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Variétés Historiques et Littéraires (05/10): Recueil de pièces volantes rares et curieuses en prose et en vers

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Vers pour Monseigneur le Dauphin au sujet d'une aventure arrivée entre lui et le petit Brancas[417].

A Paris, chez Jacques Estienne, rue Saint-Jacques, à la Vertu.

M.DCC.XIV.

Avec permission. In-8.

Muse, prenez vos plus brillans atours,
Vos patins neufs, vos habits des bons jours,
Vos beaux pendants; soyez proprette et blanche,
Telle qu'un jour de fête ou de dimanche.
Il faut partir dès demain pour la cour:
Un jeune prince aussi beau que l'Amour,
Enfant des dieux, par ses grâces exige
De tous les cœurs un juste hommage lige;
Chacun s'empresse à lui rendre le sien:
Portez-lui vite et le vôtre et le mien.
C'est ce Dauphin seul gage qui nous reste
D'un père, helas! que le courroux celeste,
Malgré les cris des peuples gemissans,
Nous enleva dans la fleur de ses ans[418].
Fasse le Ciel, appaisant sa colère,
Qu'un jour le fils nous remplace le père!
Nous ne pouvons souhaiter aujourd'hui
Rien de plus doux, ni pour nous ni pour lui.
Mais arrêtez: que vois-je ici, ma Muse?
Vous qui d'abord, etonnée et confuse
Et dans le cœur murmurant contre moi,
Vous defendiez d'accepter cet emploi,
Au tendre nom du Dauphin de la France
Vous reprenez toute votre assurance,
Et semblez même, à votre air vif et gai,
Ne demander qu'à partir sans delai.
Je vois le point, et je crois vous entendre:
Pour un enfant dans l'âge le plus tendre
Et qui ne compte encor que trois moissons,
Me dites-vous, faut-il tant de façons?
Muse, tout doux: qui vous laisseroit faire,
Vous me feriez à la cour quelque affaire.
Je crois vous voir, prompte à vous oublier,
D'un pas leger et d'un air familier,
Vers le Dauphin, pour debut d'ambassade,
Les bras ouverts, courir à l'embrassade.
Autant en fit, dans un semblable cas,
Jeune marquis que vous ne valez pas;
Autant en fit, et compta sans son hôte:
Retenez-en, Muse, et n'y faites faute,
Toute l'histoire. Au prince, certain jour,
Ce jeune enfant alloit faire sa cour.
Sa cour, que dis-je? helas! c'est un langage
Dont à trois ans on ignore l'usage.
Sans tant tourner, disons qu'il l'alloit voir,
Plus par instinct même que par devoir.
Le cœur, qui fut son guide et son genie,
Ne connoît point tant de ceremonie.
Depuis long-temps flaté de ce plaisir,
Le pauvre enfant brûloit d'un vrai desir
De voir le prince, et disoit à toute heure:
Quand le verrai-je! Il se tourmente, il pleure,
Il veut le voir. Soyez sage, et demain,
Lui disoit-on, vous le verrez. Soudain
Il s'appaisoit; une telle promesse
Plus le touchoit que bonbons et caresse.
Arrive enfin ce jour tant souhaité,
Long-temps promis, et souvent acheté.
D'attendre au moins qu'un moment on l'instruise,
Point de nouvelle; il faut qu'on l'y conduise
Sans differer. Enfin, pour faire court,
On l'y conduit, ou plutôt il y court.
Dès qu'il le voit, ne se sentant pas d'aise,
Il vole à lui, saute à son cou, le baise
De tout son cœur: qui n'en feroit autant
Si l'on osoit? N'en faites rien pourtant.
Un tel debut, quoique assez pardonnable,
Muse, n'eut pas un succès favorable.
Bientost le prince, étant debarrassé
Des petits bras qui l'avoient embrassé,
Sur l'embrasseur jette une œillade fière,
En reculant quatre pas en arrière.
Son petit cœur, mais noble, et qui se sent,
Est tout ému de ce trait indecent.
Que fera-t-il? Il s'agite, il secoue
Avec depit ce baiser de sa joue,
Et de sa main il semble s'efforcer.
S'il est possible, au moins de l'effacer.
A tous ces traits d'un courroux respectable
Que dit, que fit, que devint le coupable?
Coupable? oui: qu'il soit ainsi nommé,
Mais seulement pour avoir trop aimé.
Le pauvre enfant, dans une alarme extrême,
Se fit d'abord son procès à lui-même;
Les yeux baissez, immobile, interdit,
Il reconnut sa faute, il en rougit.
Son repentir repara son audace,
Par son respect il merita sa grâce,
Et, s'approchant humblement du Dauphin,
Il fit sa paix en lui baisant la main.
De tout ceci vous paraissez surprise,
Et votre esprit, raisonnant à sa guise,
Se dit tout bas: Prince, tant soit-il grand,
Si jeune encore entrevoit-il son rang?
De son berceau touchant à la couronne,
Distingue-t-il l'éclat qui l'environne,
Et, de Louis presomptif successeur,
De son destin connoit-il la grandeur?
Muse, il la sent, s'il ne sait la connoître.
Dans les heros que pour regner fait naître
Des grands Bourbons la royale maison
Le sang inspire, et previent la raison;
Le noble instinct qui dans leur cœur domine
Rappelle en eux leur auguste origine,
Et de ce sang reçu de tant de rois
La majesté reclame tous ses droits.
Allez donc, Muse, et desormais, instruite,
Sur ces leçons reglez votre conduite;
De ce soleil sous l'enfance éclipsé
N'approchez point d'un air trop empressé;
Sans affecter des airs de confiance,
Qu'une modeste et naïve assurance
Gagne le prince et puisse de sa part
Vous attirer quelque tendre regard;
Haranguez peu, mais que votre visage
De votre cœur exprime le langage.
Je ne dis pas qu'un petit compliment
Assaisonné du sel de l'enjoûment
N'eût son mérite et même ne pût plaire;
Mais l'embarras, Muse, est de le bien faire.
Le tout dépend des momens et du tour;
Vous l'apprendrez des rheteurs de la cour:
Point ne connois, pour l'art de la parole,
De plus adroite et plus subtile école;
Le beau parler vint au monde en ce lieu,
Et compliment est leur croix de par Dieu.
L'air du pays, qui de lui-même inspire,
Vous dictera ce que vous devez dire.
Si cependant vous doutez du succès,
Retranchez-vous à faire des souhaits:
C'est un encens qui fut toujours de mise;
Mais faites-les en Muse bien apprise.
Vous trouverez de quoi dans le Dauphin,
Et sur son compte on en feroit sans fin.
Souhaitez-lui les vertus de son père;
Ajoutez-y les graces de sa mère
L'ame et le cœur du Dauphin son ayeul,
De Louis, tout: il comprend tout lui seul;
Lui souhaiter qu'à Louis il ressemble
C'est le doüer de tous les dons ensemble.
S'il demandoit, comme il faut tout prevoir,
Pourquoi ne suis moi-même allé le voir,
Vous lui direz à l'oreille: Mon prince,
Je croi qu'il a quelque affaire en province;
Mais, en tout cas, à lui ne tiendra point
Que ne soyez obéi sur ce point.

La vraye pierre philosophale, ou le moyen de devenir riche à bon conte. Le tout espuisé d'une prophetie authentique, traduicte en françois de la fiole hebraique de Salomon, où sont enfermez sept esprits qu'il evoqua des planettes jusques au jour du jugement.

LA PROPHETIE.

L'Actéon demeurant aux bornes
Du bis sept bénedicité
Guérira du mal de ses cornes
Par bois qui remet la santé.

Imprimé à Salemanque, jouxte la coppie fraischement apportée de chez l'imprimeur des Catadupes.

S. l. ni d. In-8[419].

Explication d'Allegorie.

Benevole Lecteur, il est question maintenant d'ajuster ses lunettes aux oreilles, pour mieux entendre (ainsi que dit Panurge) le moyen de devenir riche, et à peu de frais, qui n'est autre chose que la vraye pierre philosophale que je vous apprens fort ingenieusement par ce mien petit opuscule, si, prealablement que de tirer la consequence des premisses, vous deviez percevoir humainement la petite histoire que je galope vous desduire, s'il plaît à celuy qui a fait les constellations et les planettes.

Sçache donc, Lecteur, que du temps que l'on portoit le pourpoinct attaché aux chausses[420] l'ile d'Angleterre nourrissoit une princesse de laquelle les moindres actions estoyent perfections, et ses perfections des miracles. Le bruit de ceste merveille venant jusques aux oreilles de la France, il se trouva un de ses cavalliers tellement espris et passionné au simple raport de l'idole, qu'il se delibère de s'equiper de son possible pour aller coler sa veue sur le subject lequel luy faisoit horriblement bouillir la vessie, à cause des devorantes flammes qu'amour attisoit sur le buscher de son cœur, tellement que, pour attaindre plus commodement l'epilogue de la comedie, il desgueilleta[421] les esperons de gentilhomme pour chausser la mitaine d'un fauconnier[422] verreux, croyant par tel moyen estre reçeu dans la maison de son doux esmoy, c'est à dire de ceste aymable image, au recit qu'il avoit ouy que le Monsieur aymoit moult la fauconnerie. Or arriva comme il se seroit proposé: après qu'il eut servi l'espace de quatre ou cinq ans de fauconnier, l'office de maistre d'hostel venant à vaquer par mort, à cause de ses agreables services et qu'il estoit tout propre pour une meilleure affaire, les destinées ayant escrit dans leurs feuillets d'airain une bonne fortune, il eut la charge que ses merites ne luy pouvoyent refuser; mais icelle exerçant fort bragardement sans bouger les yeux de la teste, il fit tant avec la bibliotèque de ses œillades amoureuses, que la princesse, se laissant prendre au glu de cest expert oyseleur, pour faire porter l'egrette de bœuf à son mary, rompant les bornes de la pudicité, luy donna un soir assignation de se rendre à la ruelle de son lit pour illec luy froter le busq, jouissant du loyer que meritoit la perseverance de semblables amours. Et advint qu'estant au lieu de l'assignation, sa dame luy print la main, laquelle attacha avec la sienne d'un ruban, incarnat ou fleur de lin s'il m'en souvient; puis secouant et remuant son espoux, qui à ceste heure ronfloit melodieusement, l'ayant esveillé en sursault, luy dit: Monsieur, il me semble que vous m'avez dit une plaine hote de fois que vostre maistre d'hostel vous servoit si fidellement et gentiment que pour une plaine cuve de diamans de la nouvelle roche vous ne le voudriez perdre; or, sachez à la bonne heure que c'est un perfide et meschant homme, m'ayant sollicité aujourd'huy de lui prester la courtoysie savoureuse au prejudice et honnissement de vostre honneur et du mien et toutes autres belles besongnes, etc. (Je vous laisse à penser en ceste belle paranthèse si le drolle, ne sçachant rien de tout cecy, se tenoit vilaine et lourde peur.) Pourtant je luy ay donné assignation dessoubs l'arbre de nostre jardin. Levez-vous promptement et prenez mes habits, l'alant attendre, deussiez vous demeurer jusques à une heure et trois minutes après minuict, car il m'a promis d'y venir aux despens d'abreger le peloton de sa vie. Cela fut dit, cela fut fait, et ce cocu in fieri, attendant de l'estre in facto, soudainement se botit et puis parta. Et arriva qu'après que le nouveau mary eut occupé le giste nouvellement et chaudement laissé, et qu'il eut, comme l'on dit en nostre village, entribardé à double carillon sa dame, par commandement et ruse d'icelle il print un gros baston et long à l'equipolent, et de bois de cormier, ou plustost de cornier, saluant avec ses invectives, et tel fust la mademoiselle expectante: «Comment, taupe diène!» Et zest! coups de bastons sur l'escoffion. «Est ce ainsi que vous pensez d'adouber mon maistre! Parbleu! je vous zape!» Et allons bourrassades en campenie. «Je jure qu'il n'en ira pas de la sorte, rusée masque, chaude chopine, je ne voye jamais mon cul en face, serment des bonnes festes et vie.» Redoublant plus fort, «Je vous accomoderay qu'il vous en souviendra trois jours après la Pentecoste!» Il avoit beau crier: «Holà! tout beau, mon amy! c'est moy, je ne suis pas elle.» Le palefrenier n'avoit non plus d'oreilles qu'un rocher de Casprée, mais tousjours allons sus donne Martine! L'un estoit Briarée en manière de faire pleuvoir coups de bastons, et l'autre estoit un asne de moulin pour les endurer. Tellement que le meilleur conte que le sieur desguisé pût avoir fut que d'aller trouver sa femme bride abatue, cocu, batu et content[423]. Je veux conclure par là, in modo et figura, que qui gueriroit tous les cocus depuis orient jusques en occident, et depuis le septentrion jusques au midi, sans y conter ceux des antipodes, en telle forme de proceder, seulement à une portugaloise par teste, il deviendroit plus riche et opulent que tous les faiseurs de pierre philosophale du Peru. Je me recommande

Astra regunt homines cornua sydus habes.

Prenez en gré le passe-temps.

Advertissement au lecteur.

D'autant que cecy est dedié aux beaux esprits, seuls d'en juger capables, l'œil des avaricieux (comme celuy du Basilic) en doit estre privé. C'est pourquoy nous avons cacheté à double ressort la presente pierre philosophalle, affin qu'elle ne soit communiquée qu'à ceux qui se trouveront le quid phisique, qui se reduict à une pièce d'or ou d'argent qui porte visage.

TABLE DES MATIÈRES
CONTENUES DANS CE VOLUME.

  • 1. Les Triolets du temps. 1649 5
  • 2. Discours sur la mort du chapelier 31
  • 3. Reglement d'accord sur la preference des savetiers cordonniers 41
  • 4. L'Œuf de Pasques ou pascal, à M. le lieutenant civil, par Jacques de Fonteny 59
  • 5. Catechisme des Courtisans, ou les Questions de la cour et autres galanteries 75
  • 6. Exil de Mardy-Gras 97
  • 7. Ordre à tenir pour la visite des pauvres honteux 127
  • 8. L'Anatomie d'un Nez a la mode, dédié aux bons beuveurs 133
  • 9. Extrait de l'inventaire qui s'est trouvé dans les coffres de M. le chevalier de Guise, par Mlle d'Entraigue, et mis en lumière par M. de Bassompierre 147
  • 10. Les nouvelles admirables lesquelles ont envoyées les patrons des gallées qui ont esté transportées du vent en plusieurs et divers pays et ysles de la mer, et principalement ès parties des Yndes 159
  • 11. Le Gan de Jan Godard, Parisien 173
  • 12. Discours de deux marchants fripiers et de deux tailleurs, avec les propos qu'ils ont tenu touchant leur estat 189
  • 13. Discours admirable d'un magicien de la ville de Moulins qui avoit un demon dans une phiole, condamné d'estre bruslé tout vif par arrest de la Cour de Parlement 199
  • 14. Vraye Pronostication de Me Gonin pour les mal-mariez, plates-bourses et morfondus, et leur repentir 209
  • 15. La misère des apprentis imprimeurs, appliquée par le detail à chaque fonction de ce penible estat 225
  • 16. Arrest de la Cour de Parlement qui fait deffenses à tous pastissiers et boulangers de fabriquer ni vendre, à l'occasion de la feste des Rois, aucuns gasteaux 239
  • 17. La Maltote des Cuisinières, ou la Manière de bien ferrer la mule 243
  • 18. Cas merveilleux d'un bastelier de Londres, lequel, sous ombre de passer les passans outre la rivière de Thames, les estrangloit 259
  • 19. Les de Relais, ou le Purgatoire des bouchers, poulayers, paticiers, cuisiniers, joueurs d'instrumens, comiques et autres gens de mesme farine 263
  • 20. Discours de la mort de très haute et très illustre princesse madame Marie Stuard, royne d'Escosse 279
  • 21. L'Onozandre, ou le Grossier, Satyre 291
  • 22. Le Conseil tenu en une assemblée des dames et bourgeoises de Paris 299
  • 23. Vengeance des femmes contre les hommes 311
  • 24. Ballet nouvellement dansé à Fontaine-Bleau par les dames d'amour. Ensemble leurs complaintes adressées aux courtisanes de Vénus à Paris 321
  • 25. Satyre contre l'indecence des questeuses 331
  • 26. Les contens et mescontens sur le sujet du temps 335
  • 27. Vers pour Monseigneur le Dauphin au sujet d'une aventure arrivée entre lui et le petit Brancas 353
  • 28. La Vraye Pierre philosophale, ou le moyen de devenir riche à bon conte 359

Notes

1: Cette Mazarinade, faite sous une forme qui fut très employée alors, mais rarement avec une verve aussi soutenue, passe pour être d'un prêtre nommé Jean Duval, à qui l'on attribue aussi le Parlement de Pontoise (1652), et qui mourut le 12 décembre 1680. Il se pourroit pourtant que Jean Duval n'y fût pour rien, et que le véritable auteur fût Marigny. Il est du moins certain que quelques uns de ces triolets, sinon tous, sont de ce dernier. Nous les noterons au passage. Sautereau de Marty, dans son Nouveau siècle de Louis XIV, t. 1, p. 153, etc., a donné cette pièce presque tout entière; M. Moreau, dans son Choix de Mazarinades, t. 1, p. 416, n'en a reproduit que vingt-cinq triolets. Il lui donne la date du 4 mars 1649. Il nous dit aussi, dans son excellente Bibliographie des Mazarinades, t. 3, p. 226, no 3859, qu'il y en eut une 2e édition, s. l. n. d., in-4 de 8 p.

2: Chaque maison devoit fournir un soldat. Celles qui étoient à porte cochère étoient tenues d'armer un cavalier. C'est ce que Richelieu avoit déjà ordonné en 1636, l'année de Corbie, comme on disoit, parceque les Espagnols, ayant pris cette ville, menaçoient de près Paris. V. Mém. de Monglat, collect. Petitot, 2e série, t. 49, p. 128, et Tallemant, 1re édit., t. 5, p. 51. L'arrêté du conseil de ville qui avoit renouvelé cette mesure étoit du 12 janvier 1649; on lit dans le Courrier burlesque de la guerre de Paris:

Le mardi, le conseil de ville
Fit un règlement fort utile,
Savoir que, pour lever soldats,
Tant de pied comme sur dadas,
L'on taxeroit toutes les portes,
Petites, grandes, foibles, fortes;
Que la cochère fourniroit
Tant que le blocus dureroit
Un bon cheval avec un homme,
Ou qu'elle donneroit la somme
De quinze pistoles de poids,
Payables la première fois;
Les petites un mousquetaire
Ou trois pistoles pour en faire.

Pièces à la suite des Mémoires du cardinal de Retz, Amsterdam, 1712, in-12., t. 1, p. 270.

3: Gondi, le coadjuteur. On jouoit volontiers, à propos de lui, sur le mot pasteur, comme dans ce couplet, que nous avons trouvé parmi les triolets de S.-Germain, et, avec quelques changements, dans un recueil de chansons dont M. Laverdet possède le manuscrit, tout entier de la main de Bussy-Rabutin. Nous citons d'après cette curieuse copie:

Monsieur notre coadjuteur
Quitte la crosse et prend la fronde,
Ayant sceu qu'un petit pasteur,
Monsieur notre coadjuteur.
Pour avoir été bon frondeur
Devint le plus grand roi du monde,
Monsieur notre coadjuteur.

4: L'armée du roi tenoit tous ces villages.

5: Ils négligeoient pourtant de faire trop bonne garde et un blocus trop sévère autour de Paris. Cyrano, dans sa lettre 21e (Contre les frondeurs), dit à propos de Mazarin: «Il deffendit d'abattre les moulins qui sont autour de la ville, quoiqu'il sceut que par leur moyen elle recevoit continuellement force bleds.»

6: C'est ce qui abondoit le plus, à ce qu'il paroît, grâce à un heureux coup du marquis de la Boulaye, «qui, dit la dame de la Halle dans sa harangue, qui, avec sa mine turquesque, nous fit bien manger des cochons en carême, pendant le blocus de Paris.» (Lettre de remercîment envoyée au cardinal Mazarin... avec la dame Denize, au large chaperon es Halles, députée vers Son Everminence, etc., Paris, 1651.)

7: Une autre Mazarinade, du même temps et de la même forme, avoue par son titre qu'elle fut écrite au cabaret: Triolets nouveaux sur la paix, faits dans la Pomme de Pin, pour l'heureux retour du roy, Paris, Denys Langlois, 1649.

8: Beaucoup de denrées venoient de Corbeil par la Seine. La prise de cette ville par l'armée royale étoit donc très préjudiciable aux Parisiens. «Corbeil nous sera necessaire, écrit Gui-Patin à Spon; c'est la première ville que nous irons prendre.» Les bateaux qui descendoient la Seine chargés de vivres, pain fait à Melun, poissons, fruits, etc., s'appeloient Corbillas et Corbillards, à cause de Corbeil. V. l'Estoille, édit. Michaud, t. 2, p. 38, et une note de Roquefort dans la Vie privée des François, par Le Grand d'Aussy, t. 1, p. 106. Plus tard, la voiture qui menoit les morts au cimetière prit le même nom, par allusion aux Corbeaux, comme l'Estoille appelle les croque-morts, qui la conduisent. V. id., p. 406.

9: Sautereau de Marsy n'a pas reproduit ce triolet.—Charenton avoit été pris par le prince de Condé le 8 février, et il importoit beaucoup aux Parisiens de le reprendre.

10: Le pain le plus délicat en venoit. V. la lettre de Gui-Patin citée tout à l'heure, et notre t. 2, p. 327.

11: Le conseiller Broussel.

12: Le grand maître de l'artillerie. Jusqu'à la fin des troubles, il y eut des frondeurs qui étoient d'avis qu'il falloit refuser au roi la Bastille et l'Arsenal. V. La vérité reconnue de M. le Prince, etc., Paris, 1652.

13: Equivoque sur le prénom de Mazarin et sur le nom d'une petite monnoie romaine qui ne valoit que 5 sols.

14: Il y a une amusante épître de Chapelle à M. Carré, où il se plaint des ravages que les troupes étrangères à la solde du roi faisoient alors dans la banlieue de Paris.

Toutes ces troupes étrangères
Font qu'on ne se promène guères.
Hélas! comment le pourroit-on,
Puisque Chaillot et Charenton
Sont à présent places frontières?

15: V. une des notes précédentes.

16: Espèce de demi-casque, ou morion, dont se coiffoient alors les fantassins.

17: Pendant la Terreur, Ducis, qui probablement ne connoissoit pas cette mazarinade, écrivoit à l'un de ses amis cette phrase qui la rappelle si bien: «Que parles-tu, Vallier, de faire des tragédies? La tragédie court les rues.»

18: Sautereau de Marsy n'a pas donné ce triolet. Plusieurs mazarinades firent allusion à ces misères d'un siége qui tomboit en temps de carnaval. V. notre t. 2, p. 326, note.

19: Une chère, c'étoit une précieuse. V. Œuvres de Saint-Evremond, t. 1, p. 143, le Cercle.

20: V. aussi, pour la foire Saint Germain, qui n'eut pas lieu cette année-là, notre t. 2, p. 326.

21: Sur cet empirique du Pont-Neuf, v. une note de notre édition du Roman Bourgeois.

22: Inutile de rappeler qu'on nommoit ainsi les barbiers et les chirurgiens.

23: Des conférences pour la paix se tenoient alors à Ruel.

24: On appeloit ainsi le Pérou, à cause de la grande rivière Xauca ou Maragnon, qui le traverse.

25: Il rentra dans Paris le 18 août.

26: Après avoir été l'un des chefs des rebelles, il leur faussa compagnie d'une façon éclatante, en épousant la nièce du cardinal.

27: Ce triolet, l'un des plus populaires du temps, puisque nous le trouvons dans les Triolets de Saint-Germain, dans les Triolets de la Cour, et aussi dans le mss. de Bussy, cité plus haut, fut fait par Marigny sous l'inspiration du coadjuteur, qui le dit lui-même dans ses Mémoires.

28: Ce triolet est l'un des plus ironiques. M. D'Elbeuf et ses enfants n'avoient fait merveille qu'en mettant la ville à contribution, sous prétexte qu'ils défendoient sa cause. Dans les Trahisons decouvertes ou Le peuple vendu, il est accusé «d'avoir ferré la mule au peuple de Paris».

29: Selon Sautereau de Marsy, ce triolet est encore de Marigny.

30: Le maréchal de La Mothe-Houdancourt, qui, pour s'être fait battre à Lérida, en 1644, avoit été accusé de trahison et enfermé à Pierre-Encise. Justifié pleinement par arrêt du parlement de Grenoble, il n'étoit sorti de prison, en septembre 1648, que pour se faire aussitôt l'un des chefs de la Fronde.

31: Le marquis de la Boulaye,

Ce grand gallion de convoi,

Comme il est appelé dans la Lettre au cardinal burlesque, à cause de l'heureux coup de main qui avoit permis à la ville de se ravitailler. V. l'une des notes précédentes.

32: L'histoire de ce chapelier devenu soldat fut alors très célèbre. Elle courut d'abord en chansons, comme nous le ferons voir. C'est le siége de Montauban, en 1621, qu'on y donnoit pour théâtre aux prouesses de ce soldat malgré lui. Ici il est question du grand siége de La Rochelle, qui eut lieu en 1628, comme on sait; notre pièce ne vint donc qu'après les chansons.

33: C'est à peu près ce que dit la chanson du Jeune chapelier de la rue Saint Denis qui s'en va au siége de Montlhéry:

Quand fut à Montlhery,
Sur ces hautes montagnes,
Voyant derrière luy
Toutes ces grand's campagnes,
Fit trois pas en arrière:
Ah! que le monde est grand.

Une gravure du temps, représentant un joueur de vielle suivi d'un enfant qui joue du flageolet, porte ce couplet pour légende. M. Rathery, qui le cite dans un article sur la Bibliographie des mazarinades (Athenæum, 13 février 1853), remarque avec justesse que La Fontaine a bien pu s'inspirer du dernier vers pour l'exclamation de son rat voyageur dans sa fable le Rat et l'Huitre (liv. VIII, fable 9):

Que le monde, dit-il, est grand et spacieux!

Ce couplet, du reste, se trouve presque entier dans une chanson satirique contre le Prince de Savoie, qui dut être faite à cette même époque, et qui est encore assez populaire aujourd'hui pour que Dumersan ait cru devoir la mettre dans son volume de Rondes enfantines. Une chanson (coraula) du canton de Fribourg, qui semble n'être qu'une traduction de nos couplets contre le duc de Savoie, reproduit aussi la même plaisanterie:

Noustrhou prinschou de Schavouye
Lié mardjuga on boun infan
Y l'ia leva oun' armée
Dé quatrouvans paijans,
O vertuchou, gare, gare, gare!
O rantanplan, garda devant
..........
Quand nous fum sur la montagne,
Grand Dieu! qué lou monde est grand!
Fajin vito oune détzerde
Et pu retornin nojan!

Cette chanson est citée par M. G. Brunet dans sa curieuse brochure: Notice sur Gilion de Trasignyes. Paris, Techener, 1839, in-8, p. 32-33.

34: Dans une autre chanson sur ce sujet, qui n'est même qu'une sorte de variante de celle-ci, et dont nous avons trouvé des fragments dans la Comédie des chansons, 1640, in-12, p. 35, acte 1, scène 7, le chapelier, sous le nom de Jodelet, fait une résistance pareille, et n'en est pas mieux récompensé:

Ha! que le monde est grand!
La volonté me change
D'aller à Montauban.

La Roze.

Soldat, que pensez faire?
Avez l'argent reçu.
Vous irez à la guerre,
Ou vous serez pendu.

Jodelet.

N'ay point accoustumé
D'y aller, à la guerre.
Je crains les cannonades
Qui frappent sans parler.
Quant à moy, à la guerre,
Je n'y veux point aller.

35: Ce blâme, cette honte.

36: Les mousquets étant alors trop lourds pour qu'on pût les tirer en les tenant au bout du bras, on les appuyoit sur un bâton fiché en terre et terminé par une fourchette de fer. Molière, dans le mémoire d'Harpagon, mettant en ligne de compte trois gros mousquets ornés de nacre de perle, n'oublie pas les fourchettes assortissantes.

37: Cabaretière du quartier du Louvre où l'on faisoit de gros écots. V. notre édition des Caquets de l'Accouchée, p. 28.

38: Goujat, valet d'armée. V. notre t. 4, p. 364.

39: C'est l'explication si plaisante dans le Virgile travesti de Scarron:

Par la mort!... Il n'acheva pas,
Car il avoit l'ame trop bonne.

Cette traduction burlesque auroit ici convenu mieux que le texte même à mons Phœbus, cousin de Neptune.

40: D'après le dictionnaire argot-françois mis par Grandval à la suite de son poème sur Cartouche, le Vice puni, les polissons étoient, parmi les argotiers, «ceux qui alloient presque nuds», et les marcandiers, ceux qui disoient avoir été volés, et qui, en menaçant d'une accusation le passant à la bourse duquel ils en vouloient, le faisoient ainsi chanter, c'est-à-dire payer. Marcandier signifioit aussi marchand.

41: Allusion aux duels fréquents dont la place Royale étoit l'arène, notamment à celui de Boutteville, qui avoit eu lieu en 1627.

42: Comme une partie de cette grande plaine commençoit alors à se couvrir de maisons, c'est seulement à l'extrémité, du côté de la Grenouillère (quai d'Orsay), qu'on pouvoit encore aller se battre. «Le comte et le baron, lisons-nous dans Francion, s'étant donc picquez, se retirèrent de la compagnie par divers endroits, et, ayant été passer le Pont-Neuf vers le soir, se trouvèrent presqu'en même temps au bout du Pré-aux-Clercs, où, estant descendus de cheval, ils mirent la main à l'espée.» (Hist. comique de Francion, 1663, in 8, p. 366.)

43: C'est le collége de Cambrai, qu'on appeloit quelquefois collége des Trois-Evêques, en souvenir de ses trois fondateurs: Hugues d'Arci, évêque de Laon; Hugues de Pomare, évêque de Langres; Gui d'Aussone, évêque de Cambrai. C'est à celui-ci, qui avoit eu le plus de part à la fondation, qu'il devoit son nom plus ordinaire de collége de Cambrai. La place sur laquelle il ouvroit, et qui a disparu l'année dernière, s'appeloit de même par la même raison.

44: «C'est un soufflet, un coup appliqué sur le visage de quelqu'un du plat ou du revers de la main.» (Leroux, Dictionn. comique.)

45: Petits fromages qu'on ne connoit guère qu'en Normandie, dans le pays d'Auge, ce qui nous feroit croire volontiers qu'Angelot est une altération de Augelot.

46: C'est-à-dire du bélier, pour parler comme le Zodiaque; mais comme il y avoit à Paris, dans le cimetière de Saint-Jean, une célèbre hôtellerie du Mouton (V. notre Histoire des hôtelleries, t. 2, p. 303-304), on a cru pouvoir se permettre cette variante.

47: Il y eut toujours dans cette rue du faubourg Saint-Germain beaucoup de taverniers et plus tard de traiteurs. L'une des principales loges de francs-maçons, au XVIIIe siècle, s'ouvrit et tint ses séances chez l'un de ces derniers. Mercier connut chez une autre la fameuse servante de cabaret dont il a tant vanté la prodigieuse mémoire et la capacité; enfin le Caveau étoit près de là, chez Landel, au carrefour Buci.

48: Cette burlesque étymologie rappelle celle que Balzac, peu plaisant d'ordinaire, inventa un jour, selon le Menagiana. Il disoit que les cordonniers s'appellent ainsi parcequ'ils donnent des cors!

49: Jean Guillaume étoit le bourreau de Paris. Il avoit succédé à Jean Rozeau (V. notre t. 4, p. 251), qui avoit été pendu sous Henri IV pour avoir, pendant la Ligue, étranglé le président Brisson, lui avoir pris son manteau de peluche et l'avoir vendu dix écus. V. L'Estoille, édit. Michaud, t. 2, p. 75. etc.

50: Ce mot italien, qui venoit lui-même du latin carpus ou de son diminutif carpisculus, qui désignoit une sorte de soulier découpé, a eu pour dérivé, dans notre langue, son équivalent escarpin.

51: C'est-à-dire faire un compliment, un éloge, dans le genre de ceux qu'on adressoit aux jeunes mariés, ou bien aux nouveau-venus dans les colléges.

52: J'élève, du latin extollere.

53: Jacques de Fonteny n'est guère connu, et, comme on va le voir, il mériteroit de l'être à plusieurs titres. Il faisoit partie de la Confrérie de la passion, non pas sans doute comme acteur, puisque, d'après l'Estoille, il étoit boiteux, mais comme poète certainement. Il prend la qualité de confrère de la passion dans le recueil de Pastorelles publié en 1615 par J. Corrozet, in-12, sous le titre de le Bocage d'Amour. Il s'y trouve deux pastorelles en vers, l'une le Beau pasteur, qui étoit bien de notre Fonteny, puisqu'il l'avoit déjà donnée dans la Première partie de ses ébats poétiques, Paris, Guill. Linocier, 1587, in-12; l'autre la Chaste bergère, qui, bien que publiée aussi sous le nom de Fonteny, appartenoit réellement à son camarade S. G. de la Roque, puisque celui-ci l'avoit déjà fait paroître séparément sous son nom, en 1599, à Rouen, chez Raph. du Petit-Val. Il est vrai que La Roque auroit pu la prendre, pour se l'attribuer, dans la première édition du Bocage d'Amour, donnée en 1578, et mentionnée dans la Bibliothèque du théâtre françois, t. 1, p. 220. Dans ce même ouvrage, il est parlé d'un autre recueil de notre auteur, les Ressentiments de Jacques de Fonteny pour sa Celeste, 1587, in-12, dont fait partie la pastorale en 5 actes la Galathée divinement delivrée. Quand les comédiens italiens vinrent en France, Fonteny se mit aussitôt à imiter leur théâtre. A peine Francesco Andreini, chef de la troupe de li Gelosi, avoit-il donné, en 1607, la première partie de sa grande pièce matamore le Bravure del capitan Spavento, que notre confrère de la passion la publia en françois sous le titre de: les Bravacheries du capitaine Spavente, traduictes par J. D. F. P. (Jacques de Fonteny, Parisien). M. Brunet, trompé par la première de ces initiales, a dit que cette traduction étoit de Jean de Fonteny; mais, selon moi, c'est bien Jacques qu'il faut dire. En 1638, Anthoine Robinot publia pour la seconde fois cette traduction avec le titre nouveau de le Capitan, par un comédien de la trouppe jalouse. Cette seconde édition est mentionnée dans le Catalogue Soleinne, sous le no 804, avec une note où, après avoir fait ressortir l'influence que cette pièce put avoir sur notre théâtre, dont le matamore fut dès lors l'un des personnages indispensables, l'on ajoute: «La première édition du Capitan doit être bien antérieure à celle de 1608, la plus ancienne qui soit citée par la bibliographie.» C'est une erreur, puisqu'en effet, je le répète, la première partie de l'ouvrage d'Andreini, dont celui-ci n'étoit que la traduction, avoit paru seulement en 1607. (V. le curieux travail de M. Ch. Magnin sur le Teatro celeste, Revue des deux mondes, 15 décembre 1847, p. 1103, note.) Fonteny sacrifioit volontiers à la mode en littérature: nous venons de le voir pour les comédies italiennes, dont il se hâta de se faire le traducteur au moment de leur premier succès; nous allons en avoir une autre preuve par son volume d'Anagrammes et sonnets, dédiés à la reine Marguerite, qu'il publia en 1606, in-4, c'est-à-dire au moment où ce genre de casse-tête poétique commençoit d'être en vogue. L'Estoille, dont Fonteny étoit l'ami, reçut de lui, en présent, ce volume d'anagrammes, et voici comment il en parle: «Le vendredi 5 (janvier 1607), Fonteny m'a donné des anagrammes de sa façon, qu'il a fait imprimer pour la reine Marguerite, où entr'autres il y en a ung tout à la fin qui est sublin et rencontré de mesme, tiré, ainsi qu'il dit, de l'Escriture, fort convenable à la qualité, vie et profession de la ditte dame, dans le nom de la quelle, qui est Marguerite de Valois, se trouve: Salve, virgo mater Dei. Il y en a encores un autre de mesme qu'il y a mis, qui suit cestui-ci, de pareille estofe et grace; les quels deux il semble avoir reservés pour la bonne bouche, afin que d'une tant belle conclusion, et si à propos, on jugea tout le reste, qui ne vault pas mieux.» Par bonheur un autre présent accompagnoit celui-là et le faisoit passer, quoi que ce fût aussi, mais dans un genre bien différent, un ouvrage de Fonteny: «Le dit Fonteny, ajoute l'Estoille, m'a donné pour mes estrennes un plat de marrons de sa façon, dans un petit plat de faïence, si bien faict qu'il n'y a celui qui ne les prenne pour vrais marrons, tant ils sont bien contrefaits près du naturel, se rencontrant plus heureux en cest ouvrage qu'en celuy des anagrammes.» Quelques semaines après, Fonteny, qui avoit encore quelque présent de vers à se faire pardonner, gratifia l'Estoille de la même manière. «Fonteni le boiteux, écrit celui-ci, m'a donné ce jour (20 fév. 1607) un plat artificiel de sa façon, de poires cuites au four, qui est bien la chose la mieux faite et la plus approchante du naturel qui se puisse voir. Il m'a donné aussi son Œnigme de la cloche.»—Mon ami M. de Montaiglon, frappé comme moi de ces deux passages de l'Estoille qui nous font connoître un imitateur de Palissy très intéressant et très imprévu, pense, avec raison, que la grande F placée sous une assiette de fruits émaillée faisant partie de la collection des faïences du musée du Louvre pourroit bien être l'initiale de notre Fonteny.

54: L'Eurotas. Les cygnes de ce fleuve étoient célèbres.

55: Ce traité se trouve avec les Hymnes, etc., à la suite des anciennes éditions des Argonautica d'Orphée; mais, comme tout le reste, on sait à présent qu'il n'est pas de lui.

56: Plutarque dans ses Symposiaques, au bizarre chapitre: Quel des deux a été le premier, de la poule ou de l'œuf? parle de cet usage.

57: C'est-à-dire quand, après la moisson, l'on faisoit avec le blé fauché ces grandes meules qu'on appelle chaumiers dans la Beauce.

58: Moissonneurs, ceux qui font l'aoust.

59: S'il falloit se bien garder de casser un œuf plein, il falloit aussi se hâter de le briser sitôt qu'on en avoit vidé la coque. C'étoit un usage sacré chez les Romains (Pline, liv. 28, ch. 2), et que nous avons conservé comme simple règle d'étiquette: «Après votre soupe, que mangeâtes-vous? dit l'abbé Delille à l'abbé Cosson dans la fameuse conversation qu'a rapportée Berchoux.—Un œuf frais, répond l'autre.—Et que fîtes-vous de la coquille?—Comme tout le monde, je la laissai au laquais qui me servoit.—Sans la casser?—Sans la casser.—Eh bien! mon cher, on ne vide jamais un œuf sans briser la coquille.» (Notes du poème la Gastronomie.) Grimod de la Reynière (Almanach des gourmands, 3e année, p. 349-350) se préoccupe de cet usage, et assure qu'il a beaucoup réfléchi pour en deviner le motif. Pline, qui en a parlé le premier, ne le savoit pas bien lui-même. «Au reste, dit l'illustre gourmand, il n'y a nul inconvénient à s'y soumettre.»

60: Lustrateur, qui tenoit et présentoit l'eau lustrale.

61: Eau de senteur fort en renom depuis le temps de Rabelais, qui la cite au chap. 55 de son livre 1er, jusqu'à Corneille, qui en parle dans sa comédie de la Veuve (act. 1er, sc. 1re). Elle étoit composée d'iris de Florence, de storax, de bois de rose, de santal citrin, etc. Les Espagnols avoient aussi une eau des anges (agua de angeles), mais qu'ils composoient autrement. D'après la recette qu'en donne un commentateur de Don Quichotte (2e partie, ch. 32), il paroît que la fleur d'oranger y dominoit. L'eau d'ange se seroit ainsi rapprochée de l'eau de naffe, dont nous avons parlé dans notre tome 4, p. 362, et qu'on nous assure être la même chose que l'eau de fleur d'oranger, bien que, dans le passage du Décameron cité par nous, Boccace les distingue formellement.

62: On commençoit par les œufs et l'on finissoit par les fruits, comme chez nous. De là le proverbe: Ab ovo... usque ad mala, depuis le commencement jusqu'à la fin.

63: Au moyen âge, lors même qu'on se servoit de l'huile et de la gomme pour la plupart des couleurs, il y en avoit quelques unes pour lesquelles on recouroit au blanc d'œuf. «Le vermillon, dit le Moine Théophile, la céruse et le carmin doivent se broyer et s'appliquer avec du clair d'œuf.» (Diversarum artium schedula, liber 1, cap. 27).

64: Dans les manuscrits, pour appliquer l'or, l'on s'étoit toujours servi d'un mélange de vermillon et de cinabre, broyé dans un clair ou blanc d'œuf. (Idem, cap. 31.) Quant aux relieurs, ils durent toujours faire usage du blanc d'œuf pour leurs dorures; aujourd'hui encore ils ont soin de glairer préalablement la partie sur laquelle la feuille d'or doit être appliquée.

65: C'est la première fois que nous voyons expliquer ainsi le nom de ces billets doux, qu'on appeloit aussi chapons. (V. notre tom. 1er, p. 12.) Nous préférons, l'étymologie que donne Le Duchat, lorsqu'il dit dans son Dict. étymologique de Ménage (Paris 1750, in-fol.), qu'on appeloit ainsi les billets doux parcequ'on les plioit en forme de poulet, «à la manière, dit-il, dont les officiers de bouche plient les serviettes, auxquelles ils savent donner diverses figures d'animaux». Le Duchat auroit pu appuyer son explication du passage de l'Ecole des Maris (act. 2, sc. 5) où Isabelle raconte à Sganarelle comment un jeune homme

... a droit dans sa chambre une boîte jetée
Qui renferme une lettre en poulet cachetée.

66: Armée.

67: Dans les Nova antiqua de Paschius, au chapitre où il est parlé des tentatives faites par l'homme pour s'élever dans les airs, l'on trouve d'intéressants détails sur la manière dont on préparoit les œufs pour qu'ils pussent monter comme de petits aérostats.

68: Il en avoit paru une première édition en 1649, s. l., in-4 de 8 p., avec ce titre, Catechisme des courtisans de la cour de Mazarin. Les pièces qui suivent ici, et qui sont toutes, sauf une seule, d'une époque postérieure à 1649, ne s'y trouvoient naturellement pas.

69: Ou à coups de bâton, comme celui des Plaideurs:

... Frappez,
J'ai quatre enfants à nourrir.

70: C'est l'idée développée par Etienne Pasquier dans la lettre que nous avons déjà citée (V. notre t. 2, p. 196), et aussi dans la jolie facétie les Singeries des femmes (V. notre t. 1, p. 56-65).

71: Allusion aux réformes qu'on introduisoit dans les monastères pour les ramener à un système d'abstinence et d'économie dont profitoient les revenus que touchoient les abbés.

72: Sur ce proverbe, que nous avons déjà trouvé en germe dans une pièce de 1619, V. notre t. 2, p. 284.

73: Mailly, dans l'Esprit de la Fronde, t. 5, p. 819, a reproduit tout entière cette petite pièce.

74: Les cinq grosses fermes données à bail pour un nombre d'années fixes étaient les gabelles, la vente exclusive du tabac, les entrées de Paris, les droits de traite et le domaine d'occident.

75: Cette pièce, sous une forme pareille, est d'un tout autre temps et d'un tout autre esprit. Elle dut paroître en 1665, c'est-à-dire trois ans avant d'être mise dans ce petit recueil, et à l'époque même où Alexandre V envoya le fameux formulaire, qui, reçu en France par une déclaration enregistrée, y devint l'arme de la proscription la plus violente contre le jansénisme.

76: Les refus de signer le formulaire furent très nombreux. Quatre évêques, ayant à leur tête Henri Arnaud, qui occupoit le siége d'Angers, refusèrent tout d'abord de s'y soumettre. Les dissidences, suivies de troubles graves, durèrent jusqu'à ce qu'en 1668 Clément IX eut tout apaisé par un accord qui s'appela Paix de l'église.

77: Allusion au vaste projet de révolte qu'avoit conçu Fouquet, dont le plan détaillé fut trouvé dans ses papiers, et qui, selon M. P. Clément, à qui l'on doit la publication de cette curieuse pièce, fut, malgré les dénégations du surintendant, la véritable cause de sa condamnation. V. le travail de M. Clément sur Fouquet (le Correspondant, 25 avril 1845, p. 257 et suiv.) V. aussi la lettre de Mme de Sévigné du 4 décembre 1664.

78: Le chancelier, président de la chambre de justice devant laquelle avoit été renvoyé Fouquet.

79: Il n'eut point en effet à prendre part au procès.

80: L'un des vingt-deux juges du surintendant, vota pour le bannissement.

81: C'est Boucherat, alors maître des requêtes et depuis chancelier. Il étoit de la commission chargée de la poursuite du procès. C'est lui qui avoit été chargé de mettre les scellés chez le surintendant. Mme de Sévigné se moque du chancelier, qui tous les jours se faisoit faire la leçon par Boucherat.

82: Conseiller de la Grand'Chambre, l'un des plus favorables d'entre les vingt-deux juges. C'est lui qui fut surtout frappé de l'aisance et du sang-froid de Fouquet. «Notre cher et malheureux ami, écrit Mme de Sévigné (2 décembre 1664), a parlé deux heures ce matin, mais si admirablement que plusieurs n'ont pu s'empêcher de l'admirer. M. Renard a dit entre autres: Il faut avouer que cet homme est incomparable; il n'a jamais si bien parlé dans le Parlement. Il se possède mieux qu'il n'a jamais fait.»

83: Conseiller au Parlement et l'un des vingt-deux juges. Il vota pour le bannissement pur et simple, et repoussa avec vigueur l'idée du dernier supplice, auquel quelques uns vouloient condamner Fouquet. Son intimité avec les auteurs, qui presque tous étoient les protégés et, chose rare, les fidèles défenseurs du surintendant, fut peut-être pour quelque chose dans son indulgence. Il étoit surtout au mieux avec Racine, à qui, selon les Mémoires du fils, il apprit les termes de palais nécessaires pour sa comédie des Plaideurs.

84: Henri Pussort, conseiller d'Etat, oncle maternel de Colbert, et qui, bien que récusé tout d'abord par Fouquet, fut l'un de ses juges les plus acharnés. Quand vint son tour de donner son avis, il parla quatre heures «avec tant de véhémence, tant de chaleur, tant d'emportement, tant de rage, dit Mme de Sévigné, que plusieurs juges en furent scandalisés, et l'on croit que cette furie peut faire plus de bien que de mal à notre ami.» Pussort vota pour la mort. Dans l'espèce de complainte qui fut faite sur ce procès, avec un couplet flatteur ou satirique pour chacun des vingt-deux juges, suivant qu'il avoit été indulgent ou sévère, voici le lardon qui lui échut:

Monsieur Pussort
Harangua fort;
Mais par malheur il prit l'essor,
Et sa sotte harangue
Fit bien voir au barreau
Qu'il a beaucoup de langue
Et fort peu de cerveau.

85: Procureur général dans le procès. Il y mit trop d'intégrité et de conscience au gré de Colbert, et l'on trouva moyen de le faire renvoyer et remplacer par M. de Chamillart.

86: Agent de Colbert, qui dirigeoit le procès avec la plus incroyable passion. M. d'Ormesson, dans son Journal, le donne comme l'homme le plus décrié de Paris. En dix-huit mois seulement il avoit fait, lui qu'on chargeoit de sévir contre les concussions de Fouquet, pour plus de 1,800,000 livres d'acquisition. «C'étoit, dit M. d'Ormesson, un fripon hardi et capable de toutes choses.» Sur la fin du procès, se voyant renié et abandonné de tout le monde, il devint littéralement fou. V. lettre de Mme de Sévigné du 17 décembre 1664.

87: Mme du Plessis Bellière, dont le maréchal de Créqui avoit épousé la fille. Elle étoit fort amie de Fouquet, et avoit même été, à ce qu'il paroît, la confidente de ses prétentions sur l'amour de Mlle de La Vallière.

88: Trésorier de l'Epargne, époux de la fameuse Mlle de Chemerault. Il étoit mort avant 1649. On dit de lui dans le Catalogue des partisans: «La succession de La Bazinière ne doit pas être exempte d'une légitime recherche, sa naissance et la condition de lacquais où il a esté eslevé ne pouvant pas lui avoir donné les avantages d'une si grande fortune que celle où il est mort.» L'abbé de Marolles (Paris, ou la description succinte de cette grande ville, in-4) cite l'hôtel que La Bazinière avoit fait construire dans le quartier Richelieu parmi les plus beaux de Paris.

89: Fameux financier du quartier Richelieu, dont il est parlé sous le nom de Moncrot, défiguré exprès, dans les Mémoires de Daniel de Cosnac, t. 2, p. 29. V. aussi le Catalogue des partisans, où ce qu'on prête ici à Monnerot sur sa crainte de voir éplucher ses fautes se trouve justifié.

90: Bruant des Carrières, principal commis de Fouquet.

91: C'est une paraphrase du vers de Boileau fait pour Fouquet:

Jamais surintendant ne trouva de cruelles.

92: Jean-Baptiste Colbert.

93: Un des griefs de Colbert contre Fouquet, c'est que celui-ci avoit fait peindre à Vaux, lors des grandes fêtes données au roi, un écureuil poursuivant une couleuvre, avec ces mots: Quo non ascendet! L'écureuil, c'étoit Fouquet; la couleuvre, Colbert, qui s'étoit en effet donné un coluber pour armes parlantes. Il le mettoit partout. On le trouve encore sur la façade récemment réparée, c'est-à-dire défigurée, d'une maison qu'il avoit fait bâtir rue du Mail, no 9. Le coluber symbolique se voyoit dans la coiffure du macaron qui décoroit la clef de voûte de la porte cochère; il se trouve encore gracieusement enroulé dans les volutes du chapiteau corinthien qui surmonte les pilastres.

94: Pour captal, mot de la langue d'Oc qui se prenoit dans le sens de chef et seigneur. On connoît, au temps des guerres de du Guesclin, le fameux captal de Buch. Alain Chartier l'appelle souvent captau de Buch.

95: Le même mot que muguet, tant employé depuis Etienne Pasquier (V. Lettres, t. 1, p. 23) jusqu'à La Fontaine et Molière. Selon le P. Labbe (Etymologie des mots françois, Paris, 1661, in-8, p. 351), c'étoit un dérivé des mots musqueter et musqueterie, dus à la mode de se parfumer de musc qui infecta tout le XVIe siècle, et dont parle Merot dans son épigramme à Guill. Cretin:

Mais vous, de haut savoir la voye,
Sçaurez par trop mieulx m'excuser
D'un grand erreur, si fait l'avoye
Qu'ung amoureux de musc user.

96: C'est-à-dire mignonne de visage et de taille et d'une grande propreté dans l'ajustement. On disoit plus souvent poupin et poupine. Au XVIIe siècle, c'étoit un mot qui vieillissoit.

97: Dans toutes les villes, un boucher affermoit, à ses risques et périls, le droit de vendre de la viande pendant le carême aux malades à qui leur état plus ou moins grave avoit fait accorder par l'Eglise la permission d'en manger. Si la santé publique étoit satisfaisante, c'étoit un homme ruiné; s'il arrivoit quelque bonne épidémie, il faisoit sa fortune. A une lieue d'Orléans se trouve une jolie maison qui s'appelle la maison du rhume, parcequ'elle fut bâtie par un de ces fermiers de la boucherie de carême avec les bénéfices qu'une bienheureuse grippe lui avoit fait faire.

98: C'est-à-dire chefs d'escouade.

99: Pour: audit an.

100: Cette description du costume de Mardi-Gras rappelle tout à fait certains tableaux de mascarades allemandes et hollandoises peintes par Van Boons, et dont le Magasin pittoresque a reproduit quelques unes des plus curieuses figures, t. 3, p. 65.

101: Se vantoit, du latin jactare.

102: Il a été reconnu que le poisson, en raison du phosphore qu'il contient tout formé, principalement dans les laites, possède une grande vertu prolifique. Brillat-Savarin, dans sa méditation VIe, s'étend sur cette particularité, sur ses causes, sur ses effets, et ajoute: «Ces vérités physiques étaient sans doute ignorées de ces législateurs ecclésiastiques qui imposèrent la diète quadragésimale à diverses communautés de moines, telles que les Chartreux, les Récollets, les Trappistes et les Carmes déchaux réformés par sainte Thérèse: car on ne peut pas supposer qu'ils aient eu pour but de rendre plus difficile l'observance du vœu de chasteté, déjà si anti-social.» (Physiologie du goût, édit. Charpentier, p. 109.)

103: Le craquelin, pâtisserie sèche qui se mange encore dans quelques provinces, s'appeloit ainsi parcequ'elle craquoit sous la dent.

104: Ou poupelin. V., sur la manière dont on faisoit cette pièce de four au XVIIe siècle, notre édition du Roman bourgeois, p. 51, note.

105: Dérivé singulier du verbe mener. L'on entend ici cette douce chose du commerce amoureux qui consiste à se faire partout le compagnon, le meneur de celle qu'on aime. Mme de Staal (Mlle de Launay) dans ses charmants Mémoires, (édit. Colnet, t. 1, p. 15,) fait une très fine remarque sur les indices qu'une femme peut tirer de ces meneries pour s'assurer du degré d'amour qu'un homme a pour elle. Elle parle de M. Brunet, qui, les jours qu'elle sortoit de son couvent pour aller chez mesdemoiselles d'Epinay, s'empressoit toujours de la reconduire. «Je découvris, dit-elle, sur de légers indices, quelque diminution de ses sentiments... Il y avoit une grande place à passer, et, dans les commencements de notre connoissance, il prenoit son chemin par les côtés de cette place. Je vis alors qu'il la traversoit par le milieu: d'où je jugeai que son amour étoit au moins diminué de la différence de la diagonale aux deux côtés du carré.»

106: Hypallage, figure de langage qui consiste à employer des mots recherchés.

107:

Grand mot que Pradon croit un terme de chimie,

comme dit Boileau, Epit. VII, v. 54, et qui est, on le sait, la figure de rhétorique qui consiste à prendre la cause pour l'effet, le contenant pour le contenu, et vice versa.

108: Amitiés de cousin et de cousine.

109: Contorsions du col que l'on fait pour regarder en sournois, ou en amoureux, ce qui est tout un.

110: Offres de dragées propres à dérouiller la gorge.

111: C'est-à-dire qui font semblant d'être atteints de la maladie dite danse de Saint-Guy.

112: Voy. une des notes précédentes.

113: Rayons.

114: Sur cet usage des masques que les femmes portoient alors partout, v. notre tom. 1, page 307.

115: La philanthropie au XIXe siècle s'est davantage inquiétée du mariage des pauvres. Sous la Restauration une association, patronnée par la duchesse d'Angoulême, avoit été fondée à l'effet de pourvoir au mariage des ouvriers sans fortune, leur procurer gratuitement des expéditions d'actes et les pièces notariées nécessaires, etc. Aujourd'hui la Société de Saint-François Régis s'est donné la même mission.

116: Les jeunes filles pauvres étoient surtout placées, sitôt qu'elles avoient douze ans, dans les ateliers de dentelle de Bicêtre. V. Sauval, Antiq. de Paris, liv. 5, chapitre Hôpital général.—Olier, qui étoit curé de Saint-Sulpice en 1648, prenoit soin de placer en apprentissage chez les maîtres artisans les orphelins de sa paroisse. C'est lui aussi qui avoit ouvert, dans la rue du Vieux-Colombier, la maison des Orphelines. V. Monteil, Traité de matériaux manuscrits, t. 2, p. 5.

117: La Police des pauvres de G. Montaigne, curieuse pièce des premières années du XVIIe siècle, que nous donnerons dans un prochain volume, parle de ces mendiants qui prenoient la place des bons pauvres et qu'il falloit chasser de Paris. «Il est défendu à toutes personnes de mendier à Paris, sur la peine de fouet, pour les inconvénients de peste et autres maladies qui en pourroient advenir, joint que plusieurs belistres et cagnardiers, par imposture et déguisement de maladie, prennent l'aumône au lieu des vrais pauvres, et aussi que les pauvres estrangers y viennent de toutes parts pour y belistrer.»

118: Le grand bureau des pauvres. Les bourgeois choisis par chaque paroisse pour avoir soin des intérêts spirituels et temporels des pauvres s'y assembloient le lundi et le samedi de chaque semaine, à trois heures après midi, sous la présidence du procureur général du Parlement ou de l'un de ses substituts. De cette compagnie étoient tirés les administrateurs des hôpitaux de Paris et des environs.

119: Les fabriques de paroisses, sous la présidence des curés, faisoient sans cesse acte de charité de la façon la plus efficace. Tout à l'heure nous avons parlé du curé de Saint-Sulpice; nous devons rappeler aussi celui de Sainte-Marguerite, qui, au commencement du XVIIIe siècle, adopta pour les pauvres de son église le système des soupes économiques, proposées d'abord par Vauban, conseillées par Helvétius dans son Traité des maladies (1703, chapitre Bouillon des pauvres), puis reprises par M. de Rumfort, qui leur a laissé son nom. (Pujaulx, Paris à la fin du XVIIIe siècle, p. 374-375.)

120: Sur le rôle philanthropique des corporations d'artisans et sur la caisse de secours que chacune d'elles possédoit sous le nom de Charité du métier, V. un intéressant article de M. Louandre, Revue des Deux-Mondes, 1er décembre 1850, p. 858.

121: Par une ordonnance du 8 mars 1712, Louis XIV ne s'en tint pas à défendre de donner des secours aux pauvres de la religion; il interdit, sous les peines les plus sévères, aux médecins et apothicaires, de continuer leurs soins aux malades qui ne se seroient pas encore confessés le troisième jour de leur maladie. La Gazette littéraire du 13 janvier 1831 a donné en entier la teneur de cette ordonnance.

122: Cette pièce a déjà été reproduite dans le Recueil de pièces joyeuses mentionné par De Bure dans la Bibliographie instructive, t. 2, p. 40, no 3360.

123: Ulcère du nez putride et fétide. (Dict. de Furetière.)

124: Le busque étoit un treillis dur et piqué que les tailleurs mettoient au bas des pourpoints pour leur donner plus de fermeté.

125: C'est-à-dire a de l'apparence, du volume.

126: Sorte d'arrosoir dont l'eau s'échappoit avec un bruit agréable. De Cailly fut un jour fort tourmenté au sujet de l'étymologie de ce mot. Il s'en vengea par cette épigramme:

Depuis des jours on m'entretient
Pour savoir d'où vient chantepleure.
Au chagrin que j'en ai, j'en meure!
Si je savois d'où ce mot vient,
Je l'y renverrois tout à l'heure.

127: Dans les Joyeusetez publiées par M. Techener se trouve une pièce où le mauvais état d'un nez pareil à celui-ci est aussi reproché aux vendeurs de vins frelatés:

..........
Par taverniers brouilleurs de vins
Gros bourgeons avons entour nez;
Ce sont biens que nous ont donnés
Les taverniers en leurs buvettes.
Voyez nos nez bien bourgeonnez.
N'en reste plus que les cliquettes.

128: Ils faisoient déjà merveille, surtout pour la teinture rouge, un demi-siècle avant l'époque où cette pièce dut paroître. Dans son ode XXIe, Ronsard avoit pu vanter:

... Le riche accoustrement
D'une laine qui dément
Sa teinture naturelle
Espaisse du Gobelin,
S'yvrant du rouge venin
Pour se desguiser plus belle.

129: Mouches de marais.

130: C'est ce que Taillevent appelle le couloir dans lequel on mettoit le vin et tout ce qui composoit l'hypocras. «Et le pot dessoubs, dit-il, et le passez tant qu'il soit coulé, et tant plus est passé et mieux vault, mais qu'il ne soit esventé.»

131: Greffe.

132: Ce qui sert à porter le mortier. Cet outil s'appelle ainsi à cause de sa forme, et parcequ'on le porte comme des ailes sur le dos. Vigneul-Marville a employé ce mot dans ses Mélanges, t. 3, p. 278.

133: Pour carcinome, cancer.

134: Cette pièce doit être rangée dans un genre de facétie que ce bon Palaprat, qui sans doute n'avoit pas même lu Rabelais et son chapitre de la librairie de Saint-Victor, crut avoir inventé au XVIIe siècle. (V. ses œuvres, Paris, 1712, in-12, t. 1, p. 278-279.) C'est un de ces catalogues de livres imaginaires sur lesquels M. P. Jannet, sous le pseudonyme de Hænsel, a publié dans le Journal de l'amateur de livres (1er septembre 1848) un très curieux article, que nous avons cherché à compléter dans une lettre publiée par le même journal au mois de janvier 1850. La pièce que nous reproduisons est si rare qu'elle nous échappa alors, ainsi qu'à M. G. Brunet, qui avoit le premier donné un petit supplément à l'article de M. Hænsel dans le numéro du 1er décembre 1848 du journal déjà cité.

135: César, duc de Vendôme, étoit, comme on sait, fils naturel de Henri IV et de Gabrielle d'Estrées (V. notre t. 2, p. 253), et le duc d'Angoulême bâtard de Charles IX et de Marie Touchet.

136: Gentilhomme de la maison de Foix. V. sur lui un vers des Contreveritez de la Cour dans notre t. 4, p. 343.

137: Gilles de Souvray, marquis de Courtanvaux, maréchal de France, gouverneur de Louis XIII.

138: Albert de Gondi, duc de Retz, maréchal de France. Il est souvent parlé de lui et de sa femme, Catherine de Clermont, dans la Confession de Sanci.

139: Les Italiens de la suite du marquis d'Ancre, Coglioni di mila franchi. V. notre t. 4, p. 25.

140: C'est-à-dire aux affaires. C'étoit alors un mot masculin. V. notre t. 1, p. 133, note.

141: La casaque étoit aux couleurs, à la livrée du parti qu'on suivoit, mais faite de telle sorte que, si, après la défaite du parti, il devenoit dangereux de la porter, l'on pouvoit la retourner sans qu'il parût qu'elle fût à l'envers. M. de Vendôme, l'un des esprits les plus changeants de ce temps-là, tantôt pour la reine, tantôt pour les princes, avoit une casaque de cette espèce. «Il falloit, dit Le Laboureur, vaincre ou mourir, ou bien devestir cette casaque, ce qui arrivoit assez souvent, ou pour arrester les fâcheuses suites d'un évenement sinistre, ou bien cela se faisoit pour eviter la honte et l'infamie d'une lasche action; ce qui pourroit bien avoir donné origine à l'expression proverbiale: Il a tourné casaque, laquelle se dit aujourd'hui de ceux qui changent de parti.» De l'origine des armes, Lyon, 1658, in-4, p. 8.

142: Ceci tendroit à nous donner sur les mœurs du maréchal de Brissac des soupçons qu'un passage de l'Inventaire des livres de M. Guillaume, mal compris par Le Duchat, nous avoit d'ailleurs suggérés déjà: «Une consolation à M. de Brissac sur la mort de sa femme, par le vidame de Chartres.»

143: Le fameux La Varenne, qui, de cuisinier, étoit devenu marquis, conseiller d'Etat et gouverneur de La Flèche, le tout grâce à ses obligeants services de proxénète, ce qui faisoit dire qu'il avoit plus gagné à porter les poulets du roi qu'à les piquer.

144: René de Thou, seigneur de Bonneuil, introducteur des ambassadeurs. V. Blanchard, Eloges des présidents à mortier, et notre t. 4, p. 341.

145: Il est appelé M. Le Rostein dans la facétie du même genre que celle-ci qui a pour titre: Bibliothèque de Mlle de Montpensier. On y met sous son nom un livre dont le titre: Les lamentations de saint Lazare, est loin de démentir ce qu'on lit ici. Il paroît décidément qu'il étoit lépreux.

146: Catherine de Gonzague de Clèves, mariée en 1582 à Henri d'Orléans, duc de Longueville, morte en 1629, âgée de 61 ans.

147: Le père de Concini était menuisier.

148: Nicolas Brûlart, marquis de Sillery, garde des sceaux depuis 1604. V. notre t. 2, p. 133.

149: Lisez couratiers, courtiers.

150: Dame galante et fort intrigante. Il est parlé d'elle au liv. 2, chap. 1, de la Confession de Sanci, et d'Aubigné la nomme au chap. 16 du Baron de Fæneste. Ce Charme du silence, qu'elle donne en 1619 à M. d'Epernon, n'étoit pas sans utilité pour lui, puisqu'on l'accusoit de savoir la vérité sur l'assassinat de Henri IV, et puisqu'il sut trouver le moyen de ne pas la dire.

151: Honorat de Savoie, marquis de Villars, avoit eu la charge d'amiral après l'assassinat de Coligny. Il n'y fit pas merveille, et la comparaison indiquée ici n'étoit certainement pas à son avantage.

152: Henri de Silly, comte de Rochepot.

153: Patron des fous.

154: Ceci donnerait à penser qu'on soupçonnoit M. d'Epernon de vouloir tenter contre Louis XIII ce que Ludovic le More n'avoit essayé qu'avec trop de succès contre son neveu Galeas Sforza, mort empoisonné par lui le 21 octobre 1494.

155: Le président Jeannin et le chancelier de Sillery avoient fait en 1601 le traité avec le duc de Savoie, et l'on disoit qu'en même temps qu'ils traitoient avec ce prince pour le roi, ils traitoient aussi en secret pour le maréchal de Biron, qui en effet trahissoit alors la France au profit de la maison de Savoie.

156: Antoine de Roquelaure, fait maréchal de France en cette même année 1615. Il avait 71 ans, mais c'étoit pure calomnie de comparer ce vieux brave à un vieux lièvre.

157: Celui que Louis XI fit décapiter.

158: Henri de la Tour d'Auvergne, duc de Bouillon, étoit soupçonné d'avoir des relations avec les princes d'Allemagne.

159: Le duc d'Epernon avoit, en 1611, refusé son consentement pour le mariage de son second fils, le marquis de la Valette, avec la fille du maréchal d'Ancre. Ce fils, qui étoit très jeune, et par conséquent très porté à l'obéissance pour de tels ordres, épousa, onze ans plus tard, la fille de Henri IV et de la marquise de Verneuil.

160: César Auguste de Saint-Lary, baron de Termes, avoit pour maistresse une fille de la reine, nommée la Sagonne, avec laquelle il fut trouvé couché. La reine chassa la Sagonne, et peu s'en fallut qu'elle n'obtînt du roi qu'il envoyât M. de Termes à l'échafaud.—Ce nom de la Sagonne cache Diane de la Marck, femme en troisièmes noces de Jean Bahou, comte de Sagonne.

161: Il est aussi parlé de lui à l'art. 62 de l'Inventaire de la bibliothèque de maître Guillaume.

162: Gouverneur de Chartres, qui avoit mis en effet assez de promptitude à livrer la place.

163: Frère puîné du prince de Condé, dont la légitimité est ici mise en doute. Il étoit mort en 1612.

164: Femme de ce comte de Limours qui, selon les Contrevéritez de la cour (v. notre t. 4, p. 341) avoit si mauvaise mémoire. Les actions de Mme la comtesse ne semblent pas avoir été de celles dont il fût bon de se souvenir.

165: Sœur de Gabrielle d'Estrées, pour laquelle Henri IV eut un penchant passager. V. Sauval, Galanteries des rois de France, 1731, in-12, t. 2, p. 354.

166: La douairière.—C'est la même qui fit beaucoup parler d'elle, pendant son veuvage, à cause de son commerce avec M. de Bellegarde. Le 55e article de l'Inventaire des livres trouvés en la bibliothèque de Me Guillaume lui est consacré: «Trois livres enseignants de conserver sa virginité devant et après l'enfantement, par Mme de Guise, dédiés à Mme de Vitry.»

167: L'auteur des excellents Mémoires souvent réimprimés. Je l'aurois cru exempt de ces sortes de malheurs.

168: Philibert de Grammont, second mari de la belle Corisandre d'Andouins, l'une des plus célèbres maîtresses de Henri IV.

169: Diane d'Estrées, sœur de Gabrielle, seconde femme de Jean de Montluc, seigneur de Balagny, maréchal de France.

170: Duret de Chevry. V. sur lui notre édition des Caquets de l'Accouchée, p. 147.

171: V. sur les mœurs de ce prélat notre t. 4, p. 340. C'est avec intention qu'on fait dédier ses sermons à un marguillier de Saint-Germain-l'Auxerrois. L'hôtel de Sourdis étoit proche de cette église; il avoit donné son nom à une petite impasse qui ne vient que de disparoître.

172: Celui qui avoit négocié le mariage de Henri IV et de Marie de Médicis.

173: Angélique d'Estrées, autre sœur de Gabrielle.

174: Nous devons la communication de cette pièce très curieuse à l'obligeance de notre ami M. Charles Livet, qui l'a copiée avec le soin le plus minutieux sur l'exemplaire, sans doute unique, que possède la bibliothèque de Nantes. Elle est imprimée en gothique, in-8, sans pagination. Au verso du premier feuillet, où le titre se trouve, l'on voit une grossière gravure à sept personnages, dont un assis au milieu sur un siége surmontant une estrade à deux marches. Le même frontispice, nous dit M. Charles Livet, se trouve en tête de la pièce intitulée: L'Entrée du roy à Romme (du mercredi dernier décembre 149.). Le dernier chiffre ne s'y trouve pas, mais il faut lire 1494, car il s'agit de l'entrée de Charles VIII dans la ville des papes, le 31 décembre de cette année-là. M. Livet pense que la pièce qu'il nous communique est du même temps, et je partage cet avis. C'étoit le moment de la première et de la plus vive curiosité qu'avoient dû exciter les voyages et les découvertes de Colomb; il devoit courir par toute l'Europe, au sujet de cette entreprise, aux incroyables résultats, beaucoup de petits livrets du genre de celui-ci, dans lesquels l'imagination populaire, remplie d'idées singulières touchant l'existence de tout un monde fabuleux, trouvoit moyen de renchérir encore sur ce que la réalité étaloit de merveilles. M. Brunet cite, dans le Manuel du libraire (t. 3, p. 111), une pièce qui montre avec quelle avidité la curiosité du peuple se fit partout un appât des nouvelles qui venoient de ce monde récemment découvert. C'est la traduction que Giuliano Dati fit en vers italiens de la première lettre latine par laquelle Colomb annonça au monde ancien le monde nouveau, M. Libri, qui possédoit cette pièce très rare, dont voici le titre. La lettera (in ottava rima) dellisole che ha trovato nuovamente il re dispagna, etc., pense qu'on la chantoit dans les rues. Quadrio, Storia e ragione d'ogni poesia, Milano, 1739, in-4, t. 4, p. 48, en parle, mais lui donne à tort la date de 1495, au lieu de celle de 1493. Le récit, fait aussi sous forme de lettre, que nous donnons ici, fut peut-être inspiré par le même événement; seulement, ne tirant point comme l'autre ses faits d'une lettre du grand navigateur, il est complétement fabuleux, comme ceux qui couroient depuis long-temps sur les pays gouvernés par le prêtre Jean. Quelques noms de lieux qui ont la prétention d'être des noms espagnols prouvent toutefois qu'il peut s'agir ici des pays que Colomb découvrit et baptisa pour le roi d'Espagne.—La cyté d'Arjel, d'où la lettre est datée, doit être la cité d'Alger.

175: Milieu.

176: Luths.

177: C'est-à-dire d'un bleu vert.

178: Dans les Prodiges de l'Inde, manuscrit cité par M. Berger de Xivrey, à la p. 117 des Traditions teratologiques, il est parlé de femmes barbues qui ont douze pieds de haut et portent une corne au nombril.

179: Dans le précieux volume in-4 gothique possédé par la Bibliothèque impériale: Prestre Jehan à l'empereur de Rome et au roy de France, il est aussi parlé d'animaux à sept cornes. M. G. Duplessis a publié cette légende, d'après les meilleurs textes, à la suite de la Nouvelle fabrique des excellents traits de vérité, Biblioth. elzevirienne, Paris, P. Jannet, 1853. M. Ferdinand Denis en avoit déjà donné un bon texte dans son petit volume: Le Monde enchanté, Paris, 1843, p. 376.

180: Sans doute pour plume.

181: Les éléphants. Voir la légende de Prestre Jehan citée plus haut, et les Traditions teratologiques de M. Berger de Xivrey, p. 407.

182: Dans la légende de Prestre Jehan, les griffons sont des oiseaux qui peuvent, en effet, aller de pair avec les oliphans: «Ils portent bien ung beuf ou un cheval en leur nid pour donner à manger à leurs petiz oyseaulx.»

183: V. aussi, pour une rivière qui descend «de Paradis terrestre et est appelée Syon», le livre de Prestre Jehan.

184: Sorte de musette qui avoit donné son nom à une danse grave dont elle régloit les mouvements.

185: Tradition orientale qui se trouve dans les Mille et une Nuits (histoire des Trois Calanders).

186: C'est ce qui arrivoit au phénix, d'après la légende de Prestre Jehan: «S'en monte vers le ciel sy près du soleil, tant que le feu se prent à ses helles, et puis descend en son nid et se art.»

187: Coupeau, sommet.

188: Dans la zoologie fantastique de tous les peuples se trouve un oiseau gigantesque comme celui dont on parle ici. Les Indiens ont le garouda, les Arabes ont le rokh, dont les Mille et une Nuits content tant de merveilles. «Un jour, lit-on dans la 74e nuit, il s'abattit sur un rhinocéros qui venoit d'éventrer un éléphant d'un coup de corne, et il emporta dans ses serres le vainqueur et le vaincu.»

189: Celui qui est appelé Syon dans la légende de Prestre Jehan, et dont nous avons parlé dans une de nos précédentes notes.

190: C'est l'éternelle fiction des Amazones, qui a parcouru toutes les régions. Selon M. de Humboldt, «elle appartient au cercle uniforme et étroit de rêveries et d'idées dans lequel l'imagination poétique ou religieuse de toutes les races d'hommes et de toutes les époques se meut presque instinctivement.» (Histoire de le géographie du nouveau continent, t. 1, p. 267.)—Dans le De monstris, reproduit par M. Berger de Xivrey dans ses Traditions tératologiques, les Amazones apparaissent aussi sous le nom d'Androginæ, telles que les avoit représentées Pline (liv. 7, chap. 11), telles qu'on les voit ici. La légende de Prestre Jehan en parle aussi: «Et sachez qu'elles se combatent fort, comme si elles fussent hommes; et sachez que nul homme masle ne demeure avecques elles fors que neuf jours, lesquels durant il se peut deporter et solacier avecques elles et engendrer, et non plus, car autrement il seroit mort.»

191: Ce poisson nous semble être tout à fait de la même famille que le fameux Kraken, dont il est tant parlé dans les relations des anciens voyageurs et dans quelques livres de savants, tels que l'Histoire anatomique de Bartholinus, le Mundus mirabilis d'Happelius et le De piscibus monstruosis d'Olaüs Wormius, où il est appelé Hafgufa. C'est le dernier venu de ces poissons merveilleux: il n'y a pas cinquante ans qu'un navigateur prétendit encore l'avoir rencontré dans les mers du Nord, au milieu des îles Orkeney; mais celui-là venoit trop tard, en 1808, pour accréditer son mensonge. La science alors avoit dit son mot sur le Kraken; l'on sçavoit que, sauf les immenses proportions dont l'avoit gratifié la terreur populaire, ce n'étoit autre chose qu'une sorte de sèche gigantesque, appelée sèche à coutelas, qui se rencontre parfois dans les mers du Nord. Le peuple, lui-même, n'y croyoit plus guère en 1808, et je penserois volontiers que le mot craque (mensonge) étoit un souvenir de ce pauvre Kraken dont on lui avoit fait peur si long-temps, et auquel il ne vouloit plus croire. Le comte de Provence, qui auroit pu être l'un des premiers incrédules, fut aussi l'un des derniers qui tâcha de s'en amuser. On connoît l'article qu'il publia dans le Journal de Paris, puis en brochure, sur la grande harpie de mer, appelée Cœleno, nom sous lequel on voulut retrouver une altération de celui de M. de Calonne, le rapace ministre (V. nos articles sur les Rois journalistes, Constitutionnel des 4 et 5 août 1852.) Au temps où parut la pièce donnée ici, l'on croyoit sérieusement à l'existence de poissons de l'espèce du Kraken. Le passage qui motive cette note en est la preuve. Dans le Nova typis transacta navigatio novi Orbis Indiæ occidentalis, etc., livre très singulier décrit par le Manuel, on peut lire le merveilleux récit d'un monstre de cette sorte qui, après avoir soulevé un navire, laisse les marins dire très dévotement la messe sur son dos, puis replonge dans la mer, remettant ainsi le bâtiment à flot sans avaries. Dans un autre curieux ouvrage: Recueil de la diversité des habits qui sont de present en usaige tant ès pays d'Europe, Asie, Afrique et illes sauvages, le tout fait après le naturel par François Deserpz, Paris, 1562, in-8, se trouve le portrait de l'evesque ou moine de la mer, dessiné d'après les dessins de défunt le capitaine Roberval et décrit très sérieusement: car, encore une fois, l'on croyoit alors aux monstres dont on parloit, et l'on ne faisoit pas comme le comte de Provence ou comme l'excellent père Bougeant, de qui, selon Voisenon, la fabrication des monstres étoit l'industrie: «Quand il avoit besoin d'argent pour acheter ou du café, ou du chocolat, ou du tabac, il disoit naïvement: Je vais faire un monstre qui me vaudra un louis. C'étoit une petite feuille qui annonçoit la rencontre d'un monstre très extraordinaire qu'on avoit vu dans un pays très éloigné et qui n'avoit jamais existé.» (Œuvres complètes de Voisenon, t. 4, p. 126.)

192: Prestre Jehan, dans sa légende, conte les mêmes merveilles du pays qu'il habite: «Item, en nostre terre, y a habundance de pain, de vin, de chairs et de toutes choses qui sont bonnes à soustenir le corps humain.»

193: Jean Godard fut l'un des poètes les plus en renom de son temps. Dans les stances ou sonnets mis en tête de ses poésies, l'on ne va pas moins qu'à l'égaler à Ronsard. Il étoit né à Paris en 1564, et mourut en 1630, après avoir été jusqu'en 1615 environ lieutenant général au bailliage de Ribemont. Villefranche en Beaujolois fut le séjour ordinaire de ce poète, qui pourtant, en souvenir de sa ville natale, ne manque jamais de prendre le titre de Parisien. C'est à Villefranche, selon les Mémoires du jésuite Jean de Huissière sur cette ville (1671, in-4, p. 86), qu'il fit tous ses ouvrages, «remarquables par leur mérite et par leur nombre.» Deux pièces dramatiques, la Franciade, tragédie en cinq actes, et les Desguisés, comédie en cinq actes, avec prologue en vers, qui vient d'être réimprimée dans le t. 7 de l'Ancien théâtre françois de la Bibliothèque elzevirienne, sont ce qu'il écrivit de plus considérable. On les trouve dans ses Œuvres poétiques, Lyon, 1594, 2 vol. in-8, avec un grand nombre de pièces en tous genres, odes, élégies, trophées au roi Henri IV, etc. Jean Godard n'a toutefois pas réimprimé dans ce recueil, non plus que dans la seconde édition qu'il en donna à Lyon en 1618, in-8, sous le titre de la Nouvelle muse, ou les Loisirs de Jean Godard, Parisien, la pièce singulière que nous reproduisons ici. C'étoit une œuvre de sa jeunesse, qui pouvoit lui sembler sans intérêt, mais qui n'en a pas moins beaucoup pour nous. L'abbé Goujet la connoissoit, et dans l'article qu'il consacre à notre poète, au t. 15 de sa Bibliothèque françoise, p. 248-249, il la mentionne comme très curieuse, sans toutefois en rien citer, ce que l'abbé Mercier de Saint-Léger lui reproche presque, et avec raison. (V. ses notes mss. sur la Bibliothèque de la Croix du Maine, art. Jacques Godard.) Nous la donnons d'après l'exemplaire que possède la Bibliothèque impériale, et que l'abbé de Saint-Léger ne semble pas avoir connu. Celui qu'il eut entre les mains se trouvoit à la bibliothèque Mazarine, no 21,657. Il a disparu depuis.

194: Jean Heudon, fils d'un riche bourgeois de Paris, étoit l'ami de collége de Jean Godard. Au sortir des études, comme celui-ci manquoit de ressources, il lui étoit venu en aide, et leur amitié s'en étoit augmentée. Godard fit son chemin dans les emplois, et aussi dans la poésie et au théâtre. Heudon souhaita les mêmes succès, et ce fut alors Godard qui lui tendit la main. (V. Hist. du théâtre françois, t. 3, p. 539.) Heudon fut moins heureux: sa réputation n'égala jamais celle de son ami. Ses tragédies de Saint-Clouaud et de Pyrrhe sont détestables, comparées à toutes les pièces de son temps, et en particulier à celles de Godard. Cette inégalité de succès n'altéra point leur amitié. Dans les poésies de Godard, les principales pièces sont dédiées à Jean Heudon (V. t. 2, p. 239, 245, etc.); d'autres sont adressées à son frère Audebert Heudon, à qui Godard semble avoir voué les mêmes sentiments. Tous deux moururent avant lui, laissant chacun un fils, Jean et Thomas, qui héritèrent de l'affection que J. Godard avoit eue pour leur père. Les stances qui terminent la seconde édition de ses poésies, la Nouvelle muse, etc., leur sont adressées, sous ce titre touchant: l'Amitié héréditaire.

195: Écartant avec les bras.

196: Les trois Grâces, Charites en grec.

197: On laissoit aux prélats ces gants ornés de pierreries. Georges Cliffort, comte de Cumberland, enrichit pourtant de cette manière le gant qu'Élisabeth lui avoit donné en signe d'estime. Il s'en fit une parure; dans les tournois, il ne portoit pas autre chose à son chapeau.

198: «Il suit de là, dit l'abbé Mercier de Saint-Léger dans sa note manuscrite déjà citée, que cette fabrique de gants fins à Vendôme existoit en cette ville dès le XVIe siècle. L'abbé Goujet, dans l'extrait qu'il donne de ce petit poème, n'a pas remarqué ce fait.» Dans les Mélanges d'une grande bibliothèque HH, p. 123, l'on avoit déjà constaté l'existence au XVIe siècle d'une fabrique de gants qui avoit pu donner naissance à celle de Vendôme: c'est la fabrique de Blois. «Il est certain, y est-il dit, que l'usage des gants blancs nous est venu d'Italie; cependant, au XVIe siècle, les gants de la fabrique de Blois en France étoient déjà fort renommés.» Savary (Dict. du commerce) parle de ces gants de Blois et de ceux de Vendôme. C'étoit, avec Paris, dit-il, la ville où l'on en fabriquoit le plus de son temps.

199: La réputation des gants de Rome se soutint jusqu'à la fin du XVIIe siècle. M. de Chanteloup chargea souvent Poussin de lui en acheter. Le 7 octobre 1646, celui-ci lui écrit à propos d'une de ces commissions «qu'il y a employé un sien ami, connoisseur en matière de gants.» Du tout il a fait un paquet. «Il y en a, dit-il, une douzaine, la moitié pour les hommes, la moitié pour les femmes. Ils ont coûté une demi-pistole la paire, ce qui fait dix-huit écus pour le tout.» Dans sa lettre du 18 octobre 1649, il écrit encore à M. de Chanteloup qu'il lui a acheté de bons gants à la frangipane, c'est-à-dire de ceux qu'on parfumoit selon la mode introduite du temps de Catherine de Médicis par le comte de Frangipani. C'est, dit Poussin, la signora Magdalena, «femme fameuse pour les parfums», qui les lui a vendus.

200: Le phénix.

201: Dans le Parfumeur royal, par Barbe, parfumeur, Paris, 1689, au chapitre des gants de senteur, on trouve la manière de parfumer les gants avec de la gomme odorante ou des fleurs.

202: Au moyen âge l'on portoit déjà des gants ornés de fils d'or:

Il l'en donna le gant à l'or paré.

(La Chevalerie Ogier de Danemarche, t. 1, p. 103, v. 2489.).

203: Le gant de fauconnier, dit Savary, Dict. du commerce, «est un très gros gant d'un cuir très épais, ordinairement de cerf ou de buffle, qui couvre la main et la moitié du bras du fauconnier pour empêcher que l'oiseau ne le blesse avec son bec ou avec ses serres.»

204: La manchine, manche de la charrue.

205: De lubricus, glissant.

206: C'est-à-dire agile, en liberté. On disoit plutôt encore à delivre, comme dans cette phrase de la 124e nouvelle de Despériers: «N'ayant la langue si à delivre pour se faire entendre.»

207: Le canif. (V. notre t. 1, p. 217.)

208: C'est ce que nous appelons aujourd'hui des mitaines, mot qui autrefois étoit synonyme de mouffle, et qui, au lieu de désigner ces demi-gants de femme, s'employoit pour ces gros gants fourrés qui n'avoient qu'une séparation entre les quatre doigts réunis et le pouce. Ces sortes de gants se vendoient chez les bonnetiers, qui, pour cela, se faisoient appeler mitonniers. (V. le volume déjà cité des Mélanges d'une grande bibliothèque, p. 11 et 121.)

209: Sur ces gants à frange, V. notre t. 3, p. 247. C'étoit un des grands luxes de cette époque. «On lit dans un vieux bouquin imprimé à La Haye en 1604 que les habitants de Cambray, pour recevoir dignement le roi, qui devoit passer par leur ville, eurent l'attention délicate de faire la barbe à un pendu qui étoit exposé aux fourches publiques, et de mettre un gant avec une frange d'or magnifique à une main de bois qui servoit de guide sur le grand chemin de la ville.» (Essai historique sur les modes et la toilette françoise, Paris, 1824, in-12, t. 2, p. 95.)

210: Le meilleur cuir pour les gants venoit d'Espagne. On disoit alors souple comme un gant d'Espagne, proverbe qui a survécu, mais mutilé. (V. Francion, 1663, in-8, p. 63) L'on disoit, lisons-nous dans les Mélanges d'une grande bibliothèque, loc. cit., «que, pour faire de beaux et bons gants, il falloit que trois royaumes y concourussent: l'Espagne, pour préparer et passer les peaux; la France, pour les tailler; l'Angleterre, pour les coudre, parceque les Anglois avoient déjà imaginé des aiguilles particulières pour bien coudre les gants, ce qui est assez difficile.» Du temps de Savary, le proverbe que nous venons de citer n'étoit déjà plus vrai: la France suffisoit pour faire de bons gants.

211: J. Godard auroit en effet encore pu parler des gants de Grenoble, des gants de Niort, qui sont restés célèbres, et d'une espèce de gants appelés gants gras, qui se mettoient pour adoucir les mains. Il en est déjà longuement question dans les Mémoires de La Force, t. 2, p. 457. On les fabriquoit à Ham. «On les appeloit aussi gants de chien, dit Savary, parcequ'ils se faisoient de la peau de cet animal passée en l'huile.»

212: Elle se conserve encore dans quelques villes de province, où l'on donne des gants aux conviés d'une noce ou d'un enterrement. C'est un reste de l'usage des paraguante. V. une note de notre édition du Roman bourgeois, p. 103.

213: Allusion à l'ordonnance de 1539, par laquelle François Ier décida qu'à l'avenir l'on emploieroit la langue françoise dans la rédaction des actes et dans les débats judiciaires. S'il falloit en croire une anecdote bien connue, cette sage mesure lui auroit été inspirée par quelques paroles d'un plaideur, nouvellement arrivé à Paris, que la cour avoit débouté (debotaverat) de son action, et qui se croyoit tout bonnement débotté par elle. (V. Dreux du Radier, Tablettes historiques et anecdotes des rois de France, t. 2, p. 152.)

214: L'abbé Goujet n'avoit pas remarqué ces deux sonnets, dans lesquels se retrouve l'une des préoccupations favorites de Jean Godard: la langue françoise et la grammaire. On a de lui un Discours sur la lettre H, etc.—Au lieu de parler de ces deux sonnets, l'abbé a dit par erreur (Biblioth. franç., t. 15, p. 248-249) que cette pièce du Gant de J. Godard se termine par un sonnet et un sixain de J. Heudon.

215: Nous donnons cette pièce telle que nous l'avons trouvée imprimée, avec toutes ses incorrections et ses vers faux.

216: Le fameux géant Tityus, qu'Apollon et Diane tuèrent à coups de flèches pour le punir d'avoir voulu faire violence à leur mère Latone. Une autre version, suivie ici, nous le représente souffrant doublement le supplice de Prométhée, c'est-à-dire ayant le foie dévoré par deux vautours, en punition du même crime.

217: Pauvres diables, misérables, comme les frères qui sont chargés de préparer les lampes dans les couvents. Telle est du moins l'origine que Fleury de Bellingen donne à ce mot dans son livre de l'Etymologie des proverbes françois. Borel veut que frelampier se soit pris pour charlatan; enfin, selon d'autres, il viendroit du mot frelampe, par lequel le peuple désignoit une petite monnoie de billon valant 12 ou 15 deniers.

218: Interjection affirmative très commune alors chez le peuple. Nous l'avons déjà rencontrée. On disoit aussi ce mon, ça mon. Molière l'a employée sous cette dernière forme dans le Bourgeois gentilhomme, act. 3, sc. 3, et dans le Malade imaginaire, act. 1, sc. 2. M. Paulin Paris en a fait l'objet d'une longue note dans son édition de Tallemant des Réaux, t. 4, p. 84.

219: La pelle.

220: Sorte de petites pincettes dont se servent encore les orfèvres.

221: La désinente eur se prononçoit eux dans la plupart des mots. Aujourd'hui encore les chasseurs disent piqueux pour piqueur.

222: Serge fine et luisante dont les seigneurs s'étoient long-temps vêtus. On la fabriquoit à Reims. C'est une de ces étoffes, si recherchées dès le temps de saint Louis, qu'on trouve appelées par les chroniqueurs serica Remensia.

223: On appeloit les parasites chercheurs de franches lippées. (Le P. Labbe, Etymologie des mots françois.) La Fontaine, dans sa fable du chien et du loup, a aussi employé ce mot de franches lippées pour repas happés gratis, et Regnier, sat. 10, v. 282-285, parle ainsi des gens qui s'en mettent en quête:

L'un en titre d'office exerçoit un berlan,
L'autre estoit des suivants de madame Lippée
Et l'autre chevalier de la petite espée.

224: Dans une pièce de notre t. 1, p. 198, il a déjà été parlé de ces connivences des fripiers avec les voleurs qui infestoient alors Paris, surtout avec la bande des Manteaux-Rouges. De ceux-ci, y est-il dit, on en prit d'une seule raffle vingt-deux «qui estoient à gage et qui jetoient par le soupirail des caves ce qu'ils avoient butiné par la ville.»

225: L'année précédente (1613), à l'occasion du duel entre le baron de Luz et le chevalier de Guise, dans lequel le premier fut tué, il avoit paru une déclaration du roi contre les duels, «avec protestation de n'accorder jamais la grace.» On ne l'avoit pourtant pas encore mise à exécution.

226: Les fripiers garnissoient leurs boutiques avec les défroques des suppliciés, que le bourreau leur vendoit. C'est ce qu'on voit par un passage des Visions du Pelerin du Parnasse, Paris, J. Gesselin, 1635, in-8, p. 121-112, très curieux volume que nous aurions peut-être fait entrer tout entier dans notre recueil, si quelques unes des pièces que nous avons données déjà ne s'y trouvoient à l'état de simples chapitres. Ainsi, l'une de celles qui précèdent, Réglement d'accord sur la préférence des savetiers cordonniers (V. plus haut, p. 41-58), y forme le 19e chapitre. Voici le passage relatif aux fripiers: «S'il (le chaland) estoit si faquin de s'aller habiller en ce païs là, il y auroit danger qu'il ne devint héritier des despouilles de quelque pauvre diable qui huit jours auparavant auroit passé par les mains discrètes du subtil Jean Guillaume.» Jean Rozeau, le bourreau de la Ligue, cet habile homme qui, lit-on dans le Scaligerana, p. 37, «défaisoit fort bien en laissant seulement tomber l'épée», avoit fait comme fit plus tard son successeur Jean Guillaume. C'est même pour s'être trop hâté de pendre le président Brisson, afin de le dépouiller de son riche manteau de peluche, qu'il fut pendu à son tour sous Henri IV. (V. plus haut, p. 52, et Lettres d'Estienne Pasquier, in-fol., t. 2, p. 485).

227: Barbiers-chirurgiens, carabins de Saint-Côme, ainsi qu'on les appeloit. Ils s'occupoient surtout de la cure de ces maladies.

228: C'est Antoine Vitré, l'un des plus fameux imprimeurs de Paris au XVIIe siècle. Il n'y avoit que deux ans qu'il avoit commencé à imprimer quand il publia cette pièce. Le Bruslement des moulins des Rochelois en 1621 est, à ce qu'on croit, la première chose qui sortit de ses presses. Il exerça jusqu'à sa mort, en 1674. Il n'avoit pas moins de 85 ans alors, car en 1670, dans l'avis qu'il donna au sujet de la grande affaire du Pain mollet, pour lequel il eut la collaboration d'un Poquelin, peut-être celle de Molière lui-même, il est dit qu'il a 81 ans. V. notre article Molière et le procès du pain mollet (Revue françoise, 20 juillet 1855).

229: C'est la première fois que nous voyons cet inoffensif oiseau tenir dans les invocations la place de la fameuse poule noire; mais celle-ci interviendra tout à l'heure.

230: Dans le Diable boiteux imité de l'espagnol par Lesage, c'est Asmodée qui joue le même rôle. Celui-ci est un démon bien plus ancien et bien plus célèbre que ce Boël. Il est déjà question de lui dans la Bible. V., pour l'étymologie de ce nom, Revue archéologique, t. 4, 1re part., p. 326.

231: Le livre de Cornelius Agrippa de Nettesheim, De philosophia occulta, si fameux encore au XVIIIe siècle qu'on en publia en 1737 une traduction françoise, 2 vol. in-8.

232: Ce mot se disoit «de certains billets que donnoient les charlatans ou sorciers, et qui, à cause des figures talismaniques dont ils étoient marqués, pouvoient, disoient-ils, produire toutes sortes de prodiges. Il est utile de connoître cette acception du mot caractère pour bien comprendre ce passage du rôle de Crispin dans les Folies amoureuses de Regnard (act. 1, sc. 5):

... Tout le temps de ma vie
J'ay fait profession d'exercer la chymie.
Tel que vous me voyez, il n'est guère de maux
Où je ne sache mettre un remède à propos,
Pierre, gravelle, toux, vertiges, maux de mère.
On m'a même accusé d'avoir un caractère.

233: V. l'une des notes précédentes.

234: De sa compagnie. Ce mot s'employoit pour société, liaison. On lit dans l'Apologie pour Hérodote, par Henry Estienne, «le stratagème duquel usa une femme d'Orléans pour parvenir à son intention, qui estoit d'attirer à sa cordelle un jeune escholier duquel elle estoit amoureuse.»

235: Mortaises.

236: Nous avons déjà dit quelques mots des farceurs qui se firent appeler maître Gonin (V. notre t. 3, p. 53, note); nous allons revenir plus longuement sur leur compte. Le nom de Gonin, qui appartient, plus ou moins modifié suivant les pays, à toute une famille de bouffes italiens, françois, etc., me semble venir de la gonne ou gonnelle, sorte de longue cotte dont ils s'habilloient. Tabarin, farceur de pareille espèce, emprunta ainsi son nom au tabar qui lui servoit de costume, et le Charlatan (Scarlatano), prototype des autres, qui opéroit vers le même temps sur le Pont-Neuf, ne dut d'être ainsi nommé qu'à l'habit d'écarlate dont il étoit vêtu. Dans ce monde de farceurs, c'étoit donc toujours l'habit qui faisoit, sinon l'homme tout entier, du moins son nom. La gonne ou gonnelle dut avoir d'autant mieux ce privilége pour les bouffons dont nous parlons, qu'elle avoit d'abord été robe de moine et d'écolier, et par là tout à fait prédestinée à la malice et aux bons tours. La Fontaine semble avoir eu vent de cette origine quand il a dit, au commencement de son conte de l'Ermite (11, 15):

Gardez le froc, c'est un maître Gonnin.

M. Walckenaer, prenant l'éveil sur ce vers, mit en note: «Le mot gone, en ancienne langue romane, signifioit toutes sortes d'habillements, et surtout une robe de moine. Je crois que le mot gonin en est dérivé.» C'est ce que nous soutenons, en tâchant de le prouver plus complétement. Nous trouvons en Italie, dès le XIVe siècle, un bouffon qui prit ainsi son baptême de la malicieuse robe; seulement, comme on ne l'y désignoit que par son diminutif gonella, c'est aussi par ce diminutif qu'on désigna le farceur: on l'appela Pietro Gonella. Il vivoit à la cour d'un duc de Ferrare, dont il semble avoir été le fou en titre d'office. Ses bouffonneries, qui sont souvent citées dans les Nouvelles de Sacchetti, et dont on fit un recueil dès le commencement du XVIe siècle, le Bufonerie del Gonnella, Firenze, 1515, in-4, coururent toute l'Europe. En Espagne elles étoient si populaires que Cervantes, pour dépeindre d'un trait la maigreur de Rossinante, se contenta de dire, sûr d'être compris, qu'il avoit plus triste apparence que le cheval de Gonéla. C'étoit une allusion à l'histoire, tant de fois rajeunie depuis, de cette pauvre rosse étique et décharnée que notre farceur avoit mise en défi avec le meilleur cheval du duc. Il avoit parié qu'elle sauteroit plus haut: il la fit jeter du haut d'un balcon, et, comme le duc ne se soucia point de l'épreuve pour son cheval, Gonella gagna le pari. Cette popularité du Gonella italien, qui dut se répandre en France plus facilement encore qu'en Espagne, donna sans doute de l'émulation à nos bouffons françois, et fut cause peut-être que, comme ils avoient pris le même habit, ils reçurent à peu près le même nom. Le premier maître Gonin que nous trouvons en France dit ses farces et fait ses tours, souvent fort libertins, à la cour de François Ier. (V. Brantôme, Dames galantes, discours 2, art. 3.)—Il eut, suivant le même écrivain, un petit-fils, qui vivoit sous Charles IX, et qui fut moins habile que lui. Depuis, maître Gonin ne reparoît plus à la cour, ce qui ne l'empêche pas pourtant de se mêler des affaires de l'État. Il est simplement, comme ici, faiseur de pronostications politiques, diseur de bons contes, ou joueur de gobelet sur le Pont-neuf. Sorel, qui le connut sous le règne de Louis XIII, nous a parlé de la grande escarcelle dans laquelle il mettoit ses instruments pour faire ses tours de passe-passe.» (Hist. comique de Francion, p. 177.) Ce sont ces mêmes tours qui ont perpétué sa réputation. Dans la scène 22 de la Maison de campagne, petite comédie de Dancourt, il est encore question des tours de maître Gonin.—Nous le trouvons aussi en Allemagne. Aux noces de la princesse Sophie de Bavière, Gonin, chef des magiciens bavarois, est avalé par Zytho, magicien de Bohême. (Goerres, Hist. du doct. Faust, dans son ouvrage sur les Livres populaires en Allemagne.)

237: L'auteur réunit ici dans une même allusion deux des comédies d'Aristophane, les Nuées et les Oiseaux.

238: Excogitare, penser.

239: Escalader. Ce mot étoit déjà suranné, mais on l'employoit encore quand il s'agissoit de rappeler la lutte des Titans contre Jupiter. «Laissez-le venir, ce géant qui menace d'escheller les cieux», lit-on dans l'Astrée, 4e part., liv. 2.

240: La paix entre la reine mère et les princes mécontents avoit été signée le 15 mai 1614 à Sainte-Menehould. Ce passage, qui nous montre cette pacification comme étant seulement en espérance, nous feroit penser que la Vraye pronostication de maître Gonnin est des premiers mois de 1614. L'édition que nous suivons, et qui porte, comme on l'a vu, la date de 1615, n'est donc certainement pas la première.

241: On disoit devenir bleu, et surtout faire des coups bleus, pour tenter des efforts inutiles, des entreprises qui ne réussissent pas. (Leroux, Dictionnaire comique.)

242: L'auteur suit pour ce mot la mauvaise orthographe adoptée par Bruscambille; c'est matagraboliser qu'il faut lire, comme l'a écrit Rabelais, d'après les trois mots grecs dont il a dérivé cette expression burlesque. (V. liv. 1, ch. 19.)

243: Dans les livres de droit, l'on imprimoit en lettres rouges les titres et les passages importants du texte: c'est ce qu'on appeloit rubriques.

244: Les ravages auxquels il est fait allusion ici, et qu'avoient commis les soldats des princes mécontents, donnèrent lieu à plusieurs écrits, où se retrouvoient les plaintes des habitants de la campagne: La carabinade du mangeur de bonnes gens, 1614, in-8;—Ennuis du paysan champestre, adressé à la reine regente, 1614, in-8;—Discours de Me Guillaume et de Jacques Bonhomme sur la defaite de 35 poules et le coq faite en un souper par 3 soldats, 1614, in-8. Après la paix, d'autres livrets avoient paru dans lesquels éclatoit la joie de ces pauvres gens, délivrés enfin de ceux qui les mettoient au pillage: L'Hymne de la paix chantée par toute la France, par les laboureurs, vignerons et autres paysans qui l'habitent, pour l'assurance qu'ils ont maintenant de paisiblement recueillir le fruit de leurs labeurs;—Le Holà des gens de guerre fait par le messager de la paix... dédié à Monsieur, frère du roy, qui donne la sauvegarde aux paysans..., par Beaunis de Chanteraine, sieur des Viettes, 1614, in-8.

245: V., sur cette expression, la note d'une des pièces qui précèdent.

246: Après les guerres civiles on voyoit souvent les gens du parti vaincu s'exiler volontairement pour aller offrir leurs services aux princes étrangers, ou fonder des colonies, comme les chefs huguenots Laudonnière et de Gourgues l'essayèrent dans la Floride sous Charles IX. En 1614, ceux qui avoient servi sous les princes et que la paix venoit de laisser sans emploi manifestèrent des intentions pareilles, comme ce passage semblerait l'indiquer, et comme on le sait d'ailleurs par l'ordonnance royale qui fut alors rendue pour y mettre obstacle: Lettres-patentes du roi portant defenses à toutes personnes, de quelque qualité et condition qu'ilz soient, de n'enlever aucun soldat hors de ce royaume pour aller servir aucun prince étranger, et enjoint à ceux qui y sont allés de s'en revenir sous peine du crime de lèse-majesté. (22 septembre 1614.) Louis XIV, après la Fronde, persuadé qu'il étoit plus prudent de repousser du royaume ce vieux levain de rebelles que de l'y garder, prit une mesure toute contraire. «On envoya, dit Lemontey, périr à Candie, en Afrique, en Hongrie, les vieux soldats gâtés par la licence des discordes civiles, et le duc de Beaufort, le roi des halles, et le comte de Coligny, qui avoit suivi Condé chez les Espagnols.» (Essai sur l'établissement monarchique de Louis XIV, etc. Paris, 1818, in-8, p. 328.)

247: C'est le prince de Condé, chef des mécontents, comme tout à l'heure Jupiter c'étoit le roi.

248: V., sur cette expression, notre t. 3, p. 276-277.

249: On disoit par abréviation entendre le jars pour entendre le jargon ou argot des voleurs. Il est tout naturel que Mercure sût cette langue-là. Si le duc de Mercœur n'étoit mort en 1602, je croirois que c'est de lui qu'on a voulu parler sous ce nom de Mercure, qui se prononçoit comme le sien.

250: La fougade, foucade ou fougasse, étoit une sorte de petite mine qu'on préparoit sous un ouvrage qu'on vouloit faire sauter. Ce mot s'employoit aussi figurément. On dit encore dans quelques provinces d'une personne qui va par élans et par fougue: elle fait tout par foucade.

251: Il est parlé dans l'Histoire comique de Francion (Rouen 1635, in-8, p. 689) «des anciennes trompettes revenues des guerres» qui gagnoient leur vie à fanfarer sur le Pont-Neuf aux dépens de la bourse et surtout des oreilles du passant. Selincourt se plaignoit en 1633 de ce qu'on n'employât à la chasse que de simples cors au lieu de trompes, «qui, dit-il, se font entendre de plus de deux lieues, et, ajoute-t-il, de ce qu'on a établi une licence de sonner à la manière des maîtres du Pont-Neuf.» Cité par Le Grand d'Aussy, Vie privée des François, édit. Roquefort, t. 1, p. 426.

252: C'est la belle maison bâtie à la fin du XVIe siècle dans la rue de la Barre par Scipion Sardini, gentilhomme italien de la cour de Henri III. Sous Louis XIII cet hôtel devint l'un des hôpitaux des pauvres renfermez «pour les hommes et les garçons», lisons-nous dans le Supplément aux Antiquitez de Paris de Du Breul, p. 46. L'on ne sait pas au juste à partir de quelle époque il reçut cette destination. La Tynna dit, d'après Piganiol (t. 5, p. 122), que ce fut en 1636, M. L. Lazare en 1622; mais la date de notre pièce prouve que dès 1614 la transformation de l'élégant hôtel en hospice avoit eu lieu. Par ordonnance du 27 avril 1636 il fut déclaré, ce qu'il est encore, l'une des propriétés de l'hôpital général. Les bâtiments en sont occupés aujourd'hui par la boulangerie des hôpitaux et hospices civils de Paris. Le nom de Scipion a été conservé et a même passé à la rue de La Barre, où se trouve l'établissement. Le vieil hôtel y survit par quelques restes précieux, six arcades surmontées de médaillons en terre cuite. «C'est, dit M. de Laborde, un curieux spécimen d'un genre de construction dont nous n'avons pas d'autre exemple à citer dans Paris, et d'une décoration qui n'a que trop d'imitateurs dans nos maisons modernes.» (Revue nouvelle, 1er mars 1846, p. 389.)

253: Ovide, au liv. 2 des Métamorphoses.

254: Cette locution est restée, mais diminuée. On dit seulement aujourd'hui de quiconque promet des merveilles: il va tout fendre; d'où le mot fendant pour fanfaron.

255: Le Roman du Renart, publié par Méon, t. 2, p. 24.

256: On joue ici sur le nom du maréchal de Bouillon, qui étoit, avec le prince de Condé, l'un des meneurs des troubles. On a souligné à dessein le nom dans le texte, pour rendre cette allusion plus transparente que toutes les autres qui se trouvent dans cette pièce.

257: Ces quatre vers font partie d'une chanson qui étoit déjà populaire au XVIe siècle, et qui se trouve dans le Recueil que Pierre de Phalèse réimprima à Louvain en 1554. Elle a pour refrain ce vers qui devint proverbe, et que Rabelais cite comme tel (liv. 11, ch. 16):

Faute d'argent est douleur non pareille,

Roger de Collerye a pris cette chanson pour en faire son 71e rondeau. (V. ses Œuvres, édition elzevirienne, p. 223.) Nous allons rétablir d'après lui les quatre vers cités incorrectement ici:

Faulte d'argent n'emplist point la bouteille,
Faulte d'argent rend l'homme tout deffaict,
Triste et pensif, non pas gras et reffaict,
Mais mesgre et sec, tremblant comme la feuille.

258: «Aucun ne pourra être admis à faire apprentissage pour parvenir à la maîtrise de librairie et d'imprimerie s'il n'est congru en langue latine et s'il ne sçait lire le grec, dont il sera tenu de rapporter le certificat du recteur de l'Université, à qui l'aspirant sera présenté par le syndic ou l'un de ses adjoints; et de ladite présentation mention sera faite dans ledit certificat.» (Règlement pour la librairie et imprimerie de Paris, arrêté au conseil d'Etat du roy, Sa Majesté y étant, le 28 février 1723, tit. 4, art. 20.)—«Sera tenu ledit apprenti de remettre ès mains du syndic, pour les affaires de la communauté, la somme de trente livres lors de la passation du brevet, qui sera transcrit sur le livre de la communauté à la diligence du maître auquel l'apprenti sera obligé, et ce dans un mois pour tout délai, à peine de nullité du brevet et des dommages et intérêts de l'apprenti contre le maître.» (Id., ibid., art. 21.)

259: V. la note précédente.

260: Je n'ai pas besoin d'expliquer le sens de ce mot; je dois dire seulement que, pour le rapprocher encore davantage de sa racine, qui est le mot grec προτος, premier, on l'écrivoit quelquefois proto. C'est avec cette orthographe qu'il se trouve dans le Mascurat de G. Naudé, in-4, p. 7.

261: M'accable. V. sur ce mot, alors très suranné, notre t. 3, p. 230.

262: Format de papier au-dessus du carré.

263: Le mont Saint-Hilaire, qui sera nommé plus loin, et sur lequel se groupoient, aux environs de Saint-Benoît et du Puits-Certain, la corporation des imprimeurs, des libraires, et celle des relieurs, qui sont d'ailleurs encore nombreux dans ce quartier. C'est depuis l'arrêté du 1er avril 1620 que les imprimeurs avoient surtout afflué de ce côté. Ordre y étoit donné «à tous imprimeurs de se retirer au dessus de Saint-Yves (rue des Noyers), avec defense de tenir imprimerie et presse en tout autre lieu, sur peine de la vie.» (V. sur ces libraires et imprimeurs du Puits-Certain une note de notre édition du Roman bourgeois, p. 222-223.)

264: Terme d'imprimeur pour dire quereller quelqu'un. (Note de l'auteur.)

265: La place Vendôme, qui n'étoit achevée de bâtir que depuis quelque temps. Les magnifiques hôtels qui l'entourent avoient en effet été envahis par les traitants. Le plus vaste, celui que le ministère de la justice occupe aujourd'hui, étoit habité par Bouvarlais.

266: De tout temps les ouvriers imprimeurs avoient employé entre eux un langage et des signes particuliers, notamment ce qu'ils appeloient le tric, «signal de quitter le travail pour aller boire», dit Saugrain, Code de la librairie, p. 176. Le règlement de 1618, art. 34, le leur avoit interdit: «Sera défendu à tous compagnons imprimeurs et libraires de faire aucunes assemblées, tant en général qu'en particulier, ni de porter aucunes armes offensives de jour ou de nuit, seuls ou en compagnie, et pour quelque cause que ce soit, même de faire aucun tric dans les imprimeries ni ailleurs, etc.»

267: C'est le fonds d'où l'on tire de quoi faire la fripe. (Note de l'auteur.)

268: On lave les caractères avec de l'eau de lessive.

269: On dit aujourd'hui faire tomber en pâte. C'est ce qui arrive lorsqu'une forme s'est rompue par accident et que les caractères en sont tombés pêle-mêle.

270: L'année 1740 avoit été une année de grande disette. Malheureusement, pour y porter remède, on n'avoit guère trouvé que des moyens d'une efficacité aussi douteuse que celui qui donna lieu à cet arrêt singulier. Le 20 mai l'on étoit déjà à bout d'expédients effectifs. Le Parlement, ne sachant où se prendre, avoit rendu arrêt pour faire découvrir la châsse de Sainte-Geneviève, en même temps que l'archevêque donnoit un mandement pour organiser des processions et des prières publiques.

271: V., sur cette expression et sur son origine, notre édition des Caquets de l'Accouchée, page 15, note.

272: C'est-à-dire tondre le maître. Celui-ci s'appelle encore singe dans l'argot des ouvriers.

273: C'est-à-dire au morceau, de la main à la main, sans peser.

274: La Saint-Martin étoit une des fêtes qui amenoient le plus de réjouissances chez le peuple, et par conséquent le plus d'aubaines pour les servantes. C'étoit, pour ainsi dire, le carnaval de l'automne, car ensuite venoient les abstinences de l'Avent, sorte de carême qui se prolongeoit jusqu'à Noël.

275: C'étoient souvent les écrivains publics du Charnier des Innocents qui, moyennant salaire, rendoient aux cuisinières des grandes maisons le service d'arranger leur compte, de faire d'un zéro un huit, ou d'allonger les f pour faire d'un sol un franc. «Nous verrions, dit Palaprat, à la scène 6e, acte 2, d'Arlequin-Phaeton, les Hérodotes du cimetière Saint-Innocent, levez dès la pointe du jour pour travailler avec application aux histoires fabuleuses du maître d'hôtel et de la servante.» (Le Théâtre italien de Gherardi, t. 3, p. 424.)

276: Avoir le teston, tirer le teston, étoit encore le terme consacré pour dire tirer de l'argent, dans le langage des servantes et des valets, quoique le teston fût depuis long-temps une monnoie hors d'usage. On lit dans les poésies du chevalier d'Aceilly sous ce titre, la Clef des bonnes maisons:

Chez certain president à toute heure je vais
Et ne le rencontre jamais.

277: Avoir la clef de la cave, c'étoit toute l'ambition des servantes. Ecoutez ce que dit Pierrot, déguisé en cuisinière, à l'acte 3, scène 1re, de la Précaution inutile: «Tenez, Monsieur, s'il n'y a pas un homme tout luisant d'or dans votre jardin, ôtez-moi la clef de la cave. Dame, voilà un terrible serment, stilà!» (Théâtre italien de Gherardi, t. 1er, p. 487.)

278: Le chevalier d'Aceilly (de Cailly) savoit quel art ont les servantes de faire payer au maître ce qu'elles ont pris soin d'obtenir à bon compte:

Quand ma servante est au marché,
Pour avoir à bon compte elle prend de la peine;
Mais que m'importe qu'elle en prenne?
Quand elle est au logis, rien n'est à bon marché.

279: L'endroit où se vendoit la volaille s'appeloit ainsi déjà, à cause de la Vallée de misère, quai de la Mégisserie actuel, où se tenoit ce marché. Quand il fut transféré où il est encore, sur le quai des Grands-Augustins, il garda ce nom, bien qu'il n'y eût plus de raison de le lui conserver.

280: Restes de viande. Ce mot se trouve souvent dans La Fontaine avec cette acception.

281: On ne souffroit pas que les domestiques fussent sans place. Toute fille de chambre trouvée sur le pavé étoit fustigée, et on lui coupoit les cheveux. Les valets en pareil cas étoient attachés à la chaîne et mis en galère. V. Traité de la police, tit. 9, chap. 3.

282: C'étoit depuis long-temps le profit le plus naturel des filles de cuisine:

Je gaigne douze ecus par an
Sans mon pot à la graisse;
Je mangeons tous les soirs du rost,
Farira lon la, fariran lan lost.

(Le doux entretien des bonnes compagnies, 1634, in-12, chanson 57e.)

283: «Je voudrois bien demander à ces maistres valets où ils peuvent prendre le revenu de s'entretenir de la façon, car ils n'ont pas cinquante livres de rente. S'ils avoient davantage, ils ne serviroient pas. Cependant ils font une despense de plus de mille livres, et n'ont tout au plus que trois cens livres de gage. S'ils ne déroboient que le surplus, ce ne seroit pas grand chose pour faire leur fortune.» (Les amours, intrigues et caballes des domestiques des grandes maisons de ce temps. Paris, 1633, in-12, p. 31.)

284: Pièce très rare. L'exemplaire d'après lequel nous la donnons, et le seul que nous ayons vu, se trouve porté sous le no 2396 du Catalogue de la bibliothèque de M. Coste, Paris, 1854, in-8.

285: Mot qui se trouve dans Montaigne, liv. XI, ch. 12, et qui, de même que le verbe latin diffibulare, dont il étoit dérivé, signifioit dégrafer. On disoit aussi se defuler, saluer. (Danet, Dictionnaire françois-latin.)

286: D'après Goerres (Histoire des livres populaires de l'Allemagne, 1807), l'histoire de Faust n'est que le résumé de toutes les histoires de sorciers; il dit: «De même que Faust, devant l'empereur Maximilien (non pas devant Charles-Quint), évoqua Alexandre le Grand, de même la chronique française raconte que Robert le Diable évoqua Charlemagne.»—L'histoire prodigieuse et lamentable de Jean Faust, traduite par Palma Cayet, avoit rendu ces traditions allemandes très populaires en France.

287: C'est-à-dire parents entre eux, comme Sganarelle étoit médecin de par les coups de baton, baculus.

288: Dans son fameux traité: Declamatio de nobilitate et præcellentia fœminei sexus. Anvers, 1529.

289: Sans doute l'Histoire des martyrs persécutés et mis à mort pour la vérité de l'Evangile, depuis le temps des apôtres jusqu'à présent (1610), comprise en XII livres, trad. du latin (par J. Crispin, et continuée par S. Goulard). Genève, 1619, 2 vol. in-fol.

290: Abeilles.

291: C'est-à-dire aux couvents des quatre ordres mendiants: les Jacobins, les Franciscains, les Augustins et les Carmes.

292: C'est-à-dire au cochonnet, sorte de jeu de boule dont a parlé Rabelais, et qui étoit l'amusement favori des artisans de Paris au XVIIe siècle. Il y avoit sur les remparts, près des portes, des emplacements réservés pour les joueurs au cochonnet et au mail. La rue à laquelle ce dernier jeu a donné son nom étoit encore hors des murs au commencement du XVIIe siècle. Quand l'enceinte fut reculée, les joueurs se transportèrent auprès des nouveaux remparts, sur le terrain qu'occupa plus tard la rue nommée à cause d'eux rue des Jeux-Neufs, puis, par altération, rue des Jeuneurs.

293: Le mal saint Main, c'étoit la gale, qui s'attaque surtout aux mains. Pour une galeuse on disoit une demoiselle de saint Main. (Oudin, Curiosités françoises, p. 494.) Le nom de l'autre patron doit se lire saint Galery, et alors il s'explique de lui-même. Henri Estienne, dans l'Apologie pour Hérodote, et Cornelius Agrippa, De vanitate scientiarum, chap. 57, se sont moqués de ces patronages qui n'avoient d'autre raison que la ressemblance du nom du patron avec celui de la maladie patronée.

294: Coryphée.

295: Faiseur de facéties dont nous publierons quelques vers. L'éloge qu'on trouve ici de lui, et qui n'est rien moins que mérité, nous feroit croire qu'il est peut-être l'auteur de cette pièce.

296: V., sur cette statue mutilée et ridicule qui se trouvoit dans un des coins du chœur de Notre-Dame, une note de notre édition des Caquets de l'accouchée, p. 265.

297: La pyromancie, divination par les mouvements de la flamme. Virgile, dans les Georgiques, liv. 1er, v. 390, nous montre une jeune fille des champs tirant des présages des légers fumerons (fungi) formés autour de la mèche de sa lampe, et aujourd'hui encore les gens de nos campagnes s'attendent à quelque nouvelle lorsqu'ils voient un petit point brillant se détacher tout à coup sur la clarté de leur chandelle.

298: Errinys, la première des Furies.

299: L'espiègle. V., sur ce type, qui avoit été importé d'Allemagne; une note de notre édition des Caquets de l'accouchée, p. 226.

300: Les petits marchands de noir de fumée, ou de noir à noircir, comme ils disoient dans leur cri, étoient très fameux alors dans les rues de Paris, pour le bruit qu'ils faisoient et à cause de leurs habitudes vagabondes. On trouve dans l'œuvre de Laigniet six gravures représentant les aventures de Jean Robert, le plus célèbre de ces vauriens, qui a laissé son nom à la rue qu'il habitoit.

301: Ce mot se prenoit pour bohémien. C'étoit, selon Huet, cité par le Dictionnaire de Trévoux, une altération de blaque vlasque ou valasque; or, on sait que les zingari venoient en grande partie de la Valachie. C'est à cause d'eux que l'argot est appelé souvent patois blesquin. Par extension on disoit encore au XVIIIe siècle faire le blesche, être de mauvaise foi, (V. Th. de Ghérardi, t. 3, p. 147), et l'on employoit dans le même sens le verbe bleschir, aujourd'hui hors d'usage.

302: C'est-à-dire puisque vous avez tout mangé à belles dents, faisant de votre ventre un creuset d'arquemiste.

303: Le plus souvent on disoit seulement piolé, riolé, comme une chandelle des rois (V. Comédie des proverbes, acte 2, scène 5), parce qu'en effet les chandelles ou bougies dont on se servoit le jour de l'Epiphanie étoient teintes de diverses couleurs.

304: L'auteur veut parler sans doute de ce fameux branle de Bretagne qu'on appeloit trikori, et dont il est plus d'une fois question dans les Contes d'Eutrapel. Il se transforma plus tard et devint la danse des tricotet, qui s'exécutoit sur l'air de Vive Henri IV.

305: On sait combien étoient célèbres les danses hautbarroises dont faisoit partie le branle de Metz, par lequel, sous Louis XIV encore, se terminoient les bals de la cour.

306: Sur cette danse, fort à la mode sous Louis XIII et devenue très surannée dans la seconde moitié du XVIIe siècle, où elle n'étoit plus vantée que par les grand'mères, V. une note de notre édition du Roman bourgeois, pages 128-129.

307: V. sur ce mot notre tome 3, page 145, note.

308: Ces valets des jeux de paume, qui marquoient les points et qui essuyoient les joueurs après la partie, s'appeloient naquets. V. Fauchet, Orig. des chevaliers, liv. 1, chap. 1.

309: Lisez: frère Jean des Entommures.

310: M. Brunet (Manuel du libraire, tome 2, p. 103) parle de ce Discours. Après l'avoir décrit, il ajoute: «A cette pièce s'en trouve quelquefois jointe une autre dont voici le titre: Version françoise d'une oraison funèbre faicte sur la mort de la royne d'Ecosse, par le R. P. en Dieu M. J. S., 1587.» Il en indique aussi une réimpression faicte à Anvers en 1589, et mentionnée par M. Œttinger dans sa Bibliographie biographique. Mais ce que ne dit pas M. Brunet, c'est que cette pièce n'est autre chose que la copie presque complète de toute la première partie d'une dépêche que M. l'Aubespine de Châteauneuf, notre ambassadeur près d'Elisabeth, avoit envoyée à Henri III quelques jours après l'exécution, le 27 février 1587, dépêche dont l'autographe est conservé à la Bibliothèque impériale, fonds Béthune, no 8880, fol. 7, et qui reproduit elle-même textuellement un rapport adressé à l'ambassadeur par quelque gentilhomme de sa suite. Une copie de ce rapport, qui a pour titre: Advis sur l'execution de la royne d'Ecosse, par M. de la Chastre, se trouve aux mss. de la Bibliothèque impériale, collect. des 500 Colbert, t. 35, pièce 45. Nous devons la connoissance de ce dernier fait à une note de M. A. Teulet, qui, dans sa belle publication faite pour le Bannatyne club d'Édimbourg: Papiers d'Etat relatifs à l'histoire d'Ecosse au XVIe siècle, t. 2, p. 890-899, a donné dans toute son étendue la dépêche de M. de Châteauneuf. M. Teulet ignoroit l'existence de la pièce imprimée qui en reproduit la partie la plus intéressante. M. Mignet ne semble pas non plus l'avoir connue; il ne la mentionne pas aux divers passages de son Histoire de Marie Stuart (t. 2, p. 353, etc.) où il cite la dépêche de M. de Châteauneuf. Le fait de cette publication d'un papier d'Etat tolérée, sinon autorisée, par le roi, est d'une importance qu'il n'est pas besoin de signaler, surtout lorsque l'on considère qu'il est tout à fait d'accord avec les sentiments de Henri III, en cette circonstance sympathiques pour Marie Stuart, hostiles pour Elisabeth, et tendant à attirer l'intérêt sur l'une et la haine contre l'autre.—Nous reproduisons ici la première édition du Discours. Il est probable qu'elle suivit de près l'arrivée de la dépêche, dont elle est une copie partielle, et qu'elle fut ainsi donnée à Paris vers le commencement de mars 1587. Elle précéda donc la relation du même événement faite par Bourgoin, médecin de Marie Stuart, avec ce titre: La mort de la royne d'Ecosse, douairière de France, où est contenu le vray discours de la procedure des Anglois à l'execution d'icelle, etc. Ce dernier récit, publié dans les premiers mois de 1589, a été repris par Jebb au t. 2, p. 612, de son grand ouvrage: De vita et rebus gestis serenissimæ principis Mariæ Scotorum reginæ. Ces publications faites à Paris sont un fait curieux; elles prouvent l'ardeur de la curiosité populaire à s'enquérir de tout ce qui avoit trait à l'histoire de la femme charmante et infortunée qui avoit été reine de France; elles coïncindent à merveille avec ce que nous savions de l'exposition d'un tableau représentant le supplice de Marie Stuart, qui attiroit une telle foule au cloître Saint-Benoît, où on le faisoit voir, et excitoit de tels murmures d'indignation, que le roi, de peur de quelques troubles, fut obligé de le faire enlever par un ordre dont la copie est conservée à la Bibliothèque impériale (fonds Béthune, no 8897). La vente des petits livres où ce même supplice étoit raconté ne fut certainement pas l'objet de mesures pareilles. Catherine de Médicis et son fils devoient, en bonne politique, l'encourager. La publication de ce récit, pour ainsi dire officiel, qu'ils tolerèrent, je le répète, si même ils ne l'ordonnèrent pas, en est une preuve. Ce qui contribueroit encore à nous le faire croire, c'est le soin qu'ils avoient pris auparavant pour faire disparoître tout ce qui, loin d'apitoyer en faveur de Marie Stuart, tendoit à exciter les haines contre elle. Il se trouve à ce sujet une lettre très intéressante de Catherine de Médicis au président de Thou dans le bizarre recueil publié à Paris, en 1818, sous le titre de: Life of Thomas Egerton, chancellor of England, gr. in-8, non terminé. Voici cette lettre, datée de Blois le 22 mars 1572, et que dut motiver le libelle de Buchanan de Maria Scotorum regina: «Je vous prye vous enquerir doulcement qui est l'imprimeur qui a imprimé ung livre, traduit du latin en françoys, faict à Londres contre la royne d'Escosse, et faire prendre et brûler secrettement et sans bruict tout ce qui se pourra trouver desdicts livres, de sorte que, s'il est possible, il n'en demeure un seul formulaire, faisant faire aussi soubz mains deffences à tous imprimeurs d'en imprimer, soubz telles peines que vous adviserez.»

311: Lisez Fotheringay. Il n'est pas besoin de faire remarquer que tous les autres noms ne sont pas moins affreusement défigurés. Nous allons les rétablir. Il s'agit d'abord de Robert Beale, clerc du conseil, beau-frère du secrétaire Walsingham, et qui fut en effet l'un de ceux qu'Elisabeth envoya pour signifier à Marie Stuart son arrêt de mort; ensuite viennent les comtes de Shrewbury et de Kent, chargés d'assister au supplice, et le comte de Rutland. Aucune relation n'avoit constaté la présence de celui-ci; l'on savoit seulement par le Martyre de la Royne d'Ecosse, etc. (V. Jebb, t. 2, p. 320), qu'après le supplice il avoit paru aux funérailles, soutenant la comtesse de Bedford, qui représentoit la reine d'Angleterre.

312: On lit dans la dépêche: l'exécuteur de cette ville, ce qui se comprend, M. de Châteauneuf ayant daté sa lettre de Londres.

313: Var.: ainsi que j'entends.

314: Var.: des maréchaux. Il y a dans la dépêche une abréviation qui a pu motiver l'autre lecture. Celle-ci naturellement est la bonne. Ce chef de la province est celui que Pasquier, dans son récit de la mort de la reine d'Ecosse, désigne ainsi: «Le Prevost, qu'ils appellent schériff.» (Recherches de la France, liv. 6, chap. 15.)

315: Var.: estoyt.

316: Le docteur Fletcher, doyen protestant de Peterborough.

317: «Au milieu de la salle, on avoit dressé un eschaffaut large de douze pieds, en quarré, et haut de deux, qui estoit tapissé de meschante revesche noire.» (Le martyre de la royne d'Ecosse, etc., dans De vita, etc., de Jebb, tom. 2, p. 306.)

318: André Melvil. Il est nommé Melvin dans presque toutes les relations.

319: Jacques Gervait.

320: Pierre Gorjon.

321: En outre de ceux qui viennent d'être nommés, elle avoit voulu avoir autour d'elle Bourgoing, son médecin, et Didier son sommelier.

322: Var.: Le dit chafault.

323: Ce détail ne se trouve qu'ici. Dans les autres relations, on s'accorde à dire qu'elle n'eut besoin de l'aide de personne. «La reine, dit M. Mignet (t. 2, p. 365), suivie d'André Melvil, qui portoit la queue de sa robe, monta sur l'échafaud avec la même aisance et la même dignité que si elle étoit montée sur le trône.»

324: Var.: là.

325: Suivant tous les autres récits, il n'y avoit là que le doyen de Peterborough, désigné plus haut.

326: Nau et Curl étoient les deux secrétaires de Marie Stuart. Ils avoient été arrêtés lors de la découverte du complot de Babington, et leurs aveux, ceux de Nau surtout, ayant fait convaincre la reine de complicité, avoient achevé de la perdre. Nous ne savons quel est le Pasquier nommé ici avec eux. Nous ne le retrouvons nulle part.

327: Elle parla de Nau avec amertume. Déjà, dans son entrevue avec les comtes de Kent et Shrewbury, ayant appris que Nau vivoit encore: «Quoy! avoit-elle dit, je mourrai et Nau ne mourra pas! Je proteste que Nau est cause de ma mort.»

328: Var.: femmes.

329: C'est Jeanne Kennedy qui lui banda les yeux avec «un mouchoir brodé d'ouvrage d'or... qu'elle avoit spécialement dédié à cet effet», dit Est. Pasquier, d'accord pour ce détail avec le récit de Bourgoin dans Jebb, t. 2, p. 610.

330: Var.: bloc.

331: Var.: de ce.

332: «Bandée, elle s'agenouilla, dit Pasquier, s'accoudoyant sur un billot, estimant devoir estre executée avecques une espée, à la françoise; mais le bourreau, assisté de ses satelittes, luy fit mettre la teste sur ce billot, et la luy couppa avecques une douloire.» D'après le Vray rapport sur l'exécution (Teulet, t. 2, p. 880-881), il paroît que le bourreau n'abattit la tête qu'au second coup; il fallut même, suivant le Martyre de la royne d'Ecosse (Jebb, t. 2, p. 308), qu'il s'y prit à trois fois: «Le bourreau luy donna un grand coup de hache, dont il lui enfonça le attifet dans la teste, laquelle il n'emporta qu'au troisième coup, pour rendre le martyre plus illustre.» D'après notre relation, le supplice n'auroit pas été aussi long, ce qui est d'accord avec un autre récit reproduit dans le recueil déjà cité, Life of Thomas Egerton, et où il est dit que le bourreau lui abattit la tête «assez soudainement».

333: «Il la décoiffa par manière de mespris et dérision, afin de monstrer ses cheveux desjà blancs, et le sommet de la teste nouvellement tondu, ce qu'elle estoit contrainte de faire bien souvent à cause d'un reume auquel elle estoit subjette.» (Le Martyre de la royne d'Ecosse, dans Jebb, t. 2, p. 309.) Etoit-ce par ordre d'Elisabeth que le bourreau agissoit ainsi, et n'y avoit-il pas de la part de la reine d'Angleterre un raffinement de vengeance à faire ainsi montre que cette femme, dont la jeunesse et la beauté l'avoient si cruellement insultée, n'avoit pas échappé plus qu'elle aux atteintes de l'âge et des infirmités? Ce passage, que personne ne cite, méritoit d'être remarqué.

334: Var.: j'ay entendu qu'il.

335: «Le corps fut porté en une chambre joignante celle de ses serviteurs, bien fermée de peur qu'ils n'y entrassent pour luy rendre leur debvoir.» (Le Martyre de la royne d'Ecosse, p. 309.)

336: Henry Talbot.

337: Var.: de ce mois.

338: On lit dans la dépêche de M. de Châteauneuf: «Lequel courier arriva à Grenvich, sur les neuf heures du matin, vers Sa Majesté, le jeudy dix-neuviesme.» Ensuite se trouve ce passage, omis ici: «Je ne sçay si il parla à la royne, laquelle se alla pourmener ce jour à cheval, puis au retour parla longtemps au roy de Portugal. Ledict jour de jeudy, je depeschés à Vostre Majesté pour luy porter ceste nouvelle, laquelle, etc.» Le roi de Portugal nommé ici est D. Antonio, prieur de Crato, alors réfugié près d'Elisabeth, et qui avoit un intérêt indirect dans le dénoûment de ce drame, puisque, lors du dernier complot des agents de Marie Stuart avec ceux de Philippe II, il avoit été convenu expressément que, si l'affaire réussissoit, l'on commenceroit par le livrer lui-même aux mains du roi d'Espagne. La mort de Marie Stuart enlevoit un chef à ces conspirations renaissantes dont il eût été l'une des premières victimes. V. Mignet, Histoire de Marie Stuart, t. 2, p. 288, et notre livre Un Prétendant portugais au XVIe siècle, passim.

339: Pasquier, qui semble avoir réglé sa relation sur celle-ci, reproduit presque textuellement cette dernière phrase. Dans le récit conservé dans le Recueil d'Egerton, il est aussi parlé de ces réjouissances.

340: Ici la dépêche de M. de Châteauneuf continue ainsi: «Voilà tout ce qui s'est passé au vray. Les serviteurs de la dicte dame sont encore prisonniers et ne sortiront d'ung moys, guardés plus estroitement que jamais au dict chasteau de Fotheringay; les trois autres sont prisonniers, toujours en cette ville. Ne se parle pas si on les fera mourir ou si on les delivrera. Depuis la dicte execution, M. Roger et moy avons tous les jours envoyé demander passeport pour advenir Vostre Majesté de la mort de la dicte dame; mais il nous a eté refusé, disant que la royne ne vouloit pas que Vostre Majesté fust advertie de cette execution par autre que par celui qu'elle vous envoyeroit. De faict, ses ports ont esté si exactement guardés que nul n'est sorty de ce royaulme depuis xv jours que un nommé le Pintre, que la royne a despeché à M. de Staford pour advertir Vostre Majesté de la dicte execution.» Dans les quelques lignes qui sont le commencement de la dépêche et qu'on a supprimées dans la pièce imprimée, M. de Châteauneuf s'étoit plaint déjà des obstacles qu'il avoit rencontrés lorsqu'il avoit voulu faire parvenir au roi le récit du supplice de Marie Stuart. «Sire, avoit-il dit, Vostre Majesté sera peut-être estonnée de sçavoir les nouvelles de la mort de la royne d'Escosse par le bruict commun qui en pourra courir à Paris avant que d'en estre advertie par moy. Mais Vostre Majesté m'excusera, s'il luy plaist, quand elle sçaura que les ports de ce royaulme ont esté si exactement guardés que il ne m'a esté possible de faire passer ung seul homme; et si est plus que, ayant obtenu un passeport soubs aultre nom que le mien, celui que je envoyois a esté arresté à Douvres avec son passeport et y est encores à present, bien que je le eusse despeché dès le XIX de ce moys après midy.»

341: «Cette assertion, dit M. Teulet en note, est tirée de l'avis de M. de la Châtre.» Nous en avons parlé plus haut. Après cette phrase, la dépêche de M. de Châteauneuf poursuit pendant plusieurs pages encore. Elle se termine par la signature de l'ambassadeur et par cette mention: De Londres, le XXVII febvrier 1587.

342: Bautru en est l'auteur. Le Cabinet satyrique (Paris, jouxte la coppie imprimée à Rouen, 1633, in-8, p. 619-625), la donne sous ce titre: L'Onosandre, ou la Croyance du Grossier, par le sieur Bautru. C'est contre M. de Montbazon qu'elle est dirigée. Tallemant raconte à ce sujet cette anecdote: «... Le bonhomme avoit su que l'Onosandre étoit une pièce contre lui. La reine-mère accommoda cela, et on dit que, M. de Montbazon, entr'autres choses, l'ayant menacé de coups de pied, il faisoit remarquer à la reine-mère: «Madame, voyez quel pied! que fût devenu le pauvre Bautru?» (Historiettes, édit. in-12, t. 3, p. 102.)

343: Var.:

D'Onozandre le grand ennemy de vos sons.

344: Ceci justifie pleinement le vers des Contreveritez de la cour (V. notre t. 4, p. 337).

Le duc de Montbazon ne parle que latin.

345: Var.:

Qui font que les humains ne vivent de chardons.
Je vous invoque, oyseaux

346: Vives, promptes, gaillardes.

347: Var.: de m'apprester.

348: Var.: la brayante.

349: Pour croyance.

350: Le Basacle est un moulin à eau qui existe à Toulouse depuis plusieurs siècles. Ses ânes étoient fameux par leur force. Nous avons fait une erreur à propos de ce nom dans notre t. 3, p. 71.

351: Ce sont les initiales du nom de M. de Montbazon. M. de Monmerqué en a fait la remarque avant nous dans ses notes sur l'historiette de Bautru (Tallemant, in-12, t. 3, p. 102). Elles ne se trouvent pas dans le Cabinet satyrique.

352: Après ce vers, il y en a deux de passés que nous retrouvons dans le Cabinet satyrique.

Et que là tous les saincts l'on cache tout de mesme
Comme nous le voyons aux temples de Caresme.

353: Ce vers et le suivant ne sont pas dans le Cabinet satyrique.

354: Var.: Judas.

355: Var.: est le.

356: Var.:

Et n'a rien a mespris comme un homme sçavant.

357: Var.:

Il montre à son discours qu'il n'a pas de raison
Et qu'il a le cerveau timbré comme un oison.

358: Var.:

De quelle herbe, quel foin, quel treffle, quel chardon.

359: A la suite de ce vers, il s'en trouve dans le Cabinet Satyrique quatre qui manquent ici. Ils rendent la pièce digne du recueil:

Si tu demande à tous si le paillard Ulysse,
Qui chevauchoit partout, n'eut point la chaudepisse,
Si tu crois un miracle, ayant mille putains,
Que pourtant le grand Turc n'eust jamais les oulains.

360: Var.:

Tel porte la façon d'estre un homme en effect
Et le considerant c'est un asne tout faict.

361: Ce vers et les dix-neuf qui suivent manquent dans le Cabinet satyrique.

362: Nous avons dit déjà, t. 4, p. 337, note 5, pourquoi l'on appeloit M. de Montbazon prince de Béthizy.

363: Var.:

Saphon deifier par les oyseaux des bois.

364: Cette pièce est la contre-partie de celle qui a pour titre: La permission aux servantes de coucher avec leurs maîtres, etc., reproduite dans notre t. 2, p. 237. Elle est conçue dans la même forme et écrite dans le même style. On voit par plusieurs passages qu'elle a positivement été faite pour servir de réponse à l'autre. Je penserois volontiers que toutes deux sont du même auteur.

365: S'égarent.

366: V., sur ce mot, notre t. 2, p. 242.

367: C'est l'Ordonnance de dame Avoye, enjoignant à toutes servantes, chambrières, filles de chambre, etc., de coucher avec leurs maîtres, qui fait partie de la pièce à laquelle celle-ci répond. V. notre t. 2, p. 240.

368: On sait que dans les lices la quintaine étoit le poteau contre lequel on s'exerçoit à jeter les dards ou à rompre la lance.

369: Sur l'usage des masques, même chez les bourgeoises, V. notre t. 1, p. 307, et notre édition des Caquets de l'Accouchée, p. 105.

370: On appeloit ainsi l'espèce de coiffe que portoient les femmes du commun. On disoit aussi scoffion, comme dans ces vers de Ronsard:

Son chef estoit couvert folastrement
D'un scoffion attifé proprement.

On le trouve encore sous cette forme dans les épithètes de de la Porte. Il ne falloit confondre l'escoffion ni avec la calle que portoit sans doute Mme Calette, qui vient de parler tout à l'heure, ni avec la cornette. Scarron le donne à entendre quand il fait dire par un de ses personnages:

Estes-vous en cornette ou bien en escoffions?

Molière s'est servi une fois de ce mot, dans l'Étourdi, act. 5, sc. 14; mais il vieillissoit de son temps.

371: Sur les dommages-intérêts auxquels avoient droit les servantes séduites par leurs maîtres, V. notre t. 1, p. 318-320, note.

372: C'est-à-dire atteint d'épilepsie. On donnoit ce nom de mal de saint à certaines maladies, telles que le mal saint Mathelin, qui étoient placées sous l'invocation de tel ou tel patron. V. Ancien théâtre françois, t. 2, p. 415.

373: Dans les Fantaisies de Bruscambille et dans une pièce du même temps, Complexions amoureuses des femmes, etc., se trouve la même plaisanterie sur les filles qui, par pudeur, se couvrent les yeux avec leur chemise.

374: Nouvelle allusion à la pièce dont celle-ci est la contre-partie.

375: V. l'une des notes précédentes.

376: Cette expression, qui avoit d'abord servi a désigner les jeunes gens de la noblesse qui s'étoient jetés dans la Fronde et qui vouloient faire les maîtres, en haine de Mazarin, ne se prenoit plus, à la fin du XVIIe siècle, que dans le sens qu'elle a gardé depuis. On entendoit par petit-maître ce que nous appellons aujourd'hui un fashionable, un dandy, un lion. Nous connoissons une comédie en un acte, en prose, publiée en 1696, Orléans, Jacob, sous le titre de: les Petits-Maîtres d'été.

377: Il s'agit d'une satire contre les modes des femmes, dont celle-ci est la contre-partie, mais que nous n'avons pas encore pu retrouver.

378: On appeloit ainsi, à la fin du XVIIe siècle, «les falbalas, les franges, les découpures et autres agréments qu'on mettoit aux écharpes des femmes.»

379: C'est à la fin du XVIIe siècle que les cornettes à plusieurs étages devinrent surtout à la mode. Les comédiennes qui jouent Philaminte, Belise, Belène, et quelques autres rôles marqués des pièces de Molière, ont l'habitude de s'en coiffer; c'est un tort: quand Molière mourut, en 1673, il falloit attendre encore quelques années pour voir cette coiffure à la mode.

380: Voir, sur cet abus de la poudre dont on enfarinoit la perruque et le haut des manteaux, le Dictionnaire de Furetière, au mot poudrier. Dans la comédie citée tout à l'heure, il en est aussi parlé. On y voit «ces Narcisses modernes, qui, à l'imitation de l'ancien, avec une perruque tellement chargée de poudre que le juste-au-corps en est enfariné, ne se trouvent jamais devant aucun miroir qu'ils n'honorent de leur image.»

381: Dans l'Eloge des perruques, fait par de Guerle sous le pseudonyme d'Akerlio, à l'imitation du livre du curé Thiers, il est parlé de toutes espèces de perruques, p. 96, note 45.

382: On fit mille contes sur l'étymologie de ce mot, qui, selon Le Duchat, vient de l'allemand Fall-Blatt, mais dont le vieux mot espagnol falda (bord ou pan de robe) est plutôt encore la racine. Un M. de Langlée dit un jour dans une maison que c'étoit un mot hébreu (Caillières, les Mots à la mode, p. 168). Tout le monde le crut sur parole, sauf pourtant deux personnes, qui, pour plus ample explication, crurent devoir s'adresser à l'abbé de Longuerac. «Au commencement de l'invention des falbalas, lisons-nous dans le curieux ana qui fut composé d'après les dits et gestes du savant abbé, deux hommes d'épée que je ne connoissois pas vinrent me voir à Saint-Magloire, et, après bien des compliments, ils me demandèrent ce que signifioit falbala. J'eus beau leur protester que je n'en savois rien, ils me soutenoient que je le savois, parceque c'étoit un mot hébreu qui se trouvoit dans la Bible en hébreu, et qu'on les avoit assuré que je leur expliquerois, et que c'étoit le nom de quelqu'un des habillements du grand prêtre. Langlé, qui avoit inventé ce nom-là, disoit qu'il étoit hébreu, et ils l'avoient cru.» (Longueruana, p. 155.)

383: C'est ce que Furetière appelle des perruques à la moutonne.

384: Pour les perruques du roi d'Espagne Philippe V, on ne prenoit pas indifféremment, comme vous allez voir, les cheveux des riches ou des gueux. «Il y a une difficulté pour les perruques à quoi il faut faire attention, écrit le marquis de Louville au ministre de France: c'est qu'on prétend que les cheveux avec lesquels on les fera doivent être de cavaliers ou de demoiselles, et M. le comte de Benavente n'entend point raillerie sur cela. Il veut aussi que ce soit des gens connus, parcequ'il dit qu'on peut faire beaucoup de sortiléges avec des cheveux et qu'il est arrivé de grands accidents. Vous voyez que l'affaire est de conséquence, et qu'il n'y faut rien négliger.»

385: C'est le séjour assez long que fit la cour à Fontainebleau et qui donna lieu à l'une des pièces publiées dans notre t. 3, p. 217. Elle nous avoit déjà édifié sur les scandales qui le signalèrent, et que Louis XIII, en roi chaste, réprima par la fustigation préalable et par l'expulsion des filles qui avoient suivi la cour.

386: C'est-à-dire ont été fouettées de verges. C'étoit le châtiment des filles publiques jusqu'à la fin du XVIIIe siècle. La Gourdan fut ainsi condamnée à la fustigation en plein carrefour des Petits-Carreaux, près duquel elle demeuroit. V. Corresp. secrète de Métra, t. 2, p. 168, 195.

387: Le parc de la reine Marguerite au faubourg Saint-Germain, longeant le quai Malaquais. V. le t. 1, p. 219, et le t. 4, p. 174, 175.

388: Sans doute la tour de la commanderie de Saint-Jean-de-Latran, place Cambrai. L'enclos dont elle faisoit partie étoit lieu d'asile, et par conséquent encombré d'une foule de gens sans aveu, dont le trop-plein refluoit sur les environs. Lorsqu'on la démolit, il y a deux ans, le quartier sur lequel elle planoit n'étoit pas mieux peuplé. V. notre livre Paris démoli, 2e édit., introd., p. L.

389: On sait que les courtisanes y abondoient. V. une lettre de Gui Patin, 1er octobre 1666. Marigny, dans son poème du Pain béni, nous donne le commissaire Vavasseur comme étant

Des lieux publics grand ecumeur,
Adorateur de ces donzelles
Qui ne sont ni chastes ni belles,
Et qui, sans grace et sans attraits,
Vivent des péchés du Marais.

390: C'était le mot consacré pour dire des verges. De là vient sans doute qu'en argot une canne de jonc s'appelle encore une serviette.

391: «Sorte d'ancienne danse, dit Compan, que l'on croyoit venir des îles Canaries, ou qui, selon d'autres, venoit d'un ballet ou mascarade dont les danseurs étoient habillés en rois de Mauritanie ou sauvages.» (Dict. de danse, p. 41.) Cette danse, avec toutes ses passades et reculades, est décrite dans l'orchésographie de Thoinot Arbeau. «Et notez, y lisons-nous, que lesdits passages sont gaillards, et néanmoins étranges, bizarres, et ressentant fort le sauvage.»

392: «O Dieu! quel desordre! est-il dit dans les Caquets de l'Accouchée (V. notre édit., p. 37)... A quoy servent... tant de commissaires de Chastelet? A prendre pension des garces, des maquerelles, etc.» Le commissaire Vavasseur, nommé dans l'une des notes précédentes, étoit de ceux-là.

393: C'est le plus ancien emploi que nous connoissions de ce mot, condamné plus tard par Vaugelas, mais qui n'en a pas moins fait fortune.

394: Cette petite satire se trouve à la suite des Poésies chrestiennes, contenant la traduction des Hymnes et des Proses non traduites dans les heures de Port-Royal....., par le sieur D***, à Paris, chez Guillaume Valleyre, MDCCX, in-8. Elle a trait à une mode assez profane dont Furetière nous avoit déjà parlé avec détail dans son Roman bourgeois. V. notre édit., p. 31-32.

395: Sur cette nudité de la gorge que les femmes se permettoient, même dans les églises, V. notre t. 3, p. 258, note.

396: Le chevalier de Cailly avoit déjà dit dans une de ses épigrammes:

Aux jours que va quêter la charmante Belise,
Elle furète de l'église
Les quatre coins et le milieu,
Et tous ceux que l'on voit donner à cette belle
Donnent moins pour l'amour de Dieu
Qu'ils ne donnent pour l'amour d'elle.

397: Mademoiselle de Bourdeille quêtoit à Saint-Gervais le jour de la fête patronnale. Le comte de Boursac, son parent, quand elle lui tendit la bourse, y mit ce billet au lieu d'argent:

Quand dans la nef et dans le chœur
Bourdeille eut fait la quête,
Que du troupeau, que du pasteur
Elle eut fait la conquête,
L'Amour, qui la suivoit de près,
Tant elle était jolie,
N'eût pas fait grâce à saint Gervais
S'il eût été en vie.

398: Le P. Sanlecque, dans sa Satire à une mère coquette, a dit:

Que ta fille jamais n'aille dans le saint lieu
Quester des cœurs pour elle et des deniers pour Dieu.

399: Cette petite église se trouvoit rue de la Barillerie, en face du Palais. La salle du Prado, qui fut d'abord le théâtre de la Cité, occupe son emplacement. On avoit beaucoup souffert des troubles dans ce quartier, où se faisoit le commerce des objets de luxe. Le 19 juin 1652, il y eut une requête présentée au Parlement par les marchands, bourgeois et artisans «demeurant tant sur le pont Saint-Michel, au Change, rue de la Barillerie et ès environs du Palais et lieux adjacens, pour qu'on les dechargeat «des loyers qu'ils pourroient «debvoir du terme de Noël à Pasques». Ils donnent pour raison que, «leur traficq ordinaire... ayant cessé, comme il est notoire, ils sont reduits à une disette extrême, joint que la plupart du temps leurs boutiques sont fermées, estant obligés d'avoir les armes sur le dos et faire garde aux portes.» Cette requête a été publiée dans toute sa teneur par l'Investigateur, journal de l'Institut historique, avril 1841, p. 133-134.

400: Cette ville, qui n'est qu'à trente-cinq lieues de Paris, ayant été prise en 1636, la terreur des Parisiens, qui voyoient déjà l'ennemi à leurs portes, avoit été grande. Tout le monde s'étoit armé, et Paris avoit eu bientôt sur pied près de vingt mille hommes, presque, tous laquais ou apprentis. Ceux-ci, que les maîtres avoient été obligés de congédier en vertu de l'arrêt du 13 août, et qui n'avoient plus d'emploi comme artisans, en avoient ainsi retrouvé comme soldats. Les clercs des procureurs et les commis avoient aussi été équipés en guerre. «L'armée de Corbie, dit Tallemant, obligea chaque porte cochère de fournir un cavalier. Mon père équipa un de ses commis pour cela.» (Historiettes, 1re édit., t. 5, p. 151.) V. aussi plus haut, p. 7, note. C'est à ce grand armement que notre armurière avoit fait la fortune qu'on lui reproche ici.

401: Le commerce des marchands de malles est celui qui a toujours prospéré le mieux en ces temps de troubles et de paniques, où tant de gens n'ont que la bravoure de la fuite. Dans le Bourgeois de Paris, pièce d'à-propos en cinq actes jouée au Gymnase, et l'une des meilleures que la révolution de 1848 ait inspirées, l'un des bons rôles est pour un layetier, dont la frayeur des gens pressés de faire leurs malles a de même achalandé la boutique.

402: Si les cabaretiers de la ville étoient parmi les contents, ceux de la banlieue étoient du parti contraire: ainsi la Durié, la fameuse tavernière de Saint-Cloud. Une mazarinade nous a conté ses doléances, les Lamentations de la Durié de Saint-Cloux, touchant le siège de Paris, Paris, 1649, in-4. V. sur elle une note de notre édit. du Roman bourgeois, p. 86.

403: Bimbelotiers, marchands de jouets, bimbale, comme disent les Italiens.

404: Il est question de cette misère des filles de joie dans un grand nombre de Mazarinades. Nous citerons seulement: Ambassade burlesque des filles de joie au cardinal; Dialogue de dame Perrette et de Jeanne la Crotée sur les malheurs du temps et le rabais de leur metier; L'Etat déplorable des femmes d'amour de Paris, la harangue de leur ambassadeur au cardinal Mazarin, et son succès; La famine, ou les Putains à cul, par le sieur de la Valise, chevalier de la Treille, etc...

405: «Envoyer quelqu'un au berniquet, c'est-à-dire le ruiner.» (Leroux, Dict. comique.) Le berniquet est le bahut où les meuniers mettent le son. A l'homme ruiné qui n'a plus de pain sur la planche, il ne reste que la ressource d'aller au berniquet.

406: Les moulins qui étoient amarrés sous le pont au Change et sous le pont Notre-Dame. Ils avoient beaucoup souffert des inondations de la Seine de 1636 à 1641.

407: Pour ce mon, ça mon. Nous avons déjà expliqué le sens et l'origine de cette interjection.

408: Il y eut une Requête des bourgeois de Paris à Nosseigneurs du Parlement touchant la police des vivres, etc., par lequelle il est demandé que le pain soit taxé à six blancs, ou trois sous la livre de pain blanc, deux sous le moyennement bis, dix ou vingt deniers le bis. Un boulanger qui, loin de se soumettre à cette taxe, avoit refusé de vendre du pain à une pauvre femme, mourut les entrailles rongées par de gros vers. C'est du moins ce qui est raconté dans une pièce du temps, La mort effroyable d'un boulanger impitoyable de cette ville. Paris, 1649, in-4.

409: Tous les frippiers passoient alors pour être des Juifs V. notre t. 1, p. 181.

410: V., sur cette parure des petites bourgeoises et surtout des chambrières, notre t. 1, p. 317, et t. 3, p. 106. Pour ce dernier passage, nous avons cité ce qu'on lit dans le dictionnaire de Cotgrave au sujet de cette sorte de ceinture, dont le devant étoit d'argent ou d'or, et l'autre partie de soie. Cette description est fort bien justifiée par ces vers d'une chanson de Jacques Gohorry, qui prouvent en outre que vers le milieu du XVIe siècle le demi-ceint étoit à la mode déjà:

Il vous donnera ceinture,
Demi-ceint ferré d'argent,
Rouge cotte et la doublure
Plus que l'herbe verdoyant.

411: La serge de Rome étoit une étoffe légère qui se fabriquoit à Amiens. On en faisoit les habits longs et les soutanes d'été.

412: Le noyau des prunes de damas gris et de damas blanc se détache facilement.

413: Le même trait se trouve mot pour mot dans le Médecin malgré lui, acte 1, scène 1. Martine se désole d'avoir un mari «qui vend pièce à pièce tout ce qui est dans le logis.—C'est vivre de ménage», répond Sganarelle.

414: Il falloit faire deux chefs-d'œuvre en présence des confrères pour être reçu maître coupeur de bourses. C'est au second, le plus difficile, qu'il est fait allusion ici. L'aspirant, selon Sauval (Antiq. de Paris, liv. 5), étoit conduit par ses compagnons dans un lieu public, comme la place Royale, ou dans quelque église. Dès qu'ils voyoient une dévote à genoux devant la Vierge, ou un promeneur facile à voler, les confrères lui ordonnoient de faire ce vol en leur présence et à la vue de tout le monde. A peine étoit-il parti qu'ils disoient aux passants, en le montrant du doigt: Voilà un coupeur de bourse qui va voler cette personne. Chacun alors de s'arrêter pour l'examiner. Le vol fait, les confrères se joignoient aux passants, se jetoient sur l'aspirant, l'injurioient, le frappoient, l'assommoient, sans qu'il dût oser ni déclarer ses compagnons, ni laisser voir qu'il les connût.

415: Elle veilloit à la sûreté de tout ce quartier, qui n'étoit pas le mieux gardé de Paris. Nous avons ailleurs parlé de Defunctis, prévôt de robe courte, qui commandoit cette compagnie sous Louis XIII. V. notre t. 1, p. 162-163, note.

416: Dans le De officiis, liv. 1, ch. 22.

417: Louis de Brancas, marquis de Cereste. Il étoit né en 1711, et avoit par conséquent alors trois ans au plus. Louis XV, auquel il veut de si bonne heure faire sa cour, le fit maréchal de France en 1740. Il mourut en 1750.

418: Le duc de Bourgogne, dont le Dauphin, qui l'année suivante devoit devenir le roi Louis XV, étoit le troisième fils.

419: Le conte qui va suivre, et qu'on n'auroit pas certainement été chercher sous le titre singulier de cette pièce, est une imitation abrégée d'une nouvelle du Décameron de Boccace (la 7e de la 7e journée), qui procédoit elle-même en grande partie du fabliau de la Borgeoise d'Orléans (v. Barbazan, t. 3, p. 161). Le conte de La Fontaine Le cocu battu et content (liv. 1, conte 3) en vient aussi, de même que l'un des contes de d'Ouville, t. 1, p. 186. M. Edelstand Duméril, dans son curieux chapitre des sources du Décameron et de ses imitations (Hist. de la poésie scandinave, prolégomènes, p. 354), suit ce conte sous ses diverses formes dans les littératures anglaise, italienne, provençale, et même espagnole; il le retrouve dans une vieille romance du recueil Poesias escogidas de nuestros cancioneros y romanceros antiguos, t. 17, p. 178, ce qui prouveroit peut-être que le nom de la ville de Salamanque, en Espagne, n'a pas été indiqué sans quelque motif comme étant le lieu d'impression de cette pièce, et donneroit à croire qu'ici la tradition espagnole a surtout été suivie.

420: Molière, dans l'Avare (acte 2, scène 6), donne aussi, comme signe d'ancienneté reculée cette mode du haut de chausse «attaché au pourpoint avec des aiguillettes».

421: C'est-à-dire ôta les aiguillettes, les lacets qui retenoient ses éperons.

422: Boccace dit qu'il se fit domestique du mari, mais sans indiquer la charge qu'il prit dans la maison. La Fontaine, au contraire, d'accord avec ce qu'on lit ici, soit par hasard, soit parcequ'il connoissoit en effet notre pièce, dit:

Messire Bon, fort content de l'affaire,
Pour fauconnier le loua bien et beau.

423: Ce passage nous donneroit encore à penser que La Fontaine connut cette pièce. Il trouva là le titre de son conte: Le cocu battu et content.

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