Considerations politiques sur les coups d'estat
A MONSEIGNEUR,
L’EMINENTISSIME
CARDINAL
DE BAGNI,
mon tres-bon & tres-honoré
Maistre.
(Pers. Sat. 5.)
[1] Je n’ay point essayé d’enfler mes ouvrages de sornettes boufies qui ne font que de la fumée. Je vous parle confidemment, & la muse me sollicite de vous découvrir le fond de mon ame.
Monseigneur,
Puis que vous estes maintenant à Rome, joüissant des honneurs qui servent de recompense à vos merites, & vivant dans le repos que les fonctions publiques heureusement exercées en sept Gouvernemens, une Vice-legation, & deux Nonciatures vous y ont acquis : je n’ay pas cru pouvoir mieux employer le loisir duquel vostre bien-veillance & vostre bonté extraordinaire m’y font pareillement joüir, qu’en vous entretenant des plus relevées Maximes de la Politique, & de ces grandes affaires d’Estat, en la conduite desquelles V. E. a tellement fait remarquer sa prudence, que les plus grands Genies qui gouvernent presentement toute l’Europe, en sont demeurez remplis d’étonnement, & n’ont jamais mieux reüssi aux deliberations & entreprises les plus difficiles, que lors qu’ils les ont maniées suivant les bons & genereux avis qu’il vous a pleu de leur en donner, Adeò
(Horat. l. 1. carm. Ode 7.)
[2] Aussi ne faut-il point desesperer, puisque Teucer marche à la teste, il ne faut rien craindre aussi sous le bonheur de sa conduite.