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Du Niger au golfe de Guinée par le pays de Kong et le Mossi, tome 1 (de 2)

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Réception chez le naba de Waghadougou.

Les jours de marché, la recette est bonne : on apporte de tout, aussi bien du mil que des pelles ou des arachides, et tout est accepté, on s’en rapporte à la générosité du client, car ce sont des clients, comme les passagers des paquebots, des messageries maritimes, sont les clients naturels de cet autre monarque noir, d’heureuse mémoire, le roi de Dakar !

Le vendredi, les naba des villages qui constituent Waghadougou viennent tous saluer Naba Sanom, et tous les lundis il monte à cheval et fait une promenade aux environs, accompagné de ses fidèles jeunes gens et des tam-tams.

On comprend facilement qu’avec des journées aussi bien remplies il est difficile à ce monarque de s’occuper utilement des affaires intérieures et extérieures de son pays, aussi le Mossi est-il dans une période de décadence qui ne fera que s’accroître avec le temps.

Les Mossi sont loin d’être capables actuellement de mener des expéditions comme celles qu’ils firent au commencement du XIVe siècle contre Tombouctou, comme le relate Ahmed Baba (Tarich es-Soudan). J’aurai du reste, plus tard, l’occasion de parler plus longuement de la situation politique du Mossi.

J’eus d’abord des relations fort amicales avec Naba Sanom, surtout les cinq ou six jours qui suivirent la distribution des cadeaux que je lui fis. Il m’offrit à plusieurs reprises des kolas et du dolo ; il me fit venir plusieurs fois pour voir mon fusil de chasse et une de mes armes de guerre. Ces relations semblaient devoir se continuer, lorsque, à la suite d’un entretien où je lui communiquai mon désir de continuer ma route vers le nord, il changea brusquement de procédés à mon égard et refusa même de me recevoir.

Interrogé par lui sur ce que je comptais faire dans le Yatenga, je lui fis expliquer que, ce pays étant un lieu important de production et d’élevage de chevaux, il serait intéressant pour nous de connaître les méthodes d’élevage afin de les mettre au besoin en pratique dans nos possessions de l’autre côté du Niger. Cette proposition ne semblait d’abord soulever aucune difficulté, lorsqu’il me fit dire, quelques jours après, que le Yatenga[117] lui appartenait, que c’était le même pays qu’ici et qu’il ne pouvait m’autoriser à y aller. Il refusa de même de me donner la permission de me diriger vers l’est. Mieux que cela, un soir, sans raison, il m’envoya un bœuf et une petite captive de six à sept ans avec l’ordre de me disposer à quitter le lendemain Waghadougou.

Ici je dois entrer dans quelques détails rétrospectifs qui se rattachent à cet incident. Dès mon arrivée ici, je m’informai d’une bonne monture à acheter et de deux ânes destinés à remplacer les quatre ânes perdus à Ladio.

Dès que Naba Sanom apprit que j’avais besoin d’animaux, il m’envoya un nommé Idriza (Edrizi) pour me dire que je n’avais nullement à m’inquiéter de ces détails, qu’il était désireux de faire l’acquisition d’une coupe de soierie semblable à celle que je lui avais donnée, ce qui me permettrait de me procurer les cauries nécessaires à l’achat de mes animaux.

Je proposai à Idriza d’offrir cette soierie à Naba Sanom. Idriza protesta au nom de son maître, disant que le naba refusait d’accepter un autre cadeau. La pièce de soie fut évaluée à 300000 cauries, prix qui fut accepté. Le naba me remercia et me fit dire qu’il allait s’occuper de me procurer les animaux, et qu’ensuite nous compterions ; il serait facile de régler la différence de prix en cauries ou en marchandises.

Lorsque Naba Sanom m’envoya l’ordre de partir, il était donc mon débiteur d’une somme relativement forte. Le voyant agir d’une façon aussi peu délicate, je lui fis demander de vouloir bien me régler avant de partir ou de me rendre mes marchandises, afin de me permettre de me pourvoir ailleurs d’animaux. Le naba m’envoya alors l’imam pour protester de son amitié pour moi. « Jamais, dit-il, je n’ai envoyé l’ordre de partir à ce blanc, je ne puis tolérer qu’il aille vers le nord et vers le Haoussa, mais je lui donnerai, quand il m’en fera la demande seulement, un chemin à son choix sur Salaga. Je vais dès maintenant me mettre en mesure de le pourvoir des animaux que je lui dois. »

Hélas ! j’attendis vingt longs jours les deux ânes qu’on avait, disait-on, envoyé querir au loin, Naba désirant me donner deux bêtes splendides. Et quels ânes je reçus ! Deux misérables bêtes dont n’importe quel marchand se serait gardé de faire l’acquisition.

Je ne lui gardai pas rancune, nous étions même les meilleurs amis, je comptais sous peu que Naba Sanom signerait un traité avec moi, comme il me l’avait promis dans une entrevue au cours de laquelle je l’avais amené à demander notre protectorat, lorsque brusquement il m’envoya de nouveau l’ordre d’avoir à quitter Waghadougou. A partir de ce moment il me fut impossible de communiquer avec lui. Il refusait de me recevoir et me fuyait : j’étais devenu suspect. Il fallait me résigner à partir.

On pourrait supposer que c’est parce que je suis Européen que Naba Sanom a agi de cette façon. Pas le moins du monde. Je n’ai tout simplement pas fait exception à ce principe du naba, que tout individu venant à Waghadougou avec des marchandises quelconques doit, outre des cadeaux, lui en laisser une partie.

Vient-il par hasard des marchands de chevaux du Yatenga, ou des marchands d’étoffe du Haoussa, vite il les appelle, achète ce qui lui convient sans regarder au prix (20 ou 30 captifs, cela lui est égal), puisqu’il ne règle jamais. Quelques-uns, en patientant six mois à un an, ont réussi à en tirer la dixième partie de ce qu’ils lui ont vendu ; ceux-là peuvent s’estimer très heureux. A ce propos je citerai l’aventure qui arriva à Karamokho Mouktar, chef de Ouahabou. Ce musulman envoya, il y a trois ans, à Naba Sanom 100 captifs pour recevoir en échange 30 beaux chevaux. Naba Sanom accepta les captifs, reçut fort bien les envoyés, les hébergea pendant quelques jours, puis les laissa de côté. Non seulement ces gens-là n’ont pas encore reçu un seul cheval, mais le naba les empêche de regagner le Dafina. Ces Dafing en ont pris leur parti ; ils font des lougans ici. « Peut-être, se disent-ils, quand ce chef sera mort, pourrons-nous nous en retourner ! »

Cette façon de procéder du naba est une des causes qui placent Waghadougou au second plan, et qui font de Mani la capitale commerciale du Mossi.

Parmi les raisons pour lesquelles on a refusé de me laisser continuer ma route, on m’a donné celle-ci : les uns me faisaient entendre que c’était parce que Boukary Naba se disait mon ami et m’avait donné un cheval. D’autres prétendaient que je me présentais devant le naba la tête couverte et sans me prosterner devant lui. Il y a certainement des personnes qui pourront m’accuser de fierté mal placée en cette occurrence. Peu importe ; j’estime qu’un blanc, quel qu’il soit, voyageant dans ces pays, ne doit pas se prosterner devant un roi noir, si puissant qu’il soit ; il faut que partout où un blanc passe il inspire le respect et la considération, car si jamais plus tard l’Européen doit venir ici, il devra y venir en maître, constituer la classe élevée de la société, et n’avoir pas à courber la tête devant les chefs indigènes, leur étant infiniment supérieur sous tous les rapports. Du reste un Européen vaut certes un musulman indigène, et ces derniers ne se prosternent pas devant le naba.

Pour moi, la vraie raison qui m’a empêché de continuer ma route est l’annonce de l’arrivée prochaine à Waghadougou d’une autre mission européenne[118]. Ma présence ici faisait croire que j’étais l’avant-garde d’une forte expédition militaire, c’est ce qui a éveillé la méfiance de ce roi ignorant[119].

Le 10 juillet au soir, je quittais Waghadougou en compagnie de deux jeunes gens qui devaient me servir d’escorte. Comme on me fit prendre un chemin parallèle à celui que j’avais suivi pour venir, je m’informai auprès d’Idriza si Naba Sanom avait changé d’idée et ne désirait plus que je me rende à Salaga, comme il me l’avait toujours promis.

« Pas du tout, me répondit-il. En sortant de Waghadougou, ce chemin change de direction. Il va bien à Salaga. » Interrogé sur l’itinéraire que j’avais à suivre et les noms des villages à traverser, cette canaille eut l’audace de me citer une série de villages qui n’existent pas. Une demi-heure après, il n’y avait plus de doute pour moi : je faisais route sur la résidence de Boukary Naba.

Ma boussole et mon arrivée à Nakhla me le confirmèrent bientôt. Je n’avais qu’un parti à prendre, me soumettre à la décision de Naba Sanom et continuer ma route, bien heureux de ne pas me voir retenu indéfiniment à Waghadougou.

Le retard dans la végétation, que j’ai signalé, n’existe que pour Waghadougou, car dès qu’on est seulement éloigné d’une dizaine de kilomètres, l’aspect des cultures change complètement : au lieu de trouver le mil et le maïs à peine sorti de terre, il atteint déjà deux mètres de hauteur aux abords des villages. A Saponé le marché était plus amplement fourni de denrées qu’à Waghadougou ; je trouvai à y acheter une bonne provision de gombo[120] frais qui apportèrent pendant quelques jours un appoint nouveau à ma modeste table.

C’est bien tristement que je chemine sur la même route que j’ai parcourue si plein d’espoir il y a un mois. Alors j’espérais qu’avec la protection du chef du Mossi je pourrais gagner le Niger ou au moins raccorder mes travaux à ceux de Barth, mais à présent je me demande ce que je vais devenir si, pour comble de malheur, Boukary Naba, pour plaire à son frère, me retire son amitié et me force à continuer ma route par le Gourounsi sur Ouahabou.

C’est dans cette disposition d’esprit que j’arrivais le samedi 13 juillet devant l’habitation de Boukary Naba. Il pouvait être environ huit heures du matin. Les captifs et le personnel, dès notre arrivée, évitèrent de parler à mes hommes ; quelques-uns se détournèrent de leur chemin pour ne pas avoir à nous saluer. Tout cela me paraissait de mauvais augure, d’autant plus qu’il y avait au moins une demi-heure que j’étais arrivé et que Boukary ne m’avait pas encore fait appeler. J’étais dans une pénible situation d’esprit et bien découragé, lorsque, à ma grande surprise, je reçus deux plats d’excellente viande chaude et une grande calebasse de lait aigre. De plus, Boukary me faisait dire de reprendre mon ancien campement, de m’y installer et d’aller le voir après m’être réconforté.

Dès que Boukary me vit m’avancer vers sa case, il vint au-devant de moi, me tendit les deux mains et, avec son gros rire, me dit : « Eh bien, lieutenant, comment trouves-tu Waghadougou et mon frère ? » Il me fallut lui raconter tout ce qui m’était arrivé depuis que je l’avais quitté. Boukary ne me cacha pas son étonnement quand il apprit que son frère avait refusé de me laisser continuer ma route.

Il en fut même très peiné, et comme il ne pouvait pas m’assurer de route vers le nord, il me promit de me faire gagner le Gambakha. Puis il m’informa qu’il n’exécuterait pas l’ordre de son frère qui lui prescrivait de me faire diriger, sans m’arrêter, sur Ouahabou. Sur ses instances je dus accepter l’hospitalité pendant quelques jours.

Durant mon séjour à Banéma, Boukary Naba ne se départit pas une seule fois de sa ligne de conduite, très digne de la part d’un noir, d’autant plus qu’il est excessivement rare de rencontrer un nègre assez indépendant d’idées pour ne pas renier ceux qui déplaisent au souverain. Il me traita avec beaucoup de bienveillance, et me fit parvenir tous les jours des vivres et de la viande. Ayant appris que j’aimais le gombo, il eut même la délicatesse d’envoyer tous les jours un cavalier en prendre à Dakay.

Un de mes deux chevaux étant mort en arrivant à Banéma, et comme Boukary savait que je n’avais pu me procurer de monture à Waghadougou, il me fit cadeau d’un deuxième cheval assez fort, d’une valeur d’environ 240000 cauries (380 francs).

Il est très regrettable pour moi qu’à mon arrivée dans le Mossi je n’aie pas trouvé Boukary Naba au pouvoir, il m’aurait certainement facilité mon voyage vers le Niger ; et si jamais il arrive au trône, il aidera de tous les moyens dont il dispose le voyageur européen qui passera chez lui. Cet homme a les idées larges, il aime le progrès et serait tout disposé à écouter les conseils d’un blanc. Tout en étant d’une intelligence au-dessus de la moyenne chez les noirs, il se considère comme bien inférieur à l’Européen.

Pour un héritier du trône, puisque la succession dans le Mossi n’a lieu de père en fils que lorsque la ligne mâle collatérale est épuisée, Boukary n’a pas une position bien brillante. Naba Sanom, dans la crainte de le voir se créer quelque réputation par les armes et augmenter ainsi le nombre de ses partisans, ne l’a jamais nommé naba du moindre centre et ne lui a jamais confié une expédition. Bien mieux, quand le malheureux a résidé pendant quelques années sur une frontière, son frère le déplace pour l’envoyer ailleurs. Depuis dix-sept ans, Boukary mène une vie errante, n’ayant pour ainsi dire pas de chez-soi. Comme les sept autres nabiga ses frères, Boukary n’a pas de ressources et n’a même pas le bénéfice de recevoir, de temps à autre, les offrandes de quelques gros villages. Pour subsister et tenir un certain rang, il est forcé de vivre de pillage et même de brigandage.

Ses cavaliers, de temps à autre, font irruption dans la banlieue de quelque village du Gourounsi ou du Kipirsi et s’emparent par surprise des habitants occupés aux cultures ou à chercher du bois. Ses gens vont aussi isolément s’embusquer sur les chemins et font captif tout individu qui passe à leur portée. Cette façon de procéder a valu une mauvaise réputation à Boukary Naba. Cependant les gens qui réfléchissent lui pardonnent, connaissant la situation que lui fait son frère ; malgré cela, il a de nombreux partisans, et beaucoup le verraient avec plaisir arriver au pouvoir.

Les partisans de Boukary répètent à l’unisson que Naba Sanom, étant sans postérité, se soucie fort peu du gouvernement de son pays et de ce qui adviendra dans l’avenir, tandis que Boukary, avec ses nombreux enfants, offrirait plus de garanties.

Retour des cavaliers ramenant des captifs.

Pendant mon deuxième séjour à Banéma, Boukary, connaissant mon horreur pour le pillage et l’esclavage, et craignant de me déplaire, fit partir de nuit et sans me prévenir deux expéditions : l’une dans l’ouest sur Nabouli et l’autre vers le sud sur Baouér’a. Dès dix heures du matin, le lendemain, le retour des cavaliers fut annoncé par des coups de fusil. Bientôt après apparut une file d’esclaves des deux sexes attachés l’un derrière l’autre à l’aide d’une corde passée autour du cou. L’expédition de Nabouli ramenait dix-sept esclaves ; celle de Baouér’a, cinq seulement, et un âne chargé de sel et d’un peu de cotonnade. Dès l’arrivée de ces malheureux, on les fit boire, et, à l’aide de maillets, on leur retira les bagues et les anneaux de cuivre qu’ils portaient au bras et aux jambes ; ensuite eut lieu un classement en trois catégories :

1o Les hommes formèrent un lot destiné à être vendu de suite, de crainte qu’ils ne se sauvassent ; ils furent conduits, séance tenante, à Sakhaboutenga pour être échangés contre du sorgho pour les chevaux, du mil pour le personnel et de la poudre.

2o Un second lot, comprenant les femmes, fut mis en réserve pour acheter des chevaux.

3o Enfin un troisième lot, comprenant les enfants en bas âge, les jeunes filles et jeunes gens, fut réparti entre les guerriers et pris en charge par eux. Les gamins seront employés jusqu’à nouvel ordre comme palefreniers des guerriers ; ceux qui seront reconnus capables de rendre plus tard des services et réputés dociles seront conservés. Les autres seront revendus à la première occasion. Les petites filles sont données en mariage aux guerriers qui se sont distingués.

Dès le 18, je demandai à Boukary de me mettre en route, mais il me pria de différer mon départ de deux jours, désirant me faire faire connaissance avec son jeune frère, Salifou, qui devait arriver le surlendemain. Nabiga Salifou, comme Nabiga Masy, est un jeune homme très bien élevé. Dès son arrivée il me rendit visite, fit tuer un bœuf à mon intention et m’envoya quelques autres provisions. Ce jeune homme ne ressemble ni comme extérieur ni comme caractère à Naba Sanom ; la distinction de ces jeunes gens offre un contraste frappant avec les manières rustres de Naba Sanom, leur aîné.

Comme c’était convenu, Boukary Naba devait me diriger le lendemain par un chemin parallèle à la frontière du Gourounsi vers Béri, où je devais rallier le chemin Waghadougou-Gambakha. Salifou, en dissuada Boukary, l’informant qu’il avait appris en route que Naba Sanom avait donné l’ordre de me faire rebrousser chemin si j’essayais de gagner le Gambakha par cette voie. Boukary se vit donc forcé, à son grand regret, de me diriger sur Bouganiéna sans pouvoir satisfaire à mon désir de ne pas rentrer de nouveau dans le Gourounsi.

La veille de mon départ, il m’envoya trois jeunes femmes de vingt à vingt-cinq ans en exprimant le désir de me les voir épouser. Il s’excusa près de moi de ne pas être assez riche pour me faire un plus beau cadeau. Passer brusquement du célibat à un triple mariage me parut un peu excessif ; je fis part de mes scrupules à Boukary Naba, et lui en renvoyai deux, n’en gardant qu’une pour faire la cuisine à mes hommes.

Ce ne fut pas aisé de refuser la main de ces jeunesses, Boukary tenait absolument à cette union. On trouva cependant un terrain d’entente : il fut décidé que je ferais épouser les trois femmes par mes serviteurs les plus dévoués.

Ces malheureuses étaient complètement nues. On voyait cependant qu’elles avaient l’habitude d’être vêtues, car elles étaient toutes honteuses, et dès qu’elles eurent les mains libres, elles se couvrirent de feuilles. Une d’elles seulement était tatouée, toutes les trois avaient des incisions entre les seins, et les dents de devant limées. Elles appartenaient l’une à la tribu Gourounga-Kassanga et les deux autres à la tribu Gourounga-Youlsi.

Je leur distribuai à chacune trois coudées de guinée pour se faire un pagne et leur donnai un petit collier de perles.

Dans l’espoir de les voir s’évader la nuit, leur village n’étant éloigné que de 15 kilomètres de Banéma, je négligeai de les faire attacher et empêchai mes hommes d’exercer une surveillance sur elles.

Le lendemain, à ma grande stupéfaction, mes nouvelles pensionnaires, sans recevoir d’ordres, se mirent à chercher de l’eau et à préparer les aliments de mes hommes, absolument comme si elles avaient fait partie de mon personnel depuis un an.

Si ces pauvres femmes ont si promptement renoncé à leur liberté, c’est que dès leur arrivée elles ont été traitées avec bienveillance dans mon camp. Décemment vêtues et relativement bien nourries, elles n’en demandaient pas davantage. Elles ont très bien compris que nos hommes ne les traiteraient pas, comme cela a lieu par ici, comme des bêtes de somme, des brutes ou des animaux de production.

Je me mis en devoir de les marier et de les baptiser, car, ne les comprenant pas, il était difficile de savoir leur nom. A Fondou, le plus âgé de mes hommes, je donnai la femme kassanga, qui fut appelée Miriam ; à Birima, une Youlsi qui fut nommée Tenné (de altiné, « lundi »), et à Mamourou échut l’autre, qu’il demanda à appeler Arba (qui veut dire en arabe : quatre, et en mandé : jeudi).

Le mariage eut lieu séance tenante. Je fis successivement les fonctions de tuteur, de prêtre et d’officier de l’état civil. La publication des bans et autres formalités furent naturellement laissées de côté. Je les dotai de quelques étoffes, une couverture, quelques grains de corail et de bracelets. Plusieurs milliers de cauries, une calebasse de kola et de la volaille permirent au personnel de faire le repas de noce.

Mon convoi se composait, avec ces nouvelles recrues, de sept hommes, les trois femmes et Haïda, la petite fille que m’a donnée Naba Sanom. Cette pauvre petite était d’une maigreur effrayante quand on me l’a amenée à Waghadougou. Pendant le premier mois, elle n’a fait que manger et dormir. Nous ne savions pas son nom et il était impossible de l’interroger ; je l’ai baptisée Aïda, nom que mes noirs ont transformé en Haïda.

Les trois femmes que m’envoie Boukary.

Comme la clef de toutes les langues, ou, pour mieux m’exprimer, le premier mot qu’il faut savoir est : Comment cela s’appelle ? ou : Quel est son nom ? cet interrogatif est essentiel. Je me demandai comment je pourrais l’apprendre dans la langue de la petite Haïda. J’eus l’idée de lui faire voir ma montre. Sa première parole en la voyant fut : O kan. J’ai supposé que c’était : Qu’est-ce que c’est ? Et, après lui avoir dit : Montre, à mon tour je lui ai fait voir plusieurs objets en lui disant : O kan. A chaque interrogation elle me donnait le nom de l’objet. J’ai ainsi pu constituer un petit vocabulaire comprenant les choses usuelles de la vie et lui apprendre assez rapidement à parler le mandé.

Dimanche 22 juillet. — Je n’ai pas voulu quitter Boukary Naba ce matin sans lui donner ma jumelle, qu’il envie depuis si longtemps. Jamais je n’ai vu un homme aussi heureux que lui. Il y regarde par le gros bout et assure, avec un sérieux comique, à son auditoire qu’à l’aide de cet instrument il voit tout ce qui se passe à Waghadougou !!!

Les adieux furent touchants et je reçus ses vœux de bon retour vers le Nasaratenga (pays des blancs). J’ai été accompagné à cheval par Salifou jusqu’au ruisseau de Banéma ; là nous dûmes décharger les animaux : le cours d’eau s’était changé en une véritable rivière, actuellement il n’y avait pas moins de 1 m. 50 d’eau. D’après les renseignements que j’ai recueillis à Bouganiéna sur la direction de son cours, cette rivière serait l’origine d’un grand affluent de la Volta que l’on nomme Baliviri[121], et qui sert de limite entre le Gourounsi et le Gambakha vers Oual-Oualé.

La route entre Banéma et Bouganiéna est entièrement déserte ; il ne se fait actuellement aucun commerce entre cette partie du Gourounsi et le Mossi. Presque toutes les communications ayant lieu par Baouér’a et Dakay, nous ne rencontrâmes des habitants que dans les cultures aux abords de Bouganiéna. Plusieurs me reconnurent. Mon ancien hôte Sénousi Sâfo, chez lequel je descends, me fait un excellent accueil. De toutes parts, les habitants viennent me serrer la main et m’inviter à m’installer chez eux, espérant, disaient-ils, que je passerai ici le restant de l’hivernage.

Telle n’était pas mon intention, et dès mon arrivée je cherchai un chemin vers Salaga et ensuite un compagnon de voyage. Comme j’acquis la certitude que Krauss, en revenant de Bandiagara, avait fait retour vers Salaga par Sati, Oua-Loumbalé et Oua, et qu’à Waghadougou on n’avait pas pu m’affirmer si ce voyageur était venu de Salaga par Oual-Oualé ou par Gambakha, j’étais très embarrassé sur la direction à suivre, voulant à tout prix éviter de parcourir un itinéraire déjà connu. Comme il y avait doute pour Oual-Oualé, j’optai pour cette direction.

Boukary regarde ce qui se passe à Waghadougou.

On me présenta d’abord cette entreprise comme téméraire, le chemin étant réputé impraticable depuis que quelques chefs de village ont pillé des marchands de kolas ; mais, sur l’avis de quelques anciens, on me traça un itinéraire qui m’évitait de passer par les villages hostiles et qui déviait de la route suivie habituellement. La difficulté consistait à trouver un individu qui m’accompagnât jusque dans le Dagomba. Je m’adressai à cet effet à une sorte d’aventurier, nommé Idrisa, dont j’avais fait la connaissance à Dallou. Ce dernier consentit à m’accompagner moyennant la valeur de trois captifs, moitié payable à Bouganiéna, moitié à mon arrivée à Oual-Oualé ; mais, une fois l’arrangement terminé, il se ravisa, quelques peureux lui ayant fait entrevoir ce voyage comme assez périlleux pour qu’il n’en revînt pas. Je ne parvins plus à le décider, même en lui offrant le double de ce qui avait été convenu.

L’imam, sur ces entrefaites, me fit faire connaissance avec un jeune homme de Baouér’a, nommé Isaka, qui m’offrit de me conduire dans son village et de me faire recommander successivement par les chefs de village jusqu’à Koumoullou. Le départ fut fixé au mercredi 25 juillet.

On éprouve de grandes difficultés à se renseigner sur les routes et les distances dans le Mossi. Les indigènes comptent des étapes prodigieuses, de 35 à 40 kilomètres, et ils ont la réputation de les faire. En réalité, en voyageant avec eux j’ai pu constater qu’ils marchaient comme tout le monde, et qu’en somme une étape de 25 à 28 kilomètres était une grosse étape, même pour les Mossi.

Beaucoup de villages de culture, même assez importants, n’ont pas de nom et sont simplement désignés sous le nom de wouiri. Ils se servent aussi souvent du mot tenkaï pour le désigner ; cette appellation veut dire : « Ce n’est pas une résidence de naba » (ten, résidence de naba ; kaï, pas). C’est le Tanguï que Barth a noté à profusion dans ses itinéraires par renseignements à travers le Mossi. Une autre erreur de Barth, c’est d’avoir fait une différence entre l’appellation Natenga et Waghadougou, qu’il a pris pour deux endroits différents. Natenga est un terme dont on se sert très souvent pour désigner Waghadougou ; il veut dire « capitale » ; c’est l’abréviation du mot naba tenga, « village du souverain ». Ce même voyageur a aussi souvent confondu la frontière d’un pays avec sa capitale. Ainsi il donne les itinéraires partant du Mossi vers le Yatenga ou le pays de Kong comme aboutissant à une ville nommée Yatenga[122] et à une autre nommée Kong, tandis que son itinéraire s’arrête, d’une part, à un centre qu’il nomme Yatenga et, d’autre part, aux frontières des États de Kong.


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Le peu de temps que j’ai passé dans le Mossi ne me permet pas de rapporter autant de renseignements que j’aurais voulu en recueillir sur ce pays.

J’ai été en outre très mal secondé comme interprète. L’explorateur venant de l’ouest se trouve moins bien favorisé sous ce rapport que celui qui viendrait du sud (Salaga ou tout autre point), en ce sens que l’on peut considérer le fleuve de Boromo (la Volta Rouge) comme la limite extrême des pays où l’on rencontre assez souvent des gens parlant le mandé, tandis que de Salaga au Mossi on peut se faire comprendre avec le haoussa, le mossi ou le foulbé.

En entrant dans le Gourounsi on se trouve en présence d’un autre groupe de langues et l’on n’y rencontre pas d’individus parlant le mandé. Il en est tout autrement quand on quitte Salaga. Là on peut trouver d’excellents auxiliaires auprès des Haoussa et des Mossi, de sorte qu’en entrant dans le Mossi on est déjà familiarisé avec cette langue. L’étude du mossi n’est cependant pas indispensable, car à peu près partout il y a des Haoussa et des gens du Bornou établis dans les villages un peu importants. Il suffirait donc, pour faire voyage utile de Salaga au Mossi, de savoir parler le haoussa, qui est une langue avec laquelle il est aisé de se familiariser, car on trouve en Europe d’excellents ouvrages sur le haoussa : Schœn, Barth, Leroux, Faidherbe, Tautain, etc.

Je tombais donc dans le Mossi sans interprète et sans savoir parler. Il fut encore très heureux de trouver à Waghadougou, parmi les hommes de Karamokho Mouktar qui y sont retenus prisonniers, un jeune homme du Dafina sachant s’exprimer en mossi et en mandé.

La situation difficile dans laquelle je me suis trouvé quand la défiance de Naba Sanom s’est manifestée à mon égard m’empêcha de faire beaucoup de progrès dans la géographie du Mossi. Vers la fin de mon séjour, cependant, je commençais à savoir m’exprimer suffisamment en mossi pour demander les choses indispensables ; j’ai réussi ainsi à noter plusieurs itinéraires et à me procurer les quelques renseignements que je donne ci-dessous.

Le Mossi ou pays de Mor’o, مُغوُ (mo, radical, nom du peuple ; r’o, affixe équivalant au ga ou ba du mandé qui veut dire, dans beaucoup de pays : gens de), est limité à l’ouest par le Gourounsi et le Kipirsi, dont nous avons déjà parlé.

Il est séparé au nord-ouest du Fouta macinien par le Yatenga.

Au nord, le Mossi touche au Djilgodi, à l’Aribinda et au Libtako, pays traversés par Barth, qui en a donné une remarquable description dans sa relation de voyage.

A l’est, ses limites s’étendent jusqu’au Gourma ou territoire des Bimba et au Boussangsi, dont il est séparé par la branche orientale de la Volta, et enfin, au sud, le Mossi touche au Mampoursi.

Le Mossi est divisé en de nombreuses confédérations plus ou moins indépendantes, dont les naba sont les vassaux de Naba Sanom.

Les principaux vassaux sont : les naba de Yako, de Mani, de Kaye, de Ponsa, de Boussomo, de Djitenga, de Ganzourgou, de Béloussa, de Sakhaboutenga, de Dakay, de Doullougou, de Tiéfakhé, de Béri, de Tangourkou et de Yanga, etc.

Dans cette nomenclature, plusieurs postes de naba sont occupés par des frères ou fils de frères de Naba Sanom ; alors ils portent le titre de nabiga (nababiga, enfants de chef).

Le Mossi se trouve en relations avec les pays limitrophes par une série de chemins dont l’importance commerciale varie avec les centres et les pays qu’ils desservent.

La voie de communication la plus importante est celle qui alimente de sel le Mossi. De Waghadougou elle se dirige par Djitenga, Yako ou Mani sur Ouadiougué (capitale du Yatenga), pour de là se rendre par Bandiagara (capitale du Macina) à Sofouroula, le grand entrepôt du sel de Taodéni de la région, ou encore sur le Gharnata et le Djimbala.

Cette route est une des plus fréquentées ; elle est rarement soumise au pillage, mais elle n’est pas toujours praticable, à cause d’une sourde hostilité qui règne en permanence entre le naba du Yatenga et Naba Sanom, mais qui ne prend un caractère hostile qu’à certaines époques. Le meilleur poste d’observation pour les marchands est Mani ou Yako. Ils y séjournent toujours pendant quelques jours avant d’opter pour la traversée du Yatenga ou la route de Djibo et Douentsa. Cette route est aussi interceptée quelquefois, à cause des opérations militaires du Fouta et du Macina en général, contre le Djimbala et les incursions des Maures du Fermagha.

La route directe de Waghadougou à Douentsa et Tombouctou passe à Djitenga, Mani et Djibo. Une autre plus à l’est passe à Boussomo et Kaye, et rejoint la précédente à Sourgousouma.

Ce sont les voies commerciales naturelles du sel et du kola.

Plus à l’est, le Mossi se met en communication avec le Libtako, et Dôre par Boussomo et Ponsa ; à Marraraba, à trois étapes au sud de Dôre, la route se bifurque pour se diriger à l’est sur Dôre et à l’ouest sur Kora et Lamorde dans l’Aribinda.

Barth, dans ses itinéraires, dit que Marraraba veut dire, en haoussa : « à moitié chemin », et qu’il serait curieux de savoir quel est le lieu dont Marraraba est le point central et intermédiaire.

C’est une erreur.

Marraraba veut dire, en haoussa : « bifurcation, embranchement », c’est le mot mandé faraka, il veut dire, en arabe vulgaire, « divisé ». Il est plus que probable que Marraraba est le nom donné par les Haoussa, mais que les autochtones désignent ce village sous un autre nom.

Le Haoussa est en relations avec le Mossi par une route fréquentée aussi, sur laquelle cependant je n’ai pu obtenir que des renseignements très vagues. Ce que je sais, c’est qu’elle passe à Ganzourgou et à Béloussa. A Zebbo (Yagha), elle rejoint l’itinéraire suivi par Barth quand le voyageur s’est rendu de Say à Lamorde.

Le Gourma ou territoire des Bimba (nom des indigènes du Gourma) communique de Noungou (capitale du Gourma) avec Waghadougou, par Bélounga et Koupéla. C’est une route peu fréquentée. Le caractère des Bimba est très belliqueux. Ce sont des peuples divers qui se rattachent ethnographiquement aux Mossi et aux Gourounga.

Vers le sud, reliant Waghadougou à Salaga, il n’y a pas de chemins bien définis, bien arrêtés. Les Gourounga sont pillards. La rapacité des chefs est excessive. Les marchands changent d’itinéraires très souvent ; les grandes escales sont cependant toujours à peu près les mêmes : ainsi Koupéla, Tangourkou et Yanga d’une part ; Béri, Surma, Souaga, d’autre part ; ainsi que Doullougou, Poukha, Pakhé ; et Baouér’a, Koumoullou, Pakhé, Korogo sont autant de centres qui jalonnent les voies de communication les plus importantes, sur lesquelles se dirigent indifféremment les marchands. On peut dire qu’ils sont comme les cases d’un vaste échiquier desquelles on gagne d’un point un autre en cherchant la sécurité pour se porter sur Oual-Oualé, Gambakha, Yendi et Salaga.

Les routes du Dafina, nous les avons décrites plus haut ; là aussi on cherche à louvoyer pour gagner, à travers le Dafina, Bobo-Dioulasou et Kong, ou encore Oua, Bouna, Kintampo et Bondoukou.

Le parcours de ces routes dépend essentiellement des incidents de la guerre ; le plus sage parti à prendre est de s’appuyer sur les tribus les plus fortes, c’est le seul moyen de passer. On ne peut pas dire qu’il existe une artère préférable à l’autre, elles se valent toutes ; la sécurité est un vain mot sur les chemins qui mènent au beau pays de Mossi.

Les limites du Mossi ne paraissent pas s’être jamais étendues beaucoup plus au nord qu’actuellement, quoique Ahmed Baba mentionne qu’en 1329 (?) le roi du Mossi s’empara de Tombouctou et mit la ville à feu et à sang. Cette date, qu’il n’affirme pas, me paraît en effet erronée, car si c’est vers 1326 que Tombouctou fit sa soumission à Mansa Mouça, roi du Mali, il me paraît difficile que trois ans après, les Mossi aient réussi à s’en emparer ; d’autant plus que les Mandé paraissent y avoir fait un assez long séjour. C’est en effet sous le règne de Mansa Mouça qu’Isaac de Grenade éleva la grande mosquée, dite Djemmâa el-Kébira. Ce même roi y construisit également un palais dont l’emplacement est encore connu. Cette résidence royale portait le nom de Madougou. Il est plus logique de supposer que les Mossi faisaient alors partie du sultanat de Mali, et que c’est vers 1326, avec les Mandé ou sous leurs ordres, qu’ils s’emparèrent de cette ville. Du reste, un peu plus loin le même écrivain dit que le roi du Songhay, Ali Killoun ou Killnou, se reconnaissait vassal du Mali, et que Tombouctou fut pendant cent ans sous la domination du Mali. Les Mossi ont dû rester assez longtemps après en contact avec les Touareg[123], puisqu’ils ont adopté en partie leur costume et qu’ils se servent comme eux du sabre à poignée en croix. Ils ont dû commencer à se retirer vers le sud sous le règne de l’Imoschar’A’Kil (1433), et compléter leur retraite devant l’arrivée des Songhay, sous Sonni Ali (1468) et surtout sous Askia, en 1498, qui battit Nassi, roi du Mossi, pilla et ravagea entièrement son pays.

Au moment de la prise de Tombouctou par les Mossi, il y avait probablement longtemps que des Mandé étaient fixés chez eux. Djenné n’est pas loin du Mossi, et sous Mari Diata ou Diara (1260) Djenné était presque exclusivement fréquenté et habité par des Mandé. Ce qui m’autorise à faire cette supposition, c’est qu’on trouve dans le mor’[124] quelques mots d’origine mandé ; on voit très bien qu’il y a eu contact.

Ils possédaient aussi déjà, au moment de la conquête de Tombouctou, la vilaine petite selle mandé avec toutes ses imperfections, car s’ils étaient arrivés sans chevaux, et par conséquent sans selles, chez les Touareg et chez les Songhay, ils n’auraient certes pas manqué d’adopter l’élégante selle en usage chez ces deux peuples et dont j’ai vu des échantillons chez les cavaliers songhay de Gandiari.

Après la guerre d’Askia contre le Mossi, Ahmed Baba ne parle plus de ce pays que pour mentionner qu’en 1533 les Portugais envoyèrent de la Côte d’Or une ambassade au roi du Mossi, en lutte à cette époque avec le roi du Mali, Mandi Mouça.

Quant à la légendaire histoire du Wolof Bémoy, que les Portugais amenèrent à Lisbonne, il n’y a pas à s’y attarder. Ce Wolof raconta à Lisbonne que les Mossi avaient beaucoup d’analogie avec les chrétiens et que le roi portait le titre d’ogane. Ce récit fut pris au sérieux par quelques personnes qui voulaient voir dans le titre d’ogane la corruption du mot Johannes, et en conclurent que le premier roi du Mossi devait être l’apôtre Jean.

Il est peu probable que les Mossi, en dehors de l’expédition sur Tombouctou, aient fait d’autres guerres importantes ; ce qui tendrait à le prouver, c’est qu’eux-mêmes affirment qu’à part les Mandé musulmans qui vivent au milieu d’eux, ils sont tous de même race.

Ils s’en vantent en faisant remarquer qu’ils sont environnés de peuplades à demi barbares qu’ils n’ont pas voulu annexer parce qu’ils ne sont pas de même famille. Je ne crois pas que ce soit le sentiment de l’homogénéité qui les ait guidés, c’est un tout autre mobile et un mobile qui n’est pas flatteur pour eux. Le Mossi n’a jamais annexé le Gourounsi, tout simplement parce qu’il ne pourrait plus le ravager ; si au contraire il vit en hostilité avec lui, il y trouvera son profit, puisqu’il aura toujours la ressource de capturer ses habitants. Je ne puis trouver de meilleure comparaison qu’en appelant le Gourounsi « le vivier du Mossi ».

L’aspect général des pays mossi que j’ai traversés pour me rendre à Waghadougou est celui d’une plaine élevée (altitude 900 mètres) dans laquelle on ne remarque même pas un léger plissement ; le sol est uniformément plat et entrecoupé de temps à autre de terrains marécageux ou de petits biefs pleins d’eau sans écoulement apparent.

A proprement parler, le Mossi ne compte pas de fleuve ni de cours d’eau importants.

J’ai cherché vainement où pouvaient se trouver les sources de la Schirba, rivière que Barth a traversée entre Say et Zebba, et j’ai acquis la certitude que ce cours d’eau est d’une importance tout à fait secondaire. Au moment où Barth l’a traversée, le 2 juillet 1853, la rivière avait 6 mètres de profondeur, mais c’était presque en plein hivernage, il y avait eu vingt et une pluies, dont plusieurs de grande durée. La rivière était donc déjà fortement gonflée. Du reste, sa largeur est de 100 pas, dit-il, ce qui fait 30 mètres au lieu de 200 mètres, comme cela est indiqué sur plusieurs cartes.

Cette largeur n’implique donc pas un cours très étendu, et si elle passe près de Koupéla, c’est à l’état d’un infinie ruisseau ; c’est pourquoi personne ne me l’a signalée dans mes conversations avec les marchands.

Le sol consiste en quartz, fer, argile siliceuse et granit. Ce pays m’a paru être habité et peuplé depuis fort longtemps, car je n’ai nulle part rencontré ce que nous appelons la brousse. Partout ce sont des cultures en exploitation ou des terrains anciennement défrichés dont on a momentanément abandonné la mise en œuvre, la population en ayant tiré ce qu’elle a pu jusqu’à épuisement. C’est un pays de culture et d’élevage par excellence.

Le petit gibier est très abondant partout. Les gazelles les plus communes sont l’espèce appelée koulou en mandé, et une variété un peu plus grande, rayée de larges bandes de poil blanc parallèles à l’échine, qu’on nomme siné dans la même langue. Dans les marécages il y a des caïmans d’une petite espèce, dont la longueur ne dépasse pas 2 mètres.

Le netté et le cé sont très répandus. Parmi les cés j’ai vu des arbres portant des fruits d’une forme oblongue à très petit noyau ; ils sont bien charnus et constituent un excellent dessert. Je n’ai encore rencontré cette variété nulle part ailleurs.

On cultive le petit mil (sanio) et le sorgho blanc (bimbiri). Les bas-fonds sont utilisés pour la culture du riz, qui vient très bien et est aussi beau que le riz Caroline.

Le maïs n’est cultivé qu’aux abords des villages. Il en est de même de l’indigo, du coton et du tabac. Il est regrettable que ces trois dernières cultures ne soient pas poussées avec plus de vigueur ; ce sont des produits relativement chers, à l’aide desquels les Mossi pourraient se créer des ressources, surtout avec le tabac, qui est d’une qualité supérieure aux variétés que j’ai vues jusqu’à présent.

Partout où j’ai passé, les noirs m’ont vanté la richesse de production de chevaux et d’ânes du Mossi. Avant d’entrer dans ce pays j’étais persuadé que tous les chevaux qu’on rencontre dans les États de Kong étaient des produits du Mossi. Ce que les indigènes ne me disaient pas, c’est que les chevaux, s’ils viennent du Mossi, y ont passé en transit, si l’on peut se servir de cette expression.

Ils viennent tous du Yatenga, qui en prend peut-être lui-même une partie dans le Macina, dont il est voisin.

Il est incontestable qu’il y a des chevaux dans le Mossi, mais il n’y a pas ou peu de juments. Nous avons vu Boukary Naba aller à la fête à Sakhaboutenga avec vingt chevaux, dont cinq ou six ne lui appartenaient pas.

Dans ce dernier village il y en a peut-être autant. A Waghadougou, y compris les chevaux de Naba Sanom, il n’y a pas quarante bêtes. Il est vrai que le climat de Waghadougou a la réputation d’être funeste aux chevaux, et qu’il y en a peut-être plus ailleurs. A Mani, par exemple, on peut trouver assez facilement des chevaux, ce village n’étant éloigné que de deux journées de marche du Yatenga ; mais, tout compte fait, nous sommes bien loin des deux mille chevaux par-ci, des trois mille chevaux par-là qui, sur un signe de Naba Sanom, viendraient à Waghadougou. C’est une fable. Si l’on voit quelques chevaux[125] dans les grands villages du Mossi, c’est qu’ils ne coûtent pas cher dans le Yatenga : 3 ou 4 captifs, d’une valeur moyenne de 60000 cauries chacun.

Les chevaux provenant du Yatenga qu’on voit ici sont de deux races bien distinctes.

La plus commune a, sans en avoir les qualités, tous les autres caractères du cheval arabe : tête fine, encolure courte, membres grêles et croupe fuyante, crinière et queue très longues. Les robes qu’on rencontre le plus souvent sont bai, alezan, gris, isabelle et rouan ; ces trois dernières variétés ont toutes du ladre au chanfrein. Il est rare de rencontrer des chevaux sans balzanes. Dans cette race il y a beaucoup plus de chevaux de rebut que de bêtes de prix ; c’est le cheval arabe dégénéré. Quand le poulain atteint un an, il est monté, ne se développe plus, s’enselle et est hors de service à l’âge où en Algérie et en France il commence à rendre des services.

Races de chevaux.

Comme dans toutes les régions soudanaises, les robes et les balzanes entrent en ligne de compte pour la valeur des chevaux ; il est même très curieux de voir que pour cela ils ont les mêmes croyances que les peuples musulmans.

Car, si l’on en croit le Prophète :

  • Le plus vite des chevaux est l’alezan,
  • Le plus résistant est le bai,
  • Le plus énergique le noir,
  • Le plus béni celui qui a le front blanc.

Il en est de même pour les balzanes. Les Mossi, comme le général Daumas, disent :

  • Balzane  1 : cheval commun.
  • Balzanes 2 : cheval de gueux.
  • Balzanes 3 : cheval de roi.
  • Balzanes 4 : cheval à abattre.

L’autre race, que nous pouvons appeler, jusqu’à plus ample information, cheval du Yatenga, n’a rien du cheval arabe. C’est une belle et forte bête, ayant les caractères de notre cheval de dragons, environ 1 m. 57 à 1 m. 62. Il se distingue par une tête fine et bien attachée, les membres inférieurs forts, bien musclés, un sabot large et la corne bien consistante, un beau poitrail large, la crinière et les crins de la queue courts. Les robes les plus communes sont : différents bai et alezan. C’est un véritable cheval de guerre, une bête que nous devrions avoir dans notre Soudan pour remonter nos spahis. Je suis persuadé qu’on doit mettre beaucoup de soins à les élever et que les saillies ne sont pas l’effet d’un hasard, comme cela a lieu en général. Les poulains ne sont pas montés trop jeunes non plus, et tous ont un très beau dessus ; malheureusement ces chevaux ne subissent aucun entraînement. En permanence au piquet et entravés même quand on les mène à l’abreuvoir, ils ne sortent et ne sont montés quelquefois que tous les huit jours, et encore ! De sorte que quand une bête semblable doit faire campagne ou marcher tous les jours pendant deux ou trois mois, même sans fatigue pour un animal un tant soit peu entraîné, elle dépérit et meurt. Les produits de ces deux races mélangées donnent un petit cheval court et robuste ayant les caractères d’un petit cheval de trait d’Europe.

Les naba qui possèdent deux ou trois belles bêtes de la race yatenga les font entourer de soins. Chaque animal a son captif, gamin de dix à douze ans, qui ne le quitte pas, et le tient en main à l’aide d’un licol et d’une cordelette en crin. Ces petits palefreniers les bourrent de fourrages, toujours des graminées vertes, qu’ils leur introduisent de force dans la bouche, leur présentent de temps à autre un morceau de sel à lécher, et leur préparent des barbotages au son de mil. A l’aide d’une palette en cuir, ils chassent les mouches ; ils reçoivent le crottin et les urines dans une calebasse. Avec des ciseaux fabriqués dans le pays, on fait les crins et coupe les poils des oreilles, mais on ne sait pas faire les pieds : jamais un sabot n’est rogné. Tous les deux ou trois jours, les animaux sont graissés au beurre de vache ou au beurre de cé.

Les médications en usage contre la constipation ou le manque d’appétit des chevaux sont de six espèces. Je les donne à titre de curiosité, leur efficacité n’étant pas absolument prouvée.

Pour le manque d’appétit, quand le cheval refuse le mil :

1o Poivre long avec la cosse, appelé en mandé kani[126] (environ 10 poignées).

Poivre renfermé dans une coque, appelé en mandé niamakou[127] (environ 30 noix), petit piment rouge appelé foronto ou mousso kani (2 poignées), sel, environ 600 à 800 grammes.

Le tout, pilé dans un mortier, est introduit dans le gosier du cheval, à l’aide d’une petite corne. L’animal est mis à la diète et ne reçoit à boire que six heures après.

2o Pilules de bouse de vache mélangée à de la cendre (environ 40 grammes).

3o 50 grammes d’un sel dont je rapporte un échantillon ; on le nomme baboé en mossi ; il provient du Bornou.

4o Pilules de farine de mil mélangée à environ 400 grammes de piment rouge et 500 grammes de sel.

On emploie contre la constipation :

1o Une purge d’un sel de provenance du Haoussa, nommé konri en mossi et en haoussa.

2o Infusion de l’écorce d’un arbre appelé seguéné en mandé.

J’ai usé de ces médicaments pour mes chevaux, ce qui ne les a pas empêchés de mourir, jusqu’à présent, au bout de quatre ou cinq mois de travail. Les animaux, dès qu’ils font un peu de service, sont vite atteints de fièvre paludéenne, qui se change bientôt en accès pernicieux, ou détermine l’anémie, et les noirs n’ont pas de médicament pour cela.

Nous savons heureusement mieux qu’eux soigner nos animaux, et il n’est pas rare de voir un cheval indigène faire toute une campagne sur le Niger (dix mois), ce qui n’arrive jamais chez les noirs. J’ai vu les chevaux qui restaient à Samory au mois d’août 1887 devant Sikasso ; c’était leur cinquième mois de campagne, dont quatre mois de séjour sans fatigue devant Sikasso, et aucun d’eux n’aurait été capable de faire 100 kilomètres en 5 jours. Parmi eux, il y en avait même qui n’avaient que deux ou trois mois de service, Samory renouvelant ses chevaux au fur et à mesure de ses ressources en captifs.

Je suis persuadé que nos vétérinaires employés dans le Soudan français, en mettant en pratique les observations qu’ils ont faites ou feront pendant des séjours répétés dans notre colonie, arriveront à combattre victorieusement l’affection paludéenne chez les chevaux, et peut-être même à enrayer son développement ; de même que si on leur en fournit les moyens, ils arriveraient, en employant l’étalon du Yatenga, à nous créer une qualité de chevaux qui nous dispenserait de faire venir onéreusement des chevaux d’Algérie, qui ne résistent pas[128].

Quel est le peuple qui a importé le cheval au Yatenga ? Nos recherches nous l’apprendront peut-être plus tard ; toujours est-il incontestable que ce cheval a conservé le type arien. Si l’on en croit les savantes études de Piètrement[129], le cheval arabe ne serait même autre chose qu’un cheval arien ; si donc les anciens ont réussi à acclimater le cheval arien en Algérie et dans le Yatenga, nous devrions arriver à en faire autant, et même mieux, car il faut admettre que les connaissances vétérinaires sont plus étendues actuellement qu’elles ne l’étaient il y a vingt siècles. A-t-on essayé d’acclimater en Afrique, et en particulier dans le Soudan, des chevaux d’Europe ?

Si je me suis écarté de mon sujet en effleurant cette question, j’ai tenu simplement à soumettre mes propres observations aux gens compétents, mes connaissances n’étant pas assez étendues pour me permettre d’entrer dans des détails plus techniques, c’est aux gens du métier à la traiter plus complètement.


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Si le Mossi produit peu de chevaux, il est incontestable que c’est un pays de productions d’ânes. Il semblait cependant jadis plus prospère qu’actuellement, si l’on s’en rapporte à Barth, qui signale à son passage à Dôre un convoi d’ânes considérable acheté par des gens d’Ahmadou, cheikh de Hamdallahi. Aujourd’hui, quoiqu’on trouve des ânesses dans tous les grands villages, il est moins facile de se procurer des ânes qu’à Bakel ou à Médine[130]. Leur prix est ici relativement élevé, il varie entre 30000 et 35000 cauries pour un mâle, et pour cette même somme on peut se procurer à Kong, Dioulasou, dans le Lobi et le Gourounsi environ 60 francs d’or ; ce prix ne diffère pas sensiblement de ce qu’on paye les ânes dans les postes cités plus haut, lorsqu’on les achète payables en guinée. J’ajouterai encore que les ânes du Mossi sont bien moins résistants que les ânes de Bakel. Dès qu’ils travaillent un peu, ils dépérissent ; j’en ai fait l’expérience dans la suite de mon voyage. Ainsi, sur cinq belles bêtes achetées à Oual-Oualé, j’en ai perdu quatre jusqu’à Salaga. La cause du peu de résistance de ces animaux tient à ce que jamais ils ne voyagent en hivernage et qu’en saison sèche leur entraînement se borne à un ou deux voyages de Oual-Oualé à Salaga. Toujours à l’abri de la pluie dans les villages, ces animaux ne sont plus propres à rien au bout de deux ou trois jours de route, et meurent infailliblement, n’étant pas habitués aux intempéries. L’âne du Mossi a en outre l’échine excessivement longue, il est moins ramassé que le bourricot court des Maures et de notre Soudan.

Un de nos camarades, qui s’est occupé de zootechnie pendant son séjour dans le Soudan français, dit qu’il n’existe qu’une race d’ânes dans le Soudan, et qu’il est en train de s’en créer une autre par le croisement d’ânes algériens noirs avec des ânesses indigènes.

Je ne suis pas assez compétent pour affirmer le contraire, mais je me permets ici de faire remarquer que s’il n’existe qu’une race, il existe six variétés d’ânes qui diffèrent essentiellement entre elles par les qualités et le degré de résistance plus ou moins grande qu’elles offrent ; ces variétés sont connues de tous les indigènes qui voyagent. Je les énumère en classant les meilleures les premières :

1o Le bourricot gris roux (rouan) appelé bala en mandé et diabiyangué en sonninké.
2o noir-brun, au-dessous du ventre blanc, gombing-é en mandé et en sonninké.
3o gris-souris, sarfatté  —  id.  — 
4o gris tirant sur le blanc, sale sakhanné ou saguéné  —  id.  — 
5o pie (noir et blanc), fanto  —  id.  — 
6o pie (gris et blanc ou rouan et blanc), kaba  —  id.  — 

Parmi les trois dernières catégories on trouve rarement des animaux de choix ; ils sont toujours d’un prix moins élevé que les sarfatté, qui eux-mêmes sont moins chers que les bala et gombing-é. Ces deux dernières variétés sont des animaux de choix, d’un degré de résistance à toute épreuve ; ils se distinguent en outre par leur sobriété ; ceux qui ont été élevés chez les Maures, par exemple, n’ont pas besoin de mil, ce qui ne les empêche pas de travailler comme les autres.

Parmi les sarfatté, on trouve encore beaucoup de bons animaux, mais ils sont bien moins résistants que les bala et les gombing-é.

Quand on a soin de n’acheter que des animaux dont les deux crochets ont percé, on est à peu près sûr de ne pas en perdre[131]. Plus un âne a travaillé, meilleur il est ; il franchit sans hésitation les passages difficiles, les gués, et se laisse facilement charger. J’ai eu des âniers qui conduisaient jusqu’à trois ânes chargés à 70 kilos, à l’aide du bât indigène (tarfadé).

On trouve ces six variétés répandues, dans des proportions très variables, chez les Maures, à Bakel, à Médine, dans le Kaarta, le Bakhounou, le Ségou, le Macina, le Yatenga, le Mossi[132] et le Haoussa[133]. L’autre race, le dafing (bouche noire), n’existe que dans le Dafina, ou, pour mieux dire, je n’en ai vu que là.

On peut dire que le Soudan est un des pays qui produisent les ânes les plus remarquables.

Il y a deux espèces de moutons dans le Mossi, toutes les deux à poil ras, l’un est petit (valeur 3500 à 4000 cauries), l’autre est le grand mouton maure (valeur 6000 à 7000 cauries).

Le bœuf le plus répandu ici est le zébu, dont j’ai vu des sujets remarquables par leur taille et leur bon état (valeur d’un bœuf moyen, 13000 à 15000 cauries).

Anes.

Le Mossi a cela de commun avec la plupart des autres nègres soudaniens, c’est qu’il n’existe pas de type assez répandu pour qu’on puisse dire : « Voilà un vrai type mossi ». On y rencontre des gens ressemblant à s’y méprendre aux Wolof, aux Mandé des bords du Niger et même aux Haoussa. Il m’est donc bien difficile d’en faire le portrait.

Je me bornerai à rappeler que l’on peut diviser la population du Mossi en deux races. L’une, la plus nombreuse, non musulmane, est assez ancienne pour qu’on puisse la considérer jusqu’à un certain point comme autochtone ; on distingue ses sujets sous le nom de Mor’o et Moss’i. L’autre, musulmane, d’origine mandé, est venue des bords du Niger à l’avènement du roi Bammana, Ngolo, entre les années 1754 et 1760. Elle est appelée par les Mor’o : ia r’a. Ces immigrants habitent en général les grands villages ; quelques-uns de ces centres ont même été créés par eux, tels sont : Mani, Yako, Waghadougou, dont l’étymologie est mandé. Ils ont les prénoms musulmans que l’on rencontre chez les Sonninké de Sâro et dans le Djenné. Exemple : Abd er-Rahman, Isaac, Yako, Seybou, Boubakar, Mouça, Alassane, Idriza, etc.

Les autochtones ont des noms de plantes, de choses ou d’animaux, comme les Siène-ré. Ils sont fétichistes, mais ont eu pour culte le soleil, qui porte encore aujourd’hui le même nom que Dieu : ils l’appellent Wouidi.

Ces deux peuples sont déjà fortement mélangés : il est impossible de les différencier aux tatouages, qui varient à l’infini. Je reproduis à la fin du volume ceux que j’ai eu l’occasion de relever pendant mon séjour. Ces différences marquent probablement, comme chez les Mandé (Bambara), les diverses tribus.

Le tatouage du Mossi consiste : 1o en cicatrices sur les joues, partant des tempes pour finir au menton ; 2o en cicatrices allant du nez à la joue ; 3o quelquefois en marques sur le front et le menton.

J’ai relevé onze séries, comprenant trente-trois tatouages différents, et je suis loin d’avoir vu des habitants de toutes les parties du Mossi ! J’ai constaté avec plaisir que quelques musulmans avaient pris résolument le parti de ne plus tatouer leurs enfants, ils ont fini par s’apercevoir que cette coutume barbare ne servait qu’à les défigurer et à les rendre encore plus laids qu’ils ne le sont réellement.

Le costume des hommes ne diffère pas beaucoup de celui des autres Soudaniens que nous connaissons ; j’ajouterai cependant qu’à côté des grandes coussabes et de la culotte ordinaire (doroké) des musulmans, on voit fréquemment un vêtement à taille, jupe et manches, sorte de tunique ample, ainsi que le large pantalon bouffant tombant jusqu’à la cheville, le lemta, le bonnet dit dioutougou, bordé de gris-gris, et les babouches — costume en partie emprunté aux Touareg[134]. Je n’ai pas vu porter d’étoffes de provenance européenne. Les vêtements sont tous confectionnés à l’aide de bandes de cotonnade blanche ou de couleur du Haoussa ; il n’y a que quelques turbans communs qui viennent de Salaga. Les armes les plus répandues sont l’arc et la lance ; tout le monde porte en outre une sorte de canne-massue nommée doro. Les cavaliers portent un bouclier en peau de bœuf, dans le dos, pour parer les flèches que décochent les archers quand ils ont été dépassés par le cavalier qui les a chargés.

Types et costumes de Mossi.

La femme mossi vit dans une condition d’infériorité très marquée ; elle est toujours misérablement vêtue ; le seul luxe que lui tolère son mari est de se charger jambes et bras d’anneaux en cuivre fondu et même souvent de grosses boules en cuivre creuses, ornements qui sont loin de rendre sa démarche gracieuse. Quelques-uns de ces anneaux sont fixés à demeure par le forgeron, d’autres se démontent à coups de marteau. Il n’est pas rare de voir des anneaux de pied peser 6 kilos la paire.

Les femmes qui ne sont pas assez riches pour se procurer des anneaux en cuivre portent des bracelets en bois ou en marbre, venus du Hombori par Douentsa.

A Waghadougou j’ai vu quelques femmes porter de petits bracelets en argent.

La coiffure consiste en un cimier, avec le reste des cheveux rasés, ou encore la tête entièrement rasée.

La femme mossi n’a pas de cauries à sa disposition, comme dans les pays mandé, où la femme sait toujours se créer quelques petites ressources destinées à acheter de quoi se parer.

Les femmes de naba seules portent des colliers de corail à très bon marché ou un collier de cornaline ; les autres doivent se contenter de colliers en rocaille bleue.

La femme salue et ne parle à qui que ce soit sans se prosterner et se tenir les joues avec les paumes des mains tournées en dehors, les coudes touchant terre. Elle porte son enfant en bandoulière, l’écharpe passant sur l’épaule droite. On voit encore par ici de nombreuses filles déjà grandes errer toutes nues.

Le peuple mossi m’a particulièrement paru en retard comme industrie. C’est à peine si l’on peut citer le tissage, car il ne se confectionne presque pas de cotonnade ici. Les districts sud et sud-est vers Béri et Koupéla ne fabriquent qu’un peu de koyo blanc très commun, qui est loin de suffire à la consommation locale[135]. Les autres tissus, que l’on peut appeler fantaisie, viennent du Haoussa et du Dagomba. Cette industrie du tissage n’a jamais été prospère et Barth a été induit en erreur, ou a oublié plusieurs zéros en écrivant qu’à Koupéla un bon boubou coûtait de 700 à 800 cauries. Chez les noirs il n’existe pas de pays où un boubou revienne à ce prix, il faut toujours compter au moins le triple pour un vêtement très commun.

Le métier de teinturier n’est pas répandu non plus : à Waghadougou, il n’y a que deux teinturiers, un Songhay et un Haoussa.

Comme partout, on fabrique quelques nattes, un peu de vannerie ornée avec goût et des chapeaux qui paraissent avoir été tressés pour des géants, tant la tête est spacieuse (ils sont destinés à être portés par-dessus le turban).

Les Mossi savent travailler grossièrement le fer, le cuivre et l’argent ; ils connaissent la soudure, qu’ils tirent de Salaga. On fait aussi des babouches et quelques selles, mais il ne faudrait pas en conclure qu’on trouve ces objets tout confectionnés ; si vous avez besoin d’une selle, il faut commencer par acheter une ou deux peaux de mouton ou de chèvre, ou faire les avances en cauries à l’ouvrier. Peu à peu votre selle se confectionne et vous êtes servi au bout d’un mois quand on a fait diligence. Le mors se trouve ailleurs ; la bride, les étriers, chez un autre individu. C’est une laborieuse corvée que d’avoir à se procurer quelque chose chez les Mossi. Ces gens-là m’ont paru plus paresseux que les autres noirs en général ; ils saisissent le moindre prétexte pour chômer. Ces mots naïfs de Diawé le dépeignent bien : furieux de ne pas obtenir ce qu’il désirait, mon domestique se lamentait auprès de moi, et comme j’essayais de le calmer, il me répondit d’un air convaincu : « Tu as raison, jamais que moi qui miré paille comme ici : quand de l’eau qui tombe, tout qui halte ». Ce qui veut dire : « Jamais je n’ai vu de pays comme celui-ci : quand il pleut, rien ne va plus ».

La selle en usage est la selle mandé, mais on voit aussi la selle peule, dite selle du Macina et du Djilgodi. Je crois même qu’avant d’avoir adopté la selle mandé, ils ont connu la selle peule, car elle porte un nom peul : gari ; aujourd’hui la selle mandé est la plus commune. Quelques naba ont la selle songhay au dossier élevé, recouverte d’une housse élégamment capitonnée. Les étriers sont de la forme en usage dans le Haoussa, quelquefois ils se composent d’un simple anneau en fer qui est placé entre l’orteil et le doigt suivant.

Le commerce n’est pas plus prospère que l’industrie.

Le marché a lieu à Waghadougou tous les trois jours, comme partout dans le Mossi ; les autres jours il y a petit marché. Le grand marché ne diffère des autres que par le plus grand nombre de visiteurs et le vacarme qui s’y fait. Comme dans le Follona, il s’y débite du dolo, et, en plus, le marché sert de rendez-vous à tous les griots de la région — et ils ne manquent pas. S’ils ne récoltent que peu de cauries, ils ont la satisfaction (?) d’être ivres le soir. Autour des urnes à dolo il est impossible de placer une parole, tous ces instrumentistes jouant à la fois du lounga[136], du doudéga[137], du gangang-o[138] et du ouér’a[139].

Après le dolo, par ordre d’importance, viennent les aliments préparés : riz, lakh-lalo, niomies, beignets de haricots, etc., puis les grains, mil, sorgho, riz, haricots, le savon, le beurre de cé, les condiments, un peu de sel, des kola. On y trouve aussi de petits lots de médicaments de charlatan contre la lèpre, les ophtalmies, le ver de Guinée, la maladie du sommeil, ainsi que des préparations érotiques, puis des chapeaux, des nattes, des paniers, de la viande, etc.

Mais ce que l’on trouve surtout en abondance sur les marchés du Mossi, c’est le kalgou, fabriqué avec les fruits du néré ou netté.

Le néré ou netté, Parkia biglobosa, est une très belle mimosée ; l’arbre atteint 10 à 15 mètres de hauteur dans le Mossi. Quand l’arbre fleurit, il est très curieux à voir : ses fleurs ressemblent à de beaux pompons d’un rouge écarlate.

Ses fruits sont des gousses étroites, longues de 20 à 40 centimètres, généralement disposées par grappes de cinq ou six gousses.

Elles renferment une pulpe farineuse jaune qui sert d’aliment et de boisson, et des graines.

C’est avec les graines que l’on fabrique la sauce dite soumbala en mandé, ou kalgou en mossi.

Les graines sont grillées, puis brisées et fermentées dans de l’eau. Pelées, elles constituent une pâte, dont on fait des boulettes de diverses grosseurs.

Le soumbala se conserve très longtemps. Partout on en trouve à acheter sur les marchés. Les ménagères s’en servent pour la confection de presque toutes leurs sauces.

On peut dire que le soumbala ou kalgou est la base de toutes les préparations de sauces, il est connu par tout le Soudan. L’Européen ne s’y habitue pas facilement. A la fin de mon séjour, je mangeais cependant ces sauces avec plaisir.


★ ★

De temps à autre, un marchand de captifs vient y conduire ses deux ou trois captifs.

Il ne s’y vend pas un seul article d’Europe, même pas un foulard ou une pierre à fusil.

Les marchés de Saponé, Tiéfakhé et Sakhaboutenga sont semblables. Il y vient un peu moins de monde ; on y débite également du dolo.

En dehors du marché, il existe un faible trafic permanent entre le sel, les ânes, les chevaux et surtout les captifs, qui sont la base de toute transaction dans le Mossi. C’est son seul produit ; c’est avec lui qu’il achète les chevaux, le sel, les kola. Les ânes sont échangés aux Haoussa pour des étoffes, ou à Salaga pour des kola avec quelques petits objets de provenance européenne, ou encore des étoffes de Kano.

Les kola valent ici de 25 à 50 cauries, suivant la grosseur. Le sel (la barre) coûte, suivant son poids (30 à 35 kilos), 30 à 35000 cauries.

Le captif adulte, de 50 à 65000 cauries ; le cheval, 2, 3 ou 4 captifs.

Il n’est pas possible de faire l’acquisition d’un cheval sans captifs, les cauries étant excessivement rares ici : il faudrait vendre pendant plus de six mois pour réunir les 250000 cauries nécessaires à l’achat d’un cheval.

Il n’y a peut-être pas dans tout Waghadougou un homme pouvant compter séance tenante 20000 cauries. Dès les premiers jours de mon arrivée je m’en suis rendu compte : je comptais beaucoup plus rapidement les cauries que les Mossi, tandis que les gens de Kong et les Mandé Dioula en général comptent avec une dextérité que je n’ai jamais pu atteindre. Un peu plus tard, l’imam et deux autres musulmans auxquels je croyais quelque aisance sont venus me supplier de leur acheter leur bague en or de la grosseur d’une petite ficelle ; ils en ont accepté chacun 1500 cauries. Je les ai payées au taux de Kong. C’est presque une preuve de misère, puisque l’or est excessivement rare dans le Mossi et qu’on ne s’en défait qu’à la dernière extrémité.

A partir de Kong et jusque dans le Mossi, on voit, en fait d’argent, le thaler à l’effigie de Marie-Thérèse, frappé au millésime de 1780, et quelques piastres mexicaines. Ces pièces d’argent ne sont jamais utilisées comme monnaie : les noirs s’en servent comme bijoux et en font faire des bracelets. Leur prix varie selon qu’elles sont plus ou moins neuves ; un thaler bien propre et neuf (valeur 5 fr. 50 d’argent) peut s’échanger contre 3500 à 4000 cauries. En chiffres ronds, 1 franc vaudrait 800 cauries. Quant à la valeur de la piastre mexicaine, elle varie de 2000 à 2500 cauries. Il faudrait bien se garder de croire qu’il est possible de faire n’importe quel achat avec de l’argent. On pourrait au besoin arriver à se défaire de quelques pièces à ce prix, mais alors que rapporterait-on en échange ? des ânes ou des chevaux, du sel ou des captifs ? Le noir n’acceptera pas en payement rien que de l’argent : il en prendra bien huit ou dix pièces pour en faire des bijoux, mais pas davantage, car il craindrait de ne pouvoir s’en défaire sans perte et ne l’accepterait pas.

A Kong et à Djenné on compte par sira (200 cauries) et par ba (800 cauries). Dans le Dafina, quand on achète ou vend, on spécifie si c’est le ba et le kémé des Dioula ou bien le ba et le kémé du Mossi, car les Mossi ont le système décimal. Leur première grande unité est 100 (kouapakha ou kobchi) ; vient ensuite 1000 (toucéri).

Les étoffes de provenance haoussa n’arrivent pas toutes par le Libtako, mais surtout par Salaga. Ce qu’il y a de curieux, c’est qu’elles se vendent moins cher ici qu’à Salaga. Ceci s’explique facilement : il suffit de se poser cette simple question : « Que vendent les Mossi à Salaga ? — R. Des captifs et des ânes », le sel gemme en barres revenant plus cher rendu à Salaga que le sel marin. Or, si les Mossi vendent leurs captifs et leurs ânes, ils se privent de leurs moyens de transport, ils sont donc forcés de ne prendre des kola qu’autant que les autres moyens de transport le leur permettent. Le reste des cauries qu’ils ont obtenues de leurs ânes ou captifs[140] étant trop lourd, ils le convertissent en étoffe, qu’ils revendent le même prix et souvent à meilleur marché dans le Mossi, sans pour cela éprouver de perte, puisqu’on leur a payé leur âne ou captif trois fois la valeur de ce qu’il vaut dans le Mossi et le Yatenga.

Voici la nomenclature et la description des tissus de Kano et de Sokoto qui arrivent par ces deux voies dans le Mossi :

1o Le karfo qui est une coussabe (boubou) teinte à l’indigo et brodée en lomas de même teinte. Il entre dans cette teinture une grande quantité de gomme, de sorte que le vêtement une fois battu et repassé[141] est très bien lustré. Une fois lavé, le lustrage disparaît peu à peu. Il vaut, suivant qu’il est plus ou moins luisant, de 10000 à 25000 cauries. Pour 15000 cauries, le boubou est déjà fort beau.

Cet article ferait une concurrence très sérieuse à notre guinée de Pondichéry s’il arrivait jusqu’au Ségou et au Niger, car si les noirs savaient compter et comparer les cauries à l’argent, il arriverait ceci : un karfo de 15000 cauries représente à Waghadougou 15 francs en argent, au taux habituel, mais comme le possesseur recherche ce métal, j’admets qu’il n’en obtienne que 12 francs. Porté à Nyamina, Ségou ou Bammako, il pourrait céder ce vêtement au même prix qu’un boubou en guinée et même le vendre plus cher, puisqu’il est plus solide, plus joli, brodé et tout terminé.

Or, à Ségou, un boubou en guinée revient à :

Une demi-pièce de guinée 12 fr. »
Confection du vêtement 2 fr. 50 (ba kili)
Broderies (au moins) 5 fr. »
Total 19 fr. 50 (en chiffres ronds 20 francs).

2o Après le karfo, je citerai une autre coussabe, qu’on nomme noufa, également de provenance de Kano. Ce vêtement est confectionné en tissu teint à l’indigo, rayé de blanc ; de loin le dessin paraît gris, il est richement orné, sur le devant et dans le dos, de lomas brodés en soie blanche indigène. Le prix de ce vêtement varie entre 35000 et 50000 cauries, suivant la qualité de l’étoffe, les broderies étant toujours les mêmes.

3o Vient ensuite le pantalon ou culotte longue en noufa brodé et soutaché en soie verte ou rouge. Il vaut ici de 20000 à 30000 cauries.

4o Une jolie couverture rayée de bleu de diverses nuances, bien confectionnée, avec de très belles teintes ; elle se fabrique en deux ou trois largeurs de 60 centimètres chacune, et vaut 12000 cauries en deux largeurs et 15 à 18000 en trois.

Les Haoussa sont des gens très adroits et industrieux. Ces tissus sont relativement à bon marché, quand on songe au temps que met un noir à la confection de semblables effets. Ce qui m’a paru intéressant, c’est de voir que les Haoussa savent produire des tissus de 60 centimètres de largeur, tandis qu’à Kong même et à Djenné les largeurs maxima sont de 20 centimètres seulement. Toutes ces étoffes sont pliées avec goût et très uniformément, elles sont en outre emballées dans du papier et ficelées.

J’ai réussi, avec beaucoup de peine et à force de patience, à me procurer des échantillons de ces divers tissus et vêtements, ne sachant pas si j’irais ou non à Salaga.

Il n’y a pas beaucoup de ces étoffes dans le Mossi ; les mouvements vers Salaga sont momentanément suspendus à cause des cultures, et, d’autre part, il m’est très difficile de me procurer des cauries. Je comptais beaucoup sur mes étoffes rouges de Kong, mais je n’ai pu m’en défaire que d’une partie, avec un bénéfice de 2 à 3000 cauries seulement par pièce. J’ai réussi aussi à me procurer des cauries avec du cuivre en barres, du bleu en sachets, un peu de corail à bon marché, de l’étoffe rouge pour bonnets et servant à recouvrir des gris-gris, quelques turbans à bon marché, du velours pour bonnets, un peu de coutellerie et des glaces. Comme je l’ai dit plus haut, la femme, qui ailleurs achète tant d’objets d’Europe pour se parer, ne peut s’en procurer que rarement dans le Mossi, de sorte que ce n’est qu’avec les plus grandes difficultés qu’on arrive à vendre quelques articles pour femmes.

Les Mossi ont la réputation d’être d’excellents tireurs d’arc ; leur arme est certainement la mieux conditionnée que j’aie vue jusqu’à présent. Encore actuellement ils ont fort peu de fusils. L’entourage des naba seul possède des armes à feu. La plupart d’entre elles sont de fabrication française (arme réglementaire à silex), modèle 1822, marquées Pellekerin, B... et Cie (maison de Saint-Louis).

Le Mossi est maintenant un pays engourdi, qui s’est laissé dépasser en civilisation par tous les peuples voisins qui l’environnent. Le Djenné, le Yatenga, le Macina, le Djilgodi, le Haoussa, le Dagomba, le Kong sont tous beaucoup plus avancés et plus prospères que le Mossi. Favorisés par la nature, qui leur offre un territoire presque en entier propre à la culture, les Mossi se reposent, cultivent ce qui leur est nécessaire pour vivre, mais pas plus, de sorte que, s’il n’y a pas de malheureux dans ce pays, on peut dire qu’il n’y a pas non plus de gens riches. Tout le monde vivote, pour me servir d’une expression vulgaire, mais qui peint bien la situation.

Ce pays pourrait être riche, sa population est très dense (environ 20 habitants par kilomètre carré). On peut dire qu’à part l’élevage des ânes et du bétail, le Mossi ne produit pas grand’chose. Il est tributaire de ses voisins pour tout, le commerce y est à peu près nul, ses habitants sont apathiques au dernier degré.

Ils n’ont presque pas de relations avec le Djilgodi et le Libtako, et Salaga est bien négligé.

Les produits du sol ne suffisent pas à donner la prospérité à un pays, il faut le commerce et l’industrie, chez les noirs comme chez nous. Partout où à côté de l’agriculture l’homme s’occupe aussi de commerce et d’industrie, le pays est prospère et se développe. Nous en avons deux exemples frappants dans le Soudan : le Mandé Dioula y prospère et le Peul y périclite.

Naba Sanom crie si souvent par-dessus tous les toits qu’il commande à 333 naba et à plus de 10000 chevaux, qu’il finit par en être persuadé lui-même. La réalité est que Waghadougou est la plus grande agglomération du Mossi (5000 habitants au maximum, et les autres centres, Mani, Yako, Boussomo, Sakhaboutenga, Pisséla, Koupéla, Ganzourgou, ont au maximum 3000 habitants). Dans la majeure partie des autres villages, le chiffre de la population varie entre 50 et 500 habitants, ce qui est déjà fort beau pour un pays nègre. D’après mes calculs, cela donne en moyenne une densité de population de 15 à 20 habitants par kilomètre carré. Ses 333 naba, à part ceux des grands centres que je cite, sont de simples chefs de village, dont beaucoup n’ont même pas un cheval à monter. Quant aux 2000 chevaux par-ci et 2000 chevaux par-là, j’ai dit plus haut ce que j’en pensais. Comme situation extérieure, le Mossi a été longtemps à l’abri des incursions de ses puissants voisins, grâce à une ceinture de peuples inférieurs et en retard qui constituaient autour de lui une sorte de rempart. Cette situation ne peut se prolonger longtemps : Naba Sanom est un homme de trop peu d’esprit, trop faible et trop mal conseillé pour perpétuer une série d’années de paix qui, mises à profit, auraient pu apporter quelque aisance à son pays.

A son avènement, Naba Sanom a été forcé de gouverner le Mossi avec un despotisme sans bornes. De crainte de perdre le pouvoir il s’est laissé entraîner à prendre des mesures trop excessives, qu’il a été forcé de réduire. Quand ses grands vassaux ont vu cela, ils ont pris ces concessions pour de la crainte et ont commencé à travailler sourdement contre lui. Aujourd’hui les naba de Mani, de Boussomo, de Yako et de Koupéla sont des forces avec lesquelles Naba Sanom devra compter.

Avant peu, l’empire du Mossi se désagrégera, le pays s’organisera en confédérations à l’instar du Bélédougou et du Yatenga.

C’est du reste un événement que nous, Européens, ne pouvons voir que d’un bon œil. L’expérience nous a montré que dès qu’un chef nègre commande à plus de 20000 âmes, il rêve un empire, ses besoins augmentent, il cherche l’extension. Comme il n’a point de budget, tout est déficit, et pour le combler il lui faut faire la chasse à l’esclave. En confédération, les chefs arrivent moins rapidement. Dès qu’il y en a un qui s’élève, les autres confédérations peuvent s’allier et étouffer son ambition dans le germe. C’est le seul moyen de faire régner la prospérité.

Une des grandes fautes que Naba Sanom vient de commettre, c’est d’avoir fermé les yeux sur les agissements de Gandiari, qui lui créera plus tard de sérieux embarras.

Ce Songhay a quitté il y a six ans le Zamberma pour passer le Niger à Say et recruter d’autres Songhay sur la rive gauche du fleuve, dans les régions désignées sur les cartes « Songhay indépendants ». Il se promettait d’expéditionner chez les Bimba, dans le Boussangsi ou chez tout autre peuple, suivant que l’occasion s’en présenterait.

Pour ne pas éveiller les soupçons et éviter de se faire fermer le pays, il ne prit que quelques compagnons de route et marcha pendant quelque temps à l’aventure, lorsque, sachant que le Mampourga Naba se préparait à châtier des villages du Gourounsi, entre autres Pou ou Poukha, Gandiari se dirigea à cheval sur Gambakha.

Il voyageait avec un ami nommé Alfa Hainou et n’était suivi qu’à plusieurs jours de marche par ses compagnons dévoués.

Mais en arrivant il apprit que le parti musulman, craignant sans doute que la guerre ne fît naître des difficultés encore plus grandes dans les transactions futures avec le Gourounsi, faisait tout son possible pour éviter une prise d’armes. Le Mampourga Naba s’était laissé d’autant plus persuader, que sans l’appui des musulmans de Gambakha et de Oual-Oualé il ne pouvait rien faire, ses forces n’étant pas assez nombreuses. Et enfin, raison majeure, cette guerre ne lui disait plus grand’chose, les musulmans, et par conséquent Dieu, ne lui prêtant plus d’appui.

Gandiari, après avoir sondé les musulmans de Gambakha et de Oual-Oualé, acquit la certitude qu’il n’y avait rien à faire de ce côté. On lui donna le conseil de partir pour Karaga, le naba de ce village, assez puissant, ayant formé, avec Daboya et Kompongou, le projet de détruire deux ou trois villages du Gourounsi, frontières du Dagomba. Gandiari et Alfa Hainou se rendirent donc à Karaga. Possédant chacun un cheval, ils furent agréés avec enthousiasme par le naba, et l’expédition fut organisée avec le concours des gens de Daboya.

Les Gourounga ne possèdent ni chevaux ni fusils, aussi furent-ils promptement réduits et la razzia de captifs fut considérable.

Une fois les quelques villages hostiles détruits, Daboya et Karaga considérèrent le but comme atteint et se retirèrent.

Sur ces entrefaites, plusieurs autres villages du Gourounsi firent des ouvertures aux chefs de colonne pour leur demander de les aider contre des villages voisins. Gandiari n’eut pas de peine à retenir quelques gens armés de Daboya et de Karaga, qui formèrent avec des Songhay Zaberma le noyau de sa future armée.

Un ou deux succès faciles et la quantité de captifs qu’il razziait lui valurent bientôt une réputation telle, que de toute part il lui arriva des forces, constituées naturellement par des aventuriers d’origines mossi, dagomba, gondja, gottogo, puis des Mandé de tous les pays et des gens venant du Yorouba, mais principalement des habitants de Oua et de Bouna. Au fur et à mesure que les succès de Gandiari grandissaient, il lui arrivait des Songhay ; actuellement ils sont les plus nombreux.

A la mort d’Alfa Hainou, Gandiari prit un nommé Babotou comme lieutenant, et quand Gandiari lui-même mourut[142], il y a trois ans, Babotou lui succéda en prenant pour auxiliaire un nommé Isaka, dont je ne connais pas la nationalité.

Le souvenir que Gandiari a laissé est tellement vivace encore, que partout on désigne ses troupes par son nom : jamais personne ne se douterait qu’il est mort depuis si longtemps ; je crois même qu’il y a beaucoup de noirs qui l’ignorent.

A l’heure actuelle, Babotou est maître de tous les pays qui limitent le Mossi au sud et au sud-ouest. Le dernier centre de résistance du Gourounsi était le gros village de Sati, situé à trois étapes au sud de Ladio. Ce village pris, Moussa, son chef, fut décapité, et Sati est pour ainsi dire la capitale des pays conquis et le centre de rayonnement des colonnes qui vont piller. Sati est appelé par les Haoussa Camp de Gandiari, « Sansanné Gandiari ».

Babotou se lassera évidemment d’envoyer des cadeaux en captifs à Naba Sanom, et sous peu il deviendra pour lui un ami gênant.

Cependant ce dernier ne voit pas la situation, c’est un revenu en captifs que lui sert momentanément l’autre. Bien mieux que cela, il est assez aveugle pour convier Babotou à venir s’emparer de Lalé, gros village situé sur la frontière du Kipirsi (à une journée de marche de Waghadougou), devant lequel une attaque des Mossi, mal dirigée, a échoué.

Quoique Naba Sanom fasse administrer son pays par 333 naba, comme il le dit avec emphase, ses revenus ne sont nullement réglés. Il vit d’aumônes et d’offrandes qui lui sont portées en vue d’obtenir justice ou de lui faire quelque réclamation.

Il hérite dans certains cas, à défaut de postérité par exemple. Il envoie aussi quelquefois une bande de ses gens prendre quelques captifs dans le Kipirsi, ou bien il prête la main à des entreprises de Wouidi, des chefs du Djilgodi et de Babotou. Mais ces revenus ne sont pas suffisants, comme ceux de tous les chefs noirs, chez lesquels il règne un gaspillage qui va toujours en croissant. De sorte que ces souverains sont toujours forcés d’user d’expédients pour se procurer des chevaux et d’autres ressources.

Si encore Naba Sanom groupait ses captifs dans les villages de culture, et qu’il les fît se livrer à un peu d’élevage, à l’instar de Tiéba, de Pégué et des gens de Kong, mais il s’en soucie peu. S’il ne reçoit pas assez de mil comme cadeaux, il fait vendre ses captifs pour s’en procurer.

En résumé, la situation du Mossi n’est pas prospère, mais sous une sage administration et avec un chef énergique elle pourrait le devenir.

Les terrains de culture sont nombreux et produiraient en abondance, outre les céréales : le coton, l’indigo, le tabac, les piments, la graisse de cé, tous produits plus rémunérateurs que le mil et le riz.

Le tissage et la teinture devraient prendre également de l’extension, sans compter l’élevage des chevaux et des ânes.

Ils pourraient également trouver quelques ressources en créant l’industrie mulassière, mais les Mossi sont trop apathiques, trop engourdis et surtout trop mal gouvernés, pour que leur situation s’améliore. Je crains pour eux, dans un temps plus ou moins éloigné, leur anéantissement par les Songhay, qui commencent de nouveau à se réveiller après une somnolence de près de trois siècles. Babotou fera la guerre au Mossi.


★ ★

Quelques mots sur le Yatenga.

Contrairement à ce que Barth avait compris, il ne s’agit pas d’une ville : le Yatenga est une vaste contrée qui sépare le Macina du Mossi ; elle est limitée au nord et à l’ouest par les États foulbé du Macina et le territoire des Tombo : au nord par le Djilgodi à l’est par le Mossi, au sud par le Kipirsi, et à l’ouest par les Bobo-Oulé.

Ce pays est organisé en confédérations, à la tête desquelles sont des naba puissants, qui semblent reconnaître l’autorité de celui de Ouadiougué, le centre le plus important. Les autres résidences de naba sont : Toukhé, Kindi, Alasko, Kalanka et Kalsaka.

Le Yatenga est peuplé de races diverses. Le fond de la population est d’origine mossi, mais il y a de nombreux villages songhay, tombo, peul et bobo-oulé.

Quelques-uns de ces peuples ont des cases en pierre, m’a-t-on dit, mais les habitations sont aussi misérables que si elles étaient en briques séchées au soleil.

Le pays est peu arrosé, on ne trouve l’eau que dans des puits ; il y a peu ou point de marécages.

C’est un pays d’élevage ; il fournit des chevaux au Mossi et au Dafina. Dans toute cette partie du Soudan, les chevaux du Yatenga sont renommés.

Le pays produit du tabac en grande quantité. Les habitants sont des fumeurs extraordinaires. Hommes, femmes, enfants ont toujours la pipe à la bouche.

Le Yatenga est en communication avec le Macina et le Mossi, par une route qui passe à Ouadiougué et se rend de Waghadougou à Bandiagara ; il est en relations avec le Dafina par un chemin se dirigeant sur la colonie foulbé de Baréni, résidence de Wouidi.

Il n’est pas rare de voir le Yatenga s’allier à Wouidi et aux contingents kipirsi pour faire des razzias d’esclaves dans les régions avoisinantes.

FIN DU TOME PREMIER

NOTES :

[1]Voir appendice II, la nomenclature des objets emportés.

[2]Titre religieux (imam).

[3]Matelots indigènes.

[4]Cotonnade teinte à l’indigo, fabriquée exclusivement à Pondichéry et à Chandernagor.

[5]Soldats indigènes.

[6]Caste de chanteurs et de musiciens.

[7]Vêtement en cotonnade, sorte de blouse ample.

[8]800 cauries font 1 ba, 80 cauries font 1 kémé, 1600 cauries ou 2 ba valent 5 francs en argent.

[9]Il y a en permanence dans les deux villages, y compris le transit : 30 charges de kolas de 25 kilogrammes, 50 barres de sel, 120 captifs de tout âge et des deux sexes, une trentaine d’ânes, 10 à 15 bœufs porteurs, et un chiffre variable de chevaux à vendre (de 3 à 10).

[10]Espèces d’arbres dont il est parlé plus loin.

[11]Voir pour renseignements complémentaires le chapitre Kong.

[12]Ouvriers en bois d’origine peule.

[13]Rek est un mot wolof que Diawé croit français ; il veut dire : « sans hésitation, sans restriction ».

[14]Notes sur les croyances et pratiques religieuses des Bammana, par le docteur Tautain, ex-médecin de la mission Gallieni. (Bulletin de la Société d’Anthropologie, 1880.)

[15]Comme on peut s’en assurer, ces renseignements, quoique vagues, sont empreints d’exactitude. Je les laisse subsister pour que l’on puisse comparer.

[16]Dans tous les manuscrits le nom est resté en blanc.

[17]Depuis j’ai appris que ce village est abandonné ; il est situé à quelques kilomètres au nord de Tiola.

[18]Posidonius, ap. Athenæus lib. IV. cap. 13.

[19]Voir le chapitre de Fourou pour leurs diamou (nom de famille ou de tribu) et pour les idiomes qu’ils parlent.

[21]La population totale des États de Samory s’élève à 280000 habitants ; quant à ses pays de protectorat, ils n’ont fourni que des contingents très faibles pendant cette guerre. Le Ouorodougou n’a pas fourni un homme et le Toma non plus.

[22]Sorte de tubercule, ayant le goût d’un mauvais navet.

[23]Sofa ou soufa, comme l’a dit le docteur Tautain, veut dire textuellement père du cheval, palefrenier. En principe ils n’avaient que cette fonction, mais par la suite on a étendu cette appellation à tout ce qui porte un fusil.

[24]J’ai vu un griot parcourir une ruine avec un piston d’enfant (jouet qui se vend 1 à 2 francs dans un bazar).

[25]Depuis, c’est-à-dire vers le 20 octobre, Tiéba s’était même emparé du diassa de Baffa et en avait exterminé la garnison.

[26]Sikasso est le nom par lequel les Mandé désignent le village, les Sénoufo le nomment Sikokana : so veut dire, en mandé, « village », et kana veut dire la même chose en sénoufo.

[27]J’ai vainement demandé depuis où était situé ce pays, personne ne le connaît ni n’en a entendu parler.

[28]Les patates et ignames en purée, mangées avec cette sauce, sont très bonnes ; c’est un plat recommandable pour l’estomac européen.

[29]Lenguésoro porte aussi le nom de Lensoro et Sorydianebara.

[30]Kouroudougou ne veut pas dire, comme son étymologie semble l’indiquer : pays des pierres ou des montagnes. Ce sont ses habitants qui portent le nom de « Kourou ».

[31]On apporte du Gantiédougou beaucoup de citrons à Tiong-i. Je les achetai toujours sur ce marché à raison de 1 caurie pièce, ce qui met le prix à 30 centimes le cent.

[32]Étant à Ouolosébougou, un brave Kouloubali de Nobougou (État de Ségou) vint près de ma case et offrit quelques cauries à un de mes hommes, lui demandant en échange de voir le toubab (Européen). Mon ânier lui dit que cela ne coûtait rien et qu’il allait lui faire voir le blanc tout de suite ; le Kouloubali demanda alors mon nom et on lui répondit, pour lui faire une farce : « C’est un Diara ».

J’avais entendu ce dialogue et je fis entrer cet homme ; il me salua par le mot Diara. Je me prêtai de bonne grâce à cette petite fumisterie et lui répondis par le mbati allongé de rigueur. Ce brave homme a dû répéter cela sur le marché, et ce diamou m’est resté ; beaucoup d’indigènes se figurent que c’est réellement mon nom.

Dans tout le Soudan, quand on connaît le diamou (nom de tribu) d’un individu, il suffit de le prononcer pour le saluer. Ainsi, un Sidibé rencontrant et voulant saluer un Konaté lui dira simplement : « Konaté », à quoi le Konaté répond : « Mbati, Sidibé ».

[33]C’est cet incident qui donna naissance au bruit de ma mort, qui fut colporté par les noirs avec un tel luxe de détails qu’il parvint à nos postes du Soudan français et en France, où cette fausse nouvelle plongea ma mère dans un cruel deuil de six mois.

[34]Depuis ma rentrée en France, j’ai eu l’occasion de revoir cette plante dans une exposition horticole. C’est le safran indien, le curcuma de la Martinique. L’orthographe indigène est سورن ; n’est il pas curieux qu’en écrivant safran سڢرن on y trouve les mêmes radicaux, avec cette différence que le point du fa a été omis et a ainsi donné naissance à un oua ?

On peut faire la même réflexion pour ڧڢ, café, et ڧو, caoua : là aussi il manque un simple point diacritique pour identifier les deux noms.

[35]Habituellement, avant de vendre de l’or, les marchands le font tremper pendant quelque temps dans la terre humide afin d’en augmenter le poids.

[36]Cette anomalie ne peut s’expliquer que par la configuration très boisée de la région traversée par le cours supérieur du Bagoé. Il roule ses eaux pendant 200 kilomètres au milieu d’une végétation des plus épaisses. Ces terrains boisés absorbent et retiennent facilement les eaux des pluies, qu’ils ne laissent échapper que d’une façon lente et continue. Le cours de la rivière est par suite régularisé, de sorte que son débit, tout en étant considérable pendant la saison pluvieuse, se maintient plus longtemps à un étiage élevé et ne diminue que lentement. Il en résulte que la branche orientale du Niger est moins considérable que le bras principal dans lequel elle se jette à Mopti.

[37]Dans les environs de Dôre, à l’époque du passage de Barth, 5000 cauries valaient 5 fr. 50.

[38]La guinée noire se vend ici (kémé dourou) 1 franc la coudée de 50 centimètres ; le calicot blanc (kémé ouoro) 1 fr. 20 la même coudée.

[39]Ces amulettes ont la vertu, disent les Siène-ré, de donner beaucoup d’enfants.

[40]Le Follona et non Foulouna, comme l’a écrit Barth, est un pays presque exclusivement peuplé de Siène-ré et de colonies dioula ; on n’y trouve pas de Foulbé, comme l’aurait pu faire supposer le mot Foulouna. Follona veut dire en siène-ré, chefs ici ou chefs dedans ; on l’appelle aussi Follokan et Folloklou (pays des chefs ou du chef).

[41]J’ignore si Fan est un nom propre ou si c’est seulement le titre par lequel on désignait le père de Tiéba. En tout cas, aujourd’hui encore le titre du souverain du Follona est fan follo.

[42]Les Tagoua font partie de la grande famille mandé et sont établis en grand nombre à Ngokho. Tatoués comme les Siène-ré, ils parlent soit le mandé, soit le siène-ré. Leurs noms de tribus sont Bamma, Traouré, Konné, Diarabasou ou Diarasouba ; il y en a qui sont musulmans, et d’autres fétichistes, ils ne diffèrent en rien des autres Mandé que je connais.

[43]De Léra, quand le chemin Sandergou est praticable, on met dix jours pour aller à Kong. Les principales étapes sont : Léra, Sandergou, Niandakhara, Dionkoso, campement sur la rive gauche du Comoë, Kapi, Lenguékoro, Kong.

[44]Cette nouvelle était fausse.

[45]La fonction de siratigui paraît être de création très ancienne et s’est maintenue dans cette partie des régions mandé jusqu’à nos jours. On avait donné comme étymologie que siratigui voulait dire « celui qui perçoit l’impôt » ; ici ce n’est pas absolument le cas. Dans cette région les siratigui sont sous les ordres des chefs qui commandent aux frontières ; ce sont eux qui ouvrent les communications avec les pays voisins et qui sont envoyés pour régler les questions de captifs évadés, etc. Par leurs relations avec les chefs des environs, ils sont connus et leurs hommes également. Accompagné par eux, les voyages sont plus faciles : leurs hommes sont de véritables sauf-conduits.

[46]La végétation est ici en avance de deux mois sur Niélé ; le néré, qui était seulement en fleur là-bas, est ici à maturité ; les cé sont déjà mûrs, tandis qu’à Bammako ils ne mûrissent qu’en juin et juillet.

[47]Quelques Sénégalais pensent que toubab vient du mot toubabé (l’homme qui porte un pantalon). Les Toucouleurs disent toubaco, de toubanké (également homme à pantalon). Mon avis est que ce mot n’est autre chose que l’altération du mot arabe thébib (médecin), car nous avons tous la réputation de professer la médecine, et il n’y a pas de jour où l’Européen qui voyage ne soit sollicité par le noir pour obtenir un remède quelconque.

[48]Cet arbre semble être le korgam de Barth. Ce voyageur le signale à son passage dans le Gourma, en quittant Say pour se rendre dans l’Aribinda et le Libtako.

[49]Voir chapitres IX et X.

[50]D’après une règle phonétique en pratique dans toutes ces régions, le g devant a ou o se dit b, et le k se prononce p. Ainsi Kong se dit Pon. Pour bien le prononcer il faut brusquement ouvrir la bouche. L’étymologie de Kong semble être « tête » (capitale) en mandé-dioula ; en soso, Kong veut dire : « bien habité ».

[51]Kokosou veut dire « village derrière le ruisseau ».

[52]Marrabasou veut dire « village des Haoussa, village des teinturiers » (car par ici les Haoussa exercent eux seuls cette profession).

[53]Grande mosquée.

[54]Les gens de Kong disent que Kong est plus grand et plus peuplé que Djenné ; les gens de Djenné eux-mêmes l’affirment. Caillié estimait la population de Djenné à 8 ou 10000 habitants. Le chiffre que je cite ne doit donc guère s’écarter de la vérité.

[55]Chemin de Moïse, chemin de Jésus, chemin de Mahomet.

[56]Petits pains d’épice faits avec du mil, du miel, des piments.

[57]Ces graines proviennent d’une plante ayant beaucoup de ressemblance avec celle qui produit la feuille à emballer les kola ; elles sont rondes, noires, très dures et de la grosseur des baies de genièvre ou de petits pois.

[58]Tout ce qui est en soie est appelé hanniki à Kong.

[59]Dans chaque quartier il y a un ou deux hommes sachant faire les burnous et vivant exclusivement de ce métier.

[60]Le mot daba vient d’un instrument aratoire dont on ne peut se servir que des deux mains (des 10 doigts).

[61]Mokho veut dire « homme ».

[62]Ponguisé veut dire « étoffe de Kong », et dadji « crachat » (de la couleur rouge du jus de kola).

[63]Dans toute la région de Kong, l’arbre à cé et l’arbre à néré restent stériles ; la limite de culture maximum sud est par 9° 30′ ; plus au sud, l’arbre pousse encore, mais ne donne plus de fruits. La vraie zone de culture pour ces deux arbres est comprise entre 9° 30′ et 12°.

[64]Le tintoulou est la graisse extraite du sarcocarpe fibreux qui enveloppe l’amande du palmier à huile.

[65]Le tingolotoulou (nté koulou toulou, l’huile du noyau du palmier) est l’huile extraite de la noisette du palmier à huile. (Voir le chapitre XV.)

[66]A raison de 28000 cauries pour un âne (56 fr. l’un) et 46000 pour les deux bœufs, dont un était en très mauvais état (46 fr. pièce).

[67]Il ne se passait pas de jour que je reçusse la visite d’un voisin venant me demander un écrit destiné à donner l’intelligence à ses enfants.

J’avais beau leur représenter que l’efficacité d’un tel remède était difficile à prouver, ils insistaient tellement, que je me vis forcé, à mon grand regret, de me prêter à plusieurs reprises à cette fantaisie.

Je m’en acquittai le plus loyalement possible en écrivant à l’encre sur les tablettes en bois qui leur servent d’ardoises :

« Que Dieu leur donne la lumière. »

La tablette était ensuite bien lavée, et l’encre, mêlée à l’eau qui avait servi au nettoyage de la planchette, était donnée à boire aux petits.

D’autres solliciteurs venaient me demander un écrit préservant des balles et faisant dévier ses propres projectiles, afin que de son côté il n’atteignît personne en guerre.

[68]Cependant, à mon second séjour j’ai cru surprendre dans une conversation qu’il existait ici des documents historiques sur lesquels on transcrivait les événements saillants, documents tenus à jour scrupuleusement.

[69]Kouroudougou ne veut pas dire « pays des pierres ou des montagnes », comme son étymologie pourrait le faire supposer ; Kourou est un nom de peuple.

[70]Cette appellation est absolument impropre. Le mot Bambara est à Kong le synonyme de kafir (infidèle), et comme toutes les peuplades des environs sont fétichistes, ils appellent Bambaradougou tous les pays qui ne sont pas musulmans.

[71]Homme âgé et vénéré.

[72]Note de M. O. Houdas, professeur à l’École des langues orientales, sur l’écriture des gens de Kong :

« L’écriture arabe employée par les gens de Kong est celle dont font usage tous les nègres du Soudan ; elle appartient au genre que j’ai appelé soudani et qui est une des variétés du type maghrebin. Ce qui caractérise ce genre d’écriture, c’est la ressemblance frappante qu’ont conservée bon nombre de lettres avec les caractères correspondants de l’écriture coufique telle qu’elle était usitée vers le IVe siècle de l’hégire. On y retrouve, en effet, la forme rectangulaire des lettres emphatiques qui, dans les autres genres d’écriture, a été remplacée par la figure d’une poire couchée ; les trois lettres djim, ha et kha sont représentées par une ligne brisée au lieu d’une demi-ellipse accompagnée de la partie correspondante de sa normale : le dal et le dzal ont trois branches au lieu de deux, etc.

« Il parait bien difficile, d’après ces observations, de ne point admettre que les gens de Kong, ainsi d’ailleurs que les autres musulmans du Soudan, n’ont pas tiré directement leur écriture du coufique à l’époque où ce dernier caractère était encore usité dans les livres liturgiques, c’est-à-dire au Ve siècle de l’hégire au plus tard. En outre, il est plus que probable que l’introduction de l’écriture arabe et celle de l’islamisme qui l’amenait à sa suite se sont faites directement de Kairouan et non du Maroc ou de l’Algérie, car dans ces deux dernières contrées l’usage du coufique paraît avoir cessé de fort bonne heure pour faire place à une écriture plus élégante et plus cursive. Il serait bien surprenant que les nègres eussent adopté un caractère lourd et disgracieux s’ils avaient eu connaissance d’un type, d’un tracé plus commode et d’une allure plus dégagée. »

[73]Komono veut dire « derrière le Comoé, derrière le fleuve Komo », no est un affixe qui signifie « après ». Nous en avons un autre exemple dans Tagouano, « derrière les Tagoua ». En effet le Tagouano est situé derrière, c’est-à-dire à l’est des Tagoua, qui habitent Ngokho, Mbeng-é et les environs.

[74]Partis le 19 mars, mes deux courriers sont arrivés à Bammako le 20 juin, c’est-à-dire trois mois après. Ils ont reçu partout l’accueil le plus bienveillant ; Pégué, Tiéba et Samory leur ont fait de nombreux cadeaux. Les populations qu’ils ont traversées étaient entièrement gagnées à notre cause. Partout mon passage avait laissé une heureuse impression. Ils ont fait ce voyage sans armes : mes lettres seules leur ont servi de sauf-conduit.

[75]Usage pris aux Mandé musulmans.

[76]Une charge de porteur, femme ou homme, pèse de 25 à 35 kilos.

[77]Les sadioumé sont des échassiers noirs et blancs qui, à l’approche de l’hivernage, viennent nicher sur les gros arbres des villages ; on les appelle vulgairement « oiseaux d’hivernage ».

[78]Pluriel de Peul. Synonymes de Poul, Foulla, Fellata, etc.

[79]Sur les premières éditions de la carte du Dépôt de la guerre, le Borgou était placé dans la région comprise au nord de Djenné entre Sokolo et le Niger.

[80]J’ai appris depuis que c’est Mounéri (frère d’Ahmadou de Ségou).

[81]Beaucoup de musulmans de Kong rendent la liberté à leurs captifs. J’ai eu l’occasion de voir à Kong des gens des deux sexes ayant obtenu la liberté de leurs maîtres. Je ne pense pas cependant qu’il faut attribuer cet acte à la clémence ou à la générosité du propriétaire, je crois plutôt que c’est un signe de pénitence, pour se faire pardonner quelque gros péché, ou encore que c’est suivant les conseils d’un kéniélala, ainsi que cela se passe fréquemment pour les ânes et les ânesses, qui sont exempts de travail et qu’on voit errer dans les villages. Quand un de ces animaux vient boire ou manger dans la calebasse d’une femme sans qu’il y soit convié, le fait est considéré par la brave femme comme une bonne fortune.

Par la suite j’ai appris de la bouche de notables musulmans que la libération des captifs était recommandée par les livres saints. Le Coran en effet contient un paragraphe dans lequel il est dit : « Quand un esclave te demandera sa liberté par écrit, tu la lui donneras, en y ajoutant une partie des biens que le seigneur t’a prodigués. »

J’ai du reste remarqué que tous les esclaves libérés avaient reçu une instruction religieuse assez complète et qu’ils savaient tous lire.

C’est une mesure très louable, puisque l’esclavage ainsi compris n’est qu’une mesure civilisatrice.

[82]Le colonel Archinard, depuis ma rentrée, a placé le territoire du Sâro sous notre protectorat.

[83]Mangha veut dire en poular : grand.

[84]Lakh lalo des Wolof.

[85]Doufiné, en bobo-niéniégué, veut dire « Dieu ».

[86]Les derniers que l’on rencontre en allant vers l’est.

[87]Textuellement : « homme faisant fonction de roi ».

[88]Pays indépendant, situé entre le Ségou et Djenné et placé sous l’autorité des Sonninké les plus influents de la région.

[89]Le couscous est préparé avec du petit mil (sanio) que l’on pile jusqu’à ce qu’il présente des granules grosses comme de la semoule, puis il est cuit à la vapeur dans un chaudron perce de trous qui sert de couvercle à une marmite pleine d’eau. Le couscous, une fois cuit, est séché au soleil et peut se conserver fort longtemps. Pour l’apprêter, il suffit de l’arroser avec un peu d’eau bouillante. Il se mange avec toutes les sauces, à la viande, ou simplement dans du lait frais ou caillé.

[90]Tombo (chenille), foroko (outre, peau de bouc), fani (étoffe : étoffe en outre de chenille).

[91]Le lomas est une broderie particulière, qui veut dire de « trois doigts de largeur ».

[92]Bouche noire.

[93]Comme cette étymologie me paraît hasardée, je la cite comme on-dit ; jusqu’à confirmation, je n’y crois pas.

[94]Peuple du Gourounsi.

[95]A Poura, m’a-t-on dit, les gens ont un peu plus de facilité pour se livrer à l’exploitation de l’or ; les orpailleurs lavent les alluvions d’un ruisseau dans lequel il y a de l’eau encore pendant quelques mois après la fin des pluies.

[96]Les Dafing et les Mossi de Boromo ne prononcent jamais di, ils changent partout cette diphtongue en z : ainsi ils disent Zoula au lieu de Dioula, a man zan au lieu de a man dian (il n’y a pas loin), Zabéré pour Diabéré, etc.

[97]On appelle aussi Gandiari : Diamberma, Zamberma ou Zaberma ; c’est ce dernier nom qui est le nom du pays d’origine de Gandiari et de ses guerriers. Ils viennent de Zaberma, rive gauche du Niger, au nord de Say et du Haoussa.

[98]Il n’a pas donné suite à ses projets de dévastation.

[99]Nom sous lequel on désigne certains ânes d’une robe couleur chair (voir chapitre Mossi).

[100]Nom sous lequel on désigne la nuance de certains ânes (voir chapitre Mossi).

[101]Mil tout préparé cuit avec de la patate pilée et du piment, que l’on mange en marchant.

[102]« Tu l’obtiendras, louange à Dieu ! Que Dieu te le donne ! Il n’y a pas d’inconvénients. Que Dieu te donne la paix ! » etc.

[103]Le kountan est un arbre ressemblant à un prunier sauvage, il atteint une assez grosse taille. Son fruit est de la grosseur d’une prune d’Europe ; il est blanc et sa chair est visqueuse. Le noyau est très gros, rugueux, réticulé et adhérent à la chair, dont il est excessivement difficile à détacher.

Cet arbre semble être le Chrysobalanus Icaco des Antilles.

Il existe un spécimen de cet arbre dans la cour du poste de Médine (Soudan français).

La boisson qu’on prépare avec cette prune n’est pas fabriquée comme le dolo de mil, de sorgho ou de maïs ; le fruit, fermenté, est cuit et recuit après avoir été séparé de son noyau.

Cette boisson enivre les indigènes : mais pour un Européen il faudrait en boire pendant plusieurs heures pour éprouver de l’ivresse. Il constitue pour lui un puissant laxatif.

Le noyau, séché, est conservé dans les greniers. En temps de disette et pendant les marches quand on ne peut se procurer d’autres vivres, les Gourounga en mangent l’amande.

[104]Le r’ remplace le غ arabe.

[105]Nattes tressées en gros roseaux.

[106]Voir chapitre X, t. II, pour les détails sur ses vêtements.

[107]Naba veut dire : roi, maître, chef.

[108]Nabiga veut dire en mossi : enfant de roi.

[109]Sakhaboutenga veut dire en mossi : Pays du to. Sakhabou est le mot mandé to, et tenga correspond à la terminaison mandé : dougou.

[110]Natenga, abréviation de nabatenga, résidence du naba, capitale.

[111]Waghadougou veut dire en mandé : village de la brousse ou, encore, pays des paniers.

[112]Ouor’odor’o, en mossi, veut dire : beaucoup de cases ; ouor’o, beaucoup ; dor’-o, case.

[113]Comme dans tous les pays soudanais que j’ai visités, on ne rapporte jamais la tête des lièvres dans le village : cela porte malheur, paraît-il.

[114]Les Mossi désignent les autres peuples voisins sous des noms particuliers, dont quelques-uns ont déjà été signalés par Barth. Ce voyageur, probablement par suite d’une mauvaise transcription, dit que les Mossi nomment les Haoussa : Sangoro, c’est Zang-ouér’o qu’il faut lire. Il convient aussi d’ajouter à cette nomenclature : les Tombo, qu’ils nomment : Kibga ; les Gourounga (habitants du Gourounsi) ; les Lakhama, qu’ils appellent Nokhorissé. Les Mandé sont appelés Tauréarga et encore Zauréarga ; les Peuls : Tchilmigo ; les Pakhalla : Kouakhallakha, et les Songhay : Marenga.

[115]La lettre r’, que j’aurai souvent l’occasion d’employer, représente un son très répandu dans le langage mossi. Ce son est moins dur que celui du خ arabe, que je représente toujours par kh ; il équivaut au غ arabe ; en commençant il est toujours prononcé avec difficulté par les Européens. Peu à peu l’oreille s’y fait cependant et l’on arrive à le prononcer assez aisément par la suite.

[116]Naba est un titre qui signifie en mossi : maître, seigneur, roi, chef ; pour se distinguer des autres naba, le chef suprême du Mossi porte le titre de naba sanom (roi or) ; il est désigné aussi souvent sous le nom de Mor’o naba (roi des Mor’o, des Mossi). Son prénom est Makha, et son nom de famille Gomma.

[117]Le Yatenga n’appartient pas à Naba Sanom : le souverain de ce pays est absolument indépendant, il réside à Ouadiougué et entretient des relations amicales avec le Mossi (pour plus de renseignements, voir la fin de ce chapitre).

[118]La mission dont il s’agit est vraisemblablement l’expédition du lieutenant allemand von François, qui remontait du Togo vers Gambakha.

[119]Pendant mon séjour à Oual-Oualé, plus tard j’appris, par des Mossi venant de Waghadougou, que pendant que j’étais chez Naba Sanom, la nouvelle de l’arrivée à Gambakha d’un blanc et de trente hommes armés troubla Naba Sanom ; le bruit se répandit bientôt que j’étais l’avant-garde de cette expédition. On conseilla au naba de me conserver à Waghadougou comme prisonnier en attendant les événements ; mais les musulmans influents, consultés, déclarèrent qu’il fallait me renvoyer et m’empêcher de rallier l’expédition de Gambakha. C’est pourquoi je fus dirigé vers Boukary Naba et le Dafina.

[120]Le gombo est un légume très mucilagineux et bienfaisant par excellence. Il pousse après de longues tiges, a la forme d’une corne d’abondance d’environ cinq à dix centimètres de longueur. L’extérieur est velu et l’intérieur renferme une grande quantité de grains ronds. Les indigènes s’en servent surtout pour les sauces. Ce légume est connu au Brésil, aux Antilles, aux États-Unis et en Turquie. Les Arabes l’appellent mouloukaïa.

[121]Volta Blanche.

[122]Il n’existe aucun centre désigné spécialement par le mot Yatenga, c’est le nom d’un pays assez vaste situé entre le Mossi et le territoire des Tombo. (Voir la fin de ce chapitre.)

[123]Ebn Batouta, qui visita Tombouctou en 1352, dit que la ville était alors principalement habitée par des gens de Mima et des Touareg (Massoufa) qui avaient un chef particulier.

[124]Langue du Mossi.

[125]En fait de cavaliers je n’ai à peu près vu que des gens du naba ; les autres personnages montent modestement une ânesse avec un coussin placé sur la croupe en guise de selle.

[126]Ce poivre est renfermé dans de petites cosses de 7 à 8 centimètres de longueur ; il croît en sol humide dans la zone de végétation dense entre le 8e degré et la mer. La plante est une liane qui se multiplie par boutures.

[127]Le niamakou est une plante à souche vivace ; sa fleur est rouge cramoisi dans le haut et jaune dans le bas ; elle pousse à l’état isolé dans plusieurs régions que j’ai visitées, mais on la tire surtout du voisinage du 8e degré de latitude nord.

Son fruit est une capsule coriace, bosselée, d’une couleur bistre quand elle est séchée. Elle renferme des graines noires un peu aplaties, qui sont mélangées à une pulpe incolore et acide.

Les indigènes pilent la coque avec la graine. La plante me semble n’être autre chose que l’Amomum melegueta.

[128]Les pays du Soudan où l’on trouve les meilleurs chevaux sont, de l’ouest à l’est : le Kingui, le Bakhounou, le Macina, le Yatenga, les pays songhay, le nord du Haoussa. Ce sont des pays de plaine, élevés, sans bas-fonds marécageux. Ils sont compris entre 13° et 18° de latitude nord ; dans toutes ces contrées on abreuve les chevaux aux puits.

[129]Les Chevaux dans les temps historiques et préhistoriques.

[130]On m’a affirmé qu’à Mani on pourrait trouver à acheter une dizaine d’ânes dans une journée.

[131]Sur les 18 ânes que j’ai eus à mon service et dont j’ai fait l’acquisition à Bakel, 2 sont morts à Ouolosébougou au bout de 4 mois de service (crochets non percés) ; 1 laissé au commandant de Bamakou (blessé au pied) ; 2 laissés à Tiong-i (devenus inutiles par suite de suppression de bagages) ; 3 vendus à Kong (10 mois de service) ; 1 vendu à Ouahabou (1 an de service) ; 4 volés dans le Gourounsi (18 mois de service) ; 2 morts à Oual-Oualé (16 mois de service) ; 3 morts à Salaga (18 mois de service). Tous ces animaux ont été constamment exposés aux intempéries et n’ont reçu de mil qu’à partir de Fourou, après 8 mois de service déjà.

[132]Les ânes mossi sont presque tous des sarfatté.

[133]Dans le Haoussa les ânes valent de 25000 à 30000 cauries (du temps de Barth, 5000) ; à Salaga, leur prix varie, actuellement, entre 90000 et 120000 cauries (du temps de Barth, ils valaient de 15 à 20000).

[134]Les Touareg sont aussi appelés Sorgou et Bourdammé par les Mossi. — Sorgou est le nom mandé et veut dire méchant, mauvais ; Bourdammé est le nom sous lequel on désigne les Touareg à Tombouctou.

[135]Ces districts exportent un peu de cotonnade blanche sur Oual-Oualé.

[136]Lounga, mot mossi qui désigne le tam-tam à cordes.

[137]Doudéga, sorte de violon à archet ; instrument peul.

[138]Gangang-o, tam-tam monté sur calebasse.

[139]Ouér’a, flûte.

[140]L’âne à Salaga atteint quelquefois le prix de 90 à 120000 cauries, le captif de 120 à 150000, mais son prix normal est de 40 à 45000.

[141]Le battage et le repassage se font à l’aide d’un tabouret et de deux petits maillets en bois, bien connus des Wolof, qui nomment le tabouret tabarka, et les maillets dom i tabarka (enfants du tabouret).

[142]Ces deux chefs sont morts de maladie ; quelques-uns disent empoisonnés.


TABLE DES GRAVURES


Pages.
La Gironde à Dakar 5
Le chaland pendant la tornade 7
Mouça Diawara et Diawé 11
Passage du Niger 13
Saba, ntaba, ban 15
Types de cases bambara 17
Arrivée de Kali Sidibé à Ouolosébougou 21
Les trois villages de Ouolosébougou 24
Marché de Ouolosébougou 25
Mutilation de trois voleurs 37
La bonne aventure dans la case d’un kéniélala 41
Le départ de Ouolosébougou 45
Vue de Bammako 47
Écroulement d’un pont sur la Koba 49
Vue de Ténetou 53
Plan de Ténetou 55
Carte de l’emplacement probable de l’ancien Mali 57
Morts et mourants sur les bords du Baoulé 61
Dans la ruine de Toula 67
Vue de Bassa 76
Rencontre de deux griots 77
Une rue de Kouroula 79
Ustensiles employés à Kouroula 80
Plan de Natinian 83
Fragment de l’enceinte de Natinian 83
Arrivée près de l’almamy 85
Karamokho présentant le bœuf 91
Un diassa 93
Le tata de Sikasso 95
Carte des environs de Sikasso 97
Intérieur du camp de l’almamy Samory 101
Un tabala et ses deux porteurs 105
Mokho missi kou 107
Types de Bambara et de Foula devant leurs cases 113
Passage de la rivière sur le faîte des arbres 115
Singes dans les ruines 117
Le piroguier mis en joue par le domestique 119
Sterculia cola ou Sterculia acuminata 143
Femmes de Samory et leur surveillant 157
Vue de Bénokhobougoula 161
Deux femmes du village apportent deux grandes calebasses de fonio 164
Dans les grandes herbes aux abords de Kouloussa 167
Ruines de Kouloussa 168
Les cultures de Tiong-i 169
Tiong-i 171
Bivouac de nuit 181
Dibi, type de cheminée des environs de Tengréla 183
Basoma fait danser les petits enfants 185
Vieillard buvant du dolo 195
Croquis des trois villages de Fourou 200
Un carrefour de Fourou 201
Figures dans l’intérieur des cases et lit 205
Un arbre fétiche 213
Toumané 217
Toumané enlevant des captifs 220
Un enterrement chez les Siène-ré 223
Le casque de Katon 225
Vue de Diounanténé 229
Ruines de l’ancien Niélé 241
Obligés d’éteindre le feu des herbes 243
Un togoda 247
Parkia biglobosa 249
Niélé 255
Plan de Ngélé ou Niélé 256
Hauts fourneaux et forgerons 261
A Léra 265
Plan de Léra ou Déra 267
Indigènes buvant le dolo au marche de Wangolédougou 271
Ali me présente à Iamory 273
Femmes et enfants veillant sur les arbres néré 275
Mosquée de Lokhognilé 277
Une vue à Lokhognilé 279
Finsan (Blighia sapida). 1. Rameau florifère. — 2. Coupe du fruit. — 3. Graine avec l’arille noire 285
Arrivée à Kong 289
Croquis à vue de la ville de Kong 294
Une vue de Kong 295
Une mosquée de Kong 299
Écoliers chantant une prière dans la cour d’une maison 301
Costumes et types de Kong 305
Plantation de kola 315
Fac-similé du sauf-conduit délivré par les gens de Kong 331
Grandes cases des Komono 337
La famille royale de Niambouanbo 339
Campement d’une caravane dans la brousse 345
Intérieur d’un village de Dokhosié 349
Arrivée d’El-Hadj Moussa et types de Dokhosié 351
Plans de deux habitations du rez-de-chaussée et du premier étage 359
Habitations et magasins de mil des Tiéfo 360
Aspect des hauteurs à parois verticales du plateau de Dasoulami et de Bobo-Dioulasou 361
Des hommes sur les toits s’opposent à l’entrée du capitaine à Dioulasou 367
Croquis de Sia ou Bobo-Dioulasou 369
L’heureux loustic 371
Barre de sel 376
Promenade des dou 379
Croquis de Kotédougou 381
Habitations des Foulbé de Kotédougou 383
Des femmes m’offrent de l’eau et du dolo 397
Un marchand mossi 399
Hommes et femmes bobofing 401
Sur les toits des habitations bobofing 405
Croquis de Bondoukoï 408
Je fus en un clin d’œil entouré par 200 hommes armés 413
La mosquée de Ouahabou 417
Les assistants rendant leurs devoirs à Karamokho Mouktar 419
Sur les bords de la Volta Noire 431
A la recherche des ânes 437
La mosquée de Bouganiéna 443
Soins de propreté 445
Façon de saluer le naba 451
Boukary et son escorte 453
La bénédiction 457
Résidence de Waghadougou 461
Réception chez le naba de Waghadougou 463
Retour des cavaliers ramenant des captifs 471
Les trois femmes que m’envoie Boukary 475
Boukary regarde ce qui se passe à Waghadougou 477
Races de chevaux 485
Anes 491
Types et costumes de Mossi 493

TABLE DES CHAPITRES


Chapitre I. — But et objet de la mission. — Préparatifs de départ. — Séjour à Saint-Louis. — Formation du convoi à Bakel et à Kayes. — Lettres de recommandation du colonel Gallieni. — Rencontre d’anciens serviteurs. — Séjour à Bammako. — Passage du Niger. — En route pour les États de Samory. — Arrivée à Ouolosébougou. — Entrevue avec Kali. — Misère des habitants. — Le marché de Ouolosébougou. — Difficulté de se renseigner. — Quelques mots sur les dioula et les marchands. — Passage d’un convoi de ravitaillement. — Mutilation de voleurs. — Du diala ou caïlcédra. — Dispositions malveillantes des gens de Samory. — Le kéniélala. — Nouvelle entrevue avec Kali. — Retour à Bammako. — Arrivée du courrier de Samory. — Retour à Ouolosébougou. — En route pour Ténetou. — L’arbre à beurre. — Visite à El-Hadj Mahmadou Lamine. — Le marché. — Les voyages d’El-Hadj. — Renseignements sur Mali. — Un peu d’histoire. — El-Hadj me donne deux lettres de recommandation. — Arrivée sur les bords du Baoulé. — Deuxième lettre de Samory. — Départ pour Sikasso 1
Chapitre II. — Départ pour Sikasso, les ruines et les chemins encombrés de cadavres. — Passage du Banifing. — Ruines de Sékana. — Rencontre d’un convoi de ravitaillement. — Le Ménako. — Arrivée sur les bords du Bagoé. — Une lettre de Samory. — Kourila et les Siène-ré ou Sénoufo. — Industrie et mœurs des Siène-ré. — Siège de Natinian. — Arrivée au camp de Samory. — De la façon de voyager des Soudanais. — Portrait de Samory et son entourage. — Musulmans peu scrupuleux. — Familiarité de Samory et de son fils. — Le camp de Samory. — Les palanquements et le blocus. — Garnison des diassa ou palanquements. — Effectifs et personnel non combattant. — Du ravitaillement en vivres, en poudre. — Vente d’esclaves. — Organisation des troupes. — Dénominations et grades. — Des insignes de commandement, des sonneries et des batteries, des pavillons et emblèmes. — Le Mokho missi kou. — Les cris de guerre. — Pourparlers avec Samory. — Sotte vanité de Samory. — Situation des armées belligérantes. — Autographe de Karamokho. — Samory essaye de me garder devant Sikasso. — Sottes réflexions de Karamokho. — Je réussis à quitter le camp. — Route de retour sur Tiola-Saniéna et passage de la rivière de Tiékorobougou. — Arrivée à Komina. — Sur les bords du Bagoé. — Nous nous emparons par ruse d’une pirogue. — Arrivée sur les bords du Baniégué et entrée à Bénokhobougoula 65
Chapitre III. — Limites, superficie, population, système orographique et hydrographique, productions, description des diverses régions qui constituent le domaine de Samory. — I. Région entre Niger et Milo. — II. Régions situées au nord du Ouassoulou. — III. Région située à l’ouest du Ouassoulou. — IV. Le Ouassoulou, grande route commerciale qui le traverse. — V. Provinces au sud du Ouassoulou ; un peu d’histoire. — VI. Provinces situées à l’est du Ouassoulou. — Ganadougou. — Provinces siène-ré ou sénoufo. — Le groupe sud Folou, Kabadougou, etc. — Itinéraires et région entre le Ganadougou et le Ségou. — VII. Provinces placées sous le protectorat de Samory — Le Toukoro, le Gankouna, le Toma. — Demba, mon esclave toma libéré, sa passion pour la viande de chien. — Le Ouorodougou et sa division territoriale. — Les chemins qui mènent au marché à kolas. — Quelques mots sur les Lô et le commerce du kola. — Le courtage dans cette région. — Difficulté de pénétrer dans cette région. — Histoire de Samory. — Version de la cour. — Ma version. — Les débuts de la fortune de l’almamy. — Résumé succinct de ses conquêtes par ordre chronologique. — De la façon dont son pays est administré. — L’esclavage est florissant chez lui. — Son pays est à peu près ruiné. — Causes de la dépopulation. — Pourquoi il y a lieu de protéger les confédérations et de supprimer les grands États nègres 121
Chapitre IV. — Séjour à Bénokhobougoula. — Cadeau à Samory et à ses femmes. — Le harem de l’almamy. — Le Baniégué. — Du tabac. — Nouvelles de la colonne : difficultés à se ravitailler. — Je me décide à quitter Bénokhobougoula. — Lettre à Samory. — Départ sans guide. — Égaré dans une ruine. — Arrivée sur les bords du Banifing. — Ouarakana et Caillié ; traces d’éléphants. — Tiong-i. — Départ pour Tengréla. — Accueil peu encourageant à Tintchinémé. — Conversation avec un Mossi. — Des poisons. — Menaces du chef de Tengréla. — Pourquoi l’on me nomme Diara. — Retraite de nuit sur Gongoro. — Position difficile de Tiong-i. — Population de Tiong-i. — Chasse aux iguanes. — Les Haoussa. — On cultive le safran indien. — Retour d’un courrier envoyé à Bammako. — Mort de ma mule. — Pourparlers avec Fourou. — Nouvelles de la colonne. — Industrie de Tiong-i. — Départ pour Fourou. — Le dolo, superstition de mon hôte. — Comment les noirs appliquent les préceptes et maximes. — Arrivée sur les bords du Bagoé. — Des termites comestibles. — Fourou, description de la ville, de ses fortifications. — Le culte des morts. — Les Soubakha. — Industrie. — Défiance de quelques habitants. — Le marché. — Nouveaux comestibles. — Histoire de Fourou. — Les habitants cachent leurs richesses. — Concours de beauté. — Du Peul et de l’élevage. — Le bois sacré. — Famine chez Samory. — Excursions aux environs. — Je réussis à me faire conduire chez Pégué, chef de Niélé (Follona) 155
Chapitre V. — Départ de Fourou. — Les frontières de Samory. — Enterrement siène-ré. — Dioumanténé. — En route pour Niélé. — Un incident de route. — Tiéba et son histoire. — Ses États. — Ngokho. — Un peu d’histoire ancienne. — Itinéraires. — Les ruines du vieux Niélé. — Le baobab. — Je tombe malade. — Séjour au Togoda. — Vêtements et mœurs des Siène-ré. — Cadeaux à Pégué. — Pégué et les sorciers. — Histoire du Follona de Pégué. — Niélé et son marché. — Départ pour le pays de Kong. — Oumalokho. — Un musulman qui m’attendait. — Arrivée à Léra. — Les Mbouin(g). — Arrivée chez Iamory. — Lokhognilé. — Les Karaboro. — Les Dokhosié. — Le Comoé. — Arrivée chez Dakhaba. — En vue de Kong 219
Chapitre VI. — Avantages et inconvénients des déguisements pour l’explorateur. — Entrée à Kong. — Réception des autorités. — Curiosité de la population. — Je suis obligé de parler en public pour dissiper les craintes que mon arrivée avait éveillées. — Bienveillance des Ouattara. — Discours des chefs. — Description de la ville. — Division administrative et répartition du pouvoir. — Mosquées. — Population. — Esprit tolérant des musulmans. — Le commerce à Kong. — Mœurs, divertissements, costumes masculins et féminins. — La numération des Mandé de Kong. — Crédit, valeur de l’or, de l’argent et des cauries. — Le kola me rend de grands services ; ses propriétés. — Limites de culture du kola. — Bénéfices que réalisent les marchands. — Du sel. — Des différents objets de commerce. — Lieux d’importation et d’exportation. — Le marché. — Achat d’un cheval et articles d’Europe que j’ai vendus. — Objets d’Europe qu’on m’a demandés. — Desiderata de Kong. — Superstition. — Avenir commercial de Kong. — Histoire de Kong. — Tableau généalogique de la famille régnante. — Rôle de l’imam. — Dispositions pour le départ. — Choix d’une route et d’un itinéraire vers le Mossi. — Comment je me procurai des informations géographiques. — Fac-similé et texte du sauf-conduit délivré par les autorités de Kong. — Départ et composition de la mission 287
Chapitre VII. — Départ de Kong. — Flore des Komono. — Troisième traversée du Comoé. — Séjour dans la capitale des Komono. — Départ d’un courrier pour la France. — Comment les noirs de Kong connaissent le général Faidherbe. — En route pour le pays des Dokhosié. — Coutumes des Komono. — Arrivée chez les Dokhosié. — Hostilité de Sidardougou. — Accueil d’El-Hadj Moussa. — Arrivée à Dissiné. — Quelques mots sur les Dokhosié. — Arrivée chez les Tiéfo. — Vie accidentée des marchands. — Ascension de la montagne de Dioulasou. — Superstition des habitants. — Le vin de palme et les cultures. — Arrivée à Dasoulami. — Entrée à Bobo-Dioulasou. — Description de la ville. — Le marché. — Commerce sur la route. — Importance commerciale de Dioulasou. — Statistique. — Difficulté de voyager. — Arrivée à Kotédougou. — Désordre géologique. — Les dou. — Apparition des Foulbé. — Choix d’une route vers le Mossi. — Renseignements sur Djenné. — Peuplades de cette région. — Les Dafing. — Prospérité des Mandé ; décadence de l’élément peul. — Quelques mots sur les Foulbé ; leur origine 335
Chapitre VIII. — Second sauf-conduit. — Arrivée chez Sélélou. — Les Bobo-Dioula. — Quelques observations sur la phonétique. — Satéré. — Un jeu bien innocent. — Des Bobo en général et de leurs diverses fractions. — Habitations de transition. — Ils étaient troglodytes il n’y a pas bien longtemps. — Arrivée à Bossola. — Chasse à courre et pêche. — Départ pour Bondoukoï. — Rencontre du premier mulet. — Foulbé. — Un ami gênant. — Les collines du Niéniégué. — Caravanes. — Quelques mots sur Wouidi. — Arrivée à Yaho. — Difficultés avec les guides. — Bangassi. — Traces de terrains aurifères. — Arrivée à Ouahabou. — La mosquée. — Audience chez Karamokho Mouktar. — Choix d’une route vers le Mossi. — Réflexions sur les Dafing. — Industrie de la soie. — Des teintures. — Quelques mots sur les Niéniégué et les Bobo-Oulé. — Je renvoie un domestique. — Départ pour Boromo (colonie mossi). — Passage de la Volta Noire, chasse au caïman et à l’antilope. — Entrée dans le Gourounsi. — Habitations bizarres. — Départ de Diabéré, nous nous égarons pendant la nuit. — Arrivée à Ladio. — On me vole trois ânes. — Poursuites et vaines recherches sur les frontières du Kipirsi. — Nos soupçons se portent sur un malheureux que mes hommes veulent exécuter. — Départ de Ladio dans de pénibles conditions. — On ne nous attaque pas, mais la population est partout sur pied. — J’exécute un indigène. — Arrivée à Dallou. — Colonies mossi. — Bouganiéna. — Arrivée chez Boukary Naba. — Quelques mots sur la partie du Gourounsi que je viens de traverser ; sur les Nonouma et leurs mœurs. — Soins de propreté bizarres aux enfants. — Le dolo fait avec le kountan (prunier sauvage). — Les Somono. — Les Kipirsi 395
Chapitre IX. — Chez Boukary Naba. — Manque d’interprètes. — Curieuses coutumes de la cour du Mossi. — Préparatifs pour une fête. — On attend l’apparition du croissant. — La fête à Sakhaboutenga. — On me confie à Isaka. — En route pour Waghadougou. — Séjour dans la capitale du Mossi. — Une audience chez Naba Sanom. — Difficultés avec Naba Sanom. — On me signifie de partir. — Retour chez Boukary Naba. — Nouvel accueil bienveillant. — Une rafle d’esclaves. — Boukary Naba veut me faire épouser trois jeunes femmes. — Mariage de mes hommes. — Retour à Bouganiéna. — Difficultés pour trouver des guides. — Géographie et état politique du Mossi. — Quelques itinéraires. — Flore et faune. — Chevaux. — Médication vétérinaire. — Anes. — Notes ethnographiques. — Costumes, richesse, état social. — Aliments. — Étoffes en usage dans le Mossi. — Guerres de Gandiari et des Songhay dans le Gourounsi. — Quelques mots sur le Yatenga 449

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