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Nouveaux contes cruels et propos d'au delà

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NOTE BIBLIOGRAPHIQUE

Nouveaux Contes Cruels.—Sur les huit contes de la première édition (1888, Librairie illustrée), sept parurent cette même année 1888: la Torture par l'espérance, les Amies de pension, l'Enjeu, Sœur Natalia, l'Incomprise, dans le Gil Blas; l'Amour du naturel, dans le Figaro; le Chant du Coq, dans la Revue Libre.

Villiers de l'Isle-Adam, redoutant que son éditeur n'accompagnât le volume d'illustrations, dans le dessein de justifier sa firme, spécifia qu'il refuserait toute gravure. Deux ans auparavant, il avait, en effet, éprouvé un violent mécontentement, lors de la mise en vente d'un autre recueil de contes, l'Amour suprême, lequel avait été «orné» de têtes de chapitre vulgaires. On ne lira pas sans intérêt la curieuse protestation rédigée, à ce propos, par Villiers. Elle touche à plusieurs sujets. La voici:

M. B***, éditeur, place des Vosges, doit faire paraître aujourd'hui lundi, un de mes livres, intitulé l'Amour suprême.

Je m'oppose à la mise en vente de ce livre, et j'en réclame la saisie chez M. B*** pour les motifs suivants:

1o Ce volume (ainsi que je suis en mesure de le prouver au tribunal) contient trois nouvelles de plus que celles consenties par moi. Je ne sais en vertu de quel droit M. B*** s'en est accordé la propriété (C'est un jeune homme, et qui vient d'acheter la maison d'édition où il s'est installé).

2o Diverses illustrations ont été faites en ce livre, sans m'avoir été soumises et même contre mon gré. Presque toutes sont de nature à nuire pour plusieurs raisons sérieuses (celle, par exemple, d'escompter tout l'intérêt que peut offrir l'«inconnu» d'une nouvelle, en le présentant immédiatement, en un dessin, sous les yeux du lecteur,—lequel dès lors, perdant toute curiosité possible, ne s'intéresse plus);—etc., etc.,—plusieurs mêmes travestissent les nouvelles qu'ils semblent commenter, et d'une façon ridicule.

3o Aucun bon à tirer d'aucune nouvelle n'a été donné par moi. Aucune deuxième épreuve ne m'a été soumise,—et l'on a tiré, imprimé, illustré, etc., sans me communiquer même une seule épreuve des trois Nouvelles, que l'on s'est appropriées sans droit.

4o Les fautes d'impression, depuis la première ligne du livre jusqu'à la dernière, sont telles que cela finit par nuire même à la considération littéraire d'un auteur. C'est simplement une dérision.

5o En ne me communiquant pas d'épreuves de plusieurs Nouvelles, en lésant ainsi mon droit et mon devoir d'auteur, M. B*** m'a également privé de mon droit de dédicace de ces nouvelles, de telle sorte que, les ayant promises, il se trouve qu'il me fait manquer à ma parole, en me pillant et en m'imprimant sans mon consentement.

6o M. B***, par des lettres successives que j'ai collectionnées, ne m'a jamais donné plus de 24 heures pour corriger les premières épreuves des quatre nouvelles sur treize qu'il m'a envoyées; il me menaçait dans ses lettres de donner le bon à tirer pour une heure de retard, alors que j'ai droit de donner ce bon à tirer et que l'imprimeur qui lui a obéi (savoir M. M***) est, lui-même, responsable d'avoir agi, comme l'éditeur, au mépris des lois de la presse les plus élémentaires.—J'intente donc une action contre l'un et l'autre, et, pour me couvrir, tout d'abord, du dol qui m'est causé par la mise en vente de ce livre, je le saisis simplement.—Comte de Villiers de l'Isle-Adam.

Nouveaux Contes Cruels et Propos d'Au Delà.—Cinq derniers contes et des pages inédites, réunis sous le titre de Propos d'Au Delà que Villiers réservait, dès 1887, parmi ses œuvres à paraître, complétèrent cette réédition (Calman Lévy, 1893). Le Gil Blas avait donné l'Elu des rêves, en 1888; l'Universal Review, l'Amour sublime, le 18 avril 1889; le Figaro, le Meilleur Amour, dans son supplément littéraire du 10 août 1889, quelques jours avant la mort de Villiers de l'Isle-Adam. Il faut relire dans les Promenades Littéraires, les lignes émouvantes tracées par Remy de Gourmont, sur les instants qui précédèrent l'heure suprême. A Saint-Jean-de-Dieu, Villiers énumère des projets, s'inquiète de changements apportés par le secrétariat du «Supplément littéraire», à son manuscrit du «Meilleur Amour»; et il parlait «bas, las, déjà étreint par la mort…»

Les autres Contes étaient posthumes. Les feuilles finales appartenaient à un roman, auquel Mme J. Gautier et Villiers projetèrent de collaborer, sous forme de correspondance; mais il n'y eut jamais que cette première lettre.

C'est Remy de Gourmont qui reconstitua les Filles de Milton. Il fit suivre le conte inédit de la note suivante (Echo de Paris, 17 février 1891):

Manuscrit inédit de Villiers de l'Isle-Adam. Cinq feuillets in-fo, dont les deux derniers écrits sur les deux faces. C'est un brouillon tout de premier jet, qui ne porte aucune trace de corrections postérieures. Il doit dater du printemps 1888. Du moins, à cette époque, Villiers se préoccupait de plus amples renseignements sur Milton et sur sa famille. La copie est rigoureusement textuelle; des lignes de points séparent différents fragments qui n'ont pas entre eux de lien bien logique.—R. de Gourmont.

Fragments.Isabeau de Bavière. Ecrites à la même date que Hypermnestra et Lady Hamilton (Chez les Passants; collection «les Proses», Georges Crès, 1914), et pour cette même série des «Grandes Amoureuses» de l'éditeur A. Lacroix, Villiers a extrait de ces pages le «Conte cruel», la Reine Ysabeau. Elles attestent ses recherches en vue du Mémoire destiné à disculper Jean de Villiers, au cours du procès intenté, en 1876, aux auteurs de «Perrinet Leclerc», et la préparation du livre: Documents sur les règnes de Charles VI et Charles VII, annoncé pendant de nombreuses années.

Les notes sur Philomela et Paul Forestier furent insérées dans la Revue nouvelle (1er décembre 1863) et dans la Revue des Lettres et des Arts (2 février 1868), dont Villiers de l'Isle-Adam était rédacteur en chef. La représentation de la pièce d'Emile Augier avait eu lieu sur la scène du Théâtre français, le 25 janvier 1868. Gog est le fragment d'un poème, non retrouvé, porté au verso du faux-titre de l'édition originale du Nouveau Monde; de cette époque, également, Ave, mater, imprimé avec le sous-titre: «Hymne français», par un petit journal d'alors, le Parnasse (1er juillet 1877); le manuscrit de Tarentelle recèle l'indication: «A collationner».

On pourrait, en complément à cette bibliographie fragmentaire, ajouter un article de Villiers sur le général Margueritte. La Mort d'un héros (Figaro, 12 avril 1884) retrace la carrière du général:

A Fresnes-en-Wœvre, chef-lieu du canton où est né le général Margueritte, la statue du glorieux soldat, le plus jeune général de l'armée française, tombé à Sedan, sera inaugurée en juillet prochain. Sur la demande du commandant Rogier, la souscription, autorisée par l'Etat qui a fourni le métal de ce monument, et subventionnée par la foule, a été couverte avec un pieux enthousiasme. Arabes et Français se sont souvenus, ensemble cette fois, du bon organisateur, du chef loyal et intrépide. Le bronze a été commandé au sculpteur Lefeuvre. Il représente le général Margueritte au moment de la blessure, tendant l'épée vers l'ennemi, et soutenu par un chasseur d'Afrique dont le bras lui entoure la taille, dont le genou lui maintient la jambe.

Le groupe est d'une mâle et grave beauté. Le piédestal, haut de six mètres, taillé dans le marbre des Vosges, retracera dans ses bas-reliefs des épisodes de la vie militaire, terminée à quarante-neuf ans, de ce défenseur du sol français.

A grands traits, Villiers marque les états de service du général Margueritte, puis vient le récit de sa mort, d'après un manuscrit (publié depuis, en brochure), de son fils, M. Paul Margueritte, «qui a su consacrer à la mémoire de son père des pages d'un style à la fois simple, précis et touchant». Et Villiers termine:

Le lendemain, les plus grands honneurs furent rendus à sa dépouille mortelle par le duc d'Ossona, le général Thiebaud et les officiers de l'armée belge présents à Beauraing.

Margueritte avait adopté, pour sa vie, une devise austère, digne de sa belle âme et qui impressionne comme un appel de l'exil: Duc in altum! Vers la haute mer.

Plus tard, par les soins de la veuve et des enfants qui eurent souci de son dernier sommeil, son cercueil fut transporté en Algérie, terre de sa bonne œuvre et de sa première blessure.

Maintenant, il dort là, sur le versant d'une colline brûlée, le jour par le soleil—et dont le silence n'est troublé, la nuit, que par le rugissement lointain des lions.

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