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Histoire de la Monarchie de Juillet (Volume 5 / 7)

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1: Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 4.

2: Mémoires de M. Guizot, t. VII, p. 9.

3: «Nous sommes condamnés, écrivait M. de Barante, le 24 juillet 1841, à n'avoir que des avantages sans éclat, sans contentement pour notre amour-propre.» (Documents inédits.)

4: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 129.

5: Discours du 22 janvier 1844.

6: Cette lettre est citée dans la notice de M. Guizot sur M. de Barante. C'est le même état d'esprit qui faisait écrire plus tard à M. Doudan, avec son humour habituel: «Ce que nous avons toujours souhaité, c'est d'être bien nourris, bien vêtus, bien couchés et couchés de bonne heure, et de marcher en même temps pieds nus et sans pain à la conquête de l'Europe. C'est un problème que ni César ni Bonaparte n'auraient pu résoudre apparemment.» (X. Doudan, Mélanges et Lettres, t. III, p. 265.)

7: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

8: Chronique politique de la Revue des Deux Mondes, 1er octobre 1841.

9: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

10: Lettre du 11 décembre 1841. (Lutèce, p. 209.)

11: «À aucune époque, disait cette protestation, la presse n'a montré plus de respect pour l'ordre légal; à aucune époque, elle n'a été l'objet d'une persécution plus acharnée... Il nous sera permis de signaler un résultat qui s'élève aux proportions d'un malheur public... L'arrêt de la cour des pairs ne se borne pas à frapper un écrivain politique, il pèse sur la liberté même de discussion... et l'arbitraire n'avait jamais été introduit aussi formellement dans la discussion... La presse ne peut accepter cette situation; elle résistera.» Les journaux signataires étaient: pour les radicaux, le National, le Journal du peuple, la Revue indépendante, la Revue du progrès et le Charivari; pour les légitimistes, la Gazette de France, la Quotidienne, la France, la Mode et l'Écho français; pour la gauche dynastique, le Courrier français, le Siècle, le Temps, le Commerce, la Patrie et le Corsaire.

12: Le Garnier-Pagès qui fut membre du gouvernement provisoire en 1848 était le frère cadet de celui qui mourut en 1841. Il dut toute sa notoriété au souvenir de son frère aîné, mais était loin d'avoir sa valeur. Dans la séance du 24 février 1848, quand on proclama à la tribune les noms des membres du gouvernement provisoire, le nom de Garnier-Pagès souleva des protestations, et une voix s'écria dans la foule: «Il est mort, le bon!»

13: C'est M. Ledru-Rollin qui dira à M. Léon de Malleville, au moment de l'émeute de juin 1849: «Je suis leur chef, il faut bien que je les suive.» M. Doudan ne pensait-il pas à lui quand il écrivait: «Un chef de parti dans le radicalisme est un homme qui fait ce qui plaît aux autres, et qui le fait avec le geste du commandement.»

14: On lit dans le Journal intime du baron de Viel-Castel, à la date du 5 décembre 1841: «Jamais l'impopularité proverbiale de M. Guizot n'a été plus grande qu'aujourd'hui.» (Documents inédits.)

15: Henri Heine écrivait, le 11 décembre 1841: «Personne ne veut se voir rappeler les dangers du lendemain, dont l'idée lui gâterait la douce jouissance du présent. C'est pourquoi tout le monde est mécontent de l'homme dont la parole sévère réveille, parfois peut-être à contretemps, lorsque nous sommes assis justement au plus joyeux banquet, la pensée des périls imminents suspendus sur nos têtes. Ils en veulent tous au maître d'école Guizot. Même la plupart des soi-disant conservateurs sentent de l'éloignement pour lui, et, frappés de cécité comme ils sont, ils s'imaginent pouvoir remplacer Guizot par un homme dont le visage serein et le langage avenant sont bien moins de nature à les tourmenter et à les terrifier. Ô fous conservateurs, qui n'êtes capables de rien conserver, hors votre propre folie, vous devriez conserver Guizot comme la prunelle de vos yeux...» (Lutèce, p. 209.)

16: Documents inédits.—Quelques semaines auparavant, le même observateur s'exprimait ainsi, dans une lettre adressée à un de ses parents: «Je ne sais comment sera la prochaine session. À en juger par ce que je vois de l'opinion, il y a peu ou point de bienveillance pour le ministère, mais on n'a de confiance ni de propension pour aucun autre.»

17: L'examen des archives n'avait fait relever, de 1831 à 1842, que dix-sept réclamations du commerce français contre l'usage fait du droit de visite: cinq ou six avaient obtenu satisfaction; les autres avaient été écartées comme sans fondement ou délaissées par les réclamants eux-mêmes.

18: Le prince de Metternich disait avec raison, à propos du droit de visite: «Le vice de ce mode d'action, c'est qu'il n'est praticable qu'entre, je ne dis pas seulement des gouvernements, mais des pays vivant dans la plus grande intimité, étrangers à toute susceptibilité, à toute méfiance réciproque, et animés du même sentiment, au point de passer l'éponge sur des abus.» (Cité par M. Guizot dans son étude sur Robert Peel.)

19: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

20: M. Léon Faucher, qui était cependant ami de l'Angleterre, écrivait à M. Reeve, le 14 août 1841: «Je suis effrayé des progrès que fait chez nous la haine de l'Angleterre.» Et, le 24 août, il écrivait encore à un autre Anglais, en parlant de lord Palmerston: «Croyez-moi, cet écervelé a fait plus de mal à l'Europe que des années de guerre. Il a rendu le nom anglais suspect et odieux à la France. Il a éveillé ici des passions que nous avions combattues pendant quinze ans.» (Biographie et Correspondance, t. I, p. 110 et 113.)

21: M. Guizot devait le reconnaître un an plus tard, et il dira, à la tribune, le 23 janvier 1843: «C'est le traité du 15 juillet 1840 qui a donné tout à coup aux traités de 1831 et de 1833 le caractère qu'ils ont maintenant. C'est le traité du 15 juillet qui a créé le sentiment public qui existe aujourd'hui et dont on ne s'était pas douté pendant dix ans.»

22: Telle est l'affirmation très nette de M. Duvergier de Hauranne. (Notes inédites.)

23: La princesse de Lieven était née en 1784.

24: Dans les premiers mois de 1842, on disait couramment à Londres que si lord Palmerston avait été encore au pouvoir, on n'aurait pas échappé à la guerre avec la France. (The Greville Memoirs, second part, vol. II, p. 82.)

25: Dès 1813, lord Aberdeen avait joué l'un des premiers rôles diplomatiques dans la coalition contre la France. Tel était ce passé, que M. Greville se croyait fondé à écrire, le 13 janvier 1842: «Toutes les prédilections de lord Aberdeen sont antifrançaises, et il n'oublie jamais ses anciennes attaches avec les Alliés.» (The Greville Memoirs, second part, vol. II, p. 74.)

26: «Nous sommes destinés à nous revoir souvent, disait lord Aberdeen au chargé d'affaires de France: croyez tout ce que je vous affirmerai, jusqu'au moment où je vous aurai trompé en quoi que ce soit; dès lors, ne me croyez plus du tout.»

27: Pour la négociation qui va suivre, je me suis principalement servi des documents cités par M. Guizot dans ses Mémoires, t. VI, p. 157 et suiv.

28: Bulwer, Life of Palmerston, t. III, p. 87.

29: Lettre au comte Apponyi, 4 mars 1842. (Mémoires de Metternich, t. VI, p. 613.)

30: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

31: Discussion du 28 février, des 12 et 20 mai 1842, à la Chambre des députés; du 11 avril et du 18 mai, à la Chambre des pairs.

32: Le 11 avril 1842, à la Chambre des pairs, M. Guizot insistait sur ce qu'il avait déclaré à l'Angleterre «ne prendre aucun engagement, ni direct ni indirect, de ratifier purement et simplement le traité à aucune époque quelconque». Le 17 mai, dans la même assemblée, après avoir rappelé que «la ratification actuelle avait été positivement refusée», il ajoutait: «Maintenant on a dit, non pas dans cette enceinte, mais ailleurs: C'est la présence des Chambres qui a empêché; qui empêche encore la ratification du traité; quand les Chambres seront éloignées, le traité sera ratifié. Messieurs, je serais tenté de prendre ces paroles pour une injure à mon bon sens... Ce n'est point votre présence matérielle, c'est votre opinion, c'est votre sentiment, c'est votre vœu connu qui influe sur le gouvernement et qui influera tout aussi bien après votre départ qu'aujourd'hui.» Le 20 mai, à la Chambre des députés, le ministre reconnaissait qu'il s'agissait non seulement de modifier la convention de 1841, mais de revenir sur le principe du droit de visite: «Ne croyez pas, disait-il, quand le débat s'est élevé, quand j'ai vu devant moi l'opinion des Chambres et du pays, que j'aie méconnu sa gravité: j'ai bien vu qu'il y avait là autre chose encore que le traité de 1841; que les conventions de 1831 et de 1833 allaient aussi être mises en question.» Toutefois, il veillait à ne pas se laisser entraîner trop loin; il disait dans le même discours: «On m'a demandé: Avez-vous l'intention de ratifier le traité tel qu'il est? J'ai répondu catégoriquement: Non, et je renouvelle ma réponse. Maintenant on me dit: Ratifierez-vous jamais un traité quelconque, quelle que soit la situation, quelles que soient les modifications qu'on pourrait y apporter? Comment voulez-vous que je réponde? C'est absolument impossible... Il y a là une multitude d'éléments que le temps peut féconder, dont le temps peut faire sortir quelque chose de raisonnable, quelque chose d'utile et d'honorable pour le pays, et en même temps quelque chose de favorable à l'abolition, à la répression de la traite. Voilà ce que nous voulons, ce que nous pouvons attendre, ce qu'il est de notre devoir d'attendre.»

33: Discours du 11 avril 1842, à la Chambre des pairs.

34: Peu après, dans une lettre à M. de Flahault, alors notre ambassadeur à Vienne, M. Guizot expliquait ainsi sa conduite: «Nous nous sommes montrés, pendant dix ans, bien patients et faciles; mais, en 1840, la passion de l'Empereur a évidemment pénétré dans sa politique. L'ardeur avec laquelle il s'est appliqué à brouiller la France avec l'Angleterre nous a fait voir ses sentiments et ses procédés personnels sous un jour plus sérieux. Nous avons dû dès lors en tenir grand compte. À ne pas ressentir ce qui pouvait avoir de tels résultats, il y eût eu peu de dignité et quelque duperie. Une occasion s'est présentée: je l'ai saisie. Nous n'avons point agi par humeur, ni pour commencer un ridicule échange de petites taquineries. Nous avons voulu prendre une position qui depuis longtemps eût été fort naturelle et que les événements récents rendaient parfaitement convenable.»

35: M. Guizot a raconté cet incident diplomatique en détail dans la Revue des Deux Mondes du 1er janvier 1861.

36: Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 558, 577 et 578, 582 à 586.

37: Ibid.

38: Voy. ce que j'ai dit plus haut, t. IV, ch. IV, § X.—Ces sentiments devaient persister, et, en 1853, M. de Moustier, ministre de France à Berlin, écrivait: «Je ne puis m'ôter de l'esprit que le roi Frédéric-Guillaume ne soit un des souverains de l'Europe qui aiment le moins la France.» (Cité dans les Souvenirs diplomatiques de M. Rothan.)

39: Lettre adressée à M. de Bunsen, au début de la guerre de Crimée.

40: Cf. les études de M. Saint-René Taillandier sur le baron de Stockmar et sur M. de Bunsen.

41: Notice sur lord Aberdeen, par le comte de Jarnac.

42: Correspondance de M. de Jarnac avec M. Guizot pendant le mois de juillet et le commencement d'août 1842. (Ibid.)

43: Séance du 10 août 1842 à la Chambre des communes.

44: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 369, 370.

45: Cf. plus haut, t. IV, ch. I, § III.

46: Cf. plus haut, t. IV, ch. II, § VI.—J'ai exposé en cet endroit les arguments invoqués pour et contre cette réforme.

47: Documents inédits.

48: X. Doudan, Mélanges et Lettres, t. III, p. 94.

49: Déjà, en 1836, à propos du chemin de fer de Versailles, M. Arago avait combattu l'idée de creuser un tunnel à Saint-Cloud; il déclarait qu'il faudrait au moins cinq ou six ans pour le mener à terme, et que les voyageurs qui se risqueraient dans ce dangereux passage en sortiraient avec des fluxions de poitrine.

50: M. Martin du Nord, ministre des travaux publics, s'exprima ainsi: «Ce serait par un refus pur et simple que vous répondriez à nos propositions, à nos efforts?... Prenez-y garde! Songez à votre responsabilité, après ce qui s'est passé dans la dernière session. Tout le monde dit: il faut des chemins de fer...»

51: Voici la progression des longueurs exploitées: au 31 décembre 1830, 37 kilomètres; 1836, 147 kilomètres; 1837, 166 kilomètres; 1838, 181 kilomètres; 1839, 246 kilomètres; 1840, 433 kilomètres; 1841, 571 kilomètres. Quarante ans plus tard, il y avait plus de 24,000 kilomètres en exploitation.

52: En effet, à cette date,—fin de 1841,—la France n'avait que 877 kilomètres décidés, dont 541 exploités. Les États-Unis avaient 15,000 kilomètres décidés, dont 5,800 exploités; l'Angleterre, 3,617 kilomètres décidés, dont 2,521 exploités; la Belgique, 621 kilomètres décidés, dont 378 exploités; la Prusse et l'Allemagne, 2,811 kilomètres décidés, dont 627 exploités; l'Autriche, 877 kilomètres décidés, dont 747 exploités.

53: Voy. plus haut, t. IV, ch. V, § XII.

54: Il était stipulé que l'État devait se faire rembourser les deux tiers de cette dépense d'acquisition par les départements et par les communes intéressés. Mais cette disposition souleva dans la pratique tant de réclamations, qu'on dut l'abroger en 1845.

55: M. Duvergier de Hauranne, qui faisait partie de la commission des chemins de fer, disait plaisamment, à propos des travaux de cette commission: «Pendant les cinquante ou soixante séances que M. de Lamartine présida, il ne lui arriva pas une seule fois de comprendre que deux et deux font quatre.» (Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.)

56: Lettre du 15 mai 1842. (Léon Faucher, Biographie et Correspondance, t. I, p. 119.)

57: C'est ainsi que la qualifiait alors M. Rossi, dans la Chronique politique de la Revue des Deux Mondes, 15 juin 1842.

58: Chronique politique de la Revue des Deux Mondes, 15 juin et 1er juillet 1842.—M. Léon Faucher, dans une lettre à M. Grote, en date du 15 mai 1842, se plaignait de l'énervement général. «La passion politique n'existe plus», disait-il. (Léon Faucher, Biographie et Correspondance, t. I, p. 120.)

59: «Un mois avant l'élection, écrivait peu après M. Duvergier de Hauranne, nous étions bien convaincus que le ministère obtiendrait une grande majorité.» (Notes inédites.)

60: Documents inédits.

61: Documents inédits.

62: Lettres de M. Guizot à sa famille et à ses amis, p. 222.

63: Cette pieuse préoccupation devait persister. L'année suivante, la Reine eut à ce sujet des relations avec le Père de Ravignan, lui demanda et reçut de lui de hautes consolations. (Cf. la Vie du Père de Ravignan, par le Père de Pontlevoy, t. Ier, p. 243 à 248.)

64: Pour le récit qui va suivre, je me suis servi du charmant et touchant volume publié, peu après la mort de la princesse, sous ce titre: Madame la duchesse d'Orléans.

65: «Oui, écrivait la duchesse d'Orléans cinq mois plus tard, le Seigneur qui nous frappe est un père miséricordieux: j'en ai la conviction inébranlable, lors même que je n'éprouve pas ses douceurs et ses consolations. Je suis au milieu de l'épreuve qui exige une foi aveugle; par instants, je la sens bien forte, et alors l'amour et l'espérance me sont accordés comme un rayon d'en haut; mais, parfois aussi, je sens toute la misère de la nature, et il m'est impossible de m'élever vers Dieu. Que de patience Dieu doit avoir avec nous! comment n'en aurions-nous pas pour supporter le fardeau qu'il nous impose!» (Madame la duchesse d'Orléans, p. 99.)

66: Lettres de M. Guizot à sa famille et à ses amis, p. 222.

67: La reine des Belges appelait ainsi son frère du nom qu'elle était habituée à lui donner avant 1830, quand Louis-Philippe était duc d'Orléans et que son fils aîné portait le titre de duc de Chartres.

68: Cette lettre, adressée à la reine Victoria, est citée par sir Théodore Martin, dans sa Vie du prince consort.

69: Lettres des 15, 19 et 29 juillet 1842. (Lutèce, p. 262 à 275.)

70: Lettre du 28 août 1842. (Documents inédits.)

71: Les dernières campagnes du général Changarnier en Afrique, par le comte d'Antioche. (Correspondant du 25 janvier 1888.)

72: Ibid.

73: Lettres du maréchal de Saint-Arnaud.

74: Lutèce, p. 22.

75: Cf. plus haut, t. III, chap. II, § V.

76: Quelques mois avant la mort du prince, M. Quinet avait été invité à une soirée de musique chez la duchesse d'Orléans. Poète et érudit, peu connu de la foule, il n'était jusqu'alors descendu sur la place publique que pour pousser le cri de la guerre, pour demander, en 1840, comme en 1830, la revanche de Waterloo et la conquête des frontières du Rhin. Par sympathie et par calcul, le duc d'Orléans voulut se montrer fort aimable pour l'auteur de la brochure intitulée: 1815 et 1840. Voici comment M. Quinet a rapporté sur le moment, dans une lettre à sa mère, les paroles que lui adressa le prince: «Vous avez foi en la France. J'ai été frappé du profond sentiment national qui vit dans tout ce que vous avez écrit. Mais les cosmopolites nous perdent. Ils émoussent, ils énervent tout. Malheureusement le pays leur prête souvent la main... Vous avez bien raison, la grande question pour nous, c'est celle des frontières, c'est le besoin de se relever. Au lieu de tant parler des victoires de l'Empire, je voudrais que l'on instituât des fêtes funèbres, commémoratives de Waterloo, pour obliger le pays à s'en souvenir et à tout réparer. Au lieu de cela, on parle, on perd le sentiment de l'action... Tout le monde veut jouir. Personne ne veut faire crédit à la patrie. Si je me suis occupé de l'armée, ce n'est pas que je veuille jouer au soldat; je crois être au-dessus de cela. Mais c'est que je pense que là encore se trouve la tradition de l'honneur du pays. Il ne faut pas tomber; il ne faut pas ruiner, comme Samson, nos ennemis, en périssant nous-mêmes. Il faut les détruire et vivre. Quand nous serions acculés à Bayonne, il faut être décidé à reprendre tout le reste. Pendant que les autres amollissent tout, vous êtes le clairon. Ne désespérons pas.» (Correspondance d'Edgar Quinet, t. II, p. 371.)

77: Voir, par exemple, dans le fragment du testament que nous reproduisons plus bas, la recommandation faite par le duc d'Orléans à son fils, de rester fidèle à la «révolution».

78: Causant, au lendemain de la catastrophe, avec M. de Flahault, ambassadeur de France à Vienne, M. de Metternich lui disait: «C'était une grande tâche pour votre roi que de former son successeur. Il y avait mis tous ses soins, et je sais que, depuis un an surtout, il était parfaitement content du résultat qu'il avait obtenu; il éprouvait une grande tranquillité et une extrême satisfaction, en voyant que son fils était entré dans ses idées et qu'il pourrait s'endormir sans trouble, certain que le système d'ordre et de paix qu'il a établi ne serait point abandonné après lui.» M. Guizot, de son côté, a constaté que le prince se montrait «capable de s'arrêter sur sa pente, d'apprécier la juste mesure des choses, la vraie valeur des hommes, et d'apporter dans le gouvernement plus de sagacité froide et de prudence que son attitude et son langage ne l'auraient fait conjecturer». Le ministre a même ajouté ce témoignage plus précis: «Depuis 1840, le prince avait fait dans ce sens de notables progrès, et, quoiqu'il ménageât avec soin l'opposition, son appui sérieux en même temps que réservé ne manqua point au cabinet.»

79: Il s'agit d'une lettre par laquelle le duc d'Orléans raconte au général Damrémont comment il a obtenu du Roi et ensuite généreusement sacrifié à son frère l'honneur de prendre part à la seconde expédition de Constantine. J'ai cité, dans la seconde édition du tome III, ch. X, § XIII, d'autres fragments de cette admirable lettre. On en peut trouver le texte complet dans L'Algérie de 1830 à 1840, par M. Camille Rousset, t. II, p. 230 et suiv.

80: En 1837, époque où le duc d'Orléans écrivait ces lignes, le jeune duc d'Aumale, âgé de quinze ans, venait d'obtenir un prix au concours général.

81: Sur ces pressentiments, voir ce qu'en écrivait Henri Heine en 1840 et en 1842. (Lutèce, p. 21 et 269.) Voir aussi un petit incident du voyage que le duc d'Orléans avait fait, quelques jours avant sa mort, pour conduire la duchesse à Plombières. (Madame la duchesse d'Orléans, p. 83.)

82: Je fais ici allusion à ce passage, souvent cité, du testament du duc d'Orléans, testament écrit en 1839, au moment de partir pour l'expédition des Portes de Fer, en Algérie: «C'est une grande et difficile tâche que de préparer le comte de Paris à la destinée qui l'attend; car personne ne peut savoir dès à présent ce que sera cet enfant, lorsqu'il s'agira de reconstruire sur de nouvelles bases une société qui ne repose que sur les débris mutilés et mal assortis de ses organisations précédentes. Mais, que le comte de Paris soit un de ces instruments brisés avant qu'ils aient servi, ou qu'il devienne l'un des ouvriers de cette régénération sociale qu'on n'entrevoit qu'à travers de grands obstacles et peut-être des flots de sang; qu'il soit roi ou qu'il demeure défenseur inconnu et obscur d'une cause à laquelle nous appartenons tous, il faut qu'il soit avant tout un homme de son temps et de sa nation, qu'il soit catholique et défenseur passionné, exclusif, de la France et de la révolution.»

83: Lettre au journal El Heraldo du 24 juillet 1842. (Œuvres de Donozo Cortès, t. I.)

84: Lettre à son frère, en date du 18 juillet 1842. (Bulwer, Life of Palmerston, t. III, p. 96.)

85: Lettre au comte Apponyi, en date du 18 juillet 1842. (Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 616.)

86: Rapport sur la loi de régence, présenté à la Chambre des pairs, le 17 août 1842.

87: M. Guizot écrivait, le 14 juillet 1842: «La bonne conduite est indispensable, et tout le monde le sent.»

88: On lit, à ce propos, dans une lettre de M. de Metternich au comte Apponyi, en date du 12 août 1842: «M. de Flahault m'a lu une lettre particulière de M. Guizot en réponse à ce que j'avais appris au premier sur la manière dont l'affreux événement du 13 juillet a été accueilli à Kirchberg. (C'était l'endroit où résidait alors la famille de Charles X.) Veuillez dire à M. Guizot et, si vous en trouvez l'occasion, également au Roi, que je ferai connaître là-bas l'impression que Sa Majesté a reçue de la communication. M. de Flahault mandera probablement, par le courrier de ce jour, que M. le duc de Bordeaux, qui a appris la nouvelle peu après son arrivée à Tœplitz, a fait dire le lendemain une messe à la paroisse de cette ville, à laquelle il a assisté avec tout ce qui compose sa suite. Il n'y a rien mis qui ressemblât à de l'ostentation, et toute la ville lui en a su gré.» (Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 619.)

89: Constitutionnel du 19 juillet 1842.

90: 16 juillet 1842.

91: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

92: Rapport fait à la Chambre des pairs.

93: Ainsi fit-elle avec M. Dupin, la première fois qu'elle le vit après la catastrophe. (Mémoires de M. Dupin, t. IV, p. 178.) Quelques jours plus tard, lorsque M. de Lamartine soutint, à la Chambre, la thèse de la régence féminine, elle en fut fort mécontente. «Il n'a pas parlé pour moi, dit-elle, il a parlé contre le gouvernement du Roi.» (Madame la duchesse d'Orléans, p. 135.)

94: «Au début, écrit M. Duvergier de Hauranne, nous étions tous, presque tous du moins, pour la régence de madame la duchesse d'Orléans.» (Notes inédites.)

95: Henri Heine écrivait, dès le 19 juillet 1842: «Le duc de Nemours jouit-il en effet de la très haute disgrâce du peuple souverain, comme on le soutient avec un zèle excessif? Je n'en veux pas juger. Encore moins suis-je tenté d'approfondir les raisons de sa disgrâce. L'air distingué, élégant, réservé et patricien du prince est peut-être le principal grief contre lui.» (Lutèce, p. 266.)

96: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

97: Mémoires de M. Guizot, t. VII, p. 14.

98: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

99: Louis-Philippe écrivit à M. Guizot: «Nous avons lu ce matin, en famille, votre admirable discours d'hier; les larmes ont coulé à l'exorde, et tous m'ont bien demandé de vous dire combien nous étions touchés.» (Mémoires de M. Guizot, t. VII, p. 36.)

100: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

101: Ibid.

102: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

103: Ibid.

104: Mémoires de M. Guizot, t. VII, p. 35.

105: M. de Viel-Castel, en sortant de la Chambre, écrivait sur son journal intime: «La séance d'aujourd'hui est certainement la plus dramatique qu'il y ait eu depuis longtemps.» (Documents inédits.)

106: Cf. les lettres de M. de Metternich au comte Apponyi, en date des 18 juillet, 13 et 26 août 1842. (Mémoires, t. VI, p. 617 à 621.)

107: Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 621, 622.

108: M. de Viel-Castel écrivait sur son journal intime, le soir même du discours de M. Thiers: «Ce discours, l'attitude nouvelle que M. Thiers vient de prendre, l'accueil que lui a fait la majorité, les chances qui en résultent pour lui et dont beaucoup de personnes s'exagèrent l'imminence, tel est, ce soir, l'objet de toutes les conversations. Les ministres font d'ailleurs bonne contenance et se donnent pour fort satisfaits. Leurs amis les plus intimes disent avec affectation que M. Thiers n'a pas au fond rompu avec la gauche; que ce n'est qu'une querelle d'amants, qu'il faudrait être bien sot pour s'y laisser prendre.» (Documents inédits.)

109: Documents inédits.

110: De la Hodde, Histoire des sociétés secrètes et du parti républicain, de 1830 à 1848, p. 313 à 319.

111: Chronique de la Revue des Deux Mondes du 1er janvier 1843.

112: Documents inédits.

113: Cité par M. Guizot dans sa Notice sur M. de Barante.

114: Quelquefois le ministère n'avait qu'à panser des amours-propres blessés par ses adversaires. Parmi les députés sur lesquels comptait l'opposition et qui passèrent alors au gouvernement, il en était un, beau parleur de province, qui, à son premier discours, eut si peu de succès qu'on n'entendit bientôt plus que le bourdonnement des conversations. Étonné, point déconcerté, notre député rencontre M. Thiers en descendant de la tribune et lui demande: «Eh bien, que dites-vous de mon début?»—À cette question, M. Thiers se gratte la tête, essuie ses lunettes, et, après quelques moments d'hésitation: «Vous auriez tort de vous décourager, lui dit-il, votre voix est excellente.»—«J'en dis autant à mes chiens de chasse», riposte brusquement le député. De ce jour, le ministère n'eut pas d'ami plus fidèle.

115: Cette citation et celles qui suivront sans indication spéciale d'origine sont empruntées aux Mémoires de M. Guizot.

116: M. Guizot avait tout de suite réclamé les bons offices de M. de Metternich. Celui-ci était alors en disposition favorable au ministère français. «De tous les ministres depuis 1830, écrivait-il au comte Apponyi, et je n'ai aucune difficulté à étendre mon jugement également à ceux de la Restauration, aucun n'a possédé les qualités de M. Guizot.» (Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 621.)

117: Lettre à M. de Jarnac du 8 novembre 1842. (Documents inédits.)

118: 29 septembre et 6 octobre 1842.

119: Lettre du 16 août 1842, adressée au comte de Jarnac et citée par ce dernier dans sa Notice sur lord Aberdeen.

120: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 281 à 284.

121: Lettre confidentielle du 4 décembre 1842. (Documents inédits.)

122: Lettre du comte Bresson à M. Guizot, du 19 décembre 1842. (Documents inédits.)

123: D'après M. Guizot (Mémoires, t. VI, p. 293 et 294), M. de Metternich aurait témoigné ne pas attacher d'importance à cette affaire. Telle avait pu être son attitude au début, parce qu'alors il croyait à l'insuccès de la négociation. Mais aussitôt que celle-ci lui parut avoir chance d'aboutir, il prit position très nettement, ainsi qu'il résulte des documents publiés dans les Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 623 à 627.

124: Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 623 à 627.—M. de Metternich, avec le sentiment souvent un peu exagéré qu'il avait de son importance, se flatta même plus tard d'avoir, par cette intervention, empêché l'union douanière. Il écrivit, le 2 janvier 1843, au comte Voyna, à Saint-Pétersbourg: «Je me reconnais quelque mérite relativement au genre d'action que j'ai regardé comme le seul qu'avec une chance d'utilité, il me serait possible d'exercer sur cet intermède. Il y a des questions qui de leur nature sont tellement malignes, qu'il n'y faut point toucher, ou les empoigner pour les étrangler de prime abord. La question en instance a dû passer par le second de ces remèdes, et je me suis décidé à l'employer immédiatement. L'événement ayant justifié l'entreprise, il ne me reste plus qu'à m'en féliciter.» (Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 627.)

125: Je me demande, disait un jour M. de Metternich à notre ambassadeur, si le roi Léopold a jamais eu bien sérieusement l'intention de conclure un pareil traité, et s'il n'est pas plus probable qu'il a mis en avant ce projet, qu'il doit savoir inexécutable, afin de n'arriver à rien, tout en paraissant disposé à tout faire pour plaire au roi son beau-père, à la nation française, au parti français en Belgique et au sentiment national qui cherche un débouché pour l'excédent des produits belges.» (Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 294.)

126: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 294.

127: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 285 à 293.

128: Journal des Débats du 3 décembre 1842.

129: Discours du 11 mai 1846, à la Chambre des pairs.

130: M. de Metternich, comme on l'a vu plus haut, s'imaginait volontiers que son intervention avait été la raison décisive de l'abandon du projet d'union douanière, et affectait de croire que le motif tiré du mécontentement des industriels français n'était qu'une feinte de M. Guizot. (Mémoires, t. VI, p. 628.) Le chancelier d'Autriche exagérait son rôle. La dépêche dans laquelle il avait notifié son sentiment au gouvernement français était du 8 décembre 1842. Le 11 novembre, M. Désages écrivait à M. de Jarnac: «Les journaux ont déjà parlé d'une circulaire de lord Aberdeen relative au projet d'union franco-belge... Comme ici, il y a ajournement obligé à raison de l'état d'esprit de nos industriels, je ne pense pas que cette bombe, chargée par lord Aberdeen, éclate pour le moment.» (Documents inédits.)

131: Documents inédits.

132: Ce sentiment se manifestait déjà en juillet 1841. M. Thiers écrivait alors à M. Buloz: «Je vous dirai qu'avec un goût tous les jours plus vif pour la grande politique, j'en ai toujours un moindre pour la petite, et j'appelle petite politique celle qu'on fait chaque jour pour la circonstance. Ce pain quotidien dont on vit à Paris m'inspire un dégoût presque insurmontable. Je suis fort partisan de nos institutions, car je n'en sais pas d'autres possibles, mais elles organisent le gouvernement en un vrai bavardage. L'opposition ne parle que pour embarrasser le gouvernement cette semaine, et le gouvernement n'agit que pour parer à ce que l'on dira la semaine prochaine... C'est pour moi un vrai sacrifice que de rentrer dans ce présent si étroit et si agité... Je suis heureux où je suis, en faisant ce que je fais.» M. Thiers venait de Hollande et allait en Allemagne pour étudier les champs de bataille de Napoléon. (Notice sur M. Buloz, par M. de Mazade, Revue des Deux Mondes du 1er juin 1877.)

133: M. Léon Faucher écrivait à un de ses amis, le 15 novembre 1842: «Notre politique est toujours à l'état de langueur; Thiers se préoccupe de son Histoire de l'Empire...» Il ajoutait, dans une autre lettre du 22 mars 1843: «Thiers reste à Paris tout l'été, dans l'espoir d'achever son histoire cette année: il est à peu près perdu pour la politique jusque-là...» (Léon Faucher, Biographie et Correspondance, t. I, p. 135 et 140.) Les trois premiers volumes de l'ouvrage de M. Thiers devaient être publiés au commencement de 1845.

134: Cf. liv. II, ch. X, § II.

135: Lamartine écrivait à un ami, le 1er octobre 1835: «Il se fait, depuis mon voyage et mon incursion dans l'histoire, un grand travail de renouvellement en moi... Je deviens de jour en jour plus intimement et plus consciencieusement révolutionnaire.»

136: «Il est mobile et sincère, disait madame de Girardin. La seconde page de ses lettres dément la première et n'en est pas moins pour cela l'expression d'un sentiment vrai, je veux dire qu'il l'éprouve véritablement au moment où il l'exprime. Seulement on peut dire de lui (M. de Humboldt faisait le même reproche à l'abbé de Lamennais) qu'il change trop souvent d'idée fixe.»—M. Sainte-Beuve a écrit dans ses Notes et pensées: «Lamartine est, sur tous les points, convaincu chaque jour de contradiction et d'incohérence. Il parle à Marseille pour le libre-échange, et on lui rappelle qu'il a précédemment prêché la doctrine contraire. Un jour, causant chez madame Récamier de l'impôt sur le sel, il dit toutes sortes de raisons en faveur de cet impôt: «Je suis charmé, dit M. de Chateaubriand, de vous entendre soutenir ces choses, car on m'avait dit que vous parleriez contre.—Ah! c'est vrai, répliqua Lamartine, ils sont venus me trouver, et j'ai promis d'appuyer l'abolition de l'impôt; mais je suis convaincu qu'au fond il est moins onéreux qu'utile.»—Ainsi de tout.»

137: M. de Lamartine disait à M. Sainte-Beuve: «Avez-vous jamais lu de l'économie politique?» et sans attendre sa réponse: «Avez-vous jamais mis le nez dans ce grimoire? Rien n'est plus facile, rien n'est plus amusant.» (Portraits contemporains, nouvelle édition, t. I, p. 381.)

138: C'est M. de Lamartine lui-même qui s'exprime en ces termes, dans sa critique de l'Histoire des Girondins. Il disait, un jour, à M. Duvergier de Hauranne: «Et vous aussi, vous croyez que la poésie est ma vocation. Sachez que, pour moi, la poésie est une simple distraction à laquelle je n'attache aucune importance. Le matin, avant déjeuner, je fais des vers que j'écris au crayon sur quelques morceaux de papier. Puis, sans y songer davantage, je jette tous ces morceaux de papier dans un sac où madame de Lamartine va les chercher pour les classer à son gré. Ma véritable vocation, c'est la politique, ce sont les affaires, ce sont les chiffres.» M. de Lamartine, à qui les années ne coûtaient rien, ajoutait qu'il avait pâli dix ans sur la question du libre-échange, dix ans sur la question des prisons, dix ans sur la question du budget, etc., etc. (Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.)

139: Expression de M. Émile Ollivier, dans l'éloquent discours qu'il avait préparé pour sa réception à l'Académie française. (Lamartine, précédé d'une préface sur les incidents qui ont empêché son éloge en séance publique de l'Académie française, par Émile Ollivier.)

140: M. de Lamartine écrivait à un ami, le 14 janvier 1836: «Avant-hier, j'ai improvisé une demi-heure admirablement, éloquemment et politiquement selon moi. Il n'y a que moi qui m'en sois aperçu.» Et le 13 janvier 1838: «J'ai beau travailler, comprendre, me former à une parole qui intérieurement me semble au niveau et fort au-dessus même de beaucoup d'autres, je ne suis pas encore entendu ni compris par la masse et je n'exerce pas l'ascendant naturel et proportionné à mon effort.»—Madame de Girardin écrivait peu après: «N'a-t-on pas abreuvé de ridicule et d'ironie l'orateur, sublime amant d'Elvire? Ne lui a-t-on pas crié comme une injure son beau titre de poète, chaque fois qu'il montait à la tribune? N'a-t-on pas traité ses plus nobles sentiments de fictions et de chimères? On lui a dit qu'il plantait des betteraves dans les nuages, que sa conversion des rentes ne valait pas sa conversion de Jocelyn, et mille autres niaiseries semblables...» (Lettres parisiennes du vicomte de Launay, t. II, p. 160.).

141: Cf. plus haut, ch. I, § IX, et ch. II, § IV.

142: M. Royer-Collard disait un jour, en décembre 1841: «On n'est jamais sûr que, lorsqu'on vient d'entendre de M. de Lamartine un magnifique discours à la tribune, si on le rencontre dans les couloirs de la Chambre et qu'on le félicite, il ne vous réponde à l'oreille: «Cela n'est pas étonnant, voyez-vous, car, entre nous, je suis le Père éternel!» (Cahiers de M. Sainte-Beuve, p. 15.)

143: M. de Lamartine a écrit, dans un de ses Entretiens de littérature: «Les révolutions de 1814 et de 1815 auxquelles j'assistai, la guerre, la diplomatie, la politique auxquelles je me consacrai, m'apparurent, comme les passions de l'adolescence m'étaient apparues, par leur côté littéraire... Tout devint littéraire à mes yeux, même ma propre vie. L'existence était un poème pour moi.»

144: Cité par M. de Mazade, dans son intéressante étude sur M. de Lamartine. (Revue des Deux Mondes, 1er août et 15 octobre 1870.)

145: Dans ce discours, M. de Lamartine opposait, avec complaisance, aux temps calmes où chacun est classé, suit sa voie, les temps d'orage, «ces drames désordonnés et sanglants qui se remuent à la chute ou à la régénération des empires, dans ces sublimes et affreux interrègnes de la raison et du droit». Alors «le même homme, soulevé par l'instabilité du flot populaire, aborde tour à tour les situations les plus diverses, les emplois les plus opposés... Il faut des harangues pour la place publique, des plans pour le conseil, des hymnes pour le triomphe... On cherche un homme; son mérite le désigne... On lui impose au hasard les fardeaux les plus disproportionnés à ses forces... L'esprit de cet homme s'élargit, ses talents s'élèvent, ses facultés se multiplient; chaque fardeau lui crée une force, chaque emploi, un mérite.»

146: M. de Lamartine a rapporté plus tard cette conversation, dans ses Entretiens de littérature. Le langage prêté à Talleyrand est peu conforme à ses habitudes d'esprit, mais il montre au moins ce que M. de Lamartine désirait entendre.

147: Lettre du 10 décembre 1834.

148: Lettre du 12 avril 1838.

149: La correspondance de M. de Lamartine est remplie des épanchements de l'admiration qu'il ressent pour sa propre éloquence. Il l'exprime avec une sorte de candeur et aussi peu de gêne que s'il s'agissait d'un autre: «J'ai eu un grandissime succès (juin 1836).—Tu n'as pas l'idée de l'effet de ma dernière séance à la tribune (mars 1837).—Depuis les beaux discours de la Restauration, il n'y a pas eu d'effet de tribune si merveilleux (25 avril 1838).—Je viens d'avoir un tel succès que je n'en ai jamais vu de semblable depuis 1830 (1839).»

150: Lettres du 27 décembre 1834 et du 25 avril 1838.

151: Lettre du 10 octobre 1841.

152: Chronique politique de la Revue des Deux Mondes, 15 septembre 1842.

153: Lettres du 5 novembre 1841 et du 23 novembre 1842.

154: «Guizot, Molé, Thiers, Passy, Dufaure, cinq manières de dire le même mot. Ils m'ennuient sous toutes les désinences. Que le diable les conjugue comme il voudra!» (Lettre du 5 octobre 1842.)

155: Chronique politique de la Revue des Deux Mondes du 1er avril 1843.

156: Chroniques parisiennes de M. Sainte-Beuve, p. 17.

157: Lettre du 6 février 1841.

158: Notes et pensées de M. Sainte-Beuve, t. XI des Causeries du lundi, p. 462.

159: Discours du 9 janvier 1837.

160: Lettre du 1er octobre 1858, adressée à M. W. R. Greg, esq. (Œuvres et correspondance inédites d'Alexis de Tocqueville, t. II, p. 456.)

161: C'est encore ce que M. de Tocqueville exprimait ainsi, dans la lettre déjà citée: «Ce terrain de la politique étrangère est essentiellement mobile, il se prête à toutes sortes de manœuvres parlementaires; on y rencontre sans cesse de grandes questions capables de passionner la nation, et à propos desquelles les hommes politiques peuvent se séparer, se rapprocher, se combattre, s'unir, suivant que l'intérêt ou la passion du moment les y porte.»

162: Discours du 21 janvier 1843.

163: Cf. plus haut, § I.

164: 1er février 1843.

165: Vers cette époque, le 13 mars 1843, M. Désages écrivait au comte de Jarnac: «L'anglophobie existe encore à un degré vraiment incroyable dans une foule de têtes qui, à cette infirmité près, sont d'ailleurs assez saines.» (Documents inédits.)

166: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

167: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

168: Lettre de la duchesse de Dino à M. de Barante. (Documents inédits.)

169: Le Journal des Débats disait, le 20 février 1843: «Nous demandons et nous avons le droit de demander une discussion franche et complète, et, si nous ne l'obtenions pas, si le cabinet était renversé clandestinement par des adversaires honteux d'eux-mêmes et de leurs rôles, le ministère qui viendrait à la place est baptisé d'avance; il ne pourrait s'appeler que le ministère de l'intrigue.» Il ajoutait, le lendemain: «Nous n'aimons pas, on le sait, les coalitions; mais nous aimons encore moins, s'il est possible, l'intrigue honteuse, qui n'ose s'avouer elle-même... Que voyons-nous?... Une conjuration de muets, apostés auprès du pouvoir, et qui s'apprêtent à le saisir, si, après le combat auquel ils sont décidés à ne prendre aucune part, leur appoint mystérieux et furtif donne la majorité à l'opposition... Il faut donc que le pays, la Chambre et le ministère le sachent bien: une comédie d'ambition se prépare. Méfions-nous des personnages muets qui veulent y jouer un rôle.»

170: Dans un discours fort mordant, l'un des amis du cabinet, M. Desmousseaux de Givré, avait interpellé M. Dufaure et M. Passy: «Quand on a vécu sous le même toit pendant trois ans, avait-il dit, il n'est pas permis de déménager la nuit, sans dire adieu à ses hôtes.»

171: Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 82.

172: X. Doudan, Mélanges et Lettres, t. III, p. 112.

173: Lettre à M. de Jarnac, du 6 mars 1843. (Documents inédits.)

174: En 1842, il n'y avait eu que 8 voix de majorité: 198 contre 190. En 1843, il y en eut 26: 207 contre 181. Il est à remarquer que le chiffre total des votants était le même dans les deux cas.

175: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

176: Février 1843.

177: 17 février 1843.

178: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 187.

179: Ibid., p. 186.

180: Lettre du comte Apponyi, en date du 5 mars 1843. (Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 677.)

181: Lettre du 13 février 1843 (ibid., p. 675).—M. de Metternich ajoutait cette réflexion: «Il n'y a pas de question dans laquelle un cabinet puisse se trouver plus singulièrement placé que le nôtre dans celle-ci. Nous avons combattu les propositions anglaises, pendant plus de vingt ans. De guerre lasse, et restés seuls de notre bord, nous avons fini par céder à l'invitation pressante des deux puissances maritimes, et cela pour nous trouver engagés dans un système que nous avions combattu avec les raisons,—fort bonnes d'ailleurs,—que nous devons récuser aujourd'hui, parce qu'elles sont incomplètement soutenues par l'une des puissances originairement contractantes! Tout bien considéré, il me paraît prouvé que certaines idées philanthropiques ne nous conviennent pas.»

182: Lettres du 13 avril et du 13 juin 1843. (Notice sur lord Aberdeen, par le comte de Jarnac.)

183: Même notice.

184: Mémoires de M. Guizot, t. VII, p. 309, et t. VIII, p. 108.

185: Voy. ce qui a été déjà dit des affaires d'Espagne, liv. II, ch. XIV, § V; liv. III, ch. II, §§ IV et VI; ch. III, § III, et ch. VI, § I.

186: Le maréchal Soult écrivait au duc d'Orléans, le 15 octobre 1839: «En Espagne, tout marche à notre satisfaction, et le mérite des événements qui s'y sont passés depuis deux mois appartient incontestablement à la sagesse des conseils et des manifestations qui, avec l'approbation de Sa Majesté, ont eu lieu de notre part pour imprimer une impulsion nouvelle aux opérations.» (Documents inédits.)

187: Lettre adressée à M. de Sainte-Aulaire, mais destinée en réalité à lord Aberdeen. (Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 305 et suiv.)

188: Documents inédits.

189: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 298, 299. Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 590, 591.

190: Dépêche du 5 janvier 1842.

191: Rappelons ici ce passage, déjà cité par nous, d'une lettre écrite, le 25 octobre 1833, par le duc de Broglie à lord Brougham: «Nous eussions fort préféré que don Carlos eût succédé naturellement à son frère, selon la loi de 1713. Cela était infiniment plus dans l'intérêt de la France. La succession féminine, qui menace de nous donner un jour pour voisin je ne sais qui, nous est au fond défavorable.» (Documents inédits.)

192: En commençant dans ses Mémoires le récit des négociations relatives à ce mariage, M. Guizot l'appelle «l'événement le plus considérable de son ministère». (T. VIII, p. 101.)

193: Dès le 1er novembre 1836, lord Palmerston, dont la méfiance jalouse était si facilement en éveil, écrivait à son frère: «Louis-Philippe est aussi ambitieux que Louis XIV et veut mettre un de ses fils sur le trône d'Espagne, comme mari de la jeune reine.» (Bulwer, Life of Palmerston, t. III, p. 24.)

194: Des écrivains anglais ont prétendu que Louis-Philippe avait commencé par désirer marier la Reine à un de ses fils. Cette assertion ne peut un moment se soutenir, en face des preuves données par M. Guizot. (Mémoires, t. VIII, p. 107, 108.)

195: Lettre du 9 août 1843. (Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 107.)

196: La maison de Saxe-Cobourg-Gotha, cette maison «si rapidement ascendante», comme a dit M. Guizot, se divisait en plusieurs branches. Le duc régnant, Ernest Ier, avait deux fils: Ernest, qui devait lui succéder, et Albert, l'époux de la reine Victoria. Le frère cadet d'Ernest Ier, Ferdinand, avait quatre enfants: Ferdinand, mari de la reine de Portugal; Auguste, qui devait épouser la princesse Clémentine d'Orléans; Léopold, le prétendant à la main d'Isabelle, et une fille mariée au duc de Nemours. Un autre frère d'Ernest Ier était Léopold, le roi de Belgique. Enfin ces trois frères avaient eu deux sœurs, l'une mariée en Russie, l'autre, Victoria, duchesse de Kent, et mère de la reine Victoria.

197: Un peu plus tard, M. de Sainte-Aulaire, qui avait vainement cherché à faire expliquer le roi Léopold sur cette question, résumait ainsi son impression: «Le roi Léopold ne veut pas mécontenter notre roi; il s'emploiera toujours en bon esprit entre nous et l'Angleterre. Mais, après tout, il est beaucoup plus Cobourg que Bourbon, et il fera pour son neveu tout ce qu'il jugera possible.» (Dépêche de M. de Sainte-Aulaire, en date du 14 juillet 1843. Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 132.)

198: Par un calcul facile à comprendre, le baron de Stockmar, dans ses Mémoires, et sir Théodore Martin, dans sa Vie du prince consort, ont cherché à diminuer ou à supprimer complètement la responsabilité du gouvernement et de la cour d'Angleterre dans cette candidature du prince de Cobourg. Je ne leur opposerai pas les renseignements contraires recueillis alors par la diplomatie française. Je me bornerai aux aveux mêmes du baron de Stockmar, tels qu'on les trouve dans ses Mémoires. Le confident du prince Albert, examinant, à la date du 14 mai 1842, la question du mariage espagnol, et parlant évidemment pour le prince autant que pour lui, commençait par dire que «les Bourbons offraient prise à beaucoup d'objections». Puis il ajoutait ces paroles significatives: «Notre candidat est plus acceptable.» Non qu'il fût sûr des aptitudes personnelles du jeune Léopold: «Mais, ajoutait-il, en de telles circonstances, c'est faire assez, c'est même tout faire que de permettre au destin de le trouver, si le destin, dans sa capricieuse envie de réaliser des choses invraisemblables, persistait à le chercher en dépit de tous les empêchements et de tous les obstacles. C'est ce qui a eu lieu, autant du moins que la chose était en notre pouvoir. Nous avons dirigé sur ce candidat l'attention de l'Espagne et de l'Angleterre avec la prudence que conseillait un examen attentif de toutes les convenances.» Puis, après avoir parlé des dispositions d'Espartero, il terminait ainsi: «Nous avons déjà obtenu que notre ministère, d'abord favorable à un Bourbon, parce qu'un Bourbon susciterait le moins de difficultés extérieures, devienne tout à fait impartial et soutienne loyalement tout choix conforme aux vrais intérêts de l'Espagne. Ainsi la semence est déjà confiée à la terre, à une terre, il est vrai, où, selon toute vraisemblance, elle ne lèvera pas. Qu'importe? Notre part du travail est accomplie, la seule part qui fût possible, la seule que conseillât la raison; nous n'avons plus qu'à attendre le résultat.»

199: Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 130.

200: Dans l'écrit du 14 mai 1842, déjà cité plus haut, le baron de Stockmar, après avoir rapporté comment le prince Albert et lui avaient «dirigé» sur leur candidat «l'attention de l'Espagne», ajoutait: «Espartero ne s'est déclaré ni pour ni contre; il a dit très sagement qu'une telle affaire ne pouvait être décidée que par le gouvernement espagnol, en vue des véritables intérêts de la nation espagnole, sous le patronage et avec l'assentiment de l'Angleterre

201: Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 110 à 118.

202: Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 598, 620, 658, 682 à 702. Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 118 à 122.

203: Lettres du duc de Glücksberg, chargé d'affaires de France, à M. Désages, en date du 18 mars et du 5 avril 1843. (Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 131.)

204: Dépêche de M. Guizot à M. de Sainte-Aulaire. (Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 134 à 138.)

205: Lettre du 15 février 1843. (Documents inédits.)

206: Dès septembre 1842, l'un des hommes politiques du parti radical, M. Olozaga, de passage à Paris, disait à M. Guizot: «L'influence anglaise est fort diminuée; elle pèse à tout le monde.» (Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 124.)—Peu d'années après, le duc de Broglie, rappelant, à la tribune de la Chambre des pairs, la chute d'Espartero, s'exprimait ainsi: «C'est la nation espagnole elle-même qui s'est chargée de renverser le parti antifrançais, le parti soi-disant national; c'est la rupture de ce parti, de son chef avec la France, qui a préparé et précipité sa ruine.» (Discours du 19 janvier 1847.)

207: The Greville Memoirs, second part, t. II, p. 50.—Bulwer, Life of Palmerston, t. III, p. 179.—Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 684.

208: Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 141.

209: Cette idée d'un accord avec la France sur les affaires espagnoles s'était, du reste, déjà manifestée dans l'entourage de lord Aberdeen. En mars 1842, lord Wellington avait dit à un envoyé de M. Guizot: «Ils ont détruit, dans ce pays-là, tous les vieux moyens de gouvernement, et ils ne les ont remplacés par aucun autre; il faudrait que les deux grandes puissances, l'Angleterre et la France, se concertassent pour la pacification de l'Espagne.» (Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 117.)

210: Ibid., p. 143.

211: Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 144.

212: Dépêche à M. de Jarnac, chargé d'affaires à Londres, citée par M. Guizot, à la tribune de la Chambre des pairs, dans son discours du 20 janvier 1847.

213: À Eu, lord Aberdeen dit à M. Guizot: «La Reine n'ira point à Paris; elle veut être venue pour voir le Roi et la famille royale, non pour s'amuser.» (Mémoires du M. Guizot, t. VI, p. 193.)

214: Rappelons que la duchesse de Kent, mère de la Reine, et le prince Albert, son mari, étaient des Cobourg. D'autre part, trois enfants de Louis-Philippe, les princesses Louise et Clémentine et le duc de Nemours, avaient épousé des Cobourg.

215: The Greville Memoirs, second part, t. II, p. 196, 197.

216: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 188, 189.

217: Les extraits de ce journal, auquel je ferai plusieurs autres emprunts, ont été publiés par sir Théodore Martin, dans son ouvrage The Life of H. R. H. the Prince Consort. M. Craven a donné une traduction abrégée de cet ouvrage, sous ce titre: Le Prince Albert, extraits de l'ouvrage de sir Théodore Martin.

218: À propos des acclamations des populations, M. Guizot faisait, dans une lettre écrite le lendemain, les réflexions suivantes: «Ce pays-ci n'aime pas les Anglais. Il est normand et maritime. Dans nos guerres avec l'Angleterre, le Tréport a été brûlé deux ou trois fois et pillé je ne sais combien de fois. Mais on a dit, on a répété: La reine d'Angleterre fait une politesse à notre roi; il faut être bien poli avec elle. Cette idée s'est emparée du peuple et a surmonté souvenirs, passions, tentations, partis. Ils ont crié et ils crieront: Vive la Reine! et ils applaudissent le God save the Queen de tout leur cœur. Il ne faudrait seulement pas le leur demander trop longtemps.» (Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 191.)

219: À propos de la visite faite à la chapelle du château, la Reine écrit sur son journal: «C'est la première chapelle catholique que j'aie vue.»

220: Pour l'exposé des conversations politiques qui ont eu lieu à Eu, pendant la visite de la reine d'Angleterre, je me suis principalement attaché au témoignage de l'un des interlocuteurs, aux Mémoires de M. Guizot (t. VI, p. 191 et suiv., et t. VIII, p. 144). Les citations qui seront faites sans indication de source spéciale sont empruntées à ces Mémoires.

221: Les historiens anglais ont naturellement cherché à établir que leur gouvernement ne s'était nullement engagé à repousser la candidature du prince de Cobourg. Telle est notamment la thèse de M. Bulwer (Life of Palmerston) et de sir Théodore Martin (Life of H. R. H. the Prince Consort). Le baron de Stockmar présente les faits de même dans ses Mémoires.

222: M. Guizot, revenant sur ces événements, le 20 janvier 1847, à la tribune de la Chambre des pairs, a raconté ainsi, sans être contredit par lord Aberdeen, ce qui s'était passé à Eu, en 1843, au sujet du mariage espagnol: «Cette question devint, entre lord Aberdeen et moi, l'objet de plusieurs conversations: il fut convenu, non pas que lord Aberdeen accepterait et proclamerait notre principe sur les descendants de Philippe V qui seuls nous convenaient pour le trône d'Espagne, mais qu'en fait, en pratique, les conseils de l'Angleterre seraient donnés dans ce sens, que tout autre candidat serait découragé, par voie d'influence seulement, mais qu'il le serait.» Et l'orateur citait, à l'appui de son récit, la dépêche par laquelle, le 21 septembre 1843, il mandait à M. de Flahault, son ambassadeur à Vienne, le résultat des conversations qui venaient d'avoir lieu, quelques semaines auparavant: «...Lord Aberdeen accepte les descendants de Philippe V comme les seuls candidats convenables au trône de la reine Isabelle. Il ne proclamera pas le principe hautement et absolument comme nous. Il l'adopte en fait, et se conduira en conséquence. Aucune exclusion n'est formellement prononcée. Nous n'excluons pas formellement les Cobourg. L'Angleterre n'exclut pas formellement les fils du Roi. Mais il est entendu que nous ne voulons ni l'une ni l'autre de ces combinaisons, que nous ne poursuivions ni l'une ni l'autre, que nous travaillerons, au contraire, à empêcher que l'une ou l'autre soit proposée par l'Espagne, et que si l'une des deux propositions était faite, l'autre reprendrait à l'instant sa liberté... Cela convenu, lord Aberdeen s'engage à appuyer, de concert avec nous, celui des descendants de Philippe V qui aura en Espagne le plus de chance de succès, sous ces deux réserves, qui sont parfaitement notre avis aussi à nous: 1o que l'indépendance de l'Espagne et de la Reine sera respectée; 2o que l'Angleterre ne prendra aucune initiative et se bornera à marcher avec nous, en appuyant de son influence notre résolution commune.»

223: Notre assertion n'est nullement contredite par ce fait que lord Aberdeen a affirmé plus tard avoir «toujours protesté contre la prétention d'imposer comme mari à la Reine et à son peuple un prince pris expressément dans telle ou telle famille». (Lettre à M. Guizot, du 14 septembre 1846, publiée dans la Revue rétrospective.) C'était là la réserve de principe. Mais dans cette même lettre, lord Aberdeen se faisait honneur de n'avoir jamais rien fait pour la candidature Cobourg, d'en avoir, au contraire, détourné la Reine et le prince Albert, d'avoir désavoué ceux de ses agents qui s'étaient laissé compromettre dans ce sens, et d'avoir exprimé l'avis que le mariage avec un Bourbon était le plus convenable. Voilà l'exécution de l'engagement de fait.

224: C'est ainsi seulement qu'on peut expliquer comment le prince Albert écrivait, le 10 septembre 1843, en revenant d'Eu, à son confident, le baron de Stockmar: «Il ne s'est rien passé de politique, excepté la déclaration de Louis-Philippe à Aberdeen qu'il ne donnerait pas son fils à l'Espagne, même si on le lui demandait, et la réponse d'Aberdeen qu'excepté un de ses fils, tout aspirant que l'Espagne choisirait serait accepté par l'Angleterre.» (Le Prince Albert, t. I, p. 98.)—Évidemment, si le mari de la reine Victoria avait été tenu au courant des longues conversations échangées entre les deux ministres anglais et français, il n'eût pu écrire qu'il «ne s'était rien passé de politique», et il n'eût pas tout réduit à un abandon de la candidature française sans aucune contre-partie. Il est donc probable que lord Aberdeen, qui n'aimait pas à contredire et à contrister les gens, n'avait pas été empressé de faire savoir au prince consort à quel point il avait sacrifié, en fait, les chances matrimoniales de son cousin.

225: Ce propos si significatif était rapporté, quelques jours après avoir été tenu, dans la dépêche adressée par M. Guizot à M. de Flahault. (Discours précité du 20 janvier 1847.)

226: Lettre du 2 novembre 1843. (Documents inédits.)

227: Le Prince Albert, t. I, p. 96 et 97.

228: Ibid., t. I, p. 97 et 98.

229: Lettre du 10 septembre 1843. (Documents inédits.)

230: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 195, 196.

231: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 196.

232: «Les ambassadeurs du Nord ont montré de la mauvaise humeur, écrivait le prince Albert à Stockmar, ce qui est peu judicieux... L'empereur de Russie en sera impatienté, mais cela nous est égal.» (Le Prince Albert, t. I, p. 98.)

233: Lettre du 31 août 1843. (Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 196, 197.)

234: Lettre du 22 septembre 1843. (Documents inédits.)—À la même époque, la duchesse de Dino écrivait à M. de Barante: «On ne dit pas Nicolas de trop belle humeur, et ce qui se passe à Eu lui déplaît mortellement. Je pense que tous nos petits princes allemands, qui craignent de se crotter en passant le Rhin, vont peu à peu le sauter à pieds joints.» (Documents inédits.)

235: Dépêches de M. de Flahault du 11 et du 20 septembre 1843. (Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 197, 198.)

236: Lettre du 12 octobre 1843. (Mémoires de M. de Metternich, t. VI, p. 690.)

237: Lettre à M. de Barante. (Documents inédits.)

238: Documents inédits.

239: Notice de M. le comte de Jarnac sur lord Aberdeen.

240: Cité dans une lettre du comte Bresson à M. Guizot, en date du 29 septembre 1843. (Documents inédits.)

241: Hillebrand, Geschichte Frankreichs, 1830-1848, t. II, p. 583.

242: La seule consolation que M. de Metternich trouvait au spectacle de cette «monstrueuse jonction», était l'espoir qu'elle ne durerait pas. «On a pris à Paris et à Londres, écrivait-il au comte Apponyi le 26 janvier 1844, l'habitude d'une politique de sous-entendus; à Paris, c'est la finesse qui doit remplacer le fond qui manque en toutes choses; à Londres, on est franchement stupide. Or, comme la stupidité a aussi son réveil, c'est de Londres que viendront les premières causes de tension. La finesse, étant toujours éveillée, n'est pas soumise aux mêmes lois; elle va aussi longtemps que le permet la force des choses.» (Mémoires de M. de Metternich, t. VII, p. 19 et 20.)

243: Notice sur lord Aberdeen.

244: Documents inédits.

245: Ibid.—J'aurai occasion d'exposer plus tard les affaires de Grèce et de continuer le récit de celles d'Espagne. Voir plus loin dans ce même volume le ch. VII.

246: Voir plus haut, t. III, ch. III, § V.

247: Instructions envoyées à Vienne, à Dresde, à Berlin, décembre 1842 à septembre 1843. (Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 46 à 53.)

248: Cette déclaration se trouvait dans une lettre que le roi de Prusse avait fait écrire par M. de Humboldt à M. Guizot, le 23 septembre 1843, pour le rassurer sur les conditions dans lesquelles s'était accomplie la visite. (Mémoires de M. Guizot, t. VIII.)

249: Lettre du comte de Jarnac à M. Guizot, du 31 octobre 1843. (Ibid., p. 54 et suiv.)

250: Lettre de M. Guizot à M. de Jarnac, du 4 novembre 1843. (Mémoires de M. Guizot, p. 56.)

251: Ibid., p. 57 et suiv.

252: Revue rétrospective.

253: Lettre de M. de Sainte-Aulaire à M. Guizot, du 10 novembre 1843. (Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 61.)

254: Lettre du comte de Jarnac à M. Guizot, du 8 novembre 1843. (Ibid., p. 60, 61.)

255: Revenant peu après sur ces événements, notre ambassadeur à Londres, M. de Sainte-Aulaire, écrivait, le 6 février 1844, à M. de Barante: «Bien que le parti légitimiste ne rencontre aucune sympathie en Angleterre, le pays est trop aristocratique pour n'être pas un peu ébloui par beaucoup de noms historiques, et, abstraction faite de l'intention du pèlerinage, on aurait voulu fêter les pèlerins. Je crois en vérité que la Reine et le gouvernement anglais nous ont rendu un fort grand service, en entravant cette tendance. Si M. le duc de Bordeaux eût été reçu à Windsor, des ovations eussent été données à lui et à ses leudes dans toutes les demeures hospitalières de l'Angleterre. Il retournait sur le continent, tout autre personnage qu'il n'en était venu. Les invitations de toutes les cours d'Allemagne arrivaient, les ministres de France ne pouvaient tenir à leurs postes, et l'isolement nous devenait non moins coûteux qu'en 1840.» (Documents inédits.)

256: Un autre député, le marquis de Preigne, se rendit aussi à Londres: mais il déclara plus tard que son voyage avait eu pour motif des affaires personnelles, et que sa visite au prince n'avait été dictée que par un sentiment de convenance et de politesse.

257: Sur cette retraite de M. de Chateaubriand après 1832, cf. liv. II, ch. IX, § X.

258: Le comte de Marnes n'avait plus, du reste, que quelques mois à vivre. Il mourut le 3 juin 1844.

259: Journal inédit du baron de Viel-Castel, à la date du 27 novembre 1843.

260: Lettres de M. de Sainte-Aulaire, en date des 30 novembre, 1er et 8 décembre 1843, et note de lord Aberdeen, en date du 9 décembre. (Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 63 à 66.)

261: Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 62.

262: Revue rétrospective.—Le Times avait publié, pendant le séjour du duc de Bordeaux à Londres, un article tout à fait conforme aux vues du gouvernement français. L'auteur de cet article était M. Reeve, alors à Paris. Peu de jours après, comme il était présenté au Roi, celui-ci lui dit: «Je regrette, monsieur Reeve, de ne pouvoir vous exprimer plus complètement, en cette circonstance, combien je vous ai d'obligations pour le service que vous nous avez rendu.» (The Greville Memoirs, second part, vol. II, p. 216.)

263: Lettre de M. Guizot au comte de Jarnac, en date du 6 novembre 1843. (Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 58.)

264: Lettre du comte de Jarnac, en date du 8 novembre 1843. (Ibid., p. 61.)

265: Le duc de Broglie a développé cette idée, le 16 janvier 1845, à la tribune de la Chambre des pairs: «Il y a deux manières, a-t-il dit, d'être en paix avec les autres puissances. On peut être en paix, et puis aussi en bonne intelligence, en amitié, en confiance; ou bien on peut être en paix, et puis être dans un état de hauteur, de froideur, dans un état de défiance et de bravade. On peut avoir des relations pacifiques qui soient amicales, et on peut avoir des relations pacifiques qui ne soient pas amicales. Ces deux situations sont également compatibles avec la paix; il ne faut pas s'y tromper cependant: elles ne sont pas compatibles avec la paix également dans tous les cas et pour tous les pays.» L'orateur montrait par exemple qu'entre la France et la Russie «l'état de paix et un état de froideur et de méfiance pouvaient durer assez longtemps, sans inconvénients graves». Mais en pouvait-il être de même entre la France et l'Angleterre? Il montrait ces puissances à peu près limitrophes, ayant «des relations commerciales ou autres immenses, de toutes les natures, de tous les jours et de tous les instants, se rencontrant partout», en Europe et dans le reste du monde. «Croyez-vous que, dans un tel état de choses, une situation de froideur, de réserve et de mésintelligence soit longtemps compatible avec la paix? Si les deux nations se placent dans une telle situation, l'une vis-à-vis de l'autre, que, des deux tribunes, on s'envoie à tous les instants des défis; dans une telle situation que, toutes les fois que leurs marins se rencontrent quelque part, ils enfoncent leurs chapeaux et se regardent entre les deux yeux; que lorsque l'une dise blanc, l'autre dise noir; que leurs agents diplomatiques, lorsqu'ils ont à traiter des affaires ensemble, en Espagne, en Grèce, à Constantinople, partout, car ils se rencontrent partout, si l'un prend un parti, l'autre prenne nécessairement un parti opposé, je ne crois pas, pour ma part, qu'un tel état de choses puisse être durable.»

266: M. de Metternich a critiqué assez finement M. Guizot d'avoir choisi pour qualifier ses relations avec l'Angleterre «un mot exprimant un sentiment». «Il eût bien mieux fait, ajoutait le chancelier, de prendre position sur le terrain de l'intérêt réciproque qu'ont ces États de vivre en paix et dès lors en bonne harmonie... Les mots d'entente cordiale ne marquent qu'une disposition morale, et ce sont justement les dispositions qui prêtent le plus à la critique passionnée et haineuse... En exprimant un sentiment, M. Guizot a fait appel aux sentiments opposés.» (Lettre au comte Apponyi, du 29 août 1844. Mémoires de M. de Metternich, t. VII, p. 27 et 28.)

267: Cette intervention de M. Duvergier de Hauranne fut connue alors dans le monde parlementaire. M. Thiers lui-même s'amusait de ce qu'on racontait à ce sujet: «Que voulez-vous? disait-il, puisqu'il faut absolument un gouvernement personnel, j'ai choisi Duvergier.» Il écrivait à ce dernier: «Au roi de mon choix.» Des quatre anciens doctrinaires qui s'étaient séparés de M. Guizot en 1840, deux, M. Duvergier de Hauranne et M. de Rémusat, étaient restés dans l'opposition et même s'y étaient enfoncés plus avant; deux, M. Piscatory et le comte Jaubert, étaient au contraire revenus aux conservateurs: le premier avait été nommé, en juin 1843, ministre de France à Athènes; le second devait être élevé à la pairie, à la fin de 1844.

268: Quarante-huit heures avant l'ouverture de la session britannique, le collaborateur de M. Guizot, M. Désages, écrivait à notre chargé d'affaires à Londres: «Je vois avec peine que sir Robert Peel a plus peur que lord Aberdeen et même qu'il nous rend moins justice. J'espère toutefois qu'il ne fera pas à ses adversaires de concessions qui se traduiraient ici en démenti donné à la cordiale entente et nous vaudraient de nouveaux débats où nous serions conduits, à notre tour, à affaiblir la valeur de notre expression.» (Documents inédits.)

269: M. Désages mandait à M. de Jarnac, le 9 février 1844: «M. Guizot a écrit à votre chef (M. de Sainte-Aulaire, ambassadeur à Londres) que nous étions contents de lord Aberdeen, de sir Robert Peel et de lord Brougham.» (Documents inédits.)

270: Voy. t. III, ch. III, § X, et t. IV, ch. I, § XI.

271: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

272: Papiers inédits du duc de Broglie et Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

273: «La fureur que l'article excite, écrivait le Roi à M. Guizot, le 1er juillet 1844, ne m'étonne pas et ne me paraît pas un mauvais symptôme... Mais à présent que la polémique est engagée, il faut la soutenir vigoureusement. Il est clair qu'on veut faire, comme les autres fois, tomber la question, en arrêtant le débat par intimidation, et, cela étant, il faut au contraire leur montrer qu'ils ne font pas peur et qu'ils n'étoufferont pas les justes cris de ma famille et de moi-même. Je vous recommande cela bien vivement, mon cher ministre, et je vous prie de mettre les fers au feu dans ce sens-là.» (Revue rétrospective.)

274: Séance du 1er juillet 1844.

275: Circulaire aux agents diplomatiques, en date du 2 janvier 1844.

276: Lettre du 13 janvier 1844. (Documents inédits.)

277: M. Sainte-Beuve écrivait sur le moment: «M. Guizot a montré la plus véritable, la plus énergique éloquence, la force, la sobriété, quelque chose de démosthénique et d'accompli.» (Chroniques parisiennes, p. 177.)

278: Un historien démocratique, écho fidèle de l'opposition du temps, M. Elias Regnault, dit à ce sujet: «Il faut l'avouer, M. Guizot fit preuve d'une vigueur et d'une éloquence dignes du sujet et put, à bon droit, s'enorgueillir d'une éclatante victoire.» (Histoire de huit ans, t. II, p. 364.)

279: Lettre du 19 janvier 1844. (X. Doudan, Mélanges et Lettres, t. II, p. 1.)

280: M. Duvergier de Hauranne, ordinairement bien au courant de ce qui se passait dans les coulisses parlementaires, donne, dans ses Notes inédites, une explication assez étrange du silence de M. Berryer. À l'entendre, M. Guizot avait fait avertir M. Berryer qu'il avait entre les mains une lettre fort compromettante, écrite par lui en 1831 ou 1832 et saisie dans les papiers d'un conspirateur vendéen. Si M. Berryer prononçait le mot de Gand, cette lettre serait lue. C'est devant cette menace qu'il s'était arrêté. Mais alors, pourquoi la lettre n'a-t-elle pas été lue lors du second débat, quand M. Berryer s'est décidé à parler de Gand? M. Duvergier de Hauranne suppose qu'au milieu du tumulte, M. Guizot, troublé, ne pensa plus à la lettre. Ce récit paraît peu vraisemblable.

281: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne. Ce dernier dit tenir ces détails de M. Vitet, ami du ministre.

282: M. Doudan écrivait le surlendemain: «Ceux qui ont assisté à ce beau spectacle disent que rien ne ressemblait à une meute de chiens de bouchers comme l'élite de l'opposition hurlant contre M. Guizot.» (Mélanges et Lettres, t. II, p. 3.)

283: En rentrant chez lui, M. Guizot se coucha et dormit douze heures de suite. (Journal inédit du baron de Viel-Castel.)

284: Mémoires de M. Guizot, t. VIII, p. 73.

285: «La scène faite à M. Guizot, lisons-nous dans une lettre du duc de Broglie, a augmenté, auprès des connaisseurs, sa réputation d'intrépidité et de talent; mais pour le gros même de la majorité, il reste quelque chose de pénible, des imputations, des vociférations, des menaces. Le souvenir de Gand n'est bon à remuer auprès de personne, et, malgré l'éclat de la résistance, j'aurais préféré, tout compte fait, qu'au lieu de faire avaler goutte à goutte toute cette histoire à la minorité furieuse, M. Guizot se fût borné à dénoncer la scène comme une scène préparée et arrangée, et qu'il eût refusé d'y jouer un rôle.» (Documents inédits.)

286: Documents inédits.

287: Ce comité, qui venait d'être constitué sous le nom de conseil des Dix, se composait, pour la gauche, de MM. Odilon Barrot, de Beaumont, de Tocqueville, Abbatucci, Havin; pour le centre gauche, de MM. Thiers, de Rémusat, Vivien, Billault, Duvergier de Hauranne. Il se concertait, au besoin, avec les deux délégués de l'extrême gauche, MM. Garnier-Pagès et Carnot. (Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.)

288: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

289: Voy. entre autres liv. II, ch. VIII, § V.

290: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

291: Lettre du 6 février 1844. (Documents inédits.)

292: Ainsi M. Guizot dira, deux ans plus tard, le 28 mai 1846, en pleine Chambre des députés: «Nous avons beaucoup d'estime pour la plupart des hommes qui composent le parti légitimiste; nous faisons grand cas de leur position sociale, des idées et des sentiments qui les animent... C'est notre désir que l'ensemble de notre politique, l'état de notre pays, l'empire de nos institutions rallient successivement tout ce qu'il y a d'éclairé, d'honorable et de considérable dans cette portion de la société française.»

293: Un milliard de 1830 à 1848: soit 323 millions de 1830 à 1841, et, de 1841 à 1848, environ 100 millions par an.

294: Lettre du maréchal Bugeaud à M. de Corcelle, en date du 28 septembre 1845. (Documents inédits.)

295: Mémoires de M. Guizot, t. VII, p. 141.

296: Sur les événements d'Algérie de 1830 à 1839, voir tome III, ch. X.

297: C'est alors, en février 1840, qu'eut lieu la défense de Mazagran, autour de laquelle on fit tant de bruit. Le fait se réduisait à ceci: 123 zéphyrs, soldats des compagnies de discipline, occupant un ancien fortin turc en assez bon état, s'étaient vus assiéger par environ 1,500 Arabes. À l'abri de leurs remparts, ils tinrent bon pendant quatre jours, et l'ennemi, qui n'avait ni canons pour faire brèche ni échelles pour escalader les murailles, dut se retirer. La défense était honorable, mais n'avait rien d'extraordinaire. On en pouvait juger aux pertes de la garnison qui, pendant ces quatre jours, n'avait eu que trois tués et seize blessés. La guerre d'Afrique offrait maints faits d'armes bien autrement remarquables. Mais l'opinion, égarée par le rapport exagéré du commandant, le capitaine Lelièvre, par les amplifications fantastiques des journaux et aussi par l'étrange penchant des honnêtes bourgeois à exalter le soldat vicieux aux dépens des autres, s'engoua des «héros de Mazagran», qui furent comparés aux défenseurs des Thermopyles. Le gouvernement lui-même, dupe de cette mise en scène, leur prodigua les récompenses, jusqu'au jour—près de trois ans plus tard—où, mieux informé, mais ne voulant pas confesser publiquement son erreur, il se contentera de mettre silencieusement le capitaine Lelièvre à la retraite. Le commandant de Montagnac, un vrai brave, celui-là, écrira à ce propos, dans une lettre en date du 22 novembre 1842: «Notre fameux lapin de Mazagran a fini par être expulsé de l'armée, à la suite de tous ses méfaits. Il y a longtemps qu'on aurait dû lui rendre cette justice.» Beaucoup d'historiens en sont encore restés à la légende de Mazagran.

298: Cité par M. Camille Rousset, l'Algérie de 1830 à 1840, t. II, p. 389 à 391.

299: Le général de La Moricière, par M. Keller, t. I, p. 231.

300: Lettres d'un soldat, correspondance du colonel de Montagnac.

301: Ce témoin est M. Louis Veuillot, qui vint en Algérie avec le général Bugeaud, au commencement de 1841, et qui, aussitôt après, publia ses impressions de voyage, sous ce titre: Les Français en Algérie.

302: Lettres d'un soldat, correspondance du colonel de Montagnac.

303: Chiffre avoué par le gouvernement dans la séance du 14 avril 1841.

304: Camille Rousset, l'Algérie de 1830 à 1840, t. II, p. 473.

305: Lettres d'un soldat.

306: Ce tableau de la garnison de Miliana a été tracé par le général Changarnier lui-même, dans un passage que cite M. Camille Rousset.

307: Sur les antécédents algériens du général Bugeaud, voir t. III, ch. X, § X et XII.

308: J'ai déjà eu occasion de citer un fragment de ce discours, t. IV, ch. V, § IX.

309: Lettre du 17 octobre 1840. (Le maréchal Bugeaud, par le comte d'Ideville, t. II, p. 149.)

310: Cette conversation m'a été rapportée par M. le général Trochu, qui la tenait lui-même du maréchal Bugeaud. Il en avait conservé un souvenir très vif, sans pouvoir en préciser la date. Aux débuts de sa carrière, le capitaine Trochu avait été l'officier d'ordonnance et l'homme de confiance du maréchal, qui faisait de lui le plus grand cas. «Je ne connais dans l'armée aucun homme plus distingué que lui», écrivait le maréchal à M. Guizot, le 2 juillet 1846.

311: Sur ces lettres, voir t. IV, ch. V, § IX.

312: Discours du 8 avril 1839.

313: Expression du général Trochu.

314: Voir, passim, au tome Ier de l'ouvrage de M. d'Ideville sur le maréchal Bugeaud.

315: Voici le tableau de l'effectif progressif de l'armée d'Afrique:

1831   17,900 hommes.
1832   22,400
1833   27,000
1834   31,000
1835   30,800
1836   31,400
1837   42,600
1838   48,000
1839   54,000
1840   63,000
1841   78,989
1842   83,281
1843   85,664
1844   90,562
1845   89,099
1846   107,688
1847   101,520

316: Lettre du 29 décembre 1843, à M. de Corcelle. (Documents inédits.)

317: Voy. t. III, ch. X, § V.

318: Sur le rôle de La Moricière dans l'assaut de Constantine, voir t. III, seconde édition, ch. X, § XIII.—L'impression fut très vive en France, et M. de Tocqueville traduisait le sentiment général, quand il écrivait, le 14 novembre 1837: «Je m'intéresse plus que je ne puis me l'expliquer à La Moricière. Cet homme m'entraîne malgré moi, et, quand j'ai lu le récit de son assaut de Constantine, il m'a semblé que je le voyais arriver le premier au haut de la brèche, et que toute mon âme était un instant avec lui. Je l'aime aussi pour la France, car je ne puis m'empêcher de croire qu'il y a un grand général sous ce petit homme-là.»

319: Lettres de 1840 et de 1843 citées par M. Keller dans sa Vie du général de La Moricière.

320: Le général de La Moricière, par E. Keller, t. I, p. 224 à 226.

321: M. de Montagnac. (Lettres d'un soldat, p. 141 et 142.)

322: Ceux qui auraient intérêt à connaître le détail des opérations peuvent se reporter aux ouvrages spéciaux. En ce moment même, le premier de nos historiens militaires, M. Camille Rousset, poursuit, avec le même éclat, jusqu'en 1857, le récit de la conquête algérienne que, dans un premier livre, il avait conduit jusqu'en 1840. Je me suis beaucoup servi de cet important ouvrage. Signalons aussi le Maréchal Bugeaud, d'après sa correspondance intime, par M. d'Ideville; le Général de La Moricière, par M. Keller; les Souvenirs d'un officier d'état-major, par le général de Martimprey; les Lettres d'un soldat, correspondance inédite du colonel de Montagnac; les Lettres du maréchal de Saint-Arnaud, les articles sur les Dernières Campagnes du général Changarnier en Afrique, publiés, dans le Correspondant, par le comte d'Antioche, etc., etc.

323: Lettre du 9 mai 1841.

324: Lettre du 12 mai 1841.

325: Ce n'étaient pas seulement les soldats, c'étaient aussi les colons pour lesquels le général était ainsi d'un facile abord. Un jour, l'un de ces colons, pauvre diable, vient le trouver à Alger et lui expose sa requête. «Mais, mon ami, lui dit le gouverneur après l'avoir écouté, cela ne me regarde pas; allez trouver le comte Guyot, le directeur civil.—Ah! reprit le colon en montrant son costume, comment puis-je aller parler à M. Guyot dans la tenue misérable où vous me voyez?»

326: «Nous n'avons trouvé, a dit le général Bugeaud dans son rapport, aucun mécompte ni sur les distances, ni sur la configuration des lieux, ni sur les eaux, ni sur les cultures.»

327: Voir notamment la scène assez curieuse que fit un jour le gouverneur au capitaine de Martimprey. (Souvenirs d'un officier d'état-major, par le général de Martimprey, p. 101 à 105.)

328: Lettres d'un soldat, correspondance inédite du colonel de Montagnac, p. 192-193.

329: Lettres d'un soldat, p. 204.

330: Lettre du 8 mars 1842. (Ibid., p. 206 et 207.)

331: Lettre du 31 mars 1842. (Lettres d'un soldat, p. 217.)

332: 28 janvier et 8 mars 1842. (Lettres d'un soldat, p. 199, 209.)

333: 31 mars 1842. (Ibid., p. 222.)

334: Souvenirs d'un officier d'état-major, par le général de Martimprey, p. 131.

335: Lettre du 31 mars 1842. (Lettres d'un soldat, p. 222.)

336: Souvenirs d'un officier d'état-major, p. 131.

337: Lettres du 9 janvier, des 2 et 11 février 1842. (Lettres d'un soldat, p. 186, 191, 202 à 205.)

338: «La Moricière, disait un jour le gouverneur au duc d'Aumale, est vaillant, infatigable, débrouillard, sans doute, mais doctrinaire; il discute sans cesse, ergote, hésite et n'aime pas les responsabilités.»

339: Le général Bugeaud faisait allusion à La Moricière, quand, dans une lettre à Changarnier, il se plaignait de voir «les journaux préconiser les actions magnifiques de tel jeune et brillant général, qualifier de fautes ses propres opérations, blâmer son système et louer, chez les chefs de colonne, les mêmes faits qu'on venait d'imputer à tort au gouverneur».

340: Cette lettre, qui fait tant d'honneur au général Bugeaud, a été citée pour la première fois par M. Camille Rousset.

341: Souvenirs d'un officier d'état-major, par le général de Martimprey, p. 177.

342: «Bedeau fait très-bien, disait le général Bugeaud, mais on a besoin de le pousser par les épaules.»

343: Lettre de M. de Montagnac, en date du 27 juillet 1842. (Lettres d'un soldat, p. 259 à 261.)

344: Lettre de M. de Montagnac, en date du 18 juin 1842. (Lettres d'un soldat, p. 255.)

345: Les zouaves et les chasseurs à pied, par M. le duc d'Aumale.

346: En 1848, Abd el-Kader, causant à Toulon avec le général Daumas, a parlé de soixante mille âmes. C'était probablement une exagération.

347: C'était le futur Général Ducrot. M. d'Ideville a reçu communication de cette lettre et l'a publiée dans son ouvrage sur le maréchal Bugeaud, t. II, p. 281.

348: Pour les faits qui vont suivre, je me suis attaché au rapport du duc d'Aumale, à un récit du général Fleury, alors lieutenant et attaché à la colonne, récit publié par M. d'Ideville, enfin au tableau très vivant et très exact tracé par M. Camille Rousset. J'ai trouvé aussi quelques renseignements dans les articles du comte d'Antioche, qui a eu à sa disposition les papiers du général Changarnier.

349: Sur ce qui s'est passé après que Yusuf eut rejoint le duc d'Aumale, j'ai suivi la version de M. Camille Rousset, qui diffère, en quelques points, du récit du général Fleury. J'ai des raisons de croire la version de M. Rousset plus exacte.

350: Le duc d'Aumale, les Zouaves et les chasseurs à pied.

351: Le maréchal Soult félicitait le prince sur «la parfaite combinaison de ses mouvements, sa hardiesse d'exécution et son coup d'œil exercé».—«J'ai appris presque sur les lieux, lui mandait La Moricière, le brillant succès que vous venez d'obtenir; j'ai pu juger mieux que personne la hardiesse de l'entreprise et l'importance du résultat. Vous avez porté à la puissance de l'émir le coup le plus rude qu'elle pût recevoir.»

352: M. Charras se trompait sur l'âge du prince; celui-ci n'avait que vingt et un ans.

353: Le Roi écrivait au maréchal Soult, le 30 septembre 1843: «Il me paraît bien désirable de fortifier la hiérarchie et la subordination dans notre armée d'Afrique, et d'y décourager cet esprit d'opposition envers leurs supérieurs, de jalousie et de mauvais coucheurs, dont la correspondance que vous me communiquez ne cesse de donner de tristes exemples.» (Documents inédits.)

354: Lettre à M. de Corcelle, en date du 29 décembre 1843. (Documents inédits.)

355: Lettre à M. de Corcelle.

356: Lettre du 29 décembre 1843 à M. de Corcelle. (Documents inédits.)

357: Documents inédits.

358: Circulaire du 17 septembre 1844.

359: Cf. plus haut, t. III, ch. X, § V.

360: Cf. séances des 14 et 15 avril 1841, des 4 et 5 avril 1842, des 23, 24 et 25 mai 1843, des 5 et 6 juin 1844.

361: Sur la correspondance du général Bugeaud avec M. Guizot, voyez les Mémoires de ce dernier, t. VI, p. 387 et suiv., et t. VII, p. 135 et suiv.

362: Lors de l'envoi du général Bugeaud en Algérie, il lui avait donné les instructions suivantes: «Prendre une offensive hardie; faire une guerre énergique, poussée à fond, en vue d'amener l'entière soumission des Arabes et de préparer les voies à la colonisation qui, seule, après la conquête, peut nous maintenir en possession du territoire soumis par nos armes.»

363: Quelque temps après, le général Bugeaud écrivait à M. de Corcelle: «Votre lettre m'a renforcé dans l'opinion que vous êtes bien l'homme le plus loyal et le plus généreux qu'il y ait au monde.» (Documents inédits.)

364: Lisez, par exemple, dans le Moniteur algérien du 25 décembre 1843, un article de trois colonnes, signé: Un touriste. C'est la prétendue conversation du «touriste» avec un officier qui lui démontre comment la guerre était nécessaire et comment elle n'avait pu se faire qu'avec des razzias. Le touriste était arrivé plein de préventions contre «ces barbares razzias, condamnées par tous les philanthropes et par toutes les âmes sensibles en France». L'officier lui répond: «Qu'est-ce que la guerre en Europe et partout? N'est-ce que la destruction des armées belligérantes? Non, c'est aussi une attaque aux intérêts des peuples... On s'empare des grandes villes, des centres de population et de commerce, de la navigation des fleuves et des grandes routes; à la première guerre, on s'emparera des chemins de fer. C'est en mettant la main sur tous ces grands intérêts que l'on fait capituler les nations et qu'on fait la guerre. Avions-nous des intérêts semblables à saisir en Afrique? Les villes, fort clairsemées, ne sont que de misérables bourgades dont les habitants sont étrangers au peuple arabe, qui les méprise; point de routes, point de navigation, point de capitale, point de centre enfin... L'intérêt agricole, que l'on néglige en Europe, est le seul vraiment que l'on puisse blesser en Afrique. Il y est plus difficile à saisir que partout ailleurs; car on ne trouve, chez les Arabes du moins, ni villages ni fermes; ce peuple vit sous la tente, et toutes ses richesses mobilières peuvent être transportées par les bêtes de somme dont il dispose... Dès que nos colonnes se mettaient en mouvement, le vide s'opérait devant nous: les villages se chargeaient sur les chameaux, les mulets, les bœufs, et fuyaient avec les femmes et les enfants... Il nous a fallu longtemps pour agir de manière à atteindre les populations fugitives. Nous l'avons pu enfin, et, de ce moment, vous avez vu commencer et progresser la pacification. C'est donc à la razzia, qui vous faisait horreur, que nous devons tous nos progrès, particulièrement cette sécurité qui vous a permis de visiter si paisiblement une grande partie de l'Algérie.» Suivait une comparaison entre la razzia algérienne et le bombardement européen, tout à l'avantage de la première, présentée comme beaucoup moins cruelle. Naturellement, le touriste finit par se déclarer convaincu et un peu honteux des critiques qu'il avait faites. «Je fis des excuses à l'officier, dit-il, et lui promis que la loyauté et l'humanité de l'armée d'Afrique n'auraient pas de plus ardent défenseur que moi.»—Peu après, le 28 avril 1844, le maréchal Bugeaud écrivait à M. de Corcelle: «Je ne puis pas me résoudre à ménager la sottise de nos philanthropes; je leur ai prouvé, dans le Moniteur algérien du 25 décembre, que la razzia était un moyen de guerre indispensable... S'ils ne veulent pas me comprendre, tant pis pour eux, car cela prouve qu'ils sont des sots.» (Documents inédits.)

365: Lettre du 27 juillet 1843. (Documents inédits.)

366: Lettres du 8 juillet et du 28 septembre 1845. (Documents inédits.)

367: Cette conversation a été rapportée par M. Lapasset, qui y assistait. (Le Maréchal Bugeaud, par M. d'Ideville, t. III, p. 46 et 47.)

368: Lettre du 14 mars 1844. (Documents inédits.)

369: Ce fait m'a été rapporté par M. de Corcelle, qui était l'un des convives.

370: Lettres d'un soldat, p. 316.

371: Discours du 24 janvier 1845.—Déjà, en novembre 1841, le gouverneur avait écrit à M. Guizot: «On devrait savoir que nous ne pouvons pas avoir en Afrique des batailles d'Austerlitz, et que le plus grand mérite, dans cette guerre, ne consiste pas à gagner des victoires, mais à supporter, avec patience et fermeté, les fatigues, les intempéries et les privations. Sous ce rapport, nous avons dépassé, je crois, tout ce qui a eu lieu jusqu'ici.»

372: Le lieutenant-colonel de Saint-Arnaud fut employé avec ses zouaves, en juillet 1841, à une expédition de ravitaillement dirigée de Mostaganem sur Mascara. La colonne se composait principalement de jeunes troupes de ligne arrivées récemment de France. La chaleur était effroyable; les Arabes suivaient la petite armée et massacraient les traînards. Saint-Arnaud dépeint ainsi à son frère le spectacle dont il a été témoin: «J'ai vu là, frère, tout ce que la faiblesse et la démoralisation ont de plus hideux. J'ai vu des masses d'hommes jeter leurs armes, leurs sacs, se coucher et attendre la mort, une mort certaine, infâme. À force d'exhortations, ils se levaient, marchaient cent pas, et, accablés de chaleur, de fatigue, affaiblis par la dyssenterie et la fièvre, ils retombaient encore et, pour échapper à mes investigations, allaient se coucher, en dehors de ma route, sous les buissons et dans les ravins. J'y allais, je les débarrassais de leurs fusils, de leurs sacs, je les faisais traîner par mes zouaves; j'en ai fait monter sur mon cheval, jusqu'à ce que j'eusse sous la main les sous-officiers de cavalerie, seuls moyens de transport que nous ayons eus à l'arrière-garde... J'en ai vu beaucoup me demander en pleurant de les tuer, pour ne pas mourir de la main des Arabes; j'en ai vu presser, avec une volupté frénétique, le canon de leur fusil, en cherchant à le placer dans leur bouche. Eh bien, frère, pas un n'est resté en arrière, pas un ne s'est tué; beaucoup sont morts asphyxiés, mais ce n'est pas ma faute.» Et Saint-Arnaud ajoutait: «Non, pour les épaulettes de général, je ne voudrais pas recommencer la vie que j'ai faite, dix heures de suite, le 2 juillet.»

373: Lettres d'un soldat, p. 277.

374: Lettre du 30 mais 1843. (Document inédits.)

375: Séances des 10-12 juin 1843.

376: À ce propos, le chancelier Pasquier écrivait à M. de Barante, le 14 septembre 1844: «Nos marins, à présent, ont toujours en vue ces malheureux journaux dont ils prennent les excitations pour la voix de la France entière, et, grâce à cette grossière erreur, ils croiraient volontiers que le premier coup de canon tiré par eux serait la résurrection de toutes les gloires qui se sont ensevelies dans celles de l'Empire. Le défunt amiral Lalande a donné un bien funeste exemple, par la correspondance que, pendant sa station dans les mers de Grèce, il a entretenue avec un ou deux journalistes; il en a été payé par des salves d'éloges auxquelles tous ses semblables, en grade et en position, aspirent maintenant, comme moyen de monter plus haut encore.» (Documents inédits.)

377: Documents inédits.

378: Le duc de Broglie écrivait, le 24 février 1844: «Les journaux de l'opposition ont hésité quelque temps pour voir de quel côté pencherait le ministère. Ne pouvant rester aussi longtemps incertains que lui, ils ont pris leur parti pour la gloire, et vont lui faire une obligation de poursuivre sa marche triomphante dans l'océan Pacifique.» (Documents inédits.)

379: Lettre du 29 février 1844. (Documents inédits.)

380: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

381: Quelques mois plus tard, lord Palmerston jetait, au delà de la Manche, un cri d'alarme tout semblable, et il écrivait, le 10 novembre 1844, à son frère: «Si la rupture avait éclaté, les Français auraient pu frapper quelque coup dangereux, avant que nous eussions été en mesure de nous défendre contre eux.» (Bulwer, Life of Palmerston, t. III, p. 142.)

382: Dans son article, le Journal des Débats dénonçait la manœuvre par laquelle on prétendait exploiter «contre le gouvernement du Roi» un «entraînement naturel à l'âge du prince et particulier, dit-on, à son caractère»; il parlait de «popularité trompeuse», de «triomphe suspect»; puis, montrant ce qu'avait d'incorrect cet appel à la publicité fait par un officier général et par un prince: «On ne peut pas, disait-il, être à la fois sur les marches d'un trône et sur la brèche de la polémique quotidienne.»

383: Discours du 13 avril 1844.

384: Discours du 19 avril 1844.

385: Discours du 28 mai 1844.

386: Dépêches de M. de Bunsen, citées par Hillebrand, Geschichte Frankreichs, 1830-1848, t. II, p. 583, 584.

387: Mémoires de Bunsen, cités par M. Saint-René Taillandier dans son étude sur le Conseiller de la reine Victoria.

388: Léon Faucher, Biographie et Correspondance, t. I, p. 150.

389: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 208.

390: C'est principalement aux Mémoires du baron de Stockmar que nous empruntons ces détails et ceux qui vont suivre sur les conversations du Czar.

391: Mémoires de M. Guizot, t. VI, p. 212.

392: Cité dans The Life of the Prince Consort, par sir Théodore Martin.

393: S'il faut en croire une assertion formelle de lord Malmesbury dans ses Mémoires (vol. I, p. 402), il y aurait eu plus encore. Cet homme d'État a consigné en effet sur son journal, à la date du 3 juin 1853, qu'en 1844, un memorandum secret avait été signé, à Londres, par le Czar d'une part, par Robert Peel, Wellington et Aberdeen d'autre part; il avait pour objet d'assurer à la Russie, sans consulter la France, son protectorat sur les Lieux saints et sur la religion grecque en Turquie. L'existence de cette pièce, connue seulement de la Reine, était révélée à chaque nouveau ministre des affaires étrangères lors de son entrée en fonction. C'était ainsi que lord Malmesbury l'avait connue, lorsqu'il avait été chargé du foreign office, peu avant de raconter ces faits dans son journal. L'assertion est précise et paraît fort autorisée. Je sais cependant qu'en Angleterre des personnes bien placées pour connaître les faits, et particulièrement pour avoir été informées de tous les actes de lord Aberdeen, ne croient pas à l'existence d'un memorandum signé par les ministres anglais. À leur avis, lord Malmesbury avait dû faire une confusion avec le memorandum de M. de Nesselrode. Les éléments nous manquent, en France, pour éclaircir cet incident. C'est aux historiens anglais qu'il appartient de le faire.

394: The Life of H. R. H. the Prince Consort, par sir Théodore Martin.

395: La Reine écrivait le 4 juin 1844: «L'Empereur fait à Albert et à moi l'impression d'un homme qui n'est pas heureux et sur lequel son immense puissance et sa position pèsent lourdement et péniblement.» Elle ajoutait un peu plus tard: «Il n'est pas heureux, et ce fond de tristesse qui se lit sur ses traits nous faisait parfois de la peine. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne peux pas m'empêcher de le plaindre.»

396: Cette pièce et presque toutes celles que nous citerons ou auxquelles nous ferons allusion dans la suite de ce paragraphe, ont été publiées alors par le gouvernement, pour être distribuées aux Chambres. Nous les compléterons avec d'autres documents cités par M. Guizot dans ses Mémoires.

Quelques mois plus tard, à la tribune de la Chambre, M. Guizot, parlant du choix du prince de Joinville, disait: «Il n'y a aucun de vous, messieurs, qui ne se rappelle le bruit, je dirai l'abus qu'on a fait de la note de M. le prince de Joinville sur les forces navales de la France. On a voulu y voir, y faire voir un acte, une velléité du moins, de malveillance pour le cabinet, d'hostilité pour l'Angleterre. On avait fait ainsi au noble prince une situation délicate. Nous avons pensé qu'il était de notre devoir de lui fournir la première occasion de montrer à la fois son dévouement au pays, à l'honneur et à la dignité du pays, et en même temps son intelligence de la politique qui convient au pays.» (Discours du 21 janvier 1845.)

397: Le 30 septembre 1843, à propos de difficultés qui s'étaient produites avec quelques tribus tunisiennes de la frontière, le roi Louis-Philippe écrivait au maréchal Soult: «En vérité, nous avons déjà assez de territoires et de tribus à soumettre, sans chercher à en augmenter l'étendue et le nombre.» (Documents inédits.)

398: Débats du 5 juillet 1844 à la Chambre des députés, et du 10 juillet à la Chambre des pairs.

399: M. Désages écrivait à M. de Jarnac, le 8 juillet 1844: «L'opinion repousse de bien loin toute idée de médiation réelle ou apparente. Nous désirons sincèrement que l'influence anglaise au Maroc s'emploie à faire entendre raison aux Marocains: nous serons heureux qu'elle atteigne ce but; mais nous devons et voulons laisser au cabinet de Londres la libre et entière appréciation des moyens propres à y conduire. Aucun concert, aucune discussion ne doit s'établir entre Paris et Londres à cet égard.»

400: Le Roi était fort préoccupé des idées qui traversaient à ce sujet l'esprit du maréchal Bugeaud. (Lettres du roi Louis-Philippe au maréchal Soult, en juillet 1844. Documents inédits.)

401: Dépêche de M. de Jarnac, en date du 29 juillet 1844. (Notice sur lord Aberdeen, par M. de Jarnac.)

402: Pour l'histoire des négociations qui vont suivre, j'ai consulté les documents qui ont été distribués aux Chambres à la fin de 1844, ceux qui ont été cités par M. Guizot dans ses Mémoires, par M. de Jarnac dans sa notice sur lord Aberdeen, et aussi quelques documents inédits, entre autres la correspondance de M. Désages avec M. de Jarnac.

403: Ces armements étaient réclamés notamment par le duc de Wellington, qui disait «que la disposition des Français était d'insulter l'Angleterre partout où ils pourraient le faire impunément, et que le seul moyen de rester en paix avec eux était d'être plus forts qu'eux sur tous les points du globe». (The Greville Memoirs, second part, t. II, p. 254.)

404: Cela résulte d'une conversation du duc de Wellington avec M. Greville (ibid.), et est confirmé par le journal intime de lord Malmesbury, à la date du 2 septembre 1844. (Mémoires de lord Malmesbury.)

405: Voir notamment le discours de lord Palmerston dans la séance du 7 août 1844.

406: Voir le récit du général Trochu dans son livre sur l'Armée française en 1867, celui de M. Léon Roches, inséré dans l'ouvrage de M. d'Ideville sur le Maréchal Bugeaud, celui du capitaine Blanc, dans les Souvenirs d'un vieux zouave, et aussi quelques lignes des Souvenirs d'un officier d'état-major, par le général de Martimprey.

407: «Voilà le canon de Tanger parti, écrivait M. Désages à M. de Jarnac, le 15 août 1844. À en juger par la consternation du pauvre lord Cowley (ambassadeur d'Angleterre à Paris), cela aura grand retentissement à Londres.» (Documents inédits.)

408: Un fait de presse qui fit alors beaucoup de bruit montre bien ce qu'il y avait d'animosité contre la France dans certaines parties de l'opinion anglaise. Le principal journal de Londres, le Times, publia quelques lettres qu'il prétendait avoir été écrites par des officiers de la flotte britannique, témoins du bombardement de Tanger, lettres où nos marins et leur chef, «Joinville et sa bande», comme on disait, étaient accusés d'avoir déshonoré le pavillon français par leur incapacité et par leur couardise. L'indignation fut extrême en France. Les plus sages, tels que le Journal des Débats, déclarèrent que de tels procédés risquaient de rendre vains les efforts faits pour maintenir la paix. Il est vrai qu'en Angleterre même, on eut honte de ce genre d'attaques; des protestations s'élevèrent contre la publication du Times. Les autorités navales s'émurent; une enquête ayant révélé que l'auteur des lettres était le chapelain du vaisseau le Warspite, ce chapelain fut révoqué, et le commandant de la flotte britannique dans la Méditerranée flétrit sa conduite par un ordre du jour.

409: Bulwer, Life of Palmerston, t. III, p. 129.

410: Cité par lord Palmerston, à la date du 21 août 1844. (Ibid., p. 132.)

411: Mémoires de lord Malmesbury, à la date du 2 septembre 1844.

412: The Greville Memoirs, second part, vol. II, p. 253.

413: Lettres de la fin d'août et du commencement de septembre 1844, citées dans la Vie du Prince consort.

414: Journal inédit du baron de Viel-Castel, à la date du 27 août 1844.

415: Lettres au comte Apponyi, du 29 et du 30 août 1844. (Mémoires de M. de Metternich, t. VII, p. 29 à 31.)

416: Documents inédits.

417: Expressions employées par le Roi dans une lettre au maréchal Soult, en date du 14 août 1844 (Documents inédits), et dans une lettre au roi des Belges, non datée, mais qui doit être du 1er ou du 2 septembre. (Revue rétrospective.)

418: The Greville Memoirs, second part, vol. II, p. 253, 254.

419: Lettre de M. de Jarnac à M. Guizot, en date du 29 août 1844.

420: «J'ai la conviction, écrivait le maréchal Bugeaud au prince de Joinville, que l'empereur s'exposerait plutôt à continuer une mauvaise guerre que de donner un seul million. Je sais qu'il est sordidement intéressé. Quant à Abd el-Kader, il ne pourrait pas le livrer, sans se faire honnir par tout son peuple.»

421: Ce traité différait cependant de l'ultimatum en un point, c'est qu'il stipulait la mise hors la loi d'Abd el-Kader, au lieu de son expulsion. En conséquence de cette mise hors la loi, sorte d'excommunication religieuse autant que politique, les Marocains s'engageaient à poursuivre à main armée l'émir sur leur territoire, jusqu'à ce qu'il fût expulsé ou tombé entre leurs mains; dans ce dernier cas, il serait transporté dans une ville du littoral de l'Ouest, et les deux gouvernements se concerteraient sur les mesures à prendre. Rien de mieux, si l'on eût pu compter sur l'exécution sérieuse de ces engagements.

422: Documents inédits.

423: Cité dans la Vie du Prince consort.

424: Le duc de Broglie écrivait le 5 septembre 1844: «De ce côté-ci de la Manche, tout le monde meurt de peur, au milieu des bravades et des cris de victoire, et le parti conservateur tout entier supplie M. Guizot de se montrer complaisant, tandis que le parti Thiers le pousse dans le même sens, en lui disant que c'est sa faute.» (Documents inédits.)

425: Lettre du 25 septembre 1844, adressée à M. d'Houdetot. Voir aussi une lettre du 5 septembre. (Documents inédits.)

426: En fait, l'indemnité n'a jamais été payée à M. Pritchard.

427: Revue rétrospective.

428: Sir Robert Peel, par M. Guizot.

429: Mémoires de M. de Metternich, t. VII, p. 31.

430: Sur les détails de cette visite, voir The life of the Prince Consort, par sir Théodore Martin, notamment les fragments du Journal de la Reine qui y sont cités.

431: Nous lisons, à propos d'un de ces entretiens, dans le Journal de la Reine: «Le Roi est un homme extraordinaire. Il a beaucoup parlé de nos récentes difficultés et de l'émotion excessive de la nation anglaise. Il a dit que la nation française ne désirait pas la guerre, mais que les Français aiment à faire claquer leur fouet comme les postillons, sans songer aux conséquences. Puis il a dit que les Français ne savaient pas être de bons négociants comme les Anglais, et qu'ils ne comprenaient pas la nécessité de la bonne foi qui donne tant de stabilité à ce pays-ci. «La France, a-t-il ajouté, ne peut pas faire la guerre à l'Angleterre, «qui est le Triton des mers; l'Angleterre a le plus grand empire du monde.» Puis, parlant de l'affaire de Taïti: «Je la voudrais au fond de la mer, dit-il, et «désirerais beaucoup en être entièrement débarrassé.»—Bien que Louis-Philippe fût alors très soucieux de plaire à la Reine, je doute que celle-ci ait bien entendu et exactement rapporté ce qui lui avait été dit. Elle a dû exagérer et mal comprendre certaines phrases de politesse. Le Roi n'a pu, en causant avec une souveraine étrangère, tenir, sur son propre pays, certains des propos qui lui sont ici attribués.

432: Revue rétrospective.

433: Lettre du 21 octobre 1844. (Lettres de M. Guizot à sa famille et à ses amis, p. 226 à 228.)

434: «À chaque instant, raconte l'un des chefs du centre gauche, nous rencontrions à la salle des conférences, à la buvette, des députés flottants qui, après s'être assurés d'un regard circulaire qu'on ne les voyait pas, venaient à nous et nous serraient la main avec une parole ou un geste fort significatif.» (Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.)

435: «La majorité conservatrice est ralliée, disait à ce propos le Journal des Débats; la situation est rétablie.» (2 janvier 1845.)

436: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

437: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

438: Le maréchal avait eu, sur ce sujet, un langage au moins assez variable et assez incertain. Avant le traité, le 3 septembre 1844, il reprochait au prince de Joinville d'exiger trop du Maroc. «Dans notre situation vis-à-vis de la jalouse Angleterre, écrivait-il, nous devons nous montrer faciles.» (D'Ideville, le Maréchal Bugeaud, t. II, p. 543.) Le traité fait, il se plaint qu'on n'ait pas assez obtenu. «Applaudissez, vous tout seul, écrit-il au général de La Moricière, car moi, je n'applaudis pas le moins du monde.» (Keller, le Général de La Moricière, t. I, p. 365.) Il écrit dans le même sens à M. Guizot. (Mémoires de M. Guizot, t. VII, p. 176.) Mais, le 29 décembre 1844, il mande du Périgord à M. de Corcelle: «Je me contente de vous dire que les résultats généraux sont bons, et que s'il eût été possible d'obtenir davantage, ce n'eût été qu'aux dépens d'un retard dans la conclusion. Ce retard aurait pu compliquer en Europe certaines questions.» (Documents inédits.)

439: The Greville Memoirs, second part, vol. II, p. 270.

440: Lettre du 30 octobre 1844, publiée par la Revue rétrospective.

441: Le Comte Duchâtel, par M. Vitet.

442: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

443: Ceux qui conseillaient de rester étaient appelés, dans certains milieux ministériels, les amis sérieux, par opposition aux amis romanesques qui poussaient à la démission. (Journal inédit du baron de Viel-Castel.)

444: Revue rétrospective.

445: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

446: Veut-on un spécimen des déclamations de la presse de gauche sur ce sujet? Le Siècle disait du ministère, le 26 février 1845: «C'est un gladiateur épuisé qui perd du sang à chaque pas, et dont la main défaillante, cherchant à maintenir l'appareil qui couvre la plaie sans la guérir, ajuste les plis de son manteau, souillé dans l'arène. Il demande en vain la vie ou la mort; son imperceptible et inconcevable majorité, qu'il salue tristement, le condamne à une lente agonie.»

447: Documents inédits.

448: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

449: Ibid.

450: Lettre au comte Apponyi, du 15 mars 1845. (Mémoires de M. de Metternich, t. VII, p. 91, 92.)

451: Cet épisode est raconté par M. Greville, qui en tenait le récit de la princesse de Lieven elle-même. (The Greville Memoirs, second part, vol. II, p. 278 et p. 287, 288.)

452: Journal inédit du baron de Viel-Castel.

453: Je remets à plus tard l'exposé de ces affaires d'Espagne et de Grèce, afin de ne pas le morceler.

454: Voir plus haut, ch. I, § V à VIII, et ch. II, § I, IV, VI et IX.

455: Pour le récit des négociations qui vont suivre, je me suis principalement servi des documents cités par M. Guizot au tome VI de ses Mémoires, p. 198 et suiv.

456: Documents inédits.

457: M. de Sainte-Aulaire écrivait de Londres à M. de Barante, le 14 février 1845: «Nous attendons Broglie. L'accueil qui a été fait ici à son nom est une des plus flatteuses récompenses que puisse recevoir un homme public.» (Documents inédits.)

458: J'ai eu sous les yeux tous les papiers relatifs à cette mission du duc de Broglie, dépêches officielles et correspondance confidentielle. C'est sur ces documents, dont du reste M. Guizot avait déjà cité plusieurs extraits dans ses Mémoires, que j'ai rédigé le récit qui va suivre.

459: Lettre du 22 juillet 1845. (Lettres de M. Guizot à sa famille et à ses amis, p. 230.)

460: Lettre du 1er août 1845. (Documents inédits.)

461: Le Roi s'en était souvent expliqué avec le roi et la reine des Belges, qui étaient ses intermédiaires habituels avec la cour d'Angleterre. Il écrivait notamment à la reine des Belges, le 12 mai 1845: «Ce que je désire, c'est que tout s'arrange de manière que nous puissions nous donner des cals réciproques, on both sides of the channel.» (Revue rétrospective.)—Lord Palmerston écrivait à son frère, le 16 mars de la même année: «Louis-Philippe désire que la Reine vienne le voir à Paris, l'été prochain, et offre de lui rendre sa visite l'année d'après. Il dit que, dans l'état présent des relations entre les deux pays, les souverains devraient se rencontrer tous les ans.» (Bulwer, The Life of Palmerston, t. III, p. 151.)

462: Revue rétrospective.

463: Voici ce toast, qui ne manquait pas d'une certaine éloquence: «Messieurs, remplissez vos verres! Il y a un mot d'une inexprimable douceur pour les cœurs britanniques et allemands. Il y a trente ans, on l'entendit proférer sur les hauteurs de Waterloo par des voix anglaises et allemandes, après des jours de combat terribles, pour marquer le glorieux triomphe de nos frères d'armes. Aujourd'hui, il résonne sur les rives de notre Rhin bien-aimé, au milieu des bénédictions de la paix qui est le fruit sacré du grand combat: ce mot, c'est «Victoria!» Messieurs, buvez à la santé de S. M. la reine Victoria et à celle de son auguste consort.»

464: Journal de la Reine, cité par sir Théodore Martin. (The Life of the Prince Consort.)

465: Ce fut au cours de cette visite que furent échangées, au sujet du mariage du duc de Montpensier avec l'infante, sœur de la reine d'Espagne, des explications importantes sur lesquelles j'aurai à revenir quand je raconterai les négociations relatives aux mariages espagnols.

466: «Le voyage de la reine d'Angleterre en Allemagne, écrivait M. de Metternich au comte Apponyi, n'a point eu de succès. Des circonstances peu dignes d'égards dans d'autres temps que les nôtres ont contribué à ce fait. Ce qui a fini par effacer les bonnes impressions,—car, parmi de regrettables, il y en a eu aussi de bonnes,—c'est la visite à Eu. Cette visite, qui de tout temps avait été méditée par le roi Louis-Philippe, a été habilement amenée par l'intermédiaire de la reine des Belges... Sous l'influence de la famille de Cobourg, les raisons contraires au projet du roi des Français ont été étouffées..... La visite à Eu n'a été qu'une scène de la pièce qui se joue et dans laquelle tout le monde, auteur, acteurs et spectateurs, est mystifié ou mystificateur.» (Mémoires de M. de Metternich, t. VII, p. 102.)—M. de Metternich s'était rencontré avec la reine Victoria au château de Stolzenfels, sur le Rhin. «J'ai trouvé le prince, écrit la Reine dans son Journal, notablement plus âgé que je ne m'y attendais, dogmatisant beaucoup, parlant lentement, mais du reste très aimable.»

467: Cf. t. I, liv. I, ch. VII; t. II, ch. VI, § III; ch. XIII; t. III, ch. IX.

468: Cf. t. III, ch. IX, § VI.

469: Tout au plus la presse religieuse eut-elle à relever la décision par laquelle M. Cousin avait mis les Provinciales de Pascal sur le programme du baccalauréat.

470: Vie du cardinal Mathieu, par Mgr Besson, t. I, p. 244 à 247.

471: Cf. t. III, ch. IX, § VI.

472: Sur les débuts de cette œuvre, voy. t. III, ch. IX, § II.

473: Nous avons déjà noté, en 1836 et 1837, le blâme porté par le Souverain Pontife sur l'attitude de Mgr de Quélen. (Cf. t. III, ch. IX, § VII.)

474: Je tiens le récit de cette anecdote de M. le marquis de Raigecourt.

475: En 1880, certains incidents de la politique contemporaine m'avaient amené à détacher par avance, des notes réunies pour l'histoire de la monarchie de Juillet, une étude particulière sur les luttes de la liberté d'enseignement de 1841 à 1848. (Cf. L'Église et l'État sous la monarchie de Juillet, 1 vol. in-12, Librairie Plon.) Je ne puis aujourd'hui, sous le prétexte que je l'ai déjà traitée ailleurs, omettre une question aussi importante. On ne s'étonnera donc pas de retrouver ici une partie de ce qu'on a pu déjà lire dans cette première étude: on le retrouvera, d'ailleurs, concentré, complété et surtout mis au point d'une histoire générale.

476: Cf. t. III, ch. IX, § IV.

477: Cf. t. III, ch. IX, § IV.

478: A. de Gasparin, les Intérêts généraux du protestantisme en France.

479: Chroniques parisiennes, p. 100 et 122.

480: On peut voir, dans un mémoire rédigé, peu avant la révolution de Juillet, par les aumôniers des collèges de Paris, des détails navrants sur ce sujet et, pour ainsi dire, la statistique des naufrages dans lesquels périssaient les âmes des jeunes collégiens. M. Foisset a donné des extraits de ce mémoire, dans la Vie du P. Lacordaire (t. I, p. 86 à 91).

481: Sur M. Cousin avant 1830, voir ce que j'en ai dit dans le Parti libéral sous la Restauration, p. 233.

482: Dès 1828, à l'époque où l'avènement du ministère Martignac eût pu lui donner l'occasion d'un rôle politique, il avait écrit à M. Hegel: «J'ai pris mon parti. Non, je ne veux pas entrer dans les affaires: ma carrière est la philosophie, l'enseignement, l'instruction publique. Je l'ai déclaré une fois pour toutes à mes amis, et je soutiendrai ma résolution. J'ai commencé, dans mon pays, un mouvement philosophique qui n'est pas sans importance; j'y veux, avec le temps, attacher mon nom; voilà toute mon ambition; j'ai celle-là, je n'en ai pas d'autre. Je désire, avec le temps, affermir, élargir, améliorer ma situation dans l'instruction publique, mais seulement dans l'instruction publique.»

483: Voir l'étude curieuse où M. Janet fait honneur à M. Cousin d'avoir été, en cette circonstance, le précurseur des laïcisateurs de nos jours, et où il compare son œuvre à celle qui a fait établir dans les écoles primaires un enseignement moral indépendant de toute doctrine religieuse.

484: M. Cousin avait conscience de la mobilité de son esprit. Plus tard, quand on donna son nom à une rue: «J'accepte, dit-il spirituellement, parce que c'est une rue et non une place.»

485: Pour se faire une idée de ce régime, il n'est même pas besoin d'écouter les plaintes des victimes; il suffit de prêter l'oreille aux confidences de ceux qui passaient pour être les protégés. Voir, à ce sujet, le très piquant volume de M. Jules Simon sur Victor Cousin.

486: Vie du P. de Ravignan, par le P. de Pontlevoy, t. II, p. 272 à 274.

487: Observations sur la controverse élevée au sujet de la liberté d'enseignement, par Mgr Affre (1843).

488: Voir, sur l'influence de Lamennais à ce point de vue, ce que j'en ai dit dans mon étude sur l'Extrême droite sous la Restauration (Royalistes et Républicains).

489: Foisset, Vie du P. Lacordaire, t. II, p. 95 et suiv.

490: Journal inédit de M. de Viel-Castel.

491: Univers, 25 mai 1843.

492: Telle a été, pendant plusieurs années, la préoccupation des prélats les plus éclairés. Le désordre qui pouvait en résulter a été signalé, quelques années plus tard, en 1853, dans un écrit fameux de Mgr Guibert, depuis archevêque de Paris. (Œuvres pastorales, t. I, p. 356 et suiv.)

493: Rome et Lorette. Voir notamment l'Introduction.

494: Chroniques parisiennes, p. 53.

495: Lettre du 8 juillet 1843, adressée à la Gazette d'Augsbourg. (Lutèce, p. 386.)

496: Lettre du 9 mai 1842. (Correspondance de Proudhon.)

497: Un observateur qui n'était pas favorable aux réclamations du clergé, M. de Viel-Castel, notait alors sur son journal intime: «Le Journal des Débats se distingue par l'ardeur, la passion voltairienne avec laquelle il attaque le clergé. C'est tout au plus s'il a la précaution de mêler à ses arguments et à ses épigrammes quelques protestations banales et vagues en faveur de la religion. Il ramasse avec soin tout ce qui lui paraît propre à discréditer, à ridiculiser le catholicisme.» (Documents inédits.) Aussi M. de Tocqueville, après avoir constaté que tous les journaux étaient «dans un paroxysme de vraie fureur contre le clergé et contre la religion elle-même», ajoutait que, sur ce point, «les journaux du gouvernement étaient peut-être pires que ceux de l'opposition». (Lettre du 6 décembre 1843.)

498: Revue des Deux Mondes du 1er février 1845.

499: Sur les débuts de M. de Montalembert, cf. liv. I, ch. IX, et liv. III, ch. IX, § III et VII.

500: Voir les discours prononcés par M. de Montalembert à la Chambre des pairs, le 1er mars et le 6 juin 1842.

501: Voir notamment la brochure sur le Devoir des catholiques dans la question de la liberté d'enseignement. 1843.

502: Testament du P. Lacordaire.

503: Voir le texte complet de cette note, dans la Vie de Mgr Devie, par l'abbé Cognat, t. II, p. 405 et suiv.

504: Actes épiscopaux, t. I, p. 9 et suiv.

505: Correspondance du P. Lacordaire avec Mme Swetchine, p. 392.

506: Ce prélat avait publié, en 1840, sous ce titre: Exposé des vrais principes sur l'instruction publique, un livre qui avait exercé une influence considérable en Belgique.

507: C'est la thèse que Mgr Parisis devait développer ex professo, dans un livre paru en 1847 et intitulé: Cas de conscience à propos des libertés exercées ou réclamées par les catholiques, ou accord de la doctrine catholique avec la forme des gouvernements modernes. Ce livre a été depuis retiré du commerce.

508: Lettres du 25 mai et du 15 août 1844.

509: Voir, à la fin du tome II des Actes épiscopaux relatifs au projet de loi sur l'instruction secondaire, la liste des écrits d'évêques publiés de la fin de 1841 au commencement de 1844. Or, tandis qu'en 1842 il y en avait 8, dont 5 de l'évêque de Chartres, on en compte 24 en 1843, et 5 dans le seul mois de janvier 1844. Ce sera bien autre chose quand le projet de 1844 aura été déposé.

510: Recueil des actes épiscopaux relatifs au projet sur l'instruction secondaire, t. I, p. 29 (1845).

511: Lettre du 7 juillet 1844.

512: Du devoir des catholiques dans les élections (1846).—M. Thiers, causant un jour avec Mgr Dupanloup, lui disait: «M. de Montalembert est un grand guerrier; M. de Falloux est un grand homme d'État.»

513: Lettres diverses, citées par M. de Montalembert et par M. Foisset, dans leurs ouvrages sur le P. Lacordaire.

514: Chroniques parisiennes, p. 117, 118.

515: Lettres de mai et juin 1844.

516: Chroniques parisiennes, p. 148, 149.

517: Voir, à ce propos, la note que le P. Guidée, provincial à Paris, avait fait parvenir au Roi, en 1838, t. III, ch. IX, § VI.

518: Ibid.

519: Cette recherche lui attire parfois quelque mésaventure. Un jour, les jeunes gens, en l'attendant, s'étaient mis à chanter une chanson obscène qui avait pour refrain un mot ignoble, hurlé en chœur. Sur ce mot, qui a depuis fait son entrée dans la langue parlementaire, la porte s'ouvre, le silence se fait, et M. Michelet paraît. N'ayant entendu de loin que le vacarme, il s'imagine qu'on chantait la Marseillaise. Empressé, suivant son usage, de s'unir aux sentiments des assistants, il commence: «Messieurs, dit-il, au milieu de ces chants patriotiques...» Un immense éclat de rire couvre sa voix, et le professeur est obligé de chercher un autre exorde, en face d'un auditoire rendu, par cet incident, plus tumultueux et plus inconvenant encore que de coutume.

520: De courts extraits donneront l'idée de ce petit livre. Il débutait ainsi: «La prudence a ses lois, elle a ses bornes. Dans la vie des hommes, il est des circonstances où les explications les plus précises deviennent une haute obligation qu'il faut remplir. Je l'avouerai: depuis surtout que le pouvoir du faux semble reprendre parmi nous un empire qui paraissait aboli, depuis que des haines vieillies et des fictions surannées viennent de nouveau corrompre la sincérité du langage et dénaturer les droits de la justice, j'éprouve le besoin de le déclarer: je suis Jésuite, c'est-à-dire religieux de la Compagnie de Jésus... Il y a d'ailleurs, en ce moment, trop d'ignominies et trop d'outrages à recueillir sous ce nom, pour que je ne réclame point publiquement ma part d'un pareil héritage. Ce nom est mon nom; je le dis avec simplicité: les souvenirs de l'Évangile pourront faire comprendre à plusieurs que je le dise avec joie.» La fin n'était ni moins noble ni moins touchante: «Que si je devais succomber dans la lutte, avant de secouer, sur le sol qui m'a vu naître, la poussière de mes pas, j'irais m'asseoir une dernière fois au pied de la chaire de Notre-Dame. Et là, portant en moi-même l'impérissable témoignage de l'équité méconnue, je plaindrais ma patrie, et je dirais avec tristesse: Il y eut un jour où la vérité lui fut dite; une voix la proclama, et justice ne fut pas faite; le cœur manqua pour la faire. Nous laissons derrière nous la Charte violée, la liberté de conscience opprimée, la justice outragée, une grande iniquité de plus. Ils ne s'en trouveront pas mieux; mais il y aura un jour meilleur, et, j'en lis dans mon âme l'infaillible assurance, ce jour ne se fera pas longtemps attendre. L'histoire ne taira pas la démarche que je viens de faire; elle laissera tomber sur un siècle injuste tout le poids de ses inexorables arrêts. Seigneur, vous ne permettrez pas toujours que l'iniquité triomphe sans retour ici-bas, et vous ordonnerez à la justice du temps de précéder la justice de l'éternité.»

521: M. Libri écrivait alors: «M. l'abbé de Ravignan s'intitule publiquement membre de la Compagnie de Jésus, ce qu'on n'avait jamais osé faire sous la Restauration.» Et M. Cuvillier-Fleury disait dans le Journal des Débats: «Ils ont osé, quatorze ans après la révolution de Juillet, ce qu'ils n'avaient jamais tenté, même sous la Restauration; ils se sont nommés.»

522: Lettres inédites du R. P. de Ravignan.

523: Discours du 16 février 1832.

524: Vie du P. de Ravignan, par le P. de Pontlevoy, t. I, p. 265 à 269.

525: Vie de Mgr Devie, par M. l'abbé Cognat, t. II, p. 416.—M. Villemain écrivait à Mgr Mathieu, le 14 janvier 1844: «Je connais la douceur du nom de Jésus-Christ et je le fais aimer à mes petits-enfants. Les âpretés de la vie publique, loin de détourner de Celui qui console, y ramènent le cœur.» (Vie du cardinal Mathieu, par Mgr Besson, t. I, p. 317.)

526: Courrier français du 12 février 1844.

527: Voir t. III, ch. I, § III.

528: Ces détails et ceux que nous ajoutons plus loin sont rapportés dans la Vie de Mgr Affre, par M. Cruice, mort depuis évêque de Marseille.

529: Première Lettre à M. le duc de Broglie (1844).

530: Discours du 19 mars 1844. M. Dupin avait du reste déjà commencé, le 25 janvier précédent.

531: Sur M. Dupin, voir t. II, ch. V, § I.

532: Correspondance de Jules Janin.

533: Ces derniers mots furent gravés sur la médaille d'honneur offerte par les catholiques de Lyon à M. de Montalembert.

534: Vie du P. de Ravignan, par le P. de Pontlevoy, t. I, p. 268.

535: Ces protestations ont été réunies dans les deux premiers volumes des Actes épiscopaux.

536: Dans son beau livre des Vues sur le gouvernement de la France, le duc de Broglie a exprimé sur ces questions son opinion dernière: il s'y prononce pour la liberté la plus large.

537: Documents inédits.

538: L'expression est de M. Sainte-Beuve, qui disait aussi: «M. Cousin a l'air véritablement, depuis toute cette discussion, d'être condamné à la ciguë, et il varie l'Apologie de Socrate sur tous les tons.» (Chroniques parisiennes, p. 203 et 214.)

539: Le duc de Broglie écrivait, le 11 mai 1844, à son fils, au sujet de ce débat: «J'avais prévenu plus d'une fois Cousin qu'il se tînt très tranquille, sous peine de voir passer un amendement dirigé spécialement contre lui; il n'a tenu compte de mon avertissement; il a bien fallu alors lui administrer une correction sévère; je l'ai fait, en substituant à un amendement saugrenu qui n'avait de sens que d'être dirigé contre Cousin, un amendement général qui affranchit le ministre et le conseil royal de l'instruction publique de la petite tyrannie de chaque membre de ce conseil, lequel se regarde comme souverain dans sa sphère et ne prend la peine de communiquer ce qu'il fait à ses collègues que pour la forme. En faisant du programme du baccalauréat ès lettres une affaire de gouvernement, ce qui est l'exacte vérité, nous avons mis ordre à tout envahissement de l'esprit de coterie dans l'instruction publique. Il avait fallu assister à la discussion, pour voir apparaître au grand jour le fond des choses et pour bien reconnaître qu'il y a, en ce moment, en France, un petit pape de la philosophie, avec un petit clergé philosophique, qui prétend disposer de l'enseignement philosophique sans que personne y regarde, et qu'on ne puisse devenir avocat, médecin, pharmacien, fonctionnaire public, professeur ou autre chose sans avoir souscrit le formulaire de la raison impersonnelle. J'ai fait passer l'amendement aux neuf dixièmes des voix.» (Documents inédits.)

540: Lettre du 1er juin 1844. (Documents inédits.)

541: Ibid.

542: Lettre du 1er juin 1844. (Documents inédits.)

543: Chroniques parisiennes de M. Sainte-Beuve, p. 228.

544: Depuis quelque temps, M. Villemain était, sur ce sujet, en proie à de véritables hallucinations. Il s'imaginait toujours voir auprès de lui des Jésuites, le guettant et le menaçant. Un jour, il sortait, avec un de ses amis, de la Chambre des pairs où il avait prononcé un brillant discours, et causait très librement, quand, arrivé sur la place de la Concorde, il s'arrête effrayé.—«Qu'avez-vous?» lui demande son ami, médecin fort distingué.—«Comment! vous ne voyez pas?»—«Non.»—Montrant alors un tas de pavés: «Tenez, il y a là des Jésuites; allons-nous-en.» M. Sainte-Beuve a raconté, à ce propos, l'anecdote suivante: «Un jour que Villemain avait été repris de ses lubies et de ses papillons noirs, il avait à dicter à son secrétaire, le vieux Lurat, un de ces rapports annuels qu'il fait si bien. Il se promenait à grands pas, dictait à Lurat une phrase; puis, s'arrêtant tout à coup, il regardait au plafond et s'écriait: À l'homme noir! Au Jésuite! Puis, reprenant le fil de son discours, il dictait une autre phrase qu'il interrompait de même par une apostrophe folâtre, et le rapport se trouva ainsi fait, aussi bien qu'à l'ordinaire. Des deux écheveaux de la pensée, l'un était sain, l'autre était en lambeaux. Quelle leçon d'humilité! Ô vanité du talent littéraire!» (Cahiers de Sainte-Beuve, p. 30.)

545: Documents inédits.—Le 30 septembre 1844, causant avec Mgr Mathieu que lui avait amené l'amiral de Mackau, Louis-Philippe laissait voir clairement sa volonté de «laisser tomber dans l'eau» le projet de loi. (Vie du cardinal Mathieu, par Mgr Besson, t. I, p. 329.)

546: On publia contre Timon: Feu Timon, Saint Cormenin, le R. P. Timon, Feu contre feu, Eau sur feu, etc.

547: Notes inédites de M. Duvergier de Hauranne.

548: On pourrait noter, du reste, entre les deux époques, des analogies curieuses. En 1828, le négociateur français fut, comme en 1845, un personnage d'origine italienne, M. Lasagni, jurisconsulte éminent qui a laissé les meilleurs souvenirs dans la magistrature française. Les résultats de la négociation, la conduite de la cour romaine et du gouvernement français, l'imbroglio qui en résulta, furent à peu près les mêmes dans les deux cas.

549: Lettre au R. P. Daniel (Études religieuses, septembre 1867).

550: Guizot, Mémoires, t. VII, p. 413.

551: Des associations religieuses (1845).

552: Un mot sur les interpellations de M. Thiers (juin 1845).

553: À la même époque, dans un mémorandum adressé à la cour romaine, M. Rossi reprochait aux Jésuites «la confiance inexplicable avec laquelle ils avaient déchiré le voile qui les couvrait et avaient voulu que leur nom vînt se mêler à la discussion des affaires du pays».

554: Sur les faits assez obscurs de cette négociation, on peut consulter d'une part les Mémoires de M. Guizot, t. VII, qui renferment des extraits précieux de la correspondance diplomatique, et d'autre part: La liberté d'enseignement, les Jésuites et la cour de Rome en 1845, lettre à M. Guizot sur un chapitre de ses Mémoires, par le P. Ch. Daniel, qui contient comme annexe une Note importante du P. Rubillon; la Vie du P. de Ravignan, par le P. de Pontlevoy; la Vie du P. Guidée, par le P. Grandidier; l'Histoire de la Compagnie de Jésus, par M. Crétineau-Joly, t. VI; la Vie du cardinal de Bonnechose, par Mgr Besson. C'est en rapprochant ces renseignements, venus en quelque sorte des deux partis en présence, qu'on se fait une idée un peu exacte de ce qui s'est passé. Les documents qui vont être cités ou analysés se trouvent dans ces diverses publications. J'y ai ajouté quelques pièces inédites dont communication m'a été donnée.

555: Mémoires de M. Guizot, t. VII, p. 413.

556: À plusieurs reprises, les évêques français avaient consulté Rome sur la façon dont ils prenaient part aux débats sur la liberté religieuse. Rome avait refusé de répondre. Mgr Parisis s'est plaint avec vivacité de ce silence, dans une lettre considérable, adressée à un prélat romain, le 1er novembre 1845. Cette lettre n'a pas été publiée, mais nous en avons eu le texte sous les yeux.

557: M. Crétineau-Joly a prétendu que le Pape n'avait pas voulu donner un conseil aux Jésuites. Nous ne voulons pour preuve du contraire que ce passage d'une lettre écrite par le Père général au P. de Ravignan: «Le Seigneur ne permettra pas qu'un parti conseillé et suggéré par le Souverain Pontife tourne contre nous.» (Vie du P. de Ravignan, par le P. de Pontlevoy, t. Ier, p. 332.)

558: Voir le texte complet de cette dépêche, dans la Vie du P. Guidée, par le P. Grandidier, p. 254 à 257.

559: Documents inédits.

560: Lettres de M. Guizot à sa famille et à ses amis, p. 230.

561: Lettre du P. de Ravignan au Père général, 11 juillet 1843. (Documents inédits.)

562: C'est ainsi que la division du personnel de la maison de la rue des Postes amena, à Paris, la fondation de la maison de la rue du Roule, supprimée en 1850, et de celle de la rue de Sèvres, devenue l'une des résidences importantes de la Compagnie.

563: Lettre de M. Guizot au R. P. Daniel (Études religieuses, septembre 1867).

564: Lettre inédite du 1er novembre 1845.

565: Voyez Correspondance avec Mme Swetchine, p. 420, et Foisset, Vie du P. Lacordaire, t. II, p. 104 à 107.

566: M. de Montalembert lui-même le reconnaissait, quand il disait, à la Chambre des pairs, le 16 juillet 1845, en s'adressant aux ministres: «La question de l'enseignement et celle de la liberté religieuse restent entières. Elles couraient grand risque d'être absorbées toutes deux dans la question des Jésuites, et peut-être d'y périr. Eh bien, on ne le pourra plus; vous les avez dégagées.»

567: Expressions de M. Ozanam dans une lettre du 17 juin 1845.

568: De la liberté d'enseignement à la prochaine session (10 novembre 1845).

569: Quelques mots de réserve (10 décembre 1845).

570: Discours du 31 janvier 1846.

571: Discours sur la loi de la presse, du 21 juillet 1849, et lettre à l'Univers du 23 juillet.

572: Des intérêts catholiques au dix-neuvième siècle. (1852.)

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