L'enfant taciturne : $b roman
Au sommet de la montagne, dominant les croupes moutonnantes et les longues pentes boisées, le chaos des rocs, des torrents et la rousse douceur de la Grande Clairière, l’Enfant se sentait à ce point élevée, hautaine et satisfaite, qu’elle eût pu s’écrier avec le penseur hindou :
— Mes œuvres sont mon bien. Mes œuvres sont mon héritage. Mes œuvres sont la matrice qui m’a porté. Mes œuvres sont la race à laquelle j’appartiens. Mes œuvres sont mon refuge.
Ses œuvres, c’était elle-même dans la plénitude de sa volonté et dans l’adoration de son entourage, c’était la servitude heureuse de ses vassaux, c’était tout ce qui s’étendait sous ses yeux et au-delà, son royaume et sa royauté.
— Mon bien, mon héritage, ma race !…
Pour refuge, elle avait le promontoire ensoleillé.
Souvent, une longue couleuvre grise s’y lovait, paresseuse et torpide. L’Enfant parvint à l’apprivoiser et le serpent devint le gardien symbolique des livres du buisson.