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Variétés Historiques et Littéraires (04/10): Recueil de pièces volantes rares et curieuses en prose et en vers

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1: Les Œuvres de Philippe Des Portes, abbé de Thiron, reveues et corrigées, Rouen, 1591, in-12, p. 575, Stances du Mariage.

2: Var.: d'angoisseuses langueurs.

3: Cette stance, dans la pièce de Des Portes, suit celle qui a été citée tout à l'heure.

4: Poison, comme le mot latin potio, dont il est le dérivé, fut long-temps du féminin. C'est Vaugelas et Balzac qui lui assignèrent le genre qu'il a gardé depuis, et cela en dépit de Malherbe, et même de Ménage, qui, dans ses Observations sur les poésies de ce dernier (Paris, 1666, p. 451), soutient qu'en vertu de l'étymologie, c'est le féminin qui eût dû prévaloir. Le peuple est resté de l'avis de Ménage et du latin.

5: C'est la 9e des Stances de Des Portes.

6: C'est la 6e stance.

7: Var.: Tyran injurieux.

8: On disoit alors: «Il est de Saint-Prix, il est marié.» (Oudin, Curiositez françoises, p. 494.) Quant à saint Mar, comme on écrit ici, en faisant suivre son nom du refrain ribon, ribaine, on faisoit aussi de lui le patron des maris, très marris, comme dit Molière.

9: La 11e des stances de Des Portes.

10: Molière donne une variante de ce proverbe quand il dit, dans le Médecin malgré lui (acte 3, scène 3): «Là où la chèvre est liée, il faut bien qu'elle y broute.»

11: V. l'avant-dernière note de la page 8.

12: C'est la 16e stance de Des Portes.

13: Var.: il se faut.

14: 15e stance de Des Portes.

15: Encore un proverbe dont Molière a donné une variante, mais cette fois très opposée:

La poule ne doit pas chanter devant le coq.

Les femmes sçavantes (act. V, sc. 3).

Jehan de Meung avoit dit dans le Roman de la Rose:

C'est chose qui moult me desplaist
Quand poule parle et coq se taist.

16: Stance 17e de Des Portes.

17: Var.: ainsi.

18: Ce n'est ainsi qu'un proverbe tronqué: pour qu'il soit complet, il faut dire comme on le faisoit au moyen âge: Pauvreté n'est pas vice, mais c'est une sorte de ladrerie: chacun la fuit. Ce qui revient à la variante si énergique de Dufresny: Pauvreté n'est pas vice; c'est bien pis.

19: Var.: Si vous l'épousez belle.

20: La stance 18e de Des Portes.

21: La 19e stance de Des Portes.

22: Var.: Quand la plus belle femme.

23: Stance 24e de Des Portes.

24: 25e stance.

25: Var.: Qu'ils soyent chargez.

26: C'est un mot perdu et très regrettable. Marmontel, qui tenoit pour notre vieille langue, indique par cette phrase la demi-teinte d'ingratitude qu'il faut y découvrir: «Il ne faut jamais être oublieux au point d'être méconnoissant.» (Mémoires, Paris, 1804, in-8, t. 2, p. 97.)

27: Cette stance ne se trouve pas dans l'édition de Des Portes par Raphael du Petit-Val.

28: V., sur ce mot et sur ceux de daron et dariolette, une note de notre tome 3, p. 145.

29: Les gens de finance, en effet, primoient tout alors.

30: Henri IV avoit été assassiné le 14 mai 1610.

31: La reine-mère, Marie de Médicis, avoit quitté la cour depuis 1617.—Le jeu de l'ecart, c'est l'ecarté.

32: C'est le nom qu'on donnoit à ceux qui tenoient pour le parti des princes. V. notre tome 3, p. 353, note 2.

33: Le fredon, au jeu de cartes, consistoit à avoir trois ou quatre cartes semblables, rois, dames, valets ou as.

34: On joue ici sur le vieux mot ase, qui signifie âne. Ces trois ases étoient Luynes et ses deux frères.

35: Pharamond, qui avoit ses campements ordinaires dans les marais de la Zélande, du Brabant, etc., portoit pour cela, disoit-on, trois crapauds sur son écusson. C'est une erreur qu'il est inutile de réfuter. Elle eut cours très long-temps et fut cause, selon Favin, que chez les Flamands on donna long-temps aux François le surnom injurieux de crapauds franchots. (Favin, Histoire de Navarre, liv. 7, p. 399.)

36: La reine, sur le conseil du maréchal d'Ancre, avoit fait mettre le prince de Condé à la Bastille le 1er septembre 1616.

37: Le père Arnoux étoit confesseur du roi. V. notre tome 3, p. 256.

38: Luynes fut d'abord page de la chambre du roi sous M. de Bellegarde. (Tallemant, historiette du connetable de Luynes, édit. in-12, t. 2, p. 39.)

39: Le maréchal d'Ancre, qui passoit pour être l'amant de la reine-mère. Nous donnerons dans les prochains volumes plus d'une pièce où cette injure toute italienne de coyon, qui étoit devenue le surnom de Concini, se trouvera surabondamment expliquée. V. plus loin le Songe.

40: Les PP. Arnoux et Seguirand, confesseurs du roi. V. plus haut.

41: «Il (Luynes) aimoit fort les oiseaux et s'y entendoit. Il s'attachoit fort au roi, et commença à lui plaire en dressant des pies-grièches.» (Tallemant, loc. cit.)

42: Le grand-père de Luynes, en sa qualité de chanoine, portoit en effet la couronne, c'est-à-dire la tonsure, sur le sommet de la tête. V., sur lui et sur sa concubine, Tallemant, loc. cit.

43: Cette pièce est l'une des plus curieuses et des plus rares qui aient été faites contre le maréchal d'Ancre. Nous ne l'avons pas trouvée indiquée à sa date dans le tome 1er du Catalogue de l'histoire de France.

44: Je penserois, d'après ce vers, que cette pièce fut faite par quelqu'un de la maison du duc d'Epernon, qui, en cette même année, avoit quitté la cour très mécontent du maréchal et s'étoit retiré dans son gouvernement de Saintonge.

45: Je n'ai pas besoin de faire remarquer l'équivoque qui se trouve dans ce vers.

46: La tonsure.

47: Il étoit gouverneur de Normandie.

48: Le marquisat d'Ancre, qu'il avoit acheté, s'y trouvoit.

49: Il avoit les gouvernements de Péronne, de Roye, de Montdidier, de la citadelle d'Amiens; mais il eût voulu avoir celui de toute la province.

50: C'est ainsi qu'on appeloit Concini, par le nom qu'il avoit lui-même donné aux Italiens à sa solde, coglioni di mila franchi, comme il disoit. (Tallemant, édit. in-12, tom. 3, p. 190.)

51: Petits chevaux très vifs qu'on faisoit venir d'Espagne.

52: Concini n'étoit pas brave. Tallemant le prouve par une anecdote très significative. (Id., p. 191.)

53: On veut parler ici du petit clocheteur ou crocheteur de la Samaritaine, sous le nom duquel se publioient libelles et chansons dirigés contre Concini, et que pour cela il avoit fait enlever en 1611. V. Première continuation du Mercure françois, in-8, 1611, p. 37.

54: Poteau fiché en terre contre lequel on s'exerçoit à rompre la lance. Souvent il étoit surmonté d'une figure qu'on appeloit le faquin: de là l'expression courre le faquin.

55: Le prince de Condé, qui fut si hostile à la puissance du maréchal d'Ancre.

56: Concini s'étoit retiré dans son gouvernement de Normandie, «et n'osoit revenir, dit le continuateur de Mézeray, à cause de la haine que les Parisiens lui portoient.» (Abrégé chronolog. de l'hist. de France, tom. 1, p. 186.)

57: Patron des fous.

58: L'hôtel de Concini, rue de Tournon, aujourd'hui occupé par la garde de Paris, et la maison de son secrétaire, Raphaël Corbinelli, avoient été mis au pillage par le peuple pendant trois jours, du 1er au 3 septembre 1616.

59: Cette pièce n'est autre chose que la satire 1re de l'Espadon satirique, par le sieur d'Esternod (Cologne, 1680, in-12, p. 4 et suiv.) C'est une contrefaçon flagrante qui donne pleine raison à ce passage des Caquets de l'accouchée (voyez notre édition, p. 115): «J'ay veu, dit la femme du conseiller, un Discours du Courtisan à la mode, imprimé il n'y a pas long-temps, lequel n'estoit autre chose qu'un extraict ou transcrit de l'Espadon satirique mot pour mot, ce qui ne se devroit tolerer.» Je croirois volontiers que ce Discours du Courtisan à la mode, dont il nous a été impossible de découvrir un exemplaire, reproduit aussi la satire 1re, qui se trouveroit avoir eu ainsi deux contrefaçons pour une. Je ne vois, du moins, aucune autre pièce parmi celles de l'Espadon qui pût s'accommoder aussi bien du titre inventé par le contrefacteur. Le Tableau des ambitieux, donné ici, est mis sur le compte de maistre Guillaume, le fou de cour (V. Caquets de l'accouchée, p. 263, note); c'étoit assez l'usage quand on ne vouloit pas endosser un mauvais écrit ou, comme ici, une mauvaise action. Tout l'office du bouffon étoit de vendre sur le Pont-Neuf la pièce dont on le faisoit responsable (V. Journal de l'Estoille, édit. du Panth. litt., t. 2, p. 405). Quelquefois on mit sous son nom des choses excellentes. La XIVe satire de Regnier, par exemple, parut d'abord avec ce titre: Satire de maître Guillaume contre ceux qui déclamoient contre le gouvernement. (Recueil A-Z, Q, 207.) Je ne sais si dans ce cas il y eut fraude, mais ici elle est évidente, par le soin même qu'on a pris pour la cacher. Afin de donner à la pièce l'apparence d'une chose nouvelle et tromper au moins le premier coup-d'œil du lecteur, on l'a tronquée au commencement et à la fin. Les quatre premiers vers et les quatre derniers de la satire de d'Esternod ont été enlevés. Voici les premiers:

De tant de cavaliers qui vont avec des bottes
A faute de soliers, et non faute de crottes;
De tant qui vont de pied à faute de chevaux,
Cavaliers, postillons, non faute d'animaux.

60: Arborer.

61: Faisant le braguard, le beau, le pimpant.

62: Ou ça mon, sorte d'interjection familière très employée chez les gens du commun au XVIe et surtout au XVIIe siècle. V. Montaigne, liv. 2, chap. 27; Molière, le Bourgeois gentilhomme, act. 3, sc. 3; et Francion, 1663, in-12, p. 55.

63: C'est une expression qui commençoit à avoir cours, mais à laquelle on donnoit toujours un sens méprisant. Regnier l'emploie ainsi au vers 237 de la satire V.

64: Joyeuse étoit l'épée de Charlemagne, d'après les romans de chevalerie; Durandal, celle de Roland; Haute-Claire, celle d'Olivier; Flamberge, celle de Renaud de Montauban.

65: Pour risdale, monnaie d'argent allemande.

66: C'est-à-dire leurs sonnettes, tintinnabula, comme l'âne de la fable de Phèdre.

67: Armoriés.

68: Jurons gascons dans le genre de ceux qu'on rencontre souvent chez Regnier. C'étoient les imprécations à la mode.

69: Le pain mollet, vendu chez les boulangers de luxe ou de petit pain, étoit alors le seul qui fût recherché des gourmets, au grand dommage des boulangers de Gonesse, qui ne faisoient que le pain de ménage. Ils prétendirent donc que la pâte en étoit malsaine à cause de la levure qu'on y employoit. Il en résulta, en 1668, un procès dont j'ai fait l'histoire sous ce titre: Molière et le procès du pain mollet. (Revue française, juillet 1855.)

70: C'est-à-dire grapillé. Au chapitre V de la Prognostication pantagrueline, albotteur est pris dans ce sens: «Les alleboteurs, dit Le Duchat, sont de pauvres gens qui tracassent les vignes vendangées pour y grapiller.»

71: C'est le passage des psaumes si magnifiquement paraphrasé par Racine dans le chœur du 3e acte d'Esther:

J'ai vu l'impie adoré sur la terre
..........
Je n'ai fait que passer, il n'étoit déjà plus.

72: C'est une imitation de ce passage d'Horace, tota vita fabula est, si bien paraphrasé par J.-B. Rousseau dans son épigramme:

Ce monde-ci n'est qu'une œuvre comique.
Où chacun fait des rôles differents...

73: Peut-être y a-t-il là une allusion au maréchal d'Ancre, qui, comme époux d'Eléonore Galigaï, se trouvoit être le gendre d'un menuisier florentin.

74: Var.: Aux couronnes des roys et les rois en coquins.

75: Il faut lire la loutre. On fait encore dans quelques provinces des casquettes avec la peau de cet animal.

76: Pichrocole est un roi visionnaire inventé par Rabelais (liv. I), et qui n'avoit rien de la philosophie à la Pangloss que d'Esternod prête ici aux savants qu'il baptise de son nom. La Fontaine l'a aussi nommé dans sa fable la Laitière et le Pot au lait.

77: C'est-à-dire être pendu.

78: Cela fait penser aux beaux yeux de la cassette d'Harpagon.

79: A l'occasion du Landy, ou foire de l'Indict, à Saint-Denis, qui étoit, comme on sait, un temps de fête pour l'Université, les écoliers faisoient des cadeaux à leurs maîtres. C'étoit d'ordinaire «un beau verre de cristal plein de dragées» et un citron dans l'écorce duquel on avoit fiché quelques écus. V. Francion, édit. de 1663, p. 160-161.

80: Portier. D'Esternod parle ici le langage de l'escolier limosin.

81: Maître Albert-le-Grand.

82: Dans cette orthographe primitive du mot alerte ou trouve son étymologie, qui vient de l'italien fare all' erta, être au guet. Montaigne écrit: «Se tenir à l'airte.» (Liv. 1er, chap. 19.)

83: C'est-à-dire ventru. Bedon étoit synonyme de bedaine.

84: Les lumières du droit. Corneille fait citer Balde et Jason par Dorante, à la scène 6 de l'acte 1er du Menteur.

85: Le dequoy étoit déjà le grand mot, la grande chose. «Les courtisans, dit La Boétie, voyent que rien ne rend les hommes sujets à la cruauté du tyran que les biens; qu'il n'y a aucun crime envers luy digne de mort que le de quoy.» (De la servitude volontaire.)

86: On ne tarissoit pas autrefois en proverbes et en quolibets à propos des gentillâtres Beaucerons. Dans Rabelais (liv. 1er, chap. 17), dans les Contes d'Eutrapel (fol. 158), dans les Contes et joyeux devis de Desperriers (nouvelle 74), dans les Curiositez françoises d'Oudin (p. 249), partout leur misère est tournée en moquerie. Les proverbes qui couroient le plus contre eux étoient ceux-ci: Gentilhomme de Beauce, il est au lit pendant qu'on raccommode ses chausses.

En gentilhomme de la Beauce
Garder le lit faute de chausse.

Montfleury donna en 1670, sous ce titre: Le Gentilhomme de Beauce, une comédie en cinq actes, en vers, dont on devine le sujet, et qui est d'un assez bas comique.

87: Var.: rois.

88: C'est-à-dire ayant fraise à grands plis, à grands godrons. V. notre t. 1, p. 164, note.

89: Petite monnaie flamande valant un sou.

90: C'est-à-dire qu'il ne faut pas dévorer ses pareils comme la reine de Lybie Lamia, qui, selon Suidas, se nourrissoit de chair humaine.

91: On croiroit que La Fontaine se rappeloit ce vers de d'Esternod quand il a écrit ceux-ci de sa fable la Besace:

...Mais parmi les plus fous
Notre espèce excella: car tout ce que nous sommes,
Lynx envers nos pareils et taupes envers nous,
Nous nous pardonnons tout, et rien aux autres hommes.

92: Cet adieu répété manque dans la satire de d'Esternod. A la place se trouvent ces quatre vers, qui commencent par une allusion à l'Epistre de Marot au roy pour avoir esté desrobé.

Comme fit à Marot le valet de Gascongne.
Mais vous quittez la cour et venez en Bourgogne;
Sans adieu. Autrement, vos creanciers maris
Pour estre satisfaicts vous rendroyent à sainct Pris.

93: Cette pièce est, pour le titre et quelques détails, une imitation de la Lettre de Corniflerie de Jean d'Abundance, imprimée d'abord à la suite des Quinze Signes (Voy. Brunet, Manuel du libraire, à ce mot), puis séparément à Lyon. La Lettre d'écorniflerie reproduite ici a déjà trouvé place dans le Recueil de pièces joyeuses, etc., mentionné par Debure dans sa Bibliographie instructive, t. 2, p. 40, no 3630. Elle est aussi indiquée, mais à tort, comme venant à la suite d'une pièce du même genre que nous donnons plus loin.

94: Issue étoit synonyme de dessert.

95: Dans la Lettre de Corniflerie de Jean d'Abundance, c'est Taste-Vin qui se donne aussi pour roi des Pions, duc de Glace, comte de Gelée, etc.

96: Francs buveurs, comme les gaillards pions de Rabelais (liv. 2, chap. 27) et ceux que Villon nous montre ainsi en enfer, dans son Grand Testament:

Pions y feront mate chere,
Qui boyvent pourpoinct et chemise,
Puis que boyture y est si chere.

97: Il faut sans doute lire popinateur (buveur).

98: Dans les rues Phelypeaux, ou Frepaux, et Frepillon se vendoient les vieux meubles et les vieilles hardes. V. notre édition des Caquets de l'accouchée, p. 255, et notre tome 3, p. 80.

99: Le salut étoit une monnoie d'or avec une image de la Vierge recevant la salutation angélique. V. notre tome 2, p. 191.

100: Coureurs des mauvais lieux dont étoit remplie la rue du Champgaillard. V. notre tome 3, p. 44.

101: Coureurs de galas, hommes de joyeuse humeur.

102: Vendeurs de thériaque, la grande panacée du moyen âge. Triacleur se disoit encore alors pour charlatan. V. Régnier, satire 13, v. 230.

103: Gueux de l'hôpital, selon Oudin, au mot Hostière de son Dict. franç.-espagnol. Pasquier (Recherches de la France, liv. 8, ch. 42) et après lui Furetière, dans son Dictionnaire, prétendent à tort qu'on les appeloit ainsi parce qu'ils alloient fleuretant les huis des maisons. Rabelais parle des gueux de l'hostière (liv. 1er, ch. 1er, et liv. 5, ch. 11).

104: Grand mangeur de miches. Je croirois volontiers que c'est par ces mots, et non par ceux de brise-miches, qui n'en sont qu'une altération, qu'on désigna d'abord une rue bien connue de Paris, dans le quartier Saint-Merry.

105: Vendeurs de reliques et d'oraisons (rogatum, prière). Rabelais se sert de cette expression, et Henri Estienne veut qu'on appelle ainsi les moines, «pour ce que, dit-il, ils ne vivent que des aumosnes des gens de bien.» (Apologie pour Hérodote, t. 1er, p. 536.)

106: Raccommodeurs de souliers et autres rapetasseurs. (Est. Pasquier, Lettres, liv. 10, lettre 7.)

107: Lourpidon, vieux sorcier qui joue un rôle dans l'Amadis.

108: Par morte-paye, pour l'homme de guerre, on entendoit ce que nous appelons aujourd'hui demi-solde.

109: Il faut peut-être lire poquedenares, gens peu pourvus d'argent.

110: Mendiant couvert de loques. On disoit plutôt loqueteux.

111: Joueurs de bedon, sorte de cornemuse. Dans les comptes d'Isabeau de Bavière, on trouve nommés Pierre de Ryon et Jehan Chevance en cette qualité. V. Le Roux de Lincy, Femmes célèbres de l'ancienne France, t. 1er, p. 637, 641.

112: Ceux qui entendent bigorne, c'est-à-dire l'argot.

113: Cabaret fréquenté par Chapelle, et qui se trouvoit près du cimetière Saint-Jean, dans la petite rue à laquelle il avoit donné son nom.

114: Le Petit-Diable étoit près du Palais. V. Ode à tous les cabarets, dans le Concert des enfants de Bacchus.

115: L'un des deux cabarets qui s'appeloient Bastille se trouvoit encore, en 1788, rue de l'Arbre-Sec, près du cul-de-sac qui en a gardé le nom.

116: Taverne qui se trouvoit sans doute près de l'église de la Magdelaine en la Cité, non loin, par conséquent, de la Pomme-de-Pin, et dont Saint-Amant a parlé quand il a dit, dans sa pièce des Cabarets:

Paris, qui prend pour son Helène
Une petite Madelaine.

117: Il existoit à Paris, au XVIe siècle, deux cabarets de ce nom: l'un faubourg Saint-Marceau, dont il est parlé dans les Contes d'Eutrapel; l'autre près du Palais, cité par Larivey à la scène 6, acte 2, de la comédie de la Vesve.

118: Les Torches, mentionnées avec honneur dans l'Ode à tous les cabarets, se trouvoient au cimetière Saint-Jean. En 1690, selon le Livre commode des adresses, c'est un nommé Martin qui étoit maître de cette taverne.

119: Il y avoit en 1603 un cabaret de la Hure rue de la Huchette (L'Estoille, édit. Michaut, t. 2, p. 347).

120: Ce cabaret existoit dès le temps d'Erasme dans le quartier des Ecoles. On lit dans l'Ode à tous les cabarets:

Je prefère au meileur collége
La Corne en la place Maubert.

121: Il y avoit à Paris plusieurs tavernes de ce nom. La meilleure étoit rue Saint-Thomas-du-Louvre.

122: Ce cabaret, qui se trouvoit dans le quartier de l'Université, est cité comme l'un des plus fameux dans la mazarinade ayant pour titre: Discours facecieux et politique, en vers burlesques, sur toutes les affaires du temps, etc.; Paris, 1649, in-4. C'est le maître de cette taverne qui avoit inventé ces soupes nommées à cause de lui soupes à l'écu d'argent, et dont Boileau a donné la recette quand il a dit dans sa 3e satire:

Que vous semble .... du goût de cette soupe?
Sentez-vous le citron dont on a mis le jus
Avec un jaune d'œuf mêlé dans du verjus?

123: Vin de teinture (aligant), selon Cotgrave.

124: Vin de Grèce, célèbre depuis long-temps en France, comme on le voit par un passage de Gringore. Sa vogue se maintint mieux encore en Angleterre; on en trouve la preuve dans les vieux dramatistes anglois. V. aussi le Henri IV de Shakspeare.

125: Vin de friandise alors très recherché. Courval-Sonnet en parle ainsi dans une de ses satires:

Les exquis muscadets, appelés vins de couche,
Sont toujours reservés pour la friande bouche
De ces bons financiers qui n'espargnent nul prix.

126: Le vin d'Irancy, petite ville à trois lieues d'Auxerre, étoit célèbre. Larivey en parle à la scène 6 de l'acte 2 de la Vesve, et l'Auxerrois Roger de Collerye fait dire à monsieur de Deça:

Or il est temps partir d'icy
Pour aller boire à Irency
Et engager robe et pourpoint.

Les œuvres de Roger de Collerye, nouvelle édition, donnée par M. Ch. d'Héricault, (Biblioth. elzevirienne, p. 152.)

127: Sans doute une marchande de coco de ce temps-là, portant sur sa fontaine, comme ses confrères d'aujourd'hui, un petit moulin de fer blanc toujours ailes au vent.

128: De good ale (bonne bière), boisson angloise qui avoit été importée chez nous lors de la conquête, et qui n'y avoit pas fait fortune. On la renvoyoit volontiers à ceux qui l'avoient apportée et aux Flamands. V. Froissard, chap. 59, et Marot, Ballade sur l'arrivée de M. d'Alençon en Hainaut.

129: Croquer la pie, boire, sucer le piot, être bon pion. Selon Leroux (Dict. comique), pie se disoit pour «ivre, saoul, imbu de vin.»

130: Ce personnage burlesque figure aussi dans l'étrange pièce de Sigongne, le Ballet des Quolibets, dansé au Louvre et à la maison de ville par Monseigneur frère du roy, le quatrième janvier 1627. Seulement Rifflandouille n'y est pas valet; il est passé capitaine.

131: Garçons fringants et bien mis, mirolets, selon Cotgrave.

132: Personnage d'une très ancienne chanson qu'on trouve déjà dans les mystères. L'ami Baudichon étoit si bien devenu un type de joyeuseté que l'on disoit, selon Cotgrave, faire le mibaudichon, ou simplement faire le mib, pour vivre follement.

133: Ce passage seul suffiroit pour prouver que les échaudés ne sont pas une invention du pâtissier Favart, père du poète; mais on savoit déjà que, dès le XIIIe siècle, on les connoissoit. Ils sont désignés dans une charte de cette époque par cette périphrase: Panes qui dicuntur eschaudati.

134: Bonne pour l'ivresse, de ebrius, ivre.

135: La dodine étoit une fameuse sauce à l'oignon, bonne surtout pour les canards. Rabelais (liv. 4, ch. 32) parle déjà de canars à la dodine.

136: Le mot matinier se disoit alors pour matinal. On ne dit plus guère matinière qu'à propos de l'étoile du matin.

137: Cette suite manque, malgré l'annonce du titre. La Lettre générale d'écorniflerie est sans doute la même que nous avons donnée dans ce volume. Quant à l'Arrest des paresseux, nous n'avons pu le retrouver.

138: L'expression boire à tire-larigot a donné lieu à une foule d'étymologies singulières que nous ne répéterons pas ici. Selon nous, elle équivaut à celle-ci: boire à tire gosier, le vieux mot larigaude signifiant en effet gosier, d'après le Dictionnaire des termes du vieux françois, ou trésor des recherches et antiquités gauloises et françoises, par Borel.—Quant aux autres façons de boire indiquées ici, nous ne savons comment les expliquer.

139: Cette description est une imitation de celle du pays de Coquaigne, telle qu'elle se trouve fort au long dans l'un des fabliaux publiés par Méon (t. 4): c'est li Fabliaus de Coquaigne. Rabelais s'en étoit inspiré auparavant pour le curieux tableau qu'il a fait de l'Ile de Papimanie (voy. éd. de l'Aulnaye, in-12, t. 2, p. 121), et enfin Fénelon devoit un peu plus tard concevoir dans le même esprit, et sans doute d'après la même inspiration, sa fable de l'Ile des Plaisirs.

140: Ce Harpineau, ou plutôt Herpinot, étoit un farceur qui jouoit ses farces aux halles. Nous publierons dans nos volumes suivants quelques pièces parues sous son nom. M. Leber a parlé de lui dans son livre sur Tabarin: Plaisantes Recherches d'un homme grave sur un farceur.

141: Claude de Mesme, comte d'Avaux, alors conseiller au grand conseil.

142: Les écus d'or, valant trois livres.

143: La plupart des églises de Paris étaient lieux d'asile. L'enclos du Temple, le Louvre, avoient aussi ce privilége.

144: «On dit d'un homme: Il est réduit au bâton blanc, ou absolument réduit au blanc, quand il est devenu extrêmement pauvre et misérable...» (Leroux, Dict. comique.)

145: C'étoit le surnom, et non pas sans doute le nom, du pauvre prêtre messire Jean. On lui avoit donné ce sobriquet pour faire de lui l'homonyme de Jean le Blanc. La plaisanterie étoit assez sacrilége, appliquée à un prêtre: car on sait que, dans les pasquils irreligieux, c'est l'hostie qu'on personnifioit sous le nom de Jean Le Blanc. V. Légende véritable de Jean le Blanc, 1677, in-12, pièce comprise dans le cabinet jésuitique.

146: On appeloit habitué un prêtre qui s'attachoit volontairement au service d'une paroisse et qui y alloit dire la messe.

147: Par dame Simonne Messire Jean n'entend-il pas parler de l'Eglise, de qui l'on n'obtenoit des bénéfices que moyennant finances, ce qui constituoit le crime de simonie?

148: V., sur ce cadeau qu'à certain jour les élèves faisoient aux maîtres, la note d'une des pièces précédentes, p. 41.

149: Philippe Desportes, qui, enrichi par la muse, avoit sans doute pris en pitié et protégeoit le pauvre prêtre poète. Il étoit mort en 1606, c'est-à-dire quelques années avant l'époque où cette pièce dut être écrite.

150: Il s'agit ici, sans doute, de l'édition des Lettres et autres ouvrages de saint Grégoire de Nysse, que le P. Fronton du Duc donna à Paris en 1615, 2 vol. in-fol.

151: Imprimeur parisien, l'un de ceux dont messire Jean devoit corriger les épreuves, ainsi qu'il vient de le dire. C'est en effet vers cette époque, en 1618, qu'il imprimoit. V. La Caille, p. 228.

152: Jean de Fréval, imprimeur du même temps. V. La Caille, p. 234.

153: C'est-à-dire trop amoureux de leur femme. C'est le mot latin uxorius, employé par Horace, liv. 1er, ode 2, v. 18; par Virgile, Enéide, liv. 4, v. 266, etc. Il se prenoit, comme ici, presque toujours en mauvaise part, en façon de blâme contre les maris trop foibles.

154: On croyoit que certaines maladies cérébrales venoient d'un ver logé dans la tête. C'est ce qu'on appeloit l'avertin (voy. Des Perriers, Contes et joyeux devis, nouv. 105 et 125), et ce qu'on nomme encore aujourd'hui dans les campagnes le ver coquin. On attribuoit la même cause et l'on donnoit le même nom à la maladie des bêtes à laine que l'on appelle à présent le tournis. V. Olivier de Serres, Théâtre d'agriculture, in-4, t. 2, p. 768, 838.

155: Ce Mémoire, fort rare et fort curieux, est, comme on le verra, l'œuvre d'Edme Pourchot, professeur de philosophie au Collége des Grassins, et à plusieurs reprises recteur de l'Université de Paris. Il mourut âgé de 83 ans, le 22 juin 1734, après avoir mérité de tout point ce que dit de lui dans son Dictionnaire historique l'abbé Ladvocat, qui l'avoit beaucoup connu: «Il fut sept fois recteur de l'Université et travailla avec zèle à la défense de ses droits et au maintien de sa discipline.» Le long travail qui suit, touchant une propriété d'autant plus chère et plus précieuse à l'Université qu'elle lui fut contestée davantage, est une preuve qu'Edme Pourchot ne négligea rien pour être digne du premier de ces éloges. Il trouva les principaux éléments de son Mémoire dans celui, plus important et plus rare encore, qu'Egasse du Boulay avoit publié neuf ans auparavant sous ce titre: Fondation de l'Université de Paris par l'empereur Charlemagne, de la propriété et seigneurie du Pré aux Clercs, 1675, in-4. C'est à l'extrême obligeance de M. Le Roux de Lincy que nous devons de connoître ce remarquable volume, dont nous avons vu dans son cabinet le seul exemplaire connu. Il a bien voulu nous permettre, dis-je, de prendre toutes les notes qui pouvoient compléter ou éclaircir différents passages de la pièce reproduite ici.

156: Du Boulay, dans son grand travail cité plus haut (Fondation de l'Université, etc., p. 130, 139, etc.), explique ainsi les raisons qui, selon lui, obligèrent les moitiés à établir par cette tranchée une communication entre la Seine et les fossés de leur abbaye: «Ce fut, dit-il, sous la date de 1368, par une necessité d'estat qui obligea les moines de faire de grands fossez tout autour de leur enclos, avec une espèce de citadelle pour y soutenir le siége en cas d'attaque par les ennemis, qui estoient lors en grand nombre repandus par toute la France, et speciallement contre les Anglois, qui vouloient se remparer de la Normandie... Pour faire venir l'eau de la rivière dans les fossez, on fut obligé de tirer une tranchée au travers du pré jusques à la rivière; et la partie d'entre ladite tranchée et l'hostel de Nesle fut dès lors appelée le Petit-Pré, et l'autre au dessus, vers Chaillot, le Grand-Pré.» Ce passage est fort curieux; mais, comme nous le prouverons, du Boulay auroit dû dire que le fossé de la petite Seine ne fut pas creusé, mais seulement élargi, en 1368. D'après l'Advertissement de M. Oronce Finé, etc., que du Boulay reproduit plus loin, p. 246, voici quelle étoit la situation de cette tranchée, dite la petite Seine: «Commençoit lors à l'endroit de deux piliers et colonnes de l'encoignure d'icelle abbaye (Saint-Germain-des-Prés)... et suivoit à droite ligne le fossé d'icelle abbaye qui est devant la porte murée jusques à la rivière de Seine... l'embouchure duquel fossé estoit sur la rivière de Seine, entre la fosse Saint-Bon et le Chemin-Vieux. Laquelle fosse Saint-Bon estoit sur le dos de l'embouchure du dit fossé du costé du petit Pré, où il n'y avoit qu'un petit sentier au long dudit fossé finissant à l'endroit de ladite fosse Saint-Bon.» Pour rendre cette description comprehensible pour ceux qui ne connoissent que le nouveau Paris, nous ajouterons que l'ancienne rue des Petits-Augustins représentait à peu près, comme direction et comme longueur, le cours de la petite Seine. Ce fossé seulement étoit un peu plus vers la droite en montant à l'abbaye, de sorte que la rue actuelle, en lui supposant un peu plus de largeur, pourroit représenter à la fois et la petite Seine, qu'on appeloit le Chemin-Creux quand elle étoit à sec, et le Haut-Chemin, qui la longeoit. La prise d'eau de cette sorte de chenal se trouvoit donc un peu au dessous du pont des Arts et du pavillon ouest du palais de l'Institut, tandis que son embouchure dans les fossés de l'abbaye avoit lieu au point d'intersection de la rue Jacob et de la rue Bonaparte. Le prolongement de celle-ci jusque vers la rue Taranne tient, en effet, la place de celui des fossés de l'abbaye qui sembloit être la continuation en droite ligne de la petite Seine. M. Berty a rendu cette disposition topographique fort claire par le plan annexé à son Etude... sur les deux Prés aux Clercs et la petite Seine (Revue archéologique, 15 octobre 1855). M. Berty n'a connu ni le Mémoire que nous publions ni le travail de du Boulay; mais, guidé par des documents manuscrits, il arrive à peu près aux mêmes conclusions. Il varie seulement d'opinion avec du Boulay pour la date où dut être établie cette noue, comme la petite Seine est appelée dans les vieux titres. Il croit avec raison la trouver indiquée déjà dans une charte de 1292. Selon lui, on se seroit contenté, en 1368, de remanier ce fossé et de l'élargir, et ce nouveau travail auroit suffi pour faire désigner, dans un acte de cette même année 1368, la petite Seine par le nom de Fossé-Neuf. Ce qu'on lira plus loin donne en partie raison à M. Berty contre du Boulay.

157: Nous ne nous étendrons pas ici au sujet du plus ou moins d'antiquité et de validité des droits de l'Université sur le Pré-aux-Clercs. De tout temps on en douta, et ils furent combattus et défendus à outrance. Pour qu'on juge pièces en main de cet important procès, nous renverrons au Théâtre des antiquités de Paris, par J. Du Breul, Paris, 1639, in-4, p. 294, et aux Nouvelles annales de Paris de T. Duplessis, 1753, in-4, p. 211, livres où l'opinion favorable aux prétentions des religieux de Saint-Germain-des-Prés est soutenue; pour la cause contraire, nous nous en référerons à l'Histoire de l'Université de du Boulay, et surtout à son livre déjà cité tout à l'heure, et dont l'histoire plus ou moins authentique de la donation faite par Charlemagne et confirmée par ses successeurs occupe toute la première partie. Nous nous contenterons de citer quelques phrases assez sceptiques de Sauval sur le même sujet, et d'extraire aussi d'un Discours fort rare de P. Ramus, dont nous devons la communication à l'obligeance de M. L. de Lincy, un passage très curieux et plus positif en faveur de l'Université, mais très intéressé à l'être, il est vrai. Voici ce que dit Sauval (Antiquités de Paris, t. 2, p. 367): «Pour ce qui est du Pré-aux-Clercs, l'Université le fait commencer près de l'abbaye Saint-Germain, et de là, le continuant de plus en plus, le conduit si avant qu'il se va perdre bien loin dans la campagne, assurant de plus en plus, sans autre preuve, qu'elle le tient de la libéralité de Charlemagne ou de Charles le Chauve, et que, sous leur règne, c'étoit un lieu où les ecoliers s'en alloient divertir les jours de congé.» Ramus lui-même, quoique défenseur juré des droits de l'Université, n'ose risquer, au sujet de la première donation, qu'une affirmation timide: «On dit, écrit-il, que Charlemagne, fondateur de l'Université, luy donna ce pré de grande estendue, qui contenoit depuis l'isle Maquerelle, tout du long du rivage de Seine, jusques aux rivages de Neelle et muraille de la ville et porte des Cordeliers, boucherie et abbaye de Saint-Germain, et, de là, qu'il se bornoit à l'alignement droict, depuis la chapelle de Saint-Martin-des-Orges jusqu'à ladicte isle, et que ce pré estoit divisé par un grand chemin qui passoit au travers...» (Harangue de Pierre de la Ramée touchant ce qu'ont faict les deputez de l'Université de Paris envers le roy, mise de latin en françois; à Paris, chez André Wechel, 1557, avec privilége du roy (donné à Reims l'unziesme de juing 1557), in-8 fol. 8.)

158: Cette place, dite d'Aubusson, estoit située entre les rues que l'on nomme aujourd'huy rues Neuve-des-Fossez et des Mauvais-Garçons (note de l'auteur). Elle se trouvait donc un peu plus haut que le carrefour Buci, entre la rue des Fossés-Saint-Germain ou de l'Ancienne-Comédie et la rue Grégoire-de-Tours, pour substituer le nom tout moderne de cette rue à celui des Mauvais-Garçons, que les écoliers, ses passants ordinaires, lui avoient si bien mérité autrefois, comme on le voit par un très curieux passage du volume de du Boulay, p. 183. Ces 160 pieds, selon le même du Boulay (p. 47), partoient de la porte Saint-Germain ou des Cordeliers, longeoient le mur en dehors jusqu'à la porte de Buci, et de là gagnoient le pré «par derrière les jardins de l'hostel de Nesle, où sont aujourd'huy plusieurs tripots et jeux de courte paume.» V. encore p. 394.

159: V. sur cette querelle, qu'il place en 1277, Félibien, t. 1er, p. 436.

160: «Gerard de Moret, abbé de Saint-Germain, dit Piganiol, qui résume le plus brièvement cette affaire, ayant fait batir sur le propre fonds de l'abbaye quelques murailles et autres edifices aboutissant sur le chemin qui conduit au Pré-aux-Clercs, les ecoliers trouvèrent mauvais qu'on eût rendu ce chemin plus etroit, et demolirent les batiments qui avoient été construits. Estienne de Pontoise, religieux et prevôt de l'abbaye, à la tête de leurs domestiques, alla aussitôt sur le lieu pour faire cesser ce desordre; mais ils l'augmentèrent, au lieu de l'apaiser. Gerard Dolé et le fils de Pierre le Scelleur, escoliers, furent tués, et il y en eut plusieurs de blessés. Dolé fut inhumé dans l'eglise du Val-des-Escoliers, et le Scelleur dans l'ancienne chapelle de Saint-Martin-des-Orges.» (Piganiol, t. 8, p. 88.)—Du Boulay, dans son Hist. de l'Université, donne de très longs et très curieux détails sur cette rixe, t. 3, p. 490.

161: V. Egasse du Boulay, Fondation de l'Université, etc., p. 173.—D'après l'Avertissement d'Oronce Finé, reproduit par du Boulay, p. 240, cette chapelle de Saint-Martin-des-Orges, qui, selon D. Bouillart, se trouvoit vers l'angle du jardin de l'abbaye sur le Pré-aux-Clercs, c'est-à-dire, par conséquent, tout près de l'embouchure de la petite Seine dans les fossés (voy. plus haut), auroit été différente de la chapelle de Saint-Martin-le-Vieux, et n'auroit dû sa fondation qu'à la circonstance relatée ici. C'est une double erreur.

162: C'est ce passage qui donne pleine raison à M. Berty pour son opinion mentionnée plus haut à propos de l'existence de la petite Seine avant 1368.

163: Ceux-ci, du reste, avoient bien su rendre violences pour violences. V. Félibien, t. 2, p. 539, et le travail de M. Berty, p. 388.

164: On comprend, d'après la situation de cette chapelle à l'angle des fossés de l'abbaye et de la petite Seine, qu'elle dut être démolie quand on voulut leur donner plus de largeur.

165: Cette petite église, qui avoit servi de refuge aux religieux de Saint-Germain-des-Prés à l'époque des Normands, étoit située rue du Marché-Neuf, en la Cité. C'est la similitude de son nom avec celui de Saint-Martin-le-Vieil qui a fait l'erreur d'Oronce Finé dont j'ai parlé plus haut, et dans laquelle il persévère quand il dit: «Il est vraisemblable que laditte chapelle fondée à Saint-Martin-des-Orges fut translatée à laditte chapelle vieille de Saint-Martin, à cause de la susdite demoliture d'icelle chapelle de Saint-Martin desdits Orges.»

166: Du Boulay, dans son volume cité, p. 336, s'explique avec plus de détails sur les causes qui amenèrent cette résolution de l'Université: «Les procez continuels qu'elle avoit tantost contre les moines, tantost contre les particuliers qui remplissoient d'immondices une partie du petit Pré, et la peine qu'elle avoit aussi, outre la depense continuelle où elle se trouvoit engagée, pour faire oster le gravois et autres choses que l'on y dechargeoit nuitamment, luy ayant fait prendre resolution, en l'an 1537 et 1538, de bailler ledit petit Pré à cens et rente, au lieu de le faire entourer de fossés et de murailles, ce qui eust encore cousté beaucoup, elle fit faire les publications et solennitez en tel cas requises...» Plus haut il avoit dit (p. 148): «Cette terre étant ainsi exposée au pillage de toutes parts, elle prit resolution, vers l'an 1538, de vendre du moins le petit Pré, comme le plus exposé à l'usurpation et à la decharge des gravois et immondices du faubourg et de la ville.»

167: Huit jours après la signature de ce nouveau bail, le recteur élevoit déjà une plainte contre le Clerc pour divers griefs: 1o parcequ'il ne se trouvoit aucune minute du contrat passé avec lui en 1540; 2o parcequ'il n'avoit encore rien payé; 3o parcequ'il n'avoit pas encore commencé à bâtir, ainsi qu'il s'y étoit obligé.—Le Clerc se défendit de son mieux et donna sans doute de bonnes raisons, puisque, malgré les plaintes du recteur, l'assemblée ordonna «que le second contrat confirmatif du premier seroit exécuté.» Si Le Clerc n'avoit pas bâti depuis 1540, c'est qu'il avoit trouvé des obstacles de la part de M. Claude Barbier, de la part surtout du cardinal de Tournon, qui, comme il l'allégua dans sa réponse aux plaintes du recteur, qui eum œdificare impeduit. «Afin de se mettre en garde à l'avenir contre de pareils empêchements, afin surtout de se prémunir contre ceux que pouvoient lui susciter les moines de Saint-Germain, «il representa, dit du Boulay, qui s'en étonne, que pour la sûreté de son contract il etoit à propos de le faire confirmer par le pape ou par des commissaires à ce deleguez.» L'Université prétendit que le pape n'avoit là rien à voir; mais Le Clerc, qui tenoit toujours à une sanction ecclésiastique, «ne laissa pas de presenter son contract aux grands vicaires de l'evesque de Paris.» Le 4 octobre suivant il avoit obtenu l'homologation et la ratification qu'il demandoit. V. du Boulay, p. 157-159.

168: Ramus, qui avoit certainement figuré parmi les mécontents dont il vient d'être parlé, ne dut pas être encore satisfait de l'abandon que Le Clerc consent ici. Ses prétentions, toujours fort intéressées, comme on va le voir, alloient plus loin: «Le petit Pré, dit-il dans sa Harangue de 1557 (fol. 9), est tout construict et basty de beaucoup de belles maisons que ce seroit grand dommage d'abattre; pourquoy l'Université requiert que le revenu de chasque année de ces edifices, qui sont tenuz par quelques particuliers, s'employe aux gages des lecteurs des quatre facultez, de théologie, de droict, de médecine et des arts liberaux.» Or, Ramus étoit un de ces lecteurs royaux.—En faisant et surtout en confirmant par l'acte de 1562 l'abandon mentionné ici, Le Clerc cédoit non seulement aux murmures d'une partie des maîtres et des écoliers, mais aussi à leurs violences. A plusieurs reprises, et principalement en 1548, le Pré avoit été envahi par ceux des écoles, qui avoient toujours été contraires à l'aliénation du terrain et aux constructions qui menaçoient de couvrir tout le champ de leurs promenades et de leurs jeux. «En juillet 1548, dit du Boulay (p. 166), ils s'avisèrent de desmolir quelques maisons, tant de celles qui estoient desjà basties que de celles qu'on bastissoit, et mesme mirent le feu à quelques unes.» V. aussi Du Breul, p. 294. On comprend alors que Le Clerc eût certain empressement à se défaire de terrains dont la possession étoit aussi périlleuse. En 1552, les écoliers firent pis encore, et c'est ce qui dut engager Le Clerc à renouveler sa demande de rétrocession, et l'Université à n'y pas être contraire. Profitant de ce qu'après la retraite de Charpentier, le 14 mars 1555, l'Université se trouvoit sans recteur, et étant d'ailleurs excités par Pierre Ramus et par Pierre Galland, celui-là, comme huguenot, les animant surtout contre les religieux de Saint-Germain et leurs continuels empiétements, celui-ci les lançant de préférence contre les habitations dont on encombroit le Pré, tous les mutins des écoles vinrent s'en prendre à la fois aux moines de Saint-Germain et aux propriétaires des maisons du grand et du petit Pré-aux-Clercs. Cette sorte d'invasion se trouve décrite avec tous ses ravages par Félibien (t. 2, p. 1025) et par du Boulay (p. 167). J. Du Bellay l'a aussi racontée dans ce passage de sa Satyre de Maistre Pierre du Cuignet sur la petromachie de l'Université de Paris, déjà citée par M. Ch. Vaddington dans son excellente Vie de Ramus:

Venez tous esteindre le feu
Que ces Pierres ont excité
Parmi nostre Université.
Qui, n'estant d'un recteur guidée,
Semble une jument desbridée,
Ou une barque vagabonde
Laissée à la merci de l'onde.
Le Pré-aux-Clercs en est temoing
Où il n'y a si petit coing
De muraille qu'à coup de pierre
On ne fasse broncher par terre,
Lapidant les champ fructueux
Et les beaux logis somptueux,
Ausquels la pierreuse tempeste
Gresle sans fin dessus la teste.

La grande affaire de l'Université, c'étoit de s'opposer aux usurpations des moines de Saint-Germain; mais pour cela il ne lui falloit pas moins que l'accord et l'appui de tous ses membres. Afin de se les rallier, elle leur fit une concession: elle souscrivit à la demande de Le Clerc, reprit ses terrains; et, quoique Ramus fût, au sujet des maisons déjà construites et louées, de l'avis émis plus haut, elle n'hésita pas à décider qu'on en feroit table rase. «L'Université, dit du Boulay (p. 167), se trouva fort embarrassée dans cette conjoncture d'affaires, et se vit obligée de defaire ce qu'elle avoit fait, c'est-à-dire de consentir la demolition des maisons qu'elle avoit stipulé de faire bastir par le contract faict avec Le Clerc, afin de reunir par ce moyen tous les esprits à combattre contre les ennemis communs.»

169: On l'avoit d'abord appelée le chemin aux clercs; puis le voisinage d'un colombier dépendant de l'abbaye lui avoit fait donner le nom qu'elle porte ici. (V. Sauval, t. 1, p. 127; Jaillot, Quartier Saint-Germain, p. 26.) Elle alloit de la rue de Seine à celle des Petits-Augustins. «C'est maintenant, dit M. J. Pichon, une portion de la rue Jacob, par suite de cette manie qu'ont messieurs de la préfecture de changer tous les noms des rues, souvent aux dépens du bon sens et toujours à ceux de l'histoire.» (Notices biographiques et littéraires sur la vie et les ouvrages de Jean Vauquelin de la Fresnaye et Nicolas Vauquelin des Yveteaux... Paris, 1846, in-8, p. 41, note.) Nous aurons plus loin à citer souvent cette curieuse brochure.

170: Dans le volume de du Boulay, la transaction de Le Clerc avec Carré est seule mentionnée (p. 163). Il n'y est point parlé des contrats qui suivirent et qui sont analysés ici. De même pour les autres maisons. Du Boulay se contente de relater en peu de mots les actes conclus entre Le Clerc et les premiers cessionnaires.

171: Il seroit curieux d'avoir la minute de ce contrat et de voir si François Desprez y a signé. Selon les exigences singulières de son emploi de relieur à la chambre des comptes, il n'auroit pas dû pouvoir le faire. On sait, en effet, d'après Pasquier (Recherches de la France, liv. 2, chap. 5), et d'après un document inédit publié par M. L. Lalanne dans ses Curiosités bibliographiques, p. 309, que, suivant une mesure prise en 1492, lors de la réception de Guillaume Oger, le «relieur de la dite chambre devoit affirmer qu'il ne savoit lire ne escrire.» Et cela, dit Pasquier, «afin qu'il ne descouvrist les secrets des comptes.»

172: Elle étoit sans doute fille ou sœur du libraire Jean Longis, dont la Caille a parlé dans son Histoire de l'imprimerie et de la librairie (in-4, p. 97), sous la date de 1528 à 1541, et qui, d'après un acte que cite du Boulay (p. 398), possédoit lui-même dans ces environs «un quartier six perches de terre, pris en une pièce assise près le petit Pré-aux-Clercs, tenant d'une part à la grande rue allant de l'Abbaye, pardessus les fossez, à la rivière de Seine, et d'autre part audit petit Pré.»

173: «Il est à remarquer que derrière cette maison il y a un petit bassement construit sur 5 toises de terre en quarré, que le dit Carré vendit à Louis Lemaignan, par contrat du 2 novembre 1543, que le dit Lemaignan vendit depuis à M. Charlet, auditeur des comptes, et qui furent par luy depuis vendues, le 24 janvier 1564, à Helie de la Faye, duquel M. Jean Petit, procureur, les acquit conjointement avec une maison sise rue de Seine, par contract du   août 1573. Elles sont chargées d'un denier de cens...» (Note de l'auteur.)

174: Il comptoit parmi les plus fameux du Parlement. «Avant que le marchand y entrast, est-il dit dans l'Anti-Caquet de l'accouchée, il y avoit trop de gravité. On ne pouvoit, au temps passé, approcher ses conseillers, Saint-Valerien, la Roche-Tomas, Vignolle, Ruelle, Regnard, Feu, et un tas d'autres des parlements et chambre des comptes, dont la race est noble jusques à la quatrième generation.» (Les Caquets de l'accouchée, notre édit., p. 254.) Il fut l'un de ceux que les seize proscrivirent au mois d'avril 1591. (L'Estoille, édit. Michaud, p. 47.)

175: C'est le même que nous avons rencontré dans le Caquet de l'accouchée. Il étoit alors devenu président et jouoit un grand rôle. V. notre édition, p. 27, note.

176: Comme celle des brodeurs, dont il sera parlé plus loin, la confrérie des doreurs sur métaux étoit de création récente. Elle ne devoit même être tout à fait constituée que par règlement de Charles IX, en 1573. Chose nouvelle, elle prenoit pied dans les quartiers nouveaux, où elle n'avoit pas à craindre le contact hostile des communautés plus anciennes. Il paroît qu'elle fut nombreuse dans ces parages, car elle avoit choisi pour paroisse l'église voisine des Grands-Augustins. V. Mélanges d'une grande bibliothèque, ch. 5, p. 68, et Guide du corps des marchands, 1766, in-8, p. 232.

177: Cette maison a son entrée par la rue des Marais, derrière celle qui appartient aujourd'huy à M. Thuault, procureur en la Cour. (Note de l'auteur.)

178: Les notaires ne s'appeloient pas autrement entre eux. Celui des Femmes savantes (act. V, sc. 3), refusant d'introduire dans son acte les termes pédantesques que désire Philaminte, lui dit:

... Si j'allois, madame, accorder vos demandes,
Je me ferois siffler de tous mes compagnons.

179: Peut-être est-ce le père de Jacques Lemercier, né en 1590, et qui construisit la Sorbonne, le palais Cardinal, l'Oratoire et Saint-Roch.

180: La Croix du Maine, dans sa Bibliothèque françoise (1584, in-fol., p. 175), explique ainsi comment il ne faut pas voir ici autre chose qu'un surnom donné au célèbre architecte: «Jaques Androuet, Parisien, surnommé du Cerceau, qui est à dire cercle, lequel nom il a retenu pour avoir un cerceau ou cercle pendu à sa maison, pour la remarquer et y servir d'enseigne (ce que je dis en passant, pour ceux qui ignoreroyent la cause de ce surnom).»

181: Ce passage nous a fort embarrassé. Baptiste du Cerceau, qualifié ici architecte du roi, est celui que l'Estoille appelle du Cerceau le jeune, et qui, suivant le même écrivain, donna le plan et dirigea les premières constructions du Pont-Neuf. Lorsque après sa mort, dont nous trouvons pour la première fois ici une date approximative, sa veuve, Marguerite Raguidier, vendit sa maison du Pré-aux-Clercs, quel est le Jacques Androuet qui l'acheta? Est-ce un frère du défunt, qui seroit resté inconnu jusqu'ici, ou bien est-ce le père même de Baptiste, le célèbre architecte protestant? Cette dernière opinion est la plus probable, d'autant plus qu'elle s'accorde jusqu'à un certain point avec ce que l'Estoille a dit de la maison possédée par Androuet le père dans le Pré-aux-Clercs. Voici ce qu'il écrit à la date du mois de décembre 1585: «André (Androuet) du Cerceau, architecte du roy, homme excellent et singulier en son art.... aima mieux enfin quitter et l'amitié du roy et ses biens que de retourner à la messe. Et, après avoir laissé là sa maison qu'il avoit nouvellement bastie avec un grand artifice et plaisir au commencement du Pré-aux-Clercs, et qui fut toute ruinée sur lui, prist congé de Sa Majesté, la suppliant ne trouver mauvais qu'il demeurast aussi fidèle au service de Dieu, qui estoit son grand maistre, comme il avoit toujours esté au sien, en quoi il persevereroit jusqu'à la fin de sa vie.» Jacques du Cerceau fut donc propriétaire d'une maison au commencement du Pré-aux-Clercs. L'Estoile et notre Memoire sont d'accord sur ce point. En décembre 1585 il la quitte, toujours d'après l'Estoile. Or c'est ici qu'il se trouve en contradiction avec notre Memoire, d'après lequel la maison acquise par Baptiste en 1584 n'auroit été cédée par sa veuve à Jacques du Cerceau qu'en mars 1602. N'y auroit-il pas, dans le Memoire de Pourchot, une erreur dans la manière dont les noms sont placés, et ne pourroit-on pas tout concilier en substituant l'un à l'autre, en faisant de Jacques le premier propriétaire et de Baptiste le second acquéreur, chose d'autant plus rationnelle que Jacques est le père et Baptiste le fils? L'auteur des Architectes françois du XVIe siècle, M. Callet, avoit eu en main un manuscrit «échappé de l'incendie de la bibliothèque de Saint-Germain-des-Prés», et concernant, d'après ce qu'il en dit, les titres de propriété de la maison de du Cerceau; il s'y trouvoit même annexé une vue et un plan de cette belle demeure, qu'il reproduisit l'un et l'autre dans son ouvrage (2e édit., p. 95). Les détails trop succincts que donné M. Callet, et qu'il lui eût été si facile de rendre complets avec les pièces alors à sa disposition, confirment à peu près ce que nous venons d'avancer. Suivant lui, Jacques du Cerceau eût laissé deux fois sa maison à son fils Baptiste: la première en 1585, lors de son exil volontaire, rappelé par l'Estoille; la seconde lorsqu'il partit pour Turin, où, toujours d'après M. Callet, il serait mort en 1592. Resterait à savoir comment il se fit que, cette dernière date étant admise et notre hypothèse maintenue, la maison ne passa aux mains de son nouveau propriétaire qu'en 1602, et pourquoi la transmission si directe du père au fils n'eut pas lieu, et pourquoi enfin c'est la veuve qui fut investie du droit d'aliéner la maison. Ces questions sont encore plus inextricables pour nous que les autres.—Le médecin des Fougerais, qui, comme mari de la fille de du Cerceau, se trouva propriétaire de cette maison, n'est autre que celui dont Molière s'est moqué dans l'Amour médecin, sous le nom de Desfonandrès, tueur d'hommes. V. Cizeron-Rival, p. 25.

182: Louis de Champlais, qui devint marquis par suite de l'érection de la baronnie de Courcelles en marquisat (1667). Son fils devint le mari de cette fameuse marquise de Courcelles dont M. P. Pougin a publié avec tant de soin les Mémoires dans la Bibliothèque elzevirienne.

183: On trouve la première mention de cette rue en 1540, selon La Tynna, en 1543, selon M. Berty (Rev. archéolog., octobre 1855, p. 391). La Tynna veut qu'elle doive son nom aux marais qui l'infectaient, et M. Berty, au contraire, lui donne pour parrain un certain Nicolas Marets, «qui, en 1529, possédoit une pièce de terre d'un arpent et demi et quinze perches, s'étendant le long du chemin creux, entre le petit Pré-aux-Clercs et la Seine.» L'opinion de La Tynna est la meilleure. Elle se trouve confirmée par ce passage du mémoire de du Boullay, p. 68: «Le costé de la rivière, y est-il dit, n'etoit pas haut comme il l'est à present, et ainsi beaucoup plus sujet aux inondations, pour si peu que la rivière fut grosse; et, parce que l'on y portoit et deschargeoit la plupart des gravois et immondices de la ville, il s'y faisoit des bourbiers et des marecages qui ne se dessechoient que dans les grandes chaleurs, et c'est assurement de là que la rue des Marais porte le nom qu'elle porte.»

184: Ce Martin, et non pas Mathurin Fretté, eut une grande part, en 1559, aux premières mesures prises contre les Huguenots, en raison même de la position de sa maison, qui le faisoit le voisin d'un grand nombre d'entre eux: car ils affluoient, comme on sait, dans le Faubourg-Saint-Germain, et surtout dans cette rue des Marais, «que nous autres, dit d'Aubigné, appelons le Petit-Genève». (Le baron de Fœneste, liv. 3, chap. 13.)—Fretté étoit donc en lieu commode pour les bien épier, et sa qualité de clerc au greffe criminel de la cour du parlement ne répugnoit pas à cet emploi. Regnier de la Planche (Hist. de l'estat de France, etc., in-8, t. 1, p. 51) le donne même pour «caut et rusé en ces matières, s'il en fut oncques. Aussi, dit-il, estoit-il dressé de la main du feu president Lizet, en sorte que, quand on ne pouvoit tirer tesmoignage et confession suffisante des accusez de ce crime (de religion), on mettoit ce fin Freté aux cachots avec eux, lequel savoit si bien contrefaire l'Evangeliste que le plus subtil avisé tomboit dans ses filets.» Ce qu'on cherchoit surtout, c'étoit à surprendre quelques uns des Huguenots «mangeant de la chair aux jours defendus». On savoit qu'en cette même rue des Marais un nommé Le Visconte, dont nous n'avons pu retrouver la maison, «retiroit coustumierement pour cela les allans et venans de la religion». Ses voisins, et Fretté tout le premier, l'avoient dénoncé. C'est donc chez les accusateurs, et nommément chez notre clerc du greffe, qu'on résolut «de dresser des embûches un jour de vendredy..... Freté, dit Regnier de la Planche, alleché de la depouille de ses voisins pour les avoir de longtemps remarquez, retire chez soy quarante ou cinquante sergentz en sa part, qui estoyent entrés à la file. Et sur les onze heures estans arrivés Thomas Bragelonne, surnommé le Camus, conseiller au Chatelet..., avec deux ou trois commissaires des plus envenimez contre cette doctrine, la maison du Viconte fut incontinent environnée et rudement assaillie.» La lutte fut longue; «Bragelonne et ses commissaires furent en grand danger d'estre tuez.» Si bien que ceux qu'on vouloit prendre «eurent loisir de se sauver, et les autres de la religion des maisons prochaines eurent aussi temps de se retirer, quittant leurs maisons à la merci des juges et sergens, qui y trouvèrent richesses d'or et d'argent monnoyé, principalement chez ce Viconte, où ses hostes avoient laissé leur argent en garde.» La Planche cite parmi ceux de cette rue qui avoient aussi quitté la place un gentilhomme nommé La Fredonnière.

185: Cette petite portion de terre cédée par Le Clerc à Baujouen étoit une de celles sur lesquelles on n'avoit pas construit, «à cause, dit du Boullay, p. 260, que l'on apprehendoit les desordres et insultes des escoliers.» Les mêmes craintes étoient préjudiciables aux maisons bâties. «Et ceux mesmes, dit encore du Boullay, qui y avoient des maisons ne trouvoient pas bien souvent à qui les louer, et ainsi l'Université ne pouvoit estre payée de ces cens et rentes.»

186: Françoise Marguerite Joncoux, fille du gentilhomme auvergnat qui vient d'être nommé, et de qui elle tenoit la maison de la rue des Marais désignée ici, s'est distinguée parmi les écrivains jansénistes. C'est elle qui a traduit les notes de Wendrock (Nicole) sur les Provinciales. Elle étoit née en 1668, et mourut le 27 septembre 1715.

187: Il avoit pour fille Mlle Marie de Louvencourt, qui eut une sorte de réputation poétique vers 1680. On trouve de ses vers dans la Nouvelle Pandore de M. de Vertron et dans les Entretiens de morale de Mlle de Scudéry.

188: «La reine Marguerite, duchesse de Valois..., traitta avec l'Université, en l'an 1606, pour 6 arpens de terre sciz au petit Pré, à la charge de 12 deniers parisis de cens et de 10 livres de rente foncière pour chaque arpent, lods et ventes, saisines et amendes, le cas avenant, qu'elle reconnoist, par le contract du 31 juillet au dit an, appartenir à la dite l'université en plein fief, à cause des dons et liberalitez des roys de France; lequel contract fut homologué par arrest du 5 septembre 1609....» (Du Boullay, p. 341.)

189: Une première donation aux Augustins déchaussés avoit eu lieu en 1608, par suite d'un vœu fait par la reine, «à l'imitation du patriarche Jacob», lequel consistoit en deux points: «le premier, de donner à Dieu la dîme de tout son bien; le second, d'édifier un autel..., lequel sera appelé l'autel Jacob, qui sera composé d'une grande eglise pour celebrer le divin service de l'office ordinaire qu'on a accoustumé dire et chanter...» L'église, qui n'étoit d'abord qu'une chapelle ronde, fut construite. V. Suppl. à du Breul, p. 72, et le Plan de Mérian. Le nom de la rue voisine garda le souvenir du vœu singulier fait par la reine au patriarche Jacob. Les pères Mathieu et François Amyot reçurent cette magnifique donation au nom de l'ordre des Augustins déchaussés. La reine avoit fait préalablement accorder par le roi au père Amyot un brevet lui permettant «de recevoir et occuper tous biens,... et bastir convents de son ordre en tous lieux et endroits de son royaume.» (L'Estoile, 16 juin 1607, édit. Michaud, t. 2, p. 429.)—Par malheur, les Augustins déchaussés ne satisfirent pas la reine, qui vouloit des «religieux qui chantassent à nottes». Elle les congédia en 1612, pour prendre des moines chantant mieux. Ce furent les Augustins réformés, ou Petits-Augustins. Les Augustins deschaux, ou Petits-Pères, s'en allèrent au faubourg Montmartre, où ils consacrèrent, sur un terrain dépendant de la Grange-Batelière, une église à Notre-Dame-des-Victoires. (Suppl. à du Breul, ibid.).

190: Le 15 avril 1614, l'Université avoit déjà obtenu du roi des lettres de rescision annulant le contrat qu'elle avoit fait avec la reine Marguerite. Elle s'étoit fondée, dans cette demande d'annulation, sur ce que les 6 arpents concédés à la reine «pour employer à son plaisir et contentement particulier, et pour le seul usage d'icelle dame et de son hostel», avoient été détournés de cette destination à ce point que «mesme ont esté faits des baux à personnes particulières, lesquelles maintenant y batissent». (Du Boulay, p. 300.)

191: Cet égout, construit suivant les conditions imposées ici, passoit sous une partie des jardins de des Yveteaux, dont il sera parlé tout à l'heure. V. Félibien, Preuves, t. 2, p. 136.—Il étoit d'autant plus nécessaire de le voûter que la peste, dont ces cloaques étaient un foyer permanent, avoit dernièrement sévi dans ces quartiers. L'Estoille dit, sous la date du 6 septembre 1606: «La peste est au logis de la reine Marguerite, dont deux ou trois de ses officiers meurent, et entr'autres un miserablement dans une pauvre mazure, près les Frati ignoranti, la fait retirer à Issy, au logis de la Haye, se voiant, à raison de cette maladie, abandonnée de ses officiers et gentilshommes.»

192: Les modes italiennes importées par les Médicis avoient donné une grande extension au commerce des parfums, et l'on avoit pu s'y enrichir à Paris. C'est ce que fit le sieur Devaux, à qui nous voyons acheter ici 300 toises de terrain. Il avoit sa boutique près la Magdeleine, c'est-à-dire à la descente du pont Notre-Dame, non loin de celle où le parfumeur milanois René, qu'on accusoit d'avoir empoisonné Jeanne d'Albret dans une paire de gants parfumés, avoit tenu son commerce. L'Estoille nous parle de Devaux à propos d'un cabinet qu'il eût bien voulu lui vendre. «Homme des plus curieux de Paris, il avoit, dit-il, le bruict d'être fort riche et aisé.» (Mardi, 7 octobre, 1608. Edit. Michaud, t. 2 p. 476.)

193: C'est le troisième brodeur que nous rencontrons dans ce quartier. Félibien nous en nomme encore un autre (Preuves, t. 2, p. 136). Il sembleroit par là que cette corporation, alors nouvelle, puisque ses statuts ne datent que de 1648, y comptoit, comme celle des doreurs (V. plus haut), un assez grand nombre de ses membres. Ce qui l'indiqueroit encore mieux, c'est qu'elle avoit pris pour paroisse l'église voisine des Grands-Augustins. (Le Guide du corps des marchands, 1766, in-8, p. 180.) Un peu plus tard il s'en porta un certain nombre vers la rue de Sèvres, dans la nouvelle rue de Sèvres, qui, à cause d'eux, prit, en 1676, le nom de rue des Brodeurs.

194: Peintre artisan, sans doute, car nous ne connoissons pas d'artiste de ce nom.

195: Les frères de la congrégation de Jean de Dieu, ou de la Charité, s'étoient d'abord établis, par la protection de Marie de Médicis, qui en avoit fait venir cinq de Florence, sur l'emplacement pris un peu plus tard par les Augustins réformés. C'est lors de la grande fondation religieuse de la reine Marguerite, et à la prière même de cette princesse, qu'ils avoient dû leur céder la place. Les Augustins, en échange, leur accordèrent les 1275 toises de terrain mentionnées ici, et que les bâtiments de l'hôpital de la Charité occupent aujourd'hui. Auprès se trouvoit un cimetière, qui leur fut aussi donné. Il attenoit à la léproserie où l'on portoit les malades de ce faubourg en temps de peste, et dont la petite chapelle, nommée Saint-Pierre ou Saint Père de la Maladrerie, cédée de même aux frères de la Charité, devint leur première église. Quand la population huguenote avoit commencé de s'étendre dans le Pré-aux-Clercs, le cimetière lui avoit été abandonné. Au mois de mai 1603 on y enterroit encore des protestants, puisque nous y voyons porter le 21 de ce mois là le corps du trésorier Arnauld, commis de M. de Rosny. V. L'Estoille. L'année d'après, par arrêt du Conseil, ces inhumations durent cesser, et en 1606 le cimetière, étant donné aux frères de la Charité, fut ainsi rendu aux sépultures catholiques. Il occupoit, dans la rue aux Vaches ou de Saint-Père, appelée des Saints-Pères par altération, l'espace qui s'étend depuis la rue Saint-Dominique jusqu'un peu au delà de la rue Saint-Guillaume. Au mois de juin 1844, faisant un égoût rue des Saints-Pères, les ouvriers trouvèrent à cette hauteur un grand nombre d'ossements dans des cercueils de plâtre.

196: Nous n'avons trouvé nulle part, même dans le Mémoire de du Boulay, une explication plus complète et une analyse plus détaillée des titres de propriété de cette belle maison de des Yveteaux, si célèbre au temps de Louis XIII, aussi bien à cause de l'étendue et de la beauté de ses jardins qu'en raison de la vie extravagante qu'y menoit le vieux poète courtisan.

197: Ce M. Germain Gouffé s'étoit chargé, au mois de janvier 1593, «de faire desseicher, labourer et mettre en bonne nature de terre... la quantité de douze arpents, à prendre au grand et petit Pré-aux-Clercs...», plus une pièce du même petit Pré «joignant la maison Du Cerceau...» Deux laboureurs: Menessier, demeurant rue de la Harpe, Allan, demeurant aux Bordeliers, avoient pris cette tâche «moyennant quatre escus sols par an».

198: D'après ce qu'il écrivit lui-même en 1645, lors de son procès avec son frère, dans un factum analysé par M. J. Pichon, des Yveteaux avoit acquis cette maison de la rue des Marais, «par décret, 17,000 livres, huit ans avant la mort de son père, c'est-à-dire en 1599, sur le prix de la charge qu'il avoit été obligé de vendre...» (J. Pichon, Notices biographiques et littéraires sur la vie et les ouvrages de Jean Vauquelin de la Fresnaye et Nicolas Vauquelin des Yveteaux, 1846, in-8, p. 40.) Selon du Boulay, au contraire (p. 312), il ne l'auroit acquise qu'en 1607, au mois de mars, en se reconnoissant débiteur envers les moines de Saint-Germain d'une rente annuelle de six livres, dont cette maison, seule de toutes celles de la rue des Marais, étoit restée chargée. Du Boulay pense aussi (p. 395) qu'elle avoit été bâtie à l'endroit où se trouvoit cette place d'Ancelyre, située entre la chapelle de Saint-Martin-des-Orges et les jardins de Nesle, et servant de passage aux écoliers qui se rendoient au Pré-aux-Clercs (p. 87-88). Enfin il y retrouve encore (p. 312) la maison de Martin Freté, dont il a été parlé plus haut à propos des premières mesures prises contre les huguenots de la petite Genève. Telle qu'elle étoit quand il l'acheta, elle ne lui eût pas fait grand honneur; aussi se mit-il à l'embellir et à augmenter ses jardins dans les vastes proportions dont on vient de parler. «En ce temps-là, dit Tallemant, il n'y avoit rien de bâti au delà dans le faubourg Saint-Germain. On l'appeloit pour cela le dernier des hommes. Cette maison, ajoute-t-il, a l'honneur d'être aussi extravagamment prise que maison de France. Le grand jardin qu'il y joignit, et auquel on va par une voûte sous terre, est à peu près de mesme. Il s'y mit à faire là dedans une vie voluptueuse, mais cachée: c'estoit comme une espèce de grand seigneur dans son serrail.» (Edit. P. Paris, t. 1er, p. 345.) Il est parlé dans les Mélanges de Vigneul-Marville (t. 1er, p. 177) des beautés de ce jardin, et surtout des mascarades pastorales et lyriques qu'il y menoit avec la du Puy, cette chanteuse des rues dont il avoit fait la dame et la déesse de cette belle demeure. Il en est aussi question dans le Segraisiana (p. 103) et dans le Chevræana (p. 290), où il est dit à propos de des Yveteaux et de sa bergère, «qui jouoit de la harpe parfaitement bien»: «A l'âge de soixante et dix ans, il lui faisoit prendre une houlette garnie de rubans couleur de feu, un habit propre; prenoit à son tour une autre houlette, un chapeau de paille, un habit tel que Celadon le pouvoit porter dans l'Astrée; et, par une allée sous terre, ils entroient dans un jardin qui etoit à lui.» Dans le grand procès que lui suscita le meurtre de Lezinière, frère de la du Puy, tué dans son jardin même en des circonstances qui seront expliquées sommairement plus loin, des Yveteaux eut à subir toutes sortes de reproches au sujet de sa vie voluptueuse et cachée. Dans le Factum pour madame Catherine Couldray, veuve de Lezinière, on dit que sa maison est «un dédale embarrassé», tout rempli de valets, «et dont l'entrée est si difficile que tous ceux qui y ont esté savent que les portes de la Bastille ne sont pas plus etroittement gardées.» (Page 13.) «Le sieur des Yveteaux, y est-il dit plus loin (p. 36-37), ne se soucie point que l'on publie sa vie molle et delicate. Quand il est dedans son jardin habillé en pasteur avec sa belle Iris, la reine de la harpe, et que, pour le divertissement de sa debauche, il fait porter un jambon à la mesme forme que le pain benist à l'eglise, comme il se void par la description qu'il en a fait faire par le sieur de Saint-Amant, il ne voit pas qu'il y ait d'autres divinités que celles de la poésie, ny d'autre ciel que la demeure de son jardin, où il establit le sejour de toutes ses voluptez et de tous ses crimes.» On lui reproche encore d'être resté là caché trente-cinq ans à mener une vie horrible. (Réplique de la veuve de Lezinière, p. 5). Enfin on ne lui pardonne même pas les dieux de plâtre dont son jardin étoit orné. On lui dit, dans une satire en strophes ayant pour titre les Bastons rompus, et mise à la suite de ce dernier factum:

La Bible te semble une farce;
Par tes discours et tes escrits
De Dieu tu fais toujours mespris,
Et n'en connois point que ta garce.
Ton jardin, à ce que tu dis,
Est ton unique paradis;
C'est là que tu fais l'idolastre
D'un Mercure, d'une Venus,
Et d'autres marmousets de plastre
Que l'Eglise n'a point connus.

La voûte faisant communiquer entre eux le petit et le grand jardin passoit, comme il est dit ici, et comme l'avoit deviné M. Paulin Pâris, sous la rue des Petits-Augustins, et non pas sous celle des Marais, ainsi que l'a écrit M. J. Pichon (p. 41). Les 1732 toises du grand jardin ne pouvoient, en effet, se trouver que dans les terrains vagues s'étendant au delà de la rue des Petits-Augustins, entre cette rue, la rue Jacob et l'enclos du couvent, jusque vers la rue des Saints-Pères. Il eût d'ailleurs été impossible que, comme le veut M. Pichon, des Yveteaux possédât l'espace compris entre la rue des Marais et celle du Colombier, puisqu'il étoit occupé par le terrain de G. Gouffé (voy. plus haut) et la maison de du Cerceau. La maison du poète, son petit jardin, la basse-cour avec les bâtiments en dépendant, où se trouvoit cette riche collection de tableaux que le propriétaire estimoit autant que tout le reste (voy. M. Pichon, p. 42), toute cette partie de la propriété de des Yveteaux, reliée au reste par la voûte souterraine, s'étendoit entre la rue des Marais, du côté des numéros pairs, et l'hôtel de Larochefoucauld-Liancourt, dont la rue des Beaux-Arts a, comme on sait, pris la place. Il paroît même, selon Tallemant, que Mme de Liancourt, voulant s'agrandir de ce côté, offrit à des Yveteaux 200,000 livres de sa maison et de ses deux jardins. Le plus grand des deux, celui qui étoit au delà de la rue des Petits-Augustins, avoit une petite porte sur la rue Jacob. C'est sur le seuil de cette porte que le mari de la du Puy vint se placer un soir, poussant de grands cris pour attirer l'attention et exciter la pitié de des Yveteaux, ce qui lui réussit: car il ne fallut que ce manége pour ouvrir la maison à ce couple d'intrigants, qui y fut bientôt maître. En 1636, à cause de cette même porte de derrière, nous trouvons des Yveteaux forcé de contribuer, ainsi qu'un boulanger son voisin, pour le pavage de la rue Jacob. (Félibien, Preuves, t. 2, p. 135.)

199: Des Yveteaux avoit d'abord vendu la nue propriété de sa maison à Hercule, son neveu, nommé ici, et le même dont Tallemant a dit: «Ce monsieur le maistre des requestes pretendoit estre seul heritier du bonhomme, car il y avoit assez à esperer». Malgré cette vente, qui n'étoit sans doute faite que fictivement, et pour satisfaire en apparence à l'avidité du neveu, des Yveteaux crut pouvoir céder aux obsessions de la du Puy quand il fut question de marier la fille qu'ils avoient eue ensemble avec Nicolas Vauquelin de Sacy, un autre de ses neveux. Il leur donna, par leur contrat de mariage, ce qu'il avoit déjà vendu à Hercule: de là de grandes querelles, de là même des rixes continuelles, dont la dernière finit par un assassinat. Des Yveteaux s'explique ainsi sur les suites de cette funeste donation dans le factum qu'il fut obligé de publier pour se justifier du crime commis chez lui: «Pour rachepter le repos de sa vieillesse, il fut, lui des Yveteaux, contraint de forcer le dit sieur de Sacy, son second neveu, de se priver des conditions de son dit mariage, et de faire une transaction par laquelle il s'est desisté de la donation, quoi qu'acceptée, insinuée et faicte par un contrat de mariage qui l'a engagé dans des malheurs infinis,... en ce que le dit neveu (Hercule) ayant eu quelque ombrage que cette transaction ne pouvoit subsister, comme faicte avec mineure, et contre la solidité d'un contrat de mariage, il auroit supposé quantité de gens de neant, abandonnez et desesperez, pour provoquer ledit sieur de Sacy, son cousin germain, en duel, et autre occasion d'assassin, l'un des quels, nommé Lezinière, a esté celuy qui en a voulu faire l'execution, d'où s'en est ensuivy la mort qui cause l'etat du procès.» Ce Lezinière, en effet, qui étoit frère de la du Puy, au lieu de faire cause commune avec elle, s'étoit fait, dans cette affaire, le spadassin d'Hercule. Non content d'une première querelle dans laquelle il avoit blessé Sacy, il vint un soir faire tapage chez des Yveteaux. La du Puy voulut le calmer. Sacy, qui rentroit, se mit de la partie. Il en résulta une rixe violente dans laquelle Lezinière, renversé, fut percé de coups d'épée par le valet de son adversaire, et mourut. Il est inutile d'entrer dans les détails du procès qui suivit; il ne nous importe que pour ce qui a rapport à la maison. Or, c'est Tallemant qui nous renseigne le mieux sur ce point. «Pour finir, dit-il, tous ces differends, on fit une transaction par laquelle, moyennant 80,000 livres, Sacy et sa femme renonçoient à la maison. Ils s'en sont fait relever depuis.» Il paroît cependant que la transaction passée entre des Yveteaux et Hercule fut bonne et valable en partie, puisqu'elle est rappelée ici avec sa date du 27 décembre 1644. Tout le grand jardin étoit sans doute resté le partage de Sacy, tandis que la maison et le petit jardin étoient celui d'Hercule. C'est comme propriétaire de cette partie qu'il devoit être tenu de payer le cens grevant la totalité des terrains. Un factum, sous forme d'une lettre de M. le président de la Fresnaye (le père d'Hercule) à M. des Yveteaux, son frère, nous prouve qu'en effet la maison avoit été achetée et payée par le maître des requêtes, et que le reste, le grand jardin sans doute, étoit aux mains de Sacy et de la fille de la du Puy, sa femme. «En traitant avec vous, y est-il dit, de la propriété de votre maison, dont vous vous réservez l'usufruit, il vous a payé comptant 81,000 livres et s'est obligé d'ailleurs à 42,000 livres. Ceux qui ont volé la plus grande partie de votre bien ne sont pas satisfaits s'ils n'ont le reste. Pour y parvenir, ils veulent avoir cette maison que vous avez vendue, et l'argent que mon fils a payé.» Ce qui prouve que les 123,000 livres données ici par Hercule devoient suffire à peine pour payer la maison et les meubles, sans compter le grand jardin, c'est que nous avons vu tout à l'heure madame de Liancourt offrir pour le tout 200,000 francs, somme qui même étoit encore insuffisante, puisque, d'après le factum de des Yveteaux (page 9), d'autres estimoient «cette belle maison du prix de 100,000 escus.» Pour en finir, nous dirons, d'après Tallemant (édit. P. Paris, t. 1, p. 346), que Richelieu fut de ceux à qui cette maison fit envie. «Il eut quelque pensée d'y bâtir, mais il trouva que cela estoit trop loin du Louvre..., parce qu'il falloit gagner le Pont-Neuf pour s'y rendre.»

200: C'est sans doute le Domanchin dont parle Sandras de Courtilz dans les Mémoires du comte de Rochefort, p. 341, et dont le nom est cité dans la longue pièce monorime l'Epitaphe du bibliothécaire (le Conservateur, avril 1758, p. 110). Sandras le donne pour «un fameux usurier qui avoit volé pour le moins cinquante mille écus à un gentilhomme nommé Méré.» Le prénom tout israélite de Salomon, qui lui est donné ici, ne répugne ni à la qualité, ni au méfait.

201: Nous ne savons quel est ce monsieur Gilles de Launay, historiographe de France en 1676.

202: Les hôtels garnis furent toujours très nombreux dans ce quartier. Celui qu'on nomme ici et l'hôtel de l'Aigle, qui vient après, ne s'y trouvent plus toutefois. C'étoit encore, à la fin du XVIIe siècle, une mode pour les étrangers de venir loger au faubourg Saint-Germain. Nous lisons dans les Annales de la cour et de Paris pour 1697 et 1698, t. 2, p. 135: «Depuis que la paix étoit faite, il y avoit un si grand abord d'étrangers à Paris que l'on en comptoit quinze ou seize mille dans le faubourg Saint-Germain seulement. Cette affluence y fit tellement renchérir les maisons que celles qui s'y louoient pendant la guerre mille ou douze cents francs y valoient alors cinq cents escus. Le nombre de ces étrangers s'accrut alors bientôt de plus de la moitié, de sorte que, par la supputation qui en fut faite peu de temps après, c'est-à-dire au commencement de l'année suivante, on trouva qu'il y en avoit plus de trente-six mille dans ce seul faubourg.»—Dulaure, dans sa Nouvelle description des curiosités de Paris, 1785, in-12, t. 1, p. 327, cite, dans la seule rue Jacob, trois hôtels parmi les plus excellents de Paris: l'hôtel de Danemarck, l'hôtel d'Yorck, l'hôtel du Prince de Galles. Ce dernier, comme nous le voyons sur le plan de Maire, étoit très vaste: ses jardins alloient jusqu'à la rue des Marais. Le maître de l'hôtel d'Yorck parloit anglais, et il y avoit tout proche un café ou l'on étoit servi à l'angloise. Toutes ces commodités furent sans doute cause que Sterne se logea dans cette même rue quand il vint à Paris. L'hôtel de Modène, où il descendit, s'y trouvoit, en face de la rue des Deux-Anges. V. Paulin Crassous, le Voyage sentimental, traduit en françois, Paris, 1801, pet. in-18, t. 3, p. 146.—La rue des Deux-Anges devoit peut-être elle-même son nom à une hôtellerie. Il s'en trouvoit déjà une portant cette enseigne sur le quai du Louvre. V. les Mém. de Monglat, collect. Petitot, 2e série, t. 51, p. 268.

203: Il descendoit de Louis de Lasseré, proviseur du collége de Navarre, dont le portrait se voyoit sur les vitraux de la chapelle de ce collége. Celui qui est nommé ici, fort savant homme et du meilleur monde, mourut au Temple en 1754, à quatre-vingt-quatre ans. V. Piganiol, t. 5, p. 188-190.

204: C'est le de la Haye chez lequel nous avons vu la reine Marguerite chercher un asile à Issy contre la peste. V. plus haut, p. 134, note.—Les seigneurs de Vaudetart avoient leur sépulture dans l'église d'Issy. (Piganiol, t. 9, p. 256.)

205: Ce la Chevalerie, qui a tant de fois été nommé comme mandataire de des Yveteaux, étoit d'une famille huguenote, qui passa en Prusse vers la fin du XVIIe siècle, et de laquelle se trouvoit être Mme de la Chevalerie morte à Berlin en 1736. (Ducatiana, t. 1, p. 56.)—Celui dont il est parlé ici tenoit par les femmes à la famille de la mère de Boileau. V. Berriat S.-Prix, Œuvres de Boileau, t. 4, p. 442.

206: Du Boulay (p. 320) dit que pour ce terrain les religieux devoient payer 10 livres de rente et 12 deniers parisis de cens par arpent. Afin de frustrer l'Université, ils firent racheter une partie des dites rentes, selon du Boulay; mais l'Université para le coup: elle fit aux moines un procès, à la suite duquel ils furent condamnés, le 19 août 1645, à payer à l'Université 31 livres de rente, rachetables de 620 livres, et cela sans préjudice de ce qu'ils devoient pour le bail qu'ils avoient fait avec le marbrier Alphonse Mesnard, pour 300 toises dont il sera parlé plus loin, sans préjudice non plus d'une rente de 36 livres par eux due pour 120 autres toises de terre, ni enfin de 48 livres de rente «portées, par contract du mesme jour, au profit de Roland le Duc, de 160 toises de terre sur la rue Saint-Père..., lequel bail ils avoient artificieusement fait declarer nul et resolu.» Les Augustins ne s'en étoient pas tenus à se décharger indûment de leur redevance envers l'Université; il paroît, d'après l'arrêt rendu contre eux, qu'ils avoient empiété sur le terrain du Pré-aux-Clercs au delà des limites que leur assignoit l'acte de donation de la reine Marguerite. V. l'arrêt, donné in extenso par du Boulay, p. 326.

207: Elle s'appela d'abord le Grand et le Haut-Chemin, puis rue des Vaches, puis rue des Egouts. (Du Boulay, p. 402.)

208: Ce Jehan de l'Espine est sans doute le même qui fit connoître à l'Estoile le riche parfumeur Devaux, son ami. V. le passage déjà cité, Journal de l'Estoile, édit. Michaud, t. 2, p. 476.

209: Ce nom de Colletet, porté par deux poètes qui l'ont popularisé, étoit très honorablement connu dans la bourgeoisie parisienne aux XVIe et XVIIe siècles. Il en étoit de lui à peu près comme de celui de Scarron: c'étoit une espèce de noblesse dans la roture. Une maison de la rue de la Mortellerie s'appeloit maison Colletet, et paroît avoir été très fameuse dans le quartier. V. Félibien, Preuves, t. 2, p. 34. Félibien parle d'un Colletet qui étoit dans les ordres. (Id., 1, 685.) Enfin nous savons que cette famille tenoit par alliance à celle de Boileau (Berriat Saint-Prix, Œuvres de Boileau, t. 4, p. 456), ce qui rend moins justifiables encore les attaques du satirique contre François Colletet.

210: Fils de P. Matthieu, dont il publia l'Histoire de France, Paris, 1631, 2 vol. in-fol. Il y avoit joint l'Histoire de Louis XIII. La femme qu'on lui donne ici n'auroit pas été sa seule épouse, s'il falloit en croire la Biographie universelle, qui le marie avec Louise de la Cochère, d'une famille noble de Florence. Toujours d'après le même recueil, il en avoit eu deux fils et une fille, qui se fit religieuse dans le tiers ordre de Saint-François, et y vécut d'une manière très édifiante. Sa vie a été publiée par le P. Alexandre, récollet. La Vie de la venerable M. Matthieu, Lyon, 1691, in-8.

211: Un autre M. de Bezons, qui fut membre de l'Académie françoise, demeuroit au faubourg Saint-Germain. (Tallemant, in-12, t. 8, p. 31.)

212: Il étoit sans doute le fils de l'entrepreneur Pierre Hannon, qui bâtit, en 1550, le cloître des Célestins (Piganiol, t. 4, p. 253), et comme lui, il devoit être maçon. On a dû remarquer que ce sont souvent des entrepreneurs, charpentiers ou maçons, qui prennent à cens les terrains du Pré-aux-Clercs, afin d'y construire et de revendre ensuite, comme on fait aujourd'hui dans les quartiers neufs.

213: C'est la partie dont il est parlé ainsi dans le Supplément de Dubreul (1639, in-4, p. 42): «Sur le devant est un autre bastiment regardant le Pré-aux-Clercs, où sont de belles salles hautes et convenantes, et par bas des galeries en forme d'arcades ou de cloistres, et un beau, grand et spacieux preau qui sera au milieu.»

214: Ce projet de prolongation de la rue des Deux-Anges, qui eût été si préjudiciable à l'hospice de la Charité, ne fut pas réalisé. Aujourd'hui cette rue, qui étoit très sale et peu habitée, est fermée par une porte du côté de la rue Jacob, et par une maison assez récemment bâtie du côté de la rue Saint-Benoît.

215: Elle étoit sans doute de la même famille que la mère de Molière, Marie Crissé, et que ce médecin Crissé, dont Beffara a prouvé la parenté avec le grand comique, et auquel il arriva une si singulière aventure, racontée par Gui Patin (lettre du 21 nov. 1669). V. Taschereau, Vie de Molière, 2e édition, p. 151, 208.

216: Ce M. Jacques Nau ne seroit-il pas le même que Mlle de Montpensier s'étoit attaché, comme conseiller, pour débrouiller ses procès, et dont Richelieu l'avoit ensuite forcée de se défaire, parcequ'il le soupçonnoit de lui être contraire dans son esprit et de la pousser à des intrigues hostiles à sa politique? V. Mémoires de Mlle de Montpensier, coll. Petitot, 2e série, t. 41, p. 447-491. Nous avons déjà vu Edme Robert, intendant de Mademoiselle, acheter des terrains de ce côté (V. plus haut, p. 128), et nous savons d'ailleurs que Gaston y recherchoit de pareilles acquisitions pour les personnes attachées à la maison de sa fille, et que, pour leur obtenir une préférence sur tous autres acheteurs, il usoit de l'influence de son nom auprès du recteur de l'Université. Voici, entre autres, une lettre qu'il lui écrivit à ce sujet. Nous la trouvons dans le curieux mémoire de du Boulay (p. 316-317):

«A monsieur le recteur de l'Université de Paris.

«Monsieur le recteur de l'Université de Paris, m'ayant été promis par vos predecesseurs en vostre charge la preferance de places qui vous restent encore à vendre au Pré-aux-Clercs, par la dame marquise de Saint-Georges, gouvernante de ma fille, je vous escris cette lettre pour vous faire la mesme prière en sa faveur que je leur ay faite, et vous assure que vous me ferez en cela un singulier plaisir. Je sçay qu'il vous sera d'autant plus aisé qu'il vous doit estre indifferend à quelles personnes vous bailliez les dittes places, pourvu que le prix en soit esgal. Et toutefois, quand je verray que ma recommandation aura prevalu en faveur de la ditte dame marquise de Saint-Georges, j'en tiendray l'effect à une particulière defference que vous y aurez voulu rendre, qui me conviera à vous en tesmoigner mon ressentiment aux occasions qui s'en pourront offrir, et comme je suis,

«Monsieur le recteur de l'Université de Paris,

«Votre bien bon amy,
«Gaston

217: La maison Hovalet se trouve indiquée sur le plan de Gomboust.

218: Le postulant étoit un avocat ou un procureur qui plaidoit dans les justices inférieures.

219: L'Université n'étoit pas seule à se plaindre de ces empiétements et des constructions trop multipliées dans le Pré-aux-Clercs. Il y eut, selon Sauval, des ordres de Louis XIII et de Louis XIV faisant défense de passer certaines limites. «Néanmoins, ajoute-t-il (t. 2, p. 368), on ne laisse pas d'avancer toujours et de les passer, ce qui oblige quelquefois de les reculer et mettre un peu plus loin.»—La première usurpation ne venoit pas des adjudicataires dont il est ici parlé, mais de la reine Marguerite elle-même, qui avoit donné un exemple trop bien suivi. Ne s'en tenant pas aux six arpents que l'Université lui avoit vendus dans le Pré-aux-Clercs, elle avoit empiété sur cinq ou six autres, comme il est dit dans la Requeste verbale du 24 octobre 1616; «et, afin d'en oster à l'advenir toute connoissance, elle a non seulement fait arracher les bornes et combler les tranchées qui separoient le dit Pré d'avec les terres voisines, mais mesme elle a fait faire de larges et profondes tranchées dans iceluy Pré par le moyen des quels son usurpation est demeurée jointe au parc qu'elle vouloit dresser derrière son hostel.» Ce parc, qu'on appeloit aussi le jardin, les allées, le cours de la reine Marguerite, comme dit Sauval (t. 2, p. 250), et dont nous avons parlé (V. notre t. 1, p. 219), s'étendoit loin dans le Pré-aux-Clercs en longeant la Seine: il alloit jusqu'à la halle Barbier, qui se trouvoit rue du Bac, sur l'emplacement occupé depuis par l'hôtel des Mousquetaires. L'enclos du palais de la reine Marguerite en étoit séparé par la rue des Saints-Pères. On entroit dans ce parc par une grille, visible, comme le reste, sur le plan de Mérian. La reine n'avoit pas osé, à ce qu'il paroît, s'emparer de cette rue comme elle avoit fait de celle des Petits-Augustins, qu'elle avoit, sans autres façons, englobée presque tout entière dans son enclos. «Quant à l'autre bout de la rue des Augustins (celui qui touche au quai), lisons-nous dans le Mémoire de du Boulay, p. 403, la reine Marguerite l'avoit fait enfermer en son enclos, en sorte que l'on n'y pouvoit plus passer pour aller à la rivière. Mais, après son décès, dit encore du Boulay, son hostel ayant esté decreté, sur l'opposition qui fut faite intervint arrest, le 14e aoust 1619, par le quel il fut ordonné que distraction seroit faite des criées du dit hostel de la consistance de dix-huit pieds, à commencer du coté de la grande porte par laquelle on entre au couvent des Augustins, et continuer au travers de la cour dudit hostel, jusques au chemin public d'entre la rivière et l'hostel.» Cet hôtel de la reine Marguerite, sur lequel nous n'aurons plus à revenir, avoit son entrée rue de Seine, où l'on en trouve des restes dans la maison portant le no 6. Sur le plan de Quesnel, et mieux encore sur le plan Mérian, on le trouve complétement figuré avec ses trois corps de logis, dont celui du milieu étoit couronné d'un dôme; avec son double perron sur la cour, son jardin et le parc qui en étoit le prolongement. Après la mort de la reine, les bâtiments de cet hôtel ne furent pas ruinés, comme dit Sauval: ils furent mis en location par petites parties (V. notre t. 1, p. 207), puis, vers 1639, acquis par Mme de Vassan, qui les loua au président Séguier. En 1718, le président Gilbert des Voisins en devint propriétaire et y fit des réparations qui ont donné au corps de logis encore debout la physionomie qu'il a aujourd'hui. V. Jaillot, Quartier Saint-Germain, p. 79, et G. Brice, t. 4, p. 76.

220: Qu'encore que l'echeance des rentes de toutes ces maisons ait esté fixée au 19 fevrier, cependant les receveurs de l'Université n'en ont compté que comme echeantes au dernier septembre. (Note de l'auteur.)—«MM. Lecoq, Pithou et Tambonneau, lisons-nous dans du Boulay (p. 317), commencèrent de faire bastir des maisons depuis le cimetière des Huguenots, qui aboutit de ce côté à la rue Saint-Père; et, pour rendre ces maisons remarquables et distinctives de celles des moines, l'Université les chargea d'un gros cens de 8 et 10 livres.»

221: Ces dates concordent à merveille avec ce que Corneille fait dire à Dorante et à Géronte à l'acte 2, scène 5, de sa comédie du Menteur, jouée, comme on sait, en 1642, c'est-à-dire au moment même où l'on devoit achever de bâtir les hôtels dont nous voyons acheter ici le terrain, et qui changèrent si complétement la physionomie du Pré-aux-Clercs. Voici ce curieux passage, où sont rappelés tous les travaux accomplis alors dans Paris, tant dans l'île Saint-Louis, où l'on commençoit à bâtir, que dans le Pré-aux-Clercs et dans le nouveau quartier Richelieu, sur les anciens remparts, auprès du Palais-Cardinal:

Dorante.

Paris semble à mes yeux un pays de romans:
J'y croyois ce matin voir une île enchantée;
Je la laissai deserte et la trouve habitée;
Quelque Amphion nouveau, sans l'aide des maçons,
En superbes palais a changé ces buissons.

Geronte.

Paris voit tous les jours de ces metamorphoses:
Dans tout le Pré-aux-Clercs tu verras mêmes choses,
Et l'univers entier ne peut rien voir d'égal
Aux superbes dehors du Palais-Cardinal.
Toute une ville entière, avec pompe bastie,
Semble d'un vieux fossé par miracle sortie,
Et nous fait présumer, à ses superbes toits,
Que tous ses habitants sont des dieux ou des rois.

Dans ce qu'il dit sur le Pré-aux-Clercs à cette date de 1642, Corneille se trouve être plus vrai que Sauval lui-même dans un passage trop vague de ses Antiquités de Paris (t. 2, p. 368).

222: Piganiol confirme la situation de la maison de M. Bailly de Berchère, t. 8, p. 96-97.

223: C'est le même que sa femme, la belle et trop fameuse Mme Tiquet, tenta deux fois de faire assassiner. On conçoit, d'après la situation de la maison qu'ils habitoient, comment il se fit que l'exécution de la coupable eut lieu, le 17 juin 1699, au carrefour de la Croix-Rouge, qui étoit la place de Grève de la justice de Saint-Germain-des-Prés. (V. Guyot de Pitaval, Causes célèbres, t. 4, p. 43, et t. 5, p. 485.)

224: Elle étoit fille de ce d'Almeras qui fit sous Louis XIII une si grande fortune comme financier et comme fermier des postes. (V. sur lui la Chasse aux larrons de J. Bourgoing.)

225: Ceci donne encore raison à ce que nous avons dit de l'empressement des officiers de la maison de Gaston ou de celle de sa fille à venir s'établir dans ces quartiers, qui avoient, entre autres avantages, celui de n'être pas éloignés du Luxembourg.

226: La maison de M. Lecoq est indiquée sur le plan de Gomboust, au coin de la rue des Saints-Pères et de la rue der l'Université. Cette dernière y est appelée rue de Sorbonne. Elle a aussi ce nom sur les plans de Bullet et de Jouvin. Sauval (t. 1, p. 152) dit que c'est à tort qu'on le lui donne, car rien n'indique qu'elle l'ait jamais réellement porté. G. Brice (t. 4, p. 59) est d'un avis contraire, et soutient que ce nom désigna au moins la partie comprise entre la rue des Saints-Pères et la rue du Bac. Jaillot pense, de son côté, que c'est la rue Saint-Dominique qui, en 1673, s'appeloit rue de Sorbonne. (Quartier Saint-Germain, p. 81.) Quant à Piganiol (t. 8, p. 169), il donne tort et raison à G. Brice: raison si, pour l'époque où cette désignation put être en usage, il s'en tient à la date du plan de Gomboust, c'est-à-dire à 1652; tort, s'il soutient que ce nom dut être employé plus tard. Cette opinion de Piganiol est certainement la meilleure.

227: L'hôtel de Paloiseau, l'un des plus anciens et des plus beaux de ce quartier, est indiqué sur la plupart des plans de Paris au XVIIe siècle; seulement on l'y confond souvent, notamment sur le plan de 1699 et sur celui de Blondel, avec son voisin, l'hôtel Tambonneau. Sur le plan Turgot, il s'appelle hôtel de la Roche-Guyon. Il étoit donc devenu, par acquisition ou autrement, l'un des quatre hôtels que, suivant Piganiol, «les comtes de la Roche-Guyon, du nom de Silli, ont eus à Paris en différents temps et en différents quartiers.» (Description de Paris, t. 3, p. 280-281.)

228: L'hôtel Tambonneau, dont G. Brice a donné la description, t. 4, p. 59-60, avoit été bâti par Le Vau, et étoit l'un des plus beaux de la rue de l'Université. Le président étoit venu au Pré-aux-Clercs pour se rapprocher de Le Coigneux, son ami, (dont l'hôtel est devenu celui du ministère de l'instruction publique) et peut-être aussi afin d'être à portée de voir de plus près et plus souvent la fille de la Dupuis, mariée à de Sacy, pour laquelle il avoit une vive inclination. (V. Tallemant, édit. P. Pâris, t. 1, p 347.) En attendant que son hôtel fût bâti, il s'établit dans la maison que Barbier, contrôleur général des bois de l'Isle de France, et l'un des adjudicataires du parc de la reine Marguerite, avoit fait construire rue de Beaune, à deux pas du pont de bois, qu'on appeloit à cause de lui pont Barbier. «Cette belle maison auprès du Pré-aux-Clercs», comme Tallemant appelle l'hôtel Tambonneau, étant terminée, il y vint avec sa femme, si connue alors par ses coquetteries de toutes sortes, et même avec les amants de madame, entre autres Aubijoux, qui, s'y trouvant bien, «y mena, dit Tallemant, d'autres gens de la cour». (Edit. in-12, t. 9, p. 155.) La maison Tambonneau est figurée sur le plan de Gomboust; ses jardins vont jusqu'à la rue Saint-Guillaume, en longeant sur la gauche une partie du cimetière des huguenots. La Quintinie, qui étoit précepteur du fils de M. Tambonneau, développa, dans ses magnifiques jardins, le goût qu'il avoit pour l'horticulture, si bien qu'il renonça tout à fait au dessein qu'il avoit de se faire avocat, et se fit jardinier. On sait combien cette résolution lui a réussi, et quelle célébrité il a atteinte.—M. Monmerqué a dit par erreur, dans ses Notes sur Tallemant, t. 9, p. 155, que l'hôtel Tambonneau, l'ancien hôtel de Bouillon, selon lui, étoit encore un des plus beaux du quai Malaquais.

229: Ce Thomas Gobert étoit le père de l'architecte du même nom à qui l'on devoit le dessin de la Bibliothèque des Petits-Pères, et qui construisit tout près de ce même hôtel d'Aligre «une fort jolie maison», dit Germain Brice (t. 4, 81), dont il n'est pas parlé ici. En 1752, elle appartenoit aux héritiers de la présidente de Brou. Selon Brice, on l'avoit bâtie sur un emplacement occupé auparavant par la manufacture de glaces qui fut ensuite transférée au faubourg Saint-Antoine. Un manége, ou, comme dit Brice, «une académie pour monter à cheval», s'y étoit vu auparavant. C'est sans doute l'académie de M. Forestier, figurée sur le plan Gomboust. Elle avoit son entrée sur la rue de Sorbonne (sic) par une sorte de petite ruelle. Ces établissements furent nombreux de ce côté au XVIIe siècle. Michel de Marolles, qui consacre tout un chapitre de sa Description de Paris (1677, in-4.) aux académies pour monter à cheval, nous montre:

Glapier le lyonnois, Soleitzel, Bernaldi,
Gentilhomme lucquois, cousin d'Arnolphini;
Du Vernay, Rocquefort......,
Dans la rue où l'on dit de l'Université
La Vallée au dessus des fossés de Condé,
Et Foubert dans la rue à sainte Marguerite.

230: Le notaire Arouet, père de Voltaire.

231: Germain Brice a donc raison quand il nous dit (t. 4, p. 60) que la première maison bâtie sur ce terrain le fut par Laugeois d'Imbercourt. Mme d'Aligre avoit possédé la place, mais n'y avoit rien fait construire, quoi qu'en dise Piganiol, t. VIII, p. 170. Cet hôtel, que Brice a décrit, et qui étoit loin d'être beau malgré l'argent qu'on y avoit dépensé, revint et resta à la famille d'Aligre, après avoir appartenu quelque temps au premier président Achille du Harlay.

232: Le même dont Chapelle, l'ami de Bachaumont, étoit le fils naturel.

233: C'est l'une des deux grandes maisons «sur la porte desquelles, dit le chevalier du Coudray, sont les armes de l'Université, à qui elles appartiennent et qui ont donné le nom à la rue. C'est, ajoute le chevalier, une anecdote que M. de Saint-Foix ignoroit, et que nous tenons de M. Duval, recteur pour la seconde fois de l'Université.» Nouv. Essais historiques sur Paris (Paris, 1781, in-12, t. 1, p. 178).—Saint-Foix ne l'avoit pas dit, c'est vrai, mais Brice en avoit parlé, et à peu près dans les mêmes termes que M. de Couchay, t. 4, p. 62.

234: Une partie des bâtiments du noviciat des Jacobins réformés est occupée par le Musée d'artillerie. L'église est devenue celle de Saint-Thomas-d'Aquin, qui, dès l'origine, en étoit l'un des patrons. Les Jacobins s'étoient établis là en 1633, sous le patronage de Richelieu. (V. Suppl. aux Antiquités de Paris par Dubreul, p. 43.)

235: La rue du Bac, que nous avons déjà vue souvent nommée ici, devoit, comme on sait, son nom au bac qui, avant la construction du Pont-Barbier et surtout du Pont-Royal, établissoit une communication entre la rive gauche et la rive droite de la Seine.—Suivant les registres de l'Hôtel-de-Ville, vol. 147, ce bac avoit été établi par lettres-patentes du 6 novembre 1550. Pendant la nuit de la Saint-Barthélemy, il avoit été enlevé, ainsi que les autres bateaux de passeurs qui se trouvoient d'ordinaire devant les Tuileries. On vouloit par là empêcher que les huguenots, nombreux dans le Pré-aux-Clercs, ne fussent avertis à temps; et, en effet, ce fut une des raisons qui firent que M. de Caumont et ses fils furent surpris et ne purent se sauver. (V. de Meyer, Galerie du XVIe siècle, t. 1, p. 376.)—M. Berty, à la p. 403 de son travail déjà cité, donne de curieux renseignements sur ce bac, sur celui qui en étoit chargé et sur le chemin qui y conduisoit. «Nous avons trouvé, dit-il, dans les archives de l'Université, une transaction du 26 mai 1580 par laquelle un marchand, nommé Georges Regnier, qui est dit fournissant les matériaux qu'il convient avoir pour les fortifications de cette ville de Paris du costé des Thuilleryes, ensemble du pallais de la royne (mère du roy), aus dites Thuilleryes, et ayant aussi la charge du gouvernement du bac assis sur la rivière, vis-à-vis du dit pallays, pour le passage des dits materiaux, obtint de l'Université la permission de faire passer et repasser les chevaux, charettes, harnoys, tant chargés que vuides, avec les gens du dit Regnier, par et au travers du Pré-aux-Clers..... par le chemin jà commencé longtemps et qui vient de Vaugirard, entrant dans le dit Pré, auprès de sa borne, située près du lieu où etoit sise la Maison-Rouge, pour aller où est situé le dit bac d'icelluy Regnier... sans que icelluy Regnier ni ses gens et serviteurs puissent faire autre chemin que celui susdit, de largeur de dix pieds.» Cette curieuse pièce, heureusement retrouvée par M. Berty, n'avoit pas échappé à du Boulay. (V. son Mémoire, p. 153.)—Il n'est pas étonnant que les matériaux pour les fortifications et le palais dussent venir du Pré-aux-Clercs. Les tuileries, déplacées par suite de la construction du palais qui leur devoit son nom, avoient été transportées de l'autre côté de la Seine. M. Bonnardot en remarque une dans le Pré-aux-Clercs, sur le plan anonyme de 1601 (V. son livre sur les plans de Paris, p. 108). Du Boulay parle plusieurs fois du four à tuiles de Moussy, dans la rue de Seine (p. 261, 399). Les pierres étoient tirées de Vaugirard et de Montrouge: on devoit donc prendre pour leur transport le chemin indiqué ici.

236: Petit-fils de Coiffier, le cabaretier, et gendre de Vanel, l'un des premiers propriétaires dans la rue Neuve-des-Petits-Champs. V. Tallemant, in-8, t. 3, p. 274-275.

237: Encore un officier de Gaston dans le Pré-aux-Clercs, et nouvelle confirmation de ce que nous avons dit.

238: Barbier, l'un des adjudicataires des biens de la reine Marguerite, possédoit des terrains jusque dans cette rue. En 1636, une partie en fut cédée, et non pas donnée, par lui, comme le dit Piganiol, aux religieuses chanoinesses du Saint-Sepulcre, qu'on surnomma d'abord, pour cette raison, les filles à Barbier (V. Brice, t. 4, p. 39), et qu'on appela par la suite les religieuses de Bellechasse. Jaillot, Q. S.-Germain, p. 39.

239: Il ne faut pas les confondre avec celles dont il est question dans le Supplément de du Breul, p. 43, et qui, venues de Lorraine, s'étoient établies rue de Vaugirard au commencement du XVIIe siècle. Celles dont on parle ici eurent pour fondatrice Marie Delpèche de l'Étan, et c'est le 16 juin 1641 seulement qu'elles prirent possession de la maison qui devint leur couvent. Elle se trouvoit rue Saint-Dominique, «au milieu des hôtels ou palais qui la forment», dit Piganiol (t. 8, p. 166). On y entretenoit de pauvres orphelines, qui y étoient reçues dès l'âge de huit ans. Mme de Montespan agrandit cette maison, ce qui fit dire par plusieurs, notamment par Saint-Simon, qu'elle l'avoit bâtie. Elle s'y retira, mais «fut long-temps à s'y accoutumer», dit encore Saint-Simon (Mémoires, t. 2, p. 57). Dangeau parle de cette retraite sous la date de décembre 1691. (V. édit. complète de son Journal, t. 3, p. 457.) Ceux qui ont dit qu'elle y mourut se trompent; mais ceux qui, induits en erreur par le nom de cette communauté, ont écrit que Mme de Montespan mourut dans le quartier Montmartre, rue Saint-Joseph, se trompent bien davantage.

240: Ce couvent, dont l'emplacement est occupé aujourd'hui par la maison portant le no 82 de la rue Saint-Dominique, peut donc être à peu près considéré comme la limite du Pré-aux-Clercs, c'est-à-dire des terrains possédés par l'Université. Celui sur lequel il étoit bâti ne relevoit même plus du recteur: il appartenoit à l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Il fallut le consentement de l'abbé pour l'installation de Marie Delpèche, et le prieur de Saint-Germain assista solennellement à sa prise de possession. Dom Bouillart, Hist. de l'abbaye de Saint-Germain, p. 234.

241: M. Bonnardot, dans son très intéressant et très utile ouvrage sur les Plans de Paris, cite plusieurs de ces mesurages du Pré-aux-Clercs: «1641-94, plan et mesure du territoire du Pré-aux-Clercs par de Vaulezard, aux archives», p. 232.—Ce Vaulezard est le même dont Naudé nous a vanté la science et décrit les haillons dans un passage du Mascurat, p. 270.—«1674, plan et arpentage du grand Pré-aux-Clercs.» Bonnardot, p. 232.

242: C'est l'ouvrage que nous avons si souvent cité.

243: Il est souvent parlé de lui dans les Mémoires de l'Estoille, et plusieurs pasquils du temps contiennent des rapprochements satiriques entre ce grave docteur et son homonyme le prince des sots de l'hôtel de Bourgogne.

244: Hugues Gueru, dont les noms de théâtre étoient Flechelles et Gauthier Garguille, étoit mort depuis plus d'une année, après avoir joué pendant quarante ans des farces. Il en avoit soixante. «Dans les Registres de Saint-Sauveur, dit Piganiol (t. 3, p. 386), le convoi de Flechel, comédien, est marqué au 10 de décembre de 1633.»

245: De mûres.

246: On connoît sur cette expression: payer quelqu'un d'une chanson, le joli conte que Bonaventure des Périers a imité du Pogge.

247: Cette rencontre de Gauthier Garguille et de Tabarin dans les enfers donneroit à croire que celui-ci n'avoit pas longtemps joui de la fortune qu'il s'étoit faite avec Mondor, son maître, et que sa mort funeste, dont nous avons parlé dans une note de notre édition des Caquets de l'Accouchée, p. 250, avoit suivi de près l'année 1630, où nous commençons à voir Padel le remplacer sur les tréteaux de la place Dauphine. Ce dernier farceur, nommé dans une pièce de notre tome 3, p. 151, est donné comme successeur de Tabarin dans l'avertissement de l'Amphitrite, poème de nouvelle invention, 5 actes en vers, par M. de Monléon, Paris, veuve Guillemot, 1630, in-8.

248: Tabarin n'avoit guère besoin d'entrer en connoissance avec Gauthier Garguille, s'il est vrai que celui-ci eût épousé sa fille. (Piganiol, t. 3, p. 386.)

249: C'est à la pointe formée par le chevet de cette église, auprès du petit pont jeté sur l'égout, et qui s'appeloit Pont-Alais, que les comédiens venoient en bande faire leur montre. Nous avons déjà parlé, d'après des Périers, du farceur qui, à cause de cela, avoit pris le surnom de Pont-Alais.

250: Ce n'est pas ordinairement avec Gros-Guillaume, mais avec Gauthier Garguille, que Perrine est mise en scène. Dans les pièces où ils figurent ensemble, elle est donnée pour femme de ce dernier. V. surtout l'une des plus curieuses, déjà citée par l'abbé de Marolles (Mémoires, 1656, in-fol., p. 31), et réimprimée par Caron dans son recueil de facéties: La farce de la querelle de Gauthier Garguille et de Perrine, sa femme, avec la sentence de séparation entre eux rendue à Vaugirard, par a, e, i, o, u, à l'enseigne des Trois-Raves.—V. sur ces farceurs notre édition des Caquets de l'Accouchée, p. 277-282, notes.

251: Peut-être est-ce le cas d'adopter, pour la locution croquer le marmot, dont celle-ci n'est qu'une variante, l'étymologie qu'on trouve dans le Ducatiana, t. 2, p. 489. Croquer le marmot, ce seroit, d'après cette explication, charbonner des bonshommes sur les murs en attendant quelqu'un, ou par désœuvrement. D'autres veulent y voir une allusion aux amants morfondus qui, faisant le pied de grue à la porte de leurs maîtresses, se consoloient à baiser le marteau sculpté en marmot grotesque. Cette opinion peut se justifier par la miniature d'un roman du XVIe siècle, reproduite dans le Bibliographical Decameron de Dibdin, t. 1, p. 216, où l'on voit un jeune homme baisant ainsi le marteau de la porte de la maison où demeure sa dame; et aussi par plus d'un passage des auteurs du XVIe et du XVIIe siècle, notamment par une phrase de la comédie des Petits maîtres d'été (1696), qui nous représente ces Narcisses modernes passant l'hiver «à se morfondre sous les fenêtres des dames et à baiser les marteaux de leurs portes.»—Dans la Comédie des proverbes (acte 2, scène 5), Fierabras dit: «Je leur feray croquer le marmouset.»

252: Il n'est pas besoin de faire remarquer le jeu de mots qu'il y a ici sur l'espèce de grandes bottes, ou guêtres de cuir, qu'on appeloit grèves.

253: Le pain mouton, dont Le Grand d'Aussy a oublié de parler dans le chapitre qu'il consacre au pain (Vie privée des François, 3e section), étoit, suivant Furetière, une sorte de petits pains saupoudrés de grains de blé que les pâtissiers faisoient le jour des étrennes et que les valets donnoient aux petits enfants. Les auteurs du Dictionnaire de Trévoux trouvent dans ce mot une altération du mot panis mutuatus, qui se lit dans quelques vieux cartulaires. «Ce sont, disent-ils, de petits présents que les pauvres font aux riches, qui tiennent moins du don que de l'emprunt. Il (ce pain) est semé de petits grains de blé, qui sont le symbole de la multiplication, pour figurer le profit qu'on espère d'en tirer.» L'abbé de Marolles, dans sa traduction des Quinze livres des Deipnosophistes d'Athénée (Paris, 1680, in-4), ouvrage où l'on ne s'attendoit certes pas à trouver pareil renseignement, parle (p. 39) d'une femme qui couroit de son temps les rues de Paris en vendant du pain mouton, et qui s'étoit fait, pour le crier, «un air tout particulier».

254: Depuis Henri III, dont ce fut, comme on sait, le jouet favori (V. Journal de l'Estoille, juillet 1585), le bilboquet étoit resté de mode, si bien qu'en 1626, le duc de Nemours, fort expert en tous les amusements, régla pour les fêtes du Louvre un Ballet des bilboquets (Mémoires de Michel de Marolles, t. 1, p. 134).

255: L'or.—Ne l'appeloit-on pas ainsi parceque l'Inde, contrée de l'or, étoit aussi le pays des singes, auxquels, selon Ménage, on étoit d'usage de donner le nom de Bertrand?

256: Ce petit clocheteur, ou crocheteur, comme le peuple l'appeloit par altération, avoit été enlevé du sommet de la Samaritaine à cause des pasquils qui se publioient sous son nom. Concini, ne pouvant découvrir le véritable auteur de ces libelles, presque tous dirigés contre lui, avoit cru bon de s'en prendre à cette petite figure, qu'on en faisoit l'éditeur responsable. Le coup d'état eut lieu à propos d'un de ces pasquils en forme de harangue que le clocheteur étoit censé débiter au peuple. V. Première continuation du Mercure françois, in-8, 1611, p. 37.—On se moqua beaucoup dans le public de cette singulière vengeance du ministre. V. plus haut, p. 27, la pièce qui a pour titre Songe. Aussi, l'année suivante, le petit clocheteur étoit-il rétabli, et donnoit matière à la pièce, très rare aujourd'hui, que nous reproduisons. Cette affaire a été racontée sommairement par M. Bazin dans son petit volume la Cour de Marie de Médicis, p. 100.

257: Les voleurs étoient toujours nombreux autour de la Samaritaine, à cause des bons coups qu'ils pouvoient faire dans la foule des badauds attirés là par les clochettes du Jacquemard mis ici en scène. V. notre t. 3, p. 148, note.

258: Ce détail confirme ce qu'on lit dans la Continuation du Mercure, à savoir que le petit clocheteur étoit debout sur une cloche, qu'il frappoit aux heures et aux demies avec un marteau placé entre ses jambes.

259: Allusion aux crochets que les crocheteurs portent sur leur dos, et dont la forme, assez semblable à celle des ailes d'un ange, étoit cause qu'on les appeloit Anges de Grève. V. sur cette expression populaire la citation d'un passage de l'Eugène de Jodelle, à la p. 179 de notre t. 3.

260: Les filles de joie firent de tout temps leurs caravanes sur le Pont-Neuf. V. le Tracas de Paris de Fr. Colletet. Il avoit hérité pour cela du dicton populaire qui, avant sa construction, avoit cours à propos du Grand-Pont, ou Pont-au-Change. V. Description de la ville de Paris au XVe siècle, par Guillebert de Metz, publiée par M. Le Roux de Lincy, Paris, Aubry, 1856, p. 55. Chamfort raconte une jolie anecdote au sujet de ce dicton, qui veut, comme on sait, que toute personne passant sur le Pont-Neuf y rencontre une de ces dames, un moine et un cheval blanc. Deux femmes de vertu très moyenne le traversoient. Le cheval passe, puis le moine. L'une des deux en fait la remarque.—Mais ce n'est pas assez, dit l'autre.—Oh! pour le reste, réplique la première, nous savons toutes deux à quoi nous en tenir. Le proverbe étoit deux fois vrai ce jour-là.

261: Les maîtres des basses œuvres étoient ces maistres escureurs de privés dont il vient d'être parlé. On les appeloit aussi maistres Fifi. V. Le Duchat, notes sur Rabelais, édit. in-12, 1732, t. 2, p. 197.

262: Boisrobert, dans sa charmante pièce l'Hyver de Paris, nous parle ainsi de la Samaritaine, gelée par les grands froids:

La Samaritaine, enrhumée,
N'a plus sa voix accoutumée;
Sa cruche, pleine jusqu'au fond,
Ne verse plus d'eau sur le pont.

263: Plusieurs années après le rétablissement du petit clocheteur, mais nous ne savons à quelle époque au juste, la Samaritaine perdit encore sa sonnerie. Elle s'en plaint ainsi dans les rimes redoublées de d'Assoucy:

Je n'etois pas si defroquée
Du temps que messieurs les laquais
Et mes paladins sans haquets
Pour moi quittaient Margot la fée,
Cartes, et dés et bilboquets...,
Les enfants les marionnettes,
Les polissons les ricochets,
Les courtisans leurs gaudinettes,
Et mes filoux leurs tourniquets,
Et que messieurs portant serpettes,
Mes valeureux taille-goussets,
Dont les mains gourdes, en pochettes
Se rechauffent à peu de frais,
Venoient ouïr de mes clochettes
Les tons si doux et si parfaits.

264: Le jeu de l'hombre, mot qui, en espagnol, veut dire homme. On a fait sur ce jeu et sur les termes qu'on y emploie plus d'une équivoque du genre de celle qui se trouve ici. On lit, par exemple, ces six vers, dans une des lettres de Boursault (t. 2, p. 76).

Une fille jolie et de condition,
De qui le jeu de l'hombre est l'inclination
S'écrioit l'autre jour d'une voix assez forte:
Eh! mon Dieu! que je joue avec peu d'agrément!
Quoy, faut-il qu'eternellement
Rien ne m'entre en ce que je porte!

265: C'est le bourreau dont le fameux Jean Guillaume, maître des hautes œuvres de Richelieu, fut le successeur.

266: Il y a sans doute ici une allusion à quelques différends survenus entre les marchands de moutarde et les apothicaires, qui les uns et les autres faisoient partie du corps des épiciers. Le nom de Mitton doit évidemment désigner un de ces pharmacopoles faiseurs d'onguent miton-mitaine. Ce mot s'employoit déjà. V. Ducatiana, 1, 89.

267: Les six sauvages topinamboux que Razilly avoit amenés à Paris au mois d'avril 1613 avoient rendu très populaire à Paris le nom de leur nation. V. Lettres de Malherbe à Peiresc, passim.

268: Pour boucan, mot par lequel les sauvages de l'Amérique désignoient le gril de bois, élevé de quelques pieds au dessus du feu, qui leur servoit à faire dessécher et à enfumer leurs viandes. Boucaner et boucaniers en sont les dérivés.

269: Mot formé sans doute de l'indien gari, qui signifie petit morceau, fragment.

270: C'est un proverbe qui vient de ce que les loups hurlent à la lune sitôt qu'elle paroît, et semblent vouloir la prendre aux dents. Un autre adage dit: La lune n'a rien à craindre des loups (Quitard, Dict. des Proverbes, p. 509).

271: Nous ne pouvons trouver à quoi ce passage fait allusion.

272: Le lardon étoit la plaisanterie piquante dont on cribloit tout homme ridicule ou qu'on vouloit faire passer pour tel. Par suite, on appela ainsi les petites gazettes qui venoient de Hollande. C'étoit là vraiment le lardon scandaleux dont Regnard parle dans le Joueur, acte 3, scène 5.—Voir aussi: Histoire du journal en France, par Eugène Hatin, p. 22, note.—On peut consulter sur ce mot une note de La Monnoye mise au bas de la page 261 du tome 1er des Contes de des Perriers, Amsterdam, 1735, in-12, et un passage des Mémoires du marquis de Sourches, t. 1er, p. 55.

273: Je n'ai trouvé ni imprimeur ni libraire de ce nom dans le Catalogue chronologique de Lottin, ni dans le livre de La Caille; celui-ci seulement, sous la date de 1540, nomme Pierre Beguin, libraire.

274: Pour camarade. Le mot est écrit comme le peuple, et surtout les soldats, le prononçaient et le prononcent encore.

275: Cette épitaphe d'un chien de collége, qu'il fût ou non tournebroche comme celui-ci, est un genre de facétie scolastique qui dut souvent se renouveler. Racine, étudiant à Port-Royal, fit en vers latins une pièce de cette espèce, rappelée ainsi par son fils: «Je ne rapporterai pas une élégie sur la mort d'un gros chien qui gardoit la cour de Port-Royal, à la fin de laquelle il promet par ses vers l'immortalité à ce chien, qu'il nomme Rabotin:

Semper honos, Rabotine, tuus, laudesque manebunt;
Carminibus vives, tempus in omne, meis.

Mémoires sur la vie de Jean Racine, in-12, p. 27.

Ce genre de poésie rentre dans la catégorie de celles dont parle Furetière dans le Roman bourgeois. V,. notre édition, p. 145.

276: C'est-à-dire contre terre, comme gens au guet, faisant sentinelle à l'erte, ainsi qu'on disoit alors. V. plus haut, sur cette expression, p. 42, note 3.

277: On disoit plus communément troussé en malle.

278: Le collége de Reims étoit rue des Sept-Voies. Il devoit son nom à Guy de Roye, archevêque de Reims, qui l'avoit fondé, en 1409, sur l'emplacement d'un hôtel appartenant aux ducs de Bourgogne.

279: Sur ce cabaretier, dont la femme reprit la taverne, et qui est souvent cité par Tallemant, V. notre Histoire des hôtelleries et cabarets, t. 2, p. 325-326. Sur son petit-fils, Jean Coiffier, qui fut maître des comptes, V. plus haut, p. 195.

280: Aller à gambette, c'est gambader. On avoit autrefois le verbe gambeter dans le même sens.

281: Lapin de M. de Navierre. (Note de l'auteur.)

282: On sait que ce mot se prit d'abord pour académicien, qui ne le remplaça dans la langue qu'après 1643. Cette substitution, ou plutôt cette transformation, trouve sa preuve et sa date presque certaine dans le titre de la seconde édition d'une comédie célèbre de Saint-Evremont. Imprimée d'abord sous le titre de: les Académistes, en 1643, elle prit celui de: les Académiciens, dans l'édition suivante. Le mot s'étoit métamorphosé dans l'intervalle.

283: Confrère, émule. Regnier l'emploie dans le sens de rival:

Et sans respect des saincts, hors l'Eglise il me porte.
Aussi froid qu'un jaloux qui voit son corrival.

Satire VIII, p. 95.

284: Carmina, vers.

285: C'est-à-dire chien d'Amérique, et comme lui n'aboyant plus. C'étoit, on le sait, une croyance généralement répandue que les chiens perdoient la voix rien qu'en touchant la terre du Nouveau-Monde. J'ai dit dans une note d'une pièce précédente ce qui avoit rendu à cette époque le nom des Topinamboux très populaire à Paris.

286: C'est-a-dire les écoliers du collége des Ecossois, situé rue des Fossés-Saint-Victor, et par conséquent assez voisin de celui de Reims.

287: Il venoit beaucoup de chiens de l'Artois, notamment de Boulogne, qui fournissoit les petits chiens de manchon. Pour les empêcher de croître, on leur frottoit toutes les jointures avec de fort esprit de vin, pendant plusieurs jours de suite, aussitôt après qu'ils étoient nés.

288: Il commença de régner en 1617, après la mort d'Achmet Ier, son frère. C'est la première fois que cette sorte de succession collatérale se rencontroit dans la dynastie d'Othman.

289: C'est gratuitement qu'on prête cette cruauté à Mustapha: Osman, fils aîné d'Achmet, n'eut pas les yeux crevés, et l'année suivante il put monter sur le trône que Mustapha avoit usurpé sur lui, et que sa déchéance, après une émeute des janissaires, rendit libre en cette même année 1618.

290: L'ambassadeur de France, M. le baron de Sancy, évêque de Lavaur, fut un de ceux qui eurent le plus à souffrir dans leur dignité et dans leur personne. Mustapha le fit arrêter comme accusé d'avoir favorisé l'évasion du prince polonais Koreski. Il le récompensoit ainsi de la part qu'il avoit prise à son avénement. Osman, devenu empereur, envoya une ambassade à Louis XIII en réparation de l'insulte faite à la France en la personne de M. de Sancy.

291: Sur cette prophétie, dont ce passage confirme la popularité au commencement du XVIIe siècle, V. notre t. 3, p. 212, note, et p. 358, note.

292: Il avoit fait en Hongrie une campagne dont les succès, entre autres la prise d'Albe-Royale, avoient fort inquiété les Turcs. V. notre t. 3, p. 212, note, et les Œconomies royales de Sully, coll. Petitot, 2e série, t. 4, p. 93.

293: Il étoit de la campagne de Hongrie. Il fut blessé au siége de Bude. (Œconomies royales, id., p. 161.)

294: Le prince de Joinville, quatrième fils du duc de Guise. V. sur lui notre édition des Caquets de l'Accouchée.

295: De petits témoins, sans doute, testiculi.

296: Ce mot de la langue dévote, qui signifie reproche secret, remords de conscience, est ici singulièrement placé. Regnier, satire 13, v. 22, s'en est servi; Regnard aussi, dans le Joueur, acte 5, scène 4, mais tous deux de manière à faire voir qu'ils en comprenaient le sens.

297: Pour targe, égide, bouclier.

298: Jocrisse et ses attributions datent de loin, comme on voit. Chez les Romains, le type de niaiserie auquel il a succédé et qu'il remplace chez nous avoit pour fonction un peu plus noble celle de traire les poules. Si, lisons-nous dans le Satyricon, lac gallinaceum quæsierit, inveniet. Pour le nom de Jocrisse, nous n'accepterons pas la mauvaise étymologie donnée par le Ducatiana, t. 2, p. 509; nous admettrons plutôt, avec le Monde primitif de Court de Gébelin, qui certes n'étoit guère attendu en cette affaire, que ce mot est un diminutif de l'italien zugo; ou bien nous y retrouverons encore volontiers une altération transparente du Joquesus du moyen âge, dont Coquillart a parlé dans son Monologue des perruques. Ce qui est plus certain, c'est que, dès le commencement du XVIIe siècle, Jocrisse étoit populaire comme type du valet niais, du garçon de ferme stupide. Il figure comme tel dans le Ballet des Quolibets, dansé au Louvre et à la maison de ville par Monseigneur, frère du roy, le quatriesme janvier 1627, composé par le sieur de Sigongnes, Paris, Augustin Courbé et Anthoine de Sommaville, 1627, in-8. «C'est, est-il dit dans une note du Catalogue Soleinne sur ce ballet, t. 3, p. 91, no 3265, la première apparition de ce type de naïveté.» Ce qui n'est pas tout à fait vrai: deux ans auparavant, Jocrisse avoit déjà paru, et dans une occasion pareille. Il est un des personnages dansants et chantants du Ballet des Fées des forêts de Saint-Germain, que le roi dansa le 11 février 1625. Voici ce que l'auteur lui fait dire:

Partout on m'appelle Jocrisse
Qui mène les poules pisser.
Chères beautés, faites cesser
Ce surnom rempli d'injustice;
Que chacune de vous dessus moi se repose:
Je lui ferai faire autre chose.

Molière a nommé deux fois Jocrisse: dans Sganarelle, sc. 16, et dans les Femmes savantes, act. 5, sc. 4. Richer, au liv. 4 de son Ovide bouffon, l'a mis, comme dans sa place naturelle, parmi les porchers, vachers et bergers, et Furetière, parlant à un maître sot dans son Epître à Cliton, lui dit:

Apprens-moi.....
Si tu meines pisser les poules.

(Poésies diverses, 1666, in-12, p. 189.)

299: On dirait que Béranger a pris à tâche de contredire ce vers, dans son fameux refrain:

Oui, coquettes, j'en réponds,
Bien heureux sont les chapons.

300: C'est à tort que l'auteur de la Bibliothèque du théâtre françois, Dresde, 1768, t. 3, p. 59, a dit que cette pièce étoit de Somaize. Il la confondoit sans doute avec les Précieuses ridicules, que cet auteur avoit mises en vers et qui avoient paru chez Jean Ribou cette même année 1660. Le Récit de la farce des prétieuses est de madame de Villedieu (mademoiselle Desjardins). C'est, selon Tallemant, dans l'historiette qu'il lui consacre, édit. in-12, t. 9, p. 223, «une des premières choses qu'on ait vues d'elle, au moins des choses imprimées.»—«Il en courut des copies, ajoute-t-il; cela fut imprimé avec bien des fautes, et elle fut obligée de le donner au libraire afin qu'on le vît au moins correct.»

L'Extrait assez long d'une de ces copies se trouve dans le manuscrit de Conrart, à la Bibliothèque de l'Arsenal, no 902, in-fol. t. 9, p. 1017. Mademoiselle Desjardins y est donnée comme étant l'auteur, et madame de Morangis comme étant la dame à qui la pièce est adressée, ce qui confirme le dire de Tallemant. M. Clogenson, dans sa notice, complète et exacte, de madame de Villedieu (Athenæum, 2 Juillet 1853, p. 632), dit que «cette sorte de scène dialoguée en prose et en vers fut écrite au château de Dampierre, chez madame de Chevreuse, à la demande de madame de Morangis.» Peut-être se trompe-t-il en confondant ce récit et le gaillard sonnet, comme dit Tallemant, qui courut à la suite, sous la même dédicace, et qui fut en effet écrit à Dampierre aux insinuations de madame de Chevreuse et de mademoiselle de Montbazon. (Tallemant, id. p. 224.) M. Clogenson ne connoissoit que l'extrait donné par Conrart; les deux éditions de cette pièce lui avoient échappé, ainsi qu'à M. de Soleinne, et même à M. Monmerqué, qui, annotant dans sa seconde édition du Tallemant l'historiette de madame de Villedieu, ne put citer que le fragment manuscrit. «L'imprimé, disoit-il à la fin de sa note, ne peut manquer de se retrouver; la recherche n'en sera pas inutile.» Nous avons eu, et doublement même, le bonheur tant désiré par tous ces savants amis de Molière et de mademoiselle des Jardins: non seulement nous avons eu entre les mains l'édition reproduite ici, mais encore nous avons pu consulter la première, celle dont celle-ci n'est que la contrefaçon exacte. En voici le titre: Le récit en prose et en vers de la farce des Précieuses, Paris, Claude Barbin, 1660, in-12 de 33 pages. Nous la trouvâmes indiquée sous le no 274 du Catalogue des livres de feu M. F. M. M. (22 octobre 1849), à la suite du Recueil de poésies de mademoiselle Desjardins, Paris, 1664, in-12, et nous eûmes le bonheur de faire acheter ce précieux volume par la Bibliothèque alors nationale. L'édition d'Anvers, que nous n'avons vue que bien plus tard, est citée par M. Walckenaer dans ses Mémoires sur madame de Sévigné, t. 2, p. 294. Il est évident, par la courte citation qu'il en fait, qu'il la connoissoit autrement que par le titre.

301: Il est singulier que Molière, dans sa préface des Précieuses ridicules, tienne à peu près le même langage, et prétende aussi avoir été imprimé malgré lui. Le libraire Guillaume de Luynes, dont madame de Villedieu veut avoir l'air de se plaindre ici, et chez lequel les Précieuses avoient paru vers le même temps, en février 1660, auroit donc ainsi fait violence à deux auteurs à la fois. C'est bien difficile à croire. Molière, dont c'étoit la première pièce imprimée (V. sa préface), et qui devoit avoir les craintes dont en pareil cas sont assaillis les auteurs, prit sans doute ce faux-fuyant de défiance et de modestie pour désarmer d'avance les lecteurs qui pouvoient défaire l'immense succès que les spectateurs avoient fait à sa comédie. Afin qu'on ajoutât foi à la sincérité de ce qu'il disoit, tandis qu'en réalité il ne demandoit qu'à répandre sa pièce de toutes les manières, peut-être s'entendit-il avec mademoiselle Desjardins pour qu'elle aussi se prétendît violentée par l'avide imprimeur au sujet de cette sorte de programme des Précieuses, écrit, selon moi, non pas sur le rapport d'autrui, comme elle le dit, et ce dont Tallemant doutoit déjà, mais d'après la représentation même, et sans doute aussi sur un désir de Molière. Ils se connoissoient de longue date: ils s'étoient vus à Avignon, à Narbonne, comme on l'apprend par un passage de Tallemant (id., p. 238); ils avoient eu les mêmes amis, les mêmes protecteurs, M. le duc de Guise et M. le comte de Modène, ainsi qu'on le voit par plus d'un passage du roman autobiographique de madame de Villedieu: Mémoires de la vie de Henriette-Sylvie de Molière, Toulouse, 1701, in-12, p. 32, 39, 48, 86. Molière, quand elle étoit à Paris, la venoit voir à son hôtel garni: c'est encore Tallemant qui nous le dit. Enfin il y avoit entre eux une sorte de vieille intimité qui donne toute vraisemblance à cette opinion, que le récit de la Farce des Précieuses ne fut pas écrit à l'insu de l'auteur des Précieuses et loin de son théâtre, mais bien au contraire d'après son inspiration même, et pour lui rendre le service que tout programme bien fait rend toujours à l'auteur d'une pièce. Le fait de la publication des deux brochures dans le même temps à peu près, chez les mêmes libraires, de Luynes et Barbin, n'est pas non plus indifférent comme confirmation de ce que nous avançons. De Luynes étoit l'éditeur privilégié, Barbin le vendeur.—Il ne semble pas que madame de Villedieu ait eu cette complaisance pour d'autres pièces de Molière, mais toutefois elle ne laissa jamais échapper l'occasion de parler de lui et de sa comédie. Ainsi, dans son roman déjà cité, elle donne plus d'un souvenir flatteur aux Fâcheux, à la Princesse d'Elide, etc., etc., p. 70-76. V. aussi son Recueil de poésies, p. 98.

302: Mademoiselle Desjardins étoit née en 1632, et non pas en 1640, comme l'ont dit tant de biographes; elle avoit donc 28 ans, et n'étoit point, par conséquent, d'un âge aussi respectable qu'elle voudroit le faire croire.

303: A la suite de ces mots on lit, dans le fragment conservé par Conrart: «loyal comme un Amadis.»

304: Var. du manuscrit de Conrart:

Qui d'un air d'orateur Breton....

Je n'ai pas besoin de faire remarquer que le Récit n'observe pas ici l'ordre suivi par Molière dans sa comédie. La scène de Gorgibus et de la soubrette n'est que la 3e dans la pièce. Celle de du Croisy et de Lagrange ensemble, et celle qui suit entre eux et le père, sont passées par mademoiselle Desjardins. Nous reviendrons plus loin sur cette différence, l'une de celles dont la préface nous avoit prévenus, et nous en chercherons la cause.

305: V., sur ces artifices de toilette, medicamenta faciei, comme diroit Ovide, notre t. 1, p. 340. Dans l'Héritier ridicule, de Scarron, acte 5, sc. 1, se trouve sur le même sujet un curieux passage. C'est Paquette qui parle:

... Parmi des damoiselles
Telles que je puis être, on en voit d'aussi belles
Que ces dames de prix, en qui souvent, dit-on,
Blanc, perles, coques d'œufs, lard et pieds de mouton,
Baume, lait virginal, et cent mille autres drogues,
De têtes sans cheveux aussi rases que gogues
Font des miroirs d'amour, de qui les faux appas
Etalent des beautés qu'ils ne possèdent pas.
On les peut appeler visages de mocquette.
Un tiers de leur personne est dessous la toilette,
L'autre dans les patins; le pire est dans le lit.
Ainsi le bien d'autrui tout seul les embellit.
Ce qu'ils peuvent tirer de leur pauvre domaine
C'est chair mol, gousset aigre et fort mauvaise haleine.
Et pour leurs beaux cheveux, si ravissants à voir,
Ils ont pris leur racine en un autre terroir.

306: C'étoit une espèce de petite calle ou coiffure de paysannes et de femmes du peuple.—Ce passage diffère un peu dans la copie de Conrart. On y lit, au lieu de ce qui est ici: «A ces mots, qui ne sont point agreables à l'ancien Gaulois, qui se souvient que du temps de la Ligue on ne s'occupoit point à de semblables choses, il allègue le siècle où les femmes portoient des escofions au lieu de perruques, et des sandales au lieu de patins.»

307: Les charlatans vendoient alors une sorte d'huile qu'ils prétendoient tirée du talc, et qu'ils assuroient être un fard merveilleux pour la conservation du teint. (Dict. de Furetière.)

308: Au lieu de ce nom il y a celui de Margot dans le fragment donné par Conrart.

309: Dans les Précieuses, Madelon prend le nom de Polixène, et Cathos celui d'Aminte. (V. scène 5.)

310: Cette scène ne se trouve pas dans les Précieuses. Elle y est à peu près remplacée par celle qui commence la pièce, et dont mademoiselle Desjardins n'a pas parlé. Faut-il croire qu'elle se trompe complétement, comme elle s'en excuse dans sa préface, ou qu'elle suit le plan que Molière auroit adopté d'abord, et dont il se seroit ensuite départi par crainte des longueurs, après la première représentation. Cette dernière opinion me sourit assez. Il y a en effet, dans la scène esquissée ici, une idée comique, un contraste de situation avec l'une des scènes suivantes, qui ne devoient pas échapper à l'auteur des Précieuses, et que madame de Villedieu n'étoit guère de force à imaginer toute seule. Je ne trouve qu'un défaut à cette scène: c'est que, en raison surtout de celle qu'elle amène ensuite, et qu'elle rend presque nécessaire, elle allonge trop la pièce et la rend languissante. Molière, en admettant toujours que l'idée soit de lui, aura vu le défaut dès le premier soir, et il aura changé tout aussitôt son plan. Madame de Villedieu cependant, et sur cette seule représentation, aura écrit sa lettre, l'aura laissée courir, et, quand il aura été question de la publier, ne lui aura fait subir aucun des changements que Molière avoit faits lui-même à sa comédie; elle s'en sera tenue à la petite phrase d'excuse plutôt que d'explication qui se trouve dans la préface. Je ne trouve guère que ce moyen de m'édifier à peu près sur cette différence, la seule qui existe réellement entre la pièce et le Recit, dont pour tout le reste l'exactitude est parfaite, souvent même textuelle. Malheureusement les preuves me manquent; mais il seroit à désirer que j'eusse deviné juste: nous aurions un nouvel exemple des transformations que la plupart des comédies de Molière subirent entre ses mains. Une autre version seroit peut-être encore admissible. Pour expliquer les divergences de l'analyse et de la pièce, on pourroit se demander si Molière n'avoit pas fait pour les Précieuses ce qu'il fit pour toutes ses premières pièces, c'est-à-dire si, avant de venir à Paris, il ne les avoit pas jouées en province, notamment à Avignon, où il se trouvoit, en 1657, avec mademoiselle Desjardins, et si par conséquent celle-ci n'avoit pas fait alors le Recit, qui courut plus tard à Paris lorsque la pièce y fut reprise. La comédie avoit reçu les changements que Molière ne manquoit jamais d'apporter à ses pièces faites en province, lorsqu'il se décidoit à les offrir au public plus difficile de Paris. L'analyse seule étoit restée la même. Un passage de la scène 9, relatif au siége d'Arras, qui avoit eu lieu en 1654, ne contredit point, loin de là, cette opinion, que les Précieuses pourroient avoir été écrites par Molière avant 1660. Pour leur donner plus d'à-propos lorsqu'il les reprit à Paris, il y auroit ajouté dans la même scène un mot sur le siége beaucoup plus récent de Gravelines.

311: A l'église. C'est aussi le mot que Molière fait dire à Madelon (scène 5 des Pretieuses); il convient bien à ces grandes liseuses de romans payens de Clélie et de Cyrus.

312: Ce passage, le plus curieux du Récit, à cause des détails qu'il donne sur le costume de Molière jouant le marquis de Mascarille, et par conséquent très précieux pour la tradition du rôle, a été reproduit en partie par M. Aimé Martin, dans sa dernière édition de Molière, comme note de la scène 9 des Précieuses, et par M. Jules Taschereau, d'une façon plus complète, dans l'un des savants articles qu'il a consacrés à l'Histoire de la troupe de Molière. V. le journal l'Ordre, feuilleton du 8 janvier 1850.

313: Voilà un souvenir du Cyrus, où les Massagètes et leur reine tiennent une si belle place, qui n'est pas hors de propos dans une pièce sur les précieuses.

314: V., sur ces hauts talons, qu'on appeloit talons à pont-levis, une note de notre tome 3, p. 261.

315: Amilcar est le personnage plaisant, ou du moins prétendant l'être, du roman de Clélie. On disoit, comme ici, être un Amilcar, pour dire être enjoué. (Grand Dictionnaire des Precieuses, Paris, 1660, p. 21.)

316: Il avoit couru dans le commencement du siècle, et peut-être couroit-il encore, une chanson dont Molière a bien pu s'inspirer pour ce burlesque madrigal. La voici telle que nous l'avons trouvée dans la Fleur des chansons nouvelles, Paris, 1614, in-12, p. 385:

Ah! je le voy, je le voy;
Arrestez-le, mes amis.
Dans ce logis il s'est mis,
La dame l'aime, je croy.
Son sein est le receleur
De ses larcins entrepris.
O voleur! ô voleur! ô voleur!
Rends-moy mon cœur, que tu m'as pris.

Dame, ne te fie en luy:
Il te fera comme à moy;
Un larron n'a point de foy,
Il ne faut prendre aujourd'huy.
Rends-le donc pour ton honneur,
Ou je crierai à hauts cris:
O voleur! ô voleur! ô voleur!
Rends-moy mon cœur, que tu m'as pris.

Aucun commentateur de Molière n'avoit encore retrouvé cette chanson, qu'il est si à propos, selon moi, de rapprocher du madrigal de Mascarille; aucun non plus n'a rappelé certain couplet de cantique dans lequel l'abbé Pellegrin trouve moyen d'être sérieusement, dévotement, plus bouffon que le grotesque marquis. Il se chante sur l'air: Loin de moi, vains soupirs:

Au voleur! au voleur!
Jesus me derobe le cœur,
Et je ne saurois le reprendre.
Ah! ah! ah! que me sert-il de crier?
Il entend si bien son metier
Que l'on ne sauroit s'en defendre.

(Cantiques de l'abbé Pellegrin, Lille, 1718, in-8, p. 32.)

317: Le duc d'Alençon, frère de Henri III, dont il avoit repris depuis très peu de temps le titre de duc d'Anjou. Il commandoit l'armée catholique, et l'on va voir par ce qui est ici raconté que les soldats n'étoient pas des plus dévots pour la foi qu'ils défendoient. On n'eut pas fait pis dans le camp des huguenots.

318: Cette pièce a été donnée par M. G. Duplessis, mais avec quelques retranchements, dans le charmant recueil qu'il a fait paroître sous le titre de Petit trésor de poésie récréative, etc., par Hilaire-Le-Gay. Paris, Passart, 1850, in-32, p. 150. M. Duplessis n'en a pas trouvé la date, mais il la place parmi les poésies du XVIIe siècle.

319: Potus, potion.

320: Ce mot, qui ne s'emploie plus que dans la langue du droit, avoit alors le sens d'aimable, de commode. On le rencontre très fréquemment. Au XVIIIe siècle, il étoit devenu hors d'usage, et on ne s'en servoit plus qu'en le soulignant. V. Lettres de Mme du Deffand, t. 2, p. 369.

321: Hachis de bœuf qu'on faisoit cuire dans un pot avec des marrons, des navets et toutes sortes d'assaisonnement. On l'appeloit aussi pot-pourri. Rabelais compare à un mets de ce genre l'assemblage des moines mendiants de toute robe qui couroient le monde, toujours se perpétuant, et il place à leur intention, dans la librairie de Saint-Victor, le hochepot des perpetuons.—Le hochepot étoit encore une de ces soupes au grand pot qui se mettoient sur la table dans le vase même où elles avoient cuit. Elles sont vantées dans un des contes d'Eutrapel comme un vrai restaurant et elixir de vie.

322: Ce dixain, qui est évidemment d'une autre époque que le reste de la pièce, n'a pas été reproduit par M. G. Duplessis.

323: Eloigné.

324: Pour esmoyer, émouvoir.

325: Refrain de chanson qui, après avoir couru pendant le XVe et le XVIe siècles—nous l'avons encore trouvé jusque dans Rabelais,—finit par rester comme proverbe.

326: De la glu, de la poix, dont il fait bon s'enduire les mains quand on veut voler. De là venoit que le mot picare signifioit à la fois poisser et voler, et que poissard se prit d'abord pour voleur: «Poisard pro fure habetur», dit Jacq. Sylvius dans son Isagoge. Paris, 1531, p. 4.—C'étoit un procédé larron renouvelé de voleurs de l'antiquité. Martial a dit de l'un deux, qu'il compare au fils de Mercure, patron de cette industrie:

Non erat Autolyci tam piceata manus.

327: Var: Pensatif.

328: Var: Froide.

329: M. G. Duplessis ne les a pas donnés.

330: Après ses expéditions dans le Midi, Louis XIII étoit rentré dans Paris avec son régiment des Gardes, au mois de janvier 1623. La pièce que nous donnons ici fut écrite à cette occasion.

331: Sur ce faiseur d'almanachs, V. notre édition des Caquets de l'Accouchée, p. 65, 66. L'image grotesque dont il illustroit ses prophéties, et qui n'est qu'une imitation de la dernière figure de certaines danses macabres, où l'on voit ainsi un musicien tirer le diable par son appendice caudal, a sans doute été pour quelque chose dans la popularité de l'expression qui court encore, à l'usage des nécessiteux: tirer le diable par la queue. La gravure d'un almanach du même temps a peut être aussi contribué à rendre populaire cette autre locution: prendre la lune avec les dents. Il y est ainsi fait allusion dans le Francion de Sorel (1663, p. 254): «Imaginez-vous voir ces preneurs de lune qui sont en l'almanach de l'année passée, où les uns taschent de l'attraper avec des échelles qui s'alongent et s'accourcissent comme l'on veut, et les autres avec des crochets, des tenailles et des pincettes.» Peut-être s'agit-il encore là d'un almanach du curé de Milmont, car plus loin, p. 454, Sorel en parle.

332: C'est à peu près, le vers de Molière dans Tartuffe (act. V, sc. 2):

Les envieux mourront, mais non jamais l'envie.

Il l'avoit trouvé tout fait dans la Comédie des Proverbes.

333: Sur ces épices, qui étoient alors les honoraires de la magistrature, V. notre t. 2, p. 179, note.

334: Sur ces filles du faubourg Saint-Germain, V. notre t. 1, p. 208, 219, note.

335: On disoit que ces dames avoient les talons courts et ne tomboient qu'en arrière:

Si fait bien Marion qui ne chet qu'en arrière...

(Les Satyres du sieur du Lorens, 1624, in-8, p. 146.)

336: Elles étoient surtout en nombre dans le quartier, alors tout neuf et pourtant fort mal habité, de la Villeneuve-sur-Gravois, et dans les environs de la rue des Fossés-Montmartre, où elles logeoient pêle-mêle avec les gueux. V. Tallemant, édit. in-12, t. 9, p. 23.

337: Dans la rue du Champ-Gaillard et ses environs. V. notre t. 3, p. 44, note.

338: Sur ces lunettes, d'invention nouvelle, qu'on appeloit aussi lunettes d'Amsterdam, V. notre édition des Caquets de l'Accouchée, p. 253, note.—Dans les Méditations de l'hermite Valérien (Recueil de pièces contre le connétable de Luynes, Paris, 1626, in-8, p. 302), il est parlé de lunettes de Hollande «dont use le duc de Bouillon pour prendre de loin les visées, et desquelles monsieur le prince auroit grand besoin de s'ayder, encore plus le comte de Soissons.»

339: La foire Saint-Germain, qui s'ouvroit le 3 février et finissoit la veille du dimanche des Rameaux. Il paroîtroit par ce passage que la publication de cette pièce suivit de près le retour du régiment des Gardes, qui, comme nous l'avons dit, avoit eu lieu en janvier. Dans un petit poème fort curieux qui, sous ce titre: Semonce à une demoiselle des champs pour venir passer la foire et les jours gras à Paris (Paris, 1605, in-8), n'est qu'une description très détaillée de la foire Saint-Germain, il est parlé longuement des filles de joie qui y faisoient leurs caravanes.

340: Lettre de chancellerie accordée par le roi à ceux qui avoient leurs causes commises aux requêtes du Châtelet.

341: Sur une de ces inondations, qui ne suivit que de trop près ce que dit cette commère, puisqu'elle eut lieu en 1625, V. notre t. 2, p. 221 et suiv.

342: Allusion à un proverbe cité dans les Essais de Mathurine, et dont La Fontaine a fait une fable: «Il faict comme le singe, qui tire les marrons du feu avec la patte du levrier.» V. notre édition des Caquets de l'Accouchée, p. 267, note.—C'est peut-être de ce proverbe que vint l'usage de représenter autrefois des levrettes sur les garde-feu et sur les chenets. Ce dernier mot dérive même, comme on sait, de chiennet (petit chien), à cause des figures sculptées sur les landiers, étymologie plus simple qu'elle n'en a l'air, et qui rappelle celle des robinets de fontaines, qui vient de ce qu'ils étoient faits autrefois en têtes de mouton (robins). (La Monnoye, Glossaire des Noëls Bourguignons, au mot robin.)

343: Bien que ce pasquil ait été publié dans le Recueil des pièces les plus curieuses qui ont été faites pendant le règne du connétable de Luynes (Paris, 1628, in-12, p. 65), auquel les Jeux de la Cour (V. plus haut) ont déjà été empruntés, nous n'hésitons pas à le reproduire. Il est rare, le Recueil qui l'a donné n'est pas des plus communs, et nous espérons d'ailleurs ajouter à l'intérêt de la pièce par les notes dont nous l'accompagnerons. En 1628, quand on la réimprima, l'on n'avoit pas besoin de commentaires pour expliquer que tout ce qui s'y trouve sur les hommes et les choses de ce temps n'étoit réellement que contre-vérités, comme le dit le titre; c'était chose connue de tout le monde. Aujourd'hui le commentaire est aussi indispensable qu'il étoit inutile alors; nous avons donc tâché de le faire complet autant que possible. Cette nécessité d'éclaircir par des notes une foule de pièces dont on n'a jusqu'ici publié que le texte simplement et sèchement sera notre excuse chaque fois que, pour enrichir notre recueil, nous croirons bon de nous prendre à des réimpressions anciennes, comme celles-ci, ou même toutes récentes. C'est le système suivi par M. Anatole de Montaiglon pour ses Anciennes poésies françoises; c'est le bon.—Ces contre-vérités étoient un genre de plaisanterie satirique, naturellement de mise pour toutes les époques; il ne falloit que le trouver une fois, l'application en venoit ensuite d'elle-même. Nous n'avons donc pas été surpris de rencontrer parmi les mazarinades une pièce complétement calquée sur celle-ci, ayant le même titre, les mêmes tours, souvent les mêmes rimes, enfin identiquement semblable, si ce n'est bien entendu pour les personnages, qui ont dû y faire place à d'autres, aussi en évidence pendant la fronde que ceux rappelés ici l'avoient été en 1620. Cette pièce, dont M. Moreau n'a eu garde d'oublier le titre et d'ignorer l'origine, porte le no 788 dans sa Bibliographie des mazarinades (t. 1, p. 234): Les contrevéritez de la cour. Quis vetat ridendo dicere verum? Paris, 1652, in-4.

344: C'est l'époque où les poursuites dirigées contre lui pour le crime d'impiété et d'athéisme commençoient à être le plus actives.

345: On sait que les échoppes des écrivains publics étoient nombreuses autour du charnier des Innocents.

346: L'un des hommes les plus vénérables de ce temps-là. Il mourut en 1621, peu après avoir été fait garde des sceaux. V. notre t. 2, p. 133, note.

347: Nous ne savons quel est ce Vautray. Il faut peut-être lire Vautier, ce qui, en faisant disparoître l'hiatus, nous donneroit le nom d'un homme qui jouoit un certain rôle alors. Il étoit médecin de la reine mère et se mêloit d'intrigues de cour. Il y gagna d'être mis à la Bastille, lors de la disgrâce de Marie de Médicis (Mémoires de Richelieu, collect. Petitot, t. 26, p. 448, 466).

348: Marais étoit le bouffon de Louis XIII. Dreux du Radier, qui a fait l'Histoire des fous en titre d'office, ignoroit même son nom. Tallemant (édit. in-12, t. 63, p. 3) est le seul qui en ait parlé.

349: François Annibal d'Estrées, marquis de Cœuvres, frère de Gabrielle, qui étoit alors ambassadeur à Rome. V. sur lui notre édition des Caquets de l'Accouchée, p. 149, note.

350: Les démêlés de Ferdinand II, élu empereur en 1619, avec l'électeur Palatin Frédéric V, à qui les Etats de Bohême s'étoient cru le droit de conférer le même titre, furent cause, on le sait, de la guerre de Trente-Ans.

351: Le duc de Montbazon étoit un assez pauvre homme. On pouvoit sans invraisemblance lui faire endosser toutes les naïvetés du sieur de Gaulard. Quoiqu'il sût aussi peu de latin qu'on le donne à entendre ici, monsieur son père, dans un portrait qui les représentoit tous deux, lui montroit le ciel du doigt et lui disoit:—Disce puer virtutem. «Or, ce puer, écrit Tallemant, avoit la plus grosse barbe que j'aie connue; il paroissoit richement quarante-cinq ans.» (Édit. in-12, t. 4, p. 136.) Bautru, dans l'Onosandre, Cabinet Satirique, p. 558, par une double allusion à la naïveté de M. de Montbazon et à la situation de son hôtel, qui étoit rue de Béthizy, et le même qu'on vient de démolir récemment, l'appelle Prince de Béthizy. V. le Borboniana dans les Mémoires de Bruys, t. 2, p. 312.

352: Secrétaire d'Etat et secrétaire des commandements de Marie de Médicis, il fut l'un des hommes les plus sérieux de cette époque et l'un de ceux qui par conséquent se mêlèrent le moins aux intrigues. On a de lui des Mémoires très intéressants, rédigés avec conscience et modestie.

353: Fils de P. Castille, qui de marchand de soie aux Trois visages dans la rue Saint-Denis, étoit devenu receveur du clergé et s'étoit fort avancé dans les affaires. Ce fils avoit encore été plus loin que son père. A la mort de Henry IV, il avoit été fait contrôleur général des finances.

354: Henriette d'Entragues, duchesse de Verneuil, qui ne voyoit pas alors très bonne compagnie, à ce point que l'auteur des Caquets de l'Accouchée put sans invraisemblance la mettre en scène avec ses commères.

355: Si parmi toutes ces contre-vérités il en est une bien réelle, c'est celle que contient ce vers. Richelieu, évêque de Luçon, futur ministre et cardinal, s'étoit donc laissé déjà deviner, dans sa courte apparition aux affaires, pendant la faveur du maréchal d'Ancre.

356: Après avoir joué un certain rôle, il étoit tombé avec le maréchal d'Ancre, dont il étoit la créature. V. Baron de Fæneste, liv. 1, chap. 13.

357: La vue de M. de Thémines ne devoit pas être fort agréable à des gens comme les frères de Luynes. Ils le savoient homme d'énergie et ne devoient pas avoir oublié que, sur un ordre du roi, il n'avoit pas craint d'arrêter le prince de Condé.

358: Un rapprochement entre le duc de Bouillon et le comte de Soissons n'étoit que trop à craindre. Il eut lieu plus tard, et l'on sait ce qui en résulta de difficultés pour Richelieu, jusqu'à ce que le jeune comte eut succombé dans la lutte. V. Mém. de Brienne, collect. Petitot, 2e série, t. 36, p. 72.

359: Il s'étoit retiré dans son gouvernement de Saintonge, où son attitude menaçante n'étoit pas sans faire ombrage au favori. V. plus haut le Songe, p. 23, note.

360: A Rome, il y avoit alors une garde corse, chargée d'accompagner les patients au supplice. Peut-être y fait-on allusion ici, bien qu'il n'existât point pareille milice en France. Ce qui nous le fait penser, c'est que M. d'Epernon auroit eu en effet beaucoup à craindre s'il étoit revenu à la cour.

361: Michel de Marcillac, frère du maréchal, arrêté et executé en 1632, par ordre de Richelieu. Il fut garde des sceaux de 1624 à 1630.

362: Il faut lire Rucellaï. C'était un abbé italien de la même famille qu'un des plus riches partisans de ce temps. Le marquis de Rouillac, neveu du duc d'Epernon, «lui avoit fait donner des coups de bâton, dit Tallemant, le plus mal à propos du monde. On eut bien de la peine à accommoder l'affaire.» (Edit. in-12, t. 9, p. 6, Historiette du marquis de Rouillac.)

363: Le cardinal Henri de Gondi, évêque de Paris; il fut mis à la tête des affaires avec M. de Schomberg en 1621, et mourut l'année suivante, après s'être occupé de son épiscopat aussi peu que son neveu le guerroyant coadjuteur s'en occupa plus tard.

364: Il avoit la même réputation que le duc de Montbazon, et ne la méritoit pas moins, à ce qu'il paroît.

365: V. sur les mœurs de ce prélat, Avis salutaire donné au sieur illustrissime cardinal de Sourdis pour sagement vivre à l'avenir. V. aussi Fæneste, édition de M. Mérimée, p. 230.

366: V. sur lui les Caquets de l'Accouchée, p. 162, note.

367: Créature du connétable de Luynes, qui, après avoir été simple commis sous Barbin, devint intendant des finances. Après la mort de son protecteur, il fut mis à la Bastille (Mém. d'Arnaud d'Andilly, coll. Petitot, t. 33, p. 372).

368: Ce baron de Rabat me semble bien être le favori Barradar, dont on aura écorché le nom à plaisir.

369: L'Éminence grise en effet ne s'amusoit guère à ces jeux-là.

370: Le duc de Bellegarde. «Il n'y eut jamais un homme plus propre», écrit Tallemant (édit. in-12, t. 1, p. 109).

371: Cette maigreur étoit de la famille, à ce qu'il paroît, car nous connoissons des couplets de Bussy où il se plaint de l'avoir rencontrée chez une dame du même nom.

372: Lisez n'est plus romain, et comprenez n'est plus catholique. Il fut chargé du commandement de l'armée navale contre La Rochelle (Mém. de Richelieu, collect. Petitot, 2e série, t. 22, p. 156).

373: Il étoit fort brillant et très batailleur. Il perdit la charge qu'il avoit à la Cour pour son duel avec d'Halluyn. (Id., p. 215.)

374: Il étoit introducteur des ambassadeurs. C'est lui qui, en 1628, reçut le duc de Lorraine lors de son voyage à Paris. (Piganiol, t. 2, p. 351.)

375: Avocat au parlement de Paris, très savant homme, trop savant même, car un jour, je ne sais à quel propos, s'étant perdu dans une digression sur l'Ethiopie, il fut vivement rappelé à la question par son adversaire, et de dépit il quitta le Palais et ne plaida plus.

376: Il étoit surintendant des finances. V. les Caquets de l'accouchée, p. 57.

377: Le comte de Cramail, auteur des Jeux de l'Inconnu, de la Comédie des proverbes, etc. V. l'article que nous lui avons consacré, Revue française, 20 mai 1855, p. 481.

378: Sans doute Louis Garon, auteur de l'école de Théophile, de qui l'on a le Chasse-ennuy, entretien des bonnes compagnies. Lyon, 1628, 2 vol. in-12.

379: L. Servin, l'illustre avocat général au parlement de Paris.

380: Du Monthier le peintre. Par une anecdote que raconte Tallemant; t. 5, p. 59, on voit qu'il n'étoit jésuite d'aucune manière.

381: «Le meilleur ami de Mme de Rambouillet, dit Tallemant; c'est lui qui mit Voiture dans le monde et l'introduisit chez Monsieur.» Il eut le sort des favoris de Gaston; Richelieu le fit mettre à la Bastille. V. Mémoires de Richelieu, collect. Petitot, 2e série, t. 26, p. 44.

382: Depuis qu'il avoit assassiné le maréchal d'Ancre, il étoit en effet d'une vanité insupportable.

383: Zamet le financier, dont nous avons eu déjà souvent à parler. Sa mine grave et ses révérences étoient célèbres à la Cour. (Tallemant, III, p. 63.)

384: Capitaine aux gardes qui fut tué plus tard à Pignerolles. Quant à Bautru, qu'on lui donne ici pour confrère en bavardage, il est assez connu.

385: Favori du prince de Condé, et le même qui fit rouer de coups M. de Marcillac. C'est de lui que de Courtils a fait les Mémoires.

386: Lisez Héquetot, comme écrit Tallemant, ou Ectot, selon l'orthographe du père Anselme (t. 5, p. 152). Il étoit fils aîné de M. de Beuvron. (Tallemant, t. IX, p. 73.)

387: Emmanuel de Laval, fils du maréchal de Bois-Bauphin, mari de la célèbre marquise de Sablé.

388: Nous ne le connoissons que par la mention que fait de lui N. Rœmond dans son Sommaire traicté du revenu (1622), pour une pension de 8,000 livres.

389: Moisset, dit Montauban, fameux partisan. V. notre édit. des Caquets, p. 182, 241, et notre t. 3, p. 181.

390: Confesseur du roi. V. id., p. 166.

391: Henri Robert de la Marck, comte de Brainne.

392: Le comte de Fiesque étoit l'honneur et la loyauté mêmes. Il fut tué au siége de Montauban.

393: Le marquis de Candale, fils du duc d'Épernon.

394: Les trois têtes du monstre, ce sont les trois frères, Luynes, Branthe et Cadenet.

395: On a déjà vu par une note des Jeux de la Cour que Luynes devoit sa faveur près de Louis XIII à son adresse à élever les oiseaux de proie.—Le Mignon de Troye, c'est Ganimède, fils de Tros, roi des Troyens, qui fut enlevé par l'aigle de Jupiter.

396: La campagne de la Valteline eut lieu l'année suivante, 1624.

397: Il commandoit les troupes espagnoles en Flandre. V. notre t. 3, p. 354, note.

398: La reine mère, Marie de Médicis.

399: Cinq-Mars lui-même usa de ces feintes pour faire croire à sa faveur, alors qu'elle étoit tout à fait tombée. C'est Louis XIII qui nous l'apprend lui-même, par l'organe, il est vrai, très médisant, de Tallemant des Réaux: «Pour qu'on pensât qu'il m'entretenoit encore après que tout le monde étoit parti, il demeuroit une heure et demie dans la garde-robe à lire l'Arioste. Les deux valets de garde-robe étoient à sa dévotion.» (Tallemant, édit. P. Paris, t. 2, p. 64.)

400: Il y eut une autre édition de cette Lettre, la même année, à Troyes, chez J. Moreau. Elle est curieuse, et les détails qui s'y trouvent semblent vrais; je la crois pourtant supposée, n'ayant pu découvrir quel est le Walshingham à qui on la prête. Celui qui fut long-temps ambassadeur d'Elisabeth près du roi de Navarre étoit mort au printemps de 1590 (Lingard, t. 8, p. 441), et je n'ai point de preuves qu'un autre personnage de son nom l'eût remplacé. C'est Unton qui représentoit alors la reine d'Angleterre près de Henri IV (Id., p. 436).

401: Par ces lettres monitoriales, tous ceux qui suivoient le parti du roi étoient excommuniés s'ils ne l'avoient quitté sous quinze jours. On en trouve la teneur dans le Recueil des anciennes lois françaises d'Isambert, t. 15, p. 27. Le Parlement de Châlons cassa l'excommunication; mais le Parlement de Paris à son tour cassa son arrêt le 17 juin 1591, et rétablit la bulle. V. L'Estoille, édit. Michaud, t. 2, p. 58, 59.

402: V. la note précédente.

403: «Le jeudi, 6 de juin, dit L'Estoille, le roi de Navarre a surpris le fort de Louviers près de Rouen. Claude de Saintes, évêque d'Evreux, qui s'y étoit réfugié, a esté pris comme il vouloit se sauver. Le roy l'a mis entre les mains du parlement de Caen, pour avoir fait quelques écrits où il prétend justifier le parricide commis sur Henri III et prouver qu'il est permis d'en faire de même sur le roy de Navarre.» (Journal de L'Estoille, édit. Michaud, t. 2, p. 57.)—P. Fayet, dans son Journal historique, place la prise de Louviers sous la date du vendredi 7 juin; il ajoute que cette ville «n'avoit encore esté prise des guerres civiles», et que le roi y fit «grand butin de pillaige et rançons». (Journal historique de P. Fayet, publié par M. Victor Luzarche, Tours, 1852, in-12, p. 103.)

404: Il se mit en mouvement au commencement de l'année suivante, et, quoi que pût faire le roi à la journée d'Aumale, où il fut assez gravement blessé, il parvint à délivrer Rouen et à prendre Caudebec.

405: On sait qu'il commandoit pour la ligue en Bretagne.

406: Le roi, dans la crainte qu'il ne pût tenir suffisamment tête à M. de Mercœur, le remplaça par le maréchal d'Aumont et lui donna en échange le gouvernement de Normandie, que la mort de son père, le duc de Montpensier, venoit de laisser vacant.

407: Il avoit déjà tenté deux ans auparavant contre Genève l'inutile entreprise qui se trouve racontée dans l'une des pièces de notre t. 1er, p. 149. En décembre 1602, par une nuit très sombre, il hasarda une nouvelle attaque, restée fameuse sous le nom de l'escalade. Une partie de ses gens avoit déjà franchi les murs, et sans nul doute la ville eût été à lui, si une servante qui étoit sortie à la recherche d'une sage-femme pour sa maîtresse, prête d'accoucher, ne se fût effrayée de voir les rues pleines de gens armés et n'eût tout à coup donné l'alarme. L'enfant qui naquit de cet accouchement sauveur pour Genève étoit une fille qui devint l'une des femmes les plus charmantes du XVIIe siècle: c'est Mme d'Hervart, la protectrice de Lafontaine, l'amie de Saint-Evremond. Ce dernier, dans l'épître qu'il lui adressa, rappelle ainsi la singularité providentielle de cette naissance:

Ce ne fut point par un hazard
Que Genève fut conservée;
L'etoile de madame Hervart
De l'escalade l'a sauvée.

(Œuvres de Saint Evremond, Londres, 1706, t. 5, p. 298.)

408: Peu de jours après le combat d'Arques, Henri IV avoit ainsi reçu d'Elisabeth 20,000 livres en or pour la solde de ses troupes.

409: Les Turcs étoient la grande ressource d'Elisabeth pour les princes qu'elle vouloit secourir. En même temps qu'elle prioit le sultan de venir en aide aux protestants de France et au roi de Navarre leur chef, elle lui demandoit une flotte pour le très catholique don Antonio, que Philippe II avoit dépouillé du trône de Portugal. V. Hammer, Histoire de l'Empire ottoman, t. 7, p. 193.

410: Jérusalem.

411: Le lacis étoit une espèce d'ouvrage de fil ou de soie fait en forme de filet ou de reseuil (réseau), dont les brins étoient entrelacez les uns dans les autres. (Dict. de Furetière.) Un certain Frédéric Vinciolo, Vénitien, avoit patente spéciale de la reine, en 1585, pour enseigner aux dames l'art de fabriquer ces tissus. On a de lui un livre curieux et devenu rare: Les singularités et nouveaux pourtraicts pour les ouvrages de lingerie... par le sieur Frederic de Vinciolo, Venitien. Paris, 1587, in-4.

412: V., sur cette sorte de dentelle à jour, notre t. 3, p. 246.

413: Petites rondelles d'émail, pierreries ou camées, dont on s'ornoit le front en les attachant avec un fil garni de perles. C'est ce que nous appelons une Feronnière. V. notre t. 3, p. 40, note.

414: Sorte d'eau de senteur dont on ne connoît pas au juste la composition. Il en est parlé dans Boccace (Décameron, journée VIII, nouvelle 10), dans Rabelais (livre 1er, chap. 55); et, selon Malherbe, dans sa lettre à Pereisc du 19 décembre 1626, il paroîtroit que la disgrâce de Baradas vint de ce qu'il se fâcha trop fort pour quelques gouttes de cette eau que Louis XIII lui avoit jetées au visage.

415: Paillettes.

416: C'est-à-dire ignominieusement. Etre à la cadène (à la chaîne), c'étoit être à la peine, à la honte.

417: Pour goujat, valet d'armée.

418: De testa, tesson, pot cassé.

419: C'est-à-dire tomber droits et roides comme les pans d'un pignon entrapeté, suivant l'expression des architectes.


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