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Chroniques de J. Froissart, tome 10/13 : $b 1380-1382 (Depuis l'avènement de Charles VI jusqu'au commencement de la campagne de Flandre)

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The Project Gutenberg eBook of Chroniques de J. Froissart, tome 10/13

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Title: Chroniques de J. Froissart, tome 10/13

1380-1382 (Depuis l'avènement de Charles VI jusqu'au commencement de la campagne de Flandre)

Author: Jean Froissart

Editor: Gaston Raynaud

Release date: March 27, 2023 [eBook #70396]

Language: French

Original publication: France: Vve J. Renouard, 1869

Credits: Clarity, Hans Pieterse and the Online Distributed Proofreading Team at https://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica))

*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK CHRONIQUES DE J. FROISSART, TOME 10/13 ***

Note sur la transcription: L’orthographe d’origine a été conservée et n’a pas été harmonisée, mais quelques erreurs introduites par le typographe ont été corrigées. Les corrections indiquées dans l'errata ont également été effectuées.

Les notes de bas de page ont été renumérotées et rassemblées à la fin du volume.

Presque toutes les pages du texte original des Chroniques ont des variantes. Cliquez sur le numéro de page, par exemple [52] à gauche de la première ligne pour voir ces variantes.

Table

CHRONIQUES
DE
J. FROISSART


IMPRIMERIE DAUPELEY-GOUVERNEUR
A NOGENT-LE-ROTROU.


CHRONIQUES
DE
J. FROISSART

DEUXIÈME LIVRE
PUBLIÉ POUR LA SOCIÉTÉ DE L’HISTOIRE DE FRANCE

PAR GASTON RAYNAUD


TOME DIXIÈME
1380-1382

(DEPUIS L’AVÈNEMENT DE CHARLES VI JUSQU’AU COMMENCEMENT DE LA CAMPAGNE DE FLANDRE)

[Logo: SOCIÉTÉ DE L’HISTOIRE DE FRANCE]

A PARIS
LIBRAIRIE RENOUARD

H. LAURENS, SUCCESSEUR
LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ DE L’HISTOIRE DE FRANCE
RUE DE TOURNON, Nº 6


M DCCC XCVII

EXTRAIT DU RÈGLEMENT.

Art. 14.—Le Conseil désigne les ouvrages à publier, et choisit les personnes les plus capables d’en préparer et d’en suivre la publication.

Il nomme, pour chaque ouvrage à publier, un Commissaire responsable, chargé d’en surveiller l’exécution.

Le nom de l’éditeur sera placé en tête de chaque volume.

Aucun volume ne pourra paraître sous le nom de la Société sans l’autorisation du Conseil, et s’il n’est accompagné d’une déclaration du Commissaire responsable, portant que le travail lui a paru mériter d’être publié.


Le Commissaire responsable soussigné déclare que le tome X de l’édition des Chroniques de J. Froissart, préparé par M. Gaston Raynaud, lui a paru digne d’être publié par la Société de l’Histoire de France.

Fait à Paris, le 1er août 1896.

Signé: L. DELISLE.

Certifié:

Le Secrétaire de la Société de l’Histoire de France,
A. DE BOISLISLE.

SOMMAIRE.


CHAPITRE XI.

1380, septembre. ENTRÉE EN BRETAGNE DE L’ARMÉE DU COMTE DE BUCKINGHAM.4 novembre. COURONNEMENT DU ROI CHARLES VI A REIMS.Du commencement de novembre au 2 janvier 1381. SIÈGE DE NANTES PAR LES ANGLAIS.—HIVERNAGE DES ANGLAIS EN BRETAGNE.15 janvier et 4 avril. TRAITÉ DE PAIX ENTRE LE ROI DE FRANCE ET LE DUC DE BRETAGNE.11 avril. LES ANGLAIS ÉVACUENT LA BRETAGNE; BUCKINGHAM RENTRE EN ANGLETERRE (§§ 169 à 192).

La nouvelle de la mort du roi Charles V arrive à Buckingham au moment où, après avoir traversé la Sarthe à Noyen, il fait reposer ses gens à Poillé[1]; elle parvient en même temps au Mans[2], au quartier général de l’armée française, dont les chefs se dispersent pour courir aux informations. Les Anglais poursuivent leur route par Saint-Pierre-sur-Erve[3] et par Argentré[4], passent la Mayenne au milieu de marécages dangereux et s’arrêtent à Cossé[5], pour attendre les instructions du duc de Bretagne[6].

Le duc, qui se trouve à Hennebont, mécontent de l’hostilité continue de ses villes et particulièrement de Nantes, à l’approche des Anglais, députe vers Buckingham ses conseillers habituels: Bertrand de Montbouchier, Étienne Guyon, Guillaume Tannegui, Eustache de la Houssaie, Geoffroi de Kerimel et l’élu de Léon[7], pour lui demander de venir à Rennes conférer ensemble.

Cette ambassade rejoint à Châteaubourg[8] l’armée anglaise, qui de Cossé, à travers la forêt de la Gravelle[9], avait gagné Vitré[10], puis Châteaubourg, sûre désormais de ne plus être poursuivie par les Français. P. 1 à 3, 297, 298.

Après de longs pourparlers au cours desquels Buckingham se plaint de ne pas être accueilli en Bretagne comme il s’y attendait d’après les conventions passées, rendez-vous est pris pour Rennes, où les Anglais arrivent au bout de quelques jours. Mais ils n’y peuvent entrer et les portes de la ville ne s’entr’ouvrent que pour loger le comte et quelques barons avec lui. Ils attendent ainsi plus de quinze jours la venue du duc de Bretagne, qui multiplie ses excuses plus ou moins sincères.

Les Nantais profitent de ce répit pour obtenir des quatre oncles du roi, ayant alors le gouvernement du royaume, six cents lances de renfort, qui les mettent en état de soutenir un siège[11]. P. 4 à 6, 298, 299.

Las d’attendre, le comte de Buckingham envoie vers le duc de Bretagne comme messagers: Robert Knolles, Thomas de Persi et Thomas Trivet, accompagnés de cinq cents lances, tandis que lui-même, avec le restant de ses hommes, s’achemine vers Combourg[12] par Saint-Sulpice[13]. Le duc, qui s’était décidé à quitter Vannes, où il était allé en partant de Hennebont, rencontre les trois chevaliers et se dirige avec eux sur Rennes. Entrevue à Hédé[14] du duc et de Buckingham; dîner à la Mézière[15]; longues conférences à Rennes entre le duc et les envoyés du comte. P. 6 à 8, 299, 300.

Finalement le duc de Bretagne s’engage à venir mettre le siège devant Nantes, quinze jours au plus tard après l’arrivée des forces anglaises sous les murs de cette ville, et à fournir les barques nécessaires. Le comte revient de Hédé prendre acte de cette convention à Rennes, et le duc retourne à Hennebont, tandis que les Anglais mettent quinze jours encore à faire leurs préparatifs[16].

De leur côté, les Nantais, ayant à leur tête Jean le Barrois des Barres[17], Jean de Châteaumorand[18], le sire de Tournemine[19] et autres, s’apprêtent à la défense. P. 8, 9, 300.

Pendant ce temps, à Reims, le dimanche 4 novembre 1380, a lieu le couronnement du jeune roi Charles, entouré de ses quatre oncles, les ducs d’Anjou, de Berry, de Bourgogne et de Bourbon[20], des ducs de Brabant, de Bar, de Lorraine, etc. Le comte de Flandre[21] et le comte de Blois s’étaient excusés. La veille, le samedi, le jeune roi avait fait son entrée solennelle, au milieu d’un concours immense de seigneurs et de jeunes écuyers, comme ses cousins de Navarre, d’Albret, de Bar et d’Harcourt, qu’il devait le lendemain armer chevaliers; il avait veillé une grande partie de la nuit dans l’église Notre-Dame. Le dimanche, le roi est sacré par l’archevêque de Reims, en présence de tous les seigneurs et d’Olivier de Clisson, le nouveau connétable[22]. Pour célébrer son avènement, il ordonne que toutes impositions, aides, gabelles, fouages, subsides et autres impôts grevant le peuple seront abolis[23].

Après la messe, le roi dîne au palais, sous une tente, avec ses oncles et les prélats; il est servi par des hauts barons montés sur des destriers caparaçonnés d’or: les sires de Couci, de Clisson, Gui de la Trémoïlle, l’amiral de France[24], et autres.

Le lundi, le roi se rend pour dîner à l’abbaye de Saint-Thierri[25], près de Reims; il retourne ensuite à Paris où il est bien accueilli par les habitants[26].

Après ces fêtes, les oncles du roi se partagent le gouvernement: le duc de Berri a le Languedoc; le duc de Bourgogne la Picardie et la Normandie; le duc d’Anjou reste auprès de son neveu, pour diriger en son nom le royaume[27]. Sur la demande des ducs de Brabant et d’Anjou, le comte de Saint-Pol peut rentrer en France[28], où il s’établit dans son château de Bohain[29]. P. 9 à 13, 300, 301[30].

Le duc de Bretagne, comme nous l’avons dit, avait quitté Rennes et se dirigeait, avec les seigneurs de Montbouchier, de Montraulieu et tous ses conseillers, vers Hennebont et Vannes. Le comte de Buckingham, passant par Châtillon[31], Bain[32] et Nozay[33], arrive en quatre jours aux faubourgs de Nantes où il se loge à la porte Sauvetout; Guillaume de Latimer, connétable de l’armée, Gautier Fitz-Walter et Raoul Basset se logent à la porte Saint-Pierre; Robert Knolles et Thomas de Persi à la porte Saint-Nicolas; Guillaume de Windsor et Hugues de Calverley à la poterne de Richebourg.

Ils sont aussitôt inquiétés par les défenseurs de la ville, Jean le Barrois des Barres en tête[34], qui, la veille de la Saint-Martin (10 novembre), les surprennent à la porte Saint-Pierre. P. 13 à 15, 301, 302.

Le surlendemain (12 novembre), nouvelle escarmouche du côté de la Loire, que soutiennent Jean de Harleston, Guillaume de Windsor et Robert Knolles. P. 15, 16, 302.

Le 18 novembre, les Français font une sortie par la porte Sauvetout; mais les Anglais, gardés par les troupes allemandes, se défendent bien: ils n’en perdent pas moins un de leurs chefs, Thomas de Rhodes, et se laissent faire six prisonniers. P. 16, 17, 302.

Le siège dure toujours, et le comte de Buckingham reste sans nouvelles du duc de Bretagne, malgré les messagers qu’on lui envoie et que guettent sur les chemins les gens du pays. Le duc, en effet, ne peut décider ses hommes à venir avec lui assiéger Nantes: ils refusent de faire guerre et dommage sur la terre de Bretagne, pour le service des Anglais, alors que la cour de France, qu’on voulait effrayer tout d’abord, semble disposée à respecter leurs anciennes coutumes.

D’autre part, les hauts barons, les seigneurs de Clisson, de Dinan, de Laval, de Rochefort, le vicomte de Rohan, menacent le duc de lui faire eux-mêmes la guerre, s’il vient assiéger Nantes; ils lui conseillent, au contraire, de se soumettre au jeune roi de France, qu’il ne peut haïr comme son père[35]. P. 17 à 19, 302, 303.

Sous les murs de Nantes les escarmouches continuent; le soir de la Notre-Dame des Avents (8 décembre), dans une sortie contre Guillaume de Cosyngton[36] et les hommes de guet, le seigneur d’Amboise[37] est fait chevalier par Amauri de Clisson[38], cousin-germain du connétable. P. 19, 20, 303.

Le jeudi d’avant la Noël (20 décembre)[39], les Anglais sont encore attaqués par le Barrois des Barres et le seigneur de Cholet[40]; ils perdent un de leurs chevaliers, Hugues Tyrel[41], mais, malgré leur désir, ils n’osent dégarnir leurs postes pour envoyer, sous bonne escorte, de nouveaux messagers rappeler au duc ses engagements. P. 20 à 22, 303, 304.

La veille de Noël (24 décembre), grande escarmouche, où se distinguent du côté anglais Yves Fitz-Warin et Guillaume Drayton[42]; le chevalier français, Tristan de la Jaille, est fait prisonnier par un écuyer de Hainaut, Thierri de Sommaing[43]. P. 22, 23, 304.

Pendant les fêtes de Noël, les hostilités cessent. P. 23, 24, 304.

Depuis plus de deux mois, les Anglais sont sous les murs de Nantes. Le comte de Buckingham décide alors de lever le siège et d’aller avec toutes ses troupes trouver le duc à Vannes. L’armée anglaise part donc le 2 janvier[44], passe par Nort[45], Moisdon[46], Teillais[47], Bain, traverse la Vilaine et arrive à Lohéac[48] un samedi (12 janvier); de là par Guer[49], Mauron[50], la Trinité[51], elle vient traverser l’Oust à Brehan[52], et campe sur la rive droite de la rivière.

Effrayés de l’approche des Anglais, les habitants de Vannes demandent conseil au duc de Bretagne qui les rassure et les engage à ouvrir leurs portes au comte, sous la condition qu’il ne logera que quinze jours dans leur ville. Lui-même, le lendemain, il sort de Vannes au-devant de Buckingham qui, après un arrêt à Brehan, avait, la nuit précédente, couché à Saint-Jean[53].

Le duc s’excuse auprès du comte de son manque de parole: il invoque les résistances qu’il a rencontrées chez ses vassaux et les menaces des seigneurs de Clisson, de Laval et autres hauts barons. La saison, du reste, est avancée; mieux vaut attendre l’été pour recommencer la campagne. Le comte, bien accueilli par les habitants de Vannes, jure de n’y séjourner que quinze jours et est logé au château de la Motte[54], tandis que le duc s’en va à son château de Sucinio[55], d’où il échange des visites avec le comte.

Les lieutenants de Buckingham devaient, d’après les conventions, être logés avec leurs hommes à Hennebont[56], à Quimper-Corentin[57] et à Quimperlé[58]; mais ils ne peuvent réussir à se faire ouvrir les portes de ces villes et sont forcés de se cantonner dans les faubourgs, où ils souffrent du froid et du manque de vivres[59].

Harcelées sans cesse par les garnisons des châteaux de Kaer[60] et de Guéméné-Guingamp[61], appartenant au vicomte de Rohan, et par celles des châteaux de Josselin[62], de Montaigu[63] et de Moncontour[64], appartenant au seigneur de Clisson, menacées par les forces du connétable qui occupe le pays[65], n’osant ni s’en aller ni se porter mutuellement secours, les troupes anglaises en sont réduites à se contenter de l’intervention douteuse du duc de Bretagne. P. 24 à 30, 304 à 306.

Le duc, en effet, durant ce temps, négocie la paix à Paris avec le roi de France, par l’entremise du vicomte de Rohan, de Charles de Dinan, de Gui de Laval et de Gui de Rochefort, aux conseils desquels il se rend, craignant qu’une fois établis en Bretagne, les Anglais n’en veuillent plus sortir. P. 30 à 32, 306, 307.

Les Anglais ignorent[66] tout cela et passent leur temps en joutes. On se rappelle le combat de Gauvain Michaille et de Janekin Cator dans la forêt de Marchenoir[67]. A cette occasion, plusieurs défis avaient été échangés entre chevaliers anglais et français, mais le comte de Buckingham avait ajourné ces joutes, qui, une fois encore, sous les murs de Nantes, n’avaient pu avoir lieu.

Quand les Anglais sont cantonnés à Vannes et aux environs, les chevaliers français veulent à tout prix tenir leurs engagements, et, grâce à un sauf-conduit donné par le connétable de France, des passes d’armes mettent en présence à Château-Josselin des chevaliers des deux nations, entre autres le Galois d’Aunoi[68] et Guillaume Clynton[69], Lionnel d’Airaines[70] et Guillaume Frank[71]. P. 32 à 34, 307, 308.

Les joutes se continuent à Vannes, en présence du comte de Buckingham et des principaux chefs anglais[72]. P. 34, 35, 308.

Joute des seigneurs de Pouzauges et de Vertaing; le seigneur de Pouzauges est blessé. Joute de Jean d’Aubrecicourt et de Tristan de la Jaille. Joute du bâtard de Clarens[73] et d’Édouard de Beauchamp[74], remplacé par Janekin Stonckel. P. 35 à 37, 308, 309.

Joute de Janekin Cloton[75] et de Jean de Châteaumorand. Janekin Cloton est jugé trop faible pour lutter. P. 37, 38, 309.

Il est remplacé par Guillaume de Faringdon[76], qui blesse à la cuisse Jean de Châteaumorand. P. 38, 39, 309, 310.

Tandis que les Anglais, logés à Vannes et aux environs, sans autre ravitaillement que ce qui leur vient des îles de la Manche et de Cornouailles, attendent la fin de l’hiver pour recommencer la guerre avec de nouveaux renforts, les barons bretons continuent à Paris leurs négociations en vue de la paix, désirée surtout par le duc d’Anjou qui prépare son expédition d’Italie[77].

On arrive enfin à une entente: le duc de Bretagne s’engage à faire évacuer son duché par les Anglais, auxquels il fournira des navires. Ceux d’entre eux qui appartiennent à la garnison de Cherbourg seront libres de retourner par terre avec un sauf-conduit. Le duc viendra en France faire hommage au roi[78]. P. 39 à 42, 310, 311.

Quand les Anglais apprennent que la paix est conclue entre le roi de France et le duc de Bretagne, ils s’en montrent fort mécontents. Après de longues explications et excuses de la part du duc[79], le comte de Buckingham quitte Vannes le 11 avril 1381[80] et s’embarque aussitôt: il part le soir même pour l’Angleterre, refusant une dernière entrevue que lui demande le duc. P. 42 à 44, 311.

Le connétable fait donner des sauf-conduits aux Anglais qui retournent à Cherbourg; parmi eux se trouvent les chevaliers Jean Burley, Yves Fitz-Warin, Guillaume Clynton et l’écuyer Nicolas Clifford[81]. Ce dernier rencontre à Château-Josselin un écuyer du comte de la Marche, Jean Boucinel, qui l’avait défié autrefois à Valognes. Un nouveau défi a lieu, et, malgré les résistances de Clifford, le connétable, pris comme arbitre, décide que le lendemain le combat se fera. P. 44 à 47, 311, 312.

Jean Boucinel est tué par Clifford. Les Anglais, sous la conduite du Barrois des Barres, s’acheminent vers Cherbourg. P. 47 à 51, 312, 313.

CHAPITRE XII.

1380, juin. CONCLUSION DE LA PAIX ENTRE LE COMTE DE FLANDRE ET LES GANTOIS.—8 août. REPRISE DES HOSTILITÉS.—27 août. DÉFAITE DES GANTOIS.—Septembre. LE COMTE FAIT LE SIÈGE DE GAND.—5 novembre. VICTOIRE DES GANTOIS A LONGPONT.—10 novembre. PAIX MARTINIENNE.—1381, février. NOUVEAUX DIFFÉRENDS.—13 mai. DÉFAITE DES GANTOIS A NEVELE; LEUR DÉSUNION (§§ 193 à 208).

En Flandre, les Gantois sont toujours en hostilités avec le comte, qui profite d’une émeute populaire à Bruges pour intervenir et mettre la main sur la ville, où il fait de nombreuses exécutions; ce qui entraîne la soumission du Franc de Bruges[82].

Enhardi par ce succès, le comte décide d’aller assiéger Ypres, que viennent secourir 3,000 Gantois, conduits par Jean Boele[83] et Arnould de Clerk[84]. De Bruges, le comte se dirige sur Thourout, puis sur Poperinghe, où il réunit une armée de 20,000 hommes. P. 51 à 53, 313, 314.

Les Gantois envoient alors à Ypres un nouveau renfort de 9,000 hommes, sous les ordres de Rasse d’Herzeele, Pierre du Bois, Pierre de Wintere[85] et Jean de Launoit[86], qui, après être passés par Courtrai, décidés à livrer bataille au comte, attendent à Roulers[87] d’être rejoints par les troupes d’Ypres, déjà renforcées par celles de Jean Boele et d’Arnould de Clerk.

Surprises dans une embuscade, ces dernières troupes sont taillées en pièces par les gens du comte[88] et perdent près de 3,000 hommes[89]. Les Yprois rentrent dans leur ville et les Gantois se réfugient à Courtrai. P. 53 à 56, 314.

Mais, dans leur fureur d’avoir été vaincus, ils accusent Jean Boele de trahison et le tuent; ils retournent ensuite à Gand, pendant que Jean de Launoit va s’emparer du château de Gavre sur l’Escaut. P. 56, 57, 315.

Le comte marche alors sur Ypres, qui lui ouvre ses portes et se rend à merci[90]; il fait mettre à mort plus de 700[91] partisans des Gantois, envoie à Bruges 300 otages, et, cela fait, se dispose à assiéger Courtrai. P. 57, 58, 315.

N’espérant plus de secours de la part des Gantois, la ville se rend au comte[92], qui prend 200 otages et, peu de temps après, rentre à Bruges en passant par Deynse[93]. Au bout d’une quinzaine de jours, aux environs de la fête de la Décollation de saint Jean-Baptiste (29 août)[94], le comte convoque de nouveau ses gens et vient s’établir à la Biete[95] pour faire le siège de Gand. Robert de Namur a répondu à son appel, mais non Guillaume, qui alors est en France, auprès du roi. Gautier d’Enghien est maréchal de l’armée. Les Gantois, encouragés dans leur défense par les Liégeois, les gens de Bruxelles et du Brabant, supportent vaillamment le siège, qui ne peut être complet, et sont ravitaillés du côté de Bruxelles et des Quatre-Métiers[96]. P. 58 à 60, 315.

Tandis que le seigneur d’Enghien, que le Hase de Flandre et le jeune sénéchal de Hainaut, Jacques de Werchin, se distinguent dans des escarmouches, les gens de Bruges, de Poperinghe et d’Ypres, envoyés par le comte à Longpont[97], se font battre par les Gantois[98]. P. 60 à 62, 316.

Fiers de ce succès, les Gantois, au nombre de 6,000, vont prendre, brûler et piller Alost[99], dont les seigneurs, Louis de Marbais, Geoffroi de la Tour[100] et Philippe de Jonghe, n’ont que le temps de fuir; ils se rendent maîtres ensuite de la ville de Termonde[101] (Philippe de Masmines est tué dans cette affaire), mais ne peuvent s’emparer du château, défendu par le seigneur de Widescot; enfin ils entrent par force dans Grammont[102], puis retournent à Gand avec leur butin. P. 62, 63, 316.

L’hiver s’approche; le comte se retire alors à Bruges[103] et envoie à Audenarde tenir garnison les seigneurs d’Enghien et de Montigni, pour inquiéter les Gantois.

En mars suivant, au printemps, le comte rassemble une nouvelle armée, dont il fait chef le seigneur d’Enghien. Les contingents de Deynse et d’Audenarde sont attaqués et maltraités par Rasse d’Herzeele et Jean de Launoit, qui revenaient à Gand d’une expédition contre Deynse[104].

Le lendemain, les Gantois vont brûler les faubourgs de Courtrai et rencontrent les troupes du comte à Nevele[105]. Rasse d’Herzeele et Jean de Launoit s’apprêtent à livrer bataille, sans attendre Pierre du Bois et Arnould de Clerk. P. 63 à 66, 316, 317.

L’armée du comte est forte de 20,000 hommes, de 1,500 lances, tant chevaliers qu’écuyers; ce sont: de Hainaut, le seigneur d’Enghien, maréchal de l’armée, Michel de la Hamaide, le bâtard d’Enghien[106], le seigneur de Montigni, Gille de Risoit, Hustin du Lai, le seigneur de Lens et Jean de Berlaimont[107]; de Flandre, Jean et Gui[108] de Ghistelles, le seigneur d’Escornai, le seigneur de Hulluc, le seigneur et Daniel d’Halewin, le seigneur d’Estaimbourg, Thierri de Dixmude[109], et d’autres, en y comptant le jeune sénéchal de Hainaut, Jacques de Werchin, qui mourut à Obies. Le seigneur de Leeuwerghem[110] porte la bannière du comte. Le choc a lieu, et mal fût avenu aux gens du comte, si Pierre du Bois, qui était arrivé sur le lieu du combat, eût pu secourir les siens; mais il en est empêché par un marais. P. 66 à 68, 317, 318.

Rasse d’Herzeele et Jean de Launoit, assaillis par une armée quadruple de la leur, se replient en désordre sur la ville. Rasse d’Herzeele se fait tuer en défendant l’église où Jean de Launoit[111] est brûlé vif avec tous ceux qui s’y sont réfugiés. P. 68 à 70, 318, 319.

Des 6,000 hommes de Jean de Launoit et de Rasse d’Herzeele, à peine en survit-il 300[112]. Pierre du Bois, qui a assisté au combat, sans pouvoir y prendre part, s’achemine vers Gand, où les fuyards ont déjà annoncé la mauvaise nouvelle, se plaignant de l’inaction de Pierre du Bois.

Aussi, quand ce dernier, bien que poursuivi par le seigneur d’Enghien, arrive à Gand, est-il assez mal accueilli et a grand’peine à se disculper. De là cette haine, dont Gilbert de Grutere et Simon Bette sentirent bientôt les effets. P. 70 à 74, 319, 320.

Le comte retourne à Bruges et licencie son armée; il renvoie le seigneur d’Enghien à Audenarde[113].

Les Gantois, au nombre de 15,000, au moment de la fête de Bruges (mai 1381), vont brûler les faubourgs de Courtrai[114], que le comte se contente de munir d’hommes d’armes.

Sous les murs d’Audenarde, les attaques de Pierre du Bois et de ses gens sont repoussées par les chevaliers.

Trois jours après, Arnould de Clerk et 1,200 chaperons blancs viennent tenir garnison à Gavre, pour faire échec aux gens d’Audenarde; ils en sortent bientôt pour surprendre une route conduite par le seigneur d’Escornai, Blanchard de Calonne[115] et autres, leur font perdre plus de 60 hommes et s’emparent de la ville et de l’abbaye d’Eenaeme[116]; Pierre de Steenhuyse est tué. P. 74 à 77, 320, 321.

Le lendemain, les chevaliers d’Audenarde marchent sur Eenaeme, surprennent les Gantois, les tuent presque tous, et, parmi eux, Arnould de Clerk; ils retournent ensuite à Audenarde. Ces nouvelles comblent le comte de joie. P. 77 à 79, 321, 322.

Désespérés de ces échecs, les Gantois songent à faire leur soumission, mais ils n’osent, par crainte de Pierre du Bois et de ses partisans, qui les imposent et les obligent à continuer la lutte, sous prétexte de défendre leurs franchises. Les honnêtes gens sont ainsi victimes de leur faiblesse, témoin Jean de la Faucille[117], qui, pour éviter d’être compromis, s’exile, mais n’en est pas moins accusé par Simon Rym[118], qui le tue en duel à Lille. P. 79 à 81, 322, 323.

Voyant que les notables de Gand sont fatigués de la guerre, et que, d’autre part, il ne peut traiter avec le comte sans risquer sa vie, Pierre du Bois imagine de s’adjoindre un autre chef capable de gouverner la ville de Gand avec lui[119]. Il propose à la nomination des Gantois Philippe d’Artevelde, fils de Jacques d’Artevelde, si populaire autrefois. P. 81 à 85, 323 à 325.

Après bien des hésitations voulues, Philippe se rend aux instances de Pierre du Bois, de Pierre de Wintere et de Sohier d’Herzeele[120]; il accepte et fait donner au seigneur d’Herzeele, ruiné par la guerre, une partie des revenus que le comte possédait dans la ville de Gand. P. 85, 86, 325.

CHAPITRE XIII.

1381, 14 mai. TRAITÉ D’ALLIANCE ENTRE LE PORTUGAL ET L’ANGLETERRE.—HOSTILITÉS ENTRE LE PORTUGAL ET LA CASTILLE.10 juin. INSURRECTION EN ANGLETERRE; LES BANDES INSURGÉES MARCHENT SUR LONDRES.13 juin. PILLAGE, MEURTRES ET INCENDIES DANS LA VILLE.15 juin. MORT DE WAT TYLER.18 juin. NOUVELLE TRÊVE CONCLUE AVEC L’ÉCOSSE PAR LE DUC DE LANCASTRE.—RÉPRESSION DE L’INSURRECTION DANS LES COMTÉS.Août. ARRIVÉE DU COMTE DE CAMBRIDGE ET DE SON ARMÉE A LISBONNE (§§ 209 à 227).

La mort du roi Henri de Castille ne met pas fin à la guerre entre la Castille et le Portugal. Aussitôt couronné, lui et sa femme[121], Jean est attaqué par Ferdinand, qui soutient les droits au trône de Castille de ses deux cousines, Constance et Isabelle, filles de Pèdre le Cruel, et mariées, l’une au duc de Lancastre, l’autre au comte de Cambridge. Le roi Jean se défend avec l’aide des chevaliers français[122], qui sont venus se mettre à son service depuis l’entrée des Anglais en Bretagne: le Bègue de Villaines, Pierre[123], son fils, Jean de Berguettes, Guillaume de Nailhac[124], Gauthier de Passac[125], Bertrand de Terride[126], Jean et Tristan de Roye, d’autres encore. Le roi de Portugal songe alors à envoyer en ambassade en Angleterre Jean-Fernandez[127], pour demander au duc de Lancastre de venir à son secours avec une nombreuse armée. Jean-Fernandez s’embarque à Lisbonne et arrive à Plymouth, alors que les troupes du comte de Buckingham, venant de Bretagne, débarquaient en Angleterre après avoir essuyé une violente tempête. Buckingham et l’ambassadeur de Portugal font route ensemble jusqu’à Londres, où est le roi. P. 86 à 89, 326, 327.

Jean-Fernandez est bien accueilli par le roi et ses oncles; il assiste aux fêtes de Saint-Georges (23 avril) à Windsor, en même temps que Robert de Namur, venu auprès du roi relever ses fiefs anglais[128]. Le parlement s’assemble à Westminster et décide que le comte de Cambridge ira en Portugal avec 500 lances et 500 archers, tandis que le duc de Lancastre partira pour l’Écosse et tâchera d’obtenir pour trois ans une prolongation de la trêve qui prend fin au 1er juin; cela fait, il pourra, en août ou en septembre, aller retrouver en Portugal son frère le comte de Cambridge[129]. Sa présence en Angleterre est, du reste, rendue nécessaire par les négociations du mariage du roi avec la sœur du roi des Romains[130]. P. 89 à 91, 327.

Le duc de Lancastre part; quinze jours plus tard, le comte de Northumberland le suit, pour se rendre à son poste de gouverneur du pays de Northumberland et de l’évêché de Durham, jusqu’à la Severn[131]. De son côté, le comte de Cambridge fait à Plymouth[132] tous ses préparatifs de départ pour le Portugal[133]. Il emmène avec lui sa femme, la princesse Isabelle, et son fils Jean[134]. Les chevaliers qui doivent l’accompagner sont nombreux; ce sont Matthieu de Gournai[135], connétable de l’armée, le Chanoine de Robersart[136], Raimond de Castelnau[137], Guillaume de Beauchamp[138], maréchal de l’armée, le syndic de Latrau[139], Jean de la Barthe, Richard Talbot[140], Guillaume Elmham, Thomas Simond[141], Miles de Windsor[142], Jean de Sandwich[143] et d’autres encore[144]; parmi eux, Jean-Fernandez[145], le chevalier portugais. L’expédition compte 500 hommes d’armes et 500 archers[146]. Ils attendent plus de trois semaines à Plymouth un vent favorable.

Pendant ce temps, le duc de Lancastre arrive à Berwick[147], obtient un sauf-conduit du roi Robert et s’achemine par Roxburgh vers l’abbaye de Melrose, où il attend que les Écossais soient réunis au Lammerlaw, pour entamer les négociations, qui durent plus de quinze jours. P. 91 à 94, 327, 328.

Une révolution éclate en Angleterre, qui met le royaume bien près de sa perte. Les serfs des comtés de Kent, d’Essex, de Sussex et de Bedford se soulèvent et prétendent être payés de leur travail[148].

Ils sont poussés à cet esprit de révolte par un prêtre de Kent, Jean Ball[149], puni, à plusieurs reprises, par l’archevêque de Cantorbéry, qui prêche l’égalité de tous les hommes[150], excite le peuple à la haine des riches et des nobles et engage ses auditeurs à aller à Londres demander justice au roi. Les habitants de Londres murmurent de leur côté et appellent à eux les gens des provinces. P. 94 à 97, 328, 329.

Cet appel est entendu; les gens de Kent, d’Essex, de Sussex, de Bedford et des pays environnants, au nombre de 60,000, se dirigent sur Londres. Ils ont pour chefs Jean Ball, Jack Straw[151] et Wat Tyler[152], un couvreur en tuiles, le plus populaire des trois. A leur approche, les habitants de Londres, sauf ceux qui partagent ces idées, ont peur et songent à fermer leurs portes; mais, craignant l’incendie des faubourgs, ils laissent pénétrer dans leur ville ces bandes de paysans, qui, venues parfois de cent lieues, ne savent guère ce qu’ils veulent et ne demandent qu’à voir le roi. Effrayés, les nobles s’apprêtent à la lutte.

Le jour de leur arrivée à Londres, les gens de Kent rencontrent en chemin la mère du roi[153], qui revenait de Cantorbéry. Molestée par eux, elle se hâte de se rendre auprès de son fils. Elle le trouve entouré de son conseil, du comte de Salisbury, de l’archevêque de Cantorbéry[154], de Robert de Namur, de Jean de Gommegnies et d’autres qui, depuis longtemps déjà, avaient connaissance de ce mouvement populaire et auraient dû y pourvoir[155]. P. 97 à 99, 329 à 331.

C’est le lundi 10 juin 1381 que les bandes commandées par Jean Ball, Wat Tyler et Jack Straw entrent à Cantorbéry et envoient des émissaires dans les autres comtés pour leur donner rendez-vous le jour de la Fête-Dieu (13 juin) ou le lendemain, sous les murs de Londres; elles pillent les abbayes de Saint-Thomas et de Saint-Vincent[156], et, le lendemain, prennent le chemin de Rochester, abattant les maisons des gens de loi et entraînant à leur suite les habitants des villages.

Arrivés à Rochester, les insurgés, bien accueillis par la population, s’emparent de Jean Newton[157], capitaine de la ville, et l’emmènent avec eux sous menace de mort.

Dans toutes les autres parties de l’Angleterre, jusqu’à Lynn[158] et à Yarmouth[159], les mêmes violences se produisent, et des chevaliers tels que Thomas de Morley[160], Étienne de Hales[161] et Étienne de Cosyngton sont contraints de marcher avec les révoltés. P. 100 à 102, 331, 332.

Les insurgés partent de Rochester et s’acheminent vers Londres; ils passent la rivière à Brentford[162], puis s’établissent sur la montagne de Blackheath[163], à quatre lieues de Londres. Le maire, Jean Walworth[164], et les notables font fermer et garder la porte du pont de la Tamise. Plus de 30,000 habitants partagent les idées des émeutiers.

Ces derniers députent Jean Newton vers le roi, pour lui demander de venir les trouver et pour se plaindre du mauvais gouvernement du royaume. Le roi leur promet de venir les voir le lendemain jeudi 13 juin. P. 102 à 104, 332, 333.

Le comte de Buckingham ne quitte pas, durant tout ce temps, le pays de Galles, où sa femme[165], fille du comte de Northampton, possède des terres[166]. Le bruit court cependant à Londres qu’il accompagne les émeutiers, et cela à cause d’un certain Thomas, de Kent, qui lui ressemble.

Le comte de Cambridge et ses barons, craignant de voir arrêter leur expédition par cette révolution, mettent à la voile malgré le vent et sont obligés de jeter l’ancre devant Plymouth.

Le duc de Lancastre, malgré les craintes qu’il ressent pour lui-même du mauvais état des choses, car il se sait peu aimé, n’en continue pas moins à traiter avec les barons écossais, les comtes de Douglas, de Moray, de Sutherland, Thomas d’Erskine[167] et autres, qui se montrent d’autant plus difficiles qu’ils sont au courant de ce qui se passe. P. 104 à 106, 333.

Le jour de la Fête-Dieu arrive (13 juin); le roi entend la messe et, accompagné des comtes de Salisbury, de Warwick, d’Oxford et de quelques chevaliers, il se dirige en bateau vers la rive droite du fleuve, du côté de son château de Rotherhithe[168]. Plus de 10,000 hommes l’accueillent par des cris; très effrayé, il n’aborde pas, et rentre au château de Londres.

Furieux de leur déconvenue, les émeutiers envahissent les faubourgs de Londres, saccagent les maisons des gens d’église et de cour, abattent la prison des Maréchaussées[169], délivrent les prisonniers et se présentent aux portes de la ville.

Le peuple leur ouvre les portes[170]; et ces gens affamés se jettent sans mesure sur les vivres et sur les boissons qu’on leur donne pour les apaiser.

Jean Ball, Jack Straw et Wat Tyler, avec une troupe de plus de 30,000 compagnons, brûlent l’hôtel de Savoie[171], propriété du duc de Lancastre, la maison des Hospitaliers connue sous le nom de Saint-Jean de Clerkenwell[172]; puis parcourent les rues, tuent les Flamands[173] qu’ils aperçoivent, forcent et pillent les habitations des Lombards; enfin, rencontrant un riche homme, Richard Lyons[174], qui avait autrefois, pendant les guerres de France, battu Wat Tyler, son valet alors, ils lui coupent la tête, qu’ils promènent en trophée par toute la ville. P. 106 à 108, 333, 334.

Le soir, les insurgés campent sur la place Sainte-Catherine[175], devant la Tour et le château de Londres; ils veulent, disent-ils, que le roi écoute leurs doléances et que le chancelier rende compte de tout l’argent qui, depuis cinq ans, a été levé dans le pays.

Le roi et son conseil, se tenant dans la Tour de Londres, sont prêts à écouter l’avis de Walworth, qui veut à minuit tomber sur tout ce monde et le massacrer. Robert Knolles a plus de 120 compagnons sous ses ordres; de même Perducat d’Albret. Avec ses chevaliers, les notables de la ville et leurs valets, le roi peut opposer au moins 7 ou 8,000 hommes aux 60,000 émeutiers. Mais le peuple de Londres n’est pas sûr; mieux vaut, comme le conseillent le comte de Salisbury et d’autres, accorder ce que demandent ces gens. On n’attaque donc point. P. 108 à 110, 334, 335.

Le vendredi matin, le peuple demande à parler au roi; il menace d’assiéger le château. Le roi leur fait dire par le maire d’aller hors de Londres, à Mile-End[176], où il ira les trouver et leur accordera ce qu’ils réclament.

Les émeutiers quittent donc peu à peu la ville, mais non pas tous. Aussitôt que le roi, ses deux frères et les barons de sa suite sont sortis, 400 bandits, conduits par Jean Ball, Jack Straw et Wat Tyler, pénètrent dans les chambres du château[177] et massacrent l’archevêque de Cantorbéry, Simond de Sudbury, chancelier d’Angleterre; de même sont tués le grand prieur des Hospitaliers[178], un frère mineur, médecin du duc de Lancastre[179], et Jean Leg[180], sergent d’armes du roi; les quatre têtes sont placées sur le pont de Londres[181].

Les misérables entrent aussi dans la chambre de la mère du roi, dont ils mettent le lit en pièces; la malheureuse femme, à demi morte de peur, est transportée en bateau à la Tour royale, à la Garde-robe de la reine[182], où elle reste toute la journée et la nuit suivante[183]. P. 110 à 112, 335, 336.

Le roi s’avance avec une faible escorte sur la place de Mile-End, où l’abandonnent ses deux frères et Jean de Gommegnies. Il s’adresse alors au peuple, et, après des pourparlers, il promet l’abolition du servage; chaque village aura sa charte d’affranchissement et sa bannière; tout est pardonné. L’apaisement se fait, les insurgés rentrent à Londres, et, à mesure que sont écrites les chartes[184], ils les emportent et rentrent dans leurs pays. Tous cependant ne partent pas; près de 30,000 restent à Londres avec Wat Tyler, Jack Straw et Jean Ball, attendant une occasion de pillage[185].

Le roi, voyant la rébellion un moment apaisée, se rend à la Tour royale pour rassurer sa mère: il y passe la nuit du vendredi. P. 112 à 114, 336.

Les mêmes scènes de désordre se présentent ailleurs, à Norwich[186], entre autres, où les bandes de Lynn, de Cambridge et de Yarmouth, conduites par Guillaume Lister[187], ne pouvant persuader au capitaine de la ville, Robert Sall[188], de venir avec elles, le tuent lâchement, le jour même de la Fête-Dieu, alors qu’à Londres on brûle l’hôtel de Savoie et qu’on brise les portes de la prison de Newgate[189]. P. 114 à 116, 336, 337.

Le samedi matin, 15 juin, le roi quitte la Tour royale, va à Westminster faire ses dévotions, mais n’ose entrer à Londres; arrivé près de l’abbaye de Saint-Barthélemi[190], il tombe, à Smithfield[191], au milieu des partisans de Wat Tyler, qui, au nombre de 20,000, munis de leurs nouvelles bannières, s’apprêtent à piller la ville, avant que les autres bandes, conduites par Guillaume Lister et Thomas Baker[192], ne soient arrivées des autres comtés.

Wat Tyler s’avance au-devant du roi, se prend de querelle avec un des écuyers et est frappé par le maire de Londres, Jean Walworth: un écuyer, Jean Standish[193], descend de cheval et l’achève. La foule se montre hostile et va faire un mauvais parti au roi, quand des renforts lui arrivent, 7 à 8,000 hommes, amenés par Robert Knolles, Perducat d’Albret, les neuf échevins fidèles et Nicolas Brembre. Fort de cet appui, le roi crée trois nouveaux chevaliers[194]: Jean Walworth, Jean Standish et Nicolas Brembre[195], et fait redemander aux insurgés, par ces trois chevaliers, les bannières qui leur avaient été distribuées. Les bannières sont rendues, déchirées sur place, et la foule rentre sans résistance dans Londres, au grand déplaisir de Robert Knolles, qui eût voulu tuer tout ce monde[196]. Le roi rentre à la Tour royale pour revoir sa mère. Défense est faite à quiconque n’est pas natif de Londres ou n’y demeure pas depuis un an d’y séjourner plus tard que le dimanche suivant, sous peine de mort. Chacun s’en retourne donc dans son pays[197]. Jean Ball[198] et Jack Straw[199], découverts dans leur cachette, sont décapités, ainsi que Wat Tyler[200]. Ces exécutions arrêtent la marche des bandes qui, appelées par les gens du Kent, se disposaient à venir à Londres. P. 116 à 124, 337 à 340.

En Écosse, le duc de Lancastre a conclu une trêve de trois ans[201]; muni d’un sauf-conduit donné par les barons écossais, il veut entrer à Berwick, mais l’entrée de la ville lui est interdite par le capitaine Matthieu Redman[202], au nom du duc de Northumberland, qui a donné ordre de ne laisser pénétrer qui que ce fût dans les villes[203].

Le duc dissimule la colère qu’il ressent de cet affront et se retire à Roxburgh, dont le châtelain lui appartient. P. 124 à 127, 340, 341.

Ignorant de ce qui se passe exactement en Angleterre, le duc demande alors aux barons d’Écosse de le recevoir dans leur pays; ils viennent le chercher avec 500 lances et l’accompagnent à Édimbourg, où, logé au château, il attend de meilleures nouvelles d’Angleterre.

Le bruit court cependant que le duc a trahi le roi et a embrassé le parti écossais; propos haineux et mensongers propagés par les mêmes hommes qui, à Londres, brûlent l’hôtel de Savoie, propriété du duc[204]. P. 127 à 129, 341, 342.

Quand le calme est rétabli, que Baker à Saint-Albans[205], Lister à Stafford[206], Tyler, Ball et Straw à Londres ont payé de leurs vies leur rébellion, le roi décide qu’il parcourra son royaume pour punir les coupables et reprendre les lettres d’affranchissement qu’il n’avait accordées que contraint et forcé. Il part pour le comté de Kent avec 500 lances[207], et arrive à Ospringe[208]: sept des coupables sont pendus, les lettres sont déchirées. Les mêmes exécutions (plus de 1,500) ont lieu à Cantorbéry, à Sandwich, à Yarmouth, à Orwell[209] et ailleurs[210].

Le roi envoie alors un de ses chevaliers, Nicolas Carnefelle, vers le duc de Lancastre, pour lui donner ordre de revenir[211]. Le duc obéit, quitte Édimbourg et va à Roxburgh remercier de leur bon accueil les barons écossais, qui l’accompagnent jusqu’à Melrose; puis il s’achemine vers Londres par Newcastle, Durham et York[212].

A cette époque, meurt Guichard d’Angle, comte de Huntingdon, aux obsèques duquel assistent le roi et toute la cour[213]. P. 129 à 132, 342, 343.

De retour en Angleterre, le duc de Lancastre expose au roi ce qu’il a fait au sujet des trêves d’Écosse, mais garde en son cœur rancune au comte de Northumberland, qui lui a fermé les portes de Berwick. Les fêtes de l’Ascension (15 août) arrivent; le roi tient cour plénière à Westminster. Désireux d’aller à Reading[214], à Oxford et à Coventry châtier les rebelles, comme en Sussex et en Kent, il crée de nouveaux chevaliers: le jeune comte Jean de Pembroke[215], Robert Brembre[216], Nicolas Twyford[217] et Adam Fraunceys[218]. A cette solennité assistent de nombreux barons. En leur présence, le duc de Lancastre reproche son action au comte de Northumberland et le défie. Le roi s’interpose et justifie le comte, qui n’a agi que par ses ordres. Ses ordres étaient formels; on a seulement oublié de faire une exception en faveur du duc, la faute en est à un scribe négligent. Ces explications et les supplications des barons décident le duc à faire la paix avec le comte[219]. Le roi part le surlendemain avec 500 lances et 500 archers, pour de nouvelles exécutions[220]. P. 132 à 135, 343, 344.

Le vent se montre enfin favorable, et le comte de Cambridge cingle vers Lisbonne. Sa flotte est assaillie le troisième jour par une tempête terrible, qui sépare les navires. Le comte de Cambridge et la majeure partie de son expédition entrent dans le port de Lisbonne[221], ignorant ce que sont devenus les chevaliers gascons Castelnau, la Barthe, le syndic de Latrau et quarante hommes d’armes.

Le roi Ferdinand, qui caresse le projet de marier sa fille[222] avec le jeune fils du comte de Cambridge[223], accueille avec joie les chevaliers anglais, qui, au milieu de toutes les réjouissances qu’on leur prodigue[224], songent à leurs compagnons perdus, jetés peut-être par la mer sur les côtes mauresques. Les chevaliers gascons, en effet, ballottés sur les côtes du Maroc et du royaume de Tlemcen, risquent, pendant quarante jours, d’être pris par les Sarrasins. Le vent les ramène enfin dans la mer d’Espagne. Ils se dirigent d’abord sur Séville, où, sur la foi de marchands rencontrés en mer, ils croient que le roi de Castille est assiégé par le roi de Portugal et les Anglais. Détrompés par la vue tranquille de la ville, ils arrivent à Lisbonne et entrent au port, juste au moment où, les croyant morts, leurs compagnons célèbrent un service funèbre en leur honneur dans l’église Sainte-Catherine[225]. La joie est grande de leur retour. P. 135 à 139, 344, 345.

CHAPITRE XIV.

1381, juillet. LE COMTE DE FLANDRE ASSIÈGE DE NOUVEAU GAND.—MORT DE GAUTHIER D’ENGHIEN.Octobre. CONFÉRENCES D’HAERLEBEKE.—1382, janvier. MEURTRES DE SIMON BETTE ET DE GILBERT DE GRUTERE; PUISSANCE DE PHILIPPE D’ARTEVELDE. (§§ 228 à 234[226]).

Philippe d’Artevelde, une fois maître du pouvoir à Gand[227], suit les conseils de Pierre du Bois, qui le pousse à la cruauté, et fait tuer douze des meurtriers de son père; il consolide sa puissance en s’appuyant surtout sur les gens sans aveu. Du reste, tous les partis sont d’accord dans la ville et se soutiennent mutuellement.

Tandis que le doyen des tisserands, chez qui on trouve de la poudre de mine toute mouillée, est accusé de trahison et mis à mort[228], le comte de Flandre s’apprête à faire de nouveau le siège de Gand et convoque ses vassaux. Sa mère, la comtesse d’Artois, vient de mourir[229]. P. 139 à 141, 345.

Gauthier d’Enghien se garde de manquer à l’appel et, durant le siège de Gand, il se distingue dans maintes escarmouches, lui et ses chevaliers de Hainaut. C’est ainsi qu’un dimanche de juin, il prend et brûle la ville de Grammont, y tue plus de 500 hommes, et vient recevoir les félicitations du comte sous les murs de Gand[230]. P. 141, 142, 346.

Un mois après, un jeudi, accompagné de plusieurs chevaliers, il est surpris par une embuscade de Gantois et massacré[231]. Avec lui sont tués le seigneur de Montigni, son fidèle compagnon, le bâtard d’Enghien, son frère, et Gilles du Trisson. Blessé grièvement, Michel de la Hamaide, cousin de Gauthier d’Enghien, n’est sauvé que grâce à Hustin du Lai. Le corps du seigneur d’Enghien est rendu par les Gantois contre paiement de 1,000 francs: on l’enterre à Enghien[232]. P. 142 à 145, 346, 347.

Désespéré de la mort de Gauthier d’Enghien, le comte lève le siège de Gand et s’en retourne à Bruges, après avoir établi des garnisons dans les villes voisines. Il ne peut obtenir des Liégeois qu’ils renoncent à ravitailler les Gantois; il est plus heureux auprès du duc de Brabant. Le duc Aubert transmet ses ordres à son bailli de Hainaut, Simon de Lalaing[233], qui les fait exécuter en Hainaut, mais non en Hollande et en Zélande[234].

Cependant, des conférences s’ouvrent à Haerlebeke, où le comte et les villes de Flandre envoient des représentants[235], comme aussi les pays de Brabant, de Hainaut et de Liège. Les Gantois sont au nombre de douze, parmi eux Gilbert de Grutere[236] et Simon Bette. La paix, désirée par tous les gens paisibles, est décidée sous certaines conditions; et les Gantois rentrent dans leur ville. Gilbert de Grutere et Simon Bette annoncent à leurs amis que bientôt la paix sera signée, joyeuse pour les honnêtes gens, mais funeste pour les mauvais citoyens. P. 145 à 147, 347, 348.

Informé de ce qui se passe et voyant dans les paroles de Gilbert de Grutere et de Simon Bette une menace pour lui, Pierre du Bois, d’accord avec Philippe d’Artevelde, convoque ses gens pour le jour où le traité doit être rendu public dans la halle de Gand. P. 147 à 149, 348, 349.

Le jour dit, à neuf heures du matin, les échevins et les notables de la ville se réunissent pour entendre ceux d’entre eux qui sont allés à Haerlebeke. Gilbert de Grutere et Simon Bette prennent la parole et expliquent comment, grâce à l’intervention des ducs de Brabant et de Bavière, le comte consent à la paix, sous la condition que dans les quinze jours on lui livre 200 otages, qu’il désignera lui-même, pour aller à Lille se mettre à sa merci. Pierre du Bois se montre alors et reproche à Gilbert Grutere d’avoir trahi la ville en disposant ainsi de la vie de 200 de ses concitoyens: tirant sa dague, il le frappe à mort; Philippe d’Artevelde poignarde de son côté Simon Bette. Une émeute semble poindre; elle se calme bientôt, tandis que le comte, apprenant à Bruges ces deux meurtres, jure de se venger[237]. P. 149 à 151, 349, 350.

Les Gantois pleurent tout bas ces deux victimes, mais ils sont terrorisés[238] et continuent à souffrir de la guerre, exposés à être faits prisonniers par les garnisons qui les guettent, et ne recevant plus de vivres ni du Brabant ni du Hainaut. P. 151, 152, 350.

CHAPITRE XV.

1382, 24 février. RÉVOLTE A ROUEN.—1er mars. ÉMEUTE DES MAILLOTINS.—14 janvier. MARIAGE DU ROI RICHARD II ET D’ANNE DE BOHÊME.—22 février. LE DUC D’ANJOU ARRIVE A AVIGNON.—13 juin. IL PART POUR L’ITALIE.—14 octobre. IL PÉNÈTRE SUR LE TERRITOIRE NAPOLITAIN.Mai-juin. CHEVAUCHÉE DES ANGLAIS EN ESTRAMADURE.—Août. COMMENCEMENT DES POURPARLERS DE PAIX ENTRE LE PORTUGAL ET LA CASTILLE.—Octobre. DÉPART DU COMTE DE CAMBRIDGE (§§ 234[239] à 262).

Les Parisiens, eux aussi, s’insurgent à la même époque contre le roi, qui veut rétablir les aides et autres impôts dont la suppression, accordée par feu Charles V, avait été confirmée lors du couronnement à Reims[240].

Le roi et son conseil sont forcés de se réfugier à Meaux[241]; le peuple de Paris prend les armes[242], massacre les collecteurs, ouvre les portes des prisons[243], pille les maisons[244] et délivre Hugues Aubriot[245], ancien prévôt du Châtelet, condamné à la prison pour ses méfaits dignes du feu: il se hâte de fuir en Bourgogne.

Effrayé de cette émeute, le roi se décide à envoyer aux Parisiens le sire de Couci[246], pour traiter avec eux. P. 152, 153, 350.

Sans autre suite que sa domesticité ordinaire, le sire de Couci se rend à Paris, descend à son hôtel et entre en négociations avec les chefs des émeutiers. En échange de la suppression des aides, ceux-ci s’engagent à payer chaque semaine à un receveur spécial du roi la somme de 10,000 francs, destinée uniquement à la solde des gens d’armes. Le roi, espérant mieux de l’avenir, accepte ce marché, mais reste éloigné de Paris[247]. P. 153 à 155, 350, 351.

Même insurrection à Rouen au sujet des aides; meurtres du châtelain et des collecteurs. Craignant que l’exemple ne soit contagieux pour les autres villes, le roi arrive à Rouen, apaise la révolte et obtient pour chaque semaine une somme qui sera payée à un receveur spécial[248]. P. 155, 156, 351.

Désireux de conquérir le royaume, dont le pape Clément l’a déclaré héritier, le duc d’Anjou prépare sa campagne d’Italie[249]. Ne négligeant rien pour se faire bienvenir des Parisiens, dont il espère obtenir des subsides, il s’entend avec le duc de Savoie[250], qui, moyennant 500,000 florins, lui fournira mille lances pour un an. Le duc, de son côté, engage à sa solde 9,000 hommes d’armes[251] et s’occupe de tous les préparatifs nécessaires à un long voyage. P. 156, 157, 351, 352.

Pendant que le comte de Cambridge et ses gens se reposent à Lisbonne, on célèbre le mariage de Jean[252], fils du comte de Cambridge, et de Béatrice, fille du roi de Portugal, tous deux âgés de dix ans ou à peu près. Les enfants sont couchés nus dans le même lit.

Après les fêtes du mariage[253], le roi assigne comme garnison au comte de Cambridge et à ses gens la ville d’Estremoz[254]; aux chevaliers anglais et gascons Villa Viçosa[255], leur recommandant de ne faire aucune chevauchée sans sa permission. Pendant ce temps, le roi de Castille[256], séjournant à Séville, fait venir des renforts de France. P. 157 à 159, 352.

Désireux de ne pas rester inactifs dans leur garnison de Villa Viçosa, le Chanoine de Robersart et les autres chevaliers gascons et anglais[257] envoient un des leurs, Jean de Sandwich, demander au roi l’autorisation de faire une chevauchée en pays ennemi. Refus du roi. Les chevaliers décident d’agir quand même, et, avec 400 hommes d’armes et 400 archers, ils partent un jour, sous les ordres du Chanoine, pour aller assiéger le château de Higuera[258], défendu par les frères Pierre et Barthélemi Gouse[259]. P. 159 à 161, 352, 353.

L’assaut est donné, où se distingue tout particulièrement un jeune écuyer de Hainaut nommé Froissart Meulier[260]. Les Espagnols, ayant perdu un de leurs chefs, Barthélemi Gouse, parlementent[261] et livrent le château, où ils laissent leurs armes et bagages. Ils se dirigent vers Xérès[262], espérant y trouver le grand maître de Saint-Jacques[263], qui, de son côté, à la tête de 400 hommes d’armes, cherche les Anglais pour les combattre. P. 161 à 163, 353, 354.

Les Anglais laissent une garnison à Higuera et retournent en trois routes à Villa Viçosa. La route commandée par le Chanoine de Robersart aperçoit en chemin, entre Olivenza[264] et Alconchel[265], les gens du grand maître de Saint-Jacques, qui, malgré leur nombre, n’osent attaquer. P. 163, 164, 354, 355.

Tout l’hiver se passe sans nouvelle chevauchée[266]. Le roi Jean de Castille demande alors secours au roi de France, qui lui envoie Olivier du Guesclin et autres chevaliers[267] de toutes les provinces de France. Ces nouvelles troupes traversent l’Aragon pour se rendre auprès du roi Jean. P. 164, 165, 355.

Grâce aux négociations de Simon Burley[268], le mariage du roi d’Angleterre et d’Anne de Bohême est décidé. La sœur du roi des Romains[269], accompagnée du duc de Tesschen[270] et de nombreux chevaliers, s’achemine vers Bruxelles, où elle est reçue avec joie par le duc et la duchesse de Brabant[271] et séjourne plus d’un mois par crainte des bateaux normands qui croisent en vue des côtes.

Le duc envoie alors à la cour de France deux messagers[272] chargés d’obtenir un sauf-conduit, ce qui est facilement accordé. La jeune princesse, escortée par 100 lances brabançonnes, se rend à Gand, puis à Bruges, où le comte de Flandre lui fait bon accueil; de là à Gravelines, puis à Calais, où elle entre en compagnie des 500 lances et des 500 archers[273] que les comtes de Salisbury et de Devonshire lui ont amenés entre Gravelines et Calais[274]. P. 165 à 168, 355, 356.

Anne de Bohême quitte bientôt Calais[275] grâce à un vent favorable et débarque à Douvres[276]. De là elle se rend à Cantorbéry, où elle est reçue par le comte de Buckingham, enfin à Londres[277]. (Depuis Maestricht, la nouvelle reine est escortée par Robert de Namur.) Le roi l’épouse à Westminster le 14 janvier 1382, au milieu de grandes réjouissances[278], et l’emmène auprès de sa mère à Windsor, où se trouve aussi la duchesse de Bretagne, Marie, qu’on ne veut pas laisser retourner auprès de son mari, accusé de pactiser avec le roi de France. On propose alors aux deux fils de Charles de Blois, Jean et Gui, prisonniers en Angleterre sous la garde de Jean d’Aubrecicourt, de leur rendre l’héritage paternel sous condition d’en faire hommage au roi d’Angleterre; l’aîné épouserait Philippine, fille du duc de Lancastre et de la duchesse Blanche[279]. Les deux princes refusent, préférant mourir en prison que d’abandonner leur qualité de bons Français. P. 168, 169, 356, 357.

Ayant besoin d’argent pour la solde des gens d’armes qu’il envoie au secours du roi de Castille, le roi demande au receveur de Paris, à qui chaque semaine, comme cela est convenu, est payée une certaine somme de florins, de lui avancer 100,000 francs. Celui-ci refuse de le faire sans le consentement de la commune de Paris. Mécontent, le roi demande l’argent à ses bonnes villes de Picardie[280].

Tandis que le roi, ne venant point à Paris, réside soit à Meaux, soit à Senlis, soit à Compiègne[281], le duc d’Anjou se fait le défenseur des Parisiens et sait si bien leur parler que, pour sa campagne d’Italie, il obtient d’eux 100,000 francs sur les sommes recueillies par le receveur royal, auxquelles ni le roi ni ses autres oncles ne peuvent toucher[282] (le duc avait, dit-on, rassemblé à Roquemaure[283], près d’Avignon, deux millions de florins).

Ses préparatifs faits, au commencement du printemps, le duc part pour Avignon[284], où il est bien reçu par le pape[285]; les villes de Provence, excepté Aix[286], lui font hommage. A Avignon ont lieu les paiements convenus au comte Amédée de Savoie et aux chevaliers qu’il a amenés[287].

Le duc, accompagné du comte, fait route par le Dauphiné[288] jusqu’en Savoie[289] et en Lombardie[290]. A Milan, il reçoit les présents des seigneurs Galéas et Bernabo[291], et, tenant état de roi, battant monnaie, il traverse la Toscane et s’approche de Rome[292]. Défendu par les bandes de Jean Hawkwood[293], le pape Urbain ne craint point les 9,000 lances du duc d’Anjou, du comte de Savoie et du comte de Genève[294]. P. 170 à 173, 357, 358.

Le duc évite Rome, côtoyant la marche d’Ancône et le Patrimoine[295]. Pendant ce temps, Charles de la Paix est à Naples, s’apprêtant à soutenir ses droits au trône: héritier naturel de la reine Jeanne[296], il n’admet point, avec les Napolitains et les Siciliens, qu’elle ait pu disposer de son royaume en faveur de l’antipape Clément.

Il se contente de pourvoir d’hommes et de vivres le château de l’Œuf, imprenable sinon par magie, et compte sur le temps pour rentrer en possession de ses provinces, sachant bien qu’une armée, fût-elle de 30,000 hommes[297], finit toujours, loin de son pays, à s’épuiser et à manquer d’argent. P. 173 à 175, 358, 359.

Le duc arrive en Pouille et en Calabre, pays riches et fertiles, et reçoit la soumission des villes. Les habitants de Naples laissent leurs portes ouvertes, sachant bien que les gens du duc n’oseront point s’aventurer dans leurs rues dangereuses[298].

Mise à mort de l’enchanteur, qui propose au duc de le rendre maître du château de l’Œuf[299]. P. 175 à 178, 359, 360.

Au commencement d’avril, les chevaliers qui ont tenu garnison tout l’hiver à Villa Viçosa envoient à Estremoz le syndic de Latrau, pour demander au comte de Cambridge l’autorisation de chevaucher. Le comte leur dit de patienter jusqu’à l’arrivée du duc de Lancastre, qui doit venir avec une grosse armée. Le roi de Portugal, en même temps, leur députe Jean Fernandez[300] pour leur défendre toute action.

Malgré tout, les chevaliers sont résolus à marcher et décident Jean Fernandez à les suivre. P. 178 à 181, 360, 361.

Ils partent[301] et arrivent sous les murs de Lobon[302]; la ville se rend, ainsi que le château. Plus loin, ils assiègent et prennent Cortijo[303]. P. 181 à 183, 361, 362.

Ils continuent leur chevauchée: Zafra[304] est pris et pillé; ils s’emparent d’une grande quantité de bétail et rentrent à Villa Viçosa.

De retour à Lisbonne, Jean Fernandez est emprisonné sur l’ordre du roi, pour avoir, contrairement aux instructions données, fait chevauchée avec les chevaliers gascons et anglais. P. 183, 184, 362.

Rentrés à Villa Viçosa, les chevaliers envoient à Lisbonne Richard Talbot demander au roi le paiement de leurs gages, dus depuis près d’un an. Le roi reçoit fort mal le messager et lui reproche de lui avoir désobéi en chevauchant.

Le comte de Cambridge, que les chevaliers accusent d’avoir reçu leurs gages et de ne pas les avoir payés, quitte alors Estremoz pour venir à Villa Viçosa recevoir leurs plaintes. P. 184, 185, 362, 363.

Réunion orageuse des chevaliers, qui lèvent l’étendard de Saint-Georges, mettent à leur tête le bâtard Jean Sounder[305] et veulent guerroyer contre le roi de Portugal. P. 185 à 187, 363.

Le Chanoine les apaise et leur conseille de parler au comte de Cambridge. Celui-ci les engage à envoyer trois des leurs réclamer leurs gages au roi. P. 187 à 189, 363, 364.

Les trois chevaliers sont désignés: Guillaume Elmham par les Anglais, Thomas Simond par les Allemands et autres étrangers, Castelnau par les Gascons. Ils partent. Le roi leur promet qu’ils seront payés dans quinze jours; mais il désire que le comte de Cambridge vienne le voir. P. 189 à 191, 364.

Le comte de Cambridge se rend donc à Lisbonne auprès du roi, et tous deux se résolvent à chevaucher. Le roi convoque ses hommes d’armes, qui devront se trouver le 7 juin au rendez-vous, fixé entre Villa Viçosa et Olivenza.

Le comte, après avoir obtenu la grâce de Jean Fernandez, qui sort de prison, retourne à Villa Viçosa. Peu après, les gages des chevaliers sont payés. P. 191, 364, 365.

Le roi de Castille, apprenant à Séville les intentions du roi Ferdinand, lui fait demander de désigner, soit en Portugal, soit en Espagne, le champ de bataille où les deux armées se rencontreront. Le roi de Portugal choisit un emplacement entre Elvas[306] et Badajoz. P. 191 à 193, 365.

Il vient camper à la place convenue avec environ 15,000 hommes; de même le comte de Cambridge, avec 600 hommes d’armes et 600 archers[307]. A cette nouvelle, le roi d’Espagne prend position à deux petites lieues de Badajoz avec plus de 30,000 hommes[308]. P. 193, 194, 365, 366.

Les deux armées sont séparées par la montagne où est située Badajoz. Pendant quinze jours, ce ne sont qu’escarmouches, où s’exercent les jeunes chevaliers. Le roi de Portugal hésite à livrer bataille: il ne se sent pas assez fort pour s’y risquer et attend toujours les 4,000 hommes d’armes et les 4,000 archers que doit lui amener le duc de Lancastre. Mais les émeutes d’Angleterre et les événements de Flandre[309] ont empêché le départ de ces renforts.

Des négociations s’engagent alors entre Martin, évêque de Lisbonne[310], et Pierre Moniz, grand maître de l’ordre de Calatrava, don Pierre de Mendoça, don Pero Ferrandez de Velasco[311], Fernand d’Osorès, grand maître de l’ordre de Saint-Jacques, et Jean de Mayorga, évêque d’Astorga[312]: la paix est signée[313] à l’insu du comte de Cambridge et des Anglais, qui reprochent au roi de Portugal sa dissimulation[314]. P. 194 à 196, 366.

Après une joute brillante entre Tristan de Roye, jeune chevalier français du roi de Castille, et Miles de Windsor, chevalier anglais, les deux armées se séparent. P. 196 à 198, 366.

Une partie des chevaliers français, parmi eux Tristan de Roye, Geoffroi de Charni le jeune, Pierre de Villaines et Robert de Clermont, prennent congé du roi de Castille pour se mettre au service du roi de Grenade[315], alors en guerre avec les rois de Barbarie[316] et de Tlemcen[317]. Quelques Anglais se joignent à eux, mais en petit nombre; les autres regagnent l’Angleterre avec le comte de Cambridge[318] et le jeune prince, mari de la princesse de Portugal.

Un an après meurt la reine d’Espagne, Éléonore d’Aragon[319]. Le roi, devenu veuf, épouse Béatrice de Portugal[320], dont le pape annule le mariage avec le fils du comte de Cambridge; il en a un fils[321].

Le roi Ferdinand de Portugal meurt peu de temps après[322]; mais les Portugais, ne voulant pas être gouvernés par le roi d’Espagne, nomment roi le frère bâtard de Ferdinand, Jean, grand maître de l’ordre d’Avis[323]. De là les nombreuses guerres qui divisèrent l’Espagne et le Portugal. P. 198 à 200, 366, 367.

De retour en Angleterre, le comte de Cambridge explique au duc de Lancastre comment le roi de Portugal, ne voyant pas arriver les renforts annoncés, a dû se résoudre à la paix sans combattre. Pour lui, quoi qu’il puisse arriver, il a ramené avec lui son fils, croyant avoir agi pour le mieux[324]. P. 200, 201, 367, 368.

CHAPITRE XVI.

1382, avril. CONFÉRENCE DE TOURNAI; PROPOSITIONS INACCEPTABLES DU COMTE DE FLANDRE.3 mai. BATAILLE DE BEVERHOUTSVELD; VICTOIRE DES GANTOIS; PRISE DE BRUGES; FUITE DU COMTE.Commencement de juin. SIÈGE D’AUDENARDE PAR PHILIPPE D’ARTEVELDE.Août. ASSEMBLÉE A COMPIÈGNE DES NOBLES ET DES PRÉLATS.Septembre-octobre. PHILIPPE NÉGOCIE AVEC L’ANGLETERRE.3 novembre. LE ROI DE FRANCE ARRIVE À ARRAS POUR PRÊTER SECOURS AU COMTE DE FLANDRE ET S’APPRÊTE À ENTRER EN FLANDRE AVEC SON ARMÉE (§§ 263 à 312).

La guerre de garnisons continue entre les Flamands fidèles au comte et les Gantois, qui ne reçoivent de vivres que du comté d’Alost et des Quatre-Métiers; encore ceux d’Alost, poursuivis et harcelés par les gens de Termonde, ne peuvent-ils continuer à les secourir.

D’accord avec le duc Aubert et le duc de Brabant, le comte empêche le blé de pénétrer dans la ville de Gand; la famine est imminente[325] et Philippe d’Artevelde fait ouvrir les greniers des abbayes et des riches bourgeois et vendre le blé à un taux fixé[326].

Malgré quelques secours venus de Hollande, de Zélande et parfois de Brabant, la ville manque de tout à l’époque du carême.

Douze mille hommes, poussés par la faim, s’acheminent alors vers Bruxelles et Louvain, où ils trouvent des vivres[327]. Leur chef, François Ackerman[328], demande aux Liégeois et à leur évêque, Arnould de Hornes[329], d’intervenir auprès du comte et de leur laisser faire de copieuses provisions. P. 201 à 204, 368, 369.

La permission est accordée; en deux jours, six cents chars sont remplis de farine et de blé. François Ackerman songe alors au retour; mais, en passant par Vilvorde[330], il s’avise d’aller trouver à Bruxelles, au palais de Caudenberg[331], la duchesse de Brabant. Celle-ci, en l’absence du duc, promet aux Gantois d’intercéder pour eux auprès du comte et de provoquer à Tournai la réunion d’une conférence en vue de la paix. P. 205, 206, 369, 370.

Ces vivres permettent aux Gantois de prolonger quelques jours la lutte, mais bientôt ils n’en souffrent pas moins. On était en carême (mars et avril 1382): le comte décide alors[332] de mettre le siège devant Gand et de châtier les Quatre-Métiers. Il convoque ses bonnes villes de Flandre et ses chevaliers de Hainaut, voulant être prêt à partir après la procession de Bruges (3 mai 1382). P. 206 à 208, 370.

Cependant, la conférence de Tournai est fixée au dimanche 13 avril[333]. Le comte de Flandre s’est engagé à s’y rendre. L’évêque de Liège est représenté par douze notables et le chevalier Lambert d’Oupey; le Brabant a envoyé ses députés, le Hainaut les siens, avec le bailli Simon de Lalaing; les Gantois ont choisi douze des leurs, ayant Philippe d’Artevelde à leur tête. Ils sont résolus à accepter toutes les conditions du comte, sauf les sentences de mort. P. 208, 209, 370.

On attend le comte trois jours; puis on lui envoie en députation le seigneur de Crupelant, Lambert d’Oupey, Guillaume d’Hérimez[334] et six bourgeois des villes de Flandre. Le comte leur répond qu’il leur fera bientôt part à Tournai de ses décisions.

Six jours après, en effet, arrivant à Tournai Guillaume de Reighersvliet, Jean de la Gruthuse, Jean Vilain et le prévôt de Haerlebeke[335], porteurs des conditions du comte, qui n’entend faire la paix avec les Gantois que si on lui livre, pour en disposer selon sa volonté, tous les hommes de la ville de Gand de quinze à soixante ans. Philippe d’Artevelde et ses compagnons refusent d’accepter un pareil traité, sans avoir consulté les Gantois; ils retournent à leur ville en passant par Ath. P. 209 à 211, 370, 371.

La conférence de Tournai est donc terminée, à la grande joie du comte, qui ne veut à aucun prix faire la paix avec les Gantois avant d’en avoir tiré un châtiment exemplaire.

Nouvelle émeute des Parisiens, qui, craignant que le roi ne prenne la ville par surprise et ne fasse des exécutions, mettent les quartiers en état de défense et multiplient les patrouilles de nuit[336]. P. 211, 212, 371.

Philippe d’Artevelde, revenu à Gand, hésite à annoncer à ses compatriotes les mauvaises nouvelles qu’il rapporte et ajourne cette communication au lendemain, 9 heures, sur la place du marché du Vendredi. Seul, Pierre du Bois est mis au courant des conditions que veut imposer le comte. C’est une lutte qui se prépare où il faut réussir ou mourir. P. 212 à 214, 371, 372.

Le jour arrivé, un mercredi, en présence du peuple et des capitaines de la ville, Philippe rend compte de sa mission et démontre qu’en réponse aux exigences du comte, ils n’ont d’autre parti à prendre que de marcher sur Bruges au nombre de 5 ou 6,000, et de livrer bataille. Les Gantois acclament Philippe. Rendez-vous est pris pour le lendemain: on choisira les combattants et on partira. P. 214 à 219, 372, 373.

Le jeudi, 1er mai, les 5,000[337] hommes sont choisis; ils partent accompagnés des vœux de la population et viennent gîter à une heure et demie de la ville. Le vendredi, ils sont à une lieue de Bruges[338]. Protégés d’un côté par un grand marais, de l’autre par leurs bagages, ils passent la nuit dans l’attente de la bataille. P. 219, 220, 373.

Le samedi, 3 mai, jour de la fête et procession de Bruges, le comte est informé de l’arrivée des Gantois. Il fait prendre les armes et envoie en avant trois de ses hommes pour le renseigner; ce sont Lambert de Lambres, Damas de Buxeuil[339] et Jean du Béart[340]. De son côté, Philippe d’Artevelde fait dire la messe dans son camp et prêcher la guerre par les moines qui ont accompagné les Gantois. P. 220 à 222, 373 à 375.

Philippe harangue ses troupes. Le repas a lieu, et les Gantois se préparent au combat en s’abritant derrière leurs ribaudeaux, sortes de brouettes blindées de fer, garnies de piques et armées de canons, qu’ils poussent devant eux. P. 222 à 224, 375.

Les trois chevaliers envoyés en éclaireurs reviennent à Bruges. Le comte fait sonner le départ, et ses gens, au nombre de 40,000[341], viennent prendre position en face des Gantois. La journée est déjà assez avancée[342]. Effrayés par les 300 canons des Gantois[343] et aveuglés par le soleil, qui baisse à l’horizon, les Brugeois se débandent bientôt et s’enfuient vers la ville, poursuivis par leurs ennemis. Les morts sont nombreux[344]. P. 224 à 227, 375, 376.

Voyant la lâcheté des gens de Bruges[345], le comte, avec quelques chevaliers[346], profite de la nuit qui commence pour rentrer dans Bruges, dont il ordonne de fermer les portes. Il convoque toute la population sur la place du marché. P. 227, 228, 376, 377.

Les Gantois brisent les portes et s’emparent de la ville[347]. Le comte, qui se rend au marché, est forcé de renvoyer son escorte et de revêtir la houppelande de son valet[348]. P. 228 à 231, 377, 378.

A minuit, il se fait reconnaître d’une pauvre femme, qui le cache dans le lit de ses enfants[349]: il échappe ainsi aux recherches des routiers de Gand, qui veulent le remettre vivant aux mains de Philippe d’Artevelde. P. 231 à 233, 378, 379.

Maîtres de la ville, les Gantois, sur l’ordre de François Ackerman, épargnent les marchands et les étrangers, mais sont sans pitié pour les quatre métiers, courtiers, fripiers, bouchers et poissonniers, qui ont toujours été du parti du comte: on en tue plus de 1,200, leurs maisons sont pillées[350], leurs femmes violentées.

Le dimanche matin, 4 mai, à sept heures, les habitants de Gand apprennent la nouvelle de leur victoire et en ont grande joie. A Audenarde, la frayeur est extrême[351], car on craint l’arrivée des Gantois qui, avec 3 ou 4,000 hommes, prendraient facilement la ville. Mais il n’en est rien, et les gens d’Audenarde, encouragés par trois chevaliers, Jean de Baronaige[352], Thierri d’Anvaing[353] et Florent de Heule[354], attendent la venue de Daniel d’Halewyn que le comte va leur envoyer. P. 233 à 235, 379, 380.

Philippe d’Artevelde et les autres chefs des Gantois ne font aucun mal à ceux des menus métiers, dont ils respectent la vie et la propriété[355]. Sans se soucier de ce qu’est devenu le comte, ils songent à ravitailler la ville de Gand. Damme et l’Écluse leur ouvrent leurs portes et leur fournissent du vin et des farines qu’ils expédient à Gand. P. 235, 236, 380.

C’est le dimanche, pendant la nuit, que le comte sort de Bruges, seul, à pied, couvert d’une vieille houppelande. Une fois dans la campagne, il gagne Lille, monté sur un cheval que lui procure Robert le Marescal, un de ses fidèles chevaliers, mari d’une de ses filles bâtardes. Il retrouve, le lundi, à Lille la plupart de ses barons, qui ont échappé au combat[356]. Les autres, comme Gui de Ghistelles, se sont réfugiés en Zélande et en Hollande. P. 237, 238, 380.

La nouvelle de la défaite du comte est reçue avec plaisir par les habitants des bonnes villes, les Liégeois entre autres, par ceux de Paris et de Rouen, par le pape Clément, qui voit dans cet échec un châtiment céleste[357], et par les gens de Louvain[358], qui se sentent d’autant plus forts pour lutter contre leur seigneur le duc Wenceslas de Brabant. Le comte n’est même pas plaint par les hauts barons, qui n’aiment pas son grand orgueil. P. 238, 239, 380, 381.

Les Gantois décident d’abattre deux portes[359] de Bruges, avec les murs qui sont du côté de Gand, et de prendre comme otages 500 bourgeois notables. Puis ils se font jurer obéissance par toutes les villes du Franc de Bruges et du littoral du comté de Flandre. La soumission est reçue à Bruges par Pierre du Bois et Philippe d’Artevelde, qui tient état de prince. Le château de Male est pillé, toutes ses richesses volées. Pendant quinze jours, deux cents chariots ne font que transporter à Gand l’or, l’argent, les vêtements de prix, la vaisselle, les bijoux que l’on trouve à Bruges[360]. P. 239 à 241, 381.

Les 500 otages partent pour Gand[361] escortés par François Ackerman, Pierre de Wintere et 1,000 de leurs hommes. Pierre du Bois reste à Bruges pour hâter la démolition des murs. Philippe d’Artevelde, avec 4,000 hommes, part pour Ypres, où il reste huit jours pour recevoir la soumission de Cassel, de Furnes et autres villes[362]. Puis il se rend à Courtrai[363], mais ne peut obtenir qu’Audenarde fasse acte d’obéissance. Les trois chevaliers, gardiens de la ville, ne veulent point trahir le comte et se rient des menaces du fils d’un brasseur d’hydromel[364]. P. 241, 242, 381.

Furieux de cette résistance, Philippe séjourne cinq ou six jours à Courtrai, puis retourne à Gand, où il est accueilli avec les plus grands honneurs. Magnifiquement vêtu, entouré de soldats, menant vie joyeuse et dépensant largement, le nouveau rewaert de Flandre est au comble de sa puissance. P. 242, 243, 381, 382.

Le comte est à Lille[365]; il songe à reconquérir son pays rebelle avec l’aide de son gendre le duc de Bourgogne et du jeune roi de France, qui, certainement, suivra les avis de son oncle. En attendant, il envoie comme capitaine à Audenarde Daniel d’Halewyn, accompagné de 150 lances, de 100 arbalétriers et de 200 hommes de pied. P. 243 à 245, 382, 383.

Le 17 mai, Daniel d’Halewyn entre dans Audenarde; avec lui sont Louis et Gilbert de Leeuwerghem[366], Jean[367] et Florent de Heule, Blanchart de Calonne, Gérard de Rasseghem, Gérard de Marquillies, Lambert de Lambres, Enguerran Zannequin[368], Morelet d’Halewyn, Hanghenandin et plusieurs autres chevaliers et écuyers de Flandre et d’Artois. P. 245, 246, 383.

Philippe entreprend alors le siège d’Audenarde, il lève une taille de quatre gros par semaine sur chaque feu et convoque tous les combattants flamands pour le 9 juin sous les murs d’Audenarde. Personne ne manque à l’appel et Philippe se trouve à la tête d’une armée de plus de 100,000 hommes[369], bien approvisionnés de tous côtés. Son premier soin est de planter des pieux dans l’Escaut, pour empêcher les bateaux de Tournai de descendre à Audenarde. P. 246, 247, 383, 384.

Daniel d’Halewyn s’apprête à soutenir le siège; il distribue les provisions, couvre de terre les toits des maisons voisines des murs, exposées plus particulièrement aux coups des nombreux canons des Gantois, renvoie de la ville les vieillards et les bêtes de somme et loge dans les églises les femmes et les enfants. Il soutient ainsi le siège tout l’été, faisant parfois des escarmouches où se distinguent deux frères, écuyers d’Artois, Lambert et Tristan[370] de Lambres.

Philippe d’Artevelde, qui ne veut point donner l’assaut pour ménager son monde, établit sur la montagne qui domine Audenarde un immense mouton destiné à jeter de grosses pierres sur la ville[371]; il a de plus à sa disposition d’autres puissants engins, qui ne peuvent réussir à lasser la patience et le courage des assiégés. P. 247 à 249, 384.

Pendant le siège d’Audenarde, 1,200 routiers environ se détachent de l’armée et s’en vont détruire par toute la Flandre les châteaux des nobles; ils dévastent une seconde fois le château du comte à Male et brisent le berceau où il dormait enfant. De là, ils se rendent à Bruges, où ils sont bien reçus par Pierre du Bois et Pierre de Wintere; et, après quelques jours de repos, ils passent la Lys à Warneton[372] et viennent devant Lille abattre les moulins à vent et brûler les villages.

Attaqués par 4,000 hommes de la garnison de Lille, les routiers entrent en Tournaisis et, après avoir brûlé Helchin[373] et autres villages, qui sont du royaume de France, ils retournent au siège d’Audenarde[374].

Le duc de Bourgogne apprend ces nouvelles à Bapaume: il en donne aussitôt avis à Charles VI, qui est à Compiègne[375]; c’est pour lui une bonne fortune de voir ainsi mêlé le roi de France à cette affaire, d’où il ne peut advenir que secours pour le comte de Flandre, son beau-père. P. 249, 250, 384, 385.

Le comte apprend à Hesdin[376] le sac de son château de Male: furieux, il se rend à Arras, puis à Bapaume[377] auprès du duc de Bourgogne, son beau-fils, qui lui promet aide contre toute la ribaudaille de Flandre. Revenu à Arras, il délivre de prison plus de deux cents otages et retourne à Hesdin. P. 250 à 252, 385.

Soucieux de tenir sa promesse, le duc de Bourgogne quitte Bapaume avec Gui de la Trémoïlle et l’amiral Jean de Vienne. Il se rend à Senlis auprès du roi, dont la jeunesse ardente ne demande qu’à combattre, d’accord avec les ducs de Berri et de Bourbon. Un conseil de prélats et de nobles est convoqué à Compiègne pour décider ce qu’il y a lieu de faire[378]. P. 252 à 256, 385, 386.

Songe du roi à Senlis; origine du cerf volant adopté par le roi comme emblème[379]. P. 256 à 259, 386, 387.

Le siège d’Audenarde traîne en longueur. Craignant l’intervention du roi de France, Philippe d’Artevelde, qui a déjà dans son armée des archers anglais, songe à une alliance avec le roi d’Angleterre. P. 259 à 261, 387, 388.

Mais, pour masquer son jeu, il écrit au roi de France une lettre où il lui demande d’obtenir la paix du comte de Flandre[380]. Le messager, porteur de la lettre, arrive à Senlis; comme il n’a pas de sauf-conduit, il est arrêté et mis en prison pour plus de six semaines[381]. Le roi et son conseil ne font que rire de la lettre de Philippe. Ne recevant pas de réponse, ce dernier propose alors à ses capitaines de faire alliance[382] avec le roi d’Angleterre, qu’on laissera passer par les Flandres pour entrer en France; moyennant quoi le roi d’Angleterre remboursera les 200,000 vieux écus que le pays flamand prêta autrefois au roi Édouard III, pour payer ses troupes devant Tournai[383]. P. 261 à 263, 388.

Après avoir pris l’avis de Pierre du Bois et de Pierre de Wintere, capitaines de Bruges[384], et de ceux d’Ypres et de Courtrai, Philippe organise son ambassade: chaque bonne ville enverra un ou deux bourgeois, Gand en enverra six[385], à savoir François Ackerman[386], Rasse vande Voorde[387], Louis de Vos[388], Jean de Scotelaere[389], Martin vande Water[390] et Jacques de Brauwere[391].

A ces envoyés se joint un clerc[392], parent de Philippe d’Artevelde, qui vient d’être élu évêque urbaniste de Gand en remplacement de Jean de West[393], ancien doyen de Notre-Dame de Tournai.

L’ambassade, composée de douze bourgeois, quitte le camp d’Audenarde au commencement de juillet[394] et arrive à Calais. Le capitaine de la ville, Jean d’Évreux, leur procure des bateaux pour passer en Angleterre. Ils débarquent à Douvres et arrivent à Londres, bien accueillis par la population anglaise.

Le roi venait de donner à Perducat d’Albret, en récompense de ses services, la terre de Caumont en Gascogne, qui, après le décès de Jean de Caumont[395] et d’Alexandre, son frère, morts tous deux sans héritiers, avait été attribuée par le roi à Jean Chandos, puis à Thomas de Felton. P. 263 à 265, 388, 389.

Perducat accepte la terre de Caumont et s’engage, lui et son hoir, à servir le roi d’Angleterre contre tout ennemi, excepté contre la maison d’Albret, dont il est issu. Il est mis en possession de sa nouvelle terre par le sénéchal de Bordeaux, Jean de Neuville[396], mais meurt bientôt, laissant son héritage à un jeune cousin, Perducet, qui prend les mêmes engagements vis-à-vis du roi d’Angleterre[397]. P. 265 à 267, 389.

Les ambassadeurs flamands sont reçus par le conseil du roi; ils demandent l’alliance de l’Angleterre et offrent au roi 100,000 hommes pour combattre les Français[398]; mais ils tiennent avant tout à être remboursés des 200,000 vieux écus prêtés autrefois par Jacques d’Artevelde[399]. Les seigneurs anglais trouvent les propositions quelque peu risibles et diffèrent leur réponse. Les choses vont ainsi à bien pour le roi de France, qui se prépare à entrer en Flandre. P. 267 à 269, 390.

Charles VI fait relâcher le messager de Philippe d’Artevelde. Échange de prisonniers entre la ville de Courtrai et la ville de Tournai. Philippe d’Artevelde, qui s’attend à être attaqué par le roi de France, défend aux habitants de Tournai de venir s’approvisionner dans les Flandres. P. 269 à 272, 390, 391.

Philippe continue à assiéger Audenarde, mais ne donne pas l’assaut; il espère affamer la ville et la prendre sans risquer de faire tuer ses gens[400]. P. 272, 273, 391.

Le roi de France se résout à intervenir auprès des Flamands[401]; il envoie à Tournai l’évêque de Beauvais Milon de Dormans, l’évêque d’Auxerre[402], l’évêque de Laon[403], Gui de Honcourt[404] et Tristan du Bos. Ces commissaires[405] apprennent à Tournai de Jean Bonenfant[406] et de Jean Piétart[407], qui se sont occupés de l’échange des prisonniers avec Courtrai, que Philippe d’Artevelde ne veut point entendre parler de traiter avant la prise d’Audenarde et de Termonde; mais, confiant dans le bon sens des Flamands, ils adressent à chacune des trois villes, Gand, Bruges et Ypres, une lettre portée par un messager spécial. P. 273, 274, 391.

Par cette lettre, datée du 16 octobre 1382, les trois bonnes villes sont informées que le roi de France, désirant voir la paix se rétablir entre le comte et son peuple, ne saurait tolérer l’alliance que les villes de Flandre pourraient contracter avec le roi d’Angleterre. En conséquence, les commissaires demandent un sauf-conduit leur permettant de mener à bien les négociations de paix. P. 274, 391, 392.

Les trois messagers arrivent et sont retenus prisonniers. Philippe, qui a lu la lettre à Gand, va la communiquer au seigneur d’Herzeele sous les murs d’Audenarde. P. 274, 275, 392.

Réponse de Philippe, datée d’Audenarde, 20 octobre 1382[408]: il s’étonne que son souverain seigneur, le roi de France, veuille aujourd’hui s’interposer en faveur de la paix, alors qu’il ne lui a pas répondu naguères sur le même sujet. Aucun traité n’aura lieu tant que toutes les villes et forteresses de Flandre ne seront pas ouvertes au peuple flamand; jusque-là, tous les messagers seront emprisonnés. P. 275 à 278, 392, 393.

Cette lettre est confiée à un écuyer d’Artois qui avait été fait prisonnier. Il la remet, à Tournai, à l’évêque de Laon et aux autres commissaires royaux, qui la communiquent au prévôt et aux jurés de la ville. P. 278 à 280, 393.

Voulant ne pas trop s’aliéner les gens de Tournai, Philippe leur écrit quelques jours après (23 octobre), pour leur dire qu’il désire vivre toujours en bonne amitié avec eux, qu’il regrette de ne pouvoir encore mettre en liberté les messagers, mais qu’il accorde toute facilité aux marchands pour trafiquer et passer par les Flandres. P. 280 à 282, 393, 394.

Cette lettre est apportée à Tournai par un valet de Douai; elle est lue en présence des commissaires royaux, qui conseillent aux gens de Tournai de ne pas répondre aux avances des Gantois, de crainte de mécontenter le roi de France et le duc de Bourgogne. Trois jours après, les commissaires retournent à Péronne[409] auprès du roi et de ses oncles. P. 282, 283, 394.

La veille, le comte de Flandre était arrivé pour plaider sa cause et faire hommage du comté d’Artois, qu’il venait d’hériter de sa mère. L’orgueil des Flamands et leur désir de s’allier aux Anglais décident le roi à soutenir les droits de son nouveau vassal[410].

Le comte retourne à Hesdin, et le roi appelle à Arras tous les gens d’armes du royaume[411]. P. 283 à 285, 394, 395.

Le comte s’occupe des vivres nécessaires à l’armée royale[412]. Le roi arrive à Arras[413], où le comte le rejoint; en recevant son hommage[414], il lui promet de le secourir en Flandre. P. 285, 286, 395.

Bien qu’il affecte de se moquer des entreprises du jeune roi de France, Philippe d’Artevelde n’en appelle pas moins à Audenarde le seigneur d’Herzeele pour le remplacer, tandis qu’il part pour Bruges et Ypres[415]. Craignant que les Français ne traversent la Lys, il charge Pierre du Bois de garder le passage de la rivière à Commines[416] et Pierre de Wintere de défendre le pont de Warneton, avec ordre de rompre les ponts d’Estaires[417], de la Gorgue[418], de Merville[419] et autres jusqu’à Courtrai. Philippe pense ainsi empêcher le roi de France de pénétrer en Flandre, jusqu’à l’arrivée des troupes anglaises, qui ne saurait tarder. P. 286 à 288, 395, 396.

Un certain nombre de chevaliers et écuyers de la garnison de Lille, 120 hommes environ, tentent, sous la direction du Hase de Flandre, de faire une chevauchée. Ils passent la Lys à Menin[420] et dévastent la ville, tuant et chassant tout devant eux; mais au retour, assaillis par les paysans, ne pouvant se servir du pont qui s’est brisé, ils perdent, tant tués que noyés, plus de 60 des leurs, sans parler des blessés[421], parmi lesquels il faut compter Jean de Jeumont. Le châtelain de Bouillon et Bouchard de Saint-Hilaire[422] sont tués; Henri de Duffle[423] se noie. P. 288 à 291, 396, 397.

Tandis que Pierre du Bois démolit le pont de Commines, Philippe apprend à Ypres la défaite des Français et s’en réjouit. Pendant cinq jours, il harangue le peuple, lui faisant entrevoir l’appui de l’Angleterre, et, confiant dans la fidélité des habitants, il retourne au siège d’Audenarde en passant par Courtrai, où il se repose deux jours. P. 291, 292, 397.

CHRONIQUES
DE J. FROISSART.

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DE J. FROISSART.


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