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L'essayeuse : $b pièce en un acte

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SCÈNE III

LES MÊMES, RENÉ.

RENÉ, entrant

Madame !

LISE

Ma chérie, tu connais déjà mon mari ?

GERMAINE, froide

Certainement ! Vous allez bien, monsieur Tournelle ?

RENÉ

Pas mal, merci, madame Frémine.

LISE

Non, plus de madame Frémine ! Germaine a repris son nom de jeune fille.

GERMAINE

C’est bien gênant pour mes amis ! Je devrais envoyer une carte avec ces mots : « changement d’état-civil ».

(Un temps.)

RENÉ

Vous avez fait bon voyage ?

GERMAINE

J’ai changé cinq fois de train !… Ah ! vous êtes bien défendus contre les importuns !…

LISE

Tu n’es pas une importune, ma chérie ! (Bas, désignant René qui regarde au fond.) Tu sais, il n’a pas l’air de faire attention à toi !

GERMAINE, bas

Les hostilités ne sont pas engagées !… (Haut.) Quelle vue splendide on a d’ici ! (Elle va vers la fenêtre.)

LISE

Oui !

GERMAINE

On embrasse toute la campagne.

RENÉ

Heureuse campagne !

LISE (2)

René, tu es bête, mon ami !…

RENÉ (3)

Tu es fâchée ?… (A Germaine.) Quand ma femme m’appelle : son ami, c’est qu’elle ne m’aime plus !

LISE

Je t’adore !

(Elle veut l’embrasser.)

RENÉ, bas

Prends garde à ma raie !

(Un temps.)

GERMAINE

Et… vous avez beaucoup travaillé, monsieur Tournelle ?

RENÉ

Beaucoup !… J’ai mis en train un grand ouvrage ; le premier acte est délicieux.

GERMAINE

Ah ! Qu’est-ce que c’est ?

RENÉ

Mon ménage !

GERMAINE

Parlez sérieusement. Qu’est-ce que vous avez écrit ?

LISE

Trois sonates exquises.

GERMAINE

Vous me les jouerez ?

RENÉ

Un de ces jours !… Quand je les aurai oubliées…

GERMAINE

Non, tout de suite !… Quand j’ai un désir, il faut qu’il soit réalisé à l’instant !

RENÉ

Eh bien, ce soir, pour vous endormir.

LISE

Mais… j’y pense… tu n’as pas encore pris possession de ta chambre !

GERMAINE

Oh ! ça m’est égal !… je dors bien partout. Ah ! à une condition, cependant, c’est que j’aie un oreiller de crin !

LISE

Sapristi !… Un oreiller de crin ! Il n’y en a pas dans la maison !

GERMAINE

Ça ne fait rien !… Je m’en passerai !

RENÉ, passe 2

Je puis aller en chercher un à Verville, en auto ?

LISE, vivement

Non !… Les hommes ne savent pas acheter les oreillers : j’irai moi-même. J’ai, d’ailleurs, plusieurs emplettes à faire.

GERMAINE

Je t’accompagne ?

LISE

Tu es fatiguée : reste… René te tiendra compagnie… J’en ai pour une demi-heure à peine.

GERMAINE

Puisque tu le désires…

LISE

René, dis au chauffeur qu’il prépare l’auto.

RENÉ

Bien. (Il sort.)

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