Tableau historique et pittoresque de Paris depuis les Gaulois jusqu'à nos jours (Volume 3/8)
Νἱψον ανομεματα με μοναν οψιν.
Ablue peccata non solam faciem.
On fait dans la chapelle qui contenoit le tombeau de Lully les réparations nécessaires pour y replacer ce monument; et cette même chapelle est déjà ornée du portrait en médaillon de ce musicien célèbre. Au-dessous est gravée en lettres d'or une inscription en six vers latins, composée par Santeuil.
Il a été placé un pavillon télégraphique au-dessus du clocher de cette église.
Théâtre Feydeau. Cette salle fut élevée en 1791, sur une portion du terrain appartenant aux Filles-Saint-Thomas, et sur les dessins de MM. Legrand et Molinos. Elle avoit été construite pour une troupe de bouffons italiens, qui en prit possession dans cette même année; et cet édifice porta d'abord le nom de théâtre de Monsieur.
Après avoir été successivement occupée par plusieurs autres troupes, et un moment par les comédiens françois, cette salle appartient, depuis quinze ans environ, à la troupe de l'Opéra-Comique françois.
La façade de ce monument, entourée, dans la rue Feydeau de maisons qui permettent à peine de la voir, s'y présente obliquement sur un plan circulaire, et se compose de parties trop grandes pour l'emplacement resserré dans lequel elle a été construite. Trois arcs percés dans le soubassement permettent de descendre de voiture sous le vestibule: c'est une heureuse idée, et qui produiroit beaucoup d'effet, si elle avoit été exécutée et développée sur une ligne plus étendue. Des caryatides d'un bon style forment l'accompagnement de sept arcades qui décorent le premier étage. C'est un monument élevé avec célérité au milieu des difficultés insurmontables que présentoit le terrain, et qui par conséquent ne doit point être jugé avec sévérité.
La Bourse. Cet édifice, dont la première pierre fut posée en 1808, et qui n'est point encore entièrement achevé, s'élève sur l'emplacement du couvent des Filles-Saint-Thomas. Son plan offre un parallélogramme de 212 pieds dans sa longueur, et de 126 pieds dans sa largeur. Il est entouré d'un péristyle composé de 66 colonnes corinthiennes, formant, tout autour de l'édifice, une galerie couverte à laquelle on arrive par un perron de seize marches qui occupe toute la face occidentale du monument. Des bas-reliefs ornent cette galerie, et représentent des sujets symboliques, qui tous se rapportent au commerce et à l'industrie.
Un grand vestibule sert de communication pour se rendre à droite aux salles particulières des agens et des courtiers de change, à gauche au tribunal de commerce.
La salle de la Bourse, située au rez-de-chaussée et au centre de l'édifice, a 116 pieds de longueur sur 76 de largeur. Elle est éclairée par le comble, et peut contenir 2000 personnes.
Ce monument, que l'on doit mettre, pour la pureté du style, au nombre des plus beaux de Paris, a été élevé sur les dessins de M. Brogniart. Cet architecte étant mort en 1813, la suite des travaux a été confiée à M. Labarre, qui, dit-on, a scrupuleusement suivi le plan primitif.
On assure que la rue Vivienne sera prolongée jusqu'au boulevart; et que, du côté de la rue Notre-Dame-des-Victoires, il sera percée une rue nouvelle de soixante pieds de large, laquelle devra se prolonger jusqu'à la rue Montmartre. Il est difficile, en effet, qu'un édifice de cette importance n'amène pas quelques changements dans la disposition des maisons et des rues dont il est environné.
Théâtre de l'Opéra. L'Opéra ne quitta le théâtre provisoire qui lui avoit été élevé sur le boulevart Saint-Martin[208] pour s'établir rue de Richelieu, que dans les premières années de la révolution. Ce vaste édifice, qui s'élève vis-à-vis la bibliothéque du roi, n'avoit point été construit pour recevoir un tel spectacle; et sous le rapport de l'architecture, il ne présente rien d'intéressant. Toutefois, par suite de cette translation, il subit, tant dans sa forme que dans sa décoration intérieure, plusieurs changements remarquables.
C'est un bâtiment isolé au milieu des quatre rues qui l'environnent, et la face principale, qui donne sur la rue de Richelieu, offre un grand portique composé de onze arcades, au-dessus duquel est le foyer.
Le vestibule intérieur est décoré de colonnes doriques, qui soutiennent le plafond. La salle qui porte en partie sur ce vestibule a 60 pieds de diamètre, et l'avant-scène présente 45 pieds d'ouverture.
Le foyer public est vaste et commode; il forme une galerie divisée sur sa longueur en trois parties par huit colonnes ioniques.
Personne n'ignore, et l'assassinat du duc de Berri, le 13 février 1820, au moment où il sortoit de ce théâtre, et toutes les circonstances si terribles et si touchantes qui accompagnèrent ses derniers moments; circonstances parmi lesquelles le lieu où la Providence avoit voulu placer le lit dans lequel ce malheureux prince mourut en héros et en chrétien, n'étoit pas la moins singulière et la moins frappante. La salle de l'Opéra dut être fermée dès ce jour même, et pour toujours; mais on trouva bientôt plusieurs millions pour en construire une nouvelle, plus vaste, plus magnifique, qui s'est élevée en peu de mois, comme par enchantement, tandis que plusieurs de nos églises restent dépouillées, sont à peine et lentement réparées, et que, faute d'une somme qui seroit à peine en capital l'intérêt annuel de celles qu'a coûté ce nouvel Opéra, les bâtiments neufs du séminaire de Saint-Sulpice sont interrompus, et tomberont peut-être en ruines avant d'avoir été achevés! Nous parlerons tout à l'heure de cette salle, qui est ouverte depuis près d'une année.
Théâtre des Variétés. Il a été construit par l'architecte Cellérier sur le boulevart Montmartre, et dans un emplacement long et étroit qui lui présentoit de très-grandes difficultés, difficultés qu'il a su vaincre avec autant d'adresse que de bonheur. L'entrée de ce théâtre offre un grand vestibule orné avec élégance, au fond duquel deux rampes d'escaliers conduisent aux loges et au foyer. Ce foyer, placé au-dessus du vestibule, se termine par un balcon qui a vue sur le boulevart.
La façade est à deux étages tétrastyles. Les colonnes du rez-de-chaussée sont doriques, et celles du premier étage, ioniques. Au-dessus s'élève un fronton, derrière lequel est un amortissement. Cette décoration a de l'élégance et de la simplicité.
Nouvelle salle de l'Opéra. Cet édifice a été bâti dans la rue le Pelletier sur un terrain qui dépend de l'hôtel Choiseul; il se compose au rez-de-chaussée de sept arcades élevées sur six marches, et présente des deux côtés un avant-corps avec terrasses, pour servir d'entrée aux piétons. Le premier étage est orné de huit colonnes ioniques, à moitié engagées dans le mur, avec attiques, portant huit statues qui représentent huit muses: la neuvième manque! peut-être l'architecte ignoroit-il qu'elle existât; il n'y a que ce moyen d'expliquer une si étrange omission. Les intervalles des colonnes sont percés de neuf grandes arcades, dont les archivoltes sont portées sur des colonnes et des pilastres d'ordre dorique, et d'une moindre dimension que les colonnes ioniques déjà citées. Les tympans sont ornés de figures et d'attributs symboliques. Tout cet ensemble a une apparence très-mesquine, et il est difficile de rien imaginer d'un plus mauvais goût.
Saint-Vincent de Paule. Cette église nouvelle a été construite dans la rue Monthalon. Elle n'a point de portail; la dimension en est très-petite; et l'intérieur jusqu'à présent ne présente rien qui mérite d'être remarqué.
Le Timbre royal. Cet édifice, situé dans la rue de la Paix, se compose en grande partie d'anciens bâtiments qui appartenoient au couvent des Capucines, et d'une façade nouvelle qui donne sur la rue. Cette façade, qui ressemble assez à celle d'une prison, se compose d'un grand mur tout nu, portant de chaque côté deux médaillons dans lesquels sont deux figures de génies sculptées en bas-relief.
Église des capucins de la Chaussée-d'Antin. On a élevé dans cette église un tombeau à M. le comte de Choiseul-Gouffier, ambassadeur du roi de France à Constantinople avant la révolution, et auteur d'un voyage en Grèce. Il se compose d'un tronçon de colonne noire, qui s'élève sur une base en marbre blanc, et que surmonte une urne en marbre blanc. Une inscription apprend que ce tombeau lui a été élevé par son épouse.
Fontaines des capucins de la Chaussée-d'Antin. Ces deux fontaines extrêmement simples, mais de bon goût dans leur simplicité, se composent de deux cuves de forme antique qui reçoivent l'eau de deux mascarons placés au-dessus.
Abatoir de Rochechouart. Il est situé vers la barrière qui porte ce nom, et adossé au mur d'enceinte. (Voyez à la fin du troisième volume, 2e partie, l'article Abatoirs.)