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Manuel de synonymie Latine

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A

Abesse. Deesse. Deficere.

1. Abesse marque une absence qui se réduit à une relation de lieu, ne pas être quelque part, par opposition à adesse ; deesse marque une absence qui rend un tout incomplet, comme manquer, faire défaut, par opposition à esse et superesse. Cic. Brut. 80. Calidio hoc unum, si nihil utilitatis habebat, abfuit, si opus erat, defuit. Si vous jugez cette qualité inutile, j’avouerai qu’elle n’existait pas chez Calidius ; si vous la jugez nécessaire, je conviendrai qu’elle lui faisait défaut.

2. Deesse s’applique à ce qui nous fait complétement défaut, deficere, à ce qui commence à nous faire défaut. Cic. Verr. I, 11. Vererer ne oratio deesset, ne vox viresque deficerent. Je craindrais que la parole ne me manque, que ma voix et mes forces ne faiblissent.

Abolere. Delere.

Abolere, anéantir, faire disparaître et plonger dans l’oubli par tous les moyens possibles ; delere, détruire, mettre en mauvais état, hors de service. Abolere se dit plutôt des œuvres de l’esprit ; delere, des objets matériels. Leges abolentur, urbes delentur. On annule les lois, on détruit les villes.

Abominari. Exsecrari. Detestari.

Abominari, repousser un présage qui fait horreur, chercher à détourner par une pratique religieuse un malheur qui nous menace, par opposition à omen accipere ; exsecrari, maudire en excluant un coupable de la société des hommes, en le déclarant sacer, en le dévouant aux dieux des enfers, par opposition à bénir ; enfin detestari, chercher à éloigner de nous, en invoquant les dieux, un danger dont nous menace une personne ou une chose ; il a pour opposé appeler par ses prières.

Abundare. Redundare.

Abundare, abonder, sert, comme περιεῖναι, à parler avec éloge de l’abondance prise comme un symbole de plénitude et de richesse ; redundare, surabonder, se prend en mauvaise part, comme περισσεύειν ; la surabondance est prise comme le symbole de l’excès et du luxe. L’abundans existe en grande quantité, le redundans est superflu et inutile.

Accendere. Incendere. Inflammare. Comburere. Cremare.

Accendere, incendere et inflammare, mettre le feu : accendere, par dehors et par un seul point, comme allumer, ἀνάπτειν ; incendere, par le dedans, comme ἐνδαίειν ; inflammare, enflammer par le dehors ou le dedans, comme ἀναφλογίζειν. Comburere et cremare, consumer et brûler : comburere, comme ϰαταϰαίειν, sur des charbons ardents (c’est le causatif d’ardere) ; cremare, comme πιμπράναι, par flammes vives (c’est le causatif de flagrare). On brûle les morts, mortui cremantur, sur un bûcher flamboyant ; on brûle les vivants à petit feu, vivi comburuntur, et cette manière de parler rend plus frappante l’horreur de la mort par ce genre de supplice.

Accidere. Evenire. Contingere. Obvenire. Obtingere.

Accidere, evenire et contingere marquent des événements favorables ou défavorables, le premier, lorsqu’ils sont inattendus, qu’ils surprennent ; le second, lorsqu’ils sont attendus, pressentis ; le troisième, lorsqu’on les a préparés, amenés ; obvenire et obtingere ne se disent que d’événements heureux. Les accidentia sont l’œuvre du hasard, les evenientia sont des conséquences de nos actions ou des circonstances ; les contingentia, des effets de nos efforts, de nos vœux, de nos fautes ; les obtingentia et les obvenientia, des faveurs du sort. Cic. Fam. VI, 21. Timebam ne evenirent quæ acciderunt. Je craignais de voir ces hasards se réaliser. Le premier des deux verbes, evenirent, se rapporte à Cicéron lui-même, à ses pressentiments ; le second, acciderunt, regarde les personnes qui se montrent surprises à l’heure de l’événement. Sen. Ep. 110. Scies plura mala contingere nobis quam accidere, c’est-à-dire que nos souffrances sont plus souvent les suites de nos propres vœux que l’effet d’un hasard aveugle.

Acer. Vehemens.

Acer présente la vivacité sous son aspect louable de feu, d’énergie, par opposition à frigidus, comme ὀξύς ; vehemens, sous son aspect blâmable de chaleur et de passion, par opposition à lenis, comme σφοδρός.

Acerbus. Amarus.

Acerbus marque une amertume qui emporte la bouche, par opposition à mitis, comme ὀξύς ; amarus, une amertume qui dégoûte, par opposition à dulcis, comme πιϰρός.

Acervus. Congeries. Strues. Cumulus.

1. Acervus et congeries, monceau d’objets de même espèce auparavant dispersés qu’on réunit et qu’on entasse en un lieu : acervus indique, comme σωρὸς, un certain ordre et suppose d’habitude une forme conique ; congeries admet tout le désordre de la négligence. Strues s’emploie, comme θημών, pour marquer que la mise en tas a produit un arrangement nouveau, donné aux objets rassemblés une forme déterminée, utile, artificielle. Curt. VIII, 7, 11. Passim acervos struesque accendebant. Ils allumaient çà et là des tas et des piles de bois.

2. Cumulus ne signifie point le tas lui-même, mais seulement la pointe qui le termine, la dernière pierre qui donne seule à une construction son élévation régulière et parfaite, à peu près comme ϰορυφή ; cumulare, en particulier, se rapproche tout à fait de ϰορυφοῦν. Comparez Liv. XXII, 59. Superstantes cumulis cæsorum corporum : juchés sur des monceaux de victimes, avec la fin du même chapitre : Cannenses campos acervi Romanorum corporum tegunt. Des tas de cadavres romains couvrent la plaine de Cannes. Et XXIII, 5. Molibus ex humanorum corporum strue faciendis. Faire des digues en empilant des cadavres.

Achivi. Achæi. Achaius. Achaicus. Troius. Troicus.

1. Achivi, les Grecs d’Homère, ᾿Αχαιοί ; Achæi se dit soit des habitants de l’Achaïe proprement dite, soit chez les poëtes de tous les Grecs considérés en général comme les contemporains des Romains. Cic. Divin. I, 16. Cum Achivi cœpissent inter se strepere. Quand eurent commencé les querelles bruyantes des anciens Grecs. Comparez avec Cæcil. 20. Quod eum sibi Achæi patronum adoptarant. Parce que les Grecs de l’Achaïe l’avaient souhaité et choisi pour protecteur.

2. Achaius est l’adjectif d’Achivus ; Achaicus celui d’Achæus.

3. Troius, adjectif réservé à l’ancienne Troie héroïque et homérique ; Troicus, adjectif usuel pour le pays de Troie, pour la Troade, sans allusion à la guerre de Troie.

Acies. Acumen. Cacumen. Mucro. Cuspis.

1. Acies, tranchant propre à couper ; acumen, pointe propre à piquer. Au figuré, l’acies mentis débrouille ce qui était confus, le fait connaître clairement : on met de l’ordre dans ses idées ; l’acumen mentis approfondit ce qui était caché, aboutit à des découvertes ingénieuses : on acquiert des idées nouvelles.

2. Acumen et cacumen, pointes naturelles : acumen, pointe du cône, du bec, etc. ; cacumen, terme spécial, pointe d’une montagne. Mucro et cuspis, pointes artificielles destinées à pénétrer et à blesser : mucro, pointe de l’épée, du poignard, etc. ; cuspis, de la lance, de la flèche, comme αἰχμή.

Actor. Comœdus. Ludio. Histrio.

1. Actor et les termes spéciaux de comœdus et tragœdus, l’acteur considéré comme un artiste estimable ; ludio, ludius, le comédien considéré comme un artisan vulgaire avec une idée accessoire de trivialité ; enfin histrio se dit tantôt de l’un, tantôt de l’autre, mais avec une idée accessoire de fanfaronnade et de bouffonnerie. Cic. Sext. 54. Ipse ille maxime ludius non solum spectator, sed actor et acroama. Ce baladin lui-même, car il n’est pas un simple spectateur, il est, vous le savez, tour à tour acteur et bouffon[1]. Rosc. com. 10. Nemo ex pessimo histrione bonum comœdum fieri posse existimaret. Personne n’imaginerait qu’un misérable farceur pût devenir un bon comédien. Ep. ad. Qu. fr. I, a. E. Hortor ut tanquam poetæ boni et actores industrii solent in extrema parte diligentissimus sis. Je t’engage à soigner extrêmement la fin à l’exemple des grands poètes et des acteurs consciencieux.

  • 1 Traduction Guéroult. Dans la collection Panckoucke. Cicéron, t. XIII, p. 375.

Adesse. Interesse. Præsentem esse.

1. Adesse, être près d’une personne ou d’une chose ; interesse, prendre part à une action. Cic. Verr. I, 40. Crimina ea quæ notiora sunt his qui adsunt quam nobis... De illo nihil dixit in quo interfuit. Ces accusations plus familières aux assistants qu’à nous-mêmes... Il n’a rien dit du fait auquel il a pris part.

2. Adesse marque, en général, notre présence dans un cercle dont nous faisons partie ; præsentem esse, la présence immédiate, sensible, visible. D’un hôte qu’on attend on dit adest quand il se trouve dans nos murs ; on dit præsens est quand il est dans la même pièce que nous. Ter. Ad. III, 3, 29. Non quia ades præsens dico hoc. Je ne dis pas cela parce que tu es près de moi, devant moi.

Adhuc. Hactenus. Hucusque.

Adhuc est adverbe de temps : jusqu’à ce moment ; hactenus et hucusque sont adverbes de lieu : jusqu’à cet endroit ou jusqu’à ce point.

Adversarius. Hostis. Inimicus.

1. Adversarius, terme général pour tout adversaire à la guerre, dans la politique, en justice, comme ἀντιστάτης ; hostis, ennemi à la guerre, en campagne, par opposition à pacatus, comme πολέμιος ; inimicus, ennemi du fond du cœur, par opposition à amicus, comme ἐχθρός. Cic. Man. 10. Pompeius sæpius cum hoste conflixit quam quisquam cum inimico concertavit. Pompée compte plus de combats contre des armées ennemies, que qui que ce soit au monde ne compte de luttes contre un ennemi particulier. Liv. XXII, 39. Nescio an infestior hic adversarius, quam ille hostis maneat. J’appréhende que ton adversaire ne reste plus dangereux que ton ennemi.

2. Hostilis et inimicus indiquent une disposition permanente, infestus et infensus, un état passager : infestus ne suppose qu’une attitude hostile, et peut se dire même des objets inanimés qui nous menacent d’un danger ; infensus suppose des mouvements passionnés et ne se dit que des personnes. Tac. Ann. XV, 28. Non infensum, nedum hostili odio Corbulonis nomen habebatur. Le nom de Corbulon n’avait jamais excité de ressentiment, loin d’être l’objet d’une haine nationale. Sen. N. Q. III, pr. Animus luxuriæ non adversus tantum, sed et infestus. Ame non-seulement contraire, mais rebelle aux plaisirs. Liv. 11, 20. Tarquinium infesto spiculo petit ; Tarquinius infenso cessit hosti. Il lance à Tarquin un trait dangereux ; Tarquin se retira devant cet ennemi furieux.

3. Hosticus marque un rapport de convenance : ennemi, qui appartient à l’ennemi ; hostilis, une disposition, comme hostile.

Advocatus. Causidicus.

Dans l’âge d’argent de la langue latine, advocatus désigne un procureur par rapport aux services qu’il rend, et à son client dont il est l’ami et l’appui ; causidicus, par rapport à sa condition et à son métier, souvent avec une idée de mépris, comme un mercenaire.

Ædificium. Domus. Ædes. Familia.

1. Ædificium, terme général pour toute espèce de bâtiment, comme οἰϰοδόμημα ; domus et ædes, ædium, maison d’habitation : domus, demeure, siége héréditaire d’une famille, comme οἶϰος ; ædes, assemblage d’appartements, comme δόμοι, δώματα. Virg. G. II, 461. Ingentem foribus domus alta superbis mane salutantum totis vomit ædibus undam. La fière demeure par ses portes orgueilleuses rejette, dès le matin, de ses appartements encombrés un long flot de courtisans.

2. Domus, la famille au sens patriarcal, comme une société close et intime ; familia, au sens politique, comme une partie de la noblesse, gens, de la cité, civitas, du peuple, populus.

Æger. Ægrotus. Morbidus. Morbus. Valetudo.

1. Æger, terme général qui s’applique à toute espèce d’incommodité et de malaise, au trouble d’esprit comme au mal physique ; ægrotus et morbidus supposent une maladie du corps ; ægrotus, chez l’homme, morbidus, chez un animal. L’æger se sent malade, l’ægrotus et le morbidus sont malades.

2. Morbus et valetudo désignent une maladie actuelle : morbus, comme un accident auquel l’homme est sujet ; valetudo, comme un état dont le malade a conscience.

Æquus. Par. Æqualis. Parilis. Compar. Impar. Dispar.

1. Æquum, égal en soi, uniforme, composé de parties similaires, par opposition à varius ; par, égal à quelque chose d’autre, et placé au même degré par opposition à superior et inferior. Æquo Marte présente dans son ensemble le combat des deux partis ; pari Marte oppose la fortune de l’un à celle de l’autre.

2. Par, marque une égalité de grandeur, de puissance, d’influence ou encore de nombre, d’équilibre, de proportions, comme ἴσος ; æqualis, une égalité de nature, comme ὅμοιος. Par, présente à l’esprit l’idée d’un homme d’action qui est pour le moins prêt et résolu à entrer en lutte avec ses pairs ; æqualis, l’idée d’un personnage inactif, et le mot ne se prête qu’à des comparaisons et à des parallèles. Paria, choses ou personnes opposées, hostiles, jalouses, qui se disputent la prééminence ; æqualia, choses ou personnes distinctes, mais unies, comme des parents qui ont des qualités et des sympathies communes. Pariter, au même degré, ἴσα ; æqualiter, de la même façon, ὁμοίως, ὁμῶς.

3. Par, tout à fait égal ; parilis, à peu près égal, c’est un intermédiaire entre par et similis.

4. Par, égal à quelque chose ou à quelqu’un, exprime un rapport simple ; compar, qui se dit de plusieurs choses ou de plusieurs personnes égales entre elles, un rapport réciproque, sans renchérir d’ailleurs sur le degré de ressemblance. Cette distinction se retrouve dans finitimi et confines, dans ἐγγύς et ξυνεγγύς.

5. Impar marque une inégalité, soit comme en arithmétique celle des nombres impairs qui ne sont point exactement divisibles par deux, soit une inégalité de force qui implique une infériorité relative ; dispar exprime une dissemblance et ne précise point de quel côté penche la balance dans un parallèle.

Æquus. Planus. Campus.

1. Æquum, terrain plat, surface horizontale, par opposition à ce qui monte ou descend, à superior, inferior et acclivis ; planum, la plaine unie, par opposition à un sol inégal, à montosus, saxosus. Æquum, signifie au figuré l’équité, parce que l’injustice commence dès que l’un se met au-dessus de l’autre ; planum, la clarté et la netteté, parce qu’on ne peut embrasser d’un seul regard qu’une plaine, où aucune hauteur n’arrête la vue.

2. Æquor et planities, la plaine par rapport à sa forme ; campus, par rapport à sa position, comme pays bas par opposition aux hauteurs.

Ærarium. Fiscus.

Ærarium, la caisse de l’état ; fiscus, la cassette de l’empereur. Tac. Ann. VI, 2. Bona Sejani ablata ærario, ut in fiscum cogerentur ; tanquam referret. Les richesses de Séjan retirées du trésor public entrèrent dans la cassette impériale, comme si cela eût tiré à conséquence.

Agere. Facere. Gerere. Opus. Factum. Age. I nunc. Degere.

1. Agere, marque un effet qui n’a lieu que dans le temps, comme agir ; facere, un effet qui se développe dans l’espace, comme faire. Les acta sont passés aussitôt que l’agens s’arrête, deviennent dès lors invisibles, et ne subsistent plus que par le souvenir ; les facta ne sont complets que quand le faciens s’arrête, et ne prennent qu’à partir de ce moment une existence propre. Cela doit s’entendre d’ailleurs d’acta et de facta considérés exclusivement comme participes, non comme substantifs. Agens donne l’idée de l’activité en général, faciens l’idée d’une activité pratique.

2. Agere, agir dans son propre intérêt ; gerere, dans l’intérêt d’un autre et par commission. Cic. Verr. I, 38. Quæ etiamsi voluntate Dolabellæ fiebant, per istum tamen omnia gerebantur. Tout se faisait par la volonté de Dolabella, mais par l’entremise de Verrès.

3. Opus, œuvre, ἔργον, est le substantif qui répond à facere ; factum (pris comme substantif), action, celui d’agere ; res gestæ, actes importants, hauts faits, πράξεις ; acta, mesures politiques. Cic. Att. XIV, 17. Multa de facto ac de re gesta, de nombreux détails, tant sur cette entreprise que sur ce grand acte : le premier, facto, s’appliquant à la tentative d’Amatius, le second, re gesta, au châtiment que lui a infligé Dolabella avec autant de sagesse que de courage.

4. Age, agedum, encouragement donné sérieusement ; i nunc, encouragement ironique.

5. Agere, mener une vie active et affairée ; degere, vivre dans l’oisiveté, soit parce que l’aisance nous dispense de travailler, soit parce que nous sommes réduits à l’inaction. Tac. Ann. XV, 74. Deûm honor principi non ante habetur quam agere inter homines desierit. Avant de rendre à un prince les honneurs divins, on attend qu’il ne soit plus mêlé aux affaires de la vie. Comparez avec IV, 41. Ut Tiberium ad vitam procul Roma amœnis locis degendam impelleret. Afin de pousser Tibère à vivre loin de Rome dans le repos d’un agréable séjour.

Agger. Vallum.

Agger, simple levée, comme une digue ; vallum, levée qui sert à clore un espace. L’agger peut tenir lieu d’une courtine de redoute dans des fortifications de campagne ; le vallum ou rempart fait toujours partie d’une forteresse, d’un camp, d’une place forte.

Ala. Penna. Pluma. Pinna.

1. Ala, la charpente, les muscles de l’aile, πτέρυξ ; penna, l’aile restreinte aux plumes qui concourent au vol, πτερόν. Plaut. Pœn. IV, 2, 48. Meæ alæ pennas non habent. Je n’ai pas de plumes à mes ailes.

2. Penna, plumes grandes et dures qui servent à voler ; pluma, duvet, petites plumes moelleuses qui servent à vêtir le corps de l’oiseau, comme πτίλον. Sen. Ep. 42. Meministi, quum quemdam affirmares esse in tua potestate, dixisse me volaticum esse ac levem, et te non pedem ejus tenere, sed pennam ; mentitus sum, pluma tenebatur quam remisit et fugit. Un jour, tu dois t’en souvenir, tu prétendais avoir une personne en ton pouvoir, et je te répondais qu’elle était volage et légère, que tu ne la tenais point par le pied, mais par une plume. Eh bien, ce n’était pas vrai : tu ne la retenais que par une petite plume de duvet qu’elle t’a laissée, et la voilà partie.

3. Penna, la plume entière, tuyau et barbes ; pinna, les barbes seules par opposition au tuyau.

Alapa. Colaphus.

Alapa, soufflet, coup appliqué sur la figure avec le plat de la main, c’est une punition, mais infligée avec modération ; colaphus, coup assené sur la tête avec le poing fermé et avec des marques de colère et de fureur.

Albus. Candidus. Albidus.

1. Albus, le blanc considéré en général comme l’absence de toute couleur, ce qui n’a pas de couleur ; candidus, le blanc pris comme une couleur positive, la plus pure, la plus claire, en comparaison de laquelle toutes les autres paraissent sombres ou même sales ; c’est un beau blanc éclatant. L’album, qui a pour opposé ater, tire, comme le λευϰὸν, sur le jaune pâle ; le candidum, qui a pour opposé niger, tire, comme l᾿ἀργὸν, sur le bleu pâle. Alba cutis, peau d’un malade, d’un hydropique ; candida, d’une personne qui est dans la fleur de la jeunesse. Au figuré, albor est le symbole du bonheur et de la joie ; candor, de la pureté et de l’innocence.

2. Albus, blanc ; albidus, blanchâtre.

Alere. Nutrire. Nutricare.

Alere, nourrir de manière à pousser au développement et à la croissance ; nutrire et nutricare, nourrir pour prolonger et assurer l’existence. En d’autres termes alimenta adjuvant, nutrimenta sustentant. Les aliments profitent, la nourriture soutient. Cic. N. D. II, 63. Neque ali, neque sustentari. N’être ni grassement, ni même pauvrement nourri. Nutrire, terme général ; nutricare, terme particulier usité de préférence en parlant des animaux.

Alimenta. Penus. Cibus. Esca. Edulia. Cibare. Pascere.

1. Alimenta et penus, vivres quelconques, solides ou liquides : alimenta, en général, par rapport à l’homme pris individuellement ; penus, par rapport à l’économie domestique de toute une famille. Cibus et esca ne se disent que des aliments solides par opposition à potio. Cibus, aliment fourni par la nature, ressource alimentaire ; esca, mets qui a subi une préparation artificielle, plat apprêté. Cibus est le seul de ces deux mots qui se dise aussi de la nourriture des animaux ; esca, le seul qui convienne à l’appât qu’on leur prépare et qu’on leur présente. Cic. N. D. II, 47. Animalia cibum partim dentibus capessunt. Un certain nombre d’animaux saisissent leur nourriture avec les dents. Comparez avec II, 23. Dii nec escis nec potionibus vescuntur. Les dieux se passent pour vivre de cuisine et de cave.

2. Cibaria, denrées alimentaires ordinaires et usuelles ; edulia, morceaux friands et recherchés. Suet. Tib. 46. Comites nunquam salario, cibariis tantum sustentavit. Les gens de sa suite ne tiraient de lui que des vivres, jamais de salaire. Comparez avec Cal. 40. Pro eduliis certum statumque exigebatur. Il avait mis un droit sur les comestibles.

3. Cibare, nourrir de sa propre main comme une mère ou une bonne d’enfants ; pascere, fournir seulement la nourriture en qualité de tuteur ou de maître. Suet. Tib. 72. Draconem manu sua cibaturus. Comparez avec Vesp. 18. Sineret se plebeculam pascere. Un dragon auquel il allait donner à manger de sa main. Il lui demanda la permission de laisser au petit peuple sa subsistance.

Alloqui. Appellare. Affari.

Alloqui, adresser la parole à quelqu’un, lui faire l’honneur de le saluer et de le reconnaître ; appellare, prendre les devants pour engager une personne dans une conversation, lui adresser des paroles sérieuses, sortir des phrases banales ; affari, apostropher d’un ton pathétique plein d’amitié ou de solennité. Cic. Cluent. 61. Quum nemo recipere tecto, nemo alloqui, nemo respicere vellet. Lorsque personne ne voulait ni le recueillir sous son toit, ni l’entendre, ni lui adresser la parole, ni le regarder. Comparez avec Phil. XIII, 2. Salutabunt benigne, comiter appellabunt unumquemque nostrum. Ils auront pour chacun de nous un abord bienveillant, des paroles aimables et prévenantes. Et Brut. 3. Salutatio libri quo me hic affatus quasi jacentem excitavit. La dédicace du livre dans lequel il m’apostrophe et qui m’a retiré d’une sorte d’abattement.

Altus. Editus. Procerus. Arduus. Celsus. Excelsus. Sublimis.

1. Altus, terme général ; il se dit de la hauteur ou de la profondeur considérée comme une des trois dimensions de la géométrie, et doit s’entendre de la hauteur par opposition à humilis, à ce qui reste attaché terre à terre, au niveau du sol, comme ὑψηλός ; editus ; élevé par opposition à planus, à ce qui n’offre aux yeux qu’une surface plate ; enfin procerus, ce qui a poussé en hauteur ou en longueur. L’altitudo n’a ni mesure ni limite ; l’editum est de la taille d’une colline ; la proceritas, de celle d’un arbre ou d’un corps humain.

2. Altus, editus et procerus réduisent la hauteur à un simple rapport de lieu et d’espace ; arduus se dit de ce qui est d’abord haut, puis escarpé et inaccessible, au figuré : difficile, impossible ; celsus, haut par l’effet d’une tendance à s’étendre et à s’élancer, au figuré : fier ; excelsus et præcelsus, ce qui dépasse encore d’autres points culminants, au figuré : éminent ; sublimis, ce qui se soutient en l’air sans toucher à terre, ce qui plane, comme μετέωρος, au figuré : sublime.

Ambire. Circumire.

Circumire se dit d’un mouvement sinon exactement circulaire, du moins tenu de suivre tous les contours d’un espace, faire le tour ; ambire ne désigne qu’un mouvement de va-et-vient, en zigzag, aller çà et là, parcourir. Plin. Ep. II, 9. Ambio domos stationesque circumeo. Je vais d’une maison à l’autre, je fais le tour des lieux de réunion. Et Cic. Att. XIV, 21. Antonium circumire veteranos ut acta Cæsaris sancirent, c’est-à-dire qu’il les sollicite tous à la ronde depuis le premier jusqu’au dernier. Circumire est plus fort ici qu’ambire, lequel exprimerait en gros les sollicitations et les manœuvres d’Antoine.

Ambulare. Spatiari. Deambulare. Inambulare. Obambulare.

1. Ambulare présente la promenade comme un exercice fait à loisir, c’est un mouvement de va-et-vient par opposition d’une part à stare et cubare, d’autre part à currere et salire ; spatiari donne l’idée d’un exercice au grand air, par opposition à l’espace restreint d’une chambre ou d’un lieu fermé.

2. Deambulare, aller et venir jusqu’à ce qu’on soit fatigué ; inambulare, se promener dans un espace limité ; obambulare, se promener le long d’un mur, d’une allée, ou à côté d’un compagnon de promenade.

Amens. Demens. Insanus. Vesanus. Excors. Vecors. Furor. Delirium. Rabies. Cerritus. Lymphatus.

1. L’amentia a un caractère négatif et passif ; la dementia, une influence positive et violente. L’amens manque de raison : ou bien il n’agit pas du tout, ou il agit sans raison, comme un idiot, ἄφρων ; le demens, tout en croyant bien faire, rompt en visière à la raison, comme l’insensé, παράφρων. On dit amens metu, terrore, hébété par la peur, par l’épouvante ; mais demens scelere, discordia, devenu fou à la suite d’un crime, d’une querelle.

2. Insanus a un sens privatif ; vesanus, un sens dépravatif. L’insanus n’a plus d’empire sur les sens, la raison le fuit, il dépasse dans un accès de passion la mesure et le but et nous paraît coupable. C’est un homme en démence. Le vesanus, aveuglé par des illusions, sort de la bonne voie, poursuit un but trompeur et nous paraît malheureux. C’est un visionnaire.

3. Excors, stupide, tout à fait incapable de réflexion et d’examen, par opposition à cordatus ; vecors, extravagant, incapable de réfléchir avec calme, parce que l’âme est possédée par une idée fixe.

4. Furor, surexcitation de l’esprit, extase, transport, μανιϰός ; delirium, affaissement des facultés de l’esprit par des causes physiques, comme chez une personne qui tombe en enfance ; rabies, accès de fureur méchante qui étouffe le sens moral, λύσσα. Le furibundus oublie les lois de la matière ; le delirus radote ; le rabidus veut mordre et nuire à toute force.

5. Cerritus et lymphatus représentent l’emportement comme un état de possession : cerritus ou ceritus, possédé de Cérès ; lymphatus, possédé des nymphes.

  • Amictus, amiculum, v. Vestis.

Amicus. Amans. Amator.

Amicus suppose une affection mutuelle, cordiale et paisible, ami, φίλος ; amans et amator, un amour qui peut fort bien ne pas être partagé et qui n’en est que plus ardent : amans, un amour de passage ; amator, une passion durable, comme ἐραστής. Cic. Alba tunc antiquissimus non solum amicus, verum etiam amator. Alba dont l’amitié parfaite s’élevait alors jusqu’à la constance de l’amour. Tusc. IV, 12. Inter ebriositatem et ebrietatem interest, aliudque est amatorem esse, aliud amantem. Je fais une différence entre l’ivrognerie et l’ivresse, je distingue l’amant de l’amoureux.

Amittere. Perdere. Jactura.

1. Amittere, perdre en ce sens que l’objet perdu cesse d’être en notre pouvoir, comme ἀποϐαλεῖν, par opposition à retinere ; perdere, en ce sens que l’objet est détruit et ne peut plus servir à personne, comme διολέσαι, par opposition à servare. Tac. Ann. II, 25. Perdita classe, amissis armis. Malgré la ruine de leur flotte et la perte de leurs armes.

2. Amissio, perte involontaire ; jactura, perte volontaire à laquelle on se soumet, sacrifice qu’on fait pour éviter une plus grande perte, à l’exemple du marin qui jette la cargaison par-dessus bord pour sauver son vaisseau et sa vie. Plin. Ep. 1, 12. Jacturam gravissimam feci, si jactura dicenda est tanti viri amissio. Je suis accablé par un malheur auquel ma volonté devrait souscrire, si je puis parler ainsi de la perte qui me prive d’un si grand homme. (Il s’agit de Corellius Rufus qui a cherché dans le suicide la fin de ses souffrances.)

Amplecti. Complecti.

Amplecti se dit d’un geste auquel on n’emploie souvent qu’un seul bras, et qui témoigne d’une inclination et d’une sympathie paisible ; complecti, c’est entourer, serrer avec les deux bras en signe d’amour et de passion ou d’abandon familier. De même au figuré : amplecti, c’est prendre quelque chose en main par opposition à négliger et à dédaigner ; complecti, c’est s’emparer tout à fait d’une chose par opposition à posséder à demi, à peu près.

Angustus. Arctus. Densus. Spissus.

1. Angustus et arctus ont trait à l’espace même et à la proximité des limites qui le restreignent ; densus et spissus, aux objets que l’espace contient et à leur voisinage entre eux.

2. L’angustum a pour limites de simples lignes, et offre la plupart du temps une figure oblongue, étroite, il a pour opposé latus, comme στενός ; l’arctum est clos par des barrières, des murailles, des montagnes, et offre une surface carrée ou circulaire, resserrée, par opposition à laxus, comme στενωπός. On ne peut jamais appeler arctus le clavus angustus. Mela. III, 2, 8. Rhenus ad dextram primo angustus et sui similis, post ingens lacus Flevo dicitur... fitque iterum arctior, iterumque fluvius emittitur. A droite le Rhin est d’abord étroit et conserve quelque temps ce caractère, puis il se transforme en un lac considérable appelé le Flévon, après quoi il rentre dans une gorge d’où il ressort sous la forme d’un simple cours d’eau : selon que l’on se représente les bords du Rhin comme de simples lignes ou comme des murailles.

3. Densus présente simplement les objets comme très-rapprochés les uns des autres, sans lacune apparente, par opposition à rarus, comme δασὺς et θαμειός ; spissus les représente comme entassés les uns sur les autres sans aucun intervalle, par opposition à solutus, comme πυϰνὸς et συχνός. L’idée qui domine dans densus est celle d’une surabondance d’objets qu’il n’est pas nécessaire d’écarter les uns des autres pour couvrir un vaste espace ; dans spissus, c’est l’absence de vides : les objets sont tellement pressés qu’ils remplissent tous les intervalles.

Anima. Aer. Aura. Spiritus. Sublime.

Anima et aer, l’air pris comme élément, ἀήρ : anima, par opposition aux trois autres éléments, à terra, mare, ignis ; mais aer, terme étranger et savant, par opposition à l’air épuré des célestes demeures, à æther ; aura et spiritus, l’air en mouvement : aura, l’air doucement agité, le souffle léger qui évente, αὖρα ; spiritus, l’air qui se précipite, qui entraîne, tout courant d’air analogue à une inspiration ou à une expiration, πνεῦμα ; enfin sublime, l’air suspendu au-dessus de nous : ce dernier marque un simple rapport de lieu par opposition à humus, comme μετάρσιον, μετέωρον.

Anima. Animus. Mens.

1. Anima, l’âme de la physiologie, le principe de la vie animale chez les hommes et les bêtes, vie qui cesse avec la respiration, ψυχή ; animus, l’âme de la psychologie et de la morale, le principe de la personnalité qui cesse avec la volonté, θυμός. Au sens mythologique les âmes des morts s’appellent animæ, ce sont des ombres ; au sens métaphysique animi, ce sont des esprits. L’anima est un des éléments de l’existence du corps ; le même corps n’a pas d’opposé plus tranché qu’animus. Sen. Ep. 4. Difficile est animum perducere ad contemptionem animæ. Il est difficile d’amener l’âme raisonnable jusqu’au mépris de l’âme sensitive. Juven. XV, 148. Principio indulsit communis conditor illis tantum animas, nobis animum quoque. Au commencement le créateur commun n’accorda aux animaux que des âmes sensitives, il nous accorda en outre une âme raisonnable.

2. Animus, l’âme humaine prise comme le réceptacle commun de toutes les facultés spirituelles ; il est alors, avec mens, la faculté pensante, dans le rapport du tout à une de ses parties. Cic. Rep. II, 40. Ea quæ latet in animis hominum quæque pars animi mens vocatur. L’intelligence enfouie dans nos âmes et qu’on peut appeler une partie de l’âme. Mais comme dans la vie l’âme vaut surtout par la volonté, animus devient à son tour une faculté de l’âme, celle du sentiment et de la volonté qui prend place à côté de l’intelligence, de la conscience, mens. Tac. H. I, 84. Quem nobis animum, quas mentes imprecentur ? Quels sentiments, quelles dispositions d’esprit nous souhaiteraient-ils ? Ter. Andr. I, 1, 137. Mala mens, malus animus. Mauvaise tête, mauvais cœur. Et enfin, comme la pensée précède la volonté, que la volonté sert d’intermédiaire entre la pensée et l’action, qu’elle peut être considérée comme la servante de la pensée, tout comme le corps est le serviteur de la volonté, réciproquement mens se trouvera avec animus dans le rapport d’un tout à sa partie. Cic. Tusc. III, 5. Mens cui regnum totius animi a natura tributum est. La raison qui exerce une autorité naturelle sur tous les sentiments.

Animadvertere. Notare.

Animadvertere se dit de l’esprit qui remarque et observe ; notare, d’une marque à laquelle on a recours pour attirer l’attention.

Animal. Animans. Bellua. Bestia. Pecus. Fera.

1. Animal et animans, les animaux considérés comme des êtres doués de vie, l’homme compris : animal caractérise la nature de l’être ; quel que soit son aspect, il appartient à la classe des êtres animés ; l’opposé est inanimus, l’équivalent grec ζῶον. Animans précise l’état dans lequel se trouve l’être : il vit, il respire ; l’opposé est exanimus. On dit animalium cadavera ; animantium cadavera ferait un non-sens. Bellua, bestia et pecus ont trait à l’intelligence ; c’est l’animal déraisonnable par contraste direct avec homo ; bestia et fera expriment une sorte de rapport moral, c’est la brute hostile à l’homme.

2. Bellua désigne particulièrement un animal grand et lourd, par exemple un éléphant, une baleine, par préférence les monstres marins ; pecus, un animal domestique, par préférence des moins intelligents, par exemple un taureau, un mouton, par opposition à l’animal en liberté : c’est le bétail ; bestia, bête nuisible, surtout dévorante, par exemple un tigre, un loup, par opposition aux oiseaux, comme θηρίον ; fera, bête farouche, hôte des forêts, par exemple un cerf, un loup, un tigre, par opposition aux animaux domestiques, comme le gibier et les bêtes sauvages, θήρ. Curt. IX, 10, 10. Indi maritimi ferarum pellibus tecti piscibus sole duratis et majorum quoque belluarum, quas fluctus ejecit, carne vescuntur. Les Indiens des provinces maritimes, couverts de la dépouille des bêtes sauvages, se nourrissent de poisson séché au soleil et même de la chair des monstres marins que les flots ont rejetés.

Annales. Historiæ.

Annales, traité général d’histoire et en particulier histoire du passé composée sur les sources, Tite-Live et Tacite ; historiæ, étude d’histoire contemporaine, d’événements auxquels l’auteur a assisté, Salluste et Tacite. L’auteur des annales se propose de faire, année par année, une énumération aussi variée que complète de toutes les particularités mémorables ; celui des historiæ traite un point d’histoire et laisse de côté les événements les plus remarquables quand ils ne s’y rattachent pas.

Antiquus. Priscus. Vetus. Vetustus. Veternus. Pristinus.

1. Antiquum et priscum, ce qui a existé autrefois et qui n’est plus, par opposition à novum, comme παλαιός ; vetus et vetustum, ce qui existe depuis longtemps et n’a plus de part ni aux inconvénients ni aux priviléges de la jeunesse, par opposition à recens, comme γέρων, γεραιὸς, γερούσιος">. Antiquus homo, homme du bon vieux temps ; vetus, vieillard. Les classiques s’appellent antiqui scriptores, en ce sens que leur siècle est depuis longtemps passé ; veteres, en ce sens qu’ils subsistent et servent de modèles depuis deux mille ans. Cic. Verr. II, 21. Vereor ne hæc nimis antiqua et jam obsoleta videantur. J’ai peur que ces exemples de modération n’aient vieilli et ne paraissent hors d’usage. Comparez avec Orat. I, 37. Ut illi vetus atque usitata exceptio daretur. Pour lui donner le bénéfice de ce privilége ancien et souvent appliqué.

2. Vetus se rapporte exclusivement à la durée et présente l’âge soit comme un avantage, soit comme un désavantage ; vetustus a trait aux priviléges de l’âge : ce qui subsiste de vieille date est plus solide, plus respectable, plus à l’épreuve que les nouveautés ; il a pour opposé novicius. Enfin veternus fait allusion aux infirmités du grand âge usé par les années, affaibli, épuisé pour avoir duré trop longtemps. Mais comme dans le beau siècle de la langue on ne rencontre veternus que sous la forme de substantif, veternum, dans le sens de somnolence, vetus le supplée régulièrement et désigne plus souvent la décadence que la vigueur de l’âge. Tac. Ann. XI, 14 et 15. Veterrimis Græcorum. Les caractères de l’alphabet latin sont empruntés aux plus vieilles formes des lettres grecques. Et vetustissima Italiæ disciplina. La science des aruspices, la plus auguste par son antiquité de toutes les sciences que l’Italie cultive.

3. Antiquus se dit simplement des choses du vieux temps, du temps passé, par opposition au présent ; priscus est un terme pompeux qui ajoute à l’idée principale d’antiquité une idée accessoire de respect et de sainteté, comme ἀρχαῖος, par opposition à la mode du jour.

4. Antiquus et priscus se disent d’une époque écoulée depuis très-longtemps ; pristinus, d’un temps passé quelconque, comme πρότερος, antérieur.

Anus. Vetula.

Anus, servant de féminin à senex, femme âgée, avec une idée de respect, ou encore vieille femme, avec une idée de défaveur, par allusion à sa faiblesse, à sa crédulité, à son bavardage ; vetula, vieille laide et qui n’a rien d’aimable.

Aperire. Patefacere. Aperte. Palam. Manifesto. Propalam.

1. Aperire, découvrir un espace fermé par le haut, c’est-à-dire horizontalement, par exemple une fosse, une source, et par cette opération rendre visible ; patefacere, ouvrir un espace fermé par le côté, c’est-à-dire verticalement, par des portes, des barrières, des clôtures, et par cette opération rendre accessible.

2. Returare, donner accès par une ouverture qui était bouchée ; recludere, par une ouverture fermée à clef ; reserare, paг une ouverture fermée au verrou.

3. Aperte, ouvertement et sans se cacher, en sorte que tout le monde puisse apprendre et savoir les choses, par opposition à occulte, comme φανερῶς ; palam, publiquement et sans secret, en sorte que tout le monde puisse voir et entendre, comme ἀναφανδόν ; manifesto, manifestement, de manière à rendre superflues les recherches, les conjectures, le secours et l’effort des sens et de l’esprit, comme δῆλον.

4. Palam marque qu’on expose les choses à la vue du public par effronterie ; propalam, par dessein prémédité. Cic. Orat. I, 35. Neque proposito argento neque tabulis et signis propalam collocatis, c’est-à-dire à l’admiration de tout le monde. Comparez avec Pis. 36. Mensis palam propositis, c’est-à-dire effrontément et sans gêne.

Apparet. Eminet.

Apparet se dit de ce qui est visible à l’observation ; eminet, de ce qui se fait remarquer de soi-même et saute aux yeux. Sen. Ir. I, 1. Apparent alii affectus, hic (scil. iræ) eminet. Les signes des autres passions sont visibles, ceux de la colère sont frappants.

Aqua. Unda. Fluctus. Fluentum.

1. Aqua, l’eau prise comme matière élémentaire, par opposition à terra ; unda, l’élément liquide toujours en mouvement, par opposition à solum ; lympha, simple synonyme poétique d’aqua, avec l’idée accessoire d’une belle eau claire, sens fondé sur une ressemblance fortuite de son avec la première syllabe de l’adjectif limpidus, qui n’a point la même racine.

2. Unda est un intermédiaire entre aqua et fluctus, comme aura entre aer et ventus. Car unda désigne comme onde l’eau qui semble se mouvoir d’elle-même, mais fluctus et fluenta, le flot, l’eau agitée par quelque cause extérieure, comme une tempête : fluctus, en général, c’est la mer avec ses flots ; fluentum, la vague isolée. La mer orageuse, le torrent impétueux, roulent seuls des fluctus, mais toute eau qui n’est pas stagnante a des undas. Aussi y a-t-il une grande différence entre ces deux images dans Cic. Mil. 2, 5. Tempestates et procellas in illis duntaxat fluctibus concionum semper putavi Miloni esse subeundas, c’est-à-dire dans les assemblées orageuses et agitées du peuple ; et Planc. 6, 15. Si campus atque illæ undæ comitiorum, ut mare profundum et immensum, sic effervescunt quodam quasi æstu, c’est-à-dire les réunions populaires faciles à émouvoir. Sen. N. Q. III, 10. Quid si ullam undam superesse mireris tot fluctibus fractis ? Étonnez-vous plutôt qu’il reste des ondes à la mer pour venir remplacer au rivage tant de flots qui s’y sont brisés. Et IV, 2. Nec mergit cadens unda, sed planis aquis tradit. Et l’onde ne les submerge pas dans sa chute, elle les lance sur des eaux immobiles.

Arcana. Secreta. Mysteria.

Arcana et mysteria, les secrets envisagés par leur côté honorable, ceux qui tirent d’eux-mêmes leur raison d’être, qui tiennent à la nature des choses et qui méritent à ce titre d’inspirer un saint respect ; arcana est d’ailleurs un terme populaire pour toute sorte de secrets ; mysteria, un terme savant pour les secrets religieux comparables aux mystères d’Éleusis ; enfin, secreta, les secrets, au sens le plus vulgaire, ceux qui ont une origine purement humaine, en parlant des choses qu’on tient cachées par crainte. Tac. I, 6. Sallustius Crispus particeps secretorum... monuit Liviam ne arcana domus vulgarentur. Sallustius Crispus, pour qui Tibère et Livie n’avaient rien de caché, engagea Livie à ne plus livrer au public les augustes secrets de la famille impériale.

Arcere. Prohibere.

Arcere, repousser et empêcher d’entrer, par opposition à admittere ; prohibere, tenir éloigné et empêcher d’approcher, par opposition à adhibere. L’arcens se tient sur la défensive, comme le resistens, et agit par sollicitude pour la personne menacée ; le prohibens prend l’offensive, comme le propulsans, et agit par inimitié contre l’agresseur.

Arcessere. Accire. Evocare. Accersere.

1. Arcessere et accersere, termes généraux, signifient simplement faire venir ; accire, inviter, suppose qu’on s’adresse à un égal ; evocare, mander, à un inférieur. L’arcessens pousse à se présenter, l’acciens engage, l’evocans ordonne. Cic. Att. V, 1. Tu invita mulieres, ego accivero pueros. Chargeons-nous, toi de prier les femmes, moi d’inviter les jeunes gens. Comparez avec Dej. 5. Venit vel rogatus ut amicus, vel arcessitus ut socius, vel evocatus ut qui senatui parere didicisset. Il s’est présenté ou en ami dont on souhaitait l’arrivée, ou en allié qu’on faisait venir, ou en sujet mandé par le sénat et dressé à lui obéir. Liv. X, 19. Collegæ auxilium quod acciendum ultro fuerit. Le secours de son collègue qu’il aurait dû demander sans façon. Comparez avec XLIV, 31. Evocati litteris imperatoris. Mandés par un ordre écrit du général. Et XXXIX, 11. Æbutia accita ad Sulpiciam venit. Ebutia vint trouver Sulpicie comme elle l’en avait priée. Mais 12. Ut Hispalam libertinam arcesseret ad sese. Afin de faire venir l’affranchie Hispala.

2. Arcessere signifiait primitivement pousser à venir ; accersere, à accourir en toute hâte ; mais la ressemblance de son a fait confondre les deux mots.

Ardere. Flagrare.

Ardere, brûler comme un brasier, αίθειν ; flagrare, être en flammes, comme φλέγεσθαι. Au figuré, ardere marque une passion qui couve ; flagrare, une passion qui éclate. Cic. Or. III, 2, 8. Non vidit Crassus flagrantem bello Italiam, non ardentem invidia senatum. Crassus n’a vu ni l’Italie dévorée par les flammes de la guerre, ni le sénat consumé par le feu de la jalousie.

Arduus. Difficilis.

Arduus, difficile à atteindre, par opposition à pronus ; difficilis, à exécuter, par opposition à facilis. Arduus est d’ailleurs le terme le plus fort et marque une difficulté voisine de l’impossibilité. Plin. Ep. VI, 17. Est enim res difficilis, ardua. La chose est pleine de difficultés et d’obstacles. Tac. H. II, 76. Æstimare debent an quod inchoatur, reipublicæ utile, ipsis gloriosum aut promptum effectu, aut certe non arduum sit. Tous ceux qui osent former de grands desseins sont tenus d’examiner si leur entreprise est utile à la république, si elle paraît d’une exécution facile, ou du moins si elle ne présente pas trop d’obstacles. Cic. Verr. I, 51. Cum sibi omnes ad illum allegationes difficiles, omnes aditus arduos ac pæne interclusos viderent. Voyant les difficultés qu’il y avait pour eux à faire parvenir une députation jusqu’à lui, toutes les voies hérissées d’obstacles et pour ainsi dire barrées.

Arguere. Incusare. Culpare. Criminari. Insimulare. Deferre. Accusare.

Arguere, terme général pour toutes les manières de mettre au jour une faute supposée ou réelle par devant la justice ou ailleurs, incriminer ; incusare et le terme rare de culpare ne marquent qu’une accusation extrajudiciaire ; criminari, accuser avec des sentiments d’hostilité ou de méchanceté, en noircissant ; insimulare, accuser faussement, sans reculer devant la calomnie, rendre suspect ; deferre, dénoncer au juge ; accusare, accuser au criminel. Cic. Lig. IV, 10. Arguis fatentem. Non est satis. Accusas eum. Il avoue, et tu l’incrimines. Tu ne t’en tiens pas là. Tu le poursuis devant les juges criminels.

Aridus. Torridus. Siccus.

Aridus et torridus marquent une privation de sucs : les arida ont perdu leur humidité naturelle par l’effet d’un feu qui agit à l’intérieur ; l’équivalent grec est αὖος, l’opposé humidus ; les torrida, par l’effet d’une chaleur qui agit du dehors au dedans ; ils ont pour opposé uvidus, comme σϰληρός ; siccus ne marque qu’une sécheresse extérieure, limitée à la surface, par opposition à madidus, comme ξηρός. Plin. H. N. XII, 12. Ne sint fragilia et arida potius quam sicca folia. De peur que les feuilles ne soient cassantes et tout à fait desséchées, au lieu d’être simplement sèches. Et XV, 29 : Cato docuit vinum fieri ex nigra myrta siccata usque in ariditatem in umbra. Caton a enseigné qu’on peut fabriquer du vin avec les baies de myrte noir qu’on fait sécher à l’ombre jusqu’à ce que la dessiccation soit parfaite.

Armus. Humerus. Ala. Axilla.

Armus, le sommet du bras chez l’homme, de la jambe de devant chez les animaux, mais partie du corps entier à la différence de scapula, l’omoplate, qui n’est qu’une partie du squelette, ὦμος ; humerus, la surface plane qui existe chez l’homme au-dessus du bras, l’épaule, ἐπωμίς ; ala et axilla, le creux qui se forme sous le bras, l’aisselle, μασχάλη. Ovid. Met. XII, 396. Ex humeris medios coma dependebat in armos. Des épaules, sa chevelure descendait jusqu’au-dessous de la naissance des jambes. (Il s’agit du centaure Cyllarus.)

Ascia. Securis.

Ascia, la hache du charpentier pour débiter le bois ; securis, le couperet du boucher pour dépecer la viande.

Assentiri. Assentari. Blandiri. Adulari.

1. Assentiri, donner son assentiment par conviction ; l’opposé est dissentire ; assentari, exprimer son assentiment, que ce soit par conviction ou par hypocrisie, l’opposé est adversari.

2. Assentari désigne la flatterie qui a horreur de contredire, comme θωπεύειν ; blandiri, celle qui fait dire des choses agréables, comme ἀρεσϰεύειν ; adulari, celle qui cherche à plaire en s’abaissant, comme ϰολαϰεύειν. Entre flatteurs, l’assentans recherche la faveur d’autrui en résignant son droit à toute opinion indépendante ; le blandiens, par des complaisances et des marques visibles d’affection ; l’adulans, en s’abaissant et en donnant des marques d’un indigne respect. L’assentatio, ou l’art de celui qui dit toujours oui, procède de lâcheté ou de sottise ; les blanditiæ ou cajoleries procèdent avant tout de l’envie de paraître aimable, et au pis aller de l’égoïsme ; l’adulatio ou la flatterie, la flagornerie, ϰολαϰεία, de sentiments bas, bons pour des esclaves ou des chiens. Sen. Ir. III, 8. Magis adhuc proderunt submissi et humani et dulces, non tamen usque in adulationem, nam iracundos nimia assentatio offendit. Erat certe amicus... cui non magis tutum erat blandiri quam maledicere. Un commerce plus profitable pour vous, tant que vous en serez là, c’est celui des personnes respectueuses, polies, douces, sans descendre jusqu’à l’adulation, car une complaisance excessive choque les tempéraments colériques. Je possédais en ce genre un ami qu’il n’y avait pas plus de sûreté à choyer qu’à rudoyer. Et II, 28. Sæpe adulatio dum blanditur offendit. L’adulation, en voulant complaire, s’expose à choquer.

Astutus. Callidus. Vafer. Versutus.

Astutus, en vieux latin astus, et callidus s’entendent de la finesse au sens intellectuel ; c’est une variété de la prudence : astutus se dit de la sagacité qui invente et dirige des menées secrètes ; il est synonyme de solers, rusé ; callidus se dit de la pénétration qui débrouille les affaires embarrassées, de la prudence pratique qui provient de la connaissance des hommes et de l’expérience du monde ; il est synonyme de rerum peritus et signifie, par corruption, délié, comme ϰερδαλέος. Vafer et versutus désignent la finesse par son côté immoral, comme un effet de l’improbité : vafer caractérise l’adresse à créer des difficultés, surtout en justice, en fait de chicanes d’avocat, comme madré, πανοῦργος ; versutus, la prestesse dans l’art de se déguiser, de se tirer d’embarras par tous les moyens, retors, comme στροφαῖος ; il a pour opposé simplex. Plin. Ep. VII, 6. Juvenis ingeniosus sed parum callidus. Jeune homme qui a de l’esprit naturel, mais qui n’est guère avisé. Cic. Brut. 48. Callidus et in capiendo adversario versutus. Avisé et même retors quand il s’agit d’embarrasser un adversaire.

Ater. Niger. Pullus.

1. Ater, le noir considéré comme une négation de la couleur, par opposition à albus ; niger, le noir comme étant une couleur par lui-même et la plus foncée de toutes, par opposition à candidus. L’atrum ne cause qu’une impression triste et sombre ; le nigrum produit une impression sévère et imposante qui se concilie avec la beauté, comme dans Hor. Carm. I, 32, 11. Lycum nigris oculis nigroque crine decorum. Lycus paré de ses yeux noirs et de ses cheveux noirs. Tac. G. 43. Nigra scuta, tincta corpora, atras ad prælia noctes legunt. Ils ont des boucliers noirs, ils se peignent le corps, ils choisissent pour leurs attaques des nuits sombres.

2. Ater et niger, le noir parfait, foncé, pullus, le brun qui tire sur le noir ; ce dernier rappelle la parenté qui existe entre une couleur sombre et la malpropreté.

  • Atque, v. Et.

Atrox. Trux. Truculentus. Dirus. Sævus. Torvus.

1. Atrox, trux et truculentus se disent de ce qui a un extérieur effrayant, de ce qui fait sur l’imagination, sur les yeux et les oreilles une impression terrible, comme épouvantable : atrox marque une qualité des choses ; trux et truculentus, des qualités personnelles. Dirus et sævus se disent de ce qui est vraiment terrible et dangereux : dirus, par essence, par une propriété des choses, effroyable, δεινὸς, mais sævus, par caractère, par une qualité propre à des êtres animés, sanguinaire, cruel, αἰνός. Plin. Pan. 53. Atrocissima effigies sævissimi domini. L’image effroyable du plus cruel des maîtres. Mela. II, 7. Ionium pelagus... atrox, sævum, c’est-à-dire qui a un aspect menaçant et ne cause d’ailleurs que trop de malheurs.

2. Trux désigne uu regard, une voix épouvantable par leur côté héroïque ou tragique, comme autant de signes d’un courage barbare ou de quelque sentiment cruel ; truculentus, par leur côté trivial ou comique, comme des signes de mauvaise humeur ou d’une passion basse. L’esclave de la comédie de Plaute est truculentus, Achille courroucé est trux. Mais truculentior, truculentissimus servent de comparatif et de superlatif à trux.

3. Trux et truculentus vultus regard courroucé qui inspire la crainte, comme τραχύς ; torvus (regard pénétrant, etc.) regard pénétrant, perçant, toujours farouche, comme τορὸν ou ταυρηδὸν ϐλέπων. Plin. H. N. XI, 54. Contuitu quoque multiformes, truces, torvi, flagrantes. Le regard varie à l’infini l’aspect que prennent les yeux ; ils paraissent courroucés et effrayants, perçants et farouches, étincelants, etc.

Attonitus. Stupens.

Attonitus, comme frappé de la foudre, c’est un état passager ; stupens, pétrifié, c’est un état durable. Curt. VIII, 2, 3. Attoniti et stupentibus similes. Comme frappés de la foudre et pour ainsi dire pétrifiés.

Audere. Conari. Moliri.

Audere se dit d’une entreprise considérée sous le rapport du danger de l’action et du courage de la personne, comme oser ; conari, sous le rapport de l’importance de l’action et de l’énergie de la personne, comme tenter ; enfin moliri, sous le rapport de la difficulté de l’action et des efforts qu’elle exige de la part de la personne, comme entreprendre.

  • Audacia, audentia, v. Fides.

Audire. Auscultare.

Audire, entendre, ἀϰούειν, c’est un terme purement passif, comme olfacere ; auscultare, écouter, ἀϰροᾶσθαι ; c’est vouloir entendre, écouter avec attention, soit en cachette, soit au grand jour, par un acte de volonté, comme odorari. Ter. Ad. IV, 5, 45. Æsch. Pater, obsecro, ausculta. Mic. Æschine, audivi omnia. Esch. Père, je t’en supplie, écoute-moi. Mic. Eschine, j’ai tout entendu.

Auguria. Auspicia. Prodigia. Ostenta. Portenta. Monstra. Omina.

Auguria et auspicia, apparitions naturelles qui n’ont de sens que pour les personnes versées dans l’art d’interpréter les signes : auguria, pour les membres savants du collége des augures ; auspicia, pour les magistrats qui avaient le droit de prendre les auspices. Prodigia, ostenta, portenta, monstra, apparitions surnaturelles qui frappent aussi le vulgaire et qu’un devin ne peut qu’expliquer avec plus d’exactitude ; enfin omina, signes que toute personne à qui ils apparaissent s’explique elle-même sans intermédiaire. L’idée qui domine dans prodigium est celle de la portée et des conséquences du phénomène ; dans ostentum, c’est le merveilleux et le grandiose ; dans portentum, le côté effrayant, l’annonce du danger ; dans monstrum, le côté contre nature et hideux.

Austerus. Severus. Difficilis. Morosus. Tetricus.

1. Austerus présente la sévérité comme une tournure d’esprit ; severus, comme une qualité morale. L’austerus, dont l’opposé est jucundus, répugne à la plaisanterie et aux futilités ; il demande du sérieux et du positif dans l’art, dans la science, dans le commerce de la société, au risque de passer pour un esprit sec ; le severus, dont l’opposé est luxuriosus, est rigoureux ; il hait tout libertinage, tout relâchement ; il exige des autres et de lui de l’empire sur soi-même et de l’énergie, au risque de passer pour un cœur dur. Le stoïcien est austerus comme philosophe, severus comme homme.

2. Austerus et severus n’impliquent point de blâme ; mais difficilis, morosus et tetricus désignent l’abus de la rigueur. Le difficilis ignore l’art d’un commerce facile et agréable, à cause de son tempérament hypocondriaque ; le morosus est scrupuleux ; il veut tout redresser par excès de conscience et défaut de tolérance ; le tetricus est roide et gênant par pédantisme et défaut de bonne humeur.

Auxilium. Opem ferre. Opitulari. Juvare. Adjuvare.

1. Auxilium, opem ferre et opitulari, secourir, supposent un opprimé qu’il s’agit de tirer d’embarras et de danger en venant à son secours, par opposition à deserere, destituere : il faut se représenter l’auxilium ferens comme un allié qui se met au service de la personne ou des intérêts de l’opprimé ; l’opem ferens, comme un bienfaiteur qui fait profiter le faible de sa puissance et de sa force. Juvare et adjuvare ne supposent, comme soutenir, qu’une personne qui réussira mieux et plus vite dans ce qu’elle entreprend, si on l’assiste, par opposition à impedire. Ter. Heaut. V, 2, 39. Matres solent esse filiis in peccato adjutrices, auxilio in paterna injuria. Les mères ne manquent jamais de se prêter aux sottises de leurs fils et de les secourir contre l’oppression d’un père. Quand Tarquin, dans Liv. II, 6, prie les Véiens : ferrent opem, adjuvarent, il faut se le représenter d’abord comme exilé, exulans, ensuite comme prétendant, regnum repetiturus.

2. Opem et auxilium ferre ont l’accent sur le substantif ; c’est du secours qu’on porte, non autre chose ; opitulari et le terme poétique auxiliari ont l’accent sur leur racine verbale ; c’est secourir sans hésiter.

Ave. Salve. Vale.

Ave, formule de salutation qui s’emploie également à l’arrivée et au départ, comme χαῖρε ; salve, formule d’usage à l’arrivée ; vale, au départ, comme ἔῤῥωσο. Suet. Galb. 4. Ut liberti mane salvere, vespere valere sibi singuli dicerent. Il maintint l’usage qui obligeait ses affranchis à venir lui souhaiter chacun le bonjour le matin, et le soir une bonne nuit.

Axes. Plancæ. Tabulæ.

Axes ou asses et plancæ, planches brutes qu’on emploie telles qu’elles sortent de la scie : asses, terme usuel ; plancæ, terme technique, comme ais. Tabulæ, planches travaillées avec plus de fini à l’aide du rabot, pour servir à des meubles de luxe.

B

Balbus. Blæsus.

Balbus, bègue, c’est un défaut habituel ; blæsus, qui bégaye, c’est un accident temporaire.

Bibere. Potare.

Bibere, boire à la façon des hommes, πίνειν ; potare, à la façon des bêtes et en prendre plus qu’on n’en peut porter. Sen. Ep. 122. Inter nudos bibunt, imo potant. Ils boivent, ils se soûlent de vin au milieu des baigneurs nus. Plaut. Curc. I, 1, 88. Agite, bibite, festivæ fores, potate, fite mihi volentes propitiæ. Bois, bois, charmante porte, soûle-toi, sois-moi bienveillante et favorable.

Bonus. Bene moratus. Probus. Frugi. Honestus. Sanctus.

1. Bonus, bene moratus, probus et frugi marquent un degré inférieur de moralité qui consiste à éviter le blâme et le châtiment, la haine et le mépris. Bonus se prend au sens populaire selon lequel la bienveillance et la bonté de cœur constituent un des principaux éléments de la moralité, comme bon, ἀγαθὸς, par opposition à malus. Bene moratus se dit, dans un sens plus philosophique, d’un caractère formé par l’éducation dont les traits indispensables sont de l’empire sur soi-même, de la droiture, un certain détachement de l’égoïsme vulgaire, moral, qui a des mœurs, εὔτροπος. Probus s’entend de celui qui ne fait de tort ou d’injustice à personne, le brave homme, l’honnête homme, l’homme juste. Frugi, c’est celui que son savoir-faire, son exactitude, son application, rendent un personnage utile dans la vie pratique, l’homme brave et rangé, par opposition à nequam, comme χρηστός. Quintil. VI, 4, 11. Non est altercandi ars... res animi jacentis et mollis supra modum frontis, fallitque plerumque quod probitas vocatur quæ est imbecillitas. Il faut, pour paraître en maître aux débats, une âme qui ne se laisse point abattre, un front qui ne se courbe pas trop vite, et la commune erreur vient de ce qu’on donne en cette matière le nom de probité à la pure faiblesse d’esprit. Cic. Dej. 10. Frugi hominem dici non multum laudis habet in rege. Ce n’est pas faire un grand éloge d’un roi que de l’appeler un homme rangé.

2. Honestus et sanctus désignent un degré supérieur de moralité qui s’inspire d’une raison plus haute, qui s’élève au-dessus du vulgaire et de la morale au jour le jour. Honestus, âme noble et héroïque qui conforme sa conduite aux principes d’un honneur exquis, par opposition à turpis. Sanctus, âme religieuse et sainte que gouverne le désir de plaire à Dieu.

  • Brachium, v. Ulna.

Brevis. Curtus.

Brevis, court par nature ; curtus, raccourci.

C

Cadaver. Corpus.

Il y a entre cadaver et corpus à peu près la même différence qu’entre os et ossements. Le corps inanimé désigné par cadaver n’est qu’un objet matériel ; désigné par corpus, c’est la dépouille mortelle d’une personne, et on emploie toujours ce dernier mot quand on s’intéresse au mort.

Cæteri. Reliqui.

Cæteri, les autres, par opposition aux premiers nommés, comme οἱ ἄλλοι ; l’opposition est fortement marquée ; reliqui, le reste, comme simple complément du tout, οἱ λοιποί. Cic. Brut. 2, 6. Si viveret Hortensius, cætera fortasse desideraret una cum reliquis bonis civibus ; hunc aut præter cæteros aut cum paucis sustineret dolorem. Si Hortensius vivait, il partagerait sans doute les autres privations avec le reste des bons citoyens ; mais une douleur qu’il aurait de plus que les autres citoyens ou qu’on n’aurait guère avec lui serait...

Calere. Fervere. Æstuare. Calefacere. Fovere.

1. Calere et fervere, il fait chaud, il fait très-chaud, désignent la chaleur même : calidus, dont l’opposé est frigidus, un degré de chaleur modéré ; fervidus, dont l’opposé est gelidus, le degré du point d’ébullition. Æstuare, dont l’opposé est algere, désigne la sensation que la chaleur fait éprouver, comme avoir chaud.

2. Calefacere, chauffer, au sens purement physique, sans idée accessoire ; fovere, chauffer, avec allusion à la sensation agréable ou à l’effet bienfaisant de la chaleur.

Candela. Lucerna.

Candela, chandelle que l’on peut porter comme une torche, λαμπάς ; lucerna, lumière qui brûle sur une table et qu’on ne saurait se représenter autrement.

Canere. Cantare. Psallere. Canticum. Cantilena. Carmen. Poema. Poeta. Vates.

1. Canere, terme général, faire de la musique, canere voce, tibiis, fidibus, μέλπειν ; cantare se dit de la musique vocale, ἀείδειν ; psallere, de la musique instrumentale exécutée avec des instruments à cordes.

2. Cantica et cantilenæ, compositions exclusivement destinées à être chantées, dans lesquelles les paroles et la mélodie sont inséparables, comme dans les chants populaires, et qui servent d’expression à la joie et aux plaisirs de la vie, par opposition au discours, au langage parlé : canticum, chanson favorite qui égaye ; cantilena, chanson rebattue qui a perdu le charme de la nouveauté et n’est plus qu’une vieillerie. Carmina et poemata, poésies susceptibles d’être chantées, mais dont les paroles sont une œuvre d’art, ayant une valeur propre, et qui sont consacrées à la religion ou au dieu des vers, par opposition à la prose et à la vérité pratique. Carmina, dans sa signification primitive, désigne des chants religieux, ἐπῳδαὶ, et par extension d’autres poésies, surtout de petites pièces et des morceaux lyriques, comme ᾠδαί ; poemata, des productions d’un art avancé, de longs poèmes, la plupart du temps épiques ou tragiques, comme ποιήματα. Le carmen est le fruit d’une inspiration naïve ; le poema, d’une inspiration qui se connaît et se maîtrise.

3. Poeta, terme savant, technique, ne fait voir dans le poète que l’artiste ; vates, terme religieux qui appartient à la vieille langue latine, le présente comme une personne sainte.

Caper. Hircus. Hædus.

Caper, terme général, nom du bouc en histoire naturelle, τράγος ; hircus, vieux bouc qui a toute sa croissance ; hœdus, hædus, jeune bouc, ἔριφος.

Carere. Egere. Indigere.

1. Carere se rapporte à ce qu’on souhaite de posséder, c’est être privé de quelque chose, s’en passer, par opposition à habere ; egere et indigere se rapportent à ce qu’il nous faut absolument et dont nous ne pouvons pas nous passer, comme avoir besoin, par opposition à abundare. Sen. V. B. 7. Voluptate virtus sæpe caret, nunquam indiget. Le plaisir a beau fuir la vertu, elle n’en est jamais en peine. Ep. 9. Sapiens eget nulla re ; egere enim necessitatis est. Le sage n’a aucun besoin, car qui dit besoin dit nécessité. Cic. Ep. ad Qu. Fr. I, 3, 2. Nunc commisi ut me vivo careres, vivo me aliis indigeres. Je t’ai donc imposé de mon vivant des privations, réduit de mon vivant à dépendre des autres.

2. Egere marque le besoin même, par opposition à uti ; indigere, le sentiment pressant du besoin et le vif désir de le voir satisfait.

Caro. Pulpa. Viscera. Exta. Intestina. Ilia.

1. Caro, la chair en général, comme substance, par opposition à la graisse, aux nerfs, aux muscles ; pulpa, terme particulier pour la chair qui se mange et qui a du goût, par opposition aux os ; viscera, toutes les chairs et parties charnues comprises entre la peau et les os.

2. Viscera, au sens restreint, désigne toutes les parties internes du corps ; exta, les parties molles de la poitrine, comme le cœur, les poumons ; intestina, interanea et ilia, les parties molles du ventre, surtout les intestins : intestina, et après le siècle d’Auguste, interanea, les intestins considérés comme organes de la digestion ; ilia, tout ce qui se trouve dans l’abdomen, et particulièrement les parties mangeables.

Cassis. Galea. Cudo.

Cassis, cassida, casque de métal ; galea, casque de peau et à proprement parler de peau de belette ; cudo, casque de forme inconnue. Tac. G. 6. Paucis loricæ ; vix uni alterive cassis aut galea. Un petit nombre de cuirasses ; à peine un ou deux casques de métal ou de peau.

Castus. Pudicus. Pudens. Pudibundus.

1. Castus représente la chasteté comme une vertu innée, pur, innocent ; pudicus, comme une vertu morale, pudique, modeste.

2. Pudicus, pudicitia, la modestie naturelle, la peur de paraître nu aux yeux des autres, et l’esprit de chasteté qui en est la suite au point de vue exclusif des rapports des deux sexes, la pudicité ; pudens, pudor, la modestie en général, la peur de se faire voir sous un jour fâcheux et de s’exposer au mépris, le sens de l’honneur. Cic. Catil. II, 11, 25. Ex hac parte pudor pugnat, illinc petulantia ; hinc pudicitia, illinc stuprum. La modestie est aux prises avec l’effronterie, la pudeur avec la débauche.

3. Pudicus et pudens s’entendent de la modestie à l’état de qualité permanente ; pudibundus, d’un accès de modestie.

4. La modestie, pudor, procède de l’estime de soi-même, on ne veut point se compromettre aux yeux des autres ; la délicatesse, verecundia, procède de l’estime qu’on a pour les autres, on ne veut donner aucun sujet de scandale à ceux qu’on estime.

Casu. Forte. Fortuito. Fortasse. Forsitan. Haud scio an.

Casu, forte et fortuito, marquent les chances diverses : casu, la chance inattendue, par accident, par concours de circonstances, il est opposé à consulto, συμϐεϐηϰότως ; forte, la chance ordinaire, par hasard, τυχόν ; fortuito, fortuitu, qui sont emphatiques, la chance extraordinaire, par pur hasard, ἀπὸ τύχης ; ils ont pour opposé causa. Fortasse, forsitan et haud scio an marquent une éventualité : fortasse et fortassis, quand on reconnaît et qu’on affirme la possibilité : peut-être et même vraisemblablement : ils se construisent avec l’indicatif, ἴσως ; forsitan, forsan, quand on admet simplement la possibilité : après tout, il est possible : ils se joignent au subjonctif, τάχ᾽ ἄν ; haud scio an, quand on feint par modestie de ne pas être sûr de son fait, qu’on restreint l’affirmation par euphémisme. Fortasse verum est et forsitan verum sit veulent dire : la chose est vraie peut-être, peut-être aussi ne l’est-elle pas ; mais haud scio an verum sit : je la tiens pour vraie, mais sans vouloir la donner pour certaine.

Casus. Fors. Fortuna. Fors fortuna. Fatum.

1. Casus présente le hasard comme un fait brutal qui ne se rattache ni aux calculs de l’homme, ni à des causes connues, συμφορά ; fors, comme une sorte d’être fabuleux qui influe sur les choses humaines sans dessein et sans but, sans autre fin, pour ainsi dire, que de taquiner les mortels et de confondre leurs calculs, τύχη.

2. Fors, pris comme un vrai personnage mythologique, c’est le même hasard sous les traits d’un bonheur aveugle ; fortuna, c’est le bonheur qui n’est ni aveugle ni étourdi, qui intervient dans la marche des affaires humaines pour accorder ou refuser sa faveur ; enfin, fors fortuna est une chance heureuse, ἀγαθὴ τύχη.

3. Tous ces êtres sont en opposition avec les dii et le fatum qui amènent ou détournent un événement non par humeur et caprice, mais par des motifs plus élevés, les dii, selon les lois appréciables de la morale, selon le mérite et la dignité, selon le droit et l’équité ; le fatum, selon les lois mystérieuses de l’ordre éternel qui préside à l’univers, comme l’εἰμαρμένη, la μοῖρα. Tac. Hist. IV, 26. Quod in pace fors seu natura, tunc fatum et ira deorum vocabatur. En temps de paix, on aurait appliqué à ces faits les noms de hasard et d’accidents naturels ; on n’avait plus maintenant à la bouche que les mots de fatalité et de colère divine.

Caterva. Cohors. Agmen. Grex. Globus. Turba.

Caterva, cohors et agmen, multitude assemblée en bon ordre : caterva, en masse qui constitue un tout, comme par exemple un bataillon ; cohors, sous forme d’escorte et de cortége autour d’un chef ; agmen, en procession solennelle. Turba, grex et globus, multitude réunie sans ordre : grex, sans aucun arrangement ; turba, avec une idée accessoire de désordre et d’embarras ; globus, en foule qui se presse, se gêne et aboutit à former le cercle, chacun cherchant à gagner le centre.

Celare. Occulere. Occultare. Clam. Abdere. Condere. Abscondere. Recondere.

1. Celare, verbe abstrait, comme céler, tenir secret, ϰεύθειν, par opposition à fateri, il est synonyme de reticere ; occulere, occultare, verbes concrets, comme cacher, ϰρύπτειν, par opposition à aperire, ils sont synonymes d’obtegere. Les celanda restent inconnus hors le cas de trahison ; les occultanda seraient exposés à tous les regards si l’on manquait de prévoyance et de précaution.

2. Clam et clanculum signifient de même secrètement, par opposition à palam ; occulte, en cachette, par opposition à aperte.

3. Occulere se dit de toutes les manières de cacher, mais occultare, c’est cacher avec soin ou même avec sollicitude, et ce dernier verbe ne peut pas plus trouver place dans les propositions négatives que redolere et autres, aussi forts de sens.

4. Occultare couvrir d’un voile quelconque pour soustraire à la vue ; abdere, condere et abscondere, dérober les choses à la vue en les éloignant : abdere, en les mettant simplement de côté, hors du chemin, comme ἀποϰρύπτειν ; condere, en les rangeant à leur place et en les serrant, comme ϰαταϰρύπτειν ; recondere, en les gardant avec un soin extrême ; abscondere, en les gardant après les avoir mises à l’écart.

Celeber. Inclytus. Clarus. Illustris. Nobilis.

Celeber et inclytus, termes généraux pour signifier la célébrité, surtout en parlant des choses, et qui ne s’appliquent guère aux personnes que chez les poëtes ; clarus, illustris et nobilis ont particulièrement rapport à la politique : clarus, célèbre par des services éminents rendus à la patrie ; illustris, considéré à cause de son rang et de sa fortune ; nobilis, qui appartient à une famille dont les membres ont déjà occupé de hautes positions dans l’État.

Censere. Judicare. Arbitrari. Æstimare. Opinari. Putare. Reri. Autumare. Existimare. Credere.

1. Censere, judicare, arbitrari, æstimare, émettre un avis à titre d’autorité compétente et commise à cet effet : censere, comme censeur ou comme sénateur votant ; judicare, comme juge qui rend un arrêt ; arbitrari, comme arbitre ; æstimare, comme taxateur ou commissaire-priseur. Opinari, putare, reri et existimare, émettre une opinion comme simple particulier, en son propre et privé nom : opinari exprime un simple sentiment/ou un pressentiment, par opposition à la conviction claire et nette et à la certitude, comme croire ; putare, le résultat d’un calcul ; reri est une expression poétique ; autumare, un mot vieilli.

2. Æstimare présente l’avis à donner sous l’aspect d’un devoir de police rempli par un véritable taxateur, estimer quelque chose, au propre ou au figuré, d’après son prix et sa valeur en argent ; existimare, sous l’aspect d’un devoir de morale, estimer une chose par sa valeur intrinsèque ou par ce qu’elle a de vrai. Cicéron n’oppose comme opinion particulière au jugement de l’autorité compétente, judicio, que l’existimatio, jamais l’æstimatio.

3. Censere, etc., présentent l’opinion et la croyance comme basées sur des réflexions et sur une conviction personnelles ; credere, comme basées sur la confiance qu’on accorde au témoignage d’autrui. Sen. Tranq. 11. Non putavi hoc futurum, nunquam hoc eventurum credidissem, à savoir : si quis mihi prædixisset. Cela n’entrait pas dans mes prévisions ; je n’aurais jamais cru que cela pût arriver (même si on me l’avait prédit).

4. Opinor, employé sous forme de parenthèse est une formule de modestie, comme οἶμαι, à ce que je crois ; credo est une formule d’ironie, comme ὡς ἔοιϰεν. Ce dernier peut signifier : 1º je l’imagine bien, j’imagine, dans des affirmations qui vont d’elles-mêmes, et l’ironie tombe alors soit sur celui auquel il faut dire ou répéter les choses, soit sur celui qui paraîtrait tenté d’avoir quelque doute ; 2° oui, je le crois, ou : ne devrait-on pas croire ? à propos d’affirmations absurdes qu’on se juge autorisé à prêter aux autres et à placer dans leur bouche ; 3º je le crois, naturellement, cela se conçoit, à propos de propositions évidentes, quand on demande pour ainsi dire la permission de ne pas les commenter.

Chorda. Fides.

Chorda, la corde isolée ; fides exprime toujours au singulier comme au pluriel une idée collective, c’est la garniture entière ou l’instrument même.

Cicur. Mansuetus.

Cicur, apprivoisé au sens purement physique, terme de classification en histoire naturelle, par opposition à ferus ; mansuetus, apprivoisé au sens moral, lequel suppose un adoucissement de caractère, par opposition à sævus.

Citus. Celer. Velox. Pernix. Properus. Festinus.

1. Citus et celer s’entendent d’un mouvement rapide, par opposition à tardus, il s’agit simplement de vitesse ; velox et pernix, opposés à lentus, se disent de l’agilité due à la force du corps et développée par l’exercice, par l’art ; properus et festinus, de la hâte, de la volonté d’atteindre un but dans le moins de temps possible, par opposition à segnis.

2. Citus marque un mouvement prompt et vif, il se rapproche de vegetus ; celer, un mouvement violent et entraînant, il se rapproche de rapidus.

3. Pernicitas, c’est en général l’agilité et la prestesse dans tous les exercices du corps, saut, escalade, voltige ; velocitas, c’est par préférence la vitesse à la course, au vol, à la nage. Plaut. Mil. III, 1, 36. Clare oculis video, pernix sum manibus, pedibus mobilis. J’ai des yeux qui voient clair, des mains lestes, des pieds qui ne tiennent pas en place. Virg. Æn. IV, 180. Famam pedibus celerem et pernicibus alis. La Renommée dont la course est rapide et le vol agile. Curt. VII, 7, 53. Equorum velocitati par est hominum pernicitas. L’agilité des hommes égale la vitesse des chevaux.

4. Properus, properare marquent la hâte d’aller droit au but à force d’énergie, elle est opposée au laisser-aller, à cessare ; festinus, festinare, la hâte qui provient d’impatience et qui est voisine de la précipitation.

Clangere. Clamare. Vociferari.

Clangere se dit du cri des animaux et du son des instruments, comme ϰλάγγειν ; clamare et vociferari, du cri de l’homme : clamare est l’expression de la volonté ; vociferari, celle de la passion dans la colère, la douleur, l’ivresse. Rhet. ad Her. III, 12. Acuta exclamatio habet quiddam illiberale et ad muliebrem potius vociferationem, quam ad virilem dignitatem in dicendo accommodatum. Des éclats de voix aigus ont quelque chose de bas ; cela est bon pour des femmes qui criaillent, mais indigne d’un orateur. Virg. Æn. II, 310. Exoritur clamorque virûm clangorque tubarum. Les cris des hommes, le son des trompettes s’élèvent jusqu’à moi.

Coercere. Compescere.

Coercere se dit d’un acte de compression par force et abus de pouvoir ; compescere, d’un acte de répression par autorité et sagesse.

Cogere. Adigere.

Cogere, obliger à quelque chose par contrainte et par force ; adigere, déterminer à quelque chose par des motifs qui donnent à réfléchir. Tac. Ann. VI, 27. Se ea necessitate ad preces cogi, per quas consularium aliqui capessere provincias adigerentur. Dans cette extrémité il se voyait contraint de recourir aux prières pour engager des consulaires à se charger du gouvernement des provinces.

Cogitare. Meditari. Commentari.

1. Cogitare se dit de l’activité habituelle de l’esprit qui est toujours occupé d’une chose ou d’une autre ; meditari, de l’activité d’esprit surexcitée, de l’effort qui tend vers un résultat déterminé. Le premier équivaut à penser, le second à penser à quelque chose. Ter. Heaut. III, 3, 46. Quid nunc facere cogitas ? C’est-à-dire qu’as-tu en tête à présent ? Comparez avec Adelp. V, 6, 8. Meditor esse affabilis, c’est-à-dire : je songe aux moyens d’être aimable. Dans les Tusculanes (III, 6,) cogitatio ne désigne guère que la pensée qui a conscience d’elle-même ; meditatio désigne la réflexion, la spéculation.

2. Meditari s’emploie pour marquer l’intensité, c’est méditer sérieusement, avec effort, avec ardeur ; commentari (dans Cicéron seulement), pour marquer la durée, méditer à loisir, avec calme, à fond.

Cognitio. Notitia. Scientia. Ignarus. Inscius. Nescius.

1. Cognitio, acte par lequel l’esprit acquiert une connaissance ; notitia et scientia, état de l’esprit : notitia et nosse se disent d’un état dans lequel l’âme est passive et ne fait que recevoir des impressions, quand elle a conscience d’un phénomène extérieur et en conserve le souvenir ; scientia et scire impliquent, comme le savoir, une certaine spontanéité et la conviction de la réalité des choses. La notitia peut se borner à des notions de rencontre ; la scientia doit s’être rendu l’objet familier, l’avoir approfondi à force de travail. Cic. Sen. 4, 12. Quanta notitia antiquitatis ! quanta scientia juris romani ! Quelle pratique de l’antiquité ! quelle science du droit romain !

2. L’ignarus ne possède pas cette notitia, l’inscius cette scientia. Tac. Hist. I, 11. Ægyptum provinciam insciam legum, ignaram magistratuum. La province d’Égypte qui n’est ni initiée à nos lois, ni façonnée à nos habitudes de gouvernement. La législation exige une étude en règle, tandis qu’on peut apprendre l’administration par la pratique.

3. Inscius, celui qui n’a rien appris ou qui n’a pas appris quelque chose, il y a lieu de blâmer ; nescius, celui qui par hasard n’a pas entendu parler de quelque chose, n’en a pas fait l’expérience ; le mot se prend indifféremment en bonne ou en mauvaise part. Cic. Brut. 83. Inscium omnium rerum et rudem. Ignare et brut. Comparez avec Plin. EP. VIII, 23. Absens et impendentis mali nescius. J’étais absent, je ne me doutais pas du malheur suspendu sur ma tête.

Collis. Clivus. Tumulus. Grumus.

Collis et clivus, grande colline qui est une petite montagne : collis, ϰολωνὸς, hauteur, par opposition à la plaine qui est au-dessous, et, par suite colline assez raide ; clivus, ϰλιτὸς, plan incliné, par opposition à la plaine horizontale, et, par suite, colline en pente douce. Tumulus et grumus, petite colline qui n’est qu’un gros tertre : tumulus, comme ὄχθος, tertre naturel ou artificiel, par exemple un tumulus ; grumus, élévation exclusivement artificielle, faite de main d’homme, χῶμα. Colum. Arbor. vers la fin. Collem autem et clivum modum jugeri continentem repastinabis operis sexaginta. Vous emploierez soixante manœuvres à défricher sur une colline une pente de la contenance d’un arpent. Liv. XXI, 32. Erigentibus in primos agmen clivos apparuerunt imminentes tumulos insidentes montani. Quand les têtes de colonne de l’armée d’Annibal s’élevèrent sur les premières pentes des Alpes, elles découvrirent les montagnards établis sur les mamelons qui dominaient la route. Hirt. B. Hisp. Ex grumo excelsum tumulum capiebat. Il voulut quitter son tertre pour gagner une éminence qui commandait les environs.

Comere. Decorare. Ornare.

1. Comere et decorare, parer, pour embellir et pour flatter la vue ; ornare, orner en joignant l’utile à l’agréable.

2. Comere présente la parure comme une recherche minutieuse et efféminée, souvent avec une idée de blâme, comme nitere ; il s’oppose à la nature, à une simplicité noble, à une négligence gracieuse, parer, ϰομμοῦν ; decorare et ornare la présentent toujours sous un jour favorable, comme splendere, comme un signe d’aisance et de richesse : decorare, par opposition à ce qui est commun et n’a point d’apparence, embellir, ϰοσμεῖν ; ornare, par opposition à ce qui est pauvre et incomplet, orner, ἀσϰεῖν.

3. L’idée contenue dans comere ne va pas au delà d’une question d’arrangement : on ajuste, on polit pour donner bonne mine, par exemple en peignant et tressant les cheveux ; decorare et ornare supposent une addition matérielle ; on emprunte des ornements extérieurs, par exemple, un diadème. Quintil. XII, 10, 47. Comere caput in gradus et annulos. Parer une tête de boucles disposées par étages. Et Virg. Ecl. VI, 69. Apio crines ornatus amaro. Linus, qui orne ses cheveux de fleurs et d’ache amère. ТIB. II, 2, 6. Sertis decorare comas. Relever de guirlandes la beauté des cheveux.

Comitari. Deducere. Prosequi.

Comitari, accompagner, dans tous les sens, ἀϰολουθεῖν ; prosequi et deducere, avec l’idée accessoire d’un témoignage d’estime ou d’amitié : le prosequens reconduit les gens comme le προπέμπων, soit jusqu’au bout, soit pendant une partie du chemin ; le deducens les ramène chez eux ou les mène du moins au terme de leur voyage, comme le ϰατάγων, soit qu’il se mette à leur suite dès le départ ou seulement en route.

Commodare. Mutuum dare.

Commodare, prêter sans formalités ni stipulations, à charge de restituer l’objet tel quel, fût-il usé ; mutuum dare, faire un prêt avec ou sans intérêt, à charge de rendre au bout d’un certain temps l’équivalent du prêt. La commodatio est un service rendu par affection, la mutuum datio est une affaire.

Complementum. Supplementum.

Complementum, ce qui sert, comme une clef de voûte, à compléter, à parfaire ; supplementum, ce qui sert à remplacer après coup, à remplir des lacunes.

Concedere. Permittere. Indulgere. Connivere.

Concedere et permittere, accorder quelque chose dont on dispose en vertu d’un droit personnel illimité : concedere, à la suite d’une prière ou d’une insinuation, par opposition à refuser, concéder, συγχωρῆσαι ; permittere, par confiance et générosité, par opposition à défendre, permettre, ἐφεῖναι. Indulgere et connivere, souffrir une chose qui est officiellement défendue : l’indulgens, par longanimité patente, comme condescendre ; le connivens, en feignant de fermer les yeux.

Concessum est. Licet. Fas est.

Concessum est, ἔξεστι, ce qui est permis en général ; ce terme est dans le rapport du genre à l’espèce avec licet, licitum est, ce qui est permis aux yeux des hommes en vertu de maximes consacrées soit par des lois positives, soit par les mœurs et la coutume, comme θέμις ἐστὶ, et avec fas est, ce qui est permis aux yeux des dieux en vertu de maximes révélées soit par la religion, soit par le sentiment moral, comme ὅσιόν ἐστι.

Concilium. Concio. Comitia. Cœtus. Conventus.

1. Concilium, concio et comitia, assemblées convoquées pour affaires : concilium, assemblée de nobles et de notables, de l’aristocratie, du sénat, dont les membres sont invités individuellement au conseil, συνέδριον ; concio et comitia, réunion de la commune convoquée par publication pour prendre une résolution ou pour en entendre communiquer une : concio, contio, se dit de toute assemblée régulière de la commune, soit peuple, soit armée, dans le premier pays ou le premier camp venu, σύλλογος ; comitia est le terme historique réservé pour l’assemblée du peuple romain, comme ἐϰϰλησία pour l’assemblée d’Athènes, et ἁλία pour celle de Sparte.

2. Cœtus et conventus, assemblées volontaires qui se réunissent librement : cœtus, dans un but quelconque, par exemple, pour les plaisirs de la société, pour des conspirations, σύνοδος ; conventus, dans un but sérieux, par exemple, pour célébrer une fête, pour écouter une proposition, ὁμήγυρις, πανήγυρις.

Conclave. Cubiculum.

Conclave, terme général pour toute pièce qui ferme et par préférence pièce de parade ; cubiculum, terme particulier pour la pièce où l’on se tient d’habitude.

Conditio. Status.

Conditio, état réglé par la volonté ; status, état créé par les circonstances. Cic. Fam. XII, 23. Omnem conditionem imperii tui statumque provinciæ demonstravit mihi Tratorius. Tratorius m’a rendu compte des conditions auxquelles tu as pris le commandement et de l’état de ta province.

Confisus. Fretus.

Confisus, plein de confiance et d’abandon, comme securus et πεποιθώς ; fretus, protégé, comme tutus et ἐῤῥωμένος.

Conjugium. Matrimonium. Contubernium. Nuptiæ.

Conjugium et matrimonium, union durable de l’homme et de la femme en vue d’une communauté d’existence et de la reproduction : conjugium, terme général marquant une simple liaison naturelle qui existe même chez les animaux ; contubernium, union par mariage entre esclaves ; matrimonium, mariage véritable et légal entre personnes libres et citoyens, institution civile et politique ; nuptiæ ne désigne que le point de départ du matrimonii, les noces ou la fête qui accompagne l’union.

Considerare. Contemplari.

Considerare présente la contemplation comme un acte de l’intelligence qui cherche à former un jugement ; contemplari, comme un acte du sentiment qui s’abîme dans son objet, qui s’abandonne entièrement aux impressions agréables ou désagréables que l’objet éveille.

Constat. Apparet. Elucet. Liquet.

Constat veut dire : c’est une vérité démontrée et établie, par opposition à un songe creux, à un bruit incertain ; apparet, elucet et liquet signifient : c’est une chose claire et évidente. Apparet associe à cette idée l’image d’une apparition qui se détache sur un fond ; elucet, celle de la lumière qui jaillit de l’obscurité ; liquet, celle d’une eau qui dégèle et redevient limpide.

Consuetudo. Mos. Ritus. Cærimonia.

1. Les trois premiers marquent l’observation régulière d’une pratique. Consuetudo est l’habitude qui se forme d’elle-même, qui a sa raison d’être dans les penchants de l’individu ou du peuple, dans ce qui leur est commode, έθος ; mos, les mœurs procédant de la raison et de la volonté qui a conscience d’elle-même, ayant leur raison d’être dans les idées morales ou esthétiques du droit, de la vertu et de la décence, ἦθος ; ritus, enfin, usage sacré ou implanté par l’instinct de la nature ou introduit par les dieux à titre de cérémonie, n’ayant en aucun cas une origine purement humaine. Les consuetudines n’existent qu’à l’état de simples faits et n’ont point de valeur morale ; les mores ont reçu une sanction morale par un consentement tacite, de même que les jura legesque par une convention formelle ; les ritus existent naturellement et sont consacrés par leur haute antiquité. C’est ce dernier mot que les bons auteurs en prose emploient par préférence en parlant de l’instinct des animaux à cause de la force avec laquelle il marque que l’habitude est primitive, naturelle, inséparable de l’être même.

2. Ritus, usage sacré établi et enseigné par les dieux ou par la nature ; cærimonia, même usage considéré dans ses applications au culte.

Contaminare. Inquinare. Polluere.

Contaminare désigne la souillure par son côté nuisible comme venant gâter ce qui était sain et utile ; inquinare, par son côté dégoûtant, elle défigure la beauté ; polluere, par son côté moral, elle viole la sainteté et la pureté. Le second de ces trois verbes répond à μορύσσειν ; le troisième à μιαίνειν. Cic. Cæcil. 21, 70. Judiciis corruptis et contaminatis. Les arrêts de la justice brisés et flétris. Comparez avec Cœl. 6. Libidinibus inquinari. Porter les marques affreuses de la débauche. Et Rosc. Am. 26, 71. Noluerunt in mare deferri ne ipsum pollueret, quo cætera quæ violata sunt expiari putantur. On ne voulut pas souffrir qu’il fût jeté à la mer, de peur de profaner la mer même, qui passe pour purifier toutes les souillures.

Continuus. Perpetuus. Sempiternus. Æternus.

1. Continuum, ce qui tient ensemble sans interruption, sans lacune ; perpetuum, ce qui va jusqu’à la fin et ne cesse pas avant la fin. Suet. Cæs. 76. Continuos consulatus, perpetuam dictaturam. Des consulats qui se succèdent coup sur coup, une dictature perpétuelle.

2. Perpetuus, sempiternus et æternus marquent la continuité dans la durée : perpetuus, au sens relatif, par rapport à un terme arbitraire, par exemple à celui de la vie, ce qui dure autant que la vie ; sempiternus et æternus, au sens absolu, par rapport au terme du temps en général. Sempiternum veut dire, comme ἀΐδιον, ce qui dure toujours, ce qui a une existence égale à la durée du temps, ce qui marche de pair avec le temps ; æternum signifie, comme αἰώνιον, ce qui est éternel, ce qui est au-dessus du temps et ne se peut mesurer que par grandes périodes, car le temps n’est qu’une faible partie de l’éternité, tempus est pars quædam æternitatis. Cic. Inv. I, 27. L’idée sublime d’une durée qui ne commence ni ne finit, contenue dans æternus, ne l’est pas dans sempiternus, qui fait plutôt songer à la longueur de la durée comprise entre le commencement et la fin, sans indiquer que l’éternité n’a ni commencement ni fin. Sempiternus renferme l’expression mathématique ; æternus, l’expression métaphysique de l’éternité. Cic. Orat. II, 40, 69. Barbarorum est in diem vivere, nostra consilia sempiternum tempus spectare debent. C’est affaire aux barbares de vivre au jour le jour ; nos plans doivent embrasser un temps indéfini. Finn. I, 6, 17. Motum atomorum nullo a principio sed ex æterno tempore intelligi convenire. Il va sans dire qu’il faut concevoir le mouvement des atomes comme n’ayant jamais eu de commencement, comme existant depuis un temps infini.

Contumelia. Injuria. Offensio.

1. Contumelia, atteinte portée à l’honneur d’autrui, comme l’affront ; injuria, atteinte au droit d’autrui, comme l’injustice. Un coup est une injuria en tant que je porte la main sur quelqu’un, et une contumelia en tant que je lui attire par une pareille action la réputation fâcheuse d’être un lâche ou un valet. Sen. Clem. I, 10. Contumelias quæ acerbiores principibus solent esse quam injuriæ. Les affronts qui paraissent d’habitude plus amers aux princes que les injustices. Pacuv. dans NON. Patior facile injuriam si vacua est contumelia. Je supporte aisément une injustice pourvu qu’il n’y ait pas d’affront.

2. Contumelia et injuria sont des actions ; offensio et offensa marquent un état, à savoir : le chagrin de l’offensé, le ressentiment par opposition à gratia ou à delectatio. Cic. Att. III, 23. Mihi majori offensioni sunt quam delectationi possessiunculæ meæ. Mes pauvres petites propriétés me donnent plus de peine que de plaisir. Plin. Ep. II, 18. Oportet me non solum offensas, verum etiam simultates æquo animo subire. C’est un devoir pour moi de m’exposer sans me laisser émouvoir et aux mécontentements et aux rancunes jalouses.

Corrigere. Emendare.

Corrigere, corriger à la façon du pédagogue ou du censeur qui veut redresser ou rajuster ; emendare, à la façon du maître expérimenté et de l’ami bienveillant qui veut amender. Plin. Pan. 6, 2. Corrupta est disciplina castrorum, ut tu corrector emendatorque contingeres (le premier par sévérité, le second par sagesse). La discipline avait péri dans les camps, mais tu devais paraître pour la restaurer et la rétablir. Cic. Mur. 29. Verissime dixerim nulla in re te (Catonem) esse hujusmodi, ut corrigendus potius quam leviter inflectendus viderere. Je puis dire en toute vérité que tu n’as montré nulle part un caractère qui voulût être tout à fait redressé plutôt que légèrement dirigé. Comparez avec PLIN. Ep. I, 10. Non castigat errantes, sed emendat. Il ne réprimande pas ceux qui s’égarent, il les rend meilleurs.

Coxa. Latus. Femur.

Coxa et coxendix, la hanche ; latus, la partie comprise entre la hanche et l’aisselle ou le flanc ; femur et femen, la partie située immédiatement au-dessus de la hanche ou partie supérieure de la cuisse.

Creare. Gignere. Parere. Generare.

1. Creare, faire passer une chose du néant à l’existence par sa volonté et sa puissance créatrice ; gignere, donner le jour, c’est le terme générique par rapport à generare qui ne se dit que du père, et à parere qui ne se dit que de la mère.

2. Gignere appartient au langage usuel ; generare, au style élevé. Aussi dit-on pour l’ordinaire : homines et belluæ gignunt ; natura et dii generant, et corpora gignuntur ; poemata generantur. Dans Cic. N. D. III, 16, Herculem Jupiter genuit est un simple renseignement mythologique ; mais Legg. I, 9, Deus hominem generavit, c’est une haute vérité métaphysique.

Crinis. Capillus. Coma. Cæsaries. Pilus. Cirrus. Cincinnus.

1. Crinis et capillus, les poils naturels, au sens physique, θρίξ : crinis, toute espèce de poil par opposition aux places nues ; capillus, le poil de la tête par opposition à la barbe, etc. Coma et cæsaries ajoutent à cette idée celle d’une certaine beauté. Ce sont de beaux cheveux, c’est la chevelure prise comme un ornement naturel du corps ou comme susceptible d’être parée. Coma se dit par préférence des cheveux de femme, ϰόμη ; cæsaries, des cheveux d’homme, ἔθειρα. Crinitus marque simplement qu’on a des poils ou des cheveux ; capillatus est l’opposé d’une tête chauve, et on appelle les Gaulois Galli comati, parce qu’ils portaient de longs cheveux, ϰαρηϰομόωντες.

2. Crinis, capillus, coma, cæsaries, le poil au sens collectif, tout celui qui pousse ; pilus, le poil isolé, et par préférence le poil court et hérissé des animaux. Pilosus s’oppose à une belle peau bien lisse ; crinitus et capillatus à la nudité laide et à la calvitie.

3. Cirrus, cincinnus, cheveux bouclés ; mais cirrus se dit d’une boucle naturelle ; cincinnus, d’une boucle artificielle.

Cruciatus. Tormentum.

Cruciatus, cruciamenta, terme général pour toute espèce de tourments naturels et artificiels ; tormenta, terme spécial pour les tourments de la question, tortures. Cic. Phil. XI, 4. Nec vero graviora sunt carnificum tormenta quam interdum cruciamenta malorum. Les tortures de la question ne sont pas toujours plus pénibles que les souffrances qui viennent de nos maux.

Cubare. Jacere. Situm esse.

Cubare se dit d’êtres vivants ; situm esse, d’objets inanimés qui sont couchés ou étendus ; jacere, des deux. Cubare et jacere sont neutres ; situm esse se prend toujours au sens passif. De plus cubare rappelle toujours l’image d’une personne fatiguée qui cherche à reprendre des forces, par opposition à l’effort qu’il en coûte pour se tenir debout ; jacere, l’image de la faiblesse sans idée accessoire par opposition à la manifestation de force qui consiste à se tenir debout.

Cubile. Lectus.

Cubile, couche naturelle pour les hommes et les animaux, gîte, ϰοίτη, εὐνή ; lectus, couche artificielle, exclusivement à l’usage de l’homme, le lit, λέϰτρον.

Culcita. Pulvinus. Pulvinar.

Culcita, coussin dur ; pulvinus et pulvinar, coussins moelleux et élastiques : pulvinus, pour l’usage ordinaire ; pulvinar, pour un usage solennel et religieux.

Culmen. Fastigium.

Culmen, la ligne faîtière du toit ; fastigium, l’extrémité de cette ligne, le point où les solives du toit forment un angle par leur inclinaison et leur rencontre. Fastigium est une partie du culmen dans Virg. Æn. II, 458. Evado ad summi fastigia culminis. Je m’élance aux angles de la dernière terrasse. Au figuré culmen désigne simplement le sommet comme le point supérieur, le plus élevé, à peu près comme ϰολοφὸν, ce n’est qu’un rapport de lieu ; fastigium contient une idée de prééminence, c’est le plus haut degré, le degré suprême, à peu près comme ϰορυφή. Culmen tecti, la dernière partie de la construction ; fastigium, la couronne de l’édifice. Fastigium désignera le trône, tandis que culmina montium est bien plus usité que fastigia.

Culmus. Calamus. Stipula. Spica. Arista. Arundo. Canna.

1. Culmus, tige mince et élancée, en particulier celle du blé ; calamus, même tige considérée comme un tuyau, en particulier celle du roseau.

2. Culmus, la tige du blé qui supporte l’épi de même que le corps supporte la tête, partie intégrante du tout ; stipula, la tige considérée comme la partie inutile, sans valeur en comparaison de l’épi, le chaume.

3. Spica, l’épi plein, le fruit du blé, sans égard à la forme ; arista, l’épi barbu, la pointe ou partie supérieure de la tige, sans égard au contenu, parfois les barbes seules. Quintil. I, 3, 5. Imitatæ spicas herbulæ inanibus aristis ante messem flavescunt. Mauvaises herbes qui imitent l’épi plein, mais dont la tête barbue est vide et qui jaunissent avant la moisson.

4. Calamus, dans le sens de roseau, est le terme général ; arundo, roseau long et fort ; canna, roseau petit et mince. Colum. IV, 32. Ea est arundineti senectus, cum ita densatum est, ut gracilis et cannæ similis arundo prodeat. Une plantation de roseaux est vieille lorsqu’elle s’est épaissie au point de ne plus fournir que des roseaux grêles, semblables à ceux de la petite espèce.

Culpa. Noxia. Noxius. Nocens. Sons.

1. Culpa, cas de celui qui doit répondre d’un dommage (peccatum, delictum, maleficium, flagitium ou nefas) ; ce mot suppose une responsabilité, et par suite un être raisonnable, il est opposé à casus ou à necessitas ; noxia, cas de celui qui a causé un dommage, il peut être imputé à tout être capable d’agir, par opposition à innocentia. Liv. III, 42, 2. Illa modo in ducibus culpa, quod ut odio essent civibus fecerant ; alia omnis penes milites noxia erat. Les chefs n’avaient qu’un tort, qui était de s’être rendus odieux à leurs concitoyens ; tout le mal venait d’ailleurs des soldats. Cic. Marc. 13. Etsi aliqua culpa tenemur erroris humani, a scelere certe liberati sumus. Et s’il nous reste un tort, c’est d’être tombés dans une erreur familière à l’homme ; quant au crime, nous en sommes certainement débarrassés. Et Ovid. Trist. IV, 1, 23. Et culpam in facto, non scelus esse meo. Et s’il y a faute dans mon fait, il n’y a point de crime. Dans ces exemples le terme le plus général pour toute espèce de faute, culpa, se prend particulièrement pour la plus petite de toutes, pour le delictum.

2. Culpa et noxia supposent une action dommageable ; vitium, une action ou une qualité blâmable, et même un défaut naturel dont personne ne peut nous faire un crime.

3. Nocens, innocens désignent la culpabilité ou l’innocence dans un cas déterminé, à propos d’une action isolée ; mais noxius et innoxius ainsi que les adjectifs poétiques nocuus et innocuus se rapportent à l’être et au caractère en général. Plaut. Capt. III, 5, 7. Decet innocentem servum atque innoxium confidentem esse ; c’est-à-dire un esclave qui se sait innocent dans le cas particulier dont il s’agit, et qui en général ne fait rien de mal.

4. Noxius, le coupable au sens matériel, comme auteur et cause d’un dommage, ϐλαϐερός ; sons, au sens moral et judiciaire, comme condamné ou méritant d’être condamné, θῶος.

Cunæ. Cunabula.

Cunæ, le berceau même ; incunabula, la literie et les autres accessoires du berceau. Plaut. Truc. V, 13[1]. Fasciis opus est, pulvinis, cunis, incunabulis. Il faut des bandes, des coussins, un berceau, de la literie et du linge.

  • 1 Ce qui reste du cinquième acte n’est pas divisé en scènes.

Cunctari. Hæsitare. Cessare.

Cunctari, hésiter par réflexion, μέλλειν ; hæsitare, par défaut de résolution ; cessare, par manque de force et d’énergie, ὀϰνεῖν. Le cunctans remet à commencer ; le cessans, à poursuivre.

Cupido. Cupiditas. Libido. Voluptas.

1. Cupido, le désir qui nous porte vers quelque chose conçu comme un principe d’activité par opposition à la répugnance ; cupiditas, la passion conçue comme un état par opposition au calme de l’âme. Il faut que cupido soit joint, et cupiditas peut être joint à un génitif exprimé ou sous-entendu ; cupido se rapporte alors par préférence aux biens ordinaires et à l’argent ; cupiditas, à des biens de toute sorte. Vell. P. II, 33. Pecuniæ cupidine, par un vif amour de l’argent. Et tout à la suite : interminatam imperii cupiditatem. Une passion démesurée d’autorité.

2. Cupido et cupiditas sont opposés au désir modéré ; mais libido, c’est la fantaisie et le caprice par opposition à la volonté raisonnable, ratio ou voluntas. Libidines, les caprices par rapport au défaut d’empire sur soi-même ; voluptates, les plaisirs par opposition aux goûts sérieux ou au chagrin. Tac. H. II, 31. Minus Vitellii ignaræ voluptates quam Othonis flagrantissimæ libidines timebantur. Les plaisirs paresseux de Vitellius paraissaient moins redoutables que les caprices ardents d’Othon.

Cur. Quare.

Cur sert aussi bien pour de véritables questions que pour des exclamations sous forme de questions ; quare ne s’emploie que pour des questions qui exigent une réponse.

Cura. Sollicitudo. Angor. Dolor. Ægritudo.

Cura, sollicitudo et angor, impression pénible causée par l’idée d’un mal, d’un danger à venir : cura, sous forme de pensée, le souci, la sollicitude, φροντὶς, par opposition à incuria ; sollicitudo, sous forme de sentiment, l’inquiétude, l’agitation, μέριμνα, par opposition à securitas ; angor, sous forme de passion, l’angoisse, l’anxiété, par opposition à solutus animus. Dolor et ægritudo se rapportent à un mal présent : dolor exprime un désagrément, la douleur, par opposition à gaudium, ἄλγος ; ægritudo, une maladie, la tristesse noire, ἀνία, par opposition à alacritas. Cic. Finn. I, 22. Nec præterea res ulla est, quæ sua natura aut sollicitare possit aut angere. Et il n’y a rien hors de là qui soit de nature à causer de l’inquiétude ou de l’anxiété. Accius dans Nonius. Ubi cura, ibi anxitudo. Les soucis ne vont point sans humeur. Plin. Ep. II, 11. Cæsar mihi tantum studium, tantam etiam curam (nimium est dicere sollicitudinem) præstitit ut... César s’est montré si zélé pour moi, si soucieux même (car, de dire inquiet, ce serait trop) que... Quintil. VIII, pr. 20. Curam ego verborum, rerum volo esse sollicitudinem. J’entends que les mots donnent du souci, les choses de l’inquiétude.

Curvus. Uncus. Pandus. Incurvus. Recurvus. Reduncus. Repandus. Aduncus.

1. Curvus ou en prose curvatus, terme général pour tout ce qui est courbé, depuis la courbe la plus faible jusqu’à la circonférence parfaite ; uncus suppose une forte courbure qui se rapproche du demi-cercle, comme un crochet ; pandus, une courbure faible qui s’éloigne peu de la ligne droite, comme une échancrure.

2. Les curva forment une courbe continue ; les incurva supposent une ligne droite dont l’extrémité seule dégénère et se termine en courbe, comme ἐπιϰαμπὴς, par exemple, le bâton augural ou le corps d’un homme qui se baisse, etc.

3. Recurvus, reduncus et repandus désignent des courbes tournées en dehors ; aduncus, une courbe tournée en dedans. Plin. H. N. XI, 37. Cornua aliis adunca, aliis redunca. Chez les uns les cornes sont tournées en dedans, chez les autres en dehors.

Custodia. Carcer. Ergastulum.

Custodia, lieu quel qu’il soit où sont retenus des prisonniers, fourrière ; carcer, prison bâtie exprès surtout pour les citoyens ; ergastulum, maison de correction pour des esclaves.

D

Damnum. Detrimentum. Jactura.

Damnum, perte qu’on fait par sa faute par opposition à lucrum ; detrimentum, perte qu’on éprouve par opposition à emolumentum ; enfin jactura, perte volontaire par laquelle on prétend échapper à une perte ou à un mal plus considérable. Damnum se dit seul d’une amende, tandis que dans la formule : Videant consules ne quid respublica detrimenti capiat, on ne rencontre jamais damnum.

Delibutus. Unctus. Oblitus.

Delibutus, mouillé avec un corps gras ; c’est le terme générique par rapport à unctus, oint d’une matière agréable, et à oblitus, enduit d’une matière malpropre.

Delictum. Peccatum. Malefactum. Maleficium. Facinus. Flagitium. Scelus. Nefas. Impietas.

1. Delictum et peccatum, transgression légère : delictum, des lois positives, par légèreté ; peccatum, des lois de la nature et de la raison, par sottise.

2. Malefactum est un synonyme et une sorte de périphrase des deux mots précédents. Maleficium et facinus engagent directement la morale dans la question. Maleficium, tout méfait qui mérite un châtiment, parce qu’il procède d’une mauvaise intention. Facinus, quand on le prend en mauvaise part, c’est, comme δεινόν τι, un forfait qui excite de l’étonnement ou de l’épouvante, à cause du degré extraordinaire d’audace qu’il exigeait.

3. Il y a autant de sortes de mauvaises actions que de sortes de devoirs, envers soi-même, envers les autres, envers les dieux. Flagitium est un manquement contre soi-même, contre son propre honneur, par débauche, inconduite, lâcheté, bref, par des actions qui proviennent de faiblesse morale plutôt que d’une force déréglée, par des manifestations de l’ignavia ; c’est une turpitude. Scelus est un manquement contre les autres, contre les droits des particuliers ou la paix de la société, par brigandage, meurtre et surtout par sédition, bref, par des manifestations de la malitia, un crime. Nefas est un manquement contre les dieux ou la nature, par blasphème, pillage d’un temple, meurtre de parents, trahison envers la patrie, bref, par des manifestations de l’impietas, un sacrilége.

Deligere. Eligere.

Deligere, faire son choix, ne pas laisser plus longtemps le choix en suspens ; eligere, choisir et ne pas prendre le premier venu.

Demere. Adimere. Eximere. Auferre. Eripere. Surripere. Furari.

1. Demere, adimere et eximere, enlever sans violence et sans ruse. Demere, séparer une partie d’un tout qui se trouve diminué par là ; il a pour opposé addere et adjicere ; adimere, prendre un bien à un propriétaire qui en devient plus pauvre ; il a pour opposés dare et reddere ; enfin, eximere, ôter un mal à une personne qui se sent alors comme allégée d’un fardeau.

2. Auferre, eripere, surripere et furari impliquent une idée d’arbitraire et d’injustice. Auferre est le terme général ; c’est à peu près prendre. Eripere, prendre par violence, comme arracher ; surripere et furari, secrètement et par ruse ; mais surripere, par un détournement qui peut avoir pour motif une nécessité de légitime défense et de prudence ; furari, en pratiquant le méprisable métier de voleur. Sen. Prov. 5. Quid opus fuit auferre ? accipere potuistis ; sed ne nunc quidem auferetis, quia nihil eripitur nisi retinenti. Où était la nécessité de prendre ? vous n’aviez qu’à ouvrir la main pour recevoir. Et il ne vous sera pas donné de prendre, même à présent, car on n’arrache rien qu’à celui qui veut garder. Cic. Verr. I, 4, 60. Si quis clam surripiat aut eripiat palam atque auferat. Qu’on dérobe secrètement ou qu’on arrache ouvertement et qu’on prenne. Et II, 1, 13. Non furem sed ereptorem. Ce n’est pas un voleur, mais un ravisseur.

Depravare. Corrumpere.

Depravare, terme relatif, gâter, mais de manière qu’on puisse encore réparer le mal ; il se dira de ce qui a pris un mauvais pli ; corrumpere, terme absolu, abîmer, mettre hors d’usage, en sorte qu’il n’y ait plus de remède ; il se dira de ce qui est brisé.

Desinere. Desistere.

Desinere marque un fait et se dit des personnes, des choses et des actions, comme cesser ; desistere marque un acte de volonté dont les personnes seules sont capables, comme renoncer.

Destinare. Obstinare. Decernere. Statuere. Constituere.

1. Destinare et obstinare présentent une résolution à laquelle on s’arrête, comme un acte psychologique ; decernere et statuere, comme un acte politique.

2. Destinare, prendre un parti décisif dont les conséquences sont prévues ; obstinare, prendre une résolution irrévocable dans laquelle on persiste avec opiniâtreté ou entêtement.

3. Decernere désigne comme conclure le résultat définitif d’une délibération en forme ou pour le moins d’un examen conduit avec la gravité qui préside à une discussion entre collègues ; statuere marque comme résoudre le terme d’une situation incertaine, et on emploie dans le même cas constituere, quand le sujet ou le régime de l’action est au pluriel. Cic. Fr. Tull.[1] Hoc judicium sic exspectatur, ut non unæ rei statui, sed omnibus constitui putetur. Ce qu’on attend de ce jugement, ce n’est pas tant une décision sur un intérêt particulier qu’un règlement sur un intérêt général.

  • 1 Tome XXXVI, p. 269, §9 dans le Cicéron de la collection Panckoucke.

Destruere. Demoliri.

Destruere, abattre une œuvre d’art ; demoliri, une construction solide.

Deterior. Pejor.

Deterior se dit, comme χείρων, de celui qui est inférieur aux autres, qui est moins estimable ; pejor, comme ϰαϰίων et pire, de celui qui est plus corrompu, plus dangereux. On trouve dans Sall. Or. Phil. 3. Æmilius omnium flagitiorum postremus, qui pejor an ignavior sit deliberari non potest. Æmilius, le dernier de tous les misérables. Est-il plus méchant que lâche ou plus lâche que méchant ? c’est ce qu’il est impossible de décider. Et dans ce passage deterior ne formerait pas un contraste avec ignavior. Catulle emploie, en badinant, le superlatif pessimi, qui contient l’idée d’une certaine énergie ; deterrimus, pitoyable ou chétif, ne se dit jamais par plaisanterie.

Deversorium. Hospitium. Caupona. Taberna. Popina. Ganeum.

Deversorium, tout quartier où l’on descend tant que dure un voyage, dans une propriété à soi, chez des amis, chez des hôteliers ; hospitium, l’asile qu’on trouve chez un ami avec lequel on est en relation d’hospitalité ; caupona, l’auberge ; tous ces lieux fournissent le logement comme des hôtelleries. Les tabernæ, popinæ, ganea ne fournissent que la pension, comme les restaurants : les tabernæ, pour les gens du commun, comme les cabarets ; les popinæ, pour les gens du grand monde et les gastronomes, comme certaines maisons de traiteurs ; les ganea, pour ces deux sortes de gens et en outre pour les voluptueux.

Dicere. Aio. Inquam. Asseverare. Affirmare. Contendere. Fari. Fabulari.

1. Dicere, parler pour instruire ; il se rapporte à celui qui écoute, par opposition à tacere, comme le neutre loqui et λέγειν ; aio, parler pour affirmer ; il se rapporte à celui qui parle, par opposition à nego, comme φημί.

2. Ait se joint au discours indirect et régit un infinitif ; inquit, au discours direct ; il amène un indicatif, un impératif ou un subjonctif.

3. Aio marque la simple affirmation d’une proposition qu’on se borne à énoncer ; asseverare, affirmare, contendere, marquent une affirmation énergique ; asseverare, c’est affirmer sérieusement, par opposition à une affirmation plaisante ou légère, à jocari ; affirmare, affirmer en garantissant la certitude, par opposition au doute et aux rumeurs, à dubitare ; contendere, affirmer en dépit des contradicteurs et soutenir son opinion envers et contre tous, par opposition à céder et à renoncer.

4. Dicere, dire, sans idée accessoire ; loqui, pris comme verbe actif, contient une idée accessoire de mépris : ce qu’on dit n’est que vains propos. Cic. Att. XIV, 4. Horribile est quæ loquantur, quæ minitentur. Leurs propos, leurs menaces font horreur.

5. Loqui, pris comme verbe intransitif, parler en général ; fabulari, parler sans façon ou du moins sans gêne, pour passer le temps, sans donner une grande attention au fond ou à la gravité du discours, causer, λαλεῖν ; enfin, dicere, pris comme verbe neutre, parler avec art, en s’étudiant, particulièrement à la tribune, λέγειν. Liv. XLV, 39. Tu, centurio, miles, quid de imperatore Paulo senatus decreverit potius quam quid Sergio Galba fabuletur, audi, et hoc dicere me potius quam illum audi ; ille nihil præterquam loqui, et id ipsum maledice et maligne didicit. Centurions et soldats, prêtez l’oreille au décret du sénat sur la victoire de votre général plutôt qu’aux déclamations mensongères de Galba. Prêtez l’oreille à mon langage plutôt qu’au sien. C’est un homme qui n’a rien étudié, hors l’art de parler, et encore pour insulter et pour nuire. Cic. Brut. 58. Scipio sane mihi bene et loqui videtur et dicere. Il me semble que Scipion brille également dans le langage ordinaire et dans le langage étudié. Orat. III, 10. Neque enim conamur docere eum dicere qui loqui nesciat. Nous n’entreprenons point d’enseigner l’art de la parole à celui qui ne sait pas ce que c’est que parler. Suet. Claud. 4. Qui tam ἀσαῶς loquatur, quî possit quum declamat σαφῶς dicere quæ dicenda sunt, non video. Comment, avec une parole aussi confuse, on pourrait, parlant en public, dire clairement ce qu’il faut dire, c’est ce que je ne vois pas.

6. Fari présente la parole comme le simple usage mécanique des organes de la voix pour former des sons et des mots articulés, par opposition à infantem esse ; loqui, comme le moyen d’exprimer ses pensées, par opposition à tacere. Et comme fari peut se réduire à prononcer des paroles isolées, on y rattache aisément l’idée d’un laconisme extraordinaire, imposant, digne d’un oracle, comme dans les arrêts du destin, fati, tandis que loqui fait songer aux discours ordinaires des hommes qui dégénèrent souvent en loquacité, loquacitas.

Dies. Tempus. Tempestas. Die. Interdiu.

1. Dies, le temps envisagé dans sa nature purement abstraite, comme simple extension et simple progression ; tempus et tempestas, le temps de la météorologie et de l’astronomie, la température, les rapports de la durée. Tempus marque plutôt un simple point, un moment, une époque ; tempestas, tout un espace, une période. Dies docebit a trait à un long espace de temps qui doit s’écouler avant que nous soyons instruits, comme χρόνος ; tempus docebit, au moment favorable qui nous instruira, comme ϰαιρός.

2. Die, par jour, chaque jour, par opposition à l’heure et à l’année ; interdiu et diu, de jour, par opposition à noctu ; mais interdiu se prend dans toute sorte de circonstances ; diu est toujours joint à noctuque. Cic. Att. XIII, 28. Credibile non est quantum scribam die. Vous auriez peine à croire combien j’écris chaque jour. Cels. Med. I, 3. Qui semel et qui bis die cibum... assumit. Celui qui mange une fois et celui qui mange deux fois par jour. Tac. H. II., 5. Noctu diuque. Nuit et jour.

Differre. Proferre. Procrastinare. Prorogare.

1. Differre marque le renvoi à un autre temps considéré par son côté négatif : loin de faire la chose présentement, on la laisse là ; proferre et procrastinare marquent le délai pris par le côté positif : la chose aura lieu dans un temps à venir ; une autre fois, sans dire quand, si l’on se sert de proferre ; dans un avenir très-rapproché, si l’on se sert de procrastinare.

2. Differre, etc., se disent d’une action qu’on tarde å commencer ; prorogare, d’un état auquel on tarde à mettre fin, comme prolonger.

Diligere. Amare. Deamare. Adamare. Caritas. Amor. pietas.

1. Diligere, c’est l’amour qui naît de l’estime, le résultat de nos réflexions sur le mérite de l’objet aimé, comme φιλεῖν ; amare, c’est l’amour par inclination, celui qui a son origine dans le sentiment, qui est involontaire ou même irrésistible, comme ἐρᾷν, ἔρασθαι. Diligere désigne l’amour pur, dégagé du joug des sens et de l’égoïsme, calme et paisible : amare, l’amour ardent qui confine à la passion, qu’il soit d’ailleurs sensuel ou platonique. Cic. Att. XIV, 17. Tantum accessit ut mihi nunc denique amare videar, ante dilexisse. Il me semble, tant mon amour a grandi, qu’il ne mérite ce nom que d’aujourd’hui et que je n’avais auparavant que de l’affection.

2. Amare, aimer en général ; deamare, verbe augmentatif, aimer à en mourir, comme amore deperire ; et adamare, verbe inchoatif, commencer à aimer.

3. Caritas, entendu de l’effet qu’on produit, c’est l’affection que les autres ont pour nous. C’est une sorte de substantif à sens neutre par rapport au substantif à sens actif, amor, le penchant que nous éprouvons pour un autre ; d’où viennent ces constructions : caritas apud aliquem ; mais amor erga aliquem.

4. Caritas, entendu de l’effet qu’on ressent, tout amour qui tourne à la tendresse, particulièrement celui des parents pour les enfants, sans aucun mélange de sensualité, il ne se dit que des personnes, comme ἀγάπη ou στοργή ; amor, l’amour ardent et passionné pour des personnes ou des choses, comme ἔρως ; enfin, pietas, c’est l’amour instinctif pour des personnes et des choses que les liens sacrés de la nature nous obligent à aimer, dieux, parents, patrie, bienfaiteurs. La caritas se complaît dans l’objet aimé, se réjouit de le posséder et se manifeste par des prévenances et des sacrifices ; l’amor vise à réduire toujours davantage le même objet en son pouvoir ; il est difficile à satisfaire ; la pietas se laisse aller à un penchant naturel et à un sentiment religieux.

Disceptatio. Litigatio. Controversia. Contentio. Altercatio. Jurgium. Rixa.

1. Disceptatio, litigatio et controversia, différends susceptibles d’être terminés à l’amiable et par des voies régulières ; contentio, altercatio et jurgium, différends entachés de passion et de violence, mais qui se passent néanmoins en paroles ; rixæ, différends qui se traduisent ou menacent de se traduire en voies de fait, comme les querelles et les batteries, et qui tiennent le milieu entre jurgium et pugna. Liv. XXXV, 17. Ex disceptatione altercationem fecerunt. La dispute dégénéra en altercation. Tac. H. I, 64. Jurgia primum, mox rixæ inter Batavos et legionarios. Il y eut d’abord de gros mots, puis des rixes entre les Bataves et les légionnaires. Dial. 26. Cassius Severus non pugnat, sed rixatur. Cassius Sévérus cherche des rixes, sinon des batailles.

2. Il y a lutte, controversia, entre deux partis dès qu’ils sont opposés l’un à l’autre ; débat, disceptatio, dès qu’ils s’engagent dans une dispute sous prétexte de rechercher la vérité ou de démêler le droit sans avoir dans le principe des intentions hostiles ; contestation, litigatio, dès qu’ils s’inspirent d’un esprit d’hostilité et d’intérêt personnel.

3. La contentio veut absolument avoir raison et atteindre son but en mettant toutes ses forces en jeu dans quelque intention que ce soit ; l’altercatio ou échange de paroles ne veut pas demeurer en reste de propos avec son adversaire, elle veut avoir le dernier mot ; le jurgium n’écoute rien et décharge sa mauvaise humeur par des paroles dures. La contentio offre une image sérieuse, celle d’un effort vigoureux ; l’altercatio, l’image comique de personnes qui s’échauffent à la manière des femmes ; le jurgium, l’image repoussante de la colère brutale.

Discernere. Distinguere.

Discernere, discerner, diviser conformément à des notions acquises ; distinguere, distinguer par des signes et des marques.

Disertus. Facundus. Eloquens.

Disertus et facundus désignent un talent oratoire donné par la nature ; eloquens un art de la parole acquis et perfectionné. Celui qui parle avec clarté et précision s’appelle disertus, celui qui parle avec élégance et agrément, facundus, celui qui réunit les deux, savoir la netteté et la beauté du discours, eloquens. Le disertus fera un bon maître, mais il se peut qu’il n’ait pas également cultivé toutes les facultés de son esprit ; le facundus brille en société, mais tout son savoir-faire peut n’être qu’une facilité superficielle dans le maniement de la parole, sans profondeur et sans solidité ; l’eloquens, avant de prendre la parole comme homme d’état ou comme écrivain, doit s’être rendu parfaitement maître de la langue et de l’art à force de talent et d’études variées. Cic. Orat. 5, 19. Antonius... disertos ait se vidisse multos, eloquentem omnino neminem. J’ai souvent rencontré une parole nette, dit Antoine ; je n’ai jamais entendu une voix parfaitement éloquente. Quintil, VIII, pr. 13. Diserto satis dicere quæ oporteat ; ornate autem dicere proprium est eloquentissimi. On est disert quand on sait dire ce qu’il faut ; mais de parer la parole, c’est le fait de la plus haute éloquence. Suet. Cal. 53. Eloquentiæ quam plurimum adtendit, quamvis facundus et promptus. Il s’applique fort à l’éloquence, quoiqu’il ait naturellement la parole agréable et facile.

Disserere. Disputare.

Disserere, soutenir son opinion en style didactique, en développant ses raisons ; disputare en style polémique en tenant compte des raisons contraires, en opposant à un adversaire imaginaire ou réel raison pour raison, afin de constater par une sorte de bilan de quel côté est la plus grosse somme de vérité. Le disserens vise simplement à exprimer ses vues personnelles ; le disputans veut faire prévaloir les siennes en qualité de vérités indépendantes de toute personnalité. En outre disserere marque une manière plus libre ; disputare, une manière plus méthodique de traiter le sujet.

Dividere. Partiri. Dirimere. Dispertire. Distribuere.

1. Dividere et dirimere, diviser sans autre but que de détruire l’unité de l’ensemble et de réduire en parties ; partiri, dans le but d’obtenir par voie de séparation des parties dont il soit possible de disposer. De là divide et impera et dividere sententias, mais partiri prædam.

2. Divisio marque dans les traités de rhétorique la décomposition de l’espèce en variétés ; partitio, celle du tout en ses parties.

3. Dividere ne se rapporte qu’à une réunion matérielle dans l’espace et ne détruit qu’une relation extérieure ; mais dirimere se rapporte à l’union organique d’un tout et supprime des rapports intimes. Liv. XXII, 15. Casilinum urbs... Volturno flumine diremta Falernum ac Campanum agrum dividit. C’est qu’aux yeux de l’auteur une rivière qui coupe une ville en deux constitue une séparation contre nature, tandis que la séparation de deux territoires contigus par une ville est toute naturelle.

4. Dividere signifie encore distribuer sans idée accessoire ; dispertire, c’est répartir entre futurs propriétaires ; distribuere, entre propriétaires légitimes, ou encore mettre chaque partie à une place convenable et appropriée.

Divinare. Præsagire. Præsentire. Prævidere. Vaticinari. Prædicere.

1. Divinare se dit d’un pressentiment qui provient d’une inspiration divine et d’un secours surnaturel, comme μαντεύεσθαι ; præsagire, d’un pressentiment par voie naturelle, par suite d’un tour d’esprit particulier qui confine au surnaturel ; præsentire et prævidere, par un développement extraordinaire des dons naturels de l’esprit, à savoir præsentire par une vision immédiate, prævidere, par de profondes et heureuses combinaisons, par prévoyance.

2. Divinare, etc., simples actes de l’entendement ; vaticinatio et prædictio, expression et communication de ce qu’on pressent : vaticinatio, par le fait du divinans et du præsagiens, c’est la prophétie, προφητεία ; prædictio, par le fait du præsentiens et du prævidens, c’est la prédiction.

Divitiæ. Opes. Gazæ. Locuples. Opulentus. Copiosus.

1. Divitiæ et gazæ, la richesse en général, comme propriété, comme moyen de satisfaire ses désirs de toute sorte ; opes, comme le moyen de réaliser un but élevé, de se faire valoir, d’acquérir ou de conserver de l’influence. Divitiæ, la richesse du simple particulier, πλοῦτος ; opes, la fortune mise au service de l’homme d’État ou de l’ambitieux politique ; gazæ, le trésor d’un roi ou d’un prince, θησαυροί.

2. Dives, riche par opposition à pauper, πλούσιος ; locuples, qui est dans l’aisance, par opposition à egens, egenus, ἀφνειός ; opulentus et copiosus, quia de grandes ressources par opposition à inops, comme εὔπορος.

Doctor. Præceptor. Magister.

Doctor, le maître qui expose la théorie considéré par rapport à la science ou à l’art qu’il enseigne, il s’oppose à l’auditeur ; præceptor, le maître qui initie à la pratique par rapport au pupille qu’il façonne, il s’oppose à l’écolier ; magister, le maître en général par rapport à sa supériorité et à son ascendant et par opposition aux profanes. Cic. Orat. III, 15. Vetus illa doctrina eadem videtur et recte faciendi et bene dicendi magistra, neque disjuncti doctores, sed iidem erant vivendi præceptores atque dicendi. On voit cette ancienne méthode gouverner à la fois la conduite et la parole ; point de maîtres distincts ; ceux qui forment à la parole forment en même temps à la vie.

Doctrina. Eruditio.

Doctrina, le savoir considéré comme un des moyens divers par lesquels l’esprit se développe ; eruditio, la science qui transforme l’esprit et l’amène à la dernière perfection. Le savoir, doctrina, ne donne qu’une supériorité de connaissances, il se rattache et s’oppose à l’idée qu’exprime le mot exercitatio, lequel implique une supériorité de savoir-faire ; réduit même à la théorie sèche et mis en regard de la pratique plus visiblement utile, il est exposé à être mal vu et ridiculisé. La science parfaite, eruditio, se rapproche beaucoup plus de la pratique, elle implique une certaine influence, des connaissances acquises et des études sur le perfectionnement de l’homme entier, elle représente la vraie humanité dans l’ordre intellectuel, comme humanitas dans l’ordre moral.

Dolor. Tristitia. Mœstitia. Luctus.

1. Dolor, le sentiment des douleurs, le déplaisir intérieur, par opposition à gaudium ; tristitia, mœror, luctus, l’expression de ce sentiment. Tristitia et mæstitia, manifestation naturelle qui perce involontairement dans l’attitude et dans la physionomie ; luctus, manifestation artificielle, faite à dessein, au grand jour, à l’aide de signes conventionnels, comme de se couper les cheveux, de mettre des habits de deuil, etc., πένθος. Mœror sert en même temps d’augmentatif à dolor, et luctus à mœror et tristitia, en ce sens que la manifestation extérieure vient se joindre au sentiment au lieu de lui être opposée. Cic. Att. XII, 28. Mœrorem, minui, dolorem, nec potui, nec si possem vellem. J’ai retranché quelque chose des marques de ma douleur ; mais pour ma douleur même je n’ai rien pris sur elle, et je le pourrais que je ne le voudrais pas. Phil. XI, 1. Magno in dolore sum, vel in mœrore potius, quem ex miserabili morte C. Trebonii accepimus. Je suis dans la grande douleur, ou plutôt dans les effusions de douleur où nous jette la mort déplorable de C. Trébonius. Plin. Ep. V, 9. Illud non triste solum, verum etiam luctuosum quod J. Avitus decessit. La perte de J. Avitus ne cause pas seulement un chagrin visible, c’est un deuil. Tac. Agr. 43. Finis vitæ ejus nobis luctuosus, amicis tristis. Sa fin nous plonge dans le deuil, et ses amis dans la tristesse (la parenté seule prend le deuil). Tac. Ann. II, 82. Quanquam nec insignibus lugentium abstinebant, altius animis mœrebant. Les marques de deuil ne faisaient pas défaut, mais c’étaient surtout les cœurs qui étaient contristés. Cic. Sext. 29, 39. Luctum nos hausimus majorem, dolorem ille animi non minorem. Ce fut pour nous la source d’une douleur plus expansive, pour lui celle d’une douleur concentrée tout aussi vive.

2. Tristitia présente la manifestation du chagrin par son côté repoussant, celui des idées noires, de l’ennui, de la mauvaise humeur, par opposition à hilaritas ; mœstitia, par son côté pitoyable, celui de la désolation, d’une douleur ordinairement justifiée qui nous plonge dans la mélancolie, par opposition à lætus. Tristitia est le fait de la réflexion, mæstitia, du sentiment. On reconnaît le tristis comme le truculentus à son regard farouche, à son front plissé, à ses sourcils contractés ; le mœstus comme l’afflictus à ses yeux mornes et à son regard baissé. Tac. Hist. I, 82. Rarus per vias populus, mœsta plebs ; dejecti in terram militum vultus ac plus tristitiæ quam pœnitentiæ. Très-peu de monde dans les rues, la population consternée ; des soldats qui baissaient les yeux, mais d’un air sombre plutôt que d’un air de regret. Cic. Mur. 24, 49. Tristem ipsum, mœstos amicos. Vous-même soucieux, vos amis désolés.

Donum. Munus. Largitio. Donarium. Donativum. Liberalitas.

1. Donum, cadeau désintéressé, le donateur n’ayant pas d’autre vue que de faire plaisir, δῶρον ; munus, présent qui engage la reconnaissance, qui est une marque d’amour ou de faveur de la part du donateur, γέρας ; enfin largitio, présent intéressé destiné à gagner et à corrompre les gens sous couleur de bienfaisance, la plupart du temps dans un but politique. Suet. Cæs. 28. Aliis captivorum millia dono afferens, c’est-à-dire en pur don et non point seulement par manière de prêt. Comparez avec Ner. 46. Auspicanti Sporus annulum muneri obtulit, c’est-à-dire par honnêteté. Tac. Hist. I, 52. Id comitatem bonitatemque faventes vocabant quod sine modo donaret sua, largiretur aliena. Les partisans de Vitellius vantaient son caractère facile et bienveillant lorsqu’ils lui voyaient dissiper ses propres biens en cadeaux, ceux des autres en largesses.

2. Donarium, terme particulier pour une offrande qu’on fait à un temple ; donativum, pour un don militaire que le nouvel empereur accordait aux soldats à son avénement ; liberalitas, pour une munificence de l’empereur destinée à soutenir un noble tombé dans la pauvreté.

Dorsum. Tergum.

Dorsum, le dos au sens horizontal, celui de l’animal, par opposition au ventre, νῶτον ; tergum, le dos au sens vertical, celui de l’homme par opposition à la poitrine, μετάφρενον. Dorsum montis, la crête ; tergum, le revers d’une montagne.

Dubius. Ambiguus. Anceps.

Dubius et ambiguus, douteux quand il ne s’agit que d’un bon ou d’un mauvais succès, d’un bonheur ou d’un malheur ; anceps, quand il y va de l’existence entière, d’être ou de ne pas être. Vell. P. II, 79. Ea patrando bello mora fuit, quod postea dubia et interdum ancipiti fortuna gestum est. Tels sont les retards que souffrit l’ouverture de cette guerre où la fortune intervint dans la suite avec des chances douteuses et quelquefois critiques.

Dumi. Sentes. Vepres.

Dumi, fourrés de broussailles qui offrent un aspect sauvage ; sentes, buissons épineux où l’on se blesse ; vepres réunit les deux idées : broussailles épineuses qui font du sol un lieu sauvage.

Duplex. Duplum. Geminus. Dupliciter. Bifariam.

1. Duplex, double en parlant de quantités déterminées qu’il suffit de compter ; duplum, en parlant de quantités indéterminées qu’il faut peser ou mesurer. Duplex s’emploie adjectivement, duplum substantivement. Quintil. VIII, 6, 42. In quo et numerus est duplex, nec duplum virium. Armée deux fois plus nombreuse, mais sans offrir le double de forces.

2. Étant donnés des objets semblables et pareils au nombre de deux, c’est l’idée du nombre deux qui domine dans duplex comme dans διπλοῦς ; c’est l’idée de ressemblance et de parité qui domine dans geminus comme dans δίδυμος. Dans ce passage de Cic. Part. 6. Verba geminata et duplicata, vel etiam sæpius iterata, geminata se rapporte à la répétition d’une idée par le moyen de termes synonymes, duplicata à la répétition d’un même mot.

3. Dupliciter est toujours adverbe de manière : de deux manières, à un double point de vue ; bifariam est adverbe de lieu : en deux endroits ou en deux parties. Cic. Fam. IX, 20. Dupliciter delectatus sum litteris tuis. Ta lettre me charme de deux manières. Comparez avec Tusc. III, 11. Bifariam quatuor perturbationes æqualiter distributæ sunt. Les quatre passions fondamentales ont été également réparties en deux catégories.

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