs vitriolées qui assomment les buveurs.
Le premier assommoir, bien avant celui du fameux Paul Niquet, fut créé vers 1810, rue de la Corderie, près du Temple, par un nommé Montier.
Cet empoisonneur charitable avait fait établir dans son arrière-boutique une chambre spéciale pour les assommés; la paille servait de litière, des pavés servaient d’oreillers.
Cette chambre s’appelait la Morgue (Argot du peuple).
ASTÈQUE: Bien avant que les Aztèques ne vinssent du fond du Brésil, cette expression servait à désigner les êtres chétifs et malingres (Argot du peuple). V. Avorton.
ATTACHER LE BIDON: Dénoncer un camarade.
Synonyme de remuer la casserole (Argot des voleurs).
ASTICOT: Vermicelle (Argot des voleurs). N.
ASTICOT: Fille publique.
Asticot: personne mince comme un fil (Argot du peuple).
ASTICOT DANS LA NOISETTE: Personne qui a des absences de mémoire.
On sait que l’asticot dévore l’amande de ce fruit, par analogie il dévore la cervelle (Argot du peuple). N.
ATOUT: Avoir du courage.
Avoir des atouts dans son jeu.
Un zouave rencontre son capitaine accompagné de sa femme, il leur lance au nez un pet à tout casser en criant: Atout. Le capitaine, se retournant, lui envoie un magistral coup de pied dans le cul en disant: Je coupe. Le soldat répond: Ah! je ne savais pas que vous aviez la dame seconde!
Recevoir un atout: être sérieusement blessé.
C’est sans doute d’atout que, par corruption, on a fait attiger (Argot du peuple). N.
ATTIGNOLES: Rognures de viandes hachées et vendues sous forme de boulettes.
L’expression est normande, mais elle est devenue parisienne en s’éloignant du sens primitif.
Dans le peuple, pour exprimer qu’un individu a été fortement endommagé dans une rixe, on dit: Il a reçu de rudes attignoles (Argot du peuple). N.
ATTOUCHEMENTS: Être assez indiscret pour vouloir s’assurer si une jolie femme porte un pantalon et met ses jarretières au-dessus du genou.
Synonyme de peloter (Argot du peuple) V. Baiseuses.
ATTOUCHEUSE: Fille publique.
Le mot est suffisamment expressif.
Allusion aux ménagères qui tâtent la viande chez le boucher pour s’assurer de son degré de fraîcheur (Argot des filles).
ATTRIQUER: Acheter des effets volés, sans pour cela être un recéleur habituel: Fourgat ou Meunier (Argot des voleurs).
ATTRIQUEUSE: Vendre des objets volés (Argot des voleurs).
ATTRISTÉ: Voleur qui ne travaille que la nuit, sans se soucier des pendus glacés (Becs de gaz) (Argot des voleurs).
AUBERT: Argent (Argot des voleurs).
AUMÔNIER: Vol à l’aumône.
Autrefois, cette expression désignait les dévaliseurs de bijoutiers.
Le voleur marchandait des bijoux, un mendiant survenait et sollicitait une aumône.
L’attention du bijoutier était détournée pendant qu’on lui dévalisait ses vitrines; quand il s’apercevait du vol, les voleurs étaient loin (Argot des voleurs).
AUSEIGNOT: Auxiliaire.
Détenu qui par faveur et moyennant une modique rétribution, remplit dans la prison les fonctions les plus grossières (Argot des voleurs).
AUTEL DE BESOIN: Femme ou fille.
Allusion à l’hôtel qui s’ouvre pour ceux qui paient.
Autel sur lequel l’homme sacrifie par nécessité.
Se dit souvent dans le peuple d’une femme légitime (Argot des souteneurs).
AUTOR ET D’ACHARD (d’): Abréviation d’autorité et d’acharnement.
Lorsque deux joueurs font une partie d’écarté et que l’un demande des cartes à son adversaires, l’autre lui répond: Non, j’y vais d’autor et d’achard (Argot du peuple).
AUVERPIN: Auvergnat.
On dit aussi: Auverplum et Bougnat (Argot du peuple).
AVALE-TOUT-CRU: Synonyme de Va de la gueule, Gueulard, Bouffe-tout et Ventre à tous grains.
Ces expressions, dans le peuple, signifient: Gros mangeur.
Une certaine catégorie de voleurs se sont emparés de l’expression: Avale-tout-cru, pour désigner un genre de vol assez original.
Le voleur se fait montrer par le bijoutier des diamants non montés, sur carte; il paraît avoir la vue basse, il les regarde de près, et d’un coup de langue habile il en avale quelques-uns (Argot des voleurs).
AVALER LE LURON: Communier.
On dit aussi: avaler l’Auvergnat, parce que sans doute, comme lui, Dieu n’est ni homme ni femme (Argot des voleurs).
AVALER SA CUILLER: Mourir.
Être moins heureux que le commis des Magasins du Printemps: il est vrai qu’il n’avait avalé qu’une fourchette (Argot du peuple).
AVALER LE PÉPIN: Être enceinte.
—Elle en a une de bedaine ta frangine. Qu’a-t-elle donc mangé?
—Elle a avalé le pépin (Argot du peuple).
AVALER SA CHIQUE: Mourir.
Allusion au chiqueur qui s’étoufferait en avalant son pruneau (Argot du peuple).
AVALOIR: La gorge.
Elle avale tout en effet. (Argot du peuple). V. Dalle.
AVANT-COURRIER: Mèche en acier dont se servent les voleurs pour percer les devantures des boutiques de bijoutiers (Argot des voleurs). V. Vrilleurs.
AVANT-SCÈNE: Les seins.
Ils avancent, en effet, quand... il y en a. (Argot du peuple). V. Capitonnée.
AVANTAGE: Les seins.
Avantage, oui, quand il fait froid, mais pendant les grandes chaleurs? (Argot du peuple). V. Capitonnée.
AVOIR PERDU SA CLÉ: Être atteint d’une foire à tout inonder et ne pouvoir se retenir.
On comprend qu’il s’agit d’une clé que le serrurier ne peut remplacer (Argot du peuple).
AVOIR UN PÉPIN: Aimer.
En tenir momentanément pour quelqu’un (Argot du peuple).
AVOIR LE VENTRE EN ACCORDÉON: Femme déformée qui a eu des masses d’enfants.
Allusion au plissage du ventre (Argot du peuple). N.
AVOIR LE VENTRE EN PERSIENNE: Voir ci-dessus.
AVOIR SA PISTACHE: Être complètement gris (Argot du peuple). N.
AVOIR DU PAIN SUR LA PLANCHE: Être riche et ne pas avoir à s’occuper du lendemain.
Être condamné à un certain nombre d’années de prison (Argot du peuple).
AVOIR LE NEZ SALE: Avoir trop bu.
Quand au lendemain du lundi un ouvrier dort sur son travail, les amis lui disent: Tu t’es sali le nez hein! (Argot du peuple).
AVOIR LA GUEULE DE BOIS: S’être pochardé la veille.
L’ivrogne boit de l’eau le lendemain pour éteindre le feu qui lui dessèche la gorge.
Mot à mot: Il a la gueule sèche (Argot du peuple).
AVOIR MANGÉ LA SOUPE À LA QUÉ-QUÊTE: V. Avaler le pépin.
AVOIR MANGÉ DES POIS PAS CUITS: V. Avaler le pépin.
AVOIR QUELQU’UN À LA BONNE: Être très camarade, ne jamais se quitter, vivre comme deux frères (Argot du peuple).
AVOIR DEUX ŒUFS SUR LE PLAT: On emploie cette expression pour une femme qui a des seins à l’état de soupçon.
Ce à quoi elle répond: J’en ai assez pour un honnête homme (Argot du peuple). N.
AVOIR UN PET DE TRAVERS: Se dit d’un personnage grincheux que l’on ne sait jamais par quel bout prendre et qui gémit sans cesse, du matin au soir et du soir au matin (Argot du peuple). N.
AVOIR UN BÉGUIN: Être coiffé de quelqu’un ou de quelqu’une.
S’aimer à l’œil, ce qui ne fait pas bouillir la marmite.
C’est pas l’béguin qui fait bouillir la soupe.J’te vas coller un pain.(Argot des souteneurs).
AVOIR SON PAIN CUIT: Mourir (Argot des boulangers).
AVOIR QUELQU’UN DANS LE SANG: Aimer violemment (Argot dos filles).
AVOIR UN POLICHINELLE DANS LE TIROIR: V. Avaler le pépin.
AVOIR UN POT DE CHAMBRE CASSÉ DANS L’ESTOMAC: V. Trouilloter de la hurlette.
AVOIR UNE CAROTTE DANS LE PLOMB: V. ci-dessus.
AVOIR SON COMPTE: Être pochard.
Avoir reçu une formidable volée dans une bataille (Argot du peuple).
AVOIR UN PALETOT SANS MANCHES: Être cloué dans un cercueil (Argot du peuple).
AVOIR VU PÉTER LE LOUP SUR UNE PIERRE DE BOIS: Les Lyonnais emploient cette expression pour dire qu’une fille a perdu tout droit à la fleur d’oranger (Argot du peuple). N.
AVORTON: Être difforme, petit adversaire (Argot du peuple).
AZOR: V. As de carreau.
B
BABANQUER: Vivre.
Synonyme de bien banqueter (Argot des voleurs). N.
BABILLARD: Aumônier de prison.
Allusion à ce qu’il babillarde sans cesse sans que son interlocuteur lui réponde (Argot des voleurs). N.
BABILLARD: Livre imprimé.
On dit aussi: bavard (Argot des voleurs).
BABILLARDE: Montre.
Allusion à son tic-tac qui malgré sa monotonie babille et égaie la solitude (Argot des voleurs).
BABILLARDE: Lettre.
—T’en fais du chi-chi dans ta menteuse de babillarde (Argot des voleurs).
BABILLARDER: Écrire (Argot des voleurs).
BABILLEUSE (la): Bibliothèque.
Allusion aux livres babillards qu’elle contient (Argot des voleurs).
BÂCHE: Casquette.
Elle abrite la tête comme la bâche les voitures (Argot des voleurs).
BÂCHER: Se coucher (Argot des voleurs).
BACCANTE: Barbe, favoris.
Il en est qui écrivent: bocchantes, c’est l’orthographe que je donne qui est la bonne.
Pour favoris, on dit aussi: côtelettes (Argot des voleurs). N.
BACCON: Cochon (Argot des voleurs).
BACLER: Faire vite, à la hâte une chose qui demanderait à être soignée. Un maire pressé bacle un mariage, un médecin bacle un pansement, un auteur dramatique bacle une pièce.
Mot à mot bâcler: se dépêcher (Argot du peuple).
BADIGEONNER LA FEMME AU PUITS: Farder la vérité. On sait que la vérité sort nue d’un puits; la badigeonner c’est mentir (Argot des voleurs).
BAFOUILLER: S’embarquer dans un discours et mélanger les phrases de façon à les rendre incompréhensibles.
Vouloir faire le beau parleur et s’exprimer difficilement.
Dans le peuple on appelle celui qui bafouille un bafouilleur et on lui offre un démêloir (Argot du peuple).
BAFFRE: Un coup de poing sur la figure.
Dans le peuple, cette expression est remplacée par celle-ci:
—Je vais te coller un pain sur la gueule.
—Je vais te fourrer une bègne que tu n’en verras que du feu (Argot du peuple). N.
BAFFRER: Manger avec une grande avidité (Argot du peuple).
BAGATELLE (faire la): Faire l’amour.
Quand la maquilleuse de brèmes tire les cartes à une jeune fille et que l’as de pique sort, elle lui annonce qu’elle fera la bagatelle (Argot des filles).
BAGNOLE: Bouge, masure.
Se dit également d’une vieille voiture qui gémit sur ses ressorts rouillés et cahote le voyageur (Argot du peuple). N.
BAGUENAUDER: Flâner, errer par les chemins sans avoir un but déterminé.
Être longtemps sans ouvrage (Argot du peuple).
BAGNENAUDES: Poches.
Expression usitée chez les marbriers, surtout les samedis avant la paye.
—J’ai dix ronds qui se baladent dans mes baguenaudes, les mettons-nous dans le commerce? (chez le mastroquet voisin) (Argot du peuple).
BAIGNE DANS LE BEURRE:
On sait que le maquereau maître d’hôtel est appelé par les ménagères: la mort au beurre.
Rothschild aussi baigne dans le beurre, mais par la richesse (Argot du peuple).
BAIGNOIRE À BON DIEU: Le calice.
Cette figure peint bien l’hostie consacrée baignant dans le saint-ciboire (Argot des voleurs).
BAISER LE CUL DE LA VIEILLE: Joueur déveinard qui perd la partie sans marquer un point.
Dans le peuple on dit aussi: passer sous la table (Argot du peuple).
BAJOUES: La face.
Les voleurs emploient cette expression pour grimaces (Argot des voleurs).
BALANCÉ: Être renvoyé de sa place.
—J’ai balancé ma femme, elle était par trop rasante (Argot du peuple). N.
BALANCER SON RONDIN: Aller au cabinet.
Allusion à la forme ronde des excréments (Argot du peuple). N.
BALANCER SES ALÈNES: Quitter le métier de voleur.
Deux escarpes sont embusquées au coin d’une rue; de loin, ils voient passer un garçon de recettes, une lourde sacoche sur l’épaule.
—Quel dommage, dit l’un, que l’on ne puisse effaroucher son pognon. Je balancerai mes alènes et j’irai vivre honnête dans mon patelin (Argot des voleurs).
BALANÇON: Marteau.
Pour frapper vigoureusement il faut balancer son marteau par le manche (Argot des voleurs). N.
BALANCEUR DE BRAISE: Changeur.
Allusion à l’argent qui ne fait que passer par ses mains, il le balance aussi facilement qu’il le reçoit (Argot des voleurs). N.
BALANCEUR DE LAZAGNE: Écrire une lettre d’une prison et l’adresser à quelqu’un (Argot des voleurs). V. Arcasineur.
BALANCEUR DE TINETTES: Auxiliaîres des prisons qui vident les tinettes.
Quand elles sont pleines de mouscaille, elles sont lourdes; ils impriment un balancement pour les vider: Une, deux et trois.
C’est fait.
Les troupiers disent: Passer la jambe à Jules.
Quand la tinette déborde un loustic s’écrie:
—Prenez-la par les oreilles.
Dans le peuple on dit: Passer la jambe à Thomas (Argot du peuple).
BALANSTIQUER: Jeter.
C’est une amplification de balancer: se débarrasser de quelque chose qui gène, ou d’une personne dont on a assez (Argot des voleurs). N.
BALCON (Avoir du monde au): Femme qui possède des seins volumineux (Argot du peuple). V. Capitonnée.
BALLE: Cette femme me botte, elle fait ma balle (Argot du peuple). V. Blot.
BALLON: Prison.
Allusion à la forme sphérique de Mazas (Argot des voleurs). N.
BALLON: Postérieur copieux.
Je vais t’enlever le ballon, pour coup de pied dans le derrière (Argot du peuple).
BALUCHON: Petit paquet que les compagnons portaient jadis au bout d’un bâton sur l’épaule, en faisant leur tour de France.
Ce baluchon contenait leurs vêtements.
La coutume s’est perpétuée dans le peuple: des outils et la blouse de travail en paquet composent un baluchon (Argot du peuple).
BANC DE TERRE NEUVE: De la Bastille à la Madeleine, et de Belleville à Montparnasse, on y pêche la morue sans hameçons (Argot du peuple).
BANDE À L’AISE: N’en prendre qu’à son temps et n’en faire qu’à sa volonté.
Dans le peuple on emploie cette expression par ironie vis à vis d’un vieillard qui au lieu de remiser son fiacre court après les filles (Argot du peuple). N.
BANDE À PART (Faire): Fuir ses camarades d’atelier, aller boire et manger seul.
Synonyme d’ours (Argot du peuple).
BANDE SUR L’AFFICHE: Bande de papier que les directeurs font coller sur l’affiche, annonçant le spectacle du jour, afin d’indiquer au public un changement par suite de l’indisposition subite d’un artiste ou parfois relâche.
Se dit par analogie dans le peuple pour indiquer qu’une femme a son échéance de fin de mois.
Il y a une bande sur l’affiche pour relâche (Argot du peuple). N.
BANQUE (la grande): Baraque des grands forains dans le monde des saltimbanques qui a, comme partout, ses matadors et ses miséreux (Argot des saltimbanques).
BANQUE (la faire): Le samedi, les ouvriers typographes se partagent le prix du travail de la semaine (Argot d’imprimerie).
BANQUE: Les voleurs qui se partagent le produit d’un vol emploient cette expression (Argot des voleurs).
BANQUE (en tailler une): Tenir les cartes au jeu de baccara.
Mot à mot: Être le banquier (Argot des joueurs).
BANQUETTE: Le menton.
Allusion à ce qu’il avance sur le visage (Argot du peuple). N.
BANQUISTE: Charlatan.
Tous ceux qui fardent la vérité sont des banquistes, à quelque classe de la société qu’ils appartiennent.
Tous les banquistes ne sont pas sur des tréteaux (Argot du peuple).
BANNIÈRE: Sac.
On dit de celui qui se promène en chemise: il se trimballe en bannière.
Allusion aux pans de la chemise qui flottent au vent.
On dit aussi: Se promener en panais (Argot du peuple).
BAPTÊME: La tête.
Le mastroquet baptise son vin.
Le peuple, qui a horreur de l’eau, dit des vins baptisés: Ils sont chrétiens.
Le buveur fait sa tête. (Argot du peuple). N.
BAPTISÉ D’EAU DE MORUE: Ne pas avoir de chance.
Homme ou femme à qui rien ne peut réussir.
Ce qui équivaut à déveine salée, par allusion à l’eau dans laquelle la morue a été dessalée (Argot du peuple). N.
BAPTISÉ AU SÉCATEUR: Juif.
Allusion à l’opération de la circoncision que subissent les nouveaux-nés suivant le rite juif (Argot du peuple). N.
BAQUET: Blanchisseuse.
On dit aussi: Baquet insolent. On sait que ces dames ne mâchent pas leurs paroles.
Quand une ménagère, par économie, va laver son linge au lavoir, les professionnelles l’appellent: graillonneuse ou noyeuse d’étrons. Ce sont les plus mignonnes de leurs déjections (Argot du peuple).
BARAQUE: Maison construite en plâtre, en torchis, provisoirement.
Maison où la patronne va par défiance au marché avec sa bonne.
Maison où l’on enferme le vin et les liqueurs.
Maison où l’on chipote sur tout, où l’on rogne même la nourriture.
—Tenez, voilà mon tablier, je n’en veux plus de votre baraque, j’en ai plein le dos (Argot du peuple).
BARRAQUE: Jeu de hasard.
Ce jeu se joue sur un billard ordinaire avec un appareil spécial. Un joueur tient la queue, les parieurs sont divisés an deux camps; il s’agit de mettre une bille désignée dans une des cavités de l’appareil.
La barraque est un jeu prohibé parce que l’on peut avec habileté voler facilement (Argot des joueurs). N.
BARBAQUE: Viande (Argot des voleurs). V. Bidoche.
BARBAUTIERS: Gardiens de prison.
Cette expression vient-elle de ce qu’ils sont chargés de garder les barbotteurs?
Vient-elle de ce qu’ils barbottent les prisonniers confiés à leur garde? (Argot des voleurs). N.
BARBE: Beau mâle, gars solide.
—Mon homme est un rude barbe.
Il y a des barbes qui, dans certains quartiers, sont en réputation comme autrefois les terreurs (Argot des filles et des souteneurs).
BARBE: Vieux.
Par corruption on dit: birbe.
On appelle les vieux de 1848 qui survivent: des vieilles barbes (Argot du peuple).
BARBE (en prendre une): Se pocharder.
Dans les imprimeries quand un camarade a pris une barbe, on dit aussi qu’il était chargé à cul.
Allusion au cheval qui ne peut pas avancer quand sa charge est trop lourde (Argot d’imprimerie).
BARBICHON: Capucin.
Allusion à ce que ces religieux laissent croître leur barbe (Argot des voleurs). N.
BARBILLON: Souteneur.
Diminutif de brochet, quoiqu’ils soient aussi voraces l’un que l’autre pour dévorer la recette de la marmite (Argot des souteneurs).
BARBILLON DE BEAUCE: Légumes.
Les voleurs disent également: barbillon de Varenne pour navet.
Cette dernière expression est des plus anciennes; on lit en effet dans le dictionnaire d’Olivier Chéreau: barbillons de Varanne (Argot des voleurs).
BARBISE: Apprenti souteneur.
Il en existe qui n’ont pas quinze ans et qui macrotent déjà les petites bouquetières, quelquefois leurs sœurs (Argot des souteneurs). N.
BARBISET: Diminutif de barbe.
Plus jeune et moins en faveur (Argot des voleurs). N.
BARBOTS: Voleurs.
La romance du pègre dit:
Pègres et barbots, rappliquez au SauvageEt sans traquer livrez vous au plaisir.On aurait tort de vouloir être sagePuisqu’après tout on sait qu’il faut mourir.(Argot des voleurs).
BARBOTTER: Fouiller les poches de quelqu’un.
C’est une spécialité qui demande une certaine adresse.
La ménagère souvent la nuit, pendant que son mari sommeille, pratique, sans mandat, une visite domiciliaire dans les poches du dormeur (Argot du peuple).
BARBOTTIER: Canapé (Argot des voleurs). N.
BARBUE: Plume.
Allusion à la barbe des anciennes plumes d’oie (Argot des voleurs).
BARON DE LA CRASSE: Individu malpropre, sale, puant, dégoûtant, ne se débarbouillant, suivant une vieille expression, que lorsqu’il pleut (Argot du peuple).
BARRE: Aiguille (Argot des voleurs). N.
BARRÉ: Taisez-vous, en voilà assez.
Fermez çà, barré.
Barrée (la rue est). Elle l’est, en effet, pour ceux qui n’y peuvent passer à cause d’un créancier récalcitrant.
On dit aussi: on pave (Argot du peuple).
BARRÉ (Être): Individu bouché, crédule, ignorant, qui comprend difficilement.
Mot à mot: il a la cervelle barrée (Argot du peuple).
BARRÉE (La): Échelle.
Allusion aux échelons qui forment barreaux (Argot des voleurs). V. Montante.
BAS PERÇÉ: Être à fond de cale, à bout de ressources.
Allusion aux bas percés qui indiquent la misère (Argot du peuple). V. Lac.
BASANE: Peau.
Les tabliers des forgerons se nomment basane (Argot du peuple).
BASCULE: La guillotine.
Allusion à la planche qui bascule pour pousser le condamné sous la lunette (Argot des voleurs).
BASCULES: Épaules (Argot des voleurs). V. Porte turbin. N.
BAS DU CUL: Petite femme.
Dans le peuple, pour bien caractériser sa petitesse, on dit: quand elle pète elle fait des ronds dans le sable. (Argot du peuple).
BAS DE BUFFET: Injure à l’adresse des vieilles femmes prétentieuses qui se maquillent outrageusement.
Pour accentuer on dit: vieux bas de buffet (Argot du peuple).
BASARDER: Vendre.
—Je basarde mes frusques, mon mobilier.
Basarder veut dire aussi renvoyer:
—Je basarde ma maîtresse (Argot du peuple).
BASTRINGUE: Bal de bas étage où se donne rendez-vous la canaille du quartier dans lequel il est situé.
Bastringue, faire du bruit, du tapage.
Quand l’homme rentre au logis, un peu humecté et qu’il casse la vaisselle, la ménagère, furieuse, lui dit:
—T’as pas bientôt fini ton bastringue, sale chameau? (Argot du peuple).
BASSE (La): La terre.
Pour qualifier un fainéant qui ne veut pas travailler on dit: il a les côtes en long, ce qui l’empêche de se baisser.
La terre est trop basse (Argot du peuple). N.
BASSIN: Insipide, ennuyeux (Argot du peuple). V. Bassinoire.
BASSINOIRE: Individu qui répète cent fois la même chose pour ne rien dire (Argot du peuple).
BATACLAN: Outils de malfaiteurs (Argot des voleurs). V. Agobilles.
BATACLAN: Mobilier.
Les jours de terme les ouvriers disent:
—Nous déménageons le bataclan, ou bien: nous enlevons le Saint-Frusquin (Argot du peuple).
BATAILLE DES JÉSUITES: Habitudes de masturbation.
Dans les ateliers, quand un apprenti reste trop longtemps au cabinet, un ouvrier dit à un autre apprenti:
—Vas donc voir s’il ne se fait pas sauter la cervelle.
L’allusion est transparente (Argot du peuple).
BATH AU PIEU: Femme qui a des qualités extraordinaires au lit (pieu).
Terme employé par les passionnés qui, généralement, s’y connaissent (Argot des souteneurs).
BATH AUX POMMES: Tout ce qu’il y a de mieux, le nec plus ultra en toutes choses (Argot du peuple).
BATIF ou BATIVE: Beau tout ce qu’il y a d’admirable, de supérieur, de merveilleux.
—J’ai un homme, y en a pas de pareil, il est bath (Argot des filles).
BÂTIR SUR LE DEVANT: Être enceinte.
—L’allusion est facile à saisir (Argot du peuple). V. Avaler le pépin.
BÂTON: Juge de paix (Argot des voleurs). N.
BATOUSE: Toile neuve, de batousier (tisserand):
—J’ai une rouillarde en batouse toute battante (neuve) (Argot des voleurs). V. Rouillarde.
BATOUSIER: Voleur de toile ou de linge que les blanchisseurs de la campagne font sécher dans les prairies ou sur les haies (Argot des voleurs).
BATTAGE: Se moquer de quelqu’un, dire ce que l’on ne pense pas.
—C’est du battage il n’est pas plus malade que moi (Argot du peuple).
BATTANT: Le cœur (Argot des voleurs). V. Grand ressort.
BATTANT: L’estomac.
—J’ai le ventre creux, rien a me coller dans le battant (Argot du peuple).
BATTANT, BATTANTE: Chose neuve.
On dit dans le peuple à tout bout de champ:
—Elle est battante, neuve. C’est un double emploi (Argot du peuple). N.
BATTANCOURT: Soulier (Argot des voleurs). V. Ripatons.
BATTANDIER: Mendier (Argot des voleurs). V. Aller à la chasse avec un fusil de toile.
BATTOIRS: Les mains, allusion au bruit que font les blanchisseuses avec leur battoir; quand les claqueurs applaudissent trop bruyamment, les voyous logés au poulailler crient: Remisez donc vos battoirs (Argot du peuple).
BATTRE UNE BASANE: Geste familier aux gamins qui se frappent la cuisse du revers de la main droite.
Ce geste veux dire: Merde (Argot du peuple).
BATTRE LE BRIQUET: Frotter en marchant les deux jambes de son pantalon l’une contre l’autre (Argot du peuple).
BATTRE LA COUVERTURE: Ne savoir que faire et rester couché toute la journée (Argot des troupiers).
BATTRE LE JOB: V. Battre comtois.
BATTRE COMTOIS: Un compère bat comtois en demandant un gant devant une baraque de lutteur.
Les spectateurs le prennent pour un adversaire sérieux; dans l’arène il se laisse tomber.
Un accusé bat comtois en feignant de ne pas comprendre les questions du juge d’instruction.
Une femme bat comtois lorsqu’elle vient de coucher avec son amant et qu’elle jure à son mari en rentrant qu’elle lui est fidèle (Argot du peuple).
BATTRE ENTIFFE: Faire le niais, l’imbécile.
—Tu battras entiffe quand le quart te demandera comment tu as rousti la tocante à ta dabe (Argot des voleurs).
BATTRE LA SEMELLE: Dans les grands froids les troupiers battent la semelle pour se réchauffer les pieds, soit qu’ils frappent sur le sol, soit qu’ils frappent en cadence semelles contre semelles (Argot des troupiers).
BATTRE LA SEMELLE: Arpenter le trottoir, faire les cent pas en attendant quelqu’un (Argot du peuple).
BATTRE LA SEMELLE: Se dit d’une femme sans homme qui, à l’instar de certain photographe, opère elle même.
Elle bat la semelle mais ne frappe pas aussi fort que le cordonnier sur son pavé (Argot du peuple). N.
BATTRE DE LA FAUSSE MONNAIE: Battre sa femme (Argot du peuple). N.
BATTRE UN DIG-DIG: Simuler une fausse attaque d’épilepsie sur la voie publique.
L’homme qui pratique ce truc pour donner à l’attaque simulée l’apparence de la vérité, se met préalablement dans la bouche un morceau de savon. En le mâchonnant le savon mousse et lui amène l’écume aux lèvres comme si l’attaque était naturelle.
Les batteurs de dig-dig font souvent de fortes recettes (Argot des voleurs).
BAUCE ou BAUSSE: Patron. Dans toutes les chapelleries de France on emploie ce terme (Argot des chapeliers).
BAVASSER: Personnage qui ne sait ce qu’il dit, qui bavasse à tort et à travers.
Mot à mot baver des paroles vides de sens (Argot du peuple). N.
BAVAROISE AU LARD: Absinthe épaisse à couper au couteau (Argot du peuple). N.
BAVER DES CLIGNOTS: Pleurer.
Le peuple plus expressif dit: chier des chasses (Argot du peuple). V. ce mot.
BEC DE GAZ: Sergent de ville.
Il éclaire les malfaiteurs quand il n’est pas chez le marchand de vins en train d’étouffer un glacis (Argot des souteneurs). N.
BEC DE GAZ: À la manille aux enchères, quand le joueur auquel le point est adjugé rencontre un jeu sur lequel il ne comptait pas dans les mains d’un de ses adversaires, il dit: J’ai rencontré un bec de gaz (Argot du peuple). N.
BÉCANE: Mauvaise machine à vapeur rafistolée par les Auvergnats de la rue de Lappe, qui marche comme une montre réparée par un charron (Argot du peuple). V. Seringue.
BÉCHER EN DOUCE: Blaguer un ami doucettement mais lui dire de dures vérités sous des apparences de bonhomie (Argot du peuple).
BÉCHEUR: Avocat général.
Il bèche le prévenu pour le faire condamner quand même.
Pour l’avocat bécheur il n’y a pas d’innocents.
Ou le bécheur commence à jaspiner.(Argot des voleurs).
BÉCOT: Bouche, baiser.
—Mon petit homme, donne-moi un bécot.
Embrasse-moi (Argot des filles).
BÉCOTTER: Embrasser.
—C’est dégoûtant! Ces jeunes mariés se bécottent toute la journée (Argot du peuple).
BECQUETER: Manger.
—J’ai encore cent ronds à becqueter. Viens-tu manger une friture à Auteuil (Argot du peuple).
BEDON: Gros ventre.
En Normandie on dit bedolle pour bedon (Argot du peuple).
BEFFEUR (C’est un): homme qui fait des dupes.
Homme d’affaires marron.
Ses clients le sont plus souvent que lui (Argot des voleurs).
BÉGUIN: Petit serre-tête en toile que l’on met sur la tête des enfants nouveau-nés (Argot des nourrices). V. Avoir un béguin.
BÉGUIN CARABINÉ: Avoir un amour de première force auquel il est impossible de résister (Argot du peuple). N.
BELETTE: V. Blanchisseuse.
BELLE (faire la): Jouer une troisième partie qui décidera quel sera le vainqueur des deux adversaires ayant perdu chacun une manche (Argot du peuple).
BELLE DE NUIT: Fille publique déjà vieille qui raccroche la nuit parce que la nuit tous les chats sont gris.
Cette expression est ancienne. Vers 1850, on chantait dans une revue intitulée: Vive la Joie et les Pommes de terre représentée aux Folies-Dramatiques, à l’ancien boulevard du Temple.
‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧ ‧Tous les soirs l’amateur contempleLes belles de nuit qui s’font voir,Sur le boulevard du Temple.(Argot du peuple).
BÉNISSEUR: Homme qui trouve toujours tout très bien et n’a jamais une parole amère pour personne.
Le critique H. de Lapommeraye fut et restera le plus illustre bénisseur du siècle (Argot du peuple).
BENOIT: Maquereau.
Benoit, dans le langage populaire, est synonyme d’imbécile, de niais, n’en déplaise à ceux qui portent ce nom.
Il veut dire aussi maquereau, dans le monde des filles (Argot des souteneurs). N.
BÉQUILLARDS (Les): Vieillards infirmes et mendiants que la police arrête quotidiennement et qu’elle est forcée de relâcher faute de délit.
Ainsi nommés parce qu’ils ont des béquilles ou qu’ils boitent s’appuyant sur une canne (Argot des voleurs). N.
BERDOUILLE: Ventre.
—Que boulottes-tu donc, mon vieux, pour avoir une sacrée berdouille comme ça?
On dit aussi bedaine (Argot du peuple).
BERGE: Brigadier.
Pour distinguer un sous-ordre, on ne dit pas un sous-brigadier, mais par abréviation un S. B. (Argot des agents de police). N.
BERGE: Année.
—Je tire cinq berges à la Centrousse de Melun (Argot des voleurs).
BERGERONNETTE: Année.
Diminutif de berge (Argot des voleurs).
BÉQUILLER: Manger (Argot des voleurs). V. Becqueter.
BERLINE: Couverture (Argot des voleurs). N.
BERLINE DE COMMERCE: Commis-voyageur (Argot des voleurs).
BERNIQUE: Non. Je ne veux pas.
On dit aussi Bernique Sansonnet (Argot du peuple). V. Brenicle.
BESSONS: Les deux seins (Argot des voleurs).
BERTELO: Un franc (Argot des voleurs).
BÉTA: Niais, crétin, superlatif d’imbécile (Argot du peuple).
BÉTASSE: Mou, flasque (Argot du peuple).
BÊTE A CHAGRIN: Une femme légitime.
Quand elle est acariâtre, et elle l’est souvent par les nécessités de la vie, on lui donne ce nom peu aimable (Argot du peuple). N.
BÊTE A BON DIEU: V. Bête à pain.
BÊTE A CORNES: Fourchette (Argot des voleurs). N.
BÊTE A PAIN: Homme bon et simple.
Mot à mot: bon comme du bon pain (Argot du peuple).
BÉTINET: Queue rouge.
Le peuple donne ce nom aux paillasses qui font le boniment sur les places publiques ou devant les baraques de saltimbanques pour amasser la foule.
L’un d’eux fut célèbre sous le nom de Bétinet, de 1840 à 1850, sur la place de la Bastille. Il était renommé pour ses bêtises stupéfiantes (Argot du peuple).
BEUGLANT: Café chantant où les spectateurs chantent en chœur avec les artistes.
Les deux plus célèbres furent le Beuglant de la rue Contrescarpe et le Divan japonais de Jehan Sarrazin (Argot du peuple).
BEUGLER: Enfant qui crie à en perdre haleine.
—As-tu fini de beugler, horrible crapaud (Argot du peuple).
BEURRE DANS LES ÉPINARDS (en avoir ou en mettre): Bourgeois qui augmente sa fortune par tous les moyens possibles.
On sait que les cuisiniers appellent les épinards la mort au beurre, parce qu’ils en absorbent considérablement.
L’allusion est facile à comprendre (Argot du peuple).
BIBASSE: Vieille femme.
Arrivée à un certain âge, la femme c’est comme les vieux souliers, ça boit; elle bibasse dans les bars (Argot du peuple).
BIBASSON, BIBASSIER: Vieillard (Argot du peuple). V. Birbe.
BIBERON: Pochard qui boit comme une éponge, sans soif.
Mot à mot: il tète ou suce tous les liquides possibles (Argot du peuple). V. Suce-Canelle.
BIBI: Instrument de cambrioleur (Argot des voleurs). V. Tâteuse.
BIBINE: Assommoir de bas étage, où tous les liquides les plus étranges, comme jadis à la bibine du Lapin blanc, chez le père Mauras, sont servis aux consommateurs (Argot du peuple). V. Assommoir.
BICHER: Ça prend, ça mord.
Dupe qui, comme le poisson, mord à l’hameçon (Argot des gens d’affaires et des pêcheurs).
BICHET: Mensonge (Argot des voleurs).
BICHON: Petit chien à tout faire.
Cet animal est fort affectionné des dames d’un certain monde qui évitent avec lui les accidents et les maladies de neuf mois (Argot des filles).
BICHON: Outil de chapelier.
C’est une sorte de petit tampon de soie ou de velours qui sert à bichonner les chapeaux de soie et à leur donner le coup de fion (Argot des chapeliers).
BICHONNER (se): Homme qui a grand soin de lui-même et qui se bichonne comme une petite maîtresse (Argot du peuple). V. Pommadin.
BICHONNET: Menton.
Ce mot exprime bien l’habitude qu’ont certaines gens de se passer à tout moment la main sur le menton pour se bichonner (se caresser) (Argot du peuple). V. Banquette.
BICLER: Pour cligner de l’œil.
Bicler est une très vieille expression (Argot des voleurs) V. Guigne à gauche.
BIDARD: Heureux, veinard.
C’est un nommé Bidard qui gagna un gros lot à une loterie quelconque.
On en fit une chanson qui courut les rues:
Le père Bidard, la mère Bidard, etc. Depuis ce temps, les chançards sont des Bidards (Argot du peuple). N.
BIDET: Vase intime que l’on rencontre dans les cabinets de toilette un peu chics.
Bidet, ainsi nommé par allusion au bidet sur lequel monte le cavalier: madame se met à cheval dessus, et généralement l’eau ne pourrait servir qu’à faire du Thé de la Caravane (Argot des filles). N.
BIDET: La ficelle qui sert aux prisonniers pour se transmettre leurs correspondances d’étages en étages.
Allusion au bidet de poste (Argot des voleurs). V. Postillon.
BIDOCHE: Viande.
Cette expression est connue depuis 1830.
Le nom de la mère Bidoche avait été donné à la marchande de soupe qui tenait le restaurant des Pieds humides à l’ancien marché des Innocents, aux Halles.
Le mot est resté dans le peuple, qui dit aussi quand la bidoche est trop dure: c’est de la carne (Argot du peuple).
BIDON: Ventre.
Corruption de bedon; on dit aussi bidouard.
S’emplir le bidon chez le mastroquet: boire (Argot du peuple).
BIFFARD: Bourgeois (Argot des voleurs).
BEEFSTEACK À CORBEAU: Vieille fille publique qui a servi de litière à tout un régiment de cuirassiers (Argot du peuple). N.
BEEFSTEACK À MACQUART:
Macquart est l’équarrisseur qui a la spécialité d’abattre les vieux chevaux, les carnes hors de service (Argot du peuple).
BIFFIN: Chiffonnier.
Ainsi dénommé par le peuple à cause de son crochet qui lui sert à deux fins: à se défendre et à travailler.
Depuis 1848, on dit d’un chiffonnier qu’il est membre du comité de recherches.
Allusion à ce qu’il fouille dans les tas d’ordures pour y trouver sa vie (Argot du peuple).
BIFFETON: Billet.
Quelques-uns écrivent Buffeton, c’est une erreur (Argot des camelots).
BIJOUTIER SUR LE GENOU: Savetier.
Allusion aux clous nommés bijoux avec lesquels il ferre les semelles des souliers (Argot du peuple). V. Gniaff.
BILBOQUET: grosse femme.
Il paraît pourtant impossible de jongler avec elle.
C’est sans doute par allusion à la boule du bilboquet (Argot des voleurs).
BILLANCER: Condamné qui a fait sa prison.
C’est la corruption de billancher, payer; en effet, le prisonnier qui a fait sa prison a payé sa dette (Argot des voleurs). N.
BILLANCHER: Payer.
—C’est dégoûtant, il faut toujours billancher (Argot du peuple).
BILLER: Diminutif de billancher.
Même signification (Argot du peuple).
BILLET DE LOGEMENT: Quand les filles vont à Montretout (la visite sanitaire), si elles sont malades, elles sont retenues et dirigées sur l’infirmerie de Saint-Lazare; le médecin inscrit la nature de la maladie sur un bulletin dont la couleur varie suivant la gravité du cas.
Une fois installées dans leur lit, le bulletin est placé à la tête du lit dans un petit cadre spécial.
De là le nom de billet de logement (Argot des filles). N.
BINELLE: Faillite.
—Il est tombé en binelle, mais si les Anglais se tapent, il a carré l’oseille (Argot des voleurs). N.
BIRBE: Vieillard (Argot du peuple).
BIRIBI (dés): Ce jeu se joue dans les foires et dans les fêtes publiques. C’est un vol audacieux. (Argot des camelots).
BISOT: Ami (Argot des voleurs). V. Aminches.
BISTOURNE: Cor de chasse.
Allusion à la forme tournée de l’instrument (Argot du peuple).
BISTRO: Marchand de vins.
On dit aussi des petits commis des magasins de nouveautés qu’ils sont des bistros (Argot du peuple).
BITURE (s’en flanquer une): Se saouler comme un cochon (Argot du peuple).
BLAIRE: Nez.
Cette expression est en usage depuis plus de cinquante ans dans les faubourgs, où les terreurs à la sortie des bals publics se bouffaient le blaire (Argot des souteneurs).
BLANCHETTE: Hiver.
Allusion à la neige et au givre qui couvre les rues et les toits d’une nappe blanche (Argot des voleurs). N.
BLANCHISSEUSE: Pièce de cinquante centimes (Argot des voleurs). N.
BLANCHISSEUR: Avocat.
Ce mot date du procès du fameux empoisonneur Conty de Lapommerais.
Dans les couloirs du palais, avant l’audience des assises, on discutait la condamnation ou l’acquittement; la majorité des avocats étaient d’avis qu’il serait acquitté parce que Lachaud blanchit.
Lachaud était le défenseur de Lapommerais.
Les voleurs se souviennent du calembour (Argot des voleurs). N.
BLANCHISSEUSE DE TUYAUX DE PIPES: Blanchisseuse qui ne blanchit jamais rien, elle n’a que l’apparence.
Elle habite généralement aux environs des hôtels, pour avoir la clientèle des commis-voyageurs qui désirent être servis à la minute (Argot du peuple).
BLANCHOUILLARDE: Hiver.
Diminutif de blanchette (Argot des voleurs).
BLAGUE À TABAC: Vieilles tétasses molles et flasques qui tombent outrageusement (Argot du peuple).
BLANQUETTE: Argenterie (Argot des voleurs). N.
BLAVE: La cravate (Argot des voleurs). N.
BLAVIN: Mouchoir.
Une vieille chanson dit:
Le parrain care sa frime dans son blavin.(Argot des voleurs). V. Aniterge.
BLAVINISTE: Voleur qui a la spécialité de faire le blavin (Mouchoir) (Argot des voleurs).
BLAZE: Numéro (Argot des voleurs). N.
BLÉ: Argent monnayé (Argot des voleurs). V. Aubert.
BLÉCHARD: Laid, disgrâcié de la nature.
Dans les faubourgs on dit d’une femme dans ce cas:
—Elle est rien blèche (Argot du peuple).
BLÉCHARDE: C’est le superlatif de bléchard.
Pour bien accentuer on ajoute qu’elle a une gueule à faire tourner la soupe au lait (Argot du peuple).
BLEU (Passer au bleu): Faire disparaître un objet quelconque.
Le samedi de paye quand l’ouvrier care un peu de galtouze, la ménagère dit:
—Mon vieux tu m’as fait passer cent sous au bleu (Argot du peuple).
BLEU: Jeune soldat.
Se dit de tous les hommes qui arrivent au régiment.
Ils sont bleu jusqu’à ce qu’ils soient passés à l’école de peloton (Argot des troupiers).
BLEU (J’en suis): Être étonné, ne rien comprendre, en rester ébahi (Argot du peuple).
BLEU (N’y voir que du): Être volé sans s’en apercevoir (Argot du peuple).
BLEUET: Billet de banque.
Allusion à la couleur bleue des précieux papiers (Argot des voleurs). V. Talbin d’altèque.
BLOKAUS: Chapeau haut de forme (Argot du peuple). V. Bloum.
BLOUM: Même signification que précédemment (Argot du peuple).
BLOT (C’est mon blot):
J’ai ce que je désire, elle fait bien mon blot.
Ça fait le blot, ça fait le compte (Argot du peuple). V. Balle. N.
BOBÉCHON (Se monter le): On dit aussi se monter le bourrichon.
Croire qu’une chose fausse est vraie et prendre un désir pour une réalité (Argot du peuple). N.
BOBINE: Tête (Argot du peuple). V. Tronche.
BOBINCHE: L’ancien théâtre Bobino.
Les étudiants disaient Bobinsky (Argot des étudiants).
BOBINO: Montre (Argot des voleurs). V. Babillarde.
BOBINO EN JONC: Montre en or (Argot des voleurs).
BOBINO EN PLÂTRE: Montre en argent (Argot des voleurs).
BOCARD: Maison de tolérance (Argot du peuple). V. Magasin de blanc.
BOCHE: Allemand (Argot du peuple). V. Alboche.
BOG EN JONC: Montre en or.
Quelques-uns écrivent bogues et baube, mais ce n’est pas exact (Argot des voleurs).
BOILARD: Le temps (Argot des voleurs).
BOIRE DU LAIT: Être content. Se réjouir du mal qui arrive à un ennemi (Argot du peuple).
BOIRE À LA GRANDE TASSE: Se jeter dans la Seine.
En effet, l’homme qui se noie peut boire à son aise, la tasse est assez large et assez profonde (Argot du peuple).
BOIT SANS SOIF: Ivrogne (Argot du peuple). V. Sac à vin.
BOÎTE (La grande): La préfecture de police (Argot des voleurs). V. Tour pointue.
BOÎTE À CORNES: Chapeau.
Allusion aux cocus qui y cachent leurs cornes (Argot du peuple).
BOÎTE À OUVRAGE: L’outil avec lequel les filles gagnent leur vie.
Quand l’une d’elles va au Dispensaire, elle dit qu’elle va faire voir sa boîte à ouvrage (Argot des filles). N.
BOÎTE AUX CAILLOUX: Prison où l’on couche sur la dure.
Allusion aux matelas qui sont rembourrés avec des noyaux de pêches (Argot des voleurs). N.
BOÎTE À DOMINO: Brancard couvert qui sert dans les hôpitaux à transporter les morts de leur lit à l’amphithéâtre.
Allusion de forme (Argot du peuple).
BOÎTE À DOMINOS: La bouche.
Allusion à la blancheur des dents et à leur forme qui ressemble aux dés (Argot du peuple).
BOÎTE À LAIT: Les seins.
L’allusion est jolie. Les seins d’une jolie femme sont certainement des boîtes à lait à même lesquelles on voudrait boire (Argot des voleurs). N.
BOÎTE À PANDORE: C’est une boîte ronde qui a la forme exacte d’une montre ordinaire. Elle contient une cire molle très malléable préparée pour prendre les empreintes des serrures des maisons marquées pour être dévalisées.
Ce travail est fait par les larbiniers qui préparent la besogne des cambrioleurs (Argot des voleurs).
BOÎTE À PANTES: Maison de tolérance.
Cette expression n’est pas juste; il n’est pas nécessaire d’être un pante, c’est-à-dire un imbécile, pour s’offrir une satisfaction avec G. D. G. (Argot des voleurs). V. Bocard.
BOÎTE À SIGUES: Gilet.
Allusion aux poches qui servent à mettre des pièces de vingt francs (sigues)... quand on en a (Argot des voleurs). N.
BOÎTE À VÉROLE: Fille de barrières ou rôdeuse de casernes qui s’affranchit de la visite sanitaire et en fait d’eau ne connaît que l’eau d’aff (Argot du peuple).
BOÎTE À VIANDE: Cercueil.
Ce n’est pas une boîte de conserve (Argot des voleurs). N.
BOISSEAU: Chapeau haut de forme.
Allusion de forme et aussi à la grandeur de certains chapeaux qui, assurément, pourraient servir à mesurer des pommes de terre (Argot du peuple). V. Bloum.
BOITEUX D’UN CHASSE: Borgne.
Manchot eût été plus juste (Argot des voleurs). V. Caliborgne.
BOMBE: Mesure non classée qui contient environ un demi-litre de vin.
Quand un ouvrier en a bu un certain nombre, ses camarades disent: Il est en bombe.
Quand il rentre au logis, la ménagère fait une scène épouvantable; les voisins entendant le pétard disent: la bombe éclate, gare! (Argot du peuple). N.
BON À NIB: Paresseux.
Mot à mot: bon à rien (Argot des voleurs).
BONBON À LIQUEURS: Bouton qui suinte constamment une humeur liquide.
Individu qui a des écrouelles (Argot du peuple). N.
BONBONNIÈRE: Tonneau de vidange.
Allusion, sans doute, à ce qu’en l’ouvrant on prend une prise.
Dans le peuple on dit d’un vidangeur qu’il en prend plus avec son nez qu’avec une pelle (Argot du peuple).
BONBONNIÈRE À FILOUS: Omnibus.
Les voyageurs sont serrés, le vol à la tire est facile; il y a des voleurs qui n’ont que la spécialité de voler les morlingues en bonbonnière (Argot des voleurs). N.
BONDE: Prison Centrale.
Dans les prisons, le fromage réglementaire est le bondon, sorte de fromage rond qui se fabrique à Neufchâtel.
La portion, une moitié, se nomme un système.
Par corruption, on a fait bonde (Argot des voleurs).
BONNET À POIL: Le bonnet que portaient les grenadiers et les sapeurs.
Cette coiffure a été supprimée. On l’applique à un tout autre objet (Argot du peuple). V. As de pique. N.
BONNETEAU: Jeu des trois cartes.
Ce jeu ou plutôt ce vol s’exécute à Auteuil, Saint-Ouen et dans les wagons de chemin de fer.
M. Marcel Schwob, pour arriver à expliquer l’expression de bonneteur, dit qu’il faut passer par des intermédiaires: bonnet, bonneteur, lingerie.
Bonnet, dans les ateliers, signifie se réunir plusieurs pour former une coterie, résister au patron ou aux autres camarades.
Les bonneteurs sont généralement trois pour opérer: le bonneteur qui tient le jeu, l’engageur qui ponte pour allécher les naïfs, le nonneur qui est en gaffe pour avertir si la rousse dévale.
Ce trio forme donc bien un bonnet, et bonneteur en dérive tout naturellement, et il n’est nullement question de lingerie.
Bonnet et bonneteur sont deux expressions en circulation depuis plus de cinquante ans; Vidocq en parle dans ses Voleurs (Argot du peuple).
BONNET DE NUIT: Triste comme un bonnet de nuit.
Homme taciturne, mélancolique, dont la tristesse est communicative, sa présence dans une réunion jette un froid (Argot du peuple).
BONIMENT: Discours pour attirer la foule.
Forains, orateurs de réunions publiques, hommes politiques et autres sont de rudes bonimenteurs.
Quand un boniment est par trop fort, on dit dans le peuple: c’est un boniment à la graisse de chevaux de bois (Argot du peuple).
BONNIR: Parler.
On appelle le pître qui fait le boniment le bonnisseur (Argot des camelots).
BONNIR QUE PEAU: Être muet comme une carpe (Argot des voleurs).
BONJOURIER: Vol au bonjour.
Ce vol se pratique dans les chambres d’hôtels.
Le bonjourier monte lestement les escaliers comme s’il allait faire une visite, généralement le matin à l’heure à laquelle les gens dorment encore; il voit une clé sur la porte, il entre doucement. Si le dormeur s’éveille, il lui souhaite le bonjour et s’excuse de s’être trompé de porte; au cas contraire, il vole rapidement ce qui lui tombe sous la main et s’esquive.
Il y a six mois, on arrêta une bande de bonjouriers qui avaient la spécialité de voler les souliers des locataires.
Ils avaient sous le bras une serviette d’avocat gonflée de vieux journaux; ils les jetaient dans un coin du couloir et les remplaçaient par les bottines et les souliers (Argot des voleurs).
BOQUABELLE: La bouche (Argot des voleurs). V. Affamée.
BOUCAN: Bruit, tapage, chahut, scandale.
Un boucan s’organise pour empêcher un orateur de parler ou un acteur de remplir son rôle.
Les étudiants sont passés maîtres dans l’art d’organiser un boucan (Argot du peuple).
BOUCARD: Boutique (Argot des voleurs). V. Boutanche. N.
BOUCARDIER: Le petit pégriot qui s’introduit dans la boutique pour aider son complice à voler (Argot des voleurs). V. Raton.
BOUCHER: Chirurgien.
On dit aussi charcutier.
Il charcute les chairs du patient (Argot du peuple).
BOUCHON: Mauvaise gargote où l’on vend du vin sans raisin.
Allusion à l’usage ancien de placer comme enseigne, au-dessus de la porte d’entrée, une branche de sapin ou de houx; cela se nomme un bouchon (Argot du peuple).
BOUCHON DE PAILLE: Objets à vendre.
On place un bouchon de paille au collier ou à la queue d’un chien que l’on désire vendre.
On dit de certains individus dont la moralité est plus que douteuse: Ils ont un bouchon de paille à la conscience.
Mot à mot: elle est à vendre (Argot du peuple). N.
BOUCLER: Enfermer.
Dans les prisons, on boucle les prisonniers chaque soir dans leurs cellules.
On boucle la lourde (fermer la porte) (Argot des voleurs).
BOUDER AU TURBIN: Ouvrier qui cherche tous les moyens possibles pour ne pas travailler.
Fille publique qui ne veut plus turbiner pour son souteneur. Dans la fameuse chanson: Lamentations d’un souteneur, on lit:
Quoi? C’est éteint... Tu r’buttes au flanche,Y’a pu de trottinage à la clé,Des dattes pour que tu fass’la planche,L’anse de la marmite est cassé.Pour parer c’gnon qui m’met su’l’ sable,Comme ta peau n’veut plus qu’feignanter,J’vas me r’coller avec ta dabe,Qui ne r’foul’ pas pour turbiner.(Argot des souteneurs).
BOUDINOTS: Cuisses (Argot des voleurs). N.
BOUILLON DE ONZE HEURES: Dans le peuple, on est persuadé que l’on vous administre dans les hôpitaux un bouillon qui fait mourir.
Cette légende vient de ce qu’un malade à qui on donna un bouillon à onze heures mourut à midi.
Quand il arrive quelque chose de désagréable à quelqu’un, on lui dit :
—Comment, trouves-tu le bouillon? (Argot du peuple).
BOUIS-BOUIS: Endroit mal famé.
Se dit d’un café comme d’un théâtre de dernier ordre (Argot du peuple).
BOUFFARDE: Pipe.
Allusion à la bouffée de fumée que le fumeur tire par intervalles de sa pipe et lance dans le vide (Argot du peuple).
BOUFFE-TOUT: Il est des individus atteints de boulimie, qui mangent tout ce qui se présente.
Thomas l’Ours, le modèle bien connu de Montmartre, mangeait en guise de hors-d’œuvre huit livres de pain en buvant un seau de vin.
Les rapins racontent encore qu’un jour de famine Thomas l’Ours avait dévoré un poêle de faïence (Argot du peuple).
BOUFFER LA BOTTE: Amour platonique... faute de mieux (Argot du peuple).
BOUFFER SON CRAN: Ne pas être content, marronner.
On dit aussi: bouffer son bœuf (Argot d’imprimerie).
BOUFFER À L’AS: Dîner par cœur.
Même signification que passer à l’as, passer devant Chevet, regarder mais ne pas toucher (Argot du peuple).
BOUFFER DES BRIQUES À LA SAUCE AUX CAILLOUX: Se dit par ironie.
Mot à mot n’avoir rien à se mettre sous la dent (Argot du peuple). N.
BOUFFI: Noyé.
Allusion à l’eau qui gonfle la face de l’individu qui reste longtemps immergé (Argot du peuple).
BOUFFI: Être joufflu.
D’un vaniteux on dit qu’il est bouffi d’orgueil.
On dit aussi ironiquement: tu l’as dit bouffi, dans le sens de grosse bête. Bouffi est le synonyme (Argot du peuple).
BOUGE: Endroit infect.
Bouge vient certainement de bauge où les cochons se vautrent dans la boue et dans leurs excréments.
C’est dans les bouges que se réunissent les voleurs de bas étage (Argot des voleurs). V. Bagnole.
BOUGNAT: Charbonnier.
Il y a fort peu de temps que cette expression est en usage, depuis la liberté des marchands de vin (Argot du peuple). V. Auverpin.
BOUILLOTTE: La tête.
Dans le peuple pour exprimer que l’on a une forte migraine on dit: Ma cervelle bout.
Bouillotte est la conséquence (Argot du peuple). V. Tronche.
BOULE DE LOTO: Gros yeux presque à fleur de tête (Argot du peuple).
BOULE DE SON: Pain.
Ainsi nommé à cause de sa forme ronde et de sa couleur, car autrement il n’entre pas de son dans la confection du pain de munition, pas plus que dans celui qui se fabrique à la boulangerie centrale de Saint-Lazare pour les prisons de la Seine (Argot des voleurs).
BOULEAU: Travail.
Ce mot a pris naissance chez les sculpteurs sur bois, parce que tout morceau de bois à travailler est un bouleau.
Cette expression s’est étendue à tous les corps de métiers qui disent:
—Je cherche du bouleau (Argot du peuple). N.
BOULENDOS: Bossu.
On dit aussi: boscando. Dans le peuple par allusion à la gibbosité on dit également:
—Il a volé un pain.
—Il a un orgue de Barbarie dans le dos.
—Il a un durillon dans le dos.
Les troupiers disent d’un bossu:
—Il a le sac au dos (Argot du peuple).
BOULER: Envoyer promener quelqu’un.
Sabouler veut dire la même chose.
—Je l’ai salement saboulé ce pierrot-là (Argot du peuple).
BOULET: Femme légitime.
—Tu traînes toujours ton boulet mon vieux Boireau?
—Mon Dieu oui, elle ne veut pas crever.
—Fous-lui un lavement au verre pilé.
Boulet, allusion au forçat condamné aux travaux forcés qui en traînait un autrefois pendant la durée de sa peine (Argot du peuple). V. Paillasse.
BOULETTE: Commettre une erreur, se tromper.
—J’ai fait une rude boulette en me mariant.
—Quelle boulette j’ai faite en quittant ma place.
La dernière boulette est de mourir (Argot du peuple).
BOULETTES: Billes de billard.
Allusion à la forme ronde (Argot des voleurs). N.
BOULETTE: Mélange de chair à saucisse et de bœuf bouilli, haché menu.
Elles sont rondes, de là: boulette (Argot du peuple). V. Attignolles.
BOUL’MICHE: Abréviation de boulevard Saint-Michel (Argot des étudiants).
BOULIN: Perche de sapin qui sert au maçon pour construire ses échafaudages (Argot du peuple).
BOULINE: Cette expression désigne une vieille coutume en usage dans les petites fêtes locales.
Les camelots qui font ces fêtes sa cotisent pour produire une certaine somme elle est destinée à faire boire le garde-champêtre pour détourner sa surveillance ou à l’indemniser s’il y consent pendant qu’un des compères qui tient un jeu de hasard vole les paysans.
Bouliner, faire le tour de la bouline (Argot des camelots).
BOULOTTAGE: Nourriture (Argot du peuple).
BOULOTTE: Femme rondelette, grassouillette, bien en chair, ayant du monde devant et derrière (Argot du peuple). N.
BOULOTTER: Manger (Argot du peuple).
BOULOTTER: Faire ses petites affaires.
Quand ça va bien on dit: ça boulotte à la douce, comme le marchand de cerises.
On sait que ce dernier pour annoncer sa marchandise crie:
—À la douce, à la douce (Argot du peuple).
BOURBEUX: Paysan.
Allusion à ce que pendant la saison des pluies il est toujours couvert de boue (Argot des voleurs). V. Pétrousquin.
BOURSICOTIER: Agioteur qui boursicote des valeurs qui n’en ont pas.
Tripoteur, qui vend et achète des résidus au marché des pieds humides à tous les négociants qui, voulant faire une jolie faillite, achètent des valeurs tombées pour justifier de grosses pertes vis-à-vis du syndic (Argot des boursiers).
BOURDON: Fille qui fait le trottoir.
Cette expression vient de ce que les filles chantent sans cesse, ce qui produit aux oreilles des passants un bourdonnement semblable à celui du petit insecte que l’on nomme bourdon (Argot des souteneurs).
BOURGUIGNON: Le soleil.
Il fait mûrir les bons vins de Bourgogne (Argot des voleurs).
BOURRASQUE: Rafle faite par des agents.
—Ne vas pas ce soir au bistro, il y aura une bourrasque à cause du gonce estourbi par la Saucisse.
Bourrasque peint bien les agents arrivant sur les boulevards et les balayant comme une trombe, ou pénétrant dans une maison comme un ouragan (Argot des voleurs). N.
BOURRE-COQUIN: Haricots (Argot des voleurs).
BOURREUR DE PÈGRES: Le Code pénal.
Généralement les figures employées sont plus exactes; mieux vaudrait dire bourreur de bondes, car c’est d’après le Code que les prisons sont bourrées et non les pègres (Argot des voleurs).
BOURRIQUE: Indicateur (Argot des voleurs). N.
BOUTERNIÈRE (La): C’est une voleuse qui, dans les foires de villages, expose dans une vitrine nommée bouterne des bijoux véritables.
Les paysans, alléchés de courir la chance de gagner une montre en or pour deux sous, prennent des billets mais ils ne gagnent jamais.
Les dés sont plombés (Argot des voleurs).
BOUSCULADE (Vol à la): Ce vol est une variété du vol à l’esbrouffe.
Il y a quelques années, un facteur fut victime, place de la Bourse, du vol d’un pli chargé contenant quarante mille francs.
Ce vol est très commun (Argot des voleurs). V. Esbrouffe.
BOUSILLER: Flâner, gouaper. Mettre quinze jours sur un ouvrage où il en faudrait deux et ensuite le terminer rapidement avec une mal façon (Argot du peuple). V. Saboter.
BOUSILLEUR: Ouvrier qui bousille (Argot du peuple).
BOUT COUPÉ: Juif (Argot du peuple). V. Baptisé au sécateur.
BOU-CI BOU-LÀ: Deux numéros tête-bêche
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Argot du peuple).
BOUTANCHE: Boutique.
Quelques-uns disent que boutanche veut dire bouteille, c’est une erreur.
Boutanche veut dire boutique (Argot des voleurs). V. Boucard.
BOUTIQUE À SURPRISES: Maisons qui, en apparence, vendent des livres, des tableaux ou de la parfumerie et chez lesquelles l’acheteur trouve tout autre chose que la marchandise annoncée.
Ces maisons ne sont pas au coin du quai, on ne rend pas l’argent si le client n’est pas content (Argot des filles). N.
BOTTOCHE: Fusil (Argot des voleurs). N.
BOUSSOLE: Tête.
La tête, comme la boussole, dirige (Argot du peuple).
BOUTORD: Tabac à chiquer.
On sait que ce qui affecte le plus le prisonnier c’est la privation du tabac.
Une chanson célèbre dans les prisons centrales: Pour du tabac, dit ceci:
Pour du tabac, disait un pègre.Et pour trois ponces de Saint-Père,J’ai basardé ma viande hier.Et j’ai turbiné comme un nègrePour un petit bout de boutord.Je vends ma bonde et mon pain mêmeEt, bourreau de mon pauvre corps,Je suis doublement au systèmePour du tabac, pour du tabac.(Argot du peuple). N.
BOYAU: Il a toujours un boyau de vide pour soiffer (Argot du peuple). V. Poivrot.
BOXON: Maison de tolérance.
Maison mal famée, dit le sénateur Bérenger, sans doute parce qu’il y a de fort jolies femmes.
Question d’appréciation (Argot du peuple). V. Bocard.
BRACQUEMARD: Pennis. V. Paf. (Argot du peuple).
BRAISE: Argent.
Allusion à la braise du boulanger qui enflamme très vite le charbon ou le bois.
Donner de la braise à une fille c’est l’enflammer.
La braise passe vite dans les deux cas (Argot des filles).
BRANDILLANTE: Sonnette.
Par le mouvement que lui imprime le cordon, elle brandille (Argot de voleurs). N.
BRANCARDS: Jambes.
Elles traînent le corps.
Cette expression a donné naissance à une autre.
Se mettre dans les brancards.
La situation explique le fait, surtout si on ajoute d’une femme passionnée: elle rue dans les brancards (Argot des souteneurs). N.
BRANLEUSE DE GENDARMES: Allusion au fer à repasser qui porte ce nom.
Les blanchisseuses branlent pour repasser ce fer toute la journée (Argot des blanchisseuses).
BRASSEUR DE FAFFES: Fabricant de faux papiers à l’usage des filles de maisons et des voleurs (Argot des voleurs). V. Lopheur.
BREDOUILLE: Suivre une femme et ne pas réussir à la lever.
Aller à la chasse et revenir bredouille (n’avoir rien tué).
Aller chercher de l’argent et n’en pas recevoir.
Mot à mot, bredouille est le synonyme de rater (Argot du peuple).
BRÈME DE FOND: Pièce de cinq francs en argent. (Argot du peuple).
BRÈMES: Les cartes (Argot des filles).
BRÈME DE PATELINS: Cartes de pays.
Elles servent aux rabatteurs de sorgues pour se guider (Argot des voleurs).
BRÉMER: Jouer aux cartes (Argot des voleurs).
BRENICLE: Non.
C’est une corruption de bernique (Argot des voleurs). N.
BRICULE: Officier de paix (Argot des voleurs).
BRIDE: Chaîne de montre.
Elle bride le gilet (Argot des voleurs). V. Cordelettes.
BRIDOUX: Fou (Argot des voleurs).
BRIFFE: Pain (Argot des voleurs). V. Bricheton.
BRIFFER: Manger.
Vient de briffe (Argot du peuple).
BRIGEANT: Cheveux (Argot des voleurs). V. Alfa.
BRIGEANTE: Perruque.
On dit aussi réchauffante, en effet, elle préserve les cheveux du froid (Argot des voleurs). N.
BRIGNOLET: Pain (Argot du peuple). V. Bricheton.
BRILLARD: Pièce de vingt francs.
Elle brille (Argot des voleurs). V. Sigues.
BRINGUE: Grande femme haute en jambes.
Quand elle est mal ficelée mal habillée, c’est une bringue (Argot du peuple). V. Asperge montée.
BRISEURS: Bande noire.
Cette bande est composée de plusieurs Auvergnats qui achètent des marchandises neuves et qui les brisent pour les revendre ensuite à la ferraille comme marchandises d’occasion (Argot des voleurs).
BROCHET: Marlou, souteneur (Argot du peuple). V. Barbillon.
BROQUE: Un sou (Argot des voleurs).
BROQUILLE: Minutes (Argot des voleurs).
BROQUILLEURS: Les voleurs qui portent ce nom pratiquent le vol à l’étiquette.
Ce vol consiste à faire fabriquer des bagues en toc ornées de pierres fausses et à les substituer adroitement aux vraies dans les écrins que montrent les bijoutiers aux faux acheteurs (Argot des voleurs). N.
BROUILLÉ AVEC LE DIRECTEUR DE LA MONNAIE: N’avoir pas le sou (Argot du peuple). V. Les toiles se touchent.
BROUILLOTTE: La nuit (Argot des voleurs). V. Brunette.
BRÛLÉ: Affaire manquée.
Se dit plus communément d’un agent chargé d’une surveillance, lorsqu’il est éventé par le surveillé il est brûlé.
On brûle également une carte vue par les joueurs. (Argot des voleurs).
BRÛLE-GUEULE: Pipe dont le tuyau est très court.
En fumant, la pipe vous brûle la gueule (Argot du peuple). V. Bouffarde.
BRÛLER LE PÉGRIOT: Faire disparaître les traces d’un vol (Argot des voleurs).
BRÛLOTTE: Lanterne (Argot des voleurs).
BRUNETTE: La nuit (Argot des voleurs). V. Brouillotte. N.
BÛCHE: Imbécile.
Borné, bête, grossier comme une bûche.
Bûche: une figure, dame, roi ou valet, qui ne compte pas au jeu de baccara. (Argot des voleurs).
BÛCHER: Travailler.
—Je suis dans mon dur, je bûche ferme.
(Argot du peuple).
BÛCHER: Frapper fort, allusion au bûcheron.
Bûcher(se): Se battre avec acharnement.
Bûcher le bouleau: attaquer avec énergie une pièce de bois (Argot des sculpteurs). N.
BUREAU DES PIEDS: Salle du Dépôt de la Préfecture de Police où M. Bertillon fait passer les détenus à la mensuration pour reconnaître leur identité (Argot des voleurs). N.
BURETTE: Visage (Argot des voleurs). N.
BURLINGUE: Bureau.
J’ai été au burlingue du quart (Argot des voleurs).
BUQUER: Voleurs qui dévalisent dans les boutiques sous le prétexte de demander de la monnaie (Argot des voleurs).
BUTTE (Monter à la): Quand l’échafaud avait treize marches, cette expression était juste, aujourd’hui qu’il est de plein-pied, elle n’a plus de raison d’être (Argot des voleurs).
BUTTER: Tuer (Argot des voleurs).
C
ÇÀ (Il a de): Se dit de quelqu’un qui possède beaucoup d’argent.
Les filles, pour vanter les agréments d’un homme, disent: Il a de çà; mais ce n’est pas d’argent qu’il s’agit (Argot du peuple).
CABASSEUR: Cancanier ou cancanière. (Argot du peuple).
CABASSER: Bavarder sans cesse à tort et à travers (Argot du peuple).
CABESTAN: Officier de paix.
Il fait virer ses sous-ordres (Argot des voleurs). V. Bricule.
CABOCHE: Tête (Argot des voleurs).
CABOMBE: La chandelle.
Quelques-uns écrivent calombe ou calbombe; le vrai mot est cabombe (Argot du peuple).
CABOT: Chien (Argot du peuple). V. Alarmiste.
CABOT FERRÉ: Gendarme.
Allusion aux clous qui garnissent les semelles de bottes des gendarmes (Argot des voleurs). V. Hirondelle de potence.
CABOT: Chien du commissaire de police.
Par abréviation on dit simplement le cabot du quart (Argot du peuple).
CABRIOLET: Corde de boyau de chat, ou forte ficelle de fouet, terminée par deux chevilles.
Les gardes et les agents passent le cabriolet au poignet des prisonniers pour prévenir les évasions et empêcher les récalcitrants de se révolter.
(Argot des voleurs).
CABOULOT: Cabaret de bas étage.
Brasserie où les consommateurs sont servis par des femmes.
Caboulot n’est pas juste, on devrait dire maison tolérée.
Cette expression a pour berceau le quartier latin (Argot du peuple).
CACHALOT: Femme qui a des aptitudes spéciales.
Elle rend par le nez ce qu’elle a avalé par la bouche (Argot des filles). N.
CACHE-FRINGUES: Armoire (Argot des voleurs). N.
CACHET DE M. LE MAIRE: Tache à la chemise, derrière, ce qui indique l’oubli du papier traditionnel (Argot du peuple).
CADENNE: Chaîne de montre.
Quelques-uns écrivent cadelle, mais c’est bien cadenne, car on appelait ainsi la grande chaîne de forçats qui autrefois partaient de Bicètre pour les bagnes de Brest ou de Toulon.
Cette expression est restée (Argot des voleurs).
CADET: Le postérieur.
—Viens ici, bibi, que je torche ton petit cadet.
—Tu as une figure qui ressemble à mon cadet (Argot du peuple).
CADETS: Outils de voleurs (Argot des voleurs). V. Agobilles.
CADRAN SOLAIRE: Le derrière.
Allusion à sa forme ronde.
Cette expression vient du Pont cassé, pièce représentée au théâtre Séraphin, au Palais-Royal.
Nicolas, le comique de la troupe de marionnettes, répondait à l’officier, le jeune premier, qui lui demandait l’heure, en lui montrant son derrière.
En même temps il lui chantait:
Voilà le cadran solaire,Tire lire, lire....(Argot du peuple).
CAFARD: Individu qui affecte des dehors religieux.
Hypocrite qui n’en croit pas un traître mot et exploite la crédulité publique.
Cafard est employé comme terme de mépris (Argot du peuple). N.
CAFARD: Ouvrier qui, dans les ateliers, capte la confiance de ses camarades pour rapporter aux patrons ce qu’ils pensent et ce qu’ils disent (Argot du peuple). N.
CAFARDE: La lune (Argot des voleurs). V. Moucharde.
CAFARDER: Moucharder, dénoncer (Argot du peuple). N.
CAFIOT: Mauvais café fait avec de la chicorée ou avec des résidus de vieux marc de café déjà épuisés (Argot du peuple). V. Jus de chapeau.
CAILLOU: Tête.
Il a rien un sale caillou (Argot du peuple).
CAISSE D’ÉPARGNE: Le marchand de vin.
C’est là, en effet, que les ouvriers placent non seulement leurs économies, mais souvent l’argent de la paie (Argot du peuple). N.
CALANCHER: Mourir.
Pour indiquer qu’un objet n’est pas d’aplomb, on dit: il calanche (penche) à droite ou à gauche (Argot du peuple).
CALEBASSE: Seins.
Se dit quand les malheureux sont sans consistance, qu’ils pendent et se répandent (Argot du peuple).
CALÈCHE DU PRÉFET: Le panier à salade qui transporte les voleurs des postes de police au Dépôt de la préfecture (Argot des voleurs).
CALENDRINER SUR LE SABLE: Être dans une misère noire (Argot des voleurs).
CALER: On cale un meuble avec un coin de bois.
Un homme riche est calé.
Les typographes emploient cette expression pour dire qu’ils attendent de la copie, ils calent (Argot du peuple).
CALER LES JOUES: Bien boire et bien manger.
Allusion aux joues qui gonflent lorsqu’elles sont pleines (Argot du peuple).
CALIBORGNE ou CALIBORGNON: Borgne (Argot des voleurs). V. Guigne à gauche.
CALOQUET: Chapeau (Argot du peuple). V. Bloum.
CALOTS: Les yeux mauvais.
Calots à la manque (Argot des voleurs).
CALOT: Grosse bille avec laquelle les enfants jouent, à la poucette (Argot du peuple).
CALTER: S’en aller.
Calter est synonyme de débiner; on dit à quelqu’un en danger: calte au plus vite ou bien débine-toi (Argot du peuple).
CAMARDE: La mort.
Mais si la grive,Parfois arrive,Pour nous servir,Nous suivre ou nous courir,Cont’ la camarde,Toujours en garde,On a bien soin,De jouer du surin.(Romance du Pegre).
(Argot des voleurs).
CAMARLUCHE: Camarade (Argot du peuple).
CAMAROS: Même signification. Même argot.
CAMBOLA: Faux épileptique (Argot des voleurs). V. Battre un dig-dig.
CAMBRIOLEUR: Vol à la cambriotte.
Ce vol fut célébré par B. Maurice:
Travaillant d’ordinaire,La sorgue dans Pantin,Pour mainte et mainte affaire,Faisant très bon chopin.Ma gente cambriotte.Rendoublée de camelotte,De la dalle au flaquet,Je vivais sans disgrâce,Sans regout ni morace,Sans taf et sans regret.Le quart-d’œil lui jabotte:Mange sur tes nonneurs;Lui tire une carotte,Lui montrant la couleur.L’on vient, l’on me ligotte,Adieu, ma cambriotte,Mon beau pieu, mes dardants.Je monte à la Cigogne.On me gerbe à la grotte,Au tap et pour douze ans[1].[1] La traduction de toutes ces expressions est dans le Dictionnaire.
CAMBROUSIER: Escarpe qui vole tout ce qui lui tombe sous la main on parcourant la France.
Ce nom lui vient de ce qu’il opère dans les cambrousses (maison) (Argot des voleurs).
CAMBUSE: Maison qui ne tient pas debout, bâtie avec de la boue et du crachat.
Cambuse: cabaret où l’on sert mal et de mauvaise marchandise (Argot du peuple).
CAMBUSIER: Le maître de la cambuse.
Cambusier: qui tient la cantine au bagne ou à bord (Argot du peuple).
CAMELOTTE: Marchandise.
Pour qualifier quelque chose d’inférieur on dit: c’est de la camelotte (Argot du peuple).
CAMOUFLE: Chandelle (Argot du peuple). V. Cabombe.
CAMOUFLER (se): Changer de costumes et de physionomie afin de n’être pas reconnu (Argot des souteneurs et des agents de la Sûreté).
CAMOUFLER: Réparer.
On camoufle un décor (Argot des artistes).
CANAPÉ: Femme copieusement douée du côté des fesses.
Le mot est en usage chez les pédérastes qui ne recherchent pas cet avantage du côté féminin (Argot des voleurs).
CANARD: Mauvais journal.
Quand un journal est mal rédigé, mal imprimé, pas même bon pour certain usage, car le papier se déchire, c’est un canard (Argot du peuple et des journalistes).
CANARD: Terme de mépris employé dans les ateliers vis-à-vis d’un mauvais camarade.
—Bec salé, c’est un sale canard (Argot du peuple). N.
CANARD: Nouvelle fausse ou exagérée.
Ce système est employé par certains journaux aux abois.
On pourrait en citer cinquante exemples depuis les écrevisses mises par un mauvais plaisant dans un bénitier de l’église Notre-Dame-de-Lorette et qui retournèrent à la Seine en descendant par les ruisseaux de la rue Drouot; jusqu’au fameux canard belge.
Un huissier à l’aide d’une ficelle pêcha vingt canards qui s’enfilèrent successivement, comme Trufaldin dans les Folies Espagnoles de Pignault Lebrun, il fut enlevé dans les airs, mais la ficelle se cassa et il tomba dans un étang où il se noya.
Ce canard fit le tour du monde arrangé ou plutôt dérangé par chacun, il y a à peine quelques années qu’il était reproduit par un journal, mais la fin était moins tragique, l’huissier était sauvé par un membre de la Société des Sauveteurs à qui on décernait une médaille de 1re classe.
Pour sauver un huissier on aurait dû lui fourrer dix ans de prison (Argot du peuple).
CANARDER SANS FAFFS: Braconner sans port d’armes (Argot des voleurs).
CANASSON: Vieux cheval hors de service.
On appelle aussi les vieillards: canasson (Argot du peuple). V. Gaye.
CANFOUINE: Domicile (Argot des voleurs).
CANICHE: Ballot à oreilles.
Allusion aux longues oreilles de chien-mouton (Argot des voleurs). N.
CANER: Avoir peur, reculer.
Caner: synonyme de lâcheté (Argot du peuple).
CANER LA PEGRENNE: Mourir de faim (Argot des voleurs).
CANNE D’AVEUGLE: Bougie.
Allusion à la forme droite comme la canne sur laquelle s’appuie l’aveugle (Argot des voleurs).
CANON: Verre de vin.
Allusion à la forme sphérique du verre (Argot du peuple).
CANONNER: Boire des canons sur le zinc du mastroquet (Argot du peuple).
CANONNIER DE LA PIÈCE HUMIDE: Soldat infirmier qui opère sur les derrières de l’armée (Argot du peuple).
CANONNIER: Les cambrioleurs. V. ce mot.
CANTON: Prison.
Le prisonnier y est en effet cantonné (Argot des voleurs).
CAPISTON: Capitaine (Argot des troupiers).
CAPITONNÉE: Femme bien en chair, qui a une gorge bien développée, qui se tient ferme sans le secours du corset.
On dit aussi qu’elle est meublée.
—Ah! Gugusse, mince de viande, ça ferait rien un bath traversin (Argot du peuple). N.
CAPSULE: Chapeau (Argot du peuple). V. Bloum.
CARAMBOLAGE: Choc de deux voitures dans la rue.
Les voyous que cela amuse disent:
—Ah zut, mince de carambolage (Argot du peuple).
CARAMBOLER: Au billard, faire toucher les trois billes (Argot du peuple). N.
CARAMBOLER: V. Rouscailler.
CARCAGNOT: Brocanteur, usurier, juif qui achète tout à vil prix sans s’occuper de la provenance (Argot des voleurs). N.
CARCASSER: Tousser.
—Carcasse-donc ton dernier poumon tu ne nous emmerderas plus la nuit (Argot du peuple).
CARE (Vol à la care): Les careuses entrent dans un magasin, principalement dans les bureaux de tabacs et demandent à changer des pièces d’un certain millésime contre d’autres.
Profitant de l’inattention des commerçants, elles escamotent une partie des pièces (Argot des voleurs).
CARGOT: Cantinier.
Ce n’est pas une corruption, de gargotier, car d’après les règlements des prisons le cargot ne fait pas de cuisine et ne vend que des aliments froids, du fromage et de la charcuterie.
Comme les cantiniers sont arabes, qu’ils étranglent le plus qu’ils peuvent, on les a baptisés du nom de cargot, synonyme d’usurier, abréviation de carcagnot (Argot des voleurs). N.
CARRÉMENT: N’aie pas peur, vas-y carrément.