Petit histoire des grandes rois de Angleterre
Mary Tudor était le fille
D'Henri Huit par le premier lit.
Elle était laide en vrai gorille,
Avec oun teint de pissenlit.
De son père la fanatisme
Barbare, étroit, hautain et fol,
Joint au dangereux royalisme
De la parentaige espagnol,
Fut, je crois, le pur héritaige
Du virago Mary Tudor,
Si tant il avait l'apanaige
De tout ce qui fait la butor.
Oun jour, Philippe Deux d'Espaigne [33]
Il vint pour réclamer son main.
Il l'obtint, mais sans son compaigne
Voulut partir le lendemain.
En apercevant cet visaige
L'hidalgo, surpris, s'était dit:
—Caramba! vite la veuvaige,
Autrement je suis déconfit.—
Et, depuis lors, le pauvre reine
Dut viver loin de son époux,
Et, pour mieux consoler son peine,
Fit éclater oun grand courroux.
D'abord, elle voulut le tête
De la pauvrette Jeanne Grey,
Et puis, pour compléter le fête,
Celle du jeune époux Dudley.
Northumberland perdit le sienne,
Ainsi que le fameux Cranmer [34];
Suffolk subit le même peine
Avec l'évêque Latimer.
Puis partout se multiplièrent
Les échafauds et les bûchers,
Et les flots de sang qui coulèrent
Auraient attendri les rochers.
Enfin.... elle mourut—ô chance!—
Sans avoir eu le moindre enfant,
Et c'est là que le Providence
Pour l'humanité fut clément.
[33] Voir note à l'appendice.
[34] Voir note à l'appendice.