Procès-verbaux de l'Assemblée générale de la section des Postes: 4 Décembre 1790 - 5 Septembre 1792
NOTES:
[359] On se rappelle (voyez ci-dessus, p. 92, n. 346) que le Conseil général avait fixé au mercredi 18 avril la discussion de l'affaire des bustes de Bailly et de La Fayette. En voyant l'opposition soulevée par son projet dans un certain nombre de sections [arrêtés de la section de l'Isle, du 15 avril; des sections des Thermes-de-Julien et des Postes, du 17 avril; du Théâtre-Français et de la Grange-Batelière (date inconnue)] et en apprenant l'émotion suscitée dans ces sections par la fête du 15 avril en l'honneur des Suisses de Châteauvieux, le maire Pétion jugea préférable d'attendre à plus tard et le Conseil général ne fut pas convoqué pour discuter cette question le 18 avril, ainsi que cela avait été décidé (Feuille du jour, du 21 avril, p. 888). Mais, comme la séance du 18 avril avait été annoncée publiquement en même temps que l'objet qu'on devait y discuter, certains membres du Conseil ne s'en présentèrent pas moins, ainsi que les habitués des tribunes et les gardes nationaux en armes: les premiers pour soutenir la proposition d'enlèvement des bustes, les seconds, pour la combattre. De là les incidents très violents qui marquèrent cette séance et qui se reproduisirent à celle du lendemain jeudi 19 avril. J'ai trouvé de ces deux séances particulièrement mouvementées, plusieurs récits détaillés dans des journaux d'opinions diverses; je les reproduis ici à la suite les uns des autres, sans commentaire.
Voici d'abord les récits, hostiles aux Jacobins partisans de l'enlèvement des bustes, du journal La Feuille du Jour, des 21 et 22 avril.
Feuille du jour, 21 avril, pp. 888-889.—La question des bustes était remise à mercredi dernier, 18 de ce mois.
M. Pétion, qui, quoi qu'on en dise, a sa tactique, ne jugea pas le moment favorable. Quelques coups d'essais maladroits, le factieux triomphe du dimanche, avaient ébranlé les bases du crédit de la secte, même parmi ses zélateurs. Enfin, ce n'était pas le moment d'entrer en lice avec MM. Lafayette et Bailly. Le Conseil général ne fut pas convoqué.
Cependant l'ajournement était public, il avait été provoqué par ceux-là même qui le rendaient illusoire. Au jour indiqué, les habitués des tribunes étaient en place; et quelques gardes nationales, chez qui la mémoire de leur ancien chef n'est pas encore ternie parce que, lorsque les jacobins fuyaient le danger, elles le partageaient avec lui, s'étaient rendues pour assister à la discussion.
Quelques membres du Conseil général qui ne pensaient pas non plus que la volonté du maire dût l'emporter sur celle de l'Assemblée, ni qu'il eût le droit de révoquer l'ajournement fixé par elle, étaient à leur poste.
La discussion s'engage; le doyen d'âge préside l'Assemblée. Il est prouvé que tous les membres du Conseil général ne sont ni fous ni jacobins; et que conséquemment tous n'admirent pas la conduite de M. Pétion.
Les tribunes prennent parti dans les débats; Pétion est leur dieu, on a tort de délibérer, de s'assembler sans lui; les tribunes menacent de lever la séance, et d'emporter les bustes.
La garde nationale résiste, invite les tribunes à la paix; mais bientôt leur obstination lasse sa patience, et l'un des mutins est enlevé du milieu des siens, et conduit en sequestre.
Le courage, l'énergie de M. Manuel font place au sentiment de sa conservation. Il quitte son siège, disparaît dans la foule, sans même avoir requis..... Il est brave, M. Manuel.
Le tumulte s'accroît, l'indignation de la garde nationale se manifeste; mais elle cède, et la paix se rétablit à la voix du magistrat, qui réclame le respect dû à la loi.
La séance est levée.
Enfin, M. Pétion arrive; les débris du Conseil général se réunissent en Comité secret, et là, chacun se dit ses vérités.
M. Pétion. «C'est un oubli. J'en conviens».
M. Démousseaux. «Non, mais vous avez cru convenable de différer; au moins fallait-il nous prévenir.»
M. Manuel. «Je requiers que la place destinée dans l'enceinte de la salle à la garde nationale soit supprimée, qu'il ne lui soit plus permis de s'y présenter en armes; mais, comme il serait peut-être périlleux de réitérer mon réquisitoire au Conseil général, je lègue l'honneur de la découverte à quelqu'un de mes courageux collègues.»
Un Membre. «Volontiers, je m'en charge; mais à condition que, de votre côté, vous supprimerez les convocations des sociétés fraternelles, jacobins, cordeliers, etc... Qu'ainsi vous vous mettrez à la diète des applaudissements, et que vous aurez le courage de voir triompher la raison et les principes.»
On s'attendait que la séance du lendemain serait orageuse, et qu'il faudrait lutter, avec quelques gestes imposants, contre la puissance tribunitienne; mais tout s'est passé tranquillement. Nous rendrons compte de cette séance.
Feuille du Jour, 22 avril, p. 896—La séance du 19 n'a pas relevé les municipaux jacobins dans l'opinion publique; elle a duré jusqu'à minuit. Il en est résulté que les bustes de MM. Lafayette et Bailly resteraient en place.
Malgré les protestations de MM. Raffron et Boucher, les fureurs du jeune et petit Baudouin, les clameurs d'un M. Hu, l'indécente réquisition de M. Danton, qui s'est échappé de l'Assemblée seul et conspué; malgré deux ou trois fausses dénonciations et plusieurs tracasseries imaginées pour désordonner le Conseil, la lecture des différentes pétitions adressées par les sections, et les discours vigoureux et pleins de sens de MM. Borie, Leroux, Levacher, Duplessis, et surtout de M. Lefèvre, ont déterminé le Conseil à se déclarer incompétent sur la question générale de savoir si dorénavant on décernerait des bustes; observant que, par son arrêté du 24, il avait prétendu juger et jugeait définitivement la question particulière des bustes de l'ancien maire et de l'ancien commandant général.
Le maire actuel (le grand Pétion) a souri, quand il a su que le Conseil n'avait pas le droit d'empêcher les sections de lui rendre les honneurs du buste par la suite, et cette chatouilleuse considération peut l'avoir emporté, dans son esprit, sur toute autre; car, à peine a-t-elle été présentée, qu'il est devenu sourd aux menaces de ses amis, les Jacobins, qui sont, en ce moment, très mécontents de lui. Quand il réussirait à s'en faire mépriser, nous aurions bien de la peine à l'en estimer davantage.
Voici maintenant le récit, favorable à l'enlèvement des bustes, du Courrier des 83 départements, des 21 et 22 avril 1792:
Le Courrier des 83 départements, du 21 avril 1792, pp. 305 à 308. (Paris. Assemblée générale de la Commune.)—Les 2 dernières séances ont été très orageuses. Une question juste au fond, mais dont la malveillance se sert pour aigrir les esprits et diviser la garde nationale des citoyens, c'est-à-dire, la garde nationale d'elle-même, est la cause de cette tempête qui serait alarmante si le génie de la liberté ne veillait pas sur nous. Cette question est de savoir si l'on conservera on non les bustes de MM. Bailly et la Fayette, que l'idolâtrie, ou si l'on veut, le délire a consacrés dans le sanctuaire des magistrats du peuple. Nous ne croyons pas que le moment soit bien choisi pour agiter cette question qui en présente une infiniment plus grande. Doit-on faire l'apothéose des hommes vivants? mais enfin cette question est à l'ordre du jour, et en attendant que la prudence ait prononcé, nous en allons dire un mot.
Nous n'avons point assisté à l'avant-dernière séance; nous savons seulement par le cri public qu'un homme revêtu des couleurs de la liberté, s'est permis de tirer son sabre, qu'il a été applaudi par d'autres hommes parés des mêmes couleurs. Nous savons encore que le résultat de cette scène a été défiguré de la manière la plus odieuse par les universels calomniateurs. La séance d'avant-hier annonçait de nouveaux orages, et nous, ainsi que plusieurs citoyens, avons entendu ces propres expressions sortir de la bouche d'un de ces hommes sur les épaules desquels l'intrigue a cousu un double galon: qu'on se disposait à sabrer, si ce coquin de maire n'allait pas au pas, et que, l'expédition faite, on se porterait au théâtre Molière, où dînaient les soldats de Château-Vieux....; ce sont ses propres expressions[A].
En conséquence, plusieurs bons citoyens, amis de l'ordre, se sont rendus à l'Hôtel-de-Ville où la prudence et la fermeté de M. Pétion ont triomphé dans la longue lutte qu'une cabale criminelle avait préparée. Des pétitions, pour et contre le projet d'enlever les bustes, ont été lues tour à tour. Les injures, dont quelques-unes étaient parsemées, indignaient les tribunes et étaient applaudies par une cohorte dont les gestes furieux annonçaient les intentions. Les esprits s'aigrissaient, et le sanctuaire de la magistrature populaire aurait pu être transformé en une arène de gladiateurs, si M. le Maire, conservant au milieu de cette agitation universelle le calme qui convenait au premier magistrat d'un peuple libre, n'eût fait taire toutes les passions par la loi sévère qu'il imposa de ne donner aucun signe d'approbation ni d'improbation.
Les députations des sections de l'Ile, du Théâtre-Français, de la Grange-Batelière, et des Postes[B], filèrent (sic) successivement et présentèrent leur pétition contre le projet d'enlever les bustes.
Sans doute il leur était libre d'exprimer leur vœu; mais devait-on s'attendre à voir les individus qui les composaient se prosterner devant les idoles qu'ils venaient encenser, et, après avoir épuisé l'arsenal de la flatterie, sur L'Immortel Bailly et le Grand Lafayette, apostropher, par des sorties indécentes, des hommes sur lesquels la loi du devoir leur imposait d'appeler le respect et la confiance?
De toutes ces pétitions, aucune n'était plus inepte et plus insolente que celle de quelques individus qui affectèrent de se présenter en uniforme et avec leurs épaulettes. Si l'on n'avait pas été révolté du fonds de cette diatribe, on aurait pu rire du ton grotesque de celui qui la lisait. Les chutes des périodes de l'épauletier rappelaient, malgré qu'on en eût, le Petit Jean qu'on avait fait venir d'Amiens exprès pour être suisse..... M. Pétion, qui s'était borné, pour tous les autres pétitionnaires, à deux mots de réponse, gourmanda vertement ceux-ci, et les rappela, non pas à des procédés plus honnêtes (il est des êtres pour lesquels l'honnêteté n'est pas de ce monde), mais au respect de la Constitution et à la lettre de ses décrets.
Plusieurs autres pétitionnaires, notamment une députation de Saint-Roch, plaidèrent la cause de la liberté contre l'idolâtrie. Il fut arrêté, sur le fond, que les quarante-huit sections émettraient leur vœu. Nous ne devons pas oublier qu'au milieu de cet ouragan, quelques citoyens, parmi lesquels était un grenadier de la garde nationale, sont venus réclamer contre les places exclusives qu'occupait l'ancienne garde. Les décrets, disent-ils, ont déclaré que tous les citoyens étaient tous gardes nationaux; nous concluons donc que tous les citoyens doivent partager également l'avantage précieux d'environner leurs magistrats.—Dans le cours de sa harangue, l'orateur avait parlé des sabres dont étaient armés, dans le séjour de la paix, les citoyens qui étaient à sa gauche..... Un membre de la Commission observe que le grenadier qui était à côté de l'orateur était lui-même armé. A l'instant ce grenadier dépose son sabre et son collègue s'écria: Oui, Messieurs, il est armé, parce que, voulant entrer dans cette enceinte, il n'a pu d'abord y pénétrer sans avoir son sabre, et on lui a observé que c'était la consigne. Je le dis hautement, et j'atteste cette vérité de ma signature[C].—(Cette pétition a été convertie en motion, sur l'avis de M. Polverel.)
Cette séance s'est trop prolongée pour que nous en pussions attendre la fin; mais il paraît qu'elle n'a pas cessé d'être tumultueuse[D]. Le peuple s'était porté en force à l'Hôtel-de-Ville, et il paraît qu'il a exercé une utile surveillance sur ses magistrats. L'un d'eux nous en donne une preuve bien touchante. Dans une lettre qu'il nous adresse, nous trouvons ces propres expressions: «Comme ce peuple est bon! Je m'en allais seul, à minuit et demi, sans voiture; les fiacres même étaient couchés, et il pleuvait à verse. On me conduisait de l'œil: et je ne m'en aperçus qu'en rentrant chez moi.»
[A] On feignait d'être de son parti pour en savoir davantage.
[B] La pétition de celle-ci était la seule qui méritât d'être distinguée et qui fût écrite avec un peu de logique.
[C] On le demande: dans quelle intention cette consigne a-t-elle pu être donnée?
[D] Nous recevons à l'instant la suite des détails de cette séance; ils nous arrivent trop tard pour en faire usage; nous les donnerons demain.
Le Courrier des 83 départements, du 22 avril 1792, pp. 329-331.—Assemblée générale de la Commune. (Suite de la séance de jeudi dernier.)—Voici les détails qui nous sont adressés et qui terminent le récit de la séance orageuse dont nous avons rendu compte en partie.
Il était près de 10 heures, lorsque tous les pétitionnaires pour et contre les images, eurent été entendus. L'agitation qui régnait dans l'Assemblée, l'impossibilité où l'on était de délibérer librement au milieu de 300 hommes à sabres, semblaient imposer la loi, ou de lever la séance, ou de s'occuper d'objets moins capables d'échauffer les diverses passions. C'était le vœu des véritables patriotes, mais les membres du côté gauche, qui se voyait soutenu par des sabreurs, signifièrent qu'ils passeraient la nuit plutôt que de désemparer avant que la question fût décidée. Beaucoup de temps se perd avant de savoir si l'on entamerait la question. Enfin M. Osselin propose d'attendre que tous les faiseurs de questions aient émis leur vœu. Opposition du côté gauche, qui ne voulait pas risquer une victoire qu'il voulait emporter à main armée. Le musicien Lefevre fredonna longuement sur les honneurs dûs aux grands hommes, notamment au grand la Fayette. On objectait contre la motion de M. Osselin que les Assemblées de la Commune ne pouvaient délibérer que sur les objets d'intérêt communal. Les motifs que firent valoir les opposants ne furent point écoutés et ne prévalurent pas; en vain demandèrent-ils la parole pour combattre la question préalable réclamée sur la motion de M. Osselin. Efforts inutiles! le côté gauche, fort de ses spadassins, commanda, bien plus qu'il ne requit, que la discussion fût fermée. Inutilement M. Pétion et plusieurs membres du Conseil, objectèrent qu'il n'était pas possible de fermer une discussion avant qu'elle ne fût ouverte. Leurs voix furent étouffées par les clameurs de la gauche, bien plus que par les contorsions ridicules et menaçantes des gens à sabres; enfin, après cinq heures des plus tumultueux débats et des scènes les plus révoltantes, il fut décidé qu'il n'y avait pas lieu à délibérer.
Nous ajouterons un mot à ce court extrait: nous n'examinerons pas si c'est à tort ou à raison que la question des bustes s'est élevée dans l'Assemblée générale de la Commune, nous croyons même (tout en consacrant le principe qu'il n'y a que des esclaves qui puissent consacrer de pareils honneurs à des hommes vivants), nous croyons, dis-je, qu'il est urgent de prendre un parti, afin d'éviter que les délibérations des magistrats ne soient pas à l'avenir gênées par des hommes armés, se disant gardes nationaux, et qui ne sont sans doute que des émissaires à tant le geste, à tant la clameur, à tant la menace, qui viennent faire le métier de bravaches pour insulter les véritables citoyens qui se rendent aux Assemblées pour y voir discuter leurs intérêts[E].
Nota.—Nous trouvons dans la Gazette Universelle des injures anonymes qui nous honorent trop pour ne pas les rapporter. Il y est dit: que nous étions présents à cette séance et que nous y avons vomi mille imprécations, ainsi que beaucoup d'autres scélérats qui faisaient chorus avec les émissaires de Coblentz.
(Nous offrons à l'auteur de ce paragraphe la récompense que mérite sa charmante calomnie, et un écu pour l'épithète de scélérat dont il nous gratifie.)
[E] Il est bon d'observer que certain d'Hermigny qui, dans les premiers jours de l'Assemblée législative, insulta un patriote député, fut accusé par un membre du Conseil d'avoir menacé du geste et de la voix le substitut du procureur de la Commune et plusieurs autres magistrats du peuple.
Voici enfin, franchement hostile à Bailly et à La Fayette, la narration du Thermomètre du jour, des 21 et 22 avril.
Thermomètre du jour, du 21 avril 1792. (Variétés, p. 163.)—La question de l'enlèvement des bustes de MM. Bailly et la Fayette a été agitée à la séance du Conseil général de la Commune de Paris, du jeudi 19 avril, au milieu des plus violents orages. Qui aurait cru que, dans un état libre, dans un état régénéré, il serait mis en doute, si des hommages rendus à des hommes, sur le patriotisme desquels l'opinion est divisée, doivent être suspendus au moins jusqu'à la fin de leur carrière? Mais que la philosophie est faible contre l'esprit de parti et contre le penchant à la servitude, dont une longue habitude de la corruption a imprégné certaines âmes!
A l'ouverture de la séance, des gardes nationales armées, ayant à leur tête des commandants de bataillons, des épauletiers de tout grade, se sont emparés d'une partie de la salle, moyen très efficace pour assurer la liberté des délibérations. M. le Maire a ouvert la séance en annonçant qu'il espérait que le désordre dont on paraissait menacé n'aurait pas lieu, et que de part et d'autre on saurait contenir toutes marques d'approbation et d'improbation.
On a lu diverses pétitions relatives à l'objet de la discussion. Des gardes nationales, présidés par leurs officiers, ont fait l'éloge pompeux du héros des deux mondes, et ils ont osé dire que si la Municipalité faisait ôter les bustes de MM. la Fayette et Bailly elle déshonorerait l'armée parisienne.
M. Pétion leur a répondu que les termes dont ils s'étaient servis tendaient à établir une opinion très dangereuse, savoir que l'armée parisienne peut être distinguée des citoyens de Paris. Il leur a rappelé que cette armée n'était autre chose que la réunion des citoyens actifs armés et revêtus d'un uniforme; que leur discours tendrait encore à isoler les gardes nationales de Paris, des gardes nationales des départements qui ont aussi pris les armes pour la défense de la liberté, distinctions qui sont sans fondements et également ennemies de l'égalité et de la concorde.
Des citoyens de la section du Palais-Royal ont exprimé un vœu ennemi des bustes. D'autres, de la section des Thermes-de-Julien, ont défendu les images. La section des Postes s'est aussi déclarée leur adoratrice. Des citoyens signataires d'une pétition individuelle, ont demandé que les bustes fussent enlevés, et, s'il vous faut des bustes, ont-ils ajouté, élevez ceux des hommes vertueux: que J.-J. Rousseau, que Franklin viennent remplacer ici ces hommes qui ne parurent grands que parce qu'ils étaient montés sur les échasses de la politique et de la flatterie..... A ces mots, toutes les épaulettes, tous les uniformes, se lèvent, et osent imposer silence à l'orateur. Le peuple qui remplissait les tribunes demande à grands cris que la phrase soit recommencée. Le tumulte était au comble. Quelques citoyens se montrent disposés à franchir les balustrades, pour punir les vils iconomanes: ce mouvement en impose enfin aux esclaves, et plus de cent cinquante gardes nationaux se retirent.
Thermomètre du jour, 22 avril 1792. (Suite de la discussion sur les Bustes de la Fayette et Bailly.)—Après avoir entendu tour à tour le langage de la bassesse et de l'idolâtrie, et celui de la raison et de la liberté, le Conseil passe à l'ordre du jour. Les défenseurs des bustes obtiennent que l'on agite sur le champ la question de leur enlèvement. Une foule de motions incidentes s'élèvent au milieu du tumulte. Après une heure de désordre, M. Danton requiert que la séance soit levée, attendu l'impossibilité de délibérer. Il se lève pour sortir. Quelques huées, parties du côté des épauletiers, le forcent, ainsi que M. Manuel, à reprendre sa place. M. Patris dénonce M. d'Hermigny, comme ayant insulté le substitut de la Commune (sic) et demande qu'il soit informé sur-le-champ devant le commissaire de police de la section. Une foule de voix s'élèvent pour offrir leur témoignage. Alors M. d'Hermigny, l'insolent d'Hermigny, ce même homme qui, dans le sanctuaire même des lois, osa insulter et menacer les plus zélés des défenseurs du peuple, prend la parole. Il nie que ce soit lui qui ait hué M. Danton; et, quand je l'aurais fait, ajoute-t-il, cela mériterait-il la lanterne? L'indignation du peuple se manifeste par les cris les plus violents. M. Pétion parvient enfin à rétablir le calme. M. Polverel en profite pour annoncer qu'ayant eu affaire au secrétariat, l'entrée lui en fut refusée par plusieurs gardes, qui lui ont dit que leur consigne était de ne laisser entrer que des hommes en uniforme et en armes, et que cette consigne venait de M. Guyard ou Riard, commandant de bataillon. M. le Maire a promis de vérifier ce fait aussitôt que la séance serait levée.
La discussion est reprise. M. Sergent fait la motion de s'en référer à l'arrêté du 24 mars, qui porte qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'enlèvement des bustes, et telle est la décision qui a été prise, après une heure consommée tour à tour par des amendements et la question préalable.
Les zélateurs des images ont senti que cet arrêté laissait encore dans son intégrité la question de savoir si l'on doit élever des monuments aux hommes avant leur mort, et que la décision de cette question vengerait bientôt la liberté outragée par leurs viles flagorneries; aussi se sont-ils retirés consternés de n'avoir pu obtenir qu'un triomphe éphémère, et peut-être honteux de s'être montrés, avec si peu de profit, esclaves et idolâtres. Les bons citoyens ont accompagné leur digne maire jusqu'à sa voiture. C'était, disaient-ils, autant pour veiller à sa sûreté que pour applaudir à la conduite sage et ferme qu'il avait tenue dans une circonstance si difficile.
La Fayette, Bailly, hommes aveuglés par la vanité, quelles que puissent être désormais vos vertus, vos exploits, vos bienfaits envers la patrie, votre réputation ne passera à la postérité qu'avec la tache que viennent de lui imprimer vos stupides adulateurs.
[360] Il s'agit de la loi du 19-22 juillet 1791 relative à l'organisation d'une police municipale et correctionnelle (Cf. Duvergier, t. III, pp. 114-126).
[361] P. imp., in-4o de 18 p., Bib. nat., Lf137 15 (Tourneux, no 14203). La pièce est signée: «Pour ses collègues, Dufour.» Dufour était commissaire de police de la section du Marché-des-Innocents, d'après la liste des commissaires de police qui figure au supplément de la Chronique de Paris du 22 avril 1792. Cette liste ne comprend que les commissaires de police de 47 sections. Il y manque le nom du commissaire de police de la section des Quinze-Vingts qui n'a pas signé la lettre au bas de laquelle figurent les noms de ses 47 collègues. Cette lettre est une réponse, en date du 21 avril 1792, écrite sur un ton assez ironique, à une lettre du 5 avril aux commissaires de police de la Ville de Paris, du procureur de la Commune, Manuel, conseillant à ceux-ci d'enlever les boues des rues, les pierres qui sont devant les portes, de régler la circulation des carrosses, etc... Les signataires répliquent en indiquant à Manuel ce que lui-même devrait faire.
[362] P. imp., in-4o de 7 p., Arch. nat., collection Rondonneau, ADXVI 69, p. 35 (Tourneux, no 8741).
Voici le texte de cette pièce.
SECTION DES POSTES
RAPPORT
des commissaires nommés par le Comité de la section des Postes, par délibération du 9 mars 1792, sur l'état actuel de la Police de Paris.
La Commune de Paris se félicitait d'avoir des Juges de Paix qui, suivant la loi de leur institution, s'appliquaient constamment à concilier ou à juger les différends qui s'élèvent sans cesse; des Commissaires de Police qui maintenaient l'ordre et la tranquillité dans chaque section, constataient avec célérité les délits de toute espèce: elle voyait avec la plus douce satisfaction ces deux pouvoirs agir avec beaucoup d'activité et sans se heurter.
La loi du 22 juillet 1791, relative à l'organisation d'une police municipale et correctionnelle, a dérangé cet ordre; elle a privé, pour ainsi dire, les citoyens de tous ces avantages, en surchargeant les juges de paix de fonctions, et en réduisant celles des commissaires à l'exercice de la police municipale.
En effet, d'après cette loi, tous ceux qui sont arrêtés doivent être conduits directement chez le juge de paix, lequel est déclaré compétent pour prononcer, soit la liberté des personnes amenées, soit le renvoi devant un commissaire de police s'il s'agit d'un fait de police municipale, soit le mandat d'amener ou devant lui ou devant un autre juge de paix, soit enfin le mandat d'arrêt tant en matière de police correctionnelle qu'en matière criminelle.
On ne craint pas de dire qu'il y a, dans ces nouvelles fonctions attribuées aux juges de paix et celles pour lesquelles ils avaient été institués, une très grande inconvenance. L'Assemblée constituante en avait d'abord été convaincue en rejetant, le 15 octobre 1790, d'après l'avis du Comité de constitution, une motion qui avait été faite tendante à annuler les fonctions de juge de paix et de commissaire de police.
Comment, en effet, concilier les fonctions primitives des juges de paix, celles d'entendre à toute heure du jour les affaires qui demandent une grande célérité, de tenir des audiences publiques, des assemblées pour avis de parents, de procéder à l'apposition de scellés, de faire des descentes sur les lieux contentieux, etc. Comment, disons nous, concilier ces fonctions avec celles dont la loi du 22 juillet 1791 les a encore investis? Disons-le avec confiance, cette réunion, cette complication de fonctions est sujette à mille inconvénients. Le juge de paix ne peut en même temps s'occuper des affaires civiles et recevoir journellement la garde qui lui amène des particuliers prévenus de délits, entendre les plaignants, les accusés et les témoins.
Il est vrai que la même loi, pour assurer le service dans la ville de Paris, y a établi un Bureau central où se trouvent toujours deux juges de paix, lesquels rendent, chacun séparément, les ordonnances nécessaires, que les juges de paix remplissent tour-à-tour ce service pendant vingt-quatre heures.
D'abord, remarquons qu'à la faveur de cette disposition les juges de paix ne reçoivent jamais, ou que très rarement, la garde chez eux, que la crainte qu'elle ne leur amène quelques délinquants leur suggéra le moyen de se faire sceller (sic).
En second lieu, tandis qu'un juge de paix est de service au Bureau central ou au Tribunal de police correctionnelle, ce qui arrive très fréquemment, il ne peut, ni tenir son audience publique, ni entendre les affaires qui demandent une grande célérité, ni tenir d'assemblée de parents, ni apposer de scellés; enfin, les citoyens sont privés de leur conciliateur.
En troisième lieu, les juges de paix ne voulant pas recevoir chez eux les personnes arrêtées, la garde nationale est forcée de les conduire au Bureau central; quelle fatigue pour elle de mener de tous les endroits de Paris à ce centre des hommes prévenus de délits de toute espèce, d'escorter des cadavres, des blessés, des voitures et cabriolets qui ont causé du dommage, etc.!
En quatrième lieu, pendant que la garde nationale est occupée à des transports au Bureau central, les postes sont dégarnis, ils ne peuvent faire de patrouilles pour veiller à la sûreté des personnes et des propriétés.
En cinquième lieu, le plaignant et les témoins ne se déterminent pas facilement à venir d'un faubourg à ce Bureau unique, où l'on conduit, à tous moments, de tout les points de la capitale; s'ils s'y rendent, ils apprennent que leur tour n'arrivera que dans six, huit, douze ou quinze heures; ils perdent patience et se retirent, et il s'ensuit le dépérissement des preuves et par conséquent l'impunité.
En sixième lieu, on conçoit que deux juges de paix chargés de l'expédition d'affaires qui auparavant occupaient jour et nuit quarante-huit commissaires de police, ne peuvent avoir le temps de les examiner, de les approfondir; de là résultent des décisions hasardeuses, surtout à l'expiration des vingt-quatre heures de service, dans ce moment où l'esprit se trouve abattu, exalté et souvent hors de mesure par la veille, par l'excès du travail et par la variété infinie des affaires. Nous en avons un exemple tout récent. Un particulier fait profession de faire passer de faux billets de la Caisse patriotique et de faux assignats; plusieurs déclarations sur ce fait chez le commissaire de police de cette section. Il est enfin arrêté, venant de passer à un marchand éventailliste un faux assignat de 300 livres sur lequel ce marchand lui avait rendu 207 livres. Il est conduit chez le commissaire, il reconnaît l'assignat, il avoue avoir déjà passé plusieurs billets faux. D'après ces aveu et reconnaissance, consignés dans un procès-verbal, le prévenu est conduit au Bureau central; mais les juges de paix, dont le service allait cesser, pressés sans doute de se retirer pour prendre du repos, ne cherchent point à approfondir cette affaire; ils renvoient sur-le-champ ce particulier.
Ce renvoi, ordonné aussi légèrement, a alarmé les membres du Comité de cette section; ils ont trouvé qu'il était dangereux de laisser dans la société un homme qui servait d'instrument aux fabricateurs de faux billets et de faux assignats; ils en ont porté des plaintes à l'Assemblée nationale, au Ministre de la Justice, au juré spécial et au Procureur de la Commune.
En septième lieu, peut-on voir, sans craindre l'arbitraire, que deux juges de paix prononcent, chacun séparément, la détention d'un citoyen domicilié et père de famille! et ce citoyen, qui peut bien avoir été emprisonné innocemment, peut-il être sans inquiétude quand l'officier de police qui a ordonné son arrestation provisoire est le juge qui va prononcer sur la détention définitive?
Voilà une partie des inconvénients que présente la loi du 22 juillet. Un plus long détail serait fastidieux.
Il faut néanmoins convenir que la loi supplémentaire du 29 septembre, en abrogeant les articles xiv, xv et xvi du titre IV du code municipal, a réservé aux commissaires de police la faculté de dresser, sur réquisition ou d'office, des procès-verbaux, dans les cas d'effraction, assassinat, incendie, blessures ou autres délits laissant des traces après eux; mais ils ne peuvent passer outre, toute autre opération leur est interdite. S'ils se transportent dans un lieu où il vient d'être commis un meurtre ou un vol, et que le délinquant ne soit point arrêté, il faut qu'ils attendent une ordonnance du juge de paix, pour faire perquisition. Il n'est aucun citoyen qui ne sente combien sont précieux les premiers moments qui suivent celui du crime, combien le moindre retard est avantageux aux coupables.
Suivant l'article IX, le commissaire de police, après avoir constaté le corps du délit, est obligé de transmettre au juge de paix la minute de son procès-verbal, les objets volés, les pièces de conviction et la personne saisie. Cette transmission ne peut guère se faire que par la voie de la garde nationale, chargée de conduire le prévenu devant le juge de paix; et alors, si les objets volés comportaient 100.000 livres d'assignats, n'a-t-on pas à craindre que le porteur de ces effets ne soit lui-même volé dans la course qu'il a à faire, au milieu d'une foule qui accompagne ordinairement ces sortes d'expéditions?
Il est essentiel pour la liberté que les pouvoirs soient, autant qu'il est possible, indépendants et séparés les uns des autres. Néanmoins les juges de paix, d'après les nouveaux pouvoirs qui viennent de leur être donnés, sont tout à la fois conciliateurs, juges civils, juges de police et juges criminels.
Ainsi, le juge, le magistrat qui était établi pour vivre continuellement au milieu du peuple, protéger le faible dans le premier moment de l'oppression, prévenir les contestations entre les citoyens, étouffer les premières semences de division, si dangereuses dans les familles, se trouve dans le fait, aujourd'hui à Paris, le juge le moins accessible au peuple.
Les juges de paix, citoyens estimables qui ont recueilli la marque de confiance la plus tendre et la plus affectueuse de la part de leurs concitoyens, pourront-ils consentir à se soustraire à leurs besoins instantanés? pourront-ils renoncer sans regret aux fonctions pacifiques pour lesquelles ils ont été établis et auxquelles tout le temps d'un seul homme suffit à peine?
Pourront-ils sacrifier la considération et les bénédictions qu'elles leur attireraient, à une envie déraisonnable de tout faire?
Qu'ils ne s'y trompent point: c'est la faveur qui leur avait mérité ces fonctions saintes, qui a donné l'idée de les charger de toutes leurs nouvelles attributions, comme si le même homme pouvait être partout. Elle doit disparaître, cette faveur; dans le moment où le juge de paix, ce bienfait inestimable de la Constitution française, cesse d'être accessible à tout moment et se trouve transformé en un juge de rigueur et de sévérité, fait pour effrayer et non pour concilier.
Il est donc démontré que les fonctions attribuées aux juges de paix ne peuvent être réunies à celles d'arbitres, de juges pacificateurs; que ces diverses fonctions s'excluent mutuellement par les embarras et la difficulté qu'elles présentent dans leur exercice: il est donc indispensable de rétablir la police antérieure.
Ce mode est en effet le meilleur qui convienne pour le maintien de la police générale de Paris. Il suffit, pour s'en convaincre, de jeter un coup d'œil sur ses avantages.
Par le code municipal du 27 juin 1790, et par la loi relative à l'ordre judiciaire, la police générale est attribuée à la Municipalité. Un commissaire de police élu par les citoyens, à la majorité absolue et qui a sous ses ordres un secrétaire-greffier, aussi nommé par le peuple, est placé dans chacune des quarante-huit sections: il exerce la police sous la surveillance de la Municipalité et de seize commissaires de sections qui le secondent au besoin. On trouve dans cet établissement un officier public toujours en activité; la garde nationale l'a à sa portée; les plaignants et les témoins n'ont qu'un pas à faire pour faire leurs déclarations; il poursuit le délit aussitôt qu'il est connu, et si le délinquant est pris en flagrant délit et qu'il soit domicilié, le commissaire de police ne peut le déposer dans une maison d'arrêt sans la signature d'un commissaire de section. En un mot, on trouve dans l'ensemble du code municipal les avantages de la sûreté et de la célérité. Une expérience de quinze mois l'a montré.
C'est donc le cas de solliciter auprès de l'Assemblée nationale la réformation des décrets des 22 juillet et 21 septembre 1791, et le rétablissement des articles xiv, xv et xvi du titre IV du code municipal.
Extrait des Registres du Comité de la section des Postes.
Du 29 mars 1792.
Le Comité, après avoir entendu le rapport de ses commissaires, a déclaré l'approuver en tout son contenu; en conséquence, a arrêté qu'il serait imprimé et envoyé à l'Assemblée nationale, ainsi qu'aux Comités des quarante-sept autres sections.
Signé: Boussaroque, président; Mareschal, secrétaire-greffier.
Pour expédition conforme à la minute.
Mareschal, secrétaire-greffier.
[363] Je n'ai pas retrouvé le texte de cet arrêté.
[364] Je ne connais pas le texte de cette délibération.
[365] Même observation.
[366] La question de la police de Paris préoccupait à juste titre les sections à cette époque. D'après le journal la Feuille du Jour il y aurait eu, au mois de mars, plusieurs meurtres au Palais-Royal. Au mois d'avril, les journaux renferment plusieurs réclamations de personnes volées par des cochers de fiacres, qui, après avoir extorqué de l'argent à leurs clients, s'étaient enfuis à toute bride. De là, en partie, la lettre de Manuel aux commissaires de police, en date du 5 avril, signalée à la note 361 de la page 103 ci-dessus. A la suite des arrêtés de sections mentionnés au présent procès-verbal de la section des Postes, le Corps municipal avait pris, le 16 avril, un arrêté sur les fiacres qui devaient être, à l'avenir, numérotés (on trouvera le texte de cet arrêté à la Feuille du jour du 23 avril). Puis, sous la pression des sections qui, comme celle des Postes dans la présente séance du 21 avril, réclamaient la réunion de la Commune pour délibérer sur la question de la police de la capitale, le Corps municipal convoqua des Assemblées de sections pour le samedi 12 mai, afin de délibérer sur cette question (Courrier français, du 9 mai).
TRENTE-SEPTIÈME ASSEMBLÉE.—DU LUNDI 23 AVRIL 1792
Assemblée générale de la section des Postes
du lundi vingt-trois avril
mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an quatre de la liberté.
Les citoyens de la section des Postes convoqués en la manière accoutumée d'après l'ajournement fixé en l'Assemblée du 16 de ce mois pour entendre le rapport des commissaires nommés pour l'examen du travail fait par les commissaires recenseurs, relativement à la réintégration des ci-devant gardes françaises[367].
M. Boussaroque, président du Comité a été nommé président, et M. Barré le jeune, secrétaire.
M. le Président s'étant assuré par la liste d'enregistrement que le nombre des citoyens présents était de cent quinze, la séance a été ouverte par la lecture du procès-verbal de la dernière séance, qui a été adopté.
M. le Président a ensuite fait lecture d'une lettre, à lui adressée par M. Maréchal (sic) portant sa démission de la place de secrétaire-greffier de la section.
L'Assemblée en acceptant la démission de M. Mareschal lui a voté des remerciements, a arrêté qu'il en serait fait mention honorable dans le procès-verbal, dont il lui serait délivré extrait[368].
L'Assemblée passant ensuite à l'ordre du jour MM. les commissaires nommés en la séance du 10 de ce mois, ont fait lecture de leur rapport, par lequel ils concluent à ce qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le plan d'organisation et sur le projet de pétition projetés par les commissaires recenseurs[369].
L'Assemblée après avoir entendu la lecture du rapport, et plusieurs citoyens qui avaient obtenu la parole, ainsi que l'observation faite par l'un des commissaires rapporteurs, que vérification faite des délibérations des vingt-neuf sections, nommées en l'art. 13 du procès-verbal des commissaires recenseurs[370], un grand nombre desdites délibérations ne contiennent aucun pouvoir de dresser un plan d'organisation, ni pétition; considérant que le plan d'organisation, et la pétition rédigés par les commissaires qui avaient été nommés pour constater le résultat des délibérations concernant les anciens gardes françaises, tendent évidemment à désorganiser la gendarmerie nationale à pied et les trois régiments de ligne précieux, créés par l'Assemblée nationale; convaincue d'ailleurs de l'inexactitude de l'énonciation de l'art. 13 du procès-verbal desdits commissaires;
A adopté presqu'à l'unanimité l'avis de ses commissaires recenseurs; en conséquence, a déclaré qu'il n'y avait pas lieu à délibérer sur le plan d'organisation et sur la pétition projetés par les commissaires recenseurs;
A arrêté que la délibération du 13 mars dernier par laquelle elle avait émis son vœu pour la formation de nouvelles compagnies serait rapportée et regardée comme non-avenue;
A déclaré qu'elle improuve la conduite des commissaires recenseurs, notamment la conduite des commissaires par elle nommés[371];
A arrêté en outre que le rapport des six commissaires et la présente délibération seraient imprimés et remis au Département, à la Municipalité et aux quarante-sept autres sections[372].
Fait et arrêté en l'Assemblée générale de la Section des Postes les jour et an susdits.
NOTES:
[368] Mareschal fut remplacé par Joly, le 5 mai (cf., à cette date, le registre des Assemblées primaires de la section: Arch. de la Seine, VD* 1002).
[369] Voici le texte de ce rapport d'après la pièce imprimée in-4o qui est à la Bibliothèque de la Ville de Paris, recueil factice 10065* in-4o:
SECTION DES POSTES
EXTRAIT
du registre des délibérations des Assemblées générales de la section des Postes, du lundi 23 avril 1792, l'an 4e de la liberté.
Les Citoyens de la section des Postes, convoqués en la manière accoutumée, et assemblés pour entendre le rapport des commissaires nommés pour l'examen du travail fait par les commissaires-recenseurs, relativement à la réintégration des ci-devant gardes-françaises.
L'un des rapporteurs a dit:
Messieurs,
Par votre délibération du 16 de ce mois, vous avez chargé six commissaires d'examiner le procès-verbal dressé par les commissaires que les sections avaient nommés, pour constater le résultat de leurs délibérations sur le sort des anciens gardes-françaises, et autres, ci-devant soldés par la Ville de Paris, et un projet de règlement fait par eux pour ce qu'ils appellent la réintégration de ces premiers soldats de la révolution.
Le premier objet qui a fixé l'attention de vos commissaires a été d'examiner si ceux des sections s'étaient renfermés dans les bornes que la loi leur prescrit; il nous a paru qu'ils s'en étaient écartés. La loi du 22 mai 1791 sur le droit de pétition, porte, art. vi, que les commissaires nommés par les sections pour se rendre à la maison commune, afin d'y comparer et constater les résultats des différentes délibérations, ne pourront prendre aucune délibération, ni changer, sous aucun rapport, le résultat de celles prises par chaque section. L'art. vii porte que, dans le cas où les sections ne se seraient pas accordées sur des objets soumis à leur délibération, les commissaires réduiraient la proposition sur laquelle il y aurait diversité d'opinions, de manière que les sections puissent délibérer par oui ou par non.
Le sens de ce dernier article est bien clair: il oblige les commissaires à reporter dans les sections les différents points sur lesquels elles ne sont point d'accord, pour qu'elles se déterminent sur chacun par oui ou par non. Il en résulte que la loi ne les autorise pas à faire un projet de règlement et de pétition, projet divisé en titres et en articles, qui ne peut être que le produit de délibérations qui leur sont interdites par l'article vi.
Il est vrai que le procès-verbal rédigé par les commissaires des sections porte, art. xiii, que vingt-neuf sections ont chargé leurs commissaires de se concerter entre eux, tant sur le mode de cette réintégration et formation, que pour dresser un projet de pétition à l'Assemblée nationale pour, lesdits mode et projet de pétition reportés aux sections, être pris par chacune d'elles un vœu définitif sur ces objets.
La première question à examiner est de savoir si les vingt-neuf sections ont pu donner à leurs commissaires un droit que la loi leur a refusé expressément, parce qu'elle a prévu l'abus qu'on en pourrait faire? Non, sans doute, les commissaires devaient être les premiers à rejeter ce pouvoir illégal qu'on leur offrait; ils ont d'autant plus de tort de ne l'avoir pas fait, qu'ils ne peuvent prétexter l'ignorance de la loi, puisqu'eux-mêmes ont transcrit en tête de leur procès-verbal les deux articles qui le condamnent.
Mais, Messieurs, est-il vrai que vingt-neuf sections les aient autorisés à se concerter entr'eux pour faire ce projet de règlement? Il n'est pas permis à la section des Postes de le croire. En effet, nous trouvons son nom inscrit au nombre des vingt-neuf que l'on dit avoir donné cette autorisation et il est constant par le procès-verbal de la séance qu'elle n'a point donné ce pouvoir à son commissaire. D'après cet exemple, le seul que la section puisse vérifier par elle-même, n'est-elle pas fondée à croire que plusieurs autres commissaires se seront permis la même chose? Il lui est doux, au moins, de pouvoir présumer que l'infraction à la loi dont nous nous plaignions il y a un instant ne provient point du fait des sections, mais bien de celui des commissaires qui avaient surpris leur confiance (sic).
Vos commissaires devraient peut-être, Messieurs, borner ici leur rapport, et se contenter de vous avoir prouvé que le projet de votre délibération. Mais ils ont cru que quelques observations succinctes sur plusieurs des articles de ce projet, vous démontreraient encore plus clairement combien les commissaires des sections ont outrepassé leurs pouvoirs.
Nous allons vous les soumettre.
L'article i porte: «Tous les gardes-françaises qui ont servi la révolution à la date du premier juin 1789, ensemble les canonniers et autres soldats de divers régiments sous les drapeaux de la liberté, à compter du 12 juillet 1789, et qui ont été inscrits ou enrôlés, à la Municipalité ou dans les districts de Paris, jusques et y compris le dernier octobre suivant, seront réintégrés.»
Cet article, conçu en termes trop généraux, pourrait entraîner de très grands inconvénients; les ci-devant gardes-françaises n'ont pas été les seuls qui se soient rangés sous les drapeaux de la liberté, à dater du 12 juillet 1789. Beaucoup de soldats des autres régiments accoururent en foule à Paris pour s'incorporer aux bataillons parisiens; le plus grand nombre, sans doute, était animé du zèle le plus pur pour la liberté et la révolution; mais nous ne pouvons pas nous dissimuler que plusieurs ne furent conduits à Paris que par l'espoir d'une augmentation de solde, le goût du libertinage et de l'indiscipline. Ceux-ci ne tardèrent pas à être reconnus, et les différentes compagnies du centre furent obligées successivement de les rejeter de leur sein. Rappeler ces différents individus, les confondre dans la formation de nouvelles compagnies avec les vrais soldats de la liberté, ce serait faire injure à ceux-ci, et exposer la Ville de Paris à des troubles toujours renaissants, en récompensant le vice du même prix que les vertus civiques.
L'article ii porte: «Toux ceux ci-dessus désignés qui seraient engagés dans divers régiments, seront relevés de leurs engagements pour entrer dans la nouvelle formation; il sera pourvu aux moyens de faciliter leur retour, ainsi que celui des soldats qui pourraient être retirés dans les départements».
Six sections seulement ont demandé que tous les ci-devant gardes-françaises et autres soldats qui seraient engagés dans d'autres corps, eussent la faculté d'être compris dans ladite formation.
Comment les commissaires ont-ils pu présenter comme vœu général un article qui tend à désorganiser la gendarmerie nationale et trois régiments créés par la loi expresse, surtout quand cette loi, pour les récompenser des services qu'ils ont rendus à la cause de la liberté, les affecte à la garnison de Paris, d'où ils ne peuvent être tirés que par un décret du Corps législatif. Qui est-ce qui ignore d'ailleurs que le plus grand nombre des braves gardes-françaises sont aujourd'hui officiers ou sous-officiers dans la gendarmerie nationale et dans les trois régiments de ligne, et que l'Assemblée nationale s'est réservée et doit s'occuper de faire placer ou récompenser ceux qui ne le sont pas.
L'article v porte: «Les soldat réintégrés et admis dans la nouvelle formation jouiront des droits de citoyens actifs.»
Deux sections seules ont formé cette demande subversive de toutes les lois, et notamment de celle du 28 février 1790, rendue sur les bases et principes de la constitution militaire, qui porte, art. vi: «qu'aucun soldat ne pourra exercer les droits de citoyen actif dans les endroits où il est en garnison.» Comment les commissaires, nommés par le recensement des vœux des sections, ont-ils pu se permettre de soumettre à votre délibération un article si formellement contraire à la loi, si ce droit de citoyen actif devenait un privilège pour les gardes soldés de Paris, tandis que les autres soldats en sont privés par la loi?
L'article vi, qui porte que la dénomination de cette nouvelle formation sera Garde nationale soldée, est encore contraire à la loi; les rédacteurs de cet article auraient dû se rappeler que, pour qu'il n'y eût plus de garde nationale soldée, l'Assemblée a mis en régiments et en gendarmerie à pied et à cheval celle qui existait à Paris; au surplus, cet article est encore de la création des commissaires, puisque nous ne trouvons dans le procès-verbal aucune section qui l'ait demandé.
Le titre II, article xii, porte: «Les citoyens formant ces compagnies ne seront pas casernés; mais ils seront tenus de loger dans l'arrondissement de leurs bataillons respectifs, et ils ne pourront jamais marcher qu'avec la garde nationale volontaire.»
Les réflexions sur cet article se présentent en foule. Vos commissaires ne feront que vous les indiquer. Vous devez vous rappeler, Messieurs, combien vous avez formé de plaintes, dans les commencements de la Révolution, sur les embarras qu'occasionnait dans le service le défaut de discipline dans les compagnies du centre: ce n'a été qu'à la longue, et au moyen du casernement, que la discipline s'y est établie et que le service s'y est fait d'une manière réglée. Le projet des rédacteurs de l'article est-il de nous remettre dans l'état dont nous avons eu tant de peine à sortir? Heureusement ce reproche ne peut pas tomber sur les sections; dans le recensement de leurs différents vœux, relatés dans le procès-verbal des commissaires, il n'est fait mention d'aucune qui ait formé cette demande. Ainsi ce serait encore aux seuls commissaires rédacteurs que nous aurions l'obligation de ce genre d'anarchie que l'on veut semer dans la capitale.
Titre IV. Du traitement. Ce titre ne contient que deux articles, dont le premier porte que le traitement sera une dépense nationale, et le second fixe le traitement de chaque individu.
Le calcul de ce dernier article, en supposant les compagnies de cent hommes, donnerait une dépense annuelle de 4.873.900 livres.
Les rédacteurs ont bien senti que la Commune de Paris, qui ne peut même pas suffire à ses dépenses ordinaires, ne pouvait pas se charger d'un accroissement de dépense aussi considérable; aussi demandent-ils que cette dépense soit nationale; mais, croyez-vous, Messieurs, que les députés des quatre-vingt-deux autres départements veuillent grever la Nation de cette nouvelle dépense, pour l'entretien de soldats qui ne seraient d'aucune utilité au reste du royaume, puisqu'il est dit dans l'article xii du projet de règlement, qu'ils ne pourraient jamais marcher qu'avec la garde nationale volontaire? Croyez-vous, Messieurs, que dans ce moment-ci où la guerre est déclarée, l'Assemblée nationale consentît à désorganiser trois régiments qui peuvent voler à la défense des frontières, si le besoin le requiert, pour entretenir chèrement dans Paris 6.000 hommes inutiles à sa garde?
D'après ces considérations, vos commissaires vous proposent, Messieurs, d'arrêter qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur le plan d'organisation, ni sur la pétition, rédigés par les commissaires recenseurs.
L'Assemblée, après avoir entendu la lecture du rapport ci-dessus, et plusieurs citoyens qui avaient obtenu la parole, ainsi que l'observation faite par l'un des commissaires rapporteurs, que, vérification faite des délibérations des vingt-neuf sections nommées en l'article xiii du procès-verbal des commissaires recenseurs, un grand nombre des dites délibérations ne contenant aucun pouvoir de dresser un plan d'organisation, ni pétition; considérant que le plan d'organisation et la pétition, rédigés par les commissaires qui avaient été nommés pour constater le résultat des délibérations concernant les anciens gardes-françaises, tendent évidemment à désorganiser la gendarmerie nationale à pied et trois régiments de ligne précieux créés par l'Assemblée nationale; convaincue d'ailleurs de l'inexactitude de l'énonciation de l'article xiii du procès-verbal desdits commissaires recenseurs;
A adopté presque à l'unanimité l'avis de ses commissaires rapporteurs; en conséquence, a déclaré qu'il n'y avait pas lieu à délibérer sur le plan d'organisation et sur la pétition, projetés par les commissaires recenseurs;
A arrêté que sa délibération du 13 mars dernier, par laquelle elle avait émis le vœu pour la formation de nouvelles compagnies serait rapportée et regardée comme non-avenue;
A déclaré qu'elle improuve la conduite des commissaires recenseurs, et notamment la conduite du commissaire par elle nommé;
A arrêté en outre que le rapport des six commissaires et la présente délibération seraient imprimés et remis au département, à la municipalité et aux quarante-sept autres sections.
| Signé: | Boussaroque, président, |
| Barré le jeune, secrétaire. | |
Pour expédition conforme à l'original. |
|
| Mareschal, secrétaire-greffier. | |
A Paris, de l'imprimerie de Pellier,
imprimeur de la section des Postes et du Bataillon de Saint-Eustache, rue des Prouvaires, no 61.
[370] Il s'agit ici de la pièce indiquée à la note 337 de la page 90 ci-dessus.
[371] C'est-à-dire: «du commissaire». En effet, le 13 mars, l'Assemblée n'avait nommé qu'un seul commissaire, le sieur Desvieux.
[372] On voit que la section des Postes avait complètement changé d'avis depuis sa séance du 13 mars. Cette volte-face était due, comme l'indique le procès-verbal, au rapport des six commissaires nommés le 16 avril.—Je n'ai malheureusement pas retrouvé le rapport et l'arrêté dont l'impression est signalée au présent procès-verbal. Mais l'opposition de la section des Postes, qui entraîna sans doute celle d'autres sections, n'arrêta pas les promoteurs du mouvement en faveur de la réintégration des ci-devant gardes françaises dans la garde nationale soldée. C'est le sieur Buirette-Verrières, qui, dès le 9 avril (voyez ci-dessus, p. 90, n. 338) avait pris la tête de ce mouvement. Buirette-Verrières, ci-devant attaché au tribunal de la maison du comte d'Artois et depuis défenseur officieux, petit homme bossu très remuant, s'était fait, déjà au mois de février 1791, l'avocat attitré des gardes françaises et des vainqueurs de la Bastille (voyez la pièce bibliographiée par M. Tourneux, sous le no 6914 et cf. le Contre-Poison des 15 février et 12 mars 1791, pp. 127-128 et 299). Verrières était ainsi tout désigné, en avril 1792, pour prendre en main la cause des gardes françaises. C'est dans ses papiers que se trouve l'original du procès-verbal du recensement des nouvelles délibérations prises par 34 sections sur la question qui nous occupe, avec le vœu émis par elles sur chacun des vingt et un articles du mode de réintégration dont il a été question ci-dessus, p. 90, n. 338: on trouvera ce procès-verbal manuscrit aux Archives nationales, F7 4622 (Tuetey, t. VI, no 1285).
Au mois de mai, nous retrouvons Verrières en relations avec les gardes françaises qui s'adressent à lui pour la rédaction d'une nouvelle pétition à l'Assemblée nationale (voyez Tuetey, t. VI, nos 1286 à 1289). Au mois de juin, Buirette-Verrières rédige la pétition (voyez Tuetey, t. VI, no 1291, et Tourneux, no 6900). Nouvelle pétition à la Législative du même Buirette-Verrières en faveur des gardes françaises, le 15 juillet 1792 (Tuetey, t. VI, no 1298). Le 16 juillet, la Législative décrétait la création de nouvelles divisions de gendarmerie à pied dans lesquelles devaient être versés les ci-devant gardes françaises; un registre d'inscription devait être ouvert pendant 15 jours, à Paris, au greffe de la Municipalité (décret, sanctionné le 18 juillet; Duvergier, t. IV, p. 248). Le 20 juillet, le Corps municipal, conformément à ce décret, arrêtait l'ouverture de ce registre, du 23 juillet au 7 août (voyez ci-après, p. 137, n. 418).
Enfin le 10 août arriva. L'une des premières mesures de la Législative fut de donner satisfaction aux clients de Buirette-Verrières par son décret du 17 août qui organisait définitivement les nouvelles compagnies de gendarmerie à pied (Duvergier, t. IV, p. 320, et cf. Tuetey, t. VI, nos 1302 et 1303). Dès le lendemain la Commune ordonnait aux sections de procéder à l'application de ce décret (voyez plus loin, p. 197 et n. 581).
TRENTE-HUITIÈME ASSEMBLÉE.—DU MERCREDI 6 JUIN 1792
Assemblée générale de la section des Postes
du mercredi six juin mil
sept cent quatre-vingt-douze, l'an quatre de la liberté.
Les citoyens actifs de la section des Postes, convoqués sur une pétition de 74 d'entre eux et réunis au nombre de cent trente-deux pour délibérer sur un arrêté de la Municipalité, du premier du courant, concernant les processions de la Fête-Dieu[373]; d'après les principes consacrés par la Constitution, qui garantit à tout homme le droit d'exercer le culte religieux auquel il est attaché, laisse aux citoyens la faculté de tendre et tapisser l'extérieur de leurs maisons ou de s'en dispenser, met la Garde nationale hors de réquisition pour assister aux cérémonies d'un culte quelconque, et cependant enjoint aux commissaires de police, et aux commandants de la garde nationale, de veiller au maintien de l'ordre public [et] sur l'intérêt de tous les citoyens, qui ne permet pas à l'occasion de la Fête-Dieu de suspendre la liberté et l'activité du commerce;
M. Boussaroque ayant été nommé président et M. Vanier, l'aîné, secrétaire;
La matière mise en délibération, et après une ample discussion, l'Assemblée générale de la section des Postes, ayant remarqué que l'arrêté de la Municipalité ne contient aucunes dispositions prohibitives[374], et que la presque totalité des citoyens a manifesté le désir d'assister comme de coutume aux processions de la Fête-Dieu, a arrêté qu'il n'y avait pas lieu à délibérer sur la pétition[375].
Fait et arrêté en l'Assemblée générale de la section des Postes, les jour et an susdits.
NOTES:
[373] On trouvera cet arrêté du Corps municipal au Moniteur du 3 juin 1792, réimpression, t. XII, p. 550. Il a été imprimé en un in-8o de 3 p., dont il existe un exemplaire à la Bibliothèque de la Ville de Paris, recueil factice 10073* (Tourneux, no 6083).
[374] En effet l'arrêté de la Municipalité se borne à supprimer l'obligation pour les habitants de décorer leurs maisons, et celle, pour la garde nationale de se mettre sous les armes.
[375] Cette décision de l'Assemblée de la section des Postes semble impliquer que les gardes nationaux de la section seraient réquisitionnés «comme de coutume», quelles que puissent être leurs opinions religieuses et quelque entrave que la célébration de la Fête-Dieu pût apporter au commerce. La section des Postes était, on le voit, une des sections dont la population était restée le plus pratiquante.
TRENTE-NEUVIÈME ASSEMBLÉE.—DU VENDREDI 15 JUIN 1792
Assemblée générale de la section des Postes
du vendredi quinze juin mil
sept cent quatre-vingt-douze, l'an quatre de la liberté.
L'Assemblée générale de la section des Postes, légalement convoquée sur la pétition de cinquante citoyens actifs tendant à délibérer sur la pétition incivique autant qu'inconstitutionnelle des prétendus huit mille citoyens gardes nationales[376] et aviser au moyen de faire punir les agitateurs du peuple qui se sont servis de la voie de l'état-major de la garde nationale parisienne pour faire passer dans les bataillons cette pétition, ouvrage de ténèbres; l'Assemblée composée de cent quinze citoyens, et après une ample discussion;
A arrêté: 1o qu'elle improuve formellement et voue à l'indignation, au mépris public et du monde entier, cet ouvrage et ses auteurs, comme portant une atteinte coupable à la Constitution;
2o Que ce sentiment sera porté à l'Assemblée nationale par une députation de vingt membres qui seront chargés de présenter l'assurance la plus ferme et la plus constante de son entier dévouement à la constitution et à la loi.
3o Que le présent arrêté sera envoyé le plus promptement possible aux quarante-sept autres sections avec invitation de réunir comme elle va le faire, toutes les preuves qu'il sera possible de se procurer, de l'existence de l'infâme coalition formée pour diviser les citoyens par cette pétition et surprendre perfidement leurs signatures, à l'effet d'insulter aux travaux de l'Assemblée nationale, à la loi, et à l'honneur des citoyens; l'Assemblée arrête en outre que les quarante-sept autres sections seront priées de réunir lesdites preuves en corps, afin de les mettre sous les yeux de l'Assemblée nationale, et demander une justice éclatante contre les auteurs, fauteurs et complices de cet attentat.
Et pour porter le présent arrêté à l'Assemblée nationale, l'Assemblée a nommé pour ses commissaires députés MM. Renard, Desvieux, Basty, Didelot, Lefebvre, David, Jams (sic), Gambier, Bellet fils, L'anglois (sic), Moreau, Régnier[377], Bachelard, Frosté, L'Héritier fils, Gregy, Corneille, Ybert, Guillot et Praviel (sic)[378].
Fait et arrêté en l'Assemblée générale de la section des Postes, les jour et an susdits.
NOTES:
[376] La pétition dite des huit mille, contre le décret du 8 juin organisant un camp de 20.000 fédérés sous les murs de Paris en vue de la fête de la Fédération du 14 juillet, fut présentée à la Législative dans sa séance du 10 juin. Sur cette pétition, voyez mon ouvrage sur La Commune du 10 août 1792.
[377] Régnier, Jacques-Hubert, miroitier, 40 ans, rue Montmartre, 255, membre du Comité de la section, devint après le 10 août électeur de la section.
QUARANTIÈME ASSEMBLÉE.—DU 23 JUIN 1792.
Assemblée générale de la section des Postes
du samedi vingt-trois juin
mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an quatre de la liberté.
En l'Assemblée générale de la section des Postes convoquée par M. le président et MM. les commissaires de ladite section sur la pétition motivée de plus de cinquante citoyens actifs en date du vingt-un (sic) de ce mois, et composée de cent seize citoyens et plus, et présidée par M. Bellet, président de MM. les commissaires de ladite section;
Pour remplir les fonctions de secrétaire, l'Assemblée a nommé par acclamation Jean-François Chignard[379], l'un d'eux; lequel après avoir accepté cette mission en a rempli les fonctions.
L'un des membres, ayant obtenu la parole sur l'objet de la pétition qui tendait à délibérer sur les événements qui ont eu lieu mercredi dernier dans Paris, notamment dans le château des Thuileries (sic)[380], après avoir retracé ces événements, rappelle les arrêtés du Directoire du Département pris relativement à ces circonstances, les arrêtés et délibérations de la Municipalité, la conduite du Maire et officiers municipaux, et celle du commandant général de la garde nationale; [il] a proposé d'arrêter:
1o Que l'Assemblée de la section déclare que M. Pétion, maire de Paris, et M. le commandant général de la garde nationale parisienne ont perdu la confiance publique; 2o qu'on sollicitera la convocation d'une cour martiale pour juger M. Ramainvilliers, commandant général; 3o que la section des Postes enverra une députation au Roi pour lui témoigner combien elle est sensible aux outrages que la dignité royale a reçus dans sa personne; 4o qu'il sera pareillement envoyé une députation au Corps législatif, pour solliciter une vengeance éclatante des fauteurs et instigateurs des événements du 20 juin; 5o enfin que l'arrêté sera imprimé et envoyé aux 47 autres sections et aux 60 bataillons.
La discussion s'étant ouverte sur cette proposition, un autre membre a proposé d'oublier les événements qui s'étaient passés, et à (sic) ne prendre que des arrêtés de paix, tendant à faire cesser la division qui paraît s'être manifestée entre les citoyens dans ces malheureuses circonstances.
Un autre membre a proposé de faire une adresse à toutes les sections des différents faubourgs de Paris, et même à toutes les autres sections de la ville, dans les mêmes vues que le préopinant.
Un autre citoyen, en appuyant cette motion, a proposé, pour exécuter l'arrêté qui serait pris à cet égard, de provoquer une Assemblée, par députation, au nom de tous les citoyens tant des faubourgs que de la ville, pour témoigner au Roi les regrets des citoyens sur les événements qui ont eu lieu.
La discussion ayant été fermée, un membre a proposé, de déclarer qu'il n'y avait pas lieu à délibérer sur la première proposition ci-dessus, et, cette motion mise aux voix, l'Assemblée a déclaré qu'il n'y avait pas lieu à délibérer sur cette proposition.
Ayant mis ensuite les autres propositions aux voix, l'Assemblée a arrêté à l'unanimité qu'il sera fait une adresse à tous les citoyens de la ville de Paris relativement aux événements qui ont eu lieu le 20 de ce mois, pour resserrer les liens de l'union et de la confraternité, et, à l'effet de rédiger ladite adresse, l'Assemblée a nommé MM. Légier, Renard, Thévenin, Desvieux, et Basty, lesquels rapporteront la rédaction de l'adresse dans une nouvelle Assemblée, où elle sera examinée et arrêtée définitivement, à l'effet de quoi l'Assemblée s'est ajournée à demain midi.
Fait et arrêté en l'Assemblée générale de la section des Postes les jour et an susdits.
NOTES:
[379] Chignard, Jean-François, procureur au ci-devant Châtelet, membre du Comité de la section (d'après l'Almanach général du département de Paris, pour l'année 1791).
[380] Il s'agit de la journée fameuse du 20 juin 1792.
QUARANTE-ET-UNIÈME ASSEMBLÉE.—DU DIMANCHE 24 JUIN 1792.
Assemblée générale de la section des Postes
du dimanche vingt-quatre
juin mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an quatrième de la liberté.
Et, le dit jour vingt-quatre juin sur les midi, l'Assemblée, convoquée en la manière ordinaire au lieu de ses séances accoutumées, et réunie au nombre de plus de cent citoyens, M. le Président a proposé de nommer un secrétaire en l'absence du secrétaire-greffier, et l'Assemblée a nommé par acclamation M. Légier.
A cet effet, après avoir entendu la lecture du procès-verbal de la dernière séance et les observations faites sur la rédaction, a arrêté qu'il n'y serait rien changé, et, passant ensuite à l'ordre du jour, il a été fait lecture par M. Desvieux de l'adresse aux citoyens de la capitale. Cette adresse ayant été adoptée à l'unanimité, il a été arrêté que cette adresse serait imprimée, affichée et envoyée aux 47 autres sections; en conséquence, il a été ouvert une souscription parmi les citoyens, et la collecte a monté à la somme de cent six livres deux sols, laquelle somme a été remise à l'instant au sieur Pellier, imprimeur, qui s'est chargé de les (sic) imprimer au nombre de deux mille exemplaires, et de les faire afficher au nombre de quinze cents exemplaires, et les cinq cents autres remis au Comité.
L'Assemblée a de suite nommé MM. Guillot, Gambier, Giffay (sic), Grappin, David, Gautier, Perrol, Le Roux, Bonnelle, Pruneau, Jouaud et Auger à l'effet de porter lesdits exemplaires dans les 47 autres sections[381].
Lecture faite du présent procès-verbal, l'Assemblée en arrête la rédaction.
Fait et arrêté en l'Assemblée générale les jour et an susdits.
NOTES:
[381] Nous possédons encore deux exemplaires de l'Adresse des citoyens de la section des Postes à tous les citoyens de la ville de Paris, en format d'affiche in-folio plano: Bib. de la Ville de Paris, collection d'affiches 10569 A, portef. no 2, 1re partie, pièce 31; et en un in-4o de 3 p., ibid, rec. fac. 10065-66* in-4o, 2e dossier des chemises de sections. Voici ce texte:
ADRESSE
DES CITOYENS DE LA SECTION DES POSTES
A tous les citoyens de la Ville de Paris.
«L'Assemblée nationale constituante remet le dépôt de la Constitution à la fidélité du Corps législatif, du Roi et des Juges, à la vigilance des Pères de famille, aux Épouses et aux Mères à l'affection des jeunes Citoyens, et au courage de tous les Français.»
(§ 4 de l'art. 8 du tit. vii de la Constitution.)
Frères et Concitoyens,
Calmons les émotions trop vives de nos cœurs, et l'effervescence de nos esprits! Arrêtons..... Respirons un moment..... Écoutons les conseils de la raison, l'amour fraternel, et l'égalité. Où veut-on nous entraîner? Quel malheur nous a menacés! Peu s'en est fallu que l'ardeur même de notre attachement à la Constitution ne servit ceux qui veulent la détruire. Tremblons de nous exposer aux maux affreux et aux éternels regrets qu'entraînent l'anarchie et la guerre civile. La guerre civile! Pourquoi faut-il prononcer ce mot terrible? Oui, des mains perfides agitent sur nos têtes ton funeste flambeau. Des méchants se glissent parmi nous, veulent nous égarer et nous souiller de l'horreur de leurs crimes. Eh! quoi, le citoyen va donc haïr le citoyen! Le fils s'armerait-il contre son père? Les frères combattraient-ils leurs frères?... Ou bien serions-nous réduits à nous fuir les uns les autres? Quel serait l'effet de cette funeste division! Voyez l'affreux désespoir et la famine qui en seraient les suites. Voilà, voilà les maux qu'enfanterait la guerre civile.
Écartons ces images hideuses. Citoyens, si nous nous séparons, l'ennemi va pénétrer au milieu de nous. Nos débats ont fait tressaillir de joie le cœur de l'aristocrate; le méchant a souri un moment. Qu'ils tremblent! Nous avons tous juré la Constitution; le premier devoir de l'homme est d'être fidèle à son serment. Rallions-nous donc autour de la Constitution. Repoussons des soupçons qui nous outragent. Que la sainte amitié soit toujours au milieu de nous. Rapprochons nos cœurs, nous les sentirons tous brûler du feu sacré du patriotisme. Puisse une union si précieuse, si nécessaire, ne jamais cesser d'être le gage de notre bonheur. Ah! que tous les Citoyens en portent ensemble la tendre expression! Nous touchons au 14 juillet. Le moment approche où, dans ce lieu qu'on voudrait livrer à la guerre civile, nous devons renouveler ce serment solennel fait à l'Être Suprême, d'obéir à la loi, de vivre libres ou mourir. Frères et Concitoyens, étonnons encore l'Univers de la grandeur et de la générosité des Français.
Tandis que la guerre nous entoure, conservons la paix au milieu de nous. N'oublions jamais que l'union fait la force et que le moment où elle est plus nécessaire, est celui où l'ennemi est debout, et s'avance pour nous combattre.
EXTRAIT
du registre des délibérations des Assemblées générales de la section des Postes.
Appert la dite Assemblée avoir arrêté l'Adresse ci-dessus, et ordonné qu'elle serait imprimée, affichée et envoyée dans les quarante-sept autres sections.
Bellet, président,
Légier, secrétaire.
A Paris, de l'imprimerie de Pellier,
Imprimeur de la section des Postes et du Bataillon de Saint-Eustache, rue de Prouvaires, no 61.
QUARANTE-DEUXIÈME ASSEMBLÉE.—DU MARDI 26 JUIN 1792
Assemblée générale de la section des Postes
du vingt-six juin mil sept
cent quatre-vingt-douze, l'an quatrième de la liberté.
L'Assemblée de la section des Postes, tenue au lieu ordinaire, présidée par M. Bellet, président du Comité de la section, M. Desvieux faisant volontairement les fonctions de secrétaire, cette Assemblée ayant été déclarée libre, et la sentinelle ayant été relevée eu égard à son objet[382].
L'Assemblée après avoir entendu le rapport, de M. le commandant du bataillon, des fonds provenant d'une collecte faite pour les frais de la guerre, qui montait à cinq mille cent quatre-vingt-onze livres et une croix d'or, deux paires de boucles et plusieurs pièces en or et argent de différents pays, [faite] parmi les membres composant le bataillon de Saint-Eustache, et partie (sic) de la section; M. le commandant a engagé les membres présents qui n'y avaient pas coopéré à mettre leur offrande sur le bureau, et la somme a été augmentée de celle de cent quatre-vingt-douze livres, douze jetons et deux médailles d'argent; ensuite l'Assemblée s'est occupée de nommer des commissaires pour finir cette collecte dans les maisons de la section où elle n'a point été faite, et ont été nommés MM. Renard, Régnier, Bellet fils, Charlard, Bachelard et Valentin, pour, après en avoir prévenu M. le commandant du bataillon de la Jussienne, faire la collecte dans les maisons des rues Montmartre, à droite, depuis la pointe Saint-Eustache jusqu'au passage du Saumon; depuis le passage du Saumon, rue Montorgueil à droite, et Comtesse d'Artois aussi à droite, jusqu'à la pointe Saint-Eustache; ainsi que dans toutes les maisons de la rue Tiquetonne; et en faire le rapport à la prochaine Assemblée, indiquée pour samedi trente du présent, et, pour supplément en cas de refus de la part desdits commissaires, n'y en ayant aucun de présent à l'Assemblée, ont été nommés MM. Desvieux, Charmot, Favreau, Assout, Bonnet et Duhamel, lesquels ont été chargés de s'assurer si les premiers commissaires nommés acceptaient, et, dans le cas de refus de leur part, [ils] feraient cette collecte et en rapporteraient le montant à l'Assemblée de samedi prochain, pour être la somme en provenant jointe à celles ci-dessus, et être dans la dite Assemblée nommé des commissaires en députation à l'Assemblée nationale pour y faire l'offrande du montant total au nom de la section des Postes et du bataillon de Saint-Eustache; a été aussi décidé que, dans le discours qui y serait prononcé à ce sujet, il y (sic) serait fait mention d'une fille domestique, nommée Marie-Jeanne-Elisabeth Roissy, domestique de M. Hury, marchand mercier, rue du Four, no 3, qui, n'ayant autre chose à donner, a fait l'offrande de sa croix d'or, et des sieurs et dame Bachenon qui, n'ayant non plus autre chose à donner, ladite dame a fait l'offrande de sa pièce de mariage et d'une pièce d'argent d'Italie portant l'empreinte du pape Grégoire XIII.
Et, pour que les commissaires nommés pour cette collecte soient autorisés à la faire, il leur sera délivré par M. le Président tout extrait[383] dudit procès-verbal fait à ladite Assemblée de la section des Postes, lesdits jour et an que dessus, l'an 4 de la liberté.
NOTES:
[382] Pour la première fois, par cet arrêté, l'Assemblée générale de la section des Postes admettait les citoyens passifs à assister à ses délibérations. On se souvient que la proposition en avait déjà été faite sans succès à la séance du 13 mars 1792 (voyez ci-dessus, p. 85, n. 329). Toutefois, dans la présente séance du 26 juin, la publicité des séances était proclamée d'une manière exceptionnelle, pour la séance seulement, et «eu égard à son objet»: la collecte pour les frais de la guerre.
[383] Le texte porte: «tant extrait». La phrase étant inintelligible, j'ai supposé que le copiste avait mal lu et que la minute portait «tout» et non pas «tant».
QUARANTE-TROISIÈME ASSEMBLÉE.—DU MERCREDI 27 JUIN 1792
L'Assemblée générale de la section des Postes convoquée en la manière accoutumée au lieu de ses séances ordinaires et réunie au nombre de plus de cent citoyens, Monsieur Bellet, président du Comité ayant été nommé pour la présider, et sur la proposition de nommer un secrétaire, M. Légier a été nommé pour remplir cette fonction.
L'Assemblée, avant de passer à l'ordre du jour, a reçu deux députations, la 1re de la section de la Croix-Rouge et la seconde de la section de l'Arsenal; la première relative aux événements du 20 juin dernier[384], et la seconde à l'adresse faite par la section des Postes aux citoyens de Paris[385].
L'Assemblée passant ensuite à l'ordre du jour, il a été fait une motion tendant à ce qu'il fût nommé quatre censeurs pour veiller à l'ordre et rappeler les citoyens qui s'en écarteraient, et que, dans le cas où ils y persisteraient, ils fussent invités à sortir.
Cette motion mise aux voix, l'Assemblée l'a adoptée.
Lecture ayant été faite de l'arrêté du Corps municipal qui devait faire l'objet de la délibération, l'Assemblée, après avoir entendu plusieurs citoyens, a fermé la discussion sur cet objet et adopté l'arrêté suivant qui lui a été proposé:
L'Assemblée, délibérant sur l'arrêté du Corps municipal du 18 du présent[386];
Considérant que le salut public et la tranquillité de la capitale sollicitent la conservation des soixante bataillons de la garde nationale de Paris;
Que, dans ce moment surtout, il est extrêmement important de ne pas altérer l'unité de la force armée; que ce serait désorganiser entièrement la garde nationale parisienne, dont l'organisation a été arrêtée par les décrets de l'Assemblée constituante, jeter une pomme de discorde entre tous les citoyens, lui ôter toutes ses habitudes, dans des instants où il est si essentiel de l'attacher à ses drapeaux; que ces soixante drapeaux offrent le gage sans cesse renaissant de la fraternité qui existe entre tous;
A l'égard de ______________ (sic), arrêté qu'il n'y a lieu à délibérer. A été faite ensuite une motion tendant à ce que cet arrêté fût envoyé aux 47 autres sections; cette motion mise aux voix, l'Assemblée a déclaré qu'il n'y avait pas lieu à délibérer. Elle a ensuite nommé MM. Allan et Boussaroque commissaires recenseurs, pour se rendre à la Commune et connaître le résultat du vœu des autres sections. N'y ayant plus d'objets à traiter, la séance a été levée.
NOTES:
[384] Cet arrêté de la section de la Croix-Rouge est très probablement daté du 25 juin. (Voyez mon ouvrage sur La Commune du 10 août 1792, p. 83 et n. 3.)
[385] Je ne connais pas autrement cet arrêté de la section de l'Arsenal sur l'adresse de la section des Postes dont il a été question ci-dessus (voyez p. 116 et n. 381).
[386] Le texte porte «... du 16 du présent». Mais l'arrêté est bien du 18 juin. Il convoquait les sections pour le 27 courant «à l'effet de délibérer sur la question de savoir s'il sera fait à l'Assemblée nationale une adresse pour demander que les soixante bataillons de la garde nationale soient réduits à quarante-huit» (Voyez mon ouvrage sur La Commune du 10 août 1792, p. 93 et n. 4.)
QUARANTE-QUATRIÈME ASSEMBLÉE.—DU SAMEDI 30 JUIN 1792
Assemblée générale de la section des Postes
du samedi trente juin mil
sept cent quatre-vingt-douze, l'an 4e de la liberté.
Les citoyens de la section des Postes régulièrement convoqués et assemblés en vertu de l'ajournement arrêté en la séance du vingt-six courant pour recevoir le compte des commissaires nommés en ladite Assemblée pour faire la collecte dans l'étendue de la section et recevoir les dons des citoyens et citoyennes pour subvenir aux frais de la guerre;
La séance a été ouverte par M. Bellet, président du Comité et M. Maréchal (sic) l'aîné a été unanimement nommé secrétaire.
Il a été fait lecture du procès-verbal de la dernière séance du vingt-six, lequel, à quelques changements près rectifiés sur le champ, a été arrêté.
Sept heures étant sonnées, sur le vœu des citoyens et citoyennes présents, les divers états de collecte ont été annoncés, et le résultat général des dons faits par les citoyens et citoyennes de la section des Postes et des soldats volontaires du bataillon de Saint-Eustache et de la partie du bataillon de la Jussienne faisant partie de la section, se sont (sic) trouvés monter à la somme de:
Savoir:
| En espèces or, argent et cuivre, quatre cent cinquante-six livres, trois sols, ci | 456 l. 3 s. |
| En assignats et billets patriotiques, sept mille trois cent soixante livres un sol, ci | 7.360 l. 1 s. |
| En bijoux or, argent, jetons, médailles, etc., évalués cent quatre-vingt-seize livres, ci | 196 l. » |
| Deux paires de boucles d'argent non estimées et deux bagues d'or, non estimées | » » |
| L. 8.012 l. 4 s. |
La récapitulation de l'offrande étant faite et annoncée, il a été agité de savoir (sic) combien il serait nommé de commissaires pour offrir à l'Assemblée nationale législative l'offrande de la section et du bataillon de Saint-Eustache et de la partie de celui de la Jussienne. Sur cette motion, il a été arrêté à l'unanimité qu'il serait nommé vingt citoyens et six citoyennes; et aussitôt par acclamation ont été nommés:
MM. (citoyens):
| Julliot, commandant[387]. | |
| Renard. | |
| A. | Légier. |
| Bellet père. | |
| Bachelard. | |
| Desvieux. | |
| A. | Michel. |
| A. | Basty. |
| Tacherat. | |
| Charlard. | |
| Le Roux. | |
| A. | Lavallée. |
| Larsonnier. | |
| Gillet. | |
| A. | Valentin. |
| A. | Geoffroy. |
| Bonnet. | |
| Dumoutiez fils. | |
| Clément. | |
| A. | La Porte. |
Mmes (citoyennes):
| La Sage. | |
| A. | Froyès. |
| Gaubert. | |
| A. | Marie-Jeanne-Elisabeth Roissy. |
| Juliot. | |
| Baquenon. |
Il a été arrêté que les commissaires ci-dessus nommés se rassembleront au Comité de la section demain dimanche premier juillet, à onze heures du matin.
Fait et arrêté en l'Assemblée de la section les jour et an susdits.
NOTE:
[387] Sans doute Julliot père (Claude-François), électeur et premier assesseur du juge de paix de la section, ancien négociant, 64 ans, rue des Deux-Écus.
QUARANTE-CINQUIÈME ASSEMBLÉE.—DU 3 JUILLET 1792
L'an mil sept cent quatre-vingt-douze et le quatrième de la liberté, le trois juillet, l'Assemblée générale de la section des Postes, légalement convoquée sur la pétition de cinquante citoyens actifs et en la manière accoutumée, et composée de cent trois votants, ainsi qu'il résultait de la feuille d'enregistrement, M. Bellet, président du Comité de la section, a ouvert la séance, par l'invitation de l'Assemblée de nommer un président. L'Assemblée a nommé à l'unanimité mon dit sieur Bellet pour président, ce qui a été par lui accepté.
M. le Président a ensuite proposé à l'Assemblée de nommer un secrétaire, en l'absence du secrétaire-greffier de la section. L'Assemblée ayant élu par acclamation M. Dévieux (sic), il a accepté les fonctions de secrétaire.
Il a été ensuite fait lecture du procès-verbal de la dernière séance, lequel a été adopté à quelques changements près, qui ont été indiqués par l'Assemblée et ont été faits sur le champ.
Un membre, ayant demandé et obtenu la parole, a invoqué le principe, consacré par les décrets de l'Assemblée nationale, pour la publicité des séances de tous les corps constitués[388]; et, attendu qu'une section est une partie du corps constitué pour délibérer sur ce qui intéresse toute espèce de citoyen d'une même commune, que par conséquent il importe que chaque citoyen puisse être témoin de ce qui s'agite dans les délibérations, il a demandé que les séances de l'Assemblée des citoyens de la section fussent publiques.
L'Assemblée, après avoir reconnu la vérité de ce principe, a passé à l'ordre du jour motivé sur ce que, la loi étant existante, il fallait s'y conformer à l'avenir, et a ordonné en même temps que M. le Président ferait indiquer, par la proclamation de la convocation de la prochaine séance, le lieu où l'Assemblée serait tenue publiquement[389].
Il a ensuite été fait lecture des objets de la pétition des cinquante citoyens actifs: le premier était relatif aux mesures à prendre pour le service du poste de l'Arsenal, le second était relatif au changement de nom de la rue dite Comtesse d'Artois[390].
Le premier objet ayant été mis en discussion, plusieurs membres ont obtenu la parole et démontré la nécessité de porter la plus grande attention à ce que ce poste soit gardé avec la plus active surveillance. Après une ample discussion, l'Assemblée a arrêté:
1o Que la garde du poste de l'Arsenal sera composée de cent hommes; 2o que ce service sera fait par chaque légion tour à tour; 3o qu'il y aura en outre un piquet de cavalerie pareillement affecté à ce poste, pour porter les avis ou ordres en cas de besoin.
L'Assemblée a en outre ordonné que le présent arrêté serait porté au Conseil général de la Commune par quatre commissaires qu'elle a choisis et qui sont, MM. Tacherat, Thévenin, Bellet fils aîné et Desvieux, qu'elle charge de présenter verbalement audit Conseil général de la Commune les motifs qui ont déterminé cet arrêté, et de faire part des craintes communiquées à l'Assemblée sur les bâtiments et souterrains des bâtiments environnants et magasins à poudre.
Il a été mis aux voix si le second objet de la pétition serait mis en discussion, mais, attendu qu'il était dix heures du soir et que plusieurs membres ont demandé que l'Assemblée fût instruite de tous les objets généralement quelconques qui ont été adressés à la section, soit par les Corps administratifs, soit par les autres sections, l'Assemblée s'est ajournée à vendredi prochain à cet effet.
La séance a été levée à dix heures du soir. Fait en l'Assemblée générale de la section les jour et an que dessus.
NOTES:
[388] Décret du 1er juillet (Duvergier, t. IV, p. 234; et voyez F. Braesch, La Commune du 10 août 1792, p. 130).
[389] Ainsi était adopté définitivement le principe de la publicité des séances dont nous avons déjà pu voir une application temporaire et toute exceptionnelle à la date du 26 juin (voyez ci-dessus, p. 118 et n. 382).
[390] Actuellement partie de la rue Montorgueil, entre la pointe Saint-Eustache et la rue Mauconseil.
QUARANTE-SIXIÈME ASSEMBLÉE.—DU 6 JUILLET 1792
L'an mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an quatre de la liberté, le six juillet, l'Assemblée générale de la section des Postes légalement convoquée sur la pétition de cinquante citoyens actifs et en la manière accoutumée, et composée de cent douze votants, ainsi qu'il résultait de la feuille d'enregistrement;
M. Bellet, président du Comité de la section a ouvert la séance par l'invitation à l'Assemblée de nommer un président et un secrétaire. L'Assemblée a nommé M. Bellet pour président, et M. Frosté pour secrétaire.
Il a été ensuite fait lecture du procès-verbal de la dernière séance, lequel a été adopté, à l'exclusion[391] néanmoins d'une motion incidente qui y avait été insérée et que l'Assemblée a jugé devoir être supprimée du procès-verbal, attendu que cette motion n'avait point été mise en délibération.
L'ordre du jour était la pétition de cinquante citoyens actifs, en ce qui était relatif au changement de nom de la rue dite Comtesse d'Artois et [à] la connaissance à prendre par l'Assemblée de tous les arrêtés et délibérations généralement quelconques qui ont été adressés à la section, soit par les Corps administratifs, soit par les autres sections, objets sur lesquels l'Assemblée, dans sa dernière séance, s'était ajournée à ce jourd'hui.
L'objet de la pétition ayant été livré à la discussion, plusieurs membres ont obtenu la parole et ont demandé que, non seulement le nom de la rue dite Comtesse d'Artois fût changé, mais encore que ce changement s'opérât[392] sur toutes les rues de la ville de Paris, qui portaient le nom de tel ou tel prince, de tel ou tel duc, etc., reste de nos anciens préjugés.
En conséquence l'Assemblée a arrêté que la Municipalité serait invitée à faire changer le nom de la rue dite Comtesse d'Artois, ainsi que ceux des autres rues connues sous des noms de tel ou tel prince, ou tel ou tel duc, etc., reste de nos anciens préjugés, et, pour porter ce vœu à la Municipalité, l'Assemblée a nommé MM. Tacherat, Bellet fils, Desvieux et Thévenin.
Un membre a demandé et obtenu la parole. Il a fait part à l'Assemblée d'une erreur qui avait été commise dans la transmission du mot d'ordre du[393] quatre au cinq de ce mois; que la garde nationale avait le véritable mot, mais que la troupe de ligne ne l'avait pas exactement; que cette erreur, soit qu'elle eût été commise involontairement, aurait pu devenir funeste sans la prudence des commandants de patrouilles.
L'adjudant du bataillon de Saint-Eustache ayant rendu compte de la manière dont cette erreur avait été commise[394] et ayant observé qu'il avait été pris des mesures pour empêcher dorénavant une pareille faute, l'Assemblée a passé à l'ordre du jour, en déclarant néanmoins que, si pareille erreur se commettait encore, elle demanderait la punition de son auteur.
L'ordre du jour a été repris. Il s'agissait de prendre connaissance des différents arrêtés et délibérations pris, soit par le Corps administratif (sic)[395], soit par les sections; il a été effectivement fait lecture de quelques délibérations, mais l'Assemblée, convaincue qu'elle ne pouvait prendre des délibérations d'après ces lectures, a déclaré qu'il n'y avait lieu à délibérer quant à présent sur ces diverses délibérations, sauf aux citoyens à faire des pétitions conformément à la loi.
La séance a été levée à neuf heures et demie du soir. Fait en l'Assemblée générale de la section les jour et an que dessus.
NOTES:
[391] Le texte original porte «... à l'exécution», par une erreur évidente de copiste.
[392] Le texte original porte: «... s'opérera...».
[393] Le texte porte: «... de...».
[394] Le texte porte: «... soumise...».
[395] Lisez, sans doute: Corps municipal.
QUARANTE-SEPTIÈME ASSEMBLÉE.—DU 9 JUILLET 1792
L'an mil sept cent quatre-vingt-douze le neuf juillet, l'an 4e de la liberté;
L'Assemblée générale de la section des Postes, convoquée en la manière accoutumée et réunie au nombre de plus de cent vingt-six, M. Bellet a proposé de nommer[396] un président et un secrétaire ______ (sic) a nommé M. Bellet président et M. Le Grer secrétaire.
Le secrétaire a ensuite fait lecture des diverses délibérations des sections; après la lecture d'icelles (sic) du Marché-des-Innocents, sur les échoppes et parasols[397], l'Assemblée ______ (sic) y adhère unanimement.
Lecture faite de celle de la section de la Croix-Rouge sur la question de nommer des commissaires pour obtenir la permanence des sections[398]; la discussion s'étant ouverte sur cet objet, la question préalable demandée et appuyée, après plusieurs épreuves faites pour connaître le vœu de la majorité infructueusement, l'Assemblée a passé à l'appel nominal dans laquelle (sic) a été commise une erreur en prenant une liste pour l'autre, attendu le défaut ordinaire d'y mettre les dates; l'Assemblée étant dans le trouble à ce sujet, M. le Président a levé la séance.
NOTES:
[396] Le texte original porte: «... à proposé nommé...».
[397] Je ne connais pas ces arrêtés; mais on pourra consulter sur ce sujet les documents indiqués par M. Tuetey sous les nos 3173 de son tome V et 869 de son tome VI.
[398] Voyez F. Braesch, La Commune du 10 août 1792, pp. 90-91.
QUARANTE-HUITIÈME ASSEMBLÉE.—DU 10 JUILLET 1792
Assemblée générale des citoyens actifs de la section des Postes
du 10
juillet 1792, l'an 4e de la liberté.
M. Bellet, président du Comité, a annoncé à l'Assemblée l'objet pour lequel elle était convoquée, qui est une lettre du procureur de la Commune en date du 5 de ce mois, dont il a fait lecture et qui porte que les sections s'assembleront de nouveau par suite des Assemblées du 12 mai dernier qui avaient eu lieu d'après l'arrêté du Corps municipal qui les avait convoquées ce jour pour délibérer sur l'état actuel de la police de Paris[399].
L'Assemblée a nommé pour président M. Boussaroque et pour secrétaire M. Barré jeune.
Il a été fait lecture du procès-verbal d'une Assemblée qui a eu lieu hier sur pétition; plusieurs membres ont demandé et obtenu la parole sur le procès-verbal et sur tout ce qui a été dit. Il a été arrêté de passer à l'ordre du jour, et qu'il ne serait point fait mention d'aucune des observations, excepté l'ajournement à aujourd'hui que l'Assemblée décide qui sera supprimé du procès-verbal vu que cet objet n'a pas été clairement décidé.
M. Allan[400], qui a été nommé dans l'Assemblée du 12 mai commissaire recenseur pour se rendre à la Municipalité et connaître le vœu des sections sur cet objet, a donné des éclaircissements sur les procès-verbaux des commissaires recenseurs auxquels il a concouru.
Il a été fait lecture de ces procès-verbaux dressés par les commissaires recenseurs des sections, clos et arrêtés par eux les 25 mai et 12 juin derniers; d'après quoi la discussion a été ouverte.
Plusieurs opinants ayant été entendus sur la question, l'Assemblée a fermé la discussion et a arrêté à l'unanimité qu'il serait nommé cinq personnes de l'Assemblée pour examiner les rapports faits par les commissaires recenseurs et lui en faire leur rapport, afin de l'éclairer et la mettre à même de pouvoir se déterminer, avec plus de connaissance qu'elle n'a pu en acquérir dans une simple lecture; elle a nommé à cet effet, MM. Thévenin, Desvieux, Renard, rue Montmartre, Boussaroque et Basti (sic). Elle les a invités à tenir leur rapport prêt pour lundi, jour auquel elle s'ajourne pour l'entendre et prendre telle détermination qu'elle jugera convenable.
L'Assemblée a été levée à dix heures.
Fait en l'Assemblée générale les dits jour et an que dessus.
NOTES:
[399] Voyez ci-dessus, p. 106, n. 366 in fine.
[400] Le texte porte: «... Allant...» mais il faut lire: Allan, comme à la page 120: Allan Guy-Félix, chirurgien et membre de l'Académie de chirurgie, 49 ans, rue Montmartre, 22, était électeur de la section des Postes. Il fut le chirurgien de Louis XVI et devint plus tard celui de l'impératrice Joséphine.
QUARANTE-NEUVIÈME ASSEMBLÉE.—DU 17 JUILLET 1792
Assemblée générale des citoyens de la section des Postes
du 17 juillet
1792, l'an 4e de la liberté.
M. Bellet, président du Comité, a fait part à l'Assemblée de l'objet de la convocation, qui est l'arrêté du Corps municipal du six de ce mois qui dit: que la Commune sera convoquée pour le mardi, dix-sept juillet 1792, à l'effet de délibérer sur le projet d'adresse à l'armée, voté par la section du Marché-des-Innocents.
M. Bellet a invité l'Assemblée à se nommer un président et un secrétaire, et elle a nommé par acclamation M. Bellet, pour président, et M. Barré jeune, pour secrétaire.
Il a été fait lecture du procès-verbal d'hier; un membre a demandé qu'il y soit ajouté une proposition qu'il avait faite, qui n'avait été ni rejetée, ni mise aux voix: elle tend à ce que les commissaires qu'elle a nommés pour rédiger un plan de police pour Paris se conforment au vœu de la majorité des sections sur la suppression du bureau central et le rétablissement des articles 14, 15 et 16 du titre 4 de la loi sur la Municipalité de Paris; cette proposition mise aux voix, l'Assemblée l'a adoptée, et a décidé qu'elle y serait ajoutée et ferait partie dudit procès-verbal; sur le surplus, il a été adopté[401].
On a fait lecture de l'arrêté du Corps municipal du 6 de ce mois et de la délibération de la section du Marché-des-Innocents du 30 juin 1792, contenant son vœu pour l'adresse à l'armée[402].
Plusieurs personnes ont obtenu la parole; les uns prétendaient que la convocation faite par le Corps municipal était contraire à l'article 1er du titre 4 de la loi sur la Municipalité de Paris[403], et à l'article trois de la loi du 20 mai 1791[404]; les autres ont prétendu que la convocation était légale, que l'on devait toujours délibérer. La question préalable a été demandée, mise aux voix et rejetée, après de grands débats. L'Assemblée a décidé que la discussion serait fermée, et, après, a arrêté qu'il serait nommé, au scrutin de liste de deux noms à la pluralité relative, deux commissaires qui se joindraient à ceux que nommeraient les autres sections pour rédiger une adresse à l'armée au désir de la délibération de la section du Marché-des-Innocents[405]. MM. Légier, Desvieux et Charmot ont été nommés scrutateurs; le nombre des votants a été de 58. Celui des bulletins s'est trouvé conforme; par le résultat du scrutin, M. Desvieux a eu 43 voix et M. Basty, 39. Etant ceux qui ont réuni le plus de voix, M. le Président les a proclamés commissaires pour cet objet.
L'un des (sic) MM. les Commissaires a demandé à l'Assemblée si elle voulait les autoriser, lorsqu'ils auront quelques rapports à lui faire relativement à cette adresse, à inviter M. le Président du Comité à convoquer la section; la proposition mise aux voix, l'Assemblée l'a adoptée et s'est ajournée au jour que Messieurs ses commissaires se trouveront en état de demander l'Assemblée.
Fait en l'Assemblée générale qui a été levée à dix heures du soir, ledit jour et an que dessus.
NOTES:
[401] La loi du 25 août-29 septembre 1790 sur l'organisation des tribunaux de la ville de Paris, créait, dans chacune des quarante-huit sections, un juge de paix assisté de prud'hommes assesseurs (Duvergier, t. I, p. 346). La loi du 11-18 juillet 1991, sur la compétence de ces juges de paix en matière de police et sur l'établissement d'un tribunal de police correctionnelle à Paris, confiait à ces juges de paix, par son article premier, le soin de «prononcer, soit la liberté des personnes amenées, soit le renvoi à la police municipale, soit le mandat d'amener ou devant lui ou devant un autre juge de paix, soit enfin le mandat d'arrêt, tant en matière de police correctionnelle qu'en matière criminelle» (Duvergier, t. III, p. 102). Or ces fonctions appartenaient jusque-là aux commissaires de police, en vertu des articles 14, 15 et 16 du titre IV de la loi sur l'organisation de la Municipalité (Duvergier, t. I, p. 187). De plus, par son article II, le décret du 11-18 juillet 1791 décidait qu'il serait, à Paris seulement, «déterminé, par la Municipalité, un lieu vers le centre de la ville, où se trouveront toujours deux juges de paix, lesquels pourront donner, chacun séparément, les ordonnances nécessaires. Les juges de paix rempliront tour à tour ce service pendant vingt-quatre heures.» (Duvergier, t. III, p. 102). Enfin, pour compléter l'organisation de la police de sûreté de la capitale, la Constituante, sur la proposition de Duport, décréta encore, le 21 septembre 1791, la création de vingt-quatre officiers de paix chargés d'arrêter les délinquants et de les conduire, soit devant les commissaires de police quand il s'agissait d'objets attribués à la Municipalité, soit devant le juge de paix du district ou le bureau central des juges de paix, quand il s'agissait d'objets du ressort de la police correctionnelle ou de la police de sûreté (Duvergier, t. III, pp. 331-332; Moniteur, réimpression, t. IX, pp. 736-737).
Or, à l'époque qui nous occupe, ces dispositions législatives concernant l'organisation de la police de sûreté à Paris avaient une importance politique exceptionnelle: officiers de paix et juges de paix rivalisèrent de zèle dans la poursuite des citoyens compromis dans la manifestation du 20 juin. Déjà au mois d'avril 1792, le sieur Verrières, que nous avons rencontré précédemment (voyez, p. 90, n. 338 et 111, n. 372), publiait, sous le titre de Tableau de l'ordre des mouchards patentés, une liste de vingt-quatre officiers de paix de la ville de Paris qu'il désignait ainsi à la colère publique (pièce imprimée, in-8o de 18 pages, Bib. de la Ville de Paris, recueil factice 15520*; autre exemplaire: Brit. Mus. recueil factice R 228, pièce non numérotée). Quant aux juges de paix, ils organisèrent, au lendemain du 20 juin, un «bureau central», au château même des Tuileries, et, avec l'aide des officiers de paix, ils y condamnèrent plusieurs citoyens qui furent emprisonnés (voyez F. Braesch, La Commune du 10 août 1792, pp. 58-63). Ce bureau central avait suscité de violentes protestations; de là le projet, que nous rencontrons ici, de supprimer les dispositions législatives qui avaient permis de l'établir, en rendant aux seuls commissaires de police le droit d'arrêter et d'emprisonner les prévenus.
[402] Voyez F. Braesch, La Commune du 10 août 1792, p. 96.—Voici le texte de l'arrêté de la section du Marché-des-Innocents, du 30 juin 1792, pour l'adresse à l'armée:
MUNICIPALITÉ DE PARIS
Extrait du registre des délibérations de la section du Marché-des-Innocents, du 30 juin 1792, l'an quatrième de la Liberté.
L'Assemblée générale de la section du Marché-des-Innocents, légalement convoquée sur une pétition signée de plus de cinquante citoyens actifs, et composée de plus de cent [citoyens], craignant que les armées du Nord et du Centre ne soient pas parfaitement instruites des événements arrivés dans la capitale, et désirant resserrer avec elles les liens de fraternité, a émis le vœu qu'il serait fait aux dites armées une adresse qui leur témoigne les sentiments d'attachement des citoyens composant la Commune de Paris, leur reconnaissance des services qu'elles rendent à la Patrie et des dangers auxquels elles s'exposent pour sa défense; pour leur témoigner en même temps qu'il existe assez de force et de patriotisme à Paris pour y maintenir la sûreté publique; en conséquence que les citoyens soldats actuellement sur les frontières n'ont à s'occuper qu'à repousser les ennemis étrangers, qu'enfin ils sont invités à ne pas croire trop facilement les rapports qui leur seront faits des événements de la capitale et de (sic) se confier à l'amour des Parisiens pour la Patrie et le maintien de la Constitution qui n'est pas en danger au milieu d'eux.
L'Assemblée arrête que la présente délibération sera portée aux 47 autres sections et à la Municipalité qui sera priée de convoquer la Commune entière pour nommer des députés qui rédigeront et porteront l'adresse, lorsqu'elle aura été approuvée par les sections, et que la dite convocation ait lieu avant l'émission du vœu de huit sections, attendu l'urgence.
Arrête également que l'Assemblée nationale sera priée de joindre, si elle le juge à propos, des députés à ceux de la Commune. L'Assemblée nomme: MM. Bouin, Pécoul, Margotin, de Bierne, Bernard, Martin le jeune, Le Bourg, Tinthoin, Dumoutiez, Porcher, Butin, Picot, pour porter la présente délibération aux sections et à la Municipalité, et s'ajourne à mercredi 4 juillet pour entendre le rapport de ses commissaires.
A Paris, le 30 Juin 1792, l'an 4 de la Liberté.
| Signé: | Gaucher, président. |
| Quatremere, secrétaire. |
Délivré pour copie conforme à l'original, par nous secrétaire-greffier, signé: Coudre.
Pour copie conforme à l'expédition dont lecture a été faite au Corps municipal, en sa séance du 6 juillet 1792.
| Signé: | Royer, secrétaire-greffier. |
Voici le texte de l'arrêté du Corps municipal, du 6 juillet, convoquant les sections pour délibérer sur l'arrêté ci-dessus de la section du Marché-des-Innocents:
MUNICIPALITÉ DE PARIS
Par le Maire et les Officiers municipaux
Arrêté portant convocation des quarante-huit sections pour le mardi 17 juillet, à l'effet de délibérer sur un projet d'adresse à l'Armée. Extrait du registre des délibérations du Corps municipal, du vendredi 6 juillet 1792, l'an quatrième de la Liberté.
Sur la réquisition du second substitut-adjoint du Procureur de la Commune,
Le Corps municipal arrête que la délibération de la section du Marché-des-Innocents, dont lecture a été faite à cette séance, sera imprimée et adressée aux quarante-huit sections.
Arrête en outre que la Commune sera convoquée, pour le mardi 17 de ce mois, trois heures de relevée, à l'effet de délibérer sur le projet d'adresse à l'armée, voté par la section du Marché-des-Innocents.
| Signé: | Pétion, maire. |
| Royer, secrétaire-greffier, | |
| Lemoine, secrétaire-greffier-adjoint. |
[403] Cet article est ainsi conçu: «L'Assemblée des quarante-huit sections devra être convoquée par le Corps municipal lorsque le vœu de huit sections, résultant de la majorité des voix dans une Assemblée de chaque section composée de cent citoyens actifs au moins et convoquée par le président des commissaires de la section, se réunira pour la demander.» (Duvergier, t. I, p. 186.) Or l'arrêté du Corps municipal, du 6 juillet, avait été pris sur le vu d'un seul arrêté de la section du Marché-des-Innocents, du 30 juin.
[404] Lisez: «... de la loi du 18-22 mai 1791...» (Duvergier, t. II, pp. 365-366). Voici le texte de l'article 3 de cette loi: «Dans la ville de Paris, comme dans toutes les autres villes et Municipalités du royaume, les citoyens actifs qui, en se conformant aux règles prescrites par les lois, demanderont le rassemblement de la Commune ou de leur section, seront tenus de former leur demande par un écrit signé d'eux et dans lequel sera déterminé, d'une manière précise, l'objet d'intérêt municipal qu'ils veulent soumettre à la délibération de la Commune ou de leur section, et, à défaut de cet écrit, le Corps municipal ou le président d'une section ne pourront convoquer la section ou la Commune.»
[405] Ainsi la section des Postes passait par-dessus toutes les objections tirées des questions de forme. Nous en trouverons un autre exemple à la séance suivante du 24 juillet.
CINQUANTIÈME ASSEMBLÉE.—DU 24 JUILLET 1792
Assemblée générale des citoyens de la section des Postes
du 24 juillet
1792, l'an 4e de la liberté.
L'an 1792 et le 4e de la liberté, l'Assemblée générale de la section des Postes légalement convoquée en vertu de l'arrêté du Corps municipal du 20 du présent mois, de l'objet de la convocation (sic);
Il a été en conséquence fait lecture dudit arrêté portant convocation des 48 sections de Paris à l'effet de délibérer sur l'arrêté de la section de la Fontaine Grenelle (sic), qui propose de nommer des commissaires pour rédiger deux adresses, l'une aux quatre-vingt-trois départements sur les dangers de la Patrie, l'autre au Corps législatif sur les moyens d'y remédier[406].
M. Bellet a invité l'Assemblée à se nommer un président et un secrétaire, et elle a nommé par acclamation M. Féry pour président, et M. Laurent pour secrétaire.
Il a été lu le procès-verbal de l'Assemblée, du 17 juillet présent mois, que l'Assemblée a adopté.
Il a été ensuite fait lecture de la délibération de l'Assemblée générale de la section de la Fontaine Grenelle, en date du dix-huit juillet 1792[407], suivant laquelle l'Assemblée a arrêté qu'elle inviterait ses frères des quarante-sept autres sections à nommer, dans le plus court délai, des commissaires qui, réunis à ceux nommés par elle, rédigeraient en commun, au nom de la Commune de Paris, une adresse à l'Assemblée nationale, pour la prier de ne consulter, dans les grandes mesures qu'elle doit prendre pour mettre un terme aux dangers de la patrie, que la suprême loi du salut du peuple;
Et qui rédigeront pareillement une adresse aux quatre-vingt-trois départements, dans laquelle la Commune de Paris fera entendre à tous les Français des vérités que l'éloignement et l'intrigue a peut-être empêché d'arriver jusqu'à eux.
La discussion s'est ouverte sur l'objet de ladite convocation. Il a été agité que la convocation du Corps municipal, n'étant faite que d'après le vœu d'une seule section au lieu du vœu de huit sections, ne paraissait point légale aux termes de la loi; la question préalable ayant été invoquée et mise aux voix, il a été arrêté qu'il y avait lieu à délibérer sur l'objet de ladite convocation[408]; la discussion a été continuée, et, après que plusieurs membres ont été entendus, il a été arrêté: 1o qu'il sera fait deux adresses, l'une aux quatre-vingt-trois départements sur les dangers de la patrie, l'autre au Corps législatif sur les moyens d'y remédier, et que, pour l'adresse au Corps législatif, les commissaires ci-après nommés prendront pour base la demande de la permanence des sections; 2o la suspension du pouvoir exécutif pendant le temps de la guerre; 3o la convocation des Assemblées primaires dans tout le royaume; 4o la suppression des états-majors de l'armée; 5o la diminution de la liste civile; 6o le renouvellement des Directoires de[409] Département; 7o la demande de formation de camps dans les départements, et que ces camps soient occupés par des levées faites dans les villes du septième homme en état de porter les armes, que tout citoyen sans distinction, qui sera en état de porter les armes, soit autorisé à s'armer en se faisant enregistrer à sa Municipalité, que dans chaque Municipalité il y ait toujours une force armée de garde, du vingtième de la population, qui veillera nuit et jour[410]; et, pour l'exécution du présent arrêté, l'Assemblée a nommé à l'unanimité MM. Desvieux, Légier et James, pour ses commissaires, qu'elle charge de se retirer à la Maison commune pour y travailler à la rédaction desdites adresses avec les commissaires des autres sections nommés ad hoc. L'Assemblée autorise en outre ses dits commissaires à demander la convocation de l'Assemblée de la section, pour lui rendre compte de ce travail, s'ajournant à cet effet.
Il a été enfin arrêté qu'attendu le danger de la patrie, l'Assemblée s'ajourne aux mardi, vendredi et dimanche de chaque semaine jusqu'à ce que l'Assemblée nationale en ait autrement ordonné, auquel effet le présent arrêté sera notifié à la Municipalité et annoncé aux autres sections[411]; en conséquence l'Assemblée charge son président de faire annoncer par toutes les voies ordinaires le présent article dans tout l'arrondissement de la section.
Fait, clos et lu, assemblée tenante, laquelle a adopté la rédaction du présent procès-verbal en tout son contenu; et la séance a été levée à minuit passé.
NOTES:
[406] Voyez F. Braesch, La Commune du 10 août 1792, p. 98 et n. 2 et 3. Voici le texte de cet arrêté du Corps municipal:
MUNICIPALITÉ DE PARIS
Par le Maire et les Officiers municipaux
Extrait du registre des délibérations du Corps municipal du vendredi 20 juillet 1792, l'an quatrième de la liberté.
Le Corps municipal, délibérant sur l'arrêté de la section de la Fontaine-de-Grenelle dont la lecture a été faite dans la séance, après avoir entendu le Procureur de la Commune, convoque les quarante-huit sections de Paris, pour mardi prochain 24 de ce mois, cinq heures de relevée, à l'effet de délibérer sur l'arrêté de cette section, qui propose de nommer des commissaires pour rédiger deux adresses, l'une aux quatre-vingt-trois départements sur les Dangers de la Patrie, l'autre au Corps législatif sur les moyens d'y remédier.
Et sera l'arrêté de la section de la Fontaine-de-Grenelle imprimé et envoyé aux 48 sections.
Pétion, maire.
Lemoine, secrétaire-greffier adjoint.
[407] L'arrêté de la section de la Fontaine-de-Grenelle est du 19 juillet et non du 18. L'Assemblée générale de la section avait bien été convoquée le 18 pour discuter la question, mais elle s'était ajournée, ce jour-là, au lendemain, sans prendre de décision, et c'est le 19 juillet que l'arrêté en question fut adopté. Voici le texte de l'imprimé à part qui contient les deux arrêtés:
Section de la Fontaine-de-Grenelle
Extrait du registre des délibérations des Assemblées générales de la section de la Fontaine-de-Grenelle, du 18 juillet 1792, l'an 4e de la Liberté.
L'Assemblée générale, légalement convoquée sur la pétition de plus de 50 citoyens pour délibérer sur les moyens que peut employer la Commune de Paris pour remédier, autant qu'il est possible, au danger de la Patrie, danger déclaré par l'Assemblée nationale.
L'Assemblée générale, constituée aux termes de la loi, s'est ajournée au lendemain.
Du 19 du dit mois de juillet.
L'Assemblée générale, légalement convoquée en vertu de l'ajournement arrêté à la séance d'hier et composée de cent vingt citoyens actifs;—Considérant que le but de tout parti social est la conservation de la société; qu'au moment où la patrie est en danger il serait absurde d'user de vains ménagements avec les traîtres, quels qu'ils soient, qui la mettent en péril;—Que, placés par les circonstances auprès du centre commun où viennent aboutir toutes les conjurations partielles, les citoyens de Paris doivent à la confiance que leur ont témoignée d'une manière si affectueuse en tant d'occasions leurs frères des quatre-vingt-deux autres départements, de les éclairer sur les manœuvres que le despotisme et l'intrigue osent mettre en usage, même sous les yeux des vainqueurs de la Bastille, pour pervertir l'esprit public;—L'Assemblée générale arrête qu'elle invitera ses frères des quarante-sept autres sections à nommer dans le plus court délai des commissaires qui, réunis à ceux nommés par elle, rédigeront, en commun et au nom de la Commune de Paris, une adresse à l'Assemblée nationale pour la prier de ne consulter, dans les grandes mesures qu'elle doit prendre pour mettre un terme aux dangers de la Patrie, que la suprême loi du salut du peuple;—Et qui rédigeront pareillement une adresse aux quatre-vingt-trois départements, dans laquelle la Commune de Paris fera entendre à tous les Français des vérités que l'éloignement et l'intrigue ont peut-être empêché d'arriver jusqu'à eux;—Arrête, que le présent arrêté sera porté aux quarante-sept autres sections et à la Municipalité qui sera priée de convoquer la Commune avant l'émission du vœu de huit sections, attendu l'urgence;—Et a nommé commissaires: MM. Rivaillier et Dubois.
Pour extrait conforme à l'original, signé à l'original: Magendie, président, Laugier, secrétaire.
Laugier,
Secrétaire-greffier.
[408] C'est la deuxième fois que l'Assemblée générale de la section des Postes décidait de passer par-dessus les questions de forme pour discuter de suite une affaire politique dans un sens hostile au gouvernement de Louis XVI (cf. ci-dessus, p. 131 et n. 405).
[409] Le texte original porte: «du».
[410] Ce plan d'adresse au Corps législatif reproduit les grandes lignes du projet d'adresse aux quatre-vingt-trois départements, adopté, le même jour, dans d'autres sections et dont un Jacobin fit part à la société le lendemain. (Voyez F. Braesch, La Commune de 10 août 1792, pp. 143-144.)
[411] Ainsi, après avoir arrêté la publicité de ses séances, le 3 juillet (voyez ci-dessus, p. 123), la section des Postes s'acheminait vers la permanence dont elle avait pourtant repoussé l'idée à sa séance du 9 juillet (voyez ci-dessus, p. 126). Si elle ne la décidait pas cette fois, c'est qu'il fallait un décret spécial pour cela, décret qui avait déjà été réclamé par plusieurs sections avant elle. (Voyez F. Braesch, La Commune du 10 août 1792, pp. 90-92 et 128-129.)
CINQUANTE ET UNIÈME ASSEMBLÉE.—DU 27 JUILLET 1792
Assemblée générale de la section des Postes
du 27 juillet 1792, l'an
4e de la liberté[412].
L'an mil sept cent quatre-vingt-douze, l'an 4e de la liberté, le vingt-sept juillet, l'Assemblée générale de la section des Postes légalement convoquée suivant l'ajournement porté au procès-verbal de l'Assemblée générale de la section du 24 juillet 1792, M. Bellet, président du Comité, a remis sur le bureau le procès-verbal du 24 et différents paquets adressés à la section des Postes. M. Bellet a invité l'Assemblée à se nommer un président et un secrétaire. L'Assemblée a nommé par acclamation M. Le Bœuf[413], président, et M. Lindet, secrétaire.
Il a été fait lecture du procès-verbal de la séance du 24. Il a été arrêté que le mot déchéance serait substitué à ceux de suspension du pouvoir exécutif pendant la guerre[414].
Il a été fait par le président lecture d'une lettre des sections des Quatre-Nations et des Quinze-Vingts réunies, relative à une fête civique à donner à M. le Maire, avec un placard[415] y joint, avec invitation d'y coopérer par une souscription volontaire et de nommer à cet effet deux commissaires pour se joindre à ceux desdites sections.
Après que plusieurs membres ont parlé sur cet objet[416], la question préalable a été invoquée et motivée sur ce que l'Assemblée, en apprenant l'idée et l'intention manifestées dans ces écrits, pense cependant que le moment n'est pas favorable pour une fête, quoiqu'elle désirait (sic) manifester elle-même combien elle estime M. Pétion[417].
Il a été fait lecture d'un placard concernant la formation des nouvelles divisions de gendarmerie nationale, destinées au service de la ville de Paris[418].
Il a été arrêté qu'il serait fait une pétition à l'Assemblée nationale pour lui demander qu'elle se fasse rendre compte du mode de remplacement de l'état-major de la garde parisienne, le plus tôt possible[419], et, pour la rédaction et la présentation de la pétition à l'Assemblée nationale, MM. Desvieux, Blachelard (sic), Frosté et Le Bœuf ont été nommés. Il a été arrêté que la section dénoncerait le journal intitulé Journal de Paris, ______(sic) à Monsieur le Procureur de la Commune de Paris.
Il a été arrêté qu'il serait ajouté, à la pétition à présenter à l'Assemblée nationale, qu'elle serait priée de presser le jugement des prévenus de crimes de lèse-nation, qui sont dans les prisons d'Orléans[420].
Il a été arrêté que M. Bachelard se transporterait à la section des Quatre-Nations, pour y prendre des renseignements sur l'affaire du sieur de Quincy, par elle arrêté il y a deux ans ou environ, et en faire son rapport à l'Assemblée le plus tôt possible. Séance levée à neuf heures et demie.