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La solitude

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CHAPITRE V.
DES INCONVÉNIENTS DE LA SOLITUDE POUR LES PASSIONS.

Toutes les passions agissent avec plus de force et plus d'impétuosité dans la solitude, parce qu'elles y sont concentrées sur un seul point.

Au milieu d'un calme apparent, les passions couvent sous une cendre trompeuse, lorsque l'homme ne s'occupe que de ses propres idées et exerce son imagination en lui faisant constamment parcourir le même cercle.

Ne vous fiez point à un homme hautain, même lorsqu'il vous paraît solitaire et souffrant, et gardez-vous de l'offenser. Ses passions dorment. Vous pouvez plier un corps élastique, mais soyez prudent; il vous frappera au moment où il ne sera plus comprimé. Pour les hommes portés à la susceptibilité et aux grandes passions, la solitude est dangereuse, car elle excite et développe de plus en plus ces penchants. Toutes nos passions nous suivent dans la solitude. La moindre maladie morale s'y aggrave, parce qu'on se représente vivement et sans cesse ce qui était et ce qui est. Là, on n'oublie rien; là, toutes les vieilles plaies se rouvrent; là, nulle pointe de flèche ne s'émousse. Tout ce qui nous a jadis agité, tout ce qui s'est gravé dans l'imagination nous apparaît alors, ou comme un spectre qui nous poursuit avec une rage infatigable, ou comme un ange qui nous montre à tout instant une félicité céleste.

Dans la morne stérilité des petites villes, où un petit nombre d'hommes oisifs vivent toujours entre eux, la solitude exerce visiblement une fâcheuse influence sur la tête et le cœur. On ne devrait point s'attendre à trouver tant de mouvement et tant d'ardeur au sein d'un tel repos; car, voyez comme les habitants des petites villes sont indolents et désœuvrés, et quel ennui les accable dans leur pauvreté d'idées, quand une fois ils sont sortis de table, qu'ils cessent de jouer ou de disserter sur la politique; rien ne distrait ces braves gens que ce qui se passe dans la rue, et ce qu'ils aperçoivent en se regardant du matin au soir les uns les autres par la fenêtre.

Mais c'est précisément cette disette d'idées qui donne tant de vivacité aux mouvements de passion de ces petits bourgeois. Des circonstances frivoles, des incidents auxquels personne, dans une grande cité, ne prend le moindre intérêt, occupent toute une petite ville, depuis la grande dame jusqu'à la servante, depuis le haut fonctionnaire jusqu'au simple artisan. L'étincelle de l'enthousiasme existe dans l'esprit de tous les hommes; mais, à moins de l'avoir vu soi-même, on ne saurait se figurer combien de choses insignifiantes font éclater cette étincelle dans les petites villes.

Les personnages importants des petites villes ont une effroyable faconde. Que Dieu prenne pitié du jeune homme raisonnable et intelligent qui habite une de ces petites villes dont les graves magistrats n'ont jamais ouvert un livre et ne savent rien!

Lorsque César allait en Espagne, il passa par une bourgade des Alpes où l'on ne comptait qu'un petit nombre d'habitants misérables. Ses amis lui demandèrent en riant s'il était possible que, dans une telle bicoque, on recherchât les emplois publics et les dignités avec autant d'avidité qu'à Rome, s'il s'y trouvait des factions dans le sénat, et si les hommes du pouvoir y étaient également jaloux l'un de l'autre.

Oui, sans doute, on trouve dans les plus petites villes les passions, les rivalités, l'ambition, qui ébranlent les empires les plus considérables; les rôles y sont seulement plus mal joués, et les sottes causeries, et les plus petites susceptibilités deviennent le mobile des plus grands événements. Qu'on se permette d'exprimer le moindre doute sur la beauté, sur l'intelligence, sur le pouvoir, sur les qualités angéliques d'une de ces femmes qui brillent comme le soleil dans une petite ville, il n'en faut pas davantage pour allumer le volcan. Qu'on se laisse aller à la moindre contestation avec l'être le plus insignifiant de cette même petite ville, et l'on fera autant de bruit que le duc de Crillon devant Gibraltar.

Un écrivain anglais prétend qu'il y a moins de calomnie à Londres que dans les petites cités d'Angleterre. Comme il existe à Londres une plus grande quantité d'hommes qui méritent d'être remarqués et blâmés, on se contente ordinairement de signaler leurs folies, et l'on ne s'irrite que lorsqu'on se croit personnellement offensé. Mais dans ces petites bourgades isolées où, pendant une longue suite d'années, les mêmes familles habitent les mêmes maisons, la médisance procède par généalogie, et l'on raconte les fautes de chaque génération en ligne ascendante. J'ai appris dans une de ces villes, dit cet Anglais, comment chaque individu avait acquis sa fortune, et si j'avais voulu croire tout ce qu'on m'exposait à ce sujet, j'aurais dû être convaincu que pas un de ceux dont on me parlait n'était légalement possesseur de ses biens. On m'a conté ensuite les amours de je ne sais combien de fats et de coquettes enterrés depuis plus de trois siècles, et l'on m'a entretenu des infamies de plusieurs personnes dont le nom serait depuis longtemps oublié, si, en le rappelant, on n'espérait porter atteinte à l'honneur de leurs descendants.

Dans les grandes villes, on oublie les gens que l'on hait, parce qu'on ne les voit pas, ou qu'on peut, quand on le désire, éviter de les voir. Dans les petites villes, au contraire, ces gens-là sont à tout instant près de vous, et il faut, d'année en année, supporter ce fardeau. Une vieille femme dévote d'une petite ville de Suisse me disait un jour: «Je ne veux point faire connaître les défauts des méchantes gens de cette ville, car ces gens-là sont incorrigibles; mais ce qui me désole, c'est de penser qu'un jour je ressusciterai avec eux.»

Quand le présomptueux magistrat d'une petite ville s'en va, fier et superbe, promener de côté et d'autre son oisiveté, il est certain que tous les objets se peignent à ses yeux sous une autre couleur qu'aux vôtres et aux miens. L'isolement, l'absence de lumière, la contrainte de la pensée, l'étroitesse de l'esprit, le morne horizon d'un cercle restreint, la pauvreté, l'ambition, l'ennui, la gourmandise, l'influence toute-puissante d'un homme qui n'a d'autre mérite qu'un babil intarissable, font beaucoup de mal et enfantent une quantité de sottises dans les petites villes. C'est une des conséquences funestes de la solitude, et à mesure que je développerai mes idées, on sera surpris de voir avec quelle effrayante énergie les passions peuvent se développer dans la solitude.

L'amour n'agit jamais avec plus de force que lorsqu'on le fuit. Les amants heureux ne connaissent guère la mélancolie de l'amour; mais s'ils rencontrent des obstacles, s'ils essayent d'échapper à ces deux poisons de l'âme, si la froide raison élève sa voix contre l'amour, si deux cœurs qui ne peuvent vivre l'un sans l'autre sont séparés, c'est alors que l'amour éclate avec tout son pouvoir, c'est alors qu'on apprend à connaître l'amour.

Il est plus facile de renoncer au monde qu'à l'amour. On peut s'éloigner des hommes, des réunions joyeuses, de tous les plaisirs que le monde nous offre; on peut, dans les transports de l'amour, oublier l'envie et ses fureurs, les disgrâces, les déceptions, les malheurs de toute sorte; mais on n'oublie point le véritable amour, ce qui a été et ce qui n'est plus, cet accord harmonieux de l'âme et de l'existence détruit par le sort. Tous les charmes de la solitude ne tempèrent point les souffrances de l'amour; toute la nature nous semble triste et désolée quand nous la contemplons avec un cœur malade; des torrents de larmes n'effacent point une seule trace du passé. Nos pleurs ne tarissent pas à l'aspect d'une de ces fleurs des champs que nous cueillions autrefois avec une personne aimée; elles ne tarissent pas sous les rameaux verts des bois, au bord des ruisseaux paisibles. Rien n'apaise les regrets des joies qui ne sont plus, le souvenir d'un songe ravissant.

La solitude ne triomphe pas de l'amour: le berger fait retentir les vallées de ses cris de douleur, et le cénobite inonde sa retraite de ses larmes. Le nom chéri s'échappe à tout instant de nos lèvres: les échos le répètent; on le grave partout, il se place entre Dieu et nous. Le couvent de Saint-Gildas, en Bretagne, était situé sur la cime d'un roc solitaire, baigné par les flots de la mer. Dans cette retraite sauvage, Abeilard voulait oublier son Héloïse au milieu des exercices de la piété, il voulait effacer par ses larmes l'image de la jeune fille; mais sa vertu naissante, sa piété trop faible encore, ne purent le préserver d'un nouvel orage. Il reçoit une lettre d'Héloïse, et à l'instant même son amour se réveille. Héloïse était faible, mais lui se trouvait plus faible encore et plus digne de pitié. Abeilard avait éprouvé avant Héloïse, ainsi qu'on peut le voir dans sa réponse, les salutaires effets de la grâce, mais il étouffa lui-même ce sentiment; il ne répondit point à Héloïse comme un maître, comme un confesseur, mais comme un homme qui a aimé, qui aime encore, qui l'avoue, et qui ne peut consoler celle qu'il regrette en lui racontant ce qu'il souffre d'être séparé d'elle.

La solitude est un poison et non pas un remède pour les amants. Elle est insupportable pour un cœur agité; l'ennui s'accroît dans le silence de la retraite. A Saint-Gildas, Abeilard ne cessait de pleurer; naguère déjà le Paraclet avait retenti de ses sanglots. Condamné comme un captif à une solitude éternelle, il passait ses jours dans les soupirs et ses nuits dans les douleurs. «Au milieu de ces déserts, disait-il, qui ne sont point rafraîchis par la rosée du ciel, on aime ce qu'on ne devrait plus aimer; les passions excitées par la solitude subjuguent l'âme dans ce silence profond, et l'on oublie Dieu, mais jamais l'amour.»

Les lettres d'Héloïse sont douces, caressantes, mais respirent aussi un amour violent et invincible. «Je désire avec ardeur te voir, dit-elle; mais comme je ne puis l'espérer, je veux soulager mon cœur en lisant quelques lignes de ta main.» Héloïse ne demande point à Abeilard des lettres savantes, étudiées, qui portent le cachet de son esprit: elle ne veut que des billets dictés par le cœur, écrits au courant de la plume, et dont la raison ne pèse point les expressions.» Combien je m'abusais, dit-elle, lorsque, te croyant tout à moi, je pris le voile avec la résolution de vivre à jamais sous tes lois. Je m'enfermai dans un cloître pour être à toi, pour te servir. Tu désirais, après ton malheur, que je me retirasse du monde; maintenant, pourquoi te le cacher? ce n'est point par piété que je me suis ensevelie dans ces murs. Je suis dans le cloître, j'y reste, j'y vis; mais si tu ne vis pas pour moi, si tu ne m'aimes pas, si tu ne t'occupes pas de moi, à quoi me sert cette prison? où est ma récompense? Ces chastes vêtements, je les ai pris après notre crime, après ton malheur, et non point par le désir de faire pénitence. Je me tourmente et je lutte en vain: au milieu des fiancées du Seigneur, je suis ta servante; parmi ces nobles esclaves de la croix, je suis une misérable offrande de l'amour humain; je suis à la tête d'une communauté, et je ne vis que pour Abeilard.»

Abeilard répondit à Héloïse: «Arrache-toi à ces restes honteux de ta passion. Hélas! si tu me voyais avec ce visage décharné, ce regard morne et triste, que penserais-tu de mes lâches soupirs et de mes larmes inutiles? Ah! je suis abattu par l'empire de l'amour et non par la croix. Héloïse, plains-moi et délivre-moi de l'amour; je suis un pauvre pécheur qui, dans les moments de grâce où il recouvre sa raison, se prosterne devant son juge, colle ses lèvres sur le sol et baigne la poussière de ses larmes. Pourrais-tu venir, pourrais-tu me voir dans cet état et réclamer encore mon amour? Viens, si tu l'oses, dans tes vêtements religieux, te placer entre Dieu et moi! viens, et empare-toi des pensées que je dois à Dieu seul! viens seconder le méchant esprit et sois l'instrument de sa rage! Quel pouvoir n'as-tu pas sur ce cœur dont tu connais toute la faiblesse! Mais non, fuis-moi, et je suis sauvé! Arrache-moi à la perdition, je t'en prie, je t'en conjure par ton affection qui m'a été si chère, par nos souffrances communes. Ne pas me témoigner de l'amour, ce sera encore de l'amour.»

L'amour luttait plus violemment contre la grâce et la raison dans le cœur de la pauvre Héloïse. Chaque ligne de sa lettre montre l'influence que la solitude exerçait sur son amour: «Dans ce temple de la chasteté, dit-elle, je ne suis couverte que des cendres du feu qui nous a consumés. Je suis une pécheresse, je l'avoue; mais au lieu de pleurer sur mes péchés, je ne pleure que mon amant. Au lieu d'abhorrer mes fautes, je n'éprouve que le désir d'en commettre de nouvelles. Je connais les obligations que mon habit m'impose; mais je ressens bien mieux l'empire—qu'exerce sur une âme sensible—l'habitude d'aimer. Je me sens maîtrisée et vaincue par ce tendre penchant. L'amour égare ma raison et ma volonté. Tantôt je cède aux pressentiments qui s'élèvent en moi; tantôt je laisse aller mon imagination à tout ce qui charme ma tendresse. Aujourd'hui je découvre tout ce que je jurais hier de te cacher à jamais. J'avais pris la résolution de ne plus t'aimer; je m'affermissais dans mes vœux, je regardais mon voile, je me disais que j'étais ici morte et ensevelie. Mais voilà que mon amour dissipe toutes ces résolutions, et jette un nuage sur ma raison et sur ma piété. Abeilard, tu règnes dans des replis si profonds, si cachés dans mon cœur, qu'il m'est impossible de t'y saisir. Si j'essaye de briser la chaîne qui m'attache à toi, tous mes efforts sont inutiles, je ne fais que la resserrer davantage. Par pitié, secours une malheureuse, afin qu'elle renonce, s'il est possible, à ses désirs, à elle-même, à toi. Si tu es mon amant, si tu es mon père, secours ta bien-aimée, ta fille.»

Dans une telle situation, les amants se croient souvent à l'abri des sensations voluptueuses, et la volupté la plus ardente enflamme leur cœur. «Si je n'avais eu pour toi qu'un sentiment de volupté, dit encore Héloïse, lorsque tu es tombé entre les mains de tes bourreaux, j'aurais pu trouver ailleurs une consolation. Je n'avais que vingt et un ans. Quel âge! Combien d'hommes se seraient offerts à moi pour remplacer Abeilard! Et qu'ai-je fait? Je me suis enterrée vivante dans un cloître. J'ai surmonté les désirs de l'amour au temps où ils surmontent tout. A présent, je te conserve encore les restes de ma beauté flétrie, mes nuits de veuvage, mes longs jours que je passe sans toi; et comme tu ne peux plus jouir des jouissances d'autrefois, je reprends tout, et je le donne à Dieu.»

Mais l'amour ne laissait pas plus de repos à Héloïse dans l'abbaye du Paraclet que dans le cloître d'Argenteuil; ce ne fut que vers la fin de sa vie, et après des luttes incessantes, que la pauvre femme recouvra quelque tranquillité.

Cette passion brûlante, ce délire de l'amour, condamnés par la raison et par la morale, se développent dans le cœur d'Héloïse et d'Abeilard par l'effet de la solitude et de la séquestration du monde; et cet exemple et d'autres que nous pourrions citer prouvent assez combien la solitude est dangereuse pour un amour qui ne respire que la volupté.

Pétrarque, dont l'amour était d'une nature plus délicate que celui d'Héloïse, a éprouvé comme elle que l'amour touche de près à la mélancolie, car il a bien souffert de cette passion. A la fleur de l'âge, il s'en alla près de la source de Vaucluse chercher un refuge pour ses douleurs. «Mais, hélas! dit-il, je ne savais ce que je faisais; je ne pouvais trouver le secours dont j'avais besoin. Partout je portais avec moi mes inquiétudes cruelles. Seul, délaissé, sans appui, je souffrais plus dans ma retraite qu'en tout autre lieu. Sans cesse, dévoré par l'amour, j'exhalais dans les vallées ces soupirs et ces plaintes que l'on a entendus partout et dont on a trouvé le son agréable.»

L'amour était dans l'âme de Pétrarque un noble combat de la vertu, une volupté du cœur élevée au-dessus des désirs terrestres, une douce mélancolie, une harmonie céleste. Dans le cœur d'Héloïse et d'Abeilard, c'était une effervescence impétueuse, c'était le bouillonnement d'une ardeur sensuelle.

Les besoins de l'amour ne sont souvent que l'effet de l'imagination, l'illusion d'un esprit malade. Pour pouvoir vous vaincre vous-même, sachez vaincre votre imagination; c'est elle qui porte le trouble dans vos sens; que de fois ils seraient calmes si vous parveniez d'abord à la calmer elle-même!

«On ne peut étouffer les besoins de l'amour,» disait une femme allemande. Mais en observant des jeunes gens qui adoptaient cet axiome, j'ai pu reconnaître toutes les victoires que l'homme est capable de remporter dans cette lutte, quand il a une ferme volonté. Un visage languissant, un regard abattu, des joues caves, des mains tremblantes, ne m'ont que trop souvent révélé que la chasteté est la première des règles et le plus efficace des remèdes pour les jeunes gens qui se figurent qu'ils ne peuvent comprimer les besoins charnels de l'amour. Je puis dire à ces jeunes gens avec Rousseau: «Si jamais objet lascif n'eût frappé nos yeux, si jamais idée déshonnête ne fût entrée dans notre esprit, jamais peut-être ce prétendu besoin ne se fût fait sentir en nous, et nous serions demeurés chastes, sans tentations, sans efforts et sans mérite.»

Il n'y a rien de plus dangereux pour les hommes enclins à cette maladie morale que la solitude, et surtout la solitude oisive. Les idées obscènes les poursuivent là, et les surprennent au milieu de leurs meilleures résolutions.

Par l'effet de la retraite, de l'oisiveté, une tête ardente peut être portée à toutes les erreurs imaginables, à tous les vices, à tous les crimes. L'oisiveté seule, au milieu de la vie morale, est pleine de dangers signalés dans tous les temps. Les anciens législateurs connaissaient ce redoutable écueil: Dracon et Pisistrate frappaient de la peine de mort la paresse et l'oisiveté, afin d'assurer, par cette rigueur de la loi, la tranquillité des villes, et d'établir l'activité dans les campagnes. Périclès envoya des colonies dans la Chersonèse, à Andros, dans la Thrace et en Italie, pour purger Athènes d'une foule de citoyens que l'oisiveté rendait chaque jour plus suspects et plus dangereux. Nos désirs frivoles, nos faux besoins, sont en un certain sens un bienfait pour les grands États par l'occupation qu'elles donnent, dans les cités populeuses, à une multitude d'ouvriers. Pour mettre Londres en combustion, il suffirait de détourner pendant une semaine le peuple de ses travaux journaliers; bientôt on verrait l'immense cité désolée, ravagée par la rébellion aux lois, la guerre civile, la flamme de l'incendie.

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