Mémoires d'Outre-Tombe, Tome 3
LE VOYAGEUR
Qui pour elle, à ces murs de marbre revêtus,
A suspendu ces couronnes fanées?
LE GARDIEN
Les beaux enfants dont ses vertus
Ici-bas furent couronnées.
LE VOYAGEUR
On vient.
LE GARDIEN
C'est un époux: il porte ici ses pas
Pour nourrir en secret un souvenir funeste.
LE VOYAGEUR
Il a donc tout perdu?
LE GARDIEN
Non: un trône lui reste.
LE VOYAGEUR
Un trône ne console pas.
260: Congrès de Vérone, guerre d'Espagne, négociations, colonies espagnoles, par M. de Chateaubriand. Deux volumes in-8o, 1838.
261: Le traité entre la France et l'Espagne, signé à Fontainebleau, était destiné à demeurer secret. Il était fait trois parts du Portugal,—qui pourtant n'était pas encore conquis et ne devait jamais l'être entièrement. La partie nord,—sous le titre de Lusitanie septentrionale, était attribuée à la princesse Marie-Louise-Joséphine de Bourbon, et à son jeune fils, Charles-Louis de Bourbon, roi d'Étrurie, dont le royaume (l'ancien grand-duché de Toscane) était cédé à la France.—La partie sud (les Algarves et l'Alentejo) était donnée en souveraineté à Godoï (prince de la Paix), favori de la reine et du roi d'Espagne.—La partie centrale (les provinces de Beira, Tras os Montès, Estrémadure) devait être occupée par les troupes de Napoléon, mais s'il gardait ainsi en dépôt le centre et le cœur du Portugal, c'était uniquement, disait le traité, «pour en disposer à la paix générale». On promettait au roi d'Espagne la moitié des colonies portugaises, et on lui donnait le titre pompeux d'Empereur des deux Amériques. Puis venait un petit article, jeté négligemment à la fin d'un annexe et qui était, en réalité, tout le traité. Cet article stipulait «qu'un nouveau corps de 40,000 hommes serait réuni à Bayonne, pour être prêt à entrer en Espagne et à se porter en Portugal dans le cas où les Anglais enverraient des renforts et menaceraient de l'attaquer.»
262: Jean VI (1767-1826), fils de Pierre III et de la reine Marie Ire, avait été nommé régent du royaume en 1792, lorsque sa mère fut tombée en enfance. En 1807, à la suite de l'invasion française, il se retira avec la famille royale au Brésil, colonie portugaise, et y prit le titre d'Empereur. Il fut proclamé roi du Portugal en 1816 à la mort de sa mère, mais il ne revint dans ce pays qu'en 1821.
263: Une armée d'environ 25,000 hommes, sous les ordres de Junot, s'était mise en mouvement de Bayonne, le 17 octobre 1807, et s'était portée en Portugal. Moins de dix jours après, le 26 octobre, son avant-garde était à Abrantès, à vingt lieues de la capitale, et le conseil du Régent ignorait encore son approche. Ce prince n'avait connu la gravité de sa position qu'en recevant, le 25, le numéro du Moniteur, en date du 13, apporté à Lisbonne par un bâtiment extraordinairement expédié de Londres à l'ambassadeur anglais,—numéro renfermant cette sentence impériale: La maison de Bragance a cessé de régner en Europe.
264: Proclamation de Napoléon aux Espagnols, en date du 24 mai 1808.
265: Ce Catéchisme renfermait encore d'autres questions et d'autres réponses. En voici quelques-unes:
«Combien y a-t-il d'empereurs des Français?—Un véritable en trois personnes trompeuses.—Comment les nomme-t-on?—Napoléon, Murat et Manuel Godoï (le prince de la Paix).—Lequel des trois est le plus méchant?—Ils le sont tous trois également.—De qui dérive Napoléon?—Du péché.—Murat?—De Napoléon.—Et Godoï?—De la fornication des deux.—Quel est l'esprit du premier?—L'orgueil et le despotisme.—Du second?—La rapine et la cruauté.—Du troisième?—La cupidité, la trahison et l'ignorance.—Comment les Espagnols doivent-ils se conduire?—D'après les maximes de N.-S.-J.-C.—Qui nous délivrera de nos ennemis?—La confiance entre nous autres et les armes.—Est-ce un péché de mettre un Français à mort?—Non, mon père, on gagne le ciel en tuant un de ces chiens d'hérétiques.» (Mignet, Histoire de la Révolution française, t. II, p. 836.)
266: Le 22 juillet 1808, le général Dupont, vaincu et cerné à Baylen (Andalousie), signait la capitulation en vertu de laquelle tout son corps d'armée était prisonnier de guerre. D'après le Rapport de Regnaud de Saint-Jean-d'Angély sur la capitulation, le corps de Dupont avant le combat de Baylen comptait en présence sous les armes, 22,830 hommes, et en effectif, 27,067.
267: Lorsqu'il débarqua en Portugal, le 31 juillet 1808, avec dix mille hommes, renforcés de quatre mille quelques jours après, Wellington ne portait encore que le nom de sir Arthur Wellesley. Ce fut seulement après la bataille de Talaveyra (27 juillet 1809), qu'il reçut la pairie et le titre de vicomte de Wellington. Il fut fait duc à la bataille de Vittoria (21 juin 1813).
268: Le 30 août 1808, Junot, battu le 21 à Vimeiro, dut signer la convention de Cintra, aux termes de laquelle l'armée française devait évacuer entièrement le territoire portugais, mais avec armes et bagages et sans être prisonnière de guerre. Le gouvernement anglais se chargeait de la transporter par mer à Lorient et à Rochefort.
269: Sur cette tentative du maréchal Soult et sur les moyens dont il usa pour essayer de se faire roi de Portugal, le général Thiébault a donné, dans ses Mémoires, tome IV, pages 337 et suivantes, les détails les plus curieux.
270: Le 6 juin 1808, décret impérial, daté de Bayonne, par lequel Napoléon proclame roi des Espagnes et des Indes son frère Joseph, transféré de Naples à Madrid.—Le 15 juillet 1808, autre décret, déclarant roi de Naples, sous le nom de Joachim-Napoléon, le maréchal Murat, grand-duc de Berg.
271: Chateaubriand commet ici une petite erreur de date. C'est seulement le 27 septembre 1808 que Napoléon arriva à Erfurt et qu'il eut avec Alexandre sa première entrevue. Les deux empereurs se séparèrent le 14 octobre. Ce fut le 4 octobre qu'eut lieu la représentation dans laquelle on joua l'Œdipe de Voltaire et où Talma dit le vers, si célèbre depuis:
L'amitié d'un grand homme est un bienfait des dieux.
Ce soir-là «le parterre des rois» se composait des princes suivants: le roi de Bavière, le roi de Saxe, le roi de Wurtemberg, le roi de Westphalie, le duc de Weimar, le duc d'Oldenbourg, le duc de Mecklembourg-Schwérin, le duc de Mecklembourg-Strélitz, le duc Alexandre de Wurtemberg, le prince de la Tour-et-Taxis. (Voir le beau livre de M. Albert Vandal sur Napoléon et Alexandre Ier, tome I, pages 415 et 441.)
272: L'Empereur, dans ce même discours au Corps législatif, annonçait solennellement «qu'il allait couronner dans Madrid le roi d'Espagne et planter ses aigles sur les forts de Lisbonne,» engagement théâtral qui n'empêchait pas nos troupes, à ce même moment, d'évacuer le Portugal.
273: Napoléon quitta Paris le 29 octobre 1808. Le 3 novembre, il était à Bayonne, et le lendemain il entrait en Espagne.
274: Réponse de Napoléon, le 15 décembre, à une députation de la municipalité et des principaux membres du clergé de la ville de Madrid. Dans cette réponse, il disait encore qu'il lui serait facile de gouverner l'Espagne, en y établissant autant de vice-rois qu'il y avait de provinces; que cependant il ne se refusait pas de céder au roi ses droits de conquête et de l'établir dans Madrid si les habitants voulaient manifester leurs sentiments de fidélité et donner l'exemple aux provinces. Qu'ils se hâtassent donc de prouver la sincérité de leur soumission en prêtant devant le Saint-Sacrement un serment qui sortît non-seulement de la bouche mais du cœur.—En arrivant en Égypte, Bonaparte avait dit: «Peuples d'Égypte, je respecte plus que les mameloucks Dieu, son prophète et le Coran.» À Madrid, Napoléon respecte plus le Saint-Sacrement, que le catholique peuple d'Espagne!
275: Le marquis de La Romana (1761-1811). En juin 1807, Napoléon avait obtenu du faible et imprévoyant Charles IV que 25,000 soldats espagnols fussent envoyés en Allemagne pour se joindre à l'armée française. Ces troupes ne tardèrent pas à être dirigées sur le Danemarck, pour s'opposer aux entreprises de l'Angleterre. Une division très considérable, commandée par le général La Romana, avait ses quartiers dans les îles de Fionie ou de Funen et de Langeland, à huit cents lieues des Pyrénées. À la nouvelle des malheurs de sa patrie, le marquis de La Romana résolut de lui porter secours, et, déjouant la surveillance dont il était l'objet, il s'embarqua sur des bâtiments anglais avec la majeure partie de sa division. Le 17 août 1808, il débarquait en Espagne, où son arrivée n'allait pas peu contribuer à enflammer encore davantage le patriotisme et l'enthousiasme de ses compatriotes.
276: Voici un fragment du Catéchisme en usage dans tous les diocèses de l'Empire français:
«Suite du 4e commandement (Tes père et mère honoreras, etc.).
«Demande. Quels sont les devoirs des chrétiens à l'égard des princes qui les gouvernent, et quels sont en particulier nos devoirs envers Napoléon Ier, notre Empereur?
«Réponse. Les chrétiens doivent aux princes qui les gouvernent, et nous devons en particulier à Napoléon Ier, notre Empereur, l'amour, le respect, l'obéissance, la fidélité, le service militaire, les tributs ordonnés pour la conservation et la défense de son Empire et de son trône; nous lui devons encore des prières ferventes pour son salut et pour la prospérité spirituelle et temporelle de l'État.
«Demande. Pourquoi sommes-nous tenus de tous ces devoirs envers notre Empereur?
«Réponse. C'est premièrement parce que Dieu, qui crée les empires et les distribue selon sa volonté, en comblant notre Empereur de dons, soit dans la paix, soit dans la guerre, l'a établi notre souverain, l'a rendu le ministre de sa puissance et son image sur la terre. Secondement, parce que Notre-Seigneur Jésus-Christ, tant par sa doctrine que par ses exemples, nous a enseigné lui-même ce que nous devons à notre souverain: il est né en obéissant à l'édit de César-Auguste; il a payé l'impôt prescrit, et de même qu'il a ordonné de rendre à Dieu ce qui appartient à Dieu, il a aussi ordonné de rendre à César ce qui appartient à César.
«Demande. Que doit-on penser de ceux qui manqueraient à leur devoir envers notre Empereur?
«Réponse. Selon l'apôtre Saint-Paul, ils résisteraient à l'ordre établi de Dieu même, et se rendraient dignes de la damnation éternelle.» (Catéchisme à l'usage de toutes les églises de l'Empire français, p. 55 et 56. Paris, Mame frères, 1811.)
277: Le 24 décembre 1803, Jérôme Bonaparte avait épousé à Baltimore Mlle Elisabeth Patterson, fille de M. William Patterson, écuyer, président de la Banque de Baltimore et l'un des hommes les plus riches des États-Unis. Au mois de mars 1805, les deux époux vinrent en Europe et débarquèrent à Lisbonne, d'où, le 5 avril, Jérôme partit pour Paris, engageant sa femme, déjà fort avancée dans sa grossesse, à l'aller attendre en Hollande. Ce jour fut le dernier où Mme Jérôme Bonaparte ait vu son mari. Celle-ci se rendit, non en Hollande, mais en Angleterre, ainsi que le dit Chateaubriand, et, le 7 juillet 1805, elle accoucha d'un fils, qui fut baptisé sous le nom de Jérôme-Napoléon Bonaparte. Dès le 24 mai précédent, l'Empereur avait écrit au pape pour lui demander d'annuler le mariage. Pie VII répondit, le 27 juin, qu'il n'était pas en son pouvoir de prononcer une invalidation qui serait contraire aux lois de l'Église. «Si nous usurpions, disait-il en terminant, une autorité que nous n'avons pas, nous nous rendrions coupable d'un abus le plus abominable devant le tribunal de Dieu et devant l'Église entière. Votre Majesté même, dans sa justice, n'aimerait pas que nous prononçassions un jugement contraire au témoignage de notre conscience et aux principes invariables de l'Église.»—Au mois de novembre 1805, Mme Jérôme Bonaparte retourna avec son fils aux États-Unis. Moins de deux ans après, bien qu'elle ne fût pas morte, et qu'elle dût même survivre à son mari, celui-ci épousait, le 12 août 1807, la princesse Frédérique-Catherine de Wurtemberg. Le 8 décembre de la même année, il était déclaré roi de Westphalie.
278: C'est à M. de Fontanes que Napoléon dit un jour ces paroles. En voici le texte complet: «Moi, je ne suis pas né à temps; voyez Alexandre, il a pu se dire le fils de Jupiter sans être contredit. Moi, je trouve dans mon siècle un prêtre plus puissant que moi, car il règne sur les esprits et je ne règne que sur la matière: les prêtres gardent l'âme et me jettent le cadavre.» Histoire du pape Pie VII, par le chevalier Artaud de Montor.
279: Lettre de Napoléon au comte de Champagny, ministre des relations extérieures, datée de Benavente, 1er janvier 1809.—Correspondance de Napoléon Ier, t. XVIII, p. 193.
280: Dès le mois d'août 1807, afin, disait-il, d'assurer ses communications avec Naples, Napoléon avait chargé le général Lemarrois d'occuper une partie des États de l'Église, les provinces d'Ancône, de Macerata, de Fermo et d'Urbin, et d'en percevoir les revenus. Le 2 février 1808, les troupes françaises étaient entrées à Rome, l'Empereur, cette fois, invoquant la nécessité de mettre fin aux intrigues de la cour papale, intrigues dirigées contre sa personne et son autorité. Le 2 avril suivant, un décret impérial avait annexé au royaume d'Italie les légations d'Ancône, d'Urbin, de Macerata et de Camerino. Le décret du 17 mai 1809 portant réunion des États romains à l'Empire français n'était donc que la suite et le couronnement d'une politique depuis longtemps conçue et dont le dernier terme devait être fatalement l'enlèvement et la captivité du pape.
281: Le 10 juin 1809.
282: Barthélemy Pacca (1756-1844), cardinal-doyen du Sacré-Collège. Il devint en 1808 le principal ministre de Pie VII, rédigea et fit afficher la bulle d'excommunication lancée contre Napoléon en 1809, fut enlevé de Rome en même temps que le Souverain Pontife, et enfermé au fort de Fénestrelle. Il rejoignit le Pape à Fontainebleau en 1813, le détermina à rétracter les concessions qu'il venait de faire par le Concordat du 25 janvier et rentra avec lui à Rome en 1814. Il a laissé d'intéressants Mémoires.
283: La bulle d'excommunication fut affichée dans la nuit du 10 au 11 juin.
284: Sextius-Alexandre-François, comte Miollis (1759-1828), fit ses premières armes en Amérique, fut général de brigade en 1795, divisionnaire en 1799. Il était en 1809 commandant militaire des États-Romains. Ami des lettres, il avait, en 1797, à Mantoue, établi une fête en l'honneur de Virgile. Plus tard, il fit élever une colonne à l'Arioste dans la ville de Ferrare. Son frère, Charles-François-Melchior-Bienvenu de Miollis, évêque de Digne, de 1805 à 1838, a servi de modèle à Victor Hugo, lorsqu'il a peint, dans les Misérables, avec de si admirables couleurs, le portrait de M. Charles-François-Bienvenu Myriel, évêque de D.
285: Étienne Radet (1762-1825). Il était l'homme des missions pénibles. Pendant les Cent-Jours, l'Empereur le chargea de conduire à Cette le duc d'Angoulême qui devait s'y embarquer pour l'Espagne. Cette nouvelle besogne accomplie, il fut nommé inspecteur général de gendarmerie et grand prévôt de l'armée. Arrêté en 1816 et condamné par un conseil de guerre à neuf ans de détention, il fut rendu à la liberté par une ordonnance royale du mois de mars 1818.
286: C'était dans la nuit du 5 au 6 juillet 1809.
287: Dans toutes les éditions des Mémoires, on a imprimé jusqu'ici: «le 20 février 1800». C'est le 20 février 1798 que le Directoire fit enlever le pape Pie VI. Le général Berthier, le futur major-général de Napoléon, commandait alors à Rome. «Ici, je voudrais pouvoir me taire, dit l'historien Botta, mais l'amour de la vérité l'emporte, et je dirai que dans l'état d'abaissement où était tombé le vénérable Pontife, il eut à supporter de la part des républicains français des insultes telles, que ce n'eût pas été une faute beaucoup plus grave de lui ôter la vie.» (Botta, Histoire d'Italie de 1789 à 1814, t. 3, p. 134.)
288: Pie VI, traîné par le Directoire de prison en prison, avait été amené à Valence le 11 juillet 1799; il mourut dans cette ville le 29 août de la même année, en pardonnant à ceux qui depuis dix-huit mois l'avaient traité avec tant de lâcheté et de barbarie: «Recommandez surtout à mon successeur de pardonner aux Français comme je leur pardonne de tout mon cœur.» Comme lui, son successeur sera odieusement persécuté, et il pardonnera comme lui.
289: Le poète Pétrarque, solennellement couronné au Capitole, le jour de Pâques, 8 avril 1341, de lauriers qu'il consacra sur le grand-autel de Saint Pierre. Il vécut longtemps à Avignon, qui était alors la résidence des papes.
290: 6 juillet 1809.
291: Ils avaient refusé d'assister au mariage de Napoléon et de Marie-Louise. Après avoir juré de maintenir dans leur intégrité les droits du Saint-Siège, et les voyant lésés par l'annulation du mariage de l'Empereur, ils ne s'étaient pas cru permis de légitimer par leur présence une seconde union. Napoléon les exila, confisqua leurs biens, saisit leurs revenus, supprima leurs traitements, et leur interdit de porter les marques de la dignité cardinalice. Au lieu de la soutane, du chapeau, de la barrette et des bas rouges, ils durent porter des vêtements noirs. De là l'appellation que les contemporains leur donnèrent et qui devait rester pour eux un titre d'honneur: les Cardinaux noirs. Voici leurs noms: Consalvi, di Pietro, Mattei, Litta, Pignatelli, Scotti, della Somaglia, Brancadoro, Saluzzo, Galeffi, Ruffo-Scilla, Oppizoni et Gabrielli.
292: Le Sénatus-consulte organique du 17 février 1810 sanctionna le décret du 17 mai 1809, qui avait ordonné la réunion à l'Empire français de Rome et des États du pape.
293: Bref du 20 septembre 1811.
294: 20 avril 1809.
295: 22 avril.
296: 28, 29, 30 avril.
297: Le 13 mai.
298: Jacques-Alexandre-Bernard Law, comte puis marquis de Lauriston, né à Pondichéry le 1er février 1763. Il était le petit-neveu du célèbre contrôleur John Law et le fils d'un maréchal de camp gouverneur des possessions françaises dans l'Inde. Camarade de Bonaparte à Briennne, il devint son aide de camp et assista à ses côtés à la bataille de Marengo. Général de division d'artillerie et comte de l'Empire (29 juin 1808), il se signala sur les champs de bataille, particulièrement à Raab, à Wagram, à la Moskowa, à Lützen, à Weissig, à Bautzen et à Wurtschen; très apprécié de l'Empereur, il se vit chargé par lui de plusieurs missions diplomatiques, notamment de l'ambassade de Pétersbourg en 1811. Louis XVIII le nomma grand-cordon de la Légion d'honneur (29 juillet 1814), et capitaine-lieutenant aux mousquetaires gris (20 février 1815). Pendant les Cent-Jours, il resta fidèle au roi, qui le fit pair de France (17 août 1815) et le créa marquis (20 décembre 1817). Il entra dans le cabinet du duc de Richelieu comme ministre de la Maison du roi, le 1er novembre 1820. Maréchal de France le 6 juin 1823, il prit part à la guerre d'Espagne, assiégea et prit Pampelune et devint, le 9 octobre 1823, chevalier du Saint-Esprit. Le 4 août de l'année suivante, il abandonna ses fonctions de ministre de la Maison du roi pour celles de grand veneur et de ministre d'État. Il mourut d'une attaque d'apoplexie foudroyante dans la nuit du 10 au 11 juin 1828.
299: Le chevalier de Folard (1669-1752), auteur des Nouvelles découvertes sur la guerre et du Commentaire, formant un corps de science militaire. Ses écrits sur la tactique lui valurent le nom de Végèce français.
300: Karl-Gotlieb Guischardt (1724-1775), écrivain militaire allemand, auteur des Mémoires militaires sur les Grecs et les Romains et de Mémoires critiques et historiques sur plusieurs points d'antiquités militaires.
301: Georges-Frédéric de Tempelhoff (1737-1807), général et écrivain militaire prussien. Son principal ouvrage est une Histoire de la guerre de Sept ans en Allemagne.
302: Henri Lloyd (1729-1783), écrivain militaire anglais, auteur de l'Introduction à l'histoire de la guerre en Allemagne, de Mémoires politiques et militaires et de la Philosophie de la guerre.
303: Le 12 juillet 1809.
304: M. de Champagny. Il avait été fait duc de Cadore le 15 août 1809. Ancien membre de l'Assemblée constituante, emprisonné sous la Terreur, conseiller d'État après le 18 brumaire, ambassadeur à Vienne en 1801, il avait pris le portefeuille de l'Intérieur (8 août 1804) en remplacement de Chaptal. Trois ans après, le 8 août 1807, la disgrâce de Talleyrand l'avait fait passer du ministère de l'Intérieur à celui des Relations extérieures. Il quitta ce dernier ministère le 16 avril 1811 et devint ministre d'État, intendant des domaines de la couronne et sénateur. En 1814, il adhéra des premiers aux Bourbons, qui le firent pair de France. Pendant les Cent-Jours, Napoléon lui rendit l'intendance des domaines de la couronne et le nomma pair de l'Empire. La seconde Restauration le rendit à la vie privée; mais, en 1819, M. Decazes le comprit dans la fournée des soixante nouveaux pairs destinée à rendre la majorité au ministère. M. de Champagny vécut encore assez pour prêter serment au gouvernement de Juillet, et continua de siéger dans la Chambre des pairs jusqu'à sa mort, arrivée le 3 juillet 1834.
305: Le récit du général Rapp, dans ses Mémoires, p. 141 et suiv., est de tous points conforme à celui du duc de Cadore.—Chateaubriand ne donne pas le nom du jeune Allemand qui avait voulu tuer Napoléon. Il s'appelait Frédéric Stapss. C'était le 12 octobre, au moment où l'Empereur, passant une grande revue à Schœnbrünn, assistait au défilé des troupes entre le maréchal Berthier, son chef d'état-major, et le général Rapp, son aide de camp. Un jeune homme, presque un enfant, la main droite enfoncée sous sa redingote, dans une poche d'où sortait un papier, s'avança vers lui. Berthier, s'imaginant que ce jeune homme voulait présenter une pétition, se plaça entre lui et l'Empereur, et lui dit de remettre sa pétition à l'aide de camp Rapp. Stapss répondit qu'il voulait parler à Napoléon lui-même; puis, comme il s'était avancé de nouveau et s'approchait de très près, Rapp lui signifia de se retirer, en ajoutant que, s'il avait quelque chose à demander, on l'écouterait après la parade. Son regard et son air résolus donnèrent des soupçons à l'aide de camp; appelant un officier de gendarmerie qui se trouvait là, il le fit arrêter et conduire au château. On trouva sur lui un couteau de cuisine. Stapss déclara qu'il avait voulu s'en servir pour frapper Napoléon, mais qu'il ne pouvait rendre compte de sa conduite qu'à Napoléon lui-même. (Mémoires de Rapp, p. 141.)
Napoléon, ne pouvant croire que ce jeune homme n'eût point de complice, recourut, pour le contraindre à les découvrir, à une nouvelle espèce de torture, à la torture de la faim. Dans la lettre qu'il adressa au ministre de la police, pour lui enjoindre d'étouffer le bruit de la tentative de Stapss, il écrivait: «La fièvre d'exaltation où il était a empêché d'en savoir davantage; on l'interrogera quand il sera refroidi et à jeun». Il fera, d'ailleurs, plus tard, des aveux complets. À Sainte-Hélène, il dira un jour au médecin O'Meara, qu'il avait prescrit de ne donner au prisonnier aucune nourriture pendant vingt-quatre heures, et seulement de l'eau.» (Napoléon en exil, par O'Meara, 1822.)—M. de Bausset, préfet du palais impérial, dit, dans ses Mémoires (t. II, p. 228): «On le garda au secret pendant quelques jours, lui faisant éprouver les privations du sommeil, lui donnant des fruits pour nourriture, afin d'affaiblir sa constitution et de le forcer à révéler le nom de ses complices.» Rapp constate que Stapss, lorsqu'il fut exécuté, n'avait rien pris depuis trois jours. Au moment d'aller à la mort, on lui offrit de la nourriture; il la refusa en disant qu'il lui restait encore assez de force pour marcher au supplice. Sa fermeté ne se démentit pas un instant. Son dernier cri fut: Vive la liberté! Vive l'Allemagne! Mort à son tyran! (Mémoires de Rapp, 147.)
306: Ce traité est appelé dans l'histoire la paix de Vienne. L'Autriche abandonnait quatre cent mille âmes sur la frontière de Bavière, qui fut déterminée par une ligne entre Linz et Passau, couvrant cette dernière ville; plus d'un million sur la frontière d'Italie, Villach en Corinthie, Laybach et la rive droite de la Save; enfin dix-sept cent mille en Galicie. Les territoires détachés de la Haute-Autriche furent donnés à la Bavière; les autres cédés à la France sous le nom de provinces Illyriennes. Les territoires Galiciens furent donnés au roi de Saxe, comme duc de Varsovie, sauf les deux cercles de Solkiew et de Zloczow, livrés à la Russie. L'empereur d'Autriche reconnaissait tous les changements survenus ou qui pourraient survenir en Espagne, en Portugal, en Italie; il adhérait au système prohibitif adopté par la France et la Russie à l'égard de l'Angleterre et s'engageait à cesser toute relation commerciale avec cette dernière puissance. Ce traité, qui démantelait entièrement la monarchie autrichienne, ouvrant ses provinces polonaises, lui ôtant ses défenses de l'Inn et des Alpes Carniques, était fait moins en vue de la paix qu'en prévision d'une guerre future: la paix de Vienne devait durer quatre ans.
307: Le comte Alexandre de Laborde avait servi pendant la Révolution dans un régiment de hussards autrichiens. Nommé auditeur au Conseil d'État en 1808, il avait accompagné Napoléon pendant la campagne de 1809, et il venait de jouer un rôle actif dans la pacification avec l'Autriche. Après la signature du traité et le départ de l'armée française, il était demeuré à Vienne avec la mission tout officieuse d'aplanir certaines difficultés de détail, surtout d'observer et de rendre compte: il était particulièrement propre à cette tâche, ayant ses entrées chez les ministres, de nombreuses relations dans le monde de la cour et du gouvernement. Ce fut à lui que Metternich fit la première ouverture sur la possibilité d'un mariage de l'empereur Napoléon avec une princesse de la maison d'Autriche. (Voir Napoléon et Alexandre Ier, par Albert Vandal, tome II, chapitre VI.)
308: Le maréchal Berthier, prince de Neuchâtel.
309: Napoléon n'avait point attendu Marie-Louise à Compiègne. «Profitant, dit Norvins (Mémorial, t. III, p. 279), du trouble du palais, de l'obscurité et du mauvais temps, l'Empereur s'était esquivé par un escalier dérobé et était sorti par une petite porte du parc. Il y avait trouvé une simple calèche bien attelée où, précédé d'un seul courrier, il se jeta avec Murat, enveloppés l'un et l'autre dans de grands manteaux, et à toutes brides il alla s'embusquer à deux lieues de Soissons, au village de Courcelles, sous le porche de l'église, pour y guetter l'arrivée de Marie-Louise ... Enfin parut la voiture si désirée; à l'instant, comme un sous-lieutenant qui revoit sa cousine, Napoléon s'élança de la calèche, ouvrit brusquement la portière de la berline impériale, mit sa sœur Caroline sur le devant, prit sa place et embrassa l'Impératrice. Tout cela se fit si rapidement qu'il avait embrassé dix fois la jeune archiduchesse, qu'elle savait à peine à qui elle devait cet impromptu. Ce fut une affaire d'avant-postes, conçue et exécutée militairement: Marie-Louise fut surprise et conquise.»
310: «Un courrier vint tout à coup annoncer le cortège. Il pleuvait à verse ... Tout Compiègne se précipita dans les cours, et surtout dans la cour d'honneur ... Enfin à dix heures, par une pluie battante, le canon annonça l'entrée dans la ville de l'auguste couple. À l'instant toutes nos royautés des deux sexes vinrent s'étager sur les marches du perron et se trouvèrent à la descente de la voiture impériale. L'Empereur en sortit, donnant la main à l'Impératrice, et lui présenta rapidement toute sa famille. Ainsi fit-il dans la galerie, comme au pas de course ... Le souper fut servi dans l'appartement de Marie-Louise. Il n'y eut en tiers que la reine de Naples, qui, mourant de sommeil, se congédia en sortant de table. Or, qui de trois ôte un, reste deux ... Le lendemain, à midi, l'Empereur déjeunait auprès du lit de l'Impératrice ... Ce fut la chancellerie qui resta vierge, et Napoléon un simple mortel.» Norvins, Mémorial, t. III, p. 280.—Voir aussi les Mémoires de M. de Bausset.
311: Le Moniteur du 21 mars contenait, à la date du 20, cet avis solennel: «Aujourd'hui, 20 mars, à neuf heures du matin, l'espoir de la France a été rempli. Sa Majesté l'Impératrice est heureusement accouchée d'un prince. Le Roi de Rome et son auguste Mère sont en parfaite santé.»—Le 17 février 1810, trois jours après l'adhésion officielle de l'empereur d'Autriche au mariage de l'archiduchesse Marie-Louise avec Napoléon, le ministre d'État, comte Regnaud de Saint-Jean d'Angély, avait lu aux sénateurs réunis en séance solennelle l'exposé des motifs du sénatus-consulte qui réunissait l'État de Rome à l'Empire. Après avoir félicité Napoléon de placer une seconde fois sur sa tête la couronne de Charlemagne, le ministre, dévoilant la pensée maîtresse de son souverain, avait ajouté: «Il veut que l'héritier de cette couronne porte le titre de Roi de Rome; qu'un prince y tienne la cour impériale, y exerce un pouvoir protecteur, y répande ses bienfaits en renouvelant les splendeurs des arts.» L'article du 7 Sénatus-consulte, que le Sénat s'empressa de voter, était ainsi libellé: «Le prince impérial porte le titre et reçoit les honneurs de roi de Rome.» L'article 10 stipulait que les Empereurs, après avoir été couronnés à Notre-Dame de Paris, le seraient à Saint-Pierre de Rome avant la dixième année de leur règne.» Et trois ans après sa naissance, le prince impérial, le roi de Rome n'aura déjà plus de couronne et ne sera plus pour l'Europe qu'un prince autrichien! La parole du Psalmiste sera devenue une prophétie: «Cogitaverunt consilia quœ non potuerunt stabilire»; et la menace qu'elle contient sera en voie d'accomplissement: «Fructum eorum de terra perdes et semen eorum a filiis hominum.» Voir le Roi de Rome, par Henri Welschinger, p. 6.
312: Le sultan Sélim III. Il était monté sur le trône en 1789. Lorsque Bonaparte avait envahi l'Égypte, Sélim avait fait cause commune avec l'Angleterre, mais il avait conclu la paix avec la France en 1802. Il fut étranglé en 1808.
313: Dans les précédentes éditions des Mémoires, on a imprimé à tort Ostende, au lieu d'Osterode. Après la campagne de Prusse et de Pologne, Napoléon alla s'établir à Osterode (Hanovre) pour y passer la saison froide, qui, ayant commencé fort tard, cette année, dura plus que de coutume. Il s'y occupa d'amasser des vivres, en les faisant venir par la basse Vistule, de dissoudre le corps décimé d'Augereau, de réorganiser ses troupes, et d'y rétablir la discipline, altérée par les marches, les souffrances et les habitudes de maraude.—Le texte complet de la lettre du 3 avril a été donné par Ségur dans son Histoire de Napoléon et de la Grande-Armée, livre I, chapitre III.
314: Le traité du 28 mai, signé à Bucharest, n'était pas un traité d'alliance entre la Porte et la Russie, mais un traité de paix, mettant fin à la querelle qui depuis longtemps divisait les deux puissances. Le traité rendait à la Turquie la Moldavie et la Valachie, après en avoir détaché cependant la Bessarabie, qu'il incorporait à l'empire russe; il consacrait vaguement l'autonomie des Serbes sous la suzeraineté du sultan et renouvelait implicitement le protectorat mal défini du tsar sur les principautés roumaines et même sur l'ensemble de la chrétienté orthodoxe du Levant. La paix de Bucharest assurait à la Russie l'entière disponibilité de ses forces. Le traité du 28 mai resta ignoré de Napoléon, et ce fut seulement à la fin d'octobre qu'il apprit que l'armée russe de Moldavie s'avançait vers la Lithuanie.
315: À la suite de la déposition de Gustave IV en 1809, son oncle, le duc de Sudermanie, avait été proclamé roi sous le nom de Charles XIII. Ce prince n'ayant pas d'enfants, les États, le 14 juin 1809, choisirent pour héritier de la couronne le prince de Holstein-Augustenbourg, beau-frère du roi de Danemarck. Moins d'un an après, le 28 mai 1810, pendant une revue, le prince d'Augustenbourg tomba de cheval, frappé d'un mal subit, et mourut sur la place. Dans ces circonstances, quelques officiers suédois, quelques professeurs de l'Université d'Upsal, admirateurs passionnés de la France et de son armée, se mirent en tête de chercher dans l'état-major impérial, chez l'un des maréchaux, l'héritier de la couronne. Leurs préférences allèrent à Bernadotte, dont ils avaient apprécié la conduite et les talents militaires dans la Poméranie suédoise. Le 21 août 1810, les États l'élisaient comme héritier du trône sous le nom de Charles-Jean.
316: Joseph Bonaparte et Bernadotte avaient épousé les deux sœurs, Marie-Julie Clary et Eugénie-Bernardine-Désirée Clary, filles d'un négociant de Marseille. La première devint reine de Naples, puis d'Espagne; la seconde, reine de Suède.
317: Comme la maison de la rue d'Anjou, la terre de Grosbois était une dépouille de Moreau.
318: Bernadotte s'engageait à entrer en campagne avec trente mille hommes. La Norwège était promise à la Suède. Le 3 mai 1812, l'Angleterre accéda au traité du 24 mars, qui fut le préliminaire de la sixième coalition.
319: Gérard-Christophe-Michel Duroc (1772-1813). Aide de camp du général Bonaparte dès 1796, il ne cessa de jouir auprès de lui de la plus entière confiance. Après le 18 brumaire, le premier Consul lui confia les missions les plus délicates, successivement près des cours de Berlin, de Vienne, de Stockholm et de Saint-Pétersbourg. Lors de la formation de la cour impériale en 1805, il fut créé grand maréchal du palais et spécialement chargé de veiller à la sûreté de la personne de Napoléon, qui le fit duc de Frioul, le 16 mars 1808. Le 22 mai 1813, pendant la campagne de Saxe, il fut tué, d'un boulet de canon, à côté de l'Empereur.
320: Louis-Philippe, comte de Ségur (1753-1830). Il était le fils aîné du maréchal de Ségur. Ambassadeur en Russie sous Louis XVI (1784-1789), il fut, sous Napoléon, conseiller d'État, sénateur et grand maître des cérémonies, ce qui fut à son frère, le très spirituel vicomte de Ségur, l'occasion de s'écrier chez ses amis: Ségur sans cérémonies. Pair de France pendant les Cent-Jours, il fut rappelé à la Chambre haute le 19 novembre 1819. Il était membre de l'Académie française depuis 1803. On lui doit un grand nombre d'ouvrages, et en particulier de très intéressants Mémoires. Il était le père du général Philippe de Ségur, l'historien de Napoléon et la Grande-Armée pendant l'année 1812.
321: Histoire de Napoléon et de la Grande-Armée pendant l'année 1812, par le général comte de Ségur, livre II, chap. II.
322: Ségur, livre II, chap. II.
323: Ségur, livre II, chap. III.
324: Ségur, livre II, chap. IV.
325: Joseph, prince Poniatowski (1762-1813). Après avoir, dans la campagne de Russie, commandé le cinquième corps de la grande armée, composé des divisions polonaises Dombrowski, Zayouschek et Ficher, il commanda, pendant la campagne de Saxe, le 8e corps (Polonais).
326: Dominique-Georges-Frédéric Dufour de Pradt (1759-1837). Député du clergé du bailliage de Caux à l'Assemblée constituante, il siégea au côté droit, émigra dès la fin de la session et s'établit à Hambourg, où il publia, en 1798, sous le voile de l'anonyme, un premier ouvrage, l'Antidote au Congrès de Rastadt, qui a été longtemps attribué à Joseph de Maistre. Après le 18 brumaire, son parent, le général Duroc, le présenta au premier Consul, dont il fit si bien la conquête qu'il devint bientôt évêque de Poitiers, archevêque de Malines, premier aumônier de l'Empereur, «l'aumônier du dieu Mars», comme il s'appelait lui-même. En 1812, quand la guerre de Russie fut décidée, Napoléon l'envoya comme ambassadeur dans le grand-duché de Varsovie. En 1814, il prit une part très active au rétablissement du gouvernement royal et fut un moment chancelier de la Légion d'honneur. Sous la seconde Restauration, il se jeta dans l'opposition et composa force brochures, dont l'une même lui valut d'être traduit en cour d'assises. Après la révolution de juillet, l'abbé de Pradt revint à ses premières opinions royalistes, et il s'occupait à réunir les matériaux d'une histoire de la Restauration, lorsqu'il succomba à une attaque d'apoplexie. Sainte-Beuve, qui pourtant ne l'aime guère, a dit de lui: «L'abbé de Pradt était actif, délié, infiniment spirituel en conversation; et, la plume à la main, un écrivain plein de verve et pittoresque». Son Histoire de l'ambassade dans le grand duché de Varsovie en 1812 est un pamphlet, mais qui renferme des parties dont l'histoire devra faire son profit.
327: Louis-Pierre-Édouard, baron Bignon (1771-1841). Il remplaça l'abbé de Pradt à Varsovie. Sous la Restauration, il fut, à la Chambre des députés, de 1817 à 1830, un des chefs de l'opposition libérale. Après 1830, il fut un instant ministre des Affaires étrangères, puis ministre de l'Instruction publique. Une Ordonnance royale du 3 octobre 1837 l'appela à la Chambre des pairs. Il a publié une Histoire de France depuis le dix-huit brumaire jusqu'à la paix de Tilsitt (1829-1880, 6 vol. in-8o) et une Histoire de France sous Napoléon, depuis la paix de Tilsitt jusqu'en 1812 (1838, 4 vol. in-8o). Ces deux ouvrages furent composés en exécution du testament de Napoléon, qui portait: «Je lègue au baron Bignon 100,000 francs; je l'engage à écrire l'histoire de la diplomatie française de 1792 à 1815.»
328: Napoléon n'a jamais sérieusement songé, quelque favorables que fussent les circonstances et quelque avantage qu'il y dût trouver lui-même, à relever la nation polonaise, qui versait son sang pour lui sur tous les champs de bataille de l'Europe. Sur les vrais sentiments de Napoléon à l'égard de la Pologne et des Polonais, voir les lettres publiées par la Correspondance générale, et en particulier ces deux notes: Au citoyen Talleyrand, Paris, 17 octobre 1801: «J'ai oublié, citoyen ministre, dans la lettre que j'ai eu l'honneur de vous écrire au sujet de l'Almanach national, de vous parler de la Pologne dont le Premier Consul désire qu'il ne soit pas question dans l'état des puissances. Cela est d'une inutilité absolue».—Notes sur un projet d'exposé de la situation de l'Europe (Finkenstein, 18 mai 1807): «Ne pas parler de l'indépendance de la Pologne et supprimer tout ce qui tend à montrer l'Empereur comme le libérateur, attendu qu'il ne s'est pas expliqué à ce sujet. Napoléon».—Enfin, dans des instructions au général Bertrand (Eylau, 13 février 1807) on lit: «Il (le général Bertrand) laissera entrevoir (à M. de Zartrow) que quant à la Pologne, depuis que l'Empereur la connaît, il n'y attache plus aucune importance».—Napoléon Ier peint par lui-même, par Raudot, p. 192-201.
329: Le 28 juin 1812, la Diète de Varsovie s'était constituée en confédération générale; elle avait déclaré le royaume de Pologne rétabli; convoqué les diétines, invité toute la Pologne à se confédérer, sommé tous les Polonais de l'armée russe d'abandonner la Russie. Elle avait décidé en même temps qu'une députation se rendrait auprès de l'Empereur des Français, pour l'engager à couvrir de sa puissante protection le berceau de la Pologne renaissante. Napoléon était alors à Wilna, et c'est dans cette ville que, le 11 juillet, il donna audience à la députation polonaise.
330: Il y arriva le 16 mai.
331: Les princes de Weimar, de Cobourg, de Mecklembourg; le grand-duc de Wurtzbourg, primat de la Confédération du Rhin; la reine Catherine de Westphalie, le roi de Prusse et son fils le prince royal.
332: Ségur, livre IV, ch. II.
333: Ségur, livre IV, ch. II.
334: Ibid.
335: Les 24, 25 et 26 juin. «Il en passa pendant quarante-huit heures, le 24 et le 25, jour et nuit. Le 26, on voyait encore arriver au fleuve les cuirassiers et les dragons de Grouchy, complétant l'ensemble des effectifs déversés sur la rive droite par l'Empereur lui-même.» Albert Vandal, tome III, p. 487.
336: Le 28 juillet 1812.
337: Le 17 août.
338: Manuscrit de 1812, contenant le précis des événements de cette année, pour servir à l'histoire de Napoléon.—Agathon-Jean-François, baron Fain (1778-1837), fut successivement attaché au secrétariat du Comité de Salut public, du Directoire et du Consulat. Il devint, en 1806, secrétaire-archiviste et, en 1809, secrétaire au cabinet de l'empereur. Il le suivit dès lors dans toutes ses campagnes et ne le quitta qu'après l'abdication de Fontainebleau. Il reprit son poste auprès de Napoléon le 20 mars 1815. Après la révolution de 1830, il fut nommé premier secrétaire du cabinet du roi Louis-Philippe.—Outre le Manuscrit de 1812, le baron Fain a publié le Manuscrit de l'an III, le Manuscrit de 1813 et le Manuscrit de 1814.
339: Gaspard, baron Gourgaud (1783-1852). Officier d'ordonnance de l'empereur pendant la guerre de Russie, il fut blessé à Smolensk, et, entré le premier au Kremlin, y découvrit une mine de 400,000 livres de poudre qui devait faire sauter la citadelle. Ce service lui valut le titre de baron de l'Empire. En 1814, à Brienne, il sauva la vie à l'empereur en tuant un cosaque dont la lance allait le frapper. À la première Restauration, il entra dans les gardes du corps du roi, mais, aux Cent-Jours, il reprit ses fonctions auprès de Napoléon, qui le nomma général de brigade et son premier aide de camp. Il accompagna l'empereur déchu à Sainte-Hélène, où il resta jusqu'en 1818. Il a publié, en 1822-1823, avec le comte de Montholon, les huit volumes des Mémoires pour servir à l'histoire de France sous Napoléon, et, en 1825, Napoléon et la Grande-Armée en Russie, ou Examen critique de l'ouvrage de M. le comte Philippe de Ségur. Aide de camp de Louis-Philippe (1832), lieutenant général (1835), pair de France (1841), il fut élu, le 13 mai 1849, représentant des Deux-Sèvres à l'Assemblée législative et soutint la politique personnelle du prince-président.
340: Jean-Ambroise Bastou, comte de Lariboisière (1759-1814), lieutenant d'artillerie en 1781, général de brigade en l'an XI, général de division en 1807, comte de l'Empire en 1808, commandant l'artillerie de la garde impériale, premier inspecteur de l'artillerie en 1811.
341: Michel Barclay de Tolly, né en 1750, en Livonie, d'une famille originaire d'Écosse; mort en 1818. Replacé à la tête des troupes russes en 1813, après la bataille de Bautzen, il battit Vandamme à Kulm, contribua puissamment au gain de la bataille de Leipzig et fit capituler Paris (30 mars 1814). En récompense de ses services, il fut nommé feld-maréchal et fait prince.
342: Michel Kutusof était né en 1745. Il avait donc 67 ans en 1812. Il mourut en 1813 à Bunzlau, en Silésie, étant encore à la tête de ses troupes.
343: Études sur Napoléon, par le lieutenant-colonel de Baudus, ancien aide de camp de Bessières et de Soult; deux volumes in-8o; Paris, 1841. Cet ouvrage est peut-être le meilleur qui ait été écrit sur Napoléon; c'est à coup sûr le plus impartial, et il mériterait d'être réimprimé.
344: Baudus, t. II, p. 76.
345: Louis-François-Joseph de Bausset (1770-1835). Il était depuis 1805 préfet du palais et chambellan de l'empereur. Il a laissé des Mémoires anecdotiques sur l'intérieur du palais et sur quelques événements de l'Empire depuis 1805 jusqu'au 1er mai 1814, pour servir à l'histoire de Napoléon. Quatre volumes in-8o, 1827-1828.
346: Manuscrit de 1812.
347: Ségur, livre VI, chap. VIII.
348: 6 septembre 1812.
349: Ségur, livre VII, chap. VIII.
350: Extrait du dix-huitième bulletin de la Grande-Armée.
351: Auguste du Vergier, comte de La Rochejaquelein (1783-1868). Il était le second frère de Monsieur Henri. L'ardeur de son royalisme ne l'avait pas empêché de prendre du service dans les armées impériales, où il entra avec le titre de sous-lieutenant. La blessure qu'il avait reçue à la Moskowa et dont il porta la trace toute sa vie lui valut d'être surnommé le Balafré. Sous la Restauration, devenu colonel des grenadiers à cheval, puis maréchal de camp, il prit part à la guerre d'Espagne en 1823 et combattit en 1828 dans les rangs de l'armée russe, alors en guerre contre les Turcs. Mis en non-activité pour refus de serment, après la révolution de 1830, il fut condamné à mort par contumace, en 1833, sous l'inculpation d'avoir essayé de soulever la Vendée.—Il avait épousé, en 1819, la fille aînée de la duchesse de Duras, qui fut l'une des amies les plus dévouées de Chateaubriand.
352: Ségur, livre VII, chap. XII.
353: Ségur, livre VII, chap. XI.
354: Le comte Fœdor Rostopchin (1765-1826), lieutenant général d'infanterie et grand chambellan de l'empereur Alexandre, qui le nomma gouverneur de Moscou, à la veille de la guerre, le 29 mai 1812. Une de ses filles épousa le comte Eugène de Ségur, neveu de l'historien de Napoléon et la Grande-Armée; elle a écrit pour l'enfance des Contes qui ont eu une grande vogue. Mgr de Ségur, si connu par ses vertus, sa charité et ses nombreux écrits en faveur de la Religion, était le petit-fils de Rostopchin. Un autre de ses petits-fils, le comte Anatole de Ségur, a publié, en 1874, la Vie de Rostopchin.
355: Le comte Rostopchin a publié, à Paris, en 1823, une brochure intitulée: La Vérité sur l'incendie de Moscou, dans laquelle il repousse la responsabilité de l'acte héroïque et terrible qui a immortalisé son nom. Nul doute pourtant qu'il n'en soit l'auteur. Voici, à cet égard, le témoignage d'un homme bien placé pour savoir la vérité. Joseph de Maistre, alors ambassadeur à Saint-Pétersbourg, écrivait, le 22 novembre 1812, à M. le comte de Front, ministre des affaires étrangères du roi de Sardaigne: «Je puis enfin avoir l'honneur d'apprendre à Sa Majesté, avec une certitude parfaite, que l'incendie de Moscou est entièrement l'ouvrage des Russes, et n'est dû qu'à la politique terrible et profonde qui avait résolu que l'ennemi, s'il entrait à Moscou, ne pourrait s'y nourrir, ni s'y enrichir. Dans une campagne très proche de la capitale, on fabriquait depuis plusieurs jours toutes sortes d'artifices incendiaires, et l'on disait au bon peuple qu'on préparait un ballon pour détruire d'un seul coup toute l'armée française. M. le comte Rostopchin, avant de partir, fit ouvrir les prisons et emmener les pompes, ce qui est assez clair; ce qui ne l'est pas moins, c'est que sa maison a été épargnée et que sa bibliothèque même n'a pas perdu un livre. Voilà qui n'est pas équivoque. En y réfléchissant, on voit qu'il ne convenait nullement à Napoléon de brûler cette superbe ville, et, en réalité, il a fait ce qu'il a pu pour la sauver; mais tout a été inutile, les incendiaires observant trop bien les ordres reçus, et le vent à son tour ne servant que trop les incendiaires ... Je doute que depuis l'incendie de Rome, sous Néron, l'œil humain ait rien vu de pareil. Ceux qui en ont été témoins ne trouvent aucune expression pour le décrire ... Je répète que la perte en richesses de toute espèce se refuse à tout calcul; mais la Russie et peut-être le monde ont été sauvés par ce grand sacrifice.» (Correspondance de Joseph de Maistre, tome IV, p. 302.)
356: Baudus, t. II, p. 102
357: Adolphe-Édouard-Casimir-Joseph Mortier (1768-1835). Maréchal de France le 19 mai 1804, duc de Trévise le 2 juillet 1808, il était, lors de la campagne de Russie, commandant de la jeune garde. En 1814, il partagea le commandement de Paris avec Marmont et, comme lui, défendit héroïquement la capitale dans la journée du 30 mars. Pair de France pendant les Cent-Jours et sous la Restauration, il fut, sous la monarchie de Juillet, ambassadeur à Saint-Pétersbourg, grand-chancelier de la Légion d'honneur, ministre de la guerre et président du Conseil (18 novembre 1834-12 mars 1835). Le 28 juillet 1835, il fut tué sur le boulevard du Temple, aux côtés du roi Louis-Philippe, par l'explosion de la machine Fieschi.
358: Antoine-Jean-Auguste Durosnel (1771-1849). Napoléon le fit comte en 1808 et le choisit pour un de ses aides de camp. Après la campagne de Russie, il fut nommé, en 1813, gouverneur de la ville de Dresde, où il resta jusqu'à la capitulation. Après la révolution de Juillet, il devint aide de camp de Louis-Philippe, fut député de 1830 à 1837 et pair de France de 1837 à 1848.
359: Jean-Baptiste-Barthélemy, baron de Lesseps (1766-1834). Attaché à la carrière des consulats, il était en Russie avec le titre de commissaire général des relations commerciales, lorsqu'éclata la guerre de 1812, et il fut forcé de suivre l'armée dans sa retraite. De 1815 à 1833, il remplit avec distinction les fonctions de consul général à Lisbonne. Il était l'oncle de M. Ferdinand de Lesseps, le créateur de l'isthme de Suez.
360: Ségur, livre VIII, chap. VI.
361: Napoléon et la Grande-Armée en Russie, ou Examen critique de l'ouvrage de M. le comte Philippe de Ségur. 1824.
362: Baudus, t. II, p. 127.
363: Décret sur la surveillance, l'organisation, l'administration, la comptabilité, la police et la discipline du Théâtre-Français, daté du quartier impérial de Moscou, le 15 octobre 1812. Modifié sur quelques points, ce décret est encore en vigueur dans ses dispositions principales.
364: Ségur, liv. VIII, chap. XI.
365: On achève d'imprimer à Saint-Pétersbourg les papiers d'État sur cette campagne, trouvés dans le cabinet d'Alexandre après sa mort. Ces documents, formant cinq à six volumes, jetteront sans doute un grand jour sur les événements si curieux d'une partie de notre histoire. Il sera bon de lire avec précaution les récits de l'ennemi, et cependant avec moins de défiance que les documents officiels de Bonaparte. Il est impossible de se figurer à quel point celui-ci altérait la réalité et la rendait insaisissable; ses propres victoires se transformaient en roman dans son imagination. Toutefois, au bout de ses relations fantasmagoriques, restait cette vérité, à savoir que Napoléon, par une raison ou par une autre, était le maître du monde. (Paris, note de 1814.) Ch.
366: La conspiration du général Malet avait éclaté le 23 octobre, précisément le jour où le maréchal Mortier, mettant à exécution les ordres de l'empereur, faisait sauter le Kremlin. Peu s'en fallut que Malet, ce jour-là, ne fît sauter l'Empire. Enfermé dans une prison, sans argent, sans complices, dénué de tous moyens, Malet avait entrepris de renverser Napoléon, et il faillit réussir. La conspiration Malet fut une conspiration de génie.
367: Marie-Victor-Nicolas de Fay, marquis de Latour-Maubourg (1768-1850), sous-lieutenant dans les gardes du corps avec rang de lieutenant-colonel le 6 mars 1789, colonel du 3e régiment de chasseurs le 5 février 1792, général de brigade le 2 décembre 1805, général de division le 14 mai 1807, baron de l'Empire le 12 février 1808. Il eut la cuisse emportée par un boulet, non à Dresde, comme le dit Chateaubriand, mais à Wachau (16 octobre 1813). Le 22 mars 1814, il fut créé comte de l'Empire. La Restauration le fit pair de France le 4 juin 1814, marquis par lettres patentes du 31 août 1817, et ambassadeur à Londres. Il occupait ce dernier poste lorsqu'il fut appelé au ministère de la guerre le 19 novembre 1819. Le 15 décembre 1821, il fut nommé gouverneur des Invalides. Il donna sa démission de pair à la révolution de 1830, se retira à Melun, puis alla rejoindre les Bourbons en exil. Gouverneur du duc de Bordeaux en 1835, il ne rentra en France qu'en 1848.
368: C'était celui du prince Eugène. Il comprenait les divisions françaises Delzons et Broussier, la garde royale italienne, la division italienne Pino, la cavalerie de la garde italienne et une brigade légère italienne, commandée par le général Villata.
369: Le général Dombrowski commandait une des divisions polonaises qui formaient le cinquième corps, placé sous les ordres du prince Poniatowski.
370: Jean-Baptiste-Juvénal, baron, puis comte Corbineau (1776-1848). Pendant la guerre de Russie, il commanda la 6e brigade de cavalerie, faisant partie du deuxième corps, sous les ordres du duc de Reggio. À la fin de la campagne, il fut nommé aide de camp de l'empereur, puis général de division et comte de l'Empire en 1813. Pendant les Cent-Jours, il reprit son service d'aide de camp auprès de Napoléon. Retraité le 1er janvier 1816, il fut rappelé à l'activité en 1830 et nommé pair de France le 11 septembre 1835. Ce fut le général Corbineau qui fit arrêter le prince Louis-Napoléon à Boulogne, lors de la tentative du 6 août 1840.
371: Jean-Baptiste Éblé (1758-1812), général d'artillerie, «modèle de courage, d'intégrité, d'honneur», selon la très juste expression de la comtesse de Chastenay, qui l'avait beaucoup connu et qui ajoute: «Digne, par son savoir, sa capacité, ses longs et continuels services, de diriger l'artillerie, il fut poursuivi par une jalousie implacable et constamment victime de la faveur. Ses efforts, au passage de la Bérésina, son dévouement à ses compatriotes, à la cause de l'humanité, l'oubli de sa propre conservation, lui coûtèrent sa généreuse vie. Nommé, faute de concurrents, premier inspecteur général de l'artillerie, il avait cessé d'exister avant d'en recevoir la nouvelle.» (Mémoires de Mme de Chastenay, t. II, p. 221.)
372: François, marquis de Chasseloup-Laubat (1754-1833). Il était général de division du génie depuis le 18 septembre 1799. Pendant la campagne de 1812, il traça les ouvrages avancés du pont de Kowno et le camp retranché de Wilna, et contribua beaucoup, par la construction des ponts sur la Bérésina, à sauver les débris de l'armée. Bien que Napoléon l'eût fait, en 1813, comte de l'Empire et membre du Sénat conservateur, il ne fut pas des derniers à voter la déchéance de l'empereur et fut nommé pair de France par Louis XVIII, le 4 juin 1814. Il se tint à l'écart pendant les Cent-Jours et fut créé marquis par le roi en 1817.
373: L'amiral Paul Tchitchagof avait épousé la fille d'un amiral anglais, miss Elisabeth Proby. Sa perte le plongea dans une douleur inconsolable, et il ne tarda pas à aller fixer son existence en Angleterre, auprès de la famille de sa femme. Il mourut à Paris, au mois de septembre 1849, âgé de 82 ans. C'était un grand ami de Mme Swetchine et de Joseph de Maistre. Les lettres de de Maistre à l'amiral (Correspondance, tomes III, p. 393, 439, 449, 461, 481; IV, 489; V, 455; VI, 133) sont parmi les plus belles du grand écrivain.
374: Le général Mis de Chambray (1783-1838), auteur d'une Histoire de l'expédition de Russie en 1812, trois volumes in-8o, 1833.
375: Ségur, livre XI, chap. VIII et IX.
376: Mémoires pour servir à l'histoire de la guerre entre la France et la Russie en 1812, par le général de Vaudoncourt, 1816.
377: Louis, comte Partouneaux (1770-1835). Général de division depuis le 27 août 1803, il avait les plus brillants états de services. Pendant la campagne de 1812, il commanda la 1re division du 9e corps, placé sous les ordres du duc de Bellune. Lors de la retraite, il fut posté à Borizow pour tromper l'ennemi et permettre à l'armée de franchir la Bérésina. Dans la nuit du 27 au 28 novembre, il fut attaqué, à l'est, par les cosaques de Platof, au nord, par Wittgenstein, à l'ouest, par Tabetchakof; acculé contre la Bérésina par des forces supérieures, n'ayant lui-même que 2,000 hommes, il dut mettre bas les armes. Dans le 29e bulletin. Napoléon, cherchant à rejeter sur d'autres des responsabilités qui devaient tout entières peser sur lui seul, essaya de flétrir un de ses plus glorieux soldats. Le général a victorieusement répondu dans deux brochures: Adresse et rapports sur l'affaire du 27 au 28 novembre 1812, qu'a eue la 1re division du 9e corps de la Grande-Armée au passage de la Bérésina (1815).—Lettre sur le compte rendu par plusieurs historiens de la campagne de Russie et par le 29e bulletin, de l'affaire du 27 au 28 novembre 1812 (1817). La Restauration lui donna le commandement de la 8e division militaire (Marseille), puis de la 10e (Toulouse), le fit comte en 1817 et, en 1820, commandant de la 1re division d'infanterie de la garde royale.
378: Dans ses Mémoires, toujours si dramatiques et si intéressants, mais souvent si étrangement inexacts, le général Marbot (tome III, p. 233) n'a pas craint d'avancer que «la perte totale des Français régnicoles fut, pendant la campagne de Russie, de soixante-cinq mille hommes seulement». Il traite de libellistes et de romanciers les historiens qui donnent un chiffre plus élevé. Or, M. Thiers, qui n'était pourtant pas un détracteur de Napoléon, après avoir étudié avec le plus grand soin tous les états de troupes, est arrivé à cette conclusion (tome XIV, p. 671): «Il n'y a aucune exagération à dire que trois cent mille hommes (de la Grande-Armée) moururent par le feu, par la misère ou par le froid. La part des Français dans cette horrible hécatombe fut de plus des deux tiers.» Le chiffre donné par Chateaubriand concorde, on le voit, avec celui que devait trouver plus tard M. Thiers.
379: Le général York commandait le corps prussien qui faisait partie du 10e corps de la Grande-Armée, placé sous les ordres du maréchal duc de Tarente. Il avait conclu, le 30 décembre 1812, avec les généraux russes Clausewitz et Diebitsch, une convention, par laquelle il s'engageait à observer la neutralité jusqu'au moment où le roi de Prusse lui aurait transmis ses instructions.
380: Napoléon arriva à Paris le 20 décembre, deux jours, en effet, après la publication du 29e bulletin. «On était, dit Mme de Chastenay (Mémoires, II, 221), dans toute la stupeur causée par le bulletin de consternation, quand on apprit avec un redoublement de surprise que l'empereur était aux Tuileries. Il avait, en effet, parcouru toute l'Allemagne aussi rapidement qu'un courrier; sa voiture s'étant brisée à Meaux, il s'était jeté, avec le duc de Vicence, dans le cabriolet de la poste et avait paru, vers dix heures du soir, à la grille des Tuileries, où, dans ce honteux équipage, la garde avait eu quelque peine à reconnaître son empereur ... Un bain, un bon souper, quelques heures de repos avaient réparé ses forces; les tailleurs avaient travaillé à lui préparer des vêtements,—il n'avait sauvé que ceux dont il était couvert,—et, le lendemain avant midi, tous les corps constitués, en députation au palais, le félicitaient sur son retour, sans lui demander, comme Auguste, ce qu'il avait fait de ses légions.»
381: Duroc, grand maréchal du palais.
382: Caulaincourt.
383: Bernard-Germain-Étienne de Laville-sur-Illon, comte de Lacépède (1756-1825), député à l'Assemblée législative en 1791, membre du Sénat conservateur, pair en 1814, pair des Cent-Jours, de nouveau pair de France en 1819. Continuateur de Buffon, il a publié l'Histoire naturelle des Poissons, l'Histoire naturelle des Cétacés, et aussi celle des Serpents: Chateaubriand s'en souviendra tout à l'heure.
384: Louis XVIII était alors établi, dans le comté de Buckingham, au château de Hartwell, domaine agreste et modeste d'un particulier anglais, M. Sée.
385: Il fut signé au palais de Fontainebleau, le 25 janvier 1813. En voici les principales dispositions:—La résidence à Paris n'est pas textuellement imposée au Saint-Père; il est seulement indiqué en termes un peu vagues qu'il se fixera en France ou dans le royaume d'Italie.—Les domaines qu'il possédait, et qui ne sont pas aliénés, seront administrés par ses agents ou chargés d'affaires. Ceux qui seraient aliénés seront remplacés jusqu'à concurrence de 2,000,000 de francs de revenus.—Dans les six mois qui suivront la notification d'usage de la nomination par l'empereur aux archevêchés et évêchés de l'Empire et du royaume d'Italie, le pape donnera l'institution canonique. Les six mois expirés sans que le pape ait accordé l'institution, le métropolitain, et, à son défaut, ou s'il s'agit du métropolitain, l'évêque le plus ancien de la province, procédera à l'institution de l'évêque nommé.
386: Le traité d'alliance entre la Prusse et la Russie fut signé le 1er mars 1813.
387: Berlin fut occupé par les Cosaques le 4 mars 1813; Hambourg fut évacué par les Français le 12 mars; Dresde fut pris par les Russes et les Prussiens le 21.
388: La bataille de Vitoria eut lieu le 21 juin 1813. À la nouvelle de cette défaite, qui consommait pour lui la perte de l'Espagne, Napoléon rappela Joseph et lui enjoignit de se retirer en son château de Mortefontaine, avec défense d'y voir personne, sous peine d'être arrêté.
389: 28-31 juillet 1813.
390: Joseph-Louis, comte Lagrange (1736-1813), célèbre mathématicien, membre de l'Institut, comte de l'Empire, grand-officier de la Légion d'honneur. Ce géomètre plaisait fort à Napoléon, n'étant point un idéologue. On lui demandait un jour comment il pouvait voter les terribles conscriptions annuelles: «Cela, répondit-il, ne change pas sensiblement les tables de la mortalité.»—Son corps fut déposé au Panthéon.
391: Delille mourut d'apoplexie dans la nuit du 1er au 2 mai 1813. Son corps resta exposé plusieurs jours au Collège de France, sur un lit de parade, la tête couronnée de lauriers et le visage légèrement peint. Son convoi eut quelque chose d'une apothéose, et ses funérailles ont laissé le souvenir d'une grande solennité nationale. Elles égalèrent en éclat celles du maréchal Bessières, duc d'Istrie, mort, lui aussi, le 1er mai, dans le combat qui précéda la bataille de Lützen, et dont les obsèques avaient été, par ordre de l'empereur, entourées d'une pompe extraordinaire.
392: 19 mai 1813.
393: Le 22 mai 1813, à Wurtzen, Duroc escortait, avec les ducs de Vicence et de Trévise, l'Empereur, qui descendait au galop un petit chemin creux pour gagner une éminence d'où il put juger de l'effet de la charge des 14,000 cavaliers du général Latour-Maubourg, dans la plaine de Reichenbach. Tout à coup, un boulet vint frapper un arbre, ricocha, tua le général Kirgener, de l'escorte, et atteignit mortellement Duroc au bas-ventre; on le transporta dans une petite ferme, où il expira au bout de quelques heures. Ses cendres reposent aux Invalides, à côté de celles de l'Empereur.
394: Bataille de Dresde (26 et 27 août 1813).
395:
Te Stygii tremuere lacus, te Janitor Orci.
396: Le 21 juillet 1813, le Jury d'Anvers avait acquitté les nommés Werbrouck, Lacoste, Biard et Petit, accusés d'être auteurs ou complices de dilapidations commises dans la gestion et l'administration de l'octroi d'Anvers. Le sénatus-consulte du 28 août annula la déclaration du Jury et chargea la Cour de cassation de renvoyer les quatre acquittés devant une Cour impériale qui prononcerait sur eux sans jury. Cette audacieuse violation de la loi eût peut-être passé inaperçue lorsque l'Empereur était à l'apogée de sa fortune; venant après les désastres de Russie et d'Espagne, elle souleva en Europe une indignation générale.
397: Le 30 août 1813, le général Vandamme, qui occupait à Kulm, sur le revers des montagnes de Bohême, avec une armée de 30,000 hommes, une position très forte, s'était trouvé entouré par un cercle de 130,000 ennemis. Les Français résistèrent en désespérés. Le général Corbineau finit par s'ouvrir un passage en abandonnant l'artillerie, mais nous avions eu cinq ou six mille tués ou blessés, et nous laissions sept mille prisonniers aux mains des vainqueurs. Vandamme était du nombre, ainsi que le général Haxo, aide de camp de l'Empereur, et plusieurs autres généraux. 60 pièces de canon, 18 obusiers, tous les caissons, y compris ceux du parc de réserve, tous les bagages, enfin, tombèrent aux mains de l'ennemi (Souvenirs militaires du duc de Fezensac, p. 411 et suivantes). Inaugurée par les brillantes victoires de Lützen et de Bautzen la campagne de Saxe se terminait par un désastre qui ne se devait pas réparer et qu'allait bientôt suivre le désastre, plus grand encore, de Leipsick.
398: Le 6 septembre 1813, Ney est battu par le prince de Suède, Bernadotte, et par le général prussien Bulow, à Dennewitz, près de Berlin. Il perd, avec les deux tiers de son artillerie, ses munitions, ses bagages, et plus de 10,000 hommes.
399: De land, terre, et sturm, tocsin;—nom donné en Allemagne et en Suisse à une levée en masse de tous les hommes en état de porter les armes, et qui a lieu lorsque la patrie est en danger.
400: De bursch, camarade, et schaft, confrérie;—nom donné à une association formée en 1815 par les étudiants des universités allemandes qui, deux ans auparavant, avaient quitté leurs études pour prendre part à la guerre de la délivrance.
401: Jean-Gottlieb Fichte (1762-1814). Professeur de philosophie à Iéna d'abord, ensuite à Berlin, il avait prononcé, en cette dernière ville, de 1807 à 1808, malgré l'occupation française, ses fameux Discours à la nation allemande, qui préparèrent le réveil de l'Allemagne. Ses principaux ouvrages sont les Principes d'une théorie de la science (1794), Principes du droit naturel (1796-1797), Système de morale (1798), la Destination de l'homme (1800), Méthode pour arriver à la vie bienheureuse (1806).
402: Charles-Théodore Kœrner (1791-1813). Il était poète du théâtre de la cour, à Vienne, lorsqu'en 1813 il s'enrôla dans le régiment des chasseurs volontaires de Lutzow. Il se servit aussi vaillamment de l'épée que de la lyre. Chacune de ses pièces, à peine composée, courait aussitôt les armées et enflammait tous les cœurs. Elles ont été réunies après sa mort, en 1814, sous ce titre: Lyre et Épée.
403: Kœrner ne mourut pas à Leipsick (octobre 1813); il fut frappé à mort par un boulet dans une rencontre à Gadebusch, dans le Mecklembourg, le 27 août 1813. Il n'avait que vingt-deux ans.
404: Ces strophes sont tirées d'une des plus belles pièces d'Ernest-Maurice Arndt, la Patrie de l'Allemand. Comme à Théodore Kœrner, le patriotisme a dicté à Maurice Arndt, dans ses Chants de guerre (1813-1815), d'admirables inspirations. Seulement, tandis que Kœrner mourait à vingt-deux ans, Arndt devait mourir presque centenaire. Né le 26 décembre 1769, il est mort le 29 janvier 1869.
405: Le prince Poniatowski avait été nommé maréchal de France sur le champ de bataille, le 16 octobre 1813, à la première des trois journées de Leipsick. Trois jours après, quand la grande défaite fut consommée, chargé de protéger la retraite de l'armée, il fit des prodiges de valeur, et lorsqu'il ne fut plus possible de résister, il s'élança dans l'Elster plutôt que de se rendre, et s'y noya (19 octobre).
406: Après le désastre de Leipsick, Napoléon et les débris de son armée suivirent, pour rentrer en France, la route de Weissenfeld, Erfurt, Gotha, Fulde, jusqu'à Hanau, où l'armée autrichienne et bavaroise, commandée par le général Wrède, voulut lui barrer le chemin. L'armée française, si affaiblie, si épuisée, retrouva son énergie pour combattre d'anciens alliés devenus inopinément nos ennemis. On leur passa sur le corps; ils perdirent 6,000 hommes, tués ou blessés, et 4,000 prisonniers. Notre perte totale fut d'environ 5,000 hommes. Ce dernier effort termina les opérations de la Grande Armée en Allemagne.
407: Charles-Philippe, prince de Wrède (1769-1838), feld-maréchal bavarois. Par suite de l'étroite alliance qui unissait la Bavière à la France, il servit Napoléon de 1805 à 1809, et il le fit avec autant de vaillance que de talent. Pendant la campagne de Russie, il se couvrit de gloire, surtout à Polotsk et à Valontina-Cora. À Leipsick, il se battait encore dans nos rang, mais le désastre éprouvé par Napoléon détacha de lui la Bavière. Lors de la campagne de France, en 1814, il battit Oudinot à Bar-sur-Aube, et fut fait prince; il avait été fait feld-maréchal après Wagram. Le général de Wrède est un des généraux les plus remarquables de la période napoléonienne.
408: Lacépède avait publié en 1788 l'Histoire générale et particulière des quadrupèdes ovipares.
409: Le 24 novembre 1813, le gouvernement provisoire établi à Amsterdam à la suite du soulèvement de cette ville (16 novembre), proclama l'indépendance des Provinces-Unies, et rappela le prince d'Orange.
410: Déclaration de Francfort, signée dans cette ville par les souverains alliés. Elle est datée du 1er décembre 1813, mais elle ne parut que dans la Gazette de Francfort du 7.
411: Le Sénat avait désigné comme commissaires MM. de Fontanes, de Talleyrand, de Saint-Marsan, de Barbé-Marbois, de Beurnonville.—Le Corps législatif avait choisi MM. Lainé, Raynouard, Maine de Biran, Flaugergues et Gallois.
412: Le Corps législatif, réuni en comité secret, le 29 décembre, entendit le rapport de la commission. M. Raynouard l'avait terminé par le conseil de rédiger une adresse à l'Empereur. On décida, à la majorité de 223 voix sur 254, que le rapport serait imprimé pour les membres seuls du Corps législatif, afin qu'ils pussent le méditer, et voter sur le projet d'adresse en connaissance de cause. Le 30, Napoléon assembla un conseil de gouvernement, auquel furent appelés les ministres et les grands dignitaires. Malgré l'opposition de l'archichancelier Cambacérès et celle de plusieurs autres membres du conseil, Napoléon signa le décret qui prononçait pour le lendemain, 31 décembre, l'ajournement du Corps législatif, et il ordonna au duc de Rovigo de faire enlever à l'imprimerie et partout où il en serait trouvé les copies du rapport de M. Lainé.
413: Allocution de Napoléon adressée, le 1er janvier, à la députation du Corps législatif.
414: Décret du 6 janvier 1814.
415: Chateaubriand a été ici induit en erreur par le Manuscrit de 1814, du baron Fain, lequel est d'ordinaire très exact. M. Fain et, avec lui, la plupart des historiens ont prétendu que Napoléon, à cette fin de janvier 1814, avait décidé de mettre le pape en liberté et l'avait fait partir pour Rome. M. Thiers, mieux informé, a très bien montré que Napoléon n'avait nullement en vue, à ce moment, la délivrance de l'auguste captif. Déjà les armées ennemies avaient occupé Dijon. Leurs coureurs d'avant-garde et quelques bandes de cosaques avaient apparu aux environs de Montereau. L'empereur, qui allait quitter Paris pour se rendre à Châlons et commencer la campagne de France, ne se souciait pas de laisser le Saint-Père à portée d'un coup de main de ses adversaires; il ne voulait pas non plus le rendre libre, de peur de compliquer ses affaires d'Italie. Il le fit donc partir de Fontainebleau, sous la conduite d'un commandant de gendarmerie, qui avait mission de le conduire, non à Rome, mais à Savone. Ce fut seulement le 10 mars, alors qu'il était obligé de se retirer sur Soissons, après les combats malheureux sur Laon, que Napoléon se décida à publier un décret par lequel il annonçait rétablir le pape dans la possession de ses États. Le même jour, il mandait au duc de Rovigo: «Écrivez à l'officier de gendarmerie qui est auprès du pape de le conduire, par la route d'Asti, de Tortone et de Plaisance, à Parme, d'où il le remettra aux avant-postes napolitains. L'officier de gendarmerie dira au Saint-Père que, sur la demande qu'il a faite de retourner à son siège, j'y ai consenti, et que j'ai donné ordre qu'on le transportât aux avant-postes napolitains.»—Voir Thiers, t. XVII, p. 208, et d'Haussonville, L'Église romaine et le premier Empire, t. V, p. 316, 325, 326.
416: Le colonel de gendarmerie Lagorsse.
417: Dans une maison appartenant à son ami Alexandre de Laborde. Voir ci-dessus la note de la page 58.
418: Reprise de Saint-Dizier par Napoléon en personne, le 27 janvier. Combat victorieux de Brienne, le 29.
419: Victoire de Champaubert, le 10 février; victoire de Montmirail, le 11; victoire de Montereau, le 18.
420: Par le traité de Chaumont, conclu, le 1er mars 1814, entre l'Autriche, la Grande-Bretagne, la Prusse et la Russie, les quatre puissances s'engageaient, dans le cas où la France n'accepterait pas les conditions de la paix proposée par les Alliés, le 17 février, à poursuivre la guerre avec vigueur et à employer tous leurs moyens, dans un parfait concert, afin de procurer une paix générale.—Chacune des trois puissances continentales devait tenir constamment en campagne active 150,000 hommes au complet.—Aucune négociation séparée n'aurait lieu avec l'ennemi commun.—L'Angleterre fournirait un subside annuel de 120 millions de francs, à répartir entre ses trois alliés.—Le but du traité étant de maintenir l'équilibre en Europe et de prévenir les envahissements qui, depuis si longtemps, désolaient le monde, la durée en était fixée à une période de vingt années.
421: Elle était placée sous les ordres du maréchal Augereau, duc de Castiglione.
422: Le Congrès de Châtillon, entre les quatre puissances alliées et la France, s'était ouvert le 5 février 1814. La France était représentée par le duc de Vicence; l'Autriche, par le comte de Stadion; la Prusse, par le baron de Humboldt; la Russie, par le comte Razumowsky; l'Angleterre, par sir Charles Stewart, frère de lord Castlereagh, chef du cabinet britannique. L'Angleterre était représentée en outre par lord Cathcart et lord Aberdeen.
423: Le 7 mars.
424: Le 27 février, Napoléon avait repris Troyes sur les Alliés, qui réoccupèrent cette ville le 4 mars.
425: Le 13 mars, l'empereur entra à Reims, après un combat très vif avec un corps russe qui s'en était emparé le 12.
426: La bataille d'Arcis-sur-Aube dura deux jours (20 et 21 mars). Ce fut la dernière bataille que Napoléon livra en personne dans cette campagne. Il dut abandonner le terrain à l'ennemi; mais ces deux journées n'en furent pas moins des plus glorieuses pour nos soldats et pour leur chef. Les 20,000 hommes de Napoléon avaient résisté à une masse qui s'était successivement élevée de 40,000 à 90,000.
427: J'ai entendu le général Pozzo raconter que c'était lui qui avait déterminé l'empereur Alexandre à marcher en avant. Ch.—Ce fut le 24 mars, à Sommepuis, que la résolution de marcher sur Paris fut prise, dans une conférence à laquelle assistaient l'empereur Alexandre, le chef d'état-major Wolkonski, le comte de Nesselrode, le prince de Schwarzenberg, le roi de Prusse et Blücher. M. Thiers (tome XVII, p. 546) dit, comme Chateaubriand, que la détermination d'Alexandre fut due surtout aux conseils et aux instances du comte Pozzo di Borgo, «lequel, ayant acquis sur les Alliés une influence proportionnée à son esprit, ne se lassait pas de leur répéter qu'il fallait marcher sur Paris».
428: Il arriva à Fontainebleau dans la nuit du 30 au 31 mars. Dans cette nuit même, à deux heures du matin, la capitulation de Paris était signée par les colonels Denys et Fabvier, au nom des maréchaux Mortier et Marmont.
429: La marquise de Montcalm était la demi-sœur du duc de Richelieu. Leur père, le duc de Fronsac, s'était marié deux fois: d'abord, avec Mlle d'Hautefort, dont il eut un fils, le futur ministre de la Restauration; puis avec Mlle de Gallifet, qui lui donna deux filles, Armande et Simplicie, plus tard marquises de Montcalm et de Jumilhac.
430: Voir au tome II, l'Appendice no X: Le Cahier rouge.
431: M. Mame.
432: Eugène-François-Auguste d'Armand, baron de Vitrolles (1774-1854). Il s'enrôla à dix-sept ans dans l'armée de Condé; rayé de la liste des émigrés sous le Consulat, il fut créé baron de l'Empire le 15 juin 1812. Lié avec le duc de Dalberg et avec Talleyrand, il s'associa aux vues de ce dernier en 1814, se rendit auprès des Alliés, plaida auprès du czar la cause des Bourbons. Après une entrevue à Nancy avec le comte d'Artois, il le précéda à Paris et fut nommé par ce prince secrétaire d'État provisoire (16 avril 1814). Pendant les Cent-Jours, il essaya d'organiser la résistance dans le Midi, fut arrêté et enfermé à Vincennes, puis à l'Abbaye. Un ordre de Fouché lui rendit la liberté après Waterloo. Député de 1815 à 1816, ministre d'État et membre du Conseil privé (septembre 1816), il devint le principal agent de la politique personnelle de Monsieur. En 1818, il perdit son titre de secrétaire d'État, que le roi ne lui rendit que le 7 janvier 1834. Il fut nommé, en 1827, ministre plénipotentiaire à Florence et fut appelé à la pairie le 7 janvier 1830. La chute de la branche aînée le rendit à la vie privée. Il a laissé des Mémoires aussi intéressants que spirituels.
433: Sur Laborie, voir la note 1 de la page 268 du tome II.
434: Pierre-Samuel Dupont de Nemours (1739-1817). Il avait fait partie de la Constituante et du Conseil des Anciens. Sous le Consulat et l'Empire, il refusa les fonctions publiques que Napoléon lui offrit. Au mois d'avril 1814, il accepta la place de secrétaire du gouvernement provisoire et fut nommé par Louis XVIII conseiller d'État et intendant de la marine à Toulon. Quand Napoléon revint de l'île d'Elbe, Dupont de Nemours s'embarqua pour l'Amérique, où il avait déjà habité, de 1799 à 1802, et où ses deux fils dirigeaient une importante exploitation agricole. Une chute qu'il fit dans une rivière et les attaques de la goutte dont il souffrait depuis longtemps l'enlevèrent deux ans après (6 août 1817).
435: Sur M. de Laborde, voir ci-dessus la note 3 de la page 251.
436: Voir Henry Houssaye, 1814, p. 519.
437: Charles-Marie Denys, comte de Damrémont (1783-1837). Il était, en 1814, aide de camp du duc de Raguse. En 1815, il suivit le roi à Gand. Il se signala en 1823 par sa brillante conduite dans la guerre d'Espagne, fit partie, en 1830, de l'expédition d'Alger, s'empara de Bône et d'Oran, fut nommé pair de France en 1835 et fut tué, le 12 octobre 1837, au siège de Constantine.
438: Charles-Nicolas, baron Fabvier (1782-1855). Réformé, puis mis en disponibilité sous la seconde Restauration, il prit part à la conspiration militaire d'août 1820, quitta la France et, en 1823, se rendit en Grèce, où il offrit ses services à la cause de l'indépendance. En 1828, il fut chargé d'accompagner les troupes françaises envoyées en Morée. Le gouvernement de Juillet le fit lieutenant général et pair de France. La République de 1848 le mit à la retraite comme général de division, mais le nomma ambassadeur à Constantinople. De 1849 à 1851, il fit partie de l'Assemblée législative et vota avec la majorité monarchiste. Il refusa toute faveur après le coup d'État de décembre 1851 et rentra dans la vie privée.
439: Sur la conduite et la noble attitude de Christian de Lamoignon en cette circonstance, voyez les Mémoires du chancelier Pasquier, tome II, p. 238.
440: Et lingua mea adhœsit faucibus meis. Psaume XXI, verset 16.
441: L'empereur Alexandre avait voulu loger, non aux Tuileries, mais à l'Élysée; il n'y resta du reste, que quelques heures et accepta l'offre du prince de Talleyrand, qui s'était empressé de mettre à la disposition du czar son hôtel de la rue Saint-Florentin. C'est à l'Élysée qu'il reçut une députation de royalistes, composée de MM. de la Ferté-Meun, de Chateaubriand, Léo de Lévis, Ferrand, de Semallé et Sosthène de la Rochefoucauld. M. de Semallé dit, dans ses Mémoires, encore inédits: «Alexandre avait d'abord fixé sa résidence à l'Élysée-Bourbon, et c'est dans ce palais que la députation fut reçue. M. de Semallé a la certitude que M. de Talleyrand se rendit dans la nuit auprès de M. de Nesselrode pour lui faire sentir la nécessité d'une marque de confiance de l'empereur en venant loger à son hôtel de la rue Saint-Florentin, et par là le mettre à même de dominer les événements.»
Le roi de Prusse occupa l'hôtel de Villeroi, rue de Bourbon (aujourd'hui rue de Lille); les princes Henri et Guillaume de Prusse descendirent à l'hôtel de Salm, quai d'Orsay. Cet hôtel était, depuis 1802, le palais de la Légion d'honneur. Le prince de Schwarzenberg qui, au moment de l'entrée des Alliés à Paris, représentait l'empereur d'Autriche absent, était logé dans l'hôtel qui lui appartenait rue du Mont-Blanc (aujourd'hui rue de la Chaussée-d'Antin). L'empereur d'Autriche n'arriva que le 16 avril; il habita l'ancien hôtel Charost, rue du faubourg Saint-Honoré. Cet hôtel était contigu à l'Élysée-Bourbon.
442: Voyez plus loin les Cent-Jours à Gand et le portrait de M. de Talleyrand, vers la fin de ces Mémoires. (Paris, note de 1839.) Ch.
443: Voici le titre complet de l'écrit de Chateaubriand: De Buonaparte, des Bourbons et de la nécessité de se rallier à nos princes légitimes pour le bonheur de la France et celui de l'Europe. D'après M. de Lescure (Chateaubriand, p. 93), il aurait paru le 30 mars 1814. Cela n'est pas tout à fait exact, non plus que l'indication donnée par M. Henry Houssaye, dans les premières éditions de son très remarquable ouvrage sur 1814, où il est dit, page 570: «La philippique de Chateaubriand parut le 3 avril.» C'est le 4 avril seulement que le Journal des Débats publia un premier extrait de la fameuse brochure; la mise en vente eut lieu le mercredi 5 avril.
Quoi qu'en aient dit la plupart des historiens, le grand écrivain, en composant et en publiant son éloquente philippique, n'a pas manqué aux lois de la générosité, de l'honneur et du patriotisme. On oublie trop aisément que ces pages véhémentes, passionnées, ont été préparées, écrites avant la chute de l'Empire, à quelques pas des Tuileries, sous l'œil d'une police qui pénétrait partout et pour laquelle il n'y avait rien de sacré. On oublie trop aisément que, dès le 5 août 1806, alors que l'Empire était à l'apogée de sa grandeur et se pouvait rire des vaines attaques d'une presse impuissante, Napoléon écrivait lui-même à l'un de ses maréchaux, à Berthier, une lettre datée de Saint-Cloud, pour lui signifier qu'il eût à faire fusiller dans les vingt-quatre heures les libraires d'Augsbourg et de Nuremberg, coupables d'avoir vendu une brochure de M. de Gentz dirigée contre sa politique. Il ordonnait en même temps que les libraires de Vienne et de Lintz, expéditeurs de la même brochure, fussent condamnés comme contumaces et fusillés s'ils étaient saisis. (Correspondance de Napoléon, t. XIII, p. 7.) Ordres terribles, qui reçurent leur exécution dans la mesure du possible: le libraire Palm, arrêté à Nuremberg le 26 août, fut traduit sur-le-champ devant une commission militaire et fusillé trois heures après sa condamnation. Reconnaissons-le donc, il y avait bien quelque courage à préparer une brochure telle que celle de Chateaubriand sous la domination, ébranlée sans doute, mais encore formidable, de l'homme qui avait écrit la lettre de Saint-Cloud.
Rien de moins fondé, d'ailleurs, que le reproche adressé à l'auteur de Buonaparte et les Bourbons d'avoir brisé entre les mains de l'empereur une arme dont celui-ci pouvait encore se servir avec succès pour le salut de la patrie. Lorsque parurent, dans le Journal des Débats du 4 avril les premiers extraits de la brochure, la déchéance de Napoléon avait déjà été votée par le Sénat, par le Conseil municipal de Paris, par les membres du Corps législatif présents dans la capitale. Le maréchal Marmont avait signé, la veille, avec le prince de Schwarzenberg, la Convention d'Essonnes (3 avril), et le matin même, à Fontainebleau, les maréchaux Lefebvre, Oudinot, Ney, Macdonald, Berthier avaient arraché à l'empereur son abdication. Il ne dépendait donc plus de lui, à ce moment, de changer la situation, de reprendre victorieusement l'offensive, de rejeter loin de Paris et de la France les ennemis qu'il y avait lui-même et lui seul attirés.
À cette date du 4 avril, la question n'était plus entre Napoléon et les coalisés: la Victoire, seul arbitre qu'il eût jamais reconnu, s'était prononcée contre lui, et l'arrêt était sans appel. Il ne s'agissait plus que de savoir si le trône, d'où il allait descendre, appartiendrait à son fils ou au frère de Louis XVI. La brochure de Chateaubriand, jetée dans l'un des plateaux de la balance où se pesaient alors les destinées de la France, contribua à la faire pencher du côté des Bourbons. Elle valut, pour leur cause, selon le mot de Louis XVIII, plus qu'une armée.
Pour apprécier, du reste, avec une entière équité un écrit de la nature de celui de Chateaubriand, il faut consulter avant tout l'opinion des contemporains. Or, voici ce qu'au mois d'avril 1814 Mme de Rémusat, qui avait vu de près l'empereur, écrivait à son fils: «Malheureusement, cet écrit ne renferme pas une exagération par rapport à l'empereur. Vous savez que je suis vraie, incapable de haine et naturellement généreuse. Eh bien! mon enfant, je mettrais mon nom à chacune des pages de ce livre, s'il en était besoin, pour attester qu'il est un tableau fidèle de tout ce dont j'étais témoin.» (Correspondance de M. de Rémusat, t. I, avril 1814.)
444: De l'esprit de conquête, édition d'Allemagne. Ch.
445: Lettre à M. N..., datée de Plaisance, mai 1804. (Œuvres de Paul-Louis Courier, t. III, p. 51.)
446: Dans son admirable discours du 26 mai 1840, sur la translation des restes mortels de Napoléon, il fit entendre ces prophétiques paroles: «Quoique admirateur de ce grand homme, je n'ai pas un enthousiasme sans souvenir et sans prévoyance. Je ne me prosterne pas devant cette mémoire; je ne suis pas de cette religion napoléonienne, de ce culte de la force que l'on veut depuis quelque temps substituer dans l'esprit de la nation à la religion sérieuse de la liberté. Je ne crois pas qu'il soit bon de déifier ainsi sans cesse la guerre, de surexciter ces bouillonnements déjà trop impétueux du sang français, qu'on nous représente comme impatient de couler après une trêve de vingt-cinq ans, comme si la paix, qui est le bonheur et la gloire du monde, pouvait être la bonté des nations. J'ai bien vu un philosophe déifier aussi la gloire et diviniser ce fléau de Dieu. Je n'ai fait qu'en rire. Dans la bouche d'un philosophe, ces paradoxes brillants n'ont aucun danger; ce n'est qu'un sophisme. Dans la bouche d'un homme d'État, cela prend un autre caractère. Les sophismes des gouvernements deviennent bientôt les crimes ou les malheurs des nations. Prenez garde de donner une pareille épée pour jouet à un pareil peuple!»
447: Hyacinte Thabaud de Latouche (1785-1851), poète et romancier. Son nom restera attaché à la publication des Poésies d'André Chénier (1819). Il eut aussi l'honneur, compatriote de George Sand, de la deviner tout d'abord, de lui indiquer la vraie voie et de lui rendre les premiers pas plus faciles. Possesseur, à Aulnay, d'une petite maison voisine de celle qu'avait habitée Chateaubriand, il s'appelait volontiers l'Ermite de la Vallée-aux-Loups.
448: Odes et Ballades, ode sur Buonaparte. Voir aussi, dans le même recueil, l'ode qui a pour titre: Les Deux Îles.
449: Mémoire au Roi, par Carnot; 1814.
450: Le texte complet de cet ordre du jour a été donné par le baron Fain dans son Manuscrit de Mil huit cent quatorze, p. 375.
451: M. de Talleyrand habitait l'hôtel qui fait le coin de la place de la Concorde et de la rue Saint-Florentin. Après la mort du prince de Talleyrand, il fut occupé par la princesse de Liéven. Il est aujourd'hui la propriété de M. Alphonse de Rothschild.
452: Récit historique sur la restauration de la royauté en France le 31 mars 1814, par M. de Pradt, 1815.
453: Pierre-Riel, marquis de Beurnonville (1752-1821). Ministre de la guerre (4 février—11 mars 1793); général en chef de l'armée de Sambre-et-Meuse, puis de l'armée du Nord; ambassadeur à Berlin, puis à Madrid, sous le Consulat; sénateur le 1er février 1805; comte de l'Empire le 23 mai 1808.—Louis XVIII le nomma ministre d'État, pair de France le 4 juin 1814, maréchal de France le 3 juillet 1816. En 1817, il le créa marquis et, en 1820, lui donna le cordon bleu à l'occasion de la naissance du duc de Bordeaux.
454: Arnail-François, marquis de Jaucourt (1757-1852). Il était sénateur depuis le 31 octobre 1803. Napoléon l'avait fait comte le 26 avril 1808. Nommé, le 13 mai 1814, par Louis XVIII, ministre d'État et pair de France, il fut chargé, le 4 juin, de l'intérim des Affaires étrangères, tandis que Talleyrand représentait la France au Congrès de Vienne. Pendant les Cent-Jours, il fut de ceux que Napoléon mit hors la loi. Il suivit le roi à Gand, et à la seconde Restauration, après avoir été quelque temps ministre de la marine, il devint membre du conseil privé.
455: Emerick-Joseph-Wolfgand-Héribert, duc de Dalberg (1773-1833). Il était le neveu de Charles de Dalberg, qui fut archichancelier de l'Empire, prince-primat de la Confédération du Rhin et grand-duc de Francfort. Naturalisé Français après le traité de Vienne (1809), et chargé de négocier le mariage de Napoléon avec Marie-Louise, Emerick de Dalberg fut créé duc de l'Empire (14 août 1810), conseiller d'État (14 octobre suivant), et reçut une dotation de quatre millions. Il suivit M. de Talleyrand dans sa disgrâce et se retrouva à ses côtés en 1814.
456: François-Xavier-Marc-Antoine, duc de Montesquiou-Fezensac (1756-1832). Député du clergé de la ville de Paris à l'Assemblée constituante, il avait été l'un des principaux orateurs du côté droit. L'Empire l'avait exilé à Menton. Il fut ministre de l'Intérieur du 13 mai 1814 au 20 mars 1815. Pair de France le 17 août 1815, membre de l'Académie française en vertu de l'ordonnance du 21 mars 1816, créé comte en 1817, puis duc en 1821, il fut autorisé à transmettre la pairie à son neveu Raymond de Montesquiou, plus tard duc de Fezensac et auteur des Souvenirs militaires de 1804 à 1814.
457: Voir sur Dupont de Nemours la note 2 de la page 383. Il ne fit pas partie, à proprement parler, du Gouvernement provisoire, auprès duquel il remplissait seulement les fonctions de secrétaire.
458: Au commencement du règne de Louis XVI, l'hôtel de la rue Saint-Florentin appartenait au duc de Fitz-James, qui le vendit en 1787 à la duchesse de l'Infantado. De là le nom que lui donne ici Chateaubriand et qui est celui sous lequel cet hôtel était généralement désigné sous l'Empire et au commencement de la Restauration.
459: Adresse du Gouvernement provisoire aux armées françaises, en date du 2 avril 1814.
460: Jean Baptiste Mailhe (1754-1834), député de la Haute-Garonne à la Convention. Par suite du roulement qui s'opéra entre les départements pour les appels nominaux, il fut appelé le premier à voter dans le procès du roi. En avril 1814, il envoya une adresse au Sénat pour le féliciter d'avoir prononcé la déchéance de Napoléon.
461: Le baron Petit (1772-1856). Il était, depuis le 23 juin 1813, général de brigade de la garde impériale. Au lendemain des adieux de Fontainebleau, il prêta serment à Louis XVIII, qui le fit chevalier de Saint-Louis. À Waterloo, il était à côté de Cambronne, et, à la tête des survivants de la garde, il protégea la fuite de l'empereur. Louis-Philippe le créa pair de France le 3 octobre 1837 et l'appela, en 1842, au commandement de l'hôtel des Invalides. Napoléon III le nomma sénateur le 27 mars 1852. À sa mort, le général Petit fut enterré aux Invalides, dont il avait gardé le commandement sous les ordres du prince Jérôme Bonaparte.
462: Dans son Histoire de la Restauration (tome I. p. 215), après avoir reproduit le discours de Fontainebleau, tel que le donne Chateaubriand, M. Alfred Nettement ajoute: «Nous adoptons la version de ce discours donnée par M. de Chateaubriand dans ses Mémoires d'Outre-Tombe. C'est celle qui nous a paru la plus vraisemblable, par le désordre même des idées et par ce qu'elle a d'entrecoupé dans l'accent. Sans doute, M. de Chateaubriand n'était pas à Fontainebleau, mais il était parfaitement en mesure de savoir ce que l'empereur avait dit, et il n'est pas douteux qu'il ait fait tous ses efforts pour rétablir l'exactitude textuelle des paroles de l'empereur.» Dans le Manuscrit de 1814, le baron Fain a donné de ce discours une version qui diffère sur quelques points de celle des Mémoires d'Outre-Tombe. «C'est, dit Alfred Nettement, la version du bonapartisme militant et hostile, celle où toutes les paroles qui pouvaient sembler favorables aux Bourbons avaient disparu et où le désordre des idées a fait place à une composition plus étudiée. C'est le même discours, si l'on veut, mais avec des corrections, des retranchements et des retouches.»
463: La famille du malheureux libraire a publié à Nuremberg, en 1814, un livre qui raconte de la manière la plus complète et la plus saisissante le procès et l'exécution de Johann Philipp Palm. Cet épisode eut dans toute l'Allemagne un retentissement considérable.
464: Chef-lieu de canton du département des Bouches-du-Rhône, sur la rive gauche de la Durance.
465: Village du canton de Lambesc, arrondissement d'Aix (Bouches-du-Rhône).
466: Chef-lieu de canton du Var, à quatre lieues de Brignoles.
467: Le Luc, chef-lieu de canton du Var.
468: D'après plusieurs historiens, le marquis de Maubreuil, aventurier besoigneux, aussi dénué de scrupules que d'argent, aurait été chargé par Talleyrand, au mois d'avril 1814 d'assassiner Napoléon. Le ministre de la guerre Dupont, Anglès ministre de la police et Bourrienne, directeur des postes, les commandants des troupes russes et autrichiennes, l'empereur de Russie, l'empereur d'Autriche lui-même auraient approuvé la mission donnée à Maubreuil. C'est là une abominable calomnie.
Le zèle royaliste dont Maubreuil avait fait preuve, après l'entrée des Alliés à Paris, lui avait valu les bonnes grâces de M. Laborie, secrétaire adjoint du gouvernement provisoire; mais son protecteur n'ayant rien pu lui procurer, il imagina, pour se tirer d'affaire, le coup le plus hardi.
Sous prétexte d'aller à la recherche d'une partie des diamants de la couronne, qui avaient été emportés hors de Paris et que l'on ne retrouvait pas, il arrêta, le 21 avril, au village de Fossard, près de Montereau, la reine de Westphalie, qui retournait en Allemagne, et s'empara de onze caisses contenant les bijoux et les diamants de la princesse et quatre-vingt mille francs en or. Lorsque la nouvelle de ce beau coup vint à Paris, les souverains, et en particulier l'empereur Alexandre, témoignèrent la plus vive irritation et demandèrent la punition des coupables. Maubreuil cependant était revenu à Paris, dans la nuit du 23 au 24 avril; il porta aux Tuileries les caisses qu'il avait prises et dont l'une s'était, disait-il, brisée et vidée en route. Il remit en même temps quatre sacs, contenant de l'or, suivant lui. Le lendemain, lorsque les caisses furent ouvertes par le serrurier qui avait fabriqué les clefs, elles se trouvèrent presque vides; les sacs renfermaient des pièces d'argent de vingt sous, au lieu de pièces d'or de vingt francs. La police eut bientôt la preuve que la caisse brisée, celle précisément qui contenait les objets les plus précieux, avait été ouverte, à Versailles, dans une chambre d'auberge, par Maubreuil et son complice, un sieur Dasies. De plus, dans un des appartements occupés par Maubreuil à Paris,—il en avait trois ou quatre—on trouva sur le lit un superbe diamant ayant appartenu à la reine de Westphalie. Les preuves du vol étaient certaines. Maubreuil paya d'audace. Il déclara qu'il était parti de Paris avec mission d'assassiner l'empereur; que cette mission lui avait été donnée par M. de Talleyrand; que, malgré l'horreur qu'elle lui inspirait, il s'en était chargé, de peur qu'elle ne fût donnée à un autre. «Il avait, continuait-il, tout arrangé pour tromper les criminelles intentions de ceux qui l'avaient employé, et il avait cherché, en leur apportant un trésor, en satisfaisant leur avidité, à apaiser leur mécontentement.» Cela ne tenait pas debout; mais, dans les circonstances où l'on se trouvait, ces mensonges pouvaient produire dans le public, surtout parmi les soldats, l'effet le plus déplorable et le plus funeste. Le gouvernement crut que le plus sage était de ne rien précipiter, de garder les prévenus en prison, d'attendre du temps et de la marche des événements conseil et secours.
M. Pasquier a donné sur cet épisode, au tome II de ses Mémoires (pages 365 à 375), les détails les plus circonstanciés. Son récit ne laisse rien subsister du roman de Maubreuil. Le témoignage du baron Pasquier est ici d'autant moins suspect qu'il se montre en toute rencontre très hostile à Talleyrand. «Cette aventure, dit-il en terminant, a eu dans le monde un bien long retentissement. Au moment où j'écris, après treize années écoulées, elle a servi de prétexte à une calomnie qui a porté à M. de Talleyrand un des coups les plus sensibles qui pussent atteindre sa vieillesse, en donnant à entendre qu'il avait pu connaître un projet d'attentat contre la vie de l'empereur Napoléon. J'ai dit avec une entière sincérité tout ce qui est venu à ma connaissance sur cette affaire. Rien ne peut justifier, rien ne peut donner une apparence de fondement à cette odieuse allégation.» Voir aussi les Souvenirs du comte de Semallé, pages 198 à 206.
469: Itinéraire de Buonaparte de Doulevent à Fréjus (par Fabry), 1814.—Jean-Baptiste-Germain Fabry (1780-1821) est l'auteur de nombreuses publications, écrites avec talent et animées d'un esprit profondément religieux et royaliste. Sous ce titre: Le Spectateur français au XIXe siècle, il fit paraître, de 1805 à 1815, un recueil formé des meilleurs articles publiés dans le Mercure et le Journal des Débats, par Chateaubriand, Bonald, Dussault, de Féletz, etc. De 1814 à 1819, il publia, outre l'Itinéraire de Doulevent à Fréjus, La Régence à Blois ou les derniers moments du gouvernement impérial (1814); l'Itinéraire de Buonaparte de l'île d'Elbe à l'île Sainte-Hélène (1816); Le Génie de la Révolution considéré dans l'éducation (3 volumes, 1817-1818); Les Missionnaires de 1793 (1819).
470: Ségur, livre VII, chapitre X.
471: Louis XVIII débarqua à Calais le 24 avril 1814. Il avait quitté la France le 22 juin 1791.
472: Louvel a déclaré lui-même dans un de ses interrogatoires, que dès le premier jour de la Restauration, il avait juré d'exterminer tous les Bourbons, et qu'au mois d'avril 1814, il s'était rendu à pied de Metz à Calais dans le dessein de frapper Louis XVIII.
473: Nicolas-Joseph Maison (1771-1840). Il avait pris une part glorieuse à toutes les guerres de la Révolution et de l'Empire. Napoléon l'avait créé baron (2 juillet 1808), puis comte (14 août 1813). Louis XVIII le nomma grand cordon de Saint-Louis et de la Légion d'honneur, gouverneur de Paris et pair de France (4 juin 1814). Pendant les Cent-Jours, il ne voulut accepter aucune charge de l'Empereur, et, le 31 août 1817, il fut fait marquis. Le 22 février 1829, à la suite de l'expédition de Morée, qu'il avait dirigée en chef, il reçut le bâton de maréchal de France. Sous la monarchie de Juillet, il fut ambassadeur à Vienne (de 1831 à 1833), et à Saint-Pétersbourg (de 1833 à 1835). Ministre de la guerre, du 30 avril 1835 au 6 septembre 1836, il était aux côtés du roi Louis-Philippe lors de l'attentat de Fieschi.
474: Compiègne. Louis XVIII y arriva le 29 avril.
475: Compiègne, avril 1814; par M. de Chateaubriand. Paris, Le Normant, 1814, in-8.—Œuvres complètes, Tome XXIV, Mélanges politiques.
476: Les mousquetaires de la Maison militaire du Roi, qui étaient ainsi nommés à cause de leur uniforme rouge.
477: Alfred de Vigny, alors âgé de dix-sept ans, fut placé dans les mousquetaires de la Maison du Roi. Aux Cent-Jours, les quatre compagnies rouges accompagnèrent Louis XVIII jusqu'à la frontière. «Mes camarades, dit Alfred de Vigny, étaient en avant, sur la route, à la suite du roi Louis XVIII; je voyais leurs manteaux blancs et leurs habits rouges, tout à l'horizon, au nord; les lanciers de Bonaparte, qui surveillaient et suivaient notre retraite pas à pas, montraient de temps en temps la flamme tricolore de leurs lances à l'autre horizon». Servitude et grandeur militaires, page 44.
478: Le manuscrit des Mémoires porte bien quarante ans. Est-ce simplement un lapsus calami, ou Chateaubriand, qui était, il est vrai, un assez pauvre calculateur, comptait-il vraiment quarante ans, de 1792 à 1814?
479: Malgré ce que dit ici Chateaubriand, il n'est que juste de reconnaître que Louis XVIII avait fait preuve d'une dignité vraiment royale en ne consentant pas à tenir la couronne des mains des sénateurs, et en proclamant qu'il la tenait de son droit. Il y avait dans cette attitude, il le faut bien dire, autant de vérité que de noblesse. Le comte de Lille, l'exilé d'Hartwell, n'avait d'autre titre, en effet, pour occuper le trône, que d'être le descendant de Louis XIV, le frère de Louis XVI, le successeur de Louis XVII.—On reproche à Louis XVIII d'avoir daté le commencement de son règne, en 1814, comme s'il eût vraiment été roi depuis la mort de Louis XVII, et on ne reproche pas à Napoléon, revenant de l'île d'Elbe, d'avoir voulu biffer de l'histoire tout ce qui s'était fait en son absence. Lui qui avait, le 11 avril 1814, renoncé solennellement au trône pour lui et ses héritiers, il déclare, dans sa proclamation du 1er mars 1815, que tout ce qui a été fait depuis la rentrée des Bourbons est illégitime. Il décrète, le 13 mars, à Lyon, que «toutes les promotions faites dans la Légion d'honneur par tout autre grand-maître que lui, et tous brevets signés par d'autres personnes que le comte Lacépède, grand chancelier inamovible de la Légion d'honneur, étaient nuls et non avenus». Il ne consent à donner un acte constitutionnel qu'autant qu'il sera une simple addition aux constitutions impériales. «Napoléon, dit M. Duvergier de Hauranne (Histoire du gouvernement parlementaire, t. II, p. 501), n'admettait pas qu'un autre eût été le souverain légitime de la France, et il prétendait avoir régné pendant ses onze mois de séjour à l'île d'Elbe.» C'est ce que reconnaît également le secrétaire de son cabinet et son confident pendant la tragédie des Cent-Jours, M. Fleury de Chaboulon, qui dit, au tome II de ses Mémoires, page 45: «Napoléon fut encore déterminé (à l'Acte additionnel) par une autre considération: il regardait les Constitutions de l'Empire comme les titres de propriété de sa couronne, et il aurait craint, en les annulant, d'opérer une espèce de novation, qui lui aurait donné l'air de recommencer un nouveau règne. Car Napoléon, après avoir voué au ridicule les prétentions du «roi d'Hartwell», était enclin lui-même à se persuader que son règne n'avait point été interrompu par son séjour à l'île d'Elbe.»
480: Chateaubriand commet ici une légère erreur de date. L'empereur Alexandre quitta Paris le 2 juin 1814. Ce n'est pas à ce moment, et à la veille de son départ, qu'il fit célébrer un service religieux sur la place Louis XV. Cette cérémonie avait eu lieu presque au lendemain de l'entrée des Alliés, alors que ni le comte d'Artois ni Louis XVIII n'étaient encore arrivés à Paris, le dimanche 10 avril. Ce jour-là, l'empereur de Russie, le roi de Prusse et le prince de Schwarzenberg, représentant l'empereur d'Autriche, passèrent en revue leurs troupes respectives, rangées en ligne, au nombre de 80 000 hommes, depuis le boulevard de l'Arsenal jusqu'à celui de la Madeleine. À une heure, sur la place Louis XV, une messe fut dite par un évêque et six prêtres du rite grec. Un Te Deum fut chanté pour remercier Dieu d'avoir donné la paix à la France et au monde. Les troupes alliées défilèrent devant l'autel, qu'entourait la garde nationale de Paris, sous les ordres de son commandant, le général Dessolle. (Journal des Débats, no du 11 avril 1814).
481: Joseph-Anne-Auguste-Maximilien de Croy, duc d'Havré (1744-1839). Il était déjà maréchal de camp, lorsqu'il avait été élu en 1789 député de la noblesse aux États-Généraux par le bailliage d'Amiens et de Ham. En 1814, Louis XVIII le nomma pair de France, lieutenant-général et capitaine des gardes du corps. Il avait alors 70 ans.
482: Philippe-Louis-Marie-Antoine de Noailles, prince de Poix, duc de Mouchy (1752-1819). Comme le duc d'Havré, il était maréchal de camp en 1789, et avait été, comme lui, envoyé aux États-Généraux par la noblesse du bailliage d'Amiens et de Ham. Comme le duc d'Havré encore, il fut nommé en 1814 pair de France, lieutenant-général et capitaine des gardes du corps.
483: Charles-Nicolas Oudinot, duc de Reggio (1767-1847). Il avait été nommé maréchal de France le 12 juillet 1809 et duc de Reggio le 14 avril 1810. Louis XVIII le nomma en 1814 ministre d'État, pair de France et commandant du corps royal des grenadiers et des chasseurs à pied de France. En 1815, il chercha à s'opposer à la marche de Napoléon sur Paris, mais ne put conduire ses troupes plus loin que Troyes. D'abord exilé dans ses terres par l'Empereur, puis autorisé à habiter Montmorency, il fut nommé, au retour de Louis XVIII, l'un des majors-généraux de la garde royale, membre du conseil privé et commandant de la garde nationale de Paris. Ses états de service constatent qu'il avait reçu vingt blessures; il avait eu notamment les deux jambes cassées, et la droite cassée deux fois.
484: Le témoignage de Mme de Chastenay, dans ses intéressants Mémoires, concorde ici pleinement avec celui de Chateaubriand. On vit dès lors, écrit-elle (tome II, page 304), revêtus du signe du royalisme, ceux qui, voués à sa cause par le seul instinct de leur naissance, avaient aspiré toute leur vie à son rétablissement et n'avaient cessé de l'espérer; ceux qui avaient cessé de le croire possible et qui s'empressaient de donner le change aux calculs passés de leur raison, qui leur semblaient maintenant une infidélité; enfin, les hommes de l'ancienne noblesse qui, ayant pris parti sous le gouvernement de Bonaparte, pensaient se targuer d'avoir pris de l'expérience dans une des deux carrières ouvertes, et de ne point offrir au roi des services incapables et inutiles ... D'autres, et dans toutes les classes, ne comptant plus sur rien de ce qu'ils avaient pu obtenir ou mériter sous un régime écrasé de son propre poids, saluaient une aurore nouvelle; d'autres enfin, au seul titre de citoyens, d'hommes honnêtes et éclairés, réprouvaient le destructeur de la France qui, pour prix de tant de sang et de gloire, l'avait livrée aux étrangers; ils acclamaient un régime de paix qu'une heureuse nécessité forçait désormais d'accueillir, et ceux-ci étaient les plus nombreux.»
485: Elle était née à Pondichéry, où son père, nommé Worley, était capitaine de port. À seize ans, elle épousa un Suisse, M. Grant, qui résida successivement avec elle à Chandernagor et à Calcutta; elle se laissa enlever et emmener en Europe. Après de nombreuses aventures, elle devint, sous le Directoire, la maîtresse de Talleyrand et vécut publiquement avec lui. Le premier Consul intima à son ministre l'ordre de l'épouser, ce qui fut fait, après que Talleyrand eût reçu de la cour de Rome un bref qui le déliait de ses vœux, et après que M. Grant, alors à Paris eut consenti à divorcer, moyennant une grosse somme et une bonne place ... au Cap de Bonne-Espérance. Le mariage de l'ancien évêque d'Autun fut du reste purement civil. Quand vint la Restauration, il fit à sa femme une pension de 60,000 livres, à la condition qu'elle irait se fixer en Angleterre. Un jour qu'elle était revenue à Paris (c'était sous le ministère Decazes), Louis XVIII demanda, non sans malice, au prince de Talleyrand, s'il était vrai que sa femme se fût permis de débarquer en France et d'arriver d'un trait de Calais à Paris: «Rien de plus vrai, sire, répondit-il; il fallait bien que moi aussi j'eusse mon vingt mars.»
486: La plupart des traits de cette admirable page sont empruntés à Mme de Chateaubriand qui, dans ses Souvenirs, décrit ainsi La journée du 31 mars 1814 et celles qui suivirent:
«P***, M*** et P*** étaient à l'avant-garde de toutes les parades du moment, et chacun savait par eux que le prince de Bénévent, en changeant de maître, ne serait obligé de changer ni de rôle ni de langage; que l'ex-évêque d'Autun ne serait pas plus obligé à la messe sous les Bourbons que sous Bonaparte, et qu'il serait aussi bon ministre sous la Restauration qu'il l'avait été sous l'Empire, Mme de Talleyrand (femme divorcée de M. Grant) parcourait les rues dans une calèche découverte, en chantant des hymnes à la louange de la pieuse famille des Bourbons. Elle et les dames de sa suite avaient fait autant de drapeaux de leurs mouchoirs, qu'elles agitaient avec une grâce infinie. Cinquante calèches suivaient et imitaient le mouvement donné, de sorte que les Alliés, qui arrivaient en ce moment par la place Vendôme, crurent qu'il y avait réellement autant de lis dans le cœur des Français que de drapeaux blancs en l'air. Les bons Cosaques n'auraient jamais osé croire que ces belles bourbonnéennes du 31 mars étaient des enragées bonapartistes le 30. Il n'y a qu'en France qu'on sait si bien se retourner ... Les royalistes accouraient aussi de leur côté, mais pas si vite que ceux qui croyaient ne pouvoir faire assez tôt l'hommage d'un dévouement dont on pouvait douter. Bientôt les cris de: Vive le Roi! se firent entendre de toutes parts. L'élan était donné, et, en France surtout, on crierait à bas ma tête! si on l'entendait crier à ses voisins. On envahissait les maisons pour avoir des rubans et même des jupons blancs, que l'on coupait pour faire des cocardes, les boutiques ne pouvant y suffire. Le bleu et le rouge étaient foulés aux pieds, surtout par les bonapartistes; et tout ce qui restait des trois couleurs fut, dit-on, porté dans les cachettes du Luxembourg en attendant que leur tour revînt. Un de nos amis vint me demander la permission de faire main-basse sur ma garde-robe; mais il me trouva peu disposée à chanter la victoire avant de connaître les résultats, et je gardai mes jupons...»
487: Le Corps législatif de l'Empire était conservé jusqu'aux élections prochaines; il changeait seulement de nom et prenait celui de Chambre des députés. Quant à la Chambre des pairs, nommée par le roi, si elle ne se composait pas exclusivement d'anciens sénateurs, ces derniers y étaient cependant de beaucoup les plus nombreux: «Quatorze maréchaux de l'Empire, dit M. Alfred Nettement, représentaient les illustrations militaires de la nouvelle armée, et formaient, avec quatre-vingt-sept membres de l'ancien Sénat impérial, les deux tiers de la nouvelle Chambre des pairs, qui contenait ainsi en tout quatre-vingt-onze anciens sénateurs, car sur les quatorze maréchaux il y en avait quatre revêtus de ce titre. La part faite aux hommes de la Révolution et de l'Empire était donc de cent-un membres sur cent cinquante-quatre ... La part faite aux représentants de l'ancienne société française était seulement de cinquante-trois membres, et parmi les pairs de cette catégorie il y en avait plusieurs qui appartenaient aux opinions qui dominaient depuis la Révolution». (Histoire de la Restauration, par Alfred Nettement, tome I, p. 444.)
488: Jacques-Claude, comte Beugnot (1761-1835). Ancien membre de la Législative de 1791, où il s'était signalé par son courage et son talent, il avait été successivement sous l'Empire préfet de Rouen, conseiller d'État, ministre des Finances du roi Jérôme et préfet de Lille. Louis XVIII lui confia le portefeuille de la Marine, le 3 décembre 1814. Il suivit le roi à Gand et reçut au retour la direction générale des Postes. Député de 1816 à 1820, pair de France de 1830 à 1835, le comte Beugnot a laissé la réputation d'un des hommes les plus spirituels de son temps. Une de ses plus fines plaisanteries est celle qu'il laissa échapper dans une séance des comités secrets de la Chambre de 1815. Un membre ayant demandé que la figure du Christ sur la croix fût placée au-dessus de la tête du président: «Je demande en outre, ajouta le comte Beugnot, qu'on inscrive au-dessous ses dernières paroles: «Mon Dieu, pardonnez-leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font!»—Il avait écrit de très spirituels Mémoires, qui ont été publiés par son fils.
489: Pierre-Antoine, comte Dupont de l'Étang (1765-1840). Il avait été l'un des plus brillants généraux de l'Empire, et l'heure semblait proche où il serait élevé au maréchalat, lorsque la capitulation de Baylen (juillet 1808) vint effacer tous ses services et briser son épée. Napoléon l'avait fait traduire devant une commission militaire (février 1812) qui «le destitua de ses grades militaires, lui retira ses décorations, raya son nom du catalogue de la Légion d'honneur, lui défendit à l'avenir de porter l'habit militaire, de prendre le titre de comte, mit sous séquestre ses dotations et ordonna son transfert dans une prison d'État, pour y être détenu jusqu'à nouvel ordre».—La nomination du général Dupont au ministère de la Guerre est du 9 avril 1814; elle n'est donc point imputable à Louis XVIII, qui n'était pas encore rentré, mais à Talleyrand et à ses collègues du gouvernement provisoire. Le général Dupont, député de la Charente de 1815 à 1830, siégea au centre-gauche, parmi les constitutionnels. Outre plusieurs écrits en prose, il a composé une traduction en vers des Odes d'Horace et un poème en dix chants, l'Art de la guerre.
490: Le maréchal Soult remplaça le général Dupont au Ministère de la Guerre le 3 décembre 1814.
491: Jules-Jean-Baptiste, comte Anglès (1778-1828). Auditeur, puis maître des requêtes au Conseil d'État, il était entré en 1809 au ministère de la Police, à la 3e division, chargée de la correspondance avec les départements annexés. Il fut un moment ministre de la Police en 1814. Le 22 août 1815, il fut élu à la Chambre des Députés par le département des Hautes-Alpes. En 1818, il redevint préfet de police et conserva ces fonctions jusqu'en 1821. Le comte Anglès était un homme de beaucoup d'esprit, et il n'était pas le dernier à rire des traits malicieux que Béranger lui décochait dans ses chansons.
492: Voir les Mémoires de M. Guizot, tome I, chapitre II.
493: Mémoire au Roi, par Carnot. Il se vendit, assure-t-on, six cent mille exemplaires de cet écrit, qui circulait clandestinement sous toutes les formes, manuscrit, imprimé et lithographié. (Henry Houssaye, 1815, tome I, p. 68.) Sur les incidents relatifs à ce célèbre Mémoire, d'abord destiné à la publicité, ensuite modifié pour être remis à Louis XVIII, puis publié à l'insu de l'auteur et désavoué par lui dans le Journal des Débats du 8 octobre 1814, voyez les Mémoires de Carnot publiés par son fils (tome II, p. 366-372).
494: Réflexions politiques sur quelques écrits du Jour et sur les intérêts de tous les Français. (Décembre 1814.) C'est un des meilleurs écrits de Chateaubriand.
495: Claire de Coetnempren de Kersaint, duchesse de Duras (1777-1829). Fille du comte Guy de Kersaint, député à la Législative et à la Convention, guillotiné le 4 décembre 1793, elle quitta la France après l'exécution de son père, et passa avec sa mère à Philadelphie, puis à la Martinique, patrie de Mme de Kersaint. Celle-ci étant morte à son tour, et un parent, établi aux colonies, ayant laissé à la jeune orpheline une succession assez considérable, elle vint en Angleterre, où, en 1797, elle épousa Amédée-Bretagne-Malo de Durfort qui, trois ans plus tard, à la mort de son père, allait être le duc de Duras. Elle rentra en France à l'époque du Consulat, mais se tint à l'écart de la cour impériale, retirée le plus souvent au château d'Ussé, en Touraine. Au retour des Bourbons, le duc de Duras fut nommé pair de France et premier gentilhomme de la Chambre. La duchesse eut alors un salon, qui fut bientôt l'un des plus recherchés de Paris, et dont M. Villemain, l'un des habitués, parle en ces termes: «Le salon de Mme la duchesse de Duras était naturellement monarchique, mais avec des nuances très marquées de constitutionalisme anglais, de libéralisme français, d'amour des lettres, de goût des arts, et en particulier d'admiration pour M. de Chateaubriand et d'impatient désir de le voir ministre». Elle a écrit plusieurs petits romans: Édouard, Ourika, Frère Ange, Olivier, les Mémoires de Sophie. Les deux premiers, que ses amis publièrent presque de force, parurent en 1820 et 1824, avec le plus vif succès. Les trois autres sont encore inédits. La duchesse de Duras avait composé pendant ses dernières années des pages éminemment chrétiennes, qui ont paru en 1839 sous ce titre: Réflexions et prières inédites.
496: L'aînée, Claire-Louise-Augustine-Félicité-Magloire, que l'on appelait Félicie, née en émigration le 19 août 1798, avait épousé, le 30 septembre 1813, Charles-Léopold-Henri de la Trémoille, prince de Talmont, fils du héros vendéen. Devenue veuve le 7 septembre 1815, elle se maria, en secondes noces, le 14 septembre 1819, avec Auguste du Vergier, comte de la Rochejaquelein, maréchal de camp, frère cadet des généraux vendéens, Henri et Louis.—La cadette, Claire-Henriette-Philippine-Benjamine, dite Clara, née à Londres le 25 septembre 1799, épousa, le 30 août 1819, Henri-Louis, comte de Chastellux, secrétaire de la légation française à Berlin. Le comte de Chastellux, à l'occasion de son mariage, fut créé duc de Rauzan et autorisé, par ordonnance royale du 15 août 1819, à ajouter à son nom celui de Duras. Il est dénommé, dans l'acte de naissance d'un de ses enfants (1824), marquis de Duras-Chastellux, duc de Rauzan.—La duchesse de Rauzan est morte à Paris le 11 novembre 1863.
497: Dans les derniers moments de la première Restauration, Chateaubriand fut nommé ambassadeur à Stockholm. Il allait se rendre—sans enthousiasme—auprès de Bernadotte, quand Napoléon débarqua de l'île d'Elbe.
498: Au mois de janvier 1829.
499: L'ancien cimetière de la Madeleine, rue d'Anjou-Saint-Honoré, no 48.
500: Voir tome I, page 205.
501: Le Vingt-et-un janvier, par M. de Chateaubriand. 1815, Le Normant, éditeur, in-8o, 24 p.
502: M. Desclozeaux (et non Ducluzeau, comme le portent les précédentes éditions des Mémoires), était un fidèle royaliste, qui s'était rendu propriétaire de l'ancien cimetière de la Madeleine, pour que les restes du roi et de la reine ne fussent pas profanés.
503: Jean-Baptiste, baron Dalesme (1763-1832). Général de brigade, député de la Haute-Vienne au Corps législatif, de 1802 à 1809, baron de l'Empire (1810), il se rallia à la Restauration, qui le fit lieutenant-général le 21 octobre 1814. Pendant les Cent-Jours, il fut gouverneur de l'île d'Elbe, et quitta le service à la seconde Restauration. Réintégré en 1830, il mourut gouverneur des Invalides.
504: Le 4 mai 1814.
505: Énéide, livre X, vers 174.
506: Le 1er septembre, Napoléon avait reçu la visite de la comtesse Walewska. Les Souvenirs de Pons (de l'Hérault) renferment à ce sujet de curieux détails. La chaleur excessive de l'été avait fatigué l'Empereur, qui avait quitté Porto-Ferrajo pour aller s'établir sous les châtaigniers touffus de Marciana. «De l'ombre et de l'eau, avait-il dit en riant, c'est le bonheur, et je vais chercher le bonheur.» Il fit dresser sous les arbres sa tente de campagne, pendant que Madame Mère venait habiter l'ermitage de Marciana. Un matin, une jeune femme accompagnée d'un enfant de quatre ou cinq ans débarquèrent mystérieusement dans l'île. Au cours de la traversée, la voyageuse, après avoir dit: «le fils de l'Empereur», avait ajouté: «mon fils». Évidemment, c'était l'Impératrice et le Roi de Rome! Les marins, la population, l'entourage de l'Empereur ne le mirent pas un instant en doute. Cependant la jeune dame s'était rendue immédiatement à Marciana et à la tente impériale. «Mme la comtesse Walewska et son fils, dit Pons (de l'Hérault) (Souvenirs et anecdotes de l'île d'Elbe, pages 213 et 578), restèrent environ cinquante heures avec l'Empereur; pendant ce temps, l'Empereur ne reçut plus personne, pas même Madame Mère, et l'on peut dire qu'il se mit en grande quarantaine. Son isolement fut complet. Mais, après cinquante heures, la dame alla s'embarquer à Longone pour retourner sur le continent, et elle partit par un coup de vent tel que les marins craignaient avec raison qu'il n'y eût danger imminent pour elle. Elle ne voulut écouter aucune représentation: l'Empereur envoya un officier d'ordonnance pour faire retarder le départ de l'intrépide voyageuse; elle était en pleine mer ... L'Empereur eut des heures d'angoisse. Ses alarmes durèrent jusqu'au moment où Mme la comtesse Walewska lui eut appris elle-même que le péril était passé.»
507: Antoine-François-Claude, comte Ferrand (1751-1825). Il était directeur général des Postes. À la seconde Restauration, il fut nommé pair de France et entra à l'Académie française. Il avait composé plusieurs ouvrages, dont le principal est l'Esprit de l'Histoire, ou Lettres politiques et morales d'un père à son fils sur la manière d'étudier l'histoire en général et particulièrement celle de la France. Ses Mémoires ont été publiés en 1897 par le vicomte de Broc.
508: Antoine-Marie Chamant, comte de Lavallette (1769-1830), directeur général des Postes sous l'Empire. Ses Mémoires ont paru en 1831.
509: Le Nain Jaune, qui paraissait depuis 1810 avec ce sous-titre: Journal des arts, des sciences et de la littérature, se transforma en journal semi-politique à la fin de 1814, sous l'inspiration, dit-on, des habitués du salon de l'ex-reine Hortense. Les rédacteurs du Nain Jaune, Cauchois-Lemaire, Bory-Saint-Vincent, Étienne, Jouy, Harel, étaient en effet bonapartistes, mais ils eurent soin de cacher leur drapeau, n'attaquèrent jamais le roi et prirent pour épigraphe: Le Roi et la Charte. Sous le couvert de ce pavillon, ils déversèrent le ridicule sur les hommes et les tendances du ministère et du parti royaliste. Louis XVIII, qui avait du goût pour l'esprit, s'amusait des épigrammes du mordant journal. À des courtisans qui réclamaient la suppression du Nain Jaune, il répondit un jour: «Non, c'est par cette feuille que j'ai appris des choses qu'un roi ne doit point ignorer.»—Voir Henry Houssaye, 1815, tome I, page 67.
510: Un correspondant du Nain Jaune lui écrivait, à la date du 28 février 1815: «J'ai usé dix plumes d'oie à vous écrire, sans pouvoir obtenir de réponse; peut-être serai-je plus heureux avec une plume de canne: j'en essayerai.» (Le Nain Jaune du 5 mars.)—La ville de Cannes est à peu de distance du golfe Jouan.
511: Un complot, mi-impérialiste, mi-révolutionnaire, avait éclaté, le 9 mars 1815, dans les départements du Nord. Les généraux Lefebvre-Desnoëttes et Lallemand, partis de Cambrai et de Laon, devaient, d'après le plan concerté par les conjurés, se rendre à La Fère, s'emparer du parc d'artillerie, entraîner le régiment en garnison dans cette ville, se réunir à Noyon au général Drouet d'Erlon et aux troupes qu'il aurait amenées de Lille, et de là marcher sur Paris. L'énergie du général d'Aboville, qui commandait à La Fère, fit échouer la conjuration.
512: Le maréchal Masséna, dans la soirée du 3 mars, adressa de Marseille au ministre de la Guerre la dépêche qui annonçait le débarquement de Bonaparte au golfe Jouan. En 1815, le télégraphe aérien s'arrêtait à Lyon. La dépêche fut donc portée par un courrier jusqu'à Lyon et n'arriva à Paris que le 5 mars vers midi. Ému de la gravité de la nouvelle, Chappe, le directeur-général des télégraphes (frère de l'inventeur) prit sur lui d'apporter cette dépêche à M. de Vitrolles, au cabinet du roi, au lieu de la transmettre au maréchal Soult. Vitrolles présenta la dépêche toute cachetée à Louis XVIII qui la lut plusieurs fois de suite et la jeta sur la table en disant avec le plus grand calme: «—C'est Bonaparte qui est débarqué sur les côtes de Provence. Il faut porter cette lettre au ministre de la Guerre. Il verra ce qu'il y aura à faire.»—(Mémoires de M. de Vitrolles, tome II, p. 283-285).—Pendant deux jours, le Gouvernement tint la nouvelle secrète, et c'est seulement le 7 mars qu'elle fut annoncée officiellement dans le Moniteur.
513: La formation du bataillon des élèves de l'École de droit eut lieu dès le 14 mars 1815; l'effectif s'élevait à 1,200 hommes; le drapeau avait été offert par les dames otages de Marie-Antoinette; il portait sur la cravate cette devise: Pour le bon droit. Après avoir été exercés à Vincennes, les volontaires, au nombre de sept cents environ, rejoignirent les gardes du corps à Beauvais, le 26 mars, jour de Pâques; ils passèrent la frontière, et furent cantonnés à Ypres. Louis XVIII les assimila aux officiers de sa maison et fit délivrer des brevets de sous-lieutenants à ceux qui voulurent rester dans l'armée. Le 30 juillet, le bataillon rentrait à Paris, aux applaudissements d'une foule immense venue à sa rencontre.—Retenus en France par leur âge, les professeurs de l'École refusèrent du moins de se rendre auprès de Napoléon, et ce ne fut que sur l'invitation expresse du ministre de l'Intérieur qu'ils envoyèrent une adresse dans laquelle ils se déclaraient reconnaissants de voir l'Empereur renoncer à tout esprit de conquête.—L'École de droit de Paris en 1814, 1815, 1816, d'après des documents inédits, par M. Colmet d'Aage, doyen honoraire. Voir aussi la très curieuse brochure de M. Alexandre Guillemin, avocat à la Cour royale de Paris, le Patriotisme des volontaires royaux de l'École de droit de Paris, 1822.
514: M. de La Fayette confirme, dans des Mémoires précieux pour les faits que l'on a publiés depuis sa mort, la rencontre singulière de son opinion et de la mienne au retour de Bonaparte. M. de La Fayette aimait sincèrement l'honneur et la liberté. (Note de Paris, 1840.) Ch.
515: Ordonnance royale du 6 mars, déclarant Bonaparte traître et rebelle et enjoignant à tout militaire, garde national ou simple citoyen «de lui courir sus».—Moniteur, 7 mars.
516: Alexandre-Maurice Blanc de la Nautte d'Hauterive (1754-1830). Il fut, sous le Directoire, l'Empire et la Restauration, le principal collaborateur de Talleyrand. Il rédigea, pendant qu'il était aux affaires, 62 traités politiques et commerciaux. On lui doit plusieurs écrits, dont le plus remarquable, publié en 1800, a pour titre: De l'état de la France à la fin de l'an VIII.
517: Postérieurement à l'époque où Chateaubriand écrivait ces lignes, le chevalier Artaud de Montor a publié l'Histoire de la Vie et des travaux du comte d'Hauterive. On y trouve de curieux détails sur cet épisode de 1815. Le général de Grouchy avait d'abord reçu de la bouche d'un des hommes de confiance de l'Empereur l'ordre de partir pour le Midi, où le duc d'Angoulême commandait quelques milliers d'hommes, de le prendre et de le faire fusiller sur-le-champ. Le général s'était récrié contre cette commission, déclarant qu'il ferait la guerre en homme d'honneur, et non en sauvage, et qu'avant de partir il verrait l'Empereur pour le lui dire. L'Empereur ne manifesta ni mécontentement ni surprise, il n'avoua ni ne désavoua l'ordre: «Vous irez, dit-il, dans le Midi, vous acculerez le prince à la mer jusqu'à ce qu'il s'embarque. Partez.» Puis il rappela M. de Grouchy et, d'un ton assuré et ferme, lui dit: «Souvenez-vous surtout de l'ordre que vous recevez de moi: si vous prenez le prince, gardez-vous bien qu'il tombe un cheveu de sa tête.» Après un moment et le signe d'une profonde réflexion: «Non, vous garderez le prince jusqu'à ce que je sois informé et que vous receviez mes ordres.» Le général partit. (Vie du comte d'Hauterive, page 398.—1839.)
518: L'article de Benjamin Constant parut dans le Journal des Débats du 19 mars. Voici la fin de cette éloquente philippique, de cet inoubliable article,—que seul, son auteur devait, dès le lendemain, oublier: «Du côté du Roi, la liberté constitutionnelle, la sûreté, la paix; du côté de Bonaparte, la servitude, l'anarchie et la guerre. Qui pourrait hésiter? Quel peuple serait plus digne que nous de mépris si nous lui tendions les bras? Nous deviendrions la risée de l'Europe après en avoir été la terreur ...; et, du sein de cette abjection profonde, qu'aurions-nous à dire à ce Roi que nous aurions pu ne pas rappeler, car les puissances voulaient respecter l'indépendance du vœu national? ... Lui dirions-nous: Vous avez cru aux Français, vous êtes venu au milieu de nous, seul et désarmé...; si vos ministres ont commis beaucoup de fautes, vous avez été noble, bon, sensible; une année de votre règne n'a pas fait répandre autant de larmes, qu'un seul jour du règne de Bonaparte. Mais, il reparaît sur l'extrémité de notre territoire, il reparaît, cet homme teint de notre sang et poursuivi naguère par nos malédictions unanimes. Il se montre, il menace, et ni les serments ne nous retiennent, ni votre confiance ne nous attendrit, ni votre vieillesse ne nous frappe de respect! Vous avez cru trouver une nation, vous n'avez trouvé qu'un troupeau d'esclaves. Parisiens, tel ne sera pas votre langage, tel ne sera pas du moins le mien. J'ai vu que la liberté était possible sous la Monarchie, j'ai vu le Roi se rallier à la nation. Je n'irai pas, misérable transfuge, me traîner d'un pouvoir à l'autre, couvrir l'infamie par le sophisme et balbutier des mots profanés pour racheter une vie honteuse!»
519: C'est le 7 mars que le maréchal Ney, après avoir baisé la main du roi, lui avait dit: «Sire, j'espère bien venir à bout de le ramener dans une cage de fer.» Louis XVIII, qui avait le sentiment des convenances, dit à mi-voix après le départ de Ney: «Je ne lui en demandais pas tant!» (Souvenirs du baron de Barante, II, 105).—Ney arriva le 10 mars à Besançon, siège de son commandement. Tout fier encore de ses paroles au roi, il les répéta au sous-préfet de Poligny, et celui-ci ayant objecté que mieux vaudrait le ramener mort dans un tombereau, le maréchal reprit: «—Non, vous ne connaissez pas Paris; il faut que les Parisiens voient.» Il disait encore: «—C'est bien heureux que l'homme de l'île d'Elbe ait tenté sa folle entreprise, car ce sera le dernier acte de sa tragédie, le dénouement de la Napoléonade.» Toutes ses paroles révélaient l'exaltation et même la haine: «—Je fais mon affaire de Bonaparte, répétait-il, nous allons attaquer la bête fauve.» Henry Houssaye, 1815, tome II, p. 301.
520: Pierre-Louis-Jean-Casimir, duc de Blacas d'Aulps (1771-1839). Capitaine de cavalerie au moment de la Révolution, il émigra dès 1790, et servit à l'armée de Condé et en Vendée. Étant passé en Italie, il obtint la confiance du comte de Provence (depuis Louis XVIII), confiance qu'il justifia par le service le plus constant et le plus désintéressé. Il suivit Louis XVIII à Mittau et à Hartwell et ne rentra en France qu'avec lui. Les titres de ministre de la maison du roi, de grand-maître de la garde-robe, d'intendant des bâtiments récompensèrent alors son dévouement. À la seconde Restauration, le roi, qu'il avait accompagné à Gand le fit pair de France, ambassadeur à Naples, puis à Rome. Il fut créé duc le 30 avril 1821. M. de Blacas, qui après 1830 avait voulu une fois encore partager l'exil de ses princes, mourut à Prague le 17 novembre 1839.
521: Louis-François Bertin de Vaux (1771-1842) fut l'un des fondateurs du Journal des Débats, ce qui ne l'empêcha pas d'être agent de change, de créer (1801) une maison de banque à Paris et de siéger comme juge et comme vice-président au Tribunal de Commerce de la Seine (1805). Député de Versailles sous la Restauration, il accepta la place de conseiller d'État lorsque Chateaubriand entra dans le premier ministère Villèle, et il démissionna le jour où Chateaubriand se vit arracher son portefeuille. Rentré au Conseil d'État sous le ministère Martignac, il se retira de nouveau à l'avènement du cabinet Polignac et fit partie des 221. Il fut nommé pair de France le 11 octobre 1832. Ses fonctions publiques ne l'empêchèrent pas de continuer jusqu'à sa mort, au Journal des Débats, sa très active direction.
522: Amédée-Bretagne-Malo de Durfort, duc de Duras (1771-1838). Premier gentilhomme de la Chambre du roi, il accompagna Louis XVIII à Gand et revint avec lui. Il avait été nommé pair de France le 4 juin 1814; après la Révolution de 1830, il se retira de la vie politique.
523: Les autres ministres étaient: M. Louis, aux Finances; le duc de Feltre, à la Guerre; M. Beugnot, à la Marine; M. Dambray, chancelier de France; M. de Jaucourt, aux Affaires étrangères, par intérim, le prince de Talleyrand étant à Vienne. M. de Blacas était ministre de la maison du Roi. M. de Lally-Tolendal avait par intérim le portefeuille de l'Instruction publique.
524: Claude-Victor Perrin, duc de Bellune (1766-1841). Le nom de Victor, sous lequel il s'est illustré, n'était qu'un de ses prénoms. La bataille de Friedland lui valut le bâton de maréchal, et Napoléon le créa duc de Bellune, le 10 septembre 1808. Pair de France le 4 juin 1814, il devint, à la seconde rentrée de Louis XVIII, l'un des quatre majors-généraux de la Garde royale (septembre 1815); il fut ministre de la Guerre, du 14 décembre 1821 au 10 octobre 1823. Après la Révolution de 1830, il resta fidèle à la branche aînée des Bourbons.
525: Vincent-Marie Viénot, comte de Vaublanc (1756-1845), député à la Législative de 1791, au Conseil des Cinq-Cents, au Corps législatif sous l'Empire et aux Chambres de la Restauration; ministre de l'Intérieur du 24 septembre 1815 au 8 mai 1816. Il a laissé des Mémoires qui sont du plus vif intérêt, surtout pour la période révolutionnaire, pendant laquelle son rôle fut des plus honorables et des plus courageux.
526: Guillaume-Antoine-Benoît, baron Capelle (1775-1843). Après avoir été préfet de la Méditerranée (Livourne) en 1807 et du Léman (Genève) en 1810, il reçut de Louis XVIII en 1814 la préfecture de l'Ain, et en 1815 suivit le roi à Gand. Au retour, il devint préfet du Doubs (1815), conseiller d'État (1816), secrétaire général du ministère de l'Intérieur (1822), préfet de Seine-et-Oise (1828). Il entra, le 19 mai 1830, dans le cabinet reconstitué par M. de Polignac, après la démission de MM. de Chabrol et de Courvoisier. Un nouveau département ayant été créé, celui des Travaux publics, il en devint titulaire. Signataire des Ordonnances de juillet, il fut condamné par contumace à la prison perpétuelle, rentra en France en 1836, après l'amnistie, et mourut à Montpellier le 25 octobre 1843. Il était baron de l'Empire.
527: On a imprimé à tort, dans toutes les éditions des Mémoires, l'abbé d'Ernaud. Le sous-diacre de Talleyrand à la fameuse messe du 14 juillet 1790 était l'abbé Desrenaudes.—Martial Borye Desrenaudes était, à l'époque de la Révolution, grand vicaire de l'évêque d'Autun. Très instruit, doué d'un véritable talent d'écrivain, il fut pour Talleyrand un auxiliaire précieux. Au moment où la Constituante allait se séparer, l'évêque d'Autun soumit à ses collègues un rapport et presque un livre sur un vaste plan d'instruction publique, ayant à sa base l'école communale, et à son sommet l'Institut. La lecture, qui remplit deux séances (10 et 11 septembre 1791), fut entendue jusqu'au bout avec la plus grande faveur. Marie-Joseph Chénier n'a pas craint d'appeler cet ouvrage «un monument de gloire littéraire où tous les charmes du style embellissent les idées philosophiques». Talleyrand, pour la rédaction de ce célèbre rapport, avait eu recours à la plume de Desrenaudes. Le sous-diacre de la messe de la Fédération cessa en 1792 d'exercer les fonctions ecclésiastiques, devint, après le 18 brumaire, membre du Tribunat, puis conseiller de l'Université et censeur impérial. Il continua d'être censeur sous la Restauration et mourut en 1825.
528: Claude-Philibert-Édouard, baron Mounier (1784-1843), fils du célèbre constituant Joseph Mounier. Il avait été, sous l'Empire, nommé maître des requêtes au Conseil d'État et intendant des domaines de la couronne. Louis XVIII l'avait confirmé dans ces deux postes. Conseiller d'État en 1816, président de la commission mixte de liquidation en 1817, directeur général de l'administration départementale et de la police en 1818, il se retira à la chute du ministère Richelieu, fut nommé pair de France le 5 mars 1819, reprit ses fonctions d'intendant des bâtiments de la couronne et rentra au Conseil d'État sous le ministère Martignac. Il abandonna ses fonctions salariées à la révolution de juillet et continua seulement de siéger à la Chambre des pairs.—Le comte d'Hérisson a publié en 1896 les Souvenirs intimes et Notes du baron Mounier.
529: Sur le voyage à Gand de M. Guizot, voir ses Mémoires, tome I, chapitre III.
530: Louis XVIII lui-même, très friand du poisson qu'on y servait, se faisait quelquefois conduire à cette guinguette appelée le strop (Louis XVIII à Gand, par M. Édouard Romberg).
531: Presqu'en arrivant à Gand, c'est-à-dire dans la première quinzaine d'avril, le roi et son conseil fondèrent un journal dont la direction fut confiée aux frères Bertin et qui s'appela le Moniteur. Sur la réclamation du gouvernement des Pays-Bas, qui voyait des difficultés à la coexistence dans le royaume de deux Moniteurs, on remplaça bientôt le premier titre par celui de Journal universel, mais ce n'en était pas moins l'organe officiel de Louis XVIII.
532: Rapport sur l'état de la France, fait au roi dans son conseil, par le vicomte de Chateaubriand, ministre plénipotentiaire de S. M. Très-Chrétienne près la cour de Suède. Gand, de l'imprimerie royale, mai 1815, in-8o, 63 pages.
533: Tout ceci—est-il besoin de le dire?—est rigoureusement exact. Cet officier, que Chateaubriand, par un très louable sentiment de discrétion, n'a pas cru devoir nommer dans ses Mémoires, était un inspecteur aux revues, M. Bail. Voici quelques lignes de la lettre que Chateaubriand écrivit en sa faveur au duc de Feltre, ministre de la guerre:
«Paris, 22 août 1816.
«Un monsieur Bail, inspecteur aux revues, a fait une brochure contre moi. Il a, pour ce fait, dit-il, perdu sa place. Oserais-je, monsieur le duc, espérer de votre indulgence que vous voudrez bien lui rendre vos bontés. La personne du roi est respectée dans la brochure. Veuillez, Monsieur le Maréchal, oublier ce qui ne regarde que moi.»
(Lettre autographe au duc de Feltre.—Catalogues Charavay.)
534: C'est à Bruges que l'Ordre de la Toison d'Or fut institué en 1429 par le duc de Bourgogne Philippe le Bon.
535: Jean Van Eyck (1386-1440), né à Maas-Eyck. Il alla de bonne heure s'établir à Bruges avec son frère aîné Hubert Van Eyck, ce qui le fait souvent appeler Jean de Bruges.
536: Gaston-Pierre-Marc, duc de Lévis (1764-1830). Après avoir fait partie de la Constituante comme député de la noblesse du bailliage de Senlis, il émigra pour aller servir à l'armée des princes (1792). Blessé à Quiberon (1795), il réussit à s'embarquer pour l'Angleterre, ne revint en France qu'après le 18 brumaire, et s'occupa alors, non sans succès, de travaux littéraires. Il publia successivement, de 1808 à 1814, Maximes et réflexions sur différents sujets, la Suite des quatre Facardins, imitation des Contes d'Hamilton, Voyage de Khani ou Nouvelles Lettres chinoises, Souvenirs et Portraits, L'Angleterre au commencement du XIXe siècle. Nommé pair de France par Louis XVIII le 4 juin 1814, il fut fait, en 1815, membre du conseil privé, et entra à l'Académie française par ordonnance royale en 1816.—Mme de Chateaubriand, dans ses Souvenirs, trace ce piquant portrait du duc de Lévis: «En fait de femmes de la Société, il n'y avait de Françaises à Gand que Mme la duchesse de Duras, la duchesse de Lévis, la duchesse de Bellune, la marquise de la Tour du Pin et moi; encore la duchesse de Lévis y vint-elle fort tard avec son mari, qui arriva en si piteux équipage que M. de Chateaubriand fut obligé de lui prêter jusqu'à des bas pour aller chez le roi: les bas allaient encore, mais pour le reste, c'était une vraie toilette de carnaval; le bon duc ne s'en mettait pas plus en peine à Gand qu'aux Tuileries, où sa garde-robe n'était pas mieux montée. Les souliers, par exemple, manquaient toujours; il s'était abonné aux savates parce que, disait-il, il avait eu une blessure au talon qui l'empêchait de relever les quartiers de son soulier.»
537: La Lys, rivière de France et de Belgique, qui prend sa source un peu au-dessous de Béthune et se jette dans l'Escaut à Gand.
538: Pauline-Louise-Françoise de Paule Charpentier d'Ennery, mariée au duc de Lévis par contrat du 26 mai 1785. Elle mourut le 2 novembre 1819.
539: Gaston-François-Christophe-Victor, duc de Ventadour et de Lévis (1794-1863). Il reçut sous l'Empire un brevet de sous-lieutenant, devint aide de camp du duc d'Angoulême en 1814, prit part, en 1823, à la guerre d'Espagne, comme chef de bataillon, et, en 1828, à l'expédition de Morée, comme colonel. Appelé à succéder comme pair de France à son père, mort le 15 février 1830, il refusa de siéger après la révolution de Juillet, et il accompagna dans l'exil la famille royale. Il fut longtemps un des principaux conseillers du comte de Chambord et mourut à Venise le 9 février 1863.
540: Marie-Catherine-Amanda d'Aubusson, fille de Pierre-Raymond-Hector d'Aubusson, comte de la Feuillade, et de sa première femme Agathe-Renée Barberie de Refuveille. Née en 1798, elle épousa le 10 mars 1821, Gaston-François-Christophe-Victor, duc de Ventadour, plus tard duc de Lévis. Elle mourut sans enfants le 10 mars 1854.—Sa sœur aînée, Henriette-Blanche, s'était mariée en 1812 à Auguste de Caulaincourt, frère du duc de Vicence et général de division, qui fut tué, cinq mois après son mariage, à la bataille de la Moskowa.
541: Au château des Tuileries, le pavillon Marsan, à l'angle du Jardin et de la rue de Rivoli, était, sous Louis XVIII, habité par le comte d'Artois.
542: M. Gaillard avait été secrétaire de Fouché. Voir les Mémoires de Madame de Chastenay, tome I, p. 49.
543: Le comte d'Artois avait son pavillon Marsan à l'hôtel des Pays-Bas, place d'armes, où il était logé avec sa suite et ses équipages, et payait mille francs par jour.—Louis XVIII occupait l'hôtel que le comte J.-B. d'Hane de Steenhuyse, l'un des habitants notables de la ville, avait mis à sa disposition. Cet hôtel est aujourd'hui en partie transformé en magasin d'épicerie.
544: Auguste-Clair Thibaudeau (1765-1854), membre de la Convention, où il vota la mort du roi, puis député au Conseil des Cinq-Cents, il fut l'un des serviteurs les plus empressés de Napoléon, qui le fit conseiller d'État, préfet de la Gironde et des Bouches-du-Rhône, comte de l'Empire (31 décembre 1809). Aux Cent-Jours, il fut nommé commissaire dans la 6e division militaire et promu pair. Frappé d'exil par l'Ordonnance du 24 juillet 1815, il ne rentra en France qu'après la révolution de Juillet. Napoléon III en fit un sénateur et un grand officier de la Légion d'honneur. Thibaudeau a laissé de nombreux écrits: Mémoires sur la Convention et le Directoire (1824); Mémoires sur le Consulat (1826); Histoire générale de Napoléon Bonaparte (1827-1828); le Consulat et l'Empire ou Histoire de France et de Napoléon Bonaparte, de 1799 à 1815 (1837-1838, 10 vol. in-8o); Histoire des États généraux (1843).
545: M. de Saint-Léon était une créature de Fouché; M. de Montrond était un des familiers de Talleyrand, et le plus spirituel de tous. Avec lui, le prince n'avait jamais le dernier mot.—«Savez-vous, duchesse, pourquoi j'aime assez Montrond? disait un jour M. de Talleyrand; c'est parce qu'il n'a pas beaucoup de préjugés.»—«Savez-vous, duchesse, pourquoi j'aime tant M. de Talleyrand? ripostait Montrond; c'est qu'il n'en a pas du tout.»
546: Jean-Baptiste de Gouy, comte de la Besnardière, né à Périers (Manche). Employé depuis 1795 au département des affaires étrangères, il y était devenu le collaborateur intime de Talleyrand, auquel plaisaient sa personne et son travail. Il accompagna le prince au Congrès de Vienne; à son retour, fut titré comte par le Roi, le 22 août 1815, nommé conseiller d'État en service extraordinaire, et directeur des travaux politiques. En 1819, il se retira complètement en Touraine, venant seulement chaque année passer quelques semaines à Paris, où il mourut le 30 avril 1843.
547: Une brochure qui vient de paraître, intitulée; Lettres de l'Étranger, et qui semble écrite par un diplomate habile et bien instruit, indique cette étrange négociation russe à Vienne (Paris, note de 1840).—Ch.
548: On prétend qu'en 1830, M. de Talleyrand a fait enlever des Archives particulières de la Couronne sa correspondance avec Louis XVIII, de même qu'il avait fait enlever dans les Archives de l'Empire tout ce qu'il avait écrit, lui, M. de Talleyrand, relativement à la mort du duc d'Enghien et aux affaires d'Espagne (Paris, note de 1840).—Ch.
549: «Ce qui est certain, dit Sainte-Beuve, c'est que M. de Talleyrand, au congrès de Vienne, ne perdit pas l'occasion de reprendre sous mains ses habitudes de trafic et de marchés: 6 millions lui furent promis par les Bourbons de Naples pour favoriser leur restauration, et l'on a su les circonstances assez particulières et assez piquantes qui en accompagnèrent le payement.» Un de ses hommes de confiance, M. de Perray, qui l'avait accompagné à Vienne, et qui avait été témoin des engagements contractés à prix d'argent, fut, au mois de juin 1815, dépêché à Naples par le prince, pour hâter le payement des 6 millions promis. On faisait des difficultés, parce que Talleyrand n'avait, paraît-il, traité avec Ferdinand que déjà assuré de la décision du congrès qui rétablissait les Bourbons de Naples. Bref, de Perray rapporta les 6 millions en traites sur la maison Baring, de Londres. Talleyrand l'embrassa de joie à son arrivée. Cependant de Perray, à qui il avait été alloué 1 500 francs pour ses frais de voyage, en avait dépensé 2 000; il en fut pour 500 francs de retour, mais il eut l'embrassade du prince. Il y avait, de plus, gagné une décoration de l'ordre de Saint-Ferdinand, qui se portait au cou. M. de Talleyrand, quand il la vit, s'en montra mécontent, parce que cela affichait le voyage. (Sainte-Beuve, Nouveaux Lundis, tome XII, p. 80.)
550: Ci-dessus, p. 8.
551: Mesdames Victoire et Adélaïde de France, tantes de Louis XVI. Toutes deux avaient été enterrées à Trieste, où elles étaient mortes, Mme Victoire, le 8 juin 1799, et Mme Adélaïde, le 18 février 1800.
552: Villemain, M. de Chateaubriand, p. 160.
553: Il veut dire Jéhu.
554: Lettres inédites de Napoléon Ier, publiées par Léon Lecestre, t. I, p. 100.—1897.
555: Histoire politique et littéraire de la Presse en France, par Eugène Hatin, t. VII, p. 569.
556: Mémoires pour servir à l'histoire de mon temps, par M. Guizot, t. I. p. 11.
557: Ci-dessus, p. 14.
558: Examen de la critique des Martyrs, insérée dans le Journal de l'Empire; extrait du Bulletin de Lyon.—Lyon, s. d. in-8o, 95 p.
559: Les articles de M. Guizot ont été reproduits dans le Temps passé, mélanges de critique littéraire et de morale, par M. et Mme Guizot, tome II, pp. 216 à 286.—Paris 1887.
560: Mémoires de M. Guizot, tome I, pp. 377 et suivantes.
561: Mlle Pauline de Meulan, que M. Guizot devait épouser trois ans plus tard, le 7 avril 1812.
562: Ci-dessus, p. 24.
563: Un vol. in-18, Perrin et Cie, éditeurs, 1895.
564: Livre des rapports des différents voyages faits en France, et des différentes missions remplies par M. de Chateaubriand par ordre du prince de Bouillon, depuis le mois de décembre 1794 jusqu'au mois d'août 1797. British Museum, Puisaye papers, t. XXVI.
565: Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'Empire, t. I, p. 103 et 385.
566: Mémoires pour servir à l'histoire de Napoléon Ier, par le baron de Méneval, t. I, p. 318.—Cf. Souvenirs du comte de Semallé, p. 114 et suiv.
567: Ci-dessus, p. 33.
568: Arrêté du Gouvernement contenant une nouvelle organisation de l'Institut. 3 pluviôse an XI (23 janvier 1803).
569: Paul Mesnard, p. 213.
570: Mémoires de M. de Bourrienne, t. IX, p. 51.
571: Mémoires du duc de Rovigo, t. V, p. 17.
572: Tome II, p. 632.—Édition Bourdin, 1842.
573: Charavay, Vente d'autographes du 15 juillet 1878 (Collection Fillon, sections V à VIII, n. 1173, p. 129).
574: Cartons de Victor Pavie: correspondance de Théodore Pavie.
575: Journal inédit de M. Ferdinand Denis, cité par l'abbé Pailhès, Chateaubriand, sa femme et ses amis, p. 130.
576: Villemain, M. de Chateaubriand, sa vie, ses écrits, son influence littéraire et politique sur son temps, p. 184.
577: Tableau historique et politique de l'Europe, de 1766 à 1796.
578: Histoire et Mémoires, par le général Philippe de Ségur.
579: Villemain, p. 187.
580: Villemain, p. 188.—Voir aussi Charles de Lacretelle, Histoire du Consulat et de l'Empire, tome V, pp. 86-88.
581: Villemain, p. 189.
582: Mémoires du comte Ferrand, ministre d'État sous Louis XVIII, p. 178.—Paris, 1897.
583: Le château d'Ussé en Touraine, résidence de madame de Duras.
584: A. Bardoux, la Duchesse de Duras, p. 124.
585: Les Études Historiques, dont il commençait dès lors à s'occuper.
587: Voir le Moniteur du 14 au 24 juillet 1810.
588: Voir le Moniteur des 28, 29, 30 novembre et des 7, 11, 13 décembre 1810.
589: Villemain, M. de Chateaubriand, sa vie ses écrits, p. 175.
590: Villemain, pages 176 à 181.
592: Le Mont-Valérien.
593: À Paris, au dépôt de la librairie Dentu, galerie de bois, nos 265 et 266.-1812.