Histoire de France 1466-1483 (Volume 8/19)
1: Les Normands ne demandaient pas mieux que de l'entendre ainsi. Ils firent lire au duc dans leurs Chroniques: «Que jadis y ot ung roy de France qui voulut ravoir la Normandie (donnée en apanage à son plus jeune frère); ceux de la dicte duché guerroyèrent tellement le dict roy que par puissance d'armes, ils mirent en exil le roy de France, et firent leur duc roy.» Jean de Troyes.—Le 28 déc., Jean de Harcourt livre à M. le duc les Chroniques de Normandie que l'on conservait à la maison de ville; il s'engage à les rendre à la ville, quand Monseigneur les aura lues, sous peu de jours (Communiqué par M. Chéruel). Archives munic. de Rouen, Reg. des délibérations.
2: Le Parlement avait protesté contre les traités; ils n'avaient pas été légalement enregistrés, ni publiés. Les ligués eux-mêmes avaient fait leurs réserves contre certains articles; par exemple, le duc de Bretagne contre celui des trente-six réformateurs. Quant aux régales, le roi, un mois avant le traité, avait eu la précaution de les donner pour sa vie à la Sainte-Chapelle: les détourner de là, c'était un cas de conscience. (Ordonnances, XVI, 14 septembre 1465.)
3: Pensant qu'il n'aurait jamais échappé à de tels périls sans l'aide de Notre-Dame de Cléry, il alla lui rendre grâces. C'est probablement à elle qu'il offre à cette époque un Louis XI d'argent: «Paié à André Mangot, nostre orfèvre... reste de certain vœu d'argent, représentant nostre personne.» Bibl. royale, mss. Legrand, 17 mars 1466.—Autre œuvre pie: le 31 oct. 1466, il exempte d'impôts tous les chartreux du royaume. Ordonn., XVI,—Il devient tout à coup bon et clément; il accorde rémission à un certain Pierre Huy, qui a dit: «Que Nous avions destruit et mengé nostre pais du Dauphiné et que nous destruisions tout nostre royaume, et n'estions que ung follatre, et que nous avions ung cheval qui nous portoit et tout nostre conseil.» Archives, Trésor des chartes, J. registre, CCVIII, ann. 1466.
4: Une des grâces de la France, qui en a tant, c'est qu'elle n'est pas seule, mais entourée de plusieurs Frances. Elle siége au milieu de ses filles, la Wallonne, la Savoyarde, etc. La France mère a changé; ses filles ont peu changé (au moins relativement); chacune d'elles représente encore quelqu'un des âges maternels. C'est chose touchante de revoir la mère toujours jeune en ses filles, d'y retrouver, en face de celle-ci, sérieuse et soucieuse, la gaieté, la vivacité, la grâce du cœur, tous les charmants défauts dont nous nous corrigeons et que le monde aimait en nous, avant que nous fussions des sages.
5: Il est juste de dire que la Meuse reste française, tant qu'elle peut. Elle tourne à Sedan, à Mézières, comme pour s'éloigner du Luxembourg. Entraînée par sa pente, il lui faut bien couler aux Pays-Bas, se mêler, bon gré, mal gré, d'eaux allemandes; n'importe, elle est toujours française jusqu'à ce qu'elle ait porté sa grande Liége, dernière alluvion de la patrie.
6: Ce mot de dinanderie indique assez que nous ne tirions guère la chaudronnerie d'ailleurs. V. Carpentier, Dynan, usité en 1404.
7: Cérémonie importante dans nos anciennes mœurs.—Le chat, comme on sait, ne s'attache à la maison que lorsqu'on lui a soigneusement frotté les pattes à la crémaillère.—La sainteté du foyer au moyen âge tient moins à l'âtre qu'à la crémaillère qui y est suspendue. «Les soldats se détroupèrent pour piller et griffer, n'épargnant ny aage, ny ordre, ny sexe, femmes, filles et enfans, s'attachans à la crémaillère des cheminées, pensans échapper à leur fureur.» Mélart, Hist. de la ville et du chasteau de Huy.
8: V. Laurière, I, 220; II, 171. Michelet, Origines du droit, p. XCI, 47, 268. Voir particulièrement pour le Nivernais: Guy Coquille, question 58; M. Dupin, Excursion dans la Nièvre; Le Nivernais, par MM. Morellet, Barat et Bussière.
9: «Omnes pauperes, a regno profugos propter inopiam, liberalissime sustentasse.» C'est l'aveu même du roi de France. Zantfliet, ap. Martène.
10: Comme mélodistes, les Wallons et les Vaudois, Lyonnais, Savoyards, semblent se répondre de la Meuse aux Alpes. Rousseau a son écho dans Grétry. Même art, né de sociétés analogues; Genève et Lyon, comme Liége, furent des républiques épiscopales d'ouvriers.—Si les Wallons ont semblé plus musiciens que littérateurs dans les derniers siècles, n'oublions pas qu'au quatorzième, Liége eut ses excellents chroniqueurs, Jean d'Outre-Meuse, Lebel et Hemricourt. (Voir dans celui-ci l'amusant portrait de ce magnifique et vaillant chanoine Lebel.) Froissart déclare lui-même avoir copié Lebel dans les commencements de sa chronique.—Le XVIIe siècle n'a pas eu de plus savants hommes ni de plus judicieux que Louvrex; on sait que Fénelon, en procès avec Liége pour les droits de son archevêché, se désista sur la lecture d'un mémoire du jurisconsulte liégeois.—De nos jours, MM. Lavalleye, Lesbroussart, Polain et d'autres encore, ont prouvé que cet heureux et facile esprit de Liége n'en était pas moins propre aux grands travaux d'érudition.
11: Les plus anciens de ces musiciens sont: Josquin des Prez, doyen du chapitre de Condé; Aubert Ockergan, du Hainaut, trésorier de Saint-Martin de Tours (m. 1515); Jean le Teinturier, de Nivelle (qui vivait encore en 1495), appelé par Ferdinand, roi de Naples, et fondateur de l'école napolitaine; Jean Fuisnier, d'Ath, directeur de musique de l'archevêque de Cologne, précepteur des pages de Charles-Quint; Roland de Lattre, né à Mons en 1520, directeur de la musique du duc de Bavière (Mons lui éleva une statue), etc. On sait que Grétry était de Liége, Gossec de Vergnies en Hainaut, Méhul de Givet. Le physicien de la musique, Savart, est de Mézières.—Quant à la peinture, c'est la Meuse qui en a produit le rénovateur: Jean le Wallon (Joannes Gallicus), autrement dit Jean de Eyck, et très-mal nommé Jean de Bruges. Il naquit à Maseyck, mais probablement d'une famille wallonne. Voir notre tome VI.—V. Guicchardin, Description des Pays-Bas; Laserna, Bibliothèque de Bourgogne, p. 102-208; Fétis, Mémoire sur la musique ancienne des Belges, et la Revue musicale, 2e série, t. III 1830, p. 230.
12: Les guerres continuelles donnaient une grande valeur à l'homme et obligeaient de le ménager. La culture, déjà fort difficile, ne pouvait avoir lieu qu'autant que le serf même serait, en réalité, à peu près libre. Le servage disparut de bonne heure dans certaines parties des Ardennes.—La coutume de Beaumont (qui du duché de Bouillon se répandit dans la Lorraine et le Luxembourg) accordait aux habitants le libre usage des eaux et des bois, la faculté de se choisir des magistrats, de vendre à volonté leurs biens, etc.—Au commencement du XIIIe siècle (1236), le seigneur d'Orchimont affranchit ses villages de Gerdines, selon les libertés de Renwez (Concessi, ad legem Renwex, libertatem); il réduit tous ses droits au terrage, au cens, à un léger impôt de mouture. Saint-Hubert et Mirwart suivirent cet exemple.—Originaire moi-même de Renwez, j'ai trouvé avec bonheur dans le savant ouvrage de M. Ozeray cette preuve des libertés antiques du pays de ma mère. Ozeray, Histoire du duché de Bouillon, p. 74-75, 110, 114, 118.
13: Les grands propriétaires qui attaquent les communes aux Ardennes ou ailleurs devraient se rappeler que, sans les plus larges priviléges communaux, le pays fût resté désert. Ils demandent partout des titres aux communes, et souvent les communes n'en ont pas, justement parce que leur droit est très-antique et d'une époque où l'on n'écrivait guère.—Vous demanderez bientôt sans doute à la terre le titre en vertu duquel elle verdoie depuis l'origine du monde.
14: L'image naïve de l'Église transformant en hommes, en chrétiens, les bêtes sauvages de ces déserts, se trouve dans les légendes des Ardennes. Le loup de Stavelot devient serviteur de l'évêque; ce loup ayant mangé l'âne de saint Remacle, le saint homme fait du loup son âne et l'oblige de porter les pierres dont il bâtit l'église: dans les armes de la ville, le loup porte la crosse à la patte.—Au bois du cerf de Saint-Hubert fleurit la croix du Christ; le chevalier auquel il apparaît est guéri des passions mondaines.—Le pèlerinage de Saint-Hubert était, comme on sait, renommé pour guérir de la rage. Nos paysans de France, comme ceux des Pays-Bas, allaient en foule, mordus ou non mordus, se faire greffer au front d'un morceau de la sainte étole. Les parents de saint Hubert, qui vivaient toujours dans le pays, guérissaient aussi avec quelques prières. Délices des Pays-Bas (éd. 1785), IV, p. 50, 172.
15: Le péron était, comme on sait, la colonne au pied de laquelle se rendaient les jugements. Elle était surmontée d'une croix et d'une pomme de pin (symbole de l'association dans le Nord, comme la grenade dans le Midi?) Je retrouve la pomme de pin à l'hôtel de ville d'Augsbourg et ailleurs.
16: Comme le disait son épitaphe: «Qui, toto quasi orbe lustrato, Leodiidiem vitæ suæ clausit extremum, anno Domini MCCCLXXI.» Ortelius, apud Boxhorn. De rep. Leod. auctores præcipui, p. 57.
17: Cette terrible histoire n'en est pas moins très-gaie. V. Hemricourt, Miroir des nobles de Hasbaye, p. 139, 288, 350, etc.
«Défense de violer les demeures des citoyens: En lansant, ferrant ou jettant aux maisons, ou personnes extantes en icelles, à peine d'un voiage de S. Jacques. Le régiment des bastons, 1442, apud Bartollet, Consilium juris, etc., artic. 34. Je dois la possession de ce précieux opuscule, qui donne l'analyse de presque toutes les chartes liégeoises, à l'obligeance de M. Polain, conservateur des archives de Liége.
18: In stylo curiarum sæcularium Leod., c. V., art. 8, c. XIII, art. 20, et alibi, seigneurs TRESFONCIERS dicuntur ii quorum propria sunt decimæ, reditus, census, justicia, prædium, licet alii sint usufructarii.—Treffonciers et lansagers peuvent deminuer pour faute de relief.» Cout. de Liége, c. XV, art. 17.—Et est à savoir que cil qui ara suer l'iretage le premier cens, l'on apele le TREFFONS. Usatici urbis Ambianensis, mss. Ducange, verbo TREFFUNDUS.
Hemricourt se plaint (vers 1390?) de ce que le quart de la population de Liége, loin d'être né dans la ville, n'est pas même de la principauté. Patron de la temporalité, cité par Villenfagne, Recherches (1817), p. 53.
19: On tire la houille de dessous Liége même. Un ange a indiqué la première houillère. Une de celles du Limbourg s'appelle vulgairement Heemlich, autrefois Hemelryck (royaume du ciel), à cause de sa richesse.—Ernst., Histoire du Limbourg (éd. de M. Lavalleye I, 119). V. aussi le mémoire de l'éditeur sur l'époque de la découverte.
20: Voir, à la suite du Miroir des nobles de Hasbaye, le beau récit de la guerre des Awans et des Waroux, si bien préparé par les généalogies qui précèdent, et par la curieuse préface de ces généalogies.
21: Les exemples abondent dans Hemricourt, pour les changements de condition, pour les alliances de bas en haut et de haut en bas, etc.—En voici deux prises au hasard.—Corbeau Awans (l'un des principaux chefs dans cette terrible guerre des nobles) épouse la fille de «M. Colar Barkenheme, chevalier quy fut sornomeis delle Crexhan, par tant qu'il demoroit en la maison con dit le Crexhan à Liége, en la quelle ilh avoit longtemps vendut vins (car ilh est viniers), anchois qu'il presist l'ordenne de chevalerie.»—Ailleurs, le très-noble et vaillant Thomas de Hemricourt s'excuse d'entrer dans la guerre civile, sur ce qu'il est marchand de vin; et il est visible qu'il s'agit d'un véritable commerce, et non d'une vente fortuite, comme les étudiants avaient le privilége d'en faire dans notre Université de Paris. Ce Thomas «de plusieurs gens estoit acoincteis par tant qu'il estoit vinir... Ilh répondit que c'estoit un marchands et qu'il pooit très mal laissier sa chevanche por entrer en ces werres...» Hemricourt, Miroir des nobles de Hasbaye, p. 256, 338, et p. 55, 141, 165, 187, 189, 225, 235, 277, 296, etc.
22: Au commencement du XVe siècle, époque de la proscription de Wathieu d'Athin, ses amis paraissent être des propriétaires de houillères. V. dans M. Polain un récit très-net de cette affaire, si obscure partout ailleurs.
23: Autre différence essentielle entre les deux peuples: si les révolutions de Liége semblent montrer plus de mobilité, moins de persévérance et d'esprit de suite, que celles de la Flandre, il est pourtant juste de dire qu'en plusieurs points la constitution de Liége reçut des développements qui manquèrent à celles des villes flamandes: par exemple, l'élection populaire du magistrat et la responsabilité ministérielle. Nul ordre de l'évêque n'avait force s'il n'était signé d'un ministre auquel le peuple pût s'en prendre.—Je dois cette observation à M. Lavalleye, aussi versé dans l'histoire des Pays-Bas en général que dans celle de Liége.
24: Les vingt-deux institués en 1372 pour juger les cas de force et violence, furent composés de quatre chanoines (qui étaient indifféremment indigènes ou étrangers), de quatre nobles et de quatre bourgeois (huit indigènes liégeois), enfin, de deux bourgeois de Dinant et deux d'Huy; Tongres, Saint-Trond et quatre autres villes envoyaient chacune un bourgeois.
25: Mélart en donne un exemple curieux. La petite ville de Ciney, qui devait porter ses appels aux échevins d'Huy, finit par obtenir d'en être dispensée. Huy, à son tour, prétend qu'un de ses évêques lui a donné ce privilége, qu'aucun de ses bourgeois ne pût être jugé par les échevins de Liége; et cet autre, qu'ils ne seraient tenus d'aller en guerre (en ost banni), à moins que les Liégeois ne les eussent précédés de huit jours. Mélart, Histoire de la ville et du chasteau de Huy, p. 7 et 22.
Hemricourt, dit qu'à partir de la fin de la grande guerre des nobles (1335), ils négligèrent généralement leurs parents pauvres, n'ayant plus besoin de leur épée. Miroir de la noblesse de Hasbaye, p. 267.
26: «Ils ne voloyent nient que nus deauz awist sor l'autre sangnorie, ains voloit cascuns d'eaz estre chief de sa branche.» Hemricourt, p. 4. Voir les passages relatifs aux continuels changements d'armes, p. 179, 189, 197, etc. Aussi dit-il: «À poynes soit-on al jour-duy queis armes, ne queile blazons ly nobles et gens de linage doyent porteir.» Ibidem, p. 355.
27: Hemricourt, Patron de la temporalité, cité par Villenfagne. Recherches (1817), p. 54.
28: On sait le proverbe sur Liége: Le paradis des prêtres, l'enfer des femmes (elles y travaillent rudement), le purgatoire des hommes (les femmes y sont maîtresses).—Plusieurs passages des chroniques de Liége et des Ardennes témoignent du génie viril des femmes de ce pays, entre autres la terrible défense de la tour de Crèvecœur. Galliot, Hist. de Namur, III, 272.—«Près Treit, aucunes femmes Liégeoises vindrent en habits d'homme, avec les armes, et firent au pays si grandes thirannies qu'elles surmontoient les hommes en excès.» Bibl. de Liége, ms. 180, Jean de Stavelot, fol. 159.
29: C'est ce qui arriva au chevalier Radus. Au retour d'un voyage qu'il avait fait avec l'évêque de Liége, il chercha son château des yeux, et ne le trouva plus: «Par ma foi! s'écria-t-il, sire évêque, ne sais si je rêve ou si je veille, mais j'avois accoutumance de voir d'ici ma maison sylvestre, et ne l'aperçois point aujourd'hui.—Or, ne vous courroucez, mon bon Radus, répliqua doucement l'évêque; de votre château, j'ai fait faire un moustier; mais vous n'y perdrez rien.—Jean d'Outre-Meuse, cité par M. Polain, dans ses Récits historiques.—Voir aussi dans le même ouvrage comment ce brave évêque, venant baptiser l'enfant du sire de Chêvremont, fit entrer ses hommes d'armes couverts de chapes et de surplis, s'empara de la place, etc.—«Les Dinantais entre eux divisés à l'occasion de Saint-Jean de Vallé, chevalier, duquel ils furent contraints de destruire la thour et chasteaux.» Bibl. de Liége, ms. 183, Jean de Stavelot, ann. 1464.
30: Maëstricht était sous la souveraineté indivise de l'évêque de Liége et du duc de Brabant, comme il résulte de la vieille formule:
Een heer, geen heer (un seigneur, point de seigneur),
Twen heeren, een heer (deux seigneurs, un seigneur).
Trajectum neutri domino, sed paret utrique.
V. Polain, De la Souveraineté indivise, etc., 1831; et Lavalleye, extrait d'un mém. de Louvrex sur ce sujet, à la suite du tome III de l'Histoire du Limbourg, de Ernst.
31: Les chevaliers leur faisaient faute en paix plus encore qu'en guerre. S'agissait-il d'envoyer une ambassade à un prince, ils ne savaient souvent qui employer. Louis XI les priant de lui envoyer des ambassadeurs avec qui il pût s'entendre, ils répondent qu'ils ont peu de noblesse du parti de la cité, et que ce peu de nobles est occupé à Liége dans les emplois publics. Bibl. royale, mss. Baluze, 165, 1er août 1467.
32: Dans les deux poèmes de la Bataille de Liége, et les Sentences de Liége, ils sont nommés hé-drois. Mémoires pour servir à l'histoire de France et de Bourgogne, I, 375-376. Les chefs des haï-droits sous Jean de Bavière sont: un écuyer, un boucher qui avait été bourgmestre, un licencié en droit civil et canonique, un paveur à la chaux. Zantfliet, ap. Martène, Ampliss. Collect., V, 363. Au reste, les ennemis du droit strict trouvaient de quoi s'appuyer dans la loi même, puisque la Paix de Fexhe (1316) portait que les Liégeois devaient être traités par jugement d'échevins ou d'hommes, et que le changement dans les lois qui peuvent être ou trop larges, ou trop roides, ou trop étroites, doit être attempéré par le sens du pays. Dewez, Droit public, t. V des Mém. de l'Acad. de Bruxelles.
33: Il semblerait, d'après les devises, que la guerre de Louis d'Orléans et de Jean sans Peur peut se rattacher à la concurrence du charbon de bois et de la houille, du Luxembourg et des Pays-Bas: Monseigneur d'Orléans, Je suis mareschal de grant renommée, Il en appert bien, j'ay forge levée: Monseigneur de Bourgogne, Je suis charbonnier d'étrange contrée, J'ai assez charbon pour faire fumée. Bibl. royale, mss. Colbert 2403, regius 9681-5.
Les tisserands du Liégeois n'étaient pas moins anciens que ceux de Louvain. La chronique de Saint-Trond nous montre des tisserands en 1133, à Saint-Trond, à Tongres, etc.»Est genus mercenariorum quorum officium ex lino et lana tecere telas; hoc procax et superbum supra alios mercenarios vulgo reputatur.» Spicilegium, II, 704 (éd. in-folio).
«Survint une grosse guerre entre les Bourguignons et les Dinantois, pour la marchandise de cuivre.» Bibl. de Liége, ms. 180, Jean de Stavelot, f. 152 verso.
34: Mélart lui-même, si partial pour les évêques, avoue que cette paix a été «infâme, et où l'évesque s'est abaissé trop vilement, blasmé en cela de... s'avoir laissé mettre la chevestre au col.» Mélart, Histoire de la ville et chasteau de Huy, p. 245.
Cet argent venait à point pour cette maison, si riche et si nécessiteuse, dont la recette (sans parler de certaines années extraordinaires, et vraiment accablantes) paraît avoir flotté: de 1430 à 1442, entre 200,000 et 300,000 écus d'or,—de 1442 à 1458, entre 300,000 et 400,000. C'est du moins ce que je crois pouvoir induire du budget annuel qui m'a été communiqué par M. Adolphe Le Gay. Archives de Lille, Comptes de la recette générale des finances des ducs Jean et Philippe.
35: C'est là, selon toute apparence, la triste explication qu'il faut donner de l'affaire si obscure de Wathieu d'Athin, de la proscription de ses amis, les maîtres des houillères, d'où résulta un conflit déplorable entre les métiers de Liége et les ouvriers des fosses voisines. La ville, déjà isolée des campagnes par la ruine de la noblesse, le devint encore plus lorsque l'alliance antique se rompit entre le houiller et le forgeron.
36: Il serait curieux de suivre l'action progressive de la France dans les Ardennes, depuis le temps où un fils du comte de Rethel fonda Château-Renaud. Nos rois, de bonne heure, achetèrent Mouzon à l'archevêque de Reims. Suzerains de Bouillon, et de Liége pour Bouillon, voulant fonder sur la Meuse la juridiction, de la France, ils y prirent pour agents les La Marche (et non La Mark, puisque La Marche est en pays wallon), les fameux Sangliers. Nous les tenions par une chaîne d'argent, et nous les lâchions au besoin. Ils grossirent peu à peu de la bonne nourriture qu'ils tirèrent de la France. Par force ou par amour, par vol ou par mariage, ils eurent les châteaux des montagnes. Lorsque Robert de Braquemont quitta la Meuse pour la Normandie (la mer et les Canaries), il vendit Sedan aux La Marche, qui le fortifièrent, et en firent un grand asile entre la France et l'Empire. De ce fort, ils défiaient hardiment un Philippe le Bon, un Charles-Quint. Le terrible ban de l'Empire les terrifiait peu. Ces Sangliers, comme on les appelait du côté allemand, donnèrent à la France plus d'un excellent capitaine; sous François Ier, le brave Flemanges qui, avec ses lansquenets, fit justice des Suisses. Par mariage enfin, les La Marche aboutissent glorieusement à Turenne.—En 1320, Adolphe de la Marche, évêque de Liége, reconnaît recevoir du roi 1,000 livres de rentes; 1337, il donne quittance de 15,000 livres, et promet secours contre Édouard III. En 1344, Engilbert de la Marche fait hommage au roi, puis en 1354, pour 2,000 livres de rente, qu'il réduit à 1,200 en 1268. Archives du royaume, Trésor des chartes, J. 527.
37: Sous le prétexte que si Liége n'aidait le duc, il garderait pour lui ces châteaux qui étaient des fiefs de l'évêché. Zantfliet, ap. Martène, Ampliss. Coll., V, 453. Voir aussi Adrianus de Veteri Bosco, Du Clercq, Suffridus Petrus, etc.
38: La Marche se présenta au chapitre pour faire serment le 8 mars 1455; date importante pour l'explication de tout ce qui suit. Explanatio uberior et Assertio juris in ducatum Bulloniensem, pro Max, Henrico, Bavariæ duce, episc. Leod. 1681, in-4o, p. 121.
39: Plusieurs disent qu'on le menaça de la mort, qu'on amena un confesseur, etc. Ce qui est sûr, c'est que pour faire croire qu'il était libre, on le fit résigner, non chez le duc, mais dans une auberge, «Hospitium de Cygno. Et juravit quod nunquam contraveniret, sub obligatione omnium bonorum suorum.» Adrianus de V. Bosco. Ampliss. Coll. IV, 1226.
40: Meyer, si partial pour le duc, dit lui-même: «Metu potentissimi ducis.» Meyer, Annal. Flandr., f. 318 verso.
41: «Indutus veste rubea, habens unum parvum pileum.» Adrianus de Veteri Bosco, ap. Martène, Amplissima Collectio, IV, 1230. Comment se fait-il que cet excellent continuateur des Chroniques de saint Laurent, témoin oculaire et très judicieux, ait été généralement négligé? Parce qu'on avait sous la main, dans le recueil de Chapeauville, l'abréviateur Suffridus Petrus, domestique de Granvelle, lequel écrit plus d'un siècle après la révolution, sans la comprendre, sans connaître Liége. Un seul mot peut faire apprécier l'ineptie de l'abréviateur: il suppose que Raes de Linthres fait jurer d'avance aux Liégeois d'obéir au régent quelconque qu'il pourra nommer! il lui fait dire que ce régent (le frère du margrave de Bade) est aussi puissant que le duc de Bourgogne! etc.—Outre Commines et Du Clercq, les sources sérieuses sont, pour Liége, Adrien de Vieux Bois, pour Dinant, la correspondance de ses magistrats dans les Documents publiés par M. Gachard. La petite ville a conservé ses archives mieux que Liége elle-même. Nous aurons bientôt une traduction d'Adrien, et une traduction excellente, puisqu'elle sera de M. Lavalleye.
42: Moins cruels pourtant que la justice de l'évêque, à en juger par l'effroyable supplice infligé à deux hommes ivres, dont l'un avait proféré des menaces contre l'évêque, l'autre avait approuvé: «Quod factum fuit ad incutiendum timorem, versum fuit in horrorem.» Adrianus de Veteri Bosco, Ampliss. Coll., IV, 1234.
43: «Qui se vocaverunt dy Clupslagher, et fecerunt fieri pro signo unum vagum virum cum fuste in manu, quem ponebant in vexillo, et in pecia papyri depictum portabant, affixum super brachia et pilea sua.» Ibidem, 1242.
44: «Sedendo cum eis, juvit dictare, sicut aiebant, sententias.» Ibidem, 1244.
45: La scène est jolie dans Adrien. De Dinant, on vient dire à Liége qu'il y a à Mouzon beaucoup de gens d'armes français, qu'ils vont envahir le pays. Le capitaine déclare qu'en effet il a ordre d'attaquer, si les Liégeois ne sont avant tel jour à Paris. Les magistrats de Liége hésitent fort à partir. Ils demandent un sauf-conduit, qui leur est refusé. Arrivés près de Paris, tout contre le gibet royal, survient un messager de l'évêque de Liége, qui dit à l'un d'eux, Jean le Ruyt: «Ô mon cher seigneur, où allez-vous, retournez, je vous en prie, que voulez-vous faire? Voilà Jean Bureau qui s'est constitué prisonnier jusqu'à ce qu'il ait prouvé ce dont on vous accuse.—Eh! quoi! dites-vous bien vrai?—Oui, c'est comme je vous dis.» À quoi Jean le Ruyt répliqua: «Ah! ah! ah! Domine Deus (Jérémie)! Je sais bien qu'il me faut mourir une fois; le pis qu'il me puisse arriver, c'est de finir à ce gibet. Donc, en avant!...» La première personne qu'ils rencontrèrent, ce fut Jean Bureau qu'on leur avait dit s'être constitué prisonnier. Cependant le roi, apprenant leur arrivée, envoie les chercher, une fois, deux fois. Introduits, ils se mettent à genoux, le roi les fait relever. Bérard, l'envoyé des nobles, fit en leur nom une belle harangue. Puis le roi: «Gilles d'Huy est-il ici?—Oui, sire.—Et Gilles de Mès?—Sire, me voici.—Et celui que mon père, le roi Charles, a fait chevalier?—Sire, c'est moi, dit Jean le Ruyt.» Alors le roi leur parla du bruit qui courait, qu'ils avaient promis à son père de le ramener en France. Il chargea Jean Bureau de faire à ce sujet une enquête.—Ils cherchèrent pendant trois jours l'évêque de Liége, et en furent reçus assez mal. Il ne retint avec lui que leur orateur, l'envoyé des nobles. Le lendemain, comme ils entraient au palais du roi, celui qui ouvrait la porte leur dit: «Votre orateur est là, qui parle contre vous.» Cependant le roi les tint pour excusés, et dit qu'on ne parlât plus de rien. Puis il dit à Gilles de Mès: «Voulez-vous que je vous fasse chevalier?—Mais, sire, je n'ai ni terre, ni fief...»—Voyant ensuite l'avoué de Lers avec un simple collier d'argent: «Voulez-vous la chevalerie?—Sire, je suis bien vieux.—N'importe; qu'on me donne une épée.» Il le fit chevalier, et un autre encore. Alors, les envoyés prièrent le roi de prendre la ville en sa sauvegarde. Ibidem, 1247-1250.
46: Raes de Heers ou de Lintres, fils de Charles de la Rivière et d'Arschot, et de Marie d'Haccour, d'Hermalle, de Wavre, etc.
47: Je suppose qu'il les avait dès cette époque. La fleur de lis se trouve fréquemment dans les armoiries liégeoises. Recueil héraldique des bourguemestres de la noble cité de Liége, p. 169, in-folio, 1720.
48: «Des jurisconsultes, dit le jésuite Fisen, pour déguiser la dissidence de l'autorité ecclésiastique.»
49: Où il s'était retiré. Voyez aussi vol. VI, page 235. Cette rivalité éclate partout, spécialement à l'occasion de Montlhéry. Les Hollandais soutinrent, contre les Bourguignons et Wallons, qu'eux seuls avaient décidé la bataille, en criant: Bretagne! et faisant croire que les Bretons arrivaient. Reineri Snoi Goudini Rer. Batavic. I. VII.
50: Suffridus Petrus.
51: Adrianus de Veteri Bosco.
52: La bulle est tout au long dans Suffridus Petrus.
53: Archives du royaume, Trésor des chartes, J. 527.
54: Dans sa lettre au roi, il montre une confiance extraordinaire: «En Picardie, les sieurs de Crèvecœur et de Miraumont, mes serviteurs... besoigneux en toute diligence... J'ay trouvé et trouve moyen de me fortiffier tant de mes amis que d'austres estrangers et de leurs places... Et dedans six jours espère cy avoir ung nommé Jehan de la Marche (ung nommé! que dirait de ceci l'illustre maison d'Aremberg?) qui s'est envoyé offrir à moy, et aussy aucuns députés des Liégeois qui désirent fort à moy faire plaisir. Jay en cestuy païs de Rethelois de bien bonnes et fortes places, etc. Escript en ma ville de Mézières-sur-Meuse, le 19e jour de mars 1465.» Bibl. royale, mss. Legrand, Preuves, c. I.
55: On admire encore à Saint-Barthélemy de Liége les fonts baptismaux où pendant huit siècles tous les enfants de Liége ont reçu le baptême. «Lambert Patras, le batteur de Dinant, les fit en l'an 1212.» Jean d'Outre-Meuse, cité par M. Polain, Liége pittoresque, ou Description historique, etc., p. 204-205. C'est à Dinant que fut fondue, au XVIIe siècle, la statue de bronze que Liége éleva à son bourgmestre Beeckmann. Le même, Esquisses, p. 311.
56: Rivalité sans doute analogue à celle des drapiers d'Ypres et de Poperinghen, de Liége et de Verviers. Ceux de Liége reprochaient aux autres: «Que leurs marchandises de drapperie n'estoient ni fidelles ny loyalles ny aulcunement justifiées.»
57: «Et si ne fesoient gueres de mariaiges de leurs enfans, sinon les ungz avec les aultres: car ils estoient loing de toutes aultres bonnes villes.» Commines.
58: La date est importante. L'historien du Namurois, naturellement favorable à Bouvignes, avoue pourtant qu'elle bâtit la première sa tour de Crève-Cœur. (Galliot.)
59: Dinant s'en plaint au duc dans sa lettre du 16 juillet.
60: Le clerc, conart, le chanteur, ces deux mots rappellent l'abbé des cornards, qu'on trouve dans d'autres villes des Pays-Bas. Celui-ci peut fort bien avoir été un chanteur ou ménétrier, un fol patenté de la ville, comme ceux qui jouaient, chantaient et ballaient, quand on proclamait un traité de paix ou qu'on faisait quelque autre acte public (?).
61: Du Clercq, livre V. ch. XLV. «Amplissant ung doublet plain de feur, couvert d'un manteau armoiet des armes dudit sieur, et mettant au-desseur un clockin de vache...» Documents publiés par M. Gachard, II, 221, 252.—V. aussi ibid., lettres du 5 nov. 1465 et du 23 sept.
62: Adrianus de Veteri Bosco.
63: «Qui vir prudens erat.» Suffridus Petrus.
64: Le roi avait peut-être intercédé de vive voix; mais dans le traité, il n'y a rien pour eux, sauf que le roi avoue qu'ils ont agi par suite des: «Sollicitations d'aulcuns nos serviteurs.» Lenglet. Il leur écrit: «Audict appointement estes comprins... Seroit difficile à nous de vous secourir.» Mss. Legrand.
65: Documents publiés par M. Gachard.
66: «Pfaffenkind.» Nulle injure plus grave. Grimm, Rechtsalterthümer, 476. Michelet, Origines du droit, 68.
67: «Nous apprenons, disent les Dinantais, qu'elle est à l'Écluse, attendant des gens d'armes de divers pays.» Documents Gachard.
68: «Sub pœna paternæ indignationis.» Ms. pseudo-Amelgardi.
69: Voyez tome sixième. Il est curieux de voir les efforts maladroits du bonhomme Olivier de La Marche (Préface) pour rassurer là-dessus son jeune maître Philippe, petit-fils de Charles le Téméraire: «J'ay entrepris de vous monstrer que vostre lignée du costé du Portugal n'est pas seule issue de bastards... Jephté est mis au nombre des saincts, et toutefois il estoit fils d'une femme publique... De Salmon et de Raab, femme publique, fut fils Booz...» Puis arrivent Alexandre, Bacchus, Perseus, Minos, Herculès, Romulus, Artus, Guillaume de Normandie, Henri, roi d'Espagne, Jean, roi de Portugal, père de Madame de Bourgogne.
70: Quand on connaît la violence de ces princes de la maison de Bourgogne, rien ne frappe plus que la modération de leurs paroles officielles. On y sent partout l'esprit cauteleux des conseillers qui les dirigeaient, des Raulin, des Humbercourt, des Hugonet, des Carondelet. Dans la campagne de France, le comte de Charolais avait toujours assuré qu'il venait seulement conseiller le roi, s'entendre avec les princes. Pourquoi le roi l'avait-il attaqué à Montlhéry? Il s'en plaint dans l'un de ses manifestes.—De même, lorsque les Liégeois défient le duc, comme ennemi du roi, leur allié, il répond froidement: «Ceci ne me regarde pas; portez-le à mon fils.» Et encore: «Pourquoi me ferait-on la guerre? jamais je n'ai fait le moindre mal ni au régent, ni aux Liégeois.» V. Duclercq, livre V, ch, XXXIII, et Suffridus Petrus, ap. Chapeauville, III, 153.
71: Il est probable que la banlieue elle-même n'était pas sûre, depuis que les forgerons de la ville avaient battu les houillers.
72: «Concluserunt cives quod neminem darent ad voluntatem... Ministeriales petebant pacem, sed nolebant aliquos homines dare ad voluntatem.» Adrianus de Veteri Bosco, Ampliss. Coll., IV, 1284.
73: Rien de plus odieux. Jean de Meurs, après avoir d'abord bien reçu l'abbé de Florines, qui vient intercéder, lui prend ses chevaux et le taxe outrageusement à la petite rançon d'un marc d'argent. Louis de La Marche écrit aux gens de Dinant: «Fault acquérir amis, tant par dons que par biaux langaiges, ceulx quy de ce s'entremelleront, récompenser de leurs labeurs.» Documents Gachard, II, 263-264.
74: Il n'y a pas un mot de cela dans les documents authentiques de Dinant. Tout porte à croire le contraire. On ne peut faire ici grand cas de l'assertion du Liégeois Adrien, généralement judicieux, mais ici trop intéressé à justifier sa patrie.
75: Adrianus de Veteri Bosco.
76: À l'inauguration du nouveau duc, on renouvela toutes les formes anciennes: l'épée, tenue par le comte de Tancarville, connétable hérédital de Normandie, l'étendard que portait le comte d'Harcourt, maréchal hérédital, l'anneau ducal que l'évêque de Lisieux, Thomas Bazin, passa au doigt du prince, le fiançant avec la Normandie. Registres du chapitre de Rouen, 10 déc. 1465, cités par Floquet, Hist. du Parlement de Normandie, I, 250.
77: Le duc de Bourbon s'était montré l'un des plus acharnés, l'un de ceux qui craignaient le plus qu'on ne se fiât au roi. V. ses Instructions à M. de Chaumont: «Que Monseigneur et les autres princes... se gardent bien d'entrer dans Paris... De nouvel, avons sceu par gens venant de Paris l'intention que le Roy a de faire faire aucun excès ou vois de fait... Le Roy a faict serment de jamais ne donner grace ou pardon... mais est délibéré de soy en venger par quelque moyen que ce soit, voire tout honneur et seureté arrière mise.» Bibliothèque royale, ms. Legrand, Preuves, 12 oct. 1465. Quant à la haine des Bretons, il suffirait, pour la prouver, du passage où ils veulent jeter à la mer les envoyés de Louis XI: «Velà les François; maudit soit-il qui les espargnera!» Actes de Bretagne, éd. D. Morice, II, 83.
78: Le roi ébranla d'abord le duc de Bourbon, en lui faisant peur d'une attaque de Sforza en Lyonnais et Forez. (Bernardino Corio.) Quant au Breton, le roi le prit aigri, fâché, lorsque ses amis les Normands l'avaient mis hors de chez eux, lorsqu'il regrettait amèrement d'avoir refait un duc de Normandie à qui la Bretagne devrait hommage.
79: «Les gens de nostre bonne ville de Rouen... nous ont remonstré que ladicte entrée fut faicte par nuyt et à leur desceu et très-grant desplaisance, et si soubsdain qu'ils n'eurent temps ne espace de povoir envoyer devers nous pour nous en advertir.» (Communiqué par M. Chéruel, d'après l'original, aux Archives municipales de Rouen, tir. 4, no 7, 14 janvier 1466.)
80: Où Désormeaux prend-il cette folle exagération? «Il périt presque autant de gentilshommes par la main du bourreau que par le sort de la guerre.»
81: Mss. Baluze, 9675 B, 15 janvier 1466.
82: Le comte de Charolais y envoya Olivier, qui raconte lui-même sa triste ambassade: «Si passay parmy Rouen, et parlay au Roy, qui me demanda où j'alloye...» Olivier de la Marche, liv. I, ch. XV.
83: Duclercq.
84: Legrand, Hist. ms. de Louis XI, livre IX, fol. 37.
85: Ni la garde de Melun. Jean de Troyes, ann. 1466, fin mai.
86: Rymer, 22 mars 1466. Le même jour, Édouard donne pouvoir pour traiter d'un double mariage entre sa sœur et le comte de Charolais, entre la fille du comte et son frère Clarence.
87: «Sy ne sçavoient la pluspart la cause pourquoy ne quy les mouvoit.» Du Clercq.
88: Au soir, le Roy me parla et se coroussa de ce qu'on ne vouloit faire délibérer selon son imagination, et je lui diz que j'avois oy dire à MM. qu'il perdoit son peuple...» Lettre de Reilhac à M. le contrerolleur, maître Jehan Bourré. Bibl. royale, mss. Legrand, 22 septembre 1466.
89: Le centre géométrique de la France est marqué par une borne romaine, dans le Bourbonnais, près d'Alichamp, à trois lieues de Saint-Amand.
90: Les étrangers semblent dès lors mettre le duc de Bourbon au niveau du roi: «Contentione suborta inter regem Francie et J. ducem Borbonii ex uno latere, et Karolum Burgundie ex altero.» Hist. patriæ Monumenta, I, 642.
91: Ces Bourbons, quoique assez remuants, n'avaient pas encore le sang de Gonzague, de Foix et d'Albret. La devise sur l'épée: Penetrabit, ne fut adoptée que par le connétable.—Le fameux: Qui qu'en grogne, qu'on attribue aussi aux ducs de Bretagne, fut dit (vers 1400?) par Louis II de Bourbon, contre les bourgeois qui s'alarmaient de la construction de sa tour. Ibidem, II, 201.
92: Leur roi, D. Pedro de Portugal, neveu de la duchesse de Bourgogne, était mort le 20 juin 1466.
93: Historiæ patriæ Monumenta, Chronica Sabaudiæ, ann. 1466, t. I, p. 639.
94: Ses lieutenants reçurent effectivement les clefs du château, du palais, de la tour du pont. (Communiqué par M. Chéruel.) Archives municipales de Rouen. Délibérations, vol. VII, fol. 259-260.
95: «Estoient courrouciés qu'ils n'estoient plus au roy de France.» Du Clercq.
96: Registres de Mons, cités par M. Gachard, dans son éd. de Barante, t. II, p. 255, no 2.
97: V. plus loin, p. 69, 72, et les Documents Gachard, II, 435; sur la Verte tente de Gand en 1453, Monstrelet, éd. Buchon, p. 387. Sur les Galants de la feuillée en Normandie, Legrand, Hist. ms., livre IX, fol. 87-88, ann. 1466. Cf. mes Origines du droit sur le banni; et sur l'outlaw anglais, sur Robin Hood, une curieuse thèse de M. Barry, professeur d'histoire.
98: Duclos, Preuves, IV, 279. Il s'agissait de rendre le roi odieux, il lui écrit peu après que les sergents du bailliage d'Amiens oppriment le peuple, qu'il faut en choisir de meilleurs, que le roi confirmera: «Et avec ce, ferez grant bien et soulaigement au pouvre peuple.» Bibl. royale, mss. Baluze, 9675 D., 16 oct. 1466.
99: Pour apprécier la supériorité de la main sur les moyens mécaniques, lire les discours, pleins de vues ingénieuses et fécondes, que M. Belloc a prononcés aux distributions de prix de son École. L'École gratuite de dessin, dirigée (disons mieux, créée par cet excellent maître), a déjà renouvelé, vivifié dans Paris tous les genres d'industrie qui ont besoin du dessin; orfévrerie, serrurerie, menuiserie, etc. Sous une telle impulsion, ces métiers redeviendront des arts. (Note de 1844).
100: «Savoir faisons... Nous avoir esté humblement exposé de la partie de Estienne la Mare dynan, ou potier darain, simple homme, chargié de femme et de plusieurs enfans, que comme environ la Chandeleur qui fut mil CCC,IIIIXX et cinq; icelluy suppliant se feust louez et convenanciez à un nommé Gautier de Coux, dynan, ou potier darrain, pour le servir jusques à certain temps, lors à venir, et parmi certain pris sur ce fait, et pour païer le vin dudit marchié...» Archives, Trésor des Chartes, reg. 159, pièce 6, lettre de grâce d'août 1404.
101: Lettre de Jehan de Gerin et autres magistrats de Dinant, 8 nov. 1465. Documents Gachard, II, 336.
102: Sur les trois membres de la cité, les batteurs (aidés des bourgeois) déclarent qu'ils veulent traiter. Ils demandent au troisième membre, composé des petits métiers, s'ils croient résister, lorsque la ville de Liége, lorsque le roi de France ont fait la paix?... Ils ne se plaignent de personne; ils n'attestent point le droit qu'ils auraient eu d'ordonner, dans une ville qui, après tout, était née de leur travail, et qui, sans eux, n'était rien. Ils invoquent seulement le droit de la majorité, celui de deux membres, d'accord contre un troisième. Ce troisième résiste. Il demande si l'on veut, sous ce prétexte, le mettre en servitude. «Mais quelle servitude plus grande, répliquent les autres, que la guerre, la ruine de corps et de biens? Dans un navire en péril ne faut-il pas jeter quelque chose pour sauver le reste? n'abat-on pas un mur pour sauver la maison en feu?
103: Très-fort chez nous autres Français. Les missionnaires remarquent qu'au Canada les sauvages se francisaient peu; mais les Français prenaient volontiers la vie errante des sauvages.
104: Voyez plus haut la page 15, note 1. Les Liégeoises devaient leur influence, non à la loi, mais à leur caractère énergique et violent. Les Flamandes devaient la leur, au moins en grande partie, à la faculté qu'elles avaient de disposer plus librement de leur bien.
105: On trouve encore, après tant de révolutions, un grand nombre de ces chroniques de famille (Observation de M. Levalleye).
106: Ils étaient probablement poussés par Raes et autres meneurs, qui voulaient encore essayer de leur Allemand.—Voir le détail si curieux dans Adrianus de Veteri Bosco, Ampliss. Collectio, IV. 1291-2.
107: «Fait bon à croire que ung roi de France... doibt et peut bien tenir une longue suspense entre dire et faire, avant que... soy former ennemy... contre ung bras constitué champion de l'Église... Quand il l'auroit aidié à destruire par tels vilains, si eût-il accru sa honte et son propre domage en perdition de tant de noblesse que le duc y avoit, lequel fesoit encore à craindre à ung roy de France pour mettre sa noblesse... contre ly, par adjonction à fière vilenaille, que tous roys et princes doivent hayr pour la conséquence.» Chastellain.
108: Dans un récit, au reste très-hostile, on voit que cette populace noya des prêtres qui refusaient d'officier. (Du Clercq; Suffridus Petrus.)
109: C'est ce qu'on lit dans les actes. Les chroniqueurs disent 4,000! 40,000, etc.
110: Un auteur, très-partial pour la maison de Bourgogne, avoue que les batteurs en cuivre abrégèrent la défense: «Ad hanc victoriam tam celeriter obtinendam auxilium suum tulerunt fabri cacabarii.» Suffridus Petrus, ap. Chapeauville, III, 158.
111: «Cum tubicinis, mimis et tympanis.» Adrianus de Veteri Bosco, ap. Martène IV, 1295. Voir aussi plus haut, p. 147, note 3.
112: Un auteur assure qu'au commencement du siége, Madame de Bourgogne, se faisant scrupule d'une vengeance si cruelle, vint elle-même intercéder. Mais l'épée était tirée, ce n'était plus une affaire de femme. On ne l'écouta pas. Je ne puis retrouver la source où j'ai puisé ce fait.
113: Le moine Adrien se tait sur ce point, sans doute par respect pour le duc de Bourgogne, oncle de son évêque. Jean de Hénin (à la suite de Barante, éd. Reiffenberg) dit effrontément: «Je ne sçay que à sang froid on aye tuée nelluy.» Mais Commines (édit. de mademoiselle Dupont, liv. II, ch. I, t. I, p. 117), Commines, témoin oculaire et peu favorable aux gens de Dinant, dit expressément: «Jusques à huict cens noyés, devant Bouvynes, à la grand requeste de ceulx dudict Bouvynes.» Je trouve aussi dans un manuscrit: «Environ huict cens noyés en la rivière de Meuse.» L'auteur ne s'en tient pas là; il prétend que le comte «mit à mort femmes et enfants.» Bibliothèque de Liége. Continuateur de Jean de Stavelot, ms. 183, ann. 1466.
114: Jacques Du Clerc tâche d'obscurcir la chose pour lui donner quelque ressemblance avec la ruine de Jérusalem, et faire croire que: «Ce estoit le plaisir de Dieu qu'elle fust destruite.»
115: Une partie des hommes passa en Flandre, à Middelbourg, d'autres en Angleterre; il semble que le duc ait fait cadeau de cette colonie à son ami Édouard. On transplanta les hommes, mais non l'art, selon toute apparence; les artistes devinrent des ouvriers; du moins on n'a jamais parlé de la batterie de Middelbourg ni de Londres.—Les Dinantais, à peine à Londres, prirent contre Édouard le parti de Warwick, qui était le parti français, dans leur incurable attachement pour le pays qui les avait si peu protégés! (Lettres patentes d'Édouard IV, février 1470).
116: Je me trompe; Jean de Hénin trouve que: «La ville de Dynant fust plus doucement traictée qu'elle n'avoit desservy.»—J'ai rencontré aussi les vers suivants, sotte et barbare plaisanterie des vainqueurs, que je ne rapporte que pour faire connaître le goût du temps: «Dynant, ou soupant, Le temps est venu Que le tant et quant Que t'as, mis avant Souvent et menu, Te sera rendu, Dynant, ou soupant.» Bibliothèque de Bourgogne, ms., no 11033.
117: «Les femmes mesmes quy y alloient pour trouver leurs maisons ne sçavoient cognoistre... Tellement y feut besoigné que, quatre jours après le feu prins, ceux qui regardoient la place où la ville avoit esté pooient dire: Cy feut Dynant!» Du Clercq, liv. V, ch. LX-LXI. En 1472, le duc autorisa la reconstruction de l'église de Notre-Dame au lieu appelé Dinant. Gachard, Analectes Belgique, p. 318-320.
118: «Non inveni in toto Dyonanto nisi altare S. Laurentii integrum, et valde pulchram imaginem B. V. Mariæ in porticu ecclesiæ suæ, etc.» Adrianus de Veteri Bosco, ap. Martène, IV, 1296.
119: «Unes patrenostres de gaiet, où il a des patrenostres d'argent entre deux... Une paire de gans d'espousée... un boutoir à mettre espingles de femmes...»—Puis il passe à autre chose: «Item un millier de fer... Item un millier de plomb.» Recepte des biens trouvez en ladite plaiche de Dinant. Documents Gachard, II, 381.
120: «Et à cause d'icelle destruction, devindrent les pauvres habitants d'icelle mendiants, et aucunes jeunes femmes et filles abandonnées à tout vice et pesché, pour avoir leur vie.» Jean de Troyes.
121: «Ceste nuict estoit l'ost des Bourguignons en grant trouble et double... Aulcuns d'eulx eurent envie de nous assaillir; et mon adviz est qu'ils en eussent eu du meilleur.» Commines.
122: Commines.—«Agente plurimum et pro miseris interveniente comite Sancti Pauli.» Amelgard, Amplis. Coll. IV, 752.
123: Il dit gravement aussi que le roi pourrait bien le poursuivre en dommages et intérêts. Bibliothèque royale, ms. Du Puy, 762, procès-verbal du 27 septembre 1466.
124: «S'appliquoit à lire et faire lire devant luy du commencement les joyeux comptes et faicts de Lancelot et de Gauvain.» Olivier de la Marche.
125: Cette explication ne surprendra pas ceux qui savent quels étaient les vrais rois d'Angleterre. La trêve expirait. Warwick se fit sans doute sceller des pouvoirs pour la renouveler, par son frère, l'archevêque d'York, chancelier d'Angleterre, contre le gré du roi. Ce qui est sûr, c'est qu'après le départ de Warwick, Édouard, furieux, alla avec une suite armée reprendre les sceaux chez l'archevêque qui se disait malade: il lui ôta deux manoirs de la couronne, et il prit cette précaution auprès du nouveau garde des sceaux, que, s'il voyait qu'un ordre royal pût préjudicier au roi: «Then he differe the expedition...» Rymer, Acta.
126: «Was receyvid into Roan with procession and grete honour into Our Lady chirch.» Fragment, édité par Hearne à la suite des Th. Sprotti Chronica, p. 297. L'auteur a reçu tous les détails de la bouche d'Édouard IV: «I have herde of his owne mouth.» Ibidem, p. 298.
127: Rien de plus mélancolique que les paroles de Chastellain: «Maintenant c'est un homme mort,» etc. Elles sont visiblement écrites au moment même; on y sent l'inquiétude, la sombre attente de l'avenir.
128: Lire le récit de Chastellain, plus naïf, mais tout aussi grand que les plus grandes pages de Tacite.—Cf. les détails donnés par le Registre d'Ypres, et par celui de la Colace de Gand, ap. Barante-Gachard, II, 273-277.—V. aussi Recherches sur le seigneur de La Gruthuyse, et sur ses mss. (par M. Van Praet). 1831, in-8.
Malgré l'autorité de Wiellant, j'ai peine à croire que deux hommes tels que Commines et Chastellain, témoins de ces événements, se soient trompés de deux ans sur l'époque de la soumission. Je croirais plutôt que Gand se soumit et demanda son pardon dès le mois de décembre 1467, qu'elle ne l'obtint qu'en janvier 1469, et que l'amende honorable n'eut lieu qu'au mois de mai de la même année.
129: Il accusait les Liégeois d'avoir soulevé Gand. Bibl. de Liége, ms. Bertholet, no 81, fol. 444.
130: «Renonçons à tous droits, allégations, exceptions, deffenses, previléges, fintes, cautelles, à toutes récisions, dispensations de serment... et au droit disant que général renonciation ne vault, se l'espécial ne précède.» Lettre qu'on fit signer aux Liégeois le 22 déc. 1465. Documents Gachard, II, 311.
131: «Iverunt super collem de Lottring, et acceperunt possessionem pro comite Nivernensi et rege Franciæ. Similiter in Bollan et circum, et sequenti die in Herstal.» Adrianus de Veteri Bosco, Ampliss. Coll. IV, 1369 (23 jul. 1467).—Le roi semble avoir tâté Louis de Bourbon à ce sujet: «Et pour ce qu'il estoit nécessaire de savoir le vouloir de ceulx de la cité, et s'ils se voudroient par mondit seigneur (de Liége) soumettre à vous.» Lettre de Chabannes et de l'évêque de Langres au roi. Bibl. royale, mss. Legrand, Preuves, ann. 1467.—C'est là sans doute la véritable raison pour laquelle les Liégeois refusent d'envoyer au roi; ils craignent de s'engager. L'excuse qu'ils donnent est bien faible: «La raison si est qu'il at en ceste cité très-petit nombre de nobles hommes...» Bibl. royale, mss. Baluze, 675 A, fol. 21, 1er août 1467.
132: Commines.—«Si le Roy se feust mellé réalement de la guerre des Liégeois en son contraire, il avoit deux mille Anglois à Calais, venus tout prests pour les faire venir en Liége, et trente mil francs là envoyés pour les payer en cas de besoing.» Chastellain.
133: Ordonnances, XVI, juin 1467.
134: «Ordre au trésorier du Dauphiné de payer à Dunois, etc.; aux gens de l'Auvergne de payer au duc de Bretagne, etc.; à ceux du Languedoc de payer au duc de Bourbon, etc. 1466-1467.» Archives du royaume, K. 70, 27 février et 4 oct. 1466, 14 janvier 1467.
135: Si le greffier n'a pas vu double, dans son ardeur guerrière. (Jean de Troyes, 15 septembre 1467.)
136: Mss. Legrand, Preuves, octobre 1467.
137: Commines ne l'a pas senti, parce qu'il n'a pas rapproché les dates.
138: Rien n'indique qu'il y eût d'autres Français.—Dammartin, que Meyer y fait venir avec quatre cents hommes d'armes, six mille archers! (Annales Flandr., p. 341), n'avait pas bougé de Mouzon. Le bailli de Lyon, fort embarrassé à Liége, faisait tout au monde pour le faire venir; sa lettre au capitaine Salazar (Bibl. royale, mss. Legrand, Preuves) est bien naïve: «Se nul inconvéniant leur sorvient, y diront que le Roy et vous et moy qui les ay conseglez, an somes cause... Les genz d'armes seront plus ayses icy que là, et tout le pays s'apreste vous fere très-grand chière, etc.»
139: «Plus quam vir ejus fecisset.» Adrianus.
140: Cette curieuse scène de nuit avait deux témoins très-intelligents qui l'ont peinte, un jeune homme d'armes bourguignon, Philippe de Commines, et un moine, Adrien de Vieux-Bois. Tout le couvent, en alarme, s'occupait à cuire du pain pour ceux qui viendraient, quel que fût leur parti.
141: Voir dans Adrien la scène intérieure de Liége, l'abandon du tribun. On lui en voulait de ne s'être pas fait tuer, comme Bare de Surlet. On prétendait qu'après la bataille il avait passé la nuit dans un moulin, etc. Ce qui est sûr, c'est qu'une fois rentré dans Liége, il montra beaucoup de fermeté et ne quitta qu'au dernier moment.
142: «Sans avoir regart aux malvais stieles, usaiges et coustumes selon lesquelz lesdis eschevins ont aultrefois jugiet.» Documents Gachard, II, 447.—Adrien, ordinairement fort exact, ajoute: «Et modum per dominum ducem et dominum episcopum ordinandum.» Amptiss. Coll., IV, 1322.
143: Le peuple perd son antique et joyeux privilége de danser dans l'église, etc.—«Sera abolie l'abusive coustumme de tenir les consiaux en l'église de Saint-Lambert, du marchiet de plusseurs denrées, des danses et jeuz et aultres négociations illicites que l'on y a accoustumé de faire.» Documents Gachard, II, 453.
144: Un historien du XVIIe siècle ajoute: «Le duc fit abattre la statue de Fortune, que les Liégeois avoient dressée sur le marché pour marque de leur liberté et fiché un clou à sa roue, afin qu'elle ne tournast.» Mélart. C'est la traduction de l'inscription latine donnée par Meyer, fol. 342. Voir la très-plate inscription française dans D. Plancher et Salazar. Histoire de Bourgogne, IV, 358.
145: Il l'aurait fait si ses nobles n'avaient intercédé. (Poutrain.)—Tournai, enfermée de toutes parts et s'obstinant à rester française, se trouvait dans un état de siége perpétuel. Les Flamands, quand ils voulaient, la faisaient mourir de faim, et par représailles elle se moquait fort de ses pesants voisins, trop bien nourris.
146: C'est l'expression du formidable portrait attribué à Van Eyck. Celui qu'on voyait à Gand dans une précieuse collection (vendue en 1840) est sombre, violent, bilieux; le teint accuse l'origine anglo-portugaise. Il a été souvent copié.
147: Il eut «l'entendement et le sens si grand qu'il résistoit à ses complexions, tellement qu'en sa jeunesse ne fut trouvé plus doux, ne plus courtoy que luy. Il apprenoit à l'école moult bien, etc.» Olivier de la Marche. Le portrait capital est celui de Chastellain. On y voit qu'il avait l'esprit très-cultivé, beaucoup de faconde et de subtilité: «Il parloit de grand sens et parfond, et continuoit longuement au besoin.» Ce qui contredit le mot de Commines: «Trop peu de malice et de sens,» etc. La contradiction n'est qu'apparente; on peut être discoureur, logicien et peu judicieux.
148: Selon Olivier de la Marche: Quatre cent mille écus d'or, soixante-douze mille marcs d'argent, deux millions d'or en meubles, etc. En 1460, Philippe le Bon avait ordonné à ses officiers de rendre leurs comptes dans les quatre mois qui suivraient l'année révolue. (Notice de Gachard sur les anciennes chambres des comptes, en tête de son Inventaire.) En 1467-8, le duc Charles crée une chambre des domaines, règle la comptabilité, en divise les fonctions entre le receveur et le payeur, etc. Archives gén. de Belgique, Reg. de Brabant, no 4, fol. 42-46.
149: «Se délitoit en beau parler, et en amonester ses nobles à vertu, comme un orateur... assis en haut-dos paré.—Il mist sus une audience, laquelle il tint trois fois la semaine, après disner...; les nobles de sa maison estoient assis devant ly en bancs, chascun selon son ordre, sans y oser faillir..., souvent toutesfois à grand'tannance des assis.» Chastellain.
150: Ce que nous disons ici des ministres de la maison de Bourgogne contraste avec le remarquable esprit de mesure qui caractérise la Franche-Comté. À portée de tout, et informés de tout, les Comtois eurent de bonne heure deux choses, savoir faire, savoir s'arrêter. Savants et philosophes (Cuvier, Jouffroy, Droz), légistes, érudits et littérateurs (Proudhon et ses collègues de la Faculté de Paris, Dunod, Weiss, Marmier), tous les Comtois distingués se recommandent par ce caractère. Nodier lui-même, qui a donné l'élan à la jeune littérature, ne l'a pas suivi dans ses excentricités. Les devises franc-comtoises sont modestes et sages: Granvelle, Durate; Olivier de la Marche, Tant a souffert; Besançon, Plût à Dieu.—J'attends beaucoup, pour l'étude de la Franche-Comté, des documents qu'elle publie dans ses excellents mémoires académiques, et de la savante et judicieuse histoire de M. Clerc.
Ces familles de légistes se poussaient à la fois dans la robe et dans l'épée. Un Carondelet est tué à Montlhéry, un Rochefort y commande cent hommes d'armes; en récompense, il est fait maître des requêtes; plus tard, il devient chancelier de France. Son père avait eu ses biens confisqués pour une petite rature qu'il fit à son profit dans un acte. Le faux n'est pas rare en ce temps. Cf. le fameux procès du bâtard de Neufchâtel, Der Schweitzerische Geschichtforscher, I, 403.
151: Dunod.
152: La menace est du 5 novembre, et l'explication du 20 décembre; en six semaines, l'émigration avait commencé: «Se partent et absentent, ou sont à voulenté d'eux partir et absenter.» Gachard.
153: Le duc fit lire et adopter à ce chapitre une ordonnance qui mettait dans sa main toute la juridiction de l'ordre. V. le texte dans Reiffenberg, Histoire de la Toison-d'Or, p. 50.
154: Il le déshonorait après l'avoir dépouillé. Sur cette terrible iniquité de la maison de Bourgogne, sur la cession forcée (qu'Hugonet extorqua), sur le courage du notaire qui glissa dans l'acte même (au pli du parchemin où posait le sceau), une toute petite protestation. V. Preuves de Commines.
155: Chaque ville envoya trois députés, un prêtre et deux laïques.—La relation du greffier Prévost, imprimée dans les collections (Isambert, etc.), se trouve plus complète dans un ms. de Rouen; les dates et certains détails y sont plus exactement indiqués. On y voit un seul bourgeois porter la parole au nom de plusieurs villes. (Communiqué par M. Chéruel, d'après le ms. des Archives municipales de Rouen.)
156: Dépêche de Menypeny au roi, Legrand, Hist. de Louis XI (ms. de la Bibl. royale), liv. XI, p. 1, 16 janvier 1468. V. aussi Rymer, 3 août.
157: Ici le greffier Jean de Troyes se redresse, enfle la voix et donne tout au long le noble détail.
158: «My-parti de noir et de violet» selon Jean de Hénin et Olivier de la Marche.
159: Sauf les lords de la façon d'Édouard, les parents de sa femme et un cadet des Talbot.
160: «Wen they were both in bedde...» Fragment publié par Hearnes, à la suite des: Th. Sprottii Chronica (in-8o, 1719, p. 296).
161: Olivier de la Marche lui donne les deux noms; à la fin de la fête, le péron d'or est jeté à la mer.
162: Rien de plus magnifique et de plus fantasque (V. Olivier), parfois avec quelque chose de barbare; par exemple le duc portant son écu «couvert de florins branlants;» par exemple, le couplet brutal: «Faites-vous l'âne, ma maîtresse?»—La tour que le duc bâtissait en Hollande ne manqua pas de se trouver à la fête de Bruges; du plus haut de la tour, par un jeu bizarre, des bêtes musiciennes, loup, bouc ou sanglier, sonnaient, chantaient aux quatre vents.—Autre merveille, et plus étrange (féerie hollandaise ou anglaise?): la bête de l'océan du Nord, la baleine, entre et nage à sec. De son ventre sortent des chevaliers, des géants, des sirènes; sirènes, géants et chevaliers, combattent et font la paix, comme si l'Angleterre finissait sa guerre des deux Roses. Le monstre alors, ravalant ses enfants, nage encore et s'écoule.
163: «Inermes ac nudi, sylvestribus tantum truncis et fundi lapidibusque armati.» J. Piccolomini, Comment., lib. III, p. 400, et apud Freher, t. III, p. 273.
164: «Magister Robertus habebat nomen, quod ipse scripsisset litteras, nomine domini, fugitivis de Francia quod redirent, quia omnes dicebant quod fuissent remandati.» Adrianus de Veteri Bosco, Coll. ampliss., IV, 1337.
165: «Capillorum et barbarum promissione, sylvestrium hominum instar.» Piccolomini. ap. Freher, II, 274.
166: «Ledict duc envoya devers ledict seigneur un sien valet de chambre, homme fort privé de luy. Le roi y print grant fiance, et eust vouloir de parler audict duc.» Commines.—«Un sommelier du corps du duc... fut mandé par le roy de France, et par le congé du duc y alla; et tant parlementèrent ensemble, et fit ledict (sommelier) tant d'alées et de venues, que le duc assura le roy.» Olivier de la Marche.
167: Le billet du duc au cardinal (ms. Legrand) est bien caressant, d'une familiarité bien flatteuse: «Très-cher et especial amy... Et adieu, cardinal, mon bon amy.» Voir (Ibidem) la lettre de Saint-Pol, qui semblerait perfidement calculée pour pousser le roi par la vanité.
168: C'est ce que Saint-Pol dit dans cette lettre, et ce que disaient d'autres encore: «L'on dit que M. de Bourgogne a grande envie de le veoir.» Néanmoins, il ajoute: «Hier, sur le soir, vint le vidame d'Amiens, qui amena un homme qui affirme sur sa vie que Bourgogne ne tend à cette assemblée, sinon pour faire quelque échec en la personne du roy.»
169: L'original du sauf-conduit fut reconnu pour écrit de sa main, par son frère, le Grand bâtard, par ses serviteurs intimes, Bitche et Crèvecœur, et son ancien secrétaire, Guillaume de Cluny. Cette pièce si précieuse est conservée à la Bibliothèque royale.
170: «Quand Monseigneur vint près du roy, il s'inclina tout bas à cheval. Lors le print le roy entre ses bras la teste nue, et le tint longuement acolé, et Monseigneur pareillement. Après ces acolements, le roy nous salua, et quand il ot ce fait, il rembrasa Monseigneur, et Monseigneur lui, la moittié plus longuement qui n'avoient fait. Tout en riant, ils vindrent en ceste ville, et descendy à l'ostel du receveur, et devoit venir (?) à l'après dîner logier au chasteau... Messire Poncet, avecq M. le bastard sont logié au chastel.» Le dernier mot ferait croire qu'il se trouva au château sous la garde d'un de ses ennemis. (Documents Gachard.)
171: V. le curieux livre de M. Bernard sur cette spirituelle et intrigante famille des d'Urfé.
172: «In fine Augusti dicebatur scripsisse litteras ut apponerent diligentiam ad custodiendum passagia.» Adrian., Amplis., Coll. IV, 1328.
173: Le duc se plaignait dès lors de ce que: «Les Liégeois fesoient mine de se rebeller, à cause de deux ambassadeurs que le Roy leur avoit envoyez, pour les solliciter de ce faire... À quoy respondit Balue que lesdictz Liégeois ne l'oseroiont faire.» Commines (éd. Dupont), I, 151. Ceci ne peut être tout à fait exact. Ni le duc, ni Balue ne pouvait ignorer que les Liégeois étaient rebellés depuis un mois. Ce qui reste du passage de Commines, c'est que le duc savait parfaitement, avant de recevoir le roi, que les envoyés du roi travaillaient Liége.—Les dates et les faits nous sont donnés ici par un témoin plus grave que Commines en ce qui concerne Liége, par Humbercourt lui-même, qui était tout près, qui en faisait son unique affaire, et qui a bien voulu éclairer le moine chroniqueur Adrien sur ce que Adrien n'a pu voir lui-même: «Dominus de Humbercourt, ex cujus relatu ista scripta sunt.» Ampliss. Collectio, IV, 1338.
174: Deux fois il demanda une garde: «Petivit custodiam vigiliarum... Iterum misit.» Ibidem, 1334.
175: Jour de la Saint-Denis; ces deux entreprises hasardeuses furent risquées le même jour, peut-être pour le même motif, parce que c'était la Saint-Denis, et dans la confiance que le patron de la France les ferait réussir. On sait le fameux cri d'armes: «En avant, Montjoie Saint-Denis!» Louis XI était superstitieux, et les Liégeois fort exaltés.
176: Cette célérité remarquable s'explique en ce que les Liégeois firent leur coup vers minuit: la nouvelle eut pour venir à Péronne les vingt-quatre heures du 9 octobre et une partie du 10.
177: Lequel venait d'écorcher Charles de Melun, en avait la peau, et devait tout craindre si les amis de Melun prévalaient.
178: C'est toute une longue suite d'ordonnances datées du même jour (14 octobre), de concessions croissantes qu'on dirait arrachées d'heure en heure. Elles remplissent trente-sept pages in-folio. Ordon. XVII.
179: Le faux Amelgard, dans son désir de laver le duc de Bourgogne, avance hardiment contre Commines et Olivier, témoins oculaires, que ce fut le roi qui demanda d'aller à Liége: «Et de hoc quidem minime a Burgundionum duce rogabatur, qui etiam optare potius dicebatur, ut propriis servatis finibus de ea re non se fatigaret.» Amelgardi Excerpta, Ampliss. Coll. IV, 757.
180: On a eu soin de le faire dater du jour où le roi arrivait et était encore libre, du 9 octobre. On lui fait dire que les Liégeois ont pris l'évêque; il fut pris le 9 à Tongres, on ne pouvait le savoir le 9 à Péronne. La lettre dit encore que le traité est fait; il ne fut fait que le 14.
181: Comme le mot qui tua Thomas Becket, le mot qui tua Richard II, etc.
182: À en croire l'absurde et malveillante explication des Bourguignons, ce légat, qui était vieux, malade, riche, un grand seigneur romain, n'aurait fait tout cela que pour devenir évêque lui-même. Cette opinion a été réfutée par M. de Gerlache.
183: N'oublions pas que le duc avait lui-même rappelé Humbercourt, qu'il avait laissé venir les bannis lorsqu'il pouvait, avec quelque cavalerie, les disperser à leur sortie des bois; nous ne serons pas loin de croire qu'il désirait une dernière provocation pour ruiner la ville.
184: On varie sur le nombre: «Quatre cents hommes portant la couleur et livrée du duc.» Bibliothèque de Liége, ms. Bertholet, no 183, fol. 465.
185: Dans tout ceci, je suis Commines et Adrien de Vieux-Bois, deux témoins oculaires. Le récit de Piccolomini, si important pour le commencement, n'est, je crois, pour cette fin, qu'une amplification.
186: Antoine de Loisey, licencié en droit, l'un de ceux apparemment qui restaient là pour continuer cette besogne fort peu juridique, écrit le 8 novembre au président de Bourgogne: «L'on ne besoingne présentement aucune chose en justice, senon que tous les jours l'on fait nyer et pendre tous les Liégeois que l'on treuve, et de ceulx que l'on a fait prisonniers qui n'ont pas d'argent pour eulx rançonner. Ladite cité est bien butinée, car il n'y demeure riens que après feuz, et pour expérience je n'ay peu finer une feulle de papier pour vous escripre au net... mais pour riens je n'en ay peu recouvrer que en ung viez livre.» Lenglet.
187: C'est le témoignage d'Adrien. Pour Angelo, il me paraît mériter peu d'attention; son poème est, je crois, une amplification en vers de l'amplification de Piccolomini. Il fait dire à un messager «qu'il a vu noyer deux mille personnes, égorger deux mille.» L'exagération ne s'arrête pas là: «Monsterus escrit qu'en la cité furent tuez 40,000 hommes, et 12,000 femmes et filles noyeez.» Bibliothèque de Liége, ms. Bertholet, no 183.
188: Double allusion; ce nom, qui était celui de la maîtresse du roi, rappelait celui de Péronne. Il paraît qu'il y eut à cette occasion un débordement de plaisanteries. «Il fit défendre que personne vivant ne feust si osé de rien dire à l'opprobe du Roi, feust de bouche, par escript, signes, painctures, rondeaulx, ballades, virelaiz, libelles diffamatoires, chançons de geste, ne aultrement... Le mesme jour, furent prinses toutes les pies, jais et chouettes, pour les porter devant le Roy, et estoit escript le lieu où avoient été prins lesdits oiseaux, et aussi tout ce qu'ils savoient dire.» Jean de Troyes.
189: Les Français même en parlent assez froidement. Gaguin seul articule l'accusation d'un guet-apens prémédité: «Vulgatum est Burgundum diu cogitasse de rege capiendo et inde in Brabatiam abducendo, sed ab Anthonio fratre ejus notho dissuasum abstinuisse.» R. Gaguini Compendium (éd. 1500), fol. 147. La Chronique qui prétend traduire Gaguin (voir le dernier feuillet), n'ose pas donner ce passage: Chronique Martiniane, fol. 338-339.
190: C'est ce qu'espèrent le faux Amelgard et Chastellain; le dernier pourtant s'apitoie: «C'est le roi le plus humilié qu'il y ait eu depuis mille ans, etc.»
191: Sans doute, la moralité n'a pas péri alors (ni alors, ni jamais), seulement elle est absente des rapports politiques; elle s'est réfugiée ailleurs, comme nous verrons. Je ne puis m'arrêter ici pour traiter un si grand sujet. V. Introduction de Renaissance.
192: Il donna cette autorisation au duc d'Alençon et aux Armagnacs qui étaient en conspiration permanente; il la donna au duc d'Orléans qui avait six ans, et au duc de Bourbon, qui, ne pouvant espérer d'une ligue la moindre partie des avantages énormes que lui avait faits le roi, n'avait garde de hasarder une telle position.—Les lettres du roi existent à Gand (Trésorerie des chartes de Flandre.)
193: Un mot, pour finir, sur les sources. Je n'ai pas cité l'auteur le plus consulté, Suffridus; il brouille tout, les faits, les dates; il suppose qu'il y avait dans Liége des troupes françaises pour la défendre contre Louis XI. Il croit que si Tongres fut surprise, c'est qu'on y fêtait, dès le 9, la paix qui ne fut conclue que le 14, etc., etc. Chapeauville, III, 171-173. Piccolomini est important tant qu'il suit le légat, témoin oculaire; il est inutile pour la fin. L'auteur capital pour Péronne est Commines, pour Liége, Adrien, témoin oculaire (éclairé d'ailleurs par Humbercourt), qui écrit sur les lieux, au moment où les choses se passent, et qui donne toute la série des dates, jour par jour, souvent heure par heure. N'ayant pas connu cet auteur, et ne pouvant établir les dates, Legrand n'a pu y rien comprendre, encore moins son copiste Duclos, et tous ceux qui suivent.
194: Celui qui, à tâtons, traverse ces limbes obscurs de l'histoire, se dit bien que là-bas le jour commence à poindre, que ce XVe siècle est un siècle chercheur qui se trouve lui-même à la longue, que la vie morale, pour être déplacée alors, et malaisée à saisir, n'en subsiste pas moins. Et, en effet, un observateur attentif qui la voit peu sensible dans les rapports politiques, la retrouvera, cette vie, forte au foyer et dans les rapports de famille. La famille dépouille peu à peu la dureté féodale, elle se laisse humaniser aux douces influences de l'équité et de la nature.—Et c'est peut-être pour cela justement que les petits regardent d'un œil si indifférent se jouer, en haut, sur leur tête, le jeu des politiques.
195: «Rode behynde the erle Warwick.» Fragment d'une chronique contemporaine, publiée par Hearne, à la suite des Thomæ Sprotii Chronica (1719), page 296.
196: Voir, entre autres ouvrages, l'Esquisse des relations qui ont existé entre le comté de Bourgogne et l'Helvétie, par Duvernoy (Neufchâtel, 1841), et les Lettres sur la guerre des Suisses, par le baron de Gingins-la-Sarraz (Dijon, 1840).
197: C'est dans ce moment où le roi crut les avoir divisés pour toujours qu'il voulut forcer le duc de Bretagne d'accepter son ordre nouveau de Saint-Michel, qui l'aurait mis dans sa dépendance.—Sur la fondation de cet ordre, rival de la Toison et de la Jarretière, V. Ordonnances, XVII, 236-256, 1er août 1469, et Chastellain, cité par M. J. Quicherat, Bibliothèque de l'École des Chartes, IV, 65.
198: Le duc de Guienne fut très-reconnaissant; les deux frères eurent une entrevue fort touchante; ils se jetèrent dans les bras l'un de l'autre, tout le monde pleurait de joie. (Lenglet.)
199: À la grande joie du peuple, qui en fit des chansons. Au reste, on n'avait pas attendu sa chute pour le chansonner (Ballade et caricature contre Balue, Recueil des chants historiques de Leroux de Lincy, II, 347). Pour effrayer les plaisants, il fit ou fit faire une chanson, où l'on sent la basse cruauté du coquin tout puissant; le refrain est atroce: «On en fera du civet aux poissons.» Bibl. du roi, ms. 7687, fol. 105, cité dans la Bibliothèque de l'École des chartes, t. IV, p. 566, août 1843.
On a cru à tort qu'il avait inventé ces cages; il n'eut que le mérite de l'importation. Elles étaient fort anciennes en Italie: «Et post paucos dies conducti fuerunt in palatio communis Veronæ, et in gabiis carcerati.» Chron. Veronense, apud Murat. VIII, 624, ann. 1230.—«Posuerunt ipsum in quadam gabbia de ligno.» Chron. Astense, apud Murat. XI, 145.—«In cosi tenebrosa, è stretta gabbia rinchiusi fummo.» Petrarcha, part. I, son. 4.—Même usage en Espagne: «D. Jacobus per annos tres et ultra in tristissimis et durissimis carceribus fuit per regem Aragonum, et in gabia ferrea noctibus et diebus, cum dormire volebat, reclusus.» Vetera acta de Jacobo ultimo rege Majoricarum. Ducange, verbo Gabia.—On conserve encore la cage de Balue dans la porte forteresse du pont de Moret. Bulletin du Comité hist. des arts et monuments, 1840, no 2, rapport de M. Didron, p. 50. Cette cage était placée à Amboise, dans une grande salle qu'on voit encore.
200: Rien de plus curieux ici que le témoignage de Jean de Vaurin. Warwick vint voir le duc et la duchesse, «qui doulcement le recoeilla.» Mais personne ne devinait le but de la visite. Il semble que le bon chroniqueur ait espéré que le grand politique, par vanité, ou pour l'amour des chroniques, lui en dirait davantage: «Et moy, acteur de ces cronicques, desirant sçavoir et avoir matières véritables pour le parfait de mon euvre, prins congié au duc de Bourgoigne, adfin de aller jusques à Callaix, lequel il me ottroia, pource qu'il estoit bien adverty que ledit comte de Warewic m'avoit promis que, si je le venois veoir à Callaix, qu'il me feroit bonne chière, et me bailleroit homme qui m'adrescheroit à tout ce que je voldroie demander. Si fus vers lui, où il me tint IX jours en me faisant grant chière et honneur, mais de ce que je quéroies me fist bien peu d'adresse, combien qu'il me promist que se, au bout de deux mois, je retournoie vers luy, il me furniroit partie de ce que je requeroie. Et au congié prendre de luy, il me défrea de tous poins, et me donna une belle haquenée. Je veoie bien qu'il estoit embesongnié d'aulcunes grosses matières; et c'estoit le mariage quy se traitoit de sa fille au duc de Clarence... lesqueles se partirent V ou VI jours après mon partement, dedens le chastel de Callaix, où il n'avoit guères de gens. Si ne dura la feste que deux jours... Le dimence ensievent, passa la mer, pour ce qu'il avoit eu nouvelles que ceulx de Galles estoient sur le champ à grant puissance.» Jean de Vaurin (ou Vavrin) sire de Forestel, ms. 6759. Bibliothèque royale, vol. VI, fol. 275. Dans les derniers volumes de cette Chronique, Vaurin est contemporain, et quelquefois témoin oculaire. Ils méritent d'être publiés.
201: Édouard aimait ses aises et était dormeur, il fut pris au lit: «Quant l'archevesque fut entré en la chambre où il trouva le Roy couchié, il luy dit prestement: Sire, levez-vous. De quoy le Roy se voult excuser, disant que il n'avoit ancores comme riens reposé. Mais l'archevesque... luy dist la seconde fois: Il vous faut lever, et venir devers mon frère de Warewic, car à ce ne pouvez vous contrester. Et lors, le Roy, doubtant que pis ne luy en advenist, se vesty, et l'archevesque l'emmena sans faire grant bruit.» Ibidem, fol. 278. Dans la miniature, le prélat parle à genoux, fol. 277.
202: «Le duc de Bourgoigne escripvit prestement au mayeur et peuple de Londres; si leur fist avec dire et remonstrer comment il s'estoit alyez à eulx en prenant par mariage la seur du roy Édouard, parmi laquele alyance, luy avoient promis estre et demourer à toujours bons et loyaulx subjetz au roi Édouard... et s'ilz ne luy entretenoient ce que promis avoient, il sçavoit bien ce qu'il en devoit faire. Lequel, maisre de Londres, aiant recheu lesdites lettres du duc, assambla le commun de la Cité, et là les fist lire publiquement. Laquele lecture oye, le commun respondy, comme d'une voye, que voirement vouloient-ilz entretenir ce que promis lui ayoient, et estre bons subjetz au roy Édouard... Warewic, faignant qu'il ne sceust riens desdites lettres, dist un jour au roy que bon serroit qu'il allast à Londres pour soy monstrer au peuple et visiter la royne sa femme...» Vaurin, fol. 278. L'orgueil national semble avoir décidé tous les chroniqueurs anglais à supprimer le fait si grave d'une lettre menaçante et presque impérative du duc de Bourgogne. Ce qui confirme le récit de Vaurin, c'est que le capitaine de Calais fit serment à Édouard, dans les mains de l'envoyé du duc de Bourgogne, qui était Commines (éd. Dupont, I, 236). Le continuateur de Croyland, p. 552, attribue uniquement l'élargissement d'Édouard à la crainte que Warwick avait des Lancastriens, et au refus du peuple de s'armer, s'il ne voyait le roi libre. Polydore Virgile (p. 657), et les autres après lui, ne savent que dire: l'événement reste inintelligible.
203: Je crois avoir lu sur le tombeau d'un de ces Warwick, dans leur chapelle ou leur caveau: Regum nunc subsidium, nunc invidia. Je cite de mémoire.
204: Ce nom de Robin est encore populaire au XVe siècle. C'est celui que les communes du nord, soulevées en 1468, donnèrent à leur chef.—«A cap'tain, whom thei had named Robin of Riddisdale.» The Chronicle Fabian (in-folio, 1559), fol. 498. Vaurin a tort de dire: «Ung villain, nommé Robin Rissedale.» Bibl. royale, ms. 6759, fol. 276.
Sur le cycle de ballades, sur les transformations qu'y subit le personnage de Robin Hood, V. la très-intéressante dissertation de M. Barry, professeur d'histoire à la faculté de Toulouse.
205: C'était l'usage au border que, quand le cavalier avait tout mangé et qu'il n'y avait plus rien dans la maison, sa femme lui servait dans un plat une paire d'éperons.
206: Stow (p. 421) a recueilli ces traditions. Voir aussi Olivier de la Marche, II, 276.
207: La lettre du duc à sa mère est visiblement destinée à être répandue, une sorte de pamphlet.
208: Solem excidisse sibi e mundo putabant... Illud unum, loco cantilenæ, in ore vulgi... resonabat. Polyd. Vergil., p. 659-660.
209: Dès 1465, ils rappelaient Marguerite. (Croyland.)
210: L'élévation des parents de la reine, des Wideville, fut subite, violente; elle se fit surtout par des mariages forcés. Cinq sœurs, deux frères, un fils de la reine, raflèrent les huit héritages les plus riches de l'Angleterre. La vénérable duchesse Norfolk, à quatre-vingts ans, fut obligée de se laisser épouser par le fils de la reine (du premier lit), qui avait vingt ans. «Maritagium diabolicum,» dit un contemporain, et un autre outrageusement: «Juvencula octoginta annorum!»
211: On ne parlait de rien moins que de confisquer ce que le duc tenait de la couronne. Des commissaires étaient nommés pour saisir la Bourgogne et le Mâconnais. Archives de Pau, 5 janvier 1470.
212: Et celle d'un Jean de Chassa, qui porta contre le duc les plus sales, les plus invraisemblables accusations. Voir surtout Chastellain.
213: Deux mille le 18 février, et jusqu'à dix mille qu'il aurait conduits en personne. Lettre de l'évêque de Bayeux au roi. Warwick ajoute un mot de sa main pour confirmer cette promesse. Bibl. royale, mss. Legrand, 6 février 1470.
214: Édouard partit de Flessingue: «Adcompaigné d'environ XII C combatans bien prins.» Vaurin.—Tous anglais, dit l'anonyme de M. Bruce; dans son orgueil national, il ne parle pas des Flamands.—With II thowsand Englyshe men.»—Fabian est plus modeste: «With a small company of Fleminges and other... a thousand persons,» p. 502.—Polyd. Vergilius, p. 663: «Duobus millibus contractis.»—«IX, C. of Englismenne and three hundred of Flemmynges.» Warkworth, 13.
215: On avait envoyé en France une dame au duc de Clarence pour l'éclairer sur le triste rôle qu'on lui faisait jouer. Commines est très-fin ici: «Ceste femme n'étoit pas folle, etc.»
La source la plus importante est celle où personne n'a puisé encore, le manuscrit de Vaurin. L'anonyme anglais, publié en 1838, par M. J. Bruce (for the Cambden Society), n'en est qu'une traduction, ancienne il est vrai; c'est, mot à mot, Vaurin, sauf deux ou trois passages qui peut-être auraient blessé l'orgueil anglais. Par exemple, le traducteur a supprimé les détails du passage d'Édouard à York: il a craint de l'avilir en rapportant tant de mensonges. Le récit de Vaurin n'en est pas moins marqué au coin de la vérité. Son maître, le duc de Bourgogne, étant ami d'Édouard, il ne peut être hostile. V. surtout folio 307. Glocester y paraît déjà le Richard III de la tradition; pour sortir d'embarras, il n'imagine rien de mieux qu'un meurtre: «Et dist... qu'il n'estoit point aparant qu'ils peussent partir de ceste ville sans dangier, sinon qu'ils tuassent illec en la chambre...»
216: Entre les versions contradictoires, je choisis la seule vraisemblable: Montaigu avait déjà fait tout le succès d'Édouard, en le laissant passer.—«The marquis Montacute was prively agreid with king Edwarde, and had gotten on king Eduardes livery. One of the erle of Warwike his brether servant, espying this, fel upon hym, and killed him.» Warkworth, p. 16 (4o, 1839). Leland, Collectanea (éd. 1774), vol. II, p. 505.
217: Ces événements ont été tellement obscurcis par l'esprit de parti et par l'esprit romanesque, qu'il est impossible de savoir au juste comment périrent Henri VI et son fils; il est infiniment probable qu'ils furent assassinés. Warkworth (p. 21) ne dit qu'un mot, mais terriblement expressif: À ce moment, le duc de Glocester était à la Tour. Que la présence de Marguerite ait pu embarrasser Glocester et l'empêcher d'y tuer son mari, comme M. Turner paraît le croire, c'est une délicatesse dont le fameux bossu se fût certainement indigné qu'on le soupçonnât.—Avant de quitter les Roses, encore un mot sur les sources. Les correspondances de Paston et de Plumpton m'ont peu servi. Je n'ai fait nul usage du bavardage de Hall et Grafton, qui, trouvant les contemporains un peu secs, les délayent à plaisir; pas davantage d'Hollingshed, qui a dû peut-être son succès aux belles éditions pittoresques qu'on en fit, et dont Shakespeare s'est servi, comme d'un livre populaire qu'il avait sous la main.—Une source peu employée est celle-ci: The poetical work of Levis Glyn Cothi, a celebrated bard, who flourished in the reings of Henri VI, Edward IV, Richard III and Henri VIII. Oxford, 1837.
218: Charles VIII était né le 30 juin 1470. Je ne vois, à partir de cette époque, aucune année où son père aurait trouvé le temps d'écrire pour lui le Rosier des guerres. Ce livre élégant, mais plein de généralités vagues, ne rappelle guère le style de Louis XI. Il est douteux que celui-ci, en parlant de lui-même à son fils, ait dit: «Le noble roy Loys unziesme.» V. les deux mss. de la Bibl. royale.
219: Louis XI fait les mensonges les plus singuliers pour empêcher ce mariage. Il veut qu'on dise à son frère qu'il n'y trouverait «pas grand plaisir,» ni postérité: «M. du Bouchage, mon ami, si vous pouvez gagner ce point, vous me mettrez en paradis... Et dit-on que la fille est bien malade et enflée...» Duclos.
220: La France et la Guienne étaient déjà comme deux États étrangers, ennemis. V. le procès fait par Tristan l'Ermite à un prêtre normand qui revenait de Guienne. Archives du royaume, J. 950, 25 février 1471.
221: Son sceau n'est que trop significatif. On l'y voit assis avec la couronne et l'épée de justice: Deus, judicium tuum regi da, et justitiam tuum filio regis, ce qui doit se prendre ici dans un sens tout particulier; judicium peut signifier punition. V. Trésor de numismatique et glyptique, planche XXIII.
222: Cependant ni Seyssel, ni Brantôme, ne sont des témoins bien graves contre Louis XI; tout le monde connaît l'historiette du dernier, la prière du roi à la bonne Vierge, etc. M. de Sismondi reste dans le doute.—Il ne tient pas au faux Amelgard qu'on ne croye que Louis XI empoisonnait aussi les serviteurs de son frère. Bibl. royale, Amelgard, ms. II, XXV, 159 verso.
223: Hammer.
224: Morts de Douglas et Mar, Viane et Bianca, Bragance et Viseu, Clarence, etc., etc.
225: Ici Commines est bien habile, non-seulement dans la forme (qui est exquise, comme partout), mais dans son désordre apparent. Quand il a parlé de la grande colère du duc, de l'horrible affaire de Nesles, etc., il donne la cause de cette colère, qui est de n'avoir pu escroquer Amiens.—Sur Nesle, V. Bulletins de la Société d'histoire de France, 1834, partie II, p. 11-17.
226: D'autres lui font dire, quand il sort de la ville et la voit en feu, ces mélancoliques paroles (presque les mêmes que celles de Napoléon sur le champ d'Eylau): «Tel fruit porte l'arbre de la guerre!»
227: Le roi, dans son inquiétude, avait voué une ville d'argent. Il écrit qu'il ne mangera pas de chair que son vœu ne soit accompli. (Duclos.) Commines qui était au siége, mais parmi les assiégeants, ne sait rien de cet héroïsme populaire. Il n'est guère constaté que par les priviléges accordés à la ville et à l'héroïne. Ordonnances, XVII, 529.
228: Mort le 20 mars 1474. Ce puissant écrivain commence la langue imagée, laborieuse, tourmentée du XVIe siècle, langue souvent ridicule dans l'imitateur Molinet. Chastellain fut reconnu, de son vivant, pour le maître du style; on mettait sous son nom tout ce qu'on voulait faire lire. Cependant, chose bizarre, sa destinée fut celle de Charles le Téméraire; l'œuvre disparut avec le héros, morcelée, dispersée, enterrée dans les bibliothèques. MM. Buchon, Lacroix et Jules Quicherat en ont exhumé les lambeaux.
L'autre Bourguignon, Jean de Vaurin, me manquera aussi désormais; il s'arrête au moment où le rétablissement d'Édouard porte au comble la puissance du duc de Bourgogne. La dernière page de Vaurin est un remerciement d'Édouard à la ville de Bruges (29 mai 1471).
229: Documents Gachard, I, 222. Commines fait aussi, par trois fois, cette observation.
230: Depuis qu'il avait été leur prisonnier, il les haïssait. Quand ils firent amende honorable, le 15 janvier 1469, il les fit attendre «en la nege plus d'une heure et demi.» Documents Gachard, I, 204.
231: C'est une improvisation violente, à la Bonaparte. Le scribe de la ville d'Ypres doit l'avoir écrite au moment même où elle fut prononcée; on l'a retrouvée dans les Registres de cette ville.
232: Chastellain même, son chroniqueur d'office, et dans une chronique qui peut-être passait sous ses yeux, s'en plaint avec une noble douleur.—Les instructions du roi à ses ambassadeurs étaient bien combinées pour produire cet effet. Elles contiennent une énumération de tous les bienfaits de la France envers les ducs de Bourgogne; une telle accusation d'ingratitude prononcée dans cette occasion solennelle devant tous les serviteurs du duc, pouvait les refroidir à son égard, ou même les détacher de lui. Bibl. royale, mss. Baluze, 165, 17 mai, et dans les papiers Legrand, carton de l'année 1470. Ces papiers contiennent un autre pamphlet, fort hypocrite, sous forme de lettre au roi, contre le duc, qui «dimanche dernier... a prist l'ordre de la Jarretière: Hélas! s'il eust bien recogneu et pansé à ce que tant vous humiliastes que, à l'instar de Jésus-Christ qui se humilia envers ses disciples, vous qui estes son seigneur, allastes à Péronne à luy, il ne l'eust pas fait, et croy que (soulz correction) dame vertu de Sapience lui deffault...» Bibl. royale, mss. Gaignières, no 2895 (communiqué par M. J. Quicherat).
233: Archives générales de Belgique, Brabant, I, fol. 108, mandement pour contraindre les officiers de justice et de finance à rendre compte annuellement, 7 déc. 1470.
234: Cette ordonnance innove peu; elle régularise. Elle laisse subsister la mauvaise organisation par lances, chacune de cinq ou six hommes, dont deux au moins étaient inutiles; les Anglais, dans leur expédition de 1475 en France, supprimèrent déjà le plus inutile, le page.—L'ordonnance exige des écritures, difficiles à obtenir des gens de guerre: «le capitaine doit porter toujours un rolet sur lui... en son chapeau ou ailleurs.» Ni jeu, ni jurement. Trente femmes seulement par compagnie (il y en eut 1,500 au siége de Neuss, quelques mille à Granson).—Les ordonnances de 1468 et 1471 sont imprimées dans les Mémoires pour l'histoire de Bourgogne (no 1729, p. 283; celle de 1473 se trouve dans le Schweitzerische Geschichtforscher (1817), II, 425-463, et dans Gollut, 846-866).
235: Amelgard.
236: Les Allemands félicitent la Hollande du limon que lui apporte le Rhin. La Hollande répond que cette quantité énorme de vase, de sable (plusieurs millions de toises cubes, chaque année), exhausse le lit des rivières et augmente le danger des inondations. V. le livre de M. J. Op den Hoof (1826), et tant d'autres sur cette question litigieuse. La Prusse revendiquait la libre navigation jusqu'en mer; la Hollande soutenait que le traité de Vienne porte: jusqu'à la mer, et elle faisait payer à l'embouchure. Constituée en 1815 le geôlier de la France, elle a voulu être le portier de l'Allemagne; c'est pour cela qu'on l'a laissé briser.—Ce royaume n'ayant point la base allemande qui l'eût affermi (Cologne et Coblentz), ne présentait que deux moitiés hostiles. L'empire de Charles le Téméraire avait encore moins d'unité, moins de conditions de durée.
237: Rien n'indique qu'il eût encore sur tout cela une idée arrêtée. Il flotta entre des projets divers: royaume de Gaule Belgique, royaume de Bourgogne, vicariat de l'Empire. Le bohémien Podiebrad, pour 200,000 florins, se chargeait de le faire empereur; il y eut même un traité à ce sujet. (Lenglet.) Ce n'était peut-être qu'un moyen d'obliger Frédéric III à composer, en donnant le vicariat et le titre de roi, promis depuis longtemps, comme on le voit dans les lettres de Pie II à Philippe le Bon. Celui-ci, dans une occasion solennelle, dit qu'il eût pu être roi; il ne dit pas de quel royaume. (Du Clercq.) Je vois dans un manuscrit que, dès l'origine, Philippe le Hardi avait essayé timidement, tacitement, de faire croire que «La duchié de Bourgogne n'estoit yssue ne descendue de France, mais chief d'armes à part soy.» Bibliothèque de Lille, ms. E. G. 33, sub fin.—Ce duché indépendant devient royaume dans la pensée de Charles le Téméraire. Aux états de Bourgogne, tenus à Dijon en janvier 1473, il «n'oublia pas de parler du royaulme de Bourgogne que ceux de France ont longtemps usurpé et d'iceluy fait duchée, que tous les subjects doivent bien avoir à regret, et dict qu'il avoit en soy des choses qu'il n'appartenoit de sçavoir à nul qu'à luy.»—Je dois cette note a l'obligeance de feu M. Maillard de Chambure, archiviste de la Côte-d'Or, qui l'avait trouvée dans un ms. des Chartreux de Dijon.
238: Pour rendre le jeune duc plus odieux encore, on le mit en face de son vieux père, qui lui présenta le gant de défi. Tout le monde fut touché, Commines lui-même (IV, ch. I). Rien n'était plus propre à favoriser les vues du duc. V. l'Art de vérifier les dates (III, 184), qui est ici l'ouvrage du savant Ernst, et, comme on sait, fort important pour l'histoire des Pays-Bas.
239: Non sans contestation cependant, au moins pour constater le droit de choisir: «Entrèrent en division de sçavoir pour l'advenir qui estoit celuy qui debvoit estre prince et duc du pays. Les uns disoient M. le bâtard de Calabre... Les autres disoient: Non, nous manderons au vieux roy René... Non, disoient les autres, il n'est mye venu, ny aussy de la ligne, que à cause de madame Ysabeau, sa femme. Ils dirent: Qui prendrons-nous donc?...» Chronique de Lorraine. Preuves de D. Calmet, p. XLVIII.
240: Il y paraît aux Remontrances (si hardies) faictes au duc René II sur le reiglement de son estat, à la suite du Tableau de l'histoire constitutionnelle du peuple lorrain, par M. Schütz, Nancy, 1843.
241: Le duc fait savoir au roi d'Angleterre: «Que les princes d'Alemaigne, en continuant ce que nagaires ils ont mis avant touchant l'apaisement des différan d'entre le roy Loys et mondit seigneur... ont miz suz une journée de la cité de Mez, au premier lundi de décembre, et ont requis ledit roy Loys et mondit seigneur y envoyer leur députés, instruiz des droits que chascun deulx prétend.» Archives communales de Lille, E, 2; sans date.
242: Voir Commines, les preuves dans Lenglet, les documents Gachard, Diebold Schilling, etc.
243: Le duc remercia l'empereur d'avoir fait un si long voyage pour lui faire honneur. Frédéric, voyant qu'il voulait tirer avantage de cela, aurait répliqué, selon l'historien de la maison d'Autriche: «Les empereurs imitent le soleil; ils éclairent de leur majesté les princes les plus éloignés; par là ils leur rappellent leurs devoirs d'obéissance.» Fugger.
244: M. de Gingins affirme hardiment contre tous les contemporains, qu'il ne s'agissait pas de royauté (p. 158). V. ce qu'en dit l'évêque de Lisieux, qui était alors à Trèves, Amelg. exc. Amplissima Collectio, IV, 767-770.
245: Schreiber (Taschenbuch für Geschichte und Alterthum in Suddeutschland, 1840), p. 24, d'après le greffier de Mulhouse.
246: Olivier de la Marche, II, 227, Selon Trithème: «Ex rustico nobilis,» selon d'autres, d'une famille très-noble. Bâtard, peut-être, cela concilierait tout.
247: «Berne et Soleure l'accusaient surtout de faire périr leurs messagers pour prendre les dépêches.» La bataille de Morat, p. 7; brochure communiquée par M. le colonel May de Buren.—Tillier, Hist. de Berne, II, 204.
248: «Il disait aux gens de Mulhouse que leur ville ne serait jamais qu'une étable à vaches tant qu'elle serait l'alliée des Suisses, et que, si elle se soumettait au duc, elle deviendrait le Jardin des roses et la couronne du pays.» Diebold Schilling, p. 82. Rosgarten, qu'on a toujours mal entendu ici, est une allusion au Heldenbuch; il signifie la cour des héros, le rendez-vous des nobles, etc.
249: Sur cette affaire, la chronique la plus détaillée est celle de Nicolas Gering, que possède en ms. la Bibliothèque de Bâle (2 vol. in-folio, sur les années 1473-1479). Je dois cette indication à l'obligeance de M. le professeur Gerlach, conservateur de cette bibliothèque.
250: Tschudi; Ochs.
251: Je ne puis retrouver la source où M. de Barante a pris l'histoire des femmes mises nues en leur couvrant la tête, pour voir si les maris les reconnaîtront.
252: Telles sont à peu près les paroles que lui fait dire son savant apologiste, M. Schreiber, et qu'il a probablement tirées de quelque bonne source.
253: Tout ceci est exposé avec beaucoup de netteté, d'exactitude (matérielle), dans le très-érudit et très-passionné petit livre de M. le baron de Gingins-la-Sarraz. Descendu d'une noble maison toute dévouée à la Savoie et au duc de Bourgogne, il a pris la tâche difficile de réhabiliter Charles le Téméraire et d'en faire un prince doux, juste, modéré.
254: Schreiber, 43. Je me suis servi aussi, pour la chute d'Hagenbach, d'une chronique manuscrite de Strasbourg, dont le savant historien de l'Alsace, M. Strobel, a bien voulu me communiquer une copie.
255: La complainte est dans Diebold, p. 120. Je ne connais pas de plus pauvre poésie.
256: Sous le prétexte que, pour lui faire injure, il était venu: «Passez près du duc, ses gens tout vestus de jaune.» Olivier de la Marche. Il avoue qu'il fut chargé d'exécuter le guet-apens; son maître lui donna plusieurs fois ces vilaines commissions.
257: «Le roi sollicitoit fort de l'alonger, et qu'il feist à son aise en Alemaigne.» Commines.
258: Rymer. Ce traité fut accompagné d'un acte par lequel Édouard accordait à la duchesse sa sœur (c'est-à-dire aux Flamands qui s'autoriseraient de son nom), la permission de tirer de l'Angleterre des laines, des étoffes de laine, de l'étain, du plomb, et d'y importer des marchandises étrangères.
259: Lœhrer, Geschichte der stadt Neuss, 1840; ouvrage sérieux et fondé sur les documents originaux. Voir aussi une Histoire manuscrite du siége de Nuits, Bibliothèque de Lille, D. H. 18.
260: Chronicon magnum Belgicum, p. 411. Lœhrer, p. 143.
261: Les objections de Legrand à ceci (Hist. ms., livre XIX, p. 50) ne me paraissent pas solides. V. plus bas.
262: Lui-même admet cette supposition: «Et a bien intention d'en user en temps et lieu.» Instruction à M. de Montjeu, envoyé devers la seigneurie de Venise et le capitaine Colion. Bibl. royale, mss. Baluze, et la copie dans les Preuves de Legrand, carton 1474.
263: Neuf victoires sur Nuremberg, bien fatales à son commerce.
264: Loenrer.
265: Gachard.
266: Voir Rymer, et le détail dans Ferrerius, Buchanan, etc. V. aussi Pinkerton, sur le Louis XI écossais.
267: Dix princes arrivaient, quinze ducs ou margraves, six cent vingt-cinq chevaliers, les troupes de soixante-huit villes impériales. Le bon évêque de Lisieux ne peut contenir sa colère contre ces Allemands qui viennent chasser son maître. «C'étaient, dit-il, des rustres, des ouvriers fainéants, gloutons, paillards, piliers de cabarets, etc.»
268: Il y eut un combat, où chaque partie s'attribua la victoire. Le duc écrivit une lettre ostensible où il prétendait avoir battu les Allemands. (Gachard.)
269: Meyer voudrait faire croire que l'empereur partit le premier, ce qui est non-seulement inexact, mais absurde; l'empereur, en agissant ainsi, aurait laissé la ville à la discrétion du duc de Bourgogne.
270: Louis XI écrit, le 30 juin: «À Calais, il y a quatre ou cinq cents Anglais, mais ils ne bougent.» Preuves de Duclos, IV, 428.
271: Ce qui me porte à le croire, c'est que le roi d'Angleterre, qui certainement ne dut passer que des derniers, passa le 5 juillet et reçut le 6 la visite de la duchesse de Bourgogne, sa sœur. Commines dit lui-même qu'il avait cinq ou six cents bateaux plats; il est probable qu'il se trompe en disant que le passage dura trois semaines. Ibidem.
272: Le roi s'était assuré du duc de Bourbon en donnant sa fille aînée à son frère, Pierre de Beaujeu. Le duc étant malade, ce ne fut pas lui qui gagna la bataille, comme le prouve un arrêt du Parlement, 1499, cité par Baluze, Hist. de la maison d'Auvergne.
273: Il n'avait point négligé ce moyen. En avril 1473, il tenait à Dieppe le comte d'Oxford avec douze vaisseaux, pour les envoyer en Écosse, et faire encore par le Nord une tentative pour la maison de Lancastre; mais l'Écosse était sans doute déjà fortement travaillée par l'argent de l'Angleterre, comme il y parut l'année suivante par le mariage d'une fille d'Édouard avec l'héritier d'Écosse. (Paston, ap. Fenn.)
274: Eu devait être défendu, mais si Édouard passait en personne, dépêché, c'est-à-dire brûlé. Ceci prouve que le roi connaissait parfaitement d'avance le projet du connétable d'établir les Anglais dans une ou deux petites villes de la côte. Preuves de Duclos, IV, 426-429, lettre du roi, 30 juin 1475.
275: Et non un valet, comme on l'a toujours dit pour faire un roman de cette histoire. D'autres ne se contentent plus du valet, ils en font un laquais.—Le récit de Commines, admirable de finesse, de mesure, de propriété d'expression, méritait d'être respecté dans les moindres détails (sauf les changements qu'impose la nécessité d'abréger).—Il fut étonné, non de la condition, mais de la mine de l'envoyé, p. 349.
276: D'autant plus qu'il n'était guère sorti de plus grande armée d'Angleterre. Édouard fit en partant cette bravade: «Majorem numerum non optaret ad conquærendum per medium Franciæ usque ad portas urbis Romæ.» Croyland. Continuat., p. 558.
277: Zurita, Anal. de Aragon, t. IV, libr. XIX, c. XII. Voir aussi l'Hist. ms. de Legrand, fort détaillée pour les affaires du Midi, l'Histoire du Languedoc, etc.
278: Une lettre du comte de Foix au roi montre avec quelle légèreté il le traitait. Cette lettre, spirituelle et moqueuse, dut le blesser cruellement, en lui prouvant surtout que ses finesses ne trompaient personne. Il finit par lui faire entendre qu'il n'a pas le temps de lui écrire. Bibl. royale, ms. Legrand, carton de 1470, lettre du 27 septembre.
279: Dont le zèle alla jusqu'à prêter douze mille livres pour l'expédition. Bibl. royale, ms. Gaignières, 2895 (communiqué par M. J. Quicherat).
280: Le caractère bien connu de Louis XI porte à croire qu'il y eut trahison. Cependant, la seule source contemporaine qu'on puisse citer pour cet obscur événement, c'est le factum des Armagnacs eux-mêmes contre Louis XI, présenté par eux aux États généraux de 1484. Tout le monde a puisé dans ce plaidoyer. V. Histoire du Languedoc, livre XXXV, p. 47. Quant à la circonstance atroce du breuvage que la comtesse fut forcée de prendre, dont elle avorta et dont elle mourut deux jours après, elle n'est point exacte, au moins pour la mort, puisque trois ans après elle plaidait pour obtenir payement de la pension viagère que le roi lui avait assignée sur les biens de son mari. Arrêts du Parlement de Toulouse du 21 avril et du 6 mai 1476 (cités par M. de Barante).
281: Et ce ne fut pas un vain titre. Saint-Pol lui-même, venant se faire reconnaître à Rouen, parle «du grant povoir et commission que le Roy lui a donné à lui seul, y compris le povoir de congnoistre de ces cas de crime de lèze-majesté et autres réservez,» connaissance formellement interdite à l'échiquier.—En 1469, il fait lire une lettre du roi, «Nostre très-chier et très-amé frère le duc de Guienne nous a envoyé l'anel dont on disoit qu'il avoit espousé la duchié de Normandie... Voulons que en l'Eschiquier... vous monstrez et faictes rompre publiquement ledit anel.» Il y avait dans la salle une enclume et des marteaux. L'anneau ducal, livré aux sergents des huis, fut par eux, «voyant tous, cassé et rompu en deux pièces qui furent rendues à M. le connestable.» Registres de l'Échiquier, 9 nov. 1469. Une ancienne gravure représente cette cérémonie. Portefeuille du dépôt des mss. de la Bibliothèque royale. Floquet, Parlement de Normandie, I, 253.
282: Louis XI, qui n'était pas maître de sa langue, avait lui-même fait dire à Saint-Pol peu auparavant un mot qui n'était que trop clair: «J'ai de grandes affaires, j'aurais bon besoin d'une tête comme la vôtre.» Il y avait là un Anglais qui ne comprenait pas, le roi prit la peine de lui expliquer la plaisanterie. (Commines.)
283: Nicolas des Grands Moulins dedans (la tour) estoit, lequel joyeusement les os menoit avec ses clochettes (cliquettes?), en disant de bonnes chansons. Quand venoit le soir, les Bourguignons l'appeloient, disant: Hé! li canteur, hé! par foy, dis-nous une cansonette. À puissance de flèches tiroient, le cuidant tirer, mais jamais...» Chronique de Lorraine.
284: Il avait donné à Humbercourt un démenti qu'il avait peut-être oublié lui-même, mais qu'il retrouva dans ce moment décisif. Sa fierté, ses prétentions princières, l'audace qu'il eut plusieurs fois d'humilier ses maîtres, la légèreté avec laquelle on parlait dans sa petite cour du duc et du roi, ne contribuèrent pas peu à sa mort. Louis XI s'humilia devers lui jusqu'à consentir à avoir une entrevue avec lui, comme d'égal à égal, avec une barrière entre eux. (Commines.) Le roi lui reproche dans une lettre les propos de ses serviteurs: «Ils disent que je ne suis qu'un enfant, et que je ne parle que par bouche d'autrui.» (Duclos.)
285: Il ne se justifia que sur un point, l'attentat à la vie du roi; il avait toujours témoigné de la répugnance à ce sujet. Du reste, il était l'auteur du plan proposé au duc alors devant Neuss; le duc eût été régent et le duc de Bourbon son lieutenant; on eût pris le roi et on l'eût mis à Saint-Quentin, sans lui faire mal pourtant, et en lieu où il fût bien aise. Le connétable avait dit qu'il y avait «douze cents lances de l'ordonnance du roi qui seroient leurs.» Bibliothèque royale, fonds Cangé, ms. 10,334 f. 248-251. Selon un témoin, le duc de Bourbon aurait répondu à ces propositions: «Je fais veu à Dieu que sy je devois devenir aussi pauvre que Job, je serviray le Roy du corps et de biens et jamais ne l'abandonneray, et ne veult point de leur alliance.» Bibliothèque royale, fonds Harlay, mss. 338, page 130.—Voir le Procès ms. aux Archives du royaume, section judiciaire, et à la Bibliothèque royale.
286: Lire l'exécution dans Jean de Troyes, nov. 1475, et le portrait que Chastellain a fait de cet homme en qui l'ambition gâta tant de beaux dons de la nature, passim, et le fragment édité par M. J. Quicherat, Bibl. de l'École des chartes, 1842. Paris applaudit à l'exécution; on y avait beaucoup souffert de ses pilleries. V. la complainte. Je me rappelle avoir vu une lettre de rémission accordée par le roi à un archer de Saint-Pol pour le meurtre d'un prêtre; il y détaille toutes les circonstances aggravantes, de manière à faire détester l'homme puissant qui arrachait une grâce si peu méritée. Archives du royaume, Registres du Trésor des chartes.
287: Commines prétend que le duc lui donna un sauf-conduit.
288: Il promit de rappeler les bannis, d'épargner les biens des partisans de René, de payer les dettes de son ennemi, etc.—V. dans Schutz (Tableau, etc., p. 82) la «Requeste présentée par les estats du duché de Lorraine, à Charles, duc de Bourgogne.» J'y trouve cette noble parole: «Et si ledict duché n'est de si grande extendue que beaucoup d'autres pays, si a de la souveraineté en soy, et est exempt de tous autres.»
289: La chronique, à demi rimée, de Lorraine, lui fait dire: «À l'ayde de Dieu céans une notable maison ferai; j'ai volonté d'icy demeurer, et mes jours y parfiner. C'est le pays que plus désirois... Je suis mainctenant emmy mes pays, pour aller et pour venir. Ici tiendrai mon estat... De tous mes pays, ferai tous mes officiers venir icy rendre compte.»
290: «Zu schmach und abfall ganzer Teutchen nation.» Diebold Schilling, p. 130.
291: Lire en entier ce discours, vraiment éloquent (d'autant plus irritant). Documents Gachard, I, 249-270.
292: «Ingrati animi causâ.» Ce passage et le précédent sur le crime de lèse-majesté, montrent qu'il était imbu du droit romain et des traditions impériales. Plusieurs de ses principaux conseillers, comme je l'ai dit, étaient des légistes comtois et bourguignons. Voir, à la Pinacothèque de Munich, la ronde et dure tête rouge de Carondelet.
293: Les Flamands appelaient souvent les gros bourgeois, Mangeurs de foie, «Jecoris esores.» V. notre tome VII, ann. 1436, et Meyer, fol. 291.
294: Le chiffre total des recettes et dépenses que M. Edward Le Glay me communique (d'après les Archives de Lille), n'indique pas d'augmentation considérable, parce qu'il ne donne que l'ordinaire. L'extraordinaire était accablant. Outre les droits sur les grains et denrées qu'il établit en 1474, trente mille écus qu'il leva pour le siége de Neuss en 1474, il déclara, le 6 juin de cette année, que tous ceux qui tenaient des fiefs non nobles auraient à venir en personne à Neuss, ou à payer le sixième de leur revenu (Archives de Lille). En juillet, il demanda le sixième de tous les revenus en Flandre et en Brabant. La Flandre refusa, et il n'obtint par menaces que 28,000 couronnes comptant, et 10,000 ridders par an, pendant trois ans (communiqué par M. Schayez, d'après les Archives générales de Belgique).
295: «Plusieurs bons personnages... qui, de mon temps et moy présent, avoient aydé à desmouvoir ledict duc Charles, lequel vouloit destruire grant partie de ladicte ville de Gand.» Commines.
296: On disait, entre autres choses, que Philippe le Bon s'étant dispensé d'aller à la croisade sous prétexte de santé (pour faire plaisir à sa femme et autres dont les maris partaient), le pape indigné le maudit, lui et les siens, jusqu'à la troisième génération. (Reiffenberg, d'après le Defensorium sacerdotum, de Scheurlus.)
297: «Et pour aller prendre la possession du dict pays, estoit allé M. de Chasteau-Guyon.» Commines.
298: Les Suisses croyaient qu'il avait demandé à l'empereur, dans l'entrevue de Trêves, le duché de Savoie. (Diebold Schilling.)
299: Tels que Campobasso, Galeotto. Il avait à son service d'autres méridionaux, un médecin italien, un médecin et un chroniqueur portugais, etc.
300: Trois semaines au plus avant la bataille de Granson, selon Commines.
301: Les enclavements et les enchevêtrements des fiefs dans les pays romans sont très-nettement expliqués par M. de Gingins, p. 39, 40.
302: On ne savait pas trop encore de quel côté il allait tourner. La ville de Strasbourg fit de formidables préparatifs de défense. Chronique ms. de Strasbourg, communiquée par M. Strobel.
303: Pour apprécier cette forte et rude race, voir à la bibliothèque de Berne le portrait de Magdalena Nageli, avec son chaperon et ses gros gants de chamois. L'ennemi de son père, qui la vit laver son linge à la fontaine, fit la paix sur-le-champ, afin de pouvoir épouser une fille si robuste; elle lui donna en effet quatre-vingts enfants et petits-enfants.
304: Mallet, X, p. 50. V. aussi Berchtold, Fribourg, I, 367.
305: Berne écrivait au sujet de l'Alsace: «Délaisserons-nous ce bon pays, qui jusqu'ici nous a donné tant de vin et de blé?» Diebold Schilling.
306: Les nobles entraient dans les abbayes des bouchers, tanneurs, etc., pour devenir éligibles aux charges municipales. V. Bluntschli, Tillier, II, 455, sur ces corporations, la chambre au singe, la chambre au fou, etc., sur la noblesse des fenêtres, ainsi nommée parce que pour constater son blason récent elle le mettait dans les vitraux qu'elle donnait aux églises, aux chapelles et chambres de confréries. Les Diesbach, qui avaient été marchands de toile, obtinrent de l'empereur de substituer à leur humble croissant deux lions d'or. Les Hetzel, de bouchers qu'ils étaient, devinrent chevaliers, etc. Tillier, II, 484, 486.
307: La position de ces grands seigneurs était fort analogue à celle du comte de Saint-Pol. Jacques de Savoie avait épousé une petite-fille de Saint-Pol, et se trouvait, pour les biens de sa femme, vassal du duc en Flandre et en Artois.
308: Muller; Tillier.
309: On essaya de les secourir: «Mais possible ne fut de tendre main ne nourriture aux pauvres assaillis... Si furent contraints de revenir gémissants.» Hugues de Pierre, chanoine et chroniqueur en titre de Neufchâtel, page 27. (Extraits des chroniques, faits par M. de Purry, Neufchâtel, 1839; V. aussi ce qu'en ont donné Boyve, Indigénat Helvétique, et M. F. Du Bois, Bataille de Granson, Journal de la Société des antiquaires de Zurich). Que ne puis-je citer ici les dix pages que M. de Purry a sauvées! Dix pages, tout le reste est perdu... Je n'ai rien lu nulle part de plus vif, de plus français.
310: V. surtout Berchtold, Fribourg, I, 573.—Gingins excuse le duc et veut croire qu'il était absent, parce que ce jour même il alla à trois lieues de là. Les deux serviteurs du duc, Olivier et Molinet, s'inquiètent moins de la gloire de leur maître; ils disent tout net qu'il les fit pendre.
311: «Arrivent à Neufchastel à grands sauts, avecque chants d'allégresse et formidable suitte (seize mill, disoit l'un, vingt mill, disoit l'autre), touts hommes de martials corpsages, faisant peur et pourtant plaisir à voir.» Le chanoine Hugues de Pierre.—Le dernier trait est charmant: le brave chanoine a peur de ses amis. Il essaye d'écrire ces noms terribles, Suitz, Thoun, mais bientôt il y renonce: «Desquels ne peut-on facilement se ramentevoir le nom.»
312: Cette bataille, fort obscure jusqu'ici, devient très-claire dans l'utile travail de M. Frédéric Dubois (Journal des antiquaires de Zurich), qui a reproduit et résumé toutes les chroniques, Hugues de Pierre, Schilling, Etterlin, Baillot et l'anonyme.—Le chanoine Hugues, qui était tout près et qui a eu peur, est le plus ému; il tressaille d'aise d'en être quitte. Les braves qui ont combattu, Schilling et Etterlin, sont fermes et calmes. L'anonyme, qui écrit plus tard, charge et orne à sa manière. V. le ms. cité par M. F. Dubois, p. 42.
313: Observation essentielle que me communique le savant et vénérable M. de Rodt, qui traitera tout ceci en maître dans le volume que nous attendons. Je lui dois encore plusieurs détails puisés dans le récit ms. d'un témoin oculaire, l'ambassadeur milanais Panicharola.
314: Récit ms. de Panicharola (communiqué par M. de Rodt).
315: Le duc fut entraîné dans la déroute. Son fou, le Glorieux, galopait, dit-on, près de lui, et il aurait osé dire à cet homme terrible et dans un tel moment: «Nous voilà bien Hannibalés!» Le mot n'est guère probable. Cependant, il paraît que Charles le Téméraire, qui n'aimait personne, aimait son fou. Je vois qu'en 1475, au milieu de ses plus grands embarras d'argent, il voulut lui faire un présent qui ne lui coûtât rien; il invita ses barons et les dames de sa cour à lui donner une chaîne d'or. Ils aimèrent mieux lui donner chacun quatre nobles à la rose. (Cibrario.) Voir Jean-Jacques Fugger, Miroir de la maison d'Autriche.
316: Six cents Bourguignons et vingt-cinq Suisses, selon les Alsaciens. Chronique ms. de Strasbourg (communiquée par M. Strobel).
317: Les Fugger furent seuls assez riches pour acheter le gros diamant (qui avait orné la couronne du Mogol), et le splendide chapeau de velours jaune, à l'italienne, cerclé de pierreries. État de ce qui fut trouvé au camp de Granson, 1790, 4o. M. Peignot en a donné l'extrait dans ses Amusements philologiques.
318: Notre greffier de Paris le sent à merveille. Il lui échappe un petit cri de joie quand il voit le duc: «Fuyant sans arrester, et souvent regardoit derrière luy vers le lieu où fut faicte sur lui ladite destrousse, jusques à Joigné, où il y a huict grosses lieuës, qui en valent bien seize de France la jolie, que Dieu saulve et garde.» Jean de Troyes.
319: Philippe de Bresse s'empara d'un projet écrit de la propre main du duc de Bourgogne, dans lequel il ordonnait à M. de Châteauguyon de lever des troupes en Piémont pour assurer l'invasion de la Provence qu'il méditait. L'original fut envoyé à Louis XI. (Villeneuve Bargemont.)
320: Mathieu conte que René, ne pouvant accorder son neveu Charles du Maine et son petit-fils René II, jeta une épaule de mouton à deux chiens qui se bataillèrent, et alors on lâcha un dogue qui enleva le morceau disputé.—Du temps de Mathieu, on voyait encore cet emblème en relief dans une chaire de l'oratoire de René, à Saint-Sauveur d'Aix.
321: C'était sa création des foires de Lyon qui l'avait brouillé avec la Savoie. Il montrait cette résurrection du commerce lyonnais comme son ouvrage. Le commerce avait déserté les foires de Genève; les marchands ne s'y arrêtaient plus, ils traversaient la Savoie en fraude pour arriver à Lyon. De là des violences, des saisies plus ou moins légales. De là la fameuse histoire des peaux de mouton saisies, que Commines s'amuse à donner pour cause de cette guerre, afin d'en tirer la fausse et banale philosophie des grands effets par les petites causes.—M. de Gingins le rectifie très-bien. Sur la guerre des foires de Lyon et de Genève. V. Ordonnances, t. XV, 20 mars, 8 octobre 1462, et XVII, nov. 1467.
322: «En soy retournant dudit Lyon, fist venir après luy deux damoiselles dudit lieu jusques à Orléans, dont l'une estoit nommée la Gigonne, qui aultrefois avoit esté mariée à un marchant dudit Lyon, et l'autre estoit nommée la Passe-Fillon, femme aussi d'un marchant dudit Lyon. Le roi maria Gigonne à un jeune fils natif de Paris, et au mary de Passe-Fillon donna l'office de conseillier en la Chambre des comptes à Paris.» Jean de Troyes p. 40-41.
323: Commines place cette maladie trop tard. Il est bien établi par Schilling et autres contemporains qu'il l'eut à Lausanne, c'est-à-dire après le premier revers.
324: Dès le commencement, en 1475, Berne eut beaucoup de peine à entraîner Unterwald. En 1476, les habitants même de la campagne de Berne se décidèrent difficilement à prendre part à cette expédition de Morat, qui promettait peu de butin. Stettler, Biographie de Bubenberg. Tillier, II, 289.
325: La tradition veut qu'il ait dit: «Je déjeunerai à Morat, je dînerai à Fribourg, je souperai à Berne.» Berchtold.
326: On en avait brûlé dix-huit à Bâle, comme coupables de sacriléges, de viols, etc., d'hérésies monstrueuses: «Ce qui fut non-seulement agréable à Dieu, mais bien honorable à tous les Allemands, comme preuve de leur haine pour telles hérésies.» Diebold Schilling, p. 144.
327: Strasbourg et Schélestadt en rouge (Strasbourg rouge et blanc, selon le ms. communiqué par M. Strobel), Colmar rouge et bleu, Waldshut noir, Lindau blanc et vert, etc. Chant sur la bataille d'Héricourt, dans Schilling, p. 146.
328: La chronique de Lorraine (Preuves de D. Calmet, p. LXVI-LXVII), contient des détails touchants, un peu romanesques peut-être, sur la misère du jeune René, entre son faux ami Louis XI et son furieux ennemi, sur son dénûment, sur l'intérêt qu'il inspirait, etc.
329: Quand il entra à Lyon, les marchands allemands ayant demandé d'avance quelle livrée il portait (blanc, rouge et gris), ils la prirent tous, les chapeaux de même, et à chacun trois plumes de ces couleurs.
330: «Elle vit que son beau fils et ses gens n'estoient point vestus de soye; elle appela son maître d'hostel, disant: Prenez or et argent: allez à Rouen acheter force velours et satin, et tost revenez. Le maistre d'hostel ne faillit mye, assez en apportit... Ladite dame, voyant que le duc estoit en grand soutcy, lui dict: Mon beau fils, ne vous esbahissez mye; se vostre duchié perdu avez, j'ay là, Dieu mercy, assez pour vous entretenir. Respondit le duc: Madame, et belle-mère grande, encore ay espérance... La bonne dame à luy se descouvra, elle sy vielle et fort malade, lui disant: Vous voyez, mon beau fils, en quel estat je suis; je n'en peux plus; mourir me convient maintenant; tous mes biens vous mets en main, et sans faire testament... Le duc ne la volt mye refuser, puisqu'ainsy son plaisir estoit; aussy c'estoit son vray hoirs.» Chronique de Lorraine.
331: On faisait des récits de la bonté du jeune prince: Un prisonnier bourguignon se plaignait de manquer de pain depuis vingt-quatre heures: «Si tu n'en as pas eu hier, dit René, c'est par ta faute; falloit m'en dire; ainsi seroit la mienne, si en manquoit en avant.» Et il lui donna ce qu'il avait d'argent sur lui. (Villeneuve Bargemont.)
332: De là, poursuivant son voyage, il entre en pays allemand; tous les seigneurs, etc., viennent le joindre, et le chroniqueur qui le suivait, se dédommage de sa misère et de ses jeûnes, en contant tout au long l'abondance de cette bonne cuisine allemande, les vins, les victuailles; il demande aux Allemands si c'est ainsi qu'ils vivent tous les jours, etc.
333: Les deux vaillants greffiers de Berne et de Zurich, qui combattirent et écrivirent ces beaux combats, Diebold et Etterlin, en ont le souffle encore, la sérénité magnanime des forts dans le péril.—V. Tillier, Mallet, etc. Guichenon (Histoire de Savoie, I, 527) dit à tort que Jacques de Romont commandait à Morat l'avant-garde des Bourguignons.
334: Le tout puissant doyen des bouchers portait la bannière de Berne.
335: C'est l'opinion commune, celle de Commines. Le chanoine de Neufchâtel dit que les Suisses avaient quarante mille hommes. M. de Rodt, d'après des données qu'il croit sûres, leur en donne seulement vingt-quatre mille.
336: Si l'on adopte ce chiffre moyen entre les versions opposées.
337: Il y a ce mot féroce dans le chant de Morat: «Beaucoup sautaient dans le lac, et pourtant n'avaient pas soif.» Diebold Schilling. Ce chant naïvement cruel du soldat ménétrier, Veit Weber, qui lui-même a fait ce qu'il chante, ressemble peu dans l'original à la superbe poésie (moderne en plusieurs traits) que Koch, Bodmer, et en dernier lieu Arnim et Brentano, ont imprimée: Desknaben Wunderhorn (1819), I, 58. MM. Marmier, Loeve, Toussenel, etc., ont traduit dans la Revue des Deux-Mondes (1836), et autres recueils, les chants de Sempach, Héricourt, Pontarlier, etc., qu'on retrouve dans divers historiens, principalement dans Tschudi et Diebold.
338: Que nous détruisîmes en passant (1798). Le lac rejette souvent des os, et souvent les remporte. Byron acheta et recueillit un de ces pauvres naufragés, ballottés depuis trois siècles.
339: Pour croire, avec M. de Gingins, que cet enlèvement était concerté entre le duc de Bourgogne et la duchesse elle-même, afin de ménager les apparences à l'égard du roi, il faut oublier entièrement le caractère du duc.
340: Courte-Épée et Barante-Gachard, II, 525. La recette, sans y comprendre la monnaie ni les aides, s'était élevée, dans les seules années dont nous ayons le compte (1473-4), à 81,000 livres. Communiqué par M. Garnier, employé aux Archives de Dijon.
341: Nous n'avons pas tout dit. Mais la Zélande, dès 1472, s'était révoltée contre les taxes, et Zierickzée n'avait pu être réduite que par des exécutions sanglantes. Documents Gachard, II, 270. «En 1474, le clergé de Hollande refusa d'une manière absolue de rien payer de ce que le duc demandait, etc. (Communiqué par M. Schayez, d'après les Archives générales de Belgique.)
342: Barante-Gachard.
343: Cette fatigue précoce, après Van Eyck, après le premier moment de la Renaissance, s'exprime dans les peintures mélancoliques d'Hemling; c'est une réaction mystique, après l'élan de la nature. Autant le premier est jeune et puissant, autant le second est rêveur. Van Eyck est le vrai peintre de Philippe le Bon, le peintre de la Toison et des douze maîtresses. Hemling (c'est du moins la tradition brugeoise) a suivi, tout jeune, le duc Charles dans sa malheureuse guerre de Granson et de Morat, il est revenu malade, et soigné à l'hôpital de Bruges; il y a laissé son Adoration des Mages, où l'on croit le voir coiffé du bonnet des convalescents. Puis, vient son Apothéose de sainte Ursule (véritable transfiguration de la femme du Nord), en mémoire des bonnes béguines qui l'avaient soigné. V. Ursula, par Keversberg.—Quiconque regardera longtemps (à la Pinacothèque de Munich ou dans les gravures) la suite de ces pieuses élégies y entendra la voix du peintre, la plainte du XVe siècle.
344: De là sans doute aussi ce goût pour l'art qui réveille le plus en nous le sens de l'infini, je veux dire pour la musique. Ce goût, qui surprend dans un homme si rude, lui est attribué par tous les contemporains. Chastellain, Thomas Basin, etc.
345: Il n'est pas exact de dire qu'il ne fit rien. Voir les lettres violentes qu'il écrivait, celle entre autres au fidèle Hugonet, où il le menace de reprendre sur son bien l'argent qu'il a employé à payer les garnisons, que les États devaient payer. Bibl. royale, mss. Béthune, 9568.
346: Charles VI, Henri VI, Guillaume l'insensé, etc., etc.
347: L'irréprochable Adrien de Bubenberg reçut du roi cent marcs d'argent (les autres envoyés en eurent chacun vingt), et il n'en fut pas moins, au retour, ce qu'il avait toujours été, le chef du parti bourguignon.—Der Schweitzerische Geschichtforscher, VII, 195. Le biographe de Bubenberg croit à tort qu'il reçut le collier de Saint-Michel (observation de M. J. Quicherat).
348: «Ung grand bon homme, que tanneur estoit, lequel par la communaulté pour l'année maistre échevin estoit... lequel, quand au conseil fut, commença à dire: Vous tous, messeigneurs, voyés comment vecy ce jeune prince, le duc René, qui nous a si loyaument servi...» Preuves de D. Calmet.
349: «Avec luy avoit ung ours que toujours le suyvoit, quand le duc au conseil venoit. Ledit ours, quand à l'huis vint, commença à gratter, comme s'il vouloit dire: Laissés-nous entrer. Lesdicts du conseil lui ouvrirent.—Preuves de D. Calmet, p. XCIII. L'ours est bien moins courtisan dans un récit plus moderne, qui gâte la scène: «Donna deux ou trois coups de patte, d'une telle roideur...» Discours des choses avenues en Lorraine. Schweitzerische Geschichtforscher, V, 129-131.
350: À Bâle, au moment de partir, la paye faite, ils demandent la parpaye, un complément de solde, 1,500 florins. Grand embarras; la prudente ville de Bâle ne prêtait pas sur des conquêtes à faire, un seigneur allemand emprunta pour René, en laissant ses enfants en gage. Restait à donner le trinkgeld, une pièce d'or par enseigne; René trouva encore ce pourboire et partit à la tête des Suisses, à pied, vêtu comme eux et la hallebarde sur l'épaule. Ce n'est pas tout, la plupart voulaient aller par eau; les voilà en désordre, soldats ivres et filles de joie, qui s'entassent dans de mauvais bateaux. Le Rhin charriait; les bateaux s'ouvrent et beaucoup se noient. Ils s'en prennent à René, qui est obligé de se cacher: «Si vous eussiez lors ouy le bruit du peuple, comme il maudissoit Monseigneur et ses gens, comme malheureux!...»—Dialogue de Joannes et de Ludre, source contemporaine, et capitale pour cette époque. La Bibliothèque de Nancy en possède le précieux original (qu'on devrait imprimer), la Bibl. royale en a une copie dans les cartons Legrand.
351: Avec cela point de paye, mais des paroles dures, des châtiments terribles. Un capitaine avait dit: «Puisqu'il aime tant la guerre, je voudrais le mettre au canon et le tirer dans Nancy.» Le duc l'apprit et le fit pendre. Chronique ms. d'Alsace, communiquée par M. Strobel.
352: «Il ne s'en use point en nos guerres, qui sont assez plus cruelles que la guerre d'Italie et d'Espaigne, là où l'on use de ceste coustume.» Commines, v. V, ch. VI, t. II, p. 48.
353: La chronique de Lorraine, contraire à toutes les autres, prétend que Campobasso voulait le sauver: «Dict le comte de Campobasso; Monsieur, il a faict, comme loyal serviteur... Le duc, quand il vit que ledict comte ainsi fièrement parloit, le duc armé estoit, en ses mains ses gantelets avoit, haulsa sa main, audict comte donna ung revers.» Preuves de D. Calmet, p. XCIII. Il ne faut pas oublier que Campobasso étant devenu, par sa trahison, un baron de Lorraine, le chroniqueur lorrain a dû s'en rapporter à lui sur tout cela.
354: Il offrait ou de le quitter en pleine bataille, ou de l'enlever quand il visitait son camp, enfin de le tuer. C'était, dit Commines, une terrible ingratitude. Le duc l'avait recueilli, déjà vieux, pauvre et seul, et lui avait mis en main cent mille ducats par an, pour payer ses gens comme il voudrait. Il l'avait réduit, il est vrai, après l'échec de Neuss; mais depuis, il s'était plus que jamais livré à lui; au siége de Nancy, Campobasso conduisait tout. L'insistance extraordinaire qu'il mettait dans l'offre de tuer son maître devint suspecte au roi, et il avertit le duc. Commines aurait bien envie de nous faire croire ici à la délicatesse de Louis XI: «Le Roy, dit-il, eut la mauvaistié de cest homme en grant mespris.»
355: Ce bon roi avait pensé qu'il lui serait facile de réconcilier le duc avec Louis XI, et que celui-ci l'aiderait alors contre la Castille. V. Commines et Zurita.
356: Note communiquée par M. Schayez, d'après les Archives générales de Belgique.
357: Nommons parmi ceux-ci l'italien Galeotto, qu'il avait pris récemment à son service, et qui fut blessé grièvement. On le confond souvent avec Galiot Genouillac, gentilhomme de Quercy, qui, sous Louis XII et François Ier, fut grand maître de l'artillerie de France (observation de M. J. Quicherat).
358: Il faudrait donner ici l'histoire des Beydaels, rois et hérauts d'armes de Brabant et de Bourgogne, tous, de père en fils, tués en bataille: Henri, tué à Florennes en 1015; Gérard, tué à Grimberge en 1143 (c'est lui qui, à cette bataille, fit suspendre dans son berceau son jeune maître le duc de Brabant); Henri II, tué à Steppes en 1237; Henri III, tué en 1339 en combattant Philippe de Valois; Jean, tué à Azincourt en 1415; Adam Beydaels, enfin, tué à Nancy... Superbe histoire, uniformément héroïque, et qui montre sur quels nobles cœurs ces hérauts portaient le blason de leurs maîtres. V. Reiffenberg.
359: Je tire tous ces détails des deux témoins oculaires, l'aimable et vif auteur de la Chronique de Lorraine, qui semble avoir écrit après l'événement, et le sage écrivain qui (vingt-trois ans après) a consigné ses souvenirs dans le Dialogue de Joannes et de Ludre. Le premier (Preuves de D. Calmet) est jeune évidemment, d'un esprit un peu romanesque; il met en dehors et ramène sans cesse son amusante personnalité; c'est toujours lui qui a dit, qui a fait... Il tâche de rimer, tant qu'il peut, et ses rimes naïves valent parfois les rudes chants suisses, conservés par Schilling et Tschudi.—Quant à l'auteur du Dialogue, M. Schütz en a cité un fragment assez long, dans les notes de sa traduction de la Nancéide. Ce poëme de Blarru est aussi une source historique, quoique l'histoire y soit noyée dans la rhétorique; rhétorique chaleureuse et animée d'un sentiment national parfois très-touchant.
360: «L'un gros et l'autre clair.» Chronique de Lorraine.»Ledit cor fut corné par trois fois, et chacune tant que le vent du souffleur pouvoit durer, ce qui, comme l'on dit, esbahit fort M. de Bourgoigne, car déjà à Morat l'avoy ouy.» La vraye déclaration de la bataille (par René lui-même?). Lenglet.
361: C'est ce que fait comprendre parfaitement l'inspection des lieux.
362: «Ay congneu deux ou trois de ceux qui demourèrent pour tuer ledict duc.» Commines. Il ajoute un mot froid et dur sur ce corps dépouillé, qu'il avait vu souvent habiller avec tant de respect par de grands personnages: «J'ay veu à Milan un signet (un cachet) que maintesfois avois veu pendre à son pourpoint... Celluy qui le lui osta luy fut mauvais varlet de chambre...»
363: On a continué jusqu'aujourd'hui de paver en pierre noire la place où le corps fut posé dans la rue, avant de passer le seuil; corps que l'on croirait gigantesque comme celui de Charlemagne, si l'on en jugeait par la place, qui est de huit pieds.
364: Dialogue de Ludre.
365: René institua une fête à Nancy en souvenir de sa victoire; on y exposait l'admirable tapisserie (V. les gravures dans M. Jubinal); le duc venait trinquer à table avec les bourgeois, etc. Noël, Mémoires pour servir à l'histoire de Lorraine, cinquième mémoire, d'après l'Origine des cérémonies qui se font à la fête des Rois de Nancy, par le père Aubert Rotland, cordelier.
366: Molinet. La chronique de Praillon conte qu'en 1482 un homme disait que le duc n'était pas mort, et qu'il n'était pas «d'un cheveu plus gros, ni plus grand que lui.» L'évêque de Metz le fit arrêter, mais, après un entretien secret, il le traita bien, ce qui persuada qu'en effet c'était le duc de Bourgogne. (Huguenin jeune.)
367: Molinet, II, 124. Voir le portrait de main de maître qu'en a fait Chastellain et que j'ai cité plus haut; comparer celui que donne un autre de ses admirateurs, Thomas Basin, évêque de Lisieux (le faux Amelgard), cité par Meyer, Annales Flandriæ, p. 37.
Deux grands et aimables historiens, Jean de Muller et M. de Barante ont raconté tout ceci avec plus de détail. Ils ont voulu être complets, et ils le sont trop quelquefois. J'ai mieux aimé m'attacher à un petit nombre d'auteurs contemporains, témoins oculaires ou acteurs. Muller a le tort de donner parfois, à côté des plus graves témoignages, les on-dit de la Chronique scandaleuse et autres, peu informées des affaires de Suisse et d'Allemagne.
368: Tout le monde connaît ces beaux passages de Commines, le pénétrant regard que le froid et fin Flamand jette sur son maître et sur tous, dans le moment où la joie déborde, où toute réserve échappe; Montaigne n'eût ni vu, ni dit autrement: «À grant peine sceut-il quelle contenance tenir... Moy et aultres prinsmes garde comme ils disneroient... ung seul ne mangea la moytié de son saoul; si, n'estoient-ils point honteux de manger avec le Roy, etc.»
369: Mariage plus impossible encore que celui d'Angleterre, qui était impossible, au jugement de Louis XI (Commines); Élisabeth avait quatre ans de plus que le dauphin, Marie en avait douze!
370: Huit jours encore auparavant, il y songeait encore, ou bien imaginait de marier Mademoiselle à M. d'Angoulême. C'était, en quelque sorte, recommencer la maison de Bourgogne.
371: Payé «en or sol, car en aultre espèce ne donnoit jamais argent à grands seigneurs étrangers.» Commines. Il avait fait frapper tout exprès des écus au soleil, depuis le traité de Pecquigny. (Molinet.)
372: Il périt un an après, 17 février 1478.
373: Naturellement suspect à Louis XI en cette affaire, parce qu'il était parent de la dame de Commines, principale gouvernante de Mademoiselle, et très-contraire au roi. Généalogie ms. des maisons de Commines et d'Hallewin, citée par M. Le Glay, dans sa Notice, à la suite des Lettres de Maximilien et de Marguerite, II, 387.
374: Lire une sorte de plaidoyer en faveur de la succession féminine, sous le titre de Chronique de la duché de Bourgogne: «Pour obéir à ceux qui sur moy ont auctorité, j'ay recueilli, etc. Et requiers que, se je dis aulcuns points trop aigrement au jugement des gens du Roy ou trop lâchement au jugement du conseil de mesdits seigneur et dame, qu'il me soit pardonné; car, nageant entre deux, j'ay labouré, etc.» Bibliothèque de Lille, ms. E. G., 33.
375: «Coureur (courtier) de cuirs et un autre carpentier.» Journal du tumulte (Archives de Belgique), publié par M. Gachard (Preuves, p. 17). Académie de Bruxelles, Bulletins, t. VI, no 9. On voit dans ce journal que ces notables avaient accepté, en 1469, au nom de la ville, le droit le plus odieux: confiscation, proscription des enfants des condamnés, la dénonciation érigée en devoir, etc.
376: Hugonet, outre ses fonctions de chancelier, semble avoir eu la part principale au maniement des affaires des Pays-Bas. Ce petit juge de Beaujolais s'était bien établi, spécialement en Flandre, où il se fit vicomte d'Ypres. Le duc (tout en le menant durement, lettre du 13 juillet 1476) lui donnait encore, au moment de sa mort, la seigneurie de Middelbourg.
377: Il y eut une vive réaction à Liége; Raes y revint et avec lui sans doute bien d'autres bannis; il mourut le 8 décembre 1477.—Recueil héraldique des bourgmestres de la noble cité de Liége, avec leurs épitaphes, armes et blasons. 1720, in-folio, p. 170. En tête de ce recueil se trouve une précieuse carte des bures des mahais de la ville de Liége; c'est la Liége souterraine.
378:
Franceis crient, Monjoe! e Normans, Dex aïe!
Flamens crient, Asraz! e Angevin, Valie!
(Robert Wace.)
379: «La parole du Roy estoit alors tant douce et vertueuse, qu'elle endormoit, comme la seraine, tous ceux qui lui prestoient oreille.» Molinet.
380: Pour tout ceci, nous devons beaucoup à la polémique de MM. de Saint-Génois et Gachard, le premier, Gantais, préoccupé du droit antique et du point de vue local; le second, archiviste général et dominé par l'esprit centralisateur. M. Gachard a réuni les textes, donné les dates, etc. Son mémoire est très-instructif. Cependant, il dit lui-même que Gand venait d'être rétablie dans son ancienne constitution, que tout droit contraire avait été aboli; dès lors, le wapeninghe, le jugement, la condamnation de Sersanders et autres, sont légales; quant à Hugonet et Humbercourt, la légalité fut violée en ce qu'ils n'étaient pas bourgeois de Gand, et les Gantais venaient de reconnaître qu'ils n'avaient pas juridiction sur ceux qui n'étaient pas bourgeois,—Hugonet et Humbercourt, quoique accompagnés d'autres personnes, avaient été en réalité les seuls ambassadeurs autorisés; la reddition d'Arras, loin d'être un acte opportun, comme on l'a dit, devait entraîner celle de bien d'autres villes, de tout l'Artois.
381: Droit primitif des jugements armés, wapeninghe, qui existaient avant qu'il y eût de comte, ni de bailli du comte, ni même de ville.—Voir ma Symbolique du droit, p. 312, etc. Cf. les jugements du Gau et de la Marche. Tout cela, dès les temps de Wielant, de Meyer, etc., n'est déjà plus compris. Combien moins des modernes!
382: «Met aller herten... met weenenden hoghen.» Chroniques ms. d'Ypres (Preuves de M. Gachard, p. 10). V. sur ce ms. la note de M. Lambin. Ibidem.
383: «Certaines appellations sur ce interjetées par ledict seigneur de Humbercourt en la cour du Parlement.» Lettres royales du 25 avril 1477, publiées par mademoiselle Dupont, Commines, t. III et t. II, p. 124.
384: «Pour ce qu'il estoit grand maître et seigneur.» Journal du tumulte.
385: Louis XI l'avait prévenu contre ce projet, et d'ailleurs: «Displicuit regi tanta fortuna fratris ingrati.» Croyland. Continuat.
386: «Après boire, disait le roi, il lui casserait son verre sur la tête.» Molinet. Il fut surnommé le Faiseur d'enfants.
387: «Les cheveux de son chef honorable sont, à la mode germanique, aurains, reluisants, ornés curieusement et de décente longitude. Son port est signourieux... Jassoit ce que la damoiselle ne soit de si apparente monstre, touttes-fois elle est propre, grâcieuse, gente et mignonne, de doux maintien et de très-belle taille.» Molinet, II, 94-97. Fugger (Miroir de la maison d'Autriche) fait entendre qu'il y eut enquête contradictoire sur la question de savoir s'il était beau ou laid. On peut en juger par le portrait où on le voit armé, et où de plus il est reproduit au fond comme un chasseur poursuivant le chamois au bord du précipice. Voir surtout son Histoire en gravures, par Albert Durer, si naïve et si grandiose.
388: Avertissement de M. Le Glay, p. XII, et Barante-Gachard, II, 577.
389: Commines, livre VI, ch. II, p. 179. Olivier de la Marche, avec son tact ordinaire, fait dire hardiment à la jeune demoiselle: «J'entens que M. mon père (à qui Dieu pardoint) consentit et accorda le mariage du fils de l'empereur et de moy, et ne suis point délibérée d'avoir d'autre que le fils de l'empereur.» Olivier de la Marche, II, 423.
390: Registre de la collace de Gand, Barante-Gachard, II, 576.
391: «Messieurs les comtes, écrivait-il à ses généraux qui pillaient la Bourgogne, vous me faites l'honneur de me faire part, je vous remercie; mais, je vous supplie, gardez un peu pour réparer les places.» Ailleurs: «Nous avons pris Hesdin, Boulogne et un château que le roi d'Angleterre assiége trois mois sans le prendre. Il fût pris de bel assaut, tout tué.» Ailleurs sur un combat: «Nos gens les festoyèrent si bien, qu'il en demeura plus de six cents, et ils en amenèrent bien six cents dans la cité... tous pendus ou la tête coupée.» Mais son grand triomphe est Arras: «M. le grand maître, merci à Dieu et à Notre-Dame, j'ai pris Arras, et m'en vais à Notre-Dame de la Victoire; à mon retour, je m'en irai à votre quartier. Pour lors, ne vous souciez que de me bien guider, car j'ai tout fait par ici. Au regard de ma blessure, c'est le duc de Bretagne qui me l'a fait faire, parce qu'il m'appelle toujours le roi couard. D'ailleurs, vous savez depuis longtemps ma façon de faire, vous m'avez vu autrefois. Et adieu.» Voir passim Lenglet, Duclos, Louandre, etc.
392: Jean de Troyes.
393: Molinet. Contraste remarquable et qui fait ressortir l'orgueil des temps féodaux: Philippe-Auguste, en 1185, se fait dispenser par l'église d'Amiens de lui faire hommage, déclarant que le roi ne peut faire hommage à personne. (Brussel.)
394: V. De la Pise, Histoire des princes d'Orange, Jean II, ann. 1477.
395: «Aulcuns disent qu'ils avoient saulf-conduit du Roy, mais les François ne le voulurent congnoistre.» Molinet. Oudart était un ancien mécontent du Bien public. Alors avocat au Châtelet, il alla trouver le comte de Saint-Pol, laissant sa femme pour correspondre; elle fut chassée, après Montlhéry. Jean de Troyes.
396: Tout porte à croire que ce parvenu était un méchant homme; cependant il est difficile de s'en rapporter aveuglément (comme tous les historiens l'ont fait jusqu'ici) au témoignage de ceux qui jugèrent et pendirent Olivier, dans la réaction féodale de 1484. Autant vaudrait consulter les hommes de 1816 sur ceux de la Convention.—Son ennemi, Commines, qu'il supplanta pour les affaires de Flandre, le montre un peu ridicule dans son ambassade, mais avoue qu'il avait beaucoup de sens et de mérite.
397: Le 28 mai encore, il y eut un magistrat décapité à Mons. (Gachard.)
398:
La Vierge peut demeurer nue,
Cet an n'aura robbe gantoise...
Son corps (celui du duc) fut d'enterrer permis
En mon église la plus grande,
Ce joyel des Flamens transmis
À Notre-Dame en lieu d'offrande;
En lieu de robe accoustumée
La Vierge a les pennons de soye
Et les étendards de l'armée...
Poutrain, Hist. de Tournai, I, 293.
399: Voir la malicieuse bonhomie avec laquelle il se moque des maris proposés, et prouve aux Wallons qu'il faut que leur maîtresse épouse un Français. (Molinet.) Il négociait effectivement pour le mariage (le 20 juin même, Lenglet) soit pour mieux gagner le Hainaut, soit qu'effectivement il eût encore espoir de rompre le mariage d'Autriche, conclu depuis deux mois.
400: Le duc de Clèves l'en avertit. «Non tuto diutius his in locis diversari posse.» Gaguinus, CLVIII (in-folio, 1500).
401: Fugger, Spiegel des erzhausses Œsterreich, p. 858. Ce que disent Pontus Heuterus et le Registre de la Collace, du riche cortége, doit s'entendre des princes qui accompagnaient Maximilien, et ne contredit en rien ce qu'on a dit de sa pauvreté.
402: Le roi écrit à Abbeville le triomphant bulletin: «Pour ce que nous désirions sur toutes choses les trouver sur les champs, vinsmes... pour les assaillir audit Neuf Foussé qu'ilz avoient fortiffié plus de demy an, mais la nuit, ilz l'abandonnèrent... Les (nôtres les) ont rencontrez en belle bataille rangée... tuez plus de IV mille... (13 août).» Lettres et Bulletins de Louis XI, publiés par M. Louandre, p. 25 (Abbeville, 1837).
403: Le 8 juillet 1740. Mss. Legrand.
404: Si MM. de Barante et de Sismondi avaient pris connaissance du Procès du duc de Nemours (Bibliothèque royale, fonds Harlay et fonds Cangé), ils n'affirmeraient pas «que le duc n'avait rien fait depuis 1470, et que tout son crime fut d'avoir su les projets de Saint-Pol.» Ils ne le compareraient pas à Auguste de Thou, mis à mort pour avoir su le traité de Cinq-Mars avec l'étranger.—L'ordonnance du 22 décembre 1477 (calquée sur les anciennes lois impériales), par laquelle le roi déclare que la non-révélation des conspirations est crime de lèse-majesté, ne fut point appliquée au duc de Nemours, et, comme la date l'indique, ne fut rendue qu'après sa mort. Ordonnances, XVIII, 315.
405: Le dernier jour de cestuy mois (mai), furent destendues toutes les chambres du Parlement et les tapis de fleurs de lis, avec le lict de justice, estant en un coffre. Archives, Registres du Parlement. Dans la Plaidoierie et le Criminel, silence funèbre. Dans les Après-dîners, le registre manque tout entier.
406: Les contemporains n'en parlent point, même les plus hostiles. Rien dans Masselin: Diarium Statuum generalium (in-4, Bernier) 236.
407: Venu de Naples en 1461, après les revers de Jean de Calabre, avec Campobasso et Galeotto.
408: On ne sait de quelle mort il périt: «Qualecumque genus supplicii,» Croyland. contin. Le conte du tonneau de malvoisie où il aurait été noyé se trouve d'abord dans la chronique qui donne tous les bruits de Londres. (Fabian.)
409: Preuves de l'Histoire de Bourgogne.
410: Der Schweitzerische Geschicht forscher. Il eût fallu, pour y songer, que le roi fût devenu fou. On faisait encore courir ce bruit absurde que La Trémouille avait mis des envoyés suisses à la question. (Tillier.)
411: À son départ de Cambrai, il badine sur l'attachement des impériaux pour le très-saint aigle, et leur permet d'ôter les lis: «Vous les osterez quelque soir, et y logerez vostre oiseau, et direz qu'il sera allé jouer une espace de temps, et sera retourné en son lieu, ainsi que font les arondelles qui reviennent sur le printemps.» Molinet.
412: Au grand désespoir de Dammartin. V. sa belle lettre au roi. Lenglet, II, 261. La Cronique Martiniane (Vérard in-folio), si instructive pour la vie de Dammartin à d'autres époques, ne me donne rien ici; elle se contente prudemment de traduire Gaguin, comme elle le dit elle-même.
413: Ordonnances, XVIII.
414: Voir passim: Commines, liv. VI, ch. VI; Molinet, t. II, p. 199; Gaguinus, fol. CLIX.
415: Barante-Gachard, II, 623, d'après le Registre de la collace de Gand et les Mémoires inédits de Dadizeele, extraits par M. Voisin dans le Messager des sciences et des arts, 1827-1830.
416: Voir dans Commines les scrupules d'Hastings, qui ne veut pas donner quittance de cet argent: «Mettez-le dans ma manche, etc.»
417: Galanteries toutes politiques, comme on peut le conclure d'un mot de Commines (liv. VI, ch. XIII).
418: Lenglet.
419: Les Médicis étaient les banquiers des rois de France et d'Angleterre; ils apparaissent comme garants dans toute grande affaire d'argent, spécialement au traité de Pecquigny. Il ne s'en cache nullement dans sa réponse à Louis XI. Raynaldi Annales, 1478, § 18-19. Les Médicis avaient pour eux le petit peuple, contre eux l'aristocratie. M. de Sismondi ne l'a pas senti assez.
Au reste, les Florentins avaient toujours tenu nos rois «pour leurs singuliers protecteurs; et, en signe de ce, à chacune fois qu'ils renouvellent les gouverneurs de leur seigneurie, ils font serment d'estre bons et loyaux à la maison de France.» Lettre de Louis XI, 1478, 17 août. Lenglet, III, 552. Voir à la suite l'Avis sur ce qui semble à faire au concile d'Orléans, septembre.
420: Paris, 1528, in-folio. Bordeaux, 1616. V. les deux mss. de la Bibl. impériale.
421: D. Morice, III, 343. Daru, 54. Archives de Nantes, arm. A, cassette F. Cf. d'Argentré.
422: Sembla bien aux barons d'Anjou que Dieu la leur avoit adressée, affin que ilz n'eussent la peine d'aller chercher plus loing. Histoire agrégative des annalles et cronicques d'Anjou, recueillies et mises en forme par noble et discret missire Jehan de Bourdigné, prestre, docteur ès-droitz. On les vend à Angiers (1529, in-folio; CLII verso).
423: Un autre: de se chauffer l'hiver à la cheminée du bon roi René, c'est-à-dire au soleil, proverbe provençal.
424: «Oyant nouvelles que le Roy son nepveu estoit à Angiers, il monta à cheval pour le venir festoyer, ignorant encore ce qui avoit esté faict en son préjudice. Et combien que ses domestiques en fussent bien informez..., etc. Le noble Roy, oyant racompter la perte et dommage de son pays d'Anjou que tant il aymoit, se trouva quelque peu troublé. Mais, quand il eut reprins ses espritz, à l'exemple du bon père Job...» Bourdigné.
425: L'habile Palamède de Forbin trouva cette clause dans l'acte de mariage de l'héritière de Provence et du frère de saint Louis. V. Papon, Du Puy.
426: Lire la lettre si humble à Hastings, et le billet si tendre à un de ses serviteurs, M. de Dunois, pour qu'il expédie l'affaire de Savoie: «Mon frère! Mon ami!...» Nulle part peut-être on n'a vu les affaires traitées avec tant de passion. Ces deux lettres, si caractéristiques, ont été publiées pour la première fois par mademoiselle Dupont: Commines, II, 219, 221.
427: Si l'on veut récuser le témoignage de M. de Crèvecœur, on ne peut guère suspecter celui d'un homme aussi loyal que le grand bâtard, frère du duc, ni celui de Guillaume de Cluny, qui ne quitta le service de Bourgogne que malgré lui et pour ne pas périr avec Hugonet. V. Lenglet, IV, 409.
428: C'est ce que disait le duc de Nemours (V. son Procès ms.): «Ce mauvais homme, M. de Bourbon, nous a tous trahis.»
429: Jean de Troyes.
430: Il craignait toujours les mouvements de Paris, de l'Université, etc. La fameuse ordonnance pour imposer silence aux nominaux n'a, je pense, aucun autre sens. Voir les articles, fort spécieux, qu'ils lui présentèrent, mais dans le moment le moins favorable, dans la crise de 1473. Baluze, Miscellanea (éd. Mansi), II, 293.
431: Le duc, longtemps ménagé, employé par le roi, pour la ruine des grands, exerçait avec d'autant plus de sécurité sa royauté féodale; on l'accusait d'exclure certains députés des assemblées provinciales, etc. Quant à son mariage, et celui de son frère, voir les pièces dans l'Ancien Bourbonnais, par MM. Allier, Michel et Batissier.
432: Et à Paris même. Un autre frère du duc de Bourbon, l'archevêque de Lyon, serviteur fort docile du roi, n'en fut pas moins dépouillé de son autorité sur Clermont, qui dès lors élut ses consuls. Jean de Troyes, XIX, 105. Molinet, II, 311. Oseray, Histoire de Bouillon, 131.
Sur l'affranchissement de cette ville, lire Savaron, et les curieux extraits que M. Gonod a donnés des Registres du Consulat, au moment de la visite de Doyat, sous le titre de Trois Mois de l'histoire de Clermont en 1481.
433: Ce commerce d'hommes, si coûteux à la France, fut encore plus funeste à la Suisse. Des querelles terribles y éclatèrent entre les villes et les campagnes, pour des questions d'argent, de butin, etc. (Tillier.) Stettler dit qu'en 1480, on ne put rétablir la sûreté des routes qu'en faisant pendre quinze cents pillards.
434: Le comte du Perche dit qu'avant le voyage du roi à Lyon, «il y avoit eu douze personnes au conseil du Roy dont tous avoient esté d'oppinion que ont pransist luy qui parle, fors le Roy et Mons. de Dampmartin, lequel Dampmartin avoit dit au Roy qu'il n'y a homme qui, quant il savoit que le roy le vouldroit faire prandre ou destruyre, qu'il ne mist peine de se sauver... Le dit qui parle n'avoit qui tenist pour luy, fors le Roy et ledit de Dampmartin... Luy qui parle, estoit bien tenu au Roy, car il n'avoit eu amy que luy et le dict seigneur de Dampmartin.» Procès ms. du comte du Perche (copie du temps), f. VI verso; Archives du royaume, Trésor des Chartes, J. 940.
435: «Il avoit esté mis à Chinon en une caige de fer d'un pas et demy de long en laquelle il fut environ six jours sans en partir, et luy donnoit-on à menger avecque une fourche; et par après les dicts six jours, on le tiroit hors de la caige, pour menger, et après, estoit remis en la caige, ou il est demeuré par ung yver l'espace de XII sepmaines, à l'occasion de quoy il a une espaulle et une cuisse perdue, et a une maladie à la teste dont il est en grand danger de mourir.» Archives, ibidem, fol. 170.
436: «N'y a homme au royaume de France qui fust plus desplaisant que luy du mal, ni de la mort du Roy, car quant le Roy seroit failly, il n'aroit plus à qui recourir pour lui faire grace.» Archives, ibid., fol. 57.
437: «Commençoit à soy endormir, il le tira deux ou trois fois par la chemise, tellement que il se tourna et demanda qu'il y avoit...» Ibid., fol. 70 et fol. 195.
438: Et non 1482, comme le met à tort l'Art de vérifier les dates.
439: Pontus Heuterus assure que Maximilien ne put jamais entendre parler de Marie sans pleurer. Lorcheimer raconte que Trithème, pour le consoler, évoqua Marie et la lui fit apparaître; mais cette vue lui fut si douloureuse qu'il défendit au magicien, sous peine de la vie, d'évoquer les morts du tombeau. (Le Glay.)
440: V. passim les notes du Barante-Gachard, fort instructives et tirées des actes.
441: Il ne pouvait plus déjà prononcer la lettre R.
442: Cependant il réfléchit sans doute qu'un traité juré de la main gauche pourrait bien être un jour annulé sous ce prétexte, et il toucha l'Évangile du coude droit, ce qui fit rire les Flamands: «Cubito etiam dextro multum ridiculè...» Pseudo-Amelgardi, lib. XI.
443: Richard III lui écrivit, lui demanda amitié (c'est-à-dire pension), mais le roi, au rapport de Commines: «Ne voulut répondre à ses lettres, ni ouïr le messager, et l'estima très-cruel et mauvais.»
444: La première idée qui se présente, c'est qu'il craignait que les moines n'eussent fait de l'histoire une satire. Il semble pourtant qu'il ait été curieux de l'histoire pour elle-même. Dans l'acte où il confirme la chambre des comptes d'Angers, il parle avec une sorte d'enthousiasme de ce riche dépôt de documents. V. Du Puy, Inventaire du Trésor des chartes, II, 61, et l'Art de vérifier les dates (Anjou, 1482).
445: Observation fort juste de M. de Sismondi. Le savant Legrand, parfois un peu simple, parle en plusieurs endroits de la bonté de Louis XI. Cela est fort... Néanmoins, Commines assure qu'il détesta la trahison de Campobasso et la cruauté de Richard III. La Chronique scandaleuse, qui ne lui est pas toujours favorable, remarque qu'il cherchait à éviter, dans la guerre même, l'effusion du sang, ce qui est confirmé par son ennemi Molinet: «Il aymeroit mieux perdre dix mille escus que le moindre archier de sa compagnie.»—Il n'en est pas moins sûr qu'il fut cruel, surtout dans l'expulsion et le renouvellement des populations de Perpignan et d'Arras.—Le fait suivant me semble atroce: Avril 1477, Jean Bon ayant été condamné à mort «pour certains grans cas et crimes par luy commis envers la personne du Roy... laquelle condampnacion fut despuis, du commandement du dict seigneur, en charité et miséricorde, modéré, et condampné le dit Jean le Bon seulement à avoir les yeux pochés et estains,» il fut rapporté que le dit Jean Bon voyait encore d'un œil. En conséquence de quoi Guinot de Lozière, prévôt de la maison du roi, par ordre dudit seigneur, décerna commission à deux archers d'aller visiter Jean Bon, et s'il voyait encore «de lui faire parachever de pocher et estaindre les yeux.» Communiqué par MM. Lacabane et Quicherat. L'original se trouve dans le vol. 171 des titres scellés de Clairambault, à la Biblioth. royale.
446: La fausse et dure maxime avec laquelle Commines enterre son ancien maître «Qui a le succès a l'honneur.»
447: Lire les touchantes complaintes d'Olivier de la Marche sur la maison de Bourgogne, de Jean de Ludre sur la maison d'Anjou (ms. de la Bibliothèque de Nancy), etc., etc. J'y reviendrai à l'occasion de la réaction féodale sous Charles VIII.
448: Première ceinture du royaume plus importante encore pour sa vitalité et sa durée que la seconde ceinture, les beaux accessoires de Flandre, Alsace, etc.
449: Dans une lettre à Du Bouchage, il exprime les mêmes idées, et veut, pour comparer, qu'on lui cherche les coutumes de Florence et de Venise. Preuves de Duclos, IV, 449.
450: L'autorité la plus ancienne, celle de Bodin, n'est pas fort imposante (République, livre III, ch. IV). Rien dans les Registres du Parlement.
451: C'est, je crois, l'origine de tant de contes sur Louis XI et ses serviteurs, par exemple sur Tristan l'hermite, fort âgé sous ce règne, et qui probablement agit moins que beaucoup d'autres. Les traditions sur les petites images au chapeau, etc., ne sont pas invraisemblables, quoiqu'elles aient été recueillies d'abord par un ennemi, Seyssel, l'homme de la maison d'Orléans, par un conteur gascon, Brantôme.
452: On a dit aussi du pape Innocent VIII, comme de beaucoup d'autres souverains, qu'il essaya de guérir par la transfusion du sang.—«Humano sanguine, quem ex aliquot infantibus sumptum hausit, salutem comparare vehementer sperabat.» Gaguinus, fr. CLX verso. Pour le pape, voyez le Diario di Infessura, p. 1241, ann. 1392.
453: Par exemple, il lui fait dire au Dauphin «qu'eût été rien du tout sans Olivier-le-Daim.» Jean de Troyes, éd. Petitot, XIV, 107.
454: Ni aux astrologues, ni aux médecins, quoiqu'il se servît des uns et des autres. Pour les astrologues, malgré la tradition recueillie par Naudé (Lenglet, IV, 291), d'autres anecdotes (l'âne qui en sait plus que l'astrologue, etc.) feraient croire qu'il s'en moquait.
Quant aux médecins: «Il estoit enclin à ne vouloir croire le conseil des médecins.» Commines, livre VI, ch. VI. Les dix mille écus par mois donnés à Coctier s'expliquent par l'or potable et autres médecines coûteuses.
Coctier peut-être ne recevait pas tout, comme médecin, mais comme président des comptes, et pour de secrètes affaires politiques.
455: Duclos, Preuves.
456: Il était alors au mieux avec le pape. Il avait acheté son neveu qui était venu, comme légat, imposer la paix à Maximilien. Autre faveur: «Le pape donne à Louis XI permission de se choisir un confesseur pour commuer les vœux qu'il peut avoir faits.» Archives, Trésor des chartes, J. 463.