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Le cycle du printemps

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ACTE QUATRIÈME

PRÉLUDE DE CHANT

(Une troupe de jeunes gens qui personnifie le renouveau de toutes choses, entre en chantant.)

CHANT DE LA JEUNESSE REVENUE

A nouveau et toujours nous disons « Adieu »,

Pour toujours à nouveau revenir.

Oh, qui êtes-vous ?

Je suis la fleur Vakul.

Et vous, qui êtes-vous ?

Je suis la fleur Parul.

Et qui sont celles-ci ?

Nous sommes les fleurs du Mango débarquées au rivage de lumière.

Nous rions et partons quand le temps nous fait signe.

Nous nous précipitons dans les bras de l’éternel retour.

Mais qui êtes-vous ?

Je suis la fleur Shimul.

Et vous qui êtes-vous ?

Je suis la grappe de Kamini.

Et qui sont celles-ci ?

Nous sommes la foule turbulente des feuilles nouvelles.

(L’hiver se révèle en Printemps et répond aux questions posées par le cœur des jeunes choses.)

CHANSON DES FARDEAUX TOMBÉS

T’avoues-tu vaincu par la main de la jeunesse ?

Oui.

As-tu enfin trouvé le vieillard sans âge qui toujours redevient jeune ?

Oui.

As-tu franchi les murailles qui tombent en poussière et qui écrasent ceux qu’elles abritent ?

Oui.

(Un autre groupe chante.)

Acceptes-tu ta défaite au profit de la vie ?

Oui.

As-tu passé à travers la mort, pour te trouver enfin face à face avec l’éternité ?

Oui.

As-tu abattu le démon poussière qui engloutit ton immortelle cité ?

Oui.

(Les fleurs du Printemps l’entourent et chantent.)

CHANT DE LA FRAICHE BEAUTÉ

Nous attendions sur le bord de la route, comptant les heures jusqu’à ton apparition dans un matin d’Avril.

Tu viens comme un jeune soldat vainqueur de la vie aux portes de la mort.

Oh ! Quel émerveillement !

Éblouis, nous écoutons la musique de ta jeune voix.

Ton manteau flotte au vent comme le parfum du Printemps.

La guirlande blanche des fleurs de Malati brille dans tes cheveux comme une grappe d’étoiles. Un feu brûle sous le voile de ton sourire.

Oh ! quel prodige !

Et qui sait où tu caches les flèches dont tu frappes la mort ?

(La nuit vient.)

(L’arrière-scène s’assombrit, et la scène principale est tristement plongée dans la pourpre et le noir du deuil.)

(Entre une bande de jeunes gens.)

Chandra est reparti, nous laissant en arrière.

Il est difficile de le faire rester tranquille.

Nous trouvons le repos en nous asseyant, mais lui ne se repose qu’en marchant.

Il a traversé la rivière avec le ménestrel aveugle, dans la profonde cécité duquel il cherche l’invisible lumière, et qu’il nomme le « Sondeur de l’Abîme ».

Notre vie devient entièrement vide quand Chandra est parti.

Cependant sentez-vous comme si quelque chose était dans l’air ?

Le ciel semble nous regarder comme un ami qui nous dirait adieu.

Ce petit ruisselet coule doucement à travers ce bosquet de casuarina. Ce sont comme les larmes de la nuit.

Jamais nous n’avions contemplé la terre avec autant de ferveur.

Quand nous courions à grande allure, nous regardions devant nous et nous ne voyions rien sur les côtés.

Si les choses ne marchaient pas et ne passaient pas nous ne verrions de beauté nulle part.

Si la jeunesse n’avait que l’ardeur du mouvement, elle se dessécherait et se flétrirait ; mais elle a aussi des pleurs cachés qui la rafraîchissent.

Le cri du monde n’est pas seulement « J’ai » mais aussi « Je donne ». Dans la première aube de la Création « J’ai » fut fiancé à « Je donne ». Si cette union était rompue tout irait à la ruine.

Où ce Ménestrel aveugle va-t-il nous conduire ?

Dans le ciel, les étoiles au-dessus de nous semblent les regards d’yeux sans nombre que nous aurions connus aux âges disparus. A travers les fleurs, semble venir le soupir de ceux que nous avons oubliés et qui nous disent — Souvenez-vous de nous.

Nos cœurs se briseront si nous ne chantons pas.

(Ils chantent.)

As-tu laissé derrière toi ton amour, mon cœur, et perdu la paix pour le reste de tes Jours ?

Et le chemin que tu parcourais est-il lui aussi perdu et oublié rendant ton retour sans espoir ?

Je vais errant et écoutant le babil du ruisseau et le bruissement des feuilles.

Et il me semble que je vais trouver le chemin qui mène au pays des amours perdues par delà les étoiles de la nuit.

Quel chant étrange se fait entendre ! Il semble venir de la musique du Printemps.

Il ressemble au chant des feuilles jaunies.

Secrètement et sans arrêt, le Printemps a amassé ses larmes pour nous.

Il craignait qu’à cause de notre jeunesse nous ne comprenions pas.

Il voulait nous séduire avec son sourire.

Mais, ce soir, nous voulons endormir nos cœurs dans la nostalgie de l’autre rivage.

Ah ! Terre chérie ! Terre magnifique ! Elle veut tout ce que nous avons : Le toucher de nos mains. Le chant de nos cœurs.

Elle veut tout avoir de nous, même ce que nous ignorons de nous.

Son chagrin est d’avoir découvert assez de choses pour comprendre qu’elle n’a pas tout découvert.

Ah ! Terre chérie ! jamais nous ne te renierons.

(Ils chantent.)

Avant de m’en aller je te couronnerai avec ma guirlande.

Toujours tu m’as parlé dans mes peines et dans mes joies.

Et à présent, à la fin du jour, mon cœur éclate en paroles :

Les mots me viennent, mais non la chanson et cette chanson que jamais je ne t’ai chantée reste cachée sous mes larmes.

Frère, ne te semble-t-il pas que quelqu’un vient de passer par ici ?

Tu crois toujours sentir passer quelqu’un.

J’ai senti le frôlement du manteau d’un passant.

Nous sommes sortis espérant capturer quelqu’un et à présent nous aspirons à être capturés nous-mêmes.

Ah ! voici le Ménestrel. Où nous as-tu conduits ?

Ici le souffle du monde voyageur nous a touchés — le souffle du ciel étoilé.

Nous étions venus pour chercher un nouveau genre de spectacle. Mais à présent nous avons oublié ce que nous cherchions.

Nous voulions attraper le vieil homme et tout le monde nous disait qu’il était terrifiant à voir ! Une tête sans corps, une bouche béante ; un dragon prêt à avaler avec la lune la jeunesse du monde. Mais à présent nous n’avons plus peur ; les fleurs poussent, les feuilles s’ouvrent, les vagues de la rivière marchent, et nous ferons de même.

Ah ! Ménestrel aveugle, prends ton luth et chante pour nous.

Qui sait quelle est l’heure de la nuit ?

(Le Ménestrel chante.)

Je veux tout donner sans qu’on me le demande, à celui à qui le monde se donne tout entier.

Quand je vins à lui pour mon offrande, je n’avais nulle crainte.

Et je n’aurai pas peur quand j’irai à lui pour lui rendre tout ce que j’ai.

Le matin accepte son or en chantant.

Le soir lui rend sa dette d’or avec bonheur.

La joie de la fleur éclose se change en fruit, avec la chute des feuilles.

Hâte-toi mon cœur, et dépense-toi en amour avant que le jour soit terminé.

LES JEUNES GENS. — Ménestrel, pourquoi Chandra est-il encore absent ?

MÉNESTREL. — Ne savez-vous pas qu’il est parti ?

Parti ? où ?

MÉNESTREL. — Il a dit : Je dois m’en aller pour le conquérir.

Qui ?

MÉNESTREL. — Celui que tout le monde craint. Il a dit : A quoi, autrement, servirait ma jeunesse ?

Ah ! Ceci est fameux ; Dada part pour lire ses quatrains aux gens du village et Chandra disparaît sans qu’on sache pourquoi.

MÉNESTREL. — Il a dit : Les hommes se sont toujours battus pour une cause ou pour une autre, et c’est le choc de cette bataille qui trouble les souffles du Printemps.

Le choc ?

MÉNESTREL. — Oui, celui qui annonce au monde que les combats des hommes n’ont pas encore pris fin.

Est-ce là le message du printemps !

MÉNESTREL. — Oui. Ceux qui par la mort sont devenus immortels ont envoyé leur message dans les fraîches feuilles du printemps. Ce message nous dit ; nous n’avons jamais douté du chemin, nous n’avons jamais calculé la dépense. Nous nous sommes élancés, nous nous sommes épanouis. Si nous étions restés assis à discuter, où serait le Printemps ?

LES JEUNES GENS. — Serait-ce ce message qui aurait rendu Chandra fou ?

MÉNESTREL. — Il a dit :

(Le Ménestrel chante.)

Les fleurs du Printemps ont tissé ma couronne de victoire.

Le vent du sud souffle son haleine de feu dans mon sang.

Il pleure en vain derrière ma maison.

La mort se tient devant moi m’offrant sa couronne.

La tempête de ma jeunesse fait vibrer la harpe du ciel.

Mon cœur danse au sein de ce rythme sauvage.

Prendre et économiser n’est pas pour moi. Je dépense et je jette au vent.

La prudence et le confort au désespoir me disent :

Adieu.

JEUNES GENS. — Mais où a été Chandra ?

MÉNESTREL. — Il a dit : Je ne puis rester plus longtemps à attendre au bord de la route. Il faut que je parte pour le rencontrer et le conquérir.

Mais quel chemin a-t-il pris ?

MÉNESTREL. — Il est entré dans la caverne.

Comment cela ? Il y fait si terriblement sombre. A-t-il, sans s’informer…

MÉNESTREL. — Oui, il y est allé pour s’informer lui-même.

Quand reviendra-t-il ?

MÉNESTREL. — Je ne crois pas qu’il revienne jamais.

Mais alors si Chandra nous quitte, la vie ne vaut plus la peine d’être vécue.

Que dirons-nous à notre Maître ?

Notre Maître aussi nous quittera.

N’a-t-il laissé aucun message pour nous avant de partir ?

MÉNESTREL. — Il a dit : Attendez-moi, je vais revenir.

Revenir ? Mais comment le saurons-nous ?

MÉNESTREL. — Il a dit : Je vais le conquérir, puis je reviendrai.

Alors nous l’attendrons toute la nuit.

Mais, Ménestrel, où devons-nous l’attendre ?

MÉNESTREL. — Devant cette caverne d’où l’eau s’épanche.

Quel chemin a-t-il pris pour arriver là ?

La nuit de cette caverne est comme un fourreau d’épée.

MÉNESTREL. — Il a suivi le bruit des ailes d’un oiseau de nuit.

Pourquoi n’es-tu pas allé avec lui ?

MÉNESTREL. — Il m’a laissé ici pour que Je vous donne de l’espoir.

Quand est-il parti ?

MÉNESTREL. — A la première heure de la nuit.

La troisième heure vient de sonner, je crois. Il y a une fraîcheur dans l’air.

L’UN DES JEUNES GENS. — J’ai rêvé que trois femmes aux cheveux défaits…

Oh ! laisse-nous avec tes rêves de femmes. Nous sommes las de tes rêves.

Tout paraît sombrement sinistre. Jusqu’ici je n’avais pas fait attention au ululement du hibou. Mais à présent…

Entendez-vous ce chien hurler au loin sur la berge de la rivière ?

Il semble qu’une sorcière montée sur lui le flagelle.

Sûrement, s’il avait pu, Chandra serait revenu à cette heure.

Combien je voudrais voir finir cette nuit.

Entendez-vous ce cri de femme ?

Oh ! Les femmes, les femmes, elles ne savent que pleurer et gémir. Mais elles ne peuvent faire revenir en arrière ceux qui sont partis en avant.

Cela devient insupportable de rester ainsi tranquillement assis.

Les hommes quand ils sont tranquilles imaginent toutes sortes d’histoires. Partons aussi. Dès que nous marcherons la peur et l’inquiétude nous quitteront.

Mais qui nous montrera le chemin ?

Il y a le ménestrel aveugle.

Qu’en dis-tu Ménestrel ? Peux-tu nous montrer le chemin ?

MÉNESTREL. — Oui.

Nous n’osons presque pas te croire. Comment peux-tu simplement en chantant nous montrer le chemin ?

Si Chandra ne revient pas, toi, tu reviendras.

Nous ne nous doutions pas que nous aimions Chandra si passionnément. Tous les jours il était notre lumière.

Quand nous étions en train de jouer, nous étions si captivés par notre jeu que nous en oublions notre compagnon et notre maître.

Mais à présent s’il revient nous ne l’oublierons plus jamais.

J’ai peur que bien souvent nous lui ayons fait de la peine.

Mais son amour à lui s’élevait au-dessus de tout cela.

Nous ne réalisions pas combien beau et bon il était quand nous pouvions le voir tous les Jours.

(Ils chantent.)

Quand il y avait de la lumière dans mon univers Je ne te voyais pas.

Maintenant qu’il n’y a plus de lumière, tu viens dans mon cœur.

Quand j’avais des poupées, je jouais ;

Tu me souriais et de la porte tu veillais sur moi.

A présent que mes poupées sont tombées en poussière,

Tu viens et tu t’assieds à mon côté.

Et je n’ai plus que mon cœur pour chanter, maintenant que les cordes de mon luth sont cassées.

UN JEUNE HOMME. — Ce ménestrel reste assis là si tranquille et silencieux — je n’aime pas cela.

Il a un aspect sinistre, comme les lourds nuages d’automne.

Tâchons de le faire partir.

AUTRE JEUNE HOMME. — Non, non, de le voir assis là cela me donne du courage.

Ne voyez-vous pas qu’il n’y a aucune trace de peur sur son visage ?

Des messages semblent frapper son front. Son corps paraît découvrir quelqu’un dans le lointain. On croirait qu’il a des yeux au bout des doigts.

Rien qu’en le regardant nous comprenons que quelqu’un vient à nous dans la nuit.

Regardez ! il se lève. Il se tourne vers l’est, et salue.

Cependant on ne voit rien pas même une raie de lumière.

Pourquoi ne pas lui demander ce qu’il voit ?

Non, ne le dérangez pas.

Savez-vous, il me semble qu’une aurore se lève en lui.

Comme si un grand bac de lumière avait atteint la berge de son front.

Son esprit est aussi paisible que le ciel du matin.

Maintenant va éclater le tumulte du chant des oiseaux.

Il prend son luth. Son cœur chante ?

Chut ! Il chante.

(Le ménestrel chante.)

Victoire à toi, victoire à jamais brave cœur.

Victoire à la vie, à la joie, à l’amour, à l’éternelle Lumière.

La nuit passera : l’obscurité s’évanouira.

Aie confiance, brave cœur.

Réveille-toi du sommeil et de la langueur du désespoir.

Reçois en chantant la lumière de la nouvelle aurore.

(Un rayon de lumière voltige devant la caverne.)

Ah ! le voici ! Chandra ! Chandra !

Chut ! Ne faites pas de bruit, je ne le vois pas encore distinctement.

Oh ! Cela ne peut être que Chandra.

Oh ! Quelle joie !

Chandra ! Viens !

Chandra, comment as-tu pu nous laisser si longtemps ?

As-tu réussi à capturer le Vieil Homme ?

CHANDRA. — Oui, je l’ai capturé.

Mais nous le voyons pas.

CHANDRA. — Il vient.

Mais qu’as-tu vu dans la caverne ? dis-nous.

CHANDRA. — Non, je ne peux pas vous le dire.

Pourquoi ?

CHANDRA. — Si mon esprit était une voix alors je pourrais vous le dire.

JEUNES GENS. — Mais l’as-tu vu en le capturant ? était-ce bien le Vieil Homme du Monde ? Ce Vieil Homme qui voudrait dans sa soif insatiable boire l’immense mer de la jeunesse ?

Celui qui ressemble à la sombre nuit, qui a les yeux fixés sur la poitrine, les pieds tournés en dedans et qui marche à reculons ?

Celui qui porte sur la tête une couronne de crânes et qui habite le souterrain brûlant de la mort ?

CHANDRA. — Je ne sais pas. Je ne peux rien vous dire. Mais il vient, vous le verrez.

MÉNESTREL. — Oui, je le vois.

(La lumière augmente peu à peu sur la scène, et finit par l’éclairer d’un vif éclat.)

Où ?

MÉNESTREL. — Ici !

Il sort de la caverne.

Quelqu’un sort de la caverne.

Quel prodige !

CHANDRA. — Comment c’est toi ! Notre Maître !

Notre Maître !

Notre Maître !

Où est le Vieil Homme ?

LE MAÎTRE, — Il n’est nulle part.

Nulle part ?

LE MAITRE. — Nulle part.

Alors quel est-il ?

LE MAITRE. — Il est un rêve.

Alors c’est toi qui es la Réalité ?

LE MAITRE. — Oui.

Et nous aussi nous sommes la réalité ?

LE MAITRE. — Oui.

Ceux qui t’ont vu par derrière t’imaginent sous toutes espèces de formes.

A travers la poussière nous ne te reconnaissions pas.

Tu nous paraissais vieux.

Mais tu es sorti de la caverne et à présent tu parais être un jeune homme.

Il nous semble que nous te voyons pour la première fois.

CHANDRA. — Vous croyez toujours que c’est la première fois ; vous le croyez indéfiniment.

LE MAITRE. — Chandra ! Tu dois avouer ta défaite ; tu n’as pas pu capturer le Vieil Homme.

CHANDRA. — Commençons notre fête ; le soleil est levé ; Ménestrel, si tu restes si tranquille, tu vas t’endormir. Chante quelque chose.

(Le Ménestrel chante.)

Je te perds pour te retrouver encore et toujours,

Mon bien aimé.

Tu me quittes pour que je puisse t’accueillir davantage quand tu me reviens.

Tu ne disparais derrière l’écran du temps que parce que tu es à moi pour l’éternité.

Quand je vais à ta recherche, mon cœur tremble, soulevant les vagues de mon amour.

Tu souris sous ton déguisement d’absent.

Et mes larmes rendent doux ton sourire.

Entendez-vous ce bourdonnement ?

Oui.

Ce ne sont pas des abeilles, ce sont des gens sur la place.

Alors Dada doit être tout près avec ses quatrains.

DADA. — Est-ce ici le Maître ?

Oui, Dada.

DADA. — Oh, je suis bien heureux de vous voir. Je vais lire ma collection de quatrains.

Oh ! Non, non, pas toute la collection, un quatrain seulement.

DADA. — Soit. Je n’en lirai qu’un :

Le soleil est à la porte de l’Orient ;

Son tambour de victoire résonne au ciel.

La nuit dit : Je suis bénie ; ma mort est une félicité.

Il reçoit des pièces d’or et en remplit son escarcelle puis s’en va.

Ceci veut dire…

Nous n’avons pas besoin d’explication.

DADA. — Cela signifie…

Peu importe ce que cela signifie ; nous sommes décidés à ne pas comprendre.

Qu’est-ce qui vous rend si désespérément nerveux ? C’est notre fête du Printemps.

DADA. — Ah ! C’est cela ? Alors je vais aller chez tous les voisins.

Non, vous ne devez pas y aller.

DADA. — Mais est-il nécessaire que je reste ici ?

Oui.

DADA. — Alors mes quatrains…

CHANDRA. — Nous badigeonnerons si bien tes quatrains avec un gros pinceau — que plus personne ne pourra savoir si ils ont un sens.

Et alors tu perdras toute ton influence.

Les voisins t’abandonneront.

Le veilleur te prendra pour un fou.

Le Docteur te prendra pour un idiot.

Tes amis mêmes te tiendront pour inutile.

Et les étrangers te considéreront comme un original.

CHANDRA. — Mais nous te couronnerons, Dada, avec une couronne de fleurs nouvelles.

Nous mettrons une guirlande de jasmins autour de ton cou.

Et nous serons les seuls à connaître ton véritable mérite.

LE CHANT DE LA FÊTE DU PRINTEMPS

(Tous les personnages de la pièce, y compris Struti Bushan, se réunissent, sur la scène principale, pour danser la ronde du Printemps.)

Venez vous réjouir car Avril s’éveille. Jetez-vous dans le torrent de la vie.

Et faites éclater les liens du passé.

Avril s’éveille.

La mer Infinie de la vie devant toi palpite dans le soleil.

Toutes les pertes se perdent en elle et la mort est noyée dans ses vagues.

Plonge sans crainte dans ses profondeurs avec la joie d’Avril dans ton cœur.

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