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Nouvel atlas de poche des champignons Comestibles et Vénéneux les plus répandus. Série II (Première édition)

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CHAPITRE IV
Causerie sur les Discomycètes.

Les Discomycètes (champignons en forme de disque) intéressent également les mycologues de profession et les mycophages; aux premiers, ils offrent des sujets d’études fort intéressants et très variés; aux autres, ils fournissent d’excellents champignons comestibles, tels que les Morilles, les Gyromitres, les Helvelles et même certaines grandes Pézizes. Les Morilles surtout sont très appréciées, en ce qu’elles viennent au premier printemps, alors qu’il n’y a pas d’autres champignons: elles se vendent toujours à un prix très élevé, et il n’est pas rare de les voir payer 10 à 12 francs le kilog.

Les Discomycètes forment un sous-groupe très naturel renfermant un grand nombre de genres et une multitude d’espèces, qui ont été fort bien étudiées et magnifiquement illustrées par M. Boudier, qui pendant plus de quarante années s’est attaché à décrire, coordonner et dessiner toutes les espèces existant en Europe. Aussi a-t-il pu résumer toutes ses recherches dans un gros livre, publié sous le nom de Discomycètes d’Europe, histoire et classification.

Dans ses Icones il a donné une multitude de dessins qui sont les plus beaux et les plus exacts qui existent, de sorte que l’on peut dire que les Discomycètes sont bien connus.

Tous les Discomycètes n’ont pas, à première vue, la forme d’un disque, il faut procéder par induction pour retrouver cette forme type; si nous prenons une Morille, par exemple, il ne nous sera pas difficile, après un court examen, d’admettre que chaque alvéole peut être regardée comme une coupe, un disque qui serait placé à côté d’un autre disque, dont il serait séparé par une bordure qui forme les côtes de la Morille. Ainsi envisagées, les Morilles seraient considérées comme une réunion de disques, et représenteraient une association de Pézizes.

Dans les Helvelles, la forme du réceptacle ou chapeau semble s’éloigner encore davantage de la forme d’un disque, mais là encore, si nous voulons bien chercher, nous trouverons des Helvelles dont le chapeau forme une véritable coupe surmontant un pied élancé, comme cela serait dans l’Helvelle à grand pied. Ainsi, en raisonnant par analogie, on arrive assez facilement à faire rentrer dans ce sous-groupe des Discomycètes, des champignons, qui, comme les Spathularia, les Geoglossum, paraissent tout d’abord devoir s’en éloigner.

N’y a-t-il pas dans les Hyménomycètes des faits analogues, et ne voit-on pas certaines Agaricinées se rapprocher des Polyporées, comme les Lenzites par exemple, dont les feuillets quelquefois anastomosés rappellent certains Polypores.

Les Discomycètes ont généralement une consistance charnue, parfois charnue coriace; plus rarement, et surtout dans les petites espèces, elle devient cartilagineuse. Leur réceptacle, susceptible, comme nous l’avons dit, de varier étonnamment de forme, peut aussi revêtir des couleurs variées et souvent très vives; il y en a de vertes, jaunes, rouges, etc., avec tous les intermédiaires.

L’hyménium est établi sur un plan à peu près uniforme et toujours tourné en haut; il est supère: il se compose d’une couche de thèques pressées les unes contre les autres et séparées par des paraphyses. Ces asques ou thèques sont toujours relativement beaucoup plus longs que larges, arrondis à leur partie libre, et rétrécis insensiblement à leur base où ils se continuent avec le tissu du champignon.

Ces asques renferment presque toujours huit spores, plus rarement davantage: ces spores, si l’on en juge par la fig. 2, sont excessivement variées; elles peuvent être rondes ou ovales, ou encore fusiformes plus ou moins allongées, et relativement grandes, en comparaison de celles des Hyménomycètes. Elles ont ou non un revêtement qui fournit des indications précieuses pour la détermination des genres ou des espèces: à leur intérieur elles montrent presque toujours des globules, souvent au nombre de deux, que l’on utilise également pour la détermination. Ces spores une fois mûres doivent sortir des asques et se répandre au dehors, pour concourir à la dissémination de l’espèce. Dans bien des cas il est facile d’assister à cette sortie qui a lieu en si grand nombre que l’on croirait voir un petit nuage blanchâtre envelopper le champignon.

Le phénomène est surtout visible avec les grandes espèces de Pézizes, de Morilles ou d’Helvelles; ainsi, quand on touche un peu brusquement une Pézize de grande dimension, on observe la projection d’innombrables spores visibles par leur grand nombre; qu’on laisse un peu reposer le champignon et l’on pourra répéter l’expérience.

M. Boudier, dont le nom doit être cité chaque fois que l’on parle des Discomycètes, a reconnu que les thèques ne s’ouvraient pas toujours de la même manière. Ou bien il se soulève à leur extrémité libre un petit clapet qui laisse une ouverture circulaire par où sortent les spores, ou bien la perforation est une simple déchirure qui laisse finalement une ouverture circulaire permettant aux spores de sortir. Comme ces caractères sont constants, M. Boudier s’en est servi pour diviser les Discomycètes en deux catégories, les Operculés et les Inoperculés.

Les Morilles, les Helvelles et les grandes Pézizes rentrent dans les Operculés. Les Géoglosses, Spathularia, Mitrula, Bulgaria, etc., rentrent dans les Inoperculés.

Les Discomycètes viennent un peu partout, sur la terre comme les Morilles, les Helvelles, les grandes Pézizes; sur le bois mort, les déchets de toute nature, comme un grand nombre de petites espèces de Pézizes. On les trouve toute l’année et toutes les espèces charnues sont normalement comestibles et inoffensives. On a bien signalé des symptômes d’empoisonnement, ou plutôt, des troubles gastriques assez prononcés ont été signalés à diverses reprises après l’ingestion de ces cryptogames: mais il paraît hors de doute que ces accidents sont dus à l’usage de champignons trop avancés et insuffisamment cuits. On sait, en effet, que la cuisson fait disparaître certains principes nocifs analogues à des ptomaïnes, qui se développent dans les Discomycètes trop avancés. Ceci nous indique clairement qu’il sera prudent de ne consommer que des champignons bien frais et surtout pas trop vieux, cela sera le meilleur moyen d’éviter ces accidents et de jeter le discrédit sur certains champignons d’ailleurs excellents.

Le conseil que nous donnons ici pour les Helvelles et les Morilles s’applique également aux autres champignons comestibles, quels qu’ils soient; jamais il ne faut consommer des champignons vieux ou cueillis depuis longtemps, car, à l’inverse des autres végétaux alimentaires, leur composition chimique comporte des principes azotés en assez grande proportion, puisqu’elle peut aller jusqu’à 44%; il n’est donc pas étonnant que ces principes ne se transforment rapidement pour donner des combinaisons nocives.


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