← Retour

Journal de Jean Héroard - Tome 2: Sur l'enfance et la jeunesse de Louis XIII (1610-1628)

16px
100%

ANNÉE 1617.

Ballets.—Chasses.—Mariage de Mlle de Soissons avec M. de Longueville.—Baptême de Mlle de Pluvinel.—Retour du chancelier de Sillery.—Jeux militaires du Roi.—Meurtre du maréchal d'Ancre.—La Reine mère.—Courses à Saint-Germain et à Fontainebleau.—Mort de la maréchale d'Ancre.—Portrait du Roi par Fernand.—Nombreuses courses du Roi aux environs de Paris.—Il touche par grâce quatre Espagnols.—Mariage de M. de Luynes.—Le prince de Condé sort de prison.—Départ pour Rouen.—Mantes.—Gaillon.—Pont-de-l'Arche.—Entrée à Rouen.—Dieppe.—L'hôtesse de l'Écu de Bretagne.—Retour à Rouen.—Mort de M. de Villeroy.—Réception des cours souveraines.—Assemblée des Notables.—Retour à Saint-Germain.

Le 1er janvier, dimanche.—Confessé, communié, touché quatre cent six malades.

Le 4, mercredi.—Il va chez la Reine, y recorde son ballet.

Le 12, jeudi.—Vêtu de son habit de ratine et de sa robe, il s'amuse à dresser une batterie de petits canons qu'il avoit lui-même fondus à sa forge, dresse la garde autour des canons et fait tout ainsi que s'il eût été à une armée.

Le 15, dimanche.—Paré pour aller au bal chez la Reine sa mère, il y descend à neuf heures et demie, où il y eut bal et y dansa, et revint à deux heures après minuit.

Le 19, jeudi.—Il recorde son ballet deux fois dans la journée. Entretenu le soir en se couchant, il dit qu'il n'aime plus la chasse; les deux jours précédents, il n'y avoit point eu de plaisir. Il faisoit mauvais temps.

Le 22, dimanche.—A neuf heures et demie il va chez Janv
1617
la Reine sa mère, pour y voir le ballet de M. le comte d'Auvergne, en revient à une heure et demie après minuit.

Le 29, dimanche.—Il va souper en la chambre de M. de Luynes, aux Tuileries, qui boit à sa santé. Le soir il donne son ballet, qui ne commence, par suite de difficultés, qu'à deux heures et demie, et entre dans la salle de bal avec beaucoup de peine, à cause de la foule du monde, où il se trouve une demoiselle qui se prend à ses chausses, disant: «Si vous entrez, j'entrerai».—Il entre, et danse le ballet dont le sujet étoit les Amours d'Armide et de Renaud; cela dure jusques à cinq heures[264].

Le 2 février, jeudi.—Mis au lit, il s'amuse à faire habiller huit ou dix des siens de certains habits qui avoient servi à d'autres ballets, les fait danser au violon, lui jouant du tambour.

Le 4, samedi.—Il va à la volerie, en l'étang de Massy et à Longjumeau, où il prend le héron dans le jardin de maître Jehan Philippy, chirurgien ordinaire de Sa Majesté. Le soir il va voir jouer une tragi-comédie espagnole par les filles de la Reine.

Le 6, lundi.—Il fait encore la collation chez le sieur Philippy, mange des cerises sèches, en met dans sa pochette. Après son souper il va chez la Reine, où il s'endort, sur deux escabeaux qui plient et un oreiller, jusques à près d'onze heures; à minuit il va chez la Reine sa mère, où il voit danser un ballet de la Reine; revient à une heure.

Le 7, mardi.—Il va chez la Reine sa mère, où il voit danser le ballet du prince de Joinville, en revient à deux heures après minuit.

Le 11, samedi.—Il va aux Tuileries où il court un Fév
1617
chevreuil avec ses petits chiens, va aux Feuillants. En dînant il me dit qu'il ne se trouve pas bien, qu'il râle, a l'estomac pesant, et est dégoûté; il étoit enrhumé, dit qu'il pense qu'il auroit besoin de prendre quelque chose. Après son dîner il va chez sa mère, chez la Reine, retourne aux Tuileries. Avant de se coucher il va chez la Reine sa femme, jusques à onze heures.

Le 19, dimanche.—Il s'amuse doucement, gaiement, fait battre à coups de poing les petits pages de la musique, et puis leur donne un écu à chacun.

Le 21, mardi.—A une heure et demie il entre en carrosse, va vers les Bonshommes, où il fait conduire des petites pièces de canon et tire aux corneilles. Il en tue une; c'étoit une nouvelle sorte de chasse.

Le 2 mars, jeudi.—Il va à sa forge, puis aux Tuileries, puis en la place Royale, voir la compagnie de la Reine sa mère.

Le 4, samedi.—Il s'amuse à faire son équipage pour ce qu'il veut partir pour son voyage. Le soir il va chez la Reine.

Le 5, dimanche.—Il va chez la Reine sa mère, où se passa le contrat de mariage de Mlle de Soissons avec M. le duc de Longueville[265].

Le 2 avril, dimanche.—Il va chez la Reine, chez la Reine sa mère, va chez M. de Pluvinel, l'un de ses écuyers près de sa personne, en l'absence de M. de Souvré, et de là à Saint-Thomas du Louvre pour tenir à baptême sa fille avec Madame[266]; y a goûté à la collation.

Avr
1617

Le 13, jeudi.—Il va au conseil et deux fois chez M. de Luynes, en sa chambre.

Le 17, lundi.—Il va chez la Reine, laquelle ce jourd'hui fut saignée du pied droit, en présence du docteur de la Serva, son premier médecin, et du médecin du duc de Mantoue. Le Roi va la voir le soir.

Le 24, lundi.—Le maréchal d'Ancre tué sur le pont du Louvre entre dix et onze heures du matin[267].

Le 25, mardi.—M. le chancelier de Sillery[268] arrive, et, mandé par le Roi, va chez la Reine. Il se rend seul au conseil, pour la première fois avec ses secrétaires.

Le 28, vendredi.—Il va à la chambre de M. de Luynes, chez la Reine chez sa mère.

Le 3 mai, mercredi.—A deux heures et demie le Roi descend dans l'antichambre de la Reine sa mère, pour lui dire adieu. Elle part pour Blois, et lui pour le bois de Vincennes[269].

Le 7, dimanche.—Il voit Mesdames, ses sœurs, qui étoient venues le visiter. Il s'amuse à voir combattre des dogues et des ours. Il va chez la Reine le soir, revient chez lui, et s'amuse à démonter des canons de harquebuses.

Le 8, lundi.—Il va au conseil, puis au parc, à son fort.

Le 10, mercredi.—A son parc, il fait sentinelle sur Mai
1617
le bord du fossé, à l'avenue de la porte, le mousquet sur l'épaule. Il devoit défendre le fort, et M. de Rohan le devoit attaquer; cela est diverti et la trêve publiée à son de trompe.

Le 12, vendredi.—Il donne audience au nonce[270].

Le 14, dimanche.—Il va à la messe à la chapelle de Bourbon, communie, touche sept cent quatre malades. Il va chez la Reine à deux heures, puis au sermon. Le soir encore chez la Reine.

Le 17, mercredi.—Il va chez la Reine, en la galerie, où il donne audience à des ambassadeurs, va au conseil après. Le soir chez la Reine; il revient à onze heures trois quarts.

Le 27, samedi.—Il part de Paris et va à Saint-Germain en Laye, arrive à deux heures au château neuf, va se promener partout, va par les terrasses, et à pied à la garenne. Il revient à huit heures trois quarts, décrit de sa main et donne les relais, pour le lendemain, à courre le cerf.

Le 29, lundi.—Il revient à Paris, soupe à la Chaussée, maison de M. le président Chevalier, va trouver la compagnie qui soupoit, se met entre M. de Mayenne et M. de Nevers. A sept heures et un quart il entre en carrosse à Paris, va chez la Reine à huit heures et demie, puis va se mettre au lit à neuf heures trois quarts[271].

Le 1er juin, jeudi.—A Rueil dîné; il va s'asseoir à table avec la compagnie, y mange peu, va aux grottes, y mouille, y est mouillé, revient à six heures chez la Reine, puis va souper et revient chez la Reine.

Le 4, dimanche.—Comme on lui reprochoit de ne Juin
1617
pas aller voir la Reine, il répondit que cela l'échauffoit.

Le 5, lundi.—Il avoit cessé de jouer à la paume pendant quelque temps; il s'y est remis.

Le 6, mardi.—Il ordonne de son équipage de canons qu'il veut faire mener à Fontainebleau; va en son écurie, au conseil, chez la Reine. Le soir il va chez la Reine.

Le 7, mercredi.—Il entre en carrosse à cinq heures et part de Paris pour aller à Fontainebleau, arrive à huit heures et demie à Essonne, où il dîne. A dix heures et un quart il rentre en carrosse jusqu'à Pont-Thierry, où il prend le petit, à quatre personnes, et le conduit lui-même au grand trot jusques à la forêt, et de là par ses petits cochers jusques à Fontainebleau, où il arrive à une heure et demie. Débotté, il va jouer à la paume, puis se va promener jusques à cinq heures, puis soupé. Il va encore se promener; à huit heures mis au lit.

Le 8, jeudi.—Il se va promener derrière le chenil, à travers les blés et les sables, à pied, va chez la Reine; va en carrosse, à la garenne d'Avon, fouiller aux renards et aux blaireaux, de là fait tout le tour du parc à pied, peu dedans le carrosse, revient et se met dans une nacelle sur l'étang. Il va chez la Reine, puis se promener.

Le 20, mardi.—Il va chez la Reine, au conseil, puis en la chambre ovale, donne audience au marquis de Lancy, ambassadeur extraordinaire de Savoie pour le remercier de sa bonne volonté à son secours. Après son souper, mis au lit, levé, vêtu légèrement, il descend au jardin, s'amuse à faire la garde, se fait mettre en sentinelle, reçoit le commandement du sergent (c'étoit Descluseaux), y est jusques à une heure après minuit.

Le 23, vendredi.—Il voit jouer les artifices faits pour la Saint-Jean.

Le 24, samedi.—Il s'amuse le soir à des fusées et à chanter, va chez la Reine et en revient à minuit.

Le 26, lundi.—Le soir il se va promener, fait mettre le feu à toute la paille vidée des paillasses, va chez la Juin
1617
Reine, à neuf heures fait descendre son lit, ne se couche point, descend au jardin, où il est jusques à une heure trois quarts, se jette sur une paillasse, où il est dormant légèrement, tout vêtu.

Le 27, mardi.—Il part de Fontainebleau, arrive à Paris à dix heures et demie[272].

Le 30, vendredi.—Il va enfin chez la Reine de huit heures à minuit et demi.

Le 2 juillet, dimanche.—Il va à Saint-Germain-en-Laye.

Le 5, mercredi.—A trois heures il donne audience à M. l'ambassadeur d'Espagne, puis va jusques au clos de M. de Frontenac.

Le 6, jeudi.—Il va courir le cerf, revient disant qu'il a grand faim, va chez la Reine, qui n'avoit pas dîné et y a mangé et encore dîné. Le soir il retourne chez la Reine, et vient se mettre au lit à huit heures trois quarts.

Le 8, samedi, à Saint-Germain.—Il va à l'assemblée à Maisons, ensuite à la chasse voir mourir le cerf, puis va chez la Reine; à huit heures pansé, mis au lit. A pareille heure la maréchale d'Ancre décapitée et brûlée en Grève, à Paris; on lui en parla si souvent et si longtemps qu'il fut en continuelle appréhension[273], sans se pouvoir endormir jusques à trois heures et demie après minuit, qu'il s'endort jusques à huit heures un quart.

Le 10, lundi.—Éveillé à six heures après minuit comme il l'avoit commandé, il va à Saint-Germain-en-Laye où il a dîné; revient en carrosse à Paris à dix heures et Juil
1617
demie. Débotté et, jusques à une heure, amusé, il va au conseil, au jeu de paume, chez la Reine; à cinq heures et demie soupé, puis chez la Reine, il en revient à neuf heures et demie, et est mis au lit.

Le 15, samedi.—Il va chez la Reine, et donne audience aux ambassadeurs de Venise et de Savoie, va au parc, y fait mettre son petit canon et fait mettre un chapeau contre une motte de terre, y pointe sa petite pièce de deux cents pas, donne demi-pied à côté, main droite, et à la deuxième fois donne dedans. Il va vers les Bonshommes, où il a goûté; bu dans son chapeau du vin clairet et de l'eau; il fait boire ainsi M. de Guise et d'autres.

Le 24, lundi.—Il va sur la rivière faire pêcher le cormoran, le soir chez la Reine, à la comédie en la galerie.

Le 25, mardi.—Il va chez la Reine, puis va vers les Bonshommes; baigné à la rivière, la première fois depuis qu'il est Roi, enroué après.

Le 27, jeudi.—Il va à Saint-Germain, se baigne à la rivière à main droite, vers la pointe de l'île de la Garenne, y est un quart d'heure.

Le 31, lundi.—Le matin baigné en sa chambre. Le soir il entend la comédie en sa chambre.

Le 2 août, mercredi.—Au bain en sa chambre, il est peint par Fernand[274], peintre excellent, étant dans l'eau. Le soir il voit jouer la comédie.

Le 4, vendredi.—Il va aux Tuileries, où il fait courir trois renards par ses petits chiens; l'on y avoit apporté les renards. Le soir il va chez la Reine.

Le 15, mardi.—Il va au sermon du P. Arnoux, jésuite, voit la Reine en la maison où il fait la collation; c'étoit à Saint-Germain.

Août
1617

Le 25, vendredi.—Il part de Paris pour aller à Lésigny et au bois de Piple; il arrive à une heure, va aux Fontaines, se trouve las, se couche sur un matelas, court un blaireau après.

Le 29, mardi.—Il va sur l'étang (il faisoit une extrême chaleur) revient à Paris. Il se plaint de tranchées au ventre, ce qui l'empêche d'aller dîner au faubourg Saint-Honoré, chez M. de Vendôme, et de tenir à baptême son fils.

Le 2 septembre, samedi.—Il va chez la Reine, puis part de Paris pour aller à Nanterre chasser à la garenne du Vésinet, arrive à Saint-Germain par les terrasses, va jouer à la paume au jeu du bourg, puis se promener.

Le 3, dimanche, à Saint-Germain.—Il va au vieux château pour voir l'endroit où le tonnerre vient de tomber. C'étoit auprès de la chapelle, au-dessus de la voûte du château, d'où il remonta de la cour après avoir pirouetté autour de trois ou quatre personnes qui y étoient.

Le 6, mercredi.—Il va chez la Reine, fait tirer des fusées dans le préau, joue aux barres, va à l'assemblée à Joyenval, y dîne, ayant fait quatorze lieues dans le jour sans être aucunement las, ayant chassé beaucoup.

Le 8, vendredi, à Saint-Germain.—Confessé par le P. Arnoux, il va à la chapelle de la terrasse, où il entend la messe, communie, entend encore la grande messe, puis touche quatre Espagnols malades, par grâce, à cause des maladies qui avoient cours. Il va chez la Reine après son dîner, et à deux heures à l'église, au village, au sermon du frère Paolo di Cesena, Italien, général des Capucins, qui prêcha en son langage, et y entend vêpres, revient à quatre heures. Il va au préau jouer aux barres, puis chez la Reine; mis au lit, il écrit lui-même et donne les relais pour courir le cerf le jour d'après.

Le 9, samedi.—Il part de Saint-Germain, va à l'assemblée en Vésinet, où il dîne. A Maisons, le Roi y passe en Sept
1617
bac, revient à Paris à quatre heures. Il va chez la Reine après son souper, revient à huit heures.

Le 10, dimanche.—Le Roi va voir le général des Capucins.

Le 11, lundi.—Il va chez la Reine, où se font les fiançailles de M. de Luynes avec Mlle de Montbazon[275]. M. l'archevêque de Tours, auparavant évêque de Bayonne, y fit la cérémonie.

Le 13, mercredi.—A son lever il monte en la chambre de M. de Luynes, et à cinq heures le mène à la chapelle de la Tour, près de l'antichambre de la Reine, où, par M. l'archevêque de Tours, il est épousé. Après son dîner il va chez la Reine, au conseil, va au souper que donne M. de Luynes.

Le 15, vendredi.—Ce jourd'hui, à midi, M. le prince de Condé a été sorti de la Bastille et mené au bois de Vincennes avec Madame sa femme[276].

Le 21, jeudi.—Il va mettre la première pierre au pont Saint-Michel. En ce temps-là il alloit souvent à l'assemblée de Joyenval.

Le 22, vendredi.—Mis son habit de satin; il recorde son ballet, va chez la Reine, va au conseil, puis part pour Saint-Germain.

Le 23, samedi.—Il va à l'assemblée à Maisons; le Roi passe la rivière à gué devant la maison de M. le président Chevalier, courant après le cerf.

Le 25, lundi.—Il va à l'assemblée à Vaucresson, y dîne, soupe à Saint-Germain.

Le 26, mardi.—Il revient à Paris, va chez la Reine.

Le 8 octobre, dimanche, à Saint-Germain.—Il va par la terrasse à pied à la garenne, où il chasse aux lapins à coup de sa petite pièce, en tue un par la tête.

Oct
1617

Le 18, mercredi.—Chez la Reine, dans la chapelle de la Tour, il y tient à baptême le fils aîné de M. de Vendôme, duc de Mercœur, avec la Reine[277].

Le 24, mardi.—Il donne audience aux ambassadeurs de Venise et de Savoie, qui prennent congé.

Le 27, vendredi.—Il va à l'assemblée à Joyenval, où il a dîné, arrive à neuf heures et demie, va faire la recette de son poisson, et donne dix écus au pourvoyeur et une pistole à ses serviteurs.

Le 1er novembre, mercredi.—Il touche les malades en la galerie; à onze heures il va chez la Reine.

Le 11, samedi.—Il va chez la Reine, au conseil; à midi il entre en carrosse, part de Paris allant à Rouen, arrive à Saint-Germain, il pleuvoit. Il s'amuse à faire lui-même un petit fourneau de forge, de brique et de mortier.

Le 14, mardi.—Il part de Saint-Germain; à l'entrée du bourg, M. d'Épernon, revenant de Guise, lui fait la révérence. Il soupe à Mantes pour la première fois, y joue à la paume; il dîne à Fresnède.

Le 15, mercredi.—Il arrive à Vernon pour la première fois, y dîne, arrive à Gaillon[278], va soudain à pied visiter le jardin, puis soupé.

Le 16, jeudi.—Il va en son cabinet, au conseil, où il n'y avoit que le président Jeannin.

Le 23, jeudi.—Il part de Gaillon et va à Pont-de-l'Arche pour la première fois; à Rouville dîné. Il va à Pont-de-l'Arche, où le sieur de Marsillat lui donne la collation de confitures.

Nov
1617

Le 24, vendredi.—Il part de Rouville pour aller à Rouen, la première fois, à quatre heures, sans cérémonie, va descendre à l'église de l'évêché, où il fut reçu par M. de Harlay, archevêque. A cinq heures à Saint-Ouen où il logea[279].

Le 25, samedi.—Il va à la messe et aux vêpres à Saint-Ouen. Il pleuvoit, il languit et s'amuse à jouer au volant en son cabinet.

Le 27, lundi.—Il part de Rouen pour aller à Dieppe, dîne à Tote et soupe à Baqueville, va se promener partout.

Le 28, mardi.—Il arrive à Dieppe pour la première fois, va au derrière de son logis pour y voir la mer, va voir le port.

Le 29, mercredi.—Il monte à cheval, va au-dessus du Pollet, monte au fort de Lunes, à main gauche sur le bord de la mer, où il fait mouiller et mouille lui-même, faisant avancer le piquet. M. le duc de Mayenne rencontra un piquet qui le fit tomber et fut couvert d'eau.

Le 30, jeudi.—A son dîner, Mathurine[280] y emmène son hôtesse qui dit au Roi: «Dieu vous donne bonne vie et longue, Sire; autrefois j'ai baisé votre père, mais je vois bien que je ne vous baiserai pas. Que Dieu vous bénisse, Sire, et vous maintienne longuement.» C'étoit l'hôtesse de l'Écu de Bretagne. Il retourne au bord de la mer, fait jeter dans l'eau le sieur de Frasque, écuyer de la Reine, et le sieur Bernard, s'amuse, achète beaucoup de petites besognes.

Le 1er décembre, vendredi.—Il part de Dieppe, soupe le lendemain à Rouen.

Le 4, lundi.—Il va à la messe à Notre-Dame, et puis faire l'ouverture des Notables qu'il avoit fait venir pour Déc
1617
donner ordre aux affaires de l'État, et prononça ces mots: Messieurs, j'ai dit mon intention à monsieur le chancelier; il vous la fera entendre; asseyez-vous.

Le 5, mardi, à Rouen.—Il va au collége des Jésuites, pour voir les préparatifs qu'ils avoient faits pour jouer des jeux.

Le 10, dimanche.—Il va chez M. de Luynes, va au conseil, à la messe à Saint-Ouen.

Le 12, mardi.—Il entre en carrosse, va à l'hôtel de Ville à sa collation. Ce jourd'hui M. de Villeroy est décédé, à quatre heures après midi.

Le 17, dimanche.—Dîné chez M. de Luynes; il ne boit pas du muscat.

Le 23, samedi.—Il donne audience à M. le président de Hacqueville[281], accompagné de M. le président Fayet, députés de la cour du parlement de Paris, pour faire remontrances pour la continuation du droit annuel à messieurs des comptes, cour des aides de Paris et trésorier de France.

Le 26, mercredi.—Il reçoit les avis par écrit des notables. M. le cardinal du Perron porta la parole.

Le 28, samedi.—Il va au conseil, où étoient les princes, ducs et pairs et officiers de la couronne, pour lui communiquer les avis de l'assemblée et demander le leur. Le lendemain il donne congé à messieurs les notables, au conseil. A deux heures messieurs de la cour du parlement prennent congé de lui.

Le 29, vendredi.—Il part de Rouen après l'assemblée, et dîne à Pont de l'Arche, revient souper à Gaillon, et y a couché.

Le 30, samedi.—En chassant il arrive à Mantes, où il soupe et couche.

Le 31, dimanche.—Il va à la messe à Notre-Dame Déc
1617
et à sept heures entre en carrosse, et part de Mantes; va à Fresne, où il arrive à neuf heures et où il a dîné: ensuite il va à cheval en chassant jusques à Saint-Germain-en-Laye, où il arrive à deux heures et un quart. La Reine, qui ne faisoit que d'arriver[282], le reçoit à l'entrée de la salle; il va chez la Reine, puis au petit cabinet de la galerie, où il s'amuse à faire des fusées. A six heures et demie soupé; il va après chez la Reine, en revient à huit heures trois quarts.

ANNÉE 1618.

Le journal d'Héroard devient plus concis.—Intimité croissante avec M. de Luynes.—Le Roi visite Madrid, et y va loger.—Congé donné aux Notables mandés de Rouen.—Soupers chez M. de Luynes; remarques d'Héroard.—Ballets.—Incendie au palais de Justice.—Mort de la duchesse de Nevers.—Uniformité de la vie du Roi.—Plaintes des ducs et pairs contre le garde des sceaux.—Le Roi donne la barette à M. de Gondi.—Il va à Grosbois chez le comte d'Auvergne.—M. de la Rochefoucauld nommé grand aumônier.—Le Roi à Soissons.—A Coucy.—Le cardinal de Savoie.

Le 3 janvier, mercredi.—Il va en carrosse à la garenne, où il vole et court des lièvres avec ses lévriers, revient à cinq heures, par les terrasses, chez la Reine, où il a goûté d'un gâteau au beurre fait par Mme Bélier.

Le 4, jeudi.—A sept heures, éveillé par Beringhen, fort gai, il va à l'assemblée à Joyenval, y dîne. Courant le cerf, il rencontre un petit porte-panier, lui fait déployer toute sa marchandise, et l'achète, laissant le marchand bien joyeux, qui pensoit que ce fussent des voleurs; il fut bien aise de lui avoir fait cette peine. A onze heures il va au laissez-courre; il avoit fort gelé; courant, il en voit qui tremblent, ne court plus, s'en revient et va chez la Reine, se couche à sept heures trois quarts.

Le 6, samedi.—Soupé en la chambre de M. de Luynes, il va après à la comédie françoise.

Le 10, mercredi.—Il va chez la Reine, puis à la chambre de M. de Luynes, qui devoit donner la collation de confitures, va à la cuisine, où se proposoit de souper M. de Luynes, et demande à souper au cuisinier, se fait porter un couvert, et a soupé.

Janv
1618

Le 11, jeudi.—Il donne audience à l'ambassadeur de Savoie, va chez la Reine et chez Mme de Conty qui donnoit la collation, où il n'a rien mangé.

Le 18, jeudi.—Hors la ville, par la Porte neuve, il va à pied jusques à Chaillot, faisant mener son petit canon par ses petits suisses. M. de Castille lui donne des petits canons de fer, faits en Suisse, et la collation. Il va chez la Reine, soupe, retourne chez la Reine, chez M. de Luynes; revient à neuf heures et demie.

Le 19, vendredi.—Il va à Madrid, visite tout le logement du château, le fait lui-même marquer pour y aller loger, revient chez la Reine; le soir encore chez la Reine et chez M. de Luynes.

Le 23, mardi.—Il va chez la Reine, au conseil, dîne, donne audience à l'ambassadeur de Venise, puis entre en carrosse et va à Madrid pour y loger; ce fut la première fois.

Le 25, jeudi.—Il prend un émérillon sur le poing et va à pied dans le bois, vers la Muette, revient tout à l'entour de la muraille du parc, va chez la Reine; va après à la chasse vers la plaine de Saint-Denis.

Le 26, vendredi.—Après avoir été au conseil, il va se promener et faire travailler à un fort qu'il fait faire près de la porte, à l'avenue du pont de Neuilly.

Le 28, dimanche.—Il chasse jusque par delà du pont de Saint-Cloud; il étoit à cheval; il faisoit un extrême froid. Il l'avoue contre sa coutume, et demande à se chauffer; il va chez la Reine, puis chez M. de Luynes, où il a soupé; revient à huit heures.

Le 29, lundi.—Il va travailler à son fort, revient pour le conseil où il donne congé aux notables qu'il avoit mandés pour l'assemblée tenue à Rouen; puis retourne travailler à son fort, va lui-même querir et conduire des gazons; il faisoit grand froid.

Le 31, mercredi.—Après son dîner, il va travailler à son fort, à deux heures revient au conseil; à trois Janv
1618
s'en va vers Longchamp à la volerie, revient à quatre heures, travaille encore à son fort, puis va chez la Reine, où il mange quelques beignets qui se y faisoient.

Le 2 février, vendredi.—Il va à confesse au père Arnoux[283], à la messe à la chapelle de la Tour, où il communie, et, dans la grande galerie, touche cent six malades; va au sermon et aux vêpres à Saint-Séverin, puis chez la Reine.

Le 4, dimanche.—Il va chez la Reine, puis va souper chez M. de Luynes et les princes et autres seigneurs avec lui, revient à neuf heures.

Le 11, dimanche.—Soupé chez M. de Luynes; confusion[284].

Le 12, lundi.—Il va chez la Reine, chez M. de Luynes, y recorde son ballet.

Le 15, jeudi.—Il va chez la Reine et chez M. de Luynes qui soupoit, y recorde son ballet, revient à minuit.

Le 18, dimanche.—Soupé chez M. de Luynes; un peu de confusion.

Le 20, mardi.—Il va chez la Reine et chez M. de Luynes, où il recorde son ballet à neuf heures trois quarts; il revient en la salle, où il voit danser un ballet fait par M. de Nemours; revient à une heure et demie.

Le 22, jeudi.—Soupé chez M. de Luynes et dansé son ballet.

Le 25, dimanche.—Il monte dans la chambre de M. de Luynes, où Mme de Luynes donna à souper à la Reine, laquelle à minuit y dansa son ballet. A deux heures après minuit le Roi s'en revient.

Fév
1618

Le 27, mardi.—Le soir chez la Reine et chez M. de Luynes, où il danse encore un petit ballet, appris en trois jours.

Le 28, mercredi.—Il va chez la Reine, au sermon du P. Arnoux en la grande salle; amusé ensuite diversement jusques à six heures; il retourne chez la Reine après son souper jusques à huit heures et demie.

Le 2 mars, vendredi.—Il donne audience aux ambassadeurs de Mantoue et de Savoie.

Le 7, mercredi.—Éveillé à cinq heures et demie par M. Beringhen, son premier valet de chambre, pour bailler les clefs des reliques qui sont à la Sainte-Chapelle, de peur du feu qui s'étoit mis au Palais, et brûlé toute la grande salle. Il commença à deux heures après minuit par le logis du prévôt de l'île[285]. Levé en robe, il va en la galerie pour voir le feu; remis au lit à six heures. Dans la journée, il va en carrosse à l'Arsenal.

Le 13, mardi.—Il va chez M. de Mayenne le visiter sur la mort de Mme de Nevers, sa sœur, s'étant vêtu de deuil noir pour le gratifier.

Le 22, jeudi.—Il entre en carrosse, va à la chasse vers les plaines de Saint-Cloud, par la pluie, la grêle et le tonnerre et éclairs; il entre dans une ferme, où quelques-uns s'étoient retirés, qui mangeoient du pain bis et du beurre salé de la fermière. Il revient ses bottes pleines d'eau, qu'il fallut fendre pour le débotter, va après chez la Reine.

Le 30, vendredi.—Il va en la cour, où il voit un présent de la reine d'Angleterre: c'étoient six chevaux et une meute de quarante chiens. Il va après chez la Reine et au conseil; le soir encore chez la Reine[286].

Avr
1618

Le 22, dimanche.—Il va en la galerie, où il fait faire les exercices lui-même à ses petits suisses; à quatre heures trois quarts il revient en la ruelle de son lit, reçoit la plainte de certains ducs sur leur préséance avec M. le garde des sceaux, et la plainte particulière de M. d'Épernon contre le garde des sceaux[287].

Le 24, mardi.—Il va chez la Reine, où, dans le cabinet, il entend un évêque grec célébrant la messe à la grecque. Il va ensuite au jeu de paume, revient au conseil, puis dîne, va après chez la Reine, puis aux Tuileries par la galerie. A quatre heures il retourne au conseil, soupe à sept heures, après va paître ses émérillons, et revient se coucher à neuf heures.

Le 25, mercredi.—Il va chez la Reine, et à une heure entre en carrosse, et part de Paris. Il va à Vanves, loge en la maison de M. Prévost, seigneur de Saint-Germain[288], soupe et couche à Vanves.

Le 10 mai, jeudi.—Dans la forêt de Saint-Germain il court le cerf, le prend à quatre heures et demie, et se trouvant seul, accompagné seulement de M. du Hallier-Vitry[289], capitaine de ses gardes du corps, et du baron de Palluau, son premier maître d'hôtel, il dit: Puisque je suis seul à la mort du cerf, c'est à moi à aller querir une charrette pour le porter. Il pique, et s'en va vers le bourg, en arrête une et la ramène, fait donner la curée en la cour; il va chez la Reine avant son souper.

Mai
1618

Le 20, dimanche.—Il va en carrosse à Notre-Dame pour donner le bonnet de cardinal à M. Henri de Gondi, évêque de Paris[290].

Le 1er juin, vendredi.—Il va à l'assemblée à Herbelay; il est mouillé et, à la chapelle de la terrasse, se trouve pris de foiblesse.

Le 3, dimanche.—Il va à la chapelle de la terrasse, a froid, se fait faire du feu, et touche pourtant treize cent dix malades en l'allée du palemail.

Le 11, lundi.—A une heure il donne audience au colonel Stechimbourg, colonel de la cavalerie légère de Hollande, venant de la part du comte Maurice, prince d'Orange.

Le 18, lundi.—Il part de Paris et va à Gros-Bois, où M. le comte d'Auvergne lui a fait donner à dîner.

Le 30, samedi.—Il va jouer en son antichambre au billard; à onze heures va à l'étang; il faisoit grand chaud. M. le duc d'Uzès vient à lui de la part de la Reine; il entre en la boue pour le faire aller à lui, et le fit[291].

Le 1er juillet, dimanche.—Il va à onze heures trois quarts au devant de la Reine, qui vient dîner ici; à cinq heures la Reine s'en retourne à Paris. Il soupe chez M. de Luynes[292].

Le 6 août, mercredi.—Il se baigne dans la rivière à Asnières, et soupe à la Planquette.

Le 8 septembre, samedi.—A une heure dîné, où M. le cardinal de la Rochefoucauld dit le Benedicite comme grand aumônier, dont, le matin du jour précédent, il avoit prêté le serment.

Le 10, lundi.—Il donne l'ordre du Saint-Esprit à Sept
1618
M. de la Rochefoucauld, qu'il avoit fait grand aumônier[293].

Le 15, samedi.—Il dîne à Monceaux; la Reine y arrive pour la première fois.

Le 25, mardi.—Il va à Villers-Cotterets pour la première fois avec le cardinal de Retz.

Le 28, vendredi.—Il va à la messe aux Chartreux à Bourg-Fontaine, a visité toute la maison et le lieu, y a dîné.

Le 1er octobre, lundi.—Il arrive à Soissons pour la première fois, va à l'église Notre-Dame, revient au château, où il a logé, va de là visiter les retranchements faits durant le siége; à six heures il va souper au logis de M. de Luynes.

Le 4, jeudi.—Il quitte Soissons, dîne à Chavignan et soupe à Laon pour la première fois, va à l'église et se promener.

Le 5, vendredi.—M. de Luynes me dit que le Roi lui avoit dit le soir avant que de s'endormir que depuis quelques jours en se couchant, ou aussitôt qu'il étoit couché, il avoit froid.

Le 6, samedi.—Il part de Coucy, en chemin mange du raisin en un village où l'on faisoit la vendange, et a tâté un peu du vin doux[294].

Le 10, mercredi.—Il va en l'église, où il eut un peu de foiblesse, blêmit, sua à la figure, revient, chauffé, blême[295].

Le 18, jeudi.—Il arrive à Paris[296].

Le 6 novembre, mardi.—Le cardinal de Savoie arrive peu accompagné, venant pour remercier le Roi Nov
1618
pour le secours qu'il avoit reçu pour les événements de Verceil[297].

Le 7 novembre, mercredi.—Il donne audience au duc de Montéléon, qui prend congé pour s'en retourner en Espagne; va chez la Reine, à deux heures, en sa chambre, donne audience au cardinal de Savoie[298].

Le 15, jeudi.—Il va à l'assemblée à Forqueil, y mène le cardinal de Savoie, qui a dîné et couru avec lui.

Le 29, jeudi.—Il va par la galerie aux Tuileries, où il s'informe, d'un archer des gardes du corps, de la comète qui avoit été vue le matin avec une longue queue.

Le 21 décembre, vendredi.—Il va aux Feuillants, où il se fait un grand concert de musique.

Le 29, samedi.—Il va à la volerie vers Massy, fait volerie plénière, y mène M. de Vaudemont[299] et le cardinal de Savoie, revient chez la Reine, soupe, monte chez M. de Luynes, où il voit jouer une comédie françoise.

ANNÉE 1619.

Fiançailles de Madame Christine de France.—Mariage de Mlle de Vendôme.—Baptême du fils de M. de Puisieux.—Le prince de Savoie.—Intimité croissante avec M. de Luynes.—Mariage de Madame Christine.—Ballet.—Départ de la Reine mère de Blois.—Audience des cours souveraines avant le départ du Roi.—Voyage de Touraine.—Réception de M. de Luynes chez lui.—Ambassadeur de Hollande pour le meurtre de Barnevelt.—Ambassade d'Angleterre; d'Alger.—Les députés de l'assemblée générale du clergé.—Serment du maréchal de Praslin.—Une couleuvre.—Entrevue avec la Reine mère.—Entrevue du prince de Condé; son pardon.—Discussion du prince de Condé et de M. de Soissons pour la serviette du Roi.—Fête chez M. de Luynes.—Départ de la princesse de Piémont.—Vendôme.—Le Roi raccommode lui-même une roue de sa voiture.—Chartres.—Mantes.—Le Roi touche trois Portugais.—La compagnie des mulets.—M. de Tavannes et le jugement du capitaine des mulets.—Serment du maréchal de Cadenet.—Retour à Paris.—Les députés de l'assemblée de Loudun.—Promotion de chevaliers du Saint-Esprit.

Le 5, janvier, samedi.—Il va chez la Reine, puis monte chez M. de Luynes, où il fait les Rois. M. le comte de la Rocheguyon fut le roi.

Le 9, mercredi.—Il monte à la chambre de M. de Luynes, où il recorde son ballet; après son souper il va chez la Reine et encore chez M. de Luynes, à la comédie.

Le 11, vendredi.—A sept heures, dans sa chambre, Madame Henriette de France[300] est fiancée et le contrat signé fait entre [Victor-Amédée] de Savoie, à la poursuite de [Maurice] de Savoie, cardinal, son frère.

Janv
1619

Le 20, dimanche.—Il va à la chapelle de la Tour, où Mlle de Vendôme est épousée à M. le duc d'Elbeuf[301]. Après son souper, il va chez la Reine et chez Mlle de Vendôme pour lui faire la guerre.

Le 25, vendredi.—Mis au lit, prié Dieu. A onze heures ou environ, sans qu'il y pensât, M. de Luynes vient pour le persuader de coucher avec la Reine. Il résiste fort et ferme, par effort jusques aux larmes, y est emporté, couché, s'efforce deux fois comme l'on dit, hæc omnia nec inscio. A deux heures il revient; dévêtu, mis au lit, il s'endort jusqu'à neuf heures du matin[302].

Le 3 février, dimanche.—Il va en carrosse chez M. de Sillery, chancelier de France, où étoit logé M. de Puisieux, son fils[303] et de là va à Saint-Eustache où il présente à baptême le fils du sieur de Puisieux[304] avec Mme la comtesse de Soissons; revient chez M. le chancelier, où il a goûté. Il revient à cinq heures trois quarts, monte chez M. de Luynes, où il recorde son ballet. Après son souper il retourne chez M. de Luynes, à la comédie, puis va chez la Reine à une heure.

Le 6, mercredi.—A sept heures le prince major de Savoie Fév
1619
arrive avec son frère le prince Thomas[305], en poste, étant partis de Pouilly, et salue le Roi en son cabinet. Le Roi le mène chez Madame, qu'il venoit épouser, puis chez la Reine.

Le 9, samedi.—Il va visiter sa fauconnerie au Bourg-la-Reine avec le prince de Piémont[306] et ses frères, revient à cinq heures, va chez la Reine; à huit heures Madame Christine de France fut fiancée en la chambre du Roi, par M. le cardinal de la Rochefoucauld, grand aumônier de France. Le Roi va ensuite chez M. de Luynes, où il a soupé.

Le 10, dimanche.—Il va chez la Reine, à la chapelle de la Tour, où, entre dix et onze heures, fut épousée Madame Christine de France au prince de Piémont, et presque à la même heure environ de sa nativité. Le Roi monte le soir chez M. de Luynes, où on m'a dit qu'il a fort gaiement soupé. A dix heures, il conduit Madame Christine en sa chambre, et y est tant que le prince fut couché et quelque temps après. A minuit il va chez la Reine, et en revient à deux heures.

Le 12, mardi.—Il soupe chez M. de Luynes et donne le souper à tous ceux qui étoient de son ballet, s'y est habillé et a descendu à la salle où, à minuit, il a dansé son ballet[307].

Le 19, mardi, à Saint-Germain.—Il va au bois et à la volerie, et revient par le moulin d'en bas, où le meunier, le prenant pour un fauconnier, couroit après lui, disant et opiniâtrement que c'étoit lui qui lui avoit pris Fév
1619
sa poule; à quoi il prenoit plaisir et à le faire contester.

Le 23, samedi.—Il reçoit des nouvelles que la Reine sa mère, étoit partie de Blois[308] le vendredi au soir, va ensuite chez M. de Luynes, et le lendemain à Paris.

Le 18 mars, mardi.—A dix heures et demie du soir levé, vêtu en robe, il va chez la Reine cum voluptate[309].

Le 8 avril, jeudi, à Saint-Germain.—Il va au conseil, puis à la chapelle du vieux château, au service pour la mort de l'Empereur[310].

Le 27, mardi.—Il va à Saint-Germain-en-Laye voir Monsieur, son frère, malade.

Le 29, jeudi.—Il va au conseil, donne audience au nonce, à l'ambassadeur de Lorraine.

Le 1er mai, mercredi, à Saint-Germain.—Il va par les terrasses à la garenne, voir faire la monstre à sa compagnie de chevau-légers, où le sieur de la Curée, qui l'avoit commandée en lieutenance sous le feu Roi, s'en démet au profit du sieur de Brantes[311].

Le 5, dimanche.—Il donne audience à messieurs des compagnies souveraines de Paris, qu'il avoit mandés pour leur commander ce qu'il y avoit à faire pendant le voyage qu'il alloit faire en Touraine, pour les différends de lui et de la Reine sa mère[312].

Le 12, dimanche.—Pendant son voyage de Touraine, Mai
1619
il soupe au Pontil, en la maison du sieur d'Escures, premier maître d'hôtel de Monsieur, qui a donné le souper au Roi.

Le 19 mai, dimanche, à Amboise.—Il a touché cinq malades espagnols, à la prière de la Reine, d'autant qu'il ne toucha point à cause des bruits de peste.

Le 20, lundi.—Il va aux Arpentils, où il a dîné, donné par M. de Luynes; c'étoit sa maison.

Le 28, mardi.—Le Roi arrive à Tours, où M. de Brenne lui apporte des lettres de la Reine mère; il le renvoie le surlendemain sans lettres, mais avec des compliments.

Le 1er juin, samedi.—Il donne audience à un député de messieurs des États des Pays-Bas sur le fait de l'exécution à mort du sieur de Barnawelt[313].

Le 10, lundi.—Baigné en la rivière de Loire, au-devant de Marmoustier[314].

Le 19, mercredi.—Il reçoit M. de Mayenne venant de l'armée de Guyenne.

Le 20, jeudi.—Il donne audience au chevalier Hernet, ambassadeur extraordinaire d'Angleterre et à un chaoux turc venant d'Alger; il étoit renégat natif de Martigues[315].—Il me fit l'honneur de me dire qu'il étoit sorti Juin
1619
l'après-dînée, mais qu'ayant senti la chaleur qui lui donnoit à la tête, il s'étoit vite retiré à l'ombre, et que le soir précédent, lorsqu'il se coucha, il avoit mal à la tête, qui lui donnoit de l'inquiétude et qu'il ne me l'avoit pas voulu dire. Il avoit été longtemps sur la rivière du Cher à tirer aux oiseaux, puis dans la prairie, où il se mouilla fort, à cause de ce qu'il avoit beaucoup plu.

Le 24, lundi.—Le prince de Piémont revient d'Angoulême.

Le 25, mardi.—A cinq heures et demie, il salue Mme la princesse de Piémont, sa sœur, qui arrive.

Le 27, jeudi.—Il part du Plessis, va à Azay, en la maison de M. de Lansac, où il dîne, et en revient le 29[316].

Le 2 juillet, mardi.—Cejourd'hui matin mourut, au Pont de la Mothe, près de Tours, le colonel Galati, Suisse[317] qui avoit si bien fait à Arques du vivant du feu Roi. Il se leva, disoit-il, pour aller voir le Roi au Plessis; ayant fait deux tours de chambre, il lui prend une foiblesse; étant mis sur le lit, la parole lui revient et deux jours après il décéda, âgé de plus de quatre-vingts ans.

Le 5, vendredi.—Il se relève en robe, fait porter des paillasses, ne se couche pas jusques à une heure après minuit, après avoir fort joué, passé son temps, fait manger les confitures qui étoient dans ses coffres à Marais, Boulanger, etc., fait éveiller ceux qui dormoient Juil
1619
sur les paillasses en leur faisant passer un fétu sur le visage, et avant leur avoit barbouillé les mains avec de l'encre; s'endort tout vêtu sur une paillasse.

Le 8, lundi.—Le Roi étant à Amboise, le comte Henri de Nassau arrive, venant de Flandre[318].

Le 22, lundi.—Le Roi donne audience en sa chambre à messieurs de l'assemblée générale du clergé, et leur donne congé.

Le 1er août, jeudi.—Il arrive à Tilly, maison de M. le comte du Lude[319]; à onze heures et demie il prend son harquebuse sur l'épaule et va à pied à l'étang d'Heume, où il a chassé sur l'eau dans son petit bateau et tué beaucoup de gibier de son harquebuse, nonobstant la pluie et le vent; revient à cheval[320].

Le 13, mardi.—Étant au Plessis, il va dans la journée à la comédie françoise et le soir à la comédie espagnole.

Le 24, samedi.—M. de Praslin a prêté le serment de maréchal de France[321].

Le 26, lundi, au Lude.—Pendant ce voyage il s'est baigné fort souvent ou à la rivière ou dans son cabinet, et a continué de se montrer très-attentif pour la Reine. Il ne manque presque jamais, quoiqu'en voyage, de tenir le conseil, et assiste souvent à la comédie espagnole. Il va généralement chez la Reine le matin et le soir.

Le 3 septembre, mardi.—En arrivant à Tours, il fait Sept
1619
tirer en salut dans son bateau l'harquebuse de M. de Beaumont, mestre de camp; elle creva tout auprès du Roi et il en eut la main toute froissée, et le sieur de Touvion fut blessé à la face.

Le 5, jeudi.—Il part de Tours à neuf heures et demie, et va à Cousières au-devant de la Reine mère, qui y avoit couché revenant d'Angoulême; y arriva à onze heures et demie. M. de Montbazon vint au-devant de lui, le conduisit par le bois au jardin, aux allées où étoit la Reine mère; elle vient au-devant de lui, l'embrasse, le baise, se prend à pleurer, lui aussi, sans parler l'un et l'autre; après souper il va chez la Reine, puis va voir la Reine mère, logée à l'hôtel de la Bordesière[322].

Le 12, jeudi.—Il va pour tirer de l'harquebuse sur les plaines de Saint-Avertin, chassant à pied à main gauche d'une croix, sur le chemin pour aller à Cousières; n'étant que sept à huit, épars autour de lui, il s'éleva une grosse couleuvre, longue d'environ de quatre pieds, d'un vieux chaume, et venant droit à lui à grands élans. Il ne la voyoit point; on lui crie qu'il eût à prendre garde; il la voit à six pas près, saute en arrière, et en même temps couche en joue son harquebuse et la tue, l'ayant coupée en plusieurs pièces.

Le 19. jeudi.—Il va chez la Reine sa mère, et prend congé d'elle, part de Tours, et va à Amboise. La Reine mère va à Chinon.

Le 22, dimanche.—A onze heures et demie il va chez M. de Luynes, qui faisoit le festin à messieurs les princes de Piémont et à Mesdames, qui devoient partir le jour d'après.

Le 23, lundi.—Madame Christine de France, princesse Sept
1619
de Piémont, part pour aller en Piémont. Il l'accompagne en carrosse environ une demi-lieue, revient en diligence qu'il treuve au bout du pont d'Amboise, la conduit lui-même au galop, et arrive à dix heures trois quarts à Onzain, où il a dîné.

Le 24, mardi.—Il arrive en chassant à Vendôme pour la première fois, et va visiter le château, y monte à pied et visite tout.

Le 25, mercredi.—Il part de Vendôme, va à Claye, où il arrive à dix heures et demie, à cause que la roue de son petit carrosse s'étoit rompue au-dessous d'une montagne où il y avoit un bois et après une descente pierreuse; il prend une hache, lui-même coupe un arbre, l'accommode, et remet la roue dans le fer, puis s'en va.

Le 7 octobre, lundi, à Mantes[323].—Il mange une petite grappe de raisin de Corinthe, de ceux qui viennent de lui être présentés par l'un de ses médecins, qui étoit M. Le Tilien, demeurant à Mantes. Il part de Mantes, arrive à Marcines, maison de M. le chancelier Brulart, sieur de Sillery, où il a dîné et couché.

Le 10, jeudi.—Il arrive à Compiègne pour la première fois, y loge, et va à Saint-Cornille.

Le 12, samedi.—Il va de Compiègne à Mouchy, maison de M. de Humières.

Le 14, lundi.—Retour à Compiègne; conseil.

Le 17, jeudi.—Il va en son cabinet, où je lui demandai s'il toucheroit des malades; il y avoit de la peste à Paris.—Non, mais ces gens-ci me pressent si fort, si fort; parlez à eux, ils me persécutent si fort. Ils disent que les Rois ne meurent point de la peste (en colère); ils pensent que je sois un Roi de cartes: parlez-leur, dit-il au père Arnoux.

Oct
1619

Le 18, vendredi.—Il part pour Chantilly.

Le 20, dimanche, à Chantilly.—A trois heures, dans le petit cabinet de la tour de sa chambre, il reçoit M. le prince de Condé et Mme sa femme sortant de prison du bois de Vincennes, d'où ils étoient partis à onze heures, conduits par M. de Luynes. D'abord M. le Prince met les deux genoux en terre, il demande pardon; ce qu'on put entendre du Roi en le relevant fut qu'il falloit oublier toutes les choses passées, et que M. le Prince répondit «C'est ce que je demande». Mme la Princesse en fit autant, mais le Roi la releva, n'attendant pas qu'elle eût les genoux en terre, et la baisa et Mme de Ventadour, qui l'avoit accompagnée. Le Roi va montrer à M. le Prince ses oiseaux; à quatre heures ils se séparent.

Le 22, mardi.—Retour à Compiègne.

Le 1er novembre, vendredi.—Il touche trois Portugais malades des écrouelles, aux Minimes.

Le 2, samedi.—Revenant au quartier des mulets de Monsieur, son frère, il reçoit une grande plainte de nombre de paysans contre le capitaine des mulets, sur ce qu'il ne leur payoit que quatre sols par mulet, lui qui en avoit vingt. Il le condamne à être pris au corps, ramené au village, et à payer plus qu'il n'avoit convenu avec les paysans. Il ordonne pour premier président M. de Tavannes[324], M. de Grissac, gentilhomme de la vénerie, M. des Chapelles qui avoit le vol du cahier pour greffier, et quelques autres pour la capture, et assista à l'exécution; fait fouetter un des garçons de ce capitaine qui faisoit le rieur et le suffisant[325].

Le 13, mercredi.—Il va à sept heures du matin chez Nov
1619
M. de Luynes, en sort pour l'accompagner, allant à Paris au parlement, pour faire enregistrer ses provisions de duc et pair.

Le 24, dimanche.—Il a bu de l'hypocras de cidre de Vaugrineuse; le soir il envoya querir un gobelet et une bouteille d'hypocras de cidre, en boit deux coups, et en fait boire à tous ses gentilshommes présents.

Le 5 décembre, jeudi.—Il va au conseil, chez la Reine, chez M. de Luynes. A trois heures il donne audience au comte de Furstemberg[326], ambassadeur extraordinaire de l'Empereur pour avoir secours contre les Bohêmes.

Le 8, dimanche.—Il va en son cabinet, où il reçoit le serment de M. du Cadenet[327], frère de M. de Luynes, pour l'état de maréchal de France. La Reine part pour aller à Paris.

Le 10, mardi.—Il arrive à Paris à quatre heures, et va chez la Reine.

Le 20, vendredi.—Il donne audience aux députés de l'assemblée de Loudun lui présentant leurs cahiers.

Le 25, mercredi.—Il va après dîner à sa petite chambre, où entrent M. le prince de Condé, les sieurs de Tavannes, d'Andresy, de Flochet, et se parloient de mots qui dépassoient la gaillardise; le Roi dit: Je ne veux point que l'on dise des saletés et des vilainies.—Peu après il commanda au P. Arnoux de prêcher son sermon.

Le 27, vendredi.—A cinq heures et demie le Roi voulant souper, M. le comte de Soissons, grand-maître, voulut présenter la serviette; alors M. le prince de Condé Déc
1619
la lui veut ôter, l'autre s'en défend. Sur ce différend le Roi envoie querir Monsieur, son frère, auquel M. le Comte la donna, qui la servit au Roi[328]; il va chez la Reine.

Le 31, mardi.—A deux heures il entre en carrosse, et va aux Augustins pour faire les chevaliers du Saint-Esprit[329].

ANNÉE 1620.

Festin des Rois.—Le Roi manque de se noyer.—Mariage de M. de Cadenet.—Ballet.—Indisposition de la Reine.—Le Roi fait une omelette.—Il tue un aigle.—Ballet des ivrognes.—Mariage de M. de Liancourt.—Le Roi va à Amiens.—Fiançailles du jeune duc de Guise et de Mlle de Bourbon, et de son frère avec Mlle de Luynes.—Jubilé.—Conte du Roi.—Il est mordu par un de ses chiens.—Il couche avec M. de Canaples.—Baptême de Mlle de Bourbon.—Feu de la Saint-Jean.—Départ pour Rouen.—Le duc de Longueville.—Siége de Caen.—Prise du château.—Le Mans.—Le Roi fait arborer sa cornette.—Combat du Pont-de-Cé.—La Reine mère se soumet.—Séjour à Tours; la Reine s'y rend.—Revue.—Saintes.—Bordeaux.—Navarreins.—Le gouverneur de Sale.—Bazas.—Voyage à Abbeville.—Offrande due par les habitants.—Calais.

Le 1er janvier, mercredi.—Il va encore aux Augustins pour les chevaliers de l'ordre du Saint-Esprit, à deux heures et demie, y a dîné, au festin royal.

Le 2, jeudi.—Il va encore aux Augustins, à la messe des chevaliers pour les morts[330], y a dîné au festin, et après le dîner va tenir le chapitre.

Le 4, samedi.—Après son souper il joue au hère avec quelques princes et plusieurs seigneurs.

Le 5, dimanche.—A six heures trois quarts il va chez M. de Luynes, où il a soupé, au festin des Rois.

Le 13, lundi.—Il va chez la Reine, où il assiste aux fiançailles de M. de Cadenet et de Mlle de Péquigny, faites par Mgr le cardinal de la Rochefoucauld, et monte après chez M. de Luynes, où il recorde son ballet.

Janv
1620

Le 23, jeudi.—Il part de Lésigny et va à Gros-Bois, où M. le comte d'Auvergne lui a fait le festin, revient à Paris et le soir recorde son ballet chez M. de Luynes. Il va chez la Reine à huit heures.

Le 28, mardi.—Il va à pied jusqu'à l'île vis-à-vis des Bonshommes, où il tue une quantité de gibier à l'harquebuse, va chez la Reine, puis chez M. de Luynes, où il recorde son ballet.

Le 29, mercredi.—Il reçoit en son cabinet M. le maréchal de Lesdiguières; il recorde son ballet chez M. de Luynes, et le soir voit danser chez lui un ballet de la ville[331].

Le 30, jeudi.—A une heure il va par la galerie aux Tuileries à pied et en l'île devant les Bonshommes, passe à Grenelle, revient pour passer l'eau, fait dételer un cheval aveugle d'un chariot, l'attache à son petit bateau, qu'il faisoit toujours porter dans une charrette, se met dedans, le fait tirer par le cheval allant amont la rivière; le cheval se sentant battu aux jambes, se prend à courir et à prendre l'écart, de telle façon que le bateau se fût renversé dans la rivière, n'eût été que le sieur de Réaux, lieutenant des gardes du corps, coupa promptement la corde.

Le 2 février, dimanche.—Il va chez la Reine, en son cabinet des armes. A deux heures il entre en carrosse, va aux Feuillants, au sermon et à vêpres, où le chevalier Helver, ambassadeur d'Angleterre, renouvelle l'alliance avec le Roi, offensive et défensive. Le soir chez la Reine et chez M. de Luynes.

Le 5, mercredi.—Il va chez la Reine qui étoit fort malade de fièvre continue, double, tierce, n'en veut aucunement sortir pour aller prendre l'air. Il revient souper, Fév
1620
va encore chez la Reine, monte après chez M. de Luynes, revient à dix heures se coucher.

Le 6, jeudi.—Amusé diversement, il ne sort point, à cause de la maladie de la Reine, de laquelle il étoit vivement touché.

Le 11, mardi.—Il va en carrosse à la foire de Saint-Germain-des-Prés; va chez la Reine, au conseil.

Le 14, vendredi.—Il va à six heures en carrosse à la volerie à Roissy, y a dîné. Le Roi m'avoit commandé de demeurer près de la Reine.

Le 17, lundi.—Il part de Juilly, arrive au Bourget portant un grand faucon sur le poing, ayant le vent à la face et la pluie sur le dos. Il entre à l'hôtellerie, lui onzième, fait lui-même une omelette avec du pain et autres choses, fort épaisse, la fait rissoler, en mange un peu et a bu un coup de vin fort trempé; arrive à Paris, et va chez la Reine.

Le 18, mardi.—Il va au Palais pour la vérification de quelques édits; à dix heures va en la grande salle, où il voit danser le ballet de M. le prince de Condé; on l'appeloit le Ballet des ivrognes.

Le 19, mercredi.—Il va chez la Reine, se plaint de lassitude, s'assied contre sa coutume, va au conseil.

Le 20, jeudi.—Il assiste dans le grand cabinet de la Reine aux fiançailles de M. de Liancourt, premier écuyer de la Reine, avec Mlle de Schomberg[332].

Le 26, mardi.—Avant son souper furent faites en sa présence les accordailles du fils aîné de M. de Guise avec Mlle de Bourbon, fille aînée de M. le prince de Condé[333], Fév
1620
et du fils puîné de M. de Guise avec la fille de M. de Luynes[334].

Le 3 mars, mardi.—Il va chasser à Ouarthy, où il arrive à quatre heures et demie. A une lieue de Clermont, il voloit une corneille, une aigle fond pour la prendre et la tenoit, et l'élève en haut. Le Roi demande son harquebuse; on la lui baille n'étant chargée que de poudre et de plomb. Il la tire en l'air de la hauteur d'un clocher, et lui rompt l'aile droite; elle tomba à bas de ses pieds; il la fait prendre et mener à son logis.

Le 4, mercredi.—En chassant il arrive à Breteuil, et y tue un aigle, va souper, au réfectoire, des viandes de bêtes tuées depuis quatre jours, lièvres, perdrix, canards, aigles; il ne fait qu'en sentir une tranche.—Je ne me trouvois pas à ces débauches; ce fut une mascarade.

Le 9, lundi, à Amiens.—Entre midi et une heure il va à pied hors de la citadelle pour voir tout ce qui se passa durant le siége fait par le Roi, son père[335], s'informe particulièrement, comme une personne fort expérimentée, jusques aux menues particularités, tant des assaillants que des assiégés, et spécialement il demande: Où étoit le logis du Roi mon père? et s'y alla mettre dedans. C'étoit dans un portail à la Magdeleine s'en informant spécialement du sieur de Praslin et de la Curée, qui étoient au siége.

Le 27, vendredi, à Fontainebleau.—Il entend le sermon en la grande salle, puis part à Avon gagner le jubilé; plusieurs fois il y va à pied pour gagner le jubilé.

Mars
1620

Le 29, dimanche.—A la chapelle en la grande salle, communié; à vêpres, à Avon. Il revient en chassant, tue des perdrix avec son harquebuse.

Le 31, mardi.—Il va chez la Reine, entre en carrosse à dix heures et demie, part de Fontainebleau, et va à Valery, maison de M. le prince de Condé, où il a soupé.

Le 9 avril, jeudi.—Il part de Fontainebleau, et arrive à neuf heures et demie au Bois-Malesherbes, où il a dîné.

Le 17, vendredi.—Amusé diversement à faire des contes, il raconte au père Arnoux des miracles inventés tout à l'heure, qui en rioit, et y prenoit plaisir. Le Roi en dit un des visions de saint Antoine, que le diable lui apparut en un corps sans tête, les jambes faites comme un virebrequin, et une flûte au cul.

Le 1er mai, vendredi.—Il va chez la Reine et chez M. de Luynes.

Le 17, dimanche.—Il entre en carrosse, va chez M. d'Escures, à la place Royale, où il a dîné.

Le 22, vendredi.—Il part de Paris, et va à Fresne.

Le 26, mardi.—Le Roi revient à Paris.

Le 31, dimanche.—Il est mordu au-dessus du gras de la jambe, près du jarret, par un chien des siens qui s'entrebattoient; la morsure petite et point profonde; mis dessus de la thériaque avec du vin.

Le 1er juin, mardi.—Le sieur de Canaples, puîné du sieur de Créquy, colonel du régiment des gardes[336], marié en Lorraine avec Mlle de Combalet, se trouve avec le Roi chez M. de Luynes. Ils vont coucher en la chambre, en un lit de Mme la marquise du Montlaur[337]. Le Roi Juin
1620
y boit un coup de vin clairet fort trempé, après leur avoir fait beaucoup de malices, et s'en revient à onze heures trois quarts.

Le 3, jeudi.—Étant à Montfort, il va à la Neufville, maison de M. de Bellengreville[338], grand prévôt de l'hôtel, où il a dîné.

Le 4, vendredi.—Il part de Montfort, va aux Menus, maison appartenant à M. Bernard, maître d'hôtel du Roi, où il a dîné.

Le 8, lundi.—Il va au cabinet des armes; à trois heures, fut fait au département de la Reine, mère du Roi, le baptême de Mlle de Bourbon, fille de M. le prince de Condé, et nommée Anne par la Reine; son compère fut M. le duc de Luynes[339].

Le 23, mardi.—A six heures et demie il entre en carrosse, va à l'hôtel de ville pour le feu de la Saint-Jean, y met le feu lui-même, revient à neuf heures, va chez la Reine et chez M. de Luynes.

Le 27, samedi.—Il va chez M. de Luynes, où il se jouoit une comédie.

Le 28, dimanche.—Il va jusqu'à l'île Maquerelle, où il s'amuse à tirer de la harquebuse.

Le 30, mardi.—Il retourne à l'île Maquerelle, où il s'est baigné.

Le 7 juillet, mardi.—A cinq heures trois quarts il entre en carrosse, part de Paris pour aller à Rouen, arrive à deux heures à Pontoise pour la première fois.

Le 10, vendredi.—Il part d'Escoucy, arrive à Rouen; il venoit sur quelques bruits d'émotion, à la suscitation de M. de Longueville.

Le 11, samedi, à Rouen.—Il va à la messe à Saint-Ouen, Juil
1620
puis au parlement, où il interdit M. de Longueville du gouvernement de Normandie.

Le 13, lundi.—Il va à Pont-Audemer et à Honfleur pour la première fois.

Le 15, mercredi.—Il se rend de Dive à Escouyville, où il dîne, buvant du vin clairet moins trempé qu'à l'ordinaire, de son commandement, disant gaiement qu'il le falloit ainsi puisqu'il alloit à la guerre. Il va au conseil aussitôt après dîner, puis s'arme, prend son hausse-col pour la première fois. Il part d'Escouyville à onze heures et demie, en venant reconnoît la place du château de Caen, conduit particulièrement par M. le prince de Condé et M. de Luynes. A trois heures il arrive à Caen, et tient conseil, fait sommer le château par le sieur Galeteau, conduit par un trompette.

Le 17, vendredi.—Le château se rend. Il leur envoie le marquis de Mouy et M. de Créquy leur donner abolition.

Le 18, samedi.—Il va au château, où il visite tout et partout, jusques aux plus petites choses.

Le 22, mercredi.—Il va voir le cabinet d'un nommé Bourgeois.

Le 2 août, dimanche, au Mans.—Il va à vêpres, où il a un sol de distribution, suivant un ancien fonds donnant ce à chacun qui seroit assis aux chaires hautes, le premier dimanche du mois.

Le 4 mardi.—Il part de la Suse à neuf heures et demie, monte à cheval et fait arborer sa cornette blanche pour la première fois.

Le 6, jeudi.—Dîné à Duretal, chez M. le comte de Schomberg.

Le 7, vendredi.—Il faisoit une chaleur excessive, et il étoit vêtu d'un collet de buffle double et doublé de satin; à une heure il s'arme de sa cuirasse et commande de s'armer à tous ceux de sa troupe, monte à cheval à une heure trois quarts sur l'Arméville, cheval d'Espagne, et Août
1620
part de Frellassay, et va pour voir gagner les barricades au faubourg du Pont-de-Scé. Il le vit et faire la charge avec telle furie et résolution, favorisée du canon à la tête par les régiments des Gardes et de Picardie qu'il ne s'en est jamais vu de pareil. Il s'en revient à huit heures trois quarts, soupe à Brin. Il faisoit grand chaud, et il en a beaucoup souffert. C'est le premier combat qu'il a vu faire, et le plus chaud et le plus heureux dont on eut il y avoit longtemps ouï parler.

Le 8, samedi.—Il entre au Pont-de-Scé, et va au château.

Le 13, jeudi, à Brissac.—Conseil; il part à quatre heures et demie à cheval pour aller au-devant de la Reine sa mère, venant d'Angers. A deux quarts de lieue il l'attend; environ six heures elle arrive, descend de sa litière, le Roi étant à trente ou quarante pas d'elle. Il s'avance, elle se démasque; il la baise une fois seulement, Monsieur après, qu'elle baise deux fois, puis M. le prince de Condé, et après M. de Luynes. Les paroles qui furent dites, je ne les sais pas. Cette cérémonie ne dura pas longtemps. Le Roi remonte à cheval, elle en sa litière; le Roi gagne le devant, l'attend à l'entrée du château. Elle descend, se démasque, le Roi la baise et la conduit en sa chambre, puis s'en vient souper à sept heures et demie; il retourne chez elle le soir jusqu'à neuf heures.

Le 15, samedi.—Il touche, en la chapelle de Brissac, deux jésuites portugais.

Le 16, dimanche.—Il prend congé de sa mère à neuf heures du soir; sa mère vient chez lui le soir jusques à dix heures et demie, lui au lit.

Le 22, samedi.—Il part de Poitiers pour aller voir la Reine à Tours.

Le 23, dimanche, au Plessis-les-Tours.—Il trouve la Reine arrivée la veille au soir, lui raconte les effets de son voyage, lui montre les cartes et logements de son armée, Août
1620
couche avec elle de dix heures à une heure trois quarts.

Le 31, lundi.—Il part de la Tricherie, arrive à Poitiers; la Reine arrive aussi; il va la voir.

Le 3 septembre, jeudi.—Il va chez la Reine, chez M. de Luynes, à deux heures monte à cheval et va à la plaine de la Curnille, où il a vu toute l'infanterie de son armée d'environ dix mille hommes, la fait voir à la Reine. Le soir chez la Reine et chez M. de Luynes.

Le 5, samedi.—La Reine mère arrive à Poitiers à sept heures.

Le 7, lundi, à Poitiers.—Il va à la salle du Palais, où il voit des jeux représentés par des écoliers des Jésuites. Après souper il va chez la Reine, où arrive M. le duc de Mayenne, lequel, portant un genou tout bas en terre, dit ces paroles: «Sire, je suis venu ici pour supplier Votre Majesté de juger de moi par mes intentions et non par mes actions, et s'assurer que je n'ai jamais eu et n'aurai jamais autre volonté que de lui rendre toute sorte d'obéissance et telle qui lui est due par un très-humble et très-fidèle serviteur.» Le Roi lui répond: Je suis bien aise de ce que vous vous êtes mis en votre devoir; quand vous ferez mieux à l'avenir que vous n'avez fait, j'oublierai ce qui s'est passé. Il s'en va à la fenêtre, lui donne loisir de saluer la Reine et la compagnie, puis revient à lui, et l'entretient ainsi que s'il n'y eût jamais eu noise. Il va chez la Reine sa mère, appelle M. de Mayenne, qui se reculoit, et le fait entrer devant.

Le 10, jeudi.—Il part de Lusignan, arrive à la Motte-Saint-Éloi, où M. de Parabère lui donne à dîner.

Le 15, mardi.—Arrivé à Saintes pour la première fois, en son cabinet, il donne audience à messieurs les députés du parlement de Bordeaux.

Le 19, samedi.—Il arrive à Bordeaux par la porte du Chapeau-Rouge, va en carrosse à l'évêché, et à une heure demande à dîner.

Le 28, lundi.—Il part de Bordeaux, va pour la première Sept
1620
fois à Cardillac, maison de M. d'Épernon, qui donne à dîner au Roi[340].

Le 12 octobre, lundi.—Il arrive à cinq heures à Roquebert, trouve en chemin des soldats qui emportoient du foin et un paysan qui alloit après. Il y va, et le fait remporter par ceux mêmes qui l'avoient pris, et commande deux archers de sa garde pour les accompagner sur le lieu où ils l'avoient pris, ou bien qu'ils eussent à le payer.

Le 15, jeudi.—Il arrive à quatre heures et demie à Pau, le régiment des gardes marchant devant lui à cheval. En la cour du château, la cour de parlement, en robe rouge, lui demande pardon du refus qu'ils avoient fait à la vérification de son édit sur les revenus ecclésiastiques. Il leur répond: Servez-moi mieux à l'avenir, et j'oublierai le passé.

Le 17, samedi.—Il arrive à quatre heures à Navarreins, visite toute la ville, y fait entrer quatre compagnies du régiment de ses gardes, en met dehors la garnison et le sieur de Sale, gouverneur depuis l'an soixante-neuf, mis par la reine Jeanne, à pareil jour que le comte de Montgommery l'avoit pris en son nom et mis dehors les catholiques, après la bataille qu'il gagna à Orthès sur M. de Tarride.

Le 19, lundi.—A trois heures, dans la salle basse du château, il prête le serment de prince de Béarn en l'ouverture des états du pays qu'il y avoit assemblés, jura les priviléges du pays et eux pareillement le serment accoutumé.

Le 20, mardi.—A neuf heures il va à la procession Oct
1620
pour le rétablissement de la messe, qui a lieu à l'église, devant le château.

Le 25, dimanche.—Il part aux flambeaux de Bazas, et arrive à sept heures au pont de Laugon, pour se y embarquer. Son bateau n'étant point arrivé, il y va au-devant à pied, assez loin, et s'embarque pour aller coucher à Bordeaux.

Le 28, mercredi.—Il va à la messe, et à onze heures et un quart va chez M. de Luxembourg[341], où il a dîné, va à la chasse, au château, revient à quatre heures au conseil, retourne chez M. de Luxembourg en festin.

Le 5 novembre, jeudi.—Il goûte à Amboise chez M. Langlois, fourrier du corps, d'une omelette que lui-même avoit faite, et à l'oignon, boit deux coups d'un vin fort trempé, monte à cheval, se trouve mal d'un étourdissement, de lassitude et de mal au cœur, a envie de vomir, beaucoup d'écume, avec un peu d'émotion et douleur de tête, se plaint, va au pas, eut froid, gagne Escures, va à la cuisine, apprête le souper pour les autres, sa bouche échauffée, soupe d'une rôtie au sucre et se met au lit.

Le 7, samedi.—Il arrive à cheval, fort gai, à Paris, à midi, au Louvre, salue la Reine sa mère, la Reine, Madame. Il va chez M. de Luynes, où il dîne, couche avec la Reine pendant une heure.

Le 21 décembre, lundi.—Il arrive à Abbeville pour la première fois. Entrée des gens de guerre; les habitants vont au-devant de lui pour lui offrir trois bœufs, trois mesures d'avoine, et trois poinçons de vin. C'est le devoir des habitants, dû au Roi la première fois qu'il vient à Abbeville.

Déc
1620

Le 31, jeudi, à Calais.—Il s'amuse à voir ceux qui vont à la mer pour la première fois, pour s'éprouver, part de Calais; passant par Marquise, il se fait donner un pain sortant du four, en mange la croûte. Étant près de Boulogne, il va sur la rive de la mer, attendre les bateaux qui revenoient de la pêche, arrive à Boulogne à quatre heures trois quarts, soupe une heure après. Il avoit fait acheter une plie, en mange le dos[342].

ANNÉE 1621.

Festin des Rois.—Ballet d'Apollon.—Rupture de la trêve des Pays-Bas.—Querelle du cardinal de Guise et de M. de Nevers.—Mort du roi d'Espagne Philippe III.—M. de Luynes connétable.—Départ pour le midi.—Orléans.—Blois.—Entrevue avec la Reine mère.—Mot du Roi aux habitants de Parthenay.—Le Roi va reconnaître Saint-Jean-d'Angély.—Les assiégés tirent sur le Roi.—Séjour au camp.—Les prisonniers rochellois.—Capitulation de Saint-Jean.—De Pons.—De Bergerac.—Siége de Clérac.—Mort du maréchal de Termes.—Prise de la ville.—Le Roi y tient les sceaux.—Moissac.—Piquecos.—Commencement du siége de Montauban.—Mort du duc de Mayenne.—La Reine à Moissac.—Montauban secouru.—Entrevue de MM. de Luynes et de Rohan.—Messieurs du Clergé viennent faire un don au Roi.—Attaque de Montauban.—Un laquais tué à dix pas du Roi.—Levée du siége.—Le Roi va à Toulouse.—Siége de Monhurt.—Sa prise.—Maladie du connétable de Luynes.—Sa mort.—Indifférence du Roi.—Son départ.—Il arrive à Bordeaux.—Réception.—Libourne.

Le 1er janvier, vendredi.—Il reçoit un ambassadeur extraordinaire de l'Archiduc[343], envoyé pour le visiter.

Le 5, mardi, à Amiens.—Il va au cabinet de ses oiseaux; à cinq heures trois quarts va chez M. de Luynes, où il a soupé à six heures et demie, au festin des Rois, qu'il donnoit. J'ai appris qu'il mangea fort et but six ou sept fois de l'hypocras fort trempé. Il l'avoit lui-même fait mettre dans la bouteille; c'étoit pour faire boire et mettre en train la compagnie et spécialement M. d'Elbeuf, qui buvoit le vin sans eau.

Janv
1621

Le 12, mardi.—Il va chez la Reine et, à sept heures, à la comédie italienne.

Le 15, vendredi.—Il va au conseil, où messieurs de la cour du parlement le viennent trouver.

Le 16, samedi.—A onze heures il monte à cheval, et va vers les plaines du Roule, où il fait volerie générale de toute sa fauconnerie. Les Reines[344] et Madame y étoient.

Le 13 février, samedi.—A neuf heures il entre en carrosse, bien qu'il fît un extrême froid; ce fut sur le rapport que l'on lui vint faire qu'il y avoit un loup à la garenne de Colombes; il le court, le prend, revient à quatre heures chez la Reine, puis chez la Reine sa mère. Le soir à la comédie italienne.

Le 15, lundi.—Il va à la chapelle de Bourbon, entre en carrosse, part de Paris pour aller à la chasse, va à Versailles, où il a dîné, par après monte à cheval, part de Versailles, et en chassant arrive à Saint-Germain-en-Laye.

Le 18, jeudi.—Il va chez M. de Luynes, chez la Reine, chez sa mère, va à Bourbon à deux heures, y recorde son ballet, et à sept heures M. de Liancourt, premier écuyer, lui a donné à souper en la galerie. Le cardinal Bentivoglio[345], nonce, y soupa. Je n'y étois pas; j'appris qu'il n'avoit pas trop mangé, mais bu trois coups d'hypocras fort trempé. A une heure après minuit, il y danse son ballet d'Apollon[346], revient à quatre heures et demie après minuit.

Fév
1621

Le 19, vendredi.—Il va à la chapelle de Bourbon, où il donne le bonnet de cardinal au nonce Bentivoglio, le fait dîner avec lui.

Le 20, samedi.—Il va chez la Reine, au conseil, donne audience aux députés des Pays-Bas pour la rupture de leur trêve[347], va chez la Reine sa mère, chez M. de Luynes, à la comédie italienne le soir, puis chez la Reine.

Le 21, dimanche.—A neuf heures il va en la salle de Bourbon, où il danse derechef son ballet, revient à une heure après minuit.

Le 2 mars, mardi.—Il va chez la Reine; amusé diversement jusques à onze heures trois quarts qu'il va à la grande salle de Bourbon pour y voir danser le ballet de la Reine, qui commença entre minuit et une heure. Il revient à quatre heures après minuit; mis au lit, puis levé, il va chez la Reine.

Le 10, mercredi.—Il va en la galerie, y joue au billard, M. de Longueville avec lui. Il va après au sermon.

Le 18, jeudi.—Il va aux Récollets poser la première pierre de leur église à Saint-Germain.

Le 24, mercredi.—Ce jourd'hui matin fut la querelle de M. le cardinal de Guise et de M. de Nevers, au logis de M. Guynet, au rapport d'une affaire dont ils étoient en différend.

Le 25, jeudi, à Saint-Germain.—Il va à la chapelle des terrasses, touche un jésuite à la fin de la messe, après va chez M. de Luynes. La grande neige, le vent, le mauvais temps l'empêchent de sortir; il va de çà, de là, joue aux échecs, au billard; tout cela ne le contentoit point. Il va chez M. de Luynes, revient souper à six heures; retourne chez M. de Luynes, et se couche à neuf heures.

Mars
1621

Le 28, dimanche, à Paris.—Après souper il va chez M. de Luynes, où il demeura jusques à près d'une heure après minuit, en attendant la nouvelle de M. le cardinal de Guise, qu'il envoya prendre par le sieur de la Vieuville, capitaine des gardes du corps, pour le mener à la Bastille. Il revient, est dévêtu, mis au lit, peu après s'en va chez la Reine.

Le 29, lundi.—Il va à la volerie vers le Bourget et le Blancmesnil.

Le 31, mercredi.—Il va chez la Reine, puis chez M. de Luynes, où il déclare M. de Luynes connétable de France, et retourne chez la Reine, où il le déclare.

Le 2 avril, vendredi.—Il reçoit au conseil le serment de M. de Luynes pour la charge de connétable; il lui donne l'épée en le baisant[348].

Le 8, jeudi.—Nouvelle de la mort du roi d'Espagne.

Le 10, samedi.—Il va chez la Reine avec le marquis de Mirabel et le cordelier confesseur d'elle, lui annoncer le décès du roi d'Espagne en ces termes, en espagnol: Je viens de recevoir présentement des lettres d'Espagne où l'on m'écrit que pour certain le Roi votre père est mort.—Puis il monte à cheval et va à la chasse.

Le 11, dimanche, à Fontainebleau.—Il touche les malades, va à pied à l'hermitage de la Madeleine, à une lieue de Fontainebleau.

Le 29, jeudi.—Il va à la chasse à la volerie, entre en une maison de village pour se sécher; il étoit fort mouillé de la pluie.

Le 30, vendredi.—Il va à la chambre de ses oiseaux. Avr
1621
A onze heures, nonobstant la pluie qu'il eut toujours, il part du bois Malesherbes et, en chemin, rencontre d'aventure à la campagne un faon qu'il court à force; il fut tué à coups d'épée[349].

Le 3 mai, lundi.—Il va à la comédie françoise à Orléans, part d'Orléans dans le bateau, le lendemain matin à huit heures, dîne dans le bateau; arrive à Blois à quatre heures, va au conseil. Le soir il va chez la Reine après son souper[350].

Le 14, vendredi.—Il va chez la Reine, chez le connétable (M. de Luynes) au conseil, reçoit la Reine sa mère, à trois heures, laquelle s'en retourne coucher à Bourgueil.

Le 16, dimanche.—Il va voir la Reine sa mère, qui étoit venue de Bourgueil pour lui dire adieu.

Le 18, mardi.—Il arrive de Thouars à Parthenay pour la première fois, ne veut pas du dais, dit qu'il est assez assuré de la fidélité des habitants; il craignoit la cérémonie.

Le 29, samedi.—Il part de Niort, va à Chizay, va chez le connétable, monte à cheval, va voir passer l'artillerie qui étoit à Briou, en fait tirer douze canons pour les faire entendre à ceux de Saint-Jean-d'Angély[351].

Le 30, dimanche.—Il touche des malades et loge au château de la Thibaudière, au bourg de Chizay, se confesse, va à l'église et touche les malades; revient ensuite dîner.

Le 31, lundi.—Il dîne d'un demi-pain de munition, sans Mai
1621
boire, chez M. de Lesdiguières à Saint-Julien; puis, avec lui et le connétable, il va reconnoître la ville de Saint-Jean-d'Angély.

Le 2 juin, mercredi.—Il tient conseil en l'église de Saint-Julien, et fait sommer M. de Soubise de lui rendre la place et de se rendre. Il a répondu être très-sujet et serviteur du Roi, mais ne la pouvoir rendre, la place lui ayant été commise par le sieur de Rohan, son frère, en sa garde.

Le 3, jeudi.—A deux heures il va à Aulnay voir la Reine; y allant à cheval, étant sur une hauteur avec M. le connétable et le maréchal de Praslin, sur une fourche de chemin, doutant quel chemin ils prendront, sur cette dispute ils s'arrêtent. Cela donne loisir aux assiégés de pointer un canon sur eux; comme ils commencent à démancher sur la main droite, par l'avis de M. de Praslin, ils virent la balle, et elle tomba à dix pas devant le Roi, qui n'en demeura non plus ému que de rien. Il arrive à cinq heures à Aulnay.

Le 5, samedi.—Le matin, en s'habillant, il s'informoit comment étoit fait M. de Navailles, qui sans son passeport étoit venu voir son frère blessé d'une mousquetade au coude[352]; l'ayant vu par la fenêtre, sortant de la chambre de M. le connétable et s'en retournant par sa permission, le père Arnoux entra. Le Roi lui dit: Je viens de voir un Navailles qui s'en retourne.—«Comment, Sire, le laissez-vous aller?»—Oui, pour ce que je lui ai donné ma foi: vous eussiez bien voulu que je l'eusse rompue.—«Mais, Sire, il est criminel de lèse-majesté!»—C'est tout un; s'il a fait une faute, je n'en veux pas faire un cent.

Le 12, samedi.—Il va voir la Reine, logée à Brisembourg; Juin
1621
soupe chez le connétable; couche avec la Reine de dix heures à huit heures moins un quart.

Le 18, vendredi.—Au conseil, il pardonne aux prisonniers rochellois[353] et les renvoie, fait donner à chacun une épée, de l'argent et des hommes pour les conduire.

Le 19, samedi.—Étant à Vervaux, logé à Saint-Julien, il va au conseil; la Reine sa mère, logée à Mata, le vient visiter; le soir il va chez le connétable.

Le 23, mercredi.—Il voit le feu des batteries, qui a commencé à six heures du matin; va aux batteries à onze heures. A côté de lui le baron de Palluau est blessé à la tête et son beau-frère de Carbonnier tué du même coup[354].

Le 24, jeudi.—Conseil pour le traité de Saint-Jean.

Le 25, vendredi.—Conseil où on décide ce qu'on fera. Au conseil dans l'après-midi, M. de Soubise vient vers le Roi, et demande pardon.

Le 28, lundi.—Il va à Brisembourg[355]; à neuf heures il va chez la Reine; ne pouvant dormir, ils jouent aux cartes.

Le 1er juillet, jeudi.—Sa mère le vient voir, prend congé de lui pour s'en aller à Angers.

Le 6, mardi.—Il part de Cognac pour aller à Barbezieux. Il faisoit grand froid, il se plaint, portant un pourpoint fort léger. Il va en la chambre de M. le connétable; se plaint de douleurs de tête.

Le 8, jeudi.—Il arrive à Cottras en chassant à l'harquebuse; Juil
1621
les gens de Castillon lui apportent les clefs de la ville.

Le 9, vendredi.—Le soir les habitants sortis de Bergerac demandent pardon; ils avoient, disent-ils, donné de l'argent pour sortir[356].

Le 10, samedi.—A Saint-Émilion il loge en l'église.

Le 19, lundi.—Il part de Saint-Berthoumion, ne peut passer le petit ruisseau nommé Tolosat[357], étrangement débordé à cause de la grande et continuelle pluie, attend deux grosses heures durant, attendant nouvelles du passage, et cependant la pluie invariable en impétuosité et abondance tombe sur lui, qu'il enduroit, n'ayant jamais voulu se mettre à couvert, disant que les autres n'y étoient point. Après avoir vu qu'il étoit impossible de passer le ruisseau, il rebrousse au dernier lieu et arrive à Hautevigne, maison du baron Fumel[358]. Il étoit neuf heures; il ne se veut essuyer ne débotter, va à la cuisine, où il aide aux préparatifs de son dîner. Les officiers étoient allés la nuit à Tonneins, et avoient passé avant le débordement. Le Roi passa le demeurant de la journée en peine, à cause du mauvais temps, prépara le souper comme il avoit fait le matin, mais plus abondant, car le matin l'on n'avoit trouvé aucunes choses.

Le 23, vendredi[359].—Éveillé à cinq heures par impatience Juil
1621
pour aller voir un combat qui se devoit faire contre ceux de Clérac, où alloit le maréchal de Lesdiguières. Il va chez la Reine, chez M. de Luynes, à dix heures monte à cheval et va faire les approches devant Clérac; voit tous les combats qui se firent à diverses fois, où le maréchal de Terme est blessé au bras gauche et au poumon du côté gauche[360]. Il revient à sept heures chez la Reine.

Le 24, samedi.—M. de Termes meurt à deux heures; la balle, qui perçoit le diaphragme et l'estomac, se trouva contre le cœur sans l'offenser.

Le 30, vendredi.—Il va au camp devant Clérac pour voir commencer les batteries.

Le 5 août, jeudi.—Clérac se rend à la discrétion du Roi[361].

Le 7, samedi.—Il va en la chambre de M. le connétable où il fait tenir le scel en sa présence, M. le connétable faisant la charge de garde des sceaux, accompagné du maître des requêtes et autres officiers du scel. Jugement du Roi sur une lieutenance de vétérans, présentée par Barbereau, huissier de sa chambre. Entendant ce mot, et toutefois en ayant autrefois entendu parler, il demande: Qu'est-ce qu'un vétéran? Lui ayant été répondu et pour qui c'étoit, il dit: Cela ne se donne qu'aux soldats qui le gagnent, et avec beaucoup de peine, et au péril de leur vie; ceux-ci n'ont point de peine; il lui fut dit: «Sire, les chanceliers et gardes des sceaux l'ont toujours Août
1621
scellé sans difficulté.»—C'est tout un, il le faut renvoyer au conseil; et ce ne fut scellé.

Le 17, mardi.—Il quitte Moissac, arrive à Piquecos, château appartenant à M. le marquis de Montpezat[362], à une lieue de Montauban.

Le 30, lundi.—Il va chez M. le connétable[363], assiste au sceau.

Le 1er septembre, mercredi.—Cejourd'hui, entre sept et huit heures du matin, commença la batterie de trois endroits devant Montauban[364].

Le 15, mercredi.—Sur les trois heures M. le duc de Mayenne est tué aux tranchées d'une mousquetade dans l'œil qui lui traversa la tête; il meurt soudain sans parler[365]. Le Roi va à la chasse.

Entre minuit et une heure, Montauban est secouru[366].

Oct
1621

Le 8 octobre, vendredi.—Ce matin à quatre heures, M. le connétable alla à Reniers y trouver M. de Rohan, pour traiter d'accord.

Le 13, mercredi.—Il va au camp, où il a dîné chez M. le prince de Joinville, où il voit la batterie de dix-huit canons contre un boulevart.

Le 14, jeudi.—Il se plaint de douleurs de dents, saigne du nez; il faisoit grand chaud; la douleur cesse. Il n'avoit point saigné depuis la mort du Roi, ou environ.

Le 17, dimanche.—Il va au camp, y fait porter ses armes à quatre heures du matin, au quartier de M. de Montmorency, y dîne de sa viande; séant à table avec lui et M. de Luynes seulement et l'abbé Rucelay[367], à neuf heures. A une heure il monte à cheval pour voir trois attaques qui se devoient faire: l'une du côté où il étoit, l'autre du côté des gardes, et la troisième du côté de la rivière, sur Ville-Bourbon; ce fut sur les trois ou quatre heures. Il fut tiré de la ville un coup de canon qui tua un laquais à dix pas de lui sans l'effrayer. Il revient à huit heures.

Le 18, lundi.—Il va en son cabinet, y donne audience à Messieurs du clergé, portant la parole M. l'évêque de Nantes[368], docte et éloquent personnage, offrant un million d'or pour faire la guerre.

Le 28, jeudi.—Il va en son cabinet; à midi arrive le milord Haye, ambassadeur extraordinaire d'Angleterre, qui dîne avec M. le connétable, et à trois heures a son Oct
1621
audience du Roi, accompagné seulement de M. le connétable, dans sa chambre[369].

Le 31, dimanche.—Il part de Moissac[370].

Le 15 novembre, lundi.—Il entre à Toulouse pour y dîner, la première fois, loge à l'archevêché[371].

Le 18, jeudi.—Il va collationner en cérémonie, en la maison de ville.

Le 19, vendredi.—Il donne audience à messieurs du Parlement, qui le supplient de séjourner plus longtemps, pour donner aide à leur conservation.

Le 20, samedi.—Il va à quatre heures aux Jésuites, voir jouer la tragédie d'Andromède.

Le 21, dimanche.—Il fait son entrée solennelle; va à Saint-Étienne.

Le 24, mercredi.—Il va en son cabinet, où messieurs du parlement de Toulouse prennent congé du Roi. Il part de Toulouse en chassant, et arrive à deux heures à Grenade.

Le 30, mardi.—Il va au camp devant Monhurt[372] avec Nov
1621
M. de Luynes, où le sieur Desplans près de lui reçut une mousquetade qui lui perça le manteau, le gant et s'arrêta dans le pommeau de la selle de son cheval.

Le 3 décembre, vendredi.—Il va chez M. le connétable, qui se trouvoit mal de rhume et fièvre, depuis six heures du matin qu'il eut froid.

Le 7, mardi.—Il va voir les bateaux couverts pour le siége de Monhurt, et va au logis de M. de Schomberg à pied; ainsi pendant plusieurs jours de suite, visitant les tranchées et même gaiement quitte sa volerie disant: Je m'en vais chez M. de Schomberg, s'amusant pour tromper le déplaisir qu'il avoit de la maladie du connétable.

Le 12, dimanche.—Il va au camp pour voir sortir ceux de Monhurt, à qui il donnoit la vie; ils sortirent un bâton blanc à la main[373]; les femmes et les fils sortirent à part dans des bateaux pour les conduire à Tonneins. Ce fut un de ses soins particuliers que la ville sera brûlée et une potence élevée au milieu. Il fait mettre son armée en bataille et sans armes, de peur que les soldats ne s'entretuent pour le pillage. Après dîner il veut aller au camp voir achever la sortie, puis va à sa volerie.

Le 13, lundi.—Comme il fut débotté en revenant de chez M. de Schomberg, soudain vient une fausse alarme; il se botte, sort de la salle et donne l'ordre avec une incroyable résolution. Un certain personnage lui dit: «Sire, si Votre Majesté se veut retirer, l'on peut faire face avec ses deux cents chevaux.»—Retirer! je veux mourir plutôt que me retirer.

Le 15, mercredi.—Il quitte Longuetille à cause de la maladie de M. le connétable, qui meurt à Dumasan, à deux heures[374].

Déc
1621

Le 16, jeudi.—Il va voir M. de Luxembourg, frère du défunt connétable.

Le 21, mardi.—Il arrive à Bordeaux pour la troisième fois[375], va au conseil et reçoit toute la cour du Parlement ensemble.

Le 22, mercredi.—Il fait M. de Vic[376], conseiller d'État, garde des sceaux; le lendemain il reçoit son serment.

Le 25, samedi.—En sa chambre à deux heures, il entend le sermon du P. Séguiran, jésuite, qui lui avoit été donné pour confesseur à Saint-André.

Le 31 décembre, vendredi.—Il arrive à Libourne.

ANNÉE 1622.

Départ de Libourne en chassant.—Barbezieux.—Festin du Roi chez M. de Schomberg.—Poitiers.—Tours.—Amboise.—On y charge avec des boules de neige les magistrats.—Réception des cours de Paris à Bourg-la-Reine.—Entrée à Paris.—Saint-Germain.—Ballet.—La Reine fait une fausse-couche.—Fiançailles du comte d'Alais.—Départ pour le Languedoc.—Le jeudi saint à Orléans.—Querelle du maréchal de Vitry et du duc de Luxembourg.—Blois.—Nantes.—Le Roi dit du mal de M. de Luynes.—Combat de l'île de Rié.—Niort.—Saint-Jean-d'Angély.—Le Roi affecte de ne pas vouloir en regarder les ruines.—Réception des envoyés suisses.—Siége et prise de Royan.—Reddition de Sainte-Foy la Grande.—M. de Caumont la Force traite et est fait maréchal.—Agen.—Le Roi passe devant Montauban avec son armée en bataille.—Assaut et prise de Négrepelisse.—Rendez-vous de l'armée à Campadour.—Siége de Saint-Antonin.—Une balle effleure le Roi.—Le duc de Retz blessé près du Roi.—Combat du Roi et du prince de Joinville à coups de prunes.—Arrivée à Toulouse.—Pose de la première pierre de l'église des Carmélites.—Réception à Castelnaudary.—Carcassonne.—Narbonne.—Le Roi visite quatre frégates dans le port.—A la réception officielle, le cheval du Roi se cabre.—Le Roi communie.—Béziers.—Pézenas.—Lunel.—Aigues-Mortes.—Le Roi rejoint l'armée à Castelnau.—Le duc de Lesdiguières vient prêter serment.—Commencement du siége de Montpellier.—M. de Caumartin nommé garde des sceaux.—M. d'Ocquerre, secrétaire d'État.—M. de Bassompierre maréchal.—Mot du Roi.—Congé du prince de Condé; sa conversation avec le Roi.—Reddition de Montpellier.—Départ.—Arles.—Réception brillante.—Course de taureaux.—La Sainte-Baume.—Marseille.—La pêche du thon.—Notre-Dame de la Garde.—Beaucaire.—Assemblée des États.—Avignon.—Le duc de Savoie.—Grenoble.—Dîner au château du connétable.—Vienne.—Lyon; le Roi y trouve les deux Reines.—Le Roi donne le chapeau à M. de Richelieu.—Fiançailles de Mlle de Verneuil avec le fils du duc d'Épernon.—Le Roi reçoit sa sœur la princesse de Piémont.—Roanne.—Nevers.

Le 3 janvier, lundi.—Il part à pied de Libourne à cause du froid, et un peu après monte à cheval, et par Janv
1622
un pont de bateaux sur la rivière d'Isle, arrive à Guitre, s'amusant à chasser en chemin. A quatre heures il entre au conseil; le conseil tenu, il s'amuse à jouer aux cartes, au hère, avec aucuns de son conseil et autres.

Le 5, mercredi.—Il arrive à quatre heures et demie à Barbezieux; va au conseil, et à six heures et demie a soupé chez M. le comte de Schomberg, qui donnoit le festin de la veille des Rois.

Le 6, jeudi.—Il arrive à Châteauneuf sur Charente; M. le prince de Condé lui va au-devant. A trois heures au conseil.

Le 10, lundi.—En se couchant il s'amuse à faire de la musique et fait chanter M. le Prince.

Le 13, vendredi.—Arrivé à Poitiers, il s'amuse à ses oiseaux; va au conseil, s'amuse à jouer jusques à six heures.

Le 18, mardi.—Il faisoit un temps serein, mais extrêmement froid; en route il met plusieurs fois pied à terre, arrive à Tours à deux heures, va au conseil à trois.

Le 19, mercredi.—Il part de Tours et fait une grande partie du chemin à pied, arrive à une heure à Amboise. Les magistrats de robe longue le viennent saluer; il avoit neigé; incontinent après les harangues, sur leur retraite, on leur fait une charge de pelotes de neige sur leurs robes et leurs bonnets carrés.—Il soupe au festin donné dans le château par M. le duc de Chaulnes, lieutenant du Roi, au château[377].

Le 20, jeudi.—Il faisoit grand froid; il part d'Amboise à cheval, et à un quart de lieue il entre en carrosse. Il arrive à Blois à une heure, voit M. Truchon, l'un de ses apothicaires, demeurant à Blois, lui demande: Truchon, me voulez-vous nourrir, j'ai grand faim; son gobelet n'étoit pas arrivé.

Janv
1622

Le 24, lundi.—Il arrive à une heure à Orléans, où arrive de Paris M. le comte de Soissons qu'il accueillit fort gracieusement. Il va au conseil.

Le 28, vendredi.—Dînant à Bourg-la-Reine, il reçoit les compagnies qui venoient de Paris; part de Bourg-la-Reine à deux heures, voit sept mille quatre cents hommes, habitants de Paris, postés en armes devant lui et à cheval, entre à Paris, revenant de Montauban, va à Notre-Dame, revient à six heures au Louvre, soupe, prie Dieu, va chez la Reine, à onze heures s'endort.

Le 29, samedi.—Il va à la messe, puis chez la Reine sa mère. Le soir à la salle d'en haut, à la comédie italienne.

Le 4 février, vendredi.—Il part de Paris pour aller à Saint-Germain-en-Laye, loge chez M. de Frontenac, capitaine du château; logé en la basse-cour.

Le 5, samedi.—Il part de Saint-Germain, va à Pontoise, où il s'amuse à faire et à manger des beignets; soupant à Cormeille, soudain il va au gobelet, où il fait faire des petits choux au lait; bu six coups de vin clairet fort trempé, à la santé des princes qui étoient là: MM. les princes de Condé, de Vendôme, son frère le grand prieur. Il revient dans sa chambre, où il danse aux chansons.

Le 6, dimanche.—Il va au logis de M. de Vendôme, où il a déjeûné; va à la messe, monte à cheval, part de Cormeille et va à Saint-Denis; va à la cuisine, dresse les plats, emporte le premier, les princes de même, dresse sur table, puis dîne, arrive à Paris à deux heures. Il va chez la Reine; soupe à six heures et demie, puis va en son cabinet à la comédie italienne, puis au bal, et revient à minuit.

Le 7, lundi.—Il va en haut à la comédie italienne, y voit un grand ballet venu de la ville, à onze heures revient se mettre au lit; puis relevé peu après, il va chez la Reine.

Fév
1622

Le 10, jeudi.—Il va à la volerie vers Grenelle. La terre étoit fort molle, à cause du dégel et des pluies; son cheval tombe et lui de tout son long, il ne se fait aucun mal. Il revient chez la Reine sa mère.

Le 23, mardi.—Il va le soir chez la Reine.

Le 25, vendredi.—Il entre en carrosse pour aller passer son temps, part de Paris, arrive à Villemenon, aussitôt va à la cuisine, fait dresser la viande, la met sur table, s'assied avec la compagnie: M. le prince de Condé, M. de Vendôme, M. le grand prieur, son frère, M. le Grand, M. de Courtenvaux, M. de Blainville, premiers gentilhommes de la chambre.

Le 13 mars, dimanche.—Il va à l'assemblée à Meulan, où il a dîné au festin fait par Desplans, gouverneur; retourne à Saint-Germain.

Le 14, lundi.—Il revient à Paris, va chez la Reine, et lui donne M. de Beauclerc pour secrétaire[378].

Le 16, mercredi.—Il va chez la Reine, à ses oiseaux, au conseil. Sur les trois heures après midi la Reine accouche d'un embryon de quarante ou quarante-deux jours; il va chez elle à six heures trois quarts[379].

Mars
1622

Le 17, jeudi.—Il va chez la Reine, à midi monte à cheval, va à la volerie vers les plaines du Roule et de Montmartre, revient à cinq heures chez la Reine sa mère, à sept heures va en sa chambre, où il fait les fiançailles du fils de M. le duc d'Angoulême, le comte d'Alès, et de la fille de M. le maréchal de la Châtre[380]. Le soir il va à la comédie italienne.

Le 20, dimanche.—Il part pour son grand voyage, secrètement, à cheval, tandis que tout le monde l'attendoit au Louvre pour le voir passer.

Le 24, jeudi, à Orléans.—Il va aux Récollets, où il lave les pieds aux enfants, va en sa chambre. Querelle de M. le maréchal de Vitry et de M. de Luxembourg dans la chambre du Roi. A trois heures il entre en carrosse, va gagner les pardons.

Le 26, dimanche.—Il va délivrer les prisonniers.

Le 27, lundi.—Il part d'Orléans, entre en bateau, encore qu'il fît grand vent et contraire, ne craint pas, déjeûne dans le bateau, met pied à terre à Beaugency.

Le 31, jeudi.—Il arrive à Blois, chez la Reine sa mère.

Le 5 avril, mardi.—Il part de Blois, s'embarque pour Nantes avec M. de Soubise, arrive à quatre heures à Tours. Logé près de Saint-Julien, il va chez M. de Souvré, où il a soupé.

Avr
1622

Le 7, jeudi.—Il va à l'abbaye de Saint-Florent où il a goûté. M. l'évêque de Cominges[381], qui en étoit abbé, lui a donné la collation.

Le 9, samedi.—Il arrive à Ancenis, maison de M. de Vendôme, qui donna le festin fort magnifique.

Le 10, dimanche.—Reçu à Chassay près Ancenis, par la maison de l'évêque; étant au lit, il y parle de M. le connétable. Il en contoit bien des choses qu'il lui demandoit, et entre autres qu'il lui dit qu'il lui falloit donner 4,000,000 d'or; qu'il n'avoit jamais vu tant de parents.

Le 13, mercredi.—Il va au conseil, sur le rapport, fait par M. le Prince, que M. de Soubise avec toute son armée étoit entré dans l'île de Riez.

Le 14, jeudi.—Il part de Legeay, voit son régiment des Suisses, ne laisse pas de chasser à la harquebuse; à onze heures n'ayant rien à dîner, il mange du pain qu'il fait acheter des Suisses et un peu de fromage dont il n'avoit jamais mangé, arrive à Chalan, où il dîne.

Le 15, vendredi, à la Chaussée.—M. le prince de Condé lui envoie demander des secours; il quitte son dîner, et dit: Je y veux aller!—Il monte à cheval; va à deux lieues de chemin, couche dans une petite masure, tout vêtu, sur de la paille, sa robe dessus, son manteau dessous, y dort deux heures par sommes entrecoupés, par soin de se lever pour aller à la guerre[382].

Avr
1622

Le 16, samedi.—Il se lève à minuit; se fait amener le cheval que lui a donné M. du Hallier. En la bataille, M. le prince de Condé et le comte de Soissons à l'avant-garde, M. de Vendôme à l'arrière-garde. Il marche une lieue ou deux en bataille, entre dans une île sans qu'il y eût de gens de guerre. A quatre heures du matin il se trouve à Saint-Gilles-en-Rié, où le prince de Soubise se sauvoit avec toute son armée en désordre. Je remets le demeurant à l'histoire. Ce fut un coup du ciel d'avoir préservé le Roi engagé dans l'île, et d'avoir eu la victoire sans un seul blessé ou fort peu; il y fut tué plus de trois mille hommes; canons, drapeaux et bagages perdus. A onze heures et demie à Saint-Gilles, ce fut la plus grande route, dîner[383]. Il va le soir à Aspremont, se débotte à huit heures, fut vingt heures sans se coucher et dix-huit à cheval.

Le 20, mercredi, à la Roche-sur-Yon.—M. Leclerc, intendant des finances, lui donne à goûter.

Le 24, dimanche.—Il va à Niort pour la deuxième fois, va au château, où il a dîné au festin donné par M. de Parabère, gouverneur de la ville[384].

Le 26, mardi.—Il voit passer le régiment de Navarre, commandé par le baron de Palluau, puis va au conseil.

Le 28, jeudi.—Il part de Chizay, volant par le chemin, arrive à trois heures à cheval à Saint-Jean-d'Angély. En entrant il baissa son chapeau et détourna sa vue des ruines des murailles, entièrement rasées. Aussitôt Avr
1622
qu'il fut entré, il haussa son chapeau et regardoit librement partout.

Le 1er mai, dimanche, à Saintes.—Il va à vêpres, et à trois heures et demie donne audience aux Suisses de Berne et de Zurich.

Le 7, samedi.—A cinq heures du matin, il monte à cheval et va avec M. du Hallier, capitaine des gardes, et deux écuyers, aux tranchées, où il fut tiré un coup de pièce qui tomba à six pas de lui. Il donne cent écus aux soldats de ses gardes qui entroient aux tranchées[385].

Le 9, lundi.—Il va à trois heures et demie au camp, voir une attaque qui se devoit faire d'un bastion, qui fut rude et dura plus de deux heures.

Le 11, mercredi.—Il monte à cheval, va au camp, à la tranchée du régiment des gardes; il donne la composition à ceux de Royan[386]; revient à la messe sous la Mai
1622
tente. Après son dîner, il va au camp pour faire accomplir la composition, revient au conseil.

Le 12, jeudi.—Il va au logis de M. de Schomberg, où il a soupé.

Le 25, mercredi.—Il arrive à quatre heures à Sainte-Foy-la-Grande, qui se remet en son obéissance[387].

Le 26, jeudi, à Sainte-Foy.—Il va à confesse au P. Séguin, à la messe et à la procession à la Fête-Dieu.

Le 31, mardi.—Il part d'Aiguillon et arrive au Port-Sainte-Marie.

Le 2 juin, jeudi.—Il va à Agen pour la deuxième fois, va à l'évêché, où M. l'évêque[388] lui donne à souper.

Le 8, mercredi.—A neuf heures il monte à cheval, part de Villemande, ayant fait mettre en marche son armée en bataille. Passant près de Montauban, il a dîné à onze heures à Albias, dans un champ labouré, au grand soleil. Il remonte après à cheval, va voir les attaques qui se faisoient à Négrepelisse, qui avoit refusé les portes[389].

Le 10, vendredi.—Il va à la fenêtre, d'où il voit l'assaut qui se donnoit à Négrepelisse, qui fut prise; tout tué et le lendemain brûlé.

Le 12, dimanche.—Il va à la messe en la rue, sous le portique de son logis; monte à cheval. A sept heures il part de las Gardies, village, passe la rivière de l'Aveyron et arrive à Montricous; va au conseil.

Juin
1622

Le 13, lundi.—Il arrive à la plaine de Campadour, qu'il avoit donnée pour rendez-vous à l'armée, y dîne sous des pruniers. A midi il monte à cheval, et va voir faire un logement au siége de Saint-Antonin[390]. Il y fut tiré un coup de piste, portant balle de plomb de la grosseur d'un œuf, qui passa droit et au-dessus de lui. Il arrive à trois heures aux Granges, et y a soupé, en un très-méchant logis.

Le 16, jeudi.—Il va au camp à dix heures, au-dessus d'une batterie où il y avoit deux coulevrines, en pointe par deux fois, tire sur des paysans qui remparoient; à la deuxième fois il en tue deux.

Le 17, vendredi.—Il s'endort à onze heures, entretenu de bons discours par M. le prince de Joinville et M. de Bassompierre; endormi jusqu'à neuf heures après minuit.

Le 19, dimanche.—A une heure il monte à cheval, va au camp, où il vit faire une attaque à une corne, qui fut virilement soutenue et repoussée par les femmes, à coups de hallebarde. M. le duc de Retz fut blessé près du Roi, d'une mousquetade à travers du genou, la balle demeurant dedans. Il s'en va au conseil, s'en revient fort fâché.

Le 24, vendredi.—Il dîne chez M. de Schomberg, puis voit sortir la garnison de Saint-Antonin, qui se rend à composition.

Le 25, samedi.—Il arrive à Castelnau de Montmirail, fait un combat contre le prince de Joinville avec des prunes nouvelles prises aux arbres, non encore mûres[391].

Juin
1622

Le 27, lundi.—Il arrive à Toulouse à dix heures, pour la deuxième fois, y dîne, va au conseil, reçoit les députés de la cour de Parlement et les autres corps des compagnies.

Le 3 juillet, dimanche.—Il entre en carrosse à dix heures, va à la messe aux Carmélites, et y met la première pierre à leur église, va ensuite en sa chambre, au conseil, et à quatre heures regarde passer les processions des pénitents bleus, entre lesquels étoit M. le Prince. A sept heures trois quarts il va chez M. le prince de Joinville, qui faisoit bâtir, et y a soupé.

Le 4, lundi.—Éveillé à trois heures et demie après minuit, il se plaint, criant et me disant avoir eu froid étant couché dans le lit, et fort peu dormi, les yeux chauds et la tête pesante. Levé, blême, il se sent foible et lassé; vêtu, botté, prié Dieu, déjeuné à quatre heures. Il part de Toulouse et arrive à dix heures et demie à Villefranche de Lauraguais; à onze heures et demie il se plaint encore des mêmes choses qu'il avoit fait ici dessus; dîne pourtant. Il va après en sa chambre, en son cabinet; son lit n'étoit pas venu, il se met tout vêtu sur une paillasse qu'on lui avoit apprêtée de paille fraîche. A une heure dévêtu, mis au lit, pouls plein, égal, un peu hâté, chaleur aux yeux, douleurs aux tempes et au chignon du col, chaleur âcre; il clignotoit, altéré. A deux heures il s'endort jusques à quatre et demie, se trouve mieux; levé assez gai, soupé en son cabinet.

Le 5, mardi.—Il arrive à Castelnaudary, après avoir entendu les harangues des magistrats au faubourg. Entrée à onze heures.

Le 14, jeudi.—Il arrive à Carcassonne, reçoit les harangues, y entre pour la première fois, va à l'église, puis au conseil[392].

Juil
1622

Le 17, dimanche.—Il entre à Narbonne pour la première fois; harangue hors la ville. Le sieur d'Effiat[393], écuyer cavalcadour de la grande écurie, portoit devant lui l'épée royale. Étant à cheval sous la porte, ayant la croupière trop serrée et étant piqué, il saute les quatre pieds en l'air; le Roi, surpris, est jeté sur le col, se remet si dextrement qu'à peine il y apparut, et ne parut rien à sa contenance. Il va à pied au port, voir les quatre frégates que M. de Guise avoit emmenées, puis monte à cheval et fait tout le tour de la ville pour voir les fortifications.

Le 18, lundi, à Béziers.—Il s'amuse à jouer aux cartes avec les sieurs de Montmorency, marquis de Portes, comte de Carmain[394], de Bassompierre et de Toiras[395] jusques à neuf heures et demie.

Le 24, dimanche.—Confessé, il va à la messe aux Jésuites; il se y faisoit une cérémonie pour la canonisation du père Ignace, et y a communié. Après son dîner il retourne au sermon aux Jésuites.

Le 25, lundi.—Il va en sa chambre, s'amuse à peindre au crayon, ne laisse pas d'entendre ses affaires par M. de Puisieux, secrétaire d'État.

Le 11 août, jeudi.—Il part de Béziers, va à Pézenas pour la première fois, va à la Grange, se y fait mouiller aux grottes; va à la chasse voler les perdreaux, revient souper.

Le 15, lundi.—Il part de Frontignan, va à Lunel.

Le 17, mercredi.—Il va à Semières, où il reçoit la ville, et fait sortir environ douze cents hommes de guerre; à Août
1622
neuf heures et demie M. le Prince lui a donné à dîner.

Le 19, vendredi, à Lunel.—A quatre heures il va hors la ville voir le régiment des gens de pied du fils de M. le Prince, qui venoit de Berry.

Le 21, dimanche.—Confessé par le père Séguiran, il va à la messe au Temple, y entend le sermon de M. Fenouillet, évêque de Montpellier.

Le 22, lundi.—Il va à Aigues-Mortes, va par toute la tour, et par toute la ville.

Le 26, vendredi.—A cinq heures il reçoit M. le connétable de Lesdiguières.

Le 28, dimanche.—Il va au conseil, donne l'épée de connétable à M. le maréchal de Lesdiguières.

Le 31, mercredi.—Il va à Castelnau, qu'il avoit pris pour rendez-vous de l'armée, se loge en haut de la montagne, du côté de Montpellier, et va à une petite maison appartenant au sieur d'Aimerie, premier consul dans Montpellier, se y accommode lui-même.

Le 5 septembre, lundi.—A une heure après midi, dévêtu, mis au lit pour dormir, n'ayant rien dormi la nuit à cause du bruit; il ne dort point. A quatre heures vêtu; il donne audience aux députés de Marseille[396].

Le 12, lundi.—Il va au conseil, fait sceller en sa chambre et en sa présence les provisions de secrétaire d'État pour M. d'Ocquerre[397] par la signature de M. de Gesvres, son oncle.

Le 23, vendredi.—Il donne les sceaux à M. de Caumartin[398]; pour motif, le décès de M. de Vic, décédé à Pignan.

Sept
1622

Le 29, jeudi.—A minuit vêtu, botté, il fait prendre les armes, va au quartier des Suisses dans la hutte d'un colonel, sur les avis du secours qui devoit venir à Montpellier; sans dormir, il va à la cuisine de bouche, où il a déjeuné.

Le 6 octobre, jeudi.—Il monte à cheval et va voir les trois régiments de gens de pied qui arrivoient du Dauphiné. M. le connétable arrive.

Le 9, dimanche.—Après dîner il va à son cabinet, où il fait entendre à M. le prince de Condé la résolution qu'il avoit prise sur la paix, et sur ce qu'il vouloit repartir pour le dissuader, le Roi dit: Il n'en faut plus parler, je l'ai ainsi résolu[399]; là-dessus M. le Prince demande congé pour aller à Notre-Dame de Lorette, qui lui est accordé et part soudain du logis du Roi, s'en va à Mauguiol et sur la nuit s'embarque au Thau de Mauguiol, et arrive à minuit à Aigues-Mortes, et avant le jour il part pour aller à Arles.

Le 12, mercredi.—Ce matin, avant que d'aller dîner, il fait M. de Bassompierre maréchal de France, par la démission de M. de Lesdiguières, fait connétable, disant ces mots en riant devant messieurs de son conseil: J'ai promis à Bassompierre, quand il auroit fait ses affaires, de le faire maréchal de France; je le fais et reçois son serment[400].

Oct
1622

Le 19, mercredi.—En la cour du logis, assis sur un haut dais, le seigneur de Calonges, gouverneur dans Montpellier durant le siége, lui demande pardon au nom du conseil des Églises. Il va après en sa chambre, où les députés des Cévennes en font autant; à cinq heures les consuls de Montpellier[401].

Le 23, dimanche, à Montpellier.—Il va à la procession générale, entend la messe à la grande loge, va visiter les fortifications[402].

Le 24, lundi.—A onze heures dîné au festin, chez M. de Luxembourg.

Le 25, mardi.—Il va au conseil, va après au collége du Pape, voir le cabinet de M. Ramelin, y tient à baptême un garçon d'un pauvre homme, avec la femme de M. le général Grille, homme riche.

Le 28, vendredi.—Il part de Saint-Gilles, passe le Rhône, arrive à Arles.

Le 30, dimanche.—Il arrive à Arles, fait son entrée, en demeure fort satisfait. Le peuple crioit en son langage: «Vive notre bon Roi Louis», et l'on lui a ouï dire ces paroles: Dieu vous bénie, mon peuple, Dieu vous bénie! Oct
1622
Le soir pensif, il me dit qu'il avoit été triste tout le jour, joue avec M. de Blainville.

Le 1er novembre, mardi, à Arles.—Il va à la grand'messe à l'évêché[403], et, en la cour, touche quatre cents six malades. Il voit courir les taureaux sauvages en la place de l'évêché.

Le 3, jeudi.—Il part d'Arles, va à Salon, arrive à Aix, fait son entrée.

Le 5, samedi.—Il part d'Aix et va souper à Maximin.

Le 6, dimanche.—Il va à Sainte-Baulme, où il fait ses dévotions[404]; y eut froid, y a dîné à midi. Il va après à Aubaigne.

Le 7, lundi.—Il part d'Aubaigne et fait son entrée à Marseille à six heures; va à la Majour, revient souper en son logis.

Le 8, mardi.—Le matin il va voir pêcher aux thons, et il en tue six avec une corsecque. A deux heures et demie il monte à pied à Notre-Dame de la Garde, où M. Brayer, qui étoit le capitaine, lui a donné la collation; il revient par Saint-Victor.

Le 9, mercredi.—Il va à la messe à la Majour pour faire chanter le Te Deum pour la nouvelle de la bataille navale gagnée par M. de Guise, devant la Rochelle[405], va voir la pêche du thon.

Le 10, jeudi.—Il part de Marseille, arrive en chassant à Aix pour la deuxième fois, va à l'église.

Le 11, vendredi.—Il va à l'église, où il tient à baptême Nov
1622
le fils de M. d'Oppède[406], premier président du Parlement; part après dîner.

Le 15, mardi.—Il passe à Tarascon, va à Beaucaire, à l'assemblée des états de la province de Languedoc; il lui est fait entrée.

Le 16, mercredi.—Il passe le Rhône, revient à Tarascon, passe la Durance à gué, et à trois heures fait son entrée à Avignon; loge au palais.

Le 17, jeudi.—Il monte à cheval, va à la chasse, où M. le duc de Savoie le va rencontrer, et revient le menant avec lui, et entre avec le Roi à Avignon.

Le 18, vendredi.—Il va aux Jésuites voir jouer des comédies.

Le 20, dimanche.—Il va en son cabinet, donne audience aux députés de l'assemblée des états de Languedoc, M. l'évêque de Montpellier[407] prenant la parole; va chez M. de Luxembourg, où il a dîné au festin, à la maison de M. de Breton. Après son dîner il va au sermon, puis tient à baptême le fils de M. de Breton, dont sa femme étoit accouchée une heure après que le Roi eut fait son entrée, avec Mme la duchesse de Chevreuse.

Le 21, lundi.—Il entre en carrosse et M. le duc de Savoie avec lui, et part d'Avignon. A un demi-quart de lieue, M. le duc de Savoie sort du carrosse, et prend congé de lui, ayant porté un genou en terre, et s'en retourne en Piémont. Le Roi arrive à deux heures et demie à Caderousse, va au conseil, puis joue aux cartes avant souper.

Le 28, lundi.—Il fait son entrée à Montélimart, puis à Valence, puis à Romans, part de Saint-Marcellin, par Nov
1622
Tullin, Varète, où il s'arrête à un moulin, y voit forger des épées.

Le 29, mardi.—Il fait son entrée à Grenoble, à quatre heures.

Le 1er décembre, jeudi.—Il va à l'église à sept heures et demie, monte à cheval, va à Vigile, lieu de plaisance de M. le connétable, qui lui a donné à dîner; après dîner il revient à Grenoble.

Le 3, samedi.—Étant à Grenoble, il mange chaque jour du fromage de la Grande Chartreuse, qu'ils lui avoient donné; en mange d'un deuxième, le trouve bon; il l'étoit. Il part de Grenoble à cheval, et monte en carrosse aux faubourgs à cause du froid.

Le 5, lundi.—Il fait son entrée à Vienne; y soupe.

Le 6, mardi.—Il arrive à Lyon pour la première fois, par la Saône, en bateau, à l'archevêché, ayant vu auparavant à la rencontre la Reine sa mère et la Reine. En arrivant il va en son cabinet, puis au cabinet de la Reine, et le soir chez la Reine à la comédie françoise; le soir couché, puis relevé, il va chez la Reine.

Le 8, jeudi.—A une heure il entre en carrosse, va voir la Reine sa mère, logée à Bellecourt, va à vêpres aux Jésuites, revient chez la Reine.

Le 10, samedi.—Il va à l'église, où il donne le bonnet de cardinal à M. de Richelieu, évêque de Luçon. Il va chez sa mère, revient chez M. d'Alincourt; à quatre heures à la comédie italienne.

Le 11, dimanche.—Il va dîner à la Motte, puis fait son entrée à Lyon. Il arrive à l'archevêché avec la Reine, dans une litière ouverte et le visage découvert. Il a soupé au festin chez M. d'Alincourt.

Le 15, jeudi.—Il monte à cheval, va à la volerie pour recevoir en chemin Mme la princesse de Savoie-Piémont, sa sœur, revient à quatre heures à la comédie italienne.

Le 20, mardi.—Il passe la rivière de Loire sur un pont de bateaux; elle étoit glacée. Il arrive à Roanne à Déc
1622
neuf heures. Il avoit fait dessein d'aller par eau jusques à Briare, pour y faire la fête de Noël; cet accident de glace le fait changer de dessein. A midi il monte à cheval, part de Roanne, chassant de la harquebuse.

Le 22, jeudi.—Il arrive à un méchant village nommé Tolon, y a dîné; à midi il monte à cheval, part de Tolon, en passant sans s'arrêter dans Moulins dehors la ville, et chassant arrive à deux heures à Villefranche, descend à la Croix-Blanche, et, sans y entrer, monte sur un autre cheval, fait porter ses oiseaux et sa harquebuse, va à la chasse vers la rivière d'Allier, revient à quatre heures, s'amuse à faire des barricades devant et derrière son logis, pour s'occuper, avec des chariots, et pour y faire faire la garde par ses mousquetaires.

Le 23, vendredi.—M. le duc de Nevers le vient saluer. Il arrive à Nevers à trois heures; réception. N'ayant pas voulu entrer, il va descendre à l'église, puis au château, le visite tout, reçoit les soumissions des magistrats, soupe, servi de neuf services, le festin donné par M. de Nevers.

Le 30, vendredi.—Dispute entre les sieurs d'Aiguilly[408] et de Sourdis[409], enfants d'honneur qui portoient des oiseaux de la chambre; Aiguilly est appelé par le sieur de Longueville. Le Roi le honnit; les voilà en colère. On lui dit qu'il les faut empêcher: Non, non, qu'on ne les empêche pas; laissez-les battre; je les séparerai bien, je leur ferai trancher la tête.

Chargement de la publicité...