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Leçons de cosmographie: à l'usage des lycées et collèges et de tous les établissements d'instruction publique

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The Project Gutenberg eBook of Leçons de cosmographie

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Title: Leçons de cosmographie

Author: A. Guilmin

Release date: October 8, 2007 [eBook #22917]

Language: French

Credits: Produced by Mireille Harmelin, Rénald Lévesque and the
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generously made available by the Bibliothèque nationale
de France (BnF/Gallica)

*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK LEÇONS DE COSMOGRAPHIE ***







LEÇONS

DE

COSMOGRAPHIE

À L'USAGE

DES LYCÉES ET COLLÈGES
ET DE TOUS LES ÉTABLISSEMENTS D'INSTRUCTION PUBLIQUE;

PAR A. GUILMIN,

PROFESSEUR DE MATHÉMATIQUES.

QUATRIÈME ÉDITION,
Revue et améliorée (avec figures dans le texte,
gravées en relief sur cuivre par E. SALLE).


PARIS.
AUGUSTE DURAND, LIBRAIRE,
Rue des Grès, 7.
1860



TABLE DES MATIÈRES.

Définition de la cosmographie; division générale du cours.


CHAPITRE PREMIER.


LES ÉTOILES.


Étoiles.--Sphère céleste.--Distances angulaires.

Mouvement diurne apparent des étoiles.

Étoiles circumpolaires.--Étoile polaire.

Verticale, plan vertical, zénith, nadir, horizon.

Lunette astronomique.--Théodolithe.

Hauteur d'une étoile.--Distance zénithale.

Culmination des étoiles.--Plan méridien; méridienne.

Lunette méridienne, horloge sidérale, mural.

Axe du monde.--Cercles décrits par les étoiles.

Jour sidéral.

Hauteur du pôle à Paris.

Mouvement de rotation de la terre autour de la ligne des pôles.

Différences des étoiles en ascension droite.--Déclinaisons.

Globes célestes.--Catalogues d'étoiles.

Constellations et principales étoiles.--Étoiles de diverses grandeurs.--Combien on en voit à l'œil nu

Description du ciel.

Étoiles variables ou périodiques, temporaires, colorées.

Étoiles doubles; leurs révolutions.

Distance des étoiles à la terre.

Voie lactée.--Nébuleuses.--Nébuleuses résolues.


CHAPITRE II.


DE LA TERRE.


Phénomènes qui donnent une première idée de la forme de la terre.

Pôles, parallèles, équateur, méridien.

Longitudes géographiques.

Détermination des longitudes géographiques.

Valeurs numériques du degré mesuré en France, en Laponie, au Pérou, rapportées à l'ancienne toise; leur allongement quand on va du pôle à l'équateur.

Rayon et aplatissement de la terre.

Longueur du mètre.

Cartes géographiques; globe terrestre.

Projection orthographique.

Projection stéréographique.

Système de développement en usage dans la construction de la carte de France.

Appendice.--Cartes marines.--Système de Mercator De l'atmosphère terrestre Réfraction astronomique.


CHAPITRE III.


LE SOLEIL.


Mouvement annuel apparent du soleil.

Écliplique.--Points équinoxiaux.--Solstices.

Constellations zodiacales.

Diamètre apparent du soleil variable avec le temps.

Le soleil paraît décrire une ellipse autour de la terre.

Principe des aires; ses conséquences.

Origine des ascensions droites; ascension droite du soleil.

Moment précis de l'équinoxe. Comment on règle une horloge sidérale. Origine du jour sidéral.

Variations de l'ascension droite du soleil; inégalités des jours solaires.

Temps solaire vrai; temps moyen. Mesure du temps.

Principes élémentaires des cadrans solaires; leur construction.

Année tropique; sa valeur en jours moyens.

Calendrier; réforme Julienne et Grégorienne.

Des saisons; inégalité de leurs durées.

Du jour et de la nuit en un lieu déterminé de la terre, et de leurs durées à diverses époques de l'année,--en des lieux différents. Crépuscules.

Causes principales des variations de la température en un lieu donné.

Climats.

Distance du soleil à la terre.--Parallaxe.

Rapport du volume du soleil à celui de la terre; rapport des masses. --Densité moyenne du soleil rapportée à celle de la terre.

Taches du soleil.--Sa rotation.

Lumière zodiacale.

Longitude et latitude célestes.

Idée de la précession des équinoxes.

Conséquences de la précession des équinoxes.

Mouvement réel de la terre autour du soleil.

Appendice. Calcul des parallaxes; leur usage.

Addition au chapitre de la précession des équinoxes.--Changement de direction de l'axe du monde; nutation.--Changement d'aspect du ciel. --Variations de l'année tropique, de la durée des saisons, etc.


CHAPITRE IV.


LA LUNE.


Diamètre apparent. Phases.

Syzygies, quadrature, lumière cendrée.

Mouvement propre de la lune.

Orbite décrite par la lune autour de la terre.

Révolution sidérale et synodique.

Distance de la lune à la terre.--Diamètre réel et volume de la lune. --Sa masse.

Taches.--Rotation.

Librations de la lune.

Libration en longitude.

Libration en latitude; libration diurne.

Montagnes de la lune; leurs hauteurs.

Constitution volcanique de la lune.

Absence d'eau et d'atmosphère.

Éclipses; leur cause.--Ombre et pénombre.

Éclipses de lune totales et partielles; explication de leurs phases.

Les éclipses de lune n'ont lieu qu'à l'opposition; pourquoi il n'y en a pas à chaque opposition.

Influence de l'atmosphère terrestre sur les éclipses de lune.

Éclipses de soleil, totales, annulaires, partielles.

Elles n'ont lieu qu'à l'époque de la conjonction de la lune; pourquoi il n'y en a pas à toutes les conjonctions.

Phénomènes physiques d'une éclipse totale de soleil.

Occultations d'étoiles par la lune.

Détermination des longitudes terrestres par les distances lunaires.

Appendice.--Irrégularités du mouvement de la lune. --Ligne des nœuds; leur rétrogradation; nutation de l'axe lunaire.

Explication des librations.

Prédiction des éclipses.--Période chaldéenne.

Fréquence relative des éclipses de lune et de soleil.


CHAPITRE V.


DES PLANÈTES ET LEURS SATELLITES, ET DES COMÈTES.


Des planètes. Noms des principales. Leurs distances moyennes au soleil.

Mouvements apparents des planètes.

Mouvements des planètes vus du soleil.

Lois de Kepler.

Principe de la gravitation universelle.

Définitions concernant le mouvement des planètes.

Planètes inférieures.--Digressions orientales et occidentales de Vénus et de Mercure.

Vénus. Détails particuliers.

Phases de Vénus.

Passages de Vénus sur le soleil.

Monographie de Mercure.

Planètes supérieures.--Mouvements apparents des planètes supérieures (vus de la terre); mouvements directs; stations; rétrogradations.

Monographie de Mars.

Jupiter.--Détails particuliers.

Rotation, aplatissement de son disque.

Satellites de Jupiter; leurs éclipses.

Longitudes géographiques déterminées par l'observation de ces éclipses.

Vitesse de la lumière.

Saturne; bandes, rotation, aplatissement.

Anneau et satellites.--Dimensions des différentes parties de ce système.

Monographie d'Uranus.

Monographie de Neptune.

Perturbations des mouvements planétaires.

Petites planètes situées entre Mars et Jupiter.

Remarque générale du mouvement du système solaire.


DES COMÈTES.


Leur aspect; noyau, chevelure, queue.

Petitesse de la masse des comètes.

Nature de leurs orbites.

Comètes périodiques.

Comète de Halley.

Comète de Biéla.--Son dédoublement.

Phénomène des marées.--Flux et reflux; haute et basse mer.

Circonstances principales du phénomène.--Sa période.

Marées des syzygies et des quadratures.

Les marées sont dues aux actions combinées de la lune et du soleil.

Appendice.--Détermination de la parallaxe du soleil à l'aide des passages de Vénus sur le soleil.

Note.--Explication des alternatives de jour et de nuit, des inégalités des jours et des nuits, etc., dans l'hypothèse du double mouvement de la terre.

FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES.



COURS

DE

COSMOGRAPHIE.




1. La Cosmographie a pour objet la description des corps célestes, c'est-à-dire des corps répandus dans l'espace indéfini, de leurs positions relatives, de leurs mouvements, et en général de tous les phénomènes qu'ils peuvent nous présenter.

Nous nous occuperons de ces corps dans l'ordre suivant: les étoiles, la Terre, le Soleil, la Lune, les planètes et les comètes.




CHAPITRE PREMIER.

LES ÉTOILES.



2. On donne, en général, le nom d'étoiles à cette multitude de corps célestes que, durant les nuits sereines, nous apercevons dans l'espace sous la forme de points lumineux, brillants.

3. Sphère céleste. Les étoiles sont isolées les unes des autres; leurs distances à la terre doivent être différentes; cependant elles nous paraissent également éloignées; elles nous font l'effet d'être attachées à une sphère immense dont notre œil serait le centre. Pour plus de simplicité dans l'étude des positions relatives et des mouvements des corps célestes, on considère, en cosmographie, cette sphère, apparente sous le nom de sphère céleste, comme si elle existait réellement.

La sphère céleste est donc une sphère idéale de rayon immense, ayant pour centre l'œil de l'observateur, à la surface de laquelle on suppose placées toutes les étoiles.

O étant le lieu d'observation, OE, OE', OE",..., les directions dans lesquelles sont vues les étoiles E, E', E",.,.,(fig. 1), on imagine sur ces directions de très-grandes distances Oe, Oe', Oe",... égales entre elles. Au lieu des positions réelles E, E',E",... des étoiles, on considère leurs projections e', e", e?,... sur la sphère céleste.

4. Distances angulaires. Cette conception de la sphère céleste n'a que des avantages sans inconvénients; car les distances rectilignes absolues OE, OE',... des étoiles à la terre nous étant en général inconnues, on ne considère que leurs distances angulaires.

La distance angulaire de deux étoiles E, E', est l'angle EOE' des directions dans lesquelles on les voit. Or, cet angle EOE' est précisément le même que la distance angulaire eoe' de leurs projections sur la sphère céleste.

Pour déterminer les distances angulaires on se sert d'un cercle divisé (fig.2 sur lequel se meut une alidade, c'est-à-dire une règle qui tourne autour du centre. Cette alidade porte une lunette astronomique avec laquelle on vise successivement les deux étoiles, après avoir disposé le cercle de manière à ce que son plan passe à la fois par les deux astres. L'arc qui sépare les deux lignes de visée mesure la distance angulaire cherchée.

C'est par les distances angulaires que nous nous rendons compte des positions relatives des étoiles; ce sont les arcs ee', e'e",... (fig. 1) qui forment sur la voûte céleste les figures, telles que ee'e"e?, que nous attribuons aux groupes d'étoiles nommés constellations.

5. Mouvement diurne apparent des étoiles. Au premier abord les étoiles nous paraissent immobiles. Mais prenons des points de repère, une maison, un arbre, au-dessus desquels se trouvent des étoiles, et observons celles-ci pendant un temps assez long, une heure par exemple. Au bout de ce temps, ces étoiles ne sont plus au-dessus de l'arbre ou de la maison; elles s'en sont éloignées d'une manière sensible, toutes ensemble et du même côté. Le même mode d'observation, appliqué à tous les astres, nous les fait voir animés, relativement à nous, d'un mouvement continu, plus ou moins rapide.

Ce mouvement des astres n'est pas réel; ce n'est qu'une apparence due, comme nous l'expliquerons plus tard, à ce que la terre tourne sur elle-même. Mais ce qui est vrai, c'est que les positions des étoiles, relativement à nous et aux objets qui nous environnent, changent continuellement, et de la même manière que si ces astres se mouvaient réellement autour de la terre immobile. Étudier le mouvement apparent des astres comme nous allons le faire, c'est tout simplement étudier de la manière la plus commode ces changements de positions relatives.

Voici d'abord la description générale de ce mouvement apparent, tel que chacun en France peut l'observer sans instruments, en se plaçant le soir, par un temps serein, dans un lieu découvert.

6. Description générale du mouvement diurne. La terre nous présente l'aspect d'une grande surface plane, terminée de tous côtés par une courbe circulaire qu'on appelle l'horizon, sur laquelle semble s'appuyer la voûte céleste parsemée d'un nombre immense d'étoiles 1). Tournons le dos à l'endroit du ciel où est le soleil à midi; le côté de l'horizon qui est à notre droite s'appelle l'orient; à gauche est l'occident, devant le nord, derrière le sud ou le midi. A notre droite des étoiles se lèvent, c'est-à-dire apparaissent au bord de l'horizon, montent progressivement dans le ciel jusqu'à une certaine hauteur, puis s'abaissent vers l'occident, jusqu'au bord de l'horizon où elles se couchent, c'est-à-dire disparaissent. Le lendemain, à la même heure de l'horloge astronomique, les mêmes étoiles se lèvent à l'orient, aux mêmes points, décrivent la même courbe dans le ciel, et se couchent aux mêmes endroits que la veille.

Note 1: (retour) Il est à peu près inutile de dire que cette voûte n'existe pas, que c'est une simple apparence. Les étoiles sont répandues dans l'espace infini, à des distances de la terre très-grandes, et généralement très-différentes les unes des autres.

Si nous considérons des points de lever de plus en plus avancés vers le nord, à partir de notre droite, nous remarquons que les étoiles observées restent de plus en plus longtemps au-dessus de l'horizon dans leur course diurne. L'intervalle entre le lever et le coucher devient de plus en plus court et, à une certaine distance, les étoiles sont à peine couchées qu'elles reparaissent pour recommencer la même course au-dessus de l'horizon.

Plus loin encore, vis-à-vis de nous, vers le nord, il y a des étoiles qui ne se lèvent ni ne se couchent, mais restent perpétuellement au-dessus de l'horizon. Ces étoiles se meuvent néanmoins dans le même sens que les autres; chacune d'elles décrit en vingt-quatre heures, une courbe fermée. Toutes ensemble nous paraissent tourner autour d'un point central du ciel, très-voisin de l'étoile vulgairement connue sous le nom d'étoile polaire. Celle-ci, à première vue, paraît immobile dans ce mouvement général, mais en l'observant, d'une manière plus précise, on reconnaît qu'elle se meut comme les autres, mais très-lentement.

Voilà ce qu'on remarque vers le nord. Tournons-nous vers le midi. De ce côté aussi, les étoiles se lèvent à l'orient (qui est à notre gauche) tous les jours, aux mêmes points et aux mêmes heures, décrivent chacune une courbe au-dessus de l'horizon, et vont se coucher à l'occident. Si nous considérons des points de lever de plus en plus avancés vers le sud, nous voyons que les étoiles observées restent de moins en moins longtemps au-dessus de l'horizon dans leur course diurne. Au plus loin, devant nous, les étoiles décrivent un très-petit arc au-dessus de l'horizon et se couchent très-peu de temps après s'être levées.

Telles sont les apparences du mouvement diurne observé dans ses détails. Ce mouvement, considéré dans son ensemble, est tel que la voûte céleste, comme une sphère immense couverte de points étincelants, paraît tourner tout d'une pièce autour d'une droite fixe allant à peu près de l'œil de l'observateur à l'étoile polaire.

Toutes les phases de ce mouvement général s'accomplissent dans l'intervalle d'un jour et d'une nuit; de là son nom, mouvement diurne. Si on observe une étoile à partir d'une certaine position précise (au-dessus d'une maison, d'un arbre), on la voit revenir au même point, au bout de vingt-quatre heures; elle nous paraît ainsi décrire dans cet intervalle, autour de la terre, une courbe fermée qui n'est autre chose qu'une circonférence de cercle comme nous le verrons bientôt 2.

Note 2: (retour) L'aspect du ciel, le spectacle qu'offre le mouvement diurne, ne varient jamais pour l'observateur qui ne change pas de résidence. Il en est autrement dès qu'il se transporte dans un lieu plus méridional. Du côté du nord, quelques-unes des étoiles, qui restaient perpétuellement au-dessus de l'horizon du premier lieu, se lèvent et se couchent sur le nouvel horizon. Du côté du midi, on aperçoit de nouvelles étoiles invisibles dans la première résidence. Les étoiles visibles à la fois de l'un et de l'autre lieu ne restent pas les mêmes temps au-dessus des deux horizons.

Nous venons de décrire le mouvement diurne tel qu'on peut l'observer sans instruments. On se rend compte de la nature précise de ce mouvement et de ses principales circonstances, à l'aide de quelques instruments que nous allons décrire, après avoir défini certains termes d'astronomie que nous aurons besoin d'employer.

7. Verticale. On appelle verticale d'un lieu la direction de la pesanteur en ce lieu; cette direction est indiquée par le fil à plomb, petit appareil que tout le monde connaît.

Zénith, Nadir. La verticale prolongée perce la sphère céleste en deux points opposés, l'un situé au-dessus de nos têtes et visible, appelé zénith; l'autre invisible, appelé nadir.

Plan vertical. On nomme plan vertical, ou simplement vertical, tout plan qui passe par la verticale.

Plan horizontal. On appelle ainsi tout plan perpendiculaire à la verticale; toute droite située dans un pareil plan est une horizontale.

Horizon. On appelle horizon d'un lieu la courbe circulaire qui, limite sur la terre la vue de l'observateur. Quand celui-ci est à la surface même de la terre, cette courbe est l'intersection de la sphère céleste par le plan horizontal qui passe par l'œil de l'observateur.

Quand on s'élève à une certaine hauteur, la partie visible de la terre s'agrandit; les rayons visuels qui vont aux divers points de l'horizon apparent ne sont plus dans le plan horizontal qui passe par l'œil de l'observateur, mais au-dessous, et forment avec ce plan un angle qui est toujours très-petit; cet angle s'appelle la dépression de l'horizon apparent.

Le plan parallèle à l'horizon, qui passe par le centre de la terre, se nomme l'horizon rationnel ou astronomique.

En cherchant à connaître avec précision les lois du mouvement diurne on est naturellement conduit à considérer les diverses positions que prend une étoile au-dessus de l'horizon. Ces positions se déterminent à l'aide d'un instrument nommé théodolithe.

Avant de décrire le théodolithe, nous dirons quelques mots de la lunette astronomique qui fait partie de cet appareil comme de plusieurs autres instruments d'observation.

8. Lunette astronomique. Elle se compose d'un tube aux extrémités duquel sont deux verres lenticulaires (fig. 3), un grand verre O dirigé vers l'objet, et qui, pour cette raison, se nomme objectif; l'autre, très-petit, derrière lequel on place l'œil, et qu'on nomme oculaire. Les rayons lumineux envoyés par un objet se brisent en traversant l'objectif, et viennent former dans l'intérieur de la lunette, à l'endroit qu'on nomme foyer, une image renversée de l'objet; à l'aide de l'oculaire on regarde cette image comme avec une loupe 3.

Réticule. Afin de donner plus de précision à la visée, on place au foyer de la lunette, en a, près de l'oculaire, une petite plaque percée d'un trou circulaire dans lequel sont tendus deux fils très-fins, perpendiculaires entre eux, qui se croisent au centre (V. dans la figure le cercle rr'); ce petit appareil se nomme réticule. Quand on vise une étoile, on fait mouvoir la lunette de manière que l'image de l'astre, venant se placer exactement au point a de croisement des fils du réticule, soit occultée par ce point a.

La direction du rayon visuel suivant lequel nous voyons l'étoile, coïncide alors avec l'axe optique de la lunette. Cet axe optique, aO, qui joint le point a, de croisée des fils, à un point déterminé O de l'objectif, a une position précise par rapport aux parois solides du tube. Il est donc facile de suivre la direction du rayon visuel sur un cercle divisé placé à côté de la lunette, parallèlement à cet axe; il est également facile de donner à la ligne de visée une direction indiquée, à priori, sur le cercle 4.

Note 3: (retour) V. les Traités de physique pour la description plus détaillée des lunettes et l'explication des phénomènes de la vision.
Note 4: (retour) Quand nous parlerons de l'axe d'une lunette astronomique, il s'agira toujours de l'axe optique qu'il ne faut pas confondre avec, son axe géométrique; mais, comme il importe pour la netteté de la vision que ces deux axes soient aussi rapprochés que possible, on peut fort bien, quand il ne s'agit que de se figurer approximativement la direction des rayons visuels, les supposer dirigés suivant l'axe géométrique de la lunette.

L'emploi de la lunette astronomique augmente la puissance de la vision et fait connaître avec une très-grande précision les directions dans lesquelles se trouvent les objets observés.

Dans les observations de nuit on est obligé d'éclairer le réticule. Pour cela on dispose, à l'extrémité de la lunette, en avant de l'objectif, une plaque inclinée, percée d'une ouverture circulaire qui laisse entrer dans la lunette les rayons lumineux émanés de l'astre. Une lampe placée à côté, à une certaine distance de la lunette, éclaire cette plaque qui, recouverte d'une couche d'un blanc mat, éclaire légèrement par réflexion le réticule.

9. Théodolithe. Le théodolithe se compose essentiellement d'un cercle vertical divisé, qu'on nomme limbe vertical, mobile autour d'un axe vertical AB qui passe par son centre O, et d'un autre cercle horizontal, également divisé, ayant son centre I sur l'axe (fig. 4); une lunette astronomique L'L est mobile autour d'un axe gOg' perpendiculaire au limbe vertical. L'axe de la lunette perpendiculaire à gOg' se meut parallèlement au limbe vertical. Une vis de pression permet de fixer la lunette quand on veut, de manière que, immobile sur le limbe, elle soit seulement emportée par lui dans un mouvement commun autour de l'axe AB. Une ligne horizontale H'OH est gravée sur le limbe vertical; le zéro des divisions est en H. Le cercle horizontal peut être rendu fixe; à l'enveloppe mobile de l'axe AB est attachée une aiguille IE qui se meut avec le limbe vertical, dans le plan duquel elle se trouve et reste constamment. Le mouvement angulaire de cette aiguille IE sur le limbe horizontal mesure le mouvement angulaire du limbe vertical autour de l'axe. Par exemple, supposons que l'aiguille ait la position IE, au commencement d'un mouvement du limbe vertical; si, à la fin de ce mouvement, elle a la position ID, l'angle DIE mesure l'angle dièdre des deux positions extrêmes du limbe vertical (V. la note ci-après).

On peut, au commencement du mouvement, faire tourner le limbe horizontal de manière à amener le zéro de ce limbe sous l'aiguille; alors on fixe le limbe horizontal; puis on fait mouvoir comme il convient le limbe vertical; il est clair qu'on pourra lire alors immédiatement sur le limbe horizontal l'angle décrit par le limbe vertical. Le limbe horizontal est souvent appelé cercle azimutal 5.

Le théodolithe peut d'abord nous servir à mesurer la hauteur d'une étoile au-dessus de l'horizon.

10. Hauteur d'une étoile. On appelle hauteur d'une étoile E, (fig. 5) au-dessus de l'horizon d'un lieu, l'angle EOC que fait avec le plan horizontal le rayon visuel allant du lieu à l'étoile; ou bien c'est l'arc de grand cercle, EC, de la sphère céleste qui mesure cet angle. La hauteur d'une étoile varie de 0 à 90°.

Note 5: (retour) Nous avons réduit le théodolithe à sa plus simple expression, afin de mieux faire comprendre ses usages. Pour plus de commodité dans la manœuvre de l'instrument, il est en réalité disposé comme il suit (fig. 4 bis); le limbe vertical est fixé perpendiculairement, et par son centre, à l'extrémité d'une barre horizontale. Cette barre s'appuie par son milieu sur le haut d'une colonne verticale AB, de l'autre côté de laquelle elle porte un contre-poids à sa deuxième extrémité. On fait tourner le limbe vertical autour de cette colonne AB, en poussant la barre ou le limbe lui-même. Le mouvement angulaire de ce limbe autour d'une verticale quelconque est exactement le même que celui d'un limbe vertical fictif, qui passant, comme dans notre première description ci-dessus,par l'axe AB, serait dans toutes ses positions parallèle au limbe réel. L'aiguille IE du limbe horizontal, qui est et reste toujours parallèle au limbe vertical réel, mesure donc par son mouvement angulaire celui de ce limbe vertical.


Distance zénithale. La distance zénithale d'une étoile, E, est l'angle EOZ de la verticale et du rayon visuel OE allant du lieu à l'étoile (fig. 5) ; ou bien c'est l'arc de grand cercle ZE qui mesure cet angle. La hauteur et la distance zénithale sont des angles complémentaires; EC + EZ = 90°. L'un d'eux étant connu, l'autre s'en déduit.

Azimuth d'une étoile. On nomme azimuth d'une étoile l'angle que fait le demi-cercle vertical ZEN qui contient cette étoile avec un plan vertical convenu, nommé premier vertical, que nous supposerons être ZOH (fig. 5). Cet angle dièdre est mesuré par l'angle HOC des traces horizontales de ces plans; l'azimuth est donc aussi l'arc HC qui sépare sur l'horizon le premier vertical et le vertical de l'étoile.

11. Les trois angles que nous venons de définir peuvent se mesurer en même temps avec le théodolithe.

On fait tourner le limbe vertical jusqu'à ce que son plan passe par l'étoile. Cela étant, on fait tourner la lunette jusqu'à ce qu'on voie l'étoile arriver, dans le champ de l'instrument, à la croisée des fils, en E. L'angle EOC, ou l'arc EC, est la hauteur cherchée (fig. 6).

La distance zénithale s'obtient par la même opération; c'est l'angle AOE ou l'arc AE.

Supposons que le limbe horizontal étant maintenu fixe, le zéro de ses divisions, que nous supposerons en h, soit dans le premier vertical qui est alors Zoh; l'étoile étant vue en E, l'azimuth est l'angle hoc ou l'arc hc.

La hauteur ainsi observée est ce qu'on appelle la hauteur apparente de l'étoile; la hauteur vraie est altérée par la réfraction qui est une déviation des rayons lumineux, due à l'interposition de l'air atmosphérique entre nous et l'étoile. Il y a des tables pour corriger l'erreur ainsi commise et déduire la hauteur vraie de la hauteur apparente observée (V. la réfraction).

L'azimuth et la hauteur d'une étoile déterminent sa position par rapport à l'observateur au moment de l'observation; c'est ce que montre la figure 5 (l'observateur est placé en O).

À l'aide du théodolithe on peut déjà étudier quelques circonstances importantes du mouvement diurne.

CULMINATION DES ÉTOILES; PLAN MÉRIDIEN; PASSAGE AU MÉRIDIEN.

12. Quand un observateur suit avec le théodolithe le mouvement d'une étoile qui s'élève, à partir d'une certaine hauteur, 15° par exemple, l'aiguille du limbe horizontal (fig. 8) ayant la position IE, il voit cet astre monter constamment jusqu'à une certaine hauteur, puis, au delà de ce point culminant, descendre continuellement. D'après le mouvement de la lunette sur le limbe vertical, il remarque que les hauteurs de l'étoile, dans le mouvement descendant, sont égales chacune à chacune à celles du mouvement ascendant, mais se retrouvent dans un ordre inverse; cette circonstance attire naturellement son attention sur la position culminante de l'étoile. Supposons qu'il cesse d'observer quand l'étoile est revenue à la hauteur de 15°, l'aiguille du limbe horizontal ayant la position ID; la position culminante de l'étoile qui paraît tenir le milieu entre toutes les positions observées doit se trouver dans le plan vertical moyen, celui dont la trace sur le limbe horizontal divise l'angle DIE en deux parties égales. En effet, si l'observateur, ayant tracé sur le limbe cette bissectrice IM, recommence le lendemain à observer l'étoile, il la voit constamment monter jusqu'à ce que l'aiguille ait la direction IM, puis descendre continuellement, et cela, quelle que soit la hauteur à laquelle il recommence l'observation.

Bien plus, s'il observe ensuite de la même manière le mouvement d'une autre étoile quelconque, à partir d'une de ses positions les plus rapprochées de l'horizon, il la voit monter constamment jusqu'à ce qu'elle soit arrivée dans ce même plan vertical AIM, puis descendre continuellement quand elle l'a traversée.

De semblables observations constatent ce qui suit:

13. Plan méridien. Il existe pour chaque lieu un plan vertical, nommé plan méridien, qui contient les positions culminantes de toutes les étoiles, et divise en deux parties égales et symétriques chacune des courbes qu'elles décrivent au-dessus de l'horizon.

14. Passages au méridien. Chaque étoile dans sa révolution diurne traverse deux fois le plan méridien: la première fois au point le plus élevé de sa courbe diurne, c'est le passage supérieur ou la culmination de l'étoile; la seconde fois au point le plus bas de la même courbe, c'est le passage inférieur.

Si on observe une étoile qui se lève, on la voit monter depuis son lever jusqu'à son passage supérieur, puis descendre jusqu'à son coucher; son passage inférieur a lieu au-dessus de l'horizon.

Si on observe une étoile circumpolaire, c'est-à-dire une des étoiles qui ne se lèvent ni ne se couchent, à partir d'un passage inférieur, on la voit monter à l'orient, d'un côté du plan méridien, jusqu'à son passage supérieur, puis descendre de l'autre côté de ce plan jusqu'à un nouveau passage inférieur 6.

Note 6: (retour) Dans l'une et l'autre observations, la durée du mouvement descendant est précisément égale à celle du mouvement ascendant.

15. On appelle méridienne d'un lieu l'intersection du plan méridien et du plan horizontal.

Le plan méridien joue un très-grand rôle en astronomie; pour le connaître, il suffit de déterminer la méridienne, puisque ce plan passe par une ligne déjà connue, la verticale.

La manière de déterminer la méridienne est, à la rigueur, suffisamment indiquée nº 12; mais à cause de l'importance de cette détermination, nous croyons devoir l'exposer à part, pour plus de précision.

16. Détermination de la méridienne. On vise, avec la lunette du théodolithe, une étoile déjà arrivée à une certaine hauteur au-dessus de l'horizon du lieu, à 15° par exemple, mais non encore parvenue à sa culmination. On serre la vis de pression de manière que la lunette conserve sa position actuelle, LOH = 15°, sur le limbe vertical (fig. 8); en même temps on note bien exactement la position de l'aiguille sur le limbe horizontal; soit IE, par exemple. Puis, l'étoile continuant son mouvement, on la suit des yeux, jusqu'à ce que, ayant dépassé son point de culmination, elle soit sur le point de revenir à la même hauteur de 15°. Alors on fait mouvoir le limbe vertical de manière à être en mesure de viser l'étoile quand elle sera revenue à cette hauteur, ce qui arrive quand le plan vertical passant par l'étoile, on retrouve celle-ci à la croisée des fils de la lunette dont la direction est toujours telle que LOH = 15°. [Illustration: 018, Fig. 8.]

L'aiguille horizontale occupe alors une certaine position ID sur le limbe horizontal. On divise l'arc ED en deux parties égales au point M; on tire IM; la ligne IM est la direction de la méridienne.

Si on recommence l'opération en visant l'étoile à une hauteur différente de 15°, on trouvera un angle horizontal différent D'IE'; mais cet angle a la même bissectrice IM que DIE. En observant de la même manière une étoile quelconque, on trouve toujours la même bissectrice IM.

La méthode que nous venons d'indiquer pour trouver la méridienne est connue sous le nom de méthode des hauteurs égales ou correspondantes 7.

Note 7: (retour) La méridienne peut aussi se déterminer à l'aide du gnomon. (V. à l'article des cadrans.)

17. Passage d'un astre au méridien. Une des opérations les plus importantes de l'astronomie consiste à déterminer exactement l'heure du passage d'une étoile ou d'un astre quelconque au méridien d'un lieu.

On se sert pour cela de la lunette méridienne et de l'horloge sidérale.

Lunette méridienne. Cet instrument se compose essentiellement d'une lunette fixée au milieu d'un axe de rotation horizontal, dont les extrémités s'appuient par deux tourillons, sur deux massifs de pierre (fig. 11). C'est à peu près comme un canon sur son affût.

La lunette est disposée de manière que son axe, perpendiculaire à l'axe de suspension, décrive un plan vertical qui n'est autre que le plan méridien du lieu; on conçoit alors qu'en inclinant convenablement la lunette, l'observateur puisse apercevoir les différents astres à mesure qu'ils arrivent dans le plan méridien.

Quand une étoile arrive dans le champ de la lunette, on fait mouvoir celle-ci jusqu'à ce que l'étoile touche le fil horizontal; quand elle arrive à la croisée des fils, elle est à son point précis de culmination, elle passe au méridien. On note l'heure que marque en ce moment une horloge sidérale placée à côté de la lunette méridienne.

Une mire, ou ligne de visée verticale, dont la direction est rencontrée par la méridienne, est ordinairement gravée sur une colonne ou monument solide quelconque, à une assez grande distance de l'observatoire. Pour être sûr que l'axe de la lunette méridienne décrit exactement le plan méridien, on dirige horizontalement cette lunette vers la mire; puis on la fait tourner dans les deux sens; la mire doit toujours être vis-à-vis de la croisée des fils. Si on la voit à droite ou à gauche, c'est que la lunette ne décrit pas exactement le plan méridien.

Cette vérification s'applique à toute lunette qui doit décrire le plan méridien, soit d'une manière permanente, soit momentanément pour une observation particulière; exemples: le cercle mural et le théodolithe.

18. Remarque. Un moyen précis de déterminer l'heure du passage d'un astre au méridien, consiste à l'observer, le même jour, à des hauteurs égales au-dessus de l'horizon, à 15° par exemple, en notant l'heure de chaque observation à l'horloge sidérale. La moyenne arithmétique, c'est-à-dire la demi-somme des deux heures ainsi remarquées, est l'heure précise du passage de l'étoile au méridien. Cette observation peut se faire avec le théodolithe.

19. Horloge sidérale. On nomme ainsi une horloge d'une grande précision disposée de manière à marquer le temps sidéral. Un cadran divisé en vingt-quatre parties égales est parcouru par une aiguille dans l'espace d'un jour sidéral; cette aiguille parcourt donc une division dans une heure sidérale. Deux autres aiguilles marquent les minutes et les secondes sidérales; leurs extrémités se meuvent sur une circonférence divisée en soixante parties égales, que la première parcourt en entier dans une heure sidérale (une division par minute), et la seconde en une minute sidérale (une division par seconde). Chaque oscillation du pendule s'effectue en une seconde, en sorte que le commencement des secondes successives est marqué par le bruit que fait l'échappement de l'horloge à chaque oscillation du pendule. L'observateur qui a l'œil à la lunette méridienne, et qui a regardé d'avance la position qu'occupaient les aiguilles de l'horloge, peut compter les secondes successives à l'aide de ce bruit, et connaître a chaque instant l'heure marquée par l'horloge sans se déranger de son observation.

En outre de la lunette méridienne et de l'horloge sidérale, chaque observatoire possède principalement un cercle mural.

20. Cercle mural. Cet instrument se compose d'un cercle très-exactement divisé, situé précisément dans le plan méridien. Il porte à son centre une lunette astronomique qui, tournant autour d'un axe horizontal, décrit ce même plan méridien comme la lunette des passages; ce cercle est fixé contre un mur d'une grande solidité; de là son nom de cercle mural.

La trace de l'horizon, H'H, étant invariablement marquée sur le mural (fig. 13), cet instrument peut servir, comme le théodolithe, à mesurer la hauteur EOH d'une étoile, E, au-dessus de l'horizon, quand elle passe au méridien, ce qu'on nomme la hauteur méridienne de l'astre; par suite, il sert au même instant à déterminer la distance zénithale méridienne.

21. Axe du monde.--Vérification des lois du mouvement diurne.--Nous avons dit, en finissant la description générale du mouvement diurne, que les étoiles nous paraissent tourner autour d'une ligne droite idéale allant à peu près de l'œil de l'observateur à l'étoile polaire.

On appelle axe du monde la ligne droite idéale autour de laquelle nous paraissent tourner tous les corps célestes.

On peut déterminer, comme il suit, sa direction à l'aide du mura.

On vise une étoile circompolaire à son passage inférieur, puis à son passage supérieur au méridien; on marque chaque fois la division précise du limbe rencontrée par la direction de l'axe de la lunette; soient N et L (fig. 14) les deux points marqués; on divise l'arc LN en deux parties égales au point P; puis on tire le rayon OP qui est la direction de l'axe du monde.

On peut observer pour cette détermination telle étoile circompolaire que l'on veut; on trouve toujours la même bissectrice OP. C'est ordinairement l'étoile polaire qu'on observe en cette occasion.

Le point P et par suite la direction de l'axe du monde peuvent être marqués invariablement sur le cercle mural; c'est ce que nous supposerons.

22. Lois du mouvement diurne. La direction de l'axe du monde étant connue, on peut vérifier les lois du mouvement diurne dont voici l'énoncé:

Tous les corps célestes paraissent tourner autour d'une droite fixe qu'on appelle axe du monde. Chaque étoile paraît décrire une circonférence dont le centre est sur cet axe et dont le plan est perpendiculaire à cette ligne. Tous ces cercles sont décrits d'un mouvement uniforme, et la révolution entière s'effectue dans un temps, le même pour toutes les étoiles, qu'on nomme jour sidéral. De là le nom de mouvement diurne donné à ce mouvement général de tous les corps célestes.

On peut vérifier ces lois à l'aide d'un instrument connu sous le nom de machine parallactique ou équatorial, qui n'est autre chose. qu'un théolodithe dont l'axe, au lieu d'être vertical, est dirigé parallèlement à l'axe du monde (fig. 15 bis).

On vise une étoile E avec la lunette de cet appareil (fig. 15); l'étoile étant derrière la croisée des fils, on serre la vis de pression, afin que, durant le mouvement imprimé au limbe vertical, l'angle AOL reste invariable. En même temps on met l'appareil en communication avec un mécanisme d'horlogerie, identiquement le même que celui qui met en mouvement l'aiguille des secondes d'une horloge sidérale; ce mécanisme fait tourner le limbe vertical ALC et tous les points invariablement liés à ce limbe, ex. la lunette, autour de l'axe, d'un mouvement de révolution tel que chaque point du système mobile décrit un arc de 15? à chaque battement du pendule (observez le mouvement de l'aiguille IL sur le limbe inférieur); 15? en une seconde sidérale, cela fait une circonférence en 24 heures. Après chaque mouvement de la lunette, on retrouve constamment l'étoile E derrière la croisée des fils, sur la direction de l'axe optique L'L; soit e le point de cet axe OL prolongé avec lequel coïncide d'abord l'étoile; après chaque seconde sidérale, nous retrouvons toujours l'étoile sur la direction OLe, coïncidant avec le point e (sphère céleste, nº 3). Le point e tournant autour de l'axe AB, l'étoile E nous paraît donc tourner avec lui autour de cet axe, décrivant un arc de 15? en une seconde de temps, par suite une circonférence tout entière en 86400 secondes, ou un jour sidéral 8.

Note 8: (retour) L'extrémité L de l'aiguille IL décrit sur le limbe horizontal des arcs exactement égaux (en degrés) à ceux que décrit le point e; il suffit donc d'observer le mouvement de cette aiguille sur le limbe pour déterminer la vitesse et constater l'uniformité du mouvement apparent de l'étoile.

L'expérience donne le même résultat à quelque point de son cercle diurne que l'on commence à observer l'étoile; les résultats obtenus sont également les mêmes pour toute étoile observée. Le mouvement diurne apparent des étoiles est donc uniforme; les lois de ce mouvement sont bien celles que nous avons exposées tout à l'heure, nº 22.

23. Jour sidéral. Nous avons appelé jour sidéral le temps que met une étoite à décrire une circonférence autour de l'axe du monde.

Afin de pouvoir comparer le jour sidéral à d'autres jours qui seront indiqués plus tard, on le définit souvent ainsi :

On appelle jour sidéral le temps qui s'écoule entre deux passages consécutifs de la même étoile au même point du méridien d'un lieu.

Le jour sidéral ainsi défini a toujours été trouvé le même, depuis les plus anciennes observations astronomiques jusqu'à nos jours. Il se subdivise en 24 heures sidérales, l'heure en 60 minutes, la minute en 60 secondes. Le jour et ses subdivisions s'indiquent par leurs initiales j., h., m., s. Exemple: 10 heures 42 minutes 31 secondes s'écrivent ainsi : 10h 42m 31s.

Il ne faut pas confondre le jour sidéral avec le jour vulgaire, qui est le jour solaire; nous verrons que le jour solaire surpasse le jour sidéral d'environ 4 minutes. Il importe donc, en astronomie, de préciser l'espèce des jours, heures, minutes qui expriment un temps indiqué.

24. Pôles. On appelle pôle du monde chacun des deux points où la direction de l'axe du monde va percer la sphère céleste.

Le pôle visible pour nous (à Paris et en France) s'appelle pôle boréal ou arctique; le pôle qui nous est caché par la Terre s'appelle pôle austral ou antarctique.

Parallèles célestes. Les cercles décrits par les étoiles étant tous perpendiculaires à une même droite, sont parallèles; on leur donne le nom de parallèles célestes. V. fig. 16.

Équateur céleste. On nomme équateur céleste le parallèle qui passe par le centre de la sphère céleste; il divise celle-ci en deux hémisphères, l'hémisphère boréal et l'hémisphère austral. V. fig. 16.

On nomme étoile polaire une étoile de deuxième grandeur qui nous paraît actuellement la plus voisine du pôle boréal; elle en est distante de 1° 1/2 environ. Nous apprendrons à la distinguer (n° 45); quand nous saurons la reconnaître à première vue, elle nous servira à nous orienter en nous faisant connaître à peu près la position du pôle boréal. Au lieu de pôle boréal, on dit souvent le pôle, sans autre désignation.

25. Hauteur du pôle. La hauteur du pôle au-dessus de l'horizon d'un lieu est l'angle que fait l'axe du monde avec le plan horizontal, ou bien c'est l'angle aigu de cet axe avec la méridienne du lieu. C'est l'angle POH, fig. 16, ci-après.

Dans les observatoires où il y a un mural, cette hauteur se trouve indiquée sur le limbe; c'est l'arc qui sépare l'extrémité de la méridienne (horizontale du mural) de l'extrémité de la ligne des pôles (axe du monde).

La hauteur du pôle, à l'Observatoire de Paris, est de 48° 50' 11" 5 (d'après MM. Mauvais et Laugier).

Pour déterminer cette hauteur en un lieu quelconque, par une observation directe, on détermine la hauteur, au-dessus de l'horizon, d'une étoile circumpolaire quelconque à son passage supérieur au méridien, puis au passage inférieur; la demi-somme de ces deux hauteurs est la hauteur cherchée du pôle au-dessus de l'horizon du lieu.

Cette méthode se fonde sur ce que le pôle P est le milieu de l'arc du méridien qui sépare le passage supérieur, I' (fig. 16), d'une étoile circompolaire quelconque de son passage inférieur I (nº 23). PI' = PI; alors IH = PH — PI; I'H = PH + PI; d'où IH + I'H = 2 PH, et enfin PH = (IH + I'H)/2 9

Note 9: (retour)

On peut indiquer sur une figure la disposition apparente de la sphère céleste par rapporta l'horizon d'un lieu, cette figure fera comprendre ce qui a été dit relativement au mouvement diurne apparent des astres (fig. 46).

Le cercle PEP'E', vu de face, est le méridien céleste d'un lieu m, dont nous supposerons le zénith à gauche en M. L'horizon de m est le cercle HCH'L perpendiculaire au méridien PEP'E', qui contient la verticale OM. Nous avons figuré quelques parallèles célestes, parmi lesquels l'équateur céleste EC'E'L', tous perpendiculaires au méridien PEP'E' qui contient l'axe du monde PP'.

On voit tout de suite, sur cette figure, que la sphère céleste se partage en trois zones: 1º la zone HPF' au-dessus du parallèle HF', dite de perpétuelle apparition, parce que toutes les étoiles de cette zone sont toujours visibles pour le lieu m; 2º la zone intermédiaire HFH'F', où sont les étoiles qui ont un lever L et un coucher C. On peut se figurer l'une de ces étoiles circulant sur cette zone dans le sens LD'CD, se levant sous nos yeux en L, parcourant l'arc LD'C au-dessus de l'horizon, se couchant en C ; puis, invisible pour nous, parcourant l'arc CDL au-dessous de l'horizon; 3º enfin on remarque la zone FP'H' où se trouvent les étoiles constamment invisibles pour le lieu m, parce qu'elles décrivent leurs cercles diurnes tout entiers au-dessous de l'horizon H'H de ce lieu m.

La même figure montre que le méridien divise par moitié, en D', l'arc que décrit une étoile au-dessus de l'horizon; que ce milieu D' est le point de l'arc visible LD'C le plus élevé au-dessus de l'horizon HCH'L.

Enfin, il est facile de voir que le pôle P est le milieu de l'arc I'PI de méridien qui sépare le passage supérieur, I', et le passage inférieur, I, d'une étoile circompolaire quelconque.

MOUVEMENT DE ROTATION DE LA TERRE.

26. Les étoiles ne tournent pas réellement autour de la terre, avons-nous dit précédemment, leur mouvement diurne n'est qu'une apparence produite par le mouvement de rotation de la terre. C'est ce que nous allons essayer d'expliquer.

Nous dirons d'abord comment on est conduit à mettre en doute la réalité du mouvement diurne des étoiles, puis les raisons qui nous portent à croire au mouvement de la terre. Enfin nous montrerons que toutes les apparences du mouvement diurne s'expliquent parfaitement dans l'hypothèse que voici:

La terre tourne sur elle-même autour d'un axe central; elle effectue, d'un mouvement uniforme, une révolution entière en 24 heures sidérales.

Le mouvement diurne des étoiles est invraisemblable.

En effet, le nombre des étoiles, que nous voyons, ou que les télescopes nous laissent apercevoir, est incalculable; les distances qui nous en séparent sont d'une grandeur incommensurable. Eu égard à ces distances, il faut attribuer à la sphère céleste un rayon immense; il en résulte que les cercles que les étoiles nous paraissent décrire ont des étendues excessivement diverses; petits relativement, aux environs des pôles, leurs périmètres deviennent, pour ainsi dire, infinis quand on arrive à l'équateur céleste. Pour que ces périmètres si différents soient parcourus dans le même temps, dans un jour sidéral, il faut que les vitesses réelles des étoiles, modérées relativement aux. environs des pôles, aillent en augmentant jusqu'à devenir d'une grandeur excessive sur l'équateur céleste. Néanmoins ces mouvements, si divers dans leurs rapidité, doivent être tellement réglés, tellement mesurés, que ces corps répandus en nombre infini dans l'espace, immensément éloignés les uns des autres, ne paraissant liés par aucune dépendance mutuelle, conservent invariablement leurs positions relatives, puisque la sphère céleste, gardant toujours le même aspect, semble se mouvoir tout d'une pièce. Quelle force, quelle influence produirait un pareil mouvement général? Cette influence devrait être en grande partie attribuée à la terre, puisque ce mouvement aurait lieu autour d'un axe dont la position paraît dépendre uniquement de celle de la terre. Mais comment concevoir qu'une pareille influence puisse être exercée par notre globe, dont la petitesse est inappréciable relativement aux espaces célestes à travers lesquels il lui faudrait agir sur des corps qui, à en juger par les dimensions connues de quelques-uns, sont beaucoup plus considérables que lui. Toutes ces considérations rendent aussi incompréhensible qu'invraisemblable le mouvement diurne des étoiles 10.

2º Au contraire, bien des analogies et des faits observés nous portent à croire au mouvement de rotation de la terre.

Il y a d'abord des analogies frappantes. Tous les corps célestes qui sont assez près de nous pour que nous puissions distinguer quelque chose de leur aspect extérieur, par exemple, le soleil, la lune, les planètes, tournent tous sans exception sur eux-mêmes autour d'un axe central. Il est naturel de penser que la terre, qui nous paraît dans les mêmes conditions que les planètes, tourne de. la même manière. Ce mouvement d'un corps solide, isolé de toutes parts 11, est plus simple et plus naturel que celui qu'il nous faudrait attribuer à une multitude de corps isolés, indépendants les uns des autres comme les étoiles.

Note 10: (retour) Les mêmes objections peuvent être exposées avec plus de précision comme il suit:

1º L'observation nous montre les étoiles répandues par millions dans l'espace, isolées, indépendantes et immensément éloignées les unes des autres; il est peu vraisemblable que cette multitude innombrable de corps isolés, indépendants, tournent autour de la même droite avec autant d'ensemble, autant d'accord que s'ils étaient liés invariablement les uns aux autres.

2º Eu égard à l'indépendance des étoiles, on ne pourrait expliquer le mouvement circulaire de chacun de ces astres que par l'action d'un corps placé au centre de son cercle diurne. Il devrait donc y avoir sur l'axe du monde autant de corps capables d'exercer une pareille influence qu'il y a d'étoiles; or, l'observation ne nous en montre aucun; nous n'y voyons que la terre.

L'observation nous apprend aussi que les distances qui séparent les étoiles de la terre sont immenses, tellement grandes qu'on ne peut les évaluer. La plus petite de ces distances surpasse 8 trillions de lieues; c'est donc là le plus petit rayon que nous puissions attribuer à la sphère céleste. Les étoiles qui nous paraissent décrire l'équateur céleste parcourraient donc en 24 heures une circonférence de plus de 50 trillions de lieues de longueur; plus de 500000 lieues par seconde. Comment la terre, dont la petitesse est inappréciable par rapport à ces espaces célestes, pourrait-elle imprimer à plus de 8 millions de millions de lieues de distance un pareil mouvement à des corps plus considérables qu'elle-même?

Note 11: (retour) V. le commencement du chapitre II.

Comme faits observés, nous citerons la diminution de la pesanteur à la surface de la terre quand on descend du pôle vers l'équateur, qui ne peut être, attribuée qu'à l'augmentation de la force centrifuge due à la rotation de la terre; nous citerons encore la belle expérience de M. Foucault sur le mouvement du pendule, la forme même de la terre renflée à l'équateur, aplatie vers les pôles, puis les vents alisés, etc.

Toutes les apparences du mouvement diurne des corps célestes s'expliquent parfaitement dans l'hypothèse que la terre, animée d'un mouvement uniforme de rotation autour d'un axe central, effectuerait une révolution entière en 24 heures sidérales 12.

Note 12: (retour) Les étoiles nous paraissent s'élever au-dessus de l'horizon; elles nous semblent décrire des cercles autour d'un axe dont la direction nous est connue. Ça apparences peuvent fort bien se produire sans que ce mouvement soit réel? Est-ce que les arbres d'une route ne paraissent pas fuir, et se mouvoir tous ensemble avec rapidité, devant un voyageur qui passe sur un chemin de fer? Est-ce que le rivage et les personnes qui s'y trouvent ne paraissent pas se mouvoir devant un voyageur qui s'éloigne en bateau?

Si le mouvement réel du voyageur produit l'apparence d'un mouvement en sens contraire des corps extérieurs qui ne participent pas à ce mouvement, ne peut-il pas se faire que le mouvement circulaire des corps célestes soit simplement une apparence due à un mouvement circulaire de l'observateur, dirigé en sens contraire de celui dont nous paraissent animées les étoiles? L'apparence étant la même pour les habitants de tous les lieux de la terre, doit pouvoir s'expliquer par un mouvement de rotation du globe terrestre tout entier autour de la ligne que nous avons appelée axe du monde. Or, rien de plus facile que cette explication.

C'est ce que nous allons démontrer.

Nous voyons des étoiles se lever à l'orient, monter, puis s'abaisser et se coucher à l'occident.

C'est que notre horizon, que l'on peut se figurer comme un plan matériel attaché à la terre au point où nous sommes, tourne avec elle autour d'un axe, oblique à ce plan. Le côté est de cet horizon s'abaisse dans le sens du mouvement (M1H1), (fig. 17), tandis que le côté ouest se relève (M1H'1). Durant ce mouvement, l'étoile E, dont la hauteur se comptait à l'est, nous a paru monter en se dirigeant de l'est vers l'ouest; l'étoile E' qui se trouvait au-dessous de l'horizon, invisible pour nous est devenue visible; elle s'est levée. L'étoile E?, dont la hauteur se comptait déjà à l'ouest, nous a paru descendre. L'étoile E?, qui était visible, a disparu et s'est couchée à l'occident. Toutes nous ont paru s'avancer de l'est à l'ouest, tandis que c'est l'horizon qui a marché en sens contraire.

Ces premières apparences s'expliquent donc par le mouvement de rotation de la terre.

Le mouvement diurne étudié avec précision se résume ainsi:

Toutes les étoiles nous paraissent décrire des circonférences de cercle autour d'une même droite fixe PP' 13.

Note 13: (retour) On peut à la rigueur se borner à expliquer ce mouvement circulaire autour de l'axe du monde; mais nous avons cru bien faire d'expliquer aussi le lever et le coucher des étoiles, et leur mouvement au-dessus de l'horizon qui frappe immédiatement tout le monde et avec lequel on est le plus familiarisé.

Expliquons ce qui se passe quand on étudie ces phénomènes.

L'observateur, muni d'une lunette astronomique, vise une étoile E dans la direction Oe (fig. 18). La terre tourne de l'ouest à l'est autour d'un axe dont la direction est PP', par exemple, entraînant avec elle dans ce mouvement tous les objets qui lui sont invariablement liés; l'observateur et sa lunette sont dans ce cas. La lunette tourne donc; bientôt la ligne de visée (axe optique) au lieu de la direction Oe, a pris la direction Oe'; l'étoile E qui est restée en e, n'est plus derrière la croisée des fils; elle nous paraît s'être avancée de l'est à l'ouest, décrivant l'arc e'e. La lunette (que nous supposons réduite à son axe optique) a quitté l'étoile, et nous croyons que l'étoile a quitté la lunette. Si nous voulons retrouver l'astre derrière la croisée des fils, nous sommes obligé d'imprimer à l'instrument avec la main, ou autrement (machine parallactique), un mouvement de rotation qui le ramène à l'étoile, vers l'ouest. À peine la lunette a-t-elle rejoint l'étoile, que le mouvement de la terre l'en éloigne de nouveau; la main de l'observateur ou un mécanisme la ramène vers l'étoile, et ainsi de suite.

En résumé, la lunette a un double mouvement de va-et-vient continuel, de e vers e' et de e' vers e. L'observateur qui n'a conscience que du mouvement qu'il imprime lui-même, ne tient compte que du chemin e'e, et croit que l'instrument fait ce chemin pour suivre l'étoile; celle-ci lui paraît en conséquence tourner de l'est à l'ouest autour de PP'.

En définitive la somme des chemins ee', dus à la rotation de la terre étant précisément égale à la somme des chemins e'e, dus à la main de l'observateur, si la terre, comme nous le supposons, imprime à chaque point de la direction de la lunette un mouvement uniforme tel qu'il décrive de l'ouest à l'est (sens ee') une circonférence en 24 heures sidérales, l'étoile doit nous paraître décrire dans le même temps, et aussi d'un mouvement uniforme, une circonférence de l'est à l'ouest (sens e'e).

Les apparences du mouvement diurne des étoiles s'expliquent donc parfaitement dans l'hypothèse du mouvement indiqué de rotation de la terre. Il faut donc laisser ces apparences de côté quand on veut peser les raisons qui militent pour et contre l'existence du mouvement diurne de tous les corps célestes autour d'un axe traversant la terre, pour et contre le mouvement de rotation de la terre autour du même axe en face des étoiles immobiles; ces apparences pouvant être attribuées à l'un ou à l'autre de ces mouvements.

Or, ces apparences mises de côté, il n'y a plus que des invraisemblances dans le mouvement général des corps célestes, tandis qu'il y a un grand nombre d'analogies et de faits observés qui nous portent à croire au mouvement de la terre.

Nous devons donc admettre comme certain que c'est la terre qui tourne uniformément autour d'un axe central; parce que ce mouvement de la terre explique des faits observés et certains qui sans lui seraient inexplicables, parce qu'il explique parfaitement toutes les apparences, et qu'il est conforme au mouvement que nous voyons aux corps célestes assez voisins pour que nous distinguions quelque chose de leur aspect extérieur.

Nous n'envisagerons donc-plus désormais le mouvement général de la sphère céleste autour de l'axe de la terre que comme une simple apparence.

27. Néanmoins, cela bien établi, et toutes réserves faites en conséquence, nous continuerons à parler le même langage qu'avant cette discussion, à indiquer le phénomène apparent au lieu du phénomène réel correspondant; à cela nous ne voyons aucun inconvénient pour un lecteur averti par la discussion précédente et la conclusion que nous en avons tirée.

Si nous voulons indiquer l'heure du jour par un phénomène astronomique, il n'y a évidemment aucun inconvénient à dire: il est 7 heures quand telle étoile passe au méridien, au lieu de dire, il est 7 heures, quand le méridien du lieu passe par l'étoile. Il en est toujours de même quand la question pratique que l'on traite a pour objet l'heure d'un phénomène, puisque le phénomène apparent arrive identiquement à la même heure que le phénomène réel; or, chaque phénomène réel ou apparent; dépendant du mouvement diurne, se distingue généralement par l'heure à laquelle il arrive. De même, quand nous observons une étoile dans le plan méridien, par exemple, pour connaître sa position précise dans ce plan, il nous importe peu de savoir comment elle se trouve là: si c'est l'étoile qui est venue trouver le plan, ou le plan qui est allé trouver l'étoile.

Or, dès qu'il n'y a pas inconvénient, il y avantage à parler suivant les apparences, parce que ce sont les apparences que l'on observe, c'est avec elles qu'on est familiarisé. C'est sur elles qu'on se guide quand on veut tirer parti de l'aspect du ciel pour se diriger sur la terre; ce qui est un des principaux usages que nous voulons faire de la cosmographie. Pourquoi dès lors astreindre l'esprit à un travail le plus souvent inutile?

NOTIONS DIVERSES SUR LES ÉTOILES CONSIDÉRÉES EN ELLES-MÊMES ET INDÉPENDAMMENT DU MOUVEMENT DIURNE.

28. Coordonnées célestes des étoiles. Ascension droite et déclinaison. Pour distinguer les étoiles les unes des autres, et fixer d'une manière précise leurs positions relatives sur la sphère céleste, on emploie les coordonnées célestes. Les coordonnées célestes les plus usitées sont, d'une part, l'ascension droite et la déclinaison; d'une autre part, la longitude et la latitude célestes. Pour le moment, nous ne nous occuperons que de l'ascension droite et de la déclinaison, lesquelles suffisent, ainsi qu'on va le voir, pour déterminer la position apparente de chaque étoile sur la sphère céleste.

29. Considérons la sphère céleste en elle-même, indépendamment de tout mouvement réel ou apparent; les étoiles sont pour nous comme autant de points brillants semés sur sa surface. Figurons-nous marqués sur cette sphère les deux pôles du monde, P et P', aux deux extrémités d'un même diamètre PP', axe du monde (fig. 20); puis également tracée sur la même sphère la circonférence E'nE de l'équateur céleste, grand cercle perpendiculaire à l'axe PP'.

On a fait choix d'un point de cette circonférence, celui où passe constamment le soleil quittant chaque année l'hémisphère austral pour l'hémisphère boréal 14; ce point est celui qu'on nomme équinoxe ou point équinoxial du printemps; il se désigne habituellement par ce signe ?. Ce point équinoxial du printemps, disons-nous, a été choisi pour origine des ascensions droites que nous allons définir.

Note 14: (retour) V. chapitre III le mouvement propre du soleil.

30. Par chaque étoile N et par les deux pôles P, P' on imagine un demi grand cercle de la sphère céleste.

On nomme cercle horaire d'une étoile N le demi grand cercle PNP' qui passe par cette étoile et les deux pôles du monde P, P' 15.

Note 15: (retour) Ce nom vient de ce que chacun de ces demi-cercles passe au méridien d'un lieu donné tous les jours, à la même heure sidérale; de sorte que son passage peut servir à faire connaître cette heure même.

31. On nomme ascension droite d'une étoile, N, l'arc d'équateur céleste compris entre son cercle horaire et le point équinoxial du printemps, l'arc ?n; cet arc étant compté à partir du point équinoxial, de l'ouest à l'est, en sens contraire du mouvement diurne.

On peut, si on veut, imaginer un cercle horaire passant par l'origine ? des ascensions droites; alors on définit ainsi l'ascension droite: l'angle dièdre compris entre le cercle horaire, PNP', de l'étoile, et le cercle horaire, F?P', de l'origine, mesuré de l'ouest à l'est, dans le sens ?n'n.

L'ascension droite se compte de 0° à 360°.

32. On appelle déclinaison d'une étoile le nombre de degrés du plus petit des arcs de son cercle horaire qui vont de l'étoile à l'équateur. Exemple : la déclinaison de l'étoile N (fig. 20) est Nn.

Plus précisément: la déclinaison d'une étoile N, est l'angle NOn que fait avec le rayon visuel, ON, la trace du cercle horaire de l'étoile sur l'équateur céleste; ces deux définitions rentrent évidemment l'une dans l'autre.

La déclinaison est boréale ou australe, suivant que l'étoile est située sur l'hémisphère boréal ou sur l'hémisphère austral. Elle se compte de 0° à 90° dans l'un ou l'autre cas.

Ces mots, ascension droite et déclinaison, étant très-souvent employés en astronomie, on les écrit en abrégé de cette manière: AR, ascension droite (ascensio recta); D, déclinaison.

33. L'AR et la D d'une étoile suffisent évidemment pour déterminer sa position apparente sur la sphère céleste ; l'AR, ?n, d'une étoile N, portée sur l'équateur céleste, de l'ouest à l'est, à partir de l'origine ?, fait connaître le cercle horaire PnP' de cette étoile (fig. 20), ensuite la D, nN, boréale ou australe, fait connaître la position précise, N, de cette étoile sur ce cercle horaire. On a coutume de dire que l'étoile est à l'intersection de son cercle horaire et du parallèle céleste qui correspond à sa déclinaison.

Remarque. L'AR et la D ne déterminent pas la position précise qu'un astre occupe par rapport à la terre, mais seulement la direction de la droite qui joint ces deux corps. Ce que nous venons d'appeler l'étoile N, ou sa position sur la sphère céleste, n'est autre chose que la projection perspective de l'astre sur cette sphère, dont le rayon ON est tout à fait indéterminé. C'est le point e de la figure 1, page 2; l'AR et la D ne nous font pas connaître la distance réelle OE qui achèverait de déterminer la position réelle, E , de l'étoile par rapport à la terre. Mais connaissant les directions OE, OE', on peut trouver la distance angulaire EOE'; etc. (V. le nº 4).

34. Problème. Déterminer l'AR d'une étoile N.

On a une horloge sidérale réglée de telle manière qu'elle marque 0h 0m 0s à l'instant précis où, dans le mouvement diurne de la sphère céleste, l'origine ? des AR vient passer au méridien du lieu. Alors pour déterminer l'AR d'une étoile quelconque, il suffit de déterminer l'heure précise de son passage au méridien nº 20). Cette heure convertie en degrés, minutes, secondes, à raison de 15° pour une heure, est l'AR cherchée 16.

Note 16: (retour) (V. dans l'Appendice la manière d'effectuer simplement ce calcul.) Pour comprendre l'application de cette règle à la détermination de l'AR d'une étoile; il suffit de jeter les yeux sur une sphère céleste (fig. 20). L'AR de l'étoile N est ?n. Dans le mouvement diurne, tous les points du cercle horaire PNP' décrivent des parallèles célestes avec la même vitesse de 15° par heure, et tous arrivent ensemble au méridien d'un lieu quelconque, le point N avec le point n. Or, quand le point ? passe au méridien du lieu, à 0h 0m 0s de l'horloge sidérale, le point n est évidemment en arrière d'un arc ?n; mais il y arrive, par hypothèse, à 7h 29m 43s; donc ce point n parcourt un arc égal à ?n en 7h 29m 43s. Il parcourt 15° par heure; on calcule d'après cela le nombre de degrés de cet arc ?n (qui n'est autre que l'AR de l'étoile N).

35. Remarque. Le point équinoxial ?, origine des AR, n'est pas un point visible de la sphère céleste, c'est-a-dire que sa position sur cette sphère n'est indiquée par aucune étoile remarquable; on peut auxiliairement le remplacer par une étoile.

On fait choix d'une étoile remarquable N', voisine du cercle horaire P?P', de l'origine (fig. 20), et dont l'AR a été déterminée directement; par exemple: a d'Andromède. Cela posé, pour connaître l'AR d'une autre étoile quelconque N, on détermine la différence n'n, d'AR de cette étoile et de N'; en ajoutant le résultat à l'AR connue de N', on a l'AR de N. (?n = ?n' + nn'.)

36. Différences d'AR. Pour déterminer la différence d'AR, nn' de deux étoiles N, N' (fig. 20), il suffit évidemment de les regarder passer toutes deux successivement au méridien, de noter les heures des passages, et enfin de convertir en degrés la différence de ces heures.

37. Déterminer la D d'une étoile. En jetant les yeux sur la figure 20, on voit que la déclinaison Nn d'une étoile est le complément de l'angle NOP que fait le rayon visuel allant à l'étoile avec la ligne des pôles PP'. De sorte que si la direction de l'axe du monde est gravée sur le mural, il suffit pour obtenir la D d'une étoile, en l'observant à son passage au méridien, de lire sur le limbe du mural le nombre de degrés de l'angle NOP, et d'en prendre le complément à 90°.

38. Autre méthode. La D d'une étoile est égale à la hauteur du pôle au-dessus de l'horizon du lieu, plus ou moins la distance zénithale méridienne de l'étoile, suivant que cette étoile, à son passage supérieur au méridien, se trouve entre le zénith et le pôle, ou entre le zénith et l'équateur. Or on connaît la hauteur du pôle et l'on sait trouver la distance zénithale méridienne d'une étoile à l'aide du théodolithe ou du cercle mural.

Pour vérifier la proposition précédente

D = hauteur du pôle ± dist. zénith. mérid.

il suffit de jeter les yeux sur la figure 21.

Le cercle PEP'E' est le méridien du lieu; HH' la trace de l'horizon du lieu sur ce cercle; E'E la trace de l'équateur id.; OZ la verticale du lieu et Z son zénith.

E'P = 1quadr. ou 90°; ZH = 90°;

d'où

E'P = ZH.

Otant de part et d'autre la partie commune ZP, on trouve ZE' = PH, hauteur du pôle. Si le passage supérieur de l'étoile a lieu en N, on voit que

Décl. NE' = NZ + ZE' = NZ + PH = distance zénith. + haut. du pôle.

Si le passage supérieur a lieu en N', on a

Décl. N'E' = ZE' - ZN' = PH - ZN' = haut. du pôle - dist. zénith.

La déclinaison peut être australe; le rayon visuel passe au-dessous de l'équateur par rapport à la ligne OP; on voit aisément ce qui arrive dans ce cas.

39. Remarque. La D et l'AR d'une étoile ne varient pas durant son mouvement diurne apparent; cela est évident à priori, puisque ces coordonnées sont choisies sur la sphère céleste indépendamment de tout mouvement réel ou apparent relatif à la terre.

40. Catalogues d'étoiles. Les astronomes ont consigné dans des catalogues spéciaux les AR et les D observées d'un très-grand nombre d'étoiles plus ou moins remarquables.

À l'aide de ces catalogues on construit des globes et des cartes célestes plus commodes que les catalogues quand on veut se faire des idées d'ensemble sur les positions relatives des étoiles et apprendre à les retrouver les unes par les autres. Nous allons dire comment se construit un globe céleste; quant aux cartes célestes, elles se construisent comme les cartes terrestres géographiques. V. chapitre II le mode de construction du planisphère céleste dont nous allons nous servir.

41. Globe céleste. Sa construction.

On appelle globe céleste une sphère de carton représentant la sphère céleste, sur laquelle on a figuré exactement les positions relatives d'un certain nombre d'étoiles ou d'autres points remarquables du ciel. Les points qui représentent les étoiles, vus du centre du globe, ont exactement entre eux les mêmes distances angulaires que les étoiles elles-mêmes. Cette représentation de la sphère céleste est donc on ne peut plus exacte.

Pour construire un globe céleste, on commence par marquer les deux pôles P et P' aux deux extrémités d'un même diamètre; puis on dessine l'équateur en traçant un cercle de l'un de ses points, P, comme pôle, avec une ouverture de compas sphérique égale à la corde d'un quadrant de cette sphère. On marque un point de cet équateur comme devant représenter le point équinoxial du printemps, origine des AR. À partir de ce point marqué 0° ou ?, l'équateur est divisé en degrés, minutes, secondes, de 0° à 360°, de gauche à droite. Pour plus de commodité, on adapte provisoirement au globe un demi-cercle de cuivre qui peut tourner autour d'un axe passant par les pôles P, P'. Chaque quadrant de ce demi-cercle est divisé en 90°, de 0° à 90° en allant de l'équateur à chaque pôle; dans la demi-circonférence est pratiquée une rainure dans laquelle se meut un style.

Pour marquer la position d'une étoile sur le globe, on fait tourner le cercle de cuivre jusqu'à ce que son AR, lue sur l'équateur, soit celle de l'étoile considérée. Arrêtant le cercle dans cette position, on fait mouvoir le style dans la rainure, vers le pôle boréal ou vers le pôle austral, jusqu'au point indiqué par la déclinaison donnée; on presse alors le style sur la sphère; le point marqué est la position cherchée de l'étoile sur le globe. On met à côté, si l'on veut, un nom ou une notation indicative. On répète cette opération pour les diverses étoiles que l'on veut représenter sur le globe céleste. Cela fait, on enlève, si l'on veut, le limbe de cuivre.

42. Constellations. Pour plus de commodité dans l'observation de la sphère étoilée, on a d'abord distribué les étoiles en un certain nombre de groupes principaux, de grandeurs diverses et de formes plus ou moins remarquables, qu'on a nommés constellations.

Les anciens avaient couvert le ciel de figures allégoriques de héros et d'animaux, ils distinguaient les étoiles d'une même constellation par la place qu'elles occupaient sur la figure; ainsi ils disaient l'œil du Taureau, le cœur du Lion, l'épaule droite d'Orion, son pied gauche, etc.

Les modernes ont conservé les noms des constellations, mais en abandonnant ces figures arbitraires.

On distingue les étoiles de chaque constellation, à commencer par les plus brillantes, d'abord par des lettres grecques, a, ß, ?, d,... puis par des lettres romaines, et aussi par des chiffres ou numéros d'ordre. Cependant les étoiles les plus remarquables ont encore des noms particuliers presque tous d'origine arabe; nous en citons quelques-uns plus bas.

43. Étoiles de diverses grandeurs. Les étoiles ont d'ailleurs été distribuées par classes suivant leur éclat apparent qu'on a appelé grandeur.

Les étoiles les plus brillantes sont dites de 1re grandeur ou primaires. On s'accorde généralement à ne comprendre dans cet ordre qu'une vingtaine d'étoiles, dont 14 seulement sont visibles en Europe. Voici les noms de ces dernières, en commençant par les plus brillantes 17.

Note 17: (retour) Les noms soulignés sur le planisphère désignent les étoiles de première grandeur; les autres des constellations.

Étoiles de 1re grandeur visibles en Europe.

Sirius ou a du Grand Chien.

Arcturus ou a du Bouvier.

Rigel ou ß d'Orion.

La Chèvre ou a du Cocher.

Wéga ou a de la Lyre.

Procyon ou a du Petit Chien.

Betelgeuze ou a d'Orion.

Aldébaran ou a du Taureau.

Antarès ou a du Scorpion.

Altaïr ou a de l'Aigle.

L'Épi ou a de la Vierge.

Fomalhaut ou a du Poisson austral.

Pollux ou ß des Gémeaux.

Régulus ou a du Lion.

Viennent ensuite 65 étoiles d'un éclat assez notablement inférieur pour qu'on les comprenne dans une 2e classe: ce sont les étoiles de 2e grandeur ou secondaires.

On compte ensuite environ 200 étoiles de 3e grandeur ou tertiaires, et ainsi de suite; les nombres augmentent très-rapidement à mesure qu'on descend dans l'échelle des grandeurs.

4e grandeur, 425 étoiles; 5e, 1100; 6e, 3200; 7e, 13000; 8e, 40000; 9e, 142000.

Le ciel entier contient environ 5000 étoiles visibles à l'œil nu (de la 1re à la 6e grandeur inclusivement).

On n'en voit à Paris que 4000; 1000 restent au-dessous de notre horizon.

Au delà du 9e ordre viennent des étoiles, en nombre toujours croissant, du 10e ordre, du 11e ordre, etc., jusqu'au 16e 18.

Note 18: (retour) On conçoit que cette classification est assez arbitraire, et qu'il doit être difficile d'établir une ligne de démarcation tranchée d'une classe ou grandeur à une autre; aussi les astronomes ne sont-ils pas d'accord sur les grandeurs de toutes les étoiles; de là ces nombres indiqués par approximation.

Il n'y a pas de raison pour assigner une limite à cette progression, chaque accroissement dans les dimensions et le pouvoir des instruments ayant fait apercevoir une multitude innombrable de corps célestes invisibles auparavant.

On compte aujourd'hui 109 constellations dénommées. Nous allons indiquer quelques-unes de celles qui sont visibles à Paris, et apprendre à les retrouver dans le ciel.

Description du ciel.

44. Pour retrouver dans le ciel les étoiles les plus remarquables, on emploie la méthode des alignements. Cette méthode consiste à faire passer une ligne droite par deux étoiles que l'on connaît, puis à la prolonger dans un sens ou dans l'autre, afin de trouver une ou plusieurs étoiles remarquables situées dans cette direction. On peut, si l'on veut, s'aider d'un fil tendu dans la direction considérée; tous les points de la sphère céleste, recouverts par le fil, sont dans un même plan passant par l'œil, par conséquent sur un même grand cercle de la sphère céleste. Pour avoir une base dans l'évaluation approximative; à vue d'œil, des distances angulaires, on pourra se rappeler que la distance, ßa, des gardes de la grande Ourse (dont il va être question) est d'environ 5°, et que le diamètre apparent du soleil ou de la lune est d'environ un demi-degré.

45. Nous allons, dans une description succincte, indiquer les principales constellations visibles au-dessus de l'horizon de Paris; nous donnons le moyen de les retrouver dans le ciel en partant d'une belle constellation que chacun peut facilement reconnaître à priori. (Suivez sur le planisphère.)

Grande Ourse. Il y a vers le nord une constellation très-belle, et si remarquable qu'elle est connue même des personnes qui ne s'occupent ni d'astronomie, ni de cosmographie.

C'est la grande Ourse ou le Chariot de David (fig. 22). Elle se compose de 7 étoiles (6 de 2e grandeur et 1 de 3e), dont 4 forment un quadrilatère; les 3 autres, disposées sur une ligne un peu courbe dans le prolongement d'une diagonale du quadrilatère, forment la queue de la grande Ourse; les deux étoiles ß, a, sur le côté du quadrilatère opposé à la queue, sont les gardes de la grande Ourse.

Étoile polaire, petite Ourse. La ligne ßa des gardes de la grande Ourse prolongée au nord, d'une quantité égale à 5 fois la distance ßa, rencontre une étoile de 2e grandeur, l'étoile polaire, dont il a été question comme l'étoile visible la plus voisine du pôle boréal (1° 1/2); l'étoile polaire fait partie de la petite Ourse, constellation composée de 7 étoiles principales, et ayant, à très-peu près, la même forme que la grande Ourse, mais avec des dimensions plus petites, et dans une situation renversée (fig. 23). L'étoile polaire, située à l'extrémité de la queue de la petite Ourse, se retrouve facilement une fois qu'on connaît à peu près sa position, à cause de son éclat plus vif que celui des étoiles suivantes de la même constellation. Le pôle boréal est à côté (1° 1/2), entre la polaire et la grande Ourse.

Cassiopée. La ligne qui joint la roue de devant du chariot de la grande Ourse (d) à la polaire, prolongée au delà de celle-ci (fig. 24), rencontre Cassiopée, formée de 5 étoiles de 3e grandeur, figurant à peu près une M ouverte; si l'on joint l'étoile a, adjacente, les 6 étoiles figurent une chaise.

Pégase, Andromède, Persée. Les lignes droites qui joignent respectivement a et d de la grande Ourse à la polaire, prolongées au delà de celle-ci, comprennent entre elles, au delà de Cassiopée, le carré de Pégase, formé de 4 étoiles de 2e grandeur. Trois de ces étoiles appartiennent à la constellation de Pégase; la 4e fait partie de la constellation d'Andromède.

À peu près dans le prolongement de la diagonale du carré qui va de a de Pégase à a d'Andromède, on trouve ß et ? d'Andromède, puis a de Persée, toutes trois de 3e grandeur. L'ensemble de ces trois étoiles et du carré de Pégase forme une grande figure qui a beaucoup d'analogie avec celle de la grande Ourse.

?, a, d de Persée forme un arc concave vers la grande Ourse, facile à distinguer; du côté convexe de cet arc, on remarque Algol ou ß de Persée, dont l'éclat varie périodiquement (nº 10).

Le Lion (fig. 26). La ligne aß des gardes de la grande Ourse, prolongée au sud, du côté opposé à l'étoile polaire, va rencontrer un trapèze, étroit entre les deux bases, le Lion, renfermant une étoile primaire, Régulus, et 3 secondaires.

Le Bouvier, Arcturus. À peu près sur l'alignement des deux dernières étoiles de la queue de la grande Ourse, vers le sud-est, se trouve Arcturus, étoile primaire, faisant partie de la constellation du Bouvier, dont les autres étoiles principales forment un pentagone, au nord d'Arcturus. À côté du Bouvier, on voit la couronne boréale formée de plusieurs étoiles rangées en demi-cercle, et dont la plus grande est de 2e grandeur.

Le Cocher, la Chèvre. Le côté nord du quadrilatère de la grande Ourse (da), prolongé vers le sud-ouest, passe tout près et à l'est du Cocher, pentagone irrégulier à l'angle nord-ouest duquel se trouve la Chèvre, belle étoile primaire.

Le Taureau. Au sud, et un peu à l'ouest du Cocher, tout près, on voit le Taureau, triangle d'étoiles, dont une primaire rougeâtre, Aldébaran.

Orion. Le côté sud, ?ß, de la grande Ourse, prolongé vers le sud-ouest, au delà du Cocher, conduit sur l'équateur, à Orion, la constellation la plus belle du ciel, à cause du nombre de belles étoiles qu'elle renferme (fig. 25). Le contour est un quadrilatère ayant, à deux angles opposés, deux primaires: a ou l'épaule droite d'Orion; Rigel, ou son pied gauche; puis, dans l'intérieur du quadrilatère, on remarque sur une ligne droite, et rapprochées, trois belles étoiles, formant ce qu'on appelle le baudrier d'Orion; à côté du baudrier sont deux étoiles moins brillantes.

Sirius. Sur la direction du baudrier d'Orion, vers le sud-est, on trouve Sirius, qui est aujourd'hui la plus belle étoile du ciel. Sirius fait partie de la constellation du grand Chien.

Le Cygne. La diagonale, ?ß, de Pégase, qui se dirige du sud vers l'ouest, prolongée, va rencontrer le Cygne ou la Croix, grande constellation figurant une croix.

La Lyre. À côté du Cygne, vers l'ouest, et à peu près dans la même direction, on trouve la Lyre, qui renfermé Wéga, belle étoile primaire, à côté d'un petit triangle isocèle. Wéga passe tous les jours au zénith de Paris.

Les Gémeaux. Le côté sud, ?ß, du quadrilatère de la grande Ourse, prolongé vers le sud-ouest, vers Orion, passe auparavant à côté des Gémeaux, constellation figurant un grand quadrilatère oblique, dont le côté oriental est formé par deux belles étoiles, Castor et Pollux.

Le dernier côté de la queue de la grande Ourse, prolongé au sud-est, vers Arcturus, passe tout près de l'équateur à côté de la Vierge, renfermant une étoile primaire, l'Épi.

Procyon. La ligne, menée de la polaire à Castor des Gémeaux, va rencontrer Procyon, étoile primaire faisant partie de la constellation du petit Chien, située à peu près entre Castor et Sirius.

Voici maintenant quelques particularités très-remarquables concernant les étoiles.

Étoiles variables ou périodiques.

46. On nomme ainsi des étoiles qui, sans changer de places apparentes, éprouvent des changements périodiques dans l'intensité de leur lumière; il y en a même parmi elles-qui deviennent quelque temps tout à fait invisibles. En voici trois ou quatre exemples:

Algol ou ß de Persée est de 2e grandeur pendant 2j 14h; elle décroît ensuite pendant 3h 1/2 jusqu'à la 4e grandeur, puis elle croît de nouveau pendant 3h 1/2 pour revenir à la 2e grandeur; sa période est de 2j 20h 48m. L'étoile, ?, du Cygne a une période de 404 jours, pendant laquelle elle passe de la 5e à la 11e grandeur.

? (omicron), de la Baleine, a une période d'environ 334 jours. Pendant 15 jours elle a un éclat maximum qui est celui d'une étoile de 2e ou de 3e grandeur; cet éclat décroît ensuite pendant 3 mois; elle descend à la 7e ou 8e grandeur; puis elle devient invisible pendant 5 mois. Elle reparaît ensuite; son éclat augmentant pendant 3 mois, revient à son maximum; puis cela recommence. Il y a eu des irrégularités dans cette périodicité; ainsi cette étoile est restée une fois invisible pendant 4 ans (de 1672 à 1676).

En 1596, on remarqua l'apparition et la disparition d'une étoile du Cygne; on reconnut qu'elle avait une période de 18 ans, pendant lesquels elle était 12 ans visible et 6 ans invisible.

Dans l'hémisphère austral, on remarque ? du Navire (Argo); cette étoile d'éclat variable fut classée de 4e grandeur par Halley, de 2e grandeur par Lacaille; de 1822 à 1826, elle fut de 2e grandeur; elle fut ensuite égale à a du Centaure, étoile très-brillante du ciel austral. En 1850, elle était égale en éclat à Sirius.

Nous parlerons d'étoiles colorées; en fait de variations de couleur, nous citerons Sirius; cette étoile, qui paraissait rouge aux anciens, nous paraît blanche.

Voici en tableau quelques exemples de périodes très-diverses.

NOMS DES ÉTOILES.          PÉRIODES.              VARIATIONS
	                                         de grandeurs.

ß de Persée              2 j. 20 h. 48 m.           2e à 4e
o de la Baleine          334 j.                     2e à 0
? du Cygne               404 j.                     5e à 11e
34e du Cygne             18 ans.                    6e à 0
ß de la Lyre             6 j. 9 h.                  3e, 4e, 5e.
a d'Hercule              60 j. 6h.                  3e à 4e

Étoiles temporaires.

47. On nomme ainsi des étoiles qui, après avoir brillé d'un éclat très-vif, ont complètement disparu du ciel; quelques-unes ont apparu tout d'un coup avec un éclat extraordinaire, et, après une courte existence, se sont éteintes sans laisser de traces.

On peut citer d'abord celle dont l'apparition soudaine, puis la disparition, fixèrent l'attention d'Hipparque, 128 ans avant Jésus-Christ, et lui firent entreprendre le catalogue d'étoiles le plus anciennement connu.

L'une des étoiles temporaires les plus remarquables et les mieux étudiées est celle de 1572. Son apparition fut si soudaine que le célèbre astronome Tycho Brahé, quand il la vit pour la première fois, n'en pouvait croire ses yeux, et sortit de son observatoire pour demander aux passants s'ils la voyaient comme lui. L'éclat de cette nouvelle étoile surpassait celui de Sirius et de Jupiter; il était comparable à celui de Vénus quand elle est le plus près possible de la terre; on la voyait dans le jour, et même en plein midi, quand le ciel était pur. En décembre de la même année, elle commença à décroître. Jusque-là elle était blanche; en janvier 1572, elle était jaunâtre, puis elle passa au rougeâtre d'Aldébaran, puis au rouge de Mars; enfin elle devint blanche, d'un éclat mat comme Saturne. En janvier 1574, elle était de 5e grandeur, et finit par disparaître en mars de la même année. Cette étoile était dans Cassiopée.

C'était bien une étoile, car elle conserva constamment la même place par rapport aux étoiles; sa distance à la terre ne parut pas moindre que la leur.

En 1604, une étoile temporaire, plus brillante que Sirius, fut observée par Kepler dans le serpentaire.

Antelme, en 1670, découvrit dans la tête du Cygne une étoile de 3e grandeur, qui devint ensuite complètement invisible, se montra de nouveau, et, après avoir éprouvé en 2 ans de singulières variations de lumière, finit par disparaître de nouveau et n'a jamais été revue depuis.

Quand on fait une revue attentive du ciel en le comparant aux anciens catalogues, on trouve que nombre d'étoiles manquent. Lalande a marqué dans le catalogue de Flamsteed plus de cent étoiles perdues. Ce mécompte doit probablement quelquefois être attribué à des erreurs de catalogues; mais il est certain que plusieurs étoiles observées antérieurement ont disparu du ciel.

Des étoiles doubles.

48. On nomme étoiles multiples des étoiles qui, simples à l'œil nu ou quand on les observe avec des instruments d'une médiocre puissance, se résolvent en 2, 3 et même plus de 3 étoiles, quand on les examine avec des lunettes d'un fort grossissement. Nous ne parlerons que des étoiles doubles qui se résolvent seulement en deux étoiles; ce sont les plus nombreuses parmi les étoiles multiples.

La distance angulaire qui sépare deux étoiles peut, par deux causes différentes, être assez petite pour qu'elles se confondent à l'œil nu. Elles peuvent se trouver à très-peu près sur la direction du même rayon visuel, issu de la terre, bien que réellement très-distantes l'une de l'autre, et alors on ne les regarde pas comme de véritables étoiles doubles; ce sont des couples optiques. Ou bien elles sont réellement voisines l'une de l'autre et à même distance de la terre; ce sont les véritables étoiles doubles.

Exemples. La belle étoile Castor, des Gémeaux, fortement grossie, est formée de deux étoiles de 3e ou de 4e grandeur.

s et ? de la Couronne sont 2 étoiles doubles.

Il en est de même de l'étoile ?, de la queue de la grande Ourse.

La 61e du Cygne est formée de deux étoiles à peu près égales, distantes l'une de l'autre d'environ 15?.

Nous citerons encore l'étoile ? de la Vierge.

On connaît maintenant un grand nombre d'étoiles doubles, plusieurs milliers, lesquelles ont été distribuées en 4 classes, suivant la grandeur de la distance angulaire des deux étoiles de chaque système.

Les deux étoiles d'un même système binaire changent quelquefois de position l'une par rapport à l'autre. La plus petite tourne autour de la plus grande; ce mouvement paraît elliptique et soumis aux mêmes lois que celui des planètes autour du soleil (Lois de Képler). On constate ainsi que les lois de la gravitation universelle s'étendent jusqu'aux étoiles.

Lorsque les deux étoiles d'un groupe sont très-dissemblables, on désigne quelquefois la plus petite par le nom d'étoile satellite.

M. Struve, astronome russe, a constaté ce mouvement révolutif pour 58 étoiles doubles; il l'a trouvé probable pour 39 autres. Des observations continuées depuis qu'on a soupçonné ces révolutions ont permis de déterminer la durée de quelques-unes.

Voici les éléments des systèmes binaires les mieux étudiés (d'après M. Faye):

NOM DE L'ÉTOILE DOUBLE.    GRANDEUR          DEMI-GRAND     DURÉE
	                     des                axe         de la
                         deux étoiles.      de l'ellipse  révolution
                                              décrite

? de l'Ourse              4e  et 5e           2?,44       61 ans, 6
? d'Ophiucus              5e  et 6e           4?,97       92 ans, 3
? d'Hercule               3e  et 6e           1?,25       36 ans, 4
? de la Couronne          5e  et 6e           1?,11       66 ans, 3
? de la Vierge            3e  et 3e           3?,45      153 ans, 8
a du Centaure             1re et 2e          12?,13       78 ans, 5

Étoiles colorées.

49. Les étoiles sont blanches pour la plupart, mais il y en a de colorées. Parmi les étoiles colorées, les étoiles rougeâtres sont en majorité; telles sont a d'Orion, Arcturus et Aldébaran. Puis viennent les étoiles jaunes, la Chèvre et a de l'Aigle. Antarès du Scorpion est rouge et a la forme d'un ?. Parmi les étoiles d'un moindre éclat, on en trouve de vertes et de bleues; il y a dans l'hémisphère austral un espace de 3' 3? où toutes les étoiles sont bleuâtres.

Sirius, qui parut rouge aux anciens, nous paraît blanche depuis des siècles 19.

Note 19: (retour) En général ces colorations si diverses ne sont pas très-tranchées, et la planète Mars est d'un rouge bien plus sensible que celui des étoiles rougeatres indiquées.

Le catalogue des étoiles doubles présente la plupart de ces groupes comme composés chacun de deux étoiles diversement colorées. En général les deux nuances sont complémentaires (on appelle ainsi deux nuances qui, fondues ensemble, donnent à l'œil la sensation de la lumière blanche). Ainsi, quand l'une est rouge, ou orange, ou cramoisie, l'autre est verte, ou bleue, ou vert foncé. Il peut arriver que la coloration de la petite étoile en vert ou en bleu soit un effet de contraste. Lorsque l'œil est affecté d'une manière très-vive, par la lumière rouge, par exemple, une autre lumière qui, vue séparément, nous paraîtrait blanche, nous semble verte. Dans a du Cancer, l'une des étoiles est jaune et l'autre bleue; dans ? d'Andromède, l'une est orange, l'autre verte. Quelquefois des deux étoiles la plus grande est blanche et la plus petite néanmoins est colorée. Dans d d'Orion, la plus grande est blanche et l'autre d'un rouge prononcé. Dans a du Bélier, la plus grande est blanche et l'autre bleue. Il en est de même dans ß de la Lyre.

50. Lumière des étoiles. Les étoiles sont certainement lumineuses par elles-mêmes; quels seraient les corps lumineux assez rapprochés d'elles pour qu'elles en tirassent leur éclat? On doit donc les considérer comme autant de soleils, qui peut-être échauffent et vivifient des systèmes planétaires analogues au nôtre et invisibles pour nous. Le soleil lui-même ne parait être qu'une étoile plus rapprochée de nous que les autres.

Dimensions des étoiles. Les dimensions des étoiles sont complètement inappréciables. Plus les lunettes, à l'aide desquelles on les observe, sont puissantes, plus leur diamètre apparent est petit. Eu égard aux distances qui nous séparent des étoiles (nº 54), si l'une d'elles avait seulement un diamètre apparent bien constaté de 1?, elle serait au moins un million de fois plus grosse que le soleil.

Scintillation ses étoiles. Quand on regarde à l'œil nu une étoile brillante comme Sirius, Wega, etc., on remarque dans sa lumière un tremblement auquel on a donné le nom de scintillation.

«La scintillation, dit M. Arago, consiste en changements d'éclats trèssouvent renouvelés. Les changements sont ordinairement accompagnés de variations de couleur et de quelques effets secondaires, conséquences immédiates de toute augmentation ou diminution d'intensité, tels que des altérations considérables dans le diamètre apparent des astres, etc.»

Les observateurs sont, en général, d'accord pour dire que les planètes elles-mêmes scintillent comme les étoiles; cependant la scintillation de Saturne est fort difficile à saisir.

Distances immenses des étoiles à la terre.

51. La plus petite des distances des étoiles à la terre surpasse 206265 fois 38000000 lieues (7838070 millions de lieues). Ou bien, en prenant pour terme de comparaison la vitesse de la lumière, qui parcourt 77000 lieues par seconde, on peut dire que la lumière de l'étoile la plus voisine de la terre met plus de 3 ans à nous parvenir. C'est là un fait mathématiquement démontré, comme nous l'expliquerons plus loin.

Voici les seules distances que l'on ait pu jusqu'ici mesurer avec quelque précision; elles surpassent notablement le minimum précédent.

NOMS DES ÉTOILES.             DISTANCES           TEMPS
                             en millions     que met la lumière
                              de lieues.    à venir de l'étoile.

a du Centaure                 8 603 200          3 ans, 2
61e du Cygne                 22 735 400          9 ans,43
a de la Lyre                 29 852 800         12 ans,57
Sirius                       52 174 000         21 ans,67
t de la Grande Ourse.        58 934 200         24 ans,80
Arcturus                     61 712 000         25 ans,98
La Polaire                   73 948 000         31 ans,13
La Chèvre                   170 392 000         71 ans,74

Comme on le voit, les étoiles sont immensément éloignées de la terre; il y a de bien plus grandes distances que celles que nous citons. Il résulte, en effet, de l'ensemble des observations astronomiques, que, dans la quantité innombrable des étoiles visibles au télescope, il y en a très-probablement dont la lumière met plusieurs milliers d'années à nous parvenir.

Nous allons essayer d'expliquer succinctement comment on a pu fixer avec certitude le minimum que nous avons cité en commençant, et déterminer les distances inscrites dans le tableau.

La distance d'un astre à la terre se mesure à l'aide de sa parallaxe quand celle-ci peut être déterminée. Supposons que l'observateur occupe successivement dans l'espace les positions A et B (fig. 27); la parallaxe d'une étoile e est l'angle AeB sous lequel serait vue de l'étoile la droite AB qui joint les deux stations. Cet angle AeB est la différence des angles eBX, eAX que forment les rayons visuels avec la direction ABX de la base. Si les stations A et B sont deux points de la surface terrestre, quelle que soit leur distance, il est impossible de trouver la moindre différence entre les angles eAX, eBX; leur différence AeB n'est pas appréciable avec nos instruments. Ne pouvant trouver aucune parallaxe en se déplaçant sur la terre, on a profité de ce que la terre change elle-même de position dans l'espace en tournant autour du soleil. Elle parcourt, dans ce mouvement, une orbite elliptique dont le grand axe a 76000000 lieues de longueur; un astronome peut donc, à six mois d'intervalle, observer les étoiles de deux stations. A et B, distantes l'une de l'autre de 76000000 lieues de 4 kilomètres.

On donne le nom de parallaxe annuelle d'une étoile à l'angle sous lequel serait vu de cette étoile le demi-grand axe de l'orbite elliptique que décrit la terre autour du soleil. Il est facile de voir que si la parallaxe annuelle atteignait pour une étoile la valeur de 1?, la distance de cette étoile à la terre ne serait pas moindre que 206265 fois 38000000 lieues, près de 8 millions de millions de lieues (783807000000) 20. Or il n'existe pas d'étoiles ayant une parallaxe de cette grandeur; la plus petite des distances des étoiles à la terre est donc supérieure à 206265 fois 38000000 lieues. La lumière parcourant 77000 lieues par seconde, il suffit de diviser 783807000000 par 77000, pour avoir, en secondes, le minimum du temps que met à nous parvenir la lumière d'une étoile quelconque. C'est ce minimum que nous avons cité en commençant.

Note 20: (retour) L'angle e (fig. 27 bis), étant 1? ou une fraction de seconde, on peut, sans

erreur relativement sensible, regarder la ligne AB comme confondue avec le petit arc, au plus égal à 1?, dont elle est la corde, et qui, décrit de e comme centre avec le rayon eA = eB, mesure l'angle AeB. Or il y a dans la circonférence entière, circ eA = 2p·eA, 1296000 arcs de 1?, tels que AB; 1296000 AB = 2p·eA; d'où on déduit eA = 1296000/2p AB; or, 1296000/2p = 206265, à moins d'une unité: donc si la ligne AB = 38000000 lieues, et l'angle AeB = 1?, la distance eA = 206205 × 38000000 lieues.

Si la parallaxe AeB est seulement une fraction de seconde, 0?,35, par exemple, la distance eA sera plus grande. La circonférence qui contient 1296000?, contient 129600000 fois 0?,01, et 129600000/35 fois 0?,35; d'où l'égalité 129600000/35 AB = 2p·eA, de laquelle on déduirait eA.

M. Bessel est parvenu le premier à trouver une parallaxe annuelle pour la 61e du Cygne; cette parallaxe est de 0?,35. Connaissant cette parallaxe 0?,35, on en déduit, par des considérations géométriques très-simples (indiquées dans la note ci-dessous), la distance de cette étoile à la terre, qui est 589300 fois 38 millions de lieues.

On a calculé depuis les parallaxes annuelles des 7 autres étoiles indiquées dans notre tableau.

Voici par ordre les parallaxes des 8 étoiles désignées:

0?,91; 0?,33; 0?,26; 0?,15; 0?,133; 0?,127; 0?,106; 0?,046.

Ces parallaxes ont servi, comme celle de la 61e du Cygne, à calculer les distances consignées dans le tableau de la page 45.

NÉBULEUSES. VOIE LACTÉE.

52. Nébuleuses. Dans la partie du ciel la moins riche en étoiles, on remarque des taches blanchâtres et des amas d'étoiles qui paraissent isolés. Ex.: Les Pléiades, amas confus d'étoiles indistinctes pour une courte vue, offrent néanmoins à une bonne vue 6, 7, et même un plus grand nombre d'étoiles distinctes, mais très-rapprochées; les télescopes y font voir de 50 à 60 belles étoiles, accumulées dans un très-médiocre espace, et comparativement isolées du reste du ciel. La constellation que l'on nomme la chevelure de Bérénice, est un autre groupe du même genre, plus diffus et formé d'étoiles plus brillantes. Dans la constellation du Cancer se trouve une tache lumineuse, amas confus d'étoiles analogue aux précédents, mais moins distinct à la vue simple, et qui demande une lunette médiocre pour être résolu en étoiles. Une autre tache du même genre, mais qui demande une meilleure lunette pour la séparation des étoiles, se voit sur la poignée de l'épée de Persée. Ce sont là des nébuleuses résolues.

On donne le nom de nébuleuses à des taches blanchâtres de formes très-variées que l'on remarque çà et là dans les parties du ciel les moins riches en étoiles. Les nébuleuses se distinguent en nébuleuses résolues et en nébuleuses non résolues.

53. Les nébuleuses résolues sont celles qui, examinées au télescope, se sont résolues en un nombre plus ou moins grand d'étoiles distinctes, mais très-rapprochées; nous venons d'en citer des exemples. Il y a beaucoup de nébuleuses résolues, autres que les précédentes, et qui l'ont été avec des télescopes d'un pouvoir de plus en plus grand.

Un grand nombre de nébuleuses résolues ont la forme circulaire, mais cette forme n'est qu'apparente; une étude attentive porte à croire que la forme réelle est celle d'un globe rempli du petites étoiles généralement très-nettement terminées. L'éclat de ce globe diminue rapidement à partir du centre; mais à une certaine distance du centre, il ne diminue plus sensiblement. Il paraît y avoir là une sorte de condensation, due probablement à une attraction de ces étoiles vers le centre de la nébuleuse. Ces nébuleuses sont très-riches en étoiles; ainsi, dans une seule nébuleuse de 10' de diamètre, c'est-à-dire dans une étendue égale à environ la 10e partie du disque du soleil, on a aperçu jusqu'à 20000 étoiles. Une des plus belles nébuleuses résolues se voit entre ? et ? d'Hercule; elle est visible à l'œil nu.

Quelques nébuleuses sont perforées en forme d'anneaux; d'autres ont la forme de spirales. On en voit une perforée entre ß et ? de la Lyre; une autre à la place même où est ? d'Argo, qui en occupe le milieu. On remarque une nébuleuse en spirale très-près de ? de la grande Ourse; une autre se trouve près de la chevelure de Bérénice.

Il y a des nébuleuses qui paraissent liées entre elles comme des étoiles doubles.

Les nébuleuses ne sont pas uniformément répandues dans, le ciel; elles y forment des couches plus ou moins étendues. On remarque une de ces couches très-large dans la région du ciel où se trouvent la grande Ourse, Cassiopée, la Vierge. Dans l'hémisphère austral, il y a deux espaces très-riches en nébuleuses: le petit nuage et le grand nuage de Magellan.

Les espaces célestes les plus riches en nébuleuses sont les plus pauvres en étoiles. Ainsi, dans le corps du Scorpion, il y a un trou de 4° de large sur lequel il n'y a pas d'étoiles; mais au bord on aperçoit une nébuleuse. Il semble que les étoiles se soient rapprochées, et que cette nébuleuse se soit formée des étoiles qui se trouvaient dans cet espace.

54. Les nébuleuses non résolues ne présentent au télescope que des taches blanchâtres, souvent mal terminées et de forme irrégulière, quelquefois très-grandes; on en cite une de 4°,9. Il y en a qui offrent l'aspect de nuages tourmentés par le vent. D'autres, en petit nombre, ont l'apparence d'un disque ovale, assez bien terminé, d'un éclat uniforme; on appelle celles-là des nébuleuses planétaires 21. D'autres offrent l'aspect d'un étoile pâle et voilée; on les nomme nébuleuses stellaires, ou étoiles nébuleuses. Il y en a qui, à l'œil nu, offrent l'aspect d'une étoile ordinaire, mais qui, au télescope, paraissent entourées d'une enveloppe sphérique lumineuse. Enfin, entre a et ß de la Lyre, il y a une nébuleuse qui a la forme d'un anneau.

Note 21: (retour) Il y en a une dans le voisinage de l'étoile ? du Verseau qui a un diamètre de 20?. Ces nébuleuses planétaires, eu égard à leurs distances, doivent avoir des dimensions énormes et des diamètres plus grands que plusieurs fois la distance du soleil à la terre. Parmi ces nébuleuses, il y en a trois au moins d'une couleur bleuâtre. Quelques-unes présentent au centre une étoile très-brillante; d'autres, légèrement aplaties, présentent au centre une étoile double.

Ce qui est arrivé à l'égard des nébuleuses successivement résolues, à l'aide d'instruments de plus en plus puissants, porte à croire que la différence entre les nébuleuses résolues et les nébuleuses non résolues, ne dépend que de la plus ou moins grande puissance des télescopes. S'il en est ainsi, les nébuleuses non résolues seraient, eu égard à la faible intensité de leur lumière, des amas d'étoiles tellement éloignées de nous que leur lumière mettrait un certain nombre de milliers d'années à nous parvenir.

55. Voie lactée. La voie lactée est une immense ceinture lumineuse, blanchâtre, qui fait le tour du ciel, à peu près suivant un grand cercle, en passant par le Cygne, Cassiopée, Persée, le Cocher, les Gémeaux, la Licorne, etc. (V. le planisphère). Cette zone blanchâtre se bifurque à peu près vers l'étoile a du Cygne, sous un angle aigu; les deux branches restent séparées pendant 120° environ, et vont se réunir dans l'hémisphère austral. Vue au télescope, la voie lactée se résout en étoiles amoncelées par millions; elle fait l'effet d'une poussière d'étoiles répandue sur le noir du firmament.

56. Herschell ayant eu l'idée, suivant son expression, de jauger le ciel, c'est-à-dire de comparer la richesse en étoiles des différentes parties de la sphère céleste, reconnut qu'à mesure qu'on approche de la voie lactée, le nombre des étoiles télescopiques augmente. Avec un télescope embrassant sur la sphère céleste un cercle de 15' de diamètre, environ le quart du disque du soleil, les régions les plus pauvres en étoiles lui en montraient à la fois 5, 4,.....1 ou pas du tout, et les régions les plus riches 200, 300,..... jusqu'à 588 étoiles; dans ces dernières, il voyait ainsi passer sous ses yeux, en un quart d'heure, jusqu'à 116000 étoiles.

57. Cette étude comparative de la voie lactée et des autres parties du ciel, jointe à l'observation des nébuleuses, a conduit les astronomes à cette conclusion très-probable: Les étoiles ne sont pas uniformément répandues dans le ciel; elles y forment des groupes analogues à ceux que nous avons désignés sous le nom de nébuleuses résolues. Toutes les étoiles de la voie lactée, avec celles que nous voyons isolément autour de nous, composent ensemble un de ces groupes, au milieu duquel se trouve notre soleil avec la terre et les planètes; ce groupe est notre nébuleuse.

Les apparences que nous présente la voie lactée s'expliquent, en effet, assez bien, si on admet que nous nous trouvons au milieu d'une nébuleuse ayant à peu près la forme suivante:

Forme de notre nébuleuse. C'est une couche ou strate d'étoiles très-peu épaisse, terminée par deux surfaces planes et parallèles, excessivement étendues dans tous les sens. Cette couche se bifurque d'un côté, c'est-à-dire se sépare en deux couches semblables, formant à l'intérieur un angle très-aigu, et légèrement inclinées à l'extérieur sur la couche principale qu'elles continuent respectivement. Le soleil, avec la terre et les planètes, se trouve au milieu de la couche principale, c'est-à-dire à égale distance de ses faces parallèles, tout près de l'endroit où cette couche se sépare en deux 22.

Note 22: (retour) Pour plus de précision, nous pourrions dire que chacune des faces extérieures de notre nébuleuse nous fait l'effet d'un cercle de la sphère céleste divisé en deux parties inégales par le côté d'un triangle équilatéral inscrit, et dont la plus petite partie continuerait la grande, mais avec une légère inflexion.

Voici une coupe de notre nébuleuse, faite par un plan perpendiculaire au milieu de la ligne à partir de laquelle a lieu la bifurcation. Le soleil, avec la terre, est en S, tout près de cette ligne.

Quand nos regards se dirigent vers l'une des faces parallèles, notre ligne de visée sortant presque aussitôt de la couche, nous voyons fort peu d'étoiles dans cette direction. Si, au contraire, nos regards se portent autour de nous, dans des directions parallèles à ces surfaces, nos lignes de visée se prolongeant dans la couche elle-même, nous voyons à la fois une multitude d'étoiles. Ces étoiles, en se projetant en masse sur la sphère céleste, nous offrent l'aspect de cette ceinture lumineuse à laquelle on a donné le nom de voie lactée.

Comme nous voyons des étoiles en grand nombre, dans le sens des surfaces terminatrices, aussi loin que notre vue peut porter, même à l'aide de télescopes, nous regardons ces surfaces comme traversant la sphère céleste en entier, dans tous les sens; elles nous font ainsi l'effet de grands cercles d'une immense étendue. Mais sortons, par la pensée, de notre nébuleuse; éloignons-nous-en progressivement, dans une direction à peu près perpendiculaire aux surfaces terminatrices, pour gagner, par exemple, une autre nébuleuse. La surface que nous quittons, qui, en réalité, est limitée, et dont le contour n'est probablement pas circulaire, nous paraîtra de plus en plus petite. Quand nous serons arrivés dans l'autre nébuleuse, la nôtre nous apparaîtra sous le même aspect que les autres nébuleuses vues de la terre; elle nous fera l'effet d'une tache blanchâtre et peu étendue qui, vue au télescope, se résout en étoiles.

Si les étoiles qui, autour de nous, nous paraissaient d'abord isolées, composent avec celles de la voie lactée une nébuleuse analogue aux autres, nous avons eu raison de dire tout à l'heure que les étoiles forment dans l'espace des groupes ou amas plus ou moins considérables, séparés les uns des autres par des distances extrêmement grandes relativement aux distances qui séparent les étoiles d'un même groupe 23.

Note 23: (retour) Nous jugeons de l'immensité des distances qui séparent les nébuleuses les unes des autres par la faible lumière que nous envoient les nébuleuses, comparée à celle des étoiles distinctes. A en juger par cet indice, ces distances seraient telles, que la lumière mettrait des milliers d'années pour aller d'une nébuleuse à une autre.

58. Mouvement propre des étoiles. Ainsi que nous l'avons dit ailleurs, on a remarqué dans certaines nébuleuses des indices de condensation des étoiles autour de centres d'attraction intérieurs. Les étoiles de notre groupe ne seraient-elles pas animées d'un mouvement analogue; ceci nous conduit à parler des mouvements propres des étoiles.

Depuis que les moyens d'observation sont perfectionnés, on a reconnu en effet que les étoiles ne méritent pas rigoureusement le nom de fixes; certaines étoiles ont un mouvement propre angulaire que l'on est parvenu à mesurer. Voici quelques exemples:

L'étoile a de Cassiopée parcourt annuellement un arc de 3",74. Arcturus, la plus belle étoile du Bouvier, s'avance continuellement vers le midi avec une vitesse de 2",25 par an. Sirius, la Lyre, Aldébaran, subissent des déplacements analogues. Les deux étoiles de la 61e du Cygne, étoiles doubles qui, observées depuis 50 ans, sont toujours restées à la même distance, 15", l'une de l'autre, ont parcouru ensemble, pendant ce temps, un arc de 4' 23", ou environ 5",3 par an. Vers 1718, les deux étoiles qui composent l'étoile double ? de la Vierge étaient séparées par une distance de 6 à 7", et il suffisait d'un télescope passable pour les voir distinctes. Depuis elles se sont constamment rapprochées de manière à ne plus être qu'à 1" l'une de l'autre; et on ne les voit distinctes qu'à l'aide d'un puissant télescope. Enfin, tout porte à croire que notre soleil, qui n'est qu'une étoile semblable aux autres, se meut avec son cortège de planètes, se dirigeant vers une étoile de la constellation d'Hercule.




CHAPITRE II.

DE LA TERRE.




Des phénomènes qui donnent une première idée de la forme de la terre.

59. La surface de la terre nous apparaît comme une surface plane d'une grande étendue sur laquelle le ciel s'appuie comme une voûte. Mais ce n'est là qu'une illusion; les faits suivants, observés depuis longtemps, démontrent au contraire que la terre est un corps rond, isolé de toutes parts.

1° Quand un vaisseau s'éloigne du port, un spectateur placé sur le rivage le voit au bout de quelque temps s'enfoncer sous l'horizon; bientôt le corps du navire ne se voit plus même avec une lunette, tandis que les mâts et les voiles s'aperçoivent distinctement; puis le bas des mâts disparaît également, et enfin le haut. Pour revoir le navire, il suffit à l'observateur de s'élever davantage au-dessus du sol; ce sont alors les sommets des mâts qui reparaissent les premiers. Les mêmes faits ont lieu, mais en ordre inverse, quand un navire revient au port; on voit d'abord le haut des mâts, puis le bas, etc.

Les mêmes apparences se produisent partout en mer pour un observateur placé sur un navire qui s'éloigne ou se rapproche d'un autre navire.

Ces faits seraient inexplicables, impossibles, si la terre était plane; dans ce cas, en effet, le navire serait vu tout entier tant qu'il serait à portée de la vue distincte, et, dans le lointain, ce serait évidemment le corps du navire qui disparaîtrait le dernier apparaîtrait le premier.

Tout s'explique parfaitement, au contraire, quand on admet la convexité de la terre. L'observateur ayant l'œil en O (fig. 29), concevons en ce de ce point O une tangente à la courbe que décrit le navire sur la surface de la mer supposée convexe; soit B le point de contact. Tant que le navire n'a pas dépassé le point B, il est vu tout entier du point O; au delà du point B, la partie inférieure commence à devenir invisible; bientôt le corps du navire disparaît; on ne voit plus que la mâture en C; plus loin, en D, une partie des mâts seulement; enfin l'observateur ne voit plus rien du navire quand celui-ci est en E. S'il monte alors en O', il revoit le haut des mâts.

Les mêmes apparences se reproduisent sur le continent, quand on s'éloigne ou qu'on se rapproche d'une tour ou d'une éminence dont on est séparé par un terrain étendu et découvert. D'ailleurs, si on remarque le peu de pente des fleuves qui se rendent à la mer, et ce qui se passe à leurs embouchures où la mer montante pénètre à une assez grande distance, on en conclura que la surface de chaque continent diffère peu de ce que serait la surface continuée des mers qui le baignent, si les eaux pouvaient s'étendre librement, et prendre leur position d'équilibre en pénétrant ce continent.

2° Un autre indice analogue de la convexité de la terre, c'est qu'en approchant du pôle nord, on voit l'étoile polaire de plus en plus élevée au-dessus de l'horizon, et vice versa, quand on descend vers le sud.

Les voyages autour du monde ont prouvé jusqu'à l'évidence que la terre est un corps rond, isolé dans l'espace. Magellan, le premier, quittant le Portugal, vogua vers l'ouest, rencontra l'Amérique, la côtoya vers le sud jusqu'à ce qu'il pût continuer sa route à l'ouest, traversa le détroit qui porte son nom, entra dans l'océan Pacifique, et fut tué à l'île de Zébu par les naturels. Son lieutenant voguant toujours à l'ouest, doubla le cap de Bonne-Espérance et aborda en Europe. La terre est donc arrondie dans le sens que nous venons d'indiquer; de nombreux voyages accomplis depuis dans toutes les directions ont prouvé qu'elle l'est dans tous les sens. De plus:

60. La terre est à très-peu près sphérique. En effet:

1° L'ombre portée par la terre sur la lune dans les éclipses partielles est toujours terminée circulairement; or la géométrie nous apprend que cela ne peut avoir lieu que si la terre est sphérique.

2° Un observateur placé à une certaine hauteur au-dessus de la surface de la mer n'en découvre qu'une partie, laquelle est terminée circulairement. S'il est placé au haut d'une tour très-élevée ou d'une montagne, la partie visible de la surface terrestre lui paraît également bornée par une courbe circulaire; il en est de même en tout lieu de la terre. Or la géométrie nous apprend encore qu'il n'en peut être ainsi que si la terre est sphérique. 24

Note 24: (retour) On appelle horizon sensible d'un observateur placé à une certaine hauteur au-dessus du niveau de la mer la surface conique limitée circulairement que forment tous les rayons visuels allant à la courbe à laquée s'arrête la vue.

On conclut que cette courbe limite est circulaire des observations suivantes:

1° Les rayons visuels dirigés du même point de vue vers les différents points de cette courbe limite font avec la verticale du lieu d'observation des angles égaux.

2° Si l'observateur s'élève sur la même verticale, la courbe limite change: il voit de tous côtés plus loin qu'il ne voyait à la station inférieure. Les rayons visuels dirigés dans tous les sens vers les points de la nouvelle courbe limite font avec la verticale des angles égaux entre eux; mais ces angles sont moindres que ceux des rayons visuels allant aux points de la courbe précédente.

Ces faits ont été observés des diverses hauteurs auxquelles on a pu s'élever et à tous les endroits de la terre où on a voulu les vérifier.

En admettant que ce résultat continue à être obtenu par un observateur placé à des hauteurs de plus en plus grandes sur une verticale quelconque, ou en conclut la sphéricité de la terre. (V. la note à la fin du chapitre.)

61. Cependant nous avons dit seulement: La terre est à peu près sphérique. C'est qu'en effet, eu égard à ce que l'homme ne peut s'élever qu'à des hauteurs limitées, et aux erreurs dont peuvent être affectés les résultats des observations faites avec nos instruments pour déterminer la forme des courbes limites dont nous venons de parler, on ne peut pas conclure de ces observations, d'une manière absolue, que la terre est sphérique; on peut affirmer seulement que sa forme approche de celle d'une sphère.

Plus tard, nous dirons comment on a déterminé d'une manière plus précise la forme de la terre en mesurant différents arcs tracés sur sa surface.

CERCLES PRINCIPAUX; LONGITUDE ET LATITUDE GÉOGRAPHIQUES.

62. Sachant que la terre est un corps rond, isolé dans l'espace, on comprend plus aisément qu'elle puisse tourner sur elle-même, autour d'un de ses diamètres comme axe. Ainsi que nous l'avons expliqué précédemment, les étoiles doivent nous paraître tourner autour du même axe; la ligne idéale PP' que nous avons appelée axe du monde, et l'axe de rotation pp' de la terre, sont une seule et même droite (fig. 32) 25. De plus, la terre n'étant pour ainsi dire qu'un point dans l'espace, nous pouvons sans inconvénient regarder son centre comme étant celui de la sphère céleste.

Note 25: (retour) La droite imaginaire que nous avons appelée axe du monde, dans le chapitre des étoiles, passait par le lieu d'observation; cette ligne n'est, en réalité, qu'une parallèle à l'axe de rotation de la terre qui est l'axe vrai. Le mouvement diurne des étoiles, étudié par rapport à cet axe apparent, est tel que le verrait un observateur placé sur l'axe réel: la distance dés deux lignes, qui est au plus égale au rayon de la terre, étant d'une petitesse inappréciable par rapport aux distances célestes, il ne saurait y avoir de différence appréciable entre les observations faites par rapport à l'une et à l'autre lignes, considérées comme axes, quand il s'agit de distances angulaires entre des points de la sphère céleste.

63. Pôles. On nomme pôles terrestres les deux points p, p' où la surface de la terre est rencontrée par l'axe du monde, autrement dit, l'axe de rotation de la terre. L'un de ces pôles p, celui qui est du côté du pôle céleste boréal, s'appelle pôle boréal; l'autre p' est le pôle austral.

64. Équateur. On nomme équateur terrestre le grand cercle d'intersection de la terre par un plan perpendiculaire à l'axe pp', mené par le centre. On considère l'équateur céleste comme déterminé par le même plan E'E.

Hémisphères. L'équateur divise la terre en deux hémisphères, dont l'un, celui qui contient le pôle boréal, s'appelle hémisphère boréal; l'autre est l'hémisphère austral.

65. Parallèles. On nomme parallèles terrestres les petits cercles de la terre parallèles à l'équateur.

Chaque parallèle terrestre, gi, correspond à un parallèle céleste GI, qui est l'intersection de la sphère céleste par un cône circulaire droit, ayant pour sommet le centre commun, o, des deux sphères, et pour génératrices les rayons menés de ce centre au parallèle terrestre. L'un de ces cercles est la perspective de l'autre.

66. Méridien. On appelle méridien d'un lieu g la courbe pgp' (fig. précéd.), suivant laquelle la surface de là terre est coupée par le plan qui passe par la ligne des pôles et le point g, limité à cet axe pp'.

Dans l'hypothèse que la terre est exactement sphérique, le méridien d'un lieu g est la demi-circonférence de grand cercle, pgp', qui passe par la ligne des pôles pp' et le lieu g. Le plan de ce méridien coupe la sphère céleste suivant un grand cercle PGP' qui est le méridien céleste du lieu.

67. La position d'un lieu sur la terre se détermine au moyen de sa longitude et de sa latitude géographiques.

Longitude géographique. On fait choix d'un méridien PAP' (fig. 33) qu'on appelle méridien principal ou premier méridien; cela posé, on appelle longitude d'un lieu, S, de la terre, l'angle dièdre moindre que deux droits que fait le méridien PSP' de ce lieu avec le méridien principal PAP'; ou ce qui revient au même, la longitude d'un lieu S est le plus petit des arcs d'équateur compris entre le méridien du lieu et le méridien principal; c'est l'arc AB (l'arc mesure l'angle).

La longitude d'un lieu est occidentale ou orientale suivant que l'arc d'équateur qui la mesure, compté à partir du méridien principal, se dirige dans le sens du mouvement diurne, c'est-à-dire de l'est à l'ouest, ou en sens contraire. Exemple:la longitude AB du lieu S est orientale; la longitude AE' du lieu N est occidentale. L'une ou l'autre longitude varie de 0 à 180°.

Autrefois tous les pays avaient adopté, avec Ptolémée, un premier méridien unique, qui passe par l'île de Fer, la plus occidentale des îles Canaries; et comme le monde connu ne s'étendait pas au delà vers l'ouest, toutes les longitudes étaient orientales. Aujourd'hui chaque nation a le sien: c'est celui qui passe par le principal observatoire du pays. Pour les Français, c'est le méridien de l'Observatoire de Paris; pour les Anglais, c'est le méridien de Greenwich, qui est à 2° 20' 24? ouest de celui de Paris. Il est facile de transformer une longitude anglaise en longitude française, et vice versa (nº 74); mais il vaudrait mieux que tous les peuples s'entendissent pour adopter un premier méridien unique.

Latitude géographique. On appelle latitude d'un lieu S (fig. 33) l'angle que fait la verticale OS de ce lieu avec sa projection OB sur l'équateur; ou, ce qui revient au même, c'est le nombre de degrés du plus petit arc de méridien, SB, qui va de ce lieu à l'équateur (l'arc mesure l'angle).

La latitude est boréale ou australe suivant que le lieu est situé sur l'hémisphère boréal ou sur l'hémisphère austral; elle varie de 0 à 90°, et se compte à partir de l'équateur dans l'un ou l'autre sens. La latitude SB est boréale. La longitude et la latitude d'un lieu S déterminent évidemment sa position sur le globe terrestre. En effet, ce lieu est le point de rencontre du demi-méridien PBP' qu'indique la première, et du parallèle aSb' qu'indique la seconde. Il y a donc lieu de résoudre ce problème: Trouver la longitude et la latitude d'un lieu de la terre.

68. Détermination de la latitude. La latitude d'un lieu est précisément égale à la hauteur du pôle au-dessus de l'horizon de ce lieu. Il suffit donc de déterminer cette hauteur comme il a été indiqué nº 25.

En effet, soit ON (fig. 33 bis) la verticale du lieu, PEP'E' son méridien, E'E la trace de l'équateur céleste sur ce méridien, HH' la trace de l'horizon rationnel sur le même plan. La latitude est NE', et la hauteur du pôle PH; or les arcs NE' et PH sont égaux comme compléments du même arc PN.

Ex.: La hauteur du pôle, à l'Observatoire de Paris, est 48° 50' 11?; telle est donc la latitude de Paris à cet endroit 26.

En mer, on ne peut déterminer la hauteur du pôle comme il a été indiqué, faute de pouvoir installer sur le navire un mural ou une lunette méridienne. On fait alors usage d'un instrument qu'on appelle sextant.

Note 26: (retour) La latitude varie de 1? par distance de 30m, 9 comptée du nord au sud ou vice versa, dans le sens du méridien. Il faut donc indiquer le point de Paris dont on considère la latitude (V. longueur du mètre).

69. Calcul de la longitude. Pour déterminer la longitude d'un lieu, il suffit de connaître l'heure sidérale du lieu et celle qu'il est au même instant sous le premier méridien; on convertit la différence de ces heures en degrés à raison de 15° par heure; le résultat est la longitude cherchée (V. les Remarques, n° 70).

Les heures se comptent respectivement aux divers lieux de la terre à partir du passage au méridien de chaque lieu d'un point déterminé de la sphère céleste, d'une étoile remarquable, par exemple. Cela posé, soient pE'p' (fig. 34) le méridien principal, pBp' le méridien d'un lieu quelconque m, EBE' l'équateur céleste, ebe' le cercle diurne de l'étoile régulatrice qui tourne dans le sens ebe'. Supposons qu'au même instant il soit 5 heures au lieu m, et 2 heures sous le premier méridien pE'p'. Quand l'étoile régulatrice se trouvait en e', il était 0h 0m 0s sous le premier méridien, et 3 heures au lieu m; c'est-à-dire qu'en ce moment il y avait 3 heures que l'étoile avait passé en b au méridien du lieu m; elle a employé ces trois heures à parcourir l'arc be', dont le nombre de degrés est précisément le même que celui de la longitude E'B. Mais l'étoile parcourt 360° en 24 heures, soit 15° par heure; donc l'arc be' = BE' parcouru en 3 heures est égal à 15° × 3 (15° multipliés par la différence des heures). C. Q. F. D.

70. Remarques. Si c'est l'heure de Paris qu'on retranche de celle du lieu proposé, la longitude trouvée est orientale, puisque l'étoile, qui vient de l'est, a passé en ce lieu avant d'arriver au premier méridien.

Si c'est l'heure du lieu qu'on retranche de celle de Paris, la longitude trouvée est occidentale, puisque l'étoile venant de l'est passe en ce lieu après avoir passé à Paris.

Si la différence des heures observées surpassait 12 heures, il faudrait augmenter l'heure la plus faible de 24 heures, et retrancher l'autre heure de la somme. La différence convertie en degrés est encore la longitude cherchée; celle-ci est encore orientale ou occidentale, suivant que l'heure soustraite est ou n'est pas celle de Paris.

Ex.: L'horloge sidérale d'un lieu, m, marque 3h 24' quand celle de Paris marque 19h 37'; quelle est la longitude du lieu m?

3h 24m + 24h = 27h 24m; 27h 24m - 19h 37m = 7h 47m; en convertissant 7h 47m en degrés, on a la longitude demandée; cette longitude est orientale.

Pour justifier cette dernière opération, il suffit d'observer que la différence 19h 37m — 3h 24m, plus grande que 12 heures, correspond à un arc de cercle diurne de l'étoile régulatrice plus grand que 180°; or la longitude doit être au plus égale à 180°; la longitude cherchée est donc le complément de cet arc à une circonférence; ou, ce qui revient au même, c'est le complément à 24h de la différence ci-dessus qu'il faut convertir en degrés; 24h - 19h 37' - 3h 24 = 24h + 3h 24 - 19h 37m. C'est la soustraction que nous avons prescrite et opérée.

71. Le calcul d'une longitude se réduit donc, en définitive à la résolution de ce problème: Trouver les heures que marquent au même instant les horloges sidérales de deux lieux différents, réglées sur la même étoile? 27 Il y a pour cela diverses méthodes.

Note 27: (retour) Au lieu d'horloges sidérales, on peut se servir d'horloges bien réglées sur le temps moyen (V. le temps moyen).

72. 1º Méthode du chronomètre. Un observateur transporte, de Paris au lieu dont on veut avoir la longitude, un chronomètre ou horloge sidérale portative, réglé à l'Observatoire de Paris de manière à marquer 0h 0m 0s à l'instant où une certaine étoile remarquable passe au premier méridien. Il lui suffit de comparer sur place l'heure du chronomètre à celle d'une horloge sidérale. marquant 0h 0m 0s à l'instant où cette même étoile passe au méridien du lieu.

S'il n'y avait pas en ce lieu d'horloge sidérale, en mer par exemple, on y déterminerait l'heure du lieu par des observations astronomiques; l'heure marquée en ce moment par le chronomètre ferait connaître la différence des heures sidérales de Paris et du lieu.

73. 2º Méthode du télégraphe électrique. L'admirable et récente invention du télégraphe électrique donne le moyen de résoudre la question qui nous occupe pour deux lieux mis en communication par un fil électrique. À l'instant d'un signal transmis, deux observateurs regardent les horloges sidérales de ces lieux, réglées sur la même étoile, puis se communiquent respectivement les heures observées. La transmission du signal pouvant être regardée comme instantanée, ces heures correspondent au même moment.

74. 3º Signaux de feu. Avant la découverte du télégraphe électrique, Cassini avait employé la méthode des signaux de feu, qui peut encore être employée à défaut de fil électrique. Deux observateurs, séparés par une distance de 20 à 30 lieues, munis de chronomètres et de lunettes, aperçoivent au même instant une fusée lancée durant la nuit à une station intermédiaire; leurs chronomètres leur indiquent alors les heures sidérales de leurs stations respectives.

Cette méthode peut être appliquée à deux lieux, A et B, séparés par une distance trop grande pour que le même feu soit vu à la fois de l'un et de l'autre.

   C     C'           C?
–––––––––––...........––––––.....
A     A'     A?               B

On partage la distance AB par les stations intermédiaires A', A?, en intervalles tels que chacun rentre dans le cas précédent; des observateurs se placent en A, A', A?, B. Un premier signal C se produisant entre A et A', les observateurs y notent leurs heures respectives; supposons qu'il soit alors h heures au lieu A. Après un temps ts que l'observateur en A' peut mesurer, un second, signal C se produit entre A' et A?; on y note les heures. Après un nouveau temps t's que l'observateur en A? peut mesurer, un troisième signal C? se produit entre A? et B; on y note les heures. Supposons qu'il soit alors h' heures au lieu B; l'heure de A au même instant est évidemment h heures + ts + t's.

75.Emploi du sextant. On se sert en mer, pour la détermination des longitudes, d'un instrument qu'on appelle sextant.

76.Signaux astronomiques. Certains phénomènes célestes, tels que les éclipses des satellites de Jupiter, les occultations d'étoiles par la lune, les distances angulaires de la lune au soleil ou à certaines étoiles principales, visibles au même instant en des points de la terre très-éloignés les uns des autres, sont d'excellents signaux pouvant servir à la détermination des longitudes. L'heure de chacun de ces phénomènes, en temps de Paris, se trouve dans un livre appelé la Connaissance des temps, publié à l'avance par le bureau des Longitudes de France; la différence de cette heure et de celle du lieu au même instant donne la longitude.

77. Au lieu de comparer l'heure d'un lieu à celle du premier méridien, il est quelquefois plus commode de la comparer à celle d'un lieu dont la longitude est déjà connue. On a aussi besoin de convertir la longitude relative à un méridien en longitude relative à un autre méridien.

Problème. Connaissant la longitude l d'un lieu G par rapport au premier méridien, et la longitude l' d'un lieu B par rapport au lieu G, trouver la longitude, x, du lieu B par rapport au premier méridien.

Ex.: Connaissant la longitude de Greenwich par rapport à Paris, convertir une longitude anglaise donnée en longitude française.

Le second lieu peut avoir par rapport au premier, G, l'une des quatre positions B, B', B?, B? (fig. 35). 1º Il a la position B quand les longitudes l et l? sont de même nom et que leur somme ne dépasse pas 180°; alors PB = PG + GB ou x = l + l'. 2º Il a la position B' quand les longitudes données étant toujours de même nom, leur somme PG + GB' dépasse 180°; la longitude cherchée x = PG'B' = 360° — (l + l'); elle est de nom contraire à l et à l'. 3º Le second lieu a la position B?; l = PG et l' = GB? sont des longitudes de noms différents; alors la longitude x = GB?- GP = l'l est de même nom que l'. 4º Enfin le second lieu étant B?, on a x = GP-GB? = ll', de même nom que l.

78. Commencement du même jour sidéral en différents lieux. Le jour d'une date précise quelconque, le 19 mai 1856 par exemple, commence d'abord pour les lieux situés sous le méridien PA'P' opposé à celui de Paris (fig. 33), à l'instant où l'étoile régulatrice passe à ce méridien; puis le jour de même date commence successivement à chacun des autres lieux du globe, considérés dans le sens A'EAE', au fur et à mesure que l'étoile, venant de PA'P', passe au méridien de ce lieu.

Imaginons un navire parti d'un port français de l'Océan, de Brest, par exemple, se dirigeant vers l'ouest; ayant tourné le continent américain, il a continué à s'avancer vers l'ouest, et vient à dépasser le méridien PA'P'. Il devra augmenter d'un jour la date du journal du bord, s'il veut être d'accord avec les habitants du port où il arrivera postérieurement. Le contraire aurait lieu si un navire passait ce méridien PA'P' en venant de l'ouest.

79. Problème. Trouver la plus courte distance de deux lieux, S, N de la terre supposée sphérique, connaissant leurs longitudes et leurs latitudes (fig. 33). Les arcs PS, PN, menés du pôle à chaque lieu, forment avec l'arc SN un triangle sphérique dont on connaît deux côtés, PS = 90 ± latitude de S, PN = 90° ± latitude de N (suivant que la latitude considérée est boréale ou australe), et l'angle SPN qui est la somme ou la différence des longitudes, suivant que les longitudes sont de noms différents ou de même nom. Tout cela se voit à l'inspection de la figure; on calculera facilement SN.

Étude précise de la forme de la terre. Valeurs numériques des degrés en France, en Laponie, au Pérou; leur allongement quand on va de l'équateur vers le pôle.

80. Pendant longtemps on s'en est tenu à la première idée que donnent de la forme de la terre les phénomènes que nous avons indiqués au commencement de ce chapitre; jusqu'à la fin du XVIIe siècle, on a considéré la terre comme sphérique, et on s'est seulement occupé d'en déterminer la grandeur. Dans cette hypothèse, il suffit évidemment de déterminer, par des mesures exécutées sur la surface même de la terre, la longueur d'un arc de méridien d'un nombre de degrés connu; de la longueur d'un degré on déduit celle de la circonférence, et de celle-ci la longueur du rayon.

Diverses mesures ont été ainsi exécutées, même dans l'antiquité 28. Parmi les modernes, le premier qui essaya de mesurer la longueur d'un degré fut Fernel, médecin de Henri II; il se dirigea de Paris vers Amiens, en comptant exactement le nombre des tours de roue de sa voiture; il trouva ainsi pour la longueur du degré, 57070 toises.

Note 28: (retour) La plus remarquable des mesures exécutées dans l'antiquité est attribuée à Ératosthène, à la fois géomètre, astronome, et géographe, qui vivait 256 ans avant J.-C. Il trouva pour la longueur du degré 694 stades. On ne connaît pas précisément la longueur du stade; cependant on croit ce résultat peu éloigné de la vérité.

Mais la première mesure qui ait été obtenue par des méthodes de précision dignes, de toute confiance, est due à l'astronome français Picard. Établissant un réseau géodésique entre Paris et Amiens, il trouva pour la longueur du degré, 57060 toises.

81. À la fin du XVIIe siècle, Newton et Huyghens, guidés par des considérations théoriques, émirent cette opinion: La terre n'est pas sphérique; c'est un ellipsoïde de révolution, aplati vers les pôles et renflé à l'équateur, c'est-à-dire que sa surface est semblable à celle que décrit une ellipse tournant autour de son petit axe PP' (fig. 37, ci-après). L'Académie des sciences s'occupa aussitôt de vérifier ces indications de la théorie; la seule différence entre l'ancienne hypothèse et la nouvelle consiste en ce que, dans la première, chaque plan méridien, c'est-à-dire mené par l'axe, coupe la surface de la terre suivant une circonférence de cercle (fig. 36), tandis que dans la seconde, il la coupe suivant une ellipse aplatie vers les pôles (fig. 37); c'était donc la forme de la courbe méridienne qu'il fallait étudier. Pour cela, on a mesuré la longueur du. degré à diverses latitudes (V. la note) 29.

Note 29: (retour) Mesure d'un arc de méridien. Définitions. On nomme méridien ou courbe méridienne, sur la surface de la terre, la courbe suivant laquelle cette surface est coupée par un plan mené par la ligne des pôles. Deux lieux A et B sont sur le même méridien quand la même étoile passe au méridien dans les deux lieux à la même heure de l'horloge sidérale.

Un arc de 1°, 2°, 3°,.... du méridien est un arc A'B' (fig. 37), tel que les deux normales à la courbe, autrement dit les verticales, A'I, B'I, menées à ses extrémités, font entre elles un angle A'IB' de 1°, 2°, 3°...... Cet angle A'IB' est précisément égal à la différence des latitudes des lieux A' et B', si ces lieux sont sur le même hémisphère; puisque la latitude d'un lieu, (nº 64), est égale à l'angle que fait la verticale du lieu avec sa projection sur l'équateur; A'IB' = A'Ie-B'Ie.

Le nombre des degrés d'un arc AB étant connu, il faut mesurer cet arc avec l'unité linéaire, la toise, par exemple. Si l'arc AB est sur une surface unie, découverte, on procède à cette mesure à la manière des arpenteurs, en employant seulement des instruments de mesure plus précis et plus de précautions. Mais dans le cas d'obstacles intermédiaires s'opposant à cette mesure, ce qui arrive presque toujours, on établit ce qu'on nomme un réseau géodésique.

On choisit, dans le voisinage des lieux où l'on suppose que l'arc AB doit passer, des points C, D, E, F,...... placés de manière à pouvoir être aperçus de loin (fig. 38). Concevons que les points A, C, D, E, F, etc.. soient liés entre eux comme la figure l'indique, par des triangles que traverse la direction de l'arc AB. Parmi les côtés de ces triangles on choisit celui qui peut être mesuré le plus aisément; supposons que ce soit EG; c'est ce qu'on appelle une base. Connaissant EG et les angles E et G du triangle EGF, on peut résoudre ce triangle. Connaissant EF et les angles E et F du triangle EDF, on peut résoudre ce triangle. Connaissant ED et les angles D et E du triangle EDC, on peut résoudre ce triangle. Enfin, pour la résolution du triangle ACD, on connaît AC et AD. Connaissant, à partir de A, la direction de la méridienne, dont tous les segments AL, LM, MO,..... à cause de leur peu d'étendue, sont considérés comme des lignes droites, on peut mesurer les angles CAL, DAL; on peut donc résoudre le triangle ALD; ce qui donne le segment AL et la longueur DL. Connaissant DL, l'angle D et l'angle DLM du triangle DLM, on résout le triangle, et on calcule le segment LM et la longueur DM. Dans le triangle EMO, on connaît EM, l'angle E et l'angle M; ainsi de suite jusqu'à ce qu'on arrive à la fin du réseau. Ayant la longueur de AB en toises, on la divise par le nombre de degrés de cet arc pour avoir la longueur d'un degré.

De ce que la longueur du degré va en augmentant avec la latitude, on conclut (fig. 37) que chaque méridien s'aplatit, c'est-à-dire que sa courbure diminue quand on va de l'équateur au pôle. Voici une manière, entre plusieurs, d'expliquer ce fait: Soit AB (fig. 37) un arc de 1°, voisin de l'équateur; A'B' un autre arc de 1°, voisin du pôle; on sait que A'B' > AB. On peut, à cause du faible aplatissement de l'ellipse méridienne, regarder chacun des arcs AB, A'B' comme confondu avec l'arc de cercle qui passerait par son milieu et ses extrémités. À ce point de vue, AB et A'B' sont des arcs de 1° appartenant à des circonférences de rayons différents r, r'. Puisque l'on a A'B' > AB, on doit avoir r' > r; (360 A'B' = circ. r' > 360 AB = circ. r). Cela posé, pour comparer les courbures de ces deux arcs, rapprochons-les comme il suit: sur une ligne indéfinie X'X (fig. 39) élevons une perpendiculaire GH, et prenons à partir de G, GO = r. GO' = r'; puis des points O et O' comme centres avec les rayons OG, O'G', décrivons deux arcs de cercle passant en G; ces deux arcs sont tangents à X'X en G. Si on prend QGP = 1°, Q'GP' = 1°, le milieu étant en G, ces arcs ne seront évidemment que la reproduction des arcs AB, A'B' rapprochés l'un de l'autre. L'arc Q'GP' ou A'B' se rapprochant plus de la ligne droite X'GX que QGP ou AB, est moins convexe ou plus aplati que AB.

Nous avons pris AB = 1°; on peut, pour éviter toute objection, supposer AB aussi petit que l'on veut.

Si la courbe méridienne est une circonférence de cercle, la longueur du degré doit être la même à toutes les latitudes (fig. 36); si c'est une ellipse aplatie vers les pôles, la longueur du degré doit être plus grande aux environs du pôle qu'à l'équateur, et en général augmenter avec la latitude (fig. 37). En outre, comme on savait à priori que la forme de la terre approche de celle d'une sphère, il fallait exécuter des mesures à des latitudes assez diverses pour que les différences entre les valeurs numériques du degré, si elles existaient, fussent assez notables pour ne pouvoir pas être attribuées aux erreurs des observations. On ne s'est donc pas contenté des mesures exécutées en France; la Condainine et Bouguer se transportèrent au Pérou, Maupertuis et Clairaut se rendirent en Laponie, afin d'y mesurer des arcs de méridien. Les résultats obtenus confirmèrent les prévisions de Newton et Huyghens.

82. Voici ces résultats, auxquels nous en joignons de plus récemment obtenus pour qu'on voie mieux la variation du degré:

LIEUX.               LATITUDE                LONGUEUR
                     moyenne.              de l'arc de 1°.

Pérou                1° 31                   56737 toises
Inde                12° 32' 21?              58762
France              46°  8'  6?              57025
Angleterre          52°  2' 20?              57066
Laponie             66° 20' 10?              57196

83. Toutes les mesures analogues exécutées jusqu'à nos jours en France, en Angleterre, en Espagne, en Russie, dans l'Inde, sur des arcs d'une assez grande étendue, ont constaté que la longueur du degré augmente constamment de l'équateur aux pôles. En résumé, sauf quelques irrégularités locales de peu d'importance, tous ces travaux concourent à établir la vérité de la proposition énoncée par Newton et Huyghens. Ainsi donc:

Forme de la terre. La terre n'est pas absolument sphérique; c'est un ellipsoïde de révolution un peu aplati vers les pôles et renflé à l'équateur; c'est-à-dire que sa surface est semblable à celle que décrit une ellipse tournant autour de son petit axe (V. fig. 37).

84. Dimensions de la terre; longueur du mètre. Quand la convention nationale décida en 1790 que l'unité de longueur, base du système uniforme de mesures qu'elle voulait établir en France, serait prise dans la nature, c'est-à-dire aurait un rapport simple avec les dimensions de la terre, elle ordonna qu'il serait procédé à la détermination aussi exacte que possible de ces dimensions. En exécution de cet ordre, Delambre et Méchain mesurèrent l'arc de méridien compris entre Dunkerque et Barcelone. La commission des poids et mesures, combinant leurs résultats avec ceux qu'on avait déjà obtenus en Laponie et au Pérou, en conclut que le méridien terrestre est une ellipse dont l'aplatissement a pour mesure 1/334, et dont le quart a pour longueur 5130740 toises. La dix-millionième partie de cette longueur fut choisie sous le nom de mètre pour unité de longueur; ainsi 10000000 mètres = 5130740 toises; d'où on déduit la longueur du mètre.

Le mètre légal vaut 0 toises, 5130740 = 3 pieds 0 pouce 11 lignes, 296.

(On sait que la toise vaut 6 pieds, le pied 12 pouces, le pouce 12 lignes.)

De nouveaux arcs terrestres ont été mesurés depuis 1795; les travaux de Delambre et Méchain ont été continués et vérifiés par divers savants 30. En discutant toutes les mesures, tant anciennes que nouvelles, M. Bessel a trouvé que les nombres 1/334 et 5130740 toises étaient trop petits et devaient être remplacés par ceux-ci: 1/299 et 5131180 toises. Voici ce qui résulte de ce travail de révision de M. Bessel en ce qui concerne les dimensions de la terre:

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