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Dictionnaire d'argot fin-de-siècle

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Je viens de mettre dans un trou rond
Ce qu’un jour avec impudence
Le ministre Thiers sur un balcon
Fit voir aux citoyens de France.

Ce quatrain est de Gérard de Nerval (Argot des voleurs).

LANSQUINE: Eau, pluie (Argot du peuple). V. Lance.

LANSQUINER: Pleuvoir.

—Il lansquine à torrent.

Lansquiner des chasses: Pleurer.

La pluie tombe des yeux (Argot du peuple).

LANSQUINEUR: Petit mendiant qui fait semblant de pleurer à chaudes larmes sur la voie publique pour attendrir les passants (Argot du peuple).

LANTERNER: Faire une chose mollement, accomplir un travail à regret: lanterner pour l’achever.

Lanterner: synonyme de muser (abréviation de s’amuser). Marcher comme un chien qu’on fouette (Argot du peuple).

LANDIER: Employé de l’octroi.

Autrefois, lorsque la foire du landit battait son plein, toutes les marchandises devaient payer un droit fixe, des employés étaient préposés pour le percevoir; les fraudeurs nombreux les nommaient les landiers.

Dans le peuple, on dit des gabelous, en souvenir de la gabelle (Argot du peuple).

LANDIÈRE: Boutique de marchand forain.

Ce mot est également un souvenir de la célèbre foire du landit où les escholiers de la rue du Fouarre allaient en procession s’approvisionner de papier.

Une chronique du temps dit que la tête de la colonne était à la Plaine-Saint-Denis, alors que la queue était encore sur le parvis Notre-Dame (Argot des forains).

LANTIPONNER: Synonyme de rasoir et de bassinant.

Généralement, les concierges passent leur temps à lantiponner, c’est-à-dire à bavarder (Argot du peuple).

LAPIN (En poser un): Promettre cinq louis à une fille, ne pas les lui donner et lui faire son mouchoir.

Faire attendre quelqu’un dans la rue par dix degrés de froid (Argot des filles). N.

LAPIN FERRÉ: Gendarme à cheval (Argot des voleurs).

LAPIN (Un rude): Homme fort, un risque tout, en tout et en toutes choses.

Dans le peuple, une femme dit:

—Mon homme est un rude lapin (Argot du peuple). N.

LAPIN DE COLLIDOR: Domestique.

Quand une femme vient aux halles accompagnée d’un larbin, les marchandes, en remettant les achats au domestique pour les porter à la voiture, lui disent:

—Tiens, mon vieux lapin de collidor (Argot du peuple). N.

LAPINEUR: Genre de vol accompli par le conducteur d’omnibus qui oublie de sonner les voyageurs.

Lapineur vient sans doute du nom du voyageur, qu’on désignait jadis sous le nom de lapin (Argot des voleurs).

LARBIN: Domestique (Argot du peuple).

LARBINIER: Complice qui se déguise en domestique pendant que le cambrioleur opère.

C’est le larbinier qui va préalablement en reconnaissance pour préparer le vol (Argot des voleurs).

LARD (Vieux): Terme de mépris employé pour qualifier les vieilles rouleuses.

Superlatif: Vieux lard rance (Argot du peuple). N.

LARDON: Enfant.

Diminutif de lard.

Dans le peuple, pour la chair de l’homme ou de la femme, on dit: le lard; comme l’enfant est le produit des deux sexes, de là, lardon.

Quand quelqu’un, dans une conversation, vous pique à chaque moment, on dit:

—As-tu bientôt fini de me larder?

Allusion au veau que le charcutier pique de lardons (Argot du peuple). N.

LARGUE: Femme publique.

Les voleurs disent larguepé par une adjonction de finale.

M. Marcel Schwob dit que largue s’explique par marque (Villon. J. de l’arg.), qu’on a eu lasquemé, puis que la finale est tombée; de là largue.

Halbert d’Angers donne largue ou lasque.

C’est largue qui a subsisté. (Argot des voleurs).

LARMON: Étain (Argot des voleurs). N.

LARTIF ou LARTILLE: Pain (Argot des voleurs). V. Bricheton.

LARTON: Pain (Argot des voleurs). V. Bricheton.

LARTONNIER: Voleur qui a pour spécialité de dévaliser les boutiques de boulangers.

Lartonnier est impropre; on devrait dire lartonneur (Argot des voleurs). N.

LASQUÉ: Vingt centimes (Argot des voleurs). N.

LA SEMAINE DES QUATRE JEUDIS: On dit d’une personne sale et crasseuse qu’elle se débarbouille la semaine des quatre jeudis, c’est-à-dire jamais.

Un paresseux ne travaille jamais que cette semaine-là.

—Quand allez-vous me paver mon terme? demande un propriétaire à son locataire.

La semaine des quatre jeudis.

Cette expression est synonyme de remettre aux calendes grecques (Argot du peuple). N.

LA TABLE EST MISE: Les enfants du peuple portent des pantalons fendus par derrière, on en comprend la raison.

Quand le moutard a fait ses besoins, il oublie de rentrer sa chemise; il en passe toujours un lambeau, souvent taché de moutarde; les gamins lui crient:

La table est mise.

Allusion à la nappe (Argot du peuple). N.

LATIF: Linge blanc (Argot des voleurs).

LAUMIR: Perdre.

—Il a laumi son pognon (Argot des voleurs).

LAVER: Vendre ses frusques.

On dit aussi nettoyer son complet (Argot du peuple).

LAVER LA VAISSELLE: V. Descendre à la crémerie.

LAVER SON LINGE (Avoir): Le condamné qui a subi sa peine a lavé son linge.

Il sort de prison blanc comme neige (Argot des voleurs).

LAVER SON LINGE SALE EN FAMILLE: Se disputer dans son intérieur, se faire des reproches sanglants (Argot du peuple). N.

LAVEUR: Complice qui vend aux recéleurs les effets volés (Argot des voleurs).

LAVETTE: Langue.

Dans le peuple, cette expression veut dire mou.

On dit aussi: Mou comme une chiffe, apocope de chiffon rouge, langue (Argot des voleurs). N.

LAVOIR: Confessionnal.

Mot à mot, on y lave sa conscience (Argot des voleurs). V. Planche à lavement.

LAZAGNE: Lettre (Argot des voleurs).

LAZAGNEUR: Prisonnier qui écrit pour ses camarades de prison (Argot des voleurs).

LAZZI-LOFF: M. Prudhomme tient son fils par la main, un collégien de quinze ans, rue Notre-Dame-de-Lorette; il hèle l’omnibus Batignolles-Clichy-Odéon:

—Conducteur, vous passez rue de Tournon, devant chez Ricord?

—Oui, Monsieur.

Alors, poussant son fils dans la voiture:

—Montez, petit cochon!

(Argot du peuple). V. Chaude-lance.

LE 36 DU MOIS: Réponse à un créancier qui demande:

—Quand me paierez-vous? (Argot du peuple). N.

LÉCHARD: Jeune homme (Argot des voleurs). N.

LÈCHE-CUL: V. Fleure-fesse.

LÉCHER: Peindre un tableau avec un soin méticuleux.

Dans les ateliers, on dit d’un peintre lécheur qu’il fait de la peinture de demoiselle (Argot des artistes peintres). N.

LECTURE (Être en): Femme occupée sur sa chaise longue (Argot des filles). N.

LÉDÉ: Dix centimes (Argot des voleurs). N.

LÈGRE: Foire, marché (Argot des voleurs). V. Légreur.

LEGRER: Lever, tromper (Argot des voleurs). N.

LÉGREUR (Le): Est un forain qui tient un jeu dans les foires et qui annonce, pour allécher le public, des lots imaginaires (Argot des voleurs). N.

LÉON: Le président de la cour d’assises.

—Quelle tapette, le léon de la planche à pain.

Léon, dans le peuple, est employé à tout propos:—

—Vas y Léon, tape dessus. (Argot du peuple).

LENTILLE: Punaise (Argot des voleurs). N.

LESBONDE: V. Accouplée.

LES ROUTES SONT SURES ICI, ON NE VERSE PAS SOUVENT: Exclamation d’un ivrogne dans une maison où l’on verse à boire avec parcimonie (Argot du peuple). N.

LES TOILES SE TOUCHENT: Cette expression signifie ne pas avoir d’argent: les toiles des poches se touchent (Argot du peuple). N.

LES VINGT-HUIT JOURS: Quand les réservistes partent, ils emportent généralement dans un mouchoir quelques menus objets de toilette.

Quand les agents arrêtent un individu, on le conduit au poste de police où on le fouille très minutieusement; les objets qu’il possède sont enveloppés dans un mouchoir. Quand le lendemain, à 9 heures du matin, on le conduit au bureau du commissaire de police, l’agent qui le tient porte le petit paquet; comme généralement ils sont huit ou dix à la file, quand ils passent, le peuple dit par allusion: Tiens! les vingt-huit jours! (Argot du peuple). N.

LESSIVANT: Avocat d’office (Argot des voleurs).

LESSIVEUR: Avocat.

Il y a souvent des clients qui en ont besoin d’une rude de lessive pour blanchir leur conscience. V. Blanchisseur.

LESSIVEUR DE PÉTROUSQUIN: Voleur qui dévalise les paysans. Mot à mot: Il les lessive (Argot des voleurs).

LEVAGE AU CRACHOIR (Un):

Lever une femme par une faconde intarissable, l’éblouir par un luxe de paroles, pour l’empêcher de songer à la galette (Argot du peuple).

LEVANQUÉ: Deux francs (Argot des voleurs). N.

LÈVE-PIEDS: V. Montante.

LEVER: Lever une affaire, la prendre à un autre.

Lever un homme au café ou sur une promenade publique.

—À quelle heure vous levez-vous?

—Quand on me couche. (Argot des filles).

LEVER LA LETTRE: Prendre les lettres dans la casse pour aligner les mots dans le composteur et former les phrases (Argot d’imprimerie).

LEVER LE CUL DEVANT (S’être): Être de mauvaise humeur.

On dit aussi: il est de mauvais poil (Argot du peuple).

LEVER LE PIED: V. Mettre la clé sous la porte.

LICHANCE: Repas épatant où les convives repus roulent sous la table.

—À la noce de mon cousin Bo-bosse, il y a eu une si bath lichance, que j’en ai boulotté pour quinze jours (Argot du peuple).

LICHE-FRITE: Pommes de terre frites (Argot du peuple).

LIGNARD: V. Fantaboche.

LIGOTTANTE: La corde (Argot des voleurs).

LIGOTTER: Attacher les mains.

Quand le prisonnier est trop récalcitrant, on le ficèlle comme un saucisson (Argot du peuple).

LIMACE: V. Rodeuse.

LIMACE: Chemise (Argot du peuple).

LIMANDE: Plate comme une limande.

—Prends garde, ta limande va te couper dans le pieu.

On dit également d’une femme qui a la figure en lame de couteau:

—Elle a une gueule de limande.

Quand elle grimace:

—Elle a une gueule de raie (Argot du peuple). V. Sac à os.

LIME: Diminutif de limace (Argot des souteneurs).

LIMER: Fait qui se produit après trente ans de mariage (Argot du peuple).

LIMONADE: Eau.

Tomber dans la limonade, ce n’est pas «se laisser choir dans l’eau», comme le dit A. Delvau, c’est tomber dans la misère:—Il est tombé dans la limonade.

Il existe à ce sujet une chanson:

Ah! il est tombé dans la limonade.

(Argot du peuple). N.

LIMOUSINIER: Voleur de tuyaux de plomb dans les maisons en construction.

Il se nomme également voleur de gras double, parce que les feuilles de plomb ou de zinc roulées ressemblent aux rouleaux de tripes que l’on voit à l’étalage des tripiers (Argot du peuple).

LINCÉ: Vingt-cinq centimes (Argot des voleurs).

LINGE LAVÉ (Avoir son):

Les voleurs en prison comme les troupiers, n’ont plus à s’occuper de la blanchisseuse (Argot des voleurs).

LINGOT: Forain qui met de la porcelaine ou de la verrerie en loterie.

La roue qui tourne pour indiquer le numéro gagnant se nomme un lingot (Argot des forains). N.

LINGRE: Couteau.

Quelques auteurs disent lingue, c’est une erreur, lingre est une corruption de Langres, ville renommée pour la fabrication de ses couteaux (Argot des voleurs).

LINGREUR: Assassin qui tue à l’aide d’un couteau (Argot des voleurs).

LINSPRE ou L’INSAPRÉ: C’est plutôt cette dernière expression qui est la vraie, car elle signifie inspecteur et non prince (Argot des bouchers).

LINVÉ: Un franc (Argot des voleurs). N.

LIQUETTE: V. Limace.

LIQUIDE DE BACCHUS: Vin (Argot du peuple).

LIQUIDE DE CANARD: Eau (Argot du peuple). V. Lance.

LIRE AUX ASTRES: Synonyme de bailler à la lune, mettre trois heures pour faire une course de cinq minutes (Argot du peuple). V. Gobe-mouches.

LISDRÉ: V. Fricadier.

LITARGE: V. Lance.

LIVRAISON DE BOIS DEVANT LA PORTE: V. Capitonnée.

LOCANDIER: V. Bonjourier.

LOCANDIER: Variété de voleur au bonjour (Argot des voleurs). V. Bonjourier.

LOCHE: Oreilles (Argot des voleurs). V. Esgourdes.

LOCHE: Paresseux, fainéant.

Allusion à la loche qui se traîne péniblement.

On dit également: Paresseux comme un loir.

Le loir dort au soleil (Argot du peuple). N.

LOCHER: Branler, tomber.

—Tu branles dans le manche, tu vas être renvoyé de ta place.

Ce à quoi les farceurs répondent:

—Tout ce qui branle ne tombe pas (Argot du peuple). N.

LOGER RUE DU CROISSANT: Si tous les maris cocus devaient rester rue du Croissant, il faudrait prolonger cette rue jusqu’à Vincennes (Argot du peuple). V. Joseph. N.

LOITÉ: Quinze centimes (Argot des voleurs). N.

LONG DU MUR (Le): Les murs sont blancs; quand on s’y frotte, on blanchit ses effets.

Allusion à une bonne qui, avant d’entrer en place, demande ce qu’elle gagnera:

—Nourrie, vingt francs par mois, un jour de sortie.

—Et blanchie?

—Le long des murs (Argot du peuple). N.

LONGE: V. Berge.

LOPHEUR: Fabricant de faux papiers (Argot des voleurs).

LOQUES: Vieux vêtements usés jusqu’à la corde.

Cette expression s’applique également aux vieux morceaux de ferrailles qui servent d’enjeu aux enfants (Argot du peuple).

LORCEFÉ DES PONIFFES: Prison de Saint-Lazare (Argot des filles).

LORGNE: Borgne.

On dit aussi: lorgnebé. Le borgne ne lorgne que d’un œil.

On dit aussi: Il ne peut voir que d’un bon œil (Argot du peuple).

LOUCHONNE: La cuillère (Argot des voleurs). N.

LOUF: Abréviation de loufoque (Argot du peuple).

LOUFIARDER: Vesser sourdement (Argot du peuple). N.

LOUFOQUE: Fou (Argot des bouchers).

LOUP: V. Contre-coup.

LOUPEUR: Mauvais ouvrier qui flâne, qui tue le temps en loupant pour attendre l’heure de la sortie et qui a plus souvent les yeux fixés sur la pendule que sur son ouvrage.

En 1848, un marchand de vins, boulevard de Belleville, avait pris pour enseigne: Au camp de la loupe, tenu par Feignant (Argot du peuple).

LOUPEUR: Désigne le voleur qui, à la tombée de la nuit, vole des diamants chez les bijoutiers au moyen d’une loupe à deux branches (Argot des voleurs).

LOUP-CERVIER: Alors que les boursiers se réunissaient devant Tortoni, on les nommait ainsi.

Aujourd’hui, l’expression n’est plus en vogue, mais le boursier est toujours synonyme de loup-cervier (Argot des boursiers).

LOUPIOT: Enfant (Argot du peuple).

LOURDIER (Le): V. Pessigner les lourdes.

LUISANT: Le jour (Argot des voleurs). N. LUISARD: V. Bourguignon.

LUMIGNON: V. Bourguignon.

LUNE (La faire voir): Montrer son cul:

Quand j’étais petit je n’étais pas grand
Je montrais mon cul à tous les passants.

Allusion à la rondeur; facile à comprendre (Argot du peuple).

LUQUEUR: Voleur qui escroque les gens à l’aide de faux papiers (Argot des voleurs).

LUSQUINEUR: Voleur qui s’habille en charbonnier pour dévaliser les haquets des véritables charbonniers. C’est une variété du roulottier (Argot des voleurs).

LUSQUIN: Charbon (Argot des voleurs).

LUSTRE: V. Palpeurs.


M

MAC: Diminutif de maquereau.

Quelques-uns écrivent mec, d’autres mecque.

C’est mac qui est le vrai mot (Argot des souteneurs).

MACADAM: Accoster les hommes. L. L.

On voit d’ici les filles faire le macadam qui est la chaussée des boulevards, pour raccrocher sans doute les omnibus, les fiacres et les becs de gaz.

Macadam est le nom donné à un vin blanc épais, venant soi-disant de Montbazillac, qui est vendu par les mastroquets au moment des vendanges (Argot du peuple). N.

MACARONER: Vient de macaron.

Macaron dans le peuple veut dire huissier; dans l’argot des voleurs, il veut dire traître.

Il est vrai qu’il n’y a pas grande différence entre les deux.

Un voleur est traître en dénonçant ses complices; un huissier est traître vis-à-vis des malheureux (Argot des voleurs). N.

MACÉDOINE: Combustible. L. L.

Macédoine est une salade composée de toutes sortes de légumes; on la nomme salade russe.

Macédoine est également synonyme d’arlequin (Argot du peuple). N.

MACHER LES MOTS (Ne pas): Dire carrément à quelqu’un ce que l’on pense.

Parler grossièrement; ainsi, dans le peuple, quand on dit merde à quelqu’un, on répond: mâche (Argot du peuple). N.

MACROTIN: Petit maquereau d’occasion qui glane par-ci par-là quelques sous, en attendant qu’il soit assez fort pour avoir une marmite à lui seul.

Le petit macrotin commence généralement à être raton et pégriot (Argot des souteneurs). N.

MACCHABÉE: Cadavre.

Se dit plus particulièrement d’un noyé que les mariniers retirent de l’eau.

Les croque-morts disent aussi du mort qu’ils vont enlever:

—Emballons vivement le macchabée, il fouette à en crever (Argot du peuple). V. Bouffi.

MADAME LA RESSOURCE: La marchande à la toilette, la brocanteuse, le mont-de-piété (ma tante), tous ces rongeurs sont madame la Ressource pour les pauvres gens qui vendent ou engagent leurs dernières nippes (Argot du peuple).

MADEMOISELLE DU BITUME: Péripatétitienne qui foule le bitume du matin au soir.

Le bitume, c’est son atelier, son champ de manœuvres, elle y règne en souveraine, elle l’a conquis à la pointe de ses bottines (Argot du peuple).

MADEMOISELLE DU PONT NEUF: Fille publique.

L’allusion est typique.

Comme sur le Pont-neuf tout le monde y passe librement, avec cette différence, toutefois que le pont est à péage (Argot du peuple). N.

MADRICE: Finesse.

Vient de madré.

—Il a roulé le palpeur. Il est rien madrice, le gonce (Argot des voleurs).

MAGASIN DE BLANC: Maison de tolérance.

Il est assez difficile d’expliquer le pourquoi de cette expression; elle vient sans doute de ce que dans le peuple, tous ceux qui vivent de la femme sont des mangeurs de blanc.

La maquerelle est dans ce cas (Argot du peuple). N.

MAGNES: Abréviation de manières.

Magne est ici pour façon.

—Ne fais donc pas tant de magnes, il faut y aller carrément.

—Tu fais des magnes ma vieille, ça ne prend pas (Argot du peuple). N.

MAILLOCHÉ (Il est): Synonyme d’avoir reçu un coup de marteau.

On connaît la légende de Martin et Martine, de l’horloge de Cambrai, qui a donné naissance au dicton populaire pour qualifier un être déséquilibré:

—Il a passé à Cambrai, il a reçu un coup de marteau.

Mot à mot: il est timbré (Argot du peuple). N.

MAILLOCHONS: Les pieds.

Allusion au bruit que font les pieds en marchant.

—Ils frappent le pavé, ce qui produit des coups de mailloche (Argot des voleurs). N.

MAÎTRES CHANTEURS: Individus qui font payer des imbéciles pour acheter leur silence.

Il y en a de différentes catégories.

Le maître chanteur financier qui fait chanter les sociétés financières.

Le maître chanteur qui se sert d’un Jésus pour faire chanter l’homme à passions contre nature.

Il y a des maîtres chanteurs dans toutes les classes de la société (Argot du peuple).

MAÎTRESSE DE PIANO: Professeur qui apprend aux cocottes illettrées le moyen de tirer des carottes par correspondance à leurs amants.

En fait de musique elle coupe les cors et tire les cartes.

Elle procure au besoin (Argot des filles).

MAJOR DE TABLE D’HÔTE: Individu à tout faire, qui est maquereau à l’occasion.

Le major a toutes les apparences d’un militaire en retraite; il porte à la boutonnière une rosette multicolore d’ordres exotiques. Le major de table d’hôte est un rastaquouère de premier ordre (Argot du peuple et des filles).

MAL BLANCHI: Nègre.

Une plaisanterie populaire très usitée consiste à dire à un nègre:

—Si on te conduit chez le commissaire, je ne te vois pas blanc (Argot du peuple). N.

MALADIE: Emprisonné (Argot des voleurs).

MALTAISE: Pièce de vingt francs (Argot des voleurs). V. Sigue.

MALTOUSE: Contrebande.

Halbert d’Angers dit pasquiner la maltouse.

C’est une erreur; c’est pastiquer, parce que ce mot veut dire passer.

Mot à mot, pastiquer la maltouse: passer de la contrebande, faire la fraude sur des objets soumis aux droits de l’octroi (Argot des voleurs).

MAMAN-MACA: Maquerelle qui tient une maison de tolérance.

Les pensionnaires appellent la tenancière maman; quand elle est vieille, ce qui est fréquent, elles y joignent le mot maca, abréviation de macaque qui, dans le peuple, signifie vieille guenon (Argot des filles). N.

MANCHE (Faire la): Mendier, quêter.

Les voleurs restés en liberté font la manche pour venir en aide à un camarade qui est en prison.

Les sœurs de charité font la manche dans les maisons aisées pour soulager les pauvres et les malades des hôpitaux (Argot des voleurs). N.

MANCHE À MANCHE: Quand deux adversaires ont perdu chacun une partie, ils sont manche à manche (Argot des voleurs). V. Belle.

MANCHON (Avoir des vers dans son): Avoir le crâne dénudé par place.

Allusion aux mites qui font des stries dans les étoffes de laine (Argot du peuple).

MANDOLLE (En jeter une): Donner un soufilet à quelqu’un (Argot des voleurs). V. Giroflée à cinq feuilles.

MANGER LA GRENOUILLE: Caissier qui mange le contenu de la caisse.

Notaire qui vole les fonds qui lui sont confiés.

Sergent-major qui lève le pied avec la solde de sa compagnie.

Se dit en général de tous ceux qui mangent l’argent qui ne leur appartient pas.

Cette expression vient de ce que, en Hollande, les banquiers avaient pour emblème protecteur, sur la serrure de leur coffre-fort, une grenouille en bronze; lorsque le coffre-fort était fracturé, la grenouille était déplacée. De là, manger la grenouille (Argot du peuple). N.

MANGER LE MORCEAU: Dénoncer ses complices, ou avouer ses méfaits (Argot des voleurs). V. Mouton.

MANGER DE LA VACHE ENRAGÉE: Malheureux qui ne mange pas tous les jours.

—Ah! tu ne veux pas travailler, propre à rien, tu vas foutre le camp, tu mangeras de la vache enragée (Argot du peuple).

MANGER DU PAIN ET DU FROMAGE: Repas de funérailles.

C’est une vieille coutume.

Quand on enterre un camarade, on mange du pain et du fromage, ou on casse la gueule à un lapin en souvenir du mort (Argot du peuple).

MANGER LE BON DIEU: Communier.

L’allusion est claire (Argot du peuple).

MANGER SUR L’ORGUE: Charger un complice.

Mot à mot: lui mettre ses méfaits sur le dos pour essayer de s’en décharger (Argot des voleurs).

MANGEUR DE BLANC: Homme qui vit aux dépens des autres, et particulièrement des femmes qui se livrent à la prostitution.

L’allusion est suffisamment claire pour se passer d’explication (Argot du peuple).

MANGEUSE DE VIANDE CRUE: Cette figure dégoûtante, mais très caractéristique, désigne une fille publique qui a une certaine spécialité (Argot des souteneurs).

MANNEQUIN (Tu n’es qu’un): Pas grand’chose de bon.

Mannequin: individu guindé, habillé à la dernière mode.

Mot à mot, qui ressemble à un mannequin exposé à la porte d’un tailleur.

Mannequin: hotte de chiffonnier (Argot du peuple).

MANNEQUIN DE MACHABÉES: Corbillard.

Allusion au panier dans lequel est jeté le condamné après l’exécution (Argot des voleurs). V. Omnibus de coni.

MAQUEREAU: Les uns croient que ce mot vient de l’hébreu machar, qui signifie vendre, parce que c’est le métier de ces sortes de gens de vendre les faveurs des filles.

D’autres font dériver cette expression d’aquarius ou d’aquariolas, parce que chez les Romains les porteurs d’eau étaient les intermédiaires de la prostitution, d’où nous avons fait, en ajoutant la lettre M, Maquariolus, et que de là s’est formé le nom de maquereau.

D’autres encore affirment que ce mot vient du latin macalarellus, parce que dans les anciennes comédies, à Rome, les proxénètes de la débauche portaient des habits bizarres, et ils étayent leur opinion sur ce que ce nom n’a été donné à l’un de nos poissons de mer que parce qu’il est mélangé de plusieurs couleurs dans le dos (Dessessart, Dictionnaire de police, Bulenger opuscul.)

Quoi qu’il en soit, la signification du mot maquereau est de vivre aux dépens de quelqu’un, mais l’expression s’applique plus généralement à ceux qui vivent de la prostitution des femmes.

Souteneur, qui vit des filles publiques, ou mari qui laisse sa femme se prostituer, lequel est un maquereau légitime (Argot du peuple).

MAQUERELLE: Maîtresse de maisons de tolérance ou de maisons de rendez-vous, femme qui vit du travail des filles (Argot du peuple). V. Maman-Maca.

MAQUECÉE: Abbesse d’une maison de tolérance.

Vient des deux mots: maq, abréviation de maquerelle, et de , femme d’argent; de là maquecée (Argot des souteneurs). N.

MAQUILLER: Se farder le visage.

Pour réparer des nuits l’irréparable outrage.

Quand un ouvrage est raté, on le maquille pour le faire accepter.

Maquiller un tableau. Il existe des peintres spéciaux qui font du vieux avec du neuf.

Une toile est fabriquée par un rapin quelconque, une signature de maître figure au bas, le maquilleur lui donne l’aspect de la vétusté, et un amateur naïf l’achète.

Il y a comme cela des Velasquez peints à Montmartre (Argot des filles et des peintres). N.

MAQUILLEUSE DE BRÊMES: La tireuse de cartes.

Il en existe de célèbres dans le monde des filles. Elles font des recettes fructueuses.

La maquilleuse de brêmes ne se borne pas à tirer les cartes, elle procure pour les deux sexes.

Généralement, c’est une ancienne fille sur le retour qui ne peut plus peloter que le valet de cœur (Argot des filles).

MARBRE: Ainsi nommé parce que c’est une table en fonte.

Table sur laquelle les typographes alignent les paquets composant les articles.

Avoir un article sur le marbre: attendre son tour pour être imprimé.

Quand un article reste trop longtemps sur le marbre, il faut le distribuer.

Marbre est une ironie pour les pauvres journalistes.

Leurs articles refroidissent sur le marbre (Argot d’imprimerie). N.

MARCANDIER: Cette expression désigne les marchands, quel que soit leur commerce (Argot des voleurs).

MARCHAND DE MORT SUBITE: Le maître d’armes et le bourreau.

Le maître d’armes apprend à ses élèves les moyens de tuer un homme proprement.

Le bourreau coupe la tête du condamné pour lui apprendre à vivre (Argot du peuple). N.

MARCHER DEDANS: Mettre les pieds sur une sentinelle.

Marcher dans la merde, suivant un dicton populaire, cela porte bonheur.

On dit d’un homme heureux en toutes choses, à qui tout réussit:

—C’est pas possible, il a marché dans la merde.

On dit également:

—Il a écrasé un colombin (Argot du peuple). N.

MARCHER SUR LE DERNIER QUARTIER: User le restant de ses souliers.

Par dérision, on dit à un homme dont les souliers boivent l’eau du ruisseau:

—Tes pafs sont pochards.

On dit encore:

—Tu vas t’enrhumer, tes rigodons ont un courant d’air (Argot du peuple). N.

MARCHEUSE: Belle femme qui figure à l’Opéra.

Marcheuse: la femme qui appelait les passants en termes très engageants; elle détaillait avec complaisance les charmes de la marchandise qui était dans l’intérieur de la maison.

La marcheuse était généralement un beefteack à corbeau hors d’âge et de service.

Les marcheuses furent supprimées à la porte des maisons de tolérance par arrêté de M. Andrieux, préfet de police, en 1881 (Argot des souteneurs).

MARGOT: Femme de peu.

—Tu n’es qu’une sale Margot.

Pourquoi chercher dans Margot le diminutif de Marguerite?

Toutes les Marguerites ne sont pas de Bourgogne.

Il y en a qu’on aimerait à effeuiller.

On dit aussi Margoton (Argot du peuple). N.

MARGOULETTE: La bouche.

Il existe en Bourgogne des vases en terre vernissée qui ont un goulot semblable à la bouche. Pour cette raison, on appelle ces vases des goulettes.

Mar a tout simplement été ajouté, déformant le mot primitif pour en former un autre qui a le même sens, car les nourrices disent aux enfants:

—Viens que j’embrasse ta petite goulette.

Rincer la margoulette à un ami, c’est lui payer à boire (Argot du peuple), N.

MARGOULIN: Débiteur de mauvaises boissons.

Marchand de vin qui a une fontaine dans sa cave pour fabriquer le fameux cru de Château la Pompe.

Margoulin: méchant ouvrier, fainéant, grossier, brutal, qui lève plus souvent le coude qu’un marteau.

C’est, dans le peuple, un gros terme de mépris que de dire à un individu:

—Tu n’es qu’un margoulin! (Argot du peuple). N.

MARIAGE À LA DÉTREMPE: Mariage à la colle. Quand elle est trop détrempée, le papier ne tient pas.

Autrefois, avant l’annexion de la banlieue à Paris, on disait:

—Ils sont mariés au treizième arrondissement.

Parce qu’il n’y en avait que douze.

Aujourd’hui on dit au vingt et unième, parce qu’il n’y en a que vingt (Argot du peuple). N.

MARIE-COUCHE-TOI-LA: Femme qui se met sur le dos pour un oui ou un non.

Rôdeuse de caserne (Argot des troupiers). N.

MARIE-SAC-AU-DOS: Femme toujours prête.

Allusion aux troupiers qui, quand le quartier est consigné en vue d’un événement quelconque, campent dans la cour de la caserne sac au dos, prêts à partir (Argot des troupiers). V. Rempardeuses. N.

MARIE-PIQUE-REMPART: Femme qui rôde la nuit sur les remparts, aux environs des postes de soldats.

On devine ce qu’elle cherche: un gîte et un restant de soupe.

Huit ou dix jours plus tard, le troupier sait ce qu’elle a apporté (Argot des troupiers). N.

MARIOLE: Malin, rusé, roublard.

On est mariole ou on le fait.

Dans les ateliers, un mariole passe pour un phénix.

Mariole doit être pris ici comme synonyme de marlou.

—Tu n’as pas coupé la patte à coco, tu n’es pas si mariole que ça, on pourrait bien te river ton clou.

Il existe une chanson qui dit:

Tant qu’il y aura des pantes,
Les marioles boulotteront.

(Argot du peuple et des souteneurs). N.

MARKOUSE: Carte marquée visiblement par le bonneteur. Mais aussitôt qu’elle a été vue par la dupe, elle est démarquée.

Il la devine, mais ce n’est plus la même (Argot des camelots).

MARLOU: Individu qui vit de la prostitution des femmes.

Marlou vient du vieux mot marlier, avec un changement de finale (Argot des filles).

MARLOU À LA MIE DE PAIN: Marlou qui ne sait pas faire travailler sa marmite ou qui en a une récalcitrante.

Je lis dans les Lamentations d’un souteneur:

Quoi? C’est éteint... tu r’buttes au flanche.
Y’a pu de trottinage à la clé.
Des dattes pour que tu fass’ la planche,
L’anse de la marmite est cassée.

(Argot des souteneurs). N.

MARLOUPIN: Jeune marlou qui fait son apprentissage dans les bals publics.

On dit aussi goussepin: petit vagabond dont la première étape est la petite Roquette et la dernière souvent, la grande.

Goussepin gouspiné: voler (Argot des voleurs).

MARLOUSIER: Malin, rusé, diminutif de marlou (Argot des souteneurs).

MARMITE: D’après M. Lorédan Larchey, c’est une fille publique nourrissant son souteneur.

Un souteneur sans sa marmite est un ouvrier sans ouvrage, dit Canler.

La marmite de terre est une prostituée qui ne gagne pas de pognon à son souteneur.

La marmite de fer commence à être cotée; elle gagne un peu de galette.

La marmite de cuivre, suivant Halbert, c’est une mine d’or.

Marmite, d’après Pierre, est une femme qui n’abandonne pas son mari ou son amant en prison et lui porte des secours.

Le peuple qui ne cherche ni si haut ni si loin, considère tout tranquillement la femme comme une marmite.

Quand elle trompe son mari avec son consentement, elle fait bouillir la marmite.

Quand elle fait la noce pour son compte, qu’elle ne rapporte pas, il y a un crêpe sur la marmite (Argot du peuple). N.

MARMITE ANARCHISTE: Comme la précédente, celle-là ne rapporte pas; elle fait sauter—pas les écus, mais les maisons.

C’est une marmite qui n’est guère en faveur, car elle fait perdre la tête (Argot du peuple). N.

MARMITEUX: Homme qui a sans cesse la larme à l’œil.

Corruption par extension du mot miteux (qui a la cire aux yeux) (Argot du peuple). N.

MARMITON DE DOMANGE: Vidangeur.

On dit aussi: marmiton de Richer (Argot du peuple).

MARMOTTE: Madras que les marchandes portent encore sur la tête en guise de coiffure.

Marmotte: diminutif de marmite.

—Tu n’es qu’une sale marmotte (Argot du peuple).

MARMOUSET: Le pot au feu.

—Amène-ta morue ce soir, nous boulotterons, mince de bidoche dans le marmouset.

Allusion au bruit que fait l’eau en bouillant: elle marmouse (Argot des voleurs).

MARNER: Signifie travailler.

Les voleurs disent également marner pour voler, puisque voler est pour eux travailler.

Marner est une variété du vol à l’embrassade, à l’exception toutefois qu’il est généralement pratiqué par des femmes (Argot des voleurs).

MARNEUSES: Filles publiques qui travaillent au bord des rivières.

On dit aussi: poniffes et magneuses.

Cette dernière expression indique une spécialité (Argot des souteneurs).

MARNOIS: Souliers énormes.

Synonyme de péniche (Argot des voleurs).

MARRAINE: Témoin femelle (Argot des voleurs).

MARRÉ: En avoir assez, s’ennuyer d’être en prison.

—Je vais me marrer pendant cinq berges (Argot des voleurs).

MAROTTE (Avoir une): Idée fixe qui varie suivant les tempéraments.

Tous les collectionneurs sont des gens à marotte.

Marotte est synonyme de dada.

Marotte signifie également chanter.

—À toi, la Saucisse, c’est ton tour de marotte (Argot des voleurs). N.

MARRON: Livre imprimé clandestinement (Argot d’imprimerie).

MARRONNER UN GRINCHISSAGE: Cette expression n’est pas juste, car marronner veut dire en vieux français pirate, et, en même temps, bouder, murmurer entre ses dents.

Les voleurs l’emploient pour dire qu’ils ont manqué un vol (Argot des voleurs). N.

MARQUE-MAL: Se dit de quelqu’un qui a un vilain aspect (Argot du peuple).

MARQUÉ OU MARQUETS: Mois (Argot des voleurs).

MARQUÉ (Il est): Être gravé par la petite vérole (Argot du peuple). V. Poêle à marrons.

MARQUÉ: Être ridé comme une vieille pomme (Argot du peuple).

MARQUE DE CÉ: Femme légitime de voleur.

Femme d’argent (Argot des voleurs).

MARQUER (Ne plus): Femme qui n’a plus d’échéance à chaque fin de mois (Argot du peuple).

MARQUER À LA FOURCHETTE: Marchand de vin qui majore ses notes.

Allusion aux quatre dents de la fourchette; il fait quatre raies à la fois (Argot du peuple).

MARQUIS DE LA BOURSE PLATE: Homme absolument sans le sou (Argot du peuple). V. Les toiles se touchent.

MASTIC: Terme usité en imprimerie pour indiquer qu’il y a erreur dans le classement des phrases et des alinéas, ce qui rend l’article tout à fait incompréhensible (Argot d’imprimeur). N.

MASTIC (Péter sur le): Le peintre en bâtiment qui, le lundi, veut flâner, emploie cette expression pour dire qu’il ne veut pas travailler:

—Je pète sur le mastic (Argot du peuple). N.

MASTROQUET: Marchand de vin.

Dernière transformation du mot mannezingue.

Mann, homme, zinc, par corruption zingue, comptoir (Argot du peuple). V. Bistro.

MASSEPAIN: Ce nom se donne généralement à une sorte de gâteau que l’on vend dans les foires; il a aujourd’hui une signification bien autrement «fin-de-siècle»; il sert à désigner la catégorie d’individus qui ont à Paris des salons d’essayages pour dames, avant de les expédier dans les maisons hospitalières de France ou de l’étranger (Argot des souteneurs). N.

MASSER: Travailler, peiner ferme.

Allusion au cantonnier qui casse avec une masse les cailloux sur les routes.

Il n’existe pas de métier plus pénible, il est vrai qu’ils n’en prennent qu’à leur aise, car la sueur des cantonniers n’a pas de prix.

Ce n’est sûrement pas eux qui ont créé la fameuse, légende, que les riches mangeaient la sueur du peuple (Argot du peuple). N.

MASTARDIER: Faire le mastar au gras double (Argot des voleurs). V. Limousinier.

MATADOR: Homme riche ou qui en a les apparences.

—Tu fais le matador, pour: Tu fais rudement tes embarras (Argot du peuple).

MATADOR: Partie de dominos.

Les gros dés: double-six, double-cinq, etc., sont les matadors (Argot du boulevard). N.

MATELASSÉE: Femme qui a des seins énormes.

Son estomac est matelassée.

Quand c’est une fille et qu’elle maigrit, son souteneur lui dit:

—Tu t’débines des matelassés.

Quand une femme est plate comme une limande elle se matelasse en bourrant son corset d’assez de coton pour donner l’illusion.

Les femmes fin-de-siècle en portent en caoutchouc qu’elles gonflent chaque matin (Argot des souteneurs). N.

MATHURINS: Dés pipés qui servent aux camelots pour voler au 7, au passe-dix et à la consolation (Argot des camelots).

MAZAGRAN: Café servi dans un verre.

Par abréviation on dit un mazag. (Argot du peuple).

MEC pour meg: Chef, patron, Dieu, le mec plus ultra (Argot des voleurs).

MEC À LA COLLE FORTE: Se dit d’un voleur redoutable, par opposition au mec à la mie de pain.

Voleur de rien (Argot des voleurs).

MÈCHE: Les mauvais ouvriers qui voyagent sans cesse demandent mèche dans les ateliers qu’ils rencontrent sur leur route:

—Y a-t-il mèche de travailler?

Mèche pour moyen (Argot du peuple).

MÉDAILLE ou MÉDAILLON: V. Pièce de dix sous.

MÉDAILLON: Derrière.

Les joueurs de manille appellent ainsi les as, par corruption de manillon; quelques-uns disent le merdaillon (Argot du peuple). N.

MEG DE LA ROUSSE (Le grand): Le préfet de police (Argot des voleurs). V. Dabe des renifleurs.

MÉLASSE (Être dans la): Dans la misère jusqu’au cou (Argot du peuple) V. Purée.

MÊLÉ CASS.: Mélange d’eau-de-vie et de cassis que les ouvriers boivent le matin sur le zinc pour tuer le ver.

On dit dans le peuple:

—Faire ses dévotions à Notre-Dame de Mêlé-Cassis (Argot du peuple). N.

MELET: Petit, petite (Argot des voleurs).

MENÉE: Une douzaine.

—Nous étions une menée pour ratiboiser le goncier; pas mèche d’en venir à bout, c’était un rude lapin (Argot des voleurs).

MENDIGOT: Mendiant.

D’un petit mendiant on dit qu’il mendigotte.

Mendigot, changement de finale (Argot du peuple).

MENER PAS LARGE (N’en): Être fort mal à son aise.

Mot à mot: serrer les fesses ou n’être pas dans ses petits papiers.

Le condamné qui va être exécuté n’en mène pas large (Argot du peuple).

MENESSE: Femme (Argot des souteneurs).

MENTEUSE: Langue.

On dit par opposition d’une langue d’animal:

—Allons manger une langue qui n’a jamais menti.

Parce qu’elle ne parle pas (Argot du peuple).

MENOUILLE: Monnaie (Argot du peuple).

MENTON DE GALOCHE: Menton qui avance comme celui du classique Polichinelle.

On dit de celui ou de celle qui possède un menton semblable qu’il fait carnaval avec son nez (Argot du peuple).

MÉQUARD: Commandant d’une bande de voleurs (Argot des voleurs).

MERCE: Pour merci (Argot des voleurs).

MERDAILLON: Moins que rien, une sous-merde (Argot du peuple). V. Avorton.

MERDE: À bout d’argument, dans le peuple, on dit:

Merde, est-ce français?

C’est-à-dire: Me comprends-tu?

Ce à quoi on répond:

—Goûtes tes paroles.

—Tu peux te retourner et te mettre à table.

—S’il pleuvait de la merde et que chacun en ait suivant son grade, t’en aurais un rude paquet, car tu es le colonel des imbéciles (Argot du peuple). N.

MÈRE AU BLEU: La guillotine. Les voleurs veulent faire croire que c’est le chemin du ciel. A. D.

Pas du tout, c’est parce que le condamné n’y voit que du bleu (Argot des voleurs).

MÈRE D’OCCASION: Les mendiantes louent à des industriels du quartier Mouffetard des petits enfants qu’elles traînent dans les rues pour exciter la charité publique.

Ces enfants changent chaque jour de mère; de là, mère d’occasion ou de rencontre (Argot du peuple). N.

MERLAN (Rouler des yeux de merlan frit).

Homme langoureux et timide qui, n’osant adresser la parole à une femme, la regarde en roulant des yeux (Argot du peuple). N.

MERLAN: Coiffeur perruquier.

Quand le perruquier met de la poudre de riz à son client, il l’enfarine comme le merlan avant d’être mis dans la poêle à frire (Argot du peuple).

MESSE (Être à la): Quand un ouvrier arrive à l’atelier cinq minutes après la cloche, la porte est fermée, il perd un tiers ou une demie journée; il va pendant ce temps boire des canons sur le zinc, l’autel des pochards; le mastroquet officie.

De là, aller à la messe (Argot du peuple).

METTRE À L’OMBRE: Aller en prison.

En effet, on ne craint pas l’ardeur du soleil (Argot du peuple).

METTRE AU CHAUD: V. Rouscailler.

METTRE DANS LE MILLE: Réussir une affaire du premier coup.

Terme usité chez les pédérastes; mille: podex (Argot du peuple).

METTRE EN BRINDEZINGUE (Se): Faire la noce.

Être dans les brindezingues: être pochard (Argot du peuple). N.

METTRE EN BRINGUE: Mettre en morceaux, briser. A. D.

Bringue, signifie femme maigre, l’expression est donc fausse.

Mettre en bringue, est synonyme de brindezingue (Argot du peuple). N.

METTRE EN PÂTE: Les compositeurs lient les paquets de caractères avec une ficelle.

Quand le paquet est mal lié ou que le bout de la ficelle est emprisonné, le metteur en pages met le paquet en pâte, c’est-à-dire que les caractères se mélangent et qu’il faut recomposer.

Quand, dans le paquet, il y a des lettres qui ne sont pas du corps, ou que le paquet n’a pas été assez mouillé, en le déliant, si les lettres tournent, on appelle cela: faire un soleil (Argot d’imprimerie). N.

METTRE LA TÊTE À LA FENÊTRE: Condamné à mort qui passe la tête dans la lunette (Argot des voleurs).

METTRE LA CLEF SOUS LA PORTE: Se sauver, déménager furtivement.

Se dit communément d’un commerçant, qui, ne faisant pas ses affaires, abandonne sa boutique (Argot du peuple).

METTRE LA CLEF SOUS LE PAILLASSON: V. Mettre la clef sous la porte.

METTRE LES BOUCHÉES DOUBLES: Se dépêcher de faire quelque chose.

Synonyme de manger un morceau sur le pouce, à la hâte.

Cette expression est employée pour tout ce qui est fait précipitamment (Argot du peuple).

METTRE DU PAPIER DANS SA SONNETTE: V. Affaler son grelot.

METTRE SUR LES FONDS DE BAPTÊME (Se): Quand le nourrisseur de poupard a mal renseigné ses complices et qu’ils sont dans une position difficile, pour se sauver et n’être pas paumés marrons:

—Ils sont sur les fonds de baptême (Argot des voleurs).

METTRE UNE ÉPINGLE À SA CRAVATE: S’enfiler un demi-setier (Argot du peuple). N.

MEULARD: Veau.

Allusion à la mollesse de la viande.

On dit aussi: un bœuf en bas âge (Argot du peuple). N.

MEULE: Vide.

C’est veule qu’il faudrait dire, veule signifie mou.

Meule est une corruption (Argot des souteneurs). N.

MEUNIER: Recéleur qui a la spécialité d’acheter aux mastardiers ou voleurs de gras double, le plomb, l’étain ou le zinc, volés dans les maisons en construction (Argot des voleurs).

MEZIGUE: Moi.

On dit aussi mezigo (Argot des voleurs).

MICHÉ: Homme qui monte avec une fille, en payant, ou qui y couche.

Miché était déjà connu en 1764. Merard de Saint-Just dit ceci:

D’où vient qu’on appelle miché
Quiconque va de nuit et se glisse en cachette
Chez des filles d’amour, Barbe, Rose ou Fanchette?

(Argot des souteneurs).

MICHÉ DE CARTON: Homme à qui une fille demande cinq louis et qui lui offre quarante sous.

On dit aussi: miché à la mie de pain (Argot des filles).

MICHETON: Petit miché qui rale sur le prix des faveurs des filles (Argot des souteneurs).

MIE DE PAIN: Moins que rien.

Les typos, par la grande habitude, savent, du premier coup d’œil, discerner un bon article d’un mauvais.

Le mauvais, c’est de la mie de pain (Argot d’imprimerie).

MIE DE PAIN: Pou.

On sait combien une mie de pain est désagréable sur la peau; le pou occasionne une démangeaison semblable (Argot des voleurs).

MIJOU (Faire le): Simuler une maladie (Argot des voleurs).

MILLED: Billet de mille francs (Argot des voleurs). N.

MILLERIE: Loterie que tiennent les camelots dans les fêtes publiques (Argot des camelots).

MINCE: Rien.

Mais, dans le peuple, cette expression sert à manifester l’étonnement.

—Ah! mince alors, elle en a une nichée dans la paillasse (Argot du peuple).

MINETTE: V. Descendre à la crèmerie.

MINISTRE DE L’INTÉRIEUR: Doigt.

Allusion à une coutume très en usage dans les couvents de jeunes filles (Argot du peuple).

MIOU: Enfant.

Allusion au miaou du jeune chat (Argot du peuple).

MIRADOU: V. Mirante.

MIRANTE: La glace (Argot des voleurs).

MIRETTES: Les yeux (Argot des voleurs).

MIROIR À PUTAINS: Joli garçon qui s’en croit beaucoup, une espèce de «Nicolas» de faubourg.

Dis-lui qu’un miroir à putain
Pour dompter le pays latin
Est un fort mauvais personnage.

Cette expression était employée au temps de Scarron (Argot du peuple).

MIRQUIN: Bonnet.

—J’ai vu une gerce au raslue de Saint-Lago; elle était rudement gironde avec son melet mirquin; il y manquait un rayon de miel (Argot des voleurs). N.

MIRZALES: Boucles d’oreilles (Argot des voleurs).

MISE-BAS: Quand une équipe de compositeurs est mécontente pour une raison ou pour une autre, elle met bas, elle quitte le travail (Argot d’imprimerie).

MISÉREUX: Malheureux.

Homme qui est dans une profonde misère (Argot du peuple). N.

MISLOQUE: Théâtre (Argot des voleurs).

MISTOUFLES: Faire des misères, causer des désagréments à quelqu’un (Argot du peuple).

MITARD: Cachot (Argot des voleurs).

MI-TEMPS: Milieu.

A. Delvau écrit mitan, ce n’est pas exact (Argot du peuple).

MITRE: Cachot.

Allusion à la mitre de l’évêque, qui est un signe de dignité.

Être au cachot, pour un voleur, est un titre à la considération de ses pareils.

—Où donc est Barbe-à-Poux?

—Il est mitré pour huit jornes (Argot des voleurs).

MOINE: Qu’une épreuve typographique soit faite à la brosse ou à la machine, la partie qui ne prend pas l’encre se nomme un moine (Argot d’imprimerie).

MOISSONNEUR: Le commissaire de police.

En effet, il moissonne ceux qui sont amenés à son burlingue.

Mot à mot: il les fauche comme des blés mûrs... pour la prison (Argot des voleurs). V. Quart d’œil.

MOLARD: Cracher des mucosités qui filent comme du macaroni.

Graillonner salement.

Quand un large crachat s’étale sur un trottoir, on dit:

—Quel beau molard (Argot du peuple).

MOLETTE: La bouche.

Je ne vois pas bien qui a pu donner naissance à cette expression.

La molette sert à un éperon, elle sert aussi à couper la pâte pour une certaine espèce de gâteau; enfin, quoi qu’il en soit, ce mot est usuel (Argot des voleurs). N.

MOME: Petit.

On appelle aussi une femme la môme.

Il y en a de célèbres: la Môme-Fromage, la Môme-Goutte-de-Sperme, la Môme-Caca.

On dit aussi momaque (Argot du peuple). N.

MOME D’ALTÉQUE: Jeune homme beau et efféminé que l’on rencontre vêtu d’un ça ne te gêne pas dans le parc (veston), d’un pantalon collant gris clair, d’une cravate voyante à larges bouts, et maquillé la plupart du temps.

On le rencontre dans la galerie d’Orléans, au Palais-Royal, ou au passage Jouffroy.

Ce n’est pas l’omnibus qu’il attend.

On les nomme aussi chouard, en souvenir du fameux procès Germiny (Argot du peuple). N.

MOMIGNARD: Diminutif de môme.

Petit enfant (Argot des voleurs). V. Abéqueuse.

MOMINETTE: Absinte servie dans un petit verre mousseline.

Allusion à la petitesse, du verre, qui est un môme, en le comparant à un grand verre (Argot du peuple). N.

MONSEIGNEUR (Pince): Outil qui sert spécialement, à fracturer les portes; il est tout spécialement employé par les cambrioleurs.

Cet outil en acier mesure 45 centimètres de hauteur et 25 millimètres de circonférence.

Il est connu depuis le XVIIIe siècle.

C’était un des principaux instruments dont se servait le légendaire Cartouche (Argot des voleurs).

MONTANT: Pantalon.

Il monte en effet le long des jambes.

Le montant à pattes d’éléphant est, depuis des années, le signe distinctif des citoyens à trois ponts (Argot des souteneurs). V. Falzar. N.

MONTANTE: Échelle.

L’image est frappante. Quand, autrefois, l’échafaud était élevé de treize marches que le condamné devait gravir, on nommait les marches la montante du calvaire (Argot des voleurs). N.

MONTE EN L’AIR: Les cambrioleurs.

Ils sont ainsi nommés parce que ces voleurs opèrent généralement dans les chambres de domestiques situées aux étages supérieurs.

Ils montent en l’air (Argot des voleurs). N.

MONTER UN BATEAU: Faire croire à une affaire imaginaire; présenter à des niais un projet de mise en actions pour exploiter une fonderie de pavés ou une filature de pains de sucre.

Monter un bateau, synonyme de monter le coup (Argot du peuple). N.

MONTER LE VERRE EN FLEUR (Se): Se monter le coup à soi-même. S’illusionner sur toutes choses.

S’imaginer être aimé par désintéressement.

En un mot, croire que c’est arrivé.

—Mon miché qui s’est monté le verre en fleur que j’y allais de mon voyage, faut-y qu’il soit poire (Argot du peuple). N.

MONTER LE JOB (Se): Se monter le coup.

Croire que c’est arrivé ou vouloir le faire croire à un autre (Argot du peuple).

MONTER À L’ÉCHELLE: Être guillotiné.

Mot à mot: monter à l’échelle de l’échafaud. L. L.

Monter à l’échelle a une toute autre signification dans le peuple; cela veut dire: faire mettre quelqu’un en colère.

—Il a la tête près du bonnet, il s’enlève comme une soupe au lait.

On dit aussi:

—Il a un si sale caractère qu’il grimpe à tout bout de champ (Argot du peuple). N.

MONTER UN SCHTOSSE: Mentir.

Synonyme de monter le coup à quelqu’un.

Stoss en allemand veut dire coup.

Ce mot s’est francisé et court les ateliers.

—Pour faire le lundi et ne pas avoir son sac, on monte un schtosse au patron en lui disant que l’on va à l’enterrement de son père.

Il en est qui ont enterré leur père autant qu’il y a de jours dans l’année (Argot du peuple). N.

MONNAIE DE SINGE: Une monnaie qui n’a pas cours à la Banque de France, car les garçons de recette n’accepteraient pas des grimaces en paiement (Argot du peuple).

MONTRETOUT (Aller à): Quand les filles vont au dispensaire, tous les quinze jours, pour passer la visite sanitaire, elles montrent tout au docteur (Argot des filles).

MORACE: Cri.

—Si le pante morace et que les becs de gaz accourent, lingre le pour ne pas être paumé (Argot des voleurs). N.

MORBAC: Moutard désagréable.

Morbac, diminutif de morpion (Argot du peuple).

MORCEAU DE GRUYÈRE: Individu grêlé dont le visage est percé de trous comme une passoire.

Morceau de gruyère est une allusion aux innombrables trous dont ce fromage est percé (Argot du peuple). N.

MORDANTE: Lime.

On dit d’un individu fielleux, qui ne peut prononcer une parole sans dire une méchanceté, qu’il est mordant comme une râpe (Argot des voleurs).

MORFE: Repas.

Refaite du matin, déjeuner.

Refaite du jorne, dîner.

Refaite de sorgue, souper.

Refaite exprimé bien l’action de se refaire l’estomac.

Morfer est ici pour manger (Argot des voleurs).

MORFIALLER: Manger.

Vieux mot employé par Rabelais au Propos des Beuveurs.

Où diable les escarpes ont-ils été dénicher cette expression? (Argot des voleurs).

MORFILLER LE DARDANT (Se): Se faire du mauvais sang, se manger le cœur. A. D.

Morfiller veut bien dire manger, mais dardant signifie amour.

C’est morfiller le vermeil (sang) ou le palpitant (cœur) (Argot des voleurs).

MORLINGUE: Porte-monnaie.

D’aucuns disent morningue.

Il serait plus juste de dire morniflingue, puisque mornifle veut dire monnaie (Argot des voleurs). N.

MORNANTE: Bergerie (Argot des voleurs).

MORNIFFLE: Gifle.

—Je vais te plaquer une morniffle sur la hure si tu m’emmerdes longtemps (Argot du peuple). V. Giroflée à cinq feuilles.

MORNIFFLEUR: Fabricant de fausse monnaie, argent, or, ou billets de banque (Argot des voleurs).

MORNOS: La bouche.

Manger une bouchée, avaler une mornée (Argot des voleurs).

MORPION: Insecte qui occasionne des démangeaisons fort désagréables.

Par analogie, on dit de quelqu’un dont on se débarrasse difficilement:

—Il colle comme un morpion.

On dit également: mille pattes (Argot du peuple).

MORUE: Terme employé par les femmes des halles pour répondre aux raleuses qui leur offrent un prix dérisoire de leurs marchandises.

—Va donc, morue, faudrait-y pas te foutre du beurre avec et te le porter à ton poussier (Argot du peuple).

MOU COMME UNE CHIQUE: Homme de peu de consistance, sans volonté, qui travaille mollement.

Allusion au morceau de tabac que le chiqueur a mâché toute une journée: il est mou.

De là, mou comme une chique (Argot du peuple).

MOU POUR TON CHAT: Quand on regarde avec insistance une jolie fille et que cela ne lui plaît pas, elle répond:

—Ça, mon vieux, c’est pas du mou pour ton chat.

D’aucunes, plus expressives, disent:

—Tu peux regarder, c’est pas de la viande pour ton serin (Argot du peuple). N.

MOUCHARDE: La lune.

Elle se montre souvent fort mal à propos pour déranger messieurs les voleurs dans leurs expéditions nocturnes (Argot des voleurs). N.

MOUCHE: Laid, bête, ridicule.

—Elle est rien mouche, la môme à Poil-aux-pattes (Argot du peuple).

MOUCHES (Tuer les): On dit de quelqu’un qui a une haleine infecte:

—Il tue les mouches à quinze pas (Argot du peuple). V. Pot de chambre cassé dans l’estomac.

MOUCHER LE QUINQUET (Se faire): Recevoir une verte correction, une formidable volée (Argot du peuple).

MOUCHIQUE: Laid à faire peur.

Vient du mot russe mejiks (Argot du peuple). N.

MOUCHIQUE À LA SECTION: Mal noté dans son quartier.

Quartier est synonyme de section, depuis la division des arrondissements en sections pour les votes (Argot du peuple). N.

MOULE À GAUFRE: Individu dont le visage a été ravagé par la petite vérole.

Allusion au moule employé par les gaufriers (Argot du peuple). N.

MOULE À PETS: Homme qui se lâche facilement.

Dans le peuple on dit:

—Avec un vent pareil, il va pleuvoir de la merde.

On dit également:

—Si on chante comme ça à ton enterrement, il y aura plus de cochons que de curés (Argot du peuple). N.

MOULE EST CASSÉ (Le): Se dit d’un personnage exceptionnel, inimitable. L. L.

Cette expression n’est pas prise dans ce sens parmi le peuple; elle est employée pour dire d’une femme qui a passé l’âge, qui ne marque plus, qu’elle ne peut plus faire d’enfants: le moule est cassé (Argot du peuple). N.

MOULIN: Boutique du recéleur.

C’est pour cette raison, sans doute, que l’on nomme le recéleur, le meunier (Argot des voleurs). N.

MOULIN À MERDE: La bouche.

En mangeant, elle travaille pour Richer (Argot du peuple).

MOULIN À PAROLES: Femme bavarde qui ne tarit pas, qui parle avec volubilité.

Elle broie les paroles comme le moulin, le café (Argot du peuple).

MOULIN À VENT: Le derrière.

Dans la Chanson du Propriétaire on trouve:

Moulin à eau par devant,
Moulin à vent par derrière.

(Argot du peuple). N.

MOUILLANTE: La soupe (Argot du peuple). V. Laffe.

MOUSCAILLE: La marchandise que l’on abandonne avec satisfaction dans les châlets de nécessité.

Mouscailler: faire ses besoins (Argot du peuple).

MOUSQUETAIRE GRIS: Pou.

Allusion à la couleur de cet horrible animal que pourtant certains adorent.

Un amateur marchande un pou à un chiffonnier; il lui offre d’un pou magnifique un prix dérisoire. L’éleveur le remet délicatement dans sa chemise en lui chantant le refrain célèbre:

Tu n’en veux pas! J’l’remets dans ma chemise.
Ça n’mange pas d’pain.

(Argot du peuple). N.

MOUSSANTE: Bière (Argot du peuple).

MOUSSERIE: Fosse d’aisance des prisons (Argot des voleurs).

MOUSTIQUE DANS LA BOÎTE AU SEL: V. Asticot dans la noisette.

MOUTON: Dénonciateur qui vend ses complices.

Prisonnier qu’on place dans une cellule avec un autre prévenu pour le moutonner.

C’est-à-dire le faire avouer dans la conversation (Argot des voleurs).

MOUTON: Matelas.

Quand il est plus que plat, on dit: galette (Argot du peuple).

MOUVETTE: Indicateur qui fournit des indications à la police.

C’est généralement un camelot; il se meut d’un point à un autre, suivant les cas (Argot des voleurs). N.

MUETTE (Avoir une puce à la): Condamné qui a des remords.

On dit aussi: jouer à la muette (ne pas parler) (Argot du peuple).

MUFFÉE (En avoir une): S’être empiffré jusqu’à en étouffer.

Avoir une soulographie numéro un.

Muffée: n’en plus pouvoir (Argot du peuple). N.

MUFFLE: Communément, ce sont les maçons qu’on appelle ainsi.

La chanson dit:

Tous les muffles que nous connaissons
Ne sont pas à la grève.

En effet, il y a plusieurs genres de muffles:

Tout individu qui se conduit mal avec quelqu’un est un muffle.

Muffle est synonyme de goujat (Argot du peuple).

MURON: Sel.

Muronnière: la salière (Argot des voleurs).

MUSETTE (S’en faire jouer un air): Expression employée dans les maisons de rendez-vous pour désigner un certain travail très estimé des écoliers (Argot des filles).

MUSETTE (Couper la): Empêcher quelqu’un de parler.

On dit aussi: lui couper la chique (Argot du peuple).

MUSICIEN: V. Mouton.


N

NAZ: Nez.

On dit aussi nase.

C’est certainement une abréviation de naseau (Argot du peuple).

NE PAS ATTACHER SON CHIEN AVEC DES SAUCISSES: Avare.

C’est une expression très populaire, superlatif de chien, grippe-sous.

On ne peut rien dire plus d’un homme (Argot du peuple). N.

NE RIEN AVOIR DANS LE FUSIL: Avoir le ventre vide.

L’allusion est facile à saisir:

J’sens l’paquet d’tripes qui s’cavale.

(Argot du peuple).

NEG AU PETIT CROCH: Chiffonnier.

Neg est une abréviation de négociant, et croch de crochet, outil indispensable aux chiffonniers (Argot du peuple).

NÈGRE: Heure de minuit, à laquelle l’obscurité est la plus profonde (Argot des voleurs).

NÉGRESSE: Puce.

Allusion de couleur (Argot du peuple).

NÉGRESSE: Bouteille.

—Allons-nous étouffer une négresse de ginglard à Argenteuil? (Argot du peuple).

NEP: Rastaquouère vendant aux imbéciles des décorations exotiques (Argot des voleurs).

NETTOYÉ: N’avoir plus rien, être absolument à sec.

Nettoyé, être à l’agonie, se sentir mourir.

—Le médecin m’a dit que j’étais nettoyé (Argot du peuple).

NEZ CULOTTÉ: Nez d’ivrogne.

Dans le peuple on dit:

—Si on lui pressait le piton il en sortirait du vin.

Le nez culotté a été célébré par Ch. Colmance:

Un nez culotté,
Piquante parure,
Gracieuseté
De dame nature.
Heureux l’effronté doté
D’un nez culotté.

Il y a des nez culottés qui coulent plus cher que s’ils étaient en or (Argot du peuple).

NEZ RETROUSSÉ: Nez à narines larges et ouvertes.

—Il va te pleuvoir dans le nez.

—Elle se pleure dans le nez quand elle a du chagrin (Argot du peuple).

NIB: Signifie rien.

Cette expression n’est pourtant pas toujours prise dans ce sens.

Quand on dit: nib de blaire, par exemple, pour qualifier un nez énorme, nib devient synonyme de mince qui veut dire beaucoup (Argot du peuple). N.

NIB DE BRAISE: Pas d’argent.

—Par un bourguignon pareil tu restes à la piaule, allons décanille.

Nib de braise, les valades sont dégraissées (Argot des voleurs).

NICHE À SEINS: Corset.

Allusion à ce qu’il soutient les forts, augmente le volume des faibles, discipline les vagabonds et protège les égarés (Argot du peuple). N.

NICHONS: Les seins.

—Laissez-moi tâter vos jolis nichons.

—Combien qu’tu payes? (Argot du peuple).

NIÈRE: Homme quelconque, lui.

—Le gonce a rudement le trac pour son nière.

On dit aussi: mon nière bobéchon pour moi.

Bobéchon, ici, fait double emploi (Argot des voleurs).

NIF: Non (Argot des voleurs).

NIPPÉ: Bien habillé.

—J’avais plus rien, les requins m’avaient bazardée pour payer mon probloque, j’ai dégotté un miché qui m’a renippée, à présent je suis rupine je peux trimarder (Argot du peuple)

NIQUE DE MÈCHE: N’avoir pas de complice.

—J’ai fait mon coup de vogue sans nique de mèche (Argot des voleurs).

NIQUE DE MÈCHE: Refus d’un complice de partager le produit d’un vol.

Nique de mèche, je ne fade pas le pognon (Argot des voleurs).

NIORTE: Viande (Argot des voleurs). V. Crigne.

NOCE DE TAILLEUR: (Faire une): Se promener le long des berges et faire des ronds dans l’eau avec des cailloux (Argot du peuple). N.

NOIX (En avoir): Avoir beaucoup de bijoux (Argot des voleurs).

NONNE (Faire): Faire la foule.

Rien de plus simple: les nonneurs (complices) se groupent autour de l’un d’eux, qui simule un mal subit, de préférence dans une rue barrée; les badauds s’amassent, le tireur peut à l’aise explorer les poches, et souvent la moisson est féconde.

Quand l’un d’eux est pris et qu’il se met à table, on dit qu’il mange sur ses nonneurs (complices) (Argot des voleurs).

NONNEURS: Complices de voleurs, plus particulièrement des pick-pockets (Argot des voleurs).

NORD: Tête.

Dans le peuple, on dit souvent de quelqu’un qui devient fou:

—Il perd le nord (Argot du peuple).

NOZIÈRES: Qui? (Argot des voleurs). N.

NOURISSEUR DE POUPARDS: Complice qui prépare les vols à accomplir.

Un bon nourrisseur de poupards est très recherché par les voleurs (Argot des voleurs).

NOUSAILLES: Nous.

Nosigues est beaucoup plus usité (Argot des voleurs).

NOUVELLE (La): Le bagne.

Abréviation de Nouvelle Calédonie.

Autrefois, quand les bagnes étaient à Brest et à Toulon, on disait le grand pré.

—Il est sapé à faucher le grand pré à perpète (Argot des voleurs).

NOYEUSE D’ÉTRONS: Mère de famille qui va au lavoir public laver le linge de ses enfants.

Allusion aux déjections des bébés qui souillent les couches (Argot du peuple).

NUAGE: La tournure, que portent les femmes; ainsi nommé parce qu’il cache la lune (Argot du peuple). N.


O

ŒIL À LA COQUE: Recevoir sur l’œil un formidable coup de poing qui le poche et en fait un œil au beurre noir.

La violence du coup fait extravaser le sang et le lendemain, l’œil est couvert par une large tache noire.

On appelle alors le blessé: tape à l’œil (Argot du peuple).

ŒIL EN COULISSE: Regarder quelqu’un amoureusement, tendrement, avoir l’air de lui dire:

—Veux-tu?

Faire le genou à sa voisine sous la table, est aussi significatif et beaucoup moins visible, surtout si le mari est là (Argot du peuple).

ŒIL QUI DIT MERDE À L’AUTRE: Deux yeux qui ne vivent pas en bonne intelligence, qui se regardent en chiens de faïence (Argot du peuple). V. Guigne à gauche.

ŒIL (Faire de l’): Les filles font de l’œil aux passants qu’elles veulent raccrocher:

Ses deux beaux chasses vous rembroquaient
Puis à la piaule tous les gonces rappliquaient.

dit la chanson du marlou (Argot des filles).

ŒIL (Faire l’): Avoir à crédit chez les fournisseurs.

Dans le peuple, quand on oublie de payer, le fournisseur refuse crédit; alors on dit que l’œil est crevé (Argot du peuple).

OGRESSE: La procureuse ou la proxénète, bouquetière ou marchande à la toilette; elle donne cent sous aux filles quand elle touche vingt francs, elle leur vend mille francs ce qui vaut cent francs.

Mot à mot: l’ogresse les mange toutes crues (Argot des filles).

OGRESSE: Femme friande de chair fraîche appartenant à son sexe (Argot des filles). V. Accouplées.

OIGNON (L’): Il s’appelle aussi trou de balle (Argot des souteneurs). V. Figne. N.

OIGNON: Montre énorme. Argot du peuple qui dit: ognon.

—Ton ognon marque-t-il l’heure et le linge? (Argot du peuple).

OISEAU: Hélas! quand il est envolé c’est pour longtemps et les regrets si amers qu’ils soient sont superflus.

Heureux encore s’il ne laisse pas un petit dans la cage.

—Elle a perdu son oiseau (Argot du peuple). N.

OLIVIER DE SAVETIER: Navet.

Comme ils sont économes pour la plupart, ils se servent de l’huile de navette qui se vend bon marché pour assaisonner leur salade.

C’est exactement la même chose que pour les pommes de terre; on dit des oranges de limousins (Argot du peuple).

OMNIBUS: Femme à tous.

On dit aussi: wagons et omnibusardes.

Fréquemment, ces omnibus là donnent une correspondance pour l’hôpital du Midi (Argot du peuple).

OMNIBUS À CONI: Voiture qui emporte le guillotiné du lieu d’exécution au cimetière (Argot des voleurs).

ONCLE: Le guichetier qui garde la première porte d’entrée d’une prison.

Je ne vois pas trop pourquoi on l’appelle mon oncle car il n’a guère de tendresse pour les visiteurs, à moins que ce ne soit un à peu près. Quand on va au clou, mon oncle prend soin des objets déposés (Argot des prisons).

ONGLES CROCHES (Les avoir): Ce sont généralement les Normands qui ont cette spécialité, car on dit très souvent d’un grippe-sous que l’on pourrait le jeter au plafond qu’il ne retomberait pas.

Avoir les ongles croches est synonyme de poser zéro et de retenir tout (Argot du peuple).

ORANGER DE SAVETIER: Pied de sarriette, que les savetiers placent dans leur échoppe à côté d’eux (Argot du peuple).

ORDINAIRE: La soupe et le bœuf que les ouvriers mangent le matin.

Comme presque toute l’année c’est la nourriture ordinaire, de là, le nom (Argot du peuple).

ORDINAIRE: Homme habitué à venir à heure et à jour fixe chez une fille.

C’est un protecteur intermittent (Argot des filles).

ORGUE: Homme.

Mon orgue, moi.

Ton orgue, toi.

Son orgue, lui.

Leur orgue, eux.

(Argot des voleurs).

ORGUE (Jouer de l’): Ronfler.

Il ronfle comme un tuyau d’orgue.

Il ronfle comme une toupie d’Allemagne.

Allusion au ronflement sonore que fait la toupie en tournant sur elle-même (Argot du peuple).

ORNICHON: Oie, volaille.

Les voleurs qui ont la spécialité de dévaliser les poulaillers dans les campagnes se nomment des nettoyeurs d’ornichons (Argot des voleurs). V. Angluce.

ORNIE DE BALLE: Dindon (Argot des voleurs).

ORPHELIN DE MURAILLE: Les étrons qui s’alignent le long des murs isolés.

Pourquoi orphelins?

Ils sont parfois en nombreuse société et beaucoup ne peuvent être pris pour des vagabonds étant munis de papiers (Argot du peuple).

ORPHELIN: Bout de cigare ou de cigare que le fumeur abandonne dédaigneusement.

Ils sont aussitôt recueillis par le ramasseur de mégots qui leur fait un sort (Argot du peuple).

ORPHELIN: Verre de vin à moitié bu que le buveur abandonne sur le comptoir du mastroquet.

Quand un consommateur boit seul sans trinquer, il étouffe un orphelin.

Dans les bars, il ne manque pas de Saint-Vincent-de-Paul pour les recueillir (Argot du peuple).

OSEILLE: La faire à l’oseille.

Jouer un tour désagréable à quelqu’un. A. D.

Il attribue ce mot à un cabotin habitué d’une petite gargote de la rue de Malte où mangeaient les artistes des théâtres du boulevard et du Temple.

Selon lui, ce mot date de 1861 environ.

Comme cette locution: la faire à l’oseille est très répandue, il est bon de rétablir son origine.

Le petit père Vinet, mort il y a deux ans dans un taudis de la rue de Tourtille, à Belleville, était vers 1840 un chansonnier en vogue.

Il avait été sauvage au Caveau des Aveugles, au Palais-Royal, avant le père Blondelet; il mangeait dans la gargote citée par Delvau.

La gargote était non rue de Malte, mais rue de la Tour. Un après-déjeuner, il composa une chanson intitulée: Vous me la faites à l’oseille. Bouvard, l’homme à la vessie la chantait encore en 1848, place de la Bastille.

Voici un couplet de cette chanson:

Comme papa j’suis resté garçon
Pour bonne j’ai pris Gervaise.
Elle est maîtresse à la maison
Je la trouve mauvaise
De la cave au grenier
La danse du panier
Que c’est une merveille.
Elle mange à son goût
Mes meilleurs ragoûts,
Vous me la faites à l’oseille.

Comme on le voit, il y a plus de cinquante ans que l’on connaît cette expression (Argot du peuple). N.

OS: Argent, or ou monnaie.

—J’ai de l’os à moelle dans ma poche (plusieurs pièces de cent sous) (Argot du peuple).

OSEILLE: Argent (Argot du peuple). V. Aubert.

OSEILLE (La faire à l’): Réussir un bon vol qui a été bien nourri.

Sûrement c’est la faire à l’oseille à celui qui a été dévalisé.

Les voleurs sont quelquefois facétieux (Argot des voleurs).

OSSELETS: Les cinq doigts.

Les gamins jouent un jeu qui se nomme osselet avec des os de pied de mouton (Argot du peuple). V. Apôtres.

OURLER LE BEC: Besogne terminée.

Quand un ouvrier graveur met sa signature au bas de sa planche ou de son bois, le bec est ourlé (Argot d’atelier).

OURS: Homme sombre, triste.

Dans les ateliers, on dit d’un ouvrier qui fuit ses camarades: c’est un ours.

En réalité, ours mal léché est synonyme de mufle (Argot du peuple).

OURS: Mauvais livre qui reste pour compte à l’éditeur.

Mauvais manuscrit de pièce qui dort dans les cartons du directeur.

En un mot, tout ce qui ne vaut rien, qui est raté, est un ours (Argot du peuple).

OURS (En poser un): Quitter sa casse pour raser un copain; la séance se prolongeant, les camarades crient:

Mince d’ours (Argot d’imprimerie).

OURSER: Il est très difficile d’expliquer le sens brutal de ce mot autrement que comme ceci:

Mari qui remplit ses devoirs conjugaux comme un ours (Argot du peuple). N.

OUTIL: Vieille femme.

Objet de rebut qui ne peut servir à aucun usage.

Terme de mépris fréquemment employé:

—Sale outil (Argot du peuple).

OUTIL DE BESOIN: Femme ou fille.

Elles ne deviennent outil que par l’habitude de la cohabitation.

Un souteneur qui n’a pas de poigne pour défendre sa marmite est également un outil de besoin... jusqu’à temps qu’elle en trouve un autre (Argot du peuple).

OUVRIR SA SOUPAPE: Péter bruyamment.

Allusion à la soupape de la chaudière qui se soulève pour laisser échapper la vapeur quand la pression est trop haute.

On crie à celui qui s’oublie aussi fort:

—Ferme ta soupape, ça pue (Argot du peuple). N.

OUVRIR SA TABATIÈRE: Péter.

Par allusion à l’odeur, on dit: Quelle rude prise! On en prend plus avec son nez qu’avec une pelle (Argot du peuple). N.


P

PAF: Cette expression désigne l’objet qui distingue l’homme de la femme.

Ce sont les voyous qui ont inventé le mot.

Quand un tenancier d’une maison de tolérance se retire des affaires et qu’il se fait construire une maison à la campagne, s’il éprouve, par vanité, le besoin de mettre au fronton de sa maison un écusson, il peut y ajouter cette devise qui explique le mot paf:

Pene erexit domum (Argot du peuple). N.

PAF (Être): Être gris.

—Je me suis paffé hier soir que c’en est dégoûtant.

Paf, ça y est.

Chose accomplie. Synonyme de: J’en ai mon pied. (Argot du peuple).

PAFFS: Souliers.

C’est à peu près le meilleur mot d’argot pour désigner le bruit que fait le marcheur ou frappant le sol du pied.

C’est une image: paff! paff! (Argot du peuple).

PAGNE: Lit.

Allusion au pagne qui entoure la taille des sauvages; les draps cachent également la nudité de l’homme et de la femme (Argot du peuple). N.

PAGNE: Provision.

On n’les but’plus, car c’est un mauvais flanche,
Y en a toujours qui sont paumés marrons,
Mais sans r’niffler, pour eux on fait la manche,
On leur envoie le pagne au violon.

(Argot des voleurs).

PAGNOTER (Se): Se coucher.

Malgré le double emploi, on dit dans le peuple:

—Je vais me pagnoter dans mon pieu avec mes dardants (Argot du peuple).

PAILLASSE: Femme.

Un homme se promène, sa femme au bras; il est rencontré par un ami:

—Tiens, tu déménages, Charlot?

—Pourquoi donc?

—Puisque t’as ta paillasse sous le bras (Argot du peuple). V. Boulet.

PAILLASSE À SOLDAT: Femme sur laquelle tout un régiment couche.

Mot à mot: qui sert de paillasse (Argot du peuple). N.

PAILLASSE: Pitre qui fait le boniment devant les baraques de saltimbanques.

Paillasses: les hommes politiques qui servent tous les gouvernements, pourvu qu’ils paient.

Paillass’, mon ami,
N’saut’ pas à demi.
Saute pour tout le monde.

(Argot du peuple).

PAILLE (C’est une): Signe d’étonnement qui veut dire beaucoup, trop gros fardeau à porter:

C’est une paille que de porter ça là bas (Argot du peuple). N.

PAILLE AU CUL (Avoir la): Être mis à la réforme. L. L.

S’en aller la paille au cul, c’est quitter le régiment en ayant encore de la salle de police ou de la prison à faire.

Allusion à la paille sur laquelle couchent les prisonniers (Argot des troupiers). N.

PALABRE: Discours ennuyeux, prudhommesque. A. D.

Palabra, en langue espagnole, signifie parole, il est vrai, mais ce n’est pas le sens dans le langage populaire.

Palabre trembleuse: figure de bourgeois qui tremble à propos de rien, qui a peur de son ombre, qui se cache au moindre bruit.

Palabre signifie figure:

—Le biffard a tellement la frousse que sa palabre défargue (Argot du peuple). N.

PALAIS: Pièce de cinq francs.

Allusion à la forme plate du palais qui sert pour jouer au tonneau (Argot du peuple). V. Tune.

PALLAS: Discours.

—Tu ne vas pas bientôt nous lâcher le coude avec ton pallas à dormir debout.

—Viens-tu entendre le bénisseur, il va pallasser sur la tombe de son ami (Argot des voleurs).

PALLASSEUR: Individu qui parle d’abondance, longuement, sur tout ce qu’il ne sait pas.

—Gare aux inondations! le pallasseur a ouvert son robinet (Argot du peuple).

PALPEUR: Juge d’instruction.

Il palpe en effet les prisonniers pour les faire avouer.

Cette expression est plus jolie que l’ancienne: curieux (Argot des voleurs). N.

PALPITANT: Le cœur (Argot des voleurs). V. Grand ressort. N.

PAMPINE: Sœur de charité (Argot des voleurs).

PANAMISTE: Cette expression date de 1892.

Ce sont les dénonciations faites par M. Andrieux contre les 104 députés qui auraient touché des chèques à la caisse du Panama qui ont donné naissance à ce mot (Argot du peuple). N.

PANADE: Soupe de pain qui mijote lentement sur un feu doux.

Dans le peuple, être dans la panade, c’est être dans la misère.

Allusion à ce que la panade est généralement faite avec des croûtes de pain (Argot du peuple). N.

PANAIS: Pan de chemise.

Être en panais, être en chemise.

Dans le peuple, panais est employé comme négation.

—Veux-tu me prêter cent sous?

—Des panais, tu te fouterais de ma fiole (Argot du peuple). N.

PANIER: Lit.

—Mon petit homme, veux-tu venir avec moi faire une séance de panier, tu verras comme je suis aimable (Argot des filles).

PANIER À SALADE: Voiture cellulaire pour conduire les prisonniers des postes de police au Dépôt de la préfecture, ainsi nommée parce qu’autrefois cette voiture était à claire-voie (Argot des voleurs).

PANIER À DEUX ANSES: Avoir une femme à chaque bras (Argot du peuple).

PANIER PERCÉ: Homme qui n’a rien à lui.

Allusion au panier sans fond que jamais on ne peut emplir (Argot du peuple).

PANSU: Terme de mépris employé par le peuple pour qualifier un bourgeois qui fait un dieu de son ventre et qui a une panse arrondie.

Pansu: égoïste qui ne songe qu’à lui (Argot du peuple). N.

PANTIN: Paris.

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