Monseigneur l'Éléphant
LES ENFANTS DU ZODIAQUE
Bien que tu aimes ta femme comme toi-même,Comme un autre moi d’une argile plus pure,Bien que son départ obscurcisse pour toi le jourEt prive tout ce qui a vie de charme,Sache-le bien :Quand les demi-dieux s’en vont,Les dieux arrivent.Emerson.
Il y a des milliers d’années, quand les hommes étaient plus grands qu’ils ne sont aujourd’hui, les Enfants du Zodiaque vivaient dans le monde. Les Enfants du Zodiaque étaient six : le Bélier, le Taureau, Leo, les Gémeaux et Virgo, et ils redoutaient les six Maisons qui appartenaient au Scorpion, à la Balance, au Cancer, aux Poissons, au Sagittaire et au Verseau. Dès le premier instant où ils posèrent le pied sur la terre et où ils se connurent pour des dieux immortels, cette crainte ne les quitta plus ; et elle augmenta encore à mesure qu’ils se familiarisaient mieux avec l’humanité et qu’ils entendaient parler des six Maisons. Les hommes traitaient en dieux les Enfants et venaient à eux avec des prières et de longs récits de doléances que les Enfants du Zodiaque écoutaient sans comprendre.
Une mère se jetait aux pieds des Gémeaux ou du Taureau en gémissant :
— Mon mari travaillait aux champs, et le Sagittaire l’a percé d’un trait, et il est mort ; et le Sagittaire va aussi tuer mon fils ? Secourez-moi !
Le Taureau abaissait son énorme tête et répondait :
— Qu’est-ce que ça me fait ?
Ou bien les Gémeaux souriaient et continuaient à jouer ; car ils ne comprenaient pas pourquoi l’eau coulait des yeux des gens. D’autres fois un homme et une femme s’en venaient vers Leo ou Virgo, en s’écriant :
— Nous sommes deux nouveaux mariés et nous sommes très heureux. Voici des fleurs.
Et en jetant les fleurs ils émettaient des sons mystérieux pour montrer qu’ils étaient très heureux ; et Leo et Virgo s’étonnaient encore plus que les Gémeaux de voir des gens crier « Ha ! ha ! ha ! » sans motif.
Ceci continua durant des milliers d’années d’après le comput humain. Un jour enfin, Leo rencontra Virgo qui se promenait dans la montagne, et vit qu’elle avait complètement changé depuis la dernière fois qu’il l’avait vue. Virgo, regardant Leo, vit que lui aussi avait changé du tout au tout. Alors ils décidèrent qu’ils feraient bien de ne plus jamais se séparer, de crainte que des changements encore plus considérables ne vinssent à se produire tandis que l’un ne serait pas à portée de secourir l’autre. Leo donna un baiser à Virgo, et toute la terre ressentit ce baiser, et Virgo s’assit sur une montagne et l’eau coula de ses yeux, ce qui n’était jamais arrivé encore, au souvenir des Enfants du Zodiaque.
Comme ils étaient là tous les deux, un homme et une femme vinrent à passer, et l’homme dit à la femme :
— Quel besoin de gaspiller ces fleurs pour des dieux stupides ? Ils ne nous comprennent pas, ma chérie.
Virgo se dressa d’un bond et entoura la femme de ses bras, en s’écriant :
— Je comprends. Donne-moi tes fleurs et je te donnerai un baiser.
A mi-voix Leo dit à l’homme :
— Quel nouveau nom t’ai-je entendu donner à ta femme il n’y a qu’un instant ?
L’homme répondit :
— Je l’ai appelée ma chérie, cela va de soi.
— Pourquoi dis-tu : « Cela va de soi » ? demanda Leo ; et si cela va de soi, qu’est-ce que cela veut dire ?
— Cela veut dire : « Très chère », et on n’a qu’à regarder sa femme, on sait pourquoi.
— Je comprends, reprit Leo. Tu as bien raison.
Et quand l’homme et la femme se furent éloignés, il appela Virgo « ma femme chérie », et derechef Virgo pleura de pur bonheur.
— Je pense, dit-elle enfin, s’essuyant les yeux, je pense que toi et moi nous avons trop négligé les hommes et les femmes. Qu’as-tu fait des sacrifices qu’ils t’ont offerts ?
— Je les ai laissés brûler, répondit Leo. Je ne pouvais les manger. Et toi, qu’as-tu fait de leurs fleurs ?
— Je les ai laissées se flétrir, répliqua Virgo. Je ne pouvais m’en parer : j’en avais déjà trop à moi. Et maintenant j’en suis triste.
— Il n’y a pas de quoi se chagriner, reprit Leo ; nous sommes l’un à l’autre.
Tandis qu’ils s’entretenaient, les ans de la vie humaine coulaient à leur insu, et bientôt l’homme et la femme s’en revinrent, tous deux chenus, et l’homme portait la femme.
— Nous sommes arrivés à la fin des choses, dit l’homme avec calme. Celle qui fut ma femme…
— Comme je suis la femme de Leo, reprit bien vite Virgo, dont les yeux brillèrent.
— … qui fut ma femme, a été tuée par l’une de vos Maisons.
L’homme déposa son fardeau et se mit à rire.
— Quelle Maison ? demanda Leo en colère, car il détestait également toutes les Maisons.
— Vous êtes des dieux, vous devez le savoir, répondit l’homme. Nous avons vécu ensemble en nous aimant tous les deux, et je laisse à mon fils une bonne ferme. De quoi me plaindrais-je, sinon de vivre encore ?
Comme il était penché sur le corps de sa femme, un sifflement déchira l’air. Il se dressa et voulut fuir, en s’écriant :
— C’est la flèche du Sagittaire. Oh ! que je vive encore un peu… rien qu’un petit peu !
La flèche le frappa, et il mourut. Leo et Virgo s’entre-regardaient et tous deux étaient ébahis.
— Il souhaitait mourir, dit Leo. Il disait qu’il souhaitait mourir, et quand la mort est venue, il a tenté de fuir. C’est un lâche.
— Non, dit Virgo, ce n’est pas un lâche. Il me semble que j’éprouve le même sentiment que lui. Leo, il nous faut en apprendre davantage là-dessus, pour l’amour d’eux.
— Pour l’amour d’eux, répéta Leo, très haut.
— Parce que nous sommes destinés à ne jamais mourir, reprirent ensemble Leo et Virgo, encore plus haut.
— Assieds-toi donc là tranquillement, ma femme chérie, dit Leo. Moi, j’irai visiter les Maisons que nous haïssons, et j’apprendrai d’elles le moyen de faire vivre comme nous ces hommes et ces femmes.
— Et de les faire s’aimer comme nous, reprit Virgo.
— Je ne crois pas qu’ils aient besoin d’en être instruits, dit Leo.
Et il s’éloigna très en colère, avec sa peau de lion lui battant sur l’épaule. Il arriva à la Maison où le Scorpion habite, brandissant sa queue par-dessus son dos.
— Pourquoi nuis-tu aux enfants des hommes ? demanda Leo, le cœur défaillant.
— Es-tu sûr que je nuise seulement aux enfants des hommes ? interrompit le Scorpion. Demande à ton frère le Taureau, et tu verras ce qu’il te dira.
— Je suis venu à cause des enfants des hommes, reprit Leo. J’ai appris à aimer comme eux, et je veux qu’ils vivent comme moi… comme nous.
— Ton souhait est réalisé depuis longtemps. Demande au Taureau. Il est sous ma garde particulière, répondit le Scorpion.
Leo s’en retourna sur la terre, et vit la grande étoile Aldébaran, qui est sertie dans le front du Taureau, étinceler tout proche de terre. Quand il fut arrivé auprès d’elle, il vit que son frère le Taureau, attelé à la charrue d’un laboureur, peinait tête basse dans l’eau d’une rizière, et la sueur ruisselait de ses flancs. Le laboureur le poussait de l’avant à l’aide d’un aiguillon.
— Déchire cet insolent, mets-le à mort ! s’écria Leo, et pour l’amour de notre honneur, sors de la fange.
— Je ne puis, dit le Taureau, le Scorpion m’a prédit qu’un jour, jour dont je n’ai pas connaissance, il me piquera à l’endroit où mon cou s’attache à mes épaules, et que je mourrai en meuglant.
— Quel rapport cela a-t-il avec ce hideux labeur ? demanda Leo, arrêté sur la digue qui bornait le champ inondé.
— Beaucoup. Cet homme ne pouvait labourer sans mon aide. Il me prend pour une bête échappée.
— Mais c’est un pacant croûté de boue et aux cheveux emmêlés, reprit Leo. Nous ne sommes pas destinés à son usage.
— Toi peut-être pas, mais moi, si. Je ne peux dire quand il prendra fantaisie au Scorpion de me piquer de son dard mortel… peut-être avant que j’aie retourné ce sillon.
Le Taureau lança sa masse dans le joug, et derrière lui la charrue déchira la terre grasse, et le paysan l’aiguillonna au point de lui rougir les flancs.
— Cela te plaît ? cria Leo, du bout des sillons ruisselants.
— Non, répondit le Taureau par-dessus son épaule en arrachant ses pattes de derrière de la fange collante, et s’éclaircissant les naseaux.
Dédaigneusement, Leo le quitta et s’en alla dans une autre contrée, où il trouva son frère le Bélier au centre d’une foule de gens du pays qui suspendaient à son cou des guirlandes de fleurs et lui donnaient à manger du blé vert frais cueilli.
— Voilà qui est abominable, dit Leo. Disperse cette foule et va-t’en, mon frère. Leurs mains souillent ta toison.
— Je ne puis, dit le Bélier. Le Sagittaire m’a prédit qu’un jour, jour dont je n’ai pas connaissance, il me percera d’une flèche, et que je mourrai en d’extrêmes douleurs.
— Quel rapport cela a-t-il avec cette scène indécente ? dit Leo, mais avec moins d’assurance que précédemment.
— Cela en a beaucoup, dit le Bélier. Ces gens n’ont jamais vu encore de mouton idéal. Ils croient que je suis une bête échappée, et ils veulent me porter de place en place comme un parangon pour tous leurs troupeaux.
— Mais ce sont des bergers crasseux, nous ne sommes pas faits pour les amuser, dit Leo.
— Toi peut-être pas, mais moi, si, dit le Bélier. J’ignore quand il prendra fantaisie au Sagittaire de me décocher son trait… peut-être avant que les gens d’une demi-lieue plus loin sur la route ne m’aient vu.
Le Bélier baissa la tête pour permettre à un rustre nouveau venu d’y accrocher une guirlande de feuilles d’ail sauvage, et se laissa patiemment tâter la toison par les fermiers.
— Cela te plaît ? cria Leo par-dessus les têtes de la foule.
— Non, dit le Bélier.
Et la poussière soulevée par le piétinement des pieds le fit éternuer, et il renifla le fourrage entassé devant lui.
Leo s’en alla, dans l’intention de retourner sur ses pas jusqu’aux Maisons, mais comme il traversait une rue, il vit deux petits enfants tout poudreux qui se roulaient devant le seuil d’une maisonnette en jouant avec un chat. C’étaient les Gémeaux.
— Qu’est-ce que vous faites là ? dit Leo, indigné.
— Nous jouons, dirent tranquillement les Gémeaux.
— Ne pouvez-vous jouer sur les bords de la Voie Lactée ? dit Leo.
— C’est ce que nous faisions, reprirent-ils, mais les Poissons sont arrivés à la nage et nous ont prédit qu’un jour ils reviendraient pour nous prendre et nous emporter sans nous faire aucun mal. C’est pourquoi nous jouons à être des petits enfants ici-bas. Cela plaît aux gens.
— Et cela vous plaît-il ? dit Leo.
— Non, dirent les Gémeaux, mais il n’y a pas de chats dans la Voie Lactée.
Et tout pensifs ils tirèrent la queue du chat. Une femme sortit sur le seuil et s’arrêta derrière eux, et Leo vit sur ses traits une expression qu’il avait déjà vue sur ceux de Virgo.
— Elle croit que nous sommes des enfants trouvés, dirent les Gémeaux, qui se hâtèrent de rentrer pour souper.
Alors, en toute hâte, Leo courut successivement à toutes les Maisons, car il n’arrivait pas à comprendre le nouvel ennui qui était survenu à ses frères. Il s’adressa au Sagittaire, et le Sagittaire l’assura qu’en ce qui concernait sa Maison, Leo n’avait rien à craindre. Le Verseau, les Poissons et le Scorpion lui firent la même réponse. Ils ne savaient rien de Leo et s’en souciaient encore moins. Ils étaient les Maisons et ils s’occupaient à tuer les hommes.
Il arriva enfin à cette très sombre Maison où Cancer le Crabe se tient si tranquille qu’on le croirait endormi, n’était le jeu continuel et le mouvement ondulatoire des appendices plumeux entourant sa bouche. Ce mouvement ne cesse jamais. Et parce qu’il est silencieux et sans hâte, il ressemble à la morsure d’un feu qui couve dans du bois vermoulu.
Leo s’arrêta en face du Crabe, et les demi-ténèbres lui laissèrent entrevoir le vaste dos d’un noir bleuâtre et les yeux immobiles. De temps à autre il croyait entendre un bruit de sanglots, mais presque imperceptible.
— Pourquoi nuis-tu aux enfants des hommes ? dit Leo.
Il ne reçut pas de réponse, et sans le vouloir Leo cria :
— Pourquoi nous nuis-tu ? Que t’avons-nous fait pour que tu nous nuises ?
Cette fois Cancer répondit :
— Qu’en sais-je et que m’importe ? Tu es né dans ma Maison, et au temps prescrit je viendrai te trouver.
— Quel est ce temps prescrit ? dit Leo en s’écartant du mouvement incessant de la bouche.
— Quand la pleine lune cessera de provoquer la pleine marée, dit le Crabe, je viendrai trouver l’un. Quand l’autre aura pris le monde aux épaules, je prendrai cet autre à la gorge.
Leo porta la main à la pomme de sa gorge, s’humecta les lèvres, et se ressaisissant, dit :
— Dois-je donc craindre pour deux ?
— Pour deux, dit le Crabe, et pour tous ceux qui peuvent venir ensuite.
— Mon frère le Taureau a un meilleur destin, dit mornement Leo ; il est seul.
Avant qu’il eût le temps d’achever sa phrase, une main lui ferma la bouche, et Virgo fut dans ses bras. En vraie femme, elle n’était pas restée où Leo l’avait laissée, mais s’était aussitôt mise en quête pour connaître le pire, et sans s’arrêter aux autres Maisons, était venue droit au Cancer.
— C’est ridicule, dit tout bas Virgo. J’ai attendu si longtemps dans le noir jusqu’à ta venue. Alors j’avais peur. Mais à présent…
Elle posa la tête sur son épaule et poussa un soupir de satisfaction.
— J’ai peur, à présent, dit Leo.
— C’est à cause de moi, dit Virgo. Je le sais, parce que je crains pour toi. Allons-nous-en, mon mari.
Ensemble, ils sortirent des ténèbres et retournèrent sur terre. Leo se taisait, et Virgo s’efforçait de l’égayer.
— Le sort de mon frère est le meilleur, répétait Leo de temps à autre.
Et il finit par dire :
— Allons chacun de notre côté et vivons seuls jusqu’à notre mort. Nous sommes nés sous la Maison du Cancer et il viendra nous trouver.
— Je sais, je sais. Mais où irai-je ? Et où dormiras-tu le soir ? Néanmoins, essayons. Je vais rester ici. Poursuis-tu ?
Leo fit très lentement six pas en avant, et trois longues enjambées en arrière très vivement ; et le troisième pas le remit au côté de Virgo. Cette fois ce fut elle qui le pria de s’éloigner et de la quitter, et il fut contraint de la réconforter durant toute la nuit. Cette nuit-là les décida tous deux à ne jamais se quitter pour un instant, et quand ils eurent pris cette résolution, ils se retournèrent vers l’obscure Maison du Cancer qui les dominait du haut du ciel, et leurs bras passés au cou l’un de l’autre, ils riaient : « Ha ! ha ! ha ! » exactement comme les enfants des hommes. Et ce fut la toute première fois de leur existence où ils rirent.
Le lendemain ils regagnèrent leur demeure habituelle, et virent les fleurs et les sacrifices que les villageois des montagnes avaient déposés devant leur seuil. Leo dispersa le feu d’un coup de talon, et Virgo, en frissonnant, jeta au loin les guirlandes de fleurs. Quand les villageois revinrent comme de coutume, voir ce qu’il était advenu de leurs offrandes, ils ne trouvèrent plus sur les autels ni roses ni chairs brûlées, mais un homme et une femme, aux visages pâles d’effroi, étaient assis la main dans la main sur les degrés d’un autel.
— N’êtes-vous pas Virgo ? demanda une femme à celle-ci. Je vous ai envoyé des fleurs hier.
— Petite sœur, dit Virgo, rougissant jusqu’au front, ne m’envoie plus de fleurs, car je ne suis qu’une femme comme toi.
L’homme et la femme se retirèrent, mal convaincus.
— Et maintenant, qu’allons-nous faire ? dit Leo.
— Il nous faut tâcher d’être gais, je pense, dit Virgo. Nous savons tout ce qui peut nous arriver de pis, mais nous ne savons pas le meilleur de ce que l’amour nous réserve. Nous avons bien de quoi nous réjouir.
— Nous avons la certitude de la mort, dit Leo.
— Tous les enfants des hommes ont cette même certitude, pourtant ils riaient, longtemps avant que nous eussions connu le rire. Il nous faut apprendre à rire, Leo. Nous avons déjà ri une fois.
Les gens qui, tels les Enfants du Zodiaque, se considèrent comme des dieux, ont de la peine à rire parce que les Immortels ne connaissent rien qui mérite d’en rire ou d’en pleurer. Leo se leva le cœur très gros, et, accompagné de Virgo, il s’en alla çà et là parmi les hommes : leur nouvelle crainte les accompagnait. Ils rirent d’abord d’un enfançon nu qui cherchait à introduire son orteil dodu dans sa drôle de petite bouche rose ; ils rirent ensuite d’un petit chat qui courait après sa queue ; et puis ils rirent d’un jeune garçon qui s’efforçait de dérober un baiser à une jeune fille, et qui recevait des taloches. Ils rirent enfin parce que le vent leur soufflait dans la figure, tandis qu’ils dévalaient à eux deux la pente d’une colline, au bas de laquelle ils se jetèrent tout haletants et hors d’haleine dans un attroupement de villageois. Les villageois, eux aussi, rirent de leurs vêtements qui volaient et de leurs visages rougis par le vent ; et dans la soirée ils leur donnèrent à manger et les invitèrent à un bal sur l’herbe, où chacun riait, naïvement heureux de se livrer à la danse.
Cette nuit-là, Leo se dressa d’un bond aux côtés de Virgo, en s’écriant :
— Chacun de ces gens que nous venons de rencontrer mourra…
— Nous aussi, répliqua Virgo, mi-endormie. Recouche-toi, mon aimé.
Leo ne vit pas qu’elle avait le visage mouillé de pleurs.
Mais Leo se leva et partit au loin dans les champs, poussé en avant par la crainte de la mort pour lui et pour Virgo, qui lui était plus chère que lui-même. Enfin il rencontra le Taureau qui sommeillait au clair de lune après une journée de dur travail, et considérait de ses yeux entre-clos les beaux sillons droits qu’il avait creusés.
— Ho ! dit le Taureau, on t’a donc prédit également ces choses. Laquelle des Maisons te réserve la mort ?
Leo leva le doigt vers la sombre Maison du Crabe et soupira :
— Et il viendra aussi prendre Virgo.
— Et alors, dit le Taureau, que vas-tu faire ?
Leo s’assit sur la digue et avoua son ignorance.
— Tu ne sais pas tirer la charrue, dit le Taureau avec un peu de dédain. Moi, je sais, et cela m’empêche de penser au Scorpion.
Leo fut irrité et ne dit plus rien jusqu’à la venue de l’aurore, où le cultivateur vint atteler le Taureau à son travail.
— Chante, dit le Taureau tandis que le joug raide de boue grinçait sous l’effort. J’ai l’épaule écorchée. Chante un de ces airs que nous chantions lorsque nous nous croyions des dieux.
Leo se recula dans la cannaie et entonna le Chant des Enfants du Zodiaque… l’hymne de guerre des jeunes que rien n’effraie. Au début il poussa le chant à contre-cœur, et puis le chant l’entraîna, et sa voix roulait sur les guérets, et le Taureau marchait en mesure, et le cultivateur lui donnait des coups sur les flancs par pure gaieté de cœur, et les sillons se déroulaient de plus en plus vite derrière la charrue. Puis arriva à travers champs Virgo, qui cherchait Leo : elle le trouva chantant dans la cannaie. Elle joignit sa voix à la sienne, et la femme du cultivateur apporta son fuseau à l’air libre et les écouta, entourée de tous ses enfants. Quand vint l’heure de la méridienne, Leo et Virgo avaient soif et faim d’avoir chanté, mais le cultivateur et sa femme leur donnèrent du pain de seigle et du lait, et beaucoup de remerciements, et le Taureau trouva l’occasion de dire :
— Vous m’avez aidé à faire un bon demi-champ de plus que je n’aurais fait autrement. Mais le plus dur de la journée est encore à venir, frère.
Leo désira s’étendre à terre et méditer sur les paroles du Crabe. Virgo s’en alla causer avec la femme et le bébé du cultivateur, et le labourage d’après-midi commença.
— Aide-nous maintenant, dit le Taureau. Les énergies du jour baissent. J’ai les jambes toutes roides. Chante comme tu n’as jamais chanté.
— Pour un villageois boueux ? dit Leo.
— Il est sous le même signe que nous. Es-tu donc lâche ? dit le Taureau.
Leo rougit et recommença, la gorge irritée, et de mauvaise humeur. Peu à peu il dévia du Chant des Enfants, et sans désemparer composa un chant ; et c’était là chose qu’il n’aurait jamais faite s’il n’eût rencontré le Crabe face à face. Il se souvint de détails concernant les cultivateurs et les bœufs et les rizières, qu’il n’avait pas spécialement remarqués avant l’entrevue, et les relia ensemble, s’y intéressant davantage à mesure qu’il chantait, et il en conta au cultivateur au sujet de son travail et sur lui-même, beaucoup plus que n’en savait le cultivateur. Le Taureau l’approuvait par ses grognements, tout en peinant dans les sillons pour la dernière fois de ce jour-là, et le chant se termina, laissant le cultivateur avec une très bonne opinion de lui-même en dépit de ses os douloureux. Virgo sortit de la cabane où elle avait tenu tranquilles les enfants et conté à l’épouse des propos de femme, et ils mangèrent tous ensemble le repas du soir.
— Vous devez avoir là une existence bien agréable, dit le cultivateur, à rester assis comme ça sur une digue tout le jour et à chanter ce qui vous passe par la tête. Dites, vous deux, y a-t-il longtemps que vous menez cette vie… de bohémiens ?
— Oh ! beugla le Taureau, de sa litière. Voilà tous les remerciements que tu recevras jamais des hommes, frère.
— Non, répondit Virgo au paysan. Nous venons seulement de commencer ; mais nous allons nous y tenir aussi longtemps que nous vivrons. N’est-ce pas, Leo ?
— Oui, dit celui-ci.
Et ils s’éloignèrent, la main dans la main.
— Tu chantes admirablement, Leo, dit celle-ci comme une femme doit le dire à son mari.
— Et toi, qu’as-tu fait ? demanda-t-il.
— J’ai causé avec la mère et les petits. Tu ne croirais jamais comme il nous faut peu de chose pour nous faire rire, nous autres femmes.
— Et… suis-je destiné à poursuivre ce… ce métier de bohémien ? dit Leo.
— Oui, mon aimé, et je t’y aiderai.
Il n’y a pas de documents écrits sur la vie de Leo et de Virgo, et nous ne pouvons dire comment Leo s’accommoda de son nouvel emploi qu’il détestait. Mais nous sommes assurés que Virgo l’aimait davantage à chaque fois qu’il chantait ; voire même quand, la chanson finie, elle faisait le tour de la société avec une sorte de tambour de basque, et recueillait les sous de leur pain quotidien. Il y avait aussi des fois où incombait à Leo la tâche très ardue de consoler Virgo, indignée par les odieux éloges que les gens leur donnaient à tous deux… ou par les ridicules plumes onduleuses de faisan qu’on piquait au bonnet de Leo, ou par les boutons et les morceaux de drap que l’on cousait à son habit. En vraie femme, elle savait le conseiller et l’aider en vue de leur but, mais la bassesse des moyens la révoltait.
— Qu’importe, disait Leo, aussi longtemps que mes chants les rendent un peu plus heureux ?
Et ils poursuivaient leur route et recommençaient des variations sur le très vieux thème : que de tout ce qui leur arrivait ou ne leur arrivait pas, les enfants des hommes ne devaient pas s’en effrayer. Ce fut un enseignement pénible au début, mais au cours des ans Leo s’aperçut qu’il savait l’art de faire rire les hommes et de les tenir attentifs autour de lui, même quand la pluie tombait. Mais tandis que la foule hurlait de plaisir, il y avait des gens qui s’asseyaient à terre et pleuraient doucement, et ces gens-là prétendaient que c’était l’œuvre de Leo ; et Virgo leur parlait dans les intervalles de la représentation et faisait de son mieux pour les réconforter. Des gens mouraient aussi, tandis que Leo contait, ou chantait, ou riait, car le Sagittaire et le Scorpion et le Crabe et les autres Maisons étaient sans cesse à l’œuvre. Parfois la foule se dispersait, prise de panique, et Leo s’efforçait de les tranquilliser en leur déclarant que c’était là une lâcheté, et parfois les gens se moquaient des Maisons qui les tuaient, et Leo leur expliquait que c’était là une lâcheté pire encore que de s’enfuir.
Dans leurs vagabondages ils rencontraient le Taureau ou le Bélier ou les Gémeaux, mais tous étaient trop occupés et se bornaient à s’adresser un signe de tête réciproque par-dessus la foule, sans interrompre leur besogne. Avec les années ils cessèrent même de se reconnaître, car les Enfants du Zodiaque avaient oublié qu’ils eussent jamais été des dieux travaillant pour l’amour des hommes. Sur le front du Taureau, Aldébaran était ternie de boue séchée, la toison du Bélier était poudreuse et déchirée, et les Gémeaux n’étaient plus que des petits enfants se battant autour du chat sur un seuil. Ce fut alors que Leo dit :
— Cessons de chanter et de faire les baladins.
Et ce fut alors que Virgo lui répondit :
— Non.
Mais elle ignorait pourquoi elle proférait ce « non » aussi énergiquement.
Leo soutint que c’était là de la perversité, jusqu’au jour où elle-même à la fin d’une étape rebutante lui fit la même proposition. Il lui répondit : « Bien assurément pas », et oubliant le sens des étoiles situées au-dessus d’eux, ils se querellèrent déplorablement. Au cours des ans, d’autres chanteurs et d’autres discours surgirent, et Leo, oubliant qu’il ne saurait jamais y en avoir trop, les détestait parce qu’ils accaparaient les applaudissements des enfants des hommes, qu’il estimait devoir être uniquement pour lui. Virgo se fâchait, elle aussi, et alors les chants s’interrompaient et les plaisanteries s’affadissaient durant des semaines, et les enfants des hommes criaient :
— Allez-vous-en chez vous, les deux bohémiens. Allez-vous-en et apprenez à chanter quelque chose qui en vaille la peine.
Après l’un de ces tristes jours de honte, Virgo, qui marchait au côté de Leo, vit la pleine lune se lever par-dessus les arbres, et elle saisit le bras de Leo en s’écriant :
— Voici que le temps est révolu. Oh ! Leo, pardonne-moi !
— Qu’y a-t-il ? dit Leo, qui pensait aux autres chanteurs.
— Oh ! mon mari ! répliqua-t-elle.
Et elle porta la main à son sein, et le sein qu’il connaissait si bien était dur comme pierre. Leo soupira, et se rappelant les paroles du Crabe, il s’écria :
— A coup sûr nous étions autrefois des dieux.
— A coup sûr nous sommes toujours des dieux, reprit Virgo. Ne te rappelles-tu pas que toi et moi nous sommes allés à la Maison du Crabe et… que nous n’étions pas trop effrayés ? Et depuis lors… nous avons oublié dans quel but nous chantions… Nous chantions pour des sous, et, hélas ! nous avons lutté pour des sous !… Nous qui sommes les Enfants du Zodiaque !
— C’était ma faute, dit Leo.
— Comment peut-il y avoir de ta faute qui ne soit aussi la mienne ? dit Virgo. Mon temps est révolu, mais tu vivras encore longtemps, et…
Son regard exprima tout ce qu’elle ne put proférer.
— Oui, je me souviendrai que nous sommes des dieux, dit Leo.
Il est très dur, même pour un Enfant du Zodiaque qui a oublié sa divinité, de voir sa femme se mourir lentement et de savoir qu’il ne peut lui venir en aide. Dans ces derniers mois, Virgo raconta à Leo tout ce qu’elle avait dit et fait parmi les femmes et les petits enfants en dehors des représentations nomades, et Leo s’étonna de l’avoir si peu connue, elle qui était tout pour lui. Quand elle fut à la mort elle l’adjura de ne jamais plus lutter pour des sous ni se quereller avec d’autres chanteurs, et surtout de se remettre à chanter dès qu’elle serait morte.
Elle mourut, et après l’avoir enterrée, il fit route jusqu’à un village de sa connaissance, où les gens espéraient le voir se disputer avec un nouveau chanteur qui s’était produit durant son absence. Mais Leo l’appela « Mon frère ». Le nouveau chanteur était marié depuis peu — Leo le savait — et quand il eut fini de chanter, Leo se dressa et chanta le chant de Virgo qu’il avait composé chemin faisant. Tous ceux qui étaient mariés ou en espoir de l’être, de quelque condition ou race qu’ils fussent, comprirent cette chanson… jusqu’à la jeune femme appuyée au bras de son nouvel époux. Quand Leo cessa de chanter et qu’il sentit son cœur prêt à se briser, les hommes sanglotaient.
— Voilà une histoire triste, dirent-ils enfin ; à présent fais-nous rire.
Parce que Leo avait connu tout le chagrin qu’un homme peut endurer, y inclus la pleine conscience de sa propre chute quand on a été jadis un dieu… il changea aussitôt de gamme, et fit rire les gens, si fort qu’ils n’en pouvaient plus. Ils s’en allèrent, disposés à affronter tous les maux imaginables, et ils donnèrent à Leo plus de plumes de faisan et de sous qu’il n’en pouvait compter. Sachant que les sous entraînent aux disputes et que les plumes de faisan étaient odieuses à Virgo, il les rejeta loin de lui et se mit en quête de ses frères, pour leur rappeler qu’ils étaient des dieux.
Il trouva le Taureau ensanglantant les buissons d’un fossé, car le Scorpion l’avait piqué, et il se mourait, non pas lentement comme Virgo, mais promptement.
— Je sais tout, gémit le Taureau à la vue de Leo. J’avais oublié aussi, mais voilà que je me rappelle. Va voir les champs que j’ai labourés : les sillons sont droits. J’avais oublié que j’étais un dieu, mais malgré cela j’ai tiré la charrue bien droit. Et toi, frère ?
— Je ne suis pas au bout de mon labourage, dit Leo. Est-ce que la mort fait mal ?
— Non, pas la mort, mais de mourir, dit le Taureau.
Et il expira.
Le cultivateur qui le possédait alors fut très marri, car il lui restait encore un champ à labourer.
Ce fut après cela que Leo composa le chant du Taureau qui avait été un dieu et ne s’en souvenait plus, et il le chanta de telle sorte que la moitié des jeunes hommes du monde s’imaginèrent qu’eux aussi étaient peut-être bien des dieux sans le savoir. Une moitié de cette moitié en conçurent une vanité insupportable et moururent de bonne heure. Une moitié du reste s’efforcèrent d’être des dieux sans y parvenir, mais l’autre moitié accomplirent quatre fois plus de besogne qu’ils n’auraient fait sous l’influence de toute autre illusion.
Plus tard, des années plus tard, toujours errant par monts et par vaux et faisant rire les enfants des hommes, il trouva les Gémeaux assis sur la berge d’un torrent, à attendre la venue des Poissons qui les emporteraient. Ils n’étaient pas le moins du monde effrayés, et ils dirent à Leo que la femme de la maison avait un vrai bébé à elle, et que quand le bébé serait assez grand pour devenir méchant, il trouverait un chat bien éduqué, tout prêt à se laisser tirer la queue. Alors les Poissons vinrent les chercher, mais tout ce que virent les gens, ce fut deux enfants noyés dans un torrent, et bien que leur mère adoptive en fût très triste, elle serra son vrai bébé sur son sein et se réjouit de n’avoir perdu que les enfants trouvés.
Alors Leo composa le chant des Gémeaux qui avaient oublié qu’ils étaient des dieux et qui avaient joué dans la poussière pour amuser leur mère adoptive. Ce chant fut chanté partout parmi les femmes. Il les faisait tout à la fois rire et pleurer et serrer leurs petits plus étroitement sur leurs cœurs ; et plusieurs des femmes qui se souvenaient de Virgo dirent :
— A coup sûr c’est la voix de Virgo. Elle seule pouvait en savoir autant sur nous.
Après avoir composé ces trois chants, Leo les rechanta sans cesse jusqu’à ce qu’il fût en danger de ne plus voir en eux qu’autant de mots vides, et les gens qui l’écoutaient s’en fatiguaient, et Leo fut repris de la vieille tentation de cesser de chanter une fois pour toutes. Mais il se rappela les paroles de Virgo mourante, et persévéra.
Tandis qu’il chantait, l’un de ses auditeurs l’interrompit :
— Leo, dit-il, voilà quarante ans que je t’entends nous raconter de ne pas avoir peur. Ne peux-tu enfin nous chanter quelque chose de nouveau ?
— Non, dit Leo, c’est le seul chant que je sois autorisé à chanter. Vous ne devez pas avoir peur des Maisons, même quand elles vous tuent.
De lassitude, l’homme allait s’éloigner, mais un sifflement déchira l’air, et l’on vit la flèche du Sagittaire raser le sol, dardée vers le cœur de l’homme. Il se redressa, et resta paisiblement à attendre que la flèche eût atteint son but.
— Je meurs, dit-il avec calme. Il est bon pour moi, Leo, que tu aies chanté pendant quarante ans.
— As-tu peur ? dit Leo penché sur lui.
— Je suis un homme, et non un dieu, dit l’homme. Sans tes chants je me serais enfui. Ma tâche est faite, et je meurs sans montrer ma peur.
« Me voici fort bien récompensé, se dit Leo en lui-même. A présent que j’ai vu ce que produisent mes chants, je vais en chanter de meilleurs. »
Il chemina sur la route, rassembla sa petite foule d’auditeurs, et entama le chant de Virgo. Tout en chantant, il sentit sur la pomme de sa gorge le contact glacé de la patte du Crabe. Il leva la main, et se tut un instant, étouffé.
— Chante, Leo, dit la foule. Ta vieille chanson coule toujours aussi bien qu’autrefois.
Le cœur étreint par la crainte glacée, Leo poursuivit résolument jusqu’au bout. Son chant terminé, il sentit l’étreinte se resserrer sur sa gorge. Il était vieux, il avait perdu Virgo, il se savait en train de perdre plus de la moitié de son aptitude à chanter, il pouvait à peine se traîner jusqu’aux foules décroissantes qui l’attendaient, et il ne distinguait plus les figures qui l’entouraient. Néanmoins il cria coléreusement au Crabe :
— Pourquoi viens-tu déjà me prendre ?
— Tu es né sous mon signe. Comment pourrais-je me dispenser de venir te prendre ? dit le Crabe avec lassitude, car tout être humain que tuait le Crabe lui avait posé la même question.
— Mais je commençais seulement à comprendre l’effet produit par mes chants, dit Leo.
— C’est peut-être bien pour cela, dit le Crabe, dont l’étreinte se resserra.
— Tu avais dit que tu ne viendrais pas avant que j’eusse pris le monde aux épaules, râla Leo, en tombant à la renverse.
— Je tiens toujours ma parole. Tu as réalisé cela par trois fois, au moyen de trois chants. Que veux-tu de plus ?
— Laisse-moi vivre encore assez pour voir le monde l’apprendre, implora Leo. Laisse-moi m’assurer que mes chants…
— Rendent les hommes braves ? dit le Crabe. Même alors il resterait un homme qui a eu peur. Virgo était plus brave que toi. Viens.
Leo se trouvait tout proche de la bouche infatigable et insatiable.
— J’oubliais, dit-il simplement. Virgo était plus brave. Mais je suis aussi un dieu, et je n’ai pas peur.
— Qu’est-ce que ça me fait ? dit le Crabe.
Alors la parole fut ravie à Leo, et il gisait inerte et muet, dans l’attente de la mort.
Leo fut le dernier des Enfants du Zodiaque. Après sa mort il surgit une race de petits hommes vils, qui pleurnichaient, geignaient et se lamentaient parce que les Maisons les tuaient eux et les leurs, eux qui souhaitaient vivre à jamais sans la moindre souffrance. Ils n’accroissaient pas le nombre de leurs jours, mais ils accroissaient déplorablement leurs peines, et il n’y avait plus d’Enfants du Zodiaque pour les guider, et la plupart des chants de Leo s’étaient perdus.
Mais il avait gravé sur la tombe de Virgo la dernière strophe du chant de Virgo, qui figure en tête de ce récit.
Un enfant des hommes, venu des milliers d’années après, la débarrassa du lichen, lut les vers, et les appliqua à un autre malheur que celui où les avait destinés Leo. Comme c’était un homme, les hommes crurent qu’il avait composé ces vers lui-même ; mais ils sont l’œuvre de Leo, l’Enfant du Zodiaque, et ils enseignent comme il l’enseignait, que quelque chose qui nous arrive ou non, nous autres hommes n’en devons pas être effrayés.
FIN
IMPRIMERIE NELSON, ÉDIMBOURG, ÉCOSSE
PRINTED IN GREAT BRITAIN