← Retour

Éloge de la paresse

16px
100%

Tout est dans tout. Chaque vertu a son avers, comme une médaille ; et des poisons les plus noirs d’experts praticiens tirent habilement des remèdes capables de guérir. Cette considération nous a fait penser qu’il serait excessif de condamner toujours sans appel les défauts que l’on voit habituellement aux personnes appelées à vivre en commun, c’est-à-dire à toutes celles qui composent la société.

Que penserait-on d’un homme que l’horreur entière du mensonge obligerait à dire toujours la vérité ? Il finirait en cour d’assises, sous l’accusation de calomniateur et perturbateur de la paix publique. Que pourrait-on attendre d’une femme qui ne serait point un peu coquette ? D’un causeur qui se défendrait d’être médisant ? D’un savant qui n’aurait pas de curiosité ? D’un amphitryon qui ne serait pas lui-même adonné à la gourmandise ? D’un homme d’esprit qui ne saurait pas être bête quand il faut ? Ils tourneraient tous bientôt à la misanthropie la plus hypoconde et seraient à fuir, comme Alceste, dont c’est l’erreur d’être à ce point intransigeant sur la vertu.

Philinte n’est pas moins honnête ; mais il sait mieux user des hommes et ne déteste rien tant que l’excès. C’est pour lui que nous avons entrepris cette petite collection d’éloges des défauts commodes, utiles, nécessaires, qui s’appellent la Médisance, la Gourmandise, la Frivolité, le Mensonge, la Coquetterie, etc…

Sous le voile transparent de l’ironie, la morale la plus difficile y trouvera son compte et sera très exactement servie. Mais, pour une fois, avec gaieté, ce dont nul ne pourra se plaindre.

LES ÉDITEURS.

Chargement de la publicité...