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Les Dernières Années du Marquis et de la Marquise de Bombelles

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NOTES:

[1] Angélique de Mackau et la Cour de Madame Élisabeth, Emile-Paul, 1905.

[2] Fragment des Mémoires de Bombelles que je tiens de M. le comte de Castéjà, son arrière-petit-fils. Le reste de ces Mémoires est en la possession de M. le comte Louis de Bombelles qui habite l'Autriche. Il eût été intéressant sans doute de les publier en entier; mais, d'après les instructions formelles du marquis entré dans les ordres après la mort de sa femme, et qui réprouvait certains chapitres tracés par l'homme de cour, ces Mémoires ne verront pas le jour.

[3] Radix de Sainte-Foix, ancien commis aux Affaires étrangères, devenu trésorier général de la Marine. Il fut le commensal et le favori de Choiseul, et il «inventa» avec le duc de Fitz-James la future comtesse du Barry.

[4] L'hôtel du comte de Montmorin, construit en 1720, rue Plumet, aujourd'hui rue Oudinot, fut habité, entre autres propriétaires, par le comte Rapp, le duc d'Aumont, le marquis de la Roche-Dragon qui céda cette demeure à la ville de Paris. On sait que les Frères des Ecoles chrétiennes y résidaient jusqu'en ces derniers temps.

[5] Cet hôtel se trouvait quai d'Orsay, là où commence la rue Solférino.

[6] Pierre-Etienne Maignard, marquis de la Vaupalière, né en 1731, lieutenant général en 1784.

[7] L'hôtel de la Vaupalière est celui qui porte aujourd'hui le no 85, faubourg Saint-Honoré. Il avait appartenu au marquis d'Argenteuil et aux de Chastenay.

Depuis les la Vaupalière, il fut la résidence du baron Rœderer, du comte Le Hon, du comte Molé. Il appartient aujourd'hui au baron Gérard.

[8] Le comte de Fernan Nunez, dont la mère était Rohan, comptait nombre d'amis à Paris, quand, en 1786, il vint remplacer M. d'Aranda.

[9] Thomas de Somma, marquis de Circello, arriva le 12 octobre 1786 à Paris en qualité d'ambassadeur de Naples, il y resta jusqu'à la Révolution. Sa femme était née princesse Piccolomini. M. de Bombelles l'avait beaucoup connu à Naples et à Vienne.

[10] Alors à Saint-Cloud.

[11] Il y eut plusieurs châteaux à Meudon: 1o celui d'Antoine Sanguin, évêque d'Orléans, puis archevêque de Toulouse, grand-aumônier de France et gouverneur de Paris. Quand il reçut la pourpre en 1539, il prit le nom de cardinal de Meudon. Sa terre passa à sa nièce, la duchesse d'Etampes; 2o Charles, cardinal de Lorraine, archevêque de Reims, acheta Meudon et y fit construire par Philibert Delorme un nouveau château sur le point le plus élevé de la colline qui regarde la Seine.—Abel Servien, conseiller d'Etat, secrétaire d'Etat et ambassadeur, qui fut un des premiers membres de l'Académie française, acheta Meudon à la maison de Lorraine et y mourut en 1659.—Louvois acquit le château en 1680 et y fit des embellissements considérables. Louis XIV, par un arrangement avec Mme de Louvois, acheta Meudon 900.000 livres avec Choisy en plus et le donna au Dauphin; 3o Monseigneur, devenu maître du domaine, fit construire un nouveau château par Mansart, et Le Nostre dessina les jardins (Voir Piganiol de la Force, Nouvelle Description de la France;—et Saint-Simon, édit Boislisle, t. II).

[12] Gouverneur du jeune Dauphin.

[13] Marie-Emilie Jolly de Choin, fille du baron de Choin, gouverneur et grand bailli de Bourg-en-Bresse, fut introduite à la Cour par la princesse de Conti. Mariée secrètement au Dauphin, elle lui survécut longtemps. La date de sa mort est incertaine (d'après les Mémoires de Saint-Simon, t. VIII, elle mourut vers 1723. Dans l'Addition, il est question de 1732. La Biographie générale donne 1744. M. Ed. de Barthélemy n'a pas conclu, pas plus que M. de Boislisle, nouvelle édition des Mémoires de Saint-Simon, t. II, p. 184).

[14] Celui du cardinal de Lorraine, construit par Philibert Delorme. Ce château fut démoli en 1804.

[15] Le jeune Dauphin né en 1779, y demeura en effet les deux dernières années de sa misérable vie. Il y mourut le 4 juin 1789. Sur l'enfant royal atteint d'une maladie de la colonne vertébrale il est des détails touchants. Voir surtout Hippeau, Gouvernement de la Normandie, t. IV (Souvenirs de Lefèvre, secrétaire du duc d'Harcourt), et les Souvenirs d'émigration de la marquise de Lâge de Volude, dame de la princesse de Lamballe.

[16] Troisième fils de M. de Bombelles, celui qui sera le troisième mari de Marie-Louise.

[17] Château aux portes de Versailles, près du Grand Chesnay, où étaient élevés les fils du comte d'Artois.

[18] Il y avait alors dans les relations de la reine avec Mlle de Polignac des alternatives assez déconcertantes. Marie-Antoinette ne portait plus la même affection à son amie, et depuis qu'elle avait pris l'habitude de passer ses soirées chez la comtesse d'Ossun, sa dame d'atours, elle s'était parfaitement accoutumée,—chose qu'elle jugeait impossible autrefois—à savoir se passer de la Gouvernante de ses enfants.

[19] Attribué aujourd'hui aux Archives nationales.

[20] Nous avions pris le parti de la Prusse—le plus fort—contre les partisans du stathoudérat.

[21] Voir dans le précédent volume ces laborieuses négociations qui devaient échouer. On se rappelle que cette Mlle de Rohan-Rochefort est celle qui devait être aimée par le duc d'Enghien, et à laquelle M. Jacques de la Faye a consacré un fort agréable volume.

[22] Ce qui prouve que les «faillis» de 1781 pouvaient commencer, ayant à peu près payé leurs dettes, à se remontrer à la cour.

[23] Le chevalier d'Alméida.

[24] Pierre-André, bailli de Suffren, Saint-Tropez, vice-amiral, l'un des plus grands hommes de mer qu'ait eus la France, (1726-1788).

[25] Sur les incidents de Rennes et la suspension des réunions parlementaires, voir le chapitre V de Bretagne et Vendée, par Pitre Chevalier, les ouvrages de Droz et de Todière.

[26] Bertrand de Moleville.

[27] Mme La Live de la Briche, née Prévost, apporta en dot à son mari le magnifique château du Marais. M. de la Briche était le frère de la comtesse d'Houdetot, de M. d'Epinay et de M. de Jully. Le château du Marais avait été construit par M. Lemaître, oncle de Mme de la Briche, sur le plan des grands hôtels du faubourg Saint-Honoré. Norvins en a fait une description détaillée. Avant la Révolution et sous le Consulat il s'y tint des réunions très distinguées.

[28] Voir Fantômes et Silhouettes.

[29] Noël de Jourdan, comte de Vaux, né en 1705, entré au service en 1724. Après des services éclatants surtout pendant la guerre de Sept Ans, il devint lieutenant général en 1759, commanda en chef dans la Corse, soumit l'île en trois mois; maréchal en 1783, mort en 1788. Le général Canonge lui a consacré une étude militaire très fouillée (Le Carnet, 1905).

[30] La vérité est que le maréchal de Vaux dut transiger pour rendre aux Dauphinois leurs Etats particuliers. Voir la note plus loin.

[31] Laurent de Villedeuil, son successeur, prêta serment dès le 27. C'était un ancien intendant de Rouen qui, un instant, avait été contrôleur général.

[32] Ministre de la Marine.

[33] Charles-François, comte de Saulx, duc héréditaire de Saulx-Tavannes en 1786, colonel aux grenadiers de France, chevalier d'honneur de la Reine; émigré, pair de France en 1814; titre éteint.

[34] Titre ducal héréditaire, concédé en 1764 à Louis-Albert de Brancas, frère consanguin du duc de Brancas-Villars. Devenu chambellan de Napoléon Ier, pair de France, grand d'Espagne par héritage de son cousin le marquis de Céreste, mort sans enfant.

[35] Voir dans l'ouvrage de Todière, le chapitre XI, Funestes suites du coup d'Etat du 8 mai 1788.

Les émeutes que Bombelles ne fait qu'indiquer avaient été fort graves à Grenoble. On avait rappelé Clermont-Tonnerre, qui n'avait pas su se faire respecter et qui, pour sauver sa vie menacée par la hache d'un mutin, avait capitulé. Ce n'était plus seulement une assemblée de gentilshommes, un corps de magistrats en état de résistance, c'était une portion de l'armée en état de dissolution, disposée à passer de l'obéissance à la révolte. Des soldats étaient gagnés. Comme un officier donnait l'ordre de faire feu, on entendit ces mots: Tirerez-vous donc sur vos frères? C'était déjà le début du système des crosses en l'air. Le peuple voulait fraterniser avec le soldat, bientôt le soldat n'obéirait plus. Royal Marine se défendit, le régiment d'Austrasie épargna le peuple.

L'Assemblée des Etats permise par le maréchal de Vaux après échange de lettres avec le ministère eut lieu non pas à Grenoble, mais à Vizille. Mounier et Barnave dirigèrent les débats de cette assemblée où Gon tenait tête au Gouvernement. Celui-ci dut céder et rendre aux Dauphinois leurs Etats particuliers et suivant leurs vues: Voir Mémoires de Weber, t. I, et Todière; Louis XVI, etc.

[36] Née Montmorency, mariée à un prince lorrain. Femme d'esprit très cultivé et libéral qui devait compter des amis dans tous les partis. Après la Révolution, elle se lia avec Talleyrand, avec Mme de Custine, tint un salon très intéressant. Elle resta fidèle à Fouché, même après sa disgrâce.

[37] M. Gaston Maugras vient de publier un agréable livre sur la Cour de Lunéville, Plon, 1904.

[38] On n'y croyait pas encore, et bien que créé bruyamment dans Paris, l'arrêt ne fit pas le bruit que certains en attendaient. «Le public est dans une disposition contraire à la confiance.» Correspondance secrète, II, 279. Pour l'opinion contraire, voir Journal de Hardy, VIII.

[39] Le 8, ils avaient visité le parc de Saint-Cloud, et les grandes eaux avaient joué en leur honneur. Asselin fit en 1789 de cette scène une jolie gouache, qui est au musée de Sèvres. En voir la reproduction dans le Palais de Saint-Cloud, par le comte Fleury, Laurens, 1901.

[40] On se souvient que le comte de Bombelles, fils aîné, était né du premier mariage du lieutenant-général de Bombelles.

[41] Arrêt du 16 août, celui qu'on appela l'édit de la banqueroute.

[42] La malédiction publique fondit sur lui «comme un déluge». On crut, peut-être non sans raison, que s'il avait publié l'arrêt de convocation des États Généraux, c'était dans la pensée que l'arrêt de la banqueroute cousu à celui-là passerait plus facilement. Marmontel, t. IV.—Hardy, Journal manuscrit, t. VIII, La Fayette, Mémoires, t. II, p. 232. Cf. aussi l'Esprit révolutionnaire avant la Révolution, par M. Félix Rocquain.

[43] Son neveu était nommé coadjuteur de Sens, sa nièce obtenait une place auprès de la Reine, et celle-ci envoyait au ministre disgracié son portrait enrichi de pierreries.

[44] M. de Brienne partit en effet peu après pour recevoir des mains du Pape le chapeau que le faible Louis XVI avait demandé pour lui. Dans une gravure qui parut à l'époque, la France était représentée sous la figure d'une femme dans le sein de laquelle un prêtre enfonçait un poignard, et le sang qui en jaillissait formait à ce prêtre un chapeau de cardinal.

L'histoire est forcément très sévère pour Brienne; il faut dire, avec Mignet, à la décharge de ce ministre si décrié et sous lequel s'aggravèrent les périls de l'autorité royale «que la position dont il ne sut pas se tirer, il ne l'avait pas faite, il n'eut que la présomption de l'accepter. Il périt par les fautes de Calonne, comme Calonne avait profité, pour ses dilapidations, de la confiance inspirée par Necker. L'un avait détruit le crédit, et l'autre, en voulant le rétablir par la force, détruisit l'autorité». (Révolution française, t. I). M. de Brienne ne pouvait lutter à la fois contre la masse des Parlements et contre le défaut d'argent. Voilà surtout par où il périt, et les mains qui le précipitaient élevèrent Necker.

«Une chose à remarquer à la louange de la Reine, note Sénac de Meilhan, c'est sa constance à se refuser pendant seize ans aux suggestions qui lui furent faites en faveur de l'archevêque de Toulouse. Elle les rejeta tant qu'elle put croire qu'elles étaient dictées par l'ambition, concertées avec des intrigants. Mais lorsque la réputation de ce prélat universellement établie lui eut fait croire qu'il était l'homme le plus capable d'administrer les finances, lorsqu'elle crut enfin satisfaire le vœu général, elle s'empressa de favoriser l'élévation de l'archevêque de Toulouse et de lui procurer un crédit qui lui assurât ses opérations». (Du Gouvernement, des Mœurs, etc.)

[45] Mme de Polignac, qui était tout à fait l'amie de Calonne, ne pouvait sentir Loménie de Brienne. A son immixtion dans l'affaire, il y a donc aussi cette raison dont elle ne lui parle pas, mais qui saute aux yeux, puisque la duchesse était la rivale de crédit et l'ennemi de l'archevêque.

[46] «La Reine tout en pleurant» convint de la nécessité de renvoyer l'archevêque (Bezenval).

[47] Cf. Mémoires de Bezenval. Le comte d'Artois était le protecteur de Calonne,—hélas! il le restera pendant l'émigration; rien d'étonnant à ce qu'il se montrât l'ennemi juré de Brienne, à cause de son amitié pour Calonne et non pour d'autres raisons.

[48] Chrétien-François de Lamoignon (1735-1789) avait été Président à mortier du Parlement de Paris, en 1758, et partagea l'exil de cette compagnie en 1771. Il prit part à la Correspondance, sorte de satire contre le Parlement Maupeou. Nommé Garde des Sceaux en 1787, il avait dû se rallier à la Cour et, changeant forcément de rôle, il contribua à l'exil du Parlement de Troyes. Il s'associa d'abord à tous les actes de Loménie de Brienne, puis se brouilla avec lui. En 1789, on le trouva mort dans son parc de Basville, ayant près de lui un fusil déchargé.

[49] Louis-François de Paule Le Fèvre, marquis d'Ormesson, neveu de d'Aguesseau, avocat général du Châtelet, en 1739, à vingt et un ans, président à mortier en 1755, premier Président du Parlement en 1788, membre de l'Académie des Inscriptions, servit souvent de médiateur entre la Cour et les Parlements. Mort le 26 janvier 1789.

[50] Le second fils du maréchal, colonel après son frère du régiment de cavalerie hongroise, marié à la fille du marquis de Pange, trésorier de l'extraordinaire des guerres, puis à Thérèse de Santo Domingue. Il est question de Bercheny dans les Aventures de jeunesse de Valentin Esterhazy, récemment publiées par M. Ernest Daudet.

[51] Béatrix de Choiseul-Stainville, mariée au duc de Gramont, dont elle vivait séparée, avait été la maîtresse de Louis XV; on sait son crédit sur son frère dont elle seconda énergiquement les vues. Morte sur l'échafaud en 1794.

[52] Colonel des Gardes françaises, lieutenant-général, fils de la fameuse marquise du Châtelet, née Breteuil, amie de Voltaire; né en 1731, mort sur l'échafaud en 1794.

[53] Bezenval, Mémoires;—Hardy, Journal, t. VIII;—Todières, Louis XVI, etc., t. II.

[54] Parlant de l'arrêt du Conseil qui révoquait au nom du Roi celui du 16 août (l'arrêt de la banqueroute), Hardy prétend qu'on devrait le traduire ainsi: «Mon ministre Necker par la confiance qu'il inspire m'a enfin fait trouver de quoi attendre les Etats Généraux» (t. VIII, p. 87).

[55] Voir Mémoires de Bezenval et Histoire parlementaire, t. I.

[56] Bombelles est sévère pour la rentrée de Necker, dans ces difficiles circonstances, et il ne sera pas toujours juste pour son administration. On devra tenir compte au directeur des finances de ses intentions qui étaient bonnes, des tentatives faites pour enrayer le mal et empêcher la banqueroute en donnant des garanties personnelles et des acomptes aux créanciers, en assurant les services et en pourvoyant aux besoins ordinaires. Le désordre était si grand, les difficultés étaient telles que réussir dans l'effort tardif qu'il lui était permis de faire était chose hasardeuse, et d'ailleurs l'homme politique n'était pas à la hauteur du financier. Cependant, avant de porter un jugement définitif sur Necker, on devra relire ce passage bienveillant d'un livre de M. de Monthyon: «La banqueroute était inévitable, et cependant fut évitée sans beaucoup de force, sans emprunts, sans ces billets d'Etat si effrayants... Il n'est aucun temps de l'administration de M. Necker où il ait montré plus d'adresse, de sagacité et de talent. Ses industrieuses et justes combinaisons, et le succès qu'elles ont obtenu tiennent du prodige; et cependant ce n'est point l'époque de son administration qui a été l'objet des éloges de ses partisans, parce que les hommes sont plus touchés, plus reconnaissants du bien qu'on leur fait que des maux qu'on leur évite, lors même que le service est le plus grand.» (Particularités et observations sur les ministres des finances, p. 312.) Le contrôleur général doit être loué; autre chose du premier ministre. Quoiqu'ils en aient écrit lui et sa fille, Necker était-il capable, s'il avait pris le pouvoir quinze mois plus tôt, de sauver la situation? Il est permis d'en douter.

[57] Hardy, VIII, 142.

[58] Ce fut d'Éprémesnil qui demanda l'enregistrement de la déclaration avec la clause que les États seraient assemblés d'après la forme observée en 1614, au moment de la majorité de Louis XIII. Le souvenir des États réunis alors était cher à la magistrature, parce qu'elle avait exercé sur eux le plus grand ascendant, parce qu'ils avaient offert la composition la plus aristocratique et que le Tiers État humilié n'y avait rien obtenu. La majorité du Parlement croyant trouver son salut et celui de la noblesse dans la clause proposée s'empressa de l'adopter. Quand cette déclaration fut connue, il y eut des clameurs dans le public. La révolution dans les esprits fut rapide et la malédiction remplaçait l'enthousiasme. Un vide immense allait se faire en un instant autour du Parlement dont le peuple avait commencé par saluer le retour avec des transports de joie.

Toute la basoche, procureurs, avocats, jeunes clercs, officiers ministériels, qui avaient fait le succès de sa résistance, l'abandonnèrent aussitôt, se plaignant qu'il venait de dévoiler ses véritables sentiments. Brochures et pamphlets se chargèrent de dévoiler ce qu'avaient offert de ridicule et d'odieux les États de 1614, que le Parlement offrait pour modèle. Dès lors le signal était donné de la lutte entre le Tiers État et les privilégiés, de la lutte du peuple contre l'ancien régime, et l'on pouvait présager une lutte opiniâtre. (Voir Todière, op. cit., 167.) On se rappellera aussi ces remarques de Victor Cousin dans la Fin de la Fronde à Paris: «Au XVIIIe siècle, le Parlement s'énerve avec tout le reste, et comme tout le reste succombe sous ses fautes et s'abîme dans le naufrage universel... Rappelez-vous la fatale décision que les États Généraux seraient convoqués en leur forme accoutumée, c'est-à-dire en trois ordres différents, comme au moyen âge, tandis que le Roi, s'il n'eût pas été entraîné par la déclaration des Parlements, aurait pu, en réduisant les trois ordres à deux et en rendant les États Généraux périodiques, donner la monarchie constitutionnelle et éviter une révolution.»

[59] Louis-Antoine de Gontaut (1700-1783), duc de Biron en 1740, après la mort de son neveu et la démission de Jean-Louis, abbé de Moissac, son second frère. Maréchal en 1757. Sans hoirs de Pauline de la Rochefoucauld-Roye, son titre passa à son neveu, le duc de Lauzun.

Sa comparution était motivée par ce fait que Dubois, le commandant du guet, s'était déclaré couvert par les ordres du maréchal (Corresp. secrète d'Ed. Lescure).

[60] Le Peletier de Rosambo, gendre de Malesherbes, décapité en 1794.

[61] Le prince de Lambesq de la maison de Lorraine, grand-écuyer. Son nom est resté célèbre par la charge de cavalerie faite par lui le 12 juillet 1789.

[62] Choiseul-Gouffier demeura, en fait, à Constantinople jusqu'en 1792. On sait que c'était un archéologue distingué.

[63] Joua un rôle dans les conseils de Coblentz. Voir infra.

[64] Voir aussi le Journal de Hardy.

[65] Philippine-Thérèse de Broglie, mariée à Henri de Faret, marquis de Fournès, colonel du régiment de Royal-Champagne (cavalerie); dame de compagnie de Madame Elisabeth.

[66] Château qu'habitera plus tard La Fayette, gendre de la duchesse d'Ayen.

[67] Rappeler les notables pour leur soumettre les questions relatives à la composition et à la forme des Etats Généraux, convoquer des conseillers qui s'étaient montrés impuissants dix-huit mois auparavant pour demander à leurs préjugés des lumières sur les temps nouveaux, était un acte impolitique et dénué de sens. Par le fait, cette réunion ajournait celle des Etats Généraux, «elle rendait à l'effervescence, à l'intrigue le temps qu'on avait d'abord jugé prudent de leur enlever.» (Voir Todière, op. cit., p. 170.)

[68] Philippe de Noailles, second fils du maréchal de Noailles, duc de Mouchy, lors de sa nomination de maréchal de France; s'illustra à Hilkersberg et à Fontenoy; vola courageusement au secours du Roi dans les journées du 20 juin et du 10 août; monta sur l'échafaud en 1794, en même temps que la maréchale, née d'Arpajon, l'ancienne dame d'honneur de la Reine.

[69] Tous deux frères naturels de la duchesse de Bourbon, née Bathilde d'Orléans. Honoré Bonhomme a publié leur correspondance avec leur sœur. Ils étaient fils du duc d'Orléans, alors de Chartres et de Mlle Le Marquis, danseuse à la comédie italienne. Cf. l'excellent livre du comte Ducos, La mère du duc d'Enghien.

[70] Introduction au Moniteur, p. 564.

[71] Voir Todière, ouvrage cité, p. 173 et suiv. Voir aussi F. Rocquain, l'Esprit révolutionnaire.

[72] A cette exagération maladroite, on répondit par ces paroles: Et le sang du peuple était-il de l'eau?

[73] Les écrivains du Tiers criaient: «Regardez nos campagnes, nos ateliers, nos comptoirs, nos ports, nos flottes, nos armées, nos tribunaux, nos académies, et dites, si, sans nous, le peuple français est quelque chose.» Journal de Hardy, VIII, décembre 1788.

Les hérauts du régime nouveau faisaient succéder brochures aux brochures; elles devinrent presque aussi nombreuses en quelques mois «que celles qu'avait jadis fait naître la bulle Unigenitus», «car, ajoute Grimm (XIV, 186), il n'y en a, dit-on, guère moins de dix mille».

[74] Le 22, on apprenait, à Versailles, la mort de Charles III, roi d'Espagne.

[75] Poète, soldat, académicien, qu'a rendu surtout célèbre sa liaison avec la comtesse de Sabran. Leur intéressante correspondance a été récemment publiée.

[76] De Prusse.

[77] L'ami de Mme du Châtelet.

[78] Née de Galliffet, belle-fille du maréchal, mère du ministre de la Restauration.

[79] Voir Aff. Etrangères, Venise, dt 260 et suiv.

[80] On se rappelle que d'Éprémesnil avait été emprisonné l'année précédente à la suite de sa brochure. Son voyage à travers la France jusqu'à Paris avait été un triomphe.

[81] D'importants fragments des Mémoires du maréchal, duc de Croy, ont été publiés par M. le vicomte de Grouchy, 1896.

[82] M. de Juigné, qui avait succédé à M. de Beaumont.

[83] Née Rohan-Rochefort, veuve d'un prince lorrain, avait eu une longue liaison avec Choiseul.

[84] Né en 1766. Le futur gouverneur d'Odessa pendant l'émigration, et président du Conseil en 1815. De nouveau ministre en 1820, après l'assassinat du duc de Berry. Mort en 1821, membre de l'Académie française.

[85] Le marquis de Louvois que nous avons vu dans le précédent volume épouser Mlle de Bombelles était mort, l'année précédente. C'est son fils en bas âge que le marquis de Bombelles allait représenter.

[86] Cette Mme Gourbillon, qui fut chassée, puis reprise, avait sur la comtesse de Provence, une influence très fâcheuse. (Voir E. Daudet, Histoire de l'Emigration, t. II.)

[87] Né en 1726, entré au service en 1739. Lieutenant-général, gouverneur de la Normandie en 1783 à la mort de son père. Gouverneur du dauphin, de 1786 à sa mort, 1789. Mort en 1802, le duc d'Harcourt occupait à l'Académie un fauteuil vraiment «militaire»; en effet, ses prédécesseurs étaient Scudéry, Dangeau et Richelieu, de sorte que le fauteuil appartint à l'armée pendant cent quarante-trois ans.

[88] Gabriel-Henri Gaillard, historien, né à Ostel, Picardie, en 1726, mort en 1826. On a de lui des mélanges littéraires et des ouvrages de littérature élémentaire, puis des livres d'histoire estimés à l'époque: Histoire de Marie de Bourgogne, de François Ier, de Charlemagne; une Vie de Malesherbes; des Mélanges académiques, une édition des Œuvres de du Belloy, etc. Il fut reçu de l'Académie des Inscriptions en 1761, et de l'Académie française en 1771.

[89] Florian était entré à l'Académie à trente-trois ans. Il succédait au cardinal de Luynes, le 14 mai 1788.

[90] Dans son aversion contre Necker, Bombelles en arrive à défendre Calonne.

[91] Marie-Antoinette, Joseph II et Léopold II. Lettres du 27 février, 24 avril et 16 juillet.

[92] Son souverain.

[93] Lettres du 8 avril et 17 mai 1789. Souvenirs de la marquise de Lâge de Volude, dame de la princesse de Lamballe, publiés par le baron de la Morinerie, Evreux, 1869.

[94] Lettres de Boullé, député de Nantes à ses commettants.—Revue de la Révolution, 1888, t. II. Cité par M. de la Rocheterie.

[95] Et non le 8, au retour de Meudon, comme le dit Weber.

[96] Weber, p. 210.

[97] «Paris est d'un vide affreux», écrit le 15 juillet le comte de Salmour, ministre de Saxe, très bien renseigné, et dont les dépêches citées par Flammermont sont une excellente mine, fort peu connue, de renseignements; «toutes les promenades sont désertes, les spectacles abandonnés, et l'on a l'air d'occuper une ville démantelée. Plus de société; la terreur peinte sur tous les visages; la méfiance dans tous les cœurs; un Roi sans Cour, sans armée; un château sans gardes ouvert à tout venant... A Versailles, on ne sait ni que faire ni que devenir»... Quinze jours après, il mandait à son Gouvernement: «Hors en public, la Reine ne voit plus personne... Toute la société de la reine est fugitive et dispersée; plusieurs de ses dames l'ont abandonnée d'une manière fort vilaine...» Et il cite tous ceux qui ont fui de leurs Cours respectives: Mme de Balbi, Mme de Lâge, Mme de Châlons, Mme de Polastron, tous les «Lorrains», tous les Rohan, tous les Broglie, la princesse de Monaco [97-A], les Polignac, Gramont, d'Ossun [97-B]. L'ambassadeur cite aussi Mme de Bombelles, mais nous savons que son départ a été exigé par Madame Élisabeth.

[97-A] La princesse de Monaco, née Brignole, épousa plus tard le prince de Condé.

[97-B] La comtesse d'Ossun, née Gramont, dame d'atours de la reine, devait revenir d'émigration en 1792 et mourir sur l'échafaud en 1794.

[98] Comme commandant de la garde nationale de Versailles, Alexandre Berthier devait être d'un grand secours à Mesdames, tantes du Roi, quand elles partirent en février 1791, de Bellevue. Cf., dans les Drames de l'Histoire, le chapitre consacré au départ de Mesdames.

[99] M. Paul Gaulot a récemment tiré la vérité au clair sur le procès du malheureux Favras et les responsabilités qui incombent à d'autres, surtout au comte de Provence.

[100] Lettre du 1er mai.

[101] Voir le Palais de Saint-Cloud, Laurens, éditeur, 1902.

Madame Élisabeth devait habiter au rez-de-chaussée l'appartement qui devint en dernier lieu celui du prince Impérial et qui donnait sur un minuscule jardin fermé. Le petit bassin qui était situé au milieu a été conservé et on peut le voir sur la terrasse, veuve de ses ruines...

[102] Le motif du duel était celui-ci: «Charles de Lameth ayant été chargé de faire une perquisition de nuit dans le couvent des Annonciades de Pontoise pour y rechercher l'ancien garde des Sceaux M. de Barentin (parce que sa sœur était abbesse du couvent), le duc de Castries l'avait raillé de cette étrange mission; de là un duel qui eut lieu le 10 septembre.»

Le pillage de l'hôtel de Castries fait partir de Paris onze cents personnes. Il y a grande presse à l'hôtel de Ville, où l'on peut à peine avoir des passeports. Bientôt sortent de Paris soixante-quinze berlines par jour. (Correspondance de Lenfant, Forneron t. II.)

[103] Ce fragment de lettre et beaucoup d'autres que nous citerons comme utiles à notre récit, sont tirés de la Correspondance du Marquis et de la Marquise de Bombelles et du Marquis et de la Marquise de Raigecourt que publia naguère M. Maxime de la Rocheterie pour la Société d'Histoire Contemporaine. Cet excellent livre documentaire est épuisé, et pour mettre au point mon manuscrit, que j'avais écrit à Versailles avec cet ouvrage à ma disposition, j'ai dû faire de longues recherches. Elles seraient restées infructueuses sans la parfaite obligeance de M. C. d'Arjuzon qui eut l'idée de demander à notre excellent confrère M. de Lanzac de Laborie de me prêter son exemplaire, ce qu'il fit avec une entière bonne grâce. Depuis, M. M. de la Rocheterie, informé des recherches auxquelles j'avais dû me livrer pour me servir utilement de ce nécessaire complément d'information s'est empressé de m'adresser un des exemplaires qui lui restaient. J'aime à répéter ici ce que j'ai dit dans le précédent volume, à savoir: que les travaux de M. de la Rocheterie, documentaires ou synthétiques, surtout sa belle Histoire de Marie-Antoinette, sont une mine inépuisable—et où il a été beaucoup puisé—pour quiconque s'occupe historiquement des années précédant la Révolution.

[104] Un décret du 14 octobre avait déclaré nationaux les biens des établissements d'instruction publique. La maison des dames de Saint-Louis fut conservée comme maison d'éducation, mais elle allait rentrer dans la loi commune et les biens considérés comme biens nationaux furent désignés pour être vendus.

[105] Mirabeau avait eu une première entrevue avec la Reine, à Saint-Cloud, dans le courant de juillet, et séduit par Marie-Antoinette, il avait promis de sauver la monarchie. Le bruit s'en ébruita, et l'on cria dans les rues: «la grande trahison de M. de Mirabeau». Il y eut des échanges de notes, des réformes commencées et des efforts faits... Mais l'indécision du roi et la marche rapide des événements devaient rendre ses efforts stériles. Il mourut terrassé par la maladie, le 2 avril 1791. Voir les détails de cette entrevue et des négociations qui suivirent dans la Correspondance de La Marck et de Mirabeau, et dans le Palais de Saint-Cloud, in-8o illustré, par le comte Fleury.

[106] Le troisième maréchal et deuxième duc de Broglie, vainqueur des Prussiens à Bergen et à Forbach. Chargé du portefeuille de la Guerre dans le court ministère que présida le baron de Breteuil après le premier départ de Necker, le 11 juillet. Il n'avait pas tardé à quitter la France et à se retirer à Trèves où on le regardait comme un des chefs militaires de l'émigration. M. le duc de Broglie, son arrière-petit-fils, a publié dernièrement avec M. Vernier, archiviste de l'Aube, la correspondance du maréchal avec Xavier de Saxe, comte de Lusace.

[107] Cette phrase de Mme de Bombelles est à elle seule l'explication des raisonnements des émigrés et des Vendéens. Là où était le dévouement à Dieu et au roi, là était la patrie. Ces choses ne se discutent plus sérieusement maintenant, mais on peut admettre qu'on les ait discutées et admises à l'époque et bien longtemps après. Il est un jugement du duc de Broglie actuel qui clôt la question de façon très impartiale. Publiant la correspondance de son aïeul, il a écrit cette phrase si juste:

«L'inébranlable fidélité des émigrés à une cause perdue mérite le respect; leurs souffrances trop réelles méritent l'intérêt, mais l'erreur qui leur fit considérer comme légitime l'alliance avec l'étranger a été définitivement condamnée par l'histoire.»

[108] Décret du 27 novembre sur le serment des évêques, curés et autres fonctionnaires publics. Pour le 9 décembre, on élaborait une décision prescrivant la restitution des biens des religieux fugitifs.

[109] Aff. Étrang. Venise, 248.

[110] Le comte d'Artois à Venise, et la police vénitienne (1760-1791). Rapports au secrétaire de l'Inquisition d'Etat commentés par M. Léon G. Pélissier, Revue d'Histoire diplomatique, 1901, no 4. Ces documents sont de premier ordre et éclairent bien des points obscurs de cette époque de l'émigration. Le commentaire de M. Pélissier est ingénieusement tracé, mais l'auteur tourne un peu court à la fin, les rapports d'espions s'arrêtant net. Il eût été intéressant de suivre le comte d'Artois en son dernier séjour à Venise. C'est ce que nous faisons nous-même plus loin. Voir aussi le dossier diplomatique de Bombelles (Aff. étrangères, Venise, 248 et 249).

[111] Le prince visitait les monuments, admirait les théâtres qu'il ne fréquentait que peu, du reste; réfugié à Venise plus ou moins par haine de la monarchie constitutionnelle, il se déclarait naturellement enthousiasmé par la constitution vénitienne. En dehors de la coterie Polignac, il fréquentait peu de monde, faisait peu de visites, excepté à l'Ambassadrice de l'Empire, Mme de Breunner. Quant aux visites d'un autre monde, il s'en abstint, soit par égard pour Mme de Polastron qui voyageait avec lui, soit pour s'en référer aux observations de Bombelles.

[112] M. Léon Pélissier, op. cit.

[113] Voir la Correspondance publiée par M. L. Pingaud.

[114] Voir la Correspondance publiée par M. L. Pingaud.

[115] Le baron de Talleyrand, à Naples, donna sa démission.

[116] Papiers Gramont-Polignac. Arch. de M. le duc de Lesparre.

[117] Sur le départ et le voyage de Mesdames, voir Drames de l'Histoire, Hachette, 1905.

[118] La journée du 28 février, dite Journée des Poignards, où les gentilshommes accourus au secours de la famille royale qu'une émeute semblait menacer, furent insultés et désarmés par la garde nationale. «Etourdis et répresseurs, tout le monde a eu tort», écrit Madame Elisabeth.

[119] Marie-Béatrix d'Autriche-Este, mariée à l'archiduc Ferdinand, frère de l'Empereur et gouverneur de la Lombardie.

[120] Ceci est une allusion aux projets de fuite du Roi, dont il a été plusieurs fois question dans les lettres. Les Bombelles semblent avoir été dans le secret.

[121] 6 avril, Aff. Etrang., Venise, 249.

[122] Ou Wardeck, appartient aujourd'hui au duc de Parme.

[123] «On ne lui laisse que la vie végétale. On admire qu'il puisse s'en contenter», écrit le cardinal de Bernis. Papiers Bernis, publiés par M. Frédéric Masson.

[124] Fils de Mme de Raigecourt, mort en 1789.

[125] Le baron de Breteuil.

[126] Lettre de la marquise de Bombelles, 22 juillet; il y est question en outre du Congrès armé.

[127] Aubergiste de Florence.

[128] Esterhazy, dans ses Mémoires, p. 288, dit qu'un M. de Fondeville s'était procuré une copie de la lettre par une femme que l'Empereur aimait. M. Ernest Daudet, dans Coblentz donne une explication assez conforme à notre récit, bien que n'ayant pas connu les lettres de Bombelles. Dans l'Histoire de l'Emigration, du même auteur, t. I, il est dit que le coupable de l'indiscrétion est le comte de Talleyrand.

[129] La marquise de Bombelles à la marquise de Raigecourt, 5 août 1791.—M. de la Rocheterie, op. cit.

[130] Les conseillers du comte d'Artois s'entendaient pour le monter contre Breteuil et Bombelles. «Il faut exiger du roi, écrit Vaudreuil à Calonne, que les pleins pouvoirs soient ôtés sur-le-champ à MM. de Breteuil et de Bombelles, et que vous soyez le seul représentant du Roi, le seul accrédité près des Cours.» Correspondance, publiée par M. Léonce Pingaud.

[131] Voir dans l'Histoire de l'Emigration, les conclusions conformes de M. Ernest Daudet. Il appuie sur l'incident qui explique l'attitude future du comte d'Artois et devait avoir une importance pour les intérêts des princes.

[132] La Reine haïssait cordialement Calonne. Voir Correspondance de Vaudreuil, t. II.

[133] Mgr de Fontanges, archevêque de Toulouse, écrivit pour le marquis de Bombelles une Relation du voyage de Varennes qui a été insérée dans les Mémoires de Weber. Cette relation est d'un témoin très informé pour toute la partie antérieure au départ.

[134] Nous n'avons pas à donner le détail de l'Evénement de Varennes. Les témoignages oculaires abondent. Outre les relations de M. de Fontanges, de Madame Royale, de la duchesse de Tourzel, du duc de Choiseul, du marquis de Bouillé, des comtes de Fersen, de Raigecourt, de Valori, de Damas, du baron de Goguelat, on relira les livres de Bimbenet, d'Ancelon, de Victor Fournel, de M. de la Rocheterie, et le récent ouvrage de M. G. Lenôtre.

[135] «Il n'y a que deux personnes dans la confidence; M. de Bouillé et M. de Breteuil, écrivait la Reine à son frère, le 22 mai 1791, et une troisième personne qui est chargée des préparatifs du départ» (Marie-Antoinette à Léopold II, 22 mai 1791).—Le comte de Fersen était cette troisième personne, on le sait. Mme de Tourzel assure que le chevalier de Coigny était également dans la confidence. Nous savons de plus que, sans doute par Breteuil, les Raigecourt et les Bombelles étaient au courant, sinon de la date exacte, du moins de tout le programme d'évasion.

[136] Mme de Rochereuil, dont Marie-Antoinette se méfiait. En conséquence, on attendit que son service fût fini, et le départ des Tuileries fut retardé d'un jour.

[137] Chargé avec un escadron de hussards de surveiller le premier relai de Pont-Sommevesle, le duc de Choiseul perdit patience en voyant que le Roi annoncé pour deux heures n'était pas arrivé à cinq, et se replia avec son détachement.

[138] Voir Mémoires de la duchesse de Tourzel, t. I, p. 335.

[139] Le comte Charles de Raigecourt avait été envoyé avec un détachement du Royal allemand pour escorter le roi à Varennes. Il fut impuissant.

[140] La duchesse de Tourzel donne tout le détail de la conversation de Madame Elisabeth avec Barnave.

[141] Emeute du 17, au Champ de Mars causée par les pétitionnaires qui demandaient la déchéance du Roi. La troupe chargea, il y eut des victimes. La répression de cette émeute devait être une des causes principales de la condamnation à mort de Bailly.

[142] La baronne de Mackau venait d'accoucher d'une fille. «A la place de ton mari, mande la princesse dans une autre lettre qui n'a pas été conservée, et dont Mme de Bombelles cite un extrait, je ne me serais pas chargée de la commission du comte d'Artois, et j'eusse essayé avant tout d'établir entre le Roi et le comte d'Artois une confiance qui aurait dû toujours exister.»

[143] Journal de Fersen, octobre 1791. L'une est obligée de suivre l'élaboration d'une Constitution qui est censée raffermir l'idée dynastique; l'autre ne rêve que de panaches blancs, et son cœur est à Coblentz.

[144] Mémoires de Goguelat.

[145] Voir infra.

[146] Les prétentions des princes et des émigrés ne trouvèrent chez les souverains qu'un assez froid écho. La demande faite par le comte d'Artois de reconnaître Monsieur comme Régent, ne contribua pas peu à cette froideur. Voir les ouvrages de Sybel, t. I, de M. A. Sorel, t. III.

[147] Celui qui commandera l'armée prussienne à Iéna.

[148] A Mme de Bombelles, sous le nom de Mme Schwarzengald, à Saint-Gall, en Suisse, par Roschack.

[149] Le futur est le comte d'Artois.

[150] Le père est Louis XVI.

[151] La belle-mère est Marie-Antoinette.

[152] La lettre du 13, où le Roi déclarait accepter la Constitution, et demandait une amnistie générale pour les accusations et poursuites ayant pour cause les événements de la Révolution.

[153] Par suite de l'acceptation de la Constitution, une amnistie fut proclamée sur la proposition de la Fayette, etc. Les officiers compromis dans l'affaire de Varennes furent mis en liberté.

[154] Burke écrivait d'Angleterre: «Si vous acceptez la Constitution, vous êtes tous perdus. Ce n'est pas l'adresse, c'est la fermeté seule qui peut vous sauver... Votre salut consiste dans la patience, le silence et le refus». La Marck et Gouverneur-Morris demandaient des réserves. Mallet du Pan et Malouet proposaient que le Roi montrât à l'Assemblée les dépêches des puissances et que, faisant constater qu'il n'était pas libre, il demandât à se rendre à Compiègne ou à Fontainebleau où il aurait formé un nouveau ministère. Montmorin insista, Marie-Antoinette et le Roi furent effrayés des conséquences et de la crainte d'une insurrection. D'autre part, comme elle l'écrivait à Mercy, on pouvait redouter, en cas de non-acceptation, que le jeune Dauphin ne fût retenu comme otage. Le peuple regardait cette Constitution comme l'aurore de jours sans nuages, on ne pouvait guère lui ôter cela de l'idée. Comment lutter contre cette croyance? Quelle autorité, quelle armée avait-on pour résister? «Ni force, ni moyens, écrivait la Reine. Tout ce que nous pouvons faire ce sont des observations à faire, qui ne seront sûrement pas écoutées, mais qui au moins, avec la protestation que le Roi a faite, il y a six semaines (au retour de Varennes) et calquées sur elle, serviront de base pour le moment où l'ennemi, le malheur et le désenivrement pourront laisser passer la raison», et Mercy, tout en envoyant à Marie-Antoinette l'opinion de Burke, renonçait à l'idée de résistance et concluait: «Il faudrait ne rien brusquer et mettre toute sa fermeté à tâcher de temporiser.» La Reine était plus que convaincue qu'il n'y avait rien à tenter et écrivait le 26 août: «Il est impossible que le Roi refuse son acceptation. Croyez que la chose doit être bien vraie, puisque je le dis. Vous connaissez assez mon caractère pour croire qu'il se porterait plutôt à une chose noble et pleine de courage; mais il n'en existe point à courir un danger plus que certain.»

[155] Journal d'une bourgeoise pendant la Terreur (Mme Jullien), publié par M. Lockroy, t. III, p. 51.

[156] Le baron de Staël à Gustave, 28 août, 4 et 28 septembre.

[157] Mémoires de la duchesse de Tourzel.

[158] Clairval, dans Richard Cœur de Lion, substitua le nom de Louis au nom de Richard:

O Louis, ô mon roi,
Notre amour t'environne.

Les dames brisaient leurs éventails.

[159] Castor et Pollux. Les Souverains furent acclamés quand Lays chante:

Régnez, aimable mère,
Sur un peuple généreux.

[160] Le président Thouret déclarait que l'Assemblée nationale avait terminé sa mission. Sur ces événements, voir surtout les Mémoires du marquis de Ferrières, t. II.

[161] Lettre de Monsieur et de M. le comte d'Artois au Roi. Pilnitz, 1791.

[162] Louis XVI à ses frères, septembre, lettre publiée dans le Recueil Feuillet de Conches.

Louis XVI expliquait sa conduite nécessitée par les événements. «La nation aime la Constitution, parce que ce mot ne rappelle à la classe inférieure du peuple que l'indépendance où il vit depuis deux ans, et à la classe au dessus, l'égalité.» Le bas peuple voit que l'on compte avec lui; le bourgeois ne voit rien au dessus. L'amour-propre est satisfait.... Il faut donc attendre et surtout se garder avec soin de tout ce qui pourrait faire croire au peuple qu'on veut détruire cette Constitution, qu'il regarde comme la charte de sa liberté. Il faut—et cela ne saurait tarder—que l'usage lui en démontre à lui-même les inconvénients». On lira cette phrase avec attention. Maintes fois il a été affirmé que, dès le début, Louis XVI n'entendait pas respecter la Constitution. Cela est sans doute exagéré. Mais le Roi ne cachait pas son espoir de voir la Constitution détruite par ceux-là même qui l'avaient réclamée.

Le post-scriptum de la lettre du Roi ne peut être laissé dans l'oubli:

«Je finissais cette lettre, dans le moment où j'ai reçu celle que vous m'avez envoyée. Je l'avais vu imprimée avant de la recevoir (Louis XVI signale avec raison ce manque d'égards), et elle est répandue partout en même temps. Vous ne sauriez croire combien cette marche m'a peiné... Je ne vous ferai aucun reproche; mon cœur ne peut se décider à en faire... Je vous ferai seulement remarquer qu'en agissant sans moi, il—le comte d'Artois—contrarie mes démarches comme je déconcerte les siennes. Vous me dites que l'esprit public est revenu, et vous voulez en juger mieux que moi qui en éprouve tous les malheurs. Je vous ai déjà dit que le peuple supportait toutes ses privations, parce qu'on l'avait toujours flatté qu'elles finiraient avec la Constitution. Il n'y a que deux jours qu'elle est achevée et vous voulez que son esprit soit changé!... Vous vous flattez de donner le change, en déclarant que vous marchez malgré moi; mais comment la persuader, lorsque cette déclaration de l'Empereur et du Roi de Prusse est motivée sur votre demande? Pourra-t-on jamais croire que mes frères n'exécutent pas mes ordres? Ainsi vous allez me montrer à la nation, acceptant d'une main et suscitant les puissances étrangères de l'autre.» Quelques jours après, craignant que cette lettre ne parût un message officiel et forcé, Louis XVI renouvelait ses instances dans une lettre confidentielle. Toutes ses prières restaient sans effet.

[163] Les frères du Roi comprirent peu le langage modéré et conciliant de Louis XVI. Ils n'admirent pas non plus les reproches que Louis XVI était en droit de leur adresser. Ils protestèrent de nouveau. Ce simple billet trouvé dans le secrétaire du Roi, après le 10 août, prouvera l'état de rébellion où s'entêtaient les chefs des émigrés voulant uniquement agir à leur guise: «Si l'on nous parle de ces gens-là, nous n'écouterons rien; si c'est de la vôtre, nous écouterons, mais nous irons notre chemin».

[164] Voir la Déclaration de Louis XVI (Recueil Feuillet de Conches, t. II). Il y énonçait les motifs de son départ et les critiques nombreuses qu'il avait à faire de la Constitution.

[165] Sous le titre: Un Paladin au XVIIIe siècle, le marquis d'Aragon a publié d'après des correspondances inédites une intéressante biographie de son grand-père maternel. Il est beaucoup question du prince de Nassau dans les Mémoires de Langeron. Voir aussi: M. Léonce Pingaud, les Français en Russie, et M. Albert Sorel, l'Europe et la Révolution française, t. II. Nous aurons l'occasion de parler de lui dans un chapitre postérieur ayant trait à la mission du marquis de Bombelles en Russie. Rentré dans la vie privée sous Paul Ier, le prince de Nassau-Siegen mourut obscurément en 1829.

[166] Papiers Gramont. Arch. de M. le duc de Lesparre. Tout un dossier sur l'organisation des gardes du corps.

[167] Voir fragments de Mémoires du marquis de Bouthillier; M. E. Daudet: Coblentz. Cf. Mémoires du comte Valentin Esterhazy.

[168] L'armée de Condé demande officiers et soldats. Le marquis de la Queuille fait par son ordre un appel à la noblesse pour qu'elle vienne constituer des corps réguliers. Les jeunes gentilshommes accourent «au poste assigné par l'honneur»; ils ont peur d'être blâmés pour arriver trop tard; chacun leur dit: vous n'arriverez pas à temps, vous serez déshonorés (Marcillac, Souvenirs; Bernard de la Frégeolières, Mémoires).

Quand le colonel convoque ses officiers pour prêter serment à la Constitution de 1791, ceux qui ont hésité jusqu'alors se révoltent contre un serment humiliant; ils partent le même jour. Un négociant de Marseille veut persuader à un jeune officier que l'émigration attirera des calamités sur lui, sa famille et son pays. «Je suis soldat, répond le jeune homme, les princes m'appellent, je n'ai pas à discuter, mais à obéir.» (Romain, Souvenirs.)

[169] Ernest Daudet, Coblentz, 130 et suivantes;—La Mission de Bigot de Sainte-Croix à Coblentz, par M. Bletry (inédit).

[170] Voir la lettre de Calonne à Suleau, dans Coblentz, Pièces justificatives.

[171] Forneron, t. I.—Souvenirs du comte de Neuilly.—E. Daudet: Coblentz.

[172] Barante, Correspondance de Louis XVIII et de Saint-Priest, Préface, p. 98.

[173] Voir dans la Dernière des Condé, par le marquis Pierre de Ségur, le chapitre consacré à Marie-Catherine de Brignole.

[174] Le Congrès armé faisait partie du plan de la Reine. Sans parler de la Constitution, les puissances auraient invoqué les droits lésés des princes allemands, la garantie des traités passés avec la France et compromis par le changement de régime. Elles auraient, au besoin, appuyé leurs revendications par la présence à la frontière de têtes d'armées, capables à la fois d'en imposer «à la partie la plus enragée des factieux» «et de donner aux plus raisonnables le moyen de faire le bien». Voir le Comte de Fersen et la Cour de France, t. I;—Louis XVI, Marie-Antoinette, Madame Elisabeth, t. II;—Cf. aussi dans le Cardinal de Bernis depuis son ministère, les lettres de Calonne à Bernis. Calonne y exhalait naturellement son mécontentement et sa colère contre Breteuil.

[175] Feuillet de Conches, Correspondance, p. 351, s'imagine à tort qu'il s'agit de Clément Venceslas, archevêque-électeur de Trèves. Mme de Bombelles ne le connaissait pas et n'avait pas à parler de lui. Il s'agit du prince-abbé de Saint-Gall.

[176] M. de Bombelles à M. de Raigecourt, 4 octobre.

[177] Elle fut en effet rédigée par du Tertre, mais écrite de la main du Roi. Droz, Hist. de Louis XVI, t. III;—Correspondance diplomatique du baron de Staël.

[178] On se rappelle que le baron de Bombelles, envoyé des princes, avait obtenu un premier subside. A cette époque, le baron de Bombelles est déjà de retour, et, de Berlin, il est allé en Suisse voir son frère. Le comte Valentin d'Esterhazy venait d'être chargé d'une mission des princes pour Catherine II. Il était arrivé le 14 septembre à Saint-Pétersbourg.

[179] Élisabeth-Pauline de Gand de Mérode, guillotinée le 16 février 1794; elle avait épousé Léon Félicité, duc de Lauraguais, devenu duc de Brancas à la mort de son père. Une de ses filles avait épousé, en 1773, le duc d'Arenberg.

[180] Un projet d'évasion avait été formé et la date, fixée, semble-t-il, au 27 du mois d'après Fersen; mais on l'abandonna vite. Il y en eut d'autres: l'un proposé par l'Anglais Crawfurd à la fin de 1791, l'autre en février 1792 par Fersen. Dès le mois de janvier, le bruit d'une fuite royale courait dans Paris. Voir le Journal de Gouverneur-Morris, les Papiers Fersen, janvier et février 1792, et Coblentz, par M. E. Daudet, pièces justificatives. Il y eut enfin en juillet 1792, divers projets élaborés: l'un par la Fayette qui se figurait jouir encore d'une certaine influence; il se sentit impuissant à faire partir le Roi: l'autre dont Mme de Staël était l'âme. Les réunions avaient lieu chez le comte de Montmorin, rue Plumet. Madame Elisabeth, qui avait été en relations avec les principaux constitutionnels, engagea son frère à tenter un effort près des Jacobins. Voir les Mémoires de Malouet, t. II, et de la duchesse de Tourzel, t. II.

[181] Les Monarchiens, on le sait, étaient les royalistes modérés, ceux qu'on appela plus tard les Feuillants. Sur le système politique des Monarchiens, on peut voir les Mémoires de l'un d'eux, Mallet du Pan.

[182] Sur l'organisation des premiers régiments où beaucoup d'officiers étaient incorporés comme simples soldats; sur le corps de Condé et sur le rassemblement militaire de Coblentz, Cf. Forneron, Hist. générale des Emigrés, t. I, et R. Bittard des Portes, Histoire de l'armée de Condé, premiers chapitres.

[183] Ce corps prit le nom de Marine-royale et atteignit plus tard le chiffre de 600.

[184] Dans une lettre du 21 octobre adressée à Mme de Raigecourt, Madame Elisabeth écrivait: «Je crois, comme toi, que le jeune homme dont tu me parles ne sera jamais heureux dans son ménage; mais je ne crois pas que sa belle-mère en soit tout à fait la cause; je la crois jouée par un vieux renard qui est ami intime de son frère.» Le vieux renard, c'est simplement le comte de Mercy-Argenteau, l'esprit le plus timoré qui fût, qui, lié avec les principaux Feuillants, était partisan des atermoiements. Il connaissait à son maître deux boulets politiques: la Hongrie et les Pays-Bas, et comprenait pourquoi il hésitait à se jeter dans la mêlée.

[185] Premiers décrets contre les émigrés. Quelques jours après, les princes en seront avertis par le Roi, et l'électeur de Trèves sera invité à disperser le rassemblement de Coblentz.

[186] E. Daudet, Coblentz;—Forneron, Hist. des Emigrés;—Corresp., le marquis de Raigecourt au marquis de Bombelles, 16 novembre.

[187] Chaque nuit, un homme de garde couchait en travers de la porte de leurs appartements. Une fois, un caporal se permit de consigner le Roi et la Reine dans leurs chambres, de neuf heures du soir à neuf heures du matin, et cela avait duré deux jours (Madame Elisabeth à Mme de Raigecourt, 17 novembre).

[188] Voulut-on empoisonner la famille royale? On a pu prouver que des affidés des clubs des Jacobins s'étaient glissés dans le service du palais, et que Louis XVI, averti qu'on voulait l'empoisonner, se faisait apporter le pain et le vin par le fidèle Thierry de Ville-d'Avray (Mémoires de Madame Campan).—Le dénuement des prisonniers était extrême. La Reine, une fois, pendant huit jours n'eut pas un sou à sa disposition; elle avait été sur le point d'être forcée d'emprunter au dépôt que le prince de Nassau avait fait pour elle-même. Ce même prince de Nassau écrivait en décembre à Catherine II: «Quelque idée qu'on puisse se former des malheurs du Roi et de la Reine, l'imagination ne peut les atteindre. Il faut avoir eu le tourment d'en être témoin pour en concevoir toute l'horreur. Et ceux que les Jacobins et les Républicains leur préparent les surpassent. Cependant il n'est que trop vraisemblable que leur dessein est de ne les terminer qu'avec leur vie.»

[189] Ministre du Roi auprès de l'électeur.

[190] Ces bruits erronés avaient vivement irrité et contrarié la Reine, qu'ils compromettaient. Le 6 décembre, elle écrivait à Mercy: «Toutes les lettres qui arrivent de Coblentz et du reste de l'Allemagne sont remplies de la nouvelle absurde de notre départ, qui même a été cru par des personnes qui ne connaissaient pas nos sentiments et nos véritables intentions. J'ai voulu m'assurer d'où partait un bruit aussi déplacé. Je n'en suis pas bien sûre, mais il est prouvé que c'est un secrétaire de M. de Metternich, qui a répandu la nouvelle à Coblentz. J'ai sous les yeux le tas de bêtises qu'il a mandé depuis le 17 de novembre jusqu'au 21, où il a fallu enfin changer de ton; il y mêle des circonstances et des noms, qui au moins auraient pu compromettre beaucoup de monde. Ce secrétaire est frère de celui de M. de Vergennes, ministre du Roi à Coblentz. Vous pouvez montrer cette lettre à ma sœur si vous le croyez nécessaire, je vous demande donc qu'on s'assure comment et pourquoi cet homme a répandu de telles absurdités. Il est très intéressant pour nous d'aller à la source de pareilles horreurs, et je regarderai comme personnel à moi tout ce que vous pourrez faire sur cela. Quant à l'écrivain, si c'est par bêtise qu'il s'est laissé duper ainsi, il peut être dangereux pour une place de confiance et compromettre souvent son maître; si ce n'est pas cela, je crois rendre service à M. de Metternich et à tous les honnêtes gens en demandant qu'on en fasse justice (Arneth, Marie-Antoinette, Joseph II et Léopold II, p. 229). D'après une note de Mercy, ce secrétaire s'appelait Kenzinger.

[191] Le duc et la duchesse de Saxe-Teschen. La duchesse était l'archiduchesse Marie-Christine, sœur de Marie-Antoinette.

[192] Charles-Hyacinthe du Houx, comte, puis marquis de Vioménil (1734-1827), avait fait de nombreuses campagnes, maréchal de France sous la Restauration; ami fidèle de la famille royale, fut chargé de plusieurs missions confidentielles. Il tenta, en 1792, de faire livrer Strasbourg aux émigrés. Le complot avorta par les hésitations du comte d'Artois. Voir une Conspiration royaliste, par M. Victor de Saint-Genys, Revue des Deux Mondes, 1880.

[193] Voir les lettres remplies de tristesse que Marie-Antoinette écrit à Mercy, à Fersen, à la duchesse de Polignac;—Mémoires de la duchesse de Tourzel;—Journal de Fersen, Beauchesne, Louis XVII, I, Recueil Arneth, etc. «Quel malheur que l'Empereur nous ait trahis», écrit la Reine à Fersen dès le 7 décembre.

[194] La seule fois qu'il rompt le silence à la fin de décembre, c'est pour ratifier le «conclusum» voté au mois d'août précédent par la Diète de Ratisbonne, et pour demander au Roi de France, la réintégration des princes de l'Empire dans tous leurs droits. Il répond ainsi à l'ultimatum adressé à Paris à la menace faite de marcher sur l'Electorat de Trèves, si les émigrés n'en sont pas expulsés. Voir Coblentz.

[195] Nicolas de Luckner, né en Hanovre, était au service de la France depuis 1763. Maréchal de France depuis décembre 1791, il allait prendre le commandement de l'armée de Flandre. Malgré son adhésion à la Révolution et ses attaches girondines, il ne tarda pas à être suspect. Destitué après le 10 août, il fut emprisonné et guillotiné en 1794. Son ardeur belliqueuse et révolutionnaire est bien dépeinte par Sybel, L'Europe pendant la Révolution, t. I. Voir aussi les ouvrages de MM. Sorel et Chuquet, et Wallon, Hist. du Tribunal révolutionnaire.

[196] La comtesse de Régis, dont il sera plusieurs fois question, était née Madeleine de Bressac; son père, seigneur de la Vache et de Faventines, était chevalier de Saint-Louis, sa mère était Marie-Anne Aymond de Franguières, elle épousa à Grenoble, le 4 janvier 1783, le comte Joachim de Régis, seigneur de Gatinel, coseigneur de Mornas, né à Roquemaure, le 4 novembre 1757. Mme de Régis mourut à Naples en 1806, son mari à Valence, en 1817. Notes fournies par leur arrière-petit-fils, le comte de Régis, à qui nous devons aussi la gracieuse communication du portrait qui orne le frontispice de cet ouvrage.

[197] La comtesse de Tilly.

[198] Correspondance de Calonne et du maréchal de Castries. M. E. Daudet, Coblentz.

[199] Louis XVI à Gustave III. Feuillet de Conches, IV, 271.

[200] Feuillet de Conches, IV, 269, VI, 15;—Flammermont, Négociations secrètes de Louis XVI et du baron de Breteuil, Paris, 1885.

[201] Marie-Antoinette à Mercy, 25 novembre, 16 décembre 1791, Arneth, p. 261, 231.

[202] Correspondance de Simolin, Feuillet de Conches, t. I et II.

[203] Catherine à Grimm, 1er septembre 1791.—Gustave III à Fersen, 20 septembre.

[204] Fils du marquis Virot de Sombreuil, frère de l'héroïque Mlle de Sombreuil, mort à Quiberon.

[205] Genêt à Montmorin, Forneron, t. I, 313.

[206] Voir Angélique de Mackau, marquise de Bombelles.

[207] Le comte Esterhazy à sa femme, Saint-Pétersbourg, 4 septembre 1791. Feuillet de Conches, t. IV. La comtesse Esterhazy devait bientôt rejoindre son mari et tenir un grand état de maison (Souvenirs de Mme Vigée-Lebrun).

[208] La marquise de Bombelles à son mari, Chantilly, 1781. Voir la première partie de cet ouvrage.

[209] Mémoires du comte de Langeron. Aff. étrang., mss.

[210] Lettres au comte Worontzoff.—Ch. de Larivière, Catherine II et la Révolution.

[211] Souvenirs, t. I, p. 312.

[212] Au mois d'août 1791, en réponse à une lettre flatteuse des princes où ceux-ci la comparaient à Prométhée, dérobant un rayon du soleil pour animer le vaste empire que Pierre le Grand avait fait sortir du chaos, et... lui demandaient une grosse somme d'argent. Catherine s'était exécutée de bonne grâce et avait envoyé une traite de 2 millions de livres. Les princes trouvèrent que ce n'était pas assez. Pour passer le Rhin, ne fût-ce qu'avec 10.000 hommes, «le génie de Catherine marchant devant eux», il leur fallait un million de roubles, Catherine envoya plus tard la moitié du complément demandé.

[213] Le domaine de Luka lui fut brusquement enlevé à la mort de Catherine, et fit retour à son ancien propriétaire, M Zagortzky, mais Paul Ier lui en donna un autre en Volhynie. Esterhazy, Mémoires.

[214] Agé de sept ans, et que l'Impératrice avait nommé cornette aux gardes à cheval, brevet du 1er février 1792. Le jeune Esterhazy écrivit pour la remercier à l'Impératrice, qui répondit à l'enfant. E. Daudet, Mémoires du comte Esterhazy, introduction.

[215] Esterhazy semble en effet s'être préoccupé avant tout du Roi et de la Reine. Worontzoff l'assure, le baron de Stedingk le répète dans sa réponse à Fersen du 20 janvier.

[216] Le comte de Stedingk à Gustave III, 21 octobre 1791;—Geffroy, Gustave III et la Cour de France. Ces anneaux, nous l'avons vu plus haut, avaient été créés après l'acceptation de la Constitution.

[217] Breteuil était alors ministre plénipotentiaire de Louis XVI à Saint-Pétersbourg. Les Orloff s'étaient ouverts à lui sur leur projet de renverser Pierre III et lui avaient demandé des moyens de crédit pour mener à bien leur entreprise. Peu clairvoyant, et ne croyant pas au sérieux de cette communication, Breteuil refusa net son appui aux Orloff. Son erreur sur ce point fut telle qu'il ne pensa qu'à profiter d'un congé, qu'il avait obtenu pour rentrer en France. A Vienne, quelques jours après la Révolution de Saint-Pétersbourg, il trouvait un courrier de Versailles lui apportant l'ordre sévèrement exprimé de retourner à son poste. On peut supposer si Catherine l'accueillit aussi favorablement que par le passé, lui pourtant qui avait été le confident des amours de l'Impératrice et de Poniatowski. Mémoires de Ségur, II, 73.

[218] Feuillet de Conches, t. IV. Catherine au prince de Nassau.

[219] Le baron de Stedingk, ambassadeur de Suède à Saint-Pétersbourg, au comte de Fersen, 20 décembre 1791;—Fersen à Marie-Antoinette, 4 décembre 1791;—Papiers Fersen, publiés par le colonel-baron de Klinckowstrom, Firmin-Didot, 1878, t. I.

[220] Le prince de Nassau à Catherine II, 17 décembre 1791. Feuillet de Conches, t. IV.

[221] Mémoire du roi de Suède Gustave III, envoyé à Fersen, op. cit.

[222] A cette époque, Mme de Bombelles ne sait pas encore où est allé son mari. «Les lettres arrivent de Francfort où cependant il n'est pas. On le traite toujours avec la même rigueur à Coblentz, car, lors de l'établissement d'une correspondance entre le Mentor en politique et mon mari et les princes, ledit Mentor a mandé qu'il désirait que son ami fût admis dans la confiance qu'on voulait bien lui accorder et que les anciennes aigreurs fussent oubliées; mais M. de Calonne a déterminé M. le comte d'Artois à s'y refuser absolument de la manière la plus maussade.» Le voyage de Saint-Pétersbourg n'était guère fait pour remettre Bombelles en odeur de sainteté auprès des princes.

[223] On peut supposer qu'au reçu de la lettre de Fersen et par obéissance aux ordres indirects de la Reine, Esterhazy avait eu d'abord l'idée de céder la place à Bombelles. La réflexion, peut-être les conseils de Stedingk qui s'est mis en avant pour offrir ses services, et fera tous ses efforts pour «retenir le comte Valentin et faire partir Bombelles», changèrent l'opinion d'Esterhazy.—Lettre du 20 janvier.—Papiers Fersen.

[224] Déjà Marie-Antoinette avait terminé sa lettre à Catherine par ces mots: «Si Votre Majesté a quelque chose à nous communiquer, que cela ne soit que par M. le baron de Breteuil, qui a toute notre confiance, et il est bien essentiel pour nous que le secret soit absolu pour tout autre.» Il n'y avait dans la confidence que Breteuil, Fersen, Vioménil et Bombelles. On verra plus loin que Catherine s'empressa d'en faire part au prince de Nassau et au comte de Romantzow par l'entremise du ministre Ostermann. Esterhazy s'était montré discret au début. La Reine resta persuadée qu'il avait été le révélateur du voyage de Bombelles et en conçut contre son ancien fidèle une profonde irritation.

[225] Feuillet de Conches, t. V.

[226] Catherine avait toujours eu un faible pour le prince de Condé. A la lettre du 24 septembre 1791, à elle adressée par les princes de Condé, elle avait répondu, le 25 octobre, par une lettre remplie de louanges «pour le zèle infatigable et la fermeté héroïque que les Altesses sérénissimes déployaient dans la cause de leur Roy opprimé». Rappelant la gloire de la maison des Condé, défenseurs et soutiens des droits du trône, elle ajoutait: «C'est sous un de vos ayeux, que Henri IV fit le premier apprentissage des armes. Le grand Condé fonda et assura l'éclat immortel du règne de Louis XIV par ses victoires. C'est à Vos Altesses Sérénissimes, qui se montrent si dignes d'ancêtres aussi glorieux, qu'il est réservé, en marchant sur leurs traces, de maintenir tout le lustre du nom qu'elles portent. J'en ai le présage dans la conduite ferme et généreuse, qu'elles ont tenue jusqu'à présent, et tous les succès qu'elles en obtiendront ne surpasseront point les vœux que, dans la sincérité de mon estime et de mon affection pour elles, je forme en leur faveur.» (Arch. nat., Dossier Surval. Publiée avec variante dans Mémoires pour servir à l'Histoire des Princes de Condé, t. II, Ponthieu, 1820).

[227] Voir Mém. d'Esterhazy.

[228] Ernest Daudet, Histoire de l'émigration.—Feuillet de Conches, t. IV.

[229] Voir la lettre du baron de Breteuil au maréchal de Castries, 20 janvier.—Coblentz, Pièces justificatives.

[230] Le 4, le comte d'Artois avait écrit à Madame Elisabeth pour exprimer sa juste douleur de voir employer M. de Bombelles à son insu et pour rappeler les griefs qu'il gardait au marquis depuis les incidents de Florence, racontés à sa façon. Voir supra.—E. Daudet, Coblentz, pièces justificatives.

[231] Feuillet de Conches, t. V.

[232] Pendant ce temps, les biens des émigrés avaient été confisqués par décret du 9 février. Les préparatifs de guerre se font des deux côtés, mais, comme l'écrit le marquis de Raigecourt, «nous craignons que l'amour de l'Empereur pour la paix et l'impossibilité de l'Assemblée de soutenir une guerre sérieuse, n'amène quelque fâcheux accommodement, et nous redoutons toujours les deux Chambres». A la marquise de Bombelles, 4 février.

[233] M. E. Daudet, Coblentz, pièces justificatives.

Le 22 février, Madame Elisabeth écrivait à Mme de Bombelles: «Nous avons une neige affreuse depuis cinq jours et un froid assez piquant. Malgré cela, la Reine et les enfants ont été aux Evénements imprévus. Au duo, Ah! comme j'aime ma maîtresse! il y a eu les plus vifs applaudissements; et lorsqu'ils disent: il faut les rendre heureux—une grande partie de la salle s'est écriée «oui, oui!» bref le duo a été répété quatre fois. Au milieu de tout cela il y a les Jacobins qui ont voulu faire le train... C'est une drôle de nation que la nôtre; il faut avouer qu'elle a des moments charmants.» La princesse conte les mêmes événements quelques jours après au comte d'Artois. En même temps elle donne à son frère des conseils de modération et des impressions sur la Reine, dont la justesse doit être remarquée. «Je trouve que le fils a trop de sévérité pour sa belle-mère. Elle n'a pas les défauts qu'on lui reproche. Je crois qu'elle a pu écouter des conseils suspects, mais elle supporte les maux qui l'accablent avec un courage fort, et il faut encore plus la plaindre que la blâmer, car elle a de bonnes intentions. Elle cherche à fixer les incertitudes du père qui, pour le malheur de la famille, n'est plus le maître, et je ne sais si Dieu voudra que je me trompe; mais je crains bien qu'elle ne soit l'une des premières victimes de tout ce qui se passe, et j'ai le cœur trop serré à ce pressentiment pour avoir encore du blâme.»

Le 28, Madame Elisabeth annonce à Mme de Bombelles la mort de la vicomtesse d'Aumale, ancienne sous-gouvernante des Enfants de France, qu'elle aimait beaucoup.

[234] Le comte de Caraman avait rempli à Berlin une mission secrète.

[235] Le baron de Taube au comte de Fersen, 20 février. Papiers Fersen.—Dans ses Mémoires, on sent Esterhazy gêné vis-à-vis de Bombelles autrefois son ami.

[236] Genêt à de Lessart, 17 février et 20 mars. Aff. étrang., Forneron, I, 312.—De Lessart n'était plus ministre quand arriva la seconde dépêche.—On sait qu'il fut massacré, le 9 septembre, avec les prisonniers d'Orléans à Versailles. Dumouriez fut nommé ministre le 17 mars. Il quitta le ministère en juin devant le refus du Roi de sanctionner le décret contre les prêtres. Aux Affaires étrangères, il fut remplacé par le marquis de Chambonas.

[237] Le 22 mars, Mme de Bombelles a écrit à Mme de Raigecourt une longue lettre renseignée. «Je vous avoue que je suis très fâchée que le voyage de mon mari n'ait pas pu se concerter avec Coblentz. Que doit penser l'Impératrice de voir le peu d'union qui règne entre lui et le comte d'Esterhazy? Au lieu de s'entraider, ils doivent se nuire, et le résultat en est le mal pour tout le monde. Mon mari a fait tout au monde pour lier sa partie avec son ancien ami, mais il n'y a pas eu moyen. L'arrivée de M. de Nassau, a été pour lui un soulagement, il est vrai, ils se sont vus, entendus et compris, et j'espère que tout en ira mieux: mon pauvre mari ne désire que le bien et la paix, et il est bien plus affligé de la persécution des princes pour la chose que pour lui.» Le 3 avril, elle revient sur le même sujet et complète ses réflexions: «Il a fait tout au monde pour s'entendre avec le comte d'Esterhazy qui, au lieu de se conduire de même, n'a cherché qu'à lui barrer tous les chemins, et l'a fait tellement passer pour démocrate, qu'on était étonné, qu'ayant de tels principes, il portait sa croix de Saint-Lazare... Je suis aussi profondément affligée, bien moins des désagréments de mon mari, qui, en se faisant connaître à Saint-Pétersbourg, se fera juger, que de l'inconvénient affreux qui résulte de nos querelles intestines, et je vois avec douleur que les torts sont de tous les côtés, et que personne, hors mon mari, n'est animé du désir de servir Dieu, son Roi et sa patrie, sans être préalablement plus occupé de ses intérêts et de sa vengeance propre.»

[238] Fersen, 28 mars.

[239] Léopold, frère de Marie-Antoinette, se prêtait peu au projet des princes, et sa mort fut saluée avec une joie assez peu discrète. Mort le 1er mars 1792.

[240] Gustave III, blessé mortellement, le 10 mars, par le pistolet d'Ankarström, succombait à sa blessure le 29 mars. Il était le ferme soutien de la famille royale et des émigrés, et sa mort fut cruellement sentie par ces derniers, tandis qu'elle arrachait des cris de triomphe aux feuilles révolutionnaires. Voir sa Correspondance avec Fersen dans le Comte Axel de Fersen, par le colonel baron de Klinckowström, et l'excellent ouvrage de M. Geoffroy: Gustave III et la Cour de France.

[241] Bombelles ne sait combien de temps durera sa mission si peu déterminée. «Je n'ai jamais eu le projet de faire ici (Saint-Pétersbourg) un long séjour, écrit-il au comte de Régis, le 10 avril 1792. J'ignore pourtant ce que je deviendrai cet été, mais je ne néglige rien pour arriver pendant cette saison même au sommet de la colline où vit tout ce que j'ai de plus cher au monde. A brebis tondue, Dieu mesure le vent.»

Il jouit d'une bonne santé depuis qu'il est en Russie. Il se fait, comme d'ordinaire, des illusions sur ses succès de diplomate, il s'en fait aussi sur le processus des événements. «Ne croyons ni aux gens qui se figurent que nos malheurs touchent à leur terme, ni à ceux qui les voient incurables, éternels: les souverains n'ont pas su ce qu'ils se devaient; une vieille jalousie pousse encore l'ivraie au milieu des bonnes dispositions qu'on reconnaît qu'il faut avoir, mais l'eau qui tombe goutte à goutte perce les plus durs rochers, et il s'en faut de beaucoup que celui sur lequel repose la Constitution ait la solidité du granit. Disons avec le grand Frédéric que tout le mal qu'on appréhende n'arrive pas, comme tout le bien qu'on espère ne s'effectue pas.»

Bombelles croit être à plus d'à moitié de son séjour à Pétersbourg; il oublie les difficultés du commencement. «Je ne regretterai jamais d'y être venu, je dirai à mes petits enfants: j'ai vu Catherine, et j'aurai connu un pays qui, sans elle, eût perdu tout le fruit des travaux de Pierre Ier, qui, par elle, s'est élevé au plus haut degré de splendeur.—Pendant ce temps, Esterhazy souligne que Bombelles fut «moins bien traité que ne l'étaient les étrangers considérables qui venaient en Russie».

[242] Le nouveau Roi de Hongrie et Empereur d'Autriche (François II, plus tard empereur d'Allemagne) venait d'envoyer un Mémoire aux puissances ennemies de la Révolution française pour les coaliser contre la France. Bombelles avait obtenu de Stedingk, de présenter des observations, comme émanant de l'ambassadeur de Suède, sur le mémoire destiné à Catherine II. L'ambassadeur de Hongrie et le ministre de Prusse «se donnaient bien du mouvement pour que les secours de la Russie ne fussent qu'en argent». Bombelles se berçait de l'illusion que Catherine, par orgueil, «voudrait que ses drapeaux paraissent».—V. Papiers Fersen et A. Sorel, l'Europe et la Révolution française, t. II.

[243] Correspondance de Catherine II, 12 avril et 2 mai;—Sorel, l'Europe et la Révolution, t. II.

[244] Rapport de Bombelles à Breteuil, 8 mai.—Fersen à Marie-Antoinette, 2 juin.—Au Roi de Suède, 3 juin.—Papiers de Fersen, t. II, 267, 286, 296.

[245] Voir A. Chuquet, l'Invasion prussienne, p. 46-47.

[246] Mme de Bombelles à Mme de Raigecourt, 27 avril.—Catherine à Grimm, 4 juin.—Les troupes de Catherine étaient entrées en Pologne, le jour même où l'Autriche et la Prusse avaient donné l'ordre à leurs troupes de marcher sur la France.

[247] Celui-ci flottait dans les alternatives de satisfaction ou de découragement. A la fin de mai, il a mandé à sa femme qu'il était plus content. Sa femme est plus sceptique et, partant, dans le vrai: «... Cependant, il ne s'explique pas, mande-t-elle à M. de Raigecourt, le 1er juin, et je ne comprends pas ce qu'on en peut espérer; car si la Russie fait la guerre à la Pologne, comment peut-elle se mêler de nos affaires? Au reste, nous pouvons nous passer d'elle, et il nous suffit qu'elle soit neutre.»

[248] Lettre de Catherine à Grimm, 17 août 1792.

[249] «Je soutiens, écrivait-elle à Grimm, le 20 mai, qu'il ne faut s'emparer que de deux ou trois bicoques en France et que tout le reste tombera de soi-même... Vingt mille cosaques seraient beaucoup trop pour faire un tapis vert depuis Strasbourg jusqu'à Paris: deux mille cosaques et six mille Croates suffiraient.» Même après la reculade de Valmy et la «cacade» qui s'en suivit; elle n'est pas déconcertée et ne change pas de système. Les deux mille cosaques avec beaucoup d'autres vont combattre la jacobinière de Pologne et non celle de France.

[250] Un jour viendra même où elle se reprochera d'avoir fourni inutilement tant de subsides aux émigrés. Le 5 septembre 1796, trois mois avant sa mort, elle écrira à Grimm: «Ils ont eu des fonds énormes. Qu'en ont-ils fait? Ils ont vécu grandement, largement et ont tout mangé et n'ont fait que de l'eau claire. Au premier moment, ils ont eu 8 millions; moi seule, je leur ai fait tenir au-delà d'un million et demi de roubles la première année.»

[251] La confusion où la Révolution française jetait l'Europe devait permettre à Catherine II d'exécuter ses plans à l'égard de la malheureuse Pologne. Cf. les ouvrages de Sybel et de M. A. Sorel, déjà cités, et l'Histoire diplomatique de la Révolution française, par le baron de Bourgoing.

[252] Mémoires de Mme Campan.

[253] Considérations sur la France, t. I.

[254] Mémoires de la duchesse de Tourzel, II, 178.

[255] Mémoires de Weber, 413.

[256] Par M. Albert Savine.

[257] Le manifeste que signa le duc de Brunswick, œuvre de folie des émigrés. Voir dans l'Histoire parlementaire, t. XVI, le manifeste in extenso. Voir aussi, Mortimer Ternaux, Hist. de la Terreur, t. II. Mathieu Dumas a nommé le manifeste du duc de Brunswick, «l'acte le plus impolitique que l'orgueil et l'ignorance aient jamais dicté, véritable fratricide des princes français émigrés envers Louis XVI et sa famille».

Le manifeste était dû à la plume d'un émigré, M. de Limon, et ce fut Fersen qui fit substituer ce texte à celui bien plus modéré de Mallet du Pan.

[258] Ce n'est pas sans raison que Madame Élisabeth pouvait s'effrayer de la présence des Marseillais. On sait quel rôle ils jouèrent dans le drame des journées d'août.

[259] Voir les Mémoires de la duchesse de Tourzel, t. I; les Mémoires de la Fayette, t. I; de Bertrand de Moleville, t. I; de Miot de Mélito, t. I; de Brissot, t. IV; et Taine, les Origines..., la Conquête jacobine.

[260] Il faut relire ces pages des Mémoires de Malouet où le rôle de Madame Élisabeth est clairement exposé. Cf. aussi les Mémoires de la duchesse de Tourzel.

[261] Même dossier des Archives nationales, publié par M. Albert Savine, Revue hebdomadaire, 9 août 1902.

[262] Avant les démarches tentées in extremis sur les meneurs du mouvement en faveur de la déchéance, on ne croyait plus possible de sauver la famille royale. Le 1er août, Marie-Antoinette avait fait écrire par Goguelat à Fersen une lettre désespérée. Pétion, au nom de 46 sections sur 48, demandait la déchéance le 3... Les Marseillais s'installèrent au centre de la capitale, tandis que Jourdan coupe-tête et les massacreurs de la Glacière se joignaient à Santerre. Le Roi et la Reine s'attendaient à être égorgés.

[263] La lettre, malgré la date écrite en surcharge par la princesse, est du 9 et non du 10. Les motions relatives aux fédérés, à renvoyer à Soissons, le sursis pour le vote du décret de déchéance, l'apparition à l'Assemblée du maire Pétion, tout cela est du 9.

[264] Journal d'une bourgeoise pendant la Révolution (Mme Jullien) publié par M. Lockroy.

[265] 1754-1835. Avocat, conseiller au Parlement de Metz, s'était fait remarquer par des travaux d'économie politique. Il défendit la famille royale dans le Journal de Paris, dut se cacher après la proscription des Girondins et ne reparut qu'après le 9 thermidor. Il entra à l'Institut, professa aux Ecoles centrales, seconda Bonaparte au 18 brumaire, devint conseiller d'Etat, puis sénateur, ministre des Finances de Joseph, comte et pair de France en 1815. Il vécut dans la retraite sous la Restauration et ne recouvra la pairie qu'en 1832. Il a écrit nombre d'ouvrages économiques et littéraires, même des comédies historiques.

[266] Mot de Mlle de Tourzel, Souvenirs de quarante ans, p. 131.

[267] C'est à tort que Gœthe lui donne l'épithète d'âgé. Bombelles avait alors cinquante-quatre ans.

[268] Une lettre suivante de Mme de Raigecourt la dit réfugiée rue de Sèvres, saine et sauve.

[269] Saiffert, Beitrage zur ubschäftlichen Arztneilehre. Paris, 1804, Ire partie, p. 169.

[270] Dès le lendemain de Valmy, Brunswick avait entamé des négociations avec Dumouriez, et dès le 30, la retraite des Prussiens avait commencé. Il faut se rappeler que le duc de Brunswick faisait mollement la guerre à la France, qu'en janvier 1792, Philippe de Custine avait été chargé d'une mission particulière auprès du duc de Brunswick. Il ne s'agissait pas seulement, comme l'a écrit Adolphe de Custine, de décider le duc de Brunswick à refuser le commandement de l'armée, coalisée contre la France, mais d'offrir au généralissime de prendre le commandement de l'armée française. Si invraisemblable que paraisse le plan, l'idée en fut étudiée.

Le duc de Brunswick était très populaire en France: Mirabeau l'avait peint comme un nouvel Alcibiade, les Girondins et Dumouriez l'admiraient, Carra le montrait dans son journal comme le plus grand guerrier et le plus grand politique de son siècle.—Voir A. Sorel, la Mission de Custine à Brunswick (Revue historique, 1876); Mémoires du baron de Bourgoing, 1re édition, t. I;—Fantômes et Silhouettes, Madame de Custine;—Recueil Feuillet de Conches,—le Comte de Fersen et la Cour de France.

[271] Peu après, Cléry fut autorisé à s'occuper du jeune prince. Voir Louis XVII, par Beauchesne et le Journal de Cléry.

[272] Ce fut en effet l'un des chefs d'accusation formulés contre Madame Élisabeth, l'année suivante.

[273] Le Gouvernement français n'avait plus de relations diplomatiques avec le Saint-Siège. Cependant l'ordre avait été donné d'arborer l'écusson de la République sur la maison du consul de France à Rome. Hugon de Basseville, secrétaire de la législation à Naples, était chargé de la négociation, et le 12 janvier, un officier de marine, de Flotte, apportait un ultimatum. La population romaine, exaspérée par le procès de Louis XVI, s'ameuta, Basseville et de Flotte, qui avaient eu l'imprudence de se promener sur le Corso, furent poursuivis: Basseville fut tué et de Flotte n'échappa qu'à grand'peine. Le baron de Mackau était alors ministre à Naples; voilà pourquoi Mme de Bombelles avait pu croire dans le premier moment que c'était lui qui avait été assassiné.

[274] Voir le tome II de l'Hist. de l'Emigration par M. Ernest Daudet.

[275] Abandonné par ses troupes, Dumouriez avait été contraint, le 5 avril, de se réfugier dans le camp autrichien. Il avait un plan pour restaurer la monarchie, mais non pas suivant les vues des émigrés, ce qui fait que ceux-ci partageaient sur lui les préjugés de Mme de Bombelles. «Eussé-je cent vies, avait dit Dumouriez, que je les donnerais pour mettre un terme aux atrocités des Jacobins, et en eussé-je mille que je les sacrifierais de même pour ne laisser aucun pouvoir étranger ni aucun émigré dicter des lois à ma patrie.» Voir Sybel, Histoire de l'Europe, pendant la Révolution, t. II; A. Sorel, l'Europe et la Révolution française, t. II; Mortimer-Ternaux, Histoire de la Terreur, t. VI, où l'affaire Dumouriez est contée en grands détails; le Journal de Fersen. Voir enfin le dernier ouvrage en date: la Trahison de Dumouriez, par M. Arthur Chuquet.

[276] Voir ce que nous avons dit au sujet de la lettre du 6 août adressée à Madame Élisabeth.

[277] Mme de Bombelles est inégale dans ses appréciations politiques. Nous avons montré des moments où elle s'est montrée plus modérée et, partant, plus perspicace.

[278] Par décret du 6 avril, la Convention avait ordonné l'arrestation de tous les Bourbons qui se trouvaient encore en France. En exécution de ce décret, le duc d'Orléans (Philippe-Égalité), le duc de Montpensier et le comte de Beaujolais étaient incarcérés à Marseille. Le duc de Chartres, dont la conduite militaire avait été fort brillante à Jemmapes et à Valmy, avait suivi Dumouriez en émigration.

[279] Mme de Bombelles partageait les illusions de beaucoup d'émigrés et de royalistes sur Gaston, perruquier, général de quelques jours, qui commanda le soulèvement de Challans et fut tué le 15 avril 1793 à Saint-Gervais. De faux rapports avaient fait de lui le commandant de Longwy, qui avait ouvert ses portes aux princes en 1792, et beaucoup s'imaginaient que tous les insurgés vendéens étaient commandés par le général Gaston. Voir les Mémoires de Mme de la Rochejacquelein, t. I, p. 105, édit. Dentu.

[280] Nantes fut attaquée le 29 juin par les troupes de Charette et de Cathelineau. L'armée royale dut se retirer après dix-huit heures de combat. Cathelineau était blessé à mort dans l'attaque et mourait quelques jours après.

[281] Pour le mouvement fédéraliste, voir Du Chatellier, Histoire de la Révolution en Bretagne; Cf. Carrier à Nantes, Plon, 1897.

[282] La capitulation de Mayence est du 22 juillet. Celle de Valenciennes du 1er août.

[283] Maret, le futur duc de Bassano, Huguet de Montaran de Sémonville, futur marquis de Sémonville et grand référendaire de la Cour des Pairs, alors agents diplomatiques de la République, furent en effet arrêtés le 25 juillet. L'Autriche, violant le droit des gens—avec le but de se faire des otages—les fit enfermer dans la forteresse de Kufstein, en Tyrol. Ils y demeurèrent jusqu'en 1795, époque où ils furent échangés contre Madame Royale. On doit croire qu'en traversant l'Italie, les deux envoyés étaient chargés de promettre à Florence, Venise et Naples la conservation des jours de la Reine, à condition que ces trois États feraient un traité d'amitié avec la France. Voir: Maret duc de Bassano, par le baron Ernouf;—Sur la captivité de Kufstein cf. les papiers Bassano publiés dans le Carnet historique et littéraire, année 1899. Sur la généalogie des Montholon-Sémonville, voir les Souvenirs de la comtesse de Montholon publiés par le vicomte du Couédic et le comte Fleury, Emile Paul, 1901.

[284] Les émigrés semblent s'être complus à souligner d'étrange sorte la façon peu courtoise dont Sémonville et Maret avaient été accueillis en Suisse. Sémonville se plaint à Barthélemy ambassadeur auprès de la république helvétique: «A Coire, M. de Bombelles, considéré comme le chef des émigrés, avait retenu une chambre pour voir de la fenêtre les insultes dirigées contre nous. Un silence absolu et l'attitude du mépris devaient être notre seule réponse jusqu'à une provocation directe. Elle n'a point eu lieu; mais ce complément d'outrages n'était pas nécessaire pour que vous fussiez instruit d'un fait aussi contraire aux principes professés pour le conseil helvétique.» Papiers de Barthélemy, publiés pour la Commission des Archives diplomatiques, par Jean Kaulek.

[285] Il ne pouvait être question de Gaston, mort depuis trois mois. Mais quatre jours après la mort de Cathelineau, le 18 juillet, Santerre fut battu à Villiers par les Vendéens de la Rochejacquelein et de Lescure. Santerre ne put s'échapper qu'à grand-peine. Voir les Mémoires de Mme de la Rochejacquelein et Savary, Guerre des Vendéens, t. II.

[286] Le marquis de Soucy, fils de la sous-gouvernante des Enfants de France avait, on se le rappelle, épousé sa cousine, Mlle de Mackau, sœur d'Angélique.

[287] Opinion de Napoléon, Mémoires d'un ministre du Trésor public, t. III.—«Paris n'a plus un crime à commettre, écrivait le cardinal de Bernis. Le dernier ajoute à tous les autres un degré d'horreur et d'infamie inconnu jusqu'à aujourd'hui.»

[288] Le 16 octobre.

[289] Gagné est exagéré, mais Danton avait fait répondre à Mercy que la mort de la Reine n'entrait pas dans ses calculs.

[290] Marie-Antoinette avait reçu, à la Conciergerie, les secours spirituels d'un prêtre non assermenté, l'abbé Magnin, mort curé de Saint-Germain-l'Auxerrois. Le fait a été démontré par M. de la Rocheterie, Revue des questions historiques, janvier 1870. La même question a été traitée dans la même revue par M. Victor Pierre, janvier 1890.

[291] Voir Ferrand,—Éloge de Madame Élisabeth.—Notes de Mme de Bombelles.

[292] Dont un descendant devait écrire plus tard l'histoire du prince de Nassau-Siegen.

[293] Madame Élisabeth fut guillotinée le 10 mai 1794. On sait avec quelle douceur mourut la sainte princesse. Il faut lire, dans le beau livre de M. de Beauchesne, la scène sublime où les compagnes de son martyre vinrent, sur l'initiative de Mme de Crussol, embrasser la princesse et lui demander sa bénédiction. Lire aussi Pages sombres, livre récent où Mme la duchesse de Brissac a raconté cette scène avec émotion.

M. Dassy l'avait aperçue par hasard dans le trajet qu'on lui faisait suivre pour la conduire au supplice. Il fut tellement affecté de cette vision que, rentré chez lui, il répondit à sa femme qui le pressait de s'expliquer sur le changement survenu dans sa personne: «J'ai reçu le coup de la mort; je viens de rencontrer et de reconnaître dans une charrette un ange allant à l'échafaud.»

[294] Éloge de Madame Élisabeth.

[295] Le comte de Régis écrit ceci à la date du 19 mai: «Nous avons reçu l'affreuse nouvelle de la mort de Madame Élisabeth, qui a été sacrifiée et massacrée par les mêmes scélérats qui ont immolé le Roi et la Reine...» Après des réflexions sur les «monstres qui composent le tribunal dit révolutionnaire», M. de Régis ajoute: «Mme de Bombelles, qui avait été sa dame de compagnie et son amie de cœur, perd en elle tout ce qu'il est possible de perdre; aussi est-elle affectée de cette mort autant que peut l'être un cœur aussi honnête et aussi sensible que le sien. Il n'y a qu'un seul sentiment parmi nous: celui de la plus profonde horreur pour les scélérats bourreaux et tyrans de la France, et celui de l'affliction que nous cause la perte d'une princesse si vertueuse, ainsi que du plus tendre intérêt pour son amie, que cette mort a mise dans un état pitoyable.»

[296] Cette dernière lettre de Madame Élisabeth est donnée plus loin.

[297] Lettre publiée dans les Mémoires d'Alissan de Chazet.

[298] Alissan du Chazet, op. cit. Feuillet de Conches, Correspondance de Madame Élisabeth.

[299] Plus tard, en 1796, et non en 1804, comme l'écrit M. Daudet, le comte d'Artois, devenu plus juste, écrira au comte de Vaudreuil: «M. de Bombelles a pu avoir des torts envers moi, mais je ne dois pas oublier que sa femme était l'amie de ma malheureuse sœur, et qu'en mourant elle m'a recommandé la famille de son amie.»—L. Pingaud, Correspondance de Vaudreuil, t. II, 268.

[300] Le nombre des maréchaux de camp était déjà invraisemblable. Son frère, le baron de Bombelles, était un de ceux-là. Voir l'Histoire de l'armée de Condé, par M. R. Bittard des Portes.

[301] L'armée de Condé s'acheminait vers la Pologne. Quelques semaines auparavant, l'Europe avait appris, non sans stupéfaction, que Paul Ier prenait à son service ces quelques milliers de Français, que l'Angleterre et l'Autriche venaient d'abandonner, et qu'il leur donnait le choix entre des emplois dans l'armée russe ou des terres en Crimée. Tandis que le prince de Condé était appelé à Saint-Pétersbourg, l'armée s'était embarquée en Bavière pour gagner la Pologne sous la conduite de commissaires russes. Moitié par bateau, moitié par voie de terre, elle traversait la Moravie et la Gallicie pour gagner la Volhynie, où elle devait séjourner jusqu'au printemps à Dubno, siége du quartier général des princes. L'armée de Condé séjourna en Pologne jusqu'à la formation de la seconde coalition. Elle fut alors dirigée vers la Suisse, trop tard pour prendre part aux opérations. Le tsar ne se montrait pas disposé à la conserver après qu'il se fût séparé de ses alliés. Au commencement de 1800, Condé obtint, par l'intermédiaire de Wickam, qu'elle repasserait à la solde de l'Angleterre.

Pour les détails, voir l'ouvrage de M. Ernest Daudet: Histoire de l'émigration, t. II.

[302] Correspondance publiée par M. de la Rocheterie, et Introduction.

[303] Il avait publié déjà, en Suisse, une brochure de Considérations. Les Mémoires complets existent. Nous avons déjà dit plus haut pourquoi ils ne seront pas publiés et comment nous était venue la bonne fortune d'avoir communication d'un important fragment qui est en la possession de M. le marquis de Castéjà. De ces pages, nous avons donné le meilleur dans les premiers chapitres de ce volume. Le maréchal de Castellane, t. I, de ses Souvenirs, page 335, parle de 80 volumes manuscrits remplis d'anecdotes, mais qu'on aura sans doute brûlés après sa mort. Il a connu le marquis de Bombelles, il a goûté son esprit et regrette la non-publication de ses Mémoires. A la date de mars 1817;—mais là le Journal n'a pas été écrit au moment même, car Bombelles n'est mort qu'en 1822.

[304] De Windich Freshée, près Mahrburg en Basse-Styrie, alors quartier général du prince de Condé.

[305] Comte Ferrand, Éloge de Madame Élisabeth: Articles de la Gazette de Brünn des 1er et 4 octobre.—Alissan de Chazet, Mémoires et Souvenirs, t. II;—Feuillet de Conches, Correspondance, Introduction.—Feuillet ajoute un souvenir personnel: Passant à Brünn en 1852, il trouva un vieillard de soixante et onze ans qui avait assisté à cette scène et s'en souvenait comme d'une chose présente.

[306] Les restes de Mme de Bombelles furent transférés, il y a une dizaine d'années seulement, dans la sépulture de famille des Bombelles dans la terre d'Opeka, près de Vinika (Croatie). Renseignements fournis par M. le comte Marc de Bombelles.

[307] Voir Journal d'un fourrier de l'armée de Contades, publié par le comte Gérard de Contades, et l'Histoire de l'armée de Condé, par M. Bittard des Portes.

[308] Parlant des émigrés militaires, Napoléon a dit à Sainte-Hélène: «Ils étaient salariés de nos ennemis, il est vrai, mais ils l'étaient ou auraient dû l'être pour la cause de leur Roi. La France donna la mort à leur action et des larmes à leur courage.» Mémoires de Napoléon, t. II, p. 310.

[309] Archives de M. le comte de Régis.

[310] Archives de M. le comte de Régis.

[311] La Reine Caroline de Naples.

[312] Ville de Silésie qu'avait prise le grand Frédéric en 1741, et dont s'empare Jérôme Napoléon en 1807.

[313] Dominique-Joseph Vandamne, né en 1771 à Cassel (Nord), mort en 1830, fit toutes les campagnes de 1792 à 1812. Disgracié, en 1812, par suite de ses démêlés avec Jérôme. En 1813, il fut fait prisonnier à Culm, avec 6.000 hommes, désastre qui compromit le plan de la campagne. Pair de France pendant les Cent Jours, s'exila en Amérique à la deuxième Restauration, ne revint en Europe qu'en 1824, et mourut en Belgique.

[314] Alissan de Chazet, Mgr de Bombelles.

[315] Henri-François, né le 26 juin 1789.

[316] Inédite, d'après l'original. Collection d'autographes de Mme Louis de Cernay.

[317] On chante encore ses louanges dans le diocèse, Alissan de Chazet ne nous laisse ignorer aucun trait de sa bienfaisance. Mme Auguste Craven, qui l'a beaucoup connu, avait conservé de Mgr d'Amiens la plus douce et la plus affectueuse mémoire: «Par son apparence de bonté et de sainteté, sa figure rappelait celle de saint Vincent de Paul et de saint Alphonse de Liguori, et quoiqu'il ne fût pas de haute taille, il avait l'air noble, et ses manières étaient celles d'un grand seigneur, tout en étant d'une simplicité et d'un enjouement qui attiraient autour de lui les enfants partout où il se trouvait. Il aimait à leur parler, à les exhorter et à les bénir» (Récit d'une sœur).

D'autres témoins oculaires ont souligné et sa mansuétude et la gaieté de son esprit. C'est le maréchal de Castellane se rappelant qu'un certain soir, chez M. de la Ferronnays, le marquis-évêque joua des valses et des contredanses sur le piano. «Il a même un peu dansé. Ce bon évêque n'aura pas été, je l'espère, damné pour cela», et le Journal ajoute: «il portait sur sa mitre ses deux étoiles de maréchal de camp.» Un autre souvenir est conté dans les Mémoires de la Restauration et repris par M. Denormandie, dans ses curieux Souvenirs. Un soir, comme M. de Bombelles, accompagné de deux de ses fils, allait entrer dans les salons d'une ambassade, l'huissier lui demanda son nom: «Annoncez l'évêque d'Amiens et ses fils.» Devant la tête abasourdie de l'huissier, il reprit: «Annoncez, alors, l'évêque d'Amiens et les neveux de son frère.»

[318] La marquise de Travanet, sœur de M. de Bombelles, était rentrée en France sous l'Empire. Elle mourut à Paris, le 4 mai 1828. Son tombeau est au cimetière du Mont-Valérien, 10e rangée.

[319] Cette maison était en face de l'hôtel de Louvois; Mme de Louvois, sœur du marquis, donna une soirée de noces où fut joué un proverbe de Leclerc.

[320] Dont les agréables Souvenirs viennent d'être publiés par le comte de la Boutetière, son petit-neveu (Plon).

[321] Mariée l'une au comte Clam Martinicz, l'autre au baron de Puthon.

[322] Par l'aimable entremise de M. le comte Elie de Lastours, alors secrétaire d'ambassade à Vienne, qui nous a mis en correspondance avec les survivants de cette noble famille de Bombelles, aujourd'hui dispersée en différentes parties de l'Autriche.

[323] Il n'était que le troisième; il devint le second après la mort de Bitche, en 1805.

[324] Il correspondait directement avec Metternich. Welschinger, le Roi de Rome, p. 93.

[325] Devint colonel et fut longtemps attaché à la maison de l'Empereur François-Joseph. C'est le comte Louis, aujourd'hui octogénaire, et père de la baronne de Schell.

[326] Elle fut l'amie de Nathalie Narischkin; il est souvent question d'elle dans: La Sœur Nathalie Narischkin, fille de la Charité de Saint-Vincent-de-Paul, par Mme Aug. Craven, née la Ferronnays.

[327] Wercklein, qui avait succédé comme ministre à Neipperg, s'était vu chasser en 1830 par la Révolution, et il était trop impopulaire pour être repris au retour de Marie-Louise.

[328] Comte de Falloux, Mémoires d'un royaliste.

[329] On se rappelle que l'archiduchesse avait épousé Neipperg lors de sa deuxième grossesse en 1820, mariage nul, puisque Napoléon n'était pas mort. En 1821, Neipperg chercha une formule pour annoncer la mort de l'Empereur. Il trouva cette périphrase: «serenissimo consorte della Duchessa», et la Gazetta di Parma annonça que le sérénissime prince consort de la duchesse était mort. Metternich, après avoir beaucoup ri, écrivait le 2 août à Neipperg: «Votre découverte du sérénissime consort est une merveille». Trolard, De Montenotte à Arcole, Archives de Parme. Les deux enfants portèrent le nom de Montenuovo, traduction italienne du nom de Neipperg (nouvelle montagne). Neipperg mourut en 1829 et fut enterré au couvent de Saint-Paul, où Marie-Louise lui fit élever un monument de 120.000 francs. Ernesto Masi, Li due Moglie di Napoleone I, Bologne, 1889.

[330] Ce mariage eut lieu avec l'assentiment de la Cour d'Autriche, et l'archiduchesse en a indiqué la date dans ses deux testaments, celui du 25 mai 1837 et du 22 mai 1844. Il est dit à l'article 17 du second testament: «Je lègue au comte Charles de Bombelles, mon grand-maître, avec lequel je suis mariée secrètement depuis le 17 février de l'année 1834, le capital nominal de 300.000 livres italiennes en rentes milanaises, legs qui se solde sur les papiers publics que je possède (Archives de Parme, notes d'Armand Baschet).

[331] Monumenti e munificenza de S. M. la princessa imperiale Maria Luigia, Parme, 1845, publié par ordre du comte de Bombelles.—Welschinger, le Roi de Rome.—Trolard, De Montenotte à Arcole.—Chaillot, Notice sur l'administration du comte de Bombelles, 1858.

[332] Une tradition très vivace raconte que Bombelles avait été visé par les conspirateurs, et que le chapelain aumônier, ayant bu de l'eau empoisonnée, mourut à sa place. D'après cette même tradition, Marie-Louise, qui mourut, en effet, très rapidement, aurait bien pu périr victime d'un empoisonnement. Voir la Mort de Marie-Louise, d'après des documents italiens dans la Marquise de Sade. Recueil de fragments historiques, par M. Paul Ginisty.

[333] La Sœur Natalie Narischkin, par Mme Aug. Craven.

[334] Aujourd'hui rue Gambetta.—Leroi, Hist. de Versailles, rue par rue, t. II.

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