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Le Bourdeau des neuf pucelles

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EN L’HONNEUR DE PRIAPE

Olim truncus eram ficulnus.

Tronc de figuier, je t’ai fait dieu,
Le dieu jardinier de Catulle
Aux membres grêles, mais Hercule
Par le milieu.
La Nymphe captive dans l’orme,
Dont luit le dos parmi les fûts,
Va presser dans ses bras touffus
L’amant énorme.
L’abeille, abusée au carmin
Dont j’ai peint ta tige charnue,
Voudra de la fleur inconnue
Tenter l’hymen.
La fontaine, qui chante et pleure
D’amour et de ramentevoir,
Croira que, troublant son miroir,
Un dieu la leurre.
Un espoir suspendra sa course ;
Car Eros, jaloux de ses lis,
Déçut, — amante et sœur, — Biblis
Changée en source.
Mais tu verras, blanche Armada,
Fuir les cygnes à belle proue ;
Car, te mesurant, désavoue
L’oiseau — Léda.
Voici, pour armer ton épaule,
Selon que Maro m’enseigna,
(Custos, cum falce salignâ)
La faulx de saule.
Peut-elle effrayer les pinçons,
Le freux, la pillarde alouette ?
Et garder le clos du poète
Des maugarçons ?
Veille, frappe, t’efforce, sue.
Ne me sois qu’un dieu paysan.
Ce joujou des belles, fais-en
Une massue.
Puisque ne trouble plus mes lymphes
Le dieu sauvage, tiens-t’en là :
De toi je n’implore point l’A-
-mitié des nymphes.
A ton autel nul chevrier
Des bucoliques de Sicile
Ne pousse le bouc indocile,
Pour toi lié.
Qu’ait mené ce jeu l’immortelle
Brigade, il ne sied à mon breuil.
Et Colombes n’est point Hercueil,
Ni moi Jodelle.
N’attends point qu’aux roses debout,
— Qui furent peut-être des femmes
Aux Métamorphoses, — mes lames
Coupent le cou.
L’Ode t’a fleuri par jonchée ;
Mais plus avare est mon jardin
Que l’asclépiade latin,
Que le trochée.
Assez j’honorerai ton front
Gros comme une pomme reinette,
Si je te fais une cornette
D’un liseron.
Mais dans mon bois la prima donne
Exalte en lyriques sanglots,
Où revient le nom d’Itylos,
La nuit d’automne.
La feuille a frémi, la voilà,
Favete linguis ! Dieu champêtre,
Cette grande voix c’est peut être
Philomela.
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