Dictionnaire érotique moderne
The Project Gutenberg eBook of Dictionnaire érotique moderne
Title: Dictionnaire érotique moderne
Author: Alfred Delvau
Release date: March 16, 2014 [eBook #45150]
Most recently updated: October 24, 2024
Language: French
Credits: Produced by Charlene Taylor, Bibimbop, Hugo Voisard,
Close@Hand and the Online Distributed Proofreading Team
at http://www.pgdp.net (This file was produced from images
generously made available by the Bibliothèque nationale
de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr)
— Note de transcription —
Les erreurs clairement introduites par le typographe ont été corrigées.
Un index, ajouté dans cette édition électronique, se trouve ici.
Il y a une note plus détaillée à la fin de ce livre.
DICTIONNAIRE
ÉROTIQUE
Édition imprimée exclusivement pour les membres de la Biblio-Aphrodiphile Société, et non mis dans le commerce.
DICTIONNAIRE ÉROTIQUE
MODERNE
PAR
UN PROFESSEUR DE LANGUE VERTE
(Alfred Delvau)
Nouvelle édition, revue, corrigée considérablement augmentée par l’auteur et enrichie de nombreuses citation
BALE
IMPRIMERIE DE KARL SCHMIDT
AUX ESPRITS LIBRES
Quand nous sommes entre nous, en petit comité, nous n’avons pas besoin de nous gêner; aussi arrive-t-il souvent, comme dit Gresset dans son Vert-Vert, que les f., les b. voltigent sur notre bec. Quand quelqu’un nous ennuie, nous lui disons: Tu m’entrouducutes, va te faire foutre. Quand nous voulons dire qu’un individu témoignait le désir de se comporter avec une femme de la manière la plus satisfaisante pour elle, au lieu de faire toute cette longue périphrase, nous disons: Il bandait comme un carme. Quand nous voulons exprimer tout le contraire, nous disons que c’est un vit mollet, un bande-à-l’aise. Un homme qui a du courage est un homme qui a des couilles au cul, etc.
Pour un étranger, tout cela est de l’hébreu. Il faut un dictionnaire pour comprendre les mots en usage; mais ne comptez pas sur celui de l’Académie, 6me et dernière édition; MM. les académiciens n’ont pas assez de couille pour avouer de pareils termes. Il faut quelques hommes d’esprit supérieur qui se dévouent.
Pour la langue française, nous avions déjà le dictionnaire intitulé: Erotica verba de M. de L’Aulnaye; ce dictionnaire se trouve à la suite de l’édition de Rabelais publiée par Desoer en 1820. Il est certainement très utile, mais il ne donne pas beaucoup d’expressions contenues dans d’autres auteurs contemporains de Rabelais ou plus modernes que lui. M. Auguste Scheler, l’érudit distingué, le savant bibliothécaire du roi des Belges, crut devoir, pour ce motif, refaire à nouveau ce dictionnaire, et il publia en 1861, sous le pseudonyme de Louis De Landes, son Glossaire érotique de la langue française (Bruxelles, pet. in-8o de XII 396 p.).—Notre excellent et spirituel ami Alfred Delvau voulut aussi refaire à nouveau ce travail; car lui, il avait eu le courage de descendre dans les bas-fonds sociaux, dans les bordels, dans les bastringues, dans les halles. Là, il avait recueilli nombre d’expressions pittoresques inconnues à ses devanciers. Il publia la première édition de son Dictionnaire en 1864. Tirée à petit nombre, elle fut promptement enlevée. Elle donna lieu à de nombreuses contrefaçons et à de fort mauvaises imitations. Delvau cependant avait préparé une seconde édition de son œuvre, plus châtiée et plus complète que la première, lorsque la mort nous l’enleva, en 1867. Nous recueillîmes ses épaves avec soin, et nous en faisons faire aujourd’hui, à petit nombre, une impression soignée pour les esprits libres et éclairés.
Delvau n’a pas eu le temps de faire une nouvelle préface pour sa nouvelle édition; nous allons, en conséquence, reproduire simplement la judicieuse Introduction de sa première édition. Nous la ferons suivre du remarquable Avant-propos placé par M. Auguste Scheler à la tête de son Glossaire érotique. Enfin, nous ajouterons, rivalisant avec les deux précédentes, la préface placée par Moncrif à la tête du Recueil du Cosmopolite; c’est l’une des plus spirituelles pièces de cet ingénieux écrivain, et en même temps une des plus rares et qui a rapport au sujet dont nous nous occupons: la petite révolte de la liberté de l’esprit contre les préjugés plus encore que contre les conventions sociales.
Un mot encore, et nous terminons. Dans la nouvelle édition, on remarquera que l’auteur s’est réellement borné cette fois au langage moderne et qu’il n’est pas remonté plus haut que Marot et Rabelais.
Il a négligé beaucoup de fantaisies niaises, prétentieuses et inusitées de quelques auteurs modernes, comme Nerciat, Rétif, la Tour du Bordel, ou d’argots de voleurs, de chiffonniers, etc.; par exemple, les mots inir (de Nerciat) hubir (de la Tour), pante, sinve (qui se trouvent dans le dictionnaire d’argot de Larchey), etc.
Enfin, il a supprimé quelques mots qui se retrouvent dans les dictionnaires français usuels: libidineux, lascif, impudicités, tendron, autel de la volupté, calice, etc. C’était superflu à répéter.
INTRODUCTION
(1re édition du Dictionnaire érotique.)
Aucun écrivain, jusqu’à ce jour, ne s’est senti assez franc du collier ni assez ferme des rognons pour entreprendre la publication d’un Dictionnaire érotique complet; publication jugée nécessaire cependant par tout le monde, par les gourmets aussi bien que par les goinfres, par les lettrés aussi bien que par les simples curieux.
Ce que nous avons sur la matière est bien peu de chose: le Glossarium eroticum linguæ latinæ de Pierrugues, le Dictionnaire françois contenant les mots et les choses de Richelet, le Dictionnaire d’amour de Dreux du Radier, celui de Sylvain Maréchal, celui de Girard de Propiac, et enfin le Glossaire érotique de la langue française de M.*** (dit Louis De Landes). En apprenant, il y a trois ans, la publication de ce dernier ouvrage, j’allais renoncer à continuer le mien, que je supposais dès lors inutile; une rapide lecture me détrompa: le Glossaire érotique de M.*** n’est autre chose que les Erotica verba du 3e volume de Rabelais, édition Desoer,—avec cette différence que les Erotica verba tiennent dans une trentaine de pages et que M.*** les a délayés dans un fort volume in-12. Mais les expressions modernes, mais les mots pittoresques, nés d’hier, qui servent d’étiquettes aux choses de la coucherie, de l’amour et de la polissonnerie, qui a eu la patience de les colliger et le courage de les nomenclaturer? Personne. La littérature contemporaine compte assurément nombre d’excellents esprits très dignes de mener à heureuse fin une œuvre de l’importance et de la nature de celle-ci: il n’en est pas un seul qui ait osé emboucher le clairon de l’émancipation, pas un qui soit parvenu à se démailloter, à se débarrasser de ses langes et de ses lisières. Ce sont en effet de si grands seigneurs que les préjugés! de si grandes dames, les conventions! Songez donc: appeler les choses par leur nom,—la grosse affaire!
Pour moi, qui n’ai pas la vaine superstition du langage, et qui, au contraire, possède au suprême degré la haine, presque le dégoût de la feuille de vigne que les hypocrites placent sur leurs discours—comme les vieilles femmes un couvercle sur leur pot de chambre,—j’aborde résolûment le taureau par les cornes, et j’essaie de faire, à mes risques et périls, ce que personne jusqu’ici n’a eu le courage de tenter. Car il est bien entendu que je compte pour rien le prétendu Glossaire érotique de la langue française de M.***, à qui une pudeur inexplicable a fait prendre la précaution—inutile—de s’abriter derrière un pseudonyme.
Ce qui m’a guidé dans cette intéressante besogne, à laquelle j’ai consacré de nombreuses veilles et pour laquelle je ne demande aucune récompense,—m’en étant déjà décerné une à moi-même,—ce n’a pas été de donner satisfaction aux curiosités malsaines des libertins, vieux ou jeunes, qui se jettent sur les livres obscènes comme les mouches sur des rayons de miel: j’ai trop le respect de moi-même pour descendre à une aussi puérile infamie, quelque haut prix qu’elle rapporte à son auteur. Le métier de masturbateur intellectuel peut avoir des avantages précieux pour les gens qui croient, avec Vespasien, que l’argent ne pue point; mais comme je ne me sens pas le moins du monde porté à l’exercer, je ne l’exerce pas. Mes visées sont plus hautes et mes habitudes d’esprit moins malpropres. J’ai le style gaillard, mais l’intelligence chaste.
La langue française étant, de l’avis de Voltaire, «une gueuse fière à qui il faut faire l’aumône malgré elle,» j’ai voulu essayer de glisser dans la poche de son Dictionnaire légal, si pauvre, la plupart des expressions du Dictionnaire interlope, si riche, que je publie aujourd’hui, malgré ses imperfections involontaires et ses omissions inévitables. Je me suis fait le saint Vincent de Paul des nombreux mots orphelins qui grouillent dans le ruisseau, des nombreuses expressions vagabondes qui se morfondent depuis si longtemps à la porte du Dictionnaire de l’Académie, et je leur ai construit, à mes frais, un petit hospice en attendant qu’on songe à les admettre dans le grand.
Ce qui se parle doit s’écrire, et tout doit se parler—même devant les jeunes filles. Les mots ne sont pas ordes, ce sont les pensées qui sont sales. La lecture de l’Arêtin et la vue des priapées du Musée secret de Naples sont moins corruptrices que beaucoup de romans que je pourrais citer, et je serais même disposé à absoudre le marquis de Sade (assuré que je suis de la parfaite innocuité de sa Justine) si ce misérable avait écrit en meilleur français: les livres dangereux sont les livres mal faits. Le libre langage de nos pères, qui effarouche tant de ridicules pudeurs, vaut cent fois mieux que notre phraséologie bégueule—et en même temps embrenée d’équivoques obscènes—dont ils se seraient si justement crevés de rire. Langue châtrée, peuple castrat. Où sont nos couilles du temps jadis? Qu’a-t-on fait du français médullaire, si substantiel et si savoureux, de Mathurin Régnier, d’Agrippa d’Aubigné, d’Amyot, de Rabelais, de Montaigne, de Brantôme, et de tant d’autres écrivains qui besognaient fort et dru? On l’a remplacé par le petit français d’un tas de petits écrivassiers, les uns membres—émasculés—de l’Académie, les autres dignes de le devenir. Et voilà pourquoi notre langue est muette, d’éloquente qu’elle était autrefois!
C’est à ne s’y pas reconnaître dans cette tour de Babel moderne, où l’on est arrivé, par le bégueulisme, à la confusion du langage. Jamais on n’a aussi mal écrit, ni aussi mal parlé. L’hôtel de Rambouillet, qu’on pouvait croire exproprié et démoli pour cause de clarté publique, existe avec plus de locataires que du temps de la Guirlande de Julie; il y en a depuis le sous-sol jusqu’aux combles, maîtres et domestiques mêlés, Houssaye sur Lamartine, Musset sur Murger, Mérimée sur Aubryet, Janin sur Sainte-Beuve. Ces Précieuses mâles—du moins du sexe masculin, car mâles emporte avec soi une idée de vigueur que je ne veux pas attacher au nom de ces péronnelles en culottes,—ces Précieuses, à l’exemple de leurs aînées en jupons, fessées à tour de bras par Molière, ont frappé de proscription tous les mots virils de notre langue, toutes les expressions bien bâties, qui avaient jadis droit au respect général et qui en sont réduites aujourd’hui à faire le trottoir, comme de vulgaires prostituées.
Ah! que cette horreur du mot propre est bête, dangereuse—et inutile! Qu’est indécent et saugrenu cet amour de la périphrase et du sous-entendu qui joue dans la conversation le rôle d’énigme dont tout le monde finit toujours par trouver la clef! «Vilains hypocrites! s’écrie Denis Diderot avec une indignation sincère; foutez comme des ânes débâtés, mais permettez-moi de dire foutre. Je vous passe l’action, passez-moi le mot. Vous prononcez hardiment tuer, voler, trahir, et l’autre, vous ne l’oseriez qu’entre les dents!... Il est bon que les expressions les moins usitées, les moins écrites, les mieux tues, soient les mieux sues et les plus généralement connues. Aussi, cela est: aussi, le mot futuo n’est-il pas moins familier que le mot pain; nul âge ne l’ignore, nul idiome n’en est privé; il a mille synonymes dans toutes les langues, il s’imprime en chacune sans être exprimé... et le sexe qui le fait le plus, a usage de le taire le plus.»
Que répondraient à cela nos Précieuses—si on les consultait? Que Diderot était un écrivain ordurier, qui aimait les vilains mots comme certaines gens aiment les mauvaises odeurs, et qu’aujourd’hui on le condamnerait à deux ou trois années de prison pour «outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs,»—sans compter deux ou trois autres années pour «outrage à la religion catholique.»
J’y consens—pour un instant. Mais Michel de Montaigne? Oserez-vous, pécores, dire de ce gentilhomme périgourdin ce que vous avez niaisement reproché au fils de l’ouvrier coutelier de Langres? Montaigne a écrit la même chose, pourtant, et tout aussi clairement: «Qu’a fait l’action génitale aux hommes, si naturelle, si nécessaire et si juste, pour n’en oser parler sans vergongne, et pour l’exclure des propos sérieux et règlez? Nous prononçons hardiment tuer, desrobber, trahir; et cela, nous n’oserions qu’entre les dents. Est-ce à dire que moins nous en exhalons en paroles, d’autant nous avons loy d’en grossir la pensée? Car il est bon que les mots qui sont le moins en usage, moins escripts, et mieulx teus, soient les mieux sceus et plus generalement cogneus...»
Tous ces mots qui, ruisseaux de miel,
Coulent avec de doux murmures
Des lèvres en quête du ciel!
Ce que signifie Être heureux!
Vous vous cachez le front de honte
D’avoir joui comme des dieux!
Lorsque vous êtes dégrisés,
Et vous reniez vos maîtresses
Lorsque repus de leurs baisers!
Ce qu’à faire vous trouvez bon?
Pourquoi crime un charmant délire?
Comment caca votre bonbon?
Dont le cœur à la bouche ment,
Pourquoi recrachez-vous l’hostie
Gobée à deux si goulûment?
Ce cant que nous reprochons si maladroitement aux Anglais, nous l’avons au même degré qu’eux; nous rougissons pudiquement, jeunes vierges à barbe, des grossièretés de notre Rabelais, comme ils rougissent, ces pucelles à favoris rouges, de leur Shakespeare. Et plus nous allons, et plus notre cant s’aggrave—avec nos vices. Je me rappelle encore l’émotion générale qui accueillit, il y a deux ans, le chapitre des Misérables de Victor Hugo où s’étale superbement la réponse énergique de Cambronne à Waterloo. C’était un scandale à nul autre pareil. On ne voulait pas croire à tant d’audace, et, le nez même sur la page où cette shockinerie se trouve déposée, avec des commentaires aggravants tout autour, on se refusait encore à y croire. Des cris de paon étaient poussés dans les salons et dans les cafés à propos de cette incongruité littéraire. Les académiciens se cachaient la face et se couvraient de cendres. Arsène Houssaye mettait un crêpe à sa houlette de berger en chambre. Madame Louise Colet prenait le voile. Champfleury allumait des lampions sur sa fenêtre, au grand ébahissement des habitants de Montmartre—qui se croyaient déjà au 15 août...
Victor Hugo avait écrit Merde!
Sans doute. Après? et pourquoi toutes ces clameurs de pies en délire? Que prouve cette sainte—et ridicule—indignation? Rien, sinon que depuis Boileau les lecteurs français veulent être respectés quoiqu’ils ne se respectent pas eux-mêmes. Rien, sinon que la chasteté de notre langage témoigne surabondamment du libertinage de nos mœurs. Rien, sinon que nous ne trouvons les mots ordes et puants que parce que nos actions sont malsaines et nidoreuses. Rien, sinon que notre âme est un fumier sur lequel poussent les fleurs—de rhétorique. Rien, sinon qu’au lieu de laisser aux femmes le bégueulisme des paroles, nous l’affichons comme la feuille de vigne de l’impudicité, faisant ainsi semblant d’ignorer que jamais la pureté de l’âme humaine n’a été entamée par les familiarités les plus stercoréennes du langage humain. Il ne nous manquait que cette hypocrisie-là pour être complets!
Les questions morales que cela soulève sont de la plus haute importance, et j’aurais grande joie à les examiner ici avec détails, afin de vider une bonne fois sur la tête d’un public béotien le panier de mes colères et de mes ironies. Mais, par malheur, la place me manque, mon cadre me force à me borner: à peine me reste-t-il quelques lignes.
J’abrège donc, ne voulant d’ailleurs prouver rien autre que mon droit à réunir en corps de livre une cohue d’expressions pittoresques auxquelles le Dictionnaire de l’Académie fera faire éternellement le pied de grue, sans daigner même entrebâiller un de ses feuillets pour en laisser entrer quelques-unes chez lui. «Toutes les langues roulent de l’or,» a dit Joubert,—et l’argot d’un peuple entier est une langue, spécialement l’argot érotique; s’il vit en marge du Dictionnaire officiel, comme les gens qui le parlent vivent en marge de la société officielle, il n’en finira pas moins, à un moment donné, par se confondre comme eux dans la circulation générale.
Au reste, peu me chaut! C’est déterminément que j’ai composé le recueil pornographique que je publie aujourd’hui, sans arrière-pensée mauvaise; non pour tenter mes contemporains du gaillard péché de luxure,—comme le diable de Papefiguière les nobles nonnains de Pettesec,—mais à titre seul de documents pour l’histoire de la langue et celle des mœurs au XIXe siècle, et avec cette conviction, solidement ancrée dans ma conscience, que s’il n’est utile à personne, à personne non plus il ne sera nuisible. Les lecteurs vraiment chastes ne s’en sentiront pas corrompus; les lecteurs corrompus n’en deviendront pas plus libertins.
Je n’aurai jamais à me couper le poignet par remords de l’avoir écrit.
AVANT-PROPOS
(du Glossaire érotique)
Il faut avoir un certain courage pour faire un livre comme celui-ci; car, tout d’abord, la plupart des personnes qui l’ouvriront s’empresseront de le rejeter comme un tissu d’obscénités, qu’un homme qui se respecte n’aurait jamais dû mettre au jour. Pour beaucoup de gens, sans doute, la première impression sera telle; mais pour ceux qui voudront un peu réfléchir, ils reconnaîtront bientôt qu’il y a un but utile dans cette publication; qui n’est faite ni pour les jeunes filles, ni pour les écoliers.
Pendant plusieurs siècles, on n’attacha aucune idée malhonnête à une multitude de mots et d’expressions qui sont actuellement bannis de la bonne compagnie, et les hommes les plus graves les employaient sans que personne y trouvât à redire. Peu à peu, on a trouvé que certains mots devaient être bannis de la langue, et on les a remplacés par d’autres, ou bien par des périphrases qui expriment, il est vrai, la même idée, mais en bannissant le scandale. C’est sans doute une singulière manière de voir que de regarder un mot comme obscène, et non pas ce qu’il veut dire; car il semblerait raisonnable de ne blâmer dans un écrit que les pensées qui y sont reproduites, et de ne taxer qu’elles seules d’immoralité, sans s’attacher aux mots, qui ne sont que le moyen de rendre les idées palpables. Mais, enfin, la coutume est ainsi établie, et il faut s’y soumettre, sous peine d’être honni. Un auteur qui ne se conformerait pas à cet usage ne serait pas lu, et, de plus, il irait faire un tour en police correctionnelle. Aussi n’avons-nous point le projet de vouloir réformer le monde et de changer sa manière de voir sur un sujet qui a été traité par Bayle beaucoup mieux que nous ne le pourrions faire.
La manière actuelle d’écrire ne doit cependant pas faire proscrire la littérature du XIIe au XVIIe siècle, et empêcher de lire des écrivains distingués, qui n’ont commis d’autres fautes que d’employer dans leurs écrits des mots dont on se servait dans toutes les classes de la société. Tous les dictionnaires ayant soin de bannir de leurs colonnes les mots réprouvés, il arrive que bon nombre d’expressions employées autrefois deviennent inintelligibles pour les lecteurs, qui ne les entendent pas dans la conversation. Cet inconvénient se fait surtout sentir pour les étrangers, car les nationaux ont parfois occasion de les entendre employés par le peuple. Il semble donc que la publication d’un glossaire érotique doit être accueillie favorablement par tous ceux qui veulent lire notre ancienne littérature, et qui sont désireux de bien comprendre les écrivains qui n’ont eu d’autre tort que d’appeler un chat un chat, et qui, sous des obscénités apparentes, ont souvent caché des leçons de morale et de philosophie, que les persécutions religieuses les empêchaient de publier ouvertement.
C’est donc à la partie sérieuse des gens lettrés que nous nous adressons, notre unique but étant de rendre plus familière la lecture d’écrivains d’un grand mérite. Certains d’entre eux, il est vrai, ont été publiés avec un glossaire spécial; mais, en général, il est fort incomplet, surtout en ce qui regarde les termes érotiques. Et puis ces explications manquent presque toujours dans les anciennes éditions, qui sont actuellement fort recherchées.
Dans cet ouvrage, tous les mots sont imprimés en entier, aucune lettre n’étant remplacée par des points; car cette coutume semble s’éloigner tout à fait du but qu’elle se propose. Que veut-on, en effet? Que l’attention ne se fixe pas sur des mots qu’on regarde comme déshonnêtes. Et, de bonne foi, est-il meilleur moyen de l’y fixer que de ne pas imprimer le mot tout entier, puisqu’alors on est forcé de faire des efforts d’imagination pour retrouver ce qui a été omis, tandis que s’il en était autrement on n’y ferait que fort peu d’attention, l’examen ne se portant que sur la pensée exprimée dans la phrase qu’on lit. On croirait vraiment que ce moyen a été inventé par quelque libertin.
Quant à l’orthographe, nous avons suivi en général celle qui est adoptée actuellement, celle des temps anciens étant si variable, même dans le même auteur, que nous n’aurions su laquelle choisir. Seulement, nous avons indiqué toutes les manières diverses d’orthographier le même mot, en renvoyant pour les explications et les citations à celui qui est écrit à la moderne.
L’Auteur
PRÉFACE
(du Recueil du Cosmopolite)
Il semble que la philosophie ne fasse qu’à regret (pour ainsi dire) des progrès dans l’esprit de l’homme; si elle gagne à quelques égards aujourd’hui, elle perd si considérablement par d’autres côtés, que la compensation n’est pas égale. Les connaissances physiques prennent, il est vrai, de jour en jour, un essor plus rapide, mais combien l’esprit de morale n’a-t-il pas dégénéré?
Tandis que nos philosophes s’occupent de cette attraction qui entretient le jeu des différentes parties de l’univers, l’impression conséquente que doivent leur faire les mots les plus estimables de notre langue leur échappe, ou se métamorphose dans leur imagination, et ces mêmes mots ne présentent presque plus, pour la plupart, le vrai sens auquel ils avoient été attachés.
Faut-il chercher d’autre cause de la différence des mœurs de ce siècle-ci à celles des siècles passés? Sans doute, la naïveté avec laquelle nos pères s’énonçoient, et qu’on a depuis si injustement qualifiée du nom de langage libre, étoit la base et le garant de la pureté de leurs mœurs.
Leur façon de vivre étoit aussi simple que leur langage; parmi eux, oui vouloit dire effectivement oui, et non exprimoit exactement non. Point de ces subterfuges qui sont autant de ressources pour la mauvaise foi, et d’écueils de la solidité de l’esprit.
La malignité des termes équivoques, d’autant plus dangereuse qu’elle fait les délices des petits esprits, et par conséquent du plus grand nombre, n’étoit point encore connue.
Quelle contrainte ces fausses idées qu’on attache aujourd’hui à un grand nombre de manières de s’exprimer, n’apportent-elles pas dans la société? Il faut en exposer ici quelques exemples.
Qu’une femme à qui vous parlerez d’un voyage agréable et curieux que vous aurez fait, vous dise: Je meurs d’envie de le faire, les sots éclatent de rire, et les fausses prudes rougissent.
Céliante se donne la torture pour mettre son gant trop étroit pour sa main; vous n’oseriez jamais lui dire: Madame, voulez-vous que je vous le mette? ni même: que je vous l’ôte? parce que notre esprit corrompu va plus loin que les termes propres ne signifient, et qu’il suppose que, pour l’ôter, il faut l’avoir mis, et qu’il soit dedans.
Si vous vous servez de ces termes simples, vous passez pour un sot, ou du moins pour un mauvais plaisant.
A peine est-il permis de dire que la Marne se décharge dans la Seine, ou qu’un fusil est chargé.
Nos dévots, même de la première classe, avoient voulu faire passer cette réformation prétendue de style jusque dans la manière de faire des enfants à sa femme, et trouvant une idée trop libertine, et une façon trop peu décente de se mettre dessus à nu, ils avoient imaginé de faire un trou chacun à leur chemise, pour opérer, disoient-ils, plus modestement et plus convenablement le grand œuvre de la propagation du genre humain.
Je laisse à juger si ceux qui en agissent ainsi n’ont pas l’imagination plus déréglée que ceux qui tout uniment se mettent dessus, dans la simple nudité que la sage nature nous a donnée.
Avec quelque pureté d’intention que vous employiez les mots d’enfiler, remuer, branler, large, étroit, se retirer et cent autres, ils réveillent à présent des idées licencieuses. Personne n’ignore le rire scandaleux qu’ont excité, dans les derniers temps, ces quatre vers du grand Corneille:
A-t-il paru contraint? A-t-elle été facile?
Son hommage auprès d’elle, a-t-il eu plein effet?
Comment l’a-t-elle pris? Et comment l’a-t-il fait?
La saine raison, lorsqu’elle conduisoit les hommes, ne leur avoit point appris à faire une distinction imaginaire d’une expression supposée gratuitement malhonnête, avec une autre qui ne blesse point la pudeur.
On prononce le mot crime sans remords, comme celui de vertu sans édification; on croit avec justice n’être point garant des idées opposées que l’un et l’autre présentent. Par quel égarement va-t-on déshonorer d’autres termes, qui ont le même droit d’être au rang de ceux qui composent la langue? Pourquoi les exclure de la conversation et des ouvrages littéraires, où souvent ils seraient si naturellement amenés?
DICTIONNAIRE EROTIQUE
PAR
UN PROFESSEUR DE LANGUE VERTE
Abandonner (S’). Se livrer complétement à un homme, lui ouvrir bras et cuisses, lui laisser faire tout ce que lui conseillent son amour et sa lubricité.
A fille de s’abandonner.
Si ma femme, impatiente de ma langueur, à autrui se abandonne.
Ne fait qu’en flatter son mari.
Abatteur de bois. Fouteur,—son outil étant considéré comme une cognée, et la nature de la femme, à cause de son poil, comme une forêt.
Il n’étoit pas grand abatteur de bois, aussi étoit-il toujours cocu.
Les beaux abatteurs de bois sont, comme les rois et les poëtes, des raræ aves.
Ce Jacques était un grand abatteur de bois remuant.
Il lui présenta cent mille choses que ces abatteurs de femmes savent tout courant et par cœur.
Vous êtes, je le vois, grand abatteur de quilles.
Abbaye de Clunis (L’). Le cul,—de clunis, fesse, croupe,—une abbaye qui ne chômera jamais faute de moines.
Abbaye de s’offre à tous. Bordel, dont les victimes cloîtrées s’offrent volontiers à tout venant qui tient à communiquer avec elles sur l’autel de leur dieu des jardins.
Abbesse. Grosse dame qui tient un pensionnat de petites dames à qui on n’enseigne que les œuvres d’Ovide et de Gentil-Bernard: autrement dit Maîtresse de bordel,—le bordel étant une sorte de maison conventuelle habitée par d’aimables nonnains vouées, toutes au dieu de Lampsaque.
Te recevra bien mal et te foutra des coups.
Abeilard. Nom qu’on donne à tout homme qui se trouve dans le cas de cet abbé, dont il est question dans les Contes d’Eutrapel, lequel en ses jeunes ans «avoit perdu ses deux témoins instrumentaires.»
Abeilardiser. Rendre un homme impuissant en le châtrant, comme fit le chanoine Fulbert à l’amant d’Héloïse.
Surpris, il vous abeilardisera.
Aboucher (S’). Avoir trouvé chaussure à son pied, et mettre son pied—à moelle—dedans.
A s’aboucher.
Abouler de la braise. Payer une fille, lui donner le salaire du plaisir qu’elle va vous donner—avec la vérole ou la chaude-pisse.
Ça me semble tout drôle d’avoir à abouler d’la braise au lieu d’en recevoir.
Comme un amoureux innocent.
—Il faut abouler de la braise,
Me dit-elle en me repoussant.
Abricot de la jardinière (L’). La nature de la femme,—qu’elle soit jardinière ou princesse.
Abricot fendu. La nature de la femme, qui ressemble, en effet, à ce fruit,—ce qui permet de supposer, vu l’absence de toutes preuves contraires, que le Paradis terrestre était un immense abricotier.
Abuser d’une femme. En jouir charnellement, soit de gré, soit de force,—mais le plus souvent de gré, les femmes se plaisant à être ainsi abusées.
Vous êtes un infâme, vous avez lâchement abusé de moi pendant mon sommeil...—Vous m’en voulez donc?...—Oui, parce qu’il fallait attendre que je fusse réveillée.
Académie d’amour. Lieu où on va pour jouer au jeu de Vénus—et de Mercure: en bon français, Bordel.—Le mot se trouve dans le Francion de Ch. Sorel et dans les Aventures burlesques de Dassoucy.
Allons-nous à l’Académie, ce soir?—Non, je ne suis pas en queue.
Accident. Manque d’haleine dans le discours amoureux; hasard malencontreux qui fait tomber (accidere, ad cadere) le membre viril au moment même où il devrait relever le plus orgueilleusement sa tête chauve.
Vient de perdre, à Paphos,
Un procès d’importance
Qu’on jugeait à huis-clos;
Son avocat, dit-elle,
Resta court en plaidant:
Voilà ce qui s’appelle
Un accident.
Accident féminin. Avoir ses règles. Événement prévu qui arrive juste quand une femme, ayant un ou plusieurs bons coups à tirer, donnerait tout pour qu’il y eût retard.
Nul autre que Pinange ne m’avait enfilée; peu de jours avant de le rendre heureux, j’avais eu mon accident féminin; il était donc bien avéré que ce qui allait se développer dans mes flancs était son paternel ouvrage.
Acheter une conduite. Se ranger après avoir été très dérangée par les michés; épouser un seul homme après avoir été mariée au genre humain.
Les filles qui ont fait des économies en suant le plus possible du con, peuvent seules s’acheter une conduite; il y a des messieurs qui ne sont pas plus délicats que Vespasien et qui, comme cet empereur, prétendent que l’argent n’a pas d’odeur.
Accointances (avoir des). Commercer charnellement avec un homme lorsqu’on est femme, avec une femme lorsqu’on est homme.
Je supposai qu’elle avait eu des accointances avec le baron ou avec son laquais.
Serait-ce bien votre désir?
Souvent faites filles ou fils,
En accointant les belles-mères.
Il faut que quelqu’un se soit accointé que notre ménage a ainsi renforcé.
Accolade. Baiser qui engendre l’envie de baiser,—à ce point que le même mot sert aux deux actions, la chaste et la libertine.
A quarante ans il dit son introït.
Accoler. Faire l’acte vénérien,—dont le début est presque toujours une accolade mutuelle.
Accola la charmante Armide,
Notre morpion se hâta
De gagner la forêt humide
Qui devant lui se présenta.
C’était un adieu que lui disaient toutes les femmes, filles et garces qu’il avait accolées.
Accommoder une femme. La baiser convenablement de manière qu’elle ne réclame pas—à moins qu’elle ne soit trop gourmande.
Mon drôle met pied à terre, descend la demoiselle, et l’accommode de toutes pièces.
Accomplir son désir. Faire l’acte copulatif, qui est et sera l’éternelle desiderium de l’humanité—mâle et femelle.
Il disait à ses gens de la tenir par les bras, tandis que Robin accompliroit son désir.
Accorder sa flûte. Se préparer à l’acte vénérien; bander,—la pine de l’homme étant l’instrument dont les femmes connaissent le mieux l’embouchure et dont elles jouent le plus savamment, soit avec la langue, soit avec les doigts, soit avec le cul.
Allons, mon bel ami, accordez votre jolie petite flûte.
D’accorder sa flûte avec elle.
Accorder ses faveurs. Se dit d’une femme qui ouvre son cœur, ses bras et ses cuisses à un homme pour qu’il use et abuse de cette ouverture.
Ne sera-ce qu’une déclaration de sentiment? Faudra-t-il lui accorder les faveurs?
Accouplement (L’). L’acte copulatif, qui accouple souvent un jeune homme avec une vieille femme, un vieillard avec une jeune fille, un libertin avec une presque pucelle, une bête avec un homme d’esprit.
Mais elle résista,—ce fut mon châtiment,
Et jusqu’au rayon bleu de l’aurore nouvelle,
J’ai dû subir l’horreur de notre accouplement.
Accoupler (S’). Faire l’œuvre de chair, qui consiste dans une conjonction de deux créatures de sexes différents.
Il en est de certains hommes comme des animaux; ils n’aiment pas, ils s’accouplent aux femmes, qui pour eux ne sont que des femelles.
Accroc au mariage (Faire un). Faire son mari cocu; donner une rivale à sa femme.
Faut pas pour ça t’ priver d’amant,
Car les accrocs faits au mariage,
C’est du nanan.
Accroche-cœurs. Petites mèches de cheveux que les femmes se collent sur les tempes, afin de se rendre plus séduisantes aux yeux des hommes et d’accrocher ainsi le cœur qu’ils portent à gauche—dans leur pantalon.
Dirigeons nos accroche-cœurs.
Accrocher. Faire l’acte vénérien—pendant lequel l’homme est accroché à la femme avec son épingle, qui la pique agréablement pendant quelques minutes.
Et elle rit quand on parle d’accrocher.
Deux minutes encore, et je l’accrochais sans vergogne sur la mousse.
Achever un homme. Le sucer, ou le branler, ou le faire piner tellement, dans la même soirée, qu’il tombe épuisé sur le flanc comme un lapin.—Les anciens avaient le même verbe; ils disaient, soit: peragere viros; soit: exhaurire crebro concubitu.
Tu l’as éreinté, ton homme; encore un coup, et tu l’achèveras.
Acte. Coup tiré avec une femme,—par allusion sans doute à la chemise qu’on lève et qu’on abaisse, comme le rideau d’un théâtre, avant et après chaque acte. Plus il y a d’actes, plus le vaudeville amuse la femme—qui se garde bien de siffler.
Quand nous en arriverons à l’acte, je te prouverai, carogne, que les petits en ont plus gros que les grands.
Actéoniser. Tromper son mari.
Une marchande qui dès le lendemain de ses noces a actéonisé son mari.
Acteur (L’). L’homme qui joue le rôle d’amoureux dans la comédie à deux personnages dont l’auteur a désiré garder l’anonyme, et qui porte pour titre: La Fouterie.
Lui, un acteur! dit la dame, qui savait à quoi s’en tenir sur le jeu secret du sire. C’est un cabotin vulgaire, plutôt, qui s’est usé en jouant avec des drôlesses.
Que l’autre acteur par sa prompte arrivée,
Jeta la dame en quelque étonnement.
Action (L’). Le jeu de la pine et du con,—qui est l’action par excellence.
Arrivons tout de suite à l’action, veux-tu?
Est si sale après la façon.
Action fréquente (L’). La fouterie, qui est la chose que l’on fait le plus souvent quand on est jeune, vigoureux et bien membré.
Il concède indulgence plénière à tous les religieux de l’ordre de nature, de corps véreux que la débilité de l’âge ou l’action fréquente causera.
Action honteuse (L’). La fouterie, dont rougissent le plus en public les gens qui la font le plus sans vergogne en particulier.
L’œil pour regarder l’action honteuse avec une chaleur vive et représenter à la personne aimée l’image du plaisir de son âme...
Administrer une douche—Faire pleuvoir le sperme dans le cul brûlant de la femme,—cette adorable folle dont nous sommes tous fous.
Une heureuse douche administre.
Adroite en amour (Être). Se dit d’une femme ou d’une fille qui connaît sur le bout du doigt et de la langue l’art de faire jouir les hommes.
Elle y sait plus d’un tour.
C’est une aisance!
Une indécence!
L’on croit voir une femme de cour!
Affaire. L’acte vénérien, le membre viril de l’homme, ou le con de la femme.
Le grand cordelier ayant achevé son affaire.
Femme qui vous surpasse en traits d’agilité.
Qui se plaît à l’affaire.
Elle disait qu’il n’y avait si grand plaisir en cette affaire que quand elle était à demi forcée et abattue.
Consiste en l’amoureuse affaire.
De me couvrir, en me baignant,
D’un sac qui me cache et me serre
Des pieds jusques à l’estomac...
—Parbleu! c’est prudent, dit Voltaire,
Et votre affaire est dans le sac.
Affaire avec quoi l’homme pisse (L’). La pine,—un mot que n’osent pas avoir à la bouche les femmes qui ont le plus au cul la chose qu’il représente.
N’en as-tu pas vu quelqu’un qui pissât, et cette affaire avec quoi il pisse?
Affaire de cœur. Coucherie,—cœur étant mis là pour cunnus.
Vous êtes en affaire? me cria-t-il à travers la porte, pendant que j’accolais ma drôlesse et la suppéditais avec énergie.—Oui, répondis-je en précipitant mes coups, je suis en affaire... de cœur.
Affaires (Avoir ses). Avoir ses menstrues, qui sont toute une affaire, en effet.
Qu’il paraît le plus affairé.
Affiler le Bandage. Bander,—arrigere.
Ainsi que des amants temporels pigeonnaient la mignotise d’amour, affilant le bandage.
Affriander un homme. Le tenter du gaillard péché de luxure en lui montrant un mollet bien tourné, une gorge bien ferme, des fesses bien blanches, etc.
Serais-je étonnée de te voir un caprice pour ces princesses-là (des fesses)? Va, va, mon cher, elles en ont affriandé bien d’autres.
Affront (Faire un). Débander juste au moment où il faut bander le plus roide,—seule impertinence que les femmes ne pardonnent pas.
Agacer le sous-préfet. Se masturber.—L’expression est tout à fait moderne, et fréquemment employée, quoique d’une étymologie difficile.
Agent. Celui qui agit: le doigt, le vit ou le fouteur. Ce mot s’emploie aussi pour les sodomites; le nom d’agent appartient à celui qui encule par opposition au mot patient, donné à celui qui se fait enculer.
Mais en un mot, si Monrose, agent de plein gré, ne devint pas patient avec autant de résignation que le père, c’est que...
Agir. Faire l’acte vénérien,—celui qui exige la plus grande dépense d’activité: Res, non verba!
Les poètes chantent la femme, les goujats la baisent; les uns agissent pendant que les autres pensent: les goujats sont plus heureux que les poètes.
Agnès.—Jeune fille embarrassée de son pucelage; fausse ingénue qui affecte de croire que les enfants se font par l’oreille, bien que son petit cousin lui ait appris par quel autre endroit ils s’improvisent.
Je n’aime pas ces Agnès-là, je leur préfère des garces franchement déclarées.
Agréments naturels. Le membre viril.
Il arrive de province ce matin, et la fatigue du voyage fait un peu de tort à ses agréments naturels.
Aide-mari. Amant,—qui aide en effet l’époux dans sa besogne conjugale, mais à son insu, bien entendu.
Il est assez égal que les enfants qu’elle pourra donner à son époux soient de lui ou du plus fécond des aide-mari qu’elle favorise.
Aigrette conjugale. Au figuré: ornement de tête de MM. les cocus; les cornes que leur font porter mesdames leurs épouses.
X... a couché avec madame Z...? Encore un fleuron à ajouter à l’aigrette conjugale de son mari.
Aiguille. Le membre viril, avec lequel on pique les femmes,—qui en enflent pendant neuf mois.
Et si ce n’est un jour de fête,
Elle a toujours l’aiguille en main.
Un vieil homme est comme une vieille horloge, plus elle va avant, plus l’aiguille se raccourcit.
Aiguillon. Le membre viril, avec lequel on pique les femmes pour les réveiller quand elles sont endormies.
Il lui glissa son fringant aiguillon.
Aiguillonner. Travailler du bout de la langue sur un vit, ou sur un clitoris.
... Dès lors, il a le nez sur la céleste mappemonde, et sa langue amoureuse aiguillonne le brûlant bijou.
Aimant. Ce qui attire l’homme à la femme, et vice versa.
Quand mes baisers passionnés lui coupent la parole, quand mes téméraires mains et le reste ont mis le feu partout... nos aimants se joignent, s’attirent, s’unifient... L’univers est oublié!...
Aimer. Synonyme élégant et pudique de foutre. Quand un homme dit à une femme: «Je vous aime,» il veut lui dire et elle comprend parfaitement qu’il lui dit: «Je bande comme un carme, j’ai un litre de sperme dans les couilles, et je brûle de l’envie de te le décharger dans le con.» Il n’y a que les poètes, les impuissants et les mélancoliques qui aient osé jusqu’ici donner à ce verbe éminemment actif un sens passif—et ridicule.
Dit: Aimons!!!...
Aimer ça. Avoir un goût fort vif pour les choses de la fouterie et pour la fouterie elle-même.
J’aime assez ça,
J’aime bien ça.
Aimer la femme. Avoir le tempérament amoureux, aimer à aimer—quelque femme que ce soit.
Que voulez-vous, mon père? j’aime la femme et je le lui prouve le plus souvent que je peux.
Aimer la marée. Aimer à gamahucher une femme, se dit par allusion à l’odeur sui generis qu’exhale son vagin.—L’expression date seulement du XVIIIe siècle, et elle vient de l’académicien Saint-Aulaire, le même qui avait fait sur la duchesse du Maine le fameux quatrain où il est déjà question de Téthys. Il serait dommage de priver la postérité de ce second quatrain, qui méritait de devenir aussi fameux que le premier:
Naquit la belle Cythérée:
C’est depuis ce temps que le con
Sent toujours un peu la marée.
Aimer le cotillon. Aimer la femme—surtout quand elle est déshabillée.
Vous aimez trop le cotillon, mon cher, il vous en cuira.
Aimer le goudron. Aimer à enculer, soit les femmes, soit les hommes,—ce qui embrène la queue.
Le con lui pue, il aime le goudron.
Aimer l’homme. Avoir du goût pour la pine, s’en servir le plus souvent possible; jouer franchement des fesses lorsqu’on est sous l’homme.
Les femmes qui aiment l’homme sont assez rares, aujourd’hui que les femmes aiment si volontiers la femme et que les tribades ont remplacé les jouisseuses.
Aimeuse. Petite dame—galante,—qui fait profession d’aimer.—Synonymes: putain, lorette, cocotte, grue, catin, vache, etc., etc.
Les fils d’Homère leurs Phrynés.
Délaçons pour tous les baleines
De nos corsets capitonnés.
Rousses, blondes, brunes ou noires,
Sous tous les poils, sous tous les teints...,
Qu’il pourrait raconter d’histoires,
Le cercle de nos yeux éteints!
Folâtres ou rêveuses,
Nous charmons;
Nous sommes les aimeuses:
Aimons!
Air cochon (Avoir un). Avoir un visage provoquant, qui appelle l’homme, qui le convie à manquer de respect à la femme qui a ce visage; avoir les yeux égrillards, la bouche voluptueuse, etc.
Je vous ai un petit air cochon comme tout.
Ajuster une femme. La baiser,—ce qui est ajuster le membre viril dans son vagin avec la raideur d’une flèche lancée d’une main sûre.
Alcibiadiser. Agir en pédéraste passif, se laisser enculer—comme Alcibiade par Socrate.
Aller à Cythère. Ce que les délicats appellent Ad summam voluptatem pervenire, et les voyous, Aller au bonheur,—le seul voyage que l’on ne puisse faire seul, et que l’on fait toujours à cheval sur une belle jument.
Qu’on se promèn’ pendant plusieurs instants;
Dès qu’on r’ssort, ça n’ m’amuse guère.
Aller à dame. Baiser; coucher avec une femme.—Cette expression, empruntée au jeu de dames, a été inventée par un pion de l’institution Sainte-Barbe.
Aller à la visite. Se dit des filles publiques qui, au jour fixé par les règlements de police, doivent se rendre au Dispensaire pour subir un examen de santé de la part de médecins ad hoc, qui les renvoient si elles sont saines et les retiennent si elles sont malades.
Aller à Pinada.—Faire l’acte vénérien,—à dada—sur une pine.
Aller au beurre. Baiser une femme, dont le con ne tarde pas à devenir ainsi une baratte.
Zut! je veux aller au persil pour aller au beurre, moi, na!
Aller au bonheur. Jouir en baisant, parvenir à la félicité suprême.—Cette expression, une des plus justes de la langue érotique moderne, est précisément celle qui se lisait comme enseigne sur les bordels de Pompéï: Hic habitat felicitas.
Tu as donc envie d’aller au bonheur, mon petit homme!
Aller au café. Gamahucher une femme. On dit aussi: prendre sa demi-tasse au café des Deux-Colonnes.
Aller au gratin. Baiser une femme publique,—à l’œil,—ce qui est une gourmandise pour certains travailleurs. Allusion au gratin que laisse un mets au fond de la casserole et qui trouve toujours un amateur—quand tout le monde est servi.
Aller au persil. Se dit des femmes autorisées qui se promènent le soir dans les rues, sur les trottoirs, et qui ne cessent de se promener que lorsqu’un galant homme, un peu gris, les prie de se reposer—pour tirer un coup avec lui, dans une chambre de bordel ou dans un arrière-cabinet de marchand de vins.—Voy. Aller au beurre.
Aller au vice. Aller au bordel.
Aller chez le voisin. Enculer une femme; se tromper, volontairement ou involontairement, d’endroit.
Tiens... me voilà... Pas comme ça, donc! Tu va chez le voisin... Laisse-moi te conduire.
Aller d’attaque (Y). Baiser avec énergie, sur l’herbe ou sur une chaise, sous le ciel du lit ou sous le ciel de Dieu, sans se préoccuper des passants et des enfants.
La limace... là, bien blanche, avec ses creux et ses montagnes, ça m’met sens sus d’sous... Allons-y d’attaque!
Aller de son beurre. Jouir copieusement, lorsqu’on est sous l’homme, sans craindre la vérole et les enfants, et décharger deux ou trois fois sans qu’il ait déconné.
Tu m’as fait crânement jouir, cochon! Voilà la première fois que j’y vas de mon beurre aussi franchement.
Aller de son voyage. Les filles de bordel emploient cette expression pour dire qu’elles ont joui avec un miché: «J’y ai été de mon voyage.»
Aller du cul. Se trémousser dans la jouissance vénérienne, ou dans l’attente de cette jouissance, qui est toujours précédée d’une foule de friandises fort agréables.
Aller et retour (Donner ou faire l’). Tirer deux coups avec une femme, sans déconner.
C’est un pauvre homme, dit-elle; il ne peut pas même faire l’aller et retour sans être sur les dents.
Aller l’amble. Faire l’acte vénérien, soit parce que dans cette besogne l’homme imite l’allure des chevaux qui vont l’amble, entre le trot et le pas, entre fort et doucement, soit parce que pour aller l’amble amoureux il faut être deux—ambo.
Aller se faire couper les cheveux. Aller au bordel.—L’expression date de l’établissement des bains de mer de Trouville, fréquentés par la meilleure société parisienne. Trouville est pour ainsi dire un faubourg du Havre, mais un faubourg sans bordels. Les messieurs sans dames qui ont des besoins de cœur s’échappent, vont au Havre et reviennent l’oreille basse, la queue entre les jambes, comme honteux de leurs mauvais coups.—D’où venez-vous? leur demandent les dames.—J’ai été me faire couper les cheveux, répond chaque coupable.—Les dames trouvaient—trouvillaient, dirait Commerson;—qu’ils allaient bien souvent se faire arranger—la chevelure.
Aller trop vite à l’offrande et faire choir le curé. Décharger au moment où l’on va baiser une femme que l’on a désirée trop longtemps, et débander immédiatement.
Allonger (S’). Bander,—dans l’argot des maquignons.
Allumelle. Membre viril.
Pour chatouiller leur allumelle
Le réservoir d’une pucelle.
Allumer (S’). Être en érection, soit devant une femme, soit devant une photographie obscène.
Allumer la chandelle. Mettre un homme en état de baiser, par des attouchements habiles aux environs de son braquemard et sur son braquemard lui-même.
Allumer le flambeau d’amour. Copuler.
D’allumer le flambeau d’ l’amour;
Cédant au désir qui m’allèche.
De mon feu n’ jaillit qu’un’ flammèche.
Allumer un homme. Se dit des femmes légères—comme chausson—qui, par leurs regards incendiaires, provoquent les hommes à la fouterie.
Elle! elle n’allumerait pas même un homme en amadou.
Allumette. Le membre viril, avec lequel on met le feu à tant de jeunes imaginations.
N’approche pas de moi ton allumette: tu me brûlerais, et je n’y suis pas disposée.
Ce que lui montre son amant.
Amant. Nom que l’on donne, non pas à l’homme qui aime une femme, mais à celui qui la fout.
Remplaçant le prince Charmant
Rêvé par toute pensionnaire,
De Manette eût été l’amant.
Amant de cœur. Greluchon, maquereau, homme qui, s’il ne se fait pas entretenir par une femme galante, consent cependant à la baiser quand il sait parfaitement qu’elle est baisée par d’autres que lui: c’est, pour ainsi dire, un domestique qui monte le cheval de son maître.—Il y a cette différence entre l’amant simple et l’amant dit de cœur que le premier est un fouteur qui souvent se ruine pour sa maîtresse, et que le second est un fouteur pour lequel sa maîtresse se ruine quelquefois—quand il la fout bien. Aussi devrait-on appeler ce dernier l’amant de cul, le cœur n’ayant absolument rien à voir là-dedans.
Amarris. Vieux mot hors d’usage signifiant matrice, employé dans un sens obscène pour désigner la nature de la femme.
Du bien que donnent les maris,
Soupire de son amarris.
Qui a mal à son amatrix.
Amâtiner (S’). Se prostituer à tous les hommes, comme une chienne chaude à tous les mâtins.
Ami. Synonyme décent d’amant, qui est lui-même synonyme de fouteur.
Les autres qui auront plus de hâte et prendront des amis par avance pour en essayer...
Amitié. Dans tout vocabulaire érotique, amitié est le synonyme d’amour.—C’est tout un petit drame intime et bourgeois, qui se joue à trois personnages: la femme, le mari et l’amant. S’il en survient un quatrième, c’est l’ami de l’amant, qui, presque toujours, est à l’amant...
Amour. Sentiment de création moderne. Les anciens ne connaissaient que la fouterie,—ce que Théophile Gautier, un poète, a si fort à tort appelé un «sentiment ridicule accompagné de mouvements malpropres,»—et il était donné à notre génération, épuisée par tant de masturbations intellectuelles, d’inventer cette sinistre plaisanterie qui dépeuplerait promptement la terre, si les Auvergnats n’étaient pas là.
Qui, par les yeux, dans le cœur entre,
Et par forme de fluxion
S’écoule par le bas du ventre.
Amour, substantif des deux genres: échange de deux fantaisies; privilége pour toutes les folies que l’on peut faire; pour toutes les sottises que l’on peut dire.—On a de l’amour pour les fleurs, pour les oiseaux, pour la danse, pour son amant, quelquefois même pour son mari: jadis on languissait, on brûlait, on mourait d’amour; aujourd’hui, on en parle, on en jase, on le fait, et le plus souvent on l’achète.
Pénétrer, chancelant, au fond d’un con baveux.
Mettre en contact puant les canaux urinaires,
De scrofules pourris, nous créer des neveux.
De spermes combinés faire un hideux fromage;
Au fond de la cuvette, humide carrefour,
En atomes gluants voir le foutre qui nage...
Voilà l’amour!
Amoureuse entreprise (L’). L’acte vénérien.
Amoureux des onze mille vierges. Jeune homme timide qui toutes les nuits couche, en imagination, avec toutes les femmes qu’il a rencontrées dans la journée, et, en réalité, avec la veuve Poignet,—qu’il a toujours sous la main.
Je n’ai jamais sérieusement aimé qu’une femme, la mienne; et cependant, comme tous les jeunes gens, j’ai été amoureux des onze mille vierges.
Amoureux larcin. La petite oie de la fouterie, la monnaie de la jouissance,—baisers dérobés, fesses pincées, etc.
Amoureux transi. Baiseur plus chaud en paroles qu’en action, et qu’à cause de cela les femmes tiennent en maigre estime.
Il arrive de là que ceux qui aiment le plus, comme ces amoureux transis, sont ceux qui chevauchent le moins.
Amour physique (L’). Le seul amour, le véritable amour, celui des gens bien portants d’esprit et de corps,—enfin celui que prisent sérieusement toutes les femmes, même celles qui lisent le plus de romans.
Mon amour physique
S’explique.
Amour platonique. L’amour ridicule par excellence, l’amour des poètes, des gens qui ont plus de cervelle que de queue, et qui aiment la femme à distance respectueuse parce que leurs moyens ne leur permettent pas de l’aimer plus près.
De l’amour pur et platonique,
Mais je n’en use pas.
Amour socratique. La pédérastie, que Socrate pratiquait si volontiers à l’endroit—je veux dire à l’envers d’Alcibiade.
Amuser un homme. Le faire jouir par tous les moyens connus et inconnus.
Ce sont ceux-là, d’ailleurs, qui nous payent le mieux:
Sais-tu par quels moyens, petite, on les amuse,
Et de quelle façon à leur égard on use?
Amuser (S’). Se branler.
Amusette (Faire l’). Se peloter mutuellement en attendant le moment de baiser, ou après avoir baisé; plus spécialement, se branler avec l’extrémité d’un membre viril, quand on est femme.
Lorsque nous avions couru quelques postes et que j’avais quelque peine à remonter sur ma bête, elle, qui n’était ni fatiguée ni rassasiée, s’emparait avec autorité de ma lavette et faisait l’amusette.
Anandryne. Femme qui n’aime pas les hommes, ou au moins leur préfère les femmes pour se livrer au libertinage et à la fouterie. Sapho était anandryne; elle avait un long clitoris et s’en servait comme un homme de son vit avec les femmes. Horace appelait Sapho mascula, femme mâle, femme hommesse, comme le dit Mirabeau dans son Erotika Biblion. Les Vestales à Rome, les Gymnopédistes à Sparte, instituées par Lycurgue, étaient anandrynes.
Anchois. La verge d’un petit garçon, et même la queue d’un homme lorsqu’elle a des dimensions trop grêles,—par allusion à la gracilité de ce poisson.
Approche ton anchois, ton mignon... là... bien... tu y es... Le sens-tu frétiller?
Andouille. Le membre viril, dont les femmes sont si friandes,—elles qui aiment tant les cochonneries!
N’aime rien que le cochon:
Surtout devant une andouille,
Qu’aux carmes l’on choisira,
Elle s’agenouille, nouille,
Elle s’agenouillera.
Andouille des carmes (L’). Le membre viril.
Andrins. Culistes, hommes qui ne font aucun cas des charmes féminins et ne fêtent que des Ganymèdes.
Les andrins sont les jacobins de la galanterie; les janicoles en sont les monarchiens démocrates, et les francs sectateurs du beau sexe sont les royalistes de Cythère.
Androgyne. Pédéraste, qui réunit en lui les deux sexes puisqu’il sert de maîtresse aux hommes et d’amant aux femmes,—comme ce grand libertin de Jules-César, qui était le mari de toutes les femmes et la femme de tous les maris.
Androgyne (Faire l’). Baiser une femme, ce qui est proprement réunir les deux sexes en un seul.
Anglais. Noble étranger, fils de la perfide Albion ou de la rêveuse Allemagne, qui consent à protéger de ses guinées une femme faible—de vertu—pendant toute la durée de son séjour à Paris.
Amélie ne te recevra pas, Polyte: elle est avec son Anglais.
Anglais (Avoir ses). Avoir ses menstrues, à cause de la couleur rouge de cet écoulement, qui est aussi la couleur de l’uniforme anglais.
Dans le sang des Anglais baigné,
Que de coups a tirés mon père
Dans la montagne où je suis né.
Anglais ont débarqué (Les). Les menstrues ont fait leur apparition.
Il n’y a pas moyen ce soir, mon chéri: les Anglais ont débarqué.
Angora. Petit nom d’amitié que les filles donnent à leur con, à cause de son épaisse fourrure.
Flatte mon angora, cher ange, baise-le de tes lèvres: nous allons jouir.
Anneau d’Hans Carvel (L’). Le con de la femme—dans lequel tout honnête homme doit mettre le doigt quand il n’y peut plus mettre la pine.
Une femme aimable est un anneau qui circule dans la société, et que chacun peut mettre à son doigt.
Anus (L’). Le trou du cul.
Que j’ contemple
Le saint temple
De Vénus,
Et ton anus.
Aphrodisiaques. Remèdes propres à tonifier, à roidir—momentanément—le membre qui a cessé d’être viril, par suite de maladies ou d’excès vénériens. Les stimulants les plus généralement employés sont les truffes, le musc, le phosphore, le safran et les cantharides.
Aphrodisiaques en diable.
Apothicaire. Pédéraste, ou sodomite; homme qui se trompe volontairement de côté quand il est au lit avec une femme et qui l’encule au lieu de la baiser.
Au soir, dans une taverne,
Frottait Lise à la moderne,
C’est-à-dire par le cul.
Elle, qui veut qu’on l’enfile,
Selon sa nécessité,
Disait d’un cœur irrité
Qu’un clystère est inutile
A qui crève de santé.
Apôtre de l’anus. Pédéraste, ou seulement sodomite,—homme qui se plaît à envoyer (ἀποστελλω) son sperme dans le vagin breneux d’un autre homme, de préférence au vagin naturel de la femme.
Il faut que la société
Envoie des missionnaires,
De saints apôtres de l’anus,
Qui, tirant les vits des ornières,
Prêchent l’Évangile des culs.
Appas. Les beautés d’une femme qui excitent le désir de l’homme,—mais principalement ses tétons.
Non, non, je n’y survivrai pas.
Appétit (Avoir.) Se sentir des démangeaisons amoureuses, être en disposition de baiser.
Te sens-tu en appétit ce soir?—Un appétit énorme!—Alors, allons à la Patte de chat.
Appliquer la peau d’un garçon (S’). S’introduire le membre viril dans le vagin.
C’est un grand soulagement d’être aimée, et je trouve, pour moi, que je m’en trouve mieux de la moitié depuis que je me suis appliqué la peau d’un garçon dessus.
Appliquer un homme sur l’estomac (S’). Se laisser enfiler comme une perle par lui, la perle sur le dos, et l’homme sur la perle.
Et fût-il coiffeur ou laquais, d’aussi huppées que vous se l’appliqueront sur l’estomac sans lui demander ses preuves.
Apprivoiser une fille. La dépuceler,—ce qui la rend naturellement moins sauvage.
Mon cher, je connais l’art d’apprivoiser les filles.
Après la panse, vient la danse. Vieux proverbe: Après la mangeaille, la fouterie.
Araignée. Faire patte d’araignée. Action de prendre les couilles et le vit de l’homme de manière à chatouiller le tout à la fois en allant de la tête du vit au périnée et au trou du cul, de haut en bas, à droite et à gauche et retour, en y joignant des coups de langue au filet du vit décalotté, le tout jusqu’à jouissance complète.—Voir Patte d’araignée.
Arbalète. Le membre viril, probablement par jeu de mots, parce qu’on bande,—à moins qu’on ne dise bander que parce qu’on appelle la pine une arbalète destinée à blesser la femme au ventre.
Bandez votre arbalète, mon doux ami, et visez-moi dans le noir.
Ardillon. Le membre viril, soit parce qu’il pique, soit parce qu’il brûle.
Au lieu de sentir lever son ardillon, il se sentait plus froid qu’à l’ordinaire.
Je sens ton ardillon... Ah! je le sens... Chien! chien! tu me brûles...
Argument. Pousser un argument naturel et irrésistible; c’est-à-dire une déclaration d’amour, sous la forme d’un bon vit—dans un bon con, qui ne trouve rien à redire à cela.
Moi j’attends patiemment
Qu’elle soit bien en goguette
Pour pousser mon argument.
Aristoffe (L’). Maladie honteuse, dans l’argot des filles et de leurs souteneurs.—Le mot viendrait-il de l’italien arista, épine? ou du grec ἄρίστος, la meilleure—des maladies—ou la maladie des aristos?
J’en ai eu quatorze depuis celle-là, et de toutes couleurs, car quoi qu’en disent les malins, les aristoffes se suivent et ne se ressemblent pas.
Arme de l’homme (L’). Son outil à génération, avec lequel il blesse souvent les femmes,—heureuses d’être ainsi blessées.
Plus dispos qu’auparavant,
Je me saisis de mon arme.
Elle me rappelait le tambour de ma compagnie à astiquer et fourbir ainsi mon arme.
Arracher son copeau. C’est le to leacher des Anglais, qu’il ne faudrait pas croire spécial aux menuisiers,—parce qu’il n’y a pas que les menuisiers qui sachent se servir du rabot que la nature a placé au ventre de tous les hommes.
Arracher son pavé. Faire l’acte vénérien,—à cause de l’effort que cela exige sans doute.
Oui, c’est ainsi toutes les fois que j’arrache mon pavé avec une demoiselle.
Arrangée (Être). Être baisée.
Vous n’en viendrez jamais à bout!
La comtesse était arrangée,
Et criait encor d’un ton doux:
Arrangez-vous.
Arranger une femme, ou un homme. La bien baiser, ou le bien branler.
Tu dois bien arranger une femme, hein?
Arrange-le tout d’ même.
Arrière-boutique. Le cul, qui est situé sur le derrière, et dans lequel le membre aime à se réfugier quand il est resté quelque temps dans la boutique, qui est sur le devant.
A l’instant cette demoiselle, ouvrant son arrière-boutique, laissa aller un vent.
Arriver à ses fins. Finir par baiser une femme pour laquelle on bandait,—ce qui est la fin de tout roman d’amour.
Là! tu en es arrivé à tes fins, petit cochon!
Arroser. Éjaculer dans la nature de la femme—un charmant petit jardin dont nous sommes les heureux jardiniers. Pluie ou sperme, quand cela tombe à propos, cela féconde.
Pourquoi ne voudraient-elles pas être arrosées?
Arroser le bouton. Décharger son sperme dans le vagin d’une femme, sur le bouton de son clitoris.
Craignant qu’on lui ravisse
Sa Rose, sa Clarisse,
Lui arros’ le bouton.
Arthur. Nom poli qu’on donne à l’amant de cœur d’une femme galante. C’est le chevalier à la mode de Dancourt.
Toute lorette, inévitablement, a son Arthur, comme toute fille publique son maquereau, comme toute pomme pourrie son ver.
Article (Faire l’). Se dit des maquerelles plantées le soir sur le seuil des bordels, qui essaient d’y faire entrer les passants en leur dépeignant rapidement, avec des couleurs un peu fortes mais saisissantes, les beautés diverses et les talents particuliers de leurs pensionnaires.
Tu resteras sur le seuil du bazar et tu feras l’article pour nos demoiselles.
Article (Être fort sur l’). Être toujours prêt à foutre,—porté sur sa pine comme un gourmand l’est sur sa bouche.
Dis-moi, Marton, dis-moi, t’en souviens-tu?
La marquise est froide sur l’article.
Artillerie de Cupidon ou de Vénus. Les parfums, les aphrodisiaques en général—et surtout en particulier.
Asperge. Le membre viril—dont les femmes sont si friandes, et qu’elles sucent volontiers, avec la sauce blanche qui les accommode ordinairement.
Aspergès. Le membre viril avec lequel, en effet, nous aspergeons de foutre le con des femmes.—On dit mieux: Goupillon.
L’aspergès d’un moine sans doute
Est si bon, qu’il n’en jette goutte
Qu’elle ne soit bénie deux fois.
Assaillir une femme. La baiser; monter, la queue en main, à l’assaut de son vagin.
Doit m’assaillir.
Après que ce premier assaut fut donné, la belle recouvra la parole.
Se contenta. Chétive était la dose
Au gré d’Alix.
Asseoir sur le bouchon (S’). S’asseoir sur une pine, de façon à être baisée, soit en grenouille par devant, soit en levrette par derrière.
Viens t’asseoir sur le bouchon, garce, et si tu ne jouis pas, c’est que tu ne le voudras pas.
Asticot. Le membre viril, qui grouille dans la nature de la femme comme un ver blanc dans la viande.
Tu écorches mon asticot, salope!
Astiquer. Faire l’amour,—dans l’argot des filles et des maquereaux, l’astic pour eux étant une épée, et l’épée piquant.
Astiquer (S’). Se masturber, soit seul, soit à deux.
S’astiquaient le long d’un sentier;
L’un branlait une pine blanche
Et l’autre un vit de cordelier.
Astiquer la baguette. Branler un homme,—le ventre de la femme servant de tambour à cette baguette-là, que nous savons tous manier aussi bien que les tapins de profession.
Celle-ci, d’un tambour astiquait la baguette.
Atelier. La nature de la femme,—où se fabrique l’Humanité.
Quand on entre à l’atelier, il faut avoir son outil en bon état afin de besogner convenablement, et toi, tu ne bandes seulement pas!
Dit un valet, voyant le drôle à l’atelier.
Attraper quelque chose. Gagner la chaude-pisse ou la vérole dans un coït malsain, avec une coureuse ou avec une honnête femme.
Que ces drôlesses-là sont souvent de bons greniers à chaudes-pisses! ce qu’on appelle de véritables attrape-michés.
Si j’attrape quéque chose, au moins j’ l’aurai pas volé.
Aumône amoureuse. L’acte vénérien,—la femme étant censée donner et l’homme recevoir, quoique, en réalité, l’un donne autant que l’autre.
Belle dame, faites-moi l’aumône amoureuse, je vous en supplie, je bande trop!—J’en suis fâchée, mon cher, mais j’ai mes pauvres.
Autel. La nature de la femme, où nous venons, prêtres fervents, officier chaque jour, culotte bas et pine en main.
Je pose mes lèvres tremblantes:
De ma langue, en flammes ardentes,
S’élancent...
Soudain s’approche une inconnue
Du morpion silencieux.
Si tous les autels de Venus étaient aussi dégoûtants.
Autel de plume (L’). Le lit, sur lequel l’homme et la femme officient avec une ferveur dont le Dieu—de Lampsaque—doit être content.
Ceux que l’on fait sur un autel de plume
Sont aussitôt emportés par le vent.
Auvergnate. Qui appartient au troisième sexe—puisqu’elle n’est pas homme et ne veut pas être femme.
Consommateurs des deux sexes, hommes et femmes, pas d’Auvergnats, tout au plus quelques Auvergnates très élégantes, fleurs du mal qui se respirent entre elles.
Avaler la pilule. Avaler le sperme qui s’échappe du membre de l’homme que l’on suce.
Avaler le poisson sans sauce. Être baisée par un homme qui ne décharge point, ou que l’on empêche de décharger.
Avaler les enfants des autres. Gamahucher (V. ce mot) une femme qui vient d’être baisée par un autre homme et qui n’a pas eu le temps de se laver.
Au lavabo, tout de suite! je ne tiens pas à avaler les enfants des autres.
Avances. Privautés que laisse prendre à un homme, et que parfois même prend, avec lui, la femme à qui le cul démange.
J’ai un caprice, il ne sait le deviner; je le lui explique aux trois quarts; il ne comprend rien, et mon butor me quitte après mes avances humiliantes.
Désirant lui faire quelqu’avance,
S’approch’ d’elle une bourse en main.
Avantages. Gorge plantureuse, poitrine à la mode de Caen.
C’est trop petit ici: la société y sera comme les avantages de madame dans son corset.
Avant-scène. La gorge des femmes, parce qu’elle avance plus que le reste du corps en dehors de la perpendiculaire, et que c’est la première chose que l’on remarque.
Ce ne sont pas les avant-scène qui lui manquent, mâtin!
Avec (L’). La nature de la femme, avec laquelle (cum, con) l’homme jouit quand il a répudié la veuve Poignet.
Allons, cher ange, montre-moi ton avec, je te montrerai le mien et nous les marierons ensemble.
Aventures (Avoir eu des). Avoir eu des amants si l’on est femme, ou des maîtresses si l’on est homme.
Cette femme avait eu déjà bien des aventures.
Agitant draps et couverture,
Le psautier descendant plus bas,
Se trouve au fort de l’aventure.
Aventurière. Gil-Blas femelle, fille ou femme qui a eu une foultritude d’aventures amoureuses—ou plutôt galantes.
Avitaillé. Mot grossier hors d’usage signifiant un homme pourvu de membre viril.
Duvigny était bien avitaillé et grand abasteur de bois.
Avoir. Avoir eu, foutre ou avoir foutu avec une femme ou une fille que l’on désirait.
Eh bien! ma mie, tu vois comme je t’aime, je laisse ma prébende pour t’avoir.
Fais donc que j’aie cette fille, et je te rendrai riche.
Avoir à sa bonne. Avoir de l’amour pour...
N’ fais pas l’ paillasson:
Je sais qu’ t’as Clarisse à la bonne;
Mais dis-lui d’ ma part
Qu’ell’ craign’ le pétard...
Avoir commerce. Faire l’acte vénérien.
D’avoir dit à certaine dame
Qu’Anne, avant que d’être ta femme,
Avait eu commerce d’amour.
A-t-elle eu commerce avec le chevalier de Lorraine? qu’on la brûle.
Avoir compagnie d’homme. Faire l’amour avec un homme.
Compagnie d’homme.
Avoir de l’agrément. Jouir avec une femme, soit en la baisant, soit en se faisant branler par elle.
Tu vas avoir de l’agrément, mon chéri, je t’en réponds!
Avoir des bontés. Employé dans un sens obscène pour accorder ses faveurs à un homme.
Tu as eu des bontés pour lui, ça prouve ton bon cœur.
Une femme sensible se décide difficilement à laisser pendre un homme pour qui elle a eu des bontés.
Ayez des bontés pour moi, et mademoiselle Hortense est mariée.
Avoir des sens. Être ardent en amour; jouir sous l’homme quand on est femme, jouir avec la femme lorsqu’on est homme.
Récompensants
Les insolents
Qui montrent des talents.
Avoir du chien. Se dit d’une femme qui a des grâces provoquantes, qui ne baise pas comme la première venue.
Il faut être sincère, même avec des drôlesses de cette espèce: Julia a du chien, beaucoup de chien.
Avoir du mal. Baiser beaucoup,—dans l’argot des filles de bordel.
Ce qu’ nous avons d’ bon ici, c’est d’êt’ ben nourries. Si on a du mal, on n’ meurt pas d’ faim, comme dans des maisons où j’ai été.
Avoir encore (L’). Sous entendu: Son pucelage.
Ça me rappellera... le temps où je l’avais encore.
Avoir eu quelque chose avec une femme. Avoir couché avec elle, une ou plusieurs fois; avoir été son amant.
Tu me feras peut-être accroire que tu n’as rien eu avec Henriette?
Avoir la courte haleine. Être petit baiseur, se contenter de tirer un coup ou deux et dormir après.
Parler d’amour une fois,
C’est me donner la migraine.
Avoir la main occupée. Se branler d’une main en lisant de l’autre un roman libertin; ou pincer le cul à sa voisine en trinquant avec son voisin.
Rêvant à ses appas,
Et d’une voix entrecoupée,
Je me dis, la main occupée,
Ah! comme on tirait
Chez ell’ du vin clairet!
Avoir la queue verte. Être frais et dispos pour le combat amoureux, être vaillant au lit.
Avoir la vache et le veau. Épouser une fille enceinte des œuvres d’un autre.
Avoir l’eau à la bouche. Avoir appétit de femme lorsqu’on est un homme, ou d’homme lorsqu’on est femme, soit en voyant baiser les autres, soit en lisant des livres de fouterie.
Avoir les talons courts. Se laisser volontiers renverser sur le dos par un homme; bander facilement pour les porte-queue.
Elle a les talons si courts, qu’il ne faut la pousser guère fort pour la faire cheoir.
Avoir le ventre plein. Être enceinte.
Je crois, ma chère, que j’ai le ventre plein: cet imbécile d’Hippolyte n’aura pas mouché la chandelle.
Avoir mal aux cuisses. Façon chaste de dire qu’on a beaucoup besogné avec sa voisine, ou avec toute autre femme, car c’est surtout à cet endroit du corps que se fait sentir la fatigue vénérienne.—On dit aussi, dans le même sens: avoir les cuisses coupées, ou encore, avoir les jambes brisées.
Avoir perdu sa fleur. Se dit d’une jeune fille qui a eu un fruit.
Avoir quelque chose avec une femme ou avec un homme. Être son amant ou sa maîtresse; ou s’être donné rendez-vous pour coucher ensemble.
Avoir quelqu’un. Avoir un entreteneur, un miché, quand on est fille; avoir une maîtresse, être le maquereau d’une fille, quand on est homme—sans préjugés.
J’ai pas d’amant... veux-tu me l’êt’?...—Non.—T’as quéqu’un!...—Oui?...—N’en parlons plus.
Voilà ce qu’une femme qui se sent poursuivie devrait se dire à elle-même, à tous les moments du jour: Un tel me suit, il me cherche, je le trouve partout; donc il veut m’avoir et me mettre sur sa liste.
L’an passé voulut m’avoir.