Essais d'un dictionnaire universel: contenant généralement tous les mots François tant vieux que modernes, & les termes de toutes les Sciences & des Arts
G.
GALEASSE. s. f. c'est un Bâtiment de bas bord, le plus grand de tous les Vaisseaux à Rames. Elle a ses Rameurs sous couverte, & elle peut porter 20. canons avec une pouppe capable de loger un grand nombre de Mousquetaires: elle va à Rames & à voiles, & à trois Masts, Maestre, Misaine & Artimon qu'elle ne desarbore point: elle a 32. bancs & six ou sept Forçats à chacun, elle a trois batteries à proüe l'une sur l'autre de deux canons chacune, de 36, de 24. & de dix livres de boulet; elle en a deux à pouppe chacune de trois canons de 18. livres. Les seuls Venitiens ont eu jusqu'ici des Vaisseaux de cette espece. Guillaume de Tyr fait mention de Galeasses qui ont 100. bancs de Rames.
GALEBANS. s. m. Terme de marine, ce sont deux cordages qui tiennent les masts de hune dans leur assiéte & qui secondent les aubans, on les appelle aussi Galaubans & Galans.
GALEE, en termes d'Imprimerie, est la planche qui sert à poser les lettres à mesure qu'elles sont arrangées par le Compositeur avant que de les imposer pour en faire les formes.
GALIMATHIAS. s. m. Discours obscur & embroüillé où on ne comprend rien.
On le dit aussi des affaires fort embarassées & des maisons qui sont en trouble & en desordre; le mari plaide contre sa femme, le fils contre le pere, c'est un Galimathias où on ne comprend rien. Ce mot vient de Polimathie qui signifie diversité de sciences; à cause que ceux qui ont la mémoire chargée de plusieurs sortes de sciences, sont d'ordinaire confus & s'expliquent mal.
GARDE. s. f. Terme de Guerre, de Chasse, &c. Défense ou conservation de quelque chose; Le Roi a commis la garde de ce Château à un tel Capitaine: Cette Ville est de grande garde; Une fille à marier, de petits enfans, sont de difficile garde.
On le dit aussi des gens qui sont préposez pour aider à cette garde; Il faut bien deux mille hommes pour la garde de cette Ville. Les Academiciens sont exempts de guet & de garde.
Garde, est aussi la faction ou la vigilance qu'on a dans le service pour la défense d'une Place; ainsi on dit, un tel Régiment est aujourd'hui de garde, entre en garde, monte, descend, réleve la garde, un Officier, un Sergent de garde. Un corps de garde est un poste où on met plusieurs Soldats qui se relevent de temps en temps, & qui relevent aussi les sentinelles: il se dit non seulement du lieu, mais aussi des Soldats qui y sont postez pour s'y défendre, soit au Camp, soit dans la Ville.
On dit chez les Grands, que des Officiers, des Pages, des Laquais sont de garde, pour dire qu'ils sont de jour, & obligez à être assidus au service de leur Maître, tandis que les autres se reposent.
Grande garde, en termes de Guerre est un corps de Cavalerie composé de plusieurs Escadrons détachez à la tête d'un Camp pour résister quelque temps à l'ennemi, jusqu'à ce que l'Armée ait loisir de se mettre en ordre pour combattre.
On dit aussi garde avancée ou garde folle, celle d'un corps de 15 ou 20 Maîtres qui est au delà de la grande garde pour avertir des approches de l'ennemi.
On dit en termes de Palais, mettre à la garde de quelqu'un, pour dire charger quelqu'un de la conservation du quelque chose: On a mis ce Prisonnier à la garde d'un Huissier, pour dire qu'il sera tenu de répondre de sa personne. On a laissé tous les meubles saisis de cette maison, à la garde d'un voisin qu'on en a chargé, qui a pris tout en sa garde. On a mis cette fille à la garde d'une telle Dame.
On dit aussi payer la garde de quelque chose, pour dire le salaire qu'on donne à celui qui a eu le soin de la garder & conserver. On lui a taxé tant pour ses frais de garde.
On appelle aussi lettres de garde-gardienne, des Lettres de privilége que le Roi donne à quelques personnes & Communautez, par lesquelles, il déclare qu'il les prend en sa garde particuliére, & pour cet effet il leur assigne de certains Juges, par devant lesquels toutes leurs causes sont commises; anciennement c'étoit le Prévôt de Paris, & maintenant ce sont les Requêtes du Palais & de l'Hôtel. L'Université de Paris, l'Abbaïe de S. Victor ont des Lettres de garde-gardienne attributives de Jurisdiction au Prévôt de Paris.
Garde-noble, Terme de Coûtumes, est un droit que les peres & les meres nobles ont de joüir du bien de leurs enfans mineurs jusqu'à un certain âge, qui est de 20. ans pour les mâles & de 15. ans pour les filles en la Coûtume de Paris, sans être tenus d'en rendre compte: à la charge de les entretenir selon leur qualité, de tenir les bâtimens en bon état, & de païer toutes leurs dettes mobiliaires. En Normandie le Seigneur Feodal à la garde-noble des orfelins de ses vaisseaux & de leurs Fiefs tenus de lui en hommage.
Garde Bourgeoise ou roturiere, est un droit ou privilége accordé aux Bourgeois de Paris par la Coûtume, qui est le même à l'égard des peres ou meres bourgeois, que celui de garde-noble à l'égard des Gentilshommes.
Garde, en termes des Eaux & Forêts, est une étenduë de païs, dans laquelle certains gardes & Officiers sont commis pour l'a conservation des bois: Les grands Maîtres sont obligez par l'Ordonnance de faire leurs visites de garde en garde.
Garde, signifie quelquefois protection: Ainsi le Roi finit les Lettres qu'il écrit à ses sujets, priant Dieu qu'il vous ait en sa sainte garde: On dit aussi à ceux qu'on éconduit, allez vous-en à la garde de Dieu.
Garde, signifie aussi précaution, & on dit absolument prenez garde, ou prenez garde à vous, à vôtre conduite: Il faut bien se tenir sur ses gardes quand on a à faire à des méchans: Il faut se donner de garde des surprises des chicaneurs: Il faut être toujours en garde contre les tentations de l'Esprit malin: Je n'ay garde de manquer au respect que je vous dois: On dit aussi, il n'a garde d'être aussi brave que son aîné, pour dire il s'en manque beaucoup.
Garde, signifie aussi considération. Vous ne prenez pas garde que ce que vous dites fait contre vous: Quand on contracte il faut bien prendre garde à ce qu'on dit, & à ce qu'on fait: Quand on juge, quand on fait des experiences, il faut prendre garde jusqu'aux moindres circonstances, jusqu'aux moindres minuties: on dit aussi il faut toûjours être en garde avec cet homme-là, pour dire qu'il est accoûtumé à tromper, à surprendre les gens: Cet avare prend garde jusqu'à la moindre obole, il est exact à ne rien relâcher: Il ne faut pas prendre garde à ce que dit un foû, un yvrogne, pour dire, s'en fâcher, y ajoûter foi, &c.
Garde, en termes de négoce, signifie conservation, durée, en même état: Le vin est verd cette année, il sera de garde. Les fruits d'Eté ne sont pas de garde, il les faut confire pour être de garde: La mode de ces étoffes se passe; la garde n'en vaut rien.
On appelle chez les Joüeurs de Piquet une garde, certaine petite carte de même point que le Roi qu'ils ont en main & dont ils n'ont pas l'as: On perd souvent une belle partie de Piquet pour avoir écarté sa garde: Une double garde, ce sont deux cartes de ce même point.
Garde, est aussi une femme qui est attachée au service d'un malade, ou d'une femme en couche: Les pareins & mareines font un présent à la sage femme & à la garde.
Garde, est aussi un terme d'escrime, & on dit être en garde & se mettre en garde, pour dire se mettre en posture pour se défendre de son ennemi les armes à la main.
Il y a quatre gardes générales de l'Epée, que pour bien concevoir, il faut se représenter un cercle décrit sur un mur à plomb & divisé en ses quatre points cardinaux, de haut en bas & de droit à gauche: quand on porte la pointe de son Epée au point inferieur du cercle, avec le fort opposé au point superieur du même cercle, & le corps fort penché en avant, c'est ce qu'on appelle la prime ou la premiere garde; la seconde garde que plusieurs nomment tierce, mais improprement, se fait en portant la pointe de l'Epée au deuxiéme point du même cercle distant d'un quart du premier point, & montant à gauche, le fort de l'Epée tourné à droit en dehors, & le corps relevé à proportion: La tierce ou la troisiéme garde se fait en posant la pointe de l'Epée au point superieur du même cercle, qui est diametralement opposé à l'inferieur de la prime, & alors le corps, le bras, & l'Epée sont dans leur naturelle disposition, & dans le milieu des extrêmitez de leurs mouvemens: La quarte se fait en portant la pointe de l'Epée au quatriéme point du même cercle, directement opposé à celui de la seconde, en descendant à droit à un quart de la tierce, le côté exterieur du bras & le plat de l'Epée étant tournez vers la terre, le corps étant hors la ligne à droit, & le fort de l'Epée vers la ligne à gauche: Il y a une quinte & cinquiéme garde qui n'est que le retour de la pointe de l'Epée à droit aprés la révolution de ce cercle, au point inferieur de la prime d'où elle étoit partie & néanmoins avec une autre disposition du corps, du bras, & de l'Epée.
Toutes ces gardes s'appellent aussi figures & postures; le centre de ces mouvemens doit être à l'épaule: En toutes ces sortes de gardes il y en a de hautes avancées, hautes retirées, hautes moyennes, quand elles sont posées devant la plus haute partie du corps, aiant le bras tout étendu, fort retiré, ou entre l'une & l'autre extrêmité: Les gardes moyennes avancées, ou simplement moyennes sont celles où l'Epée est posée devant la partie moyenne du corps: Les gardes-basses avancées, retirées, ou basses-moyennes sont celles où le bras & l'Epée sont avancez, retirez, ou entre les deux extrêmitez, & sont situez devant la partie basse du corps. Quelques-uns croyent que la principale garde est celle de prime; les autres la quinte; d'autres avec plus de raison croyent que c'est la tierce, parce qu'elle est composée de lignes droites, qui sont plus aisées à défendre que les obliques comme sont du côté droit la prime & la seconde, & du côté gauche la quarte & la quinte.
Garde. Se dit aussi de la défense qui est auprés de la poignée d'une épée pour empêcher que la main ne soit offensée par l'ennemi. Une Garde d'argent, une Garde damasquinée. Il lui a enfoncé son épée jusqu'à la Garde. Il lui en a donné jusqu'aux Gardes. Il y a des Gardes à branches & des Gardes à ponte.
Gardes. En termes de Venerie se dit des ergots du sanglier, ou des os de derriere les jambes proche les pieds, en Latin apri calcaria.
En termes de Marchands on appelle garde forte & garde foible dans la Balance Romaine, des broches de fer qui passent à travers de la branche, où est attaché l'anneau qui soûtient la Balance. La foible est la plus éloignée, & la forte la plus proche du centre de la balance: celle-ci soûtient un plus grand poids que l'autre.
Garde de peson sont des boucles qui sont attachées aux broches du peson.
Gardes. En termes de Marine, ce sont les deux Etoiles les plus voisines du Pole Arctique, qui sont les dernieres du chariot de la petite Ourse, sur lesquelles si on éleve un triangle équilateral, sa pointe tombera justement sur le point du Pole; car c'est abusivement qu'on dit l'Etoile Polaire, parce qu'il n'y en a point précisément sur le Pole. Quelques-uns mettent trois gardes au lieu de deux.
Gardes. En termes de Serrurier sont de petites pointes ou lames de fer, qui sont tellement disposées pour entrer dans les dents ou les fentes du paneton de la clef, que pour peu qu'il y ait de changement la clef ne tourne plus: & quand on dit changer les gardes, c'est changer ces petites piéces de fer.
Garde, s. m. Archer ou soldat détaché d'une Compagnie pour protéger quelqu'un, ou pour l'arrêter, ou pour veiller à ses actions. Les Maréchaux de France ont envoyé un Garde à chacun de ces Gentilshommes qui se vouloient battre. On le dit aussi de tout le corps des Compagnies, des Régimens d'Archers ou de Cavaliers: & en ce sens on dit Capitaine des Gardes, de ceux qui commandent les Compagnies des Gardes du Corps du Roi, & Capitaine aux Gardes, des Capitaines du Régiment des Gardes Suisses ou Françoises. Un cadet aux Gardes. Les Gardes de la Manche, les Chevaux legers de la Garde.
On dit aussi les Gardes d'un Prince, d'un Général, d'un Gouverneur. Les Gardes de la Prévôté de l'Hôtel, du Prévôt de Paris. Les Gardes du Sel, des Aides. Les Gardes des Ports. Gardes des pertuis, des riviéres, &c. Il est fait mention aussi dans les Coûtumes des Gardes liges, qui sont des vassaux qui sont obligez à garder le corps de leur Seigneur avec armes suffisantes.
Les Gardes de la Marine sont des Gentilshommes destinez à servir sur les vaisseaux, pour être auprés de l'Amiral, ou pour aider aux Officiers dans leurs fonctions.
On appelle aussi Garde celui qui a le soin de quelque chose. Le Garde de la Bibliotheque du Roi. Le Garde des Chartres. Le Garde des Livres de la Chambre des Comptes.
On appelle aussi dans les six Corps des Marchands les Maîtres & Gardes, ceux qui sont élûs de ces Corps pour être Jurez, & faire observer par les autres les Statuts & Réglemens de chacune de ces Communautez. Dans les Corps des Artisans il n'y a que des Jurez. Il y a aussi des Gardes & Contre-gardes des marais, îles & salines.
Gardes. En termes des Monnoyes, ce sont des Officiers considerables & les premiers Juges des Monnoyes, dont les appellations ressortissent à la Cour; Il y en a deux établis dans chaque Hôtel, où on les fabrique. Leur institution est ancienne & auparavant l'an 689. comme il résulte d'un titre rapporté par Dargentré. Leur fonction est de veiller sur tout le travail de la Monnoye, à ce qu'il soit fait selon l'Ordonnance, de peser, rebuter & faire refondre les espéces trop foibles de poids & de loi, d'en tenir Registre & d'en faire des Procés verbaux, & de les envoyer à la Cour, avec les boëtes dans lesquelles ils enferment les piéces & échantillons pour être jugées.
Garde bois. s. m. Sergent ou Archer commis à la garde des Forêts.
Garde-chasse. s. m. Sergent ou Archer que le Roi ou les Seigneurs commettent à la garde de leurs chasses.
Garde côte. s. m. Vaisseau armé en guerre qui croise la mer le long des côtes pour la préserver de la pillerie des pirates, & escorter les vaisseaux Marchands. Il y a aussi sur terre des Capitaines Garde côtes distribuez le long des côtes de la mer pour veiller à la conservation de la côte, & empêcher les descentes dans une certaine étenduë de Païs dépendante de leur Capitainerie. Les Capitaines Garde côtes sont exempts de l'arriere-ban, comme il est porté dans la Nouvelle Ordonnance de la Marine.
Garde marteau. Officier des Eaux & Forêts qui garde le marteau avec lequel on marque le bois qu'on doit couper dans les Forêts du Roi quand on fait des ventes. Le Garde marteau assiste au jugement des procés, & y a voix déliberative, même y tient le Siege en l'absence du Maître & du Lieutenant.
Garde. Se dit aussi de plusieurs Officiers de Justice, Monsieur le Garde des Sceaux est un grand Officier à qui le Roi commet la garde de son Scel Royal quand il n'y a point de Chancelier, ou lors qu'il ne luy est plus agréable. Il y a aussi des Gardes du petit Scel dans les Jurisdictions Royales, du nom desquels sont intitulez les Contrats qui se passent dans leur ressort.
On appelle le Prévôt de Paris simplement Garde de la Prévôté, à cause que c'est le Roi qui est le premier Juge & Prévôt, & pour cela il y a un dais au dessus du Siége du Prévôt de Paris, ou de son Lieutenant Civil; ce qui n'est pas même dans les Parlemens, sinon quand le Roi y va tenir son Lit de Justice. On l'appelle aussi Garde & Conservateur des Priviléges de l'Université, des Foires, &c.
Garde rôle. Est un Officier de Chancellerie qui garde les rôles des oppositions qui se font au Sceau à la résignation des Offices de ceux qui ont des créanciers. Il y en a aussi d'établis pour les rentes de l'Hôtel de Ville, qu'on appelle Conservateurs des hypotheques. Les Garde rôles rapportent à Monsieur le Chancelier des Provisions des Offices, & les Conservateurs, des Lettres de ratification de la vente des rentes sur la Ville.
Gardenotte. s. m. C'est la qualité que prennent les Notaires, qui se disent Notaires & Gardenottes du Roi; c'est à dire, qu'ils gardent les minutes des contrats que les particuliers passent devant eux; qui originairement s'appelloient Nottes.
Garde-sacs. Est un Greffier dépositaire & chargé des sacs & productions des parties; & particuliérement au Conseil, & dans les Parlemens.
Garde vaisselle. Est un Officier chez le Roi qui a soin de la vaisselle d'or & d'argent.
Garde meuble. Officier qui garde les meubles du Roi, dont on ne se sert pas actuellement: on le dit aussi du lieu où ces meubles sont conservez. Le Garde meuble du Roi est la chose la plus magnifique qui soit au monde.
Garde-magazin. Est un Officier d'un Arsenal; qui tient registre des poudres, canons, armes, provisions, & toute autre chose qu'on lui laisse en garde.
Garde. Se dit aussi d'autres lieux & de ce qui sert à la conservation des autres choses.
Garde manger. Lieu où on serre la viande & autres choses bonnes à manger, il se dit tant d'une petite chambre qui est à côté de la cuisine, que d'une armoire, ou même d'un grand bassin.
Garde robbe. s. f. Petite chambre voisine de celle où on couche qui sert à serrer les habits & les hardes d'une personne, ou à coucher les valets qu'on veut avoir prés de soi la nuit. Dans les logis Bourgeois on appelle garde robbe toute petite chambre qui accompagne une grande.
Garde robbe. Chez le Roi & les Princes est un appartement où on met les habits du Roi & des Princes, & tout ce qui sert à leur personne, & où se retirent les Officiers qui y servent.
On appelle aussi la Garde robbe tous les Officiers qui y sont en fonction. La garde robbe du Roi suit toûjours sa Personne. Le grand Maître de la Garde robbe. Les valets de la Garde robbe. Le premier valet de la Garde robbe.
On le dit aussi des hardes & habits de la Garde robbe. A la mort de ce Prince, sa Garde robbe fut estimée dix mil écus; Il donna sa Garde robbe à ses Officiers.
On appelle aussi garde robbe un aisement, un privé. Aller à la garde robbe c'est aller décharger son ventre. Ces pilules font aller deux ou trois fois à la garde robbe.
Garde robbe. s. m. Tablier de toile que mettent les femmes de basse condition pour conserver leurs habits.
Garde bonnet. C'est une coiffe de toile qu'on met sur le bonnet des enfans pour empêcher qu'ils ne le salissent. On appelle aussi garde manches, les fausses manches qui servent à même effet.
Garde-infant. s. m. Grand vertugadin que portent les femmes Espagnoles sur les reins, & qu'on portoit il y a quelque temps en France, qui sert à empêcher qu'elles ne soient incommodées dans la presse; c'est une espéce de ceinture rembourée ou soûtenuë par de gros fils de fer, qui est fort utile aux femmes grosses.
Gardes corps. En termes de Marine, sont de gros tissus fort épais faits de nattes ou de cordages tressez, qu'on étend avec les pavois sur le bord du vaisseau pour couvrir le soldat dans les combats de mer.
Garde-feux. En terme de Marine, ce sont les boëttes où on met les gargouches.
Gardefou. s. m. Petit parapet ou barriére que l'on met aux bords des lieux ou passages élevez pour empêcher qu'une personne tombe, comme sur les ponts, quais, chaussées & terrasses des tours ou des bâtimens.
Garde feu. s. m. Grilles, ou barres de fer qu'on met à une cheminée, pour empêcher que les enfans ne tombent dans le feu.
Garde boutique. Se dit chez les Marchands, de la marchandise frippée & hors de mode, qu'il est difficile de vendre & qui demeure long-temps dans la boutique.
Avant-garde. Arriére-garde. Contregarde. Sauve-garde. Mégarde, seront à leur ordre.
GAUDE. s. f. Drogue de Teinturier qui teint en jaune, c'est une plante qu'on seme dans des terres legéres en Mars ou en Septembre. La Gaude la plus menuë & roussette est la meilleure.
Gauder. v. act. Teindre une étoffe avec de la Gaude. Les bleus teints en indigo doivent être gaudez, & deviennent verds.
GENETTES. s. f. Ce sont des animaux qui ressemblent en grandeur aux chats d'Espagne, ou à des fouïnes, qui ont un nez long & menu, le col & le corps grêles & souples, dont les peaux échauffées sentent comme des Civettes ou du Musc. Quelques-uns les appellent Chats d'Espagne; d'autres croyent que c'est la petite Panthére d'Oppian. Cet animal est plus petit qu'un Renard, quelquefois il est roux & a des taches noires. Voyez sa figure dans Jonston, chap. 12. liv. 3. tom. 2. On en trouva quantité de peaux dans le camp d'Abderama, lors de la grande victoire que Charles Martel obtint contre lui, en mémoire de laquelle fut établi le premier Ordre de Chevalerie qu'on ait vû en France, qu'on appella du Genet. Cette peau est extrêmement noire, luisante comme un satin & marquetée de rouge.
GIRON. s. m. Espace qui est depuis la ceinture jusques aux genoux, il se dit particuliérement des femmes & du tablier qu'elles portent, & sur tout quand elles sont assises. Elle a toûjours un enfant, un petit chien sur son giron. Cette païsane a apporté des champignons plein son giron, pour dire plein son tablier. Ce mot vient de ce que les habits longs s'élargissans par en bas, & se retrecissant par en haut, forment vers la ceinture une espéce de giron d'Armoiries, ou de triangle, à l'endroit que les Latins appelloient gremium; les Italiens appellent encore gheroni, les girons des habits: & c'est un proverbe parmi eux, que ce qui ne va pas aux manches, va au giron, pour dire que ce qui ne sert pas à un usage, peut servir à un autre.
Giron. Se dit figurément de l'Eglise, & on dit qu'un huguenot, un apostat est revenu au giron de l'Eglise: pour dire s'est converti & a reconnu sa faute.
Giron. En Architecture est la largeur de la marche d'un escalier, ou le lieu où on pose le pied; Il se dit particuliérement des marches d'une vis d'escalier qui vont en tournant & qui sont plus larges par un bout que par l'autre.
Giron ou guiron. Terme de Blason, c'est une figure triangulaire qui a une pointe longue faite comme une marche d'escalier à vis, & qui finit au cœur de l'Ecu. On voit des Ecus qui ont six, huit, dix, douze & jusqu'à seize girons qui se joignent par leurs pointes à l'abysme de l'Ecu; ils sont alternativement de métail & de couleur.
Gironné. ée. Terme de Blason qui se dit d'un Ecu divisé en plusieurs girons; quand il est gironné de huit on l'appelle absolument gironé; D'autres l'appellent parti, coupé, trenché & taillé, parce qu'il est fait par ces divisions de l'Ecu; y ayant quatre girons qui forment un sautoir, & les quatre autres une croix; Quand il y a plus ou moins de girons, il en faut exprimer le nombre.
GNOMON, s. m. Est le style qu'on met sur les Cadrans pour marquer les heures.
Gnomon. Signifie aussi cette petite aiguille de cuivre qu'on met au centre d'un petit cercle polaire sur le méridien d'un globe, & qui a le même mouvement que l'axe.
Gnomonique. s. f. Science qui fait partie des Mathématiques; Elle enseigne à faire toutes sortes de Cadrans au Soleil & à la Lune pour connoître les heures par le moïen des ombres, & d'un gnomon ou style qui les marque: on y décrit tous les autres cercles de la Sphére si on veut. Clavius a fait un Livre in folio de la Gnomonique, qui comprend tout ce qu'on peut sçavoir sur les Cadrans. Sebastien Munster a fait un traité fort joly de la Gnomonique. On a aussi écrit de la Gnomonique speculaire. Elle enseigne l'art de faire des Cadrans qui marquent l'heure par la réflexion de la lumiére sur toutes sortes de surfaces.
GONFANON. s. m. Terme de Blason; quelques-uns disent confaron, ou gonferon, ou gonfalon: c'est une forme de Banniére d'Eglise à trois ou quatre fanons, ou piéces pendantes & aboutissantes non pas en quarrez comme les Banniéres, mais en pointes mousses & à demi rondes, dont les plus usitées sont à trois pendans, & quelques-unes bordées & frangées d'un émail different. Ce Gonfanon étoit la Banniére de l'Armée Chrêtienne prise par Baudoüin Comte de Boulogne & d'Auvergne, frere de Geoffroy ou Godefroy de Boüillon, auquel elle avoit été envoyée par le Pape, comme au vray défenseur de l'Eglise contre les infidéles.
Le Gonfanon de l'Eglise de S. Pierre est de gueules à deux clefs d'argent passées en sautoir. Le Pape & d'autres Prélats ont donné des Gonfanons à des Séculiers, en leur donnant le titre d'avoüez & de défenseurs des Eglises & des Abbayes. L'Eglise de Lyon a un gonfanon rouge chargé d'un lyon d'argent qu'elle fait porter aux Processions.
Le Gonfanon est la marque des Eglises Patriarchales, qui le font porter devant elles quand elles marchent en Procession. Ce mot vient de ce que le Gonfanon est composé de plusieurs piéces pendantes, dont chacune se nomme Fanon de l'Allemand Fanen, qui signifie une piéce de linge ou d'étoffe & une banniére.
On appelle aussi Gonfanons d'Eglise des Baniéres qui se font pour certaines solemnitez & cérémonies, comme en celle de la Canonisation des Saints, que l'on charge des Armoiries des Papes, des Cardinaux Patrons, des Légats, des Evêques, & des Saints canonisez: Comme aussi des Ordres, Communautez ou Confrairies dont ils ont été membres, des Princes dont ils étoient sujets, ou qui ont fait le plus d'instance pour les faire canoniser.
Gonfanonier ou Gonfalonier, s. m. qui porte l'Etandart de l'Eglise. Il vient du mot de Gunt Fanonarius, qui se trouve dans les Capitulaires de Charles le Chauve. Ménage.
On a appellé aussi Gonfanoniers les protecteurs que les Papes établirent dans les principales Villes du patrimoine de saint Pierre, depuis que les Empereurs s'éleverent contre l'Eglise, & perdirent la qualité de ses protecteurs. On a appellé aussi Gonfanoniers de l'Eglise de saint Martin de Tours les Comtes d'Anjou, depuis que par leur soin le corps de saint Martin fut rapporté d'Auxerre en son Eglise. On appelloit aussi les anciens Comtes du Vexin Gonfanoniers de l'Eglise de saint Denis en France, parce qu'ils portoient la Banniére, qui s'appelloit l'Oriflame. Les Ducs de Modéne, d'Urbin & de Parme, se glorifient de ce que ceux de leur famille ont possedé la charge de Gonfanoniers de l'Eglise, & ils en portent le Gonfanon dans leurs écus.
Chez les Florentins il y a eu un Magistrat qu'on appelloit le Gonfalonier de la Justice. A Lucques le chef de la République s'appelle aussi Gonfalonier.
GRAIRIE. s. f. Terme des Eaux & Forêts, Partie d'un Bois qui est possedée en commun. Il en est fait mention en la plûpart des articles de la nouvelle Ordonnance des Eaux & Forêts.
GRAIRIE. Est aussi un droit que le Roi prend sur les bois qui sont sur le trés-fonds d'autrui, à cause de la justice qu'il fait exercer par ses Officiers des Eaux & Forêts pour leur conservation, comme à Orleans on paye deux sols parisis d'une part, & dix-huit deniers d'autre pour ce droit, comme dit Chauffour. Ce droit est different selon les lieux.
GROUPPE. s. m. Terme que les Peintres & Sculpteurs ont emprunté des Italiens, qui se dit d'une piéce de sculpture ou d'un endroit de tableau où il y a plusieurs figures assemblées qui ont quelque rapport ensemble d'hommes, d'animaux, ou de fruits. Il y a dans les Tuilleries un beau Grouppe de marbre. On dit aussi telle & telle chose font grouppe avec telle ou telle autre, quoi que ce soient des corps de differente nature. Il faut que dans un tableau toutes les figures soient divisées en deux ou trois grouppes, ou bandes. Il vient de l'Italien Groppo.
GRIOTTE. s. f. grosse cérise à courte queuë plus douce que les autres & qui tire sur le noir; il y en a aussi quelques-unes qui sont aigres. On dit que ce mot vient du Grec agrioti, qui marque l'acidité de ce fruit.
Griottier. s. m. Arbre qui porte les griottes.
Grip. s. m. vieux terme de marine qui signifioit un petit bâtiment pour aller en course, comme aujourd'hui le Brigantin. Les Corsaires qui partent pour courir les mers, disent encore qu'ils vont au Cap de Grip.
GUESDE. s. f. ou pastel, qui est la même chose. C'est une herbe semblable au Plantin, excepté qu'elle a ses feüilles un peu plus grosses & plus noires, & qu'elle a la tige de deux pieds de haut. Voyez Pastel. Elle est de grand usage chez les Teinturiers. Les anciens Bretons s'en peignoient le visage pour être plus terribles en guerre, comme témoigne Cesar; & Pline dit que les femmes en usoient de même en certains sacrifices. Ce mot vient du Latin Guastum, ou Guasdum, qui signifie la même chose, & qui est un vieux mot Gaulois, comme on infere du passage de Pline. On appelle encore Vouede en Normandie le petit Pastel, ou Guesde. Il y a plus d'apparence que l'un de ces mots vient de la corruption de l'autre. On l'appelle aussi Isatis. Saumaise soûtient qu'il faut dire guastum, & non pas glastum, comme il est écrit communément dans les Livres.
GUEUSE. s. f. Terme de Fondeur, est une grosse piéce de fer qui dans sa premiére fonte coule dans des Canaux triangulaires, & se forme en gros lingots du poids de trois, cinq, & jusqu'à six mil livres. On porte de là les gueuses à la Forge, ou à la Fonderie, où on les forge, & on les fend avec l'aide des moulins qui remuent un puissant marteau. En Latin on l'appelle Sporca triangularis.
H.
HAMAC. s. m. Terme de Relations. C'est un lit de cotton dont on fait grand trafic en toutes les Indes Occidentales. Pour s'en servir on le suspend à deux Arbres, & il garantit ainsi des Animaux farouches & des insectes. Les Caraybes sont si superstitieux qu'ils les travaillent avec grande cérémonie, ils mettent au bout du Métier des Pacquets de cendre, faute de quoi ils croyent que leur Hamac ne dureroit pas: s'ils avoient mangé des figues quand ils ont un Hamac neuf ils croyent que cela le feroit pourrir, & ils n'osent manger d'un poisson qui a de bonnes dents croyant que cela seroit cause que leur Hamac seroit bien-tôt percé. On en a apporté plusieurs en France, où quelques-uns s'en servent.
Hamade, ou Hamaide, ou Hameïde, Terme de Blason. C'est une fasce de trois piéces alaisées qui ne touchent point les bords de l'Ecu: ces trois fasces paralelles ne font qu'une piéce de Blason qu'on appelle Hamaïde, de même que les Jumelles sont de deux piéces. On croit que ce nom vient de la Maison d'Hamaide en Angleterre qui porta des Armes de cette sorte, qui sont selon Upton une étoffe découppée en trois piéces en forme de fasce, qui laisse voir par ses ouvertures une étoffe d'une autre couleur mise au dessous; d'autres croyent que c'est une clôture ou barriére quarrée & à jour de trois piéces, qui sert à fermer les chemins des hameaux pour empêcher le bêtail d'y entrer, ou d'en sortir, comme on en trouve quantité en Allemagne; d'autres que ce sont des barriéres de manége qu'on nomme en Turc Atmeidan; d'autres enfin disent que les Hameides representent des chantiers qui supportent les Vaisseaux à mettre du vin, qu'en Flamand on appelle Hames, qui ont emprunté ce mot de Hama ou Hamula, qu'on a dit dans la Basse latinité pour signifier vase & bouteille.
HAMADRIADE. s. f. Divinité fabuleuse des Payens qu'ils croyoient présider aux Forêts, & être enfermée sous des écorces de chênes, comme témoigne le mot drys qui signifie quercus, chêne.
HANOUARDS. Vieux mot qui signifie des Porteurs de Sel. Il en est fait mention dans la grande Ordonnance du Roi Jean du 30. Janvier 1350. c'étoient alors des Officiers dépendans de la Ville au temps que la Gabelle n'étoit pas encore établie en France. Il y a encore maintenant des Jurez Hanoüards qu'on nomme simplement Porteurs de Sel établis pour le porter du bateau au Grenier, & du Grenier aux maisons des Bourgeois.
HANSIERE. s. f. Terme de Marine. Est un gros cordage que l'on jette aux chalouppes & aux bâtimens qui veulent venir à bord d'un autre Vaisseau: Elle sert aussi pour remorguer les vaisseaux & les tirer sur la terre aprés y avoir fait porter un ancre. Elle signifie aussi le cable du plus petit ancre & celui dont on amarre l'esquif. On appelle collier de hansiere une corde ou sangle pendante en écharpe du col de ceux qui halent ou qui tirent.
HARO. s. m. Terme de la Coûtume de Normandie. C'est un cri qu'on fait en Normandie lors qu'on trouve sa partie & qu'on la veut mener devant le Juge; car alors elle est obligée de suivre celui qui a crié Haro sur elle, & l'un & l'autre demeurent en prison, ou en la maison du Juge, jusqu'à ce qu'il ait prononcé sur leur different du moins par provision. Haro sur toi & sur ta bête. Les Lettres de Chancellerie portent ordinairement, nonobstant clameur de Haro, Chartre Normande & autres privileges à ce contraires.
Le Haro. Est interjetté non seulement pour crime, mais aussi pour l'introduction de tous les procés, même en matiére beneficiale tant pour meuble que pour héritage; & les parties sont tenuës de donner respectivement caution, l'une de poursuivre, l'autre de défendre le Haro, aprés quoi la chose est sequestrée, & le jugement emporte l'amende, comme il est porté dans la Coûtume de Normandie. Ce mot vient de Ha & Raoul, comme étant une invocation du secours du Prince pour défendre le foible contre le puissant, à cause que Raoul étoit un grand Justicier qu'on regrettoit & qu'on reclamoit aprés sa mort quand on souffroit quelque oppression. D'autres disent que dés son vivant on crioit à Raoul, pour dire je t'assigne à comparoir devant Raoul; parce qu'il jugeoit lui-même les affaires de ses Sujets. D'autres croyent que ce mot vient de Harouenna vieux mot François qui signifioit le lieu où se tenoit la Justice. Borel dit que d'autres dérivent ce mot de Harola Roi de Dannemarck, qui l'an 826. fut fait à Mayence le grand Conservateur de la Justice. D'autres d'un mot Danois aa rau, qui signifie aide moi, depuis qu'un Roi de Dannemarck se fit Duc de Normandie.
HARPAIL. s. m. Terme de Chasse, troupes de bêtes fauves, voyez Harde.
HAUTBERT. s. m. Terme de Jurisprudence feodale. C'est un plein fief avec justice, mouvant immédiatement de la Couronne ou d'un Prince jouïssant des droits de Souveraineté, ou qui en releve de nud à nud, & sans moyen; on l'appelloit aussi fief chevel ou regalien selon Ragueau. Ce mot vient de Halberk Saxon, qui signifie cotte de mailles, parce que le feudataire étoit obligé d'en porter une, lors qu'il alloit en guerre servir le Prince dont il relevoit, comme disent Spelman, Vossius, Mattinius & du Cange, qui disent aussi que les anciens l'écrivoient avec un K. ou un G; quelques-uns distinguent le Fief de Hautbert qui étoit tenu immédiatement du Roi avec justice, de celui de Hautbert, qui étoit un Fief du moyen genre non Royal, qui n'avoit pas la haute Justice unie au Fief avec le droit & jouïssance des Armes; de sorte qu'il faut ajoûter au premier la qualité de plein Fief, ou de plein Hautbert.
Hautbert. Est aussi un vieux mot François qui signifioit haut Baron; car Bers signifioit Gentilhomme, & quand on disoit haut Bers, c'étoit à dire, haut & puissant Seigneur, comme on voit dans Villehardoüin, & quelques-uns prétendent que c'est de là qu'est venu le nom du Fief de Hautbert; En effet ces Barons possedoient les pleins Fiefs de Hautbert mouvans de la Couronne, & il falloit quatre Fiefs de Hautbert, ou du moyen genre pour faire une haute Baronnie.
HAUTBERGIER. s. m. Celui qui tient un Fief de Hautbert, qui est obligé d'accompagner son Seigneur à la guerre en cette qualité. Les Vassaux servoient autrefois leurs Seigneurs en qualité d'Ecuyers, de Hautbergiers, de Lanciers, d'Arbalestiers, &c.
Hautbert. Est aussi une cotte de mailles à manches & gorgerin que portoient sur leurs Armes les Seigneurs de Hautbert, qui tenoit lieu de Haussecol, Brassars & Cuissarts.
HAUTBERGEON. s. m. Signifie aussi bien que Haubert une cotte de mailles. C'étoit une ancienne arme défensive en forme de cotte, qui venoit jusqu'à mi-jambes, dont les François furent inventeurs, comme témoigne Varron. Il est fait de plusieurs petits anneaux de fer, comme hameçons accrochez ensemble. Spelman dit qu'il vient d'un vieux mot François hame, haim, ou hameçon & crohet, & de Berg qui étoit une armure de chaînettes de fer entrelacées & l'une harpant l'autre. On l'a nommée aussi halecret & brigantine ou brigandine, parce que les voleurs s'en servoient; Nicod l'appelle aussi Ecaille, parce qu'elle étoit composée de certains ronds comme une Ecaille; & enfin on l'a appellée Jaquedemaille qui est un Haubert de coton. Ménage dit que Hauberg arme vient de alle qui signifie tout en Allemand & de Bergen qui signifie couvrir. Ce mot ne se dit plus qu'en cette phrase proverbiale, maille à maille se fait le haubergeon, pour dire qu'il faut faire les choses à loisir & les unes aprés les autres: ou bien qu'en faisant plusieurs petites épargnes on peut amasser beaucoup de bien.
HELICE. adj. & subst. f. Terme de Géometrie & d'Architecture. C'est une ligne tracée avec inclination & en forme de vis autour d'un cylindre qui est toûjours également distante de son Axe. Un Escalier en hélice est composé de marches gironnées qui sont attachées les unes sur les autres autour d'une piéce de bois ou de pierre Cylindrique qui sert de noyau. Cette ligne differe de la spirale en ce que la spirale est une ligne décrite en forme de vis autour d'un cone qui s'approche continuellement de son Axe. La vis d'Archimede n'est autre chose qu'un tuyau posé sur un cylindre en forme d'Helice.
Helice. En termes de Médecine se dit de tout le circuit de l'oreille de l'homme, comme qui diroit tour ou tortis.
Helice. Est aussi un nom qu'on donne à une constellation du Ciel qui est la grande Ourse, à cause qu'on la voit toujours tourner autour du pole dans un petit cercle, elle a 35. étoiles selon Ptolomée, dont il y en a 27. qui composent sa figure & 8. qui sont au dehors. Bajerus n'en compte que 32. mais Quepler dit y en avoir observé 56. Il y en a sept principales de la seconde grandeur en forme de chariot, ce qui l'a fait appeller de ce nom par le peuple.
HOURDER. v. act. maçonner grossiérement. On dit qu'un mur est seulement hourdé, lors qu'il n'y a point encore d'enduit, qu'il est encore rude & inégal.
On dit proverbialement qu'un homme est crotté & hourdé quand il revient de ville salle & crotté comme un messager, ou hourdé comme s'il avoit travaillé à la maçonnerie à hourder un mur.
HOURDI, ou lisse de Hourdi. Terme de Marine. C'est le dernier des baus vers la pouppe.
HOURET. s. m. mauvais chien de chasse. Moliere raille en ses fâcheux un Chasseur qui chasse avec quelques hourets galeux.
HOURQUE, ou Houcre. s. m. Terme de marine. C'est un Vaisseau leger & plat de varengue dont se servent les Hollandois, qui est rond de bordage comme les flûtes ou fustes & masté comme un heu, ayant quelquefois un beaupré. Il est du port depuis 50. jusqu'à 200. ou 300. tonneaux. Il est facile à conduire & propre à louvoyer. On tient qu'il fut inventé par Erasme pour aller sur les canaux de Hollande; car il va à vent contraire en faisant plusieurs petites bordées sur des canaux étroits qui n'ont que quatre ou cinq longueurs du bâtiment. Ce mot vient de l'Espagnol urca, qui signifie la même chose.
HYDROGRAPHIE. s. f. Ce mot par son Etimologie signifie seulement la description des eaux; mais dans l'usage ordinaire on entend la science qui apprend l'art de naviger, de faire les cartes marines, de conduire les vaisseaux & de connoître dans les voyages de long cours le lieu précis où on est; c'est de toutes les sciences celle qui approche le plus de la perfection, & il ne lui manque guéres que la connoissance des longitudes. Le Pere Fournier a amplement écrit de l'Hydrographie, & aprés lui le Pere Deschales. L'Ordonnance de la marine au titre huit, parle des Professeurs d'Hydrographie, qu'elle veut être établis dans tous les ports.
HYDROGRAPHIQUE. adj. qui appartient à l'Hydrographie; des cartes Hydrographiques, c'est à dire, marines, ou dressées exprés pour les Pilotes. On y marque les rums des vents, les méridiens y sont paralelles les uns aux autres; on y marque aussi les basses, les rochers, & les bancs. Christophle Colomb étoit un homme qui gagnoit sa vie à faire des Cartes Hydrographiques, il se trouva héritier des mémoires d'un fameux Pilote nommé Alonso Sanchez de Huelva, Capitaine de Vaisseau, lequel par hazard avoit été poussé par une tempête en l'Isle de S. Dominique, & qui mourut chez lui au retour de son voyage; cela lui fit entreprendre la découverte des Indes Occidentales, qui lui réüssit. Cesar d'Arcons a enseigné la maniére de faire un vase qu'il appelle Hydrographique, par lequel il explique le flus & le reflus de la mer, & on y voit produire les mêmes mouvemens & régularitez qu'on a remarquez par toutes les mers suivant le sisteme qu'il en a donné dans son Livre du flus & du reflus de la mer.
HYDROMANTIE. s. f. Divination qui se fait par le moyen de l'eau. Varron dit que l'Hydromantie a été inventée par les Perses, & que Numa Pompilius & Pithagore s'en sont fort servis.
HYDROMEL. s. m. Breuvage qui se fait avec de l'eau & du miel. L'Hydromel vineux se fait avec de l'eau de pluye & du miel de Narbonne qu'on fait cuire & écumer jusqu'à ce qu'un œuf y surnage, & aprés que la liqueur qu'on en tire a été exposée au Soleil pendant 40. jours pour la faire bien fermenter, on y mêle du vin d'Espagne, & si on ne s'en sert que deux ou trois mois aprés, il aura alors un goût approchant de la malvoisie. On fait aussi de l'Hydromel vineux sans y mettre du vin & en le laissant boüillir au Soleil: Les Polonois & les Moscovites en font leur boisson ordinaire. L'Hydromel s'appelle en Grec melicratum, & en Latin aqua mulsa; il est appellé simple quand il n'y entre rien que de l'eau & du miel; & quand il y a beaucoup d'eau & peu de miel on le nomme aqueux, lequel se peut faire en tout temps; quand on y mêle quelques autres drogues on l'appelle composé, & on l'appelle vineux, quand sa force égale celle du vin, laquelle il acquiert non seulement par la grande quantité de miel qu'il reçoit; mais aussi par sa grande coction & insolation, & il ne se fait bien que durant les grandes chaleurs de l'Eté.
HYDROPHOBIE. s. f. Terme de Medecine qui signifie crainte de l'eau. C'est un Symptome qui arrive aux malades mordus de bêtes enragées; de sorte qu'on appelle aussi la maladie de la rage Hydrophobie.
HYPOCONDRE. s. m. Terme d'Anatomie, qui se dit proprement de chaque côté de la region Epigastrique ou superieure du bas ventre. Ce mot est Grec, & signifie sous les cartilages des fausses côtes. En l'Hypocondre droit est situé presque tout le foye, au gauche la rate & la plus grande portion du ventricule ou de l'estomac: quelquefois Hyprocrate a appellé Hypocondre tout le ventre inferieur.
HYPOCONDRIAQUE. adj. m. & f. & subst. qui est travaillé des vapeurs & fumées qui s'élevent des Hypocondres qui troublent le cerveau, d'où vient qu'on appelle visionaire, un foû mélancolique un Hypocondriaque, un foû par intervalles.
HUCHE. s. f. grand coffre de bois dans lequel les Bourgeois & les Païsans paîtrissent le pain.
Huche. Se dit aussi d'un coffre qui est dans la dépense où on serre le pain & autres choses qui servent sur la table.
Huche de Moulin est un coffre de bois, dans lequel tombe la farine mouluë en sortant de dessous la meule. En quelques lieux on le dit aussi de la tremie où se met le grain pour le faire tomber sur la meule petit à petit.
Huche. Terme de Marine. On appelle un navire en Huche celui qui a la pouppe trés-haute.
HUCHER. v. act. vieux mot qui signifioit autrefois appeller, il n'est plus en usage que dans les Provinces. Nicod dérive ce mot du Latin heus; mais Ménage prétend qu'il vient par corruption du mot de vocare qui signifie appeller, ou de levare huescum qui signifie acclamare.
I.
IADE s. m. Pierre verdâtre tirant sur la couleur d'olive, qui est estimée à cause de sa dureté étant beaucoup plus dure que le Porphire, que l'Agathe, & que le Jaspe. Il est fort en estime chez les Turcs & les Polonois qui en ornent toutes sortes d'ouvrages, & sur tout les manches de leurs Sabres, qu'ils font graver & remplir d'or fin; on en fait même des vases, il y en a de deux ou trois verds differents: les Cabinets des curieux sont pleins de Cimeterres, de couteaux emmanchez de Iade. On tient que le Iade appliqué sur les reins préserve de la colique nephretique.
JALAP. s. m. Terme de Pharmacie, est une plante qui croît dans la nouvelle Espagne, & est une Racine moindre en grosseur que le Méchoacan, de couleur plus obscure en dehors, & de substance plus pesante, plus compacte & plus résineuse, on l'apporte en roüelles seches.
JAQUEMAR. s. m. Terme d'Horloger, est un homme de fer qu'on met sur les Horloges avec un marteau à la main pour frapper les heures: on l'a ainsi appellé du nom de l'ouvrier qui en a été inventeur, qui s'appelloit Jacques-Marc.
Quand on dit armé comme un Jacquemar, cela vient de Jacques-Marc de Bourbon, Troisiéme fils de Jacques de Bourbon Connêtable de France sous le Régne du Roy Jean: c'étoit un Seigneur fort brave & vaillant qui se trouva en toutes les occasions les plus dangereuses de Guerre & de Tournois; mais qui pour donner bon exemple & se moquer des fanfarons, étoit toûjours armé à l'avantage, disant que les armes n'étoient faites que pour cela, & dés-lors on appella Jaquemars tous ceux qu'on voyoit armez de pied en cap.
JAVART, s. m. Terme de Manége, maladie de Cheval, c'est une petite tumeur qui se résout en apostume ou bourbillon qui se forme au paturon sous le boulet & quelquefois sous la corne. Un Javart nerveux est celui qui vient sur le nerf, & Javart encorné est celui qui vient sous la corne. Il faut dessoler le plus souvent un Cheval, quand il a un Javart encorné.
JAVEAU, s. m. Terme d'Eaux & Forêts. Isle faite nouvellement au milieu d'une Riviére par alluvion, ou amas de limon & de sable. L'Ordonnance parle souvent des atterrissemens & Javeaux.
ICNOGRAPHIE, s. f. Terme de Géometrie; C'est le plan ou la description d'une Forteresse, d'un Bâtiment ou d'une autre construction. Cette délineation est telle que le Bâtiment paroîtroit au rés-de chaussée, si on l'avoit rasé, on l'appelle autrement section horisontale. Cette description marque seulement les longueurs & les inclinations de leurs lignes ou de leurs angles & les épaisseurs des ouvrages, les élévations ne sont connuës que par le profil ou l'Orthographie.
ILIAQUE, adj. f. Terme de Medecine, maladie qu'on appelle autrement la colique de miserere: les Medecins l'appellent Voluulus, c'est une obstruction des intestins grêles, qui ferme tellement le passage des excremens, qu'on les rend par la bouche en vomissant: Elle est ainsi nommée de l'intestin Ileon; quelques-uns l'appellent entortillé. En la passion Iliaque la viande ne descend point en bas, & les clistéres ne montent point en haut.
Iliaque, est aussi un nom qu'on donne à une veine ou vaisseau qui est un des rameaux du tronc descendant de la veine cave qui arrose les flancs, & qui se divise en autres souches & rameaux. La veine Iliaque ou des flancs, a de part & d'autre cinq rameaux ou surgeons, l'adipeux, le Renal, le spermatique, le Lombaire & le Musculeux.
IMPRIMERIE, s. f. l'art d'Imprimer, de tirer l'empreinte des caractéres qui servent de moule: L'Imprimerie est un art ancien dans la Chine, mais elle est bien differente de la nôtre: On est en doute de celui qui a inventé l'Imprimerie en Europe. Mantel Medecin de Paris, dans une Lettre écrite à Monsieur Naudé, prouve que ce fut Jean Mantel Bourgeois de Strasbourg qui l'inventa en 1442. du temps de Federic III. Empereur, & que Jean Guttemberg un de ses compagnons la transporta à Mayence où il s'associa avec Fauste & Scœffer, ausquels quelques-uns en ont faussement attribué l'invention; comme Munster, Polidore Virgile, Vignier & Pasquier aprés eux. L'Empereur Federic III. en l'an 1466. en faveur de cette invention donna à Jean Mantel pour Armes un Champ de gueules au Lyon couronné d'or, accollé d'un Rouleau Voltigeant d'Azur. Les premiers Livres imprimez qu'on ait vûs en Europe sont un Durandus de Ritibus Ecclesiæ de l'année 1461. & une Bible de l'an 1462. la Cité de Dieu de Saint Augustin, & les Offices de Ciceron.
Imprimerie est aussi tout l'attirail, les outils & instrumens qui servent à imprimer, comme les Presses, les Casses, le Plomb, les Chassis, &c. un tel Imprimeur est mort, son Imprimerie est à vendre.
Imprimerie, est aussi le lieu où on imprime: Il est allé à l'Imprimerie du Louvre; On a mis bas en telle Imprimerie faute d'ouvrage: On dit aussi que l'Imprimerie ne va plus, pour dire que le trafic des Livres diminuë.
On appelle Correcteur d'Imprimerie, celui qui est gagé pour revoir les Epreuves.
INCESTE, s. m. crime qui se commet quand on a la compagnie charnelle de personnes qui sont parentes jusqu'à un certain degré prohibé par l'Eglise. Le second Concile de Latran, Session 51. a réduit au quatriéme degré de parenté la prohibition de contracter mariage, qui étoit autrefois étenduë jusqu'au huitiéme, à cause que le corps est composé des quatre Elemens, & de quatre humeurs: Toutes les Nations ont eu de l'horreur pour l'Inceste, Régnier a dit pourtant,
Quelques-uns dérivent ce mot de Grec Ceston qui étoit une Ceinture brodée que les maris détachoient quand ils vouloient consommer le mariage, disant qu'il a signifié d'abord toute conjonction illicite.
Inceste spirituel est un crime qui se commet de la même maniére entre des personnes qui ont une alliance spirituelle par le Sacrement de Baptême & de Confirmation.
Inceste spirituel se dit aussi en parlant du Beneficier, qui possede la mere & la fille; c'est à dire, deux Benefices, dont l'un dépend de la collation de l'autre, comme l'Abbaye de Cluni, & le Prieuré de la Charité; Un Inceste spirituel rend l'un & l'autre des Benefices vacans & impétrables.
INCOMMENSURABLE, adj. Terme de Géometrie; Il se dit de deux lignes comparées l'une à l'autre, qui n'ont point de mesure commune quelque petite qu'elle soit; de sorte qu'aprés plusieurs repetitions & soustractions de parties égales, il en reste toûjours quelque partie, par laquelle l'une est plus grande que l'autre; Le côté d'un quarré est incommensurable avec sa diagonale, comme démontre Euclide livre 10. Pappus liv. 4. Probl. 17. parle aussi des angles incommensurables, & pour les surfaces qui ne se peuvent pas mesurer par une surface commune, on les appelle incommensurables en puissance.
INDULT, s. m. Grace accordée par Bulles du Pape à quelque Corps ou Communauté, ou à quelque personne par un privilege particulier pour faire ou obtenir quelque chose contre la disposition du droit commun.
L'Indult des Rois est le pouvoir qui leur est donné de nommer aux Benefices consistoriaux, soit par un traité ou concordat, soit par une grace ou un privilege particulier.
L'Indult des Cardinaux est un privilege de pouvoir tenir des Benefices réguliers, aussi-bien que des séculiers, de pouvoir conferer en commende, ou la continuer; de ne pouvoir être prévenus dans les six mois, pour la collation des Benefices qui dépendent d'eux.
Quelques autres collateurs ont aussi un Indult pour continuer la commende, pour conferer de Commende en Commende.
Indult plus communément se dit d'un droit ou privilege accordé par le Pape aux Conseillers du Parlement de Paris & Maîtres des Requêtes, de pouvoir obtenir le premier Benefice vacant à la nomination de chaque Collateur; Un Collateur ne doit être chargé de son vivant que d'un seul Indult. Un Chapitre ou autre corps, que d'un seul Indult durant chaque Régne. Il faut avoir des Lettres de Chancellerie, pour placer son Indult, & se faire nommer sur un tel collateur. Le Pape Benoît XIII. envoya une forme d'Indult à l'Université de Paris en l'an 1396. par lequel il lui permettoit de se nommer sur les Benefices des Diocesains, mais elle en negligea l'execution.
Indult se dit aussi de la permission qu'on donne à quelqu'un d'exercer la Médecine, sans donner lieu à la vacance des Benefices, il se dit aussi de plusieurs graces semblables.
Les Marchands appellent aussi Indult & bon passage, les droits & péages qu'ils payent au Roi d'Espagne.
INCUBE, s. m. Démon qu'on s'imagine venir coucher avec les femmes & en abuser: Les Philosophes ont fait plusieurs dissertations sur la nature des Incubes, & s'il y en avoit effectivement.
Incube, est aussi une maladie qui est causée d'une oppression d'estomac si grande qu'on ne peut respirer ni parler; elle se fait de nuit ordinairement: En cette maladie les sens ne sont point perdus, mais étonnez, endormis & hebetez, aussi bien que l'entendement & l'imagination, ce qui fait croire au patient que quelque ennemi se vient ruer sur lui ou le sollicite à luxure. Les enfans sont sujets à l'Incube aussi bien que les personnes grasses & les gens de Lettres, dont l'estomac a de la peine à faire la digestion, l'Incube est cousin germain de l'Epilepsie & de l'Apoplexie; car s'il dure long-temps il dégénére en l'une ou l'autre de ces maladies: Ce mot vient du Latin Incubare, qui signifie se mettre sur quelque chose & la presser; les Grecs l'ont nommée Ephialtes, c'est à dire, le sauteur ou celui qui se ruë sur quelqu'un, le vulgaire l'appelle Cauchemar.
INFEODER, v. act. donner en Fief, à foi & hommage; infeoder des heritages, c'est les unir à son Fief.
Infeodé, ée. adj. donné en Fief, ou uni au Fief. Dîmes inféodées. Jean du Luc en son Recueil d'Arrêts attribuë la premiére invention des Dîmes inféodées à Philippes Auguste, mais Pasquier prouve qu'il s'abuse, parce que deux ans auparavant qu'il régnât, elles avoient été condamnées comme usurpations au Concile de Latran: Elles furent introduites lors qu'on entreprit le premier voyage d'outre-mer, car alors les Curez firent present à leurs Seigneurs de partie de leurs Dîmes pour leur aider à faire ce voyage; Elles n'étoient d'abord que viageres, mais depuis les Seigneurs se les appropriérent tout à fait.
INSOLATION, s. f. Terme de Pharmacie. C'est une préparation de Remédes, ou de fruits qui se fait en les exposant aux rayons les plus ardens du Soleil, soit pour les secher, soit pour les cuire, soit pour les aigrir, comme on fait le vinaigre rosat, les figues, les pruneaux, &c.
IRIS, s. f. Les Philosophes le font masculin: Arc en Ciel qui se fait par la réflexion de la lumiére dans une nuée pluvieuse: L'Iris se fait par réflexion des rayons du Soleil avec deux réfractions de suite dans une même goutte de pluye, ce qui a été remarqué par Jean Fleischer de Breslaw, dés l'année 1571. & par A. de Dominis Italien en 1611. en quoi ils ont prévenu M. Descartes qui a expliqué l'Arc en Ciel interieur par deux réfractions & une réflexion, & l'exterieur par deux réfractions & deux réflexions sur une même goutte d'eau: On peut voir deux ou trois Iris, quand il y a des nuées de differente élevation: Deux personnes qui sont éloignées l'une de l'autre, ne voyent pas la même Iris, parce qu'elle change selon la situation de l'œil qui la regarde, selon les angles par lesquels la lumiére est reflêchie. L'Iris fut montrée à Noé en signe de paix aprés le Déluge. Il se fait aussi des Iris dans des prismes ou verres triangulaires, dans des phioles pleines d'eau, dans des jets de Fontaines: On voit même des Iris renversées, dont les causes sont fort bien expliquées dans la Dioptrique & les Méteores de Descartes.
Iris, En termes de Medecine se dit d'un cercle qui est autour de la prunelle de l'œil qui est de differentes couleurs, tantôt noir, tantôt bleu, tantôt verd, &c. qui est sur une peau ou tunique de l'œil qu'on appelle Rhagoide, ou vuée.
Iris, Est aussi une divinité fabuleuse des anciens que les Poëtes ont feint être la Messagere de Junon: Virgile dit qu'elle fut envoyée pour couper quelques cheveux à Didon pour faire un Sacrifice à Proserpine, afin qu'elle mourût plus facilement.
Iris, Est aussi une fleur marécageuse qui imite en quelque façon les couleurs de l'Iris, bleuë, blanche & jaune, on l'appelle vulgairement flambe: Il y a des Iris d'Angleterre, de Florence, de Portugal, de Suse, &c. Sa racine est odoriferante, & quand elle est broyée on la mêle avec de la poudre qu'on appelle poudre d'Iris. Si on en fait tremper dans du vin tandis qu'il bout, cela lui donne un goût & une odeur agréable.
Iris de Perse, est une fleur précoce qui fleurit sur la fin de Février: sa racine est insipide & bulbeuse en forme d'une petite poire: Sa tige est d'un verd blaffard, blanche par le bas, d'un bleu lavé par le haut: Sa fleur est blanche avec quelque teinte de bleu, rayée & tachée d'orangé & de violet fort enfoncé. Elle a neuf feüilles, six grandes & trois petites: Sa fleur laisse à l'entour d'elle un limbe blanc, & du reste est semblable aux autres Iris. On trouve sa figure dans les mémoires de l'Academie des sciences.
Iris, Est aussi une pierre qu'on met au rang des précieuses & des opales, quoy qu'elle ne soit pas d'extrême valeur, laquelle étant exposée au Soleil renvoye un lustre & une lumiére de diverses couleurs. Boëce la met au rang du cristal, à cause qu'elle naît comme lui avec six faces, on la tient pourtant pour Orientale, & Pline dit qu'elle vient de la mer rouge: Sa couleur est un gris-de-lin fort transparent dans lequel il paroît du rouge.
ISCHION, s. m. Terme de Medecine, c'est un nom qu'on donne à la derniére partie de l'os anonyme qui est au bas de l'épine du dos, dans lequel il y a une profonde cavité qu'on nomme Cotyle, Acetabule, ou Emboëture, pour recevoir la tête de l'os de la cuisse: il a une apophyse de cartilage qui comprend cette tête & on la nomme Sourcil, cet os avec ses autres parties & l'os sacré, font le bassin qui contient la vessie, la matrice & les intestins.
ISCHURIE, s. f. Terme de Medecine, c'est une maladie où il arrive une entiére suppression d'urine causée d'astriction, ou d'obstruction de la vessie, ou des deux ureteres: ce mot est Grec & composé du verbe Ischo, id est Sisto, & de Ouron, urina.
ISOSCELE, adj. Terme de Géometrie: Triangle qui a deux côtez égaux, & par consequent ses deux angles sur sa baze, sont égaux: Triangle, Rectangle Isoscele.
JUMART, s. m. Bête de somme engendrée d'un Taureau & d'une Cavale, qui porte la charge d'un Mulet, & qui marche lentement.
JUSSANT, s. m. Terme de Marine. C'est le reflus ou descendant de la marée quand la mer refoule: On l'appelle aussi Ebe.
L.
LABORATOIRE. s. m. terme de Chymie. C'est le lieu où les Chymistes font leurs operations, où sont leurs fourneaux, leurs drogues, leurs vaisseaux. Le Roy a deux beaux Laboratoires, l'un à sa Bibliotheque, l'autre à son Jardin des Plantes; on y enseigne la Chymie.
LAIE. s. f. terme de Chasse, la femelle d'un sanglier, ainsi nommée, parce que les Chasseurs la laissent pour faire des petits, ou de ce qu'on la laisse parmi des arbrisseaux qu'on appelle lais. On les distingue selon leurs âges, en jeunes, grandes & vieilles.
Laie en termes de Forêtier, est une route coupée dans une forest. Il est permis aux Arpenteurs de faire des laies de trois pieds pour porter leur chaîne, quand ils en ont besoin pour arpenter ou marquer les coupes. L'Ordonnance défend aux Gardes d'enlever le bois qui a été abattu pour faire des laies.
Laie en termes de Maçonnerie, est un marteau de Tailleur de pierre, brettelé & dentelé, qui laisse sur les pierres taillées des rayes ou brettures, qui s'appellent aussi laies.
LAIER. v. act. faire des routes dans une forest.
Laier signifie aussi, marquer les Lais, ou bois à réserver dans la coupe des taillis.
Laier signifie aussi, tailler une pierre avec une laie.
LAIS. s. m. jeune bailliveau de l'âge du bois, qu'on laisse quand on coupe le taillis, afin qu'il revienne en haute fûtaye. Toutes les Ordonnances sur le fait des Eaux & Forêts enjoignent de laisser par chacun arpent 16. bailliveaux de l'âge du bois, qu'on nomme des lais, outre les autres bailliveaux anciens & modernes.
LAMANEUR. s. m. Terme de Marine, pilote ou marinier qui fait le lamanage: c'est un homme qui réside dans un port, qui en connoit les entrées & les issuës, & qui conduit les vaisseaux étrangers dans les rades ou dans les ports, lorsque les parages sont dangereux & sont inconnus à ceux qui y abordent. On les appelle aussi locmans, ou lormans, ou lomens. Le titre 3. du 4. Livre des nouvelles Ordonnances de la Marine contient les réglemens faits pour les pilotes lamaneurs, ou locmans. Ils doivent avoir 25. ans pour être reçûs, aprés un rude examen en la Justice de l'Amirauté, où on leur taxe leur salaire; & si le vaisseau qu'ils conduisent, échouë par leur ignorance, ils sont condamnez au foüet, si c'est par malice, ils sont pendus à un mast. Les lamaneurs sont aussi des pilotes de riviéres vers leurs emboucheures, qu'on louë pour éviter les bancs, secques, syrtes & autres dangers, parce que l'Ocean & les eaux d'amont les font changer de place presque tous les ans, & sur tout vers Roüen, où il y a des lamaneurs jurez de deux lieuës en deux lieuës. Luitprandus dit que ce mot vient de lomen, ou guide; d'autres disent que lamaneur est dit quasi laborans manu, à cause qu'il se sert souvent de cordes, crocs, harpins & avirons pour mettre un vaisseau en rade ou en furin.
LANTERNE. s. f. vaisseau fait de matiére transparente servant à conserver la lumiére qu'on transporte, ou qui est exposée au vent & à la pluye. Lanterne de verre, de corne, de papier, de talc, de toile. On taxe pour les lanternes qu'on met la nuit dans les ruës. La lanterne d'Epictete fut venduë autrefois 3000. dragmes. La lanterne de Diogene étoit une piéce curieuse chez les Anciens. La lanterne de Judas se garde au Tresor de Saint Denys comme une piéce curieuse & antique. On fait commandement aux Bourgeois de mettre des lanternes aux fenêtres dans les réjouïssances publiques. Lanterne sourde est une lanterne de fer blanc ou noirci, qui n'a qu'une ouverture, qu'on ferme quand on veut cacher la lumiére, & qu'on presente au nez de ceux qu'on veut voir, sans qu'on en puisse être apperçû. On appelle soufflets à lanternes ceux qui representent une lanterne de papier dont l'ais superieur quand on le leve, demeure paralelle à l'inferieur.
Lanterne en termes de Guerre, c'est un instrument pour prendre la poudre, & en charger le canon: elle est faite en forme d'une longue cuillier ronde, & est attachée au bout d'un bâton.
Lanterne en termes d'Orfévres, est la partie d'une crosse d'Evêque ou d'un bâton de Chantre, qui est grosse & à jour, qui en quelque façon represente une lanterne. Les crosses & bâtons d'argent doivent être contremarquez aux vases, fonds de lanterne, dômes, douïlles & croisillons, suivant les Statuts des Orfévres.
Lanterne est aussi une construction de charpente qui se met au plus haut des dômes & des pavillons, où il y a d'ordinaire quelques fenêtres pour leur donner plus de jour.
Lanterne est aussi un petit cabinet de menuiserie qu'on éleve dans quelques auditoires, pour placer quelques personnes qui veulent écouter sans être vûës. Il s'étoit glissé dans la lanterne de la Grand'Chambre, quand on rapportoit son procés.
Lanterne de moulin est un certain pignon à jour fait en forme de lanterne, qui est composé de deux tourtes, ou piéces de bois rondes, au bord desquelles sont dix fuseaux où s'engrenent les dents de la rouë interieure du moulin qui fait tourner les meules.
Lanterne magique est une petite machine d'Optique, qui fait voir dans l'obscurité sur une muraille blanche plusieurs spectres & monstres si affreux, que celui qui n'en sçait pas le secret, croit que cela se fait par magie. Elle est composée d'un miroir parabolique qui refléchit la lumiére d'une bougie, dont la lumiére sort par le petit trou d'un tuyau, au bout duquel il y a un verre de lunette, & entre-deux on y coule successivement plusieurs petits verres peints de diverses figures extraordinaires & affreuses, lesquelles se representent sur la muraille opposée en plus grand volume. Le premier qui a enseigné la construction de la lanterne magique est Swenterus en son Livre Deliciæ Mathematicæ. Les Peres Kirker & Kestlerus Jesuites en ont aussi écrit, & avant tous Roger Bacon Anglois en avoit donné quelque idée.
Lanternes au plurier se dit des discours, des choses de néant. Tout ce que vous me dites, ce sont des lanternes, je n'y aurai point d'égard.
On dit proverbialement en parlant d'un sot & d'un crédule, qu'on lui feroit croire que des vessies sont lanternes, & que les nuées sont poëles d'airain.
LATITUDE. s. f. terme de Géographie. C'est la distance de l'Equateur au Zenit ou point vertical de quelque Ville ou autre endroit de la terre, qu'on compte sur les degrez du Meridien: on la nomme autrement l'élevation du Pole sur l'Horizon. Les paralelles de l'Equateur sont appellez Cercles de latitude, à cause qu'ils la marquent par leur intersection avec le Meridien. Paris a 48. degrez 50. minutes de latitude Boreale, ou Septentrionale, ou d'élevation de Pole. Quand on a passé l'Equateur, on l'appelle latitude Australe. On dit sur la mer, Bande du Nord, ou Bande du Sud, pour dire, deçà, ou delà la Ligne.
Latitude en termes d'Astronomie, est l'éloignement d'un astre de l'Ecliptique, ou de l'orbite du Soleil vers un des Poles du Zodiaque; & elle differe en ce point de la déclinaison, laquelle est un éloignement de l'Equateur vers un des Poles du monde: ainsi le Soleil n'a jamais de latitude; & on dit que les Planettes ont quelque latitude, quand elles s'éloignent de l'Ecliptique: & c'est pour cela que dans la sphere ordinaire on donne au Zodiaque quelque largeur. Les Anciens ne la faisoient que de six degrez de chaque côté de l'Ecliptique. Les Modernes l'ont étenduë jusqu'à neuf: car par les observations de Tycobrahé Venus a de latitude Boreale 9. degrez 2. minutes; Mercure trois degrez 33. minutes; la Lune dans son quadrat avec le Soleil cinq degrez 17. minutes, & en son opposition & conjonction quatre degrez 58. minutes; Saturne 2. degrez 48. minutes; Jupiter 1. degré 38. minutes; Mars 4. degrez 31. minutes. Cette latitude est quelquefois plus grande du côté du Midi. Quand les Planettes sont dans leurs plus grandes latitudes, on dit qu'elles sont dans le ventre de leur Dragon; quand elles n'ont aucune latitude, on dit qu'elles sont dans les nœuds de l'Ecliptique, ou dans l'intersection de leur orbite avec celle du Soleil qu'on appelle la tête & la queuë du Dragon: & c'est alors qu'elles causent ou souffrent l'éclipse. A l'égard des étoiles fixes, leur latitude peut aller jusqu'à 90. degrez, selon qu'elles sont éloignées de l'Ecliptique vers les Poles du Zodiaque. La latitude ortive d'un astre ou d'un degré de l'Ecliptique, est l'arc de l'Horizon compris entre le point du lever ou du coucher de l'Equateur, & le point du lever ou du coucher de cet astre; c'est ce qui fait connoître l'étenduë de l'arc diurne ou nocturne, ou la durée du jour & de la nuit, en telle sorte que plus cette latitude est grande, & plus il y a de difference entre les deux arcs, ou entre le jour & la nuit. Quand elle est Boreale, le jour est plus grand; quand elle est Australe, il est plus petit. On l'appelle autrement amplitude ortive.
LIGE. adj. m. & f. Vassal qui tient une certaine sorte de Fief qui le lie envers son Seigneur dominant d'une obligation plus étroite que les autres. Ce mot vient d'une cérémonie qu'on faisoit en rendant la foy & hommage, de lier le pouce au vassal, ou de lui serrer les mains dans celles du Seigneur, pour montrer qu'il étoit lié par son serment de fidélité. Il étoit obligé à servir son Seigneur tant en Guerre qu'en Jugement, c'est à dire, à servir d'Assesseur pour juger les causes. Par l'hommage lige le vassal étoit obligé de servir son Seigneur envers tous & contre tous, excepté contre son pere. Ce mot est opposé à l'hommage simple, qui obligeoit simplement à payer les droits & devoirs ordinaires, & non point au service contre l'Empereur, le Duc ou autre Seigneur superieur, en sorte que l'homme lige étoit comme donné & dévoüé au Seigneur, & étoit entiérement sous sa puissance. Le Seigneur lige est le Seigneur prochain & immédiat dont on releve nuëment, ligement & à ligence, c'est à dire, sans moyen. Tels étoient les hommages que le Roy d'Angleterre a rendus au Roy de France à cause du Duché de Guyenne, & les Comtes de Flandre & d'Artois pour leurs Seigneuries.
Homme lige, hommage, lige, Fief lige, garde lige, se dit en parlant de l'obligation qu'a le vassal à garder le Château ou la personne du Seigneur.
Lige est aussi un droit de relief qui se paye au Seigneur en cas de mutation de Fief. Il est fixé en quelques lieux à dix livres pour plein lige; en d'autres, à la moitié ou au quart de cette somme; & on le nomme alors demy lige ou quart de lige.
LIGEMENT. adv. d'une maniére lige. Il tient cette Terre ligement, avec la condition des Fiefs liges.
LIGNE. s. f. Terme de Géometrie. C'est une quantité étenduë en long. Euclide la définit, longueur sans largeur; Candale son Commentateur, l'écoulement d'un point. Ligne droite est celle qui est la plus courte entre deux points. Les lignes courbes réguliéres sont la circulaire, ecliptique, parabolique, hyperbolique, cycloïde, conchile, helice, spirale, asymptote. On dit aussi ligne paralelle, incommensurable, infinie, tangente, secante, qui sont définies à leur ordre. L'inclination de deux lignes fait un angle. On n'a pû trouver encore deux lignes moyennes & continuellement proportionelles. Les Ouvriers parlant des lignes & des traits, quand elles sont paralelles, les nomment jaugées; & quand elles sont irréguliéres, ils les nomment tastées ou corrompuës.
Ligne signifie encore la premiére & la plus petite des longueurs, c'est la douziéme partie d'un pouce, & la cent quarante-quatriéme partie d'un pied de Roi: on l'appelle autrement grain d'orge. Cet ais a six lignes d'épaisseur.
Ligne de foi est un cheveu ou un petit fil d'argent le plus délié qu'on peut trouver, qu'on applique sur le verre d'une lunette, posée sur une alhidade ou un niveau pour faire de plus justes observations, soit au Ciel, soit sur la terre.
Ligne signifie aussi un trait de plume ou de pinceau fort délié, quoi qu'il ne contienne aucun caractére.
Ligne en termes d'Ecrivains & Imprimeurs, est une rangée ou suite de caractéres couchez sur du papier, du parchemin ou autre matiére propre, à côté les uns des autres, qu'on lit de gauche à droit. Les grosses des écritures d'Avocats doivent avoir vingt & une lignes à la page suivant l'Ordonnance. Il n'y a pas assez d'espace entre vos lignes. Ces lignes ne sont pas droites. Ce mot vient du Latin Linea.
Lignes se dit au plurier d'un écrit, d'une lettre. Je vous écris ces lignes pour vous donner avis que, &c. c'est à dire, je vous écris une lettre. Je vous demande deux lignes de vôtre main sur une telle difficulté.
On dit en ce sens, lors qu'on écrit en cérémonie: Il ne lui a pas laissé la ligne. Il lui a donné la ligne, lors qu'on remplit ou qu'on laisse en blanc la premiére ligne aprés le mot de Monsieur. C'est une cérémonie que font les Grands, quand ils veulent faire distinction de la qualité des gens à qui ils écrivent.
On dit absolument à la ligne; lors qu'on veut marquer un nouvel article, pour dire qu'il faut recommencer une nouvelle ligne, & laisser la précédente imparfaite.
Ligne en termes d'Astronomie & de Géographie se dit par excellence de la ligne Equinoctiale ou de l'Equateur. Les Matelots baptizent les passagers la premiére fois qu'ils passent la Ligne. Cette Isle est sous la Ligne, à deux degrez de la Ligne: c'est là que commencent les latitudes Australes & Septentrionales.
En termes de Gnomonique on appelle la ligne de Midi, ou la ligne Meridienne, celle qui tend d'un Pole à l'autre, qui représente le cercle Meridien. Dans les cadrans verticaux la ligne de Midi est toûjours perpendiculaire à l'Horizon; Dans les horizontaux le stile ne fait point d'ombre vers l'Orient, ni vers l'Occident, quand il est sur la ligne de Midi.
En termes d'Escrime on appelle la ligne, celle qui est droitement opposée à l'ennemi, dans laquelle doivent être les épaules, le bras droit & l'épée, & sur laquelle sont aussi posez les pieds à la distance de 18. pouces l'un de l'autre; & ainsi on dit, être dans la ligne, sortir de la ligne.
En termes de Statique ou de Méchanique, la ligne de direction est celle qui passe par le centre de gravité du corps grave jusqu'au centre de la terre, laquelle doit passer aussi par le soûtien du corps pesant, autrement il est de nécessité qu'il tombe.
En termes de Pesche, on appelle aussi une ligne un hameçon attaché à une ficelle penduë au bout d'un bâton, qui sert à pescher de médiocre poisson. Ligne dormante est celle qu'on attache à un arbre pour pescher en secret. Elle est défenduë par l'Ordonnance. Ménage croit que ce mot de ligne a été dit à lino, à cause que les pescheurs faisoient leurs lignes de lin.
En termes d'Optique ou de Perspective, on appelle la ligne visuelle, la ligne ou le rayon qu'on s'imagine s'étendre depuis l'œil jusqu'à l'objet. La ligne de terre, est celle où l'on met le plan géometral qu'on veut tirer en perspective.
En termes de Chiromance, on appelle lignes les traits ou incisures qui sont marquez dans la main, dont les observations servent de fondement à cette vaine science. On en décrit ordinairement 14. dont il y en a trois principales. La premiére qui est au dessous du pouce, se nomme ligne de vie, ou la ligne du cœur, & la ligne de l'âge; la seconde s'appelle hepotique ou la ligne du foye, & naturelle, qui passe par le milieu de la paulme de la main, & qui la coupe en travers, & va jusqu'au mont de la Lune; la troisiéme qui va dans le même sens, & qui lui est paralelle, prend depuis l'indice jusqu'à l'autre bout de la main, & s'appelle mensale, thorale, ou la ligne de Venus.
En termes d'Architecture, d'Arpentage & de Jardinage on appelle ligne, le cordeau avec lequel on trace sur terre les desseins des bâtimens, on mesure les longueurs, on dresse les allées. Ces ruës sont tirées à la ligne. Voilà des arbres plantez à la ligne, en droite ligne.
En termes de Manége on appelle ligne du banquet, celle que les éperonniers s'imaginent en forgeant un mors pour déterminer la force ou la foiblesse qu'ils veulent donner à la branche, pour la rendre hardie ou flaque.
Ligne en termes de Guerre se dit de la disposition d'une armée rangée en bataille. L'avant-garde est placée en droite ligne, & se divise en plusieurs Bataillons & Escadrons postez sur le devant, & c'est la premiére ligne. Le corps de Bataille forme la seconde ligne, où est le poste du Général; & la troisiéme ligne est le corps de réserve ou l'arriére-garde. Il faut laisser 150. pas de terrain pour se rallier, entre la premiére & la seconde ligne, & deux fois autant entre la seconde & la troisiéme. Dans cette Bataille Navale tous les Vaisseaux étoient rangez sur une même ligne.
Ligne en termes de Fortification, est un travail fait de terres remuées, un fossé, un parapet, ou une couverture faite de rangées de fascines, gabions ou sacs à terre, pour défendre un camp, une place d'armes.
Lignes de circonvallation sont des fossez couverts de parapets, qui se font autour d'une place à la portée du Canon, pour se défendre du secours qu'on pourroit craindre; & parce que d'espace en espace elles sont fortifiées de forts & de redoutes, elles sont appellées de communication d'un quartier à l'autre.
Lignes de contrevallation sont de semblables lignes par lesquelles on se fortifie contre les assiégez, quand la garnison est trop forte. On les appelle aussi contrelignes.
Ligne de défense rasante ou flanquante est la ligne qui étant tirée le long de la face du bastion aboutit à quelque point de la courtine. La ligne de défense doit être de 120. toises ou environ.
La ligne de défense fichante, est celle qui est tirée de l'angle, de la courtine, & du flanc, ou de quelque autre partie du flanc qui fait un angle avec la face, d'où les coups tirez peuvent entrer & se ficher dans la face du bastion opposé.
On appelle aussi lignes d'attaques, lignes d'approches, les tranchées, & semblables travaux qui sont faits pour s'approcher de la place & l'attaquer.
On appelle la ligne fondamentale, la premiére ligne, qu'on décrit quand on veut tracer le plan d'une place, & qui en figure toute l'enceinte. La ligne capitale est celle qui va du centre du bastion à sa pointe.
En termes de Marine, on appelle lignes plusieurs cordes qui servent à amarer, lier ou arrêter les manœuvres, comme les rabans, rides & garcettes. On appelle aussi ligne d'eau, la ligne que marque sur le bordage la surface de l'eau, quand le vaisseau est à flot. On appelle aussi la ligne de la seconde, le cordeau où est attachée la seconde.
Ligne blanche en termes de Médecine, est la termination des muscles de l'Epigastre continuée depuis le cartilage scutiforme jusqu'à l'os pubis. Elle est appellée blanche tant à cause de sa couleur, que parce qu'il n'y a point de parties charneuses, ni au dessus, ni au dessous d'elle.
En termes de Finance on appelle ligne de compte, les articles qu'on couche dans un compte; & on dit qu'une somme est tirée hors ligne, quand elle est mise en chiffre à la marge droite du compte, pour en faciliter le calcul.
En ce sens on dit au figuré, mettre en ligne de compte les graces qu'on reçoit de ses amis, les services qu'on leur rend, suivant qu'on en fait plus ou moins d'état. Cette faveur est trop legére, ne la mettez pas en ligne de compte.
Ligne en termes de Généalogie, est une suite de Parens en divers degrez descendans d'une même souche ou pere commun. La ligne directe est celle qui va de pere en fils, la collaterale est celle où sont placez les oncles, tantes, cousins, neveux. La ligne ascendante, la ligne descendante. Un lignager est celui qui est de l'estoc & ligne de quelqu'un. La ligne masculine a fini à un tel.
LITARGE. s. f. est la fumée du plomb évaporé dans l'affinement de l'or & de l'argent; c'est comme une suye qui s'attache à la cheminée du fourneau: celle d'or est jaune, & celle d'argent est blanche. C'est aussi l'écume du plomb brûlé, hors qu'il est fondu avec de l'argent: car cette écume étant ôtée, elle est de la couleur d'argent; mais si elle est poussée davantage au feu, elle devient de couleur d'or: de sorte qu'il n'y a que la difference de la cuisson, qui distingue la litarge d'or ou d'argent. Dioscoride en parlant des litarges d'argent qu'il appelle spuma argenti, dit qu'il y en a une faite de sablon plombin; l'autre d'argent & de plomb. La meilleure est de couleur d'or, qu'il nomme chrysitis. Celle de Sicile s'appelle argentine à cause de sa couleur; mais celle qui est faite d'argent, s'appelle Calabroise. Mathiole la définit plomb mêlé de vapeurs de bronze & d'argent; il dit aussi que la litarge est un poison.
LUNETTE. s. f. terme d'Optique, Instrument qui sert à grossir les objets, à conserver, à faciliter l'action de la vûë. Les Auteurs qui ont écrit des lunettes, & sur tout du Telescope, ont été entr'autres Kepler dés l'année 1611. Johannes Hevelius, Scheinerus, Emanuel Magnan, Galilée, Descartes, Sirturus, Maurolicus, Antonius de Dominis, Malapertius, Aquilonius, Vitellio, Tardeus, Fontana, le Pere Schot Jesuïte, le Pere de Rheita Capucin, & Pierre Borelli, dans divers Traitez d'Optique, de Perspective & d'Astronomie. Les Ouvriers fameux ont été Torricelli, Fontana, Ferrier, Chorez, Campani, Divini, & maintenant le Sieur Borelli Chymiste, qui est de l'Academie Royale des Sciences, qui a fait les verres de lunettes de l'Observatoire.
Le Telescope est une lunette à longue vûë, qui approche les espéces des corps éloignez, & qui les grossit. On l'appelle aussi une lunette d'Hollande, de Galilée. Il y a de ces lunettes simples à deux verres, qui sont l'objectif & l'oculaire, & d'autres à quatre verres. La lunette de l'Observatoire de Paris a septante six pieds de tuyau. Messieurs Descartes & Hook n'ont pas desesperé de pouvoir découvrir quelque jour des animaux dans la Lune par le moyen des grandes lunettes; mais Monsieur Auzout a prétendu qu'on n'en peut faire de plus longues que de trois cens pieds, & qu'en ce cas on ne pourroit voir la Lune que comme on la verroit de soixante lieuës loin sans lunettes, à laquelle distance on ne pourroit pas découvrir des animaux sur la Terre. Voyez Telescope.
Le Microscope est une autre lunette courte, qui sert à découvrir les plus petites parties des objets qu'elle grossit extraordinairement. Il s'en fait aussi à plusieurs verres. Il y a d'autres Microscopes si petits, qu'ils sont faits d'un verre qui n'est gros que comme la tête d'une épingle, & ils font des effets merveilleux. Gassendi dit avoir vû émeutir un ciron avec le Microscope. Il y en a aussi pour le Peuple qu'on appelle lunettes à puces, qui ne sont autre chose qu'une petite bouteille, dans laquelle on regarde par un fort petit trou.
Lunette Poliedre ou à Facette, est ce que le Peuple appelle lunette d'Avaricieux, qui se fait avec un verre taillé, qui multiplie autant de fois l'objet qu'il a de faces. Il se fait de belles perspectives de piéces rapportées avec des lunettes à Facettes, dont l'art est décrit par le Pere Niceron dans sa Perspective, & par le Pere Kircher en son Livre de la Magie, de la Lumiére, & de l'Ombre.
Lunettes au plurier, ce sont deux verres enchassez dans de la corne ou autre matiére qu'on applique sur le nez, & devant les yeux, pour aider aux vieillards & à ceux qui ont la vûë courte, à lire & à écrire, ou à découvrir mieux les objets. On les appelle aussi Besicles. Il y en a qui servent à grossir les objets, les autres à conserver seulement la vûë, qu'on appelle Conserves. On a fait aussi des lunettes à longue vûë, pour appliquer aux deux yeux qu'on appelle Binocles, dont a écrit le Pere Cherubin Capucin, & avant lui le Pere Rheita du même Ordre, en son Livre intitulé Oculus Enoch & Eliæ, lequel avoit trouvé aussi l'invention des lunettes à trois ou à quatre verres. Voyez Binocle.
Pour achever la perfection des lunettes, on a trouvé le moyen d'appliquer un treillis ou grille de filets trés-déliez sur le verre oculaire convexe, ce qui rend l'observation plus juste. On en voit la figure dans le Journal des Sçavans de l'année 1667.
Les lunettes ont certainement été inconnuës aux Anciens, mais aussi elles ne sont pas si modernes que le Telescope. Un Frere Alexandre Despina de l'Ordre des Freres Prêcheurs de Sainte Catherine de Pise, qui mourut dés l'an 1311. en communiqua l'invention, qu'il trouva de lui-même, aprés qu'il eut appris qu'un autre en avoit trouvé le secret, lequel il ne vouloit pas communiquer. Cela est écrit dans la Chronique de ce Convent; & il est fait mention de ces lunettes dans le Dictionaire de la Crusca au mot occhiale. Il en est fait aussi mention dans le Livre de Guy de Chauliac Professeur de Medecine à Montpellier, intitulé la Grande Chirurgie, composé dés l'année 1363. Il y a aussi un Arrest du 12. Novembre 1416, rapporté par Ménage en son livre Amœnitates Juris, qui fait mention de ces lunettes, & d'autres témoignages anciens citez par le sieur Comiers en son Traité des Lunettes.
On appelle aussi en Architecture des voutes à lunettes, lorsque dans les deux côtez du berceau d'une voute on y fait de petites arcades pour y pratiquer quelques jours ou veuës.
Lunettes se dit aussi par antiphrase en matiére de bâtimens, de ce qui bouche ou qui ôte la veuë. Cette maison avoit veuë sur plusieurs jardins; mais le voisin a élevé son mur, & il lui a donné des lunettes.
Lunette se dit aussi d'une petite ouverture qui se fait dans le toit d'une maison.
Lunette en termes de Menuiserie, est une planche de bois percée, qui sert de siége à un privé. On a commandé à ce menuisier une lunette pour un privé. On appelle aussi une lunette, cette ouverture qui est au derriere des soufflets, par où entre le vent, & qui se ferme en dedans par la souspape.
Lunettes en termes de fortifications, sont des enveloppes qui se font au devant de la courtine. Elles sont composées de deux faces qui font un angle rentrant, & se construisent ordinairement dans des fossez pleins d'eau, pour y faire l'effet d'une fausse braye. Elles ont cinq toises de large dont le parapet en a trois.
Lunettes en termes de Manége, sont deux petites piéces de feûtre relevées en bosse, qu'on applique sur les yeux d'un cheval vicieux, ou qui ne veut point se laisser ferrer ni monter.
On dit aussi ferrer un cheval à lunettes, ou à demi fer, c'est à dire, avec un fer dont on a retranché la partie des branches, qui est vers le quartier du pied, ce qu'on appelle les éponges.
On appelle aussi lunette le cercle de métail qui enferme & soûtient le crystal d'une montre.
Lunette chez les Tourneurs, est cette piéce de bois troüée qu'ils appliquent sur leur tour, pour faire diverses sortes d'ouvrages qui se tournent en l'air.
Lunette de volaille, est la partie du chappon qui est entre le col & l'estomac, qui est soûtenuë par deux petits os qui forment un angle aigu. On tient que la lunette est la partie la plus excellente du chappon.
On dit proverbialement à celui qui s'est trompé en regardant quelque chose: Prenez vos lunettes, chaussez vos lunettes. On dit aussi en se mocquant d'un grand nez: Voilà un beau nez à porter lunettes.
LUNETTIER. s. m. Ouvrier qui fait & qui vend des lunettes. Les Miroitiers & les Lunettiers ne font qu'un Corps & une même Maîtrise.
LUT. s. m. En termes de Chymie, se dit de toute sorte de ciment ou d'enduit qui sert tant pour le bâtiment des fourneaux, que pour mettre autour des vaisseaux de verre & de terre qui doivent résister à un feu violent. On le fait de terre grasse, de sable de riviére, de fiente de cheval, de la poudre des pots de beurre cassez, de la tête morte du vitriol, du machefer, du verre pillé & de la bourre ou laine courte des Tondeurs, mêlez avec de l'eau salée ou sang de bœuf. Il y a aussi un Lut qui sert à luter les chappes avec les cucurbites ou recipiens, ou pour réparer les fentes des vaisseaux, qui se fait avec de l'amidon cuit, ou de la colle de poisson dissoute dans l'esprit de vin & des fleurs de soulfre, du mastic & de la chaux éteinte dans du petit lait. On appelle aussi lut de sapience le sceau hermetique qui se fait en fondant le bout d'un matras de verre au feu de lampe, & en le tortillant avec la pincette. Ce mot vient de lutum.
LUTH. s. m. Instrument de musique monté de cordes de boyau, qui n'avoit autrefois que six rangs de cordes; mais avec le temps on y a ajoûté quatre, cinq, ou six autres rangs plus bas. Le luth est composé de quatre parties, de la table de sapin ou de cedre, du corps composé de neuf ou dix éclisses, qu'on appelle aussi le ventre ou la donte; du manche qui a neuf touches ou divisions marquées avec des cordes de boyau; & de la tête ou de la crosse où sont les chevilles. Il y a aussi une rose au milieu de la table par où sort le son; un chevalet où sont attachées les cordes, & un fillet ou mourceau d'ivoire qui est entre le manche & la tête, sur lequel les cordes portent par l'autre extrêmité. On pince les cordes de la main droite, & de la gauche on appuye sur les touches. On appelle le temperament du luth, l'alteration convenable que l'on est obligé de faire des intervalles tant à l'égard des consonances, que des dissonances, pour les rendre plus justes sur l'instrument. Les luths de Boulogne sont les plus estimez par la qualité du bois, qui est cause qu'on en tire un plus beau son. On est plus long-temps à accorder un luth qu'à en jouër. Les concerts se font avec des dessus & des basses de luths. On dit qu'un luth est bien monté quand on y a mis de bonnes cordes, qui sont bien d'accord & au ton convenable. Un Auteur digne de foy dit qu'on a vû à Paris un luth d'or, qui revenoit à trente-deux mille écus. Ce mot vient de laud Espagnol, qui est venu de allaud des Maures, qui signifie la même chose, comme témoigne Scaliger. Quand on le veut nommer en Latin, on l'appelle testudo, cythara, chelys.
LUTHÉE. s. f. Est une épithete qu'on donne à la Mandore, lors qu'elle a plus de quatre rangs de cordes, & qu'elle approche plus prés du luth.
M.
MAGDALLON. s. m. C'est ainsi qu'on appelle un rouleau ou petit cylindre de soulfre, d'onguent, &c. tels qu'on les vend chez les Epiciers & Apotiquaires: ce mot vient de Magdalis Latin, tiré du Grec Magdalis, signifiant la même chose.
MAGISTERE. s. m. Terme de Chymie & de Pharmacie: c'est la préparation d'un corps mixte par art de Chymie, par laquelle toutes ses parties homogenes sont exaltées en un degré de qualité ou substance plus noble qu'auparavant, en rejettant seulement ses impuretez externes sans faire aucune extraction. Le magistere differe de l'extrait, en ce que dans le magistere toutes les parties du mixte y demeurent, quoi qu'elles soient changées en des qualitez ou consistances plus exquises, & dans l'extrait on ne prend que la plus noble partie de la substance, qui est tout à fait séparée d'avec la plus grossiere & élementaire.
On fait des magisteres de tartre, de perles, de coraux. Des magisteres de lait, cremeur, ou beurre de soulfre. Des magisteres d'agaric, de turbit, d'hermodax, &c. L'effervescence de l'esprit de vitriol mêlé avec l'huile de tartre, leur a fait donner par quelques-uns le nom de magistere.
MAGNESIE. s. f. Est une pierre minerale, fossile, noire, opâque, tirant de la couleur de fer au pourpre, qui ne contient aucun métal; mais un soulfre fixe & un peu inflammable. Elle entre en la composition du verre, le purifie & le blanchit, si elle est en petite quantité. Autrement elle le rend bleu ou de couleur de pourpre; elle la donne aussi aux pots de terre si avant leur cuitte on les peint de cette magnesie dissoûte. C'est la même chose que le saffre; on l'appelle aussi manganese, & chez les artisans, perigueux.
MALACHITE. s. f. Est une pierre précieuse qui est d'une nature mitoyenne entre le jaspe & la turquoise, & qui est tout à fait opaque: Elle a des veines blanches mêlées de taches noires & de plusieurs autres couleurs qui en font faire plusieurs distinctions. La plus estimée est celle qui approche le plus de la turquoise, & qui a le plus de bleu.
MALTHE. s. f. Ciment dont on se servoit autrefois, qui étoit un mêlange de poix, de cire, de plâtre & de graisse. Dans le Pontificial il est parlé de ce ciment, dont on avoit besoin quand on faisoit la Dédicace des Eglises, en Latin malta; d'où quelques-uns prétendent qu'on a fait les mots de Smaltire, d'où viennent émailler, & émeutir.
MANDRIN. s. m. Est le principal outil d'un tourneur; l'arbre qui tourne dans la lunette, au bout duquel on monte ou on attache les piéces que l'on veut tourner en l'air & hors les pointes.
Mandrin, se dit aussi de plusieurs poinçons qui servent aux artisans à percer le fer ou les métaux sur lesquels ils travaillent.
MANICORDION. s. m. Instrument de Musique, fait en forme d'Epinette, qui a 49 ou 50 touches ou marches, & 70 cordes, qui portent sur cinq chevalets, dont le premier est le plus haut, les autres vont en diminuant. Il y a quelques rangs de cordes à l'unisson, parce qu'il y en a plus que de touches, chaque chevalet en contient divers rangs: Il a plusieurs petites mortaises pour faire passer les sautereaux armez de petits crampons d'airain qui touchent & haussent les cordes, au lieu de la plume de corbeau qu'ont ceux des clavessins & des épinettes; ce qu'il a de particulier: c'est qu'il a plusieurs morceaux d'écarlate ou de drap, qui couvrent les cordes depuis le clavier jusqu'aux mortaises, qui rendent le son plus doux, & l'étouffent tellement qu'on ne le peut entendre de loin; d'où vient que quelques-uns le nomment Epinette sourde ou muette; aussi est-il particuliérement en usage chez les Religieuses qui apprennent à en jouër, & qui craignent de troubler le silence du dortoir. Cet instrument est plus ancien que le clavessin & l'Epinette, comme témoigne Scaliger, qui ne lui donne que trente-cinq cordes.
On dit proverbialement & burlesquement qu'une fille a joüé du manicordion quand elle a eu quelque amourette, qui a duré long-temps sans faire bruit.
MANIPULE. s. m. Ornement Ecclesiastique que les officians Prêtre, Diacre & Soûdiacre portent au bras gauche: il est fait en forme de petite étolle, & de la même étoffe que les chasubles, & tuniques. Il signifie & represente un mouchoir que les Prêtres de la primitive Eglise portoient au bras pour essuyer les larmes qu'ils versoient continuellement pour les péchez du peuple, dont il reste encore une marque dans l'oraison que disent ceux qui s'en revêtent. Merear, Domine, portare manipulum fletus & doloris. En beaucoup d'endroits on l'appelle le fanon.
Manipule, en termes de Medecine est une mesure d'herbes, qui s'entend de ce que la main peut serrer, les Medecins le désignent dans leurs Ordonnances par M.
Manipule, signifioit encore chez les Romains une petite troupe ou compagnie de soldats, parce que chez eux le manipule signifioit au propre une poignée de foin qu'ils attachoient au bout d'une perche pour se reconnoître avant qu'ils eussent pris les aigles pour enseignes; de là vient que nous disons encore en ce sens une poignée de gens.
Manipule pyrotecnique, se dit à la guerre d'une certaine quantité de petards de fer ou de cuivre qu'on peut jetter à la main sur les ennemis, la maniére de les faire est enseignée par Casimir dans son Livre de l'Artillerie.
MANŒUVRE. s. m. Homme de peine qu'on prend à la journée dans les âteliers pour servir les Massons, & faire autres fonctions qui n'ont besoin d'aucun art ou apprentissage. Ce mot vient de manopera, ouvrage de main. Ménage.
On appelle proverbialement & ironiquement un homme fin & adroit, un rusé manœuvre.
Manœuvres, en terme de marine, ce sont les cordes qui servent à manier les voiles en diverses façons, comme les Issas ou Drisses qui sont le long des masts servent à les hausser. Les valencines servent à faire pancher les antennes d'un côté ou d'autre. Les bras tirent le bout des antennes vers la pouppe. Les escoutes, ou contre-escoutes tiennent le bout des voiles: les breuils ou martinets servent à embroüiller promptement les voiles, & les garcettes, à les ferler, les ralingues à les fortifier, les boulines ou boulinettes servent à ouvrir les bords des voiles pour recevoir le vent qui vient de biais: cela fait dix ou onze cordes qui sont le plus souvent doubles, & étant multipliées par les dix voiles, font plus de deux cens cordes, ou manœuvres. L'Itacle est la plus grosse des manœuvres, elle soûtient & éleve l'antenne passant à une poulie qui est sous la hune, & aboutit à un moufle de poulies où sont les Issas.
Il y a des manœuvres dormantes qui sont fixes, ausquelles on touche rarement, & d'autre coulantes qui sont presque en mouvement continuel, comme celles qui servent à manier les voiles.
Manœuvre, signifie aussi l'usage & le service de ce cordage, & le service des Matelots qui les font mouvoir. Les manœuvres sont en desordre pendant la tempête. Ce matelot entend bien la manœuvre, il execute soudain les commandemens.
MANNE. s. f. Terme de pharmacie, drogue médicinale, c'est un suc ou une liqueur blanche, douce, qui découle d'elle-même, par incision des branches & des feüilles même des frênes tant ordinaires que sauvages pendant la canicule, & un peu auparavant. On ne la trouve que sur ces arbres, encore n'est-ce pas sur tous, mais principalement en Calabre & aux environs de Briançon; c'est pourquoi ceux là se trompent lourdement, qui disent que c'est un miel de l'air, ou une espéce de rosée, qui vient d'une vapeur élevée de la terre & digerée dans l'air, condensée par le froid qu'on recuëille dans les païs chauds avant le lever du Soleil, tant sur les plantes & les arbres que sur les rochers & la terre même, qui disparoît lorsque la chaleur survient; car au contraire on l'amasse en plein Soleil, lequel la seche & la condense, de sorte qu'on la doit mettre au rang des gommes qui s'épaississent par la chaleur, & se résolvent dans l'humidité.
Les Italiens en connoissent de trois sortes, manna di corpo, qui sort d'elle-même des branches de l'arbre dés le mois de Juillet; la seconde manna forzata, ou forzatella, qui ne se recueille au mois d'Août qu'aprés l'incision de l'arbre, & lorsque la premiére a cessé de couler. La troisiéme manna di fronda, qui sort d'elle-même en forme de petites gouttes d'eau comme un espéce de sueur, de la partie nerveuse des feüilles du frêne, qui sont de la grosseur des grains de froment, & qui s'endurcissent au Soleil au mois d'Août; on voit quelquefois ces feüilles si chargées de ces grains qu'il semble qu'elles soient couvertes de neige. La manne est une medecine qui purge fort doucement, & qu'on prend dans les boüillons. Altomatus Medecin de Naples en a fait un traité exprés; & Joseph Donzellus confirme ce qu'il en a dit. La manne purge la bile, quoi qu'on la tienne une espéce de miel, & au contraire le miel ordinaire l'augmente. Fuchsius dit que les païsans du Mont-Liban mangent ordinairement la manne, comme ailleurs on fait le miel.
A Mexique ils ont de la manne que l'on mange comme on fait le fromage en Europe.
Manne en termes de l'Ecriture, est une viande miraculeuse que Dieu fit tomber du Ciel pour nourrir son peuple Hebreu dans le desert pendant quarante ans. La manne étoit en façon de coriandre. Les Israëlites murmurerent contre la manne, & en eurent du dégoût. La manne est une des figures de l'Eucharistie.
Manne, se dit figurément de toutes sortes de viandes & de fruits, principalement quand ils sont de garde, quand ils peuvent nourrir, & faire subsister une maison. C'est une bonne manne dans un logis qu'une provision de pois, de féves, de ris pour le Carême.
Manne est aussi un grand panier d'osier fait en quarré long, qui sert quelquefois de berceau pour coucher un enfant à la mammelle, quelquefois elle est plus petite, & elle sert à transporter les habits d'un ballet, ou le linge & la vaisselle pour mettre le couvert, &c.
On appelle aussi mannes sur la mer des paniers à rebords faits comme un chapeau.
Mannequin. s. m. Panier d'osier haut & assez étroit, plus large par en haut que par en bas, qui sert à differens usages. On a mis ces plantes dans un mannequin pour les transporter. Les marchands de fruits les transportent dans des mannequins: ce mot est diminutif de manne quand il signifie panier.
Mannequin, chez les Peintres se dit d'une certaine figure de bois qui a des charniéres en la plûpart de ses membres, par le moyen de quoi elle est mobile, & on la met en toute sorte de postures ou d'attitudes, elle leur sert pour disposer leurs drapperies en la revêtant d'habits tels qu'ils desirent. Borel dérive ce mot en ce sens de man, qui en Allemand & en vieux François signifioit un homme, dont il est diminutif, comme qui diroit petit homme.
MARESCHAL. s. m. Officier de la Couronne qui commande les Armées; on l'appelle par excellence Mareschal de France. Chez quelques étrangers il fait la même fonction. Le grand Mareschal de Pologne, de Lithuanie. L'Electeur de Saxe est grand Mareschal de l'Empire. On dit qu'on a donné à un homme le Bâton de Mareschal, ou simplement le Bâton, pour dire qu'on l'a fait Mareschal de France; c'est un Bâton fleurdelisé qui marque la dignité, & qu'il met en sautoir sous l'écu de ses armes. Ce sont les Mareschaux de France qui sont Juges du point d'honneur entre les Gentilshommes, qui accordent leurs querelles.
Les Prévôts des Mareschaux sont des Officiers Royaux & Juges d'épée établis pour la seureté de la campagne, pour prendre & juger les voleurs, vagabonds & gens non domiciliez; on leur a aussi attribué la connoissance des cas Royaux par prévention: ils sont reçûs à la Connestablie, & y ont attribution de Jurisdiction, & sont réputez du corps de la gendarmerie.
Mareschal de Camp, est le second Officier de l'Armée, le premier Officier aprés le Lieutenant général, c'est celuy qui ordonne du campement & du logement de l'Armée, & qui prend les devans pour la faire marcher en seureté, & reconnoître le terrain.
Mareschal de Bataille, étoit autrefois un Officier qui rangeoit les troupes en bataille, qui avoit soin de leur marche & de leur ordre; ce sont aujourd'hui les Mareschaux de camp, & les Majors généraux qui en font la charge.
Mareschal des Logis, est un Officier de guerre, qui a soin du logement des soldats. Il y a un Mareschal des Logis de l'Armée. Il y en a un dans chaque Régiment d'infanterie, & en chaque compagnie de cavalerie, deux en chaque compagnie de gend'armes & de chevaux legers, & six en chacune des compagnies des Mousquetaires.
Il y a aussi un grand Mareschal des Logis chez le Roi, qui marque les logemens de la suite de la Cour quand le Roi fait voyage; Il y en a aussi chez la Reine & chez les Fils de France.
Mareschal ferrant, ou simplement Maréchal, est un artisan qui ferre les chevaux, & qui les pense quand ils sont malades. En Espagne ce sont deux métiers separez, les premiers s'appellent herradores, & les autres alveytares.
Ce mot vient selon Nicod de Polemarchus, comme qui diroit Maire de camp; en vieux Gaulois & encore en Breton Mark signifioit cheval, comme on recueille de Pausanias, qui dit que ce mot étoit en usage chez les Celtes, mais c'est plûtôt un mot Allemand dont il est fait mention dans la loi salique, & dont on a fait marchal, pour dire celui qui commandoit la cavalerie. Ménage le dérive de Mareschalcus, qui se trouve dans les loix des Allemands, composé de Marck cheval, & de schalk signifiant serviteur; ce qui a donné ce nom à celuy qui pense les chevaux, & par succession de temps à celuy qui les commande. Borel dit qu'originairement Mareschal signifioit gouverneur de jumens, & que mark signifie jument, dont les anciens se servoient d'ordinaire pour épargner le fourrage, parce que les jumens gâtent moins de litiere, à cause qu'elles jettent en arriére leur urine. Il dit aussi que ce mot de mark, qui en vieux Gaulois & en ancien Allemand signifioit cheval, vient de l'Hebreu Ramak, où il veut dire une jument. Quelques-uns ont dit que le mot de mareschal étoit un abregé de mire cheval, car mire signifie Medecin, & les Rois en avoient autrefois pour leurs chevaux, comme témoigne Nicod. Pasquier fait distinction pour l'origine de Mareschal des logis, & Mareschal de camp, d'avec ceux de Mareschal de France, & Mareschal ferrant; A l'égard des premiers, il dit que ce mot vient de marche, ou marchir, qui signifioit marquer, limiter, & il prétend qu'il faut dire marchal, & non pas Mareschal. A l'égard des derniers, il dit que le mot est composé de maire, qui signifioit maître, & de chal qui signifioit cheval. Lecteur choisissez.
Mareschaussée. s. f. Jurisdiction des Prévôts des Mareschaux; il y a dans l'enclos du Palais la Connestablie & Mareschaussée de France, où sont des Juges de Robbe qui prennent connoissance de la réception des Officiers des autres Mareschaussées, & de leurs differens. Il y a d'ailleurs 180 Mareschaussées en France, qui sont des siéges de Juges d'épée, qui instruisent les procés des voleurs & des vagabonds, & autres cas dont ils sont competens; qui les jugent souverainement avec sept Officiers du plus prochain Présidial. Le Prévôt qui tient à Paris cette Mareschaussée s'appelle le Prévôt de l'Ile.
On dit aussi que la Mareschaussée se tient chez un tel Doyen des Mareschaux de France, quand quelques Exempts & Gardes se trouvent chez luy pour executer les ordres qu'il aura à donner dans les occasions pour les querelles de la Noblesse.
Mareschaussée a signifié aussi en Lorraine, un grand lieu ou enclos, où on enferme le bêtail, d'où le Bon Medecin de ce païs-là trouve occasion de dériver le mot de Mareschaussée, parce que, dit-il, il y avoit plusieurs lieux marécageux qui obligeoient à faire des places relevées pour mettre à sec le bêtail, lesquelles on appelloit chaussées comme tout autre chemin levé & pavé; & parce que dans ces lieux on faisoit souvent des vols de bestiaux, on y établit un Juge qui jugeoit dans l'étenduë de la Mareschaussée, ou village; ce qu'on a depuis étendu à d'autres Officiers.
Dans plusieurs Coûtumes on appelle mareschaussée, les matériaux assemblez pour bâtir, comme en celles de Montreüil, Arthois, Bapaume, &c.
Marfil. s. m. est un nom que les marchands en gros donnent à l'yvoire, ils l'ont pris de l'Espagnol, où il signifie la même chose.
MARIN. ine. adj. qui vient de la mer, qui appartient à la mer. Les Anciens appelloient les Tritons des Dieux marins. Ce fut un monstre marin qui fit périr Hypolite. On peignoit le char de Neptune attelé de chevaux marins. Il y a des veaux marins; des chiens & des loups marins. Le sel marin est celui qui se fait de l'eau de la mer, qui est de figure cubique, & le plus fort de tous les sels.
La carte marine, ou hydrographique, est celle qui sert pour la conduite des vaisseaux, où sont marquez les rumbs des vents, les côtes, les rades, & les bancs de sable.
On dit qu'un homme a le pied marin, quand il est accoûtumé à l'air & à la fatigue de la mer, quand il a été long-temps sur les vaisseaux.
La trompette marine, est un instrument qui n'a qu'une grosse & longue corde de boyau, tenduë sur un chevalet, & qu'on touche avec un archet; elle a le corps triangulaire, & elle imite fort bien le son des trompettes ordinaires. Voyez trompette.
La Marine. s. f. est la science de la navigation, ou l'art de naviger dont les Anciens n'ont rien laissé par écrit avant l'invention de la boussole. On tient que la marine est la science qui approche le plus de la perfection. Pierre Nonius est un célébre Mathématicien Portugais, qui le premier en a écrit deux livres en l'année 1530. à l'occasion de quelques doutes que lui proposa Martin Alphonse Sosa: en suite Pierre Medina Espagnol; & en 1606. André Garcia Cespedes fit imprimer Regimiento de la navigation: en 1608. Simon Stevin Mathématicien du Prince d'Orange. En 1620. Willebrordus Snellius a fait imprimer son Typhys Batavus. En 1631. Adrianus Metius a écrit de l'art de naviger par le globe. En 1640. le Pere Fournier Jesuite a écrit de l'hydrographie. En 1661. le Pere Riccioli & le Pere Gaspard Schotus Jesuites en ont donné quelques traitez dans leurs Œuvres; & en 1666. le Sieur Denis Hydrographe & Professeur à Dieppe, Rodericus Zamoranus, Pierre Appian, Rodericus Crescentius, Augustinus Cæsareus, Robert Dutlé, Jacques Colomb, Jean Janson, & le Pere Mersene Minime en ont fait quelques traitez; le dernier qui en a écrit est le Pere Deschales Jesuite, des œuvres duquel ceci est tiré en faveur de ceux qui s'adonnent à la navigation, que maintenant on cultive heureusement en France. Les Livres ordinaires de marine qu'ont les pilotes sont les Routiers de Pierre de Medine, de Manuel Figueirido, le miroir, le tresor, la colomne de la mer, le flambeau de la navigation dressé par Guillaume Jeanszoon.
On appelle des marchandises marinées, lorsqu'elles sont imbuës & soüillées de l'eau de la mer.
Mariné. En termes de blason, se dit des animaux dépeints sur les écus, qui ont la moitié du corps de poisson. Il portoit de gueules au cerf estropié (ou qui n'a point de pieds) mariné d'or.
Marinette. s. f. Vieux mot qui signifioit autrefois la pierre d'aimant, & même la boussole qui en est touchée, parce qu'elle servoit principalement à la marine. Voyez Boussole.
MASCARET. s. f. terme de navigation: C'est un reflus violent de la mer qui remonte impetueusement dans la riviére de Dordogne, qui fait le même effet sur cette riviére que celui qu'on appelle la Barre sur la Seine. Les Naturalistes ont de la peine à expliquer cette sorte de reflus, qui est particulier à ces deux riviéres.
MASCARADE. s. f. Troupe de personnes masquées qui vont danser & se divertir, sur tout en la saison du Carnaval. Cette compagnie a fait une jolie mascarade, a dansé une espece de ballet. Ce mot vient de l'Italien mascarata, dérivé de l'Arabe Mascara, qui signifie raillerie, bouffonnerie. Ménage.
Mascarade est aussi un titre que quelques Poëtes ont donné à des vers qu'ils ont fait pour les personnages de ces petites danses ou ballets.
Mascarade, se dit aussi d'une personne mal mise, ou mal proprement ajustée, comme si elle vouloit se déguiser, & aller en masque. Cette femme affecte des ornemens, des parures extravagantes, & hors de mode; c'est une vraye mascarade. Les chevaux l'ont tellement éclaboussée qu'elle avoit le visage comme une vraye mascarade.
Mascarade, se dit aussi d'une vaine pompe & cérémonie, d'un appareil éclatant qui ébloüit le sot peuple, et dont les sages ne sont point touchez. Démocrite traitoit tout le genre humain de mascarade, se mocquoit de ses vanitez & mascarades. On le dit aussi de ceux qui trompent sous apparence d'honnêteté, qui déguisent leurs sentimens. Les hypocrites sont des continuelles mascarades.
MASSORE. s. f. Terme de Théologie. C'est un travail fait sur la Bible par quelques sçavans Rabbins pour en empêcher l'alteration. Buxtorfe la définie une Critique d'un texte Hebreu, que les anciens Docteurs Juifs ont inventée, par le moyen de laquelle on a compté les versets, les mots, & les lettres de texte, & l'on en a marqué toutes les diversitez; car le texte des Livres sacrez étoit autrefois écrit tout d'une suite, sans aucune distinction de Chapitres, ni de versets, ni même de mots; de maniére que tout un Livre n'étoit qu'un mot continu à la maniére des Anciens, dont on voit encore plusieurs manuscrits Grecs & Latins, écrits de cette sorte. Ce mot ne signifie que tradition, comme si cette critique n'étoit autre chose qu'une tradition que les Juifs avoient reçûë de leurs peres. On tient que ce sont les Juifs d'une école fameuse qu'ils avoient à Tiberiade qui ont fait, ou du moins commencé cette Massore, comme dit Elias Levita. Aben Esra les fait Auteurs des Points & des accens qui sont dans le texte Hebreu qu'on a aujourd'hui, qui servent de voyelles. Les Arabes ont fait aussi la même chose sur leur Alcoran, que les Massoretes sur la Bible. Il y a une grande & une petite Massore imprimées à Venise & à Bâle avec le texte Hebreu en different caractére. Voyez là-dessus le P. Morin & le P. Simon, Buxtorfe dans le Commentaire Massoretique qu'il a intitulé Tiberias. On appelle Massoretes ces Auteurs qui ont travaillé à la Massore, & l'exemplaire Massoretigue est le texte Hebreu dont on se sert aujourd'hui.
MAST. s. m. grand arbre posé dans les Vaisseaux, où on attache les vergues & les voiles pour recevoir le vent nécessaire à la navigation. Il y en a quatre dans les grands Vaisseaux, quelquefois on y en ajoûte un cinquiéme qui est un double artimon. Le grand mast, ou le mast de maître est le principal mast du Vaisseau; le second s'appelle de misaine, mast de bourset, ou mast d'avant, qui est entre le grand mast & la prouë; le troisiéme l'artimon, qui est entre le grand mast & la pouppe; & le quatriéme beaupré, qui est couché sur l'esperon à la prouë. Le mast de contremisaine, ou petit artimon est sur l'arriére dans les galions, Naos, ou grands Vaisseaux. Le grand mast jusqu'à la premiére hune est ordinairement égal à la quille du Vaisseau.
On appelle aussi mâts les brisures ou divisions des mâts qui sont posez les uns sur les autres: le grand mast & celui de misaine en ont chacun trois, le grand mast, le mast de hune, qui est au dessus & tout d'une piéce, & le mast de perroquet qui est sur celui de hune; & au dessus encore est le bâton du pavillon, ce qui fait quelquefois plus de trente-quatre toises. L'artimon qu'on appelle aussi mast de foule, & le beaupré n'ont qu'une brisure chacun, on l'appelle de perroquet, & non de hune. Le grand mast est posé au milieu du premier pont ou franc tillac, & descend au fond de cale, sur la contrequille; il n'est pas tout à fait perpendiculaire, mais il panche du côté de la pouppe à proportion de sa hauteur depuis deux jusqu'à six pieds. Sa plus grande grosseur est au franc tillac, & il va en diminuant par haut & par bas du tiers de sa grosseur. Le mast de misaine passe à travers le château d'avant au dessus de l'estrave, à l'extrêmité de l'escarlingue. Le mast de beaupré est enchassé par le bout d'embas sur le premier pont dans le mast de misaine. Le mot de mast en est François, en Allemand, en Flamand & en Anglois la même chose; l'Italien dit masto, & l'Espagnol mastel.
Mast gemellé ou jumellé, est celui qui est fortifié par plusieurs piéces de bois qui y sont étroitement jointes, qu'on appelle jumelles ou gaburons, ou costons. On l'appelle aussi mast reclampé, renforcé, ou surlié, & s'il est enté par le haut, on le nomme mast affusté, ajusté. On dit aller à mâts & à cordes, ou se mettre à sec, quand on a abaissé toutes les voiles & les vergues pour éviter la furie du vent.
Les bateaux navigeans sur les riviéres ont aussi un mast par où passe le cable, qui sert à les tirer avec des chevaux.
Mast, se prend quelquefois pour un Vaisseau. Il y avoit cent mâts dans cette armée, c'est à dire, cent vaisseaux. On voit une forest de mâts dans le port d'Amsterdam.
On appelle aussi mâts dans un camp les piéces de bois qui servent à soûtenir les tentes.
En termes de blason on appelle un mast desarmé, quand il est peint sans voiles.
MEDIASTIN. s. m. terme d'anatomie; c'est une continuation de la membrane qui s'appelle pleure, laquelle est tenduë sous toutes les côtes & enferme la région moyenne ou vitale, autrement nommée le thorax. Quand cette membrane est arrivée au milieu de la poitrine, elle se double de part & d'autre, & va de l'épine du dos au brechet séparant le côté droit d'avec le gauche, & c'est ce qu'on appelle vulgairement le mediastin, qui s'étend en longueur depuis les clavicules jusqu'au diaphragme, & en hauteur depuis l'os de la poitrine jusqu'au corps des vertebres, il soûtient les visceres, de peur qu'ils ne tombent d'un côté ni d'autre.
MEDIN, terme de relations, c'est une monnoye de Turquie, d'argent fin qui vaut dix-huit deniers monnoye de France, ou deux aspres de Turquie. Il y a aussi des Medins de Barbarie, qui est une monnoye Africaine dont Bodin fait mention.
MENEAU. s. m. terme d'architecture; c'est la séparation des ouvertures des fenêtres ou grandes croisées. Autrefois on faisoit de gros meneaux & croisillons de pierre au milieu des croisées qui défiguroient tout un bâtiment. Les meneaux ou croisillons doivent avoir quatre ou cinq pouces d'épaisseur.
MESOLABE. s. m. instrument de Mathematique inventé par les Anciens pour trouver méchaniquement deux moyennes proportionnelles, lesquelles on n'a pû faire encore géometriquement; il est composé de trois parallelogrames qu'on fait mouvoir dans une coulisse jusqu'à certaines intersections. Sa figure est décrite dans Eutocius en ses Comm. sur Archimede.
Mesplat. adj. Terme d'artisan, qui se dit des piéces des ouvrages qui ont plus d'épaisseur d'un côté que d'autre, & particuliérement des piéces de bois de sciage.
METACARPE. s. m. Terme d'anatomie. C'est une partie du squelet qui contient quatre os de la paume de la main, situez entre ceux du poignet & ceux des doigts: on l'appelle aussi avant-poignet, & c'est ce qui forme la paume de la main: les Latins l'appellent post brachiale.
METAPHYSIQUE. s. f. Derniére partie de la Philosophie dans laquelle l'esprit s'éleve au dessus des êtres créez & corporels, s'attache à la contemplation de Dieu, des Anges & des choses spirituelles, & juge des principes de toutes connoissances par abstraction & détachement des choses materielles. Aristote a écrit plusieurs Livres de Métaphysique. Descartes a laissé plusieurs méditations métaphysiques incomparables. On l'appelle aussi Théologie naturelle, & c'est comme le tronc ou la racine de toutes les sciences; son objet est l'être en général en tant qu'il est séparé de toute matiére, soit réellement, soit par la pensée. M. Duhamel prétend que ce nom a été forgé par les sectateurs d'Aristote, & qu'il lui a été tout à fait inconnu.
Metaphysiquement. adv. D'une maniére métaphysique élevée au dessus de la matiére & des êtres sensibles. Il y a des choses qu'on ne peut concevoir que métaphysiquement.
Metatarse. s. m. Terme de Medecine. C'est une partie du squelet de l'homme, qui compose la partie mitoyenne du petit pied, & qui contient cinq os entre le talon & les arteils.
METOPE. s. m. Terme d'Architecture. C'est l'intervalle ou quarré qu'on laisse entre les trigliphes de la frise de l'ordre dorique, il represente l'endroit où aboutissent les solives ou poutrelles d'un bâtiment: ces quarrez sont quelquefois emplis d'ornement, comme de têtes de bœuf, & autres choses qui servoient aux sacrifices des Payens.
Metopion. s. m. Est un arbre qui naît en Afrique vers l'Ethiopie, d'où, selon Pline, distile sur le sable la gomme de l'ammoniac; mais Pline se trompe, & l'ammoniac est un sel & non une gomme. Dioscoride dit que Metopion est une plante de Syrie, d'où distile le galbanum.
Metoposcopie. s. f. Art qui enseigne à connoître le temperament & les mœurs des personnes par la seule inspection des traits du visage. Ce n'est qu'une partie de la physionomie, parce que celle-ci fonde ses conjectures sur toutes les parties du corps. L'une & l'autre sont fort incertaines. Le mot est Grec & signifie inspection du visage.
MEZZANIN. s. m. terme de Marine. C'est un arbre ou troisiéme mast qu'on met quelquefois sur la Mediterranée, dans les Galeres entre l'arbre de mestre & la pouppe, qui est garni de sa voile.
Mezzanine. s. f. Est un terme qui se trouve employé par quelques Architectes, pour signifier une entre-solle.
Mezeline. s. f. Est une sorte d'étoffe mêlée de soye & de laine.
Mezeau. s. m. Vieux mot qui signifioit autrefois ladre, d'où on a fait mezelerie, qui a signifié ladrerie; il vient de l'Italien mezzo, qui veut dire pourri, gâté, corrompu, Ménage: d'autres le dérivent de miser & miseria, & de misellus.
Mezaraique. adj. Terme de Medecine, qui se dit des veines du mesentere qui succent le chyle des intestins pour le porter au foye: on les appelle aussi mesenteriques.
Mezail. s. m. Terme de Blason, qui se dit du devant, ou plûtôt du milieu du devant du heaume qui s'avance à l'endroit du nez, & comprend le nazal & le ventail; de là vient que les Princes & grands Seigneurs portent leurs timbres ayant le mezail tarré ou tourné de front, c'est à dire, le mezail paroissant également éloigné des oreilles. Ce mot vient du Grec messon. Borel.
Mezereon. s. m. terme de Pharmacie: c'est une plante medicinale qu'on appelle thimælea, qui porte le granum gnidium, que plusieurs confondent avec la laureole, dont les Apoticaires font des pilules qui sont si violentes & dangereuses dans les purgations, que les Arabes l'appellent lyon de la terre, ou herbe qui fait les femmes veuves: les Païsans appellent son fruit poivre de montagne, à cause qu'étant seche il ressemble au poivre, & qu'il est si piquant au goût qu'on ne le sçauroit souffrir tout seul.
Microscope s. m. Terme d'Optique. C'est une lunette qui sert à découvrir les moindres parties des plus petits corps de la nature, parce qu'elle grossit les objets extraordinairement. Il s'en fait de plusieurs façons, les uns avec quatre verres qui ont un tuyau long d'un pied; d'autres avec une petite lentille grosse comme une tête d'épingle qui font un fort bel effet. L'Inventeur du Microscope est le même que celui qui a inventé le Telescope, appellé Zacharias Jansen ou Joanides; on attribuë à M. Hugenes l'invention de celui qui est fait avec une petite lentille, & néanmoins on trouve que le Pere Maignan Minime en a parlé long-temps auparavant dans le 4. tome de son Cours Philosophique, &c.
N.
NAVIRE. s. m. Terme de Marine, Vaisseau de haut bord pour aller sur la Mer avec des voiles; on le dit en général de toutes sortes de grands Vaisseaux, à la réserve des Galéres, on l'appelle aussi simplement Bord, ou Vaisseau, & ce mot est le plus en usage. Ce Port est capable de tant de Navires. Les Navires sont à l'ancre en une telle Rade. Navire de guerre, Navire marchand. On dit armer, équipper, fretter un Navire. La grandeur d'un Navire s'estime par son port, qui est de tant de tonneaux, dont chacun pese deux milliers. On distingue aussi les Navires du premier, du second, du troisiéme, du quatriéme & du cinquiéme rang selon la grandeur de leur quille, leur port ou capacité, le nombre de leurs ponts, ou des canons dont ils sont montez. Les Navires sont réputez meubles par le titre dix du Livre second de l'Ordonnance de la Marine; ils peuvent être néanmoins vendus par decret, si leur port est au dessus de dix tonneaux, suivant les formalitez du tître quatorziéme du même Livre; ils ne laissent pas d'être réputez immeubles à l'égard des hypotecques seulement; mais ils ne doivent point de lods & ventes, & ils ne sont point sujets au retrait lignager, ni à la licitation à l'égard des combourgeois. Les affiches des criées s'appliquent au grand mast du Vaisseau, & au parquet de l'Admirauté. Tout Navire allant en guerre ou en long cours doit être consideré en ces trois parties, la Bourgeoisie à qui appartient le Vaisseau, qu'elle doit fournir avec bons apparaux, armes & artillerie; l'Equipage qui consiste aux gens de guerre & Mariniers, pages, garçons & gourmettes; le Victuailleur qui fournit les victuailles, les poudres, boulets, cloüages, chaînes, carreaux, grenades, & tout ce qu'on nomme armement, & chez les Levantins sartie. Le Navire est composé de plusieurs parties qui seront expliquées à leur ordre; ce mot vient du Latin Navis. Plusieurs croient que Janus a été l'inventeur des Navires, à cause qu'il y en avoit de marquées sur le revers des plus anciennes monnoyes de Gréce, de Sicile & d'Italie, suivant le témoignage d'Athenée.
On dit au feminin la Navire d'Argo, en parlant de ce fameux Vaisseau qui le premier traversa la mer de la Gréce pour aller à la conquête de la Toison d'or sous la conduite de Jason, & de cinquante-quatre Argonautes.
Le plus fameux Navire de l'Antiquité est celui de Ptolomée Philopator, qui étoit long de 280. coudées, large de 38. haut de 48. & qui du haut de la pouppe jusqu'à la mer en avoit 54. Il portoit 400. rameurs, 400. matelots, & 3000. soldats; celui qu'il fit pour naviger sur le Nil étoit long d'une demi stade, & large de 30. coudées, mais ce n'est rien en comparaison du Navire d'Hieron construit sous la conduite d'Archimede, de la fabrique duquel Moschion, au rapport de Snellius, a écrit un Livre entier; on y employa le bois destiné à faire 60. Galéres, & 300. Ouvriers sans les manœuvres; le dedans étoit si bien distribué, qu'il y avoit une loge particuliére pour chacun des rameurs, des matelots, des soldats & passagers: il y avoit aussi plusieurs salles à manger, chambres, promenoirs, galeries, jardins, viviers, fours, écuries, moulins, un Temple de Venus, des bains, des salles de conference, &c. Outre cela il y avoit un rempart de fer, huit tours, deux en prouë, deux en pouppe, les autres sur les côtez, avec des murs & bastions, sur lesquels il y avoit plusieurs machines de guerre, dont une entr'autres jettoit une pierre du poids de trois cens livres, ou une fléche de douze coudées, à la portée de six cens pas, avec plusieurs autres merveilles admirables dont Athenée fait mention.
En termes de blason on appelle un Navire équippé, & habillé d'argent ou de gueules, & de sable, quand les agreils sont de ces émaux.
NAZAL. s. m. Terme de Blason, qui s'est dit de la partie supérieure de l'ouverture d'un casque ou heaume qui tomboit sur le nez du Chevalier quand il l'abaissoit; il est opposé à ventaille, qui est la partie inferieure.
Nazard. s. m. C'est un des jeux de l'orgue dont les tuyaux sont de plomb, & d'environ cinq ou six pieds; ce jeu est bouché, & ses tuyaux sont à cheminée accordez à la douziéme de la montre. Il y a aussi un second nazard qui est à l'octave du précédent, & une quarte du nazard.
Nazard, ou nazillard, se dit d'une personne qui parle du nez, & sur le ton du jeu d'orgue qu'on appelle nazard.
Nazarde. s. f. Chiquenaude que l'on donne sur le bout du nez. On dit d'un homme ridicule & timide, qu'il a un nez à camouflets & à nazardes.
Nazarder. v. act. donner des nazardes. Les pages, les écoliers se nazardent les uns les autres.
Nazeaux. s. m. Ouvertures du nez des animaux, particuliérement des chevaux, qui leur servent à la respiration. On ouvre les nazeaux aux chevaux qui ont de la peine à respirer. Ovide dit, que les chevaux du Soleil soufloient le feu par les nazeaux. On appelle proverbialement un fanfaron, un fendeur de nazeaux.
Naziller. v. n. parler du nez, d'où vient le mot de nazillard, qui ne parle pas distinctement. Il y a des Ordres de Religieux qui affectent de naziller en chantant, qui croyent que cela est plus devot.
On dit en termes de chasse, que le sanglier se foüille, ventroüille & nazille dans la bouë.
NEPHRETIQUE. adj. & subst. Maladie causée ordinairement par quelque pierre ou gravier qui se forme dans les reins. La colique nephretique est une douleur qui provient de cette cause; on la sent dans les reins & sur les boyaux; & elle est plus cruelle que toutes les autres coliques: ce mot est dérivé du Grec nephros, qui signifie le Rein.
Nephretique, est aussi une pierre précieuse, ou espéce de jaspe, qui ordinairement est mêlée de blanc, de jaune, de bleu, & de noir, & en cela elle differe de l'heliotrope, parce qu'on y découvre ces couleurs quand on la veut polir; ce qui n'arrive pas à l'heliotrope.
Il y a aussi un bois qu'on appelle nephretique, qui vient des Indes, qui étant rappé ou fendu en petits morceaux, & infusé dans l'eau, la teint en sorte qu'elle paroît d'or à travers le jour, & d'un bleu foncé à contre jour. La pierre girasole fait le même effet.
NICOTIANE. s. f. Tabac, Petun, herbe à la Reine. Ce sont les noms qu'on donne à une herbe qui vient de l'Amerique, qui desseiche le cerveau, & fait éternuer, à qui on donne diverses préparations pour la prendre en poudre par le nez, ou en machicatoire par la bouche, ou en fumée avec une pipe. Nicod l'envoya en France pendant qu'il étoit Ambassadeur en Portugal en 1560. & il lui a donné son nom, comme il témoigne lui-même dans son Dictionaire. Il dit qu'elle a une merveilleuse vertu contre toutes les playes, dartres, ulceres, & Noli me tangere. Catherine de Medicis la voulut faire appeller Medicée, de son nom; de là vient qu'on l'appelle encore en plusieurs lieux herbe à la Reine. Elle étoit venuë originairement de la Floride, où quelques-uns disent qu'on l'appelloit Petun.
NIL. s. m. Fleuve qui traverse une grande partie de l'Afrique, il s'employe dans la langue en cette phrase proverbiale; c'est un homme obscur qui cache son logis, il est aussi inconnu que la source du Nil, parce que cette source a été inconnuë jusqu'à ce dernier siécle; elle est dans un territoire que les Habitans appellent abavi, ou sacahala, c'est à dire, le pere des eaux; ce Fleuve sort de deux fontaines éloignées de trente pas, chacune de la grandeur d'un de nos puits. Les Habitans qui sont Payens adorent la plus grande, & lui offrent plusieurs sacrifices de vaches, dont ils mangent la chair comme sainte, & ils laissent les os dans un endroit destiné pour cela, qui font maintenant une montagne assez considerable; ces Habitans s'appellent Agaus dans le Royaume de Goyam à douze degrez de latitude Septentrionale, & 55. de longitude; c'est dans une plaine d'environ trois quarts de lieuë, enfermée de montagnes; au sortir de là il entre en un petit lac, puis il se perd sous terre par l'espace d'une portée de mousquet, & à trois journées de sa source: il est assez large & profond pour porter des Vaisseaux, mais à cent pas plus loin il passe à travers des rochers, en sorte qu'on le passe aisément sans se moüiller le pied; on y navige avec des bateaux de natte bien serrées: il reçoit trois riviéres assez grandes nommées Gema, Linquetil & Brantil; & quand il est sorti du lac de Dambea, qui a cinquante lieuës de large, il reçoit de trés-grands fleuves, comme le Gamara, Abea, Baixo & Aquers; & enfin prés de l'Egypte le Tacase. Il y a deux principales cataractes ou saults; à la deuxième il tombe dans un profond abîme, le bruit s'en entend à trois lieuës de là. L'eau est poussée avec tant de violence qu'elle fait une arcade, sous laquelle elle laisse un grand chemin; où on peut passer sans être moüillé, & où il y a des siéges taillez dans le roc pour reposer les voyageurs. La premiére catadoupe ou cataracte du Nil est d'environ cinquante pieds; la seconde est trois fois plus haute. On dit qu'Albuquerque eut dessein de faire un traité avec les Abissins pour détourner le Nil, & le faire jetter dans la mer Rouge, afin de rendre les campagnes d'Egypte stériles, & que pour empêcher cela le Turc paye tribut au grand Negus; mais c'est une fable, & la chose est entiérement impossible. Alexandre consulta l'Oracle de Jupiter Ammon pour apprendre où étoit cette source, Sesostris, Ptolemée, la firent chercher inutilement. Cambises, à ce que dit Strabon, employa une armée pour la chercher. Lucain témoigne que Cesar disoit qu'il eût quitté la guerre Civile s'il eût été assuré de la trouver. Saint Augustin & Théodoret ont cru que c'étoit le Fleuve appellé Geon, qui arrousoit le Paradis terrestre, & qui alloit par dessous la mer Rouge renaître en Afrique. Ce que dessus est extrait de l'histoire écrite en Portugais par le Reverend Pere Balthasar Tellés Jesuïte. Isaac Vossius a écrit de l'Origine du Nil, & des autres Fleuves, & en attribuë la source & le débordement aux pluyes abondantes en ce païs là en Eté. Monsieur de la Chambre attribuë la cause de sa cruë au nitre dont le lit de ce Fleuve est plein, qu'il dit être cause d'une vehemente fermentation, mais il se trompe.
Nille, ou Nigle, ou Nelle, terme de blason, qui se dit d'une espéce de croix ancrée, beaucoup plus étroite & plus menuë qu'à l'ordinaire. Il y en a qui confondent Nille & Anille. Voyez croix Nillée.
NOLI me tangere, terme Latin. C'est un nom que donnent les Médecins à un ulcére malin qui vient au visage.
Nolis & Nolissement. s. m. Termes de Marine, ils signifient sur la Méditerranée la même chose que fret & affrettement sur l'Ocean. On dit aussi sur l'Ocean naulage, pour dire le fret des Navires qu'on louë pour aller en guerre, ou pour courir le bon bord; & on dit noliger & nauliser, pour dire loüer & fretter. Tout ces mots viennent du Latin naulum.
NOMBRE. s. m. quantité discrete, assemblage de plusieurs corps separez, considerez comme s'ils occupoient une certaine étenduë. Euclide le définit une multitude composée de plusieurs unitez. La quantité continuë est l'objet de la géometrie, la quantité discrette, celui de l'Arithmetique, ou de la science des nombres: ce mot vient du Latin numerus.
Dieu a tout fait en nombre, poids & mesure. 2. Diophante a bien écrit des nombres. Il a été commenté par Gaspard Bachet de Meziriac, qui a fait aussi des problêmes pour deviner les nombres qu'un autre a pensé. Les mystéres des nombres de Pithagore avoient plus de vanité que de solidité, aussi bien que toutes les allégories que plusieurs Docteurs en ont voulu tirer. Voyez le traité des nombres du Sieur Freniel inseré dans les mémoires de l'Academie des sciences, où il en fait voir plusieurs belles propriétez.
Nombre, signifie particuliérement le premier caractére d'une suite de chifres, qui ne contient que des unitez; c'est un nombre simple. On commence à compter par nombre, dixaine, centaine, mille, &c. Le nombre binaire, ternaire, centenaire, se dit des caractéres qui marquent ces quantitez.
Nombre pair est celui qui se peut diviser en deux parties égales. Tout nombre pair multiplié par un nombre pair fait un nombre pair.
Nombre impair qui ne se peut diviser également sans fraction, qui est plus grand d'une unité que le pair. La somme de deux nombres impairs fait un nombre pair.
Nombre Pairement pair, est celui qu'un nombre pair mesure par un nombre pair, comme deux fois quatre c'est huit, ce huit est un nombre pairement pair.
7. Nombre pairement impair, celui qu'un nombre pair mesure par un nombre impair; quatre multiplié par cinq fait vingt, nombre pairement impair.
Nombre premier, ou primitif, est celui qui ne peut être mesuré que par la seule unité: comme 19. 29. dans la division desquels en quelque partie qu'on les divise, il reste toûjours une unité.
Nombre composé, est celui qui se peut diviser en plusieurs parties égales, qui peut être mesuré par d'autres nombres.
Nombre parfait, est celui qui est égal aux parties qui le composent, si on les ajoûte ensemble, comme 6. est parfait, parce qu'il égale la somme de 1. 2. 3. qui sont ses parties.
Nombre sourd, ou irrationnel, est un nombre qui n'a pas de proportion avec un autre.
Nombres cosiques. Terme d'Algebre: ce sont les diverses puissances d'un nombre multiplié plusieurs fois par lui-même. Racine, quarré, cubique quarré de quarré, cubo cubique, &c. sont des nombres cosiques.
Nombre entier, est celui qui n'est point divisé, qui est sans fraction.
Nombre rompu, c'est un nombre divisé en plusieurs parties, ou fractions, qu'on écrit avec deux rangs de chifres, divisez par une barre, dont celui de dessus est le numerateur, celui de dessous le dénominateur.
Nombre poligone, en termes d'algebre signifie un nombre à plusieurs angles qui se forme par des nombres en progression Arithmetique ou égale; en telle sorte que s'ils étoient arrangez & marquez en points, ils feroient une figure à plusieurs angles. Par exemple, si on marque un point en haut, & deux en bas, cela fera un triangle, & le nombre de trois fera un trigone: Si on marque deux en haut & deux en bas, cela fera un quadrangle, ou nombre quarré, qui fera quatre. Ce qui arrive quand la progression va seulement par un ou deux: mais si la difference des nombres est de trois, elle fera un pentagone, si elle est de quatre un exagone; si elle est de cinq un eptagone, & ainsi du reste. Voyez l'Algebre du P. Malebranche, où les propriétez de ces nombres sont bien expliquées.
Nombre, en termes de Palais, & en plusieurs Arts, se dit aussi d'une quantité incertaine, indéterminée. Quand on dit j'ai été mille fois chez lui, on prend un nombre certain pour un incertain; un nombre rond c'est cent ou mille, &c. Nous n'étions pas nombre, c'est à dire, nous n'étions pas assez pour juger, pour tenir Chapitre, & déliberer: il faut ceder au nombre, à la force, à la pluralité. Dans les grands Corps, la plûpart ne servent que de nombre. Il a nombre d'envieux: il a un nombre innombrable d'écus. On dit mettre au nombre, ou du nombre, pour dire dans le rang, dans la liste, dans le Catalogue; on l'a mis au nombre des Saints. Il est du nombre des exilez. Il s'est mis du nombre, pour dire il s'est mis dans la troupe. On dit aussi dans le blazon, des étoilles, des fleurs de lys sans nombre, quand l'écu en est chargé sans qu'il y ait de nombre prescrit.
Nombre en Musique, en Poësie, en Rhetorique, se dit de certaines mesures, proportions, ou cadences qui rendent agréable à l'oreille un air, un vers, une période. Il y a un certain nombre qui rend les périodes harmonieuses: les vers sont composez d'un certain nombre de pieds ou de syllabes. Toute musique a un certain nombre de notes.
Nombre en termes de Grammaire, se dit du singulier & du plurier, & du duel chez les Grecs & les Hebreux. Il faut que le substantif & l'adjectif s'accordent en genre, en cas, & en nombre.
Nombre d'or, est un terme du comput Ecclésiastique, qui est une période de dix-neuf ans, inventée par Methon Athenien, au bout de laquelle on void arriver les mêmes lunations, & la même Epacte, quoi que cette période ne soit pas tout à fait juste. Et on dit figurément en ce sens, qu'un homme entend le nombre d'or, quand il a trouvé l'art d'amasser beaucoup de bien.
En Théologie on appelle le Livre des Nombres un des Livres du Pentateuque, qui contient les cérémonies de la Loi de Moïse.
En agriculture on appelle un nombre de gerbes, douze gerbes: Il faut trois nombres de bled pour faire un septier de grain. On a fourni trente nombres de gluis pour recouvrir cette bergerie.
Nombrer. v. act. Compter sçavoir le nombre. Il y avoit une quantité de peuple si prodigieuse qu'on ne la pouvoit nombrer. On met dans tous les Contracts, cette somme a été comptée & nombrée en presence des Notaires.
Nombreux. euse. adj. en grand nombre. La France est habitée par un peuple fort nombreux; l'assemblée étoit fort nombreuse.
Nombreux, signifie aussi agréable à l'oreille, harmonieux. Cette période est fort nombreuse, ces vers sont fort nombreux.
Nombreusement. adv. en grand nombre. Le peuple vint nombreusement & en foule faire ses plaintes au Roi, &c.
Nombril s. m. C'est une partie du corps de l'animal composée de quatre vaisseaux umbilicaux, sçavoir une veine, deux artéres, & l'ouraque qui s'unissent ensemble, & sont renfermez comme dans un canal long, nerveux, tortillé; qu'on appelle cordon, lacet, ou petit intestin; c'est par où le fœtus prend sa nourriture dans le ventre de la mere, & quand l'enfant est né, ces quatre vaisseaux ayant fait leur fonction, dégénérent en un ligament qui fait comme un nœud au milieu du ventre, qu'on appelle le nombril. La veine du nombril est le lien du foye, quand elle est coupée il tombe & tire quand & soi le diaphragme. Ce mot vient de umbilicus Latin, & celui-ci de umbo, qui signifie bouton, ou bosse qui est au milieu d'un bouclier.
Nombril de Venus, est une plante que les Grecs appellent cotyledon, les Latins umbilicus Veneris, myrepsus, cymbalium; d'autres cymbalaria, & d'autres scatuucellus.
En Botanique on appelle le nombril, ou l'œil, dans les poires, les pommes, & autres fruits semblables l'endroit où sont enfermez les pepins.
En termes de Blason, on appelle le nombril de l'écu un point qui est au milieu du dessous de la fasce, & qui la separe de la pointe. Il portoit d'or à un écusson de gueules mis au nombril.
NORD. s. m. Terme de Marine dont on se sert sur la mer Oceane pour signifier le pole arctique, ou Septentrional, qui est élevé sur nôtre horison. L'étoile du Nord est la derniére de la queuë de la petite ourse, qui est à deux degrez du pole. On a fait virer le cap au Nord. La boussole est ce qui marque le Nord. Depuis le Nord jusqu'au Sud. Le vent est tourné au Nord. Le Soleil revient en Eté vers le Nord.
Nord, signifie aussi la partie du monde qui est Septentrionale, à l'égard de quelque autre païs. L'Angleterre est au Nord de la France. Les Princes du Nord sont la Suéde, le Danemark, la Lapponie, &c. Les peuples du Nord aiment bien à boire. Les Navires Hollandois qui n'osent entrer dans la Manche sont contraints de prendre leur route par le Nord d'Ecosse.
Nord, est aussi le nom qu'on donne à un des quatre vents cardinaux, qui vient du côté du Septentrion, qu'on appelle autrement la bise, & sur la Mediterranée tramontane. Le Nord qui souffloit avec violence nous empêcha d'aborder; le Nord est un vent froid & sec. Ces mots de nord, sud, est, & oüest sont de vieux mots François dont on se servoit du temps de Charlemagne, qu'on dit être celui qui leur a donné ces noms; qui passent aujourd'hui pour Allemans.
Nordest, est un quart de vent entre l'Orient & le Septentrion, que sur la Mediterranée on appelle galerne: Nordoüest, est un quart de vent entre le Septentrion & l'Occident, sur la Mediterranée on l'appelle maëstral.
Nort nordest, nordnord quart au nordest, sont des subdivisions de vent entre l'Orient & le Septentrion; on fait la même subdivision à l'égard du Nordoüest.
Nordester. v. n. Terme de Marine qui se dit de l'aiguille aimantée, lors qu'elle décline du Nord vers l'Est, ou l'Orient; & Nordoüester se dit quand elle décline du même point vers l'Oüest, ou l'Occident.
NOTA. s. m. Terme Latin dont on use au Palais & dans l'Ecole, pour signifier une marque qu'on met en quelque endroit d'un livre ou d'un écrit, quand il y a quelque chose de remarquable, & dont on veut se souvenir.
Nota, se dit aussi d'une explication, d'une restriction, ou d'une observation que font les Auteurs d'un Livre, ou ceux qui en font faire l'édition, soit dans le texte, soit dans la glose, pour empêcher que le Lecteur ne se trompe: ou pour l'avertir de quelque chose. Cet article de compte est alloüé, mais il y a un nota qui montre qu'il en faut faire la reprise.
Nota, se dit dans le discours ordinaire pour tenir lieu de parenthese. Cet importun me vouloit encore conter son procés, nota qu'il étoit deux heures, & que j'étois à jeun.
Notables. adj. m. & f. & s. qui est excellent, rare, singulier, remarquable, considerable; on le dit premiérement des personnes. L'élection des Echevins se fait par les notables Bourgeois qu'on mande à la Ville pour cet effet. On a fait autrefois une Assemblée des notables à Roüen, des personnes considerables de l'Etat.
On le dit aussi des choses. Nous avons eu un avantage notable sur les ennemis. Ce Marchand a fait une perte notable dans ce naufrage. Il est engagé pour une somme notable dans cette banqueroute. Plutarque a fait un traité des Dits notables des Lacedemoniens. Les Arrêts notables ont été recueillis par les Arrestographes.
Notablement. adv. d'une maniére considerable. On a interessé notablement ce Favori en une telle affaire, pour la faire réüssir. Cet homme a été notablement blessé dans une telle mêlée.
Notaire. s. m. Officier dépositaire de la foi publique, qui garde les nottes & minutes des Contracts que les parties ont passé par devant lui, & qui en delivre des expeditions qui sont authentiques & obligatoires, & portent hypotéques. Les Notaires du Châtelet ont maintenant la qualité de Conseillers du Roy & Gardenottes. Les Secretaires du Roy s'appellent Conseillers, Notaires & Secretaires du Roy. Il y a quatre Notaires & Secretaires du Parlement. Ragueau fait une distinction entre les Notaires & Tabellions, & dit qu'en plusieurs Villes les Notaires reçoivent & passent seulement les minutes & nottes des Contracts, & les peuvent délivrer aux parties en Brevet; mais qu'ils sont tenus de les porter aux Tabellions pour les garder & delivrer en grosse aux parties si elles le requérent pour avoir une execution parée; & il se fonde sur des Edits de François Premier dés années 1542. & 1543. mais ces Tabellions ont été supprimez par le Roy Charles IX. en l'Ordonnance d'Orleans; & maintenant on appelle Notaires tous les Officiers Royaux qui reçoivent, & qui delivrent des grosses de toutes sortes de Contracts & conventions, & Tabellions ceux qui font la même chose dans les Seigneuries & Justices subalternes. On appelle maintenant l'étude des Notaires. On disoit autrefois boutique, & on le dit encore en plusieurs Provinces.
Les Notaires ont été ainsi appellez, parce qu'anciennement ils écrivoient par nottes ou écritures abregées, une lettre signifiant un mot entier; cela a donné occasion à Valerius Probus de travailler à l'explication des nottes des Anciens, comme il a fait trés-utilement. Magnon fit un traité des abbreviations du Droit dés le temps de Charles le Chauve; & Pierre Diacre en fit un plus ample au temps de l'Empereur Conrad; & Goltzius en a fait un pour l'intelligence des legendes des médailles.
Notaire Apostolique, est un Notaire qui reçoit & expedie des actes en matiére spirituelle & beneficiale, comme les résignations de Benefices, concordats de permutation, &c. Il a une commission du Pape confirmée & approuvée par l'Evêque diocesain, & il est opposé à Notaire Royal.
On dit proverbialement quand un homme est en réputation de garder sa parole, c'est autant que si tous les Notaires y avoient passé. On dit aussi Dieu nous garde d'un &c. de Notaires, parce qu'ils font quelquefois six rolles pour expliquer ces trois mots de leurs minutes, promettant, &c. obligeant, &c. renonçant, &c.
Notamment. adverb. particuliérement: On a donné ordre à ce Sergent de contraindre tous les cottisez, & notamment tels & tels.
Notariat. s. m. Qualité, charge, fonction de Notaire. On ne doit admettre au Notariat que des gens d'une vertu integre, d'une fidélité inviolable.
NOTTE. s. f. terme de pratique, minute d'un Acte qu'on passe chez un Notaire; il n'est plus en usage que dans le composé en cette phrase, les Notaires sont créez Gardenottes du Roy.
Notte, marque qu'on fait à quelque feüillet ou passage d'un livre pour le retrouver au besoin. J'ai lû ce livre, & j'ai fait des Nottes avec un crayon, avec des coups d'ongle. On met un, hic, ou une Notte à la marge d'un Contract pour en remarquer la clause décisive, ou importante.
Notte. Est aussi une remarque ou explication qu'on met à la marge, ou au bas de la page d'un livre, d'un écrit, pour en faciliter l'intelligence. Le textuaire de Droit avec les nottes de Godefroy est estimé. Les nottes de Dumoulin sur la Coûtume de Paris. Les nottes de Cujas, &c. Cette Bible est imprimée avec des nottes marginales.
Notte, se dit aussi de ce qui marque quelque défaut, ou imperfection. Dans un Dictionnaire on doit mettre une notte à un mot quand il est vieux ou particulier à quelque art ou science; quand il est dans l'usage commun il n'y faut point de notte. Cette fille a épousé un honnête homme, mais il est bâtard, c'est une grande notte. Quand quelqu'un est pendu, c'est une notte pour toute sa famille. On appelle aussi notte d'infamie, celle dont une personne est marquée par sa profession, ou par quelque jugement. Le métier de Comedien porte avec soi une notte d'infamie. Toute condamnation à peine afflictive emporte notte d'infamie.
Nottes. Sont aussi des caractéres ou abreviations qu'on fait, soit pour écrire promptement, soit pour signifier quelque chose. Herigone a fait cinq tomes d'un cours de Mathematique en nottes, qu'il prétend être une langue universelle, & pouvoir être entenduës de tout le monde. Les Jurisconsultes ont des nottes, comme §. paragrapho, ff. digestis. E. extra. Scto. senatus consulto. Les Romains avoient des nottes pour leurs inscriptions, S. P. Q. R. Senatus, populusque Romanus, p. p. pater patriæ. Ce sont ces nottes anciennes qu'a expliqué Valerius Probus. Les Chimistes ont leurs nottes a, a, a, Amalgamer, s, s, s, stratum super stratum. L'Algebre a aussi ses nottes expliquées à Algebre.
Les Medecins, Chirurgiens & Apoticaires se servent de nottes ou caracteres, pour marquer le poids & les doses de leurs Ordonnances.
NOTTE, en termes de Musique se dit des caracteres qui marquent les tons, les élevations ou les abaissemens de la voix, & ses mouvemens vîtes ou lents; enfin toutes les variations qui y doivent faire de l'harmonie.
La notte maxime est figurée par un quarré long avec une queuë, elle vaut 8 mesures, quoi que le Pere Mersenne la fasse de 12. La longue est un quarré avec une queuë qui en vaut la moitié, ou quatre mesures: la bréve est un quarré sans queuë, qui vaut deux mesures; la semi-bréve est un quarré sans queuë, qui est posé sur ses angles, ou en losange, qui vaut une mesure, ou le lever & le baisser de la main; la minime est une losange avec une queuë, qui vaut la moitié d'une mesure; la noire a la même figure; mais elle est pochée & vaut un quart de mesure; la crochuë est la même figure avec un croc par en bas, qui vaut un huitiéme de mesure, & la double crochuë un seiziéme.
Il y a aussi des nottes ou caracteres pour signifier les pauses, les repos ou silences qui marquent qu'il faut se taire aussi long-temps qu'on est à chanter la notte qui précéde; elles se font avec des points ou des lignes qui traversent d'un réglet à l'autre.
Les Grecs faisoient leurs nottes de musique avec des lettres simples ou doublées, droites ou renversées, comme on prouve par les Livres de Bacchius, d'Alipius, de Porphire & de Boëce.
On dit en ce sens qu'un homme chante sur la notte, pour dire à livre ouvert sur un Livre notté, ou qu'il fait des accords sur la notte, sans avoir étudié ce qu'il chante.
Note, se dit aussi pour signifier le ton. Il y a sept notes en Musique qu'on appelle ut, re, mi, fa, sol, la, si; les six premiéres ont été inventées en l'an 1024. par Guy Aretin Moine Benedictin, qui les trouva à Pompose dans le Duché de Ferrare, sous le Pape Jean XX. lequel les reçût avec si grand applaudissement, qu'il commanda de mettre cette maniére de chanter en usage; aussi est-elle si facile, qu'on apprend plus de Musique en un jour avec cette méthode, qu'on ne faisoit autrefois en un an avec celle des Grecs, dont on s'étoit servi jusques alors. Il intitula Micrologue le livre où il publia cette invention. Aretin a pris les nottes ut, re, mi, fa, sol, la, de l'Hymne des Vêpres de S. Jean Baptiste, Ut queant laxis, &c.
La septiéme notte a été inventée de nos jours par le Maire, qui est un, si, qui differe d'un demi ton du, la; il sert à éviter la difficulté des muances qui étoient restées dans la gamme de Guy Aretin; cette syllabe est plus haute d'un demi ton que le, la, & quand on voudra avoir un ton entier, on mettra une diése au dessous.
On peut faire 720 variétez des six nottes de Musique sans repeter la même deux fois; & on peut faire 40820 airs differens des nottes de chaque octave. Il y a des Organistes qui font 32 nottes dans la mesure binaire, qui dure seulement une seconde de minute.
Notte, se dit proverbialement en ces phrases: on dit d'un Menêtrier qu'il ne sçait qu'une notte, qu'il n'aura qu'un double, pour dire qu'il ne sçait qu'une chanson. On dit aussi qu'un homme change de notte, quand il parle d'une autre maniére qu'il n'avoit fait, quand il supplie au lieu de menacer. On dit aussi de celuy qui ne sçait rien de la matiére dont on l'interroge, qu'il n'en sçait notte, qu'il n'en a pas retenu une notte.
NYMPHE. s. f. Fausse divinité que les Payens croyoient présider aux eaux, fleuves & fontaines. Quelques-uns en ont étendu la signification, & les ont prises pour Déesses des montagnes, des forêts, & des arbres, qu'on appelle particuliérement, Oreades, Dryades, Hamadryades & Napées, la Nymphe de la Seine, de la Loire.
Nymphe. Dans les Romans se dit des Dames de condition qu'on introduit, à qui on donne un rang au dessus des Bergeres, comme dans l'Astrée la Nymphe Galathée.
Nymphe se dit en ce sens des Maîtresses, que chacun se fait, en une compagnie, ou qu'on meine en une promenade. En cette partie de divertissement chacun avoit sa Nymphe, chacun fit danser sa Nymphe à ce Bal.
Nymphes, en termes de Medecine sont de petits aîlerons, ou parties molles & spongieuses qui sortent & avancent hors les lévres de la matrice; elles servent à guider l'urine, & à la conduire comme entre deux parois, ce qui leur a donné le nom de Nymphes, comme qui diroit Dames des eaux, ou du conduit d'où l'urine coule comme d'une source. On les appelle aussi aîles.
Les Naturalistes appellent Nymphe la petite coque des vers à soye qui reste aprés qu'on en a devidé le cocon; c'est une pellicule jaune dans laquelle sont enfermez leurs œufs; ils l'appellent en Latin nympha aurea, autrement chrysalis. Tous les insectes volans, comme papillons, mouches & chenilles ont de semblables nymphes, mais qui ne sont pas si sensibles. Voyez Swammerdam, qui en a fait un excellent volume.
O.
OBLAT. s. m. Est un Moine lay que le Roi mettoit cy-devant en chaque Abbaye ou Prieuré dépendant de sa nomination, auquel les Religieux étoient obligez de donner une portion monachale, à la charge qu'il sonneroit les cloches, qu'il balayeroit l'Eglise & la court. Ces places étoient destinées à des soldats estropiez & invalides. Cette prestation s'est convertie en argent, qui étoit taxée à vingt écus, puis à 100 livres, & enfin on l'a augmentée jusqu'à 150 livres. Depuis on a transferé tous ces oblats avec leurs pensions, à l'Hôtel des Invalides à Paris. Pasquier dit que les oblats commencerent à avoir lieu du temps des Capets, & que le Roi se départant du droit qu'il avoit d'assister à l'élection des Abbez, se réserva le privilege d'aumôner une place de Religieux à un pauvre soldat impotent; & alors il donna de ces Oblats dans les Monasteres électifs seulement.
OBTUS, s. m. Terme de Geometrie. Angle qui a plus de 90 degrez ou d'un quart de cercle. Un triangle obtus est celuy qui a un de ses angles obtus.
Obtus se dit figurément d'un esprit qui n'est point subtil ni pointu, qui est émoussé. C'est un homme qui a l'esprit obtus.
OBTURATEURS. adj. Terme de Medecine qui se dit de deux muscles de la cuisse, parce qu'ils bouchent le trou qui est entre l'os pubis & celuy de la hanche.
OGIVE. s. f. Terme d'Architecture. C'est le trait d'une voute qui au lieu d'être en berceau ou en plein ceintre, trace une diagonale en forme d'arrête.
Les deux ogives diagonales en se croisant forment la clef de la voute. Les arcs en berceau d'où les ogives sortent, s'appellent arcs doubleaux; & ce qui est entre les ogives & les arcs doubleaux, s'appelle le pendentif de la voute. Les parties des ogives qui sont en saillie, s'appellent les nerfs.
OGOESSES. Terme de Blason qui se dit des tourteaux de sable pour les distinguer des autres qui se nomment Gulpes, quand ils sont de pourpre; quand ils sont de geules, guses; quand ils sont d'azur, heurtes; & quand ils sont de sinople, pommes ou volets, quoy qu'ils retiennent tous en général le nom de tourteaux.
OIGNEMENT. s. m. Action par laquelle on oint, on parfume. Le lavement & l'oignement des pieds étoit une honnêteté que les juifs faisoient à leurs hôtes, à ceux qu'ils vouloient honorer, comme celuy que fit la Madelaine au Sauveur.
OISEAU. s. m. Animal qui s'éleve en l'air, qui le traverse, qui s'y tient suspendu par le secours de ses plumes & de ses aîles. Le Phenix, s'il y en a, passe pour le Roi des oiseaux. C'est une erreur de croire que les oiseaux de paradis volent toûjours, ils ont des pieds avec lesquels ils s'attachent aux branches pour dormir. Les Romains observoient avec soin le vol des oiseaux. A l'arrivée des Européans dans les Isles de l'Amerique, tous les oiseaux, à ce qu'on dit, étoient privez parce qu'on ne leur faisoit point la guerre. Ce mot vient d'Avicellus, ou Aucellus, dont les Italiens ont fait aussi Augello. Ménage & Du Cange.
On appelle en termes de Fauconnerie, oiseaux de proye, les gros oiseaux qui vivent de grip, de rapt & de rapine, qu'on dresse & qu'on apprivoise. On appelle oiseaux niais ceux qui sont pris au nid. Oiseau branchier celuy qui n'a encore que la force de voler de branche en branche. Un oiseau sor, celuy qui n'a point encore mué, il ne se dit que des oiseaux de passage, & non du niais & du branchier. Un oiseau hagard, celuy qui a été à soi, qui est plus farouche. Un oiseau de bonne ou de mauvaise affaire, celuy qui est docile ou farouche. On appelle parement de l'oiseau, la maille qui luy couvre le devant du col; manteau d'oiseau, le plumage des épaules, du dos & du dessus des aîles. Serres d'oiseau, ce sont leurs griffes. Mains d'oiseau, ce sont leurs pieds. La couronne de l'oiseau, c'est le duvet qui couronne, qui joint le bec à la tête. On appelle train de l'oiseau, son derriére, ou son vol.
On appelle oiseau de poing, celuy qui étant reclamé, fond sur le poing sans entremise de leurre, comme l'autour & l'éprevier; oiseau de leurre, celuy qui fond sur le leurre, quand on le luy jette, & delà sur le poing. On en compte dix ordinaires, faucon, gerfaut, sacre, lanier, aigle, tagarot, émerillon & hobereau, le faucon & le sacre bâtards, oiseau de montée, est celuy qui s'éleve fort haut, comme le milan, le heron, &c. Il y a des oiseaux pour la haute & pour la basse volerie. Oiseau pillard celui qui pille & détrousse un autre; oiseau chariard, qui dérobe sa perdrix; oiseau bas & tenu par le Bec, c'est à dire, en faim. L'oiseau Bâtard est, par exemple, un faucon né d'un tiercelet de faucon & du lanier; ou un sacre né du sacret & du lanier.
On appelle oiseaux vilains, poltrons & tripiers ceux qui ne suivent le gibier que pour la Cuisine, qu'on ne peut affaiter ni dresser, comme les milans & les corbeaux, qui ne combattent que les poulets, lesquels n'ont ni vol ni défense. Un oiseau dépiteux, qui ne veut pas revenir, quand il a perdu sa proye. Un oiseau attrempé est celuy qui n'est ni gras ni maigre. Un oiseau âpre à la proye, bien armé de bec & d'ongles. Un oiseau fort à Delivre, qui n'a point de corsage qui est quasi sans chair, comme le heron. On appelle oiseau allongé, celuy dont les pennes sont bien entieres, qui ont toute la longueur qu'elles doivent avoir; un oiseau trop en corps, celuy qui est trop gras. On dit aussi un oiseau de bonne aire, un oiseau de grand travail & de bon guet, un oiseau de bonne compagnie, un oiseau pantois ou asthmé, un oiseau égalé, quinteux, escartable, rebuté, un oiseau d'échappe. Un oiseau bon chaperonier. Il y a aussi des oiseaux de nuit, de mauvais augure, de voirie, des oiseaux de jour, oiseaux de parade, de babil, & cageolleurs, oiseaux sauvages, passagers, de combat, de volerie, de marais, de marine, qui rasent les étangs, & sont bons poissonniers, &c.
Les oiseaux de leurre doivent avoir les mahutes hautes, les reins larges, bien croisez, bas assis, cour-jointez, les mains longues. On dit aussi apoltronir un oiseau, l'acharner, l'abecher, l'abattre, l'abaisser, l'entraver, l'essimer, & plusieurs autres phrases qui sont expliquées à leur ordre.
On appelle oiseaux de riviére, les canards, sarcelles & autres aquatiques qui aiment les eaux. Oiseaux de bois, les gelinottes, les faisans. Oiseaux passagers, les beccasses, les cailles, les guignards. Oiseaux domestiques, les poulles, les canes, oyes. On appelle oiseaux de voliére, ceux qu'on garde en cage pour leur chant, leur ramage, leur gazoüillement, comme rossignols, serains, linottes, chardonnerets, &c.
Il y a des oiseaux qui ne sont bon qu'à mettre à l'engrais, comme les coqs qu'on chaponne, qui perdent leur chant. Il y a des oiseaux qui ne volent jamais, comme l'Autruche & le casuel. Kircher dit qu'il y a un oiseau en la Chine qu'on appelle hoang cio yu, qui change de nature deux fois l'an; il est oiseau tout l'Eté & se transforme en poisson durant l'hiver. Ce nom veut dire poisson jaune.
On appelle tirer à l'oiseau, quand on dispute le prix en s'exerçant à tirer de l'arc ou du fusil sur un oiseau de bois qu'on nomme le papegay.
Les oiseaux de leurre en terme de Blason témoignent la noblesse, parce qu'ils sont des marques d'hommage & de redevance; ce qui a fait que dans les sceaux anciens on a representé les Chevaliers avec une épée nuë à la main droite & un oiseau de leurre à la gauche. Les Poëtes ont appellé l'Aigle l'oiseau de Jupiter, le paon l'oiseau de Junon, le hibou l'oiseau de Pallas, le pigeon l'oiseau de Venus, & le peuple appelle maintenant un bœuf oiseau de S. Luc.
Oiseau de Limosin est une espece de vaisseau qui sert à porter le mortier dans les ateliers: il est composé de deux ais joints d'un côté en équerre & arrondis par l'autre extrêmité, il se porte sur les épaules.
Oiseau se dit proverbialement en ces phrases: Petit à petit l'oiseau fait son nid, en parlant des choses qui se font lentement & peu à peu. On dit que la belle plume fait le bel oiseau. On dit aussi: Ce n'est pas viande pour vos oiseaux, pour dire, Cela ne vous est pas destiné, c'est pour des gens d'une plus grande qualité. On dit qu'un homme a battu les buissons, & qu'un autre a pris les oiseaux, pour dire qu'il a travaillé, & que les autres en ont profité. On dit qu'un homme est comme l'oiseau sur la branche, quand il n'a point de logement d'employ, de fortune assurée.
On dit aussi qu'un homme est battu de l'oiseau, quand il lui est arrivé plusieurs malheurs, plusieurs pertes qui lui ont abattu le courage. On dit aussi d'un prisonnier qu'on a manqué, ou qui a brisé les prisons, que l'oiseau s'en est envolé. On dit aussi: Voilà une grande cage pour un petit oiseau, quand un homme de peu de considération est logé dans un logis magnifique. On dit qu'un oiseau en a dans l'aîle, quand il a reçû un coup qui l'empêche de voler; on le dit figurément des hommes, dont la santé ou la fortune sont ruinées. On dit aussi ironiquement qu'un homme est un bel oiseau, pour témoigner un grand mépris de sa personne.
Oiseler. v. act. terme de Fauconnerie qui signifie dresser un oiseau; oiseler un faucon pour le faire Bon gruyer, bon heronnier, l'affaiter, le leurrer & assurer, commencer à le mettre dedans & l'employer à voler. On dit aussi mettre l'oiseau à poil, pour dire le dresser à voler gibier à poil.
Oiselerie s. f. métier de prendre, d'élever & de vendre des oiseaux.
OISELET ou OISILLON s. m. petit oiseau.
OISELEUR. s. m. celui qui prend des oiseaux. On le dit particuliérement de ceux qui prennent des oiseaux de chasse au passage. Ménage a fait une belle Eglogue intitulée l'Oiseleur.
OISELIER. s. m. celui qui vend des oiseaux de voliére, qui les éleve en cage.
OMBELLE. s. f. Terme de Blason qui se dit d'une espece de parassol que le Doge de Venise met sur ses Armes par une concession d'Alexandre III. quand il se réfugia à Venise en fuyant la persecution de Federic. Elle est quelquefois sur les Armes de la République.
Ombelle en termes de Botanique est une partie de la plante, dont le bout de la tige se divise en plusieurs autres moindres tiges, lesquelles portent des bouquets ou graines; comme le fenoüil & l'anet sont des plantes à ombelle. Ce mot vient de ce que ces petites tiges s'ouvrent & sont disposées de la même maniére que les bâtons qui supportent un parassol, ou ombelle.
OREILLE. s. f. partie double de la tête des Animaux qui leur sert à ouïr, à entendre les sons qui la frappent. Pour la perfection de l'ouïe la Nature nous a donné une oreille exterieure & une interieure: l'exterieure est d'une substance membraneuse, & cartilagineuse, c'est à dire, mitoyenne entre l'os & la chair. Sa figure est presque en demi cercle, & creuse par dedans, comme une petite caverne; le haut de l'oreille s'appelle l'aîle ou l'aîleron; l'extrêmité de son tour enfoncé du devant au dedans s'appelle gibbeuse, le trou & le creux de dedans s'appelle la petite coquille, ou conque, parce qu'elle ressemble à l'entrée de la coquille d'un limaçon; la cavité qui est auprés du conduit de l'oreille, en laquelle s'amassent ses ordures, s'appelle Ruche; & cette glu ou ordure qu'on en tire avec un cure-oreille, s'appelle le suif, & par quelques-uns la cire; le bout ou tendon qui est plus gras & charnu, s'appelle lobe, ce bout-là rougit d'ordinaire, quand on a de la honte; & tout le circuit de l'oreille se nomme helix, c'est à dire, tour ou tortis. Le conduit de l'oreille est formé de parties cartilagineuses & osseuses. Les animaux couverts de plumes ou d'écailles n'ont point d'oreilles exterieures, mais ils ont un trou ouvert pour ouïr.
L'oreille interne est située en l'os pierreux derriére l'apophyse mamillaire, dans la partie écailleuse de l'os des temples, & est separée de l'organe externe de l'ouïe par la membrane du tambour: Elle est composée de quatre conduits; le premier qui est tourné vers le dehors, & toûjours ouvert, est celui qui donne passage au son, il est tortueux, biaisant, long & étroit, au bout duquel il y a cette membrane qu'on nomme tambour, qui est mince & seche, déliée & qui a le sentiment extrêmement vif. Ceux qui l'ont trop dense & épaisse dés leur naissance sont des sourds incurables. Derriére cette membrane on trouve une seconde cavité, que quelques-uns appellent la quaisse du tambour, & d'autres le bassin, dans laquelle est contenu un certain air naturel & interne, que les anciens Medecins ont appellé implanté, qui selon eux, reçoit aisément l'impression de celui de dehors, & ils tiennent qu'il sert à l'ouïe, comme le crystalin à la vûë. Là on découvre trois petits os à qui on a donné le nom de leur figure; le premier est fait comme un petit marteau, le second comme une enclume, & le troisiéme qu'on nomme étrier, est triangulaire, comme étoient les étriers antiques. M. du Vernay en a découvert un quatriéme sur la tête de l'étrier; & ce qui est à remarquer, c'est qu'ils sont aussi gros & aussi grands aux enfans qu'aux hommes d'âge. Ils sont placez dans la cavité de la quaisse. Il y a une corde fort deliée qui passe derriére la peau du tambour, de même que le tymbre qui fait resonner un tambour de guerre. On doute si c'est une veine, un nerf ou une artere, tant elle est petite. Du Vernay dit que c'est un nerf. Il y a aussi des muscles dans cette cavité, dont deux servent au mouvement du marteau, & l'autre à celui de l'étrier. Ils sont si déliez qu'à peine les peut-on voir. Ils servent au flux & au reflux, ou au double mouvement du marteau: il y a aussi deux petites fenêtres, dont la plus haute s'appelle ovale, à cause de sa figure. La seconde est sans nom; & il y a un conduit qui va jusques dans le palais. La troisiéme cavité qui est creusée dans l'os pierreux, s'appelle le labyrinthe, pour ce qu'il y a plusieurs trous & chambrettes cachées. Elle est faite comme une coquille d'escargot. Sa premiére partie s'appelle le Vestibule, qui a 9. ouvertures, & la derniére le limaçon ou trou aveugle, parce qu'il est sans bout & issuë. Il est composé d'une lame spirale montante, qui separe en deux un canal demi ovallaire, qui fait deux tours & demi au tour du noyau du limaçon toûjours en diminuant, & forme comme deux rampes d'escalier. C'est dans cette partie que du Vernay met l'organe immédiat de l'ouïe. Enfin on trouve le nerf de l'ouïe qu'on nomme le nerf auditif, qui prend son origine de la cinquiéme conjugaison suivant les Anciens, & la septiéme suivant les Modernes. Il y en a aussi un rameau de la seconde paire vertebrale, qui porte les images de tous les sons au sens commun. Enfin il y a un petit conduit cartilagineux, qui va de l'ovale dans le palais de la bouche, qu'on nomme aqueduc, & qui est fermé par une petite valvule, ou sous pape: de là vient que les sourds entendent un peu par la bouche, & qu'en leur faisant prendre le manche d'un luth avec les dents, ils en entendent l'harmonie. Dessous & derriére les oreilles il y a des glandules qu'on appelle parotides, qui sont des émonctoires par où le cerveau se décharge, & quand elles sont trop humectées, il s'y fait des tumeurs que le peuple appelle orillons ou oripeaux. Ce mot d'oreille vient du Latin auris, que Dulaurens dérive de haurire, qui signifie tirer ou puiser, parce que les oreilles tirent & reçoivent la voix & les sons dans leurs cavitez. Quelques Medecins ont crû que quand les oreilles étoient coupées, les hommes devenoient stériles, & que de là est venuë la coûtume de couper les oreilles aux larrons de peur qu'ils n'engendrassent de petits larronneaux.
Les oreilles des Animaux sont faites diversement. Le Veau marin & toutes les especes de lezards & de serpens n'ont point du tout d'oreilles externes; le singe & le porc-épic les ont applaties contre la tête comme les hommes; il y a une espece de Baleine qui a l'ouverture de l'oreille sur les épaules. Les taupes ont le conduit de l'oreille fermée par une petite peau qui s'ouvre comme une paupiére. La tortuë, le cameleon aussi bien que la plûpart des poissons, ont le conduit de l'oreille tout à fait bouché.
Les bruits, les tintoins, les bourdonnemens sont des maladies des oreilles. Quand on dit qu'un homme a l'oreille dure, c'est à dire, honnêtement qu'il est sourd.
Les Incas du Perou se faisoient particuliérement remarquer par leurs oreilles, dont la largeur étoit si prodigieuse qu'elle est incroyable. Ils accordoient aux Capitaines qui les avoient bien servis, comme un grand privilege la permission de se percer les oreilles, à condition que le trou n'en seroit pas la moitié si grand que celui de l'Inca, & on leur donnoit même la mesure du trou, afin qu'il ne fût pas plus grand que le privilege portoit. Ils y portoient des pendans d'oreille attachez à deux filets, longs d'un quart d'aune, & gros d'environ la moitié d'un doigt, ce qui les fit appeller par les Espagnols orejones, c'est à dire, hommes à grandes oreilles. Cette coûtume de se percer les oreilles étoit aussi en usage chez les Indiens d'Orient, dont il est fait mention ci-aprés au mot Pendans d'oreille.
Oreille en termes de Musique, se dit du jugement que l'oreille fait des sons. Cet homme danse bien, il a l'oreille fine, juste, delicate, il observe la cadence. Cet homme n'a point d'oreille, ne distingue pas les tons & les mesures. On dit aussi des Orateurs & des Poëtes qu'ils doivent avoir de l'oreille, pour dire qu'ils doivent observer la cadence de leurs Vers, de leurs périodes, éviter les cacophonies. Un Ancien a dit que le jugement de l'oreille étoit fort rigoureux.
On dit en ce sens d'un discours, des paroles, qu'elles blessent, qu'elles choquent les oreilles, quand elles déplaisent. Les ordures blessent les oreilles chastes. Les barbarismes choquent les oreilles des gens polis. Les belles paroles n'écorchent point l'oreille. Les grands ont les oreilles delicates, se choquent de peu de chose. La Musique charme, flatte, chatoüille l'oreille. Il y a bien des gens qui se laissent prendre par l'oreille, charmer par une belle voix, persuader par un beau discours. On dit aussi qu'une chose sonne mal aux oreilles, quand elle est odieuse, quand on en a mauvaise opinion. On dit qu'un homme a l'oreille d'un Prince, d'un Ministre, pour dire qu'il en a de favorables audiences, & tant qu'il veut; qu'il lui souffle, qu'il lui corne aux oreilles quelque chose, pour dire qu'il fait tant qu'il le persuade. Il lui a dit un mot à l'oreille, pour dire qu'il lui a donné un avis secret.
A Syracuse il y a un lieu qu'on appelle l'oreille de Denis le Tiran, c'est un trou qui perce dans une montagne, & qui fait qu'on entend en haut tout ce qui se dit en bas, quoi qu'à une grande distance.
On dit que la gelée, le vent, la grêle ont donné sur l'oreille aux fruits, au bleds, pour dire qu'ils en ont été endommagez, qu'ils baissent l'oreille. On dit aussi d'un chapeau, qu'il baisse l'oreille, pour dire que les bords ne le soûtiennent pas bien; qu'il fait le clabaud: c'est une métaphore tirée des chiens de chasse qui ont de grandes oreilles pendantes.
Oreille de cochon, est la partie du cochon la plus delicate pour manger en ragoût.
Oreille de Parisien est un petit ouvrage de Patisserie fait de bœuf fort épicé, enveloppé d'une pâte legere en forme d'oreille, qu'on appelle autrement rissolle.
Oreilles du cœur sont deux petites parties ou ouvertures du cœur faites en forme d'oreilles, dont la droite aboutit à la veine cave, & la gauche à l'entrée de l'artere veineuse. Elles servent à recevoir le sang, & à en faire la circulation dans le cœur; l'oreille gauche du cœur se dilate, quand le cœur se resserre pour en faire sortir le sang.
Oreille en terme de mer se dit des voiles Latines qui sont triangulaires, qu'on appelle oreilles de liévre ou à tiers point à la difference de celles qui sont à trait quarré. On appelle aussi les oreilles ou les pattes d'un ancre.
Oreille en termes d'Artisans, se dit aussi de deux petites avances qu'on applique au bord d'une écuelle pour la tenir plus facilement. Une écuelle à oreilles.
On appelle aussi oreille la partie d'un cercle de fer qui est au haut d'un chauderon dans laquelle l'anse est mobile; & dans un minot la partie du cintre où sont attachez les deux bouts de la potence.
On appelle aussi oreille les deux grosses dents d'un peigne qui sont aux extrêmitez, qui conservent les autres.
On appelle oreilles d'un cadenas, ses ouvertures dans lesquelles son anse est mobile.
Oreille se dit aussi du bord replié d'un livre, quand on veut y faire quelque marque pour retrouver aisément quelque endroit singulier, ou l'endroit où on en est demeuré en le lisant, cela arrive aussi aux livres frippez, qu'on a beaucoup maniez avec peu de soin.
Oreille se dit aussi de cette petite courroye où se termine le quartier du soulier, qui sert à y attacher des rubans, ou des boucles pour le serrer.
Oreille en terme d'Organistes, se dit de deux petites plaques de plomb que l'on soude sur les tuyaux à côté de leur bouche ou lumiére, qu'on abaisse ou qu'on releve pour faire des sons plus graves ou plus aigus: ils les nomment ainsi, parce qu'il semble qu'elles écoutent si les tuyaux sont d'accord.
On appelle en termes de Blason oreilles deux petites pointes qui sont au haut des grandes coquilles, comme celles de S. Jaques.
On appelle oreilles d'abricots des abricots confits dont on a ôté les noyaux, & dont on a rejoint les deux moitiez, en sorte que l'extrêmité de l'une n'aille qu'au milieu de l'autre, ce qui represente une espece d'oreille.
Oreille d'ours est une petite fleur printaniére qui pare agréablement un parterre, quand on la sçait bien disposer: car il y en a de plusieurs couleurs. Cette herbe est une espece de saniclet qui a les feüilles grandes comme le plantain, & roulées dans le bourgeon: elles ont certains replis ou bords fort artistement faits, on l'appelle en Latin Ursi auricula, ou dentaria minor, ou lunaria sanicula, ou artritica.
Oreille d'âne, est aussi un nom qu'on donne à la grande consolide qui est une plante fameuse en Medecine. Voyez Consolide.
Oreille de Rat, ou de souris, est le nom d'une plante qu'on appelle en Latin pilosella, c'est une espece de mouron, elle rampe toûjours par terre, & a des feüilles disposées en étoile, couvertes de poils blancs, ses tiges aussi rampantes ressemblent à de petites cordes souples rondes & veluës, qui prennent racine & poussent des branches nouvelles. Ses fleurs sont jaunes, qui à leur maturité s'envolent en bourre; ses racines sont déliées, & pourtant difficiles à arracher. Si on coupe la plante, elle rend du lait: son suc est astringeant, constipe le bêtail, & le fait mourir. Mathiole.
Oreille se dit proverbialement en ces phrases: Un chien hargneux a toûjours les oreilles déchirées, pour dire que les gens quérelleux sont sujets à être battus. On dit que les murs ont des oreilles, pour dire qu'on a beau parler secretement & à l'oreille, il y a toûjours quelque espion qui écoute, &c.
On dit qu'un homme se fait tirer l'oreille, pour faire quelque chose, quand il la fait à regret, ce qui se dit par allusion à une coûtume qu'avoient les Romains d'amener par l'oreille en justice, ceux qui ne vouloient pas y venir rendre témoignage d'une action qu'ils avoient vûë, lors de laquelle on leur pinçoit, & on leur tiroit l'oreille, afin qu'ils se souvinssent du fait, dont on voit plusieurs témoignages dans Plaute, Virgile, & Horace, &c.
OREILLÉ. ée. adj. terme de Blason qui se dit des dauphins, lorsque leurs oreilles sont d'un émail different de leurs corps; on le dit aussi des grandes coquilles, quand elles ont des oreilles aussi d'émail different.
ORGUE. s. f. & autrefois masculin. C'est le plus grand & le plus harmonieux de tous les instrumens de Musique qui est particuliérement eu usage dans les Eglises, pour célébrer l'Office Divin avec plus de solemnité. On fait pourtant dans les maisons particuliéres quelques orgues portatives, qu'on nomme cabinets d'orgues, mais dans les Eglises, on appelle buffet d'orgues cette construction de menuiserie qui enferme toute la machine. Le grand Buffet sert pour le grand jeu, qu'on appelle le grand corps, & le petit buffet pour le petit jeu qu'on nomme le positif. Ce mot vient du Latin organum.
L'orgue est composée de plusieurs tuyaux qui reçoivent le vent de gros soufflets, lequel est distribué par un sommier & par le moyen de plusieurs registres, qui ouvrent & ferment les ouvertures de ces tuyaux; & il y entre selon qu'on appuye les doigts sur les differentes touches du clavier.
On appelle accompagnement en l'orgue les divers jeux qu'on touche pour accompagner le Dessus, comme sont le bourdon, la montre, la flûte, le prestant, &c. Ceux de la grande orgue sont differents de ceux du positif.
La plûpart des piéces qui composent l'orgue sont expliquées à leur ordre alphabetique: on dira seulement ici que le chassis est une des principales piéces de l'orgue, parce qu'on enchasse dedans l'ais du sommier sur lequel on pose les tuyaux; on applique sur la table du sommier des tringles d'épaisseur de membrure, qu'on appelle Barreaux, éloignées les unes des autres de deux doigts, pour faire place à 48. Raynures ou crans ou graveures, sur lesquelles on met des chappes ou des ais qui les couvrent, & dans l'intervalle vuide de ces Raynures, on fait entrer des Régles planettes & mobiles en forme de lattes, qu'on nomme Registres, on perce ces trois piéces vis à vis l'une de l'autre, pour donner passage au vent dans les tuyaux, lesquels on applique sur le plus haut de ces trous, & cet assemblage s'appelle le sommier de l'orgue. On appelle le secret de l'orgue une layette ou quaisse, où est reçû & réservé le vent de la souflerie, pour le distribuer par les sous-papes au sommier qui est derriére. Vitruve nomme le sommier canon musical.
On appelle le tamis, la piéce de bois percée, à travers laquelle passent les tuyaux de l'orgue, & qui les tient en état.
L'orgue a deux ou trois & quelquefois quatre ou cinq claviers, dans les grands Buffets: ils sont divisez en plusieurs touches ou marches, comme ceux de l'Epinette & du clavessin. Chaque octave doit avoir 13. marches, & le clavier harmonique parfait en doit avoir 19. Une orgue a pour le moins 2000. tuyaux tant dans le grand Buffet que dans le positif, & elle a jusqu'à 8. octaves d'étenduë depuis le tuyau de 32. pieds jusqu'à celui d'un demi-pied. Ces tuyaux sont de bois, d'étain, ou de plomb. Il y a des tuyaux à anche & des tuyaux ouverts & d'autres bouchez, où on remarque que le tuyau bouché descend deux fois plus bas que celui qui est deux fois plus long, & qui est ouvert, parce que l'air qui y entre, & qui en sort, a deux fois autant de chemin à faire. Les tuyaux à cheminée sont ceux qui ont un petit tuyau soûdé au bout d'en haut d'un plus grand.
Les simples jeux de l'orgue sont, la montre, le premier & le second bourdon, le prestant & la doublette, le flageolet, & le nazard, la flutte d'allemand, la tierce, la fourniture, la grosse cimbale, la seconde cimbale, le cornet, le larigot, la trompette, le clairon, le cromorne, la régale ou la voix humaine, la pédale, la trompette & la flûte de pédale, sans compter le tremblant qui n'est qu'une modification des jeux.
De ces jeux on en fait plusieurs composez, qu'on varie en une infinité de façons. On appelle le plein jeu de l'orgue celui qui est composé de la montre, du bourdon, du 16. & du 8. pieds, du prestant & de la doublette, de la fourniture & de la tierce. Les facteurs d'orgue y ajoûtent d'autres jeux, ou en retranchent suivant leur different genie, ou la dépense qu'on y veut faire.
On appelle le temperament de l'orgue une diminution du ton majeur d'un comma, dont on augmente le ton mineur par une espece d'équation pour les rendre plus justes. L'invention de l'orgue est fort ancienne: Vitruve en décrit une dans son dixiéme livre. L'Empereur Julien a fait une Epigramme à sa loüange. Saint Jerôme fait mention d'une orgue qui avoit 12. souflets, dont la layette étoit faite de deux peaux d'Elephant, & on l'entendoit de mille pas: il dit qu'il y en avoit une en Jerusalem qu'on entendoit du Mont des Olives.
On appelle aussi orgue le lieu de l'Eglise où sont les orgues. Il est allé aux orgues entendre le Sermon. Ce mot vient du Latin organum. Salomon de Caux dit que le premier Auteur qui a écrit de l'orgue est Heron Alexandrin dans ses Pneumatiques. Le Pere Mersenne a fait une ample description de l'orgue aussi bien que Salomon de Caux. Le Begue a fait imprimer plusieurs piéces d'orgue, qui font voir comme on en peut mêler les jeux agréablement.
Orgues en termes de guerre est une machine composée de plusieurs gros canons de mousquet, attachez ensemble, dont on se sert pour défendre les brêches & autres lieux qu'on attaque, parce qu'on tire par leur moyen plusieurs coups tout à la fois.
Orgues est aussi une espece de herse, avec laquelle on ferme les portes des Villes attaquées: ce sont plusieurs grosses piéces de bois qu'on laisse tomber d'en haut, & qui ne sont point attachées l'une à l'autre par aucune traverse, comme sont les herses ordinaires, ou Sarrasines.
Orgues en termes de Marine sont des trous & ouvertures qui passent au travers du bordage d'un Vaisseau le long des tillacs ou des sabords qui servent de goutiéres pour l'écoulement des eaux: on les appelle autrement dalots.
ORIFLAME. s. f. les Anciens le faisoient masculin. Etendart de l'Abbaye de Saint Denys. Quelques-uns ont dit qu'elle étoit semée de flammes d'or, d'où elle avoit pris son nom. Elle differoit de la Banniére de France qui étoit d'un velours violet ou bleu celeste à deux endroits semez de fleurs de lys d'or plus plein que vuide. Elle étoit aussi differente en la forme, parce que celle de France étoit toute quarrée sans aucunes découpures par le bas, non plus que les autres banniéres, au lieu que l'Oriflame étoit attachée au bout d'une lance en guise de gonfanon, qui d'abord étoit pendu sur le tombeau de Saint Denys, & ne servoit que pour l'Abbaye. Il étoit mis entre les mains de son Avoüé qui étoit le Comte de Vexin, pour défendre les biens de l'Eglise & du Monastére, c'étoit une espece de labarum ou de gonfanon, ou de banniére comme en avoient toutes les autres Eglises, qui étoit fait de rouge & de soye de couleur de feu qu'on nommoit cendal ou samit vermeil, qui avoit trois queuës, ou fanons, & étoit entouré de houppes de soye verde, &c.